LES RAPPORTS SCIENCE ET RELIGION À LA LUMIÈRE DE L’EVOLUTION DES SCIENCES

CONTEMPORAINES

LAUSANNE

Centre CEDRES

29 Septembre 2012

Jean Staune

La modernité s’est trouvée associée à un désenchantement du monde

La triple humiliation de l’homme Copernic : l’homme n’est plus au centre du monde Darwin : l’homme n’est plus au centre de la nature Freud : L’homme n’est plus au centre de lui-même. Deux concepts clés : Le Déterminisme et le Réductionnisme

Rapport entre Science & Religion En partie inspiré de Ian Barbour dans

Religion in an age of Science I/ Conflit

Matérialisme scientifique ; Richard Dawkins II/ Intégration

La science prouve la véracité de la religion: Intelligent Design, Miracles Scientifiques du Coran III/ Séparation

NOMA Non Overlapping MAgisteria IV/ Dialogue

“ Questions frontières”, Rapprochement des attitudes, Théologie Naturelle

Implications philosophiques de la physique quantique

Il y a une limite absolue à la connaissance que nous pouvons avoir du monde qui nous entoure (Principe d’incertitude de Heisenberg), défaite du déterminisme.

Les fondements des objets ne sont pas des

objets. Leurs propriétés n’existent pas en elles mêmes mais dépendent de la façon dont on les mesure ( Comme l’Arc en Ciel!)

L’existence de la non-séparabilité montre que des phénomènes échappent au temps et à l'espace comme a l’énergie et à la matière. Défaite du réductionnisme.

« La science du XVIII ème siècle avait abouti au triomphe du matérialisme mécanique qui expliquait tout par l’agencement de morceaux de matières minuscules et invisibles, agencement réglé par diverses forces d’interaction qu’ils exerçaient entre eux. Cette vision assez primitive à laquelle se tiennent encore la plupart des biologistes avait pour conséquences l’inutilité des religions et de celles des philosophies qui font appel à l’existence d’entités non-matérielles. Le fait que ces morceaux de matière se soient révélés n’être en réalité que des abstractions mathématiques non-locales, c’est-à-dire pouvant s’étendre sur tout l’espace et de plus n’obéissant pas au déterminisme, a porté un coup fatal au matérialisme classique ». et « la variante couramment dite « rationnelle » du matérialisme, c’est-à-dire la variante locale et déterministe a été radicalement éliminée ». Ortoli et Pharabod Le Cantique des quantiques

« Un des enseignements des sciences modernes dites (par tradition) « de la matière » est celui-ci : la « chose », s’il en est une, qui se conserve n’est pas le concret mais l’abstrait, non pas ce qui est proche des sens mais au contraire le nombre pur dans toute son abstraction mathématique tel que nous l’a révélée la physique théorique. En d’autres termes, par apport à nos sens et à nos concepts familiers (qui en résument les possibilités), le réel, indéniablement, est lointain. Et cette découverte (fort importante), une des manières les plus pertinentes de l’évoquer est, selon moi, de reconnaître que le mot matière est mauvais et de réintroduire le beau mot d’Être. » Bernard d’Espagnat, Un atome de sagesse, Le Seuil, 1982, p. 55.

Implications philosophiques de l’Astrophysique

Le monde physique où nous vivons ne

s’explique pas par lui-même. Il y a un au-delà du temps et de l'espace.

La question du Créateur est redevenue une

question strictement scientifique même si la réponse semble devoir rester d'ordre personnel. (Trinh Xuan Thuan)

Implications philosophiques de la neurologie

Il n’y a pas d’adéquation absolue entre l’expérience mentale du sujet et son état neuronal. (J-F Lambert, J. Eccles) Le libre arbitre est possible sur le modèle du veto (Modèle de l’arbitre dans un match de football : B. Libet)

La conscience semble pouvoir « jouer » avec le temps (B.Libet)

Reproductibilité de l’évolution

Christian de DUVE : Prix Nobel de Médecine, Biochimiste, Professeur à l’Université de Louvain (BE) et à l’Université Rockfeller New York (USA)

« Dieu joue aux dés parce qu’il est sûr de gagner »

« La vie est un impératif cosmique » Les lois de la biochimie produisent des

contraintes si strictes que le hasard est canalisé et que l’apparition de la vie et même de la pensée consciente devient une obligation dans l’Univers et cela en de nombreuses occasions.

«Poussière de Vie»

Editions Fayard, 1996

Canalisation de l’évolution

Reproductibilité de l’évolution

Simon CONWAY MORRIS : Paléontologiste, Professeur à l’Université de Cambridge

« Pour les Darwiniens Classiques, il est très improbable que les occupants d’une planète puissent ressembler à ceux d’une autre planète.

Le phénomène de la convergence évolutionniste indique que, au contraire, le nombre des alternatives est strictement limité (…) Un tel programme de recherche pourrait révéler un niveau plus profond de la biologie dans lequel l’évolution darwinienne resterait un concept central, mais où les formes fonctionnelles possibles sont prédéterminées depuis le Big Bang.

Simon Conway-Morris, Life’s solution, Cambridge

University Press, 2003, p. 309-310.

Evolution par Lois Naturelles et non seulement par Sélection Naturelle

En 2001, un article publié dans Nature commence tout simplement par les mots suivants : “Goethe avait raison en proposant que les fleurs étaient des feuilles modifiées. ”

Gunther Theiben et Heinz Saedler, « Plant biology: floral quartets », Nature, 409, 26 janvier 2001, p. 469-471.

L’évolution fait une fleur au structuralisme

L’intuition de Goethe « Bien que paraissant être dissemblables, les différents organes

d’une plante en train de fleurir proviennent tous d’un organe unique, nommément la

feuille ».

Selon Geoffroy Saint Hilaire les arthropodes et les vertébrés possèdent un même plan d’ensemble

Implications philosophiques de la Biologie de l’Evolution

Possibilité que l’évolution soit en

partie canalisée et donc reproductible (De Duve, Conway Morris). Cette conception est soutenue par l’existence de convergences amenant à des résultats identiques par des voies différentes.

Les formes des structures

complexes seraient produites par les lois de la Nature et non par la sélection naturelle (Denton)

Le monde des mathématiques

« Selon Platon, les concepts et les vérités mathématiques résident dans un monde réel dépourvu de toute notion de localisation

spatio-temporelle. Notre esprit y a toutefois directement accès, grâce à une « connaissance immédiate » des formes mathématiques et d’une capacité de raisonner sur ces formes. C’est ce potentiel de « connaissance immédiate » des concepts mathématiques, cet accès direct au monde platonicien, qui confère à l’esprit un pouvoir supérieur à celui de tout dispositif dont l’action repose uniquement sur le calcul. »

Roger Penrose Les ombres de l’esprit, Interéditions 1995, Page 46

« Tout ensemble fini d’axiomes contient au moins

une proposition indécidable »

Corollaire : tout système logique humain cohérent est incomplet.

Le théorème de Gödel

Implications philosophiques des mathématiques

Aucun système logique n’est à la fois complet et cohérent (Gödel)

Il y a des vérités que nous pouvons

percevoir alors qu’elles ne sont pas démontrables dans un système donné

(Gödel) Possibilité de l'existence d'un monde des

concepts mathématiques avec lequel l'homme est en contact (Connes, Penrose)

Newton Temps et Espace absolus

Laplace Déterminisme

Hilbert Complétude de la logique

Darwin Sélection naturelle

Berthelot Analyse de l’équilibre

Changeux Homme neuronal

Einstein Relativité de l’espace et du temps Big Bang

Heisenberg Principe d’incertitude

Godel Théorème d’incomplétude

De Duve, Conway Morris Répétitivité de l’évolution

Prigogine Analyse des déséquilibres

Libet L’existence du libre-arbitre

Ce qui est en cours c’est une révolution conceptuelle

Appliquer l’incomplétude à la Philosophie : Trois positions possibles sur la Vérité

La vérité existe et je peux la posséder en totalité (du moins en théorie). Position qui peut mener au scientisme comme au fondamentalisme religieux. Il n’y a pas de vérité absolue. Il y a une vérité absolue mais je ne pourrai jamais la posséder en totalité.

Qu ’est ce que Science & Religion ?

I- L ’approche apophatique ( négative) :

L ’incomplétude radicale, ontologique de toutes descriptions uniquement matérialiste de la réalité.

Physique quantique, thèorème de Gödel, Théorie du Chaos, Non identité États Neuronaux-États Mentaux.

II- L ’approche cataphatique (positive) :

Principe Anthropique, Structuralisme en biologie.

III- Les Attitudes communes :

Le chercheur scientifique et le chercheur de Dieu partage une quête de la vérité, une foi dans la compréhensibilité du monde, une humilité devant le Réel.

IV- L ’approche épistémologique :

Proximité méthodologique entre les démarches de la Science et celle de la Religion

Conclusion I

L’évolution actuelle des sciences constitue un changement de paradigme sans précédent depuis le passage Moyen Age Modernité.

Toutes les religions disent depuis des siècles qu’il y a un autre niveau de réalité au delà de l’espace du temps et de la matière et que l’esprit de l’homme est relié à cet autre niveau.

La modernité avait rendu absurde une telle conception : pour elle il n’existe rien d’autre que le monde matériel.

Le nouveau paradigme scientifique redonne de façon inattendue une crédibilité à cette conception.

Conclusion II

Nous avons vu que cette évolution répond positivement aux questions suivantes :

- existe-t-il un autre niveau de réalité au delà de l’espace et du temps ?

- l’esprit de l’homme peut il être en contact avec un autre niveau de réalité ?

- le libre arbitre existe t il ?

- un principe créateur est il crédible au plan rationnel ? Ainsi une nouvelle synthèse entre Science et Spiritualité est possible : elle conduit à un « Réenchantement du Monde » Un espoir pour le XXI ème siècle : combler le fossé entre les « deux cultures » et rebâtir une vision du monde bénéficiant du souffle que donne la transcendance et de la solidité que donne la raison.

Conclusion III

La religion sans la science est aveugle, la science sans la religion est boiteuse.

Albert Einstein

Conference on Science, Philosophy and Religion in Their Relation to the Democratic Way of Life, New York, 1941

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