les germains

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Ozanam, Frdric (1813-1853). Oeuvres compltes de A.-F. Ozanam. 1861.

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OEUVRES

COMPLTES DE

A.

F.

OZANAM AVEC PRFACE PAR M. AMPRE de l'Acadmie franaise SECONDE DITION

UNE

TOMETROISIME TUDES GERMANIQUES

LES GERMAINS AVANT LE CHRISTIANISME

SIMON ETCOMP-, D'ERFURTIF,, RUE 1. PARIS.IMP. RAON

LES

GERMAINS AVANT LE CHRISTIANISME

RECHERCHES LESORIGINES, TRADITIONS, SUR LES LESINSTITUTIONS DESPEUPLES GERMANIQUES, ET SUR LEUR TABLISSEMENTL'EMPIRE DANS ROMAIN, PAR A. F. OZANAM DE DES DEPARIS PROFESSEUR LITTERATURE ALAFACULTLETTRES ETRANGERE

TROISIEME

EDITION

PARIS JACQUES LECOFFRE ET Cie, DITEURS - 0L0M R, 29 RUE VIEUX C DU BIE 1861 Le droit e traduction rserv. est d

PRFACE

Toute la socit franaise repose sur trois fondements : le christianisme, la civilisation et romaine, l'tablissement des barbares. Ce sont les trois sujets d'tude il ne faut pas se lasser de revenir auxquels veut s'expliquer le droit du pays, ds qu'on public Mais il n'est pas facile sa littrature. ses moeurs, le prsent le christianisme ; il remplit d'ignorer s'ocle pass, et force les plus indiffrents romaine a laiss des monucuper de lui. L'antiquit de l'oubli ments qui se dfendent par leur grandeur n'ont que au contraire, Les barbares, et leur beaut. arides et des codes incomplets des chroniques ; et ce ne commence peu qu'ils nous apprennent qu'aprs de la barils sortent c'est--dire l'invasion, quand comme o s'arrtent la plupart l'poque dans les premiers de ceux qui ont port la lumire sicles de notre histoire ; et, avec une louable rserve, barie. C'est aussi E. G. I.

2 ils se sont

PREFACE. contents

des les institutions d'tudier des Goths, des Burgondes, Francs, depuis l'entre A cet de ces peuples dans la socit chrtienne. il ne reste rien faire aprs les leons de gard, de M. Guizot, les travaux de M. Thierry, aprs de M. Gurard, de M. Naudet, de M. Pardessus, M. Laboulaye et de plusieurs autres que je ne puis mais qu'assurment n'oublie. personne Toutefois, depuis trente ans, les recherches qu'on ne devait point commencer en France, dans un pays tout romain par ses souvenirs, ont tent la curiosit des Allemands, ces hritiers des Germains. directs nommer, Ils ont de s'enfoncer au del du sicle des entrepris de pntrer dans les traditions invasions, germaniques avant le temps o elles s'altrent par le dsordre de la conqute et par le commerce de l'tranger, de rtablir l'histoire des peuples du Nord une poque et de les suivre assez loin qui n'eut pas d'historiens, et par quels liens pour savoir enfin d'o ils vinrent ils tiennent au reste de la race humaine. Des tudes si graves, et qui semblent vouloir tant de calme, nade l'agitation et de la quirent cependant publique Ce fut en 1812, dans cette sanglante guerre. anne, que deux jeunes dcouvrigens, les frres Grimm, de la bibliothque rent, dans un manuscrit de Cassel, de Hildebrand et Hadebrand. le pome L'Allemagne la publication de ce chant, o clatait applaudit le de la barbarie. gnie libre et guerrier Le succs dcida deux des plus belles vocations littraires de

PREFACE. notre

5

et les frres Grimm temps; ouvrirent ces fouilles la Grammaire qui devaient alleproduire mande, la Mythologie les Antiquits du droit allemande, l'essai sur la Tradition allemand, et mettre hroque, nu tout le fond des antiquits du Nord (1). Des travaux si heureusement conduits ne pouvaient rester isols : toute l'Allemagne savante y voulut mettre la main. les idiomes Bopp rattacha ger la famille des langues maniques indo-europennes, dont il crivait la grammaire Gans, Philcompare. lips, Klenze, derniers poussaient l'analyse jusqu'aux fondements du droit allemand, et y montraient les mmes principes toute la lgislation qui soutiennent de Rome, de la Grce et de l'Inde. En Danemark et en Sude, Rask et Geijer tiraient des pomes Scandinaves une lumire sur tous les qui rejaillissait du Nord. En Angleterre, et Kemble peuples Thorpe des potes allemandes. De anglo-saxons, toutes parts, de jeunes savants s'taient mis creuser le sol de la patrie ce paysan et, comme germanique; labourant un champ de baque Virgile reprsente les dbris glorieux taille, ils admiraient qu'ils retrouvaient dans chaque et les tombes des gants sillon, dont ils taient les fils : reconnaissaient, Grandiaque effossis mirabitur ossa scpulcris. (1) M. Jacob Grimm vient de couronner ses travaux en publiant l'Histoire de la langue allemande. dans les premiers l'cho des traditions chants

4

PRFACE.

Mais l'admiration la suite des a ses dangers: matres une cole s'est forme, qui a fini par ne rien voir que de gigantesque dans et de plus qu'humain les moeurs, de l'ancienne On a vant la Germanie. de la race allemande, puret quand, vierge comme ses forts, elle ne connaissait pas les vices de l'Eude On n'a plus tari sur la supriorit rope civilise. son gnie, sur la haute moralit de ses lois, sur la de ses religions, profondeur philosophique qui pouvaient la conduire si le aux plus hautes destines, christianisme et la civilisation latine n'avaient dtruit ces esprances. Ces rves ne sont point ceux d'un nombre : les petit d'antiquaires fourvoys esprits les plus levs ne s'en dfendent pas toujours. On sait avec quelle autorit les critiques prussiens, dcids nous refuser l'inspiration ont fait potique, Il n'y a pas longjustice de Racine et de la Fontaine. temps que Lassen, cet orientaliste consomm, oppole paganisme libral sait, dans un loquent parallle, des Germains au dieu goste des Hbreux ; et Gervide la posie allemande, ne peut se nus, l'historien consoler de voir que la mansutude lui a catholique anctres gt ses belliqueux (1). Les dcouvertes de l'Allemagne historiques pouvaient donc se trouver aux yeux de compromises, l'tranger, par l'usage qu'on en faisait. D'ailleurs, les ouvrages de M. Grimm, o except la Grammaire, (1) Lassen, Indische Alterthumskunde, p. 415; Gervinus, Geschichte der poetischenNational-Littertur, p. 312.

PRFACE.

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il y a beaucoup d'art et de gnie, taient surtout des de documents collections bien choisis, qui attenleur emploi. daient Les Allemands nous laissent voce travail lontiers de rdaction, trop frivole pour M. Fauriel eux. En 1831, la chaire de inaugurait littrature o il trangre par ces belles leons, clairait d'un jour si nouveau les commencements de la littrature C'est l qu'il renconprovenale. trait le pome barbare de Walther et d'Aquitaine, l'tude de cet pisode trange le conduisait exposer la suite toute de l'pope En 1852, germanique. M. Ampre ouvrit la brillante de son enseicarrire en menant ses auditeurs aux sources engnement, core peu rappelle connues avec quel dans la de la posie Scandinave. On se il introduisit le applaudissement chaire les chants de classique, des Sagas, et tant de textes curieux tonnait nos oreilles. loquente M. Saint-Marc Girardin, aprs avoir

premier, les rcits l'Edda, dont la barbarie D'un autre ct, analys montrait hroque consacra profonde tiquit, pire travaux

les institutions de l'ancienne la Allemagne, dans la fable pour ainsi dire toute vivante des Nibelungen. En 1844, M. Lenormant vingt leons d'un cours aussi attachant que de toute l'anclaircir, par le tmoignage envahirent non l'em-

plus que les Edede MM. Marmier, Eichhoff, Bergmann, lestand du Meril, ont achev de naturaliser parmi du et les vieilles littratures nous les vieilles langues

des peuples qui l'origine romain. Il ne faut pas oublier

6 Nord. rests L'Allemagne indiffrents

PREFACE.

d'tre ne peut plus nous accuser de tant de trsors la dcouverte Car, littraires, patrimoine. qui sont aussi notre intressent dont il s'agit aprs tout, les recherches de France ; et rien n'importe toute l'histoire plus que avant, leur conversion, de savoir enfin ce qu'taient, ces Bourguignons, ces Visigoths, ces ces Francs, nos pres, Normands qui mirent que nous appelons dans leur pe au service de notre foi, leur libert et leur gnie dans nos arts. nos institutions, en sont l, assez agites Les questions germaniques l'attention encore assez dj pour rveiller publique, assez claires par la neuves pour ne point la fatiguer, discussion des faits pour qu'il y ait lieu de rsumer me pardonnera-t-on Peut-tre et de conclure. d'enun travail si bien prpar, surtout quand treprendre j'en trouve les premiers exemples dans cette chaire de la Facult des lettres dont je tiendrais honneur de continuer les traditions. Je me propose premirement de mettre en oeuvre des matriaux choisis par des mains et de tirer, plus sres que les miennes, s'il se peut, de ses ruines en l'antique Germanie, les restes de ses institutions et de ses rapprochant en ranimant enfin ses vieux peuples, en traditions; les accompagnant dans leurs migrations et leurs conqutes, jusqu'au les Francs pour Providence sation. moment o le christianisme choisit en faire les serviteurs de la prfrs et les ouvriers de la civiliprincipaux

PRFACE. On ne trouvera

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des pas ici cette lente discussion ces controverses mais ncesdocuments, pineuses, fonder une science. Il s'agit saires pour de populariser une science ses rsuldj faite, en poussant tats jusqu'aux points o ils intressent par leur nouveaut et leur tendue. Chez ces peuples, o l'on ne dcouvre d'abord que des superstitions sanguinaires la des Je et la passion de l'indpendance de tous contre tous, guerre je de puissance traits inattendus vois une doctrine pousse jusqu' crois reconnatre et de grandeur.

rattache, religieuse par d'inconaux plus fameuses testables de analogies, religions des lois qui sauvent les principes de la l'antiquit; de la justice et qui publique, proprit, de la famille, en plus d'un s'accordent avec les lois de Rome point dont le vocabulaire et la et de l'Orient ; des langues attestent un singulier de la pentravail grammaire tous les signes se, en mme temps qu'on y dmle avec le latin, le grec et le d'une troite parent une posie enfin qui, sous des formes imsanscrit; et soules procds parfaites, reproduit l'inspiration, Partout vent jusqu'aux fables de l'pope classique. aux les traces d'une tradition commune reparaissent du 1 errants du Nord et aux socits polices peuples aux prises ancien les restes d'un ordre Midi, partout et de destruction, avec l'esprit de dsordre partout de la barbarie. un tat de lutte qui est le propre de deux principes Cette lutte contraires, qu'on des Gerdcouvre primitives dj dans les moeurs

8

PRFACE.

en prsence clate bien plus manifestement mains, D'un ct, je trouve que romaine. de la civilisation ne Rome avait pntr qu'on plus profondment mais dans dans le territoire, non-seulement pense, de ces peuples ; elle leur avait successivel'esprit les frontires ment ouvert les rangs de ses armes, et de ses les portes de son snat de son empire, des barbares coles. Cet tablissement prpacifique D'un autre mais l'adoucit. para la chute de l'empire, des Romains, compromise par ct, la domination d'abord la rsistance et la cruaut, l'avarice provoque et ensuite leurs d'une partie des Germains, reprC'est la cause de ces irruptions sailles. violentes, n'ont point exagr dont les rcits contemporains Je m'explique ainsi les contradictions l'horreur. qui dans l'histoire m'tonnaient d'abord des invasions ; non pas l'impuissance, mais l'insuffiet je reconnais sance du gnie romain des pour faire l'ducation peuples du Nord. Il est temps de montrer le christianisme achevant l'oeuvre qui avait dsespr la politique des Csars. A mesure que l'ancienne Rome perd du terrain et des batailles, mesure qu'elle use et qu'elle puise contre les barbares ses trsors, ses armes, tout ce qu'elle avait de pouvoir, une autre Rome toute spisans autre puissance rituelle, que la pense et la pala conqute, attend les barbares role, recommence la frontire pour les matriser quand ils deviennent matres de tout, et pntre enfin chez eux, au coeur

PRFACE.

9

les nations attardes pour y chercher de la Germanie, et rcalcitrantes. Pendant que les Goths, les Vandales, les Lombards, passent l'arianisme qui les perdu peuple franc : ds ce moment, dra, la foi s'empare les invasions ont trouv leur barrire, et l'empire ses successeurs. romain Je m'attache ce peuple, la grandeur tout l'Occident et, en duquel travaille; chez lui la civilisation tudiant chrtienne, je me trouve au point d'o elle rayonne sur les Germains. On sait trop peu l'histoire des missions qui achela conversion vrent des Francs, et, par eux, celle des nations voisines. Dans ce combat de cinq cents ans contre la barbarie, on aurait lieu d'admirer auet de gnie qu'aux tant d'hrosme plus beaux jours de l'glise Les Pres du quatrime primitive. sicle, vient de rveiller dont une voix loquente les souveni plus de courage dfier les nirs (1), n'eurent ni plus d'inspiration mouvoir les dangers, pour ni plus de sagesse pour les gouverner, peuples, que les missionnaires sans gloire des temps mrovinsaint loi, saint Boniface. giens, saint Colomban, Un savant mmoire de M. Mignet a commenc la due ces hommes, d'une dignes rpartition postSon travail aurait arrt le mien, s'il rit meilleure. de ces crits excellents n'tait du nombre qui inspirent encore plus qu'ils n'apprennent (2). C'est ce qui (1) Villemain, Tableau de l'loquence chrtienne au quatrime sicle. Nouvelle dition, 1849. (2) Mignet, Comment l' ancienne Germanie entra dans la socit de l'Europe civilise. E. G. I.

10

PRFACE.

ducation de prs la longue tudier m'encourage de l'piscopat gallodu peuple franc, les services et de de l'Irlande les colonies romain, monastiques assez ni le nomdont on ne connaissait l'Angleterre, enfin l'interni les bienfaits; bre, ni les lumires, de en la personne du pouvoir vention temporel comme o il se contint du clerg, et cette formidable guerre faire dont j'ai tent de mieux Saxons, le pril, et les fautes tardivel'intrt, comprendre des Nor. la conversion ment rpares. Je m'arrte Charlemagne, rformateur contre les les bornes venus de l'invamands au moment o, ces derniers le Nord n'a plus sion tant entrs dans la chrtient, de barbares. chrtienne Il fallait suivre la conqute jusqu'au les effets dans l'glise, bout, avant d'en considrer dans l'tat, dans les lettres. Aprs tant de tholoni la giens et de canonistes, je n'avais ni la mission hardiesse l'examen dtaill des instid'entreprendre Il ne me restait tutions ecclsiastiques. qu' saisir il se produisit l'esprit qui les anima, voir comment par la hirarchie, par la prdication, par le culte; il eut vaincre rsistances dans la socit quelles Ce travail de l'glise devait pntrer la lgislation des peuples nouveaux : ici les recherches de la science moderne sont pousses une profondeur o je ne descendrai pas. Je ne m'endans les difficults gage pas la suite des matres du droit civil, et, m'attachant une question de droit et dans les mes.

PRFACE. public origines

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aux plus agite que rsolue, je remonte de la monarchie. La royaut sacerdotale et des barbares demande un appui aux instiguerrire et va se perdre tutions romaines, par une restaurade l'antiquit, le christiation inintelligente lorsque nisme la sauve en la sacrant. d'clairer d'un J'essaye cette mmorable affaire de la translajour nouveau aux Francs, tion de l'empire la faiblesse d'opposer la grandeur de l'idal de la ralit politique, pourles publicistes, suivi par les docteurs, les potes. restaure le pouMais, pendant que le christianisme il lui fait des conditions la voir, qui sauveront libert. Enfin, sans recommencer aprs d'excellents des lettres aux temps l'histoire mrovincritiques mais nougiens, je me rduis un sujet restreint la tradition littraire dans les veau, et je cherche o l'on a coutume de croire que coles, au moment et que toute science tout enseignement s'interrompt du grammairien s'teint (1). Une tude plus attentive de fixer sa date au comVirgile, en me permettant du septime dans mencement sicle, me fait entrer le secret des coles de la dcadence, qui vcurent leur doctrine aux monasassez pour communiquer et d'Angleterre. C'est dans d'Irlande iront cherces deux les lointaines que les barbares les anciens Grecs allaient comme cher l'initiation, tres savants (1) Histoire Littraire de la France, par des bcdictins de la congrgation de Saint-Maur. Ampre, Histoire littraire de la France. Guizot, Histoire de la civilisation en France, t.I et II.

12

PRFACE. Toutefois de Samothrace. le feu laissent pas mourir les restes aux en conserve cette cole du palais, dont

aux prtres la demander ne l'Italie et l'Espagne sacr, et la Gaule mme plus mauvais jours, dans on avait ouverte

et qui reste contest l'existence, injustement le Bref. Thodebert Ppin jusqu' depuis de l'Universit; Nous n'y trouverons pas le berceau rendez-vous mais, quand Charlemagne y donnera nous verrons a de savant, tout ce que la chrtient de ce grand rgne tout le dans l'activit commencer mouvement intellectuel du moyen ge. dissimul mconnais d'avoir les diffipas non cd l'en-

Comme je ne me suis point cults de mon travail, je n'en faibles. Je crains plus les parties tranement la certitude de

hardies qui promettent conjectures est peine possible, l o la probabilit dcid par des autorits considrables, j'ai lorsque, chez les Gtes, et dtercru trouver des Germains des Scandila premire miner exactement patrie des Lois voulait plus de dvelopnaves. Le chapitre et les conclusions en seraient moins inatpement; tendues si l'on y arrivait par un chemin plus long. Je pourrais ces aveux d'une conscience multiplier de laisser chapper au moment l'oeuvre de inquite, annes. Mais, sachant touplusieurs qu'il y restera des jours assez de dfauts pour exercer l'indulgence seulement trois objections auxlecteurs, je prvois dtruiquelles je ne puis me rendre, parce qu'elles

PRFACE. raient d'un seul en attaquant

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coup toute la suite de ces recherla mthode ches, qu'on y a suivie et les rsultats o elle conduit. On me reprochera d'abord d'avoir trop accord aux barbares, et d'avoir fait servir la reconstruction d'une Germanie idale des matriaux de tous les temps les pays, textes des historiens rcits des temps lois des classiques, mrovingiens, chants des Saxons, des Lombards, Francs, piques de la Sude et de l'Islande. Mais je n'ai jamais mentre les Scanconnu la diffrence qu'il faut tablir dinaves et les peuples proprement appels Germains; entre les tribus restes l'ombre de leurs forts, du genre humain, dans une entire et les ignorance au milieu de la socit nations conqurantes tablies les lumires et de de toutes au centre romaine, les toutes les corruptions. Toutefois, sans ngliger diffrences, cher aux instructives. ne furent on peut s'attaqui sont incontestables, ressemblances, qui ne sont pas moins ces rapprochements Jamais, d'ailleurs, des qu'en s'appliquant plus lgitimes et de tous

dont le propre est de peu changer. peuples barbares, Il n'y a de progrs disciplines que chez les nations erre encore L'Arabe de nos jours et laborieuses. il se dans les mmes dserts qu'au temps d'Ismal; s'abreuve aux mmes puits. dresse la mme tente, de ses dans le nombre Il met toujours sa gloire : ses et de ses troupeaux de ses esclaves femmes, moeurs sont encore le plus fidle commentaire de la

14 Gense.

PRFACE.

les tmoiDe mme, aprs avoir rassembl on reconnat diffrentes, de tant d'poques gnages sicle et les Saxons les Scandinaves du onzime que allemands tous les peuples du neuvime, comme n'ont avant leur entre dans la socit chrtienne, considrable, une institution, pas une tradition pas de ne soit au moins en germe chez les Germains qui Tacite. Chaque parole de cet crivain, qu'on ne mdes ddite pas assez, rsume et justifie quelqu'une Pour moi, des modernes. font l'orgueil couvertes qui m'tre rien ne me rassure que la pense de ne plus et la plus flatcart d'un si grand matre; jamais serait teuse comme la plus hardie de mes esprances au livre mon travail pt servir de commentaire que de la Germanie. d'avoir au contraire, D'autres me blmeront, trop caet d'avoir accord des peuples hroques, peu dans sa en trouvant lomni Germanie l'ancienne du sang, dans religion le culte de la chair et l'amour d'une socit ses lois l'impuissance impunment et dans ses chants potidans ses langues dsobie, d'un gnie qui ne se matrise pas. ques le dsordre Surtout on ne me pardonnera point d'avoir suppos du que Rome et des leons donner aux hommes et de CharleNord, et d'avoir pris le parti d'Auguste et Wittikind. Mais, si c'est magne contre Arminius la thse favorite de l'cole teutonique de nier ce que dut la civilisation et d'abjurer latine, l'Allemagne cette ducation commune qui fait le lien de la famille

PRFACE. europenne, la famille, c'est

15

aux Franais, comme aux ans de d'en conserver les titres. qu'il appartient trouveront Enfin, plusieurs que j'ai fait la part au christianisme, soit quand trop grande j'ai cru reconnatre la trace de ses plus anciennes traditions dans les religions des Germains, soit quand j'ai montr la barbarie de ces peuples rsistant tous humains, pour ne cder qu' la toutede l'vangile. Ceux qui ne veulent puissance pas de dans un travail croyance religieuse scientifique m'accuseront de manquer ; mais je d'indpendance ne sais rien de plus honorable tel reproche. qu'un Je ne connais de coeur qui veuille pas d'homme mettre la main ce dur mtier sans une d'crire il dpende par conJe n'aspire triste cette squent. indpenpoint dont le propre serait de ne rien croire et de dance, ne rien aimer. Sans doute il ne convient pas de proles professions de foi : mais qui donc aurait diguer le courage de toucher aux points les plus mystrieux le spectacle ples, sans prendre un parti sur les questions un tel parti, Et qui peut prendre qu'elles agitent? surtout de doute et de controverse, dans un sicle et sa parole sans que sa pense en reste pleine l'crivain mue? On ne peut demander que deux soit libre choses : premirement, que sa conviction et intelligente, et le christianisme n'en veut de l'histoire, de se donner de remonter l'origine de leurs des peureligions, ternelles conviction qui le domine, dont les efforts

pas

16 d'autres

PRFACE.

raisonnable : c'est l'adhsion que rclamait saint Paul. Secondement, que le dsir de justiles n'entrane fier une croyance pas dnaturer et de condouteux faits, se payer de tmoignages C'est le pril de ceux qui se squences prmatures. d'une opiau service d'un systme mettent nouveau, et de sa lgitimit, mal assure nion humaine, Mais rien ne presse des preuves. de trouver presse : ils doivent avoir trop de chrtiens les crivains dans la foi qu'ils professent, confiance pour croire Rassuni de leurs travaux. d'eux qu'elle ait besoin de Dieu, de l'me, rs sur ces questions suprmes tant d'intelligences, ils de l'ternit, qui troublent doivent libert et avec ni de ngliger Ils savent respect. aucune vrit, si petite, ni de dissimuler si profane, mme si embarrassante Si leurs qu'elle paraisse. justifier un dogme rvl, recherches aboutissent non pour le besoin ils le constatent, du dogme, mais par amour du vrai. Et, s'il ne leur est pas donn de lever les obstacles et de conduire la science jusla foi, ils savent point o elle rencontrerait qu'au que d'autres en patience que Dieu est Ceux qui la pousseront pensant que au bout. me suivront dans ces recherches une d'environ mille priode et peut-tre la plus humain. Nous ferons plus loin ; et ils prennent la route est longue, mais auront ans, la de la avec entrer dans la science avec qu'il n'est permis

parcourir sixime partie vie du genre

laborieuse ce chemin

PRFACE.

17

mais avec attachement lenteur, l'opinitre qu'on met un grand Nous aurons beau nous spectacle. enfoncer dans les forts de la Germanie, dans les obscurits d'un temps mal connu, nos tudes ne seront pas si trangres aux procqu'elles paraissent du prsent, ses dangers, ses espcupations rances. Nous y verrons la civilisation, dont nous sommes les disciples, et au besoin les soldats, aux rvolution prises avec la plus formidable qui fut jade ces destrucde ces rvolts, mais, avec l'invasion teurs de l'ancien monde, je veux dire les barbares. Nous apprendrons ne pas dsesprer de notre sicle en traversant o la des poques plus menaantes, violence sembla de toutes o matresse choses, et constituer les peuples chaque effort pour clairer succombait rvolte de cet esprit de sous une nouvelle et dtestait la loi. dsordre la lumire qui mprisait nous Assurs que la civilisation ne peut pas prir, connatrons aussi comment parole plus que par l'pe, que par la justice. Je ne puis terminer cette elle peut vaincre, et par la charit par la autant

Prface sans remercier de leurs les savants assist encouragequi m'ont En les nommant, ments et de leurs conseils. je ne la responsabilit de leur faire partager risque point de mes opinions Comment ouet de mes erreurs. du bienveillance regrettable blierais-je que la M. Fauriel et m'en m'ouvrit aplanit la carrire les premires ces recherches difficults? Et comde

18 tairais-je communications ment

PRFACE.

tout ce que j'ai d aux obligeantes de M. Victor le Clerc, de M. Ch. Leet surtout de MM. Doellinger et Phillips, normant, aussi de M. Ampre, dont j'ai trouv l'rudition inpuisable que l'amiti?

LES

GERMAINS AVANT LE CHRISTIANISME

PREMIERE

PARTIE

LA GERMANIE AVANT LES ROMAINS

CHAPITRE

PREMIER

ETENDUE DELAGERMANIE.ORIGINE GERMAINS DES

La Germanie connue des Romains au La Germanie commenait connue et s'tendait un peu plus loin que la Vistule. des Romains. Rhin, Les vainqueurs du monde ne considraient pas sans dans ses cette vaste contre, inquitude qui cachait un peuple forts et dans ses marcages belliqueux, suspendu comme une menace ternelle sur leur empire. tout leur danCependant ils taient loin de connatre ger : derrire la Germanie des Romains j'en crois d-

20

CHAPITRE I.

l'tenune autre, dont ils ne surent jamais ni couvrir due ni les forces. par l'ocLesGermains Csar attaqua les populations germaniques de Csar et de Tacite. du ct o elles du Rhin, c'est--dire cident, du ct les plus avancs. Aussi, quand il avaient leurs postes bandes les rencontra sur les frontires de la Gaule, ces et de une vie de hasards par errantes, dsorganises tous les signes de la dernire barmontraient combats, n'adorant sans sacrifices, que le barie : sans prtres, ni ni proprit, la lune et le feu, ne connaissant soleil, et ni d'autre gloire que celle de dtruire agriculture, de camper en sret au milieu des dserts qu'elles avaient faits. Ce furent les premiers Germains que l'on dans les triomphes, connut Rome, qu'on vit traner et sur lesquels aux btes dans les amphithtres, jeter on jugea tous les autres (1). de Tacite pntrent Les recherches plus avant. Sur d'abord que le dsles deux rives du Rhin il n'aperoit ordre des migrations qui se succdent ; il voit les dtruits par leurs voiBataves chasss, les Bructres sins. Cependant il dmle dj dans cette race inquite la puret du des caractres de grandeur et de beaut, les peuplades sang, la svrit des mariages. Derrire au sol par le mobiles, il trouve des tribus attaches travail et la proprit; il trouve des pouvoirs hrdi(1) Caesar,de Bello Gallico, VI. C'est ces peuples des frontiresqu'il faut restreindre la comparaisonsavante, mais trop gnraleque M.Guizot tablit entre les Germainset les sauvagesdu nouveaumonde. Histoire de la civilisation en France, t. I, leonVII.

ORIGINE DES GERMAINS. taires,

21

des cultes publics. A mesure qu'il s'enfonce vers les sacerdoces sont plus honors, l'Orient, les rois mieux Mais ses obis, les nations plus nombreuses. comme les armes romaines, renseignements s'arrtent, au bord de l'Elbe; au del il ne connat plus gure que des noms. Toutefois, parmi ces noms, il en faut deux. Ce sont d'abord les peuples que l'hisremarquer torien appelle Gottones, chez lesquels on reconnat une branche de la grande nation des Goths. Les autres, sont les aeux des Sudois, de qu'il nomme Suiones, ces mmes Scandinaves qui devaient faire un jour, par leurs pirateries, la terreur de l'Europe. Il les reprsente dj comme des navigateurs enrichis redouts, vivant sous l'autorit d'un roi et dans un de butin, commerce troit avec les dieux, dont ils prtendaient voir les ttes rayonnantes se montrer, au lever du soleil, au-dessus des flots immobiles par elles de la mer du Nord (1). Ces deux avaient

nations, ngliges pris soin de leur gloire;

les historiens, avaient des tra-

ditions. Les Goths conservaient des chants d'une LesGoths. piques haute antiquit, de la qu'on rcitait en s'accompagnant les conqutes de la nation et harpe, et qui clbraient les grandes actions de ses hros. On y voyait comment (1) Tacite, deGermania, 29, 33; 4, 18; 38, 39, 40, 43, 44. Geijer (Svea Rikes Haefder, p. 80) reconnat chez les Suiones de Tacite le nom national des Sudois; Svea, pluriel Svear, et Svithiod, le peuple de Sude.

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CHAPITRE I.

nom de Gaut, avait donn le jour un dieu, ador sous le deux dynasties de rois, les Amales et les Balthes, qui aux tribus de l'est, l'autre celles l'une commandaient, une caste divin descendait Du mme sang de l'ouest. dans leur langue par le titre nobles dsigns d'hommes On les reconnaissait c'est- dire demi-dieux. d'Anses, leurs longs cheveux, et c'tait de leurs rangs qu'on Les prtres et les prtres. tirait les chefs de guerre ils avaient des lois l'autorit souveraine; partageaient couo ils paraissaient des pompes solennelles, crites, leur idole sur un char ronns de la tiare, conduisant et des sacrides adorations au milieu de triomphe, donc sous des institutions fices (1). Les Goths vivaient dans ce respect du pass qui fait les grands antiques, tait rempli du nom Tout le Nord, disaient-ils, peuples. d'avoir D'un ct, ils se vantaient de leurs anctres. et les bords de la mer Baltique occup la Scandinavie jusqu' la Vistule; et, en effet, trois sicles avant l're des Goths le navigateur Pythas rencontrait l'ambre. (Gottones) sur ces rivages o l'on recueillait encore aux Les gographes grecs et latins les trouvent chrtienne, (1) Jornandes, de Rebus Geticis, cap. V. Cantu majorum facta modulationibus, citharisque canebant... cap. XIV.Horum ergo ut ipsi suis fabulis ferunt, primus fuit Gapt... cap. XI. Jam proceres suos quasi qui fortuna vincebant, non puros homines sed semideos, id est Anses, vocavere... etc. Cf. Sozomne, Hist. eccl., cap. XXXVII, o'ctvov pu,ap.ar,; tp' Le JTM;. tmoignage de Jornandes, compromis par l'abus qu'on en a fait longtemps, me parait apprci avec beaucoup de sagesse par Geijer, Svea Rikes Haefder, p. 96, qui attache un grand prix aux traditions recueillies dans l'Histoire, des Goths, sans mconnatre les erreurs qu'y mle l'rudition indiscrtede l'historien.

ORIGINE DES GERMAINS. mmes

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des anciens habitants lieux; et le souvenir s'est conserv dans la partie de la Sude appele aujourd'hui Gothland, le pays des Goths (1). D'un autre ct, leurs avaient pntr jusqu'au del du Danube; ils se armes les fondateurs du royaume des Gtes, qui prtendaient touchait aux frontires de la Macdoine, et qui occupa l'attention des Grecs. Les Goths et les Gtes sont en effet considrs comme une mme race par tous les crivains qui les connurent depuis le troisime jusqu'au sixime sicle. Les deux noms ont la mme racine et le mme sens dans les langues et tous les germaniques, caractres des deux peuples s'accordent. Si tant d'anaen eux deux logies ne trompent pas, il faut reconnatre d'une mme famille. branches Les Gtes, fixs au midi sous un ciel plus doux, s'amollirent et cessrent d'tre libres. Les Goths, tablis au septentrion, y demeurrent inconnus et indompts, jusqu'au temps o, entrans ils se jetrent sur le terripar le torrent des invasions, toire de leurs frres, se confondirent avec eux, et ne formrent plus qu'une seule nation, qui tonna d'abord le monde par le renversement de l'empire et romain, (1) Jornandes, cap. IV. Pline, Hist. nat., lib. XXXVII, ap. XI.Pythas : c Guttonibus, Germaniaegenti accoli, AEstuarium Oceani,MentonomonnoS mine, spatio stadiorum sex millium. Ptolme : KcO.eTtui iJiw xttX Torai TI y.vsia,za! y.aTsy_cuiv arri... r p.