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Correspondances en Métabolismes Hormones Diabètes et Nutrition - Vol. XV - n° 3 - mars 2011 63 dossier thématique Endocrinopathies familiales Les diabètes insulinorésistants familiaux Familialinsulin-resistantdiabetes Camille Vatier, Caroline Le Dour, Véronique Béréziat, Martine Caron-Debarle, Olivier Lascols, Jocelyne Magré, Jacqueline Capeau, Corinne Vigouroux* » Les diabètes insulinorésistants familiaux, génétiquement déterminés, sont des entités rares. Il s’agit d’un groupe de maladies monogéniques, pour lesquelles plusieurs gènes différents ont été mis en cause. » Il faut distinguer d’une part les syndromes d’insulinorésistance dus à un défaut primaire d’activation du récepteur de l’insuline, caractérisés essentiellement par la présence d’un acanthosis nigricans et d’une hyperandrogénie chez la femme, sans anomalie patente de répartition du tissu adipeux, et d’autre part, les syndromes lipodystrophiques dans lesquels l’insulinorésistance postrécepteur s’associe à des troubles du développement ou de la répartition du tissu adipeux. Enfin, l’insulinorésistance peut faire partie d’autres syndromes génétiques, le plus souvent en association avec une obésité sévère. » Les mutations du récepteur de l’insuline sont responsables de trois syndromes différents : - le syndrome d’insulinorésistance de type A, lié dans la plupart des cas à des mutations hétérozygotes affectant l’activité tyrosine kinase du récepteur. Bien que sa transmission soit autosomale dominante, le diagnostic est le plus souvent posé chez une jeune fille présentant la triade hyperinsulinisme- acanthosis nigricans -hyperandrogénie en l’absence de surpoids ; - le lépréchaunisme ; - le syndrome de Rabson-Mendenhall. Ces deux derniers, dus à des mutations touchant le plus souvent les deux allèles du gène du récepteur de l’insuline, sont de révélation néonatale ou pédiatrique, respectivement. À l’insulinorésistance majeure s’associent des signes dysmorphiques. Le pronostic est sombre, avec une survie allant de quelques mois à quelques années, et qui dépend du niveau d’activité résiduelle du récepteur de l’insuline. » Les diabètes insulinorésistants familiaux avec lipodystrophies sont classés selon le caractère généralisé ou partiel de la lipoatrophie : - le syndrome de Berardinelli-Seip, ou lipoatrophie congénitale généralisée, est le plus souvent lié aux mutations de la seipine, dont le rôle physiologique n’est qu’incomplètement connu, mais qui semble participer à la formation de la gouttelette lipidique adipocytaire, ou d’AGPAT2 (1-acylglycerol-3-phosphate O-acyltransferase 2), enzyme de la voie de synthèse des triglycérides. Plus rarement, des mutations de la cavéoline 1 ou de la cavin-1, qui appartiennent à des invaginations membranaires appelées caveolae et qui pourraient aussi concourir à la formation de la gouttelette lipidique adipocytaire, ont été rapportées dans des syndromes de Berardinelli-Seip ; - le syndrome de Dunnigan, ou lipodystrophie partielle familiale, est lié le plus souvent aux mutations du gène de la lamine A/C, protéine du réseau filamentaire de la lamina situé sous la membrane interne du noyau cellulaire ou du gène du PPARγ (Peroxisome Proliferator- Activated Receptor gamma), facteur transcriptionnel adipogénique. Des mutations dans d’autres gènes rendent compte d’autres cas, plus rares ; il s’agit des gènes codant pour AKT2 (intermédiaire de la voie de signalisation insulinique), CIDEC (protéine de la gouttelette lipidique adipocytaire) ou celui de la périlipine, qui structure la gouttelette et régule la lipolyse adipocytaire et dont l’implication dans des lipodystrophies partielles autosomales dominantes vient d’être montrée ; - d’autres mutations de la lamine A/C donnent des syndromes d’insulinorésistance avec lipodystrophie atypique, parfois minime (laminopathies métaboliques) et des syndromes de lipodystrophies partielles ou généralisées dans le cadre de syndromes de vieillissement accélérés (dysplasie acromandibulaire, Points forts * Faculté de médecine Pierre-et-Marie-Curie, site Saint-Antoine, université Paris-6 Pierre-et-Marie-Curie, centre de recherche Saint-Antoine, Inserm UMRS 938, Paris.

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Page 1: Les diabètes insulinorésistants familiaux - edimark.fr · enzyme de la voie de synthèse des triglycérides. Plus rarement, des mutations de la cavéoline 1 ou de la cavin-1,

Correspondances en Métabolismes Hormones Diabètes et Nutrition - Vol. XV - n° 3 - mars 2011 63

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Endocrinopathies familiales

Les diabètes insulinorésistants familiauxFamilial�insulin-resistant�diabetesCamille Vatier, Caroline Le Dour, Véronique Béréziat, Martine Caron-Debarle, Olivier Lascols, Jocelyne Magré, Jacqueline Capeau, Corinne Vigouroux*

» Les diabètes insulinorésistants familiaux, génétiquement déterminés, sont des entités rares. Il s’agit d’un groupe de maladies monogéniques, pour lesquelles plusieurs gènes différents ont été mis en cause.

» Il faut distinguer d’une part les syndromes d’insulinorésistance dus à un défaut primaire d’activation du récepteur de l’insuline, caractérisés essentiellement par la présence d’un acanthosis nigricans et d’une hyperandrogénie chez la femme, sans anomalie patente de répartition du tissu adipeux, et d’autre part, les syndromes lipodystrophiques dans lesquels l’insulinorésistance postrécepteur s’associe à des troubles du développement ou de la répartition du tissu adipeux. Enfin, l’insulinorésistance peut faire partie d’autres syndromes génétiques, le plus souvent en association avec une obésité sévère.

» Les mutations du récepteur de l’insuline sont responsables de trois syndromes différents : - le syndrome d’insulinorésistance de type A, lié dans la plupart des cas à des mutations hétérozygotes affectant l’activité tyrosine kinase du récepteur. Bien que sa transmission soit autosomale dominante, le diagnostic est le plus souvent posé chez une jeune fille présentant la triade hyperinsulinisme-acanthosis nigricans-hyperandrogénie en l’absence de surpoids ;

- le lépréchaunisme ; - le syndrome de Rabson-Mendenhall.

Ces deux derniers, dus à des mutations touchant le plus souvent les deux allèles du gène du récepteur de l’insuline, sont de révélation néonatale ou pédiatrique, respectivement. À l’insulinorésistance majeure s’associent des signes dysmorphiques. Le pronostic est sombre, avec une survie allant de quelques mois à quelques années, et qui dépend du niveau d’activité résiduelle du récepteur de l’insuline.

» Les diabètes insul inorés istants fami l iaux avec lipodystrophies sont classés selon le caractère généralisé ou partiel de la lipoatrophie : - le syndrome de Berardinelli-Seip, ou lipoatrophie congénitale généralisée, est le plus souvent lié aux mutations de la seipine, dont le rôle physiologique n’est qu’incomplètement connu, mais qui semble participer à la formation de la gouttelette lipidique adipocytaire, ou d’AGPAT2 (1-acylglycerol-3-phosphate O-acyltransferase 2), enzyme de la voie de synthèse des triglycérides. Plus rarement, des mutations de la cavéoline 1 ou de la cavin-1, qui appartiennent à des invaginations membranaires appelées caveolae et qui pourraient aussi concourir à la formation de la gouttelette lipidique adipocytaire, ont été rapportées dans des syndromes de Berardinelli-Seip ;

- le syndrome de Dunnigan, ou lipodystrophie partielle familiale, est lié le plus souvent aux mutations du gène de la lamine A/C, protéine du réseau filamentaire de la lamina situé sous la membrane interne du noyau cellulaire ou du gène du PPARγ (Peroxisome Proliferator-Activated Receptor gamma), facteur transcriptionnel adipogénique. Des mutations dans d’autres gènes rendent compte d’autres cas, plus rares ; il s’agit des gènes codant pour AKT2 (intermédiaire de la voie de signalisation insulinique), CIDEC (protéine de la gouttelette lipidique adipocytaire) ou celui de la périlipine, qui structure la gouttelette et régule la lipolyse adipocytaire et dont l’implication dans des lipodystrophies partielles autosomales dominantes vient d’être montrée ;

- d’autres mutations de la lamine A/C donnent des syndromes d’insulinorésistance avec lipodystrophie atypique, parfois minime (laminopathies métaboliques) et des syndromes de lipodystrophies partielles ou généralisées dans le cadre de syndromes de vieillissement accélérés (dysplasie acromandibulaire,

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* Faculté de médecine Pierre­et­Marie­Curie, site Saint­Antoine, université Paris­6 Pierre­et­Marie­Curie, centre de recherche Saint­Antoine, Inserm UMRS 938, Paris.

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Endocrinopathies familiales

L es diabètes insulinorésistants familiaux se déve-loppent chez les patients atteints d’un syndrome d’insulinorésistance sévère. Il s’agit donc d’un

groupe de pathologies dans lesquelles les troubles majeurs de la sensibilité à l’insuline dominent le tableau clinique et biologique. Selon l’étiologie, ces anomalies s’associent ou non à une lipodystrophie qui va entraî-ner, outre le diabète, une dyslipidémie souvent sévère.La résistance à l’insuline est définie par une diminution de l’effet biologique de l’insuline au niveau des différents tissus cibles. Néanmoins, bien que l’insuline exerce des fonctions pléiotropes sur les métabolismes glucidique, lipidique, protéique mais aussi sur la prolifération cellu-laire, on restreint en pratique clinique la définition de la résistance à l’insuline à “un état dans lequel des quantités d’insuline supérieures à la normale sont nécessaires pour maintenir l’homéostasie glucidique” (1). Ainsi, c’est l’ina-déquation entre la glycémie et l’insulinémie qui permet de mettre en évidence chez les patients une insulino-résistance sur le plan biologique, bien que l’évaluation quantitative de la sensibilité à l’insuline nécessite des explorations métaboliques plus précises, comme le clamp euglycémique hyperinsulinémique. Les formes familiales d’insulinorésistance sévères sont des syndromes rares monogéniques qui peuvent être diagnostiqués dès la naissance ou à l’âge adulte (2,�3). Ces syndromes sont schématiquement classés en trois groupes selon leur origine étiopathogénique, i) provenant d’un défaut de la transmission du signal de l’insuline primitif, comme en cas de mutations du récepteur de l’insuline, ou ii) secondaire à des anomalies de développement et/ou de répartition corporelle du tissu adipeux, ou enfin iii) apparaissant dans le contexte d’autres syndromes génétiques.

Le tableau présente les principales causes connues des syndromes d’insulinorésistance.

Quelques notions physiopathologiques

La résistance à l’insuline joue un rôle clé dans la patho-genèse de nombreuses maladies dont l’obésité de type androïde, le diabète, l’hyperandrogénie ovarienne, la stéatose hépatique ou la stéatohépatite et l’hyperten-sion artérielle.L’insuline exerce un effet majeur sur la régulation de l’ho-méostasie glucidique en favorisant la mise en réserve du glucose sous forme de glycogène dans le foie et le muscle (glycogénogenèse), en inhibant la production hépatique de glucose (inhibition de la néoglucogenèse et de la glycogénolyse) et en activant le captage du glucose par le muscle et le tissu adipeux et l’utilisation du glucose dans la glycolyse. Sur le plan lipidique, l’insu-line active les voies de la lipogenèse hépatique et de la synthèse des triglycérides adipocytaires, tandis qu’elle s’oppose à la lipolyse adipocytaire. Elle stimule aussi la synthèse protéique et inhibe la protéolyse musculaire. Enfin, elle a un rôle important dans la croissance, la différenciation et l’inhibition de l’apoptose cellulaire.Les actions de l’insuline sont initiées par son interaction avec un récepteur protéique spécifique transmembra-naire, à activité tyrosine kinase.Les différents mécanismes classiquement susceptibles d’induire une résistance à l’insuline sont des anomalies situées au niveau du récepteur ou après la fixation de l’hormone sur son récepteur au niveau de la cascade des voies de signalisation.

progéria), pouvant aussi être liés à des mutations de l’enzyme de maturation de la prélamine A en lamine A, ZMPSTE24 ;

- d’autres syndromes lipodystrophiques familiaux, généralisés ou partiels, sont toujours de cause inconnue : le rôle d’autres gènes reste à découvrir.

» Plusieurs syndromes génétiques comportent une insulinorésistance s’associant à d’autres signes cliniques spécifiques, l’insulinorésistance étant souvent, mais pas toujours, liée au surpoids.

» L’identification des phénotypes et des génotypes de ces pathologies est encore incomplète mais ces maladies, diverses, sporadiques ou génétiquement déterminées, sont

des modèles pour l’étude du déterminisme plus général de la résistance à l’insuline.

» Le traitement est identique au traitement des autres situations d’insulinorésistance : exercice physique, insulinosensibilisateurs (type metformine ou glitazones), insuline. Des essais cliniques de traitement par la leptine dans les lipoatrophies avec déficit en leptine sont encourageants.

Mots-clés : Insulinorésistance – Lipodystrophies – Diabète – Hypertriglycéridémie – Familial.

Keywords: Insulin-resistance – Lipodystrophies – Diabetes – Hypertriglyceridemia – Familial.

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Les�diabètes�insulinorésistants�familiaux�

Tableau. Classification des principales causes de diabètes familiaux insulinorésistants.

Phénotype Génotype

Syndromes d’insulinorésistance extrême par mutation du récepteur de l’insuline (chromosome 19)

Syndrome d’insulinorésistance de type A de Kahn

• Acanthosis nigricans et hyperinsulinisme avec, chez la femme, un syndrome des ovaires polykystiques

• Autosomal dominant dans la plupart des cas, lié à des mutations hétérozygotes du gène du récepteur de l’insuline affectant son activité tyrosine kinase

• Dans 75 à 90 % des cas, gène du récepteur de l’insuline normal, autres gènes en cause ?

Syndrome de Rabson-Mendenhall

• Retard de croissance intra-utérin• Insulinorésistance évoluant vers le diabète• Faciès pseudo-acromégalique• Anomalies des phanères• Décès dans les premières années de vie

• Autosomique récessif• Mutations homozygotes ou hétérozygotes composites

du gène du récepteur de l’insuline• Défaut d’activité du récepteur de l’insuline

Lépréchaunisme • Retard de croissance intra-utérin• Dysmorphie faciale

(leprechaun : gnome du folklore irlandais)• Hypertrophie des organes génitaux• Atrophie des tissus adipeux et musculaire• Insulinorésistance majeure• Décès avant l’âge de 1 an

• Autosomique récessif• Mutations homozygotes ou hétérozygotes composites

du gène du récepteur de l’insuline• Défaut d’activité du récepteur de l’insuline

Syndromes lipodystrophiques avec insulinorésistance

Formes généralisées

Syndrome de Berardinelli-Seip :lipodystrophie généralisée congénitale de type 1(BSCL1 ou CGL1)

• Lipoatrophie généralisée néonatale avec graisse mécanique sous-cutanée préservée

• Hypertrophie musculaire• Hépatomégalie stéatosique, risque de cirrhose• Cardiopathie hypertrophique• Diabète insulinorésistant• Hypertriglycéridémie sévère avec risque

de pancréatite aiguë • Leptine effondrée

• Autosomique récessif• Mutations nulles ou faux-sens du gène AGPAT2

(1-acylglycerol-3-phosphate O-acyltransferase, chromosome 11)

Syndrome de Berardinelli-Seip :lipodystrophie généralisée congénitale de type 2(BSCL2 ou CGL2)

Phénotype similaire à celui du BSCL de type 1, mais avec une lipoatrophie totale, touchant aussi la graisse mécanique, un retard mental• Leptine effondrée

• Autosomique récessif • Mutations nulles du gène BSCL2 codant pour la seipine

(chromosome 9)

CAV1 • Lipoatrophie généralisée sévère, insulinorésistance • Dyslipidémie

• Mutation du gène CAV1 codant pour la protéine cavéoline 1 impliquée dans la signalisation de l’insuline et des facteurs de croissance, la formation de la gouttelette lipidique et dans le recyclage des lipides

PTRF • Lipoatrophie généralisée sévère, insulinorésistance • Dystrophie musculaire

• Mutation du gène PTRF codant pour la protéine cavin, composant essentiel des caveolae (son absence provoque une perte des protéines cavéolines)

Formes partielles

Lipodystrophie partielle familiale de Dunnigan (FPLD2)

• Lipoatrophie péripubertaire touchant les membres, le tronc, l’abdomen

• Accumulation de graisse au niveau du visage et du cou, des creux sus-claviculaires et axillaires

• Acanthosis nigrans• Parfois, atteinte myopathique, et/ou troubles du rythme

et de la conduction cardiaques• Athérosclérose exacerbée• Dyslipidémie sévère avec hypertriglycéridémie

prédominante• Diabète insulinorésistant après la puberté• Leptine basse

• Autosomique dominant• Mutations faux-sens hétérozygotes du gène LMNA

codant pour la lamine A/C

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Endocrinopathies familiales

Laminopathies métaboliques • Pas ou peu de lipoatrophie• Parfois, atteinte myopathique, et/ou troubles du rythme

et de la conduction cardiaques• Athérosclérose exacerbée et précoce• Dyslipidémie sévère avec hypertriglycéridémie

prédominante• Diabète insulinorésistant après la puberté

• Mutations du gène LMNA codant pour la lamine A/C différentes des substitutions R482 du FPLD2 typique

Lipodystrophie partielle familiale liée à PPARg (FPLD3)

• Lipoatrophie des membres et des fesses• Hypertension artérielle• Syndrome métabolique sévère• Dyslipidémie

• Autosomique dominant• Mutations hétérozygotes inactivatrices du gène de PPARγ

(Peroxisome Proliferator-Activated Receptor Gamma)

Lipodystrophie partielle familiale liée à Akt2/PKBb

• Insulinorésistance majeure• Lipodystrophie

• Autosomique dominant• Mutation hétérozygote de Akt/PKB (intermédiaire

de la voie de signalisation de l’insuline)• Une seule famille décrite

Périlipine • Lipodystrophie diffuse• Aspect cushingoïde• Insulinorésistance• Hypertriglycéridémie• Hypertension artérielle

• Mutation du gène PLIN1 codant pour la périlipine (impliquée dans la structure de la gouttelette lipidique)

CIDEC • Lipoatrophie des membres et des fesses• Dyslipidémie• Diabète acidocétosique

• Mutation de CIDEC (impliqué dans la régulation de la formation de la gouttelette lipidique)

Lipodystrophies partielles de la dysplasie acromandibulaire

• Lipoatrophie, insulino-résistance, hypertriglycéridémie• Retard de croissance postnatal• Anomalies osseuses, cutanées

• Autosomique récessif• Mutations homozygotes ou hétérozygotes composites

du gène LMNA (lamine A/C) : formes avec lipodystrophie partielle, épargnant la partie supérieure du corps ou double mutation de la protéase de maturation de la lamine A, ZMPSTE 24 : formes avec lipoatrophie généralisée

Lipodystrophie de la progéria de Hutchinson-Gilford

• Syndrome de vieillissement accéléré débutant vers l’âge de 1 an

• Dysmorphie faciale,• Signes osseux, cutanés et cardiaques

(athérosclérose accélérée)• Décès en moyenne vers 13 ans (de cause cardio-vasculaire)

• De novo• Mutation hétérozygote du gène de la lamine A/C

aboutissant à une prélamine A délétée de 50 acides aminés, ne pouvant subir sa maturation physiologique

Autres lipodystrophies partielles des syndromes progéroïdes

• Lipoatrophies après la puberté• Signes de vieillissement cutanés et cardiaques• Dyslipidémie• Diabète insulinorésistant

• Mutation de novo• Mutation hétérozygote de la lamine A/C

Insulinorésistance associée à d’autres syndromes génétiques

Syndrome d’Alström • Obésité• Rétinopathie pigmentaire• Surdité neurosensorielle• Cardiomyopathie• Insulinorésistance

• Autosomique récessif• Mutations du gène ALMS1

Syndrome de Prader-Willi • Obésité massive• Retard mental• Hypogonadisme• Retard statural

• Défaut d’expression de gènes de l’allèle paternel du chromosome 15q11-13

Dystrophie myotonique de Steinert

• Myotonie, atrophie musculaire• Cataracte• Troubles du rythme cardiaque• Retard mental• Insulinorésistance

• Autosomique dominant• Expansion de triplets dans le gène DMPK

(Dystrophia Myotonica Protein Kinase)

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Les�diabètes�insulinorésistants�familiaux�

L’expression de la résistance à l’insuline est modulée par des facteurs d’environnement, et notamment l’activité physique et l’équilibre alimentaire.

Récepteur de l’insulineLe récepteur de l’insuline est un hétérotétramère com-posé de deux sous-unités alpha extracellulaires (qui lient l’hormone) et de deux sous-unités bêta intracellulaires comportant un domaine tyrosine kinase qui permet la transmission du signal (figure 1). Un seul gène, constitué de 22 exons, situé sur le bras court du chromosome 19 en p13.2 code pour l’ensemble des sous-unités. Ce récepteur est présent dans tous les tissus ; il est par-ticulièrement abondant dans le foie, le muscle et le tissu adipeux (4,�5).

Principaux mécanismes de l’insulinorésistance d’origine monogéniqueSi l’on conçoit bien que les mutations du récepteur de l’insuline, qui entraînent un défaut de fixation de l’insuline sur ce récepteur, induisent une inhibition de la voie de signalisation à l’origine d’un tableau d’in-sulinorésistance, les mécanismes impliqués dans les lipodystrophies sont plus complexes.En effet, il peut sembler paradoxal que le défaut de tissu adipeux puisse conduire aux mêmes complications que l’obésité. En réalité, le concept de lipotoxicité permet de réconcilier ces observations. Selon cette théorie, la limitation des possibilités d’expansion du tissu adi-peux, qui a atteint son maximum dans l’obésité, ou qui est génétiquement limitée dans les lipodystrophies, conduit aux troubles métaboliques (6) [figure 2, p. 68].Le tissu adipeux périviscéral ayant atteint son expan-sion maximale libère des acides gras libres en grande

quantité. D’une part, ceux-ci entrent en compétition avec le glucose pour leur oxydation, en particulier

Ataxie de Friedreich • Ataxie• Cardiomyopathie• Diabète

• Autosomique récessif• Expansion de triplets dans le gène de la frataxine

Progéria et syndromes progéroïdes

• Dysmorphie• Athérosclérose précoce• Anomalies cutanées, cataracte précoce,

surdité, risque de cancers• Vieillissement accéléré• Insulinorésistance

• Mutation dans le gène WRN (codant pour une hélicase de l’ADN) [syndrome de Werner, autosomique récessif ]

Syndrome AREDYLD • Retard de croissance• Malformations osseuses, rénales, dentaires• Hypopilosité• Lipoatrophie• Diabète

• Inconnu

Ataxie télangiectasie • Ataxie cérébelleuse• Télangiectasies• Déficit immunitaire• Prédisposition aux cancers

• Autosomique récessif• Mutation du gène ATM, impliqué dans la réparation

de l’ADN et le contrôle du cycle cellulaire

Figure 1. Schéma simplifié des voies de signalisation de l’insuline. En l’absence d’hormone, les sous-unités alpha exercent une inhibition permanente sur l’activité tyrosine kinase des sous-unités bêta. La liaison de l’insuline sur son récepteur provoque un changement conformationnel qui permet de lever cette inhibition. L’activité tyrosine kinase permet la trans-autophosphorylation de chacune des sous-unités bêta sur certains résidus tyrosine spécifiques (pY), conférant au récepteur ainsi activé la capacité à phosphoryler d’autres protéines. Les protéines adaptatrices phosphorylées par le récepteur (protéines de la famille des IRS ou protéines Shc) servent alors d’ancrage pour des protéines effectrices à activité enzymatique. Ainsi, la phosphatidylinositol 3 kinase (PI3K) phosphoryle des lipides membranaires, permettant d’activer d’autres enzymes comme AKT/PKB, qui à son tour inactive la glycogène synthase 3 kinase bêta (GSK3β) par sérine-phosphorylation. La cascade des MAP kinases (MEK, MAPK) est surtout impliquée dans la prolifération et la différenciation cellulaires.

Récepteur de l’insuline

Membrane plasmique

Raf1 Ras SOS

Grb2

SHC

ProtéinesIRS

pY

pY pYpY

MEK

MAPK

SHP-2Fyn

PI3K

PDK1

PP1

AKT/PKB

GSK3β

ADN/ARN/Synthèse protéique Synthèse du glycogène Transport du glucose

MétabolismeCroissance cellulaire

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Endocrinopathies familiales

au niveau du tissu musculaire, entraînant un défaut de captage du glucose et une sécrétion d’insuline plus marquée (7). D’autre part, les acides gras ou les dérivés d’acides gras intracellulaires en excès, stoc-kés de façon ectopique sous forme de triglycérides dans les tissus autres que le tissu adipeux, s’opposent directement à la signalisation insulinique (8). De plus, le tissu adipeux en excès sécrète également des cyto-kines inflammatoires, comme des interleukines, le TNF alpha, des agents prothrombotiques et d’autres adipokines qui sont délétères pour la sensibilité à l’insuline.En cas de lipoatrophie, seule une quantité limitée d’acides gras peut être stockée sous forme de trigly-cérides au niveau du tissu adipeux. L’excès d’acides gras s’accumule alors au niveau du muscle, du foie et du pancréas, contribuant à l’apparition d’une insulino-résistance, la glycémie étant initialement compensée par l’hyperinsulinisme. La survenue progressive d’une amyloïdose insulaire et d’une atrophie des cellules bêta conduit à un diabète. Dans les lipoatrophies, le déficit endocrine du tissu adipeux, qui sécrète moins de leptine et moins d’adiponectine, contribue à l’insulinorésistance et à la lipotoxicité.Alors que la leptine est diminuée de façon grossière-ment proportionnelle à la sévérité de la lipoatrophie (9), la production d’adiponectine est plus variable. Nous avons récemment montré au laboratoire que dans les lipoatrophies généralisées congénitales, l’adiponec-tine circulante était totalement effondrée en cas de mutations de AGPAT2, alors qu’une sécrétion résiduelle

était observée chez les patients atteints de mutations de la seipine (10). En revanche, en cas de mutations du récepteur de l’insuline, l’adiponectine sérique est plus élevée que chez les sujets témoins, ce qui suggère que les mutations inactivatrices du récepteur de l’insuline puissent lever l’effet physiologique inhibiteur de l’hor-mone sur la sécrétion d’adiponectine (11).Le syndrome des ovaires polykystiques, l’acanthosis�nigricans et l’aspect pseudo-acromégalique, symptômes retrouvés à des niveaux de sévérité variable dans tous les syndromes d’insulinorésistance, seraient liés à l’effet facteur de croissance de l’hyperinsulinisme majeur, qui agit sur les récepteurs de l’insuline mais aussi, lorsque l’insuline est en grande quantité, sur le récepteur de l’Insulin-like�Growth�Factor 1 (IGF1), de structure voisine. En revanche, la dyslipidémie et la stéatose hépatique se voient dans les lipodystrophies, mais pas en cas de mutations du récepteur de l’insuline. Ces signes seraient liés à la persistance de la stimulation de la lipogenèse hépatique par l’insuline : en effet, dans l’insulinorésis-tance postrécepteur, cette voie de signalisation serait épargnée (12).Enfin, dans les insulinorésistances survenant dans le cadre d’autres syndromes génétiques, l’obésité sévère peut être en cause. Dans la myotonie de Steinert, des défauts d’expression (13) ou d’épissage (14) du transcrit du récepteur de l’insuline ont été rapportés.

Aspects clinique et biologique

CliniqueLes conséquences cliniques de la résistance à l’insuline peuvent être classées en deux catégories : celles résul-tant du défaut d’action de l’insuline et celles résultant de l’hyperinsulinisme, agissant sur le récepteur de l’IGF1 ou sur certaines voies de signalisation de l’insuline épar-gnées dans les insulinorésistances postrécepteur.L’intolérance au glucose et le diabète sont les consé-quences du déficit d’action de l’insuline, comme le retard de croissance et les lipoatrophies, que l’on voit dans les insulinorésistances majeures par mutation des deux allèles du gène du récepteur de l’insuline, de révélation précoce.La notion d’hyperinsulinémie compensatrice est illus-trée par deux caractéristiques cliniques communes à de nombreux patients insulinorésistants : l’acanthosis�nigricans et l’hyperandrogénie ovarienne.L’acanthosis�nigricans, lésion hyperkératosique et bru-nâtre de l’épiderme, prédominant aux plis de flexion (plis axillaires et nuque le plus souvent), donne à la peau un aspect rugueux et épais. La sévérité de l’acanthosis�

Figure 2. Mécanismes de résistance à l’insuline dans les lipoatrophies.

Le défaut de stockage des lipides dans le tissu adipeuxconduit à la résistance à l’insuline

Lipoatrophie

Stockage ectopique des lipides(foie, muscle, pancréas) :

lipotoxicité

Déficit endocrinedu tissu adipeux

(leptine, adiponectine)

Résistance à l’insulinepostrécepteur

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Les�diabètes�insulinorésistants�familiaux�

nigricans est corrélée positivement à l’insulinorésistance (figure 3).L’hyperandrogénie associée est caractérisée clinique-ment par la présence d’hirsutisme, d’acné, d’alopécie androïde, avec parfois une hypertrophie des organes génitaux externes. L’hyperinsulinémie affecte égale-ment les ovaires par liaison et activation des récepteurs de l’IGF1. En effet, les cellules ovariennes humaines ont des récepteurs à l’insuline et à l’IGF1 et ces deux ligands peuvent stimuler la stéroïdogenèse et la croissance cellulaire des tissus ovariens. Ainsi, chez les femmes, l’hirsutisme et les troubles des règles, dans le cadre d’un syndrome des ovaires polykystiques ou d’une hyperthécose ovarienne sont très fréquents et représentent l’un des modes de découverte du syn-drome d’insulinorésistance (15). Biologiquement, on retrouve les signes d’une hyperandrogénie d’origine ovarienne, avec une diminution du taux de la SHBG, protéine porteuse de la testostérone, liée à l’hyper-insulinisme.Par ailleurs, la stéatose hépatique, simple ou com-pliquée de stéatohépatite (NASH, Non� Alcoholic�SteatoHepatitis), pouvant conduire à la cirrhose, et la dyslipidémie avec hypertriglycéridémie prédominante, sont habituellement corrélées au tableau métabolique des insulinorésistances postrécepteur associées aux lipodystrophies.

BiologieEn pratique courante, un dosage d’insulinémie à jeun supérieur à 20 mUI/l en regard d’une glycémie nor-male ou élevée permet de dépister une insulinorésis-tance sévère, mais cette valeur doit être considérée au regard des normes du laboratoire. Une hypergly-cémie provoquée par voie orale est souvent utile pour démasquer l’hyperinsulinémie, souvent majeure en poststimulatif.Les index HOMA (HOmeostasis�Model�Assessment, gly-cémie [mmol/l] x insulinémie [mUI/l] à jeun/22,5) ou QUICKI (QUantitative�Insulin�sensitivity�ChecK�Index, 1/ (log glycémie à jeun en mg/dl + log insulinémie à jeun en μUI/ml) peuvent être mesurés, bien que leur sensibilité à l’échelle individuelle soit insuffisante. Une suspicion d’insulinorésistance peut être confirmée par des tests dynamiques : le clamp euglycémique hyper-insulinique est la technique de référence.Comme discuté plus haut, les anomalies biologiques du syndrome métabolique sont fréquemment observées dans les lipodystrophies (hypertriglycéridémie, baisse du HDL-cholestérol, perturbations du bilan hépatique) de même que des perturbations des concentrations d’adipokines circulantes.

Classification des diabètes familiaux insulinorésistants

Le tableau présente les principales causes connues de diabètes familiaux avec insulinorésistance.

Syndromes d’insulinorésistance liés à des mutations du récepteur de l’insulineLes mutations du récepteur de l’insuline ont représenté la première cause moléculaire connue des syndromes d’insulinorésistance. Elles s’opposent à la transmission du message de l’insuline en diminuant le nombre de récepteurs exprimés à la surface cellulaire ou en inhi-bant la fonction normale du récepteur. Elles s’expri-ment cliniquement sous la forme de trois syndromes de sévérité croissante : le syndrome de type A, le syn-drome de Rabson-Mendenhall et le lépréchaunisme. Les relations génotype-phénotype sont complexes, bien que la plupart des études retrouvent une perte de fonctionnalité du récepteur proportionnelle à la sévérité de l’expression clinique.

Syndrome d’insulinorésistance de type A de Kahn (16)Le diagnostic clinique du syndrome d’insulinorésistance de type A, décrit par Kahn et al. en 1976 est fondé sur la présence de la triade hyperinsulinisme, acanthosis�nigri-cans, et de signes d’hyperandrogénie chez la femme. Les hommes atteints présentent un syndrome d’insulinoré-sistance isolé, plus difficile à évoquer cliniquement. Une hypertrophie musculaire est généralement associée. Le syndrome de type A peut parfois s’accompagner d’un faciès acromégaloïde ou de crampes muscu-laires. Il n’y a pas d’anomalie de la répartition du tissu adipeux chez ces patients et le bilan lipidique est peu perturbé. Bien que ce syndrome ait été initialement rapporté comme étant lié à des mutations dans le gène du récepteur de l’insuline, on sait maintenant que la

Figure 3. Patiente atteinte d’une lipoatrophie généralisée congénitale : acanthosis�nigricans�axillaire et cervical.

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Endocrinopathies familiales

maladie est génétiquement hétérogène : seuls 10 à 25 % des cas survenant chez des patients minces (et pratiquement aucun chez des sujets obèses) sont dus à de telles mutations. La maladie est alors le plus souvent autosomique dominante : dans la plupart des cas, les mutations hétérozygotes sont dominantes négatives, avec déficience pour l’activité tyrosine kinase, ce qui explique l’insulinorésistance clinique majeure. Quelques cas sont associés à des mutations homozygotes, pou-vant alors porter sur la sous-unité alpha dans le domaine de liaison de l’hormone. Les causes moléculaires des syndromes de type A non liés au récepteur de l’insuline sont inconnues. Des mutations du substrat du récepteur de l’insuline IRS-1 (Insulin�Receptor�Substrate�1) sont exceptionnellement en cause.

Syndrome de Rabson-Mendenhall (17)Le syndrome de Rabson-Mendenhall est lié à des muta-tions homozygotes ou hétérozygotes composites du gène du récepteur de l’insuline. De révélation précoce, il associe aux signes d’insulinorésistance, un retard de croissance intra-utérin, et postnatal mais aussi une dysplasie dentaire, des anomalies des phanères et un faciès acromégaloïde apparaissant au cours de l’évo-lution de la maladie. Une hypertrophie de l’épiphyse a également été décrite dans quelques observations. La survie peut atteindre quelques années. Comme dans le lépréchaunisme, on peut observer une hypoglycémie de jeûne et une hyperglycémie postprandiale qui évoluent secondairement vers l’acidocétose diabétique récur-rente (17). On considère actuellement que ce syndrome, de même cause génétique que le lépréchaunisme, en constitue une forme mineure permettant une survie de plusieurs années.

Lépréchaunisme (OMIM #246200)�[18,�19]Le lépréchaunisme est une pathologie congénitale très rare, à transmission autosomique récessive, carac-térisée par un retard de croissance intra-utérin et un faciès dysmorphique rappelant les gnomes du folklore irlandais : yeux proéminents, malposition des oreilles, lèvres minces, nez retroussé. Il existe également une atrophie du tissu adipeux sous-cutané, une hypotrophie musculaire et une hypertrophie des organes génitaux, avec parfois chez les fillettes, des kystes ovariens ou des tumeurs de la granulosa. Cette maladie est asso-ciée à des mutations touchant les deux allèles du gène du récepteur de l’insuline, qui dans la plupart des cas affectent les sous-unités alpha. D’autres cas sont dus à un défaut majeur d’activité tyrosine kinase par mutation des sous-unités bêta. L’espérance de vie de ces enfants ne dépasse pas quelques mois en général.

Syndromes d’insulinorésistance associés à une lipoatrophie génétiquement déterminéeCertains syndromes de résistance à l’insuline sont carac-térisés par un déficit de tissu adipeux, appelé lipoatro-phie, associé ou non à une altération de sa répartition corporelle. L’absence de tissu adipeux sous-cutané réalise l’aspect clinique lipoatrophique caractéristique : au niveau du visage, l’atrophie des boules de Bichat exacerbe les reliefs osseux ; au niveau des membres, les veines sont particulièrement bien visibles (aspect de phlébomégalie) et les masses musculaires, le plus souvent réellement hypertrophiées, sont particulièrement bien dessinées. La lipoatrophie peut être généralisée ou partielle, congéni-tale ou acquise. Le terme de diabète lipoatrophique, qui est souvent utilisé pour désigner des patients à la fois diabétiques et lipodystrophiques, mais qui n’indique pas le type de lipodystrophie, devrait être remplacé par les termes plus précis de lipodystrophie généralisée ou lipodystrophie partielle, permettant de mieux définir ces syndromes distincts. Ces maladies s’accompagnent le plus souvent, en dehors de l’insulinorésistance majeure, d’une dyslipidémie avec hypertriglycéridémie prédominante conduisant à un risque important de pancréatite aiguë et d’une stéatose hépatique pouvant évoluer vers la cirrhose.

Lipodystrophies généraliséesDans les lipodystrophies (ou lipoatrophies) généralisées, le tissu adipeux, qu’il soit sous-cutané ou périviscéral, est absent. Deux syndromes se rapportent à ce phé-notype : d’une part, le syndrome de Berardinelli-Seip (lipoatrophie généralisée congénitale) qui réalise une lipoatrophie néonatale ou très précoce dans l’enfance ; d’autre part, la lipodystrophie généralisée acquise ou syndrome de Lawrence qui correspond à une lipoatro-phie généralisée se développant dans l’adolescence ou à l’âge adulte (20). Les lipoatrophies généralisées sont très rares, leur prévalence n’est pas connue pré-cisément mais doit concerner quelques centaines de cas dans le monde. Les formes congénitales, autoso-miques récessives, surviennent dans la grande majorité des cas chez des enfants issus d’unions consanguines. Le plus souvent, l’hypertrophie musculaire est pré-coce, l’insulinorésistance et l’hypertriglycéridémie se développent au cours de l’enfance, le diabète appa-raissant rarement avant l’adolescence. Une avance staturale, une organomégalie sont classiques chez ces enfants. Un retard mental peut exister, mais n’est pas constant. Les complications du diabète, les pan-créatites aiguës, la cardiomyopathie hypertrophique, qui peut se compliquer d’insuffisance cardiaque, et la stéatose hépatique, évoluant vers la cirrhose, sont les principales causes de mortalité (21). Des lésions

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Les�diabètes�insulinorésistants�familiaux�

lytiques des diaphyses des os longs sont souvent observées chez les adolescents et les adultes (22). Le syndrome de Berardinelli-Seip est génétiquement hété-rogène : 95 % des cas sont liés à des anomalies de l’un de deux gènes. Le premier gène identifié est celui de la seipine, porté par le chromosome 11q13, qui code pour une protéine impliquée dans l’adipogenèse et/ou la formation de la gouttelette lipidique et qui rend compte de la moitié des cas (23). Les mutations d’un autre gène, AGPAT2, situé sur le chromosome 9q34, et codant pour une enzyme adipocytaire de la voie de synthèse des triglycérides, ont été découvertes en 2002 (24). Ces dernières mutations, qui prédominent chez des patients d’origine africaine, représentent environ l’autre moitié des causes de lipodystrophie généralisée congénitale (23). Bien que le phénotype clinique de ces deux formes soit très proche, les mutations de la seipine semblent plus sévères : le tissu adipeux consi-déré comme “mécanique” (au niveau des paumes et des plantes, de la langue, des régions rétro-orbitaire, périar-ticulaires et périnéale) est complètement absent chez ces patients, alors qu’il est préservé chez les patients porteurs de mutations de AGPAT2 (25,�26), les déficits mentaux sont plus fréquents et la mortalité plus précoce (27). Néanmoins, comme discuté plus haut, les concen-trations circulantes d’adiponectine sont plus élevées chez les patients porteurs de mutations de la seipine que chez ceux atteints de mutations d’AGPAT2 (10).Récemment, deux nouveaux gènes responsables de syndrome de Berardinelli-Seip ont été identifiés, codant pour les protéines cavéoline 1 et cavin-1 (issues des gènes CAV1 sur le chromosome 7q31 et PTRF sur le chromosome 17q21, respectivement). Ces protéines participent à l’organisation structurale de la membrane cellulaire au niveau des caveolae mais sont également présentes à la surface de la gouttelette lipidique adipo-cytaire. Les caveolae sont des invaginations de la mem-brane plasmique présentes à la surface de nombreuses cellules et abondantes dans les adipocytes où elles jouent un rôle important dans la signalisation insuli-nique, le métabolisme lipidique (transport des lipides en particulier), mais aussi la formation et le métabolisme de la gouttelette lipidique (28). Les souris déficientes en cavéoline 1 développent une lipodystrophie avec insulinorésistance. Le séquençage du gène CAV1 chez une patiente brésilienne issue d’une union consanguine, atteinte de lipoatrophie généralisée congénitale, a per-mis de retrouver une mutation homozygote inactiva-trice (29). Des mutations ont également été identifiées dans le gène PTRF (Polymerase�I�and�Transcript�Release�Factor), chez plusieurs individus lipoatrophiques pré-sentant aussi une dystrophie musculaire (30).

En accord avec le rôle physiopathologique des déficits hormonaux dans l’insulinorésistance des lipodystro-phies généralisées, le traitement par la leptine a montré une bonne efficacité dans la réduction des troubles métaboliques dans les modèles murins de lipoatrophie généralisée (31,�32), et plus récemment chez l’homme (33-35).

Lipodystrophies partiellesComme pour les formes généralisées, les lipodystro-phies partielles regroupent plusieurs pathologies. Plusieurs causes génétiques en sont connues, les plus fréquentes étant les mutations de la lamine A/C et celles du facteur transcriptionnel PPARγ. Des muta-tions d’autres gènes codant pour des protéines qui participent à l’organisation structurale de la goutte-lette lipidique adipocytaire ont été découvertes très récemment (CIDEC, périlipine).

•LipodystrophiesetmutationsdeslaminesA/CLes lamines A et C, produites par épissage alternatif du gène LMNA, appartiennent à la famille des filaments intermédiaires nucléaires qui interagissent avec la chro-matine, les protéines de la membrane nucléaire interne et les pores nucléaires, jouant un rôle dans de nom-breuses fonctions nucléaires. Les altérations génétiques du gène LMNA conduisent à de nombreuses pathologies différentes : huit “laminopathies” sont ainsi connues à ce jour, dont certaines comportent des lipodystrophies.La principale forme de lipodystrophie liée aux mutations de la lamine A/C est la lipodystrophie partielle familiale ou syndrome de Dunnigan (36). La maladie est auto-somique dominante, de pénétrance quasi complète mais de sévérité variable. Ainsi, les femmes atteintes ont une lipodystrophie plus marquée et des troubles métaboliques plus sévères que les hommes (37,�38). La lipodystrophie apparaît généralement après la puberté, sous la forme d’une lipoatrophie siégeant au niveau de la partie inférieure du corps (membres inférieurs, fesses, tronc) avec un excès de tissu adipeux dans la région cervico-faciale, donnant un aspect pseudo-cushingoïde au visage. Cette répartition androïde caricaturale des graisses est accentuée par une hypertrophie musculaire marquée des membres, qui, avec l’absence d’obésité abdominale, permet de différencier ces patients de ceux atteints d’un syndrome métabolique “banal”. Sur le plan biologique, l’insulinorésistance et l’hypertriglycéridémie sont souvent majeures et le risque de pancréatite aiguë peut mettre en jeu le pronostic vital. Le HDL-cholestérol est bas. Les taux circulants d’adiponectine et de lep-tine sont abaissés, mais moins sévèrement que dans les formes généralisées de lipoatrophie (9). La stéatose hépa-

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Endocrinopathies familiales

tique, très fréquente, doit être recherchée et surveillée. Les femmes atteintes se plaignent souvent de troubles des règles et d’hirsutisme. L’athérosclérose est précoce et sévère, conduisant à un risque majeur de coronaro-pathie (39,�40). Quelques observations de phénotypes croisés, avec présence à la fois d’une lipodystrophie et de signes de laminopathie cardiaques ou musculaires, peuvent s’observer exceptionnellement pour des muta-tions habituellement non associées à la lipodystrophie de Dunnigan (41,�42). Il est donc indispensable chez tout patient porteur d’une lipodystrophie de Dunnigan, de réaliser systématiquement un examen neuromusculaire précis – et surtout de rechercher une cardiomyopathie, des troubles rythmiques ou conductifs pouvant engager le pronostic vital – un électocardiogramme, une écho-cardiographie, un holter cardiaque. À côté des formes typiques, notre équipe a décrit un groupe de laminopa-thies associées à un tableau de syndrome métabolique sévère mais dans lequel la lipodystrophie peut être très modérée ou quasi absente. Ces “laminopathies méta-boliques” présentent un tableau métabolique sévère surtout chez les femmes et une athérosclérose précoce pouvant compromettre le pronostic vital (43).Plusieurs cas de syndromes de vieillissement accé-léré, pouvant comporter une lipodystrophie partielle ou généralisée, ont été rapportés et sont associés à d’autres mutations de la lamine A/C. Ces maladies s’ac-compagnent de retard de croissance, de malformations osseuses, en particulier cranio-faciales, d’insulinorésis-tance, et, ce qui en fait toute la gravité, d’athérosclérose sévère et précoce. Parmi ces maladies :

✓ la dysplasie acromandibulaire, due à la substitu-tion homozygote d’un acide aminé dans la région C-terminale de la protéine (44), ou à une altération génétique de la protéine ZMPSTE24, qui intervient dans le clivage protéolytique de la prélamine A en lamine A (45)�;

✓ la progéria de Hutchinson-Gilford, forme gravissime de vieillissement accéléré, avec délétion des 50 acides aminés C-terminaux de l’isoforme A de la lamine (46), altérant sa maturation (47)�;

✓ un syndrome de vieillissement accéléré avec un phénotype complexe (lipoatrophie généralisée, dia-bète insulinorésistant, stéatose hépatique majeure, signes dermatologiques et cardiaques) lié à la mutation hétérozygote LMNA R133L (48)�;

✓ d’autres syndromes progéroïdes liés aux mutations des lamines A/C ont été décrits (49).Ainsi, en dehors du syndrome de Dunnigan, très carac-téristique, les lipodystrophies liées aux autres lamino-pathies s’intègrent parfois dans un tableau clinique plus complexe.

Les relations entre les lamines, la sénescence cellulaire, la redistribution du tissu adipeux et les troubles méta-boliques associés, et les altérations neuromusculaires et cardiaques, ne sont pas encore bien comprises.

•LipodystrophiesetmutationsdePPARγDes mutations hétérozygotes de PPARγ, autre facteur transcriptionnel impliqué dans la différenciation du tissu adipeux (50), peuvent être à l’origine d’une lipodys-trophie partielle (51-53). La plupart de ces mutations affectent le domaine de liaison du ligand ou le domaine de liaison à l’ADN ; elles réduisent l’efficacité transcrip-tionnelle de PPARγ. La lipodystrophie qui en résulte est modérée, très proche de celle que l’on voit fréquem-ment dans le syndrome métabolique, avec surtout une perte du tissu adipeux sous-cutané des membres et des fesses. Les principales différences cliniques par rapport au syndrome Dunnigan sont :

✓ la préservation d’une quantité normale de tissu adi-peux sous-cutané facio-cervical et abdominal ;

✓ la moindre sévérité de l’hypertrophie musculaire ; ✓ la plus grande fréquence de l’hypertension artérielle

sévère.

•Lipodystrophiespartiellesetmutationsdegènesdelagouttelettelipidique:CIDECetpérilipineDe la même façon que pour les lipodystrophies géné-ralisées, de nouveaux gènes codant pour des protéines impliquées dans la composition même de la gouttelette lipidique ont été identifiés récemment dans certaines lipodystrophies partielles.Le gène codant pour CIDEC (protein�Cell�death-Inducing�DNA�fragmentation�factor-a-like�Effector�C) a été retrouvé muté chez un patient lipodystrophique. Cette muta-tion génère un codon stop prématuré et une protéine tronquée. Or, cette protéine, abondante dans le tissu adipeux blanc, joue un rôle majeur dans l’augmenta-tion de taille de la gouttelette lipidique, s’opposant à la lipolyse et à la fragmentation de la gouttelette (54).Enfin, très récemment, des mutations inactivatrices du gène PLIN1 codant pour la périlipine (chromosome 15q26), protéine la plus abondante des gouttelettes lipidiques adipocytaires, ont été identifiées dans trois familles indépendantes de patients atteints de lipodys-trophie partielle. La périlipine possède un double rôle régulateur : elle protège les triglycérides de la lipolyse à l’état basal, tandis qu’elle active, au contraire, l’hydrolyse des triglycérides en conditions lipolytiques, sous l’effet des catécholamines. Le tissu adipeux des patients a révélé une diminution de la taille des adipocytes ainsi qu’une inflammation et une fibrose du tissu adipeux. L’expression des protéines mutées dans des cellules préadipocytaires

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a confirmé leur incapacité à former des gouttelettes de triglycérides et à inhiber la lipolyse basale (55).

•AutreslipodystrophiespartiellesElles sont moins bien décrites, et leurs causes ne sont pas connues. Dans le syndrome de Barraquer-Simons, la redistribution du tissu adipeux est inverse par rapport au syndrome de Dunnigan : la partie supérieure du corps est le siège d’une lipoatrophie sévère, tandis que le tissu adipeux s’accumule au niveau de la partie inférieure du corps. La maladie est sporadique, se développant à partir de l’adolescence ou chez le jeune adulte, avec une prédominance féminine (56). Les troubles métaboliques sont inconstants. Une glomérulonéphrite membrano-proliférative et des signes de dysimmunité s’y associent fréquemment : diminution du taux sérique du facteur C3, autres maladies auto-immunes, sensibilité accrue aux infections et présence dans le sérum du facteur néphri-tique, un auto-anticorps qui active la voie alterne du complément en stabilisant la C3 convertase (57). Une publication a fait état de mutations du gène de la lamine B2, partenaire des lamines de type A à la membrane nucléaire, dans le syndrome de Barraquer-Simons (58). Néanmoins, cette observation n’a pas été confirmée.D’autres formes de lipodystrophie ont été décrites, comme le syndrome de Köbberling, qui ressemble à la lipodystrophie de Dunnigan, mais avec une obésité centrale associée (59). La frontière entre ce type de lipodystrophie et un syndrome métabolique “banal” est ténue et aucune anomalie génétique n’a pour l’ins-tant été associée à ce syndrome mal individualisé. Les lipodystrophies partielles associées aux traitements de la maladie VIH, qui sont actuellement les formes cliniques les plus fréquentes des lipodystrophies par-tielles, ne sont pas d’origine génétique et ne sont donc pas abordées dans cette revue.

Insulinorésistance dans le cadre d’autres syndromes génétiquesPlusieurs syndromes génétiques associent une insuli-norésistance à des signes cliniques spécifiques. La plu-part comportent une obésité importante, mais, parfois, l’insulinorésistance ne peut être liée au surpoids. Ces syndromes sont indiqués dans le tableau.

Perspectives thérapeutiques

Traitement des troubles du métabolisme glucidiqueLes anomalies du métabolisme glucidique sont d’in-tensité variable en fonction de la pathologie dans les-

quelles elles s’inscrivent mais également d’un patient à l’autre, soulignant l’importance des facteurs envi-ronnementaux.Dans le syndrome d’insulinorésistance de type A, les mesures hygiénodiététiques (obtention d’un poids normal, régime alimentaire adapté au diabète, exercice physique) peuvent parfois suffire mais le plus souvent, le diabète nécessite rapidement un traitement médi-camenteux par la metformine et/ou l’insuline à fortes doses. Les thiazolidinediones n’ont pas montré d’intérêt supplémentaire mais les études portant sur un effectif plus important manquent.Dans le lépréchaunisme et le syndrome de Rabson-Medenhall, les troubles de la croissance et du méta-bolisme peuvent être améliorés par l’IGF1. Néanmoins, certains patients peuvent être résistants à ce traitement et les risques de l’administration d’IGF1 à long terme ne permettent pas son utilisation en pratique courante pour les formes moins sévères de résistance à l’insuline. L’association thérapeutique IGF1 + IGF-BP3 pourrait être utile (60) ainsi que le traitement par la leptine (61).Le traitement des lipodystrophies n’a fait l’objet que de peu d’études. La metformine peut parfois suffire à normaliser les glycémies des patients les moins sévèrement insulinorésistants. Les thiazolidinediones ont permis d’induire la différenciation adipocytaire in vitro de cellules sous-épidermiques d’un enfant atteint de lipodystrophie généralisée (62). Néanmoins, leur efficacité thérapeutique chez les patients lipodystro-phiques, en dehors des cas associés aux traitements de l’infection par le VIH, a été peu étudiée. L’essai portant sur le plus grand nombre de patients (20) avait éva-lué la troglitazone pendant 6 mois. Quatre patients présentaient une lipoatrophie généralisée et 16, une lipodystrophie partielle (63). L’efficacité sur l’hypergly-cémie a été majeure, avec une diminution moyenne de l’HbA1C de 2,8 points chez les 13 patients diabétiques. En parallèle, le taux des triglycérides et des acides gras libres circulants a été significativement diminué. La prise de poids moyenne était de 2,4 kg, avec une augmen-tation de la quantité de tissu adipeux sous-cutané au niveau de l’abdomen et des cuisses (de 34 et de 19 %, respectivement) tandis que la graisse viscérale avait ten-dance à diminuer, quoique les valeurs n’aient pas atteint la significativité statistique. Enfin, le volume du foie a diminué de 13 % en moyenne au cours de cette étude, montrant l’intérêt potentiel des thiazolidinediones dans le traitement de la stéatose hépatique associée aux lipodystrophies. Néanmoins, la troglitazone n’est plus commercialisée en raison de son hépatotoxicité. Les nouveaux produits n’ont pas fait l’objet d’une évalua-tion sur un nombre suffisant de sujets. Quelques cas

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Merck Serono Diabétologie

STAGID® 700 mg comprimé sécable. FORMES ET PRESENTATIONS : Comprimé sécable (jaune) : boîtes de 30 et de 100, sous plaquettes thermoformées. COMPOSITION* : Metformine (DCI) embonate : 700 mg/cp (soit en metformine : 280 mg/cp). INDICATIONS : • Diabète non acidocétosique, non insulinodépendant de l’adulte (diabète de type II), en particulier avec surcharge pondérale, lorsque le régime prescrit n’est pas suffi sant pour rétablir à lui seul l’équilibre glycémique. • Diabète insulinotraité en complément de l’insulinothérapie : - dans le diabète de type I (DID) ; - dans le diabète de type II, en particulier en cas de surcharge pondérale importante associée à une résistance secondaire à l’action de l’insuline. POSOLOGIE ET MODE D’ADMINISTRATION* : 3 cp/j en 3 prises en moyenne, à adapter en fonction des résultats biologiques. CONTRE-INDICATIONS : Absolues : • Insuffi sance rénale même modérée, organique ou fonctionnelle (créatininémie ≥ 135 µmol/l chez l’homme et ≥ 110 µmol/l chez la femme : cette valeur limite est à réduire en fonction de l’âge physiologique et de la masse musculaire). • Explorations par produits de contraste (UIV, angiographies) : en règle générale, à éviter chez le diabétique ; en cas de nécessité, la metformine doit être suspendue avant ou au moment de l’examen, pour n’être réintroduite que 48 heures après, et après s’être assuré de la normalité de la fonction rénale. • Pathologie aiguë comportant un risque d’altération de la fonction rénale : déshydratation (diarrhées, vomissements), fi èvre, états infectieux et/ou hypoxiques sévères (état de choc, septicémie, infection urinaire, pneumopathie). • Insuffi sance hépatocellulaire, intoxication alcoolique aiguë. • Décompensation acidocétosique, précoma diabétique. • Expression clinique d’une affection aiguë ou chronique susceptible d’entraîner une hypoxie tissulaire sévère (insuffi sance cardiaque ou respiratoire, infarctus du myocarde récent...). Relatives : • Tous les antidiabétiques (insuline, sulfamides hypoglycémiants...) et danazol (cf. Interactions). • Femme enceinte (cf. Grossesse et allaitement). MISES EN GARDE ET PRECAUTIONS D’EMPLOI* : La metformine peut entraîner ou favoriser la survenue d’une acidose lactique dont l’incidence doit être réduite par une bonne surveillance des facteurs de risque. Devant toute suspicion d’acidose métabolique, arrêter la metformine et hospitaliser d’urgence le malade. INTERACTIONS* : Danazol, alcool, chlorpromazine, corticoïdes, progestatifs macrodosés, sympathomimétiques bêta-2, diurétiques, produits de contraste iodés. GROSSESSE ET ALLAITEMENT* : Relais par l’insuline. EFFETS INDESIRABLES* : Troubles gastro-intestinaux, acidose lactique. SURDOSAGE*. PHARMACODYNAMIE* : Antidiabétiques oral. PHARMACOCINETIQUE*. RENSEIGNEMENTS ADMINISTRATIFS : Titulaire de l’AMM : Merck Santé, Lyon, France. LISTE I. AMM/CIP N° 3400931927501 (30 cp) ; Prix : 4,25 € ; CTJ : 0,43 €. AMM/CIP N° 3400931927679) (100 cp) ; Prix : 11,44 € ; CTJ : 0,34 €. Remb. Séc. Soc. à 65 %. Collect. Merck Serono : 37 rue Saint-Romain F-69379 Lyon cedex 08. Tél : 04 72 78 25 25. Information médicale/Pharmacovigilance : Tél (N° vert) : 0 800 888 024. Site web : www.merckserono.fr. E-mail : [email protected]. *Pour une information complète, consulter le RCP disponible sur le site internet de l’AFSSAPS ou auprès de Merck Serono. MLC 2010-12-07.

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Diabète de type 2

Agissez vite, pour voir loincliniques témoignent de l’efficacité de la pioglitazone sur l’équilibre glycémique et lipidique dans le syndrome de Dunnigan (64,�65). Une publication (66) rapporte chez une patiente atteinte de syndrome de Dunnigan et traitée par rosiglitazone, des résultats équivalents à ceux de la metformine sur les glycémies, mais avec une majoration de la dyslipidémie et une prise de poids ayant aggravé l’aspect cushingoïde du visage (66). Des études portant sur un plus grand nombre de patients sont donc nécessaires.

Traitement des troubles du métabolisme lipidiqueLes mesures diététiques, avec en particulier un régime alimentaire évitant les sucres d’absorption rapide, ainsi que l’exercice physique, sont essentiels. En cas d’hy-pertriglycéridémie, les patients doivent être avertis du risque de pancréatite aiguë, savoir consulter rapi-dement en cas de douleurs abdominales aiguës, et savoir reconnaître la xanthomatose éruptive. Le régime hypolipidique est utile dans les hypertriglycéridémies majeures. La substitution par des triglycérides à chaîne moyenne pourrait avoir un effet favorable sur le diabète et la dyslipidémie dans les lipoatrophies généralisées.

Traitement des autres facteurs de risque cardio-vasculaireLe risque cardio-vasculaire est majeur chez ces patients, du fait de l’association de nombreux facteurs de risque (39,�40) et d’un rôle probablement directement délétère

de certaines mutations (lamine A/C, PPARγ). Il est donc très important de bien contrôler l’hypertension artérielle, de lutter contre le tabagisme et l’hypercholestérolémie.

AutresEn dehors de la prise en charge métabolique, il faut dépister précocement la stéatose hépatique éventuelle ; la cirrhose qui peut en résulter représente, en effet, une cause importante de morbidité et de mortalité, mieux évaluée dans les lipodystrophies généralisées (27). Les thiazolidinediones ou la leptine apporteront peut-être une réponse thérapeutique spécifique à la stéatose. De même, l’impact de la metformine et/ou des thiazolidinediones sur la fonction ovarienne n’a pas été évalué dans le contexte des lipodystrophies.

PerspectivesLa leptine, seulement disponible dans le cadre d’un programme compassionnel spécifique en France (Pr Gautier-Dr Vigouroux, hôpital Saint-Louis, Paris), serait certainement utile chez tous les patients lipodys-trophiques sévèrement déficients en leptine, comme présenté plus haut (33-35).L’association IGF1-IGF-BP3 pourrait améliorer l’insulino-sensibilité dans les cas les plus sévères d’insulinorésis-tance extrême (67).Les molécules agonistes de PPARα et γ et l’adiponectine représentent un espoir thérapeutique important pour ces pathologies, qui restent actuellement de traitement difficile. ■

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