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Rendez-vous du Sénat Cambrai, le 18 novembre 2010 1 Les jeunes, citoyens et responsables de leur avenir Le débat est animé par Antoine BOILLEY, animateur de Ma Chaîne Etudiante (MCE) Antoine BOILLEY Bonjour à tous. Bienvenue dans l’amphithéâtre du Centre Universitaire de Cambrai La Forêt. Merci à l’Université de nous accueillir pour ce troisième rendez-vous du Sénat, organisé à l’initiative du Président du Sénat, Gérard Larcher, et du Président de la Commission de la Culture, de la Communication et de l’Education du Sénat, Jacques Legendre. En tant qu’animateur de l’émission politique Face aux jeunes sur la chaîne MCE, je suis particulièrement heureux d’animer ces débats sur un thème plus que crucial et d’actualité : Les jeunes, citoyens et responsables de leur avenir. Nous avons trop souvent coutume de considérer en France la jeunesse comme passive, individualiste, désintéressée par la chose publique ou encore abstentionniste. Les jeunes semblent pourtant résolument tournés vers leur avenir, comme en témoigne d’ailleurs leur récente mobilisation autour de la réforme des retraites. Leur avenir les inquiète. Les raisons et les raisins de la colère chez les jeunes sont aujourd'hui nombreux : un parcours du combattant pour décrocher une formation débouchant sur un emploi, un taux de chômage important, des difficultés croissantes d’accès au logement, des fins de mois souvent très difficiles à boucler… Dans ce contexte difficile, les jeunes se mobilisent, au sein des établissements scolaires et universitaires, des associations, des partis politiques ou encore des syndicats étudiants et lycéens, pour changer la société et construire leur avenir, notre avenir. Nous allons débattre de ces questions. Vous allez ainsi pouvoir confronter vos expériences et vos points de vue à ceux de responsables politiques, universitaires, de membres de la société civile, de représentants du monde de l’Entreprise, d’associations ou encore de la justice. Nous nous poserons deux questions principales : A quelle implication citoyenne et politique les jeunes doivent-ils aspirer ? Quelle mesure doit-elle être poursuivie, amplifiée ou mise en œuvre par les pouvoirs publics en matière d’enseignement, de formation, d’orientation et d’emploi pour donner à la jeunesse toute sa place dans notre société ? Ce débat a été voulu par le Président du Sénat, soucieux, en tant que législateur, des questionnements, nombreux et légitimes, des jeunes. Bonne matinée à vous.

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Rendez-vous du Sénat

Cambrai, le 18 novembre 2010 1

Les jeunes, citoyens et responsables de leur avenir

Le débat est animé par Antoine BOILLEY, animateur de Ma Chaîne Etudiante (MCE)

Antoine BOILLEY

Bonjour à tous. Bienvenue dans l’amphithéâtre du Centre Universitaire de Cambrai La Forêt. Merci à l’Université de nous accueillir pour ce troisième rendez-vous du Sénat, organisé à l’initiative du Président du Sénat, Gérard Larcher, et du Président de la Commission de la Culture, de la Communication et de l’Education du Sénat, Jacques Legendre.

En tant qu’animateur de l’émission politique Face aux jeunes sur la chaîne MCE, je suis particulièrement heureux d’animer ces débats sur un thème plus que crucial et d’actualité : Les jeunes, citoyens et responsables de leur avenir.

Nous avons trop souvent coutume de considérer en France la jeunesse comme passive, individualiste, désintéressée par la chose publique ou encore abstentionniste. Les jeunes semblent pourtant résolument tournés vers leur avenir, comme en témoigne d’ailleurs leur récente mobilisation autour de la réforme des retraites. Leur avenir les inquiète. Les raisons et les raisins de la colère chez les jeunes sont aujourd'hui nombreux : un parcours du combattant pour décrocher une formation débouchant sur un emploi, un taux de chômage important, des difficultés croissantes d’accès au logement, des fins de mois souvent très difficiles à boucler…

Dans ce contexte difficile, les jeunes se mobilisent, au sein des établissements scolaires et universitaires, des associations, des partis politiques ou encore des syndicats étudiants et lycéens, pour changer la société et construire leur avenir, notre avenir.

Nous allons débattre de ces questions. Vous allez ainsi pouvoir confronter vos expériences et vos points de vue à ceux de responsables politiques, universitaires, de membres de la société civile, de représentants du monde de l’Entreprise, d’associations ou encore de la justice.

Nous nous poserons deux questions principales :

• A quelle implication citoyenne et politique les jeunes doivent-ils aspirer ?

• Quelle mesure doit-elle être poursuivie, amplifiée ou mise en œuvre par les pouvoirs publics en matière d’enseignement, de formation, d’orientation et d’emploi pour donner à la jeunesse toute sa place dans notre société ?

Ce débat a été voulu par le Président du Sénat, soucieux, en tant que législateur, des questionnements, nombreux et légitimes, des jeunes.

Bonne matinée à vous.

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Rendez-vous du Sénat

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Discours d’accueil

Mohamed OURAK Président de l’Université de Valenciennes et du Hainaut-Cambrésis

Monsieur le Président du Sénat, Mesdames, Messieurs les Sénateurs, Monsieur le Sous-préfet, Madame le Recteur, Monsieur le Député-Maire, Mesdames et Messieurs les Conseillers Régionaux, Mesdames et Messieurs les Elus, Mesdames et Messieurs, Chers collègues et amis, soyez les bienvenus en Hainaut-Cambrésis, non seulement terre d’arts et d’histoire, mais également terre industrielle.

Nous sommes particulièrement honorés et heureux de vous accueillir sur le site universitaire de Cambrai. C’est en effet la première fois qu’un « rendez-vous du Sénat » est délocalisé en Région. Nous tenons à remercier Monsieur Larcher et Monsieur Legendre pour cette excellente initiative.

Depuis 1982, l’Université de Valenciennes et du Hainaut-Cambrésis est présente sur le territoire de Cambrai, qui se distingue, à l’image de la Région Nord-Pas-de-Calais, par sa vitalité, son dynamisme, et la jeunesse de sa population. Sur ce campus, l’Université de Valenciennes et l’Université de Lille 2 collaborent de manière exemplaire afin de proposer aux étudiants du Cambrésis une offre de formation diversifiée et de qualité.

Depuis 1982, ce site de la Forêt est devenu, avec l’implantation d’un restaurant et d’infrastructures sportives, un véritable lieu de vie universitaire et un tremplin pour la réussite des étudiants, grâce au soutien financier et matériel de la Communauté d’Agglomération de Cambrai. Nous en remercions son Président, Monsieur Villain, ainsi que tous ses prédécesseurs. Ce campus dispose de nombreux atouts : d’excellents taux de réussite, un très bon niveau d’encadrement, des pédagogies innovantes, une proximité importante avec les enseignants chercheurs…

Le choix du débat de cette matinée autour de l’école, de la formation et de l’insertion professionnelle me tient particulièrement à cœur. Je reprends les propos de Bernard Decomps : « l’Université se doit d’être passeur de culture avec l’Entreprise ». Selon Condorcet, le premier défi de l’école se résume dans la formule : « éduquer, c’est éveiller ». L’école doit répondre aujourd'hui à un nouveau défi, plus ambitieux encore. L’école doit former les citoyens de demain, afin qu’ils s’intègrent dans une société de la connaissance. L’Université doit apprendre aux étudiants à apprendre.

La volonté constante de l’Université de Valenciennes est de contribuer à la réussite et à l’épanouissement de ses étudiants dans leurs projets personnel et professionnel. Depuis sa création, l’Université a toujours privilégié la qualité de ses formations, de ses relations avec les milieux socio-économiques, de sa recherche, tournée vers l’innovation et l’excellence, et de son transfert technologique.

Elle est reconnue pour la qualité de l’insertion professionnelle de ses diplômés. Les étudiants de l’Université de Valenciennes disposent non seulement de compétences scientifiques et techniques, mais également de compétences organisationnelles et linguistiques, nécessaires à une bonne insertion professionnelle. L’Université favorise également la réussite de ses étudiants en ouvrant chaque année de nouvelles formations par alternance. Aujourd'hui, plus de 10 % des étudiants suivent une telle formation. L’Université mobilise également l’environnement économique local, à

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Rendez-vous du Sénat

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travers des offres de stage, des offres d’emploi et l’accompagnement de projets de création d’entreprise.

J’espère que ce débat sur les jeunes citoyens et responsables de leur avenir sera un grand moment de partage. Je souhaite à tous une bonne réunion et, à nos étudiants, une bonne continuation.

Merci à vous.

Christian SERGHERAERT Président de l’Université de Lille 2

Monsieur le Président du Sénat, Mesdames, Messieurs les Sénateurs, Monsieur le Sous-préfet, Madame le Recteur, Monsieur le Délégué à l’information et à l’orientation, Mesdames et Messieurs les Elus, Mesdames et Messieurs les représentants des organisations représentatives des employeurs et des salariés, Mesdames et Messieurs, chers collègues, chers étudiants, je vous souhaite moi aussi la bienvenue dans cette antenne cambrésienne, qui est une antenne commune à l’Université de Valenciennes Hainaut-Cambrésis et à l’Université de Lille Droit et Santé.

Je remercie également le Président Gérard Larcher, Monsieur le Sénateur Jacques Legendre, Président de la Commission Culture, Education et Communication du Sénat, et les membres de cette dernière Commission pour avoir organiser cette matinée dédiée au service civique, à l’orientation et à l’insertion de nos jeunes.

Je vous délivre le message de Lionel Collet, Président de la Conférence des Présidents des Universités :

« Monsieur le Président du Sénat, je tiens à vous remercier chaleureusement d’avoir souhaité associer à votre journée la Conférence des Présidents des Universités. Je regrette vivement que notre dernière séance plénière, qui se tient aujourd’hui, ait empêché le bureau de notre Conférence de vous témoigner, par sa présence, combien nous avons été sensibles à votre invitation.

Nos collègues, Présidents d’Université de la région Nord-Pas-de-Calais, le Délégué général de notre conférence, Alain Abecassis, que nous avons spécialement dépêché, vous diront l’importance que les Présidents des Universités Françaises attachent à des manifestations qui, comme celles-ci, sous l’égide de votre Haute Assemblée, veulent conjuguer les efforts des entreprises, des partenaires sociaux, des élus de tous horizons, de toutes les collectivités territoriales, et des responsables d’établissement de formation et d’enseignement supérieur pour favoriser l’insertion professionnelle des jeunes. Il s’agit là en effet d’une des missions des universités, inscrite dans la loi LMU, aux côtés des missions de formation et de recherche, que nous nous efforçons d’accomplir quotidiennement, en y consacrant les structures, les moyens, les synergies et les partenariats nécessaires. Nous savons que, sur un marché de l’emploi difficile, particulièrement pour les jeunes, la formation et le diplôme représentent la meilleure des protections contre le chômage. L’autonomie permet à nos établissements d’innover pour proposer des diplômes en formation initiale et tout au long de la vie, toujours mieux adaptés aux besoins et aux attentes des jeunes et des entreprises, tant par la voie traditionnelle que par celle de l’apprentissage.

Mais l’autonomie ne signifie pas l’autarcie. Nous ne pouvons pas réaliser seuls ces missions, et nous avons besoin de nouer des partenariats avec les milieux économiques et sociaux, avec les élus, responsables des territoires dans lesquels nos universités sont insérées. C’est le sens, au

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Rendez-vous du Sénat

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niveau national, des conventions cadres, passées par la CPU avec l’Association des Régions de France, hier encore, avec trois associations de Villes (l’Association des Villes Universitaires de France, la Fédération des Villes Moyennes de France, l’Association, des Maires des grandes villes de France) et avec le MEDEF, la semaine prochaine. C’est aussi le sens du dialogue engagé avec les grandes confédérations de salariés. Ces conventions cadres ont pour vocation d’être déclinées par chaque Université avec les partenaires qui souhaiteront s’associer à cette démarche, afin de leur donner un contenu concret et opérationnel, afin de montrer que nos universités veulent être présentes et actives sur tous les territoires, depuis les sites universitaires de proximité, comme ici à Cambrai, avec nos IUT, nos professions de santé, nos antennes d’IUFM, nos écoles de formation en soins infirmiers, jusqu’aux grands pôles universitaires à vocation et attractivité internationales, avec les centres de recherche de niveau mondial les plus avancés. Chacune des conventions s’attache à mettre en œuvre, avec nos différents partenaires, les conditions matérielles et pédagogiques de réussite du projet personnel des étudiants, depuis son accueil à l’Université jusqu’à son insertion professionnelle.

A l’heure du plan Campus et des investissements d’avenir, notre Conférence est pleinement consciente que la richesse de notre système d’enseignement supérieur réside dans sa diversité et que chacun de ses maillons, à condition naturellement d’avoir pour chacun une exigence adaptée d’excellence, est nécessaire à la performance globale de notre système et à sa compétitivité internationale.

En vous renouvelant mes regrets de ne pas pouvoir être avec vous, je vous adresse mes vœux de plein succès, Monsieur le Président, pour cette manifestation ».

Discours d’ouverture

Jacques LEGENDRE Président de la Commission de la Culture, de l’Education et de la Communication.

Monsieur le Président du Sénat, Monsieur le Député-Maire de Cambrai, Mesdames et Messieurs les parlementaires, Mesdames et Messieurs les responsables dans le secteur politique, économique, et administratif, et surtout les jeunes, nombreux aujourd'hui, je vais essayer de ne pas faire comme d’habitude. J’ai préparé un beau discours, mais je crois que, aujourd'hui, il est essentiel que nous débattions.

Je suis très heureux de vous accueillir aujourd’hui au centre universitaire de Cambrai et je remercie Monsieur le Président du Sénat d’avoir choisi d’organiser - pour la première fois en région et dans notre ville - cette 3e édition des « Rendez Vous du Sénat » sur le thème : les jeunes, citoyens et responsables de leur avenir.

Le Sénat est en effet très préoccupé par l’avenir de nos 8 millions de jeunes et s’est penché sur le malaise qui frappe cette génération, notamment dans le cadre d’une mission d’information rassemblant l’ensemble des groupes politiques.

Nous avions fait des propositions en faveur de la jeunesse, non seulement dans le domaine de l’orientation, de l’accès à l’emploi, mais aussi de l’autonomie financière ou de la citoyenneté. C’est au Sénat qu’est née l’idée d’un service civique dont M. Demuynck nous parlera au cours de la première table ronde. Un bon nombre de nos propositions ont également été reprises dans le plan

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Rendez-vous du Sénat

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pour l’emploi des jeunes lancé l’an dernier par le Président de la République. Des progrès ont été accomplis, mais nous sommes bien conscients qu’un long chemin reste à parcourir pour que les jeunes retrouvent confiance dans leur avenir.

Car le malaise est bien réel : selon une enquête menée par la Fondation pour l’innovation politique, fin 2009, auprès de 20 000 jeunes de 16 à 20 ans de dix-sept pays, c’est en France, en Espagne et en Allemagne que les jeunes ont le moins le moral. Ils ne sont que 36 % à croire en un avenir prometteur contre 60 % au Danemark. Si ce problème n’est pas propre à notre pays, nous détenons hélas le record de taux de chômage des jeunes ! La même étude souligne aussi que le modèle éducatif leur semble dépassé. Un constat que ne dément pas le baromètre Ipsos de septembre 2010 établi pour le Secours populaire : un jeune sur deux s’y dit « angoissé » et plus d’un sur trois « en colère » quand il pense à son avenir.

Ce malaise est-il nouveau ? Je ne le crois pas. J’ai à l’esprit la célèbre formule de Paul Nizan, qui fut tué durant les combats de 1940 : « J’avais vingt ans. Je ne laisserai personne dire que c’est le plus bel âge de la vie. » C’est par ces mots que s’ouvre Aden Arabie, livre paru en 1932.

Notre propre génération a sans doute eu plus de chance. En effet, la guerre d’Algérie était derrière nous et la France connaissait un important développement économique. Notre seul problème était de réussir nos études : nous ne connaissions pas l’angoisse du chômage, sachant qu’une bonne formation permettait à coup sûr d’avoir un emploi intéressant.

Nous qui avons eu cette chance, nous avons le devoir de faire le maximum pour les jeunes d’aujourd’hui. Ces derniers doivent avoir confiance en l’avenir, ce qui n’est malheureusement pas le cas à l’heure actuelle.

Nous nous glorifions souvent de notre titre de champion d’Europe de la natalité. Certes, nous avons des jeunes en nombre, mais nous ne leur permettons pas d’entrer dans la vie active avec confiance. Si nous ne remédions pas à une telle situation, nous serions injustes à leur égard et nous ne rendrions pas service à notre pays. Nous ne pouvons plus longtemps tolérer que 150 000 jeunes sortent chaque année du système scolaire sans diplôme ni formation et que l’école reproduise les inégalités sociales. A cet égard, je me félicite des avancées récentes en matière de décloisonnement de l’orientation et de l’action interministérielle, notamment s’agissant de la prévention du décrochage scolaire et de l’accompagnement des jeunes sortant sans diplôme du système scolaire. Monsieur Pitte, délégué à l’information et à l’orientation, nous dira tout à l’heure comment il compte mettre en œuvre ces mesures.

La commission que je préside au Sénat, chargée notamment de l’éducation, est tout particulièrement sensible à cette question de l’orientation et de la démocratisation de l’enseignement supérieur qui a fait l’objet de deux rapports d’information récents.

S’agissant du baccalauréat, nous avons en particulier montré que la réussite à cet examen suscite des frustrations à la hauteur des espoirs qu’il peut faire naître, notamment chez tous ceux dont les parents ne sont pas eux-mêmes bacheliers, car il ne leur permet finalement pas toujours d’obtenir dans la société la place qu’il est censé leur garantir.

Quant à l’accès aux classes préparatoires, il nous a paru indispensable de progresser vers une plus grande diversité sociale, car la plus grande cause du désamour entre les jeunes et l’école est qu’ils ne croient plus en la capacité de l’école de faire échec à la reproduction sociale. Les expériences

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menées par plusieurs grandes écoles vont dans le bons sens, et nous le verrons tout à l’heure avec le représentant de Sciences Po Lille.

Nous découvrirons également à travers l’exemple de l’antenne universitaire de Cambrai, comment une offre de formation universitaire de proximité permet aux jeunes des milieux les plus modestes d’accéder à l’enseignement supérieur.

J’avais été frappé par une enquête réalisée dans les années quatre-vingt parmi les lycéens de la région et selon laquelle un jeune originaire du Cambresis avait quatre fois moins de chance qu’un jeune issu de la banlieue lilloise d’accéder à l’université, en raison de la distance pour se rendre à Lille ou Valenciennes. En effet, le coût des transports et de la location d’une chambre dissuadait les enfants des milieux modestes d’envisager des études supérieures.

C’est pourquoi j’ai soutenu et obtenu du ministère de l’enseignement supérieur, en 1986, la création d’une antenne des universités de Lille et Valenciennes sur le site de Cambrai avec le souci de développer une base large de premiers cycles, pour éviter que le choix des étudiants ne soit faussé par la proximité. L’objectif était d’offrir une diversité de formations dans les secteurs juridique, scientifique et littéraire.

La ville de Cambrai a alors financé à hauteur de 35 millions de francs la transformation d’une ancienne usine textile en bâtiments universitaires et d’une graineterie en résidence étudiante.

Cet enseignement supérieur long à Cambrai, en partenariat avec les universités de Lille-II et de Valenciennes, qui y envoient leurs professeurs, a connu un réel succès : le centre universitaire accueille aujourd’hui 700 à 800 étudiants par an, dont la majorité est originaire de l’arrondissement de Cambrai.

Si l’on y ajoute le développement de filières post-bac dans les lycées, une école d’art et une école de soins infirmiers, ce sont environ 2 000 jeunes qui poursuivent des études supérieures dans la ville de Cambrai qui ne compte que 35 000 habitants.

L’environnement et les conditions de travail du centre universitaire sont favorables à la réussite des étudiants dont les taux de succès en première année ou aux concours sont supérieurs à ceux de Lille, en raison sans doute d’un meilleur encadrement.

L’insertion professionnelle des jeunes est également une préoccupation de l’UVHC. Depuis 1991, le centre universitaire s’est enrichi de formations professionnelles (IUT, licences professionnelles) qui viennent en appui du développement économique de la ville.

L’existence d’un centre universitaire à Cambrai est incontestablement un élément essentiel du développement de la ville.

Par ailleurs, je suis depuis longtemps convaincu de la nécessité de rapprocher l’école et le monde du travail. Car la réussite d’un système éducatif, c’est celui de l’insertion professionnelle.

Vous savez l’importance que j’attache aux filières professionnelles et aux formations en alternance. Voilà 30 ans, alors que j’étais secrétaire d’État chargé de la formation professionnelle, au cours des débats parlementaires qui ont conduit à l’adoption de la première loi sur l’alternance, j’avais dressé – qu’on me pardonne de me citer moi-même ! – le constat suivant : « Sur les 650 000 jeunes qui arrivent chaque année sur le marché du travail, 200 000 ont une formation générale relativement

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faible et sont dépourvus de qualification professionnelle. » Je soulignais alors « l’impression de tourner en rond pour qui ne peut trouver un emploi faute d’expérience, et qui ne peut en acquérir puisqu’il n’a pas encore pu travailler ».

Malheureusement mes propos restent d’actualité ! Pourtant, de nombreuses décisions sont intervenues depuis lors, et les moyens ont été substantiellement renforcés. Actuellement, à l’issue de la scolarité obligatoire, c’est-à-dire en fin de troisième, près de 40 % des élèves – cette part est stable depuis dix ans – s’engagent dans la voie professionnelle, soit sous statut scolaire soit sous contrat d’apprentissage. Les jeunes qui ont bénéficié d’une formation en alternance obtiennent, je le rappelle, d’excellents résultats en termes d’insertion professionnelle – et c’est bien cela qui compte ! – puisque 80 % d’entre eux trouvent un emploi durable en moins d’un an.

Selon moi, il convient donc, tout particulièrement en cette période de crise, de poursuivre nos efforts dans ce domaine. Nous aborderons cette question tout à l’heure avec M. Villain, maire de Cambrai et président de la mission locale, et Mme Drobinoha, directrice de Formatech. Nous verrons également que l’enseignement agricole est un modèle d’excellence de notre système éducatif.

Bien entendu, les entreprises doivent aussi se mobiliser : il est en effet de leur responsabilité citoyenne de s’engager à accueillir des jeunes et de contribuer à leur formation. Une enquête récente de l’institut Trendence, qui a interrogé 2 492 recruteurs de vingt pays sur leur conception et leurs attentes vis-à-vis des jeunes diplômés, montre toute l’importance que les entreprises attachent à l’expérience professionnelle, première information recherchée sur un CV. Les recruteurs se préoccupent peu des savoirs théoriques des candidats : pour 70 % d’entre eux ce sont les compétences techniques ou sociales qui comptent.

Les employeurs sont évidemment les plus à même de transmettre les connaissances et compétences concrètes de leurs métiers, en perpétuelle évolution. Or les possibilités de stages demeurent limitées et tant qu’elles ne seront pas mieux organisées par les établissements sous la forme de bourses aux stages, continueront de se reproduire les inégalités sociales, car seuls les jeunes ayant des réseaux pourront en bénéficier.

J’évoquerai rapidement un sujet qui fait débat : faut-il orienter les jeunes vers les métiers dits « en tension » ? Personne ne défend l’orientation forcée de quiconque. Mais il parait de bon sens de prendre en considération l’inadéquation entre les offres et les demandes d’emploi. Bien entendu, les professionnels doivent aussi s’interroger et découvrir pour quelles raisons leurs métiers n’attirent pas les jeunes. Mais il n’est pas inutile de rappeler aux jeunes l’existence des secteurs qui recrutent. Le devoir de la formation est de préparer à l’emploi dans les métiers où les embauches sont avérées.

Mesdames, Messieurs, vous l’aurez compris : nous souhaitons sortir de l’orientation par défaut, de la logique du tout ou rien et garantir à chaque jeune le droit à la différenciation des parcours, en développant des passerelles entre les différentes voies de formation, pour faciliter les réorientations et offrir à tous une seconde chance.

C’est pourquoi nous avons voulu débattre aujourd’hui, non seulement entre responsables politiques et enseignants, mais aussi avec des jeunes représentant les divers cursus de formation. J’espère que nos débats seront fructueux et que nous pourrons tirer le plus grand bénéfice de ce dialogue pour répondre aux inquiétudes de ces jeunes qui sont l’atout majeur de notre pays.

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Rendez-vous du Sénat

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Merci encore, Monsieur le Président, d’avoir permis que ce premier rendez-vous décentralisé du Sénat se tienne ici.

Introduction

Gérard LARCHER Président du Sénat

Madame le Recteur, Monsieur le Sous-préfet, Monsieur le Député-Maire, qui nous accueille, Messieurs les Présidents d’Université, nous avons identifié trois thèmes prioritaires pour les rendez-vous du Sénat.

Le premier thème porte sur le pacte social. Ce travail ne s’est pas révélé totalement inutile dans un débat récent sur la réforme des retraites, alors que nous sentions des interrogations et des crispations dans le pays. Nous avons travaillé sur la construction de relations sociales, ce qui me permet de saluer tous les représentants des partenaires sociaux, les entreprises, les élus locaux, les proviseurs et les enseignants, les représentants des étudiants et les étudiants.

Le deuxième thème porte sur la représentation des territoires. Il s’agit là d’ailleurs de la vocation du Sénat, inscrite dans l’article 24 de la Constitution. Sont présents dans la salle des députés et des sénateurs régionaux : non seulement des parlementaires du Nord-Pas-de-Calais, mais également le Sénateur de la Somme, le Sénateur de la Sarthe, Jean-Pierre Chauveau. Je constate également la présence du Vice-président du Sénat en charge du budget de l’Université, Jean-Léonce Dupont. Si nous avons travaillé sur la représentation des territoires, c’est parce que le territoire est urbain et rural. Il est constitué de grandes villes, de villes moyennes et de territoires ruraux. Certains territoires connaissent une phase d’expansion ; d’autres connaissent des difficultés.

Le troisième rendez-vous du Sénat porte sur la jeunesse. Ce rendez-vous a été pris bien avant que les partenaires sociaux ne se fixent pour objectif de parler des jeunes. Notre Assemblée doit certes remplir sa mission fondamentale, qui est de produire la Loi et de contrôler le gouvernement. Nous avons cependant considéré que la question des jeunes était essentielle. Nous avons ainsi produit un rapport l’an dernier sur les jeunes. Le rapporteur appartenait à la majorité ; la Présidente, à l’opposition. Il s’agit là d’une particularité du Sénat.

Il convient désormais de mettre ce rapport en pratique. Un grand débat national doit se tenir. Je souhaite qu’il soit conduit par les partenaires sociaux. Il s’agit là sans doute d’un vieux réflexe de Ministre de Travail, que j’ai été. Le Parlement ne peut pas cependant se tenir à l’extérieur du débat. Nous devons avec les jeunes en poser les bases. Elles seront posées à Cambrai.

Cambrai appartient à un département dans lequel 30 % de la population a moins de 25 ans. Il s’agit d’un territoire porteur d’une extraordinaire tradition. Pardonnez-moi de vous le dire : ma mère est issue de cette région. Elle vivait rue de Lannoy, à Roubaix. En outre, vous avez eu le bon goût d’installer ce centre universitaire rue de Rambouillet, ville dont je suis Maire !

Monsieur le Président d’Université, il est essentiel que nous vous écoutions et que nous recevions votre message. Pour cette raison, est ici présent Christian Demuynck, un des constructeurs du service civique, avec Martin Hirsch et Yvon Collin.

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Rendez-vous du Sénat

Cambrai, le 18 novembre 2010 9

Je suis venu vous écouter et écouter les jeunes. Je suis également venu porter vos messages.

Merci à l’Université de nous accueillir. Je remercie également Monsieur le Maire. Les villes moyennes sont à dimension humaine et permettent une écoute de qualité.

Merci à Jacques Legendre de nous avoir conduits jusqu’ici, dans cette région symbolique. Sa population, parfois venue d’ailleurs, a toujours défendu les valeurs du travail, même si elle a connu de douloureuses mutations économiques et industrielles. Venir dans cette région, c’est essayer de contribuer à l’espérance.

Je vous remercie.

Du service civique à l’engagement citoyen

Table ronde

Participent à la table ronde :

Christian DEMUYNCK, Sénateur de Seine-Saint-Denis ; Marie-Alice CANONNE, engagée dans le service civique ; Thomas DEWAMIN, engagé dans le service civique ; Juliette DUPONT, Vice-présidente de la Communauté d’agglomération de Cambrai et Présidente de l’association Amitié Burkina Faso ; Christelle BRIQUET, bénévole de l’association Amitié Burkina Faso ; Jean-Philippe VICENTINI, Procureur de la République de Cambrai.

I. Qu’est-ce que le service civique ?

Antoine BOILLEY

Monsieur Demuynck, vous avez été le rapporteur de la mission d’information sur la politique en faveur des jeunes. Vous avez également présenté la proposition de Loi relative au service civique.

Pourriez-vous nous exposer l’ambition et les objectifs du service civique ? Quels sont les premiers résultats de ce projet ?

Christian DEMUYNCK

Monsieur le Président du Sénat, Monsieur le Président de la Commission de la Culture, de l’Education et de la Communication, Mesdames et Messieurs les Elus, les Sénateurs, les Députés, Messieurs les Présidents, Mesdames et Messieurs, je suis très heureux d’être ici avec vous et de voir autant de jeunes.

Je suis venu ici pour vous donner envie de vous engager pour l’intérêt général.

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Rendez-vous du Sénat

Cambrai, le 18 novembre 2010 10

Nous pouvons nous interroger sur la raison pour laquelle c’est le Sénat qui s’empare de cette question. Il est coutume de dire que le Sénat est composé de personnes relativement âgées, qui, jeunes, n’ont connu ni problèmes d’emploi ni problèmes de logement. Pourtant, Jacques Legendre a créé ce centre universitaire. Le Président du Sénat a, quant à lui, souhaité que la jeunesse soit au cœur de notre réflexion en créant une mission commune d’information, à laquelle tous les sénateurs ont participé. Nous sommes d’ailleurs parvenus à dégager un certain consensus sur le service civique. La proposition de Loi relative à la création du service civique a été portée d’abord par le Sénateur Yvon Collin, puis par le Commissaire Martin Hirsch.

Le service miliaire ayant disparu, il n’existait plus de moment privilégié durant lequel des jeunes de milieux sociaux différents pouvaient se rencontrer. Le service civique doit permettre aux jeunes de 16 à 25 ans de se rencontrer.

Le service civique s’adresse plus particulièrement à trois catégories de jeunes.

Il s’adresse d’abord aux jeunes qui ont terminé leurs études et qui ont envie de servir l’intérêt général avant de s’engager dans la vie professionnelle. Le service civique leur permet d’enrichir leurs connaissances de la vie.

Le service civique s’adresse également aux jeunes qui n’ont pas encore défini leur projet professionnel. Durant le service civique, les jeunes peuvent réfléchir à leur avenir. Ils sont en outre accompagnés par un tuteur.

Le service civique s’adresse enfin aux 150 000 jeunes qui sortent du système éducatif sans savoir ni lire, ni écrire, ni compter. Selon la Loi, il faut essayer d’enrichir les connaissances de ces jeunes afin que ceux-ci puissent prétendre soit à une formation soit à un emploi. Ces jeunes sont en outre accompagnés non seulement par des tuteurs, mais également par Pôle Emploi.

Nous souhaitons que 10 % d’une classe d’âge, soit 70 000 ou 75 000 jeunes, puissent réaliser le service civique. Actuellement, seuls 3 000 jeunes s’engagent dans le service civique. Toutefois, en promouvant ce dispositif dans les différentes villes de France, nous constatons qu’énormément de jeunes sont intéressés.

Par ailleurs, le service civique présente trois avantages majeurs.

D’abord, les jeunes disposent, à l’issue de leur service, d’un certificat de service civique. Or, au cours d’une réunion à Clermont-Ferrand, le DRH de Michelin, a indiqué que, entre deux jeunes disposant de compétences identiques, il choisirait le jeune ayant réalisé le service civique.

En outre, un livret de compétences est délivré aux jeunes qui ont réalisé le service civique. Ce livret décrit les actions menées par les jeunes et peut ainsi être utilisé dans une démarche de validation des acquis de l’expérience.

Enfin, des indemnités sont versées aux jeunes réalisant le service civique. Une indemnité de 480 euros est versée par l’Etat. Une indemnité de 100 euros est versée par la structure accueillante, qui est soit une association agréée soit une collectivité territoriale. Une indemnité supplémentaire de 100 euros est enfin versée aux jeunes qui connaissent des difficultés particulières, notamment des problèmes de transport.

J’espère qu’un certain nombre d’entre vous accomplira le service civique.

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Rendez-vous du Sénat

Cambrai, le 18 novembre 2010 11

Antoine BOILLEY

Je cède la parole à Marie-Alice et à Thomas qui font partie des 3 000 premiers jeunes à s’être engagés dans le service civique.

Marie-Alice, pourrais-tu nous expliquer les raisons de ton engagement et les actions que tu mènes sur le terrain ?

Marie-Alice CANONNE

Bonjour à tous et merci de nous avoir donné la possibilité de témoigner devant autant de personnes.

Après mes études, je souhaitais faire une pause avant de m’engager dans la vie professionnelle. Le service civique m’a permis de servir l’intérêt général tout en disposant de temps pour réfléchir à mon avenir. En outre, dans l’association qui m’a recrutée, Unis-cité, j’ai pu travailler en équipe et bénéficier d’une aide dans mon orientation professionnelle.

Au sein d’Unis-cité, nous travaillons sur deux projets. Le premier projet, porté par Unis-Cité au niveau national, consiste à accompagner des familles dont le revenu est modeste dans l’adoption d’éco-gestes. Nous avons ainsi pour objectif d’aider les familles à réaliser des économies dans le respect de l’environnement. Le second projet, mené en partenariat avec le SAMU de l’Environnement, consiste à réaliser un kit de randonnée pédagogique afin de faire découvrir aux enfants leur environnement quotidien et les risques qui y sont présents.

Antoine BOILLEY

Thomas, comment as-tu eu connaissance du service civique. Pourquoi t’es-tu engagé dans ce service ?

Thomas DEWAMIN

Je souhaitais faire une pause avant d’entreprendre des études supérieures. Après le baccalauréat, j’ai entrepris des études d’anthropologie, mais celles-ci ne me convenaient pas. J’ai ainsi interrompu mes études et j’ai été recruté par Unis-Cité.

Antoine BOILLEY

Quelles sont tes missions ?

Thomas DEWAMIN

Je suis passeur de mémoire. J’accompagne des personnes âgées handicapées. Je travaille au sein du Centre Communal d’Action Sociale de Lambersart.

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Rendez-vous du Sénat

Cambrai, le 18 novembre 2010 12

Antoine BOILLEY

Je suppose que les personnes qui t’accompagnent t’aident à réfléchir sur ton projet professionnel.

Thomas DEWAMIN

Nous travaillons avec des éducateurs spécialisés et des assistantes sociales. Je pense m’orienter vers ces fonctions.

Antoine BOILLEY

Parles-tu du service civique à tes amis ?

Thomas DEWAMIN

Il est possible de s’engager auprès d’Unis-Cité, soit pendant neuf mois, à partir du mois d’octobre, soit pendant six mois, à partir du mois de janvier. J’ai parlé d’Unis-Cité à deux amis, qui se présenteront à la session de janvier.

Echanges avec le public

Christian DEMUYNCK

Les personnes qui ont déjà entendu parler du service civique pourraient-elles lever la main ?

Le nombre de mains levées est relativement modeste.

Willy LENGLET, Directeur d’un Centre Social pour l’Association Avenir Jeunes, à Caudry

Avenir Jeunes a obtenu la semaine dernière un agrément pour accueillir six jeunes dans le cadre du service civique. Le premier jeune que nous avons recruté est dans la salle.

Auparavant, nous avons recruté des jeunes dans le cadre du service civil volontaire. Il s’agit d’une expérience qui s’est avérée positive aussi bien pour les jeunes que pour la structure. En effet, les jeunes jouent un rôle à part entière dans l’association. Il est essentiel que des tuteurs s’investissent dans l’accompagnement des jeunes. Nous avons accueilli des jeunes diplômés et des jeunes non diplômés. Les jeunes ont estimé que cette expérience était enrichissante. Une fois que leur service est terminé, il faut toutefois penser à leur devenir. Il n’est pas possible de suivre une formation professionnelle pendant le service civique. Comment pouvons-nous accentuer davantage le suivi des jeunes, en particulier des jeunes non diplômés, à l’issue du service civique ?

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Rendez-vous du Sénat

Cambrai, le 18 novembre 2010 13

Christian DEMUYNCK

Les jeunes en difficulté ne doivent pas en effet être abandonnés à l’issue du service civique. Selon la Loi, les tuteurs doivent ainsi assurer un suivi des jeunes, à travers l’organisation de rencontres avec Pôle Emploi ou avec les Missions locales, afin d’identifier des possibilités de stage. En outre, les associations doivent permettre aux jeunes de découvrir des métiers, mais elles n’ont pas vocation à proposer aux jeunes une formation professionnelle.

Christophe, engagé dans le service civique

J’ai intégré le service civique hier au sein d’Avenir Jeunes. Je dispose d’un diplôme social, mais je n’ai pas encore trouvé d’emploi dans ce domaine. Le service civique constitue pour moi une première expérience professionnelle.

Antoine BOILLEY

Monsieur le Sénateur, le service civique n’est-il pas un dispositif qui se substitue au dispositif des emplois jeunes ? En outre, les jeunes en service civique n’occupent-ils pas finalement des emplois ?

Christian DEMUYNCK

Absolument pas. Le service civique n’est pas un emploi. La Loi interdit d’ailleurs que les missions affectées à une personne en service civique correspondent à des missions attachées à un poste qui a été supprimé l’année précédente.

Antoine BOILLEY

Les années effectuées dans le service civique ouvrent-elles des droits à la retraite ?

Christian DEMUYNCK

Absolument.

Geneviève MANNARINO, élue à la Ville de Valenciennes, en charge de la jeunesse

La ville de Valenciennes accueille Unis-Cité. Les jeunes d’Unis-Cité sont repérables dans la mesure où ils sont vêtus d’habits orange. Depuis deux ans et demi, la population nous adresse des remarques positives sur les jeunes, qui sont ainsi considérés actifs et compétents.

Le service civique change le regard de la société sur la jeunesse. Je souhaite ainsi que l’ensemble des villes accueille Unis-Cité. La présence de nombreux jeunes au sein d’une ville est une chance.

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Rendez-vous du Sénat

Cambrai, le 18 novembre 2010 14

Antoine BOILLEY

Que votre appel soit entendu et relayé !

Jean-Louis DELAIS, Conseiller Municipal de la Ville de Cambrai, retraité de l’Education nationale

Vous présentez les jeunes comme une catégorie d’handicapés qu’il faut aider. Je considère, quant à moi, qu’il existe, au sein de la population, différentes catégories, toutes porteuses de richesses.

Par ailleurs, les conditions financières assorties au service civique ne me semblent pas optimales.

Christian DEMUYNCK

Une subvention de 480 euros est versée par l’Etat ; une subvention de 100 euros, par la structure d’accueil. Par ailleurs, l’Etat verse à la structure d’accueil 100 euros. Le coût est ainsi nul pour les associations, lesquelles peuvent, par ailleurs, offrir aux jeunes des tickets-restaurants.

En outre, il est important que les collectivités territoriales s’engagent dans la mise en œuvre de ce dispositif, dans la mesure où elles sont en mesure de recruter de nombreux jeunes et où elles disposent de compétences de technicité et d’encadrement.

Jacques LEGENDRE

Nous ne souhaitons absolument pas stigmatiser les jeunes. Il convient cependant de reconnaître que, dans les conditions actuelles, il n’est pas aisé pour un jeune de 20 ans d’entrer dans la vie professionnelle. Il est ainsi essentiel d’aider les jeunes.

Jonathan

Je m’adresse aux jeunes engagés dans le service civique. Quelles sont vos conditions de vie ?

Thomas DEWAMIN

J’ai quitté le domicile de mes parents il y a quatre ans. Après avoir interrompu mes études universitaires et rejoint Unis-Cité, j’ai dû retourner vivre chez mes parents.

Par ailleurs, les chèques-restaurants que nous recevons ne s’ajoutent pas à la subvention de 100 euros versée par l’association ; ils s’y substituent. A Lille, il est difficile de trouver un appartement dont le loyer est inférieur à 330 euros. Il ne reste ainsi que 110 euros pour vivre !

Les conditions financières ne sont ainsi pas très favorables. Nous espérerons que les collectivités locales se mobiliseront pour les améliorer.

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Rendez-vous du Sénat

Cambrai, le 18 novembre 2010 15

Christian DEMUYNCK

Nous nous sommes beaucoup battus pour que l’indemnité versée aux jeunes soit plus élevée, mais les contraintes budgétaires sont importantes.

Cependant, 80 % des jeunes ne percevaient aucun revenu avant de s’engager dans le service civique. L’indemnité versée permet tout de même aux jeunes de disposer d’un revenu.

Par ailleurs, j’ai rencontré à Angers des jeunes. Ces derniers ont réussi à quitter le domicile familial. Ils vivent en colocation et sont indépendants.

Antoine BOILLEY

J’ai crû comprendre que vous avez exercé une certaine pression auprès du gouvernement pour qu’il améliore les dispositions du service civique. Vous engagez-vous à continuer à exercer une pression dans ce sens auprès de Roselyne Bachelot ou de Jeannette Bougrab, nouvelle Secrétaire d’Etat à la jeunesse et à la vie associative ?

Christian DEMUYNCK

Nous sommes tout de même parvenus à ce que le gouvernement dégage un budget de 40 millions d’euros pour le service civique. Il était prévu de faire une campagne de publicité importante au mois de juin. Finalement, une campagne de faible ampleur a été effectuée au mois d’octobre. Elle n’est pas suffisante. Nous mettons alors en avant le fait que des spots télévisés ont déjà été tournés. Il faut désormais les diffuser afin que le nombre d’engagés dans le service civique se rapproche de notre objectif, qui est de 10 000. Par ailleurs, le Président de la République s’est engagé à poursuivre le dispositif et à y consacrer des moyens afin que le maximum de jeunes puisse y participer. Nous continuerons cependant à exercer une certaine pression auprès de la Ministre de la Jeunesse.

II. Le sens de l’engagement

Antoine BOILLEY

Au-delà du service civique, les jeunes s’engagent au quotidien dans les champs politique, associatif et syndical pour faire évoluer la société. Le taux d’abstention des jeunes aux élections politiques ne peut refléter leur engagement.

Pourriez-vous nous dresser un état des lieux de l’engagement des jeunes ? La jeunesse de 2010 est-elle plus engagée que celle de 1990 ?

Christian DEMUYNCK

Oui. Elle l’est. Les jeunes expriment leur volonté de servir l’intérêt général, de se rendre à l’étranger, notamment en Afrique, pour aider les personnes en difficulté. Je stigmatise ainsi la jeunesse par son engagement et par ses qualités.

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Rendez-vous du Sénat

Cambrai, le 18 novembre 2010 16

Antoine BOILLEY

La Croix-Rouge déclare que 20 % de ses bénévoles ont moins de 27 ans.

Christian DEMUYNCK

Les jeunes souhaitent s’investir dans la société. Il faut ainsi leur en donner les moyens. Le service civique en est un.

Jacques LEGENDRE

Il est dommage à 20 ans de n’avoir pas trouvé l’occasion de porter un idéal. J’ai eu la chance de partir en coopération en Afrique Noire. J’y ai enseigné pendant deux ans. Ce fut une expérience passionnante.

Nous souhaitons que les jeunes s’engagent dans la vie sociale et politique. Il s’agit là du rôle d’un citoyen.

Antoine BOILLEY

Monsieur Larcher, des jeunes ont exprimé récemment leur opposition à la réforme des retraites devant le Palais du Luxembourg. La mobilisation des jeunes contre le projet de réforme symbolise-t-elle un regain démocratique ?

Gérard LARCHER

L’engagement des jeunes est essentiel. Je les invite à faire irruption dans le débat démocratique.

J’appartiens à la génération née entre 1948 et 1951. Cette génération s’est fortement engagée. A l’âge de 17 ans, j’étais moi-même engagé dans l’Union Démocratique du Travail. Je ne croyais pas au principe de la lutte des classes, mais je considérais que le cœur de la société était l’avenir des hommes.

Je souhaite en outre insister sur le fait que le service civique n’est pas un emploi bon marché pour les collectivités.

Le taux de chômage moyen des jeunes de moins de 25 ans dans les pays européens développés est le double du taux de chômage moyen national. J’ai été Ministre du Travail pendant trois ans. Mon plus grand échec est de ne pas avoir trouvé le moyen de réduire le taux de chômage des jeunes.

La formation doit permettre non seulement d’éveiller, mais également d’acquérir une qualification. Il faut rompre les barrières entre les formations professionnelles et les autres formations. Réfléchissons à ce que font les Allemands. Valorisons les relations avec les entreprises. Les jeunes doivent s’exprimer et être exigeants. J’ai été moi-même Président d’un syndicat étudiant parce que je souhaitais que la société évolue. L’expression des jeunes participe de la démocratie.

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Rendez-vous du Sénat

Cambrai, le 18 novembre 2010 17

Je souhaite rendre hommage aux partenaires sociaux. Il existe plusieurs niveaux de démocratie. La démocratie parlementaire arbitre après que des débats se sont tenus.

Antoine BOILLEY

Anne Muxel, sociologue, compare mai 68 à mai 2010. Elle explique que les jeunes se mobilisaient auparavant plutôt sur des idéaux. Aujourd'hui, ils se mobilisent plutôt sur des problèmes très concrets. Génération Précaire s’intéresse aux stages et à l’emploi des jeunes ; Jeudi Noir, au logement ; Jeunesse Ouvrière Chrétienne, à l’insertion.

Gérard LARCHER

Les préoccupations des jeunes sont en effet devenues très concrètes. Les jeunes de ma génération étaient des nantis. Nous nous intégrions aisément dans la vie active. Par ailleurs, la génération de nos parents avait pansé les plaies de la guerre. Nous devions réfléchir ainsi à un certain nombre d’idéaux et inventer un monde différent.

Le problème du logement des jeunes est complexe, en particulier dans certaines grandes métropoles. La question de l’accueil des jeunes travailleurs se pose. Actuellement, un jeune en formation par alternance chez un artisan est moins bien traité qu’un jeune étudiant. Il s’agit là d’une discrimination que nous devons analyser.

Antoine BOILLEY

Christelle Briquet et Juliette Dupont, quel est le rôle de l’association Amitié Burkina Faso et des jeunes en son sein ?

Juliette DUPONT

Les jeunes s’investissent dans notre association depuis six ans. Ils nous ont d’abord aidés à organiser notre soirée annuelle. Ensuite, ils ont voulu s’investir en Afrique et sont venus nous demander des conseils pour la mise en place de leur projet. Ils ont travaillé sur leur projet pendant deux ans. Ils ont collecté des livres pour les enfants du Burkina Faso.

Antoine BOILLEY

Vous ne disposez d’aucun problème pour recruter des jeunes.

Juliette DUPONT

En effet. Les jeunes sont d’ailleurs de plus en plus nombreux au sein de notre association.

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Rendez-vous du Sénat

Cambrai, le 18 novembre 2010 18

Christelle BRIQUET

Ils sont en outre dynamiques, très spontanés et acteurs de leur projet. Ils organisent des ventes, des brocantes pour financer leurs voyages et leurs projets à Kantchari. De plus, ils sont tournés vers les jeunes africains.

Antoine BOILLEY

Les jeunes sont ainsi sensibles aux problématiques de solidarité entre le Nord et le Sud.

Echanges avec le public

Delphine DERUMAUX, étudiante en 3e année de licence de droit

Le taux de chômage des jeunes n’est-il pas lié principalement à l’absence de volonté des entreprises de former des diplômés ?

Gérard LARCHER

Le chômage des jeunes est un problème complexe.

Six mois après la sortie du système éducatif, 80 % des diplômés de la formation en alternance obtiennent un emploi en CDI ; 90 % obtiennent un emploi quelle que soit la nature du contrat.

Dans notre pays, la formation en alternance a été d’abord essentiellement portée par l’artisanat et les petites et moyennes entreprises. Des rapports ont été produits, en 2004 et en 2009, notamment par Henri Proglio, sur la formation en alternance. Les partenaires sociaux devront réfléchir à la manière dont les moyennes et les grandes entreprises pourraient être des acteurs plus importants dans la formation en alternance.

Par ailleurs, il n’est pas nécessairement simple pour les entreprises de former des jeunes. Nous devons ainsi travailler sur les passerelles entre la formation et l’entreprise. Les entreprises ne doivent pas, dans le monde de la formation, être considérées comme des adversaires, mais comme des partenaires qui créent de la richesse et des emplois.

Antoine BOILLEY

Monsieur le Procureur de la République de Cambrai, en quoi l’engagement citoyen des jeunes peut être un outil de prévention, voire d’aide à l’insertion ?

Jean-Philippe VICENTINI

Merci à Monsieur le Président du Sénat et au Sénateur Monsieur Legendre de me permettre de dire quelques mots au sujet de personnes ayant eu des incidents de parcours.

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Rendez-vous du Sénat

Cambrai, le 18 novembre 2010 19

Mon intérêt personnel est que ma vie professionnelle soit la plus tranquille possible. Je souhaite ainsi que le moins de personnes possible viennent dans mon tribunal.

Il convient alors de travailler sur l’absentéisme scolaire. Nous avons signé, il y a cinq ans, une convention pour lutter contre l’absentéisme scolaire. Dans ce domaine, les textes actuels ne nous aident pas dans la mesure où ils ne permettent qu’une réponse lente à ce problème, alors qu’il est nécessaire d’agir rapidement. Nous avons ainsi mis en place de nouveaux moyens pour détecter l’absentéisme scolaire. En particulier, nous avons demandé aux policiers, aux gendarmes et aux élus de nous signaler le plus rapidement possible les jeunes qui traînent dans les rues tard le soir. Nous faisons un point sur leur situation éducative. Le cas échéant, nous les intégrons, en lien avec les juges des enfants ou avec le Conseil Régional, dans le système éducatif.

Par ailleurs, il faut que la peine des personnes ayant commis des actes de délinquance devienne un moteur de l’insertion professionnelle. Tous les acteurs doivent y travailler. A Cambrai, nous sommes en train de mettre en place des travaux d’intérêt général, en lien avec Pôle Emploi. Ces travaux permettront aux jeunes de s’inscrire dans une formation professionnelle.

Enfin, pour les personnes en grande difficulté, c’est-à-dire des personnes qui sortent de prison, qui n’ont pas de diplôme, pas nécessairement de logement et dont la santé peut être précaire, nous avons mis en place un suivi renforcé. Des moyens sont ainsi mobilisés pour réinsérer ces personnes, les soigner et les loger. Après deux ans de suivi, trois personnes sur quatre n’ont pas récidivé. Une journée en maison d’arrêt coûte 75 euros. Le coût d’un séjour d’une semaine en maison d’arrêt est équivalent au coût de suivi d’une personne sortant de prison pendant 18 mois. Nous comprenons ainsi l’intérêt économique, citoyen et humain de la mise en place de tels projets.

Nous avons encore des progrès à réaliser dans ce domaine, mais des synergies ont été mises en place entre la Justice, les entreprises, le MEDEF et les collectivités territoriales pour que l’insertion des jeunes en difficultés dans la société soit une priorité.

De l’orientation à l’insertion

Table ronde

Participent à la table ronde :

Jean-Robert PITTE, Délégué à l’information et à l’orientation auprès du Premier ministre ; Jacques LEGENDRE, Président de la Commission de la Culture, de l’Education et de la Communication du Sénat; Jonathan HERENGUEL, Cadre dans une Entreprise de transport (NETS) ; Claude LANCELLE, Présidente de l’Institut des Sciences de l’Université de Valenciennes, Michel QUERE, Directeur de l’évaluation, de la prospective et de la performance (DEPP) au Ministère de l’Enseignement supérieur et de la Recherche ;

Pascal CHARVET, Directeur général de l’Office national d’information sur les enseignements et les professions (ONISEP) ; Nathalie DROBINOHA, Directrice de la formation (Formatech) ;

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Rendez-vous du Sénat

Cambrai, le 18 novembre 2010 20

François-Xavier VILLAIN, Député-Maire de Cambrai et Président de la mission locale du Cambrésis.

Antoine BOILLEY

Le taux d’échec en première et en deuxième année d’études universitaires est très important. 150 000 étudiants sortent par an du système éducatif sans diplôme. L’âge moyen d’entrée sur le marché du travail est de 27 ans. Le taux de chômage des jeunes est de 23 %. 34 % des actifs âgés entre 15 et 29 ans occupent un emploi précaire, contre 9 % pour les actifs de 30 à 49 ans.

Dans ce contexte, le gouvernement a réformé le lycée et les universités. Monsieur Pitte et Monsieur Charvet, pouvez-vous nous expliquer ces réformes et vos missions ?

Jean-Robert PITTE

57 % des actifs âges de 50 à 59 ans souhaitent partir en retraite le plus tôt possible. Ce pourcentage n’est que de 31 % aux Pays-Bas. Beaucoup de français ne se plaisent pas ainsi dans leur vie professionnelle. Le problème d’orientation est la cause majeure de cette insatisfaction. 8 000 organismes d’orientation existent pourtant sur le territoire. Ces structures sont très variées. Il existe ainsi des CIO, des CIDJ, des Maisons de l’Emploi, des Cités de l’Entreprise… Certains organismes dépendent de l’Etat ; d’autres, des collectivités territoriales. Le système d’orientation est très complexe et peu visible pour les usagers, en particulier pour les personnes de milieu défavorisé.

Dans le cadre de la Loi, votée il y a un an, sur l’orientation et la formation professionnelle tout au long de la vie, j’ai reçu la mission de coordonner et d’ordonner ces différentes structures.

Un service dématérialisé sera ainsi mis en place, à travers la mise à disposition d’un numéro unique national et d’un site national. Ce service délivrera une première réponse aux questions des usagers. De tels organismes exercent déjà une telle mission (la plateforme de l’ONISEP, la plateforme de Fongecif), mais l’information est cependant fractionnée.

En outre, nous allons essayer de coordonner les lieux d’accueil et de créer des conventions entre les différents organismes. Des lieux uniques, dénommés POM (Pôles Orientations Métiers) seront ainsi créés. Les Cités des Métiers regroupent déjà différents organismes.

Le terme métier est un terme très important. L’objectif de la formation n’est pas d’obtenir un diplôme, mais d’acquérir des compétences, en lien avec un métier. Les jeunes ont besoin de mieux connaître les métiers. Il existe actuellement des émissions sur les métiers, notamment sur les métiers de boucher et de cuisinier. Il est essentiel que ces métiers soient mis en valeur.

Les jeunes doivent pouvoir choisir leur métier, en fonction non seulement de leur goût et de leur idéal professionnel, mais aussi en fonction de leurs capacités et du marché de l’emploi.

Pascal CHARVET

A la demande du Ministre de l’Enseignement supérieur et de la Recherche et du Ministère de l’Education Nationale, l’ONISEP a été chargé de travailler sur la mise en place d’une nouvelle

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Rendez-vous du Sénat

Cambrai, le 18 novembre 2010 21

culture commune de l’orientation. La structure des organismes est en effet très complexe à appréhender pour les adolescents.

Les plateformes en ligne de l’ONISEP permettent aux adolescents et éventuellement aux adultes de téléphoner, l’ONISEP occupant davantage le champ de la formation initiale. Le pourcentage de contacts téléphoniques est de 16 %. Le pourcentage de contacts par tchat est de 57 %. Le nombre de contacts par mail est également important.

Ce sont surtout les lycéens et les collégiens qui nous contactent par tchat ; les étudiants nous contactent surtout par mail. Grâce au tchat, une nouvelle catégorie de la population nous contacte.

En outre, de manière à ce qu’il n’existe aucune rupture entre la prise de contact et l’entretien, des plateformes régionales ont été mises en place, notamment à Amiens, à Nantes, à Paris, à Créteil, à Grenoble, à Bordeaux, à Fort-de-France. Les plateformes envoient les appels vers les missions locales, les CIO… Grâce aux plateformes, nous constatons que se dessine une chaîne de technologie au service de l’humain. L’outil ne permettra pas cependant de régler l’ensemble des problèmes.

I. Démocratiser l’enseignement supérieur : l’exemple du centre universitaire de Cambrai

Antoine BOILLEY

Madame la Présidente, quelle est l’origine du projet de création de l’Université de Cambrai ?

Claude LANCELLE

C’est en témoin privilégiée que j’interviens ce matin. En effet, associée dès 1986 aux démarches engagées par Monsieur Legendre, je n’ai cessé depuis, en tant qu’Elue de Cambrai, Administrateur de l’Université de Valenciennes et du Hainaut-Cambrésis et Présidente de l’Institut des Sciences, de travailler à leur réalisation.

Dans les années 80, avant la reconnaissance de l’Université de Valenciennes, le Nord-Pas-de Calais, région densément peuplé, ne comptait qu’un seul grand pôle de formation, Lille.

Un rapport de l’IFRESI, daté de 1985, met en évidence l’importance de la proximité des lieux de formation dans l’accès à l’enseignement supérieur. Ainsi, 20 % des personnes résidant à proximité des lieux de formation y accèdent, contre 4,5 % pour les personnes du Cambrésis.

Parallèlement, l’accroissement du nombre d’étudiants dans les structures traditionnelles pose un problème d’accueil et conduit à la création d’antennes dans les villes moyennes.

Jacques Legendre saisira cette opportunité pour permettre à l’ensemble des jeunes de gravir les premières marches de l’enseignement supérieur, à travers l’ouverture de DEUG dans différentes disciplines. Il obtient la création d’une antenne universitaire à Cambrai. La première rentrée universitaire à Cambrai s’effectuera en 1988, dans des bâtiments provisoires. Le Centre Universitaire La Forêt sera inauguré en 1991 dans une ancienne blanchisserie industrielle, réhabilitée par l’Etat et par la Ville. Dès la création de ce centre, la Communauté d’agglomération inscrit dans ses compétences le soutien au développement de l’enseignement supérieur. Une

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Rendez-vous du Sénat

Cambrai, le 18 novembre 2010 22

collaboration efficace s’instaure avec les universités mères. Cette coopération permettra l’ouverture de filières professionnelles, de formations en continue et en apprentissage et enfin de masters en agroalimentaire.

Antoine BOILLEY

Grâce à toutes ces initiatives, un nombre important de jeunes a pu accéder aux études supérieures.

Claude LANCELLE

En effet. A la rentrée 1988, 120 étudiants se répartissaient dans trois filières. Actuellement, près de 800 étudiants se répartissent dans 17 filières, générales et professionnelles.

Antoine BOILLEY

Merci Madame la Présidente.

Jonathan, pour quelle raison as-tu réalisé tes études au Centre universitaire. Quels sont les liens que tu as gardés avec ce centre ?

Jonathan HERENGUEL

J’ai obtenu une licence professionnelle en management en 2006. J’ai effectué un stage dans une entreprise de transport du Cambrèsis avant d’y être recruté. Je suis désormais cadre et deviendrai très prochainement investisseur.

Antoine BOILLEY

L’insertion professionnelle des titulaires de cette licence est de qualité.

Jonathan HERENGUEL

En effet, 90 % de mes amis ont trouvé un emploi.

Antoine BOILLEY

Michel Quéré, quel enseignement tirez-vous des initiatives locales ? En outre, la volonté du gouvernement de créer des grands pôles d’excellence ne risque-t-elle pas de remettre en cause les initiatives locales ?

Michel QUERE

J’ai été Directeur du Centre d’Etudes et de Recherches sur les Qualifications, centre qui publie des travaux de qualité sur l’insertion professionnelle des jeunes. Toutes les enquêtes d’insertion

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Rendez-vous du Sénat

Cambrai, le 18 novembre 2010 23

montrent que l’accès à l’emploi reste le diplôme. En forçant le trait, l’accès au salaire est le diplôme du supérieur.

L’insertion des jeunes diplômés de l’enseignement supérieur est certes devenue relativement difficile. Ceci étant, les diplômés ne sont pas les plus démunis pour accéder à l’emploi. Je suis préoccupé en revanche par l’insertion des jeunes non diplômés. Il est ainsi nécessaire de permettre à ces jeunes d’obtenir un diplôme. Il faut alors réfléchir à l’articulation entre l’enseignement secondaire, qui fait actuellement l’objet de réformes, et l’enseignement supérieur, et notamment au rôle des filières courtes de l’enseignement supérieur. Le Ministère de l’Enseignement supérieur et le Ministère de l’Education nationale doivent travailler ensemble sur cette articulation et doivent prendre en compte la question de l’emploi. Par ailleurs, les formations en alternance permettent d’améliorer les conditions d’entrée sur le marché du travail.

II. L’excellence de l’enseignement professionnel

Antoine BOILLEY

Monsieur le Député-Maire, votre capacité à agir au niveau local en lien avec le monde de l’Entreprise a-t-elle été le facteur clé de réussite ? Quelle est en outre votre vision prospective ?

François-Xavier VILLAIN

J’interviendrai davantage en tant que Président de la mission locale qu’en tant que Député-Maire.

La mission locale du Cambrésis suit 4 100 jeunes. 50 % de ces jeunes n’ont aucun diplôme. Par ailleurs, dans le Cambrésis, le taux de titulaires d’un diplôme équivalent à bac+2, parmi les jeunes de 16 à 25 ans, est de sept points inférieur au taux national.

En outre, la mission locale ne peut fonctionner que si nous parvenons à tisser des partenariats. Je profite de la présence de nombreux parlementaires pour affirmer qu’il faut sanctuariser les moyens des missions locales. Cette année, l’Etat a fait un effort considérable dans le cadre du plan de relance. Le budget affecté à la mission locale du Cambrésis est de 2 millions d’euros. L’année prochaine, le budget sera sans doute de 1,6 million d’euros. Le soutien des élus locaux est également indispensable. Je salue et remercie les Maires du Cambrésis ici présents pour leur cotisation.

La mission locale a travaillé, aux côtés du Procureur, sur l’insertion des jeunes sortants de prison. Si nous réussissons à insérer professionnellement ces personnes, notre expérience constituera un formidable laboratoire pour les autres territoires.

L’initiative locale est essentielle. La coopération des différents acteurs autour de l’université et des problématiques de l’emploi est fondamentale.

Antoine BOILLEY

Merci.

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Rendez-vous du Sénat

Cambrai, le 18 novembre 2010 24

Je cède la parole à Nathalie Drobinoha.

Nathalie DROBINOHA

Je suis directrice de Formatech, centre de formation de la chambre de commerce du Cambrésis. Notre objectif est l’emploi. Nous travaillons avec l’ensemble des partenaires du bassin. Dans les villes moyennes, les différents acteurs peuvent travailler en commun. Nous travaillons ainsi avec les collectivités territoriales, la mission locale, Pôle Emploi, et bien sûr les entreprises. Notre objectif est de mettre en cohérence l’offre et la demande de travail. En particulier, une zone d’activité a été implantée et continue à se développer sur le territoire. La chambre de commerce travaille ainsi avec les nouvelles entreprises pour qu’elles puissent bénéficier dès leur arrivée sur le territoire d’une main d’œuvre qualifiée.

Echanges avec le public

Alexis DEWARDE, administrateur de l’organisation étudiante représentative promotion et défense des étudiants

J’ai eu l’occasion de travailler avec des réseaux d’association d’étudiants et de participer au groupe de travail sur l’orientation dans le cadre de la Commission Hirsch. Le portail unique est considéré comme une solution permettant de résoudre le problème de l’asymétrie d’information. Cependant, la mise en place de ce portail créé un nouveau problème, le problème de la responsabilisation. Les jeunes ne sont en effet pas souvent acteurs de leur orientation.

Le dispositif de l’admission post-bac ne pourrait-il être généralisé afin de résoudre les deux problèmes évoqués ?

Jean-Robert PITTE

Il faut que l’ensemble des établissements d’enseignement supérieur acceptent de recevoir les étudiants et les lycéens. Je pense d’ailleurs que cela devrait être obligatoire. Par ailleurs, il faut également que les établissements du secondaire jouent le jeu, ce qui n’est pas toujours le cas, certains d’entre eux souhaitant que les bons élèves intègrent leurs classes préparatoires plutôt que d’autres établissements. Des cloisons subsistent, mais le travail en commun mené par les différents organismes de formation devrait permettre d’améliorer la situation. Les recteurs ont en outre un très grand rôle à jouer dans ce domaine.

Par ailleurs, il est essentiel que les jeunes s’emparent eux-mêmes de la question de l’orientation.

Hugo BARBEY, représentant étudiant en troisième année de droit et animateur en centre social

Les étudiants Cambrésiens sont très heureux d’avoir entendu parler Monsieur Legendre de la démocratisation de l’enseignement supérieur.

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Rendez-vous du Sénat

Cambrai, le 18 novembre 2010 25

En outre, pour quelle raison l’engagement des étudiants dans les associations n’est-il pas pris en considération ?

Enfin, en tant qu’animateur, je rencontre quotidiennement des jeunes de 13 à 14 ans qui ne souhaitent plus aller à l’école. Les ateliers périscolaires ne pourraient-ils devenir des ateliers de découverte des métiers ?

Jacques LEGENDRE

Merci de ces propos. La sensibilisation à l’orientation doit en effet commencer tôt dans le parcours des jeunes. Certains jeunes peuvent en outre choisir de préparer un métier dès le lycée, sachant que des études pourront toujours être reprises ultérieurement dans le cadre de la formation tout au long de la vie.

En tout état de cause, dès le collège, il faut donner l’opportunité aux jeunes de découvrir les métiers. L’Education nationale s’est d’ailleurs lancée dans cette voie.

Marie-Jeanne PHILIPPE, Rectrice

C’est en effet le sens des réformes menées dans l’Education nationale. Un parcours de découverte des métiers a été mis en place au collège. En outre, la réforme du lycée se traduit par une amélioration du processus d’orientation de la seconde à la terminale.

Pascal CHARVET

Nous assistons désormais à un changement de culture dans le domaine de l’orientation, à travers notamment la mise en place de parcours de découverte des métiers et des formations. Des actions dans le domaine de l’orientation se mettent en place dès la classe de troisième. En outre, au lycée, des tutorats, ainsi qu’un accompagnement personnalisé sont prévus afin d’aider les adolescents à être acteurs de leur orientation.

Par ailleurs, un outil, piloté par les recteurs, est désormais disponible dans plus de 2 000 établissements. Il s’agit du passeport orientation / formation. Ce passeport intégrera un volet décrivant les compétences non scolaires.

Amadou HAMAR, chef d’entreprise de transport et enseignant vacataire

Nous comptons beaucoup de classes de BTS dans le Cambrésis. Je souhaite que les chefs d’établissement ouvrent leurs portes aux étudiants afin que ceux-ci promeuvent l’Université.

Par ailleurs, les étudiants ont parfois des difficultés à trouver un stage. Quatre étudiants en licence professionnelle ont ainsi récemment abandonné leurs études faute de stage. Que pouvons-nous faire pour que chaque étudiant puisse effectuer un stage ?

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Rendez-vous du Sénat

Cambrai, le 18 novembre 2010 26

Gérard LARCHER

Je salue l’arrivée de Marc-Philippe Daubresse.

Le problème des stages, du tutorat et de l’accueil des jeunes en entreprise est en effet un facteur limitant à la formation en alternance. En tant que législateurs, nous devons réfléchir à la question d’une réelle ouverture des entreprises. Nous devons réfléchir à la manière de contractualiser l’entrée dans l’emploi.

Conclusion

Antoine BOILLEY

Nous accueillons Madame Létard.

Monsieur Larcher, dans la mesure où vous êtes attendu par France 3, nous vous proposons de nous livrer dès maintenant votre conclusion.

Gérard LARCHER

Saluons Valérie Létard, qui porte une responsabilité majeure dans le Valenciennois.

Nous avons mis en évidence l’existence un certain nombre de clichés, selon lesquels la jeunesse est moins porteuse d’espoir ou moins imaginative. Ces clichés n’ont pas lieu d’être.

Les jeunes sont engagés et mobilisés dans la société. Le service civique constitue un des moyens leur permettant de prouver leur volonté d’engagement. En outre, en aucun cas, le service civique ne constitue un emploi de substitution.

Nous avons parlé de l’école. Parmi les talents des cités, que nous récompensons chaque année au Sénat, un jeune m’a signalé qu’aucune chance ne lui avait été donnée, personne ne lui ayant expliqué l’importance de l’école. Nous devons ainsi faire de la lutte contre l’absentéisme scolaire un enjeu politique. La question de l’absentéisme est encore complexe, dans la mesure où nous nous préoccupons également du respect de la situation familiale. Un problème d’articulation entre les libertés collectives et les libertés individuelles se pose toujours. Monsieur le Procureur, j’ai bien reçu votre message cependant. Nous devons soutenir les familles, y compris en s’y substituant un temps, pour accompagner les jeunes.

Par ailleurs, nous avons déjà réfléchi, avec Jean-Louis Borloo, au problème de l’orientation. Nous ne sommes pas parvenus cependant à trouver un système efficace d’orientation, même si des moyens importants ont été mis en œuvre. Tous les territoires ne connaissent pas les mêmes difficultés. Je suis le Secrétaire général de la mission locale du Sud Yvelines. Dans ce territoire, le taux de chômage des jeunes est inférieur à 10 %.

Quand nous entendons que, sur 4 000 jeunes, 2 000 n’ont aucun diplôme et que trois quarts des étudiants inscrits en première année quittent l’université sans diplôme, nous devons nous interroger sur les questions de l’orientation et de l’accompagnement. Nous avons encore beaucoup de difficultés à faire tomber les cloisons. En outre, le problème ne réside pas dans l’insuffisance des

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Rendez-vous du Sénat

Cambrai, le 18 novembre 2010 27

moyens, mais dans l’efficacité de la dépense publique. Sur le sujet de l’orientation, les jeunes doivent aussi être l’aiguillon de l’exigence. Des mesures ont été mises en œuvre depuis deux ans, il faut désormais qu’elles s’inscrivent dans la continuité. La question de l’orientation est un enjeu national. Le taux actuel de chômage des jeunes est inacceptable.

Je rends hommage à Marc-Philippe Daubresse, qui a mis en place le principe de laboratoire territorial des politiques de la jeunesse.

Je pense qu’il nous faut simplifier et clarifier notre politique de la jeunesse. Cette dernière doit être en effet comprise et partagée. Il faut ainsi permettre à tous les jeunes d’accéder au portail.

Par ailleurs, la jeunesse ne doit pas être considérée comme une catégorie particulière de la population. De ce fait, la politique de la jeunesse ne doit pas être très différente de la politique générale.

Les thèmes successifs des rendez-vous du Sénat (le pacte social, la ruralité, la jeunesse) délivrent un message. Dans une région comme celle-ci, composée de 30 % de jeunes, la problématique de la jeunesse ne peut être traitée par des moyens accessoires. Nous devons considérer que les jeunes sont des citoyens à part entière. Ils doivent pouvoir s’exprimer. En outre, nous devons être en capacité de les écouter non pas de manière condescendante, mais de manière participative.

Nous sommes venus ce matin vous écouter. Faites-nous part de vos observations et de vos attentes. Le Sénat n’est pas une assemblée coupée de la société. Nous sommes élus par les élus du territoire, mais notre responsabilité, aux travers des élus territoriaux, est de représenter l’ensemble des citoyens. Notre rôle est peut-être de poser des questions de fond, qui ne trouvent pas de réponses depuis des décennies.

Merci au Cambrésis de nous avoir permis de partager sur la jeunesse. J’ai eu pendant trois ans l’honneur d’être au gouvernement. Il me reste comme une blessure le fait que le taux de chômage des jeunes est toujours plus de deux fois supérieur au taux de chômage national.

Nous avons un temps pensé que les seniors sur le départ seraient remplacés par des jeunes. Ce n’est pas vrai. En revanche, la présence de seniors tuteurs donne des chances aux jeunes. En outre, les rapports sociaux se modifient. Nous sommes encore à l’âge de l’adolescence dans le dialogue social, mais je crois beaucoup à ce qui est en train de s’engager avec les partenaires sociaux. Le sujet des jeunes et le sujet des seniors sont des sujets majeurs. Merci à Cambrai de nous avoir aidé à les faire mûrir.

Marc-Philippe DAUBRESSE, ancien Ministre, Député du Nord, Maire de Lambersart

Monsieur le Président, Mesdames et Messieurs les Elus, Mesdames, Messieurs, j’ai un peu de scrupules à parler à la suite de Monsieur Larcher. Je ne suis que le numéro deux d’un grand parti politique, alors que Monsieur Larcher est le deuxième personnage de l’Etat.

N’étant plus Ministre de la jeunesse, ma parole sera plus libre. Je suis heureux que le Président de la République ait pris en considération une note que je lui avais adressée. Je lui indiquais que l’organisation actuelle du Ministère de la jeunesse n’était pas satisfaisante. Il s’agissait en effet d’une organisation transversale qui ne permettait pas au Ministère d’imprimer sa politique. Lorsque Gérard Larcher, Jean-Louis Borloo et moi-même travaillions au Ministère de la Cohésion sociale,

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Rendez-vous du Sénat

Cambrai, le 18 novembre 2010 28

nous avons pu impulser une dynamique forte sur le logement, l’emploi et l’égalité des chances dans la mesure où nous disposions d’un portage politique fort. Il était souhaitable que la jeunesse soit également rattachée à un portage politique fort. Il est assez cohérent que la jeunesse soit rattachée à l’Education nationale. La plupart des problématiques liées à la jeunesse doivent en effet se traiter très en amont, c’est-à-dire au moment de l’éduction, de la formation et de l’orientation.

Beaucoup de sénateurs sont réunis à l’initiative de Jacques Legendre que je remercie. Je regrette en outre qu’il n’y ait plus de Ministres du Nord au sein du gouvernement.

Les sénateurs ont joué un rôle important dans la politique de la jeunesse. C’est en effet au Sénat que le service civique s’est inventé et que de nombreuses initiatives ont été prises. Je salue d’ailleurs l’action déterminante du sénateur Demuynck dans ce domaine.

Comme l’a dit Monsieur Larcher, le problème de la jeunesse n’est plus tellement un problème de moyens. Le budget dédié à la politique de la jeunesse est de 74,2 milliards d’euros. Le budget du Ministère de la jeunesse est, quant à lui, de 200 ou de 300 000 millions d’euros. Il est essentiel de prendre en compte la politique de la jeunesse dans sa diversité. Il ne convient pas nécessairement de dépenser davantage, mais d’organiser la dépense différemment. Une nouvelle gouvernance de la politique de la jeunesse doit ainsi être définie.

A travers la mise en place de laboratoires territoriaux de la jeunesse, je plaide pour la définition de parcours sécurisés, individualisés et territorialisés. Je m’aperçois que l’image de la jeunesse est détériorée. Plus d’un français sur deux a une image négative de la jeunesse, alors que, lorsque vous interrogez les jeunes, vous constatez que les jeunes souhaitent s’engager et donner du sens à leur vie, qu’ils ne considèrent pas la rémunération comme un critère essentiel dans le choix d’un métier, et qu’ils souhaitent travailler plutôt dans des entreprises privées à caractère familiale que dans des multinationales ou dans la fonction publique. Les jeunes souhaitent s’engager dans le service civique. Le baromètre de la jeunesse, que j’ai mis en place, met en évidence l’existence d’une distorsion entre la réalité de la jeunesse et l’opinion publique. Le nombre de jeunes qui brûlent des voitures en fin d’année est très faible. En outre, il s’agit de jeunes qui expriment une souffrance par rapport à la politique de la ville.

Il faut définir des parcours pour les jeunes. Au cours de leur parcours, les jeunes rencontrent plusieurs problématiques. Se pose d’abord la question de l’orientation dans le système éducatif. Se posent ensuite la question de l’autonomie et les questions du logement, de la mobilité, des transports… Se pose également le problème de l’insertion et de l’emploi. Faut-il renforcer les filières en alternance qui permettent à des jeunes d’obtenir un emploi plus rapidement ? Enfin, se pose la question de l’engagement citoyen.

Les parcours doivent, en outre, être individualisés dans la mesure où la jeunesse est diverse. Les jeunes du Cambrésis et les jeunes de Bobigny ne sont en effet pas confrontés aux mêmes problématiques.

De plus, les parcours doivent être sécurisés. En effet, tout au long des parcours des jeunes, il existe des moments de fracture et de rupture. Des moyens doivent être mobilisés afin de dépasser ces moments. L’école de seconde chance, qui proposera 11 000 places à la fin de l’année prochaine, est une belle initiative. Il est toutefois regrettable que des moyens considérables soient dégagés en aval du dispositif, et non en amont du dispositif.

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Rendez-vous du Sénat

Cambrai, le 18 novembre 2010 29

Enfin, les parcours doivent être territorialisés. Pour mettre en place une nouvelle gouvernance de la politique de la jeunesse, il faut en effet agir sur des territoires pertinents : sur les agglomérations en zone urbaine, sur les départements en zone rurale…

Dans le domaine de la cohésion sociale, nous avons réussi, avec Jean-Louis Borloo, à mettre en œuvre une nouvelle politique de rénovation urbaine.

Je salue les Sénateurs dans la mesure où ils ont été plus engagés que les députés sur la question de la jeunesse. En tout état de cause, les parlementaires doivent devenir des ambassadeurs de la jeunesse.

Il faut traiter la question de la jeunesse dès maintenant. Quelles sont mes propositions ?

Selon le baromètre jeunesse, effectué par l’IFOP, 66 % des jeunes considèrent que les professeurs enseignent de manière remarquable. 42 % considèrent que le principal problème du système éducatif est l’orientation. Actuellement, 8 000 lieux d’orientation sont répartis sur le territoire. Il existe de nombreux portails professionnels. Malheureusement, seules les personnes insérées dans un réseau, du fait de leur appartenance à une famille aisée ou à une famille d’enseignants, accéderont aux lieux d’orientation.

Il convient ainsi de construire des Points Orientations Métiers. Il s’agit d’un des outils utilisés par les laboratoires expérimentaux de la jeunesse. Il n’existe pas actuellement de carte des métiers. Il faut alors construire des itinéraires et préciser les métiers porteurs. Même si les jeunes doivent pouvoir choisir librement leur orientation, il ne faut pas laisser les jeunes s’engager dans des filières dans lesquelles leur taux de réussite est faible. Il faut lutter contre le décrochage scolaire en amont. Il faut prévoir la possibilité de réorienter les jeunes au lycée ainsi qu’au cours des deux premières années d’enseignement supérieur. Il faut en outre renforcer les formations en alternance et l’apprentissage et valoriser ces formations. Il faut enfin que le monde de l’éducation accepte de travailler avec le monde de l’entreprise sur l’orientation, comme cela se fait en Allemagne.

Par ailleurs, avec Martin Hirsch, nous avons travaillé sur la valorisation des expériences. Le travail qu’effectuent les jeunes dans les associations doit en effet être valorisé. Il faut ainsi considérer les savoirs fondamentaux, les savoir-faire et enfin les savoir-être. J’ai dirigé pendant dix ans un cabinet de recrutement. Les compétences dans le management d’une équipe et la gestion des conflits sont essentielles. Un engagement citoyen doit être valorisé dans les unités de valeur au même titre que les savoirs fondamentaux.

Il faut en outre travailler prioritairement sur les formations en alternance. Il faut notamment mettre en place des systèmes de tutorat entre les seniors et les juniors et développer l’apprentissage.

Par ailleurs, il faut lutter contre le décrochage scolaire. Un budget de 28 000 millions d’euros sera dédié en 2011 à la mise en place de l’outil Espadon, outil de repérage du décrochage scolaire, et de l’outil Partage du Nord-Pas-de-Calais. Les enseignants, les missions locales, les personnes en charge des jeunes et les parents doivent entrer dans une dynamique qui permette de raccrocher scolairement très tôt les jeunes.

En outre, 18 000 nouvelles places d’hébergement seront disponibles pour les apprentis. J’ai signé récemment une convention avec les chambres de commerce et les acteurs du 1 % logement.

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Rendez-vous du Sénat

Cambrai, le 18 novembre 2010 30

Par ailleurs, il faut proposer une forme de revenu contractualisé d’autonomie pour prendre en compte les frais de transport et les frais de garde d’enfants.

La citoyenneté est enfin l’étincelle qui permet de réconcilier les jeunes avec l’espérance de la vie. Le budget dédié au service civique sera de 15 000 euros. Il aurait été préférable qu’il atteigne 20 à 25 000 euros.

Avec les termes orientation, alternance, autonomie et citoyenneté, une belle politique de la jeunesse peut-être construite.

Antoine BOILLEY

Valérie Létard, la jeunesse doit-elle être au cœur du débat présidentiel ?

Valérie LETARD, Présidente de la Communauté d’agglomération de Valenciennes Métropole

L’avenir d’un pays passe évidemment par sa jeunesse.

Trop de jeunes entrent dans la vie active sans diplôme et sans qualification. Certes, nous avons connu une période de crise et le chômage a augmenté. Cependant, nous connaissons également une véritable mutation industrielle. Jean-Louis Borloo considère que nous nous orientons vers une économie décarbonée.

Pour que notre économie reste compétitive au niveau mondial, elle devra être positionnée sur de nouveaux chantiers. De nouveaux métiers vont émerger, ce qui ouvre de nouvelles perspectives d’avenir aux jeunes. De nouvelles compétences seront en particulier nécessaires dans le domaine du bâtiment, dans le domaine automobile, en raison du passage des véhicules hybrides aux véhicules électriques et dans le domaine énergétique. Actuellement, d’ailleurs, le nombre de jeunes qualifiés n’est pas suffisant pour répondre aux besoins des artisans dans le secteur du photovoltaïque.

Il faut travailler sur l’adéquation entre l’offre et la demande. Un travail est effectué en lien avec l’éducation nationale et les branches professionnelles pour faire en sorte que la population active puisse bénéficier de l’adaptation de notre offre de formation.

Nous devons adapter notre offre de formation aux métiers de demain. Nous prévoyons en effet 6 000 créations de postes dans les métiers en évolution.

L’université du Hainaut-Cambrésis a su s’adapter à son environnement économique. Elle a su créer des filières d’excellence, qui nous ont permis d’accompagner la renaissance économique du Valenciennois et du Hainaut-Cambrésis. L’Université a développé des filières d’ingénieur, des IUT, mais aussi des formations d’ouvriers qualifiés dans les domaines du ferroviaire et de l’automobile, deux pôles d’excellence au sein de notre territoire.

Nous avons réussi à maintenir notre industrie dans la mesure où nous avons su accompagner la formation et où nos laboratoires de recherche travaillent en lien avec le tissu économique.

Il faut que les universités, l’éducation nationale, les branches professionnelles et les organismes professionnels travaillent ensemble sur un territoire pour aider les jeunes à s’orienter. Nous devons considérer d’une part le devenir d’un territoire et d’autre part les aspirations des jeunes.

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Rendez-vous du Sénat

Cambrai, le 18 novembre 2010 31

Il est en outre indispensable que les jeunes puissent accéder aux transports. Un jeune de Fourmies doit pouvoir se former à Lille, à Valenciennes ou à Calais. Les jeunes doivent également accéder au logement. Ils doivent enfin disposer d’un minimum d’autonomie et de revenu.

Les acteurs d’un territoire doivent travailler en commun et doivent être animés par la même volonté politique de servir les jeunes, lesquels dessineront la dynamique future des territoires.

Antoine BOILLEY

Monsieur Legendre, quel est votre mot de conclusion ?

Jacques LEGENDRE

J’étais heureux que ce débat se tienne ici, mais un peu inquiet de lasser l’auditoire. Je suis rassuré. Je souhaite que les jeunes comprennent que les parlementaires ne s’engagent pas uniquement dans des joutes partisanes. Les parlementaires sont des citoyens qui réfléchissent à la manière dont notre pays peut aborder le 21ème siècle en faisant progresser l’égalité.

Parmi les six Commissions permanentes du Sénat, je siège au sein de celle compétente dans le domaine de l’éducation, la culture, la communication, la vie associative, les sports et la jeunesse. Nous ne préparons pas de Lois dans ce domaine sans nous ouvrir sur l’extérieur. Nous sommes en effet d’abord des élus locaux. Nous entretenons ainsi des rapports permanents avec nos concitoyens. Nous recevons en outre de nombreuses personnes dans les Commissions, lesquelles nous donnent leur avis sur les textes que nous sommes en train de préparer.

Le fait que nous ayons décentralisé nos rendez-vous vous permet de mieux comprendre nos préoccupations.

Nous devons impérativement répondre aux attentes de la jeunesse. A défaut, l’avenir de notre pays sera compromis. Gérard Larcher a cependant indiqué, avec franchise, que nous éprouvons quelques difficultés à résoudre certains problèmes.

Des décisions concrètes ont cependant été prises. La Loi sur le service civique sera fort utile. Nous serons mobilisés pour que tous ceux qui peuvent en bénéficier puissent s’en saisir.

Pour certains sujets, nous n’avons pas encore répondu aux attentes de la société. Nous pouvons même éprouver certains regrets. Dans le domaine de l’orientation, les progrès ne sont pas suffisants. Nous devons ainsi voté les textes et mettre en place les dispositifs adéquats. En, particulier, les parlementaires devront travailler en lien avec le gouvernement dans le domaine de l’information et de l’orientation. Le parlement et le gouvernement seront intransigeants et exigeants dans ce domaine.

Lorsque nous avons crée le centre universitaire, nous avons souhaité offrir aux étudiants un large choix, pour éviter que les étudiants ne choisissent une filière par défaut.

L’accès à l’enseignement supérieur a beaucoup progressé depuis 30 ans. Nous avons débattu, hier, au Sénat, d’un texte de loi rapporté par Jean-Léonce Dupont. Ce texte est relatif à la dévolution des biens immobiliers aux universités. N’existe-t-il pas un risque que les universités se concentrent sur

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Rendez-vous du Sénat

Cambrai, le 18 novembre 2010 32

la modernisation de leurs maisons mères et décident alors de fermer les antennes universitaires ? Il s’agirait là d’un recul considérable, les antennes universitaires étant un instrument parmi d’autres de la démocratisation de l’enseignement. La Commission du Sénat sera très vigilante sur ce point. Elle a d’ailleurs fait part de ses remarques à ce sujet à Madame Pécresse.

J’espère que ce débat a été utile. Ce rendez-vous était également l’occasion de vous décrire la manière dont les élus travaillent. La démocratie est compréhensible seulement si les élus sont en permanence sous le regard des citoyens.

Antoine BOILLEY

Je cède la parole au public.

Jacques STANIAC

Je m’occupe des politiques de démocratisation à Sciences Po Lille. Il y a trois ans, nous avons mis en place le programme paye. Ce programme concerne 500 jeunes appartenant à 90 établissements scolaires. Il s’agit en outre d’un programme national.

Sur l’orientation, nous avons constaté que les élèves de terminale ne connaissaient que vaguement les établissements d’enseignement supérieur. Nous avons alors mis en place des tutorats étudiants. Une cinquantaine d’étudiants de l’IEP se rendent ainsi dans les lycées pour aider les jeunes à briser leurs stéréotypes et à lutter contre l’autocensure.

Les collectivités territoriales, les partenaires privés, le Ministère de l’Enseignement supérieur et le Ministère de l’Education participent à la réalisation de ce programme. Il existe par ailleurs d’autres programmes dans le domaine de l’orientation. Des synergies devraient se créer entre les différents programmes dans la mesure où nous considérons que nous sommes parvenus à créer un pont entre l’enseignement supérieur et l’enseignement secondaire. Ce programme pourrait ainsi être décliné dans d’autres filières.

Gérard LARCHER

Je pense que l’enseignement agricole, qui fonctionne de manière satisfaisante, pourrait nous aider à réfléchir. Je suis issu de l’enseignement agronomique et vétérinaire.

L’enseignement agricole a la particularité d’avoir été construit par l’enseignement privé catholique et par la profession, plutôt que par l’Etat. L’enseignement agricole se caractérise également par l’importance des contacts entre les professionnels, les référents et les éducateurs. Le département du Nord est un des premiers départements agricoles de France. En outre, les emplois dans le domaine de l’agriculture et de l’agroalimentaire représentent près de 13 % des emplois. Le Sénat s’est, de plus, engagé à préparer avec le Parlement allemand la politique agricole commune à partir de 2013. Il serait ainsi opportun de réfléchir aux valeurs portées par l’enseignement agricole. Ce modèle d’enseignement répond à des défis que l’Europe devra relever : la sécurité et l’indépendance alimentaires d’une part et la valorisation du territoire d’autre part.

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Rendez-vous du Sénat

Cambrai, le 18 novembre 2010 33

Jacques LEGENDRE

Je regrette également que nous n’ayons pas davantage parlé de l’enseignement agricole, alors que nous sommes à 300 mètres d’un superbe lycée agricole et au cœur d’un centre universitaire disposant d’un département agroalimentaire.

Antoine BOILLEY

Je propose aux jeunes de conclure. Qu’avez-vous pensé de cette matinée ?

Une étudiante

Ce débat était très intéressant. Je suis en outre impressionnée par la présence du Président du Sénat.

Une étudiante

Il est essentiel que ce débat se soit tenu à Cambrai, alors que les universités de proximité sont quelque peu remises en cause par la mise en place de pôles universitaires.

Antoine BOILLEY

Vous engagerez-vous dans le service civique ?

Une étudiante

Ce n’est pas prévu, mais j’ai appris beaucoup de choses.

Aurélien FURNE, étudiant en DUT

J’ai 25 ans. Je reprends mes études cette année. Je suis titulaire d’un baccalauréat STT et je souhaitais préparer un BTS en assistant comptabilité. Or les intervenants de Formatech m’ont fortement dissuadé de m’engager dans cette voie !

Une intervenante

Le projet de ce jeune ne semblait pas lui convenir. Nous avons recherché avec lui des solutions. Un problème de dialogue s’est manifestement posé.

Antoine BOILLEY

Merci à tous pour ces échanges.

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Rendez-vous du Sénat

Cambrai, le 18 novembre 2010 34