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Les manifestations régionales Bulletin annuel de l'AFGC 46 N° 20 - Janvier 2018 17 mai 2017 La rénovation du viaduc Eiffel de Cubzac-les-ponts La délégation Sud-Ouest de l’AFGC a organisé le mercredi 17 mai 2017 à la Mairie de St Vincent de Paul une manifestation consacrée au Viaduc Eiffel et plus particulièrement à sa rénovation. Ce pont, qui supporte la route départementale 1010, seule alternative à l'autoroute pour le franchissement de la Dordogne, est en service depuis 1839. Or, en l’espace de presque 200 ans des tassements différentiels de l’ordre du mètre et diverses pathologies ont a pu être observées. C’est pourquoi le projet de rénovation actuel à vu le jour, afin de pallier ces problèmes et d’assurer la pérennité de l’ouvrage. Par ailleurs ce pont mixte est aujourd’hui d’usage quasi exclusivement routier. Il s’agit du second enjeu de cette rénovation : implanter une passerelle permettant aux piétons et aux cyclistes de traverser en toute sécurité la Dordogne. Deux entreprises délicates puisqu’il s’agit d’un ouvrage historique qu’il ne faut ni transformer ni dénaturer. Cette rencontre a permis d’exposer au cours d’une conférence les différentes solutions envisagées et adoptées. Puis a suivi une visite du chantier à la fois de la pose des passerelles piétonnes sur la partie métallique et de la rénovation des piles en maçonnerie. Rappel du programme 9h15 : Accueil AFGC et présentation de la journée. Gaëtan de Gevigney, Président de la délégation AFGC 9h30 : Historique de l’ouvrage – Pathologies Philippe Guignard, MOA et, Jean Luc Martin, responsable des OA à la SNCF, Assistant à la Maîtrise d'Ouvrage 9h45 : Elaboration d’un programme – choix de la conception-réalisation Xavier Scalieri, MOE 10h00 : Le projet du groupement Damien Vedrenne, Directeur de Travaux et Thomas Lavigne; Architecte 11h00 : Pause 11h15 : Le comportement des maçonneries et le renforcement Jean-Pierre Levillain, ingénieur consultant 12h00 : La passerelle métallique – interface GC/métal – equipage mobile Damien Védrenne 12h45 : Conclusion 13h00 : Déjeuner à La P'tite Adresse 14h00 : Visite du chantier 17h00 : Fin de la journée Déroulement de la journée Gaëtan de Gevigney, président de la délégation sud ouest de l’AFGC a marqué l’ouverture de cette journée en souhaitant la bienvenue à l’ensemble des participants. Les présentations se sont alors articulées autour de cinq points forts. Philippe Guignard, représentant la maîtrise d’ouvrage (le département de la Gironde), a présenté l’historique de l’ouvrage ainsi que les pathologies justifiant le projet. Jean- Luc Martin, responsable des ouvrages d’art de la SNCF et Assistant à la Maîtrise d'Ouvrage sur cette opération, a exposé les avantages du marché conception-réalisation retenu. Damien Védrenne, Directeur de travaux, et Xavier Scalieri, Maître d’œuvre ont ensuite présenté les différentes solutions techniques envisagées. Par la suite Jean-Pierre Levillain, ingénieur consultant expert en maçonnerie, a explicité les différents principes régissant une construction en maçonnerie.

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Les manifestations régionales

Bulletin annuel de l'AFGC 46 N° 20 - Janvier 2018

17 mai 2017 La rénovation du viaduc Eiffel de Cubzac-les-ponts

La délégation Sud-Ouest de l’AFGC a organisé le mercredi 17 mai 2017 à la Mairie de St Vincent de Paul une manifestation consacrée au Viaduc Eiffel et plus particulièrement à sa rénovation.

Ce pont, qui supporte la route départementale 1010, seule alternative à l'autoroute pour le franchissement de la Dordogne, est en service depuis 1839. Or, en l’espace de presque 200 ans des tassements différentiels de l’ordre du mètre et diverses pathologies ont a pu être observées.

C’est pourquoi le projet de rénovation actuel à vu le jour, afin de pallier ces problèmes et d’assurer la pérennité de l’ouvrage. Par ailleurs ce pont mixte est aujourd’hui d’usage quasi exclusivement routier. Il s’agit du second enjeu de cette rénovation : implanter une passerelle permettant aux piétons et aux cyclistes de traverser en toute sécurité la Dordogne. Deux entreprises délicates puisqu’il s’agit d’un ouvrage historique qu’il ne faut ni transformer ni dénaturer.

Cette rencontre a permis d’exposer au cours d’une conférence les différentes solutions envisagées et adoptées. Puis a suivi une visite du chantier à la fois de la pose des passerelles piétonnes sur la partie métallique et de la rénovation des piles en maçonnerie.

Rappel du programme

9h15 : Accueil AFGC et présentation de la journée. Gaëtan de Gevigney, Président de la délégation AFGC

9h30 : Historique de l’ouvrage – Pathologies Philippe Guignard, MOA et, Jean Luc Martin, responsable des OA à la SNCF, Assistant à la Maîtrise d'Ouvrage

9h45 : Elaboration d’un programme – choix de la conception-réalisation Xavier Scalieri, MOE

10h00 : Le projet du groupement Damien Vedrenne, Directeur de Travaux et Thomas Lavigne; Architecte

11h00 : Pause

11h15 : Le comportement des maçonneries et le renforcement Jean-Pierre Levillain, ingénieur consultant

12h00 : La passerelle métallique – interface GC/métal – equipage mobile Damien Védrenne

12h45 : Conclusion

13h00 : Déjeuner à La P'tite Adresse

14h00 : Visite du chantier

17h00 : Fin de la journée

Déroulement de la journée

Gaëtan de Gevigney, président de la délégation sud ouest de l’AFGC a marqué l’ouverture de cette journée en souhaitant la bienvenue à l’ensemble des participants.

Les présentations se sont alors articulées autour de cinq points forts.

Philippe Guignard, représentant la maîtrise d’ouvrage (le département de la Gironde), a présenté l’historique de l’ouvrage ainsi que les pathologies justifiant le projet. Jean-Luc Martin, responsable des ouvrages d’art de la SNCF et Assistant à la Maîtrise d'Ouvrage sur cette opération, a exposé les avantages du marché conception-réalisation retenu.

Damien Védrenne, Directeur de travaux, et Xavier Scalieri, Maître d’œuvre ont ensuite présenté les différentes solutions techniques envisagées. Par la suite Jean-Pierre Levillain, ingénieur consultant expert en maçonnerie, a explicité les différents principes régissant une construction en maçonnerie.

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Les manifestations régionales

Bulletin annuel de l'AFGC 47 N° 20 Janvier 2018

Thomas Lavigne, architecte du groupement, a ensuite présenté les choix esthétiques retenus qui ont abouti au projet actuel mais aussi les choix rejetés.

Enfin, Damien Védrenne a pu rendre compte de l’avancement des travaux en cours.

À la suite de ces interventions et après un échange de questions/réponses avec les différents intervenants, les participants ont déjeuné à Ambarès et Lagrave.

L’après-midi a été consacrée à la visite du chantier qui s’est déroulée en deux temps :

• la passerelle piétonne

• la rénovation et la consolidation des culées en maçonnerie.

Synthèse des présentations

Après avoir accueilli l’ensemble des participants, Gaëtan de Gevigney a présenté l’AFGC dont l’ambition est de rassembler l’ensemble des acteurs intéressés par le monde du Génie Civil. Qu’ils soient issus du monde professionnel ou de l’enseignement, l’AFGC permet aux ingénieurs, architectes, entrepreneurs, chercheurs, professeurs, mais aussi étudiants et plus généralement à toute personne passionnée par le monde de la construction, de se rencontrer et d’échanger autour de leur passion commune.

Après avoir rappelé la dimension historique de l’ouvrage et parlé de cette rénovation comme “l’aboutissement de 10 ans de travail”, Gaëtan de Gevigney a présenté les différents acteurs et membre de l’AFGC présents.

Un ouvrage historique

L’année 1839 a marqué l’ouverture au public du pont suspendu au dessus de la Dordogne. Cet ouvrage audacieux par ses dimensions et sa finesse reposait sur des piles centrales coniques en fontes et comprenait déjà les deux viaducs d'accès en maçonneries. à cette époque le port de Libourne est en activité, la solution est donc d’opter pour des portée supérieures à 100 mètres et une hauteur libre de l'ordre de 25 mètres pour ne pas gêner le passage des bateaux.

Malheureusement, le lit de la Dordogne et le sous sol de ses berges sont essentiellement composés d’un sol argileux de piètre qualité en termes de portance, ce qui a causé des désordres structurels tout au long de la vie de l’ouvrage.

En 1869 une tempête détruit le tablier, et le pont est hors service. A partir de 1879 l’entreprise Eiffel intervient pour mettre en œuvre une poutre treillis en tant que structure centrale à 8 travées et restaurer les viaducs d'accès. Le chantier sera terminé en 1883. Ce passé mouvementé s’achève par la destruction de deux piles par l’armée allemande en 1944, plus tard reconstruite à l’identique.

Contexte général du projet - Situation

Aujourd’hui en tant que pont routier le Viaduc Eiffel permet chaque jour la traversée de 9000 à 14000 véhicules. Il représente donc une alternative réelle au pont autoroutier qu’est le pont de Guyenne, et permet aux usagers de conserver une forme de liberté en évitant aux véhicules non autorisés sur l’autoroute un détour de 50 kilomètres. C’est pour éviter ces détours que le besoin de réaliser des travaux en limitant la coupure de la circulation est apparu.

Cependant les ouvrages de cette envergure et de cet âge n’ont aucun semblable, tous les travaux les concernant doivent donc s’adapter et innover.

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Bulletin annuel de l'AFGC 48 N° 20 - Janvier 2018

C’est pourquoi la maîtrise d’ouvrage a porté son choix sur un marché de conception/réalisation avec l’aide de la SNCF en tant qu’assistant à maîtrise d’ouvrage.

En effet, cette procédure permet d'associer dès la conception du projet le savoir faire des entreprises ainsi que la veille technologique sur les procédés existants.

Or toute la particularité de ce pont repose sur le fait qu’il s’agisse d’un ouvrage mixte. Les viaducs d’accès en maçonnerie reposent sur un sol sédimentaire de nature variable, ils atteignent le lit de la rivière et se terminent par une paire de culées accueillant la structure métallique centrale surplombant le fleuve qui quant à elle voit ses piles soumises au courant de ce dernier. Cette situation entraîne nécessairement une différence concernant la nature des fondations. Tandis que les piles en rivière sont sur pieux, de même que les culées, la majorité des piles des viaducs d'accès sont fondés sur des semelles continues reliées entre elles, constituant une sorte de radier général. Ces fondations de nature différente génèrent des tassements différentiels qui entraînent des désordres dans les voûtes.

Les contraintes de charge due à la qualité du sol étant déjà connu autrefois, les viaducs en maçonnerie sont constitués d’une structure relativement légère pour leur taille, faite de petites voûtes transversales et d’une voûte d’élégissement longitudinale qui permettent un gain de matière.

L'ouvrage a néanmoins subi des désordres, plus importants en rive droite qu'en rive gauche ayant nécessité des reconstructions de voûte au fil des ans cependant 60 % des voûtes sont encore d'origine.

La nécessité de rénover

C’est en premier lieu un déversement longitudinal qui peut être remarqué en observant le pont, traduisant un tassement différentiel au niveau des fondations. Ce n’est qu’en second lieu, lors d’une étude géologique et topographique, que peut être constaté le tassement qui ne cesse de grandir au fil des années. D’après les archives conservées, c’est un tassement de près de 1m50 que le terrain et le pont ont subi depuis 1820. Aussi, les maçonneries et en particulier les voûtes nécessitent un entretien qui requiert de renforcer ou de remplacer les pierres détériorées en place.

Le second point de ce projet de rénovation consiste à rendre aux piétons et aux cyclistes l’usage du viaduc Eiffel. En effet, le profil en travers comprenant une chaussée de 6 mètres et deux trottoirs de 1 m se prête mal, compte tenu du trafic routier, aux circulations douces. Pour cela c’est l’implantation d’une passerelle qui est retenue, accordant à cet ouvrage une greffe moderne.

Conservation de l’identité

C’est tout particulièrement pour l'implantation de cette passerelle qu’un architecte a rejoint le groupement. Les piles du pont, détruites en 1869, ont été remplacées par l'entreprise Eiffel par les actuelles, qualifiées de «dentelle de fonte». Afin de conserver l’identité du viaduc il a été primordial de retenir une passerelle la plus discrète possible ; l’architecte l’évoque comme une lame d’acier. Différentes solutions ont été proposées, comme celle de placer la passerelle en dessous de la chaussée, une solution approuvée par les Architectes des Bâtiments de France ou encore équilibrer le pont en positionnant une passerelle de chaque côté imposant un sens de circulation aux cyclistes. Le choix s’est finalement porté sur une passerelle unique, accolée au pont sur un côté, permettant de sauvegarder l’aspect initial du pont sur au moins un flanc.

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Bulletin annuel de l'AFGC 49 N° 20 Janvier 2018

Alors qu’il y avait peu de choix de couleurs pour les structures métalliques, c’est un gris/bleu qui a été retenue minimisant au mieux le contraste entre le pont existant et la passerelle ajoutée. Avec l’objectif de réaliser une passerelle discrète ce sont des garde-corps avec des poteaux simples qui ont été sélectionnés permettant également de rendre la passerelle la plus légère possible.

Etudes spécifiques au projet

En plus des études classiques communes à tout acte de construction, la susceptibilité de l’ouvrage a contraint les intervenants à appréhender son comportement et son état.

Pour cela un diagnostic complet a été réalisé à l’aide d’auscultations, de calculs et d’instrumentation. La conclusion permettant une analyse des risques encourus par l’ouvrage.

Ce diagnostic nécessite de rechercher et d’établir la connaissance :

• de l’historique de la vie de l’ouvrage et des techniques de construction employées

• géologique et d’état géotechnique des sols de fondation

• du comportement des sols d’encastrement des fondations,

• du comportement structurel par une approche visuelle

• de l’état actuel des matériaux constitutifs.

L’objectif d’une instrumentation est de mieux anticiper les variations altimétriques pour valider la conception de renforcement de la pile-culée rive droite, mais également de réaliser un suivi pendant la phase travaux et pendant les dix ans qui suivent.

Dispositifs mis en œuvre

• Capteurs de mesure de pression interstitielle sur les deux rives (niveau de la nappe)

• Plots HLS permettant de suivre les mouvements de la pile-culée en rive droite

• Capteur de mesure de la fracture de la voûte de la pile-culée en rive droite, mesure de l’ouverture et du rejet

• Sonde de niveau de la Dordogne

Cette analyse révélant l’état de l’ouvrage a permis de diriger les travaux à venir en listant les contraintes immuables à l’ouvrage :

• Tenir compte de l’environnement des appuis des viaducs : tassements naturels des sols, mouvements d’eau, variations de température,

• Aucune augmentation de charge ne doit être appliquée sur les fondations des piles et culées des deux viaducs (déterminant pour la passerelle)

• Limiter les déplacements verticaux de la fondation de la pile-culée rive droite.

• Conserver la ductilité de la maçonnerie des voûtes leur permettant d’encaisser les petits déplacements relatifs des appuis,

• Remplacer les ciments de jointoiement par un mortier non agressif à base de chaux hydraulique et remplacer les pierres dégradées

• Protéger les maçonneries en assurant une étanchéité générale de surface

Dès le démarrage des travaux le suivi topographique est renforcé, notamment lors des interventions sur les voûtes et tympans fracturés, mais aussi et surtout lors de la réalisation des micropieux et des palplanches sur la pile culée en rive droite.

Une limite de mouvement est fixée, à son approche les travaux sont suspendus jusqu'à stabilisation de l’ensemble.

De lourds impacts environnementaux ont été identitiés afin de préserver une espèce d’orchidée, la nivéole d’été ainsi que l’ensemble de l’écosystème de la mégaphorbiaie, le déroulement des travaux s’est vu régulé en fonction du rythme de ces espèces.

Les solutions : définitives et abandonnées

L’idée d’une réfection totale des 6 voûtes a été abandonnée après examen et analyse par l'expert du groupement, pour un remplacement des pierres dégradées en profondeur et une reconstitution des

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Les manifestations régionales

Bulletin annuel de l'AFGC 50 N° 20 - Janvier 2018

parements par suppression des mortiers de ciment et jointoiement à la chaux.

L’étanchéité de surface est refaite à neuve afin de ne plus permettre d’infiltration au sein des maçonneries.

La passerelle est réalisée à partir de caissons métalliques en encorbellement.

Le surpoids causé est diminué en abaissant le profil en long des viaducs d’accès : une partie du remblai interne aux tympans est décaissé pour ne pas créer de nouvelles instabilités.

Au niveau de la pile culée rive droite le sol est renforcé par micro pieux réalisés par scellement rapide, le transfert de charges de la pile culée s'effectue au moyen d’une poutre en béton armé ceinturant le tout.

Le projet retenu prévoyait la mise en œuvre des caissons au dessus de la rivière par une grue sur un ponton flottant. Cette solution présentait plusieurs inconvénients parmi lesquels, des contraintes environnementales fortes pour réaliser une estacade d'embarquement, une sensibilité aux marées et aux intempéries. Dans ces conditions, le groupement s'est intéressé à une étude complète afin de réaliser un échafaudage mobile. Ce dernier permet de supporter un caisson de passerelle, tout en permettant aux ouvriers de réaliser les boulonnages et autres manipulations nécessaires.

Visite du chantier

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Les manifestations régionales

Bulletin annuel de l'AFGC 51 N° 20 Janvier 2018

Compte-rendu rédigé par Julia Suarez, Nicolas Thivet, et Loubaba Mourabiti élèves de 1ère année d’IUT Génie Civil et Construction Durable à Toulouse