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Histoire-Géographie CRPE Les guerres au XXème siècle – Le nazisme Sup de Cours – Etablissement d’Enseignement Supérieur Prive RNE 0333 119 L - 73, rue de Marseille – 33001 Bordeaux Cedex 1 LES GUERRES AU XX ème SIECLE ; LE NAZISME D’après les documents d’application des programmes de l’école primaire, cette question des guerres contemporaines doit considérer tout le siècle : la Première Guerre mondiale, fondatrice en terme de violence et d’idéologie ; la Se- conde Guerre mondiale, consacrant la « guerre totale » ; mais également les guerres de décolonisation de la deuxième moitié du siècle (Indochine et Algérie) ainsi que les « massacres » des Balkans et en Afrique. Il est bien évident qu’au regard de la thématique abordée et des programmes de l’école primaire, tous ces événements n’ont pas le même intérêt. Les réalités de l’enseignement de l’histoire des guerres à l’école et le temps qui doit y être imparti restreignent l’investigation. D’autant que le programme du concours ajoute à cela une atten- tion particulière au nazisme et donc à la Shoah. Il n’est donc ici pas question de tout traiter dans le détail, mais de donner de solides informations sur les deux guerres mondiales, à propos du nazisme et de l’extermination des Juifs par les nazis. Comme le soulignent encore les documents d’application, il s’agit d’aborder le XX ème siècle sous l’angle de son « extrême violence », qui compte parmi les conséquences principales des progrès accomplis par l’homme ; jusqu’à la planifica- tion d’une destruction méthodique d’une part de l’humanité, pour des raisons eth- niques et/ou religieuses. I. La Première Guerre mondiale Considérée à juste titre comme une « boucherie », la « Grande Guerre » dure d’août 1914 à novembre 1918, faisant près de neuf millions de morts parmi lesquels deux millions d’Allemands et un million et demi de Français. Même si le théâtre des opérations est principalement européen, c’est également la première fois où la plupart des nations du monde se trouvent impliquées, directement ou indirectement, dans une même guerre. a. Aux origines du conflit Au début du XX ème , l’Europe domine le monde, politiquement, culturelle- ment et économiquement. Le Vieux Continent sert encore de modèle aux jeunes Etats-Unis et les deux grands empires coloniaux français et britannique se par- tagent la maîtrise des mers et l’exploitation commerciale de contrées « exoti- ques ». Pourtant l’exacerbation des nationalismes en Europe et au sein notam- ment des empires Ottomans et Austro-hongrois devait provoquer de nombreuses tensions sur le plan international et mener inéluctablement à la guerre. En même temps, chaque pays allait se constituer une armée à la mesure de ses ambitions, puis tenter de se positionner dans un système d’alliance : la Tri-

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    Les guerres au XXème siècle – Le nazismeSup de Cours – Etablissement d’Enseignement Supérieur Prive RNE 0333 119 L - 73, rue de Marseille – 33001 Bordeaux Cedex

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    LES GUERRES AU XXème SIECLE ; LE NAZISME

    D’après les documents d’application des programmes de l’école primaire,cette question des guerres contemporaines doit considérer tout le siècle : laPremière Guerre mondiale, fondatrice en terme de violence et d’idéologie ; la Se-conde Guerre mondiale, consacrant la « guerre totale » ; mais également lesguerres de décolonisation de la deuxième moitié du siècle (Indochine et Algérie)ainsi que les « massacres » des Balkans et en Afrique. Il est bien évident qu’auregard de la thématique abordée et des programmes de l’école primaire, tous cesévénements n’ont pas le même intérêt. Les réalités de l’enseignement del’histoire des guerres à l’école et le temps qui doit y être imparti restreignentl’investigation. D’autant que le programme du concours ajoute à cela une atten-tion particulière au nazisme et donc à la Shoah.

    Il n’est donc ici pas question de tout traiter dans le détail, mais de donnerde solides informations sur les deux guerres mondiales, à propos du nazisme etde l’extermination des Juifs par les nazis.

    Comme le soulignent encore les documents d’application, il s’agit d’aborderle XXème siècle sous l’angle de son « extrême violence », qui compte parmi lesconséquences principales des progrès accomplis par l’homme ; jusqu’à la planifica-tion d’une destruction méthodique d’une part de l’humanité, pour des raisons eth-niques et/ou religieuses.

    I. La Première Guerre mondiale

    Considérée à juste titre comme une « boucherie », la « Grande Guerre »dure d’août 1914 à novembre 1918, faisant près de neuf millions de morts parmilesquels deux millions d’Allemands et un million et demi de Français. Même si lethéâtre des opérations est principalement européen, c’est également la premièrefois où la plupart des nations du monde se trouvent impliquées, directement ouindirectement, dans une même guerre.

    a. Aux origines du conflit

    Au début du XXème, l’Europe domine le monde, politiquement, culturelle-ment et économiquement. Le Vieux Continent sert encore de modèle aux jeunesEtats-Unis et les deux grands empires coloniaux français et britannique se par-tagent la maîtrise des mers et l’exploitation commerciale de contrées « exoti-ques ». Pourtant l’exacerbation des nationalismes en Europe et au sein notam-ment des empires Ottomans et Austro-hongrois devait provoquer de nombreusestensions sur le plan international et mener inéluctablement à la guerre.

    En même temps, chaque pays allait se constituer une armée à la mesure deses ambitions, puis tenter de se positionner dans un système d’alliance : la Tri-

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    ple-Alliance ou Triplice regroupe ainsi dès la fin du XIXème siècle, l’Allemagne,l’Italie et l’Autriche-Hongrie ; la Triple-Entente réunit la France, la Grande-Bretagne et la Russie. Des rivalités économiques, notamment entre la Grande-Bretagne et l’Allemagne, président à la constitution de ces alliances. Du côtéfrançais, la question de l’Alsace-Lorraine et d’une « revanche » à prendre sur lesAllemands reste présente dans toutes les consciences. Pour autant, c’est dans la« poudrière balkanique » que la situation va définitivement dégénérer. La régionest en effet primordiale pour les « empires centraux » (Allemagne, Autriche-Hongrie, Russie), car elle est un débouché aisé sur la Méditerranée. Le nationa-lisme serbe s’y développe peu à peu, visant à faire l’union de l’ensemble de ces« slaves du sud », alors qu’ils vivent sous domination ottomane ou austro-hongroise. Mais ce réveil des nationalités est de mauvais augure : il signerait lafin des empires.

    Le 28 juin 1914, l’archiduc François-Ferdinand, héritier du trôned’Autriche-Hongrie et neveu de l’Empereur, était assassiné à Sarajevo par Gavri-lo Princip, membre d’une société secrète, la « main noire ». Un mois plus tard,l’Autriche-Hongrie déclarait la guerre à la Serbie et le jeu des alliances fit lereste : la Russie s’en mêla, l’Allemagne lui déclara la guerre, puis à la France ; laGrande-Bretagne entrant dans le conflit au moment où fut violée la neutralitéBelge. D’austro-serbe, la guerre était en quelques semaines devenue austro-russe, puis européenne et mondiale. La ferveur patriotique fait accepterl’impensable à l’ensemble des belligérants.

    En France, l’assassinat de Jean Jaurès le 31 juillet 1914 sonne l’échec dupacifisme et le début de la guerre voit, sous l’égide du président de la RépubliqueRaymond Poincaré, un gouvernement d’Union Sacrée arriver au pouvoir, révélantla profondeur du patriotisme (Alsace-Lorraine) et la stabilité du régime républi-cain.

    b. De la guerre en mouvement à la guerre de tranchées

    De part et d’autre de la ligne de front, on a dès le départ voulu et imaginéune issue rapide. Dans ce but, l’attaque allemande est conçue comme un déferle-ment de troupes sur la France, passant par la frontière nord-est et la Belgique(plan Schlieffen). Cette offensive est stoppée sur la Marne en septembre 1914par le général Joffre. Les belligérants se lancent alors dans une course effrénéejusqu’à la mer afin de déborder l’ennemi. Aucun n’y parvint et un front de 800km, allant de Dunkerque à la Suisse s’établit. Les armées sont alors « enterrées »dans des tranchées, chacun essayant de percer le front adverse (1915).

    Le 21 février 1916 débute la bataille de Verdun, offensive menée par lestroupes allemandes sous le commandement du général von Falkenhayn. Le généralPétain dirige alors les opérations du côté français et parvient à contenir la per-cée ennemie tandis que le général Foch déclenche la bataille de la Somme (1er

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    juillet – 18 novembre 1916) ce qui a pour effet de « soulager » l’enfer de Verdunoù 250 000 soldats français et autant d’Allemands périrent en à peine dix mois(21 février – 15 décembre 1916). Cette année 1916 marque une transition impor-tante dans le déroulement et l’évolution du conflit. Dès le début de l’année, etmême dès 1915, la guerre d’usure, de tranchées, a dépassé la guerre courte, enmouvement. Le conflit se modernise, les soldats se terrent, adoptent la tenue decamouflage, utilisent l’artillerie, les grenades, les gaz asphyxiants, puis à partirde 1916, les chars d’assaut. Ainsi l’« effort de guerre » devient-il également in-dustriel, alors que les économies de chacun des belligérants peinent à organiserla fabrication des équipements et leur acheminement sur le théâtre des opéra-tions. Cet « effort » porte également sur les populations civiles et leur ravitail-lement, le blocus de l’ennemi étant également un important moyen de pression.

    En même temps, les Etats renforcent leur exécutif ainsi que leur emprisesur l’économie : il fallait à tout prix galvaniser le moral des troupes sans oubliercelui du peuple. La propagande ne parvint cependant pas à faire oublier la réalitéde la vie quotidienne et l’âpreté des combats.

    L’année 1917 voit le conflit s’élargir, avec notamment l’entrée en guerredes Etats-Unis d’Amérique dont la marine marchande est menacée par les sous-marins allemands. L’Amérique mettait sa puissance industrielle et financière auservice de la Triple-Entente, en même temps qu’elle lui apportait un soutien enhommes non-négligeable. Le moment est opportun car les armées sont épuiséespar trois années de conflit sans qu’aucun belligérant n’ait véritablement prisl’avantage. Fort de cela, le général Nivelle lance en avril 1917 l’offensive du Che-min des Dames, lequel se solde par un cuisant et sanglant échec (30 000 tués et100 000 blessés en 10 jours). Mais surtout, ce sont les quelques 200 mutineriesqui inquiètent l’état-major. Nouvellement nommé à la tête des armées, le généralPétain répond tout à la fois par l’amélioration des conditions matérielles pour lessoldats, mais également par la condamnation à mort : plus de 500 soldats en fe-ront les frais, une cinquantaine seront exécutés. En même temps, une grave crisesociale touche les sociétés françaises et allemandes ; les grèves se multiplient,l’Internationale socialiste se réorganise. En France, l’Union Sacrée est rompue etPoincaré est obligé d’appeler à la présidence du Conseil son vieil ennemi GeorgesClémenceau, plus énergique et futur « Père la victoire ». En Russie, la révolutionbolchevique d’octobre 1917 et dirigée par Lénine s’impose. Le nouveau pouvoirdemande à l’Allemagne la signature d’une paix séparée (Brest-Litovsk, 3 mars1918).

    c. 1918, la victoire et la paix

    Avec le retrait de l’Empire russe, l’équilibre des fronts est rompu etl’Allemagne peut concentrer toutes ses forces sur le front ouest. Mais la Triple-Entente s’est renforcée du soutien américain et de la détermination de son pré-

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    sident, Wilson, qui définit en janvier 1918 ses fameux quatorze points, pro-gramme de paix dans lequel il introduit la notion de « guerre du droit » en mêmequ’il renoue avec les principes de liberté des peuples. Dès lors, la guerre opposeles garants de la démocratie aux empires autoritaires.

    Et les événements allaient se précipiter. En mars 1918, le général Luden-dorff tente une dernière offensive dans la Marne et en Picardie qui se casse surune armée alliée supérieure en nombre et en équipement. Progressivement, lenord de la France était libéré tandis que partout ailleurs en Europe, les « Empi-res » se délitaient sous les coups alliés et indépendantistes : la Yougoslavie, laTchécoslovaquie et la Hongrie se proclamaient indépendantes. Début novembre,les empires austro-hongrois et allemands éclataient dans une ambiance insurrec-tionnelle.

    Charles 1er demande un armistice sans conditions le 3 novembre et abdiquele 4 ; Guillaume 1er abdique le 9 novembre et c’est un gouvernement provisoire quisigne le 11 novembre l’armistice de Rethondes. La conférence de la paix s’ouvre àParis l’année suivante : les traités de Versailles (1919, avec l’Allemagne), deSaint-Germain (1919, avec l’Autriche), de Sèvres (1920, avec la Turquie), deNeuilly (1919, avec la Bulgarie) et du Trianon (1920, avec la Hongrie) viennentclore la Première Guerre mondiale, consacrant ainsi le démembrement des empi-res allemands, austro-hongrois et ottoman ; la France récupère l’Alsace et laLorraine. De là émergent de nouveaux pays mais aucune paix durable n’est assu-rée. Car le règlement du conflit instaure en même temps les conditions del’explosion à venir : l’Allemagne est humiliée par ce qu’elle considère déjà commeun diktat et l’Italie, entrée en guerre au côté des alliés pour récupérer l’Istrieet le Trentin n’a vu satisfaire son vœu ; le nazisme et le fascisme allaient pourune part naître de ces frustrations.

    Le bilan du conflit est enfin très lourd sur le plan humain avec près de dixmillions de morts : Allemagne et Russie, deux millions, France et Autriche-Hongrie, un million et demi, Grande-Bretagne et Italie, 500 000 ; à celas’ajoutent quelques six millions de blessés. L’Europe est durement touchée parces quatre années de conflit, les pays en guerre se sont appauvris, endettés ; ilsdoivent reconvertir leur économie de guerre, leurs industries, réinsérer les dé-mobilisés valides. Surtout, 1918 signe la fin de l’hégémonie européenne sur lereste du monde : les Etats-Unis allaient s’imposer, tandis qu’en Asie, le Japonrécupère les anciennes colonies allemandes. Les pays européens perdaient ainside leur prestige auprès notamment des régions colonisées, par leurs divisions etleur vulnérabilité.

    II. Le nazisme

    Le Parti national-socialiste des travailleurs allemands (NSDAP) est néd’une part de la frustration causée par le traité de Versailles, en réaction à

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    l’effervescence régnant alors en Allemagne, d’autre part. L’éclosion puisl’évolution du mouvement national-socialiste est par ailleurs intimement liée àl’histoire personnelle d’Adolf Hitler.

    a. La volonté d’un homme

    En 1919, le jeune Adolf Hitler, ancien combattant décoré de la croix deguerre, est chargé par l’armée de surveiller et d’infiltrer un nouveau parti au nomévocateur, le DAP (Parti social allemand). Celui-ci est alors dirigé par Anton Dre-xler, serrurier de son état, mais écrivain à ses heures. Dans l’arrière-salle d’unebrasserie où les partisans ont coutume de se réunir, Hitler trouve des personnespartageant ses idées, mais surtout un auditoire tout dévoué à suivre sa fougue.Les harangues d’Hitler sont de plus en plus populaires, l’homme prend du poidsdans ce qui est désormais le NSDAP (1921). Il fait adopter par la direction duparti un programme centralisateur, anticapitaliste, expansionniste et racisteavant d’en prendre la tête et de faire triompher le Fuhrerprinzip (le principe duguide) : un chef unique, des pouvoirs complets, la fin de la direction en comité. Enoutre, celui qui se fait désormais appeler le Führer dote son parti d’une organisa-tion structurée, s’appuyant sur des sections paramilitaires, les S.A. (sturm abtei-lung, sections d'assaut). Hitler attire de riches mécènes, achète un journal pourdiffuser ses messages, et fait adopter la croix gammée noire cerclée de blancsur fond rouge pour insigne du parti.

    Fort de cette popularité et de cette organisation, Adolf Hitler organise unputch en 1923 : avec les S.A. et ses partisans dont Ludendorff, il tente de pren-dre le pouvoir à Munich, mais se heurte à un barrage de police qui tire sur lafoule. Hitler est arrêté. Si jusque-là lui et ses S.A. jouissaient d’une relative im-punité de la part de l’Etat, ce malgré l’agitation qu’ils entretiennent, Hitler estpourtant jugé et condamné à cinq années de forteresse. La couverture de sonprocès par la presse a fait de lui un héros de la cause nationale. A la prison deLandsberg, il continue son activisme et dicte à Rudolf Hess ce qui allait devenirMein Kampf. A sa sortie de prison à la noël 1924, Hitler décide qu’il parviendra aupouvoir par la voie légale : par le jeu du parlementarisme qu’il méprise pourtant,tout en poursuivant les opérations d’intimidation menées par les S.A.

    Mais le mouvement s’essouffle. La prospérité économique retrouvée, la re-connaissance internationale (entrée à la SDN en 1926), renforcent de la jeunedémocratie allemande. Au sein même du NSDAP, Hitler est contesté, notammentpar les frères Strasser qui « tiennent » le parti dans la capitale. Hitler renforcealors la propagande avec l’aide de Goebbels puis inaugure en 1927 à Nuremberg legigantisme de réunions politiques militarisées où le salut fasciste est adopté ensigne de ralliement à la personne du Führer. Mais en 1928, le résultat n’est tou-jours pas dans les urnes et Hitler est à nouveau contesté par les partisans de

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    l’action violente ; l’intervention de sa garde rapprochée les S.S. (schutzstaffel,groupes de protection fondés en 1926), permet de mater les révoltés.

    La crise économique du début des années 1930, allait donner au parti nazil’occasion d’obtenir des succès électoraux ; la propagande du parti se fait alorsvolontiers antiparlementarisme, anticommuniste et antisémite. C’est ainsi qu’auxélections de 1932, Adolf Hitler devient le chef du parti majoritaire au Reich-stag ; le président Hindenburg est alors obligé de l’appeler à la Chancellerie. Le30 janvier 1933, Hitler arrive donc au pouvoir par la voie légale. En quelque mois,il va anéantir la démocratie tout en maintenant l’illusion d’une action essentielle-ment patriotique de « redressement national » : les partis d’oppositions sont dis-sous à commencer par les communistes, le Reichstag est incendié en mars 1933,les structures fédérales sont supprimées au profit d’une centralisation directe.Enfin, Hitler règle ses comptes avec des S.A. devenus incontrôlables (nuit deslongs couteaux, 30 juin 1934). Lorsque le maréchal Hindenburg s’éteint en août1934, Hitler obtient les pleins pouvoirs.

    b. La marche à la guerre

    A la fin de 1934, une fois les oppositions annihilées à l’intérieur du payspuis dans son propre camp, Hitler se consacre au volet expansionniste de sonprogramme tel qu’on peut le lire dans Mein Kampf. Après avoir restauré la vitali-té démographique de son pays ainsi que sa puissance militaire, il s’attache à laconquête de « l’espace vital », soit un territoire suffisant pour accueillir un peu-ple de plus en plus nombreux ainsi qu'une zone de drainage de ressources detoute nature.

    Par référendum, les Sarrois décident de leur rattachement à l’Allemagneen janvier 1935 ; c’est une première revanche sur le « diktat » de Versailles. Puisil créé à partir de mars 1935 deux corps d’armée, la Wehrmacht et la Luftwaffe(550 000 hommes). Ce réarmement s’accompagne l’année suivante d’une remilita-risation de la Rhénanie qui reste un pari sur la faiblesse de la réaction démocra-tique en Europe. Toujours en 1936, Hitler vient en aide au général Franco dans laguerre d’Espagne au nom d’un anti-bolchevisme qui par ailleurs permet de consti-tuer l’axe Rome-Berlin avec un autre dictateur, Benito Mussolini, également en-gagé en Espagne.

    A partir de 1937, Hitler est sûr de sa puissance et peut envisager sa poli-tique d’expansion. Depuis 1934, il s’est également persuadé de la passivité despuissances démocratiques et de la SDN. C’est ainsi qu’il réalise l’annexion del’Autriche en mars 1938 (Anschluss) et y obtient 99% d’avis favorable lors d’unplébiscite organisé un mois plus tard. Puis il s’attaque à la région des Sudètes deTchécoslovaquie, contrée peuplée de germanophones. La réaction internationale

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    se matérialise alors dans la conférence de Munich où les démocraties occidenta-les finissent par accepter les annexions menées par Hitler, croyant avoir évité ledéclenchement d’un conflit de plus grande ampleur (30 septembre 1938).

    Un an plus tard, après s’être assuré de la non-agression de l’URSS en casd’attaque à l’ouest (pacte germano-soviétique d’avril 1939), les troupes alleman-des pénétraient en Pologne (1er septembre) ce qui allait déclencher la SecondeGuerre mondiale

    c. L’essence du nazisme

    Dans son texte doctrinal, Mein Kampf, Adolf Hitler déroule plus qu’un pro-gramme d’action politique. Au centre se situe l’existence d’une race allemande,constituée à partir d’un sang, d’une langue et d’une culture commune (idéologievolkisch). Supérieure à toutes les autres, cette race aryenne doit affirmer sadomination sur le reste du monde, par la création d’un Etat et d’une société hié-rarchisés, guidés par un chef, le Führer. Ainsi devient-il nécessaire d’agrandirl’espace vital (lebensraum) et de préserver la pureté aryenne par la guerre et laségrégation. Le discours est brutal, le verbe simple ; il faut toucher les masses.Pour Hitler, il s’agit de se faire l’écho d’un peuple blessé par le « diktat » de Ver-sailles, nostalgique de la grandeur passée, las de la division politique des partis,désireux d’appartenir à une nation « régénérée ».

    Adolf Hitler fait également la synthèse d’idéologies pangermanistes et an-tisémites circulant en Allemagne depuis le XIXème siècle (Fichte, Wagner) ; il seréapproprie également les théories du darwinisme social selon lesquellesl’Histoire, la vie, seraient une compétition de telle sorte que les hiérarchies quise créent résultent d'une sélection sociale permettant aux meilleurs de l'empor-ter. Hitler ajoute à cela la confusion et le populisme : il associe la haine du« juif » à celle des « internationales », financières et marxistes, et vulgarise cediscours afin que les masses elles-mêmes participent à l’institution de sa penséepolitique.

    Au-delà de la doctrine sociale, Hitler est conscient qu’il faut façonnerl’avenir pour voir ses principes pérennisés. Dès 1926 est ainsi fondée la JeunesseHitlérienne où sport et endoctrinement doivent façonner un homme nouveau. Dixans plus tard, tous les jeunes allemands sont obligés d’y adhérer, et en 1938 lemouvement compte 7,7 millions de membres. Peu à peu, l’Etat totalitaire se meten place notamment par la censure, les individus deviennent indifférenciables,strictement encadrés par le Parti et la Gestapo et tout autre forme de contrôlesocial et privé.

    Enfin, conformément à un élément fondamental de doctrine développédans Mein Kampf, les nazis mettent en place une politique raciale et antisémite,affirmant la pureté aryenne et marginalisant la communauté juive. Les lois deNuremberg (1935) privent les juifs de droits politiques tout en les excluant de la

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    vie économique, sociale et culturelle. En novembre 1938, la Nuit de Cristal est unimmense pogrom, des synagogues sont détruites, des magasins juifs pillés. Lesjuifs sont regroupés dans des camps de concentration jusque-là réservés auxseuls opposants politiques.

    III. La Seconde Guerre mondiale

    L’extrême violence du siècle, augurée par la Première Guerre mondiale,s’incarne dans cette longue guerre totale : c’est en effet sans précédent que lespopulations civiles ont été massacrées, alors que les nazis se lançaient en mêmetemps dans l’extermination des populations juives et tziganes d’Europe. De fait,le déclenchement du second conflit mondial renvoie à l’existence de dictaturesmilitaristes, fortement tournées vers la guerre, mais pas seulement. Les années1930 sont jalonnées de crises politiques nationales et de tensions internationalesqui rappellent combien la paix de 1918 est fragile et surtout à quel point ce com-promis constitue le ferment d’une nouvelle explosion. A cela s’ajoutent une criseéconomique durement ressentie en Europe et l’affirmation de prétentions colo-niales par trois pays à régime autoritaire : l’Allemagne de Hitler, l’Italie de Mus-solini et le Japon de Hiro Hito. Devant l’absence de réaction de la SDN et desdémocraties – occupées à entretenir des rivalités bilatérales (Etats-Unis/URSS ;France/Grande-Bretagne) – ces dictatures allaient se montrer de plus en plusagressives, chacune dans leur aire d’influence : le Japon en Chine dès 1931,l’Italie en Ethiopie (1935), l’Allemagne sur ses frontières, et ces deux dernièresdurant la guerre d’Espagne.

    L’invasion de la Pologne, le 1er septembre 1939, est à l’origine du déclen-chement du conflit. Deux jours plus tard, la France et la Grande-Bretagne décla-rent la guerre à l’Allemagne. Dans un premier temps, la guerre oppose les puis-sances de l’Axe (Allemagne nazie et Italie fasciste) au couple franco-britannique ; le conflit allait rapidement s’étendre à toute la Méditerranée, puisà l’Asie et au Pacifique.

    a. La puissance de l’Axe (1939-1942)

    Première victime de la guerre, la Pologne est anéantie en moins d’un mois,prise en étau entre les Russes à l’est et l’Allemagne à l’ouest. La stratégie desalliés n’est pour l’heure que défensive ; la ligne Maginot en est un exemple.

    Les nazis adoptent quant à eux la technique de la guerre éclair (Blitzkrieg)qui leur permet de remporter des victoires rapides sur le Danemark et la Nor-vège. Le 10 mai 1940, ils lancent une grande offensive sur le front ouest, enva-hissent les Pays-Bas et la Belgique malgré leur neutralité déclarée, franchissentla Meuse à Sedan pour finalement encercler les alliés dans la poche de Dunker-que. L’armée britannique se retire et partout en France, les civils fuient massi-vement la partie nord du pays ; c’est la débâcle. L’aviation allemande n’hésite pas

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    à bombarder les colonnes que forment la population en fuite, tandis que les trou-pes au sol entrent dans Paris le 14 juin. Le 22 juin, le dernier gouvernement de laTroisième République que dirige le Maréchal Pétain demande un armistice etl’arrêt des combats. Ratifié en forêt de Compiègne dans le wagon même oùl’armée allemande avait signé sa reddition en 1918, le texte prévoit notammentl’occupation des trois-quarts du territoire national et l’entretien de l’arméed’occupation ; il n’est en outre pas question de libérer les 1,5 millions de prison-niers.

    L’Europe dominée par l’Axe

    Source : Manuel de troisième, Nathan, 1998.

    Après coup, seule la Grande-Bretagne continue à affronter l’Allemagne na-zie malgré les nombreuses attaques aériennes sur des villes telles Londres, Bir-mingham, Southampton, Bristol, Plymouth ou Liverpool ; le 14 novembre 1940,Coventry est totalement détruite par une vague de 500 bombardiers. C’estl’époque des discours galvanisants du premier ministre Winston Churchill dontcelui prononcé le 13 mai 1940 à la chambre des Communes dans lequel il emprunteune formule de Garibaldi : « Vous croyez pouvoir éviter la guerre avec des com-

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    promissions. Vous récolterez la honte en plus de la guerre. […] Je n’ai à vous of-frir que du sang, de la peine, des larmes et de la sueur ». Ne pouvant s’imposerdurant la bataille d’Angleterre, l’Allemagne décide d’attaquer l’empire colonialbritannique notamment en Méditerranée où les troupes de l’axe contrôlent laYougoslavie, la Grèce. De l’autre côté de la Méditerranée, Rommel etl’Afrikakorps affrontent Montgomery en Libye.

    L’année 1941 allait se révéler décisive dans l’évolution du conflit. Sur lefront est, les Allemands déclenchent le 22 juin, l’opération Barberousse, applica-tion de la stratégie éclair à l’URSS. Dans un premier temps, l’armée russes’effondre, du fait de la très grande mobilité des troupes nazies et de la désor-ganisation d’un état-major considérablement affecté par les purges staliniennes.Si l’Ukraine et la Crimée sont rapidement occupées, Leningrad et Moscou ne sontpas prises avant l’hiver. En cette fin d’année 1941, le conflit prend également del’ampleur en Asie du sud-est où l’aviation japonaise bombarde la base américainede Pearl Harbor (Hawaï) le 7 décembre. Les nippons achèvent de dominer la ré-gion, entre la Birmanie et l’Indonésie, du nord de la Nouvelle-Guinée à l’île deSakhaline. La domination japonaise s’avère brutale et dirigée contre les puissan-ces européennes coloniales.

    A la moitié du conflit, en Europe, seules la Grande-Bretagne et une partiede l’URSS échappent à l’influence des puissances de l’axe. L’Allemagne pouvaitcompter sur des alliés déclarés comme la Roumanie et la Bulgarie ou encore col-laborant comme le gouvernement de Vichy en France. Au contraire, des hommespolitiques refusèrent la situation et durent s’installer à Londres qui devint peu àpeu une ville refuge : gouvernements belge, polonais…, France libre du Général deGaulle.

    b. Résistance, guerre totale et victoire finale (1943-1945)

    Rapidement, la majorité des populations européennes était passée sous ladomination d’une puissance de l’Axe. Parmi cette masse silencieuse ou résignée,une petite minorité refusa l’impensable et entra en résistance (renseignement,sabotage), tandis qu’une autre minorité se lançait dans le soutien actif àl’Allemagne nazie.

    Les Alliés parviennent quant à eux à s’organiser et à imposer à leurs paysrespectifs un effort de guerre sans précédent. A la fin de l’année 1942, le rap-port de force commence à s’inverser, les Américains débarquent en Afrique duNord et occupent le Maroc et l’Algérie. Lors de la deuxième campagne de Russie,l’échec de la bataille de Stalingrad voit une armée allemande capituler pour lapremière fois (février 1943). En Méditerranée, après avoir reconquis le Mag-hreb, les Alliés débarquent en Sicile (juillet 1943) avant de pénétrer en Italie dusud. Mussolini est révoqué par le roi et le nouveau gouvernement italien déclarela guerre à l’Allemagne. Les nazis sont attaqués de toutes parts tant sur les

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    frontières de leurs conquêtes, qu’à l’intérieur des zones d’occupation où la résis-tance s’arme peu à peu et mène des opérations de plus en plus efficaces. Le Paci-fique est également le théâtre de combats victorieux pour les Alliés : les troupesaméricaines emmenées par le général Mac Arthur reprennent une à une les îlesconquises par les Japonais.

    Forts de ces premiers succès, les Alliés mettent en place l’opération Over-lord : dans la nuit du 5 au 6 juin 1944, les troupes débarquent sur les côtes nor-mandes. En même temps, l’armée rouge lance une offensive à l’est. Le 19 avril,Berlin est occupée par Joukov mais les troupes allemandes résistent ailleurs pourne capituler que le 8 mai 1945, soit une semaine après le suicide de Hitler (30avril). Dans le Pacifique, les kamikazes japonais continuent de harceler l’arméeaméricaine jusqu’à ce que le président Truman, nouvellement élu, ne recoure à labombe atomique à deux reprises : le 6 août à Hiroshima, le 9 à Nagasaki.L’empereur Hiro-Hito capitule sans conditions le 19 août.

    Au total, le conflit a fait plus de cinquante millions de victimes, civiles etmilitaires. Les destructions sont très importantes et la reconstruction va êtrelongue même si elle facilitée par les fonds du plan Marshall. Les Alliés avaienttriomphé du fascisme et du nazisme, mais leur entente ne dura qu’un temps(conférences de Yalta, de Postdam). Très vite, les zones libérées et quelques peudésorganisées se transformèrent en autant de points d’influence pour les deuxgrandes puissances mondiales qu’étaient désormais l’URSS et les Etats-Unis,plongeant le monde dans la guerre froide.

    c. La France de 1940 à 1944

    La Seconde Guerre mondiale est une étape fondamentale de l’histoire deFrance. Le conflit a certes durablement éprouvé le pays mais surtout ses institu-tions, son économie et sa position internationale s’en sont trouvées bouleversées.

    La défaite militaire qui suivit la « drôle de guerre » puis la facilité avec la-quelle les troupes allemandes envahirent le pays provoquèrent l’effondrement dela IIIème République. Son dernier Président du Conseil, Philippe Pétain signal’armistice le 22 juin 1940 et se fit remettre les pleins pouvoirs le 10 juillet : ce-ci marque le début du gouvernement de Vichy. Séparée en deux zones jusqu’ennovembre 1942, la France est alors l’Etat français, un régime traditionaliste,contre-révolutionnaire et autoritaire dont la devise « Travail, Famille, Patrie »traduit la volonté d’établir une France corporatiste. Ce gouvernement collaboreouvertement avec l’Allemagne et fait des communistes, francs-maçons, tziganeset surtout juifs, les responsables de la déroute de 1940 : les premières lois por-tant statut des juifs datent d’octobre 1940. Le régime apportera ensuite un sou-

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    tien non-négligable à la « solution finale » entreprise par les nazis à partir de1942.

    Dès 1941, des mouvements de résistance intérieure s’organisèrent peu àpeu pratiquant des opérations de sabotage des installations allemandes. De Lon-dres, le général de Gaulle allait unifier ces réseaux très disparates et créer enmai 1943 le Conseil National de la Résistance, avant de présider un Gouverne-ment Provisoire de la République Française à Alger en 1944. Après le débarque-ment allié du 6 juin 1944, la Résistance participa à l’insurrection intérieure etpar là même à la Libération progressive du pays.

    La France avait subit une occupation dure, matériellement et moralement,alors qu’un million et demi de ses hommes étaient restés prisonniers. Les Fran-çais restèrent certes attachés à la personne du maréchal Pétain, ils n’en demeu-rent pas moins fidèles à la République dans leur grande majorité. La France deDe Gaulle est ainsi une puissance victorieuse aux côtés des Alliés.

    La France occupée (1940-1944)

    IV. L’extermination des juifs par les nazis : un crime contrel’humanité

    Pour l’historienne Annette Wieviorka, il s’agit de « l’épisode le plus violent,le plus barbare et le plus ‘européen’ du XXème siècle », le plus difficile à envisagerégalement du fait qu’il se situe entre la mémoire et l’histoire. L’exterminationdes juifs par les nazis est un entreprise industrielle et programmée d’environ sixmillions d’individus pour l’unique raison que ceux-ci appartenaient à une religion ouà une culture considérée comme une race à éliminer. Dès lors, se pose la ou les

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    questions de la possibilité d’une telle réalisation et de l’explication historique del’impensable.

    Il est clair que la question est difficile à traiter à l’école. Les faits sontpeu évidents à aborder avec des enfants, mais il ne faut pas occulter ce qui resteune étape importante de l’histoire de l’humanité et de l’histoire de France,l’administration française ayant largement participé à la déportation des juifs etdes tziganes du territoire. Si le thème n’est entré dans les programmes de ter-minale qu’en 1962, il faut attendre 2002 pour qu’il soit introduit de façon expli-cite à l’école primaire ; il s’agit même d’un « point fort » desdits programmes.Entre temps, le sujet est abordé de façon plus ou moins aboutie au détour d’unchapitre portant sur la Seconde Guerre mondiale ou la politique de collaboration.Je renverrai pour ma part un l’article que Dominique Borne a fait paraître dans lepremier numéro des Cahiers de la Shoah : « Faire connaître la Shoah à l’école »(Les cahiers de la Shoah, n° 1, 1994 ; http://www.anti-rev.org/textes/Borne94a/).

    a. Les ferments du génocide

    Pour mettre en place une telle entreprise, les nazis eurent besoin del’ensemble des moyens techniques et bureaucratiques dont ils s’étaient faits leschampions : éliminer des individus sur une si grande échelle supposait en effetune organisation sans faille. Surtout, il fallut qu’il préexiste à l’Allemagne nazieun sentiment antisémite suffisamment important pour nourrir l’idéologie hitlé-rienne. A cela s’ajoute un contexte de crise économique et sociale en Allemagne,au lendemain du Traité de Versailles et dans les années 1930.

    Dans Mein Kampf, Adolf Hitler étaye son antisémitisme en avançant que le« juif » représente le mal, qu’il est d’une race encline à la destruction des autres,qu’il est une « peste ». Mais ce discours n’aurait pu être reçu favorablement s’iln’avait été tenu dans un contexte antisémite dépassant largement le parti nazi etses dirigeants. La doctrine de la hiérarchie des races théorisée au XIXème siècleavait transformé l’antisémitisme religieux, qui faisait des juifs un peuple déicide,en antisémitisme biologique : les juifs incarnaient le mal par essence et non parreligion, les convertis et autre assimilés ne seraient donc pas épargnés. Preuveen est le rejet politique et social dont ils sont les victimes : s’ils sont grands pa-trons, on les identifie aux capitalistes profiteurs de guerre ; s’ils appartiennentaux mouvements marxistes ou internationalistes, ils sont des révolutionnairesattentant aux valeurs de la nation. Dès la République de Weimar (1919-1933), ce« complot juif international » est dénoncé ; Walter Rathenau, ministre des affai-res étrangères juif, socialiste et grand industriel est assassiné en 1922.

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    b. La mise en place de la Solution finale

    Si les historiens de la Seconde Guerre mondiale ont très vite acquis descertitudes quant à la réalité du génocide et de son ampleur, la question de la pro-grammation intentionnelle de l’entreprise a longtemps suscité débats et contro-verses. On constate cependant que l’arrivée des nazis au pouvoir s’accompagned’assassinats de juifs, déjà victimes de violences et vexations diverses. La suiterésulte d’un enchaînement de décisions politiques prises entre septembre et dé-cembre 1941 ; les premières chambres à gaz entrent en action à Chelmno en dé-cembre 1941, rapidement suivies par celles d’Auschwitz.

    La volonté d’exterminer les populations juives d’Europe entre tout d’aborddans la théorie du Lebensraum ; libérer l’espace vital de cette « gangrène ». Lesjuifs sont donc dans un premier temps encouragés à émigrer, puis expulsés jus-qu’en 1941. Les conquêtes nazies s’étendant, les dirigeants ont l’idée de les ras-sembler dans une sorte de « réserve » européenne ou extra-européenne (Polo-gne, Madagascar) ; c’est la théorie du ghetto appliquée sur une plus grandeéchelle. Mais pointe déjà dans l’idée des dignitaires nazis à commencer par leurchef, l’idée d’une extermination : Hitler l’évoque dans un discours de 1939 en cas« d’agression juive » ; le régime a déjà fait exterminer des catégories indésira-bles comme les 70 000 malades mentaux assassinés entre 1939 et 1941 ; le pro-jet trouve sa place dans le vœu d’un Reich racialement pur, débarrassés des« impuretés » slaves (polonais, russes) et donc juives.

    Dès le début de l’été 1941, à l’arrière de l’opération Barberousse, deshommes sont massivement fusillés par des commandos S.S. (Einsatzgruppen) Desfamilles entières sont également massacrées en Russie par la Wehrmacht. Peu àpeu apparaît l’idée d’une solution « finale » ou « définitive » (endlösung) dans lescorrespondances échangées au plus haut sommet de l’Etat, comme le « RapportJäger » du 1er décembre 1941. Au même moment apparaissent les premiers cen-tres de gazage en Pologne, alors que les Einsatzgruppen commencent à utiliserles camions à gaz. Le 20 janvier 1942, dans la banlieue de Berlin, se tient laconférence de Wannsee qui va décider de l’extermination de tous les juifsd’Europe. Surtout cette réunion met en relation les différents acteurs du géno-cide afin qu’ils coordonnent leur action. Dans le procès-verbal qu’il rédige, AdolfEichmann note « une élimination physique », « une mise au travail jusqu’à lamort ». Sans nul doute est-ce cette rencontre de Wannsee qui marque le débutréel du génocide. Le Reich décide ici d’une politique de pureté raciale qui devait« débarrasser » l’Europe de tout sang juif. En même temps, l’Allemagne com-mence à s’enliser sur le front russe, les Etats-Unis entrent en guerre, il leur fautdonc accélérer le processus d’extermination pour éviter que les juifs ne survi-vent au conflit. La conférence de Wannsee marque donc l’accélération, la systé-matisation d’un processus engagé dès 1941.

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    c. Les lieux du génocide

    Dans le système répressif nazi, on recense deux types de camps : lescamps de concentration et les camps d’extermination ; dans les premiers, la mortn’est pas systématique mais courante, les seconds sont une machine à tuer.

    Dès l’arrivée au pouvoir des nazis, le pouvoir créé des camps de concentra-tion, d’abord en Allemagne puis dans les pays occupés. Ils sont tout d’abord des-tinés à recevoir tous les opposants du régime, auxquels s’adjoignent rapidementl’ensemble des « asociaux » comme les homosexuels ; les juifs sont déjà la ciblede ses premières mesures d’internement. A chacun de ces camps est associé uncamp de travail forcé où les prisonniers soutiennent l’effort de guerre nazi dansdes conditions épouvantables : outre le dur labeur, ils y subissent de nombreuxsévices corporels et sont décimés par de nombreuses épidémies dues essentiel-lement aux mauvaises conditions sanitaires. Le camp de Dachau, créé en 1933 àcôté de Munich est de ceux-ci.

    Les camps d’extermination répondent quant à eux au protocole décidé àWannsee même si certains d’entre eux sont en place dès 1941. Par la déportation,l’ensemble des juifs d’Europe occupée sont acheminés vers ces camps tous situésen dehors des frontières allemandes. A l’arrivée, le tri sépare les hommes jeuneset valides des femmes, enfants, malades et vieillards : les premiers sont envoyésdans la partie « camp de travail » de la structure, les seconds sont immédiate-ment assassinés d’abord par fusillade puis par gazage (camions et chambres àgaz). Six camps répondent à cette configuration : Auschwitz-Birkenau, Maïdanek,Chelmno, Treblinka, Sobibor, Belzec.

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    Au total, ces événements font le constat d’une extrême violence pour lesiècle passé. C’est avec des moyens sans précédents que les nations se sont af-frontées faisant de nombreuses victimes civiles. La Seconde Guerre mondialeavec l’expansion du Reich et le génocide, perpétré contre des individus aux ap-partenances culturelles et religieuses bannies par les nazis, marque une étapedans l’horreur. Si l’impensable est difficilement dicible, il reste qu’il s’agit d’unepériode essentielle à la compréhension du monde contemporain, dont les pro-grammes de l’école sont parmi les moyens.