les mémoires de diaghilev
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Critique de la publication des mémoires inédits de DiaghilevTRANSCRIPT
C’est à l’intérieur de la MaisonIgoumnov au style néo-russe, quePauline de Laboulaye a reçu leCourrier de Russie. Installée dans lecreux d’un canapé de son petitsalon, buvant thé sur thé, monhôtesse semblait aussi curieuse deconnaître le quotidien desFrançaises à Moscou, que nous lesien. Quotidien pas vraiment simple,pour les plus enthousiastes d’entrenous, franchement pénible, pour lesplus découragées. Qu’en est-il pourPauline de Laboulaye, femme del’Ambassadeur de France enRussie ?
En suivant le soleil
Je me lève en même temps que mon
mari. L’été, je profite du fait que notre
chambre est exposée à l’Est, au soleil
du matin, pour lire les journaux dans
mon lit : Le Monde, Moscow Times,
Herald Tribune... c’est un moment
agréable où je termine mes lectures
inachevées.
Ma journée de travail commence dans
mon bureau, qui est à côté du petit salon
où nous nous trouvons. Ces pièces sont
exposées au sud et nous y passons beau-
coup de temps même si ce sont les
pièces les plus petites de la maison.
Je commence par allumer mes ordi-
nateurs, le mien et celui de l’ambassade.
La secrétaire me rejoint avec son agenda
et le courrier. Nous passons en revue les
lettres, les invitations, les visites, les
listes d’invités...
Excepté l’intendant et le chef qui sont
français, le personnel de la résidence est
russe. Ils sont là depuis longtemps et
connaissent parfaitement leur métier. Ils
ont été mon premier contact avec la
population russe, un contact positif et
chaleureux. Je les côtoie tous les jours et
même si nous communiquons plus par
gestes que par mots, nous nous amusons
bien ensemble.
Voyages et rencontres
En réalité, la maison tourne très bien
sans moi, ce qui me permet de partir
facilement. Je me partage entre Moscou
et Paris, sans compter nos voyages en
province. Tous ces déplacements rendent
ma vie moscovite un peu épisodique.
À Paris, je retrouve mes enfants qui
ont entre 30 et 20 ans, ainsi que mes
deux petits-enfants et je suis aussi très
prise par l’association que je préside, Les
Amis de La Maison Rouge, FondationAntoine de Galbert*.
À Moscou, ma priorité est bien sûr
d’être auprès de mon mari. Je lui
apporte un peu d’oxygène dans un
emploi du temps saturé.
Le temps de se resservir une tasse de
thé, elle sourit en pensant à son rôle de
femme d’ambassadeur qu’elle juge « à lafois essentiel et insignifiant ».
C’est une position un peu étrange,
commente t-elle amusée. Le protocole
ne prévoit d’ailleurs ni statut ni titre pour
nous nommer. Autrefois on pouvait nous
appeler Madame l’ambassadrice, mais
avec la parité, une femme ambassadeur
peut choisir de se faire appeler Madame
l’ambassadrice, du coup il n’y a plus de
nom pour la femme de l’Ambassadeur !
Ce qui me plait le plus dans ma posi-
tion, c’est de pouvoir rencontrer des
gens intéressants dans tous les domaines.
En Russie, le fait d’être un « officiel »
vous ouvre de nombreuses portes. Je
reçois beaucoup de personnes qui me
sollicitent pour patronner un événe-
ment, participer à un jury ou simple-
ment me faire part de leur projet. Ma
position me permet de les aider, notam-
ment en les orientant vers les services de
l’ambassade qui peuvent les conseiller,
ou vers d’autres personnes ou organisa-
tions.
J’aime également suivre mon mari
lors de ses déplacements en régions.
Parfois je dois me battre pour sortir des
parcours habituels où les administra-
tions régionales me cantonnent
habituellement. J’essaie de rencontrer
les artistes locaux, de voir les petits
musées, de visiter les écoles de français
et les organismes avec qui nous avons
une coopération. C’est l’occasion de
découvrir un autre pays, à la fois plus
ouvert et plus fermé.
Moscou : en robes de mariée et
guenilles de mendiante
Pour le déjeuner, je dois avouer qu’il
n’y a pas de meilleure cantine que la
résidence. Laissé à son inspiration, le
chef se surpasse dans ces moments-là
et je crois que certains jours nous
devons être la meilleure table de
Moscou. Finalement je passe beau-
coup de temps dans cette maison qui
est une sorte de bulle où beaucoup de
choses se passent. Et je m’en félicite en
contemplant les bouchons permanents
de la Iakimanka.
Je sors souvent en fin d’après-midi
pour aller dans les vernissages où je
rencontre artistes et acteurs du monde
de l’art que je commence à bien
connaitre. Certains deviennent même
des amis. Lorsque nous ne recevons
pas à la résidence, nous allons au
concert, une découverte pour moi qui
– comme de nombreux Parisiens –
avais renoncé aux joies des spectacles
du soir. J’adore la ferveur très parti-
culière qui règne dans les salles de
concert en Russie.
Mes premières impressions de
Moscou ? J’y suis arrivée en novembre
2006, sous un ciel de plomb. J’ai eu la
sensation d’une ville oppressante, pol-
luée et triste. Les grandes artères, les
barres d’immeubles en mauvais état, et
la situation de l’Ambassade de France,
sur la Bolchaïa Iakimanka, qui me
donne parfois l’impression de vivre au
bord du périphérique parisien.
J’attendais désespérément la neige et
quand elle est tombée tout est devenu
beau. Le printemps nous a replongés
dans la grisaille et la boue puis la végéta-
tion a de nouveau tout métamorphosé.
Moscou est comme une femme qui
change de toilette. Il n’y a que le métro
qui ne change pas au fil des saisons mais
il a sa poésie bien particulière et j’aime
beaucoup m’y plonger lorsque je veux
aller plus vite à Winzavod ou au Manège.
En fait je découvre une ville pleine de
poésie, mais une poésie pour initiés.
Reviendrai-je à Moscou ? Je reviens
peu en général, pour éviter la nostalgie
et parce que la vie diplomatique vous
oblige à tourner la page pour vous
intéresser à un autre pays. Mais je serais
ravie d’y revenir si l’occasion se présen-
tait, d’y travailler sur un projet d’art
contemporain par exemple, ou pour une
foire ou une biennale.
Propos recueillis par Maureen Demidoff
C O M M U N A U T E8 Le Courrier de RussieLe Courrier de Russie Du 23 mai au 6 juin 2008
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La vraie cuisine française
Une journée à Moscou avec Paulinede LaboulayeL’épouse de l’ambassadeur de France en Russie se confie auCourrier de Russie
Programme de TV5
Retrouvez la liste des programmes sous-titrés en russe sur www.tv5.org
Le Centre Franco-Russe de Journalismerecrute des étudiants pour la rentrée
d’octobre 2008 pour une formation en
journalisme d’une année, initiée
conjointement par le Centre de
Formation et de Perfectionnement des
Journalistes (CFPJ) de Paris et l’univer-
sité d’Etat Lomonossov de Moscou.
Cette formation est ouverte aux étudiants
justifiant d’une 4ème année de journa-
lisme, d’un diplôme universitaire russe
(en privilégiant le journalisme) ou d’un
début d’expérience professionnelle. La
maîtrise d’une langue étrangère
(française ou anglaise) est absolument
nécessaire.De septembre à décembre
2008, la formation se déroulera à
Moscou. A l’issue du 1 trimestre, les
meilleurs étudiants seront sélectionnés
pour prolonger leur formation à Paris.
L’enseignement est gratuit, une bourse
sera attribuée pour les candidats qui
seront sélectionnés pour la formation du
printemps 2009 en France. Les dossiers
de candidaure (CV + lettre de motiva-
tion en français ou en anglais) à envoyer
avant le 9 juin prochain aux adresses
[email protected] et interna-
[email protected]. Le candidat est prié
d’indiquer le nom de la ville où il
souhaite passer les examens écrits dans
l’objet du courrier électronique. Le
concours écrit aura lieu le 12 juin
prochain à 10h à la faculté de journal-
isme, Mokhovaïa, 9, Moscou. Les
entretiens de motivation se dérouleront
durant la semaine du 23 au 27 juin.
Pour en savoir plus : contacter Lidia
Sou-khoroukova au numéro (495) 62944 40 Surprises théatrâles, le nouveau spec-
tacle du groupe de théâtre de l’associa-
tion Moskva Accueil, sera joué les 6 et
11 juin prochains à 19h30, à
l’Ambassade de France. Entrée : 150
roubles. Places à réserver auprès de
C.Delpal : cé[email protected] à vous munir de vos passeports
pour pénétrer sur le territoire de
l’Ambassade.
La publication des mémoiresinédits de Serge Diaghilev permetde découvrir les aspects les moinsconnus du fondateur des BalletsRusses. Un avant-goût de lacélébration du centenaire desBallets Russes et du quatre-vingtième anniversaire de la mortde Diaghilev qui auront lieu en2009.
Fondateur légendaire des
Ballets Russes, mécène
despotique à l’intuition infail-
lible et aux goûts novateurs, Serge
Diaghilev a révélé l’art russe à l’é-
tranger, et a propulsé le monde vers
une nouvelle ère, celle du XXe siècle.
Au tout début du siècle dernier, la
musique russe était méconnue en
Occident et considérée comme « d’un
ennui mortel » en Russie même, la
danse était un art pratiquement oublié
ou cadenassé par les règles du XIXe,
et les Français prenaient les Russes
pour des « sauvages ». C’est dans ce
contexte que Diaghilev, en 1909, créa
les Ballets Russes à Paris.
Ce fut un bouleversement majeur
de l’art occidental. Le premier des
ma-nagers modernes, Diaghilev, fut
un parfait amateur au meilleur sens du
terme : guidé par son seul goût, il avait
l’art de repérer, avec un sens inné, les
génies de demain. Magnétisés par son
charisme, compositeurs, choré-
graphes, auteurs, peintres, danseurs –
parmi eux, Stravinsky, Ravel,
Debussy, Prokofiev, Nijinsky, Anna
Pavlova, Richard Strauss, Picasso,
Matisse, Cocteau, Miró, Derain,
Braque et même Coco Chanel – tra-
vaillèrent ensemble pour la première
fois dans l’histoire de l’art, créant un
genre nouveau, celui du spectacle
total. Rappelons-nous Parade, ce bal-
let commandé par Diaghilev à Erik
Satie et Picasso, chorégraphié par
Léonide Massine sur un livret de
Cocteau.
Sans attaches et sans le sou,
Diaghilev transportait sa vie dans deux
valises, d’hôtel en hôtel, toujours prêt à
lever le camp. Tel un feu d’artifice, il
émerveilla de son vivant mais ne laissa
rien après sa disparition… Du moins le
pensait-on, jusqu’à ce que l’on décou-
vre l’existence de ces mémoires. Un
bien grand mot, d’ailleurs, pour qua-
rante feuillets remplis d’une écriture
serrée. Mais ces notes se révèlent d’au-
tant plus précieuses que l’on ne
connaît Diaghilev qu’à travers les mots
des autres, dans les mémoires de
Stravinsky, de Serge Lifar, de Tamara
Karsavina, de Nijinsky, de Boris
Kochno et de tant d’autres : tous le
faisant revivre à leur façon… Mais au
fond, quel être de chair se cache der-
rière le mythe de Diaghilev ?
C’est à ces interrogations que
répond l’ouvrage préparé par
Guillaume de Sardes. Dans ces
mémoires, retrouvés dans les tiroirs de
la Bibliothèque de l’Opéra Garnier,
écrits peu avant sa mort, Diaghilev,
plutôt que sur les heures de gloire des
Ballets Russes, revient sur sa vie en
Russie, lorsqu’il ignorait encore l’in-
fluence qui serait la sienne sur le
devenir de l’art du XXe siècle.
Il y narre les débuts difficiles de
l’opéra russe en Occident : « A toutesmes demandes, on me répondait invari-ablement : « Mais, Monsieur, ça ne s’estjamais fait, c’est impossible ! » Quandnous commençâmes enfin à répéter avecl’orchestre (…) les machinistes del’Opéra se mirent à faire sur le plateauun tel vacarme que lorsque Chaliapineou d’autres artistes devaient chanter enscène, je devais tenir dans la main unepièce d’or de vingt francs, tout prête àleur être donnée afin qu’ils cessassenttout tapage. A cette condition seulement,les ouvriers s’arrêtaient et partaient pourquelque temps au bistro »1.
Des rencontres avec Tchaïkovsky
aux rapports avec la famille impériale,
des affrontements avec la bureaucratie
de l’Opéra de Paris aux déboires avec
les critiques, Diaghilev bavarde,
raconte des anecdotes, s’énerve, s’en-
flamme, parle de la mort des hommes
célèbres, – pense-t-il alors à la sienne,
toute proche – de l’indécision
légendaire de l’empereur, des lettres de
Pouchkine… Reflet de l’esprit papil-
lonnant de ce prodigieux touche-à-
tout, dernier éclat d’un personnage
insaisissable qui ne laissa en tout et
pour tout qu’une paire de boutons de
manchettes.
Daria MoudrolioubovaSergue Diaghilev. Mémoires. Editions
Hermann
1 à propos de la mise en scène de Boris Godounov à
l’Opéra de Paris, en 1908.
Chronique littéraire
Quand la France a revu ses préjugés Serge Diaghilev – Mémoires
C a r n e t d e q u i n z a i n e
« En Russie, le fait d’être un « officiel » vous ouvre de
nombreuses portes »
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