les blessures invisibles liées au stress qu’endurent les ...€¦ · la réflexion sur le stress...

103
Mémoire Master of Advanced Studies en Action Humanitaire Année académique 2011-2012 Les blessures invisibles liées au stress qu’endurent les travailleurs humanitaires Les cas de MSF et du CICR Présenté par Cédric VIONNET Composition du jury de soutenance : Directeur de mémoire : M. Fidel FONT SIERRA Présidente du jury : Prof. Doris Schopper Experte : Mme. Claire Colliard Juin 2012

Upload: nguyentruc

Post on 16-Sep-2018

218 views

Category:

Documents


0 download

TRANSCRIPT

Mémoire Master of Advanced Studies en Action Humanitaire

Année académique 2011-2012

Les blessures invisibles liées au stress qu’endurent les travailleurs humanitaires

Les cas de MSF et du CICR

Présenté par

Cédric VIONNET Composition du jury de soutenance : Directeur de mémoire : M. Fidel FONT SIERRA Présidente du jury : Prof. Doris Schopper Experte : Mme. Claire Colliard

Juin 2012

- 1 -

Remerciements

À Mon directeur de mémoire : M. Fidel Font Sierra

À Gorin Valérie

Au CICR pour leur collaboration et plus particulièrement à :

Dr. Sigiriya Aebisher Perone, responsable de la cellule santé et stress

Dr. Bouvier Paul, responsable du programme HELP

M. Boeckli René, responsable de la cellule sécurité et stress

Dr. Bierens De Haan, ancien responsable des cellules de stress du CICR

À MSF pour leur collaboration et plus particulièrement à :

Mme. Gayral Christine, des ressources humaines

Dr. Woodman Mike, responsable de la santé des expatriés

Aux psychologues :

Mme Rombaldi Juan-Torres Sylvie

Mme Colliard Claire

Mme Josse Evelyne

Aux académiciens :

Mme Schwarz Lisa

Mme Guss Isabelle

Au journaliste Jean-Paul Mari

Aux membres du CERAH et à mes collègues

À mes amies Anne et Kimberly pour la relecture de mon mémoire

À ma mère et mon père pour leur précieux soutien

- 2 -

Table des matières

Liste d’abréviations 3

Résumé, Summary

4

Introduction 6 Motivations personnelles 7

Méthodologie

8

Chapitre 1 -Définitions- 10 1.1 Le travailleur humanitaire, l’expatrié 10

1.2 Les différentes formes de stress 11

1.3 Les signes d’alerte 12

1.4 Le traumatisme 13

1.5 Le PTSD 14

1.6 Symptômes PTSD 15

Chapitre 2 - La gestion de la santé mentale des acteurs

humanitaires - 16

2.1 Contexte humanitaire 17

2.2 Manque de reconnaissance du problème, disparité entre ONG et

financement

20

2.3 La législation et les différentes prises en charge psychologique au

sein des organisations de solidarité internationale

23

2.4 Débriefing psychologique après incident critique 25

2.5 Entre théorie et pratique 26

2.6 PTSD 29

2.7 Les avancements et les directions à prendre pour minimiser

l’impact du stress

30

2.8 Standardisation des ressources humaines 31

2.9 Réinsertion 32

2.10 Principales recommandations des experts 34

Chapitre 3 –Les cas de MSF et du CICR- 35

3.1 MSF 36

3.2 Les défauts de la prise en charge des expatriés 38

3.3 Le mouvement MSF : principes refoulés pour les employés? 40

3.4 La prise en compte de la Santé mentale chez MSF Suisse 42

3.5 Le CICR 44

3.6 MSF vs CICR, deux programmes, un combat 46

3.6.1 Evaluations, suivis/réinsertions 47

3.6.2 Suivi/assurance 49

3.6.3 Dénonciation 51

Conclusions 52 Références/bibliographie 60

Table des matières Annexes 69

Glossaire 94

- 3 -

Acronymes

ALNAP: Active Learning Network for Accountability and Performance

CICR: Comité International de la Croix-Rouge et du Croissant Rouge (cristal)

CHP: Centre de Psychologie Humanitaire

ECHO: European Community Humanitarian Office

EMDR: Eye Movement Desensitization and Reprocessing (MODR)

ESPT: Etat de Stress Post Traumatique

FICR: Fédération International de la Croix Rouge

HQ: Headquarter (siege)

HR: Human Resources

IASC: Inter-Agency Standing Commission

ICRC: International Committee of the Red Cross

IFRC: International Federation of the Red Cross/Red Crescent

mhGAP: Mental Health Global Action Programme (mhGAP).

MSF: Médecins sans frontières

MODR: Mouvement Oculaires de Désensibilisation et de Reprogrammation

MSF-OCG: MSF Suisse, Operational Centre of Geneva

OMS: Organisation Mondiale de la Santé

ODI: Overseas Development Institute

ONU/UN: Organisation des Nations Unis/ United Nations

ONG: Organisation Non Gouvernemental

PTSD: Post Traumatique Stress Disorder

PSCU: The Psycho-Social Care Unit (MSF Holland)

PAE: Programme d’Assistance aux Employés

RH: Ressources Humaines

SPAM: Stress, Prévention And Management

SSPT: Syndrome de Stress Post Traumatique

UK: United Kingdom

WHO: World Health Organisation

- 4 -

Résumé : Ce mémoire sřintéresse au soutien fourni par les agences humanitaires aux

travailleurs humanitaires pour lutter contre les effets négatifs du stress avant, pendant et après

le déploiement. Il développe les failles des programmes de lutte contre le stress dřacteurs

majeurs de lřaction humanitaire, Médecins Sans Frontières (MSF) et le Comité International

de la Croix Rouge (CICR). Une revue de la littérature sur les moyens et les dispositifs que

mettent en place les ONG pour mitiger les conséquences du stress sur leurs employés a été

faite et des interviews directives ont été menées auprès des principales personnes impliquées

dans ce processus du CICR et de MSF.

On peut sřapercevoir quřil y a encore une grande disparité entre agences humanitaires dans le

soutien offert aux expatriés, allant dřaucunes dispositions préétablies sur le plan sécurité, de la

santé physique et mentale à un programme réfléchi et des procédures écrites. Les études

mesurant le stress des expatriés sont rares mais elles démontrent un pourcentage important du

niveau de stress que subissent les humanitaires pendant et après leur mission.

La réflexion sur le stress des humanitaires est récente, elle à moins de vingt ans. Cependant

une avancée prodigieuse a été faite dans la reconnaissance du problème. Toutefois la gestion

du stress, dans le contexte humanitaire, nřest pas encore maitrisée. Il reste encore beaucoup

dřinterrogations en attente et de nombreuses pratiques de soutien sřaffrontent sans consensus,

sans standardisation de la part de la communauté internationale. Entre théorie et réalité de

nombreuses disparités subsistent. La présence dřun soutien effectif, son financement et sa

qualité semblent être les enjeux majeurs du débat ; en gardant à lřesprit que les acteurs

impliqués ne sont pas que les ONG mais aussi les Etats qui se doivent de légiférer sur la

protection de lřemployé post-déploiement et de faire respecter lřaspect légal de la défense du

travailleur ainsi que de son droit à la santé. Les travailleurs humanitaires eux-mêmes doivent

sřinvestir en se sensibilisant sur la réalité du terrain humanitaire ainsi que sur ses risques avec

lřappui des ONG qui les recrutent. Des organismes indépendants et confidentiels pourraient

assurer un suivi, en toute neutralité, des expatriés. Une reconnaissance de la responsabilité de

protéger les employés doit-être faite, de la part de toute la profession, et une modification du

code de conduite du CICR encouragerait peut-être un travail en profondeur sur la protection

de lřemployé. La formation des managers, la résolution des conflits internes et lřaugmentation

de la résilience du travailleur humanitaire sont les enjeux principaux des prochaines années

tout en renforçant les programmes de soutien aux expatriés.

- 5 -

Summary: this graduation paper focuses on the support provided by humanitarian agencies to

humanitarian aid workers, in order to combat the negative effects of stress before, during and

after deployment. It points out the failures of programs to tackle stress of humanitarian aid

workers of the major actors in the humanitarian field, Doctors without Borders (Médecins

Sans Frontières Ŕ MSF) and the International Committee of the Red Cross (Comité

International de la Croix Rouge Ŕ CICR). A literature review of the means and the tools used

by NGOs to mitigate the consequences of stress on their personnel has been conducted, and

interviews have been held with prominent persons involved within the CICR and MSF.

It can be observed that there is still a big divergence between humanitarian agencies regarding

the support offered to their employees, ranging from no established provisions in the security

and physical and mental health plan to a solid program and written procedures. Studies

measuring the stress level of expats are rare, but the ones available show an important

percentage of the stress level which humanitarian aid workers experience during and after a

mission. Only recently there has been attention to the effects of stress on humanitarian aid

workers; this development can be noticed since twenty years. However, a serious

advancement has been made in the recognition of this issue. Nevertheless, the management of

stress-related issues within the humanitarian sector has not yet been mastered. There are still a

number of questions to be solved, and several support techniques are being operated without a

consensus or standardization within the international community. Also, between theory and

practice there are great differences. Major issues in the debate regarding mental support for

humanitarian aid workers include the creation of an effective support system, its financing

and its quality. It has to be noted that this not only concerns NGOs but also States, which

should create laws concerning the protection of employees, after deployment and which have

to respect the legal position of the employer and its right to health. At the same time,

humanitarian aid workers have to become more aware of the reality of working in the

humanitarian field and of the risks involved, with the help/support of the NGOs that recruited

them. An independent and confidential organization could assure a follow-up for these expats

with the advantage to be neutral. A recognition of the Ŗresponsibility to protectŗ the

employees of humanitarian agencies should be made by the whole sector, and a modification

of the code of conduct of the CICR might encourage in-depth research on the protection of the

humanitarian aid worker. The training of managers, the settlement of internal disputes and the

augmentation of the humanitarian aid workerřs resilience to stress are the main issues which

should be discussed in the following years, with the overall objective of reinforcing the

support to these expats.

- 6 -

Introduction

Il est souvent difficile dřimaginer ce que peuvent ressentir les travailleurs de lřaide

internationale sur le terrain humanitaire. Lřinvestissement émotionnel est extraordinairement

fort. Une anticipation éducative sur les risques encourus et une meilleure perception des

conséquences auxquelles ils sřexposent sur le terrain, devraient être indispensables avant de

sřengager dans un milieu qui contraste souvent avec des habitudes antérieures. En ce sens, les

travailleurs humanitaires sont donc souvent sujets au stress lors de leur mission sur le terrain :

« ils peuvent subir tous les risques liés à la guerre en plus de ceux liés au banditisme et à la

criminalité ». (Dr. Bierens de Haan, 2002, p. 2)(1998) En plus des risques liés au contexte de

lřintervention, que ce soit des conflits armés ou des catastrophes, ce sont les conditions de vie

du travailleur humanitaire en général qui peuvent être à lřorigine dřun stress :

Même dans des situations plus sûres, le stress environnemental peut être considérable : séparation

de la famille, des amis ; intense travail physique ; conditions de vie austères; alimentation

différente ; communication limitée ; risques de blessures ; manque d'assainissement ; risques de

maladies et choc des cultures représentent un cumul de désagréments (Ditzler, 2001, p. 2).1

Si on ajoute les tensions que le travailleur humanitaire doit supporter avec ses collègues dans

sa vie professionnelle ainsi que dans sa vie sociale, et influant sur sa vie privée, il doit

perpétuellement gérer son stress ; il peut être directement ou indirectement2 exposé à un

évènement traumatique qui le met en bonne posture pour développer des troubles psychiques

importants, perturbant son quotidien professionnel ainsi quřayant des répercussions notables

dans sa vie future.

Ces complications liées au stress ne sont pas nouvelles ; toutefois la prise en compte de ces

maux, et surtout leurs prises en charge thérapeutiques par les ONG, sont récentes en dépit du

fait que lřon puisse diminuer fortement les désagréments psychiques avec un suivi

psychologique efficace et professionnel avant, pendant et après la mission. Dřailleurs très peu

dřétudes ont été faites sur la santé mentale des travailleurs humanitaires et les données

épidémiologiques sont rares, mais un volume convaincant de rapports indiquent que de

nombreuses ONG nřoffrent pas un soutien adéquat aux travailleurs humanitaires : « Des

problèmes existent dans toutes les réponses au stress mises sur pied par les organisations, lors

du recrutement, pendant la mission sur place et dans la phase de suivi post-déploiement. »

(Ditzler, 2001, p. 1)3

1 Traduction personnelle.

2 La différence entre une exposition directe et indirecte sera expliquée dans la partie 1.4.

3 Traduction personnelle.

- 7 -

Egalement affecté par des problèmes liés au stress, Médecins Sans Frontières (MSF), un

acteur majeur de lřaction humanitaire, qui emploie un nombre important dřexpatriés, a eu une

réflexion sur la gestion du stress pour ces derniers qui est assez récente4 comparée à la

politique du CICR qui lřa prise en compte depuis plus de 15 ans5.

Dès lors, on peut se demander dans quelles mesures une étude comparative sur la gestion du

stress par MSF et le CICR permet de discerner si et quand les deux organisations prennent en

compte les risques de détérioration sur la santé mentale de leurs employés ? Offrent-ils des

suivis appropriés avant, pendant et après la mission et quelles sont les modalités de

lřassistance ?

Que se passe-t-il avec les personnes qui sont atteintes par des troubles psychologiques au sein

du mouvement MSF et du CICR, particulièrement quand ceux-ci persistent ? Ces travailleurs

peuvent-ils repartir sur le terrain ?

Quel est la différence entre lřaide théorique proposée et le soutien ressenti dans la pratique par

les travailleurs humanitaires ?

Motivation personnelle

Je dévisageais inconsciemment le regard figé du jeune homme, j’ai remonté doucement la

fermeture éclair en évitant soigneusement le contact avec ses viscères qui ressortaient

abondamment de son abdomen. Le sac mortuaire blanc était éclaboussé de sang, mais les

frères d’armes du malheureux combattant n’en firent pas cas et s’empressèrent d’évacuer le

corps sur un des ces fameux pick-up bariolé retransformé à la sauce guérilla.6

La vision de cet homme, un militaire mort pour ses idéaux, plus jeune que moi, fût un

symbole fort de ma première mission en tant quřexpatrié professionnel, pour une ONG

reconnue internationalement.

A vingt-quatre ans jřétais submergé par des responsabilités immenses, dans une zone reculée

du monde, inondé dřobjectifs à réaliser, dans un contexte dřinsécurité. Le travail ne manquait

pas et la moindre urgence mřenvahissait de stress. Cela ne mřa jamais empêché dřeffectuer

mon travail efficacement et je ne cache pas mon attrait professionnel pour travailler sous

pression constante ; mais cette expérience traumatisante a déclenché une grande réflexion

4 Un rapport des ressources humaines de 2009 de MSF-OCG (seulement la section Suisse) effectue un statu quo

sur lřaccompagnement des expatriés, avant, pendant et après la mission. Aucun accompagnement sérieux nřavait

été pris en compte (MSF, 2009). 5 Dès 1994, un programme de soutien psychologique du personnel terrain, plus communément appelé

programme stress, est mis sur pied par trois personnes, un médecin psychiatre-psychothérapeute et deux

infirmiers, conseillers en santé, qui constituent ce qu'on appelle familièrement la cellule stress. Voir le rapport

disponible en ligne à lřadresse suivante : <http….> 6 Sud Soudan 2011, Zone dřAbyei, récit personnel

- 8 -

personnelle sur les conséquences que pourraient avoir, dans un futur proche, le cumul

dřexpériences difficilement soutenables sur ma santé mentale. Je me suis demandé comment

je pourrai accumuler ce genre de visions sans être affecté mentalement ; comment je me

comporterai lors de mon retour dans la société occidentale qui prône des valeurs si différentes

de ce que jřai vécu sur le terrain humanitaire ; quel regard je porterai sur mes actions, sur mon

utilité, sur mon évolution en navigant entre deux mondes si dissemblables ? Ces

interrogations me laisseront-elles intacts ? Qui sera encore là pour me soutenir et comprendre

mes questionnements ainsi que mes souffrances ? Les traumatismes cumulés auront-ils un

effet destructeur sur ma personnalité ?

Etre un acteur humanitaire, témoin malgré moi, dřatrocités, dřexactions, dřactes de violence

souvent disproportionnés par rapport aux valeurs morales de la société occidentale, me

place en bonne posture pour développer différents troubles psychologiques, des addictions,

qui peuvent se manifester en mission ou lors du retour. Agir dans lřurgence, exécuter des

tâches dans des environnements à fort taux de stress deviendra peut-être une routine. Dans

cette vocation où jřévolue corps et âme, je me dois de me protéger contre une éventuelle

blessure invisible. Mřimmuniser contre tout traumatisme est difficile, mais avoir une

connaissance plus large sur les risques, les causes, les symptômes et les éventuels traitements

peut avoir une influence sur mes qualités dřintrospection et augmenter ma résilience.

Dans un deuxième temps, ce mémoire, pourrait-être intéressant pour tout lřensemble des

employeurs humanitaires qui ont lřintention dřinstaller ou dřévaluer leurs systèmes de

mitigation du traumatisme psychologique sur leurs subordonnés. Il peut aussi avoir un intérêt

de la part des travailleurs humanitaires, qui sřinterrogent sur leur condition de soutien que

propose ou devrait proposer leur employeur respectif. Et dans un troisième temps, ce mémoire

permettra dřavoir une meilleure analyse des problèmes psychologiques que rencontrent les

acteurs de la solidarité internationale et quel type dřaccompagnement ils sont en mesure de

recevoir.

Méthodologie

Ce mémoire contient une revue de la littérature étoffée sur les troubles mentaux affectant les

travailleurs humanitaires ; il tente de comparer les approches menées au sein des ONG et leurs

éventuelles lacunes. Le point de vue psychologique, particulièrement du point de vue de la

médecine et de la psychiatrie, ne sera pas abordé dans ce mémoire ; une revue de la littérature

- 9 -

sur se sujet a déjà été faite.7 Lřintérêt ne se portera que sur les acteurs travaillants

exclusivement dans le secteur humanitaire revenant du terrain avec des problèmes psychiques

et sur la relation entre employé et employeur concernant la prise en compte du soutien

organisationnel pour la réduction des troubles de la santé mentale.

La méthodologie employée pour extraire ces éléments a débuté par une recherche dans la

littérature avec comme principaux mots clefs : stress ; humanitaire ; SSPT ; soutien ; santé

mentale ; psychologie humanitaire ; sécurité ; turn-over8 ; déploiement ; the keys words

used : stress ; humanitarian, aid workers, mental health, psychology, PTSD, support,

resilience, well being…La seconde partie du travail concerne les entretiens directifs dřune

durée dřenviron 50min-70min menés auprès du siège de MSF Suisse et du CICR à Genève.

Un responsable des ressources humaines de MSF a été interviewé de manière informelle. Le

thème abordé a été la prise en compte du soutien des expatriés avant/pendant et après la

mission. Le responsable de la santé des expatriés au siège a été approché de la même manière.

La psychologue consultante et indépendante de MSF en charge de la santé des expatriés a été

interviewée en suivant la même méthode. La dernière partie a été lřinterview des différents

responsables au CICR. Des interviews directives ont été menées auprès des deux cellules

responsables du stress. Une première interview chez le responsable du stress et de la sécurité

et une seconde chez la responsable de la santé aux ressources humaines. Une interview du Dr.

Bouvier responsable du célèbre cours H.E.L.P9 a permis de compléter la vue dřensemble et un

entretien directif avec la spécialiste du stress chez les humanitaires Claire Colliard a conclu la

phase de collecte dřinformations.

Le mémoire annoncera dans un premier temps quelques définitions puis une revue de la

littérature qui fera un point sur le contexte humanitaire et sur les risques dont sont sujets les

acteurs humanitaires. Il reviendra sur les différents soutiens théoriques apportés aux expatriés

et sur certaines pratiques des ONG et sera conclu par les recommandations des experts sur le

sujet. Dans un deuxième temps, les cas des institutions MSF et du CICR seront pris comme

exemples et seront analysés en regardant les questions de recherches. Pour finir les

conclusions reprendront les points cruciaux de la revue de la littérature et des études de cas et

des recommandations viendront parachever ce mémoire.

7 Connorton Ellen en 2011 Humanitarian Relief Worker and Trauma-related Mental Illness ; Ellen Connerton,

Mellisa J.Perry, David Hemenenway, and Matthew Miller 8 Rotation du personnel

9 Le cours H.E.L.P. a été créé en 1986 par le Comité international de la Croix-Rouge pour améliorer le

professionnalisme des collaborateurs chargés de la réalisation des programmes d'assistance humanitaire menés

dans les situations d'urgence. Ces cours (126 à ce jour), sont organisés en partenariat avec l'OMS et un partenaire

académique dans le monde entier, et ont réuni 2'926 professionnels de la santé. (CICR,2011)

- 10 -

Chapitre 1 –Définitions-

Pour disposer dřune bonne compréhension de lřensemble du mémoire, une revue notionnelle

concernant la typologie typique des troubles des humanitaires sera abordée puisque le stress

peut se manifester de façon différente, mais dans un premier temps, il est essentiel de définir

le sujet traité, le travailleur humanitaire.

1.1 Le travailleur humanitaire, l’expatrié

Ce mémoire ne sřintéresse quřà une seule catégorie de personne, lřexpatrié : « un individu

qui a quitté sa patrie (…) » (Larousse, 1994, p. 419) ; il est important dřêtre précis sur quels

acteurs seront mis en avant10

. Bien quřil nřy ait pas de définition standardisée sur le travailleur

humanitaire, on pourrait dire que : « Les travailleurs humanitaires sont ceux qui travaillent

pour des organisations dřaide humanitaire et les agences dřaide » (Cardozo, 2004, p. 153).

Mais cette définition trop large et trop simpliste, peut être poussée un peu plus en profondeur.

On peut émettre que les travailleurs humanitaires sont des civils employés par des

organisations non gouvernementales. Ils peuvent être envoyés à lřétranger ce qui leurs

confèrent le statut dřexpatrié. Ils peuvent avoir des parcours professionnels différents, mais

disposent généralement de compétences et qualités professionnelles qui ne sont pas

disponibles en suffisance dans le pays dřexpatriation.

Dans cette définition les travailleurs humanitaires ne sont quřun maillon de la chaîne. Les

équipes nationales qui permettent au cycle dřavancer, sont souvent la base de tout projet et

sont généralement engagées dans le pays même. Ils peuvent avoir des parcours professionnels

différents avec des compétences comme chauffeur, garde, jusquřaux hautes compétences

professionnelles comme coordinateur, médecin… La principale caractéristique qui différencie

les staffs nationaux des expats, est que, usuellement, ils ont leurs réseaux de soutiens naturels

qui sont en place alors que lřexpatrié est déraciné de ses propres mécanismes de soutien de

son pays dřorigine. Affecté par le stress et de nombreux problèmes concernant leur contexte

de vie, le soutien au staff national ne sera abordé que secondairement dans ce mémoire. Il

pourrait aussi avoir confusion avec les soldats de la paix, il est donc important de faire une

distinction claire. Les soldats de la paix, militaires engagés par lřONU, pour des missions de

« maintien ou le rétablissement de la paix et de la sécurité internationale » (ONU, 2008) qui

sont généralement des militaires professionnels, ne seront pas pris en compte dans ce

mémoire. Cependant ces différents acteurs de lřhumanitaire ont un point commun ; ils

10

A noter que dans le langage courant de MSF le mot expats désignant les expatriés est couramment utilisé

dans la profession. Et le mot délégué est souvent utilisé par le CICR.

- 11 -

travaillent tous dans un environnement où le stress est présent. Mais différentes formes de

stress peuvent apparaître.

1.2 Les différentes formes de stress

Il existe de multiples définitions du stress. Il peut se dévoiler sous la forme extrême dřun

épuisement physique et psychique total. On le définit couramment comme un burnout, qui

est un état sévère de fatigue ou un manque dřénergie, qui est apporté par des attentes non

raisonnables de travail, de vous-même, de la part des autres ou de lřenvironnement de travail

relié au stress (CHP, 2009)

Différents termes ou concepts se sont développés autour du stress ; lřexemple du CICR paraît

approprié, vu le travail de recherche et dřautoréflexion effectué par la cellule de stress du

CICR et notamment du Dr.Bierens De Haan, qui a définit trois catégories de stress :

le premier est le stress de base, étroitement lié à la gestion « des ressources

humaines et aux relations interpersonnelles dans les équipes »

le deuxième est le stress cumulatif qui vient du cumul de petits traumatismes qui

sont répétitifs au travail et au contact des victimes (2002, pp. 4-7)

le dernier le stress traumatique11

, associé souvent à un incident de sécurité.

Un phénomène intéressant est à noter parmi les délégués du CICR : « les décompensations

psychiques graves. Deux à trois cas sur une moyenne de 1200 expatriés » souffrent de telle

forme de stress. « Il peut sřagir de bouffées délirantes, dřaccès maniaques, de tentatives de

suicide, de réactions dépressives, dřattaques de panique… » (2002, p. 7).

Il est intéressant de voir que la plupart du stress des humanitaires provient de difficultés

internes à lřONG. Dans l'ensemble, les six facteurs de stress les plus importants d'après

Mcnair (1995) ont été : les problèmes d'organisation, la sécurité, la charge de travail, les

communications, le fait d'être témoin de souffrances et les collègues expatriés (ODI, 1995).

En ajoutant de lourdes charges de travail associées à un manque de reconnaissance du travail

accompli et à des difficultés de communication (S. Aebischer Perone H, 2008). Les problèmes

institutionnels dirigent donc une partie de la problématique de la santé mentale vers la

psychologie organisationnelle et la psychologie du travail.

Tout naturellement, la question est de parvenir à détecter ces différentes formes de stress chez

nos collègues et sur nous. Des signes dans notre comportement nous permettent de distinguer

notre niveau de stress.

11

Le traumatisme, le PTSD, compassion fatigue seront expliqué dans les définitions suivantes.

- 12 -

1.3 Les signes d’alerte

Ces signes dřalerte ont été notamment étudiés par Evelyne Josse (2007), qui les distinguent

sous quatre formes :

1. Au niveau relationnel et émotionnel : dans cette catégorie, on peut placer des attitudes

inhabituelles comme devenir irritable, avoir une méfiance accrue, des proliférations de

pleurs injustifiés, un sentiment négativiste ou pessimiste. On peut observer une

certaine déshumanisation des relations envers les autres, comme du cynisme, de

lřhumour déplacé, du sexisme, du racisme, de lřintolérance, des jugements critiques ou

de lřagressivité.

On peut voir aussi une croissance du besoin de partager des émotions auprès de la

famille, des amis et des collègues. La nécessité de parler, dřêtre écouté, dřêtre pris en

charge devient grandissante ainsi que lřobservation dřune forme dřapathie,

dřévitement des relations familiales et/ou amicales et/ ou sociales et/ou

professionnelles voir le repli sur soi-même.

2. Au niveau professionnel : on peut observer un manque dřefficacité professionnelle des

difficultés pour se concentrer, une fuite ou une hyperactivité, des pensées fermées,

une résistance excessive au changement, ainsi quřune perte dřobjectivité, une

surévaluation ou dévalorisation de ses compétences ou de celles des autres.

3. Au niveau comportemental : il est fréquent de voir des troubles du sommeil, de

lřappétit, lřutilisation de drogues comme lřalcool, les médicaments psychotropes, une

irritabilité et des comportements à risques comme une conduite automobile

dangereuse, créer des provocations, rapports sexuels non protégés, etc.

4. Au niveau somatique : les signes qui peuvent affecter le corps, peuvent être une fatigue

démesurée, de légers problèmes de santé, migraines, maux de dos, troubles gastriques,

rhumes, grippes, problèmes dermatologiques, lřamplification dřun problème de santé

existant ou des plaintes excessives sur de petites difficultés de santé.

(2007, p. 7)

En conséquence, on sřaperçoit que le stress peut avoir un large éventail dřeffets sur

lřorganisme ainsi que sur le psychisme. Lřenvironnement de stress où évolue le travailleur

humanitaire peut le conduire un cran au-dessus et générer des traumatismes.

1.4 Le traumatisme

Scientifiquement parlant, on peut donner une explication neurologique sur le phénomène du

traumatisme :

- 13 -

Le cerveau a des circuits de la peur ; une des régions centrales, lřamygdale, forme la mémoire de

la peur. Le cerveau enregistre lřinformation brute et déclenche une cascade de réactions

automatiques comme lřaugmentation du rythme cardiaque, différentes hormones comme

lřadrénaline ou le cortisol sont sécrétées, puis les hormones stimulent la production de protéines ou

de récepteurs qui favorisent la construction de nouvelles cellules synoptiques qui permettent de

stocker le souvenir à lřintérieur. Ainsi le tissu cérébral est modifié par le traumatisme. (TSR, 2010)

Il y a donc un vrai changement dans notre organisme lorsque lřon subit un traumatisme. Mais

il faut encore différencier les traumatismes. On parle souvent du traumatisme primaire par

lřexposition directe aux graves événements traumatisants, tels que les agressions. Il y aussi la

possibilité dřavoir un traumatisme secondaire suite à une exposition potentielle indirecte. Ce

phénomène a également été qualifié de traumatisme de lřautre et l'origine a été introduite

par McCann et Pearlman en 199012

. Les travailleurs de la santé mentale, les traducteurs par

exemple, en étant exposés à la souffrance des autres ont la possibilité dřavoir un traumatisme

secondaire. Ils sřaccaparent le traumatisme de lřautre. Donc, le traumatisme est vraiment

ancré dans notre mémoire. Il peut amener une énorme souffrance même après une longue

période après lřévènement. Ce témoignage relaté par Bierens De Haan, dřun sauveteur

victime dřune embuscade révèle lřhorreur et le traumatisme profond que peuvent subir

certains humanitaires.

Il était au volant, subitement on avait tiré sur leur véhicule. Il avait été touché au bras. La voiture a

été déportée dans le fossé où elle sřest couchée. Les assaillants avaient accouru. Ils avaient extrait

son compagnon de la voiture et lřavaient abattu, à bout portant, sous ses yeux. Il se souvenait

encore très bien du soupir dřagonie qui sřétait échappé de la bouche de son camarade et du

sentiment dřhorreur qui lřavait envahi. Sa collègue, assise à lřarrière du véhicule, avait eu juste le

temps de crier. Le coup était parti et lřavait abattue sur son siège (Bierens De Haan, 2005, p. 61).

Le travailleur ayant subit cette attaque lřa mémorisée au plus profond de lui, il en ressort une

grande détresse psychologique. Les Américains ont trouvé une dénomination pour cette forme

de stress après un évènement traumatique le Post Traumatic Stress Disorder (PTSD).

1.5 Le PTSD

Le PTSD a été conceptualisé après la guerre du Vietnam, et introduit dans le célèbre manuel

américain le DSM (The Diagnostic and Statistical Manual of Mental Disorders). Jean Paul

Mari, journaliste de guerre, dit : « en 1997, 25 ans après la guerre du Viêtnam, lřarmée

Américaine a fait ses comptes. Il y a eu 54'000 morts au combat, et lřarmée Américaine a

12 Vicarious traumatization: A framework for understanding the psychological effects of working with victims ; Journal of Traumatic Stress volume 3 Number1 131-149

- 14 -

recensé 102'000 morts classés comme suicide réussi, deux fois plus de morts par suicide que

pendant la guerre. » (Mari, 2008) Mais ce ne fut pas la première fois que lřon détectait des

problèmes mentaux après des évènements traumatiques. Evelyne Josse (2006) a notamment

repéré des périodes clefs de lřhistoire où des évènements traumatiques se sont succédés.

Des témoignages sur des réactions post-traumatiques datent de deux mille ans avant Jésus-

Christ.13

Au fil de lřhistoire différents récits sřajouteront mais « cřest au 19ème

siècle que le

terme de névrose traumatique apparaît par la suite dřaccidents ferroviaires14

» (2006, p. 4).

Puis tout au long du 20ème

siècle, lřintérêt pour les troubles traumatiques connaîtra un intérêt

progressif et continu. De grands psychiatres tels que Sigmund Freud, Pierre Janet, Sandor

Férenczi et Otto Fénichel ont apporté de nombreux enrichissements par leurs réflexions.

Lřarmée quant à elle, teste « la psychiatrie de lřavant »15

pendant la guerre russo-japonaise de

1904-1905. (2006, p. 4) Les militaires ont été précurseurs dans ces recherches ; par exemple

T. Salomon, psychiatre militaire, avait déjà observé et mis en pratique certains principes pour

minimiser les impacts psychologiques sur les combattants, en 1917 sur le front Français

(Bierens De Haan, 2005, p. 38). Progressivement, les professionnels de la santé mentale se

sont spécialisés et ont mis en place des systèmes pour lutter contre le phénomène pour une

population élargie comme les militaires, pompiers, policiers, victimes dřattentats, de violences

sexuelles, de tortures, populations affectées par une catastrophe, attentats, etc. En fin de

compte la définition du concept du PTSD aura été longuement critiquée mais selon la

psychologue Evelyne Josse :

Cela aura permis de faire connaître la notion de traumatisme psychique à un large public et son

plus grand mérite aura été de normaliser les réactions post-traumatiques trop longtemps

attribuées à une vulnérabilité individuelle et en conséquence, considérées comme lřattribut des

faibles. (2006, p. 5)

Le monde scientifique reste donc divisé sur se concept du PTSD, ainsi que sur les symptômes

larges qui peuvent affecter le travailleur humanitaire.

1.6 Les symptômes du PTSD

Carlos Buverd délégué du CICR, raconte quřau Liban après avoir été les premiers témoins du

résultat dřun massacre horrible et désastreux, son collègue a carrément perdu la voix pendant

13

Des témoignages révèlent la souffrance des Sumériens de Basse-Mésopotamie à la suite de la destruction de Nippur1. 14 en 1884, Herman Oppenheim, un neurologue allemand, les regroupe sous le vocable de « névrose traumatique ». 15

Aide psychologique mobile dispensée à proximité du front aux soldats blessés visant à réduire les réactions post-traumatiques

immédiates.

- 15 -

un mois. En reparlant quelques années plus tard, entre eux, de son mutisme, son collaborateur

avait complètement oublié cette période de sa vie, il lřavait complètement effacé de sa

mémoire (Humem, 2011). Le mécanisme de protection de Carlos a été lřoubli. Mais peut-on

dire quřil a été affecté par le PTSD ? Il est difficile de donner une affirmation sur ce sujet

puisquřil nřy a aucun consensus sur la définition ainsi que sur la pathologie du PTSD qui a été

faite par la communauté scientifique internationale. Ce concept reste très critiqué et

controversé. Cependant, des symptômes de PTSD ont été choisis arbitrairement, pour nous

permettre dřavoir une vue dřensemble de leurs variétés.

Le Centre dřétude sur le Trauma (2008-2012)16

nous donne un bon aperçu de la multitude des

symptômes. Le centre les classe en trois catégories.

1. « La personne revit constamment lřévénement traumatique »

Des souvenirs reviennent souvent sur lřévènement ; des cauchemars ; des « flash-back » qui

sont des impressions de revivre lřévènement ; en face dřévènements ayant un lien avec le

trauma, une détresse psychique peut arriver.

2. « La personne cherche à éviter les éléments associés à lřévénement et montre un

émoussement de sa réactivité générale »

La personne fait des efforts pour éviter les pensées, les activités, les endroits et les gens ainsi

que les sentiments ou les conversations pouvant avoir un lien avec lřévènement; elle peut être

incapable de se souvenir dřun aspect important du traumatisme, un manque dřintérêt envers

des activités importantes ; ressentir un détachement envers les autres ou des difficultés à

montrer certains sentiments ; elle peut avoir une impression dřun « avenir fermé ».

3. « La personne présente des symptômes dřhyperéveil »

La personne ressent des difficultés à « sřendormir ou à rester endormi » ; peut avoir un

comportement irritable voir colérique ainsi que des gênes pour se concentrer ; un état

dřanxiété, dřalerte quřon dit « dřhyper vigilance » et des réactions de sursauts excessives.

Mais la présence de ces symptômes ne suffit pas à diagnostiquer un PTSD :

Pour établir le diagnostic, les symptômes doivent persister plus d’un mois et entraîner une

souffrance significative ou des problèmes dans le fonctionnement social, professionnel ou dans

d'autres domaines importants de la vie de la personne. Il est également à noter que lřintensité et la

durée du PTSD peut varier selon les individus (Centre d'étude sur le trauma, 2008-2012).

16

Le Centre d’étude sur le trauma (CÉT) fait partie du Centre de recherche Fernand-Seguin de l'Hôpital Louis-

H. Lafontaine. Il sřagit dřun milieu de recherche, de clinique et dřenseignement multidisciplinaire dédié aux

problématiques entourant le trauma. Il est basé au Québec.

- 16 -

Il est donc intéressant dřaller voir ce que dit la littérature sur la façon dont les humanitaires

sont affectés par ces différentes formes de stress.

Chapitre 2 –La gestion de la santé mentale des acteurs humanitaires-

La santé mentale des travailleurs humanitaires est un sujet méconnu et peu traité par la

communauté internationale. A titre dřexemple, MSF offre un soutien psychologique pendant

et au retour de la mission, mais peu dřétudes existent sur lřefficacité de cet accompagnement

et sur sa perception par les travailleurs humanitaires eux-mêmes. Le psychologue Bierens de

Haan, responsable de la cellule psychologique du CICR pendant 10 ans précise que « ce sujet

est rarement traité par les médias et lřon ignore le vécu quotidien des sauveteurs. Les livres

sur lřaction humanitaire ne parlent pas de la difficulté de lřengagement (…) ». (2005, p. 17)

Lisa Ouss, travaillant pour MSF en 2003, raconte que : « Lionel Bailly, psychiatre et

consultant pour MSF [lui] a dit quřune autre organisation avait voulu faire le recensement des

troubles présentés par les expatriés et que devant lřénormité ou lřampleur des difficultés, il

avait rapidement arrêté lřenquête. Il valait mieux ne pas savoir » (Bauber, 2003, p. 64).

Lřenvironnement de travail atypique des humanitaires, peut gravement léser leur santé

physiologique ainsi que psychologique ; néanmoins il est plus facile de justifier un apport

structurel et organisationnel lorsque lřon touche à lřintégrité physique de lřexpatrié, tandis que

les méfaits psychologiques ont peut-être eu tendance à être mis de côté, abordé en toile de

fond ou de manière confidentielle sans vraiment cibler la cause du problème. La gêne

viendrait-elle de lřimage donnée aux humanitaires par lřopinion publique occidentale ?

Cette glorification de lřhumanitaire, ce super-héros des temps modernes, a fait naître une

tendance idéaliste dans lřimaginaire collectif qui nřa guère songé aux troubles psychologiques

que peuvent engendrer de telles professions ; Rick Klomp17

, admet que : « les organisations

doivent s'assurer qu'elles nřépuisent pas leurs ressources trop minces. Les travailleurs

humanitaires et les intervenants "ne sont pas immunisés. Ils ne sont pas à l'épreuve des

balles" ». (Poole, 2010)18

2.1 Contexte humanitaire

Le premier point développé ici est lřorigine et la prévalence dřaffection chez les travailleurs

humanitaires. En effet, la prise inconsidérée de risques semble importante au sein de la

communauté des travailleurs humanitaires. Les risques ne viennent pas toujours de

17

Rick Klomp, a behavioral scientist at the Centers for Disease Control and Prevention and an expert on

workforce and responder resiliency 18

Traduction personnelle

- 17 -

lřinsécurité du contexte, mais aussi dans des comportements quotidiens comme par exemple

la sexualité. Une étude de MSF France a révélé que : « 42% des volontaires en mission

avaient eu une ou plusieurs rencontres sexuelles avec un volontaire et/ou partenaire local.

Parmi ces personnes, seulement ; 45% employaient systématiquement un préservatif » (MSF,

2009, p. 149). Lřimaginaire collectif nous laisserait développer lřidée quřun onéreux expatrié,

expert/spécialiste dans son domaine, ayant des connaissances multiples, est capable de

connaître le danger de pratiques sexuelles non-protégées. Isabelle Guss (2012) montre une

augmentation de la consommation de substances addictives dans une étude quantitative sur

274 expatriés de MSF, 20% augmente leur consommation dřalcool, 23% fument plus

quřhabituellement et 1% consomment des drogues. Une étude antérieure, faite au Kosovo, a

détecté des abus dřalcool et estime que 16% des travailleurs humanitaires ont une prise

dřalcool plus élevée que la moyenne (Cardozo BL, 2005). Une étude qui sřintéresse aux

journalistes de guerre, subissant le même stress que les expatriés, rapporte que 47% dřentre

eux fument des cigarettes, 24% fument du cannabis et 6.5% consomment des drogues dures

(cocaïne, amphétamine...)19

(Feinstein, 2002). Lřemploi de ces mécanismes pour faire face

aux détresses psychologiques est symptomatique dřun manque de soutien. Une certaine

prévalence de troubles psychiques a pu être mesurée dans un nombre très limité dřétudes.

Connerton a analysé trois études mesurant le taux de dépression chez les expatriés et a

remarqué que les troubles dřanxiété générale vont de 8% à 20 % pour la dépression et 8% à

29% pour lřanxiété20

. Mais on peut se poser la question si les différences entre la vie

« occidentale » et les conditions du terrain sont les sources de ce mal-être ? Les conditions de

vie, dans cet environnement particulier, peuvent-elles expliquer de telles prévalences ? Le

contexte humanitaire est en perpétuelle évolution, et ces dernières années il a drastiquement

changé. Peu de données sont disponibles sur la dangerosité du travail humanitaire. The U.S.

Bureau of Labor Statistics indique que le travail dans lřaide internationale est parmi les plus

dangereux et que : « les travailleurs humanitaires sont également confrontés à un risque

relativement élevé de rencontrer une fin violente » (Bauer, 2009, p. 3).

La situation sécuritaire pour les humanitaires post 11 septembre 200121

a empiré sévèrement,

le terrain humanitaire sřest complexifié. Travailler sur la gestion de la sécurité et dans la

19

Traduction personnelle 20

Cardozo BL et al. The mental health of expatriate and Kosovar Albanian humanitarian aid workers (2005)

Holtz et al. Mental health status of human rights workers, kosovo, June 2000 (2002)

Erickson et al Trauma exposure and PTSD symptoms in international relief and development personnel. 21

Selon lřarticle du CICR du 31-03-2004 Déclaration de Pierre Krähenbühl : « Les conflits dřaujourdřhui

continuent à se dérouler dans des contextes très divers tant par leurs causes que par leurs caractéristiques et leur

typologie. Au niveau mondial, nous constatons une polarisation ou radicalisation de plus en plus marquée. Ce

- 18 -

Attaques dont les motifs ont été déterminés

(n=p80 annexe) (Abby Stoddard, 2009)

mitigation des effets physiques et psychologiques que peuvent avoir de tels environnements

sont indispensables. Malgré le fait quřil y ait une prise en compte des risques inhérents à cette

activité, il y aura toujours des évènements singuliers pouvant engendrer un traumatisme :

« dans le travail humanitaire et de développement, les situations stressantes et risquées sont

inévitables » (People in Aid, 2003, p. 20).

De fait, les acteurs humanitaires ne sont plus une représentation de la neutralité, pouvant être

perçus comme aidant les civils, comme favorisant une des deux parties, prolongeant le conflit

ou comme des cibles molles22

.

Ce phénomène de ciblages violents des expatriés sřest accentué avec la potentialité de rançon.

Ils sont devenus des ressources monétaires importantes. Lřaugmentation du taux

dřenlèvement est significative pour sřapercevoir

du bien précieux que les expatriés sont devenus.

Dans leur rapport de 2006, ODI a montré que

les attaques à motivation politique ont été

multipliées par neuf. Les incidents à motivation

politique sont passés de 29% en 2003 à 49% en

2008 (Abby Stoddard, 2009, p. 5). Comme le

montre le tableau ci-contre, les raisons politiques

ne sont pas les seules motivations des attaques

contre les humanitaires. Les raisons économiques

ont augmenté considérablement durant la dernière

décennie.

Le respect du Laurier Bleu ou du symbole

protecteur de la Croix Rouge et du Croissant

Rouge ne sont plus des étendards protecteurs.

Hugo Slim met en avant que :

phénomène revêt différentes formes, mais celle qui touche le plus particulièrement lřenvironnement des conflits

est la confrontation entre un certain nombre dřÉtats engagés dans ce que lřon appelle maintenant la « lutte contre

le terrorisme » et une série dřacteurs non étatiques extrémistes, résolus à sřopposer à ces États et prêts à recourir

à lřusage de méthodes non conventionnelles Ŕ notamment des attaques terroristes délibérées contre des civils et

contre ce quřil est convenu dřappeler des « cibles vulnérables », dont les organisations humanitaires. Si ces

tendances mondiales influent sur un certain nombre de contextes, ce sont néanmoins surtout des causes locales

qui semblent prédominantes lorsquřon évalue les raisons dřun conflit : problèmes économiques, sociaux,

sanitaires et autres problèmes connexes ». 22

Surnom donné par les militaires aux humanitaires, puisant son origine dans les attaques que subissent les

humanitaires qui ne peuvent opposer de résistance.

- 19 -

Certains insignes identifient son porteur comme lřennemi venant dřune communauté internationale

privilégiée dřoù beaucoup de populations locales sont exclues. Dans notre climat actuel, ce

symbole prisé de neutralité, venant sous les attaques, ne représente plus un signe de compassion

mais est remplacé par une interprétation de la supériorité et dřun inconscient paternalisme. (Ros,

2004, p. 2) 23

24

Tout est devenu plus complexe et incertain, les analyses de risques sont devenues des enjeux

consubstantiels à lřaction humanitaire. Cependant certains sujets sont souvent omis, comme la

violence sexuelle que subissent les expatriés. Il est impossible de trouver des chiffres qui

révèleront lřampleur des abus sexuels quřendurent les acteurs humanitaires. Le US Peace

Corps qui place de jeunes volontaires dans des missions de développement à long terme est la

seule organisation qui fournit en toute transparence des chiffres. « Plus de 1000 jeunes

femmes Américaines ont été violées ou ont subit des agressions sexuelles ces dix dernières

années comme volontaires pour la Peace Corps » (Pelcran, 2012). « Les volontaires du Corps

sont environ 13 fois et demie plus susceptibles d'être la victime d'une agression sexuelle ou de

viol » (Peace Corps, 2007, pp. 7-10).

La sécurité des expatriés est donc

devenue un enjeu clef : « 68%

des morts sont dues à des

violences intentionnelles où le

travailleur humanitaire a

clairement été pris pour cible et

78% des travailleurs

humanitaires ont déclaré sřêtre

sentis en danger pendant les

missions humanitaires

auxquelles ils ont participés »

(Pelcran, 2012). Les

travailleurs humanitaires sont

donc sujets à de nombreux évènements qui ont des implications sur leur sécurité. Le tableau

ci-dessus nous montre graphiquement les méthodes et tactiques de violence des incidents de

23

« Cette érosion de la neutralité est une explication pour les travailleurs humanitaires étant les cibles de

violences intentionnelles et d'agressions, y compris vols qualifiés, enlèvements et assassinats ; comme en

Tchétchénie (Décembre 1996), Rwanda (Octobre 1999), la Bosnie-Herzégovine, au Timor occidental et en

Afghanistan et comme dans le bombardement du siège des Nations Unies à Bagdad en Août 2003 qui fit vingt-

deux morts et 100 blessés. » 24

Traduction personnelle

Méthodes et tactiques de violence des incidents de sécurité pour les

humanitaires de 2006 à 2008 (n=p80 annexe) (Abby Stoddard, 2009)

- 20 -

sécurité pour les humanitaires de 2006 à 200825

. Expérimenter de tels actes de violence peut

laisser un impact important sur lřexpatrié. Comment les organisations ont-elles reconnues ces

souffrances psychiques chez leurs employés ?

2.2 Manque de reconnaissance du problème, disparité entre ONG et financement

Quand on lit le célèbre code de conduite26

du CICR (1995) et de la FICR27

que de nombreuses

ONG ont signés ou se réfèrent dans leur pratique professionnelle, sur les dix articles présents,

aucun ne mentionne ce sujet. Malgré que ce code soit basé sur la bonne foi des signataires,

aucune ligne ne précise la responsabilité de lřemployeur sur la santé physique et mentale des

expatriés. Lřarticle 2 mentionne que : « les souffrances humaines doivent être soulagées où

qu'elles se manifestent; la vie est également précieuse en tout lieu. Nous apporterons donc nos

secours en fonction de l'ampleur des souffrances qu'ils visent à soulager » (CICR/FICR,

1996). Alors quřon défend des valeurs dřhumanité pour les gens auxquels on tente de venir en

aide, aucune ligne claire nřexiste sur lřobligation de lřemployeur à préserver la santé de ses

collaborateurs. Ce code qui est cité en exemple est une base idéologique pour beaucoup

dřONG, et démontre simplement que ce sujet nřest pas prioritaire et nřencourage pas la

concrétisation dřaccompagnements adéquats du personnel. Bien que ce code ait été préparé à

la base par la FICR et le CICR, qui ont été des précurseurs de programmes pour la prise en

compte de la santé mentale des expatriés dans le monde francophone, ce code est un réel

guide de principes de lřaction humanitaire, une réflexion importante, mais leur autocritique

semble incomplète. Dřautres codes de conduite plus spécifiques ont vu le jour comme le code

de conduite pour le renforcement des systèmes de santé (Health Alliance International, 2009),

problématique de développement, où là aussi le sujet du soutien en santé physique et mentale

aux expatriés nřest pas abordé. Pour voir apparaître une prise en compte de cette thématique

on doit se diriger vers le Code de bonnes pratiques dans la gestion et le soutien de l'aide au

25

Les donnés de ODI viennent de rapports publics concernant tous les terrains dřaction des humanitaires et de la

base de données Aid Worker Security Database.

26 Le Code de conduite pour le Mouvement international de la Croix-Rouge et du Croissant-Rouge et pour les

ONG lors des opérations de secours en cas de catastrophes « a été élaboré et approuvé durant l'été de 1994 par

huit des plus grandes agences spécialisées du monde: Caritas Internationalis, Catholic Relief Services, la

Fédération internationale des Sociétés de la Croix-Rouge et du Croissant-Rouge, l'Alliance Save the Children, la

Fédération luthérienne mondiale, Oxfam, le Conseil cuménique des Eglises (tous membres du Comité directeur

de l'action humanitaire) et le Comité international de la Croix-Rouge. Ce Code constitue une importante

contribution à la normalisation des interventions lors de catastrophes. Il permet à la Fédération internationale, au

CICR et aux autres institutions fondatrices à la fois de surveiller l'application de leurs propres normes en la

matière et d'encourager d'autres institutions à adopter des normes analogues » (CICR, 1995). Les articles du code

sont présents en annexe. 27

Fédération Internationale de la Croix Rouge, Mouvement qui rassemble toutes les Croix Rouge et Croissants

Rouge Nationales du monde entier

- 21 -

personnel publié par People in Aid (première publication en 1997 révision en 2003). Celui-ci

explique pour la première fois clairement les étapes nécessaires pour une bonne surveillance

du personnel humanitaire et met en avant ce principe directeur que « les personnes (employés)

sont essentielles pour la réalisation de notre mission » (People in Aid, 2003, p. 6). Le stress au

travail est une maladie de nos sociétés avec parfois, des fins tragiques28

. Devons-nous attendre

quřil ait un taux de suicide des humanitaires publié dans un journal scientifique avant

dřentreprendre une minimisation des risques obligatoires ? Faut-il attendre des cas célèbres de

PTSD comme le Général Roméo Dallaire, commandant des forces de lřONU au Rwanda,

impuissant dans lřarrêt du génocide, qui fut par la suite, dévasté par une névrose post-

traumatique qui a failli lui coûter la vie (Mari, 2008) ? Malgré cela, de grands progrès ont été

faits depuis une quinzaine dřannées dans le soutien aux travailleurs humanitaires. Plusieurs

mesures ont été prises dans le secteur du développement et de lřurgence. Cependant, alors que

certaines organisations ont indéniablement mieux développé lřassistance dans le secteur de la

santé aux expatriés, d'autres en sont encore aux balbutiements. Certaines statistiques sont

édifiantes : « 50% des travailleurs du terrain indiquent quřils ne savent pas où aller ou qui

contacter pour trouver de bonnes ressources sur le stress et sur le trauma sřils le désiraient29

»

(Headington institute, 2007, p. 45). Une autre étude effectuée par People in Aid30

(2009) sur

vingt organisations confirme cette inégalité:

55% des organisations n'ont pas de système ou plan d'urgence pour le personnel pour

lřobtention d'un appui psychologique direct (5 utilisent le soutien par téléphone clinique,

6 ont offert un soutien ad hoc)

50% des organisations ont un Programme dřAssistance aux Employés (PAE).

30% des organisations ont, en interne, des professionnels dans le domaine psychologique

40% des organisations ont mis au point une liste

de références de professionnels qualifiés (2009,

p. 28)

La problématique principale du Staff Care ne sřoriente pas

vers la psychologie, mais vers le soutien et les pratiques de

gestion du personnel. La focalisation des défenseurs de la

responsabilité de protéger les travailleurs humanitaires dans

28

Exemple de France Telecom : en 2 ans, 25 employés de France Télécom se sont suicidés sur un total de

100'000, de nouvelles dispositions furent prises par la France pour obliger les patronats, entrepreneurs à faire une

analyse psychosociale de lřenvironnement de travail des employés. 29

Traduction personnelle 30

Idem

Dimensions to Staff Care (People in Aid, 2009)

- 22 -

les procédures RH des ONG en découle. Pour bien visualiser la globalité de la demande, cette

figure ci-dessus (2009, p. 10), présente deux grands cercles pouvant être juxtaposés au soutien

à la santé mentale des expatriés ; la santé physique et lřéconomie. Lřéconomie, parce que la

sensibilisation des donateurs, la disponibilité de fonds pour les activités de soutien du

personnel, le turn-over sont des points quřil ne faut pas oublier quand on parle de prise en

charge des staffs.

Dans notre monde libéral, lřhumanitaire nřest plus seulement un acte de charité. Il sřagit

clairement dřun business où des sommes dřargent colossales sont transférées au nom de notre

bonne conscience collective : « les Organisations humanitaires comme toutes les

organisations doivent générer des ressources financières durables si elles veulent survivre.

Ces indispensables démons de lřaction humanitaire assurent une survie de lřorganisation31

»

(Walkup, 2002, p. 357). Lřallocation dřune partie du budget pour la santé des expatriés,

viendra en partie de la bonne sensibilisation et dřune transparence dans la communication

entre ONG et donateurs privés et publics. De nos jours, on peut sřapercevoir que ce nřest pas

si aisé : « Nos budgets sont minutieux, après avoir été examiné par les bailleurs de fonds. Il

n'y a habituellement pas d'espace pour le personnel de soins » (People in Aid, 2009). Le

travail de sensibilisation entre donateur et praticien de lřaide reste donc un combat journalier :

« Convaincre les hautes directions que les investissements dans des initiatives de soins du

personnel sont un bon rapport coût-efficacité, continuent d'être un défi pour la plupart des

organisations » (Sharon Forrence, 2008, p. 30).

La façon dont les organisations humanitaires collectent lřargent diffère entre ONG, mais

quand elles entreprennent une telle action, la transparence du processus entre le bailleur et le

récipiendaire est primordiale. Dans ce jeu où lřéchec nřest guère permis, expliquer à ces

pions, les donateurs, quřil est essentiel de prendre une part de leur don, pour aider aussi les

chevaliers qui se jettent dans le feu afin quřils puissent ainsi évoluer efficacement et au long

terme sur lřéchiquier humanitaire, est encore un concept très peu entrepris ouvertement.

Tous chevaliers quřils sont Ŕ ou quřils ne sont pas Ŕ les sauveteurs, parfois héroïques, sont bien les

éboueurs de la planète. Ils ont les mains dans le cambouis. Ils font un travail pénible au péril de

leur vie. Surtout se sont des chevaliers sans armure, car ils affrontent les dangers avec des moyens

techniques de plus en plus sophistiqués. Une protection individuelle contre lřeffondrement

émotionnel au contact de la mort leur manque parfois cruellement et leur vulnérabilité devient

alors extrême (Bierens De Haan, 2005, p. 11).

31

Traduction personnelle

- 23 -

Subséquemment on peut se demander quels sont donc les soutiens effectifs que

proposent les ONG pour diminuer cette vulnérabilité au stress.

2.3 La législation et les différentes prises en charge psychologique au sein des

organisations de solidarité internationale

Un soutien efficace à la santé est un droit que possède chaque employé, mais aussi un devoir

de lřemployeur. Les ONG effectuent souvent les contrats dřembauche selon la législation en

vigueur dans le pays du siège de lřONG. En prenant exemple de MSF Suisse, les contrats se

font donc principalement sous lřégide de la loi Fédérale Suisse sur le travail. LřArticle 328

VII sur la protection de la personnalité du travailleur dit que :

Lřemployeur protège et respecte, dans les rapports de travail, la personnalité du travailleur; il

manifeste les égards voulus pour sa santé et veille au maintien de la moralité. En particulier, il

veille à ce que les travailleurs ne soient pas harcelés sexuellement et quřils ne soient pas, le cas

échéant, désavantagés en raison de tels actes.

Et complète en ajoutant :

Quřil prend, pour protéger la vie, la santé et lřintégrité personnelle du travailleur, les mesures

commandées par lřexpérience, applicables en lřétat de la technique, et adaptées aux conditions de

lřexploitation ou du ménage, dans la mesure où les rapports de travail et la nature du travail

permettent équitablement de lřexiger de lui. (Les autorités Fédérales de la Confédération Suisse,

2012)

Dans cette multitude dřONG, il y a des moutons noirs qui ne sřintéressent guère à la santé de

leurs collaborateurs ; toutefois beaucoup dřinstitutions ont déjà commencé à proposer un

éventail de services en faveur de la santé mentale de leurs employés. Si nous examinons, le

soutien psychologique donné aux travailleurs humanitaires, celui-ci il se traduit

principalement par six formes dřaide :

Un programme dřassistance aux employés (EAP), des conseillers sont joignables par

téléphone 24/24h.

Le téléphone et lře-mail gérés par des psychologues indépendants.

Une base de contact de psychologues indépendants, occidentaux, qui apportent du

soutien sur le terrain

Un soutien psychologique par un psychologue interne à lřONG

Un psychologue interne sur le terrain dřopération

Une base de données ou une liste de références de psychologues/conseillers/pairs qui

soutiennent les employés. (People in Aid, 2009, pp. 25-26)

- 24 -

En fin de compte, il est important que le personnel ait le plus dřoptions possibles. Chaque

méthode reçoit des critiques diverses. Il y a un consensus général sur le fait que le soutien

psychologique devrait venir dřune personne qui a de lřexpérience dans le soutien humanitaire

sur le terrain. (People in Aid, 2009) Mais ces options, ces aspects psychologiques

interviennent à plusieurs phases de la mission. On peut distinguer trois phases (2009, pp. 54-

55) :

1. Pré-déploiement : sélection, (screening), formation, incorporation

2. Durant le déploiement : soutien et évaluation ; formation ; soutien en temps de crise

3. Post-déploiement : débriefing, soutien psychologique, réinsertion

Chaque phase pourrait-être étudiée avec soin ; des manuels, des outils sont à disposition des

ONG pour les aider à gérer convenablement tout le processus. Mais, il est intéressant de se

pencher sur certaines phases contestées comme le dépistage psychologique pendant la période

de pré-déploiement qui consiste à rendre visite à une psychologue avant de partir sur le

terrain ; cette méthode montre certains avantages. Il est dit quřavoir :

une attention sur les besoins psychologiques du personnel sur le terrain pendant la phase de pré-

déploiement permet de développer une main-d'œuvre stable en freinant la probabilité dřune

maladie, dřune détresse psychologique, dřune sécurité défaillante, de rendement médiocre, et de

fortes dépenses associées au turn-over32

(People in Aid, 2009, p. 20).

Certaines professions ont essayé et évalué ce système et sont particulièrement en avance dans

les recherches sur les dépistages psychologiques ; il sřagit dřune pratique de routine pour les

militaires durant la phase de pré-déploiement. Une étude (2011) menée sur le dépistage

psychologique pendant cette phase sur 11'000 soldats Américains démontre quřil y a une

réduction sur la prévalence des maladies mentales et des évacuations médicales. Malgré le fait

quřhumanitaire et militaire font rarement cause commune, il y a néanmoins beaucoup à

apprendre de l'armée. Alors quřune recherche de People in Aid (2009, p. 20) a révélé que

seulement 15% des organisations utilisent le dépistage psychologique de leur personnel

international avant le départ. Un autre 15% des organisations ont déclaré utiliser un dépistage

sur le comportement et évaluation de la personnalité (non-clinique). De grands organismes

comme la Croix-Rouge française exigent que tous les membres du personnel international

reçoivent un dépistage psychologique et médical avant le départ, ainsi quřen post-affectation.

La question sur les antécédents psychiatriques comme facteurs aggravants est mentionnée

dans plusieurs études ; les résultats ont clairement démontrés que des antécédents de

32

Traduction personnelle

- 25 -

dépression influençaient de manière néfaste les conséquences du stress. Ceci est confirmé par

lřétude de Lopes Cardozo (2005) qui explique que les personnes sans antécédents de troubles

psychologiques ont moins de risque de souffrir de dépression ou dřautres troubles mentaux. Il

reste malgré tout, beaucoup de questions en suspens, mais la prise en compte par

lřorganisation dřun système de soutien, de surveillance et dřévaluation par les différents

acteurs imbriqués est peut-être la bonne recette. Le renforcement des ressources humaines qui

sont en charge du suivi des expatriés, reste le point central de lřaction pour un soutien efficace

aux employés. Les ressources humaines ne sont pas les seules à être remises en cause, les

psychologues ont aussi leurs propres débats et viennent ajouter leur pierre à lřédifice. Un des

points les plus litigieux reste celui du débriefing psychologique.

2.4 Débriefing psychologique après un incident critique

Contesté, le débriefing psychologique, une branche de lřaide psychologique apporté par les

ONG, est rempli de divergences. Il ressort de lřétude dřEhrenreich (2004) que sur dix-sept

ONG, les expatriés recevaient tous des débriefings après un incident critique ; alors que le

Manuel Sphère annonce que le débriefing psychologique33

« est, au mieux, inefficace et doit

être évité » (2011, p. 335) ; mais il émet aussi que « des premiers secours psychologiques

doivent être mis immédiatement à la disposition des travailleurs humanitaires qui ont vécu des

événements extrêmement éprouvants ou en ont été témoins » (2011, p. 335). Alors

quřEvelyne Josse souligne que

Malgré le fait que cette pratique est décriée ces dernières années, le débriefing psychologique est

trop souvent appliqué à mauvais escient, parfois mal conduit, il nřen reste pas moins utile lorsquřil

sřaccompagne dřautres mesures préventives et thérapeutiques (par exemple, groupe dřentraide,

psychothérapie, etc.) » (2006, p. 4).

Cependant une alternative aux débriefings psychologiques existe ; lřapparition de la

Psychologie de Premiers secours34

a été recommandée par de nombreuses organisations

internationales et groupes d'experts internationaux, y compris le Comité permanent inter

organisations (IASC) et le Projet Sphère. En 2009, The World Health Organization’s (WHO)

mhGAP Guidelines Development Group ont évalué lřefficacité des premiers secours

psychologiques et du débriefing psychologique. Ils ont conclu que : « les premiers secours

psychologiques, plutôt que le débriefing psychologique, devraient être offerts aux personnes

33

Selon le manuel Sphère : « Cřest le fait de faciliter la décharge en encourageant la personne concernée à

raconter brièvement mais de manière systématique les perceptions, pensées et réactions émotionnelles quřelle a

vécues pendant un récent événement stressant » 34

Présentation à lřannexe

- 26 -

en détresse après avoir été récemment exposées à un événement traumatique » (WHO, 2011,

p. 4). Utilisé en première intention, il peut avoir une utilité pour les travailleurs humanitaires.

Contrastant avec la position du CICR qui continue de pratiquer le débriefing (Bierens De

Haan, 2005, pp. 236-245). Un consensus sur cette méthode ne semble pas avoir été trouvé. Il

est étonnant quřune réponse uniforme de la part des spécialistes de lřaide nřait pas émergée.

Cela peut nous faire supposer que la minimisation des effets du stress sur le staff humanitaire

est un sujet trop contestable pour avoir un assentiment, ou que lřétude sur le sujet spécifique

de lřexpatrié, évoluant dans un environnement difficile, nřest pas un sujet qui émeut la

communauté internationale35

. En fin de compte, on peut sřapercevoir quřil y a un groupe

dřacteurs qui écrit la bonne pratique face à des praticiens qui font le contraire sur le terrain.

2.5 Entre théorie et pratique

Cette différence entre théorie et réalité ne se reflète pas que dans lřaspect du débriefing

psychologique. On peut voir par exemple dans le manuel People in Aid (2003) quřil est inscrit

que : « les horaires de travail ne nécessitent pas plus d'heures de travail qui sont énoncées

dans les contrats individuels. Temps libre et périodes de congé, sur la base des politiques

écrites, sont obligatoires » (2003, p. 20). Le temps de travail revient dans le chapitre

protection du manuel sphère où il est souligné que :

Les travailleurs humanitaires travaillent souvent de longues heures dans des conditions

dangereuses et stressantes. Les agences ont lřobligation de prendre soin de leurs collaborateurs ;

elles doivent notamment prendre des mesures pour favoriser leur bien-être, et leur éviter

épuisement durable, accidents ou maladies. Les cadres doivent attirer lřattention de leurs

collaborateurs sur les dangers possibles et les protéger contre toute exposition à des risques inutiles

pour leur santé physique et émotionnelle (2011, p. 85).

Alors que les chiffres dans le tableau ci-contre,

montrent la moyenne dřheure de travail effectif sur

274 expatriés de MSF Suisse, on peut distinguer

quřune partie des expatriés sont nettement en dessus

des moyennes suisses. La loi suisse fixe lřhoraire de

travail maximum à 45 heures par semaine mais peut

aller pour certains types de travailleurs, jusquřà 50 heures. Les objectifs des plans dřaction, la

surcharge de travail, le manque de personnel, la pression de la planification des budgets, puis

des révisions budgétaires qui auront un impact sur la bonne continuation du projet pendant de

35

Voir glossaire

Heures de travail (n=274) (Guss, 2012)

- 27 -

long mois, lřaffluence des bénéficiaires, lřaugmentation des besoins, le changement

dřenvironnement et lřévolution du contexte font partie de cette liste non-exhaustive de

facteurs qui engendrent des heures de travail supplémentaire. La spécificité du travail

humanitaire peut-elle expliquer un écart de la loi sur le travail Suisse ? Alors que la fondation

Antares rajoute que :

Le bien-être de ses employés va au-delà de la simple obligation de lřorganisme dřéviter quřils ne

souffrent des dommages et dřassurer quřils soient de Řbons travailleursř. Lřorganisme a la

responsabilité, conformément à ses objectifs humanitaires, de favoriser la résistance et de renforcer

les capacités humaines. Lřorganisme doit sřengager à encourager le personnel à développer ses

propres compétences et connaissances et à renforcer son expérience, ce qui augmentera les

probabilités de lřorganisme dřatteindre ses objectifs sur le terrain (2006, p. 6).

La suggestion que : « lřorganisation non gouvernementale peut considérer les travailleurs

humanitaires comme des actifs négligeables qui ont un taux élevé de déperdition facilement

compensé par un apport continu dřenthousiasme et dřengagement » (Ditzler, 2001, p. 2)

contredit ces affirmations. Sans oublier la perception des humanitaires qui selon le Centre

dřApprentissage Interculturel (2009),

Nombre de travailleurs humanitaires affirment ne pas se sentir adéquatement soutenus par leur

employeur au cours de leur affectation, et tout particulièrement à lřétape de la réintégration. Ce

manque de soutien (réel ou perçu) peut accroître lřanxiété chez le travailleur et le risque de

troubles psychosociaux graves. (2009, p. 4)

La réalité de certains résultats

dřétudes comme celle

dřEhrenreich (2004)qui met en

avant que sur dix-sept individus

seulement 18% rapportent une

activité de prévention sur la

gestion du stress sur le terrain.

Lřétude dřIsabelle Guss sur la

formation des expatriés avant

départ de MSF Suisse, démontre

les disparités. Les prestations, ne semblent pas atteindre un niveau équitable pour lřensemble

du personnel.

Alors que lřattitude professionnelle des ONG a été commentée par des autres instances,

comme l'Organisation Mondiale de la Santé (OMS) qui a publié les conclusions d'un rapport

Formations avant départ reçues par les expatriés de MSF-OCG

(Guss, 2012)

- 28 -

sur plus de 200 travailleurs humanitaires des ONG en mission au Rwanda, en Ouganda et en

Tanzanie. Ce rapport cite quatre problématiques générales: le calendrier de recrutement, le

manque de soutien significatif et la supervision sur le site, la préparation insuffisante des

travailleurs et le manque de briefings de la zone et dřinformations adéquates sur les conditions

de travail. Ce rapport mettait en avant que 53% n'avaient pas de briefing médical ; environ

20% ont été recrutés par mail uniquement, sans entrevue ou références exigées, sans conseils

sur la sécurité alimentaire, l'eau et sur les maladies parasitaires, infectieuses.36

(Ditzler, 2001,

pp. 1-2)

Dřune manière générale, malgré les outils, standards et études diverses, il persiste un décalage

entre lřaide théorique proposée et la réalité. La réalité sur le terrain étant souvent complexe et

laisse lřexpatrié confronté à des choix qui peuvent le marquer toute sa vie. Lřexemple de

Carlos Buverd, délégué du CICR, responsable en Angola, en 1981, de lřaide alimentaire pour

un quart de million de personnes, qui, vingt ans après, revoit les regards des personnes qui

lřinsultaient et des bénéficiaires quřil écartait de lřaide car il nřy en avait pas assez pour tout le

monde (Humem, 2011). Les expatriés subissent le manque de professionnalisme des ONG ;

alors on peut se demander comment se fait lřaccompagnement des personnes ayant subit un

traumatisme ou ayant développé un PTSD ?

2.6 PTSD

Les acteurs humanitaires sont plus prédisposés à souffrir dřun état de stress post-traumatique,

dřanxiété, de dépression que la majorité de la population (Europe/U.S.A.) (Ellen Connorton,

2011, p. 146). Une étude a démontré notamment que 30% des travailleurs humanitaires

récemment rentrés de mission présentent des symptômes de PTSD (Eriksson, 2001). Les

chiffres diffèrent selon les études que lřon peut trouver sur le sujet, mais elles révèlent toutes

que les cas de PTSD sont bien présents chez les humanitaires. Mais les chiffres ne reflètent

peut-être pas la réalité. Bauer précise que : « parce que les symptômes de stress ou un

traumatisme peuvent apparaître en surface après que le travailleur ait quitté le service d'une

organisation, il est difficile d'obtenir un décompte précis de la façon dont il est affecté dans sa

vie sociale et professionnelle37

» (Bauer, 2009, pp. 6-7). On peut donc logiquement se

demander si on ne laisse pas des poissons sřéchapper des mailles du filet, sombrant dans

lřabysse et qui seront difficiles à repêcher ultérieurement.

Les acteurs humanitaires ont été les oubliés de ce fléau. Les militaires ont fait la une des

journaux, du vétéran du Vietnam au jeune père de famille rentrant dřIrak. Il y a eu une

36

Traduction personnelle 37

Idem

- 29 -

quantité colossale dřarticles sur le PTSD affectant les victimes ainsi que sur les sauveteurs

après le 11 septembre 2001 mais les travailleurs humanitaires semblent passer inaperçus,

hormis Jean-Paul Mari, journaliste de guerre qui sřest intéressé aux effets du PTSD sur les

journalistes, les militaires, les troupes de maintien de la paix et les membres des ONG. Ayant

vécu le PTSD, son intérêt pour ce sujet méconnu sřest développé38

. Il est aussi notable que les

journalistes de guerre, selon une étude, aurait un taux de prévalence de 20% pour le PTSD

(Feinstein, 2002, p. 309) et sont sujets au même droit de disposer dřun soutien que les

travailleurs humanitaires. Le rapport pourrait être similaire entre un journaliste de guerre et un

travailleur humanitaire exerçant en zone de conflit. Le tabou de la maladie, de la perte dřun

travail rémunéré, la honte ou la méconnaissance du sujet mettent les journalistes et les acteurs

humanitaires dans la même situation malgré leur mandat totalement différent. On peut donc se

demander ce que suggère lřOrganisation Mondiale de la Santé (OMS). Elle aura participé au

débat en publiant des manuels de santé mentale dont des chapitres sur lřaide appropriée pour

les travailleurs humanitaires ; lřOMS y déclare que :

Si vous vous retrouvez avec des pensées ou des souvenirs bouleversants sur l'événement, vous

vous sentez très nerveux ou très tristes, vous avez des troubles du sommeil, ou buvez beaucoup

d'alcool ou prenez des médicaments, il est important d'obtenir le soutien de quelqu'un de

confiance. Parlez à un professionnel de la santé ou, le cas échéant, un spécialiste de la santé

mentale si ces difficultés persistent pendant plus d'un mois (2011, p. 40).

Le mot PTSD nřapparaît cependant pas dans la source citée ni dans lřensemble du texte

original. Cependant, la durée précisée et le temps exact quřil faut pour diagnostiquer un

PTSD, ainsi que la nature des symptômes mentionnés sont liés fondamentalement aux

caractéristiques de ce trouble. Il est intéressant de voir que la notion nřapparaît pas clairement

dans ce manuel. Il est vrai, néanmoins, que la responsabilité individuelle devrait pousser

chaque acteur à aller approfondir ses connaissances sur les risques dont il peut être victime

mais il semblerait que la transparence sur ce sujet dans ce guide reste très limitée.

Des désaccords entre les professionnels de la santé mentale semblent aussi être présents

comme le conclu Connorton qui a analysé la présence du PTSD chez les humanitaires : « la

plupart des études évaluent la présence des symptômes et non pas les diagnostiqués PTSD

(…) Il nřy a pas vraiment un consensus sur une méthodologie standardisée pour mesurer les

PTSD et les autres traumas reliés aux maladies mentales39

» (2011, p. 153). Cependant,

38

Jean-Paul Mari ; sans blessure apparente Paris 2008 39

Traduction personnelle

- 30 -

soulignons que de gros progrès ont été faits et que les enjeux de ces prochaines années ne se

feront pas sur la santé mentale.

2.7 Les avancements et les directions à prendre pour minimiser l’impact du stress

Le problème de la santé mentale semble être le haut de lřiceberg, mais il semblerait que

lřessentiel du travail restant est au niveau de la psychologie du travail :

Le travail humanitaire doit être bien organisé pour réussir. Cela dépend du bien-être, de la

performance des travailleurs humanitaires, des structures organisationnelles qui les soutiennent,

ainsi que de la création et l'entretien de travail décent pour tous. Ces préoccupations sont l'essence

même de la psychologie du travail humanitaire40

(Stuart C Carr, 2012).

People in Aid, acteur majeur de la psychologie organisationnelle, fait partie de ces pionniers

qui ont effectué énormément de recherches sur lřaspect des ressources humaines comme

facteur de mitigation du stress au travail concernant les humanitaires. On est sorti de la

fascination pour le traumatisme et de la souffrance psychique pour sřorienter vers les

ressources personnelles des expatriés. Si on prend le pourcentage dřexpatriés souffrant de

traumatismes au CICR, on peut voir que les chiffres sont faibles de 5% pour les expatriés

souffrants de stress traumatique et 0.17% pour les diagnostiqués PTSD (Dr. Bierens de Haan,

2002). Ce type de statistique a donc permis dřinvestir dřavantage dans la psychologie

organisationnelle. Actuellement la notion de résilience41

qui est : « la capacité à traverser avec

succès des passes très difficiles et des périodes de changement, et à se remettre après des

évènements stressants et traumatiques » (People In Aid, 2011, p. 2) a permis de discerner les

principaux enjeux qui doivent être développés chez lřexpatrié et chez les managers :

lřadaptabilité, la capacité à résoudre des problèmes, le sens dřavoir un objectif à atteindre, de bons

rapports/soutien social, lřoptimisme et le sens de lřhumour, une capacité à réguler ses émotions, la

conscience de soi, lřéquilibre et lřaptitude à sřéconomiser et à se couper du reste et la santé

physique (manger de manière équilibrée, dormir suffisamment, et faire de l'exercice) (2011, pp. 2-

3).

Ces facteurs de résilience et de bien-être auraient un impact important sur la diminution

du stress au travail. On peut donc se demander comment les ONG ont pris en compte

ces enjeux et si une standardisation des ressources humaines apporte des solutions.

40

Traduction personnelle 41

Voir glossaire

- 31 -

2.8 Standardisation des ressources humaines

On a pu voir que le travail au niveau des ressources humaines est la clef pour diminuer la

prévalence de troubles mentaux. Une étude de McCall (1999) montre quřil nřy a pas de

protocole clair pour la sélection du staff et une intégration limitée42

. Elle met aussi le doigt sur

le fait que les organisations sont sensibilisées sur les risques de PTSD mais nřont que de

légères connaissances ainsi que sur le déploiement répété43

(Ellen Connorton, 2011). Une

normalisation amènerait-elle une augmentation de la qualité du soutien donné aux expatriés ?

Selon People in Aid :

Le soin du personnel a été standardisé, cependant, il manque des systèmes nuancés qui prennent en

compte la relation dynamique entre les influences de l'environnement, la culture de l'organisation,

le modèle opérationnel, la phase contractuelle, et l'individu.44

(2009, p. 19)

Pourtant beaucoup dřoutils on été mis en place ces dernières années pour inciter les ressources

humaines à veiller au bien-être des employés et on peut décemment affirmer que tout a été fait

pour faciliter la tâche des responsables des RH pour lřimplantation de ces procédures.

Les agences et ONG ont à leur disposition des outils comme les Standards Sphère45

existant

depuis 1997 qui par exemple les redirigent vers des manuels de Bonnes pratiques de

gestion46

, comme le Code de bonne pratique de People In Aid47

, comprenant des politiques

générales et des directives pour la planification, le recrutement, la gestion, la formation et le

perfectionnement, la transition en fin de contrat et la finalité pour le déploiement. En outre la

fondation Antares48

(2006) a développé huit principes pour minimiser les impacts du stress

sur les employés :

1. Il est impératif dřavoir une politique écrite et active sur le stress

2. Il démontre lřimportance de la présélection et de lřévaluation du personnel

3. Il attire lřattention sur la valeur de la préparation et de la formation à la gestion du

stress avant la mission

4. Il insiste sur le suivi permanent du personnel

5. Il accentue lřimportance du soutien continu dans la formation et le soutien au stress

quotidien

42

On parle de la phase dřintégration et de lřaccueil de lřemployé dans la structure. 43

Le fait de faire enchaîner les missions à lřexpatrié. 44

Traduction personnelle 45

Voir glossaire 46

Manuel Sphère 2011Français P 84 47

Présent dans les annexes 48

Voir Glossaire

- 32 -

6. Il affirme que : « lřorganisme a besoin de donner un appui dans les situations

critiques en fournissant à ses employés un soutien spécifique et culturellement

adéquat en cas dřincidents critiques ou traumatiques et dans dřautres situations

imprévues sources de stress sévère »

7. Il souligne que : « lřoffre dřun soutien pratique, affectif et culturellement adéquat

(…), ce soutien comprend un examen personnel du stress et un débriefing

opérationnel »

8. Il élabore une politique de soutien post-mission. (2006, p. 7)

Il est intéressant de voir que le guide a précisé dans son dernier point, lřimportance dřun

soutien post-déploiement. Lřexpatrié revenant à une vie occidentale pourrait avoir besoin

dřassistance pour retrouver ses repères.

2.9 Réinsertion

Il ressort que le retour de mission peut-être une phase critique pour lřexpatrié. Il a le temps de

ressasser ce quřil a vécu et reste souvent renfermé avec ses malaises puisque les personnes

aptes à le comprendre sont rarement présentes en retour de mission.

Les désagréments psychologiques peuvent arriver des mois après la mission, voire des années.

Les cas de personnes ayant les syndromes de PTSD, qui ne sont pas diagnostiqués ou qui

nřont pas bénéficiés dřune assistance appropriée existent dans lřensemble de la communauté

internationale. Le processus de retour peut être perturbant. Le terme Syndrome de la

rentrée49

ou de choc des cultures fait partie du vocabulaire humanitaire. Néanmoins si de

nombreuses mesures sont prises pour préparer le personnel à entrer dans un contexte différent

lors du déploiement, peu dřaide est apportée pour faciliter le retour. Pourtant lřaprès mission

est le moment idéal pour collecter des informations et avoir une évaluation de ses employés.

Pourtant quand on lit les statistiques, peu dřONG saisissent lřoccasion de récolter des

informations : « lorsque nous avons demandé si les organisations avaient évalué le personnel

de soins, seulement 30% ont dit qu'ils lřavaient fait50

» (People in Aid, 2009, p. 47).

On peut aussi constater une petite évolution dans lřutilisation du débriefing dřaprès mission

comme lřillustre McConnan en 1992. Il a révélé que « 72% des travailleurs de lřaide ont

déclaré avoir eu un débriefing inadapté et une mauvaise prise en charge sur leur retour, tandis

quřen 2003 Foyle a constaté que 43% ont déclaré que les débriefings étaient inadéquats »

(People in Aid, 2009, p. 39). Une disparité importante existe donc entre ONG :

49

Voir glossaire 50

Traduction personnelle

- 33 -

Certaines organisations proposent à tous les travailleurs internationaux dřaller dans un

emplacement central où ils effectuent des entrevues de départ, font des rencontres pertinentes avec

les départements, assistent à un tropical check-up obligatoire, un dépistage sur la santé physique, et

une obligation dřaller faire un examen psychologique, tandis que d'autres organisations perdent le

contact avec le personnel après quřils quittent le terrain; aucun soutien de suivi nřest

fourni. (People in Aid, 2009, p. 43).

Les études se focalisent sur les humanitaires sur le terrain ou rapidement après, et très peu sur

la phase de la transition à la vie normale : « les rapports indiquent que les humanitaires ne

sont pas suivis après le service, ce qui rend difficile dřévaluer les besoins de soins

particuliers 51

» (Ellen Connorton, 2011, p. 153). « 74% du personnel rapportent des problèmes

de réajustement dans la vie normale, mais les organisations ne sont généralement pas au

courant et ne soutiennent pas la réinsertion52

». (Guss, 2012, p. 71).

Dans le centre de psychologie humanitaire où une assistance gratuite via e-mail ou téléphone

pour les expatriés de retour ou en mission ont été mis en place le responsable déclare que :

Plus de 400 personnes ont pris contact par e-mail ou par téléphone lřannée dernière, les appelants

étaient principalement à la recherche de réconfort dans leurs situations. Un petit nombre présentait

des signes de syndrome de stress post-traumatique (SSPT-PTSD) et a été informé qu'il devrait

rechercher du soutien professionnel immédiatement (People in Aid, 2003, p. 21).

Les prestations, le suivi, la prise en charge dépendent aussi des législations nationales

qui : « varient quant aux conditions exigées aux employeurs dans de telles circonstances ainsi

quřaux moyens pratiques de soutien quřoffre le gouvernement lui-même (ex. : revenus, prise

en charge médicale) » (Antares, 2006, p. 23). À la fin du contrat, lřassurance-maladie ne

fonctionne plus et rien nřoblige lřemployeur à prendre en charge les désagréments

psychologiques que son ex-employé endure. Cela dépend souvent de la bonne volonté de

lřemployeur de proposer ces services à leurs équipes. Des initiatives privées comme celles

du centre de psychologie humanitaire permettent de mettre en avant le fait quřil y a toujours

des besoins dans le suivi des personnes revenant du terrain. Mais des questions subsistent sur

la responsabilité de chacun : des employeurs vis-à-vis de leurs anciens employés et de

lřemployé vis-à-vis de lřacceptation du problème et dans sa volonté de guérir.

2.10 Principales recommandations des experts

Ellen Connorton conclut sa revue de la littérature en disant que :

51

Idem 52

Idem

- 34 -

Actuellement il nřy a pas de base évidente concernant la façon de préparer les travailleurs

humanitaires aux risques de traumas et de stress. Alors que le taux élevé de trauma rapporté chez

le travailleur humanitaire indique un besoin de prescrire des formations et un soutien approprié, les

méthodes des études passées en revue ne nous permettent pas de faire des suggestions adéquates53

(2011, p. 147).

Pourtant des outils peuvent et doivent toutefois être mis en place car les gens continuent

d'aller sur des missions et font toujours face à des défis éthiques : « La nécessité de

promouvoir un outil qui peut aider les travailleurs humanitaires à mieux se préparer pour le

départ et de permettre de les aider à traiter des événements sur place ou au retour54

» (Lisa

Schwartz, 2010, p. 10). « Il y a aussi un manque dřétudes, de connaissances scientifiques sur

la santé psychologique du staff et de lřimpact du stress après le conflit55

». (Cardozo, 2004, p.

153) Il est également important dřaborder des études concernant le staff national. Il est

intéressant de voir que le personnel recruté dans le pays souffre dřavantage de traumas, de

symptômes dřanxiété généraux ; de dépression et de PTSD :

Comparé au personnel international, ils vivent une plus grande insécurité, non reflétée dans leur

salaire, sécurité, plans de carrière, et subissent parfois un traitement inégalitaire en cas

dřévacuation dřurgence ou de fin de la mission. Des malentendus interculturels, exacerbés par les

questions raciales, ethniques ou néo-colonialistes, sont dřautres sources de stress. (Antares

Foundation, 2008, p. 4)

Le staff national est un sujet quasi absent de la littérature alors que des études sur le soutien

quřils reçoivent par rapport à leurs besoins psychiques seraient pertinentes.

En conclusion les agences humanitaires devraient examiner les points, tels quřénoncés par

Thomas Ross56

(2004, p. 161) :

Que fait-on si un humanitaire est exposé à un évènement traumatique signifiant ?

Quelles soutiens et mesures préventives y a-t-il pour les staffs pour prévenir dřéventuels troubles

sur la santé mentale à cause du déploiement ?

Comment travaille-t-on dans une culture qui a de fortes conséquences sur la santé psychologique,

sur la manière de faire face, la résilience, pour révéler un problème psychologique qui est toléré

sans stigmatisation ?

Comment pouvons-nous créer un climat organisationnel où les expatriés pourraient avoir

confiance dans la divulgation dřune vulnérabilité émotionnelle qui ne serait pas stigmatisant ?

53

Traduction personnelle 54

Idem 55

Idem 56

Traduction personnelle

- 35 -

Les acteurs humanitaires paient actuellement toujours un lourd tribut de la mauvaise

perception de la fragilité psychologique dans nos sociétés occidentales. Une évolution doit se

faire des deux côtés, de la part de lřONG qui emploie du staff et de la part du staff lui-même

dans sa manière de sřauto-responsabiliser, dřappréhender et de connaître les facteurs de stress

ainsi que ses risques. La mitigation du taux de prévalence des maladies mentales ne peut se

faire quřavec un réajustement structurel et organisationnel des services employant des

expatriés. Il y a une autoréflexion de la part des ONG à faire dans les phases avant, pendant et

après le déploiement, qui prend en compte un suivi après la période contractuelle sur plusieurs

années. Le fonctionnement interne des ONG doit être analysé pour proposer un soutien

adéquat aux employés. Le manque de recherches dans ce domaine ne permet pas de solution

miracle, mais nombre de manuels et guides prenant en compte la santé mentale existent et

peuvent dès lors être utilisés comme base de réflexion. Dans toute implantation de projet, par

des ONG de toutes dimensions, dans toutes les phases du déploiement, un programme entier

doit être créé pour le soutien aux travailleurs internationaux, ce qui représente une prise en

compte sérieuse dès la création dřune action humanitaire, un coût important et un

professionnalisme durant sa mise en œuvre.

Davidson conclut en disant quř : « une bonne gestion du personnel et un bon soutien coûte de

lřargent, mais une pauvre gestion et un mauvais soutien coûte plus57

» (Davidson, 1998, p. 7).

Chapitre 3-Les Cas de MSF et du CICR

Après avoir développé dans la première partie de mon travail la théorie sur la gestion de la

santé mentale des expatriés travaillant dans le secteur humanitaire, je vais prendre le cas de

deux institutions respectées pour comprendre comment elles ont pris en compte ces aspects de

soutien aux expatriés.

En effet MSF et le CICR, deux antagonistes de lřaction humanitaire, ont pris conscience de

lřimpact négatif du stress chez le travailleur humanitaire. Des principes Dunantistes58

sont

présents chez les deux organisations. Humanité, Impartialité, Indépendance, Neutralité et

Volontariat59

sont les principes idéologiques dont les deux organisations se revendiquent.

Possédant des mandats distincts, ils ont réussis, par des actes humanitaires efficaces sur le

terrain à se construire une respectabilité mondialement reconnue. Critiquer de telles entités,

57

Idem 58

Principes venant du fondateur du CICR Henri Dunant. 59

Voir Glossaire

- 36 -

toutes deux détentrices de Prix Nobel, nřest pas chose aisée. Mais il est intéressant de voir si

elles ont des failles organisationnelles concernant le soutien dans le domaine de la santé de

ces deux monuments de lřhumanitaire.

Nous commencerons avec lřexplication du programme de MSF, et notamment ses principaux

enjeux, qui occuperont une bonne partie du chapitre, puisque le soutien psychologique y est

moins développé que dans dřautres ONG. Puis nous aborderons rapidement le programme du

CICR comme élément comparatif en essayant aussi dřexaminer ses failles.

3.1 MSF

MSF se définit comme :

Une ONG existant depuis quarante ans, elle apporte une assistance médicale à des populations aux

prises avec des crises menaçant leur survie : principalement en cas de conflits armés, mais aussi

d'épidémies, de pandémies, de catastrophes naturelles ou encore d'exclusion des soins. Toutes ces

situations nécessitent des ressources médicales et logistiques adaptées. Indépendante de tous

pouvoirs politiques, religieux ou militaires, MSF agit en toute impartialité, après évaluation des

besoins médicaux des populations. La garantie de l'indépendance de l'association s'enracine dans

son financement, assuré à plus de 80% par la générosité de ses donateurs privés (MSF, 2012).

MSF est une ONG à portée internationale qui compte dix-neuf sections, dont cinq sont

des centres opérationnels (France, Belgique, Espagne, Hollande et Suisse) ; les autres

sections travaillent en collaboration pour un de ces cinq centres dřopérations. Chaque

section opérationnelle est interdépendante, mais une fois engagée dans lřune ou lřautre

des dix-neuf sections, on peut rejoindre une des cinq sections sans renouveler le

processus de recrutement. MSF fait partie de ces grands acteurs de lřhumanitaire qui ont

permis une évolution des pratiques humanitaires.

La prise en compte de l’aspect psychologique de MSF Suisse

Il est important de comprendre les différentes parties du processus, dřavant et dřaprès la

mission.60

Avant la mission : MSF Suisse propose des journées dřinformations sur ses activités ; elle

montre honnêtement la vie dřun expatrié où les recruteurs accentuent sur les avantages et

inconvénients de cet engagement. MSF a deux départements RH, le premier sřoccupe des

recrutements, le deuxième est incorporé à une cellule (centre dřopération ayant plusieurs pays

à charge). A la phase du recrutement, les candidats sont mis sous pression assez

agressivement pour évaluer sřils sont conscients de la réalité du travail humanitaire. La RH

60

Les informations ont été collectées par interview auprès dřune responsable des Ressources humaines et dans le

manuel de MSF de 2009 (carnet de route).

- 37 -

manager peut, sur un sentiment personnel, demander une consultation psychologique

obligatoire ou mettre des points dřinterrogations sur les aspects où elle ne se sent pas

convaincue et fait suivre lřinformation à la cellule, puis sur le terrain. Après validation de la

candidature, un cours dřintégration pré-départ est organisé pendant une semaine. La sécurité

et le stress sont abordés lors dřun cours de 1h30 en utilisant énormément dřoutils du CICR. A

noter que des guides, un carnet de route (expliquant la politique de lřONG avec des pages sur

le stress et la sécurité) sont donnés à lřexpatrié. Lors du briefing avant la mission, chaque

département insiste sur les risques et dangers, puis revient sur le stress, toujours avec des

outils du CICR.

En cours de mission : le coordinateur médical est en charge de la santé mentale, si besoin, il

peut mettre lřexpatrié en contact avec le responsable de la santé de lřONG ou avec la

psychologue indépendante de MSF. La psychologue peut sřentretenir au téléphone et prendre

les mesures qui sřimposent.

Le CRACK est également une solution innovante que MSF-OCG a mise en place : en cas de

conflit avec un supérieur ou si lřon veut dénoncer quelque chose, un numéro de téléphone ou

une adresse mail sont à disposition. Le problème est soumis à une cellule indépendante des

cellules dřexperts de MSF qui juge les cas et redonne des instructions (décision en 72h,

investigation sur terrain, rapatriement,…). En cas de crise ou dřincident, un psychologue peut

être dépêché sur place. (Le defusing61

est pratiqué seulement par des professionnels)

Au retour : un débriefing émotionnel volontaire est proposé, ainsi que des débriefings avec

les différents départements dont les RH, qui se chargent aussi dřévaluer sřil y a un besoin de

soutien psychologique. Jusqu'à cinq séances chez un psychologue seront prises en charge par

lřONG (avec un peu de flexibilité). Lřassurance-maladie continue dřêtre valide jusqu'à trois

mois après la fin du contrat. Par ailleurs, des appels téléphoniques peuvent être faits à

lřemployé pour évaluer son niveau de santé après la mission selon le désir de la responsable

des ressources humaines.

Ces nombreuses mesures prennent-elles en compte les besoins des expatriés ? Sont-elles

efficaces ? Les expatriés de MSF sont sujets à de nombreux évènements violents sur le

terrain, lřorganisation assume-t-elle ses responsabilités ? Une série de points que nous allons

aborder dès à présent.

61

Voir glossaire

- 38 -

3.2 Les défauts de la prise en charge

des expatriés

Le tableau ci-contre démontre que les

expatriés de MSF sont des personnes

très exposées à de potentiels

évènements difficiles, induisant un

stress variable selon la nature des

incidents subits. Comment la politique

de MSF prend-elle en compte

lřaccompagnement de ces

travailleurs ? Il semblerait que

certains se sentent délaissés, selon ce

témoignage. Un ancien collaborateur de MSF, Marc Vachon (2002), raconte : « Quand tu vas

sur le terrain, tu penses que les gens derrière toi, au siège, sont des professionnels qui

prendront soin de toi si quelque chose třarrive. En réalité, tu te sens comme un citron

compressé et quřon jette au loin quand ils nřen ont plus besoin » (2002, p. 186). Il témoigne

après sa mission à Goma, post Rwanda (94) où il a côtoyé lřhorreur du flot de réfugiés en

provenance du Rwanda :

Lors de mon retour à Paris au siège de MSF France, jřai eu un court et froid débriefing. Personne

ne semblait savoir ce qui cřétait passé au Zaïre (RDC). Merci pour tout Marc (…) Tu sembles un

peu fatigué (…) tu devrais te reposer. Merci pour tout encore. Je retournais à Maputo pour trois

semaines où jřai eu des cauchemars, je commençais à boire, à boire beaucoup, whiskies pour

déjeuner et pilule pour mřendormir. Toutes les nuits, jřallais dans les bars pour me battre. A la fin

des trois semaines ma fiancée ne veut plus me parler. Finalement jřai tout abandonné et jřai pris

lřavion pour la France sans regarder derrière moi. (…) Je ne savais pas pourquoi tout le monde me

regardait si froidement au siège. Je pense que cřest parce quřje ressemble à un morceau de merde

ou à un fou (…) Quand je vais pour parler à quelquřun, il est occupé ou nřest pas là. Quand je

demande une autre mission ils me répondent quřil nřy a rien en vue (…) jřallais chaque semaine au

siège, pendant six semaines, je continuais de mřagrémenter de whiskies et de pilules, à chaque

passage au siège, je reçois toujours la même réponse : Rien pour vous maintenant. - Quřavais-je

fais de mal ? Après investigations (…) jřai appris que jřavais été black listé par MSF(…)

Démoralisé nřest pas un mot assez fort. Jřétais vraiment déprimé, et triste. Tout était noir. Jřétais

triste pour MSF, pour moi, pour les Rwandais, pour tout ce foutu monde. Mais cřest quoi le pire

Goma ? Ou comment MSF mřa traité ?62

(2002, p. 186)

62

Traduction personnelle

Evènements critiques expérimentés en mission par les

expatriés de MSF (n=381) (Guss, 2012)

- 39 -

Malgré lřancienneté du témoignage, nous retrouvons dans celui-ci des aspects

organisationnels néfastes pour le collaborateur qui se perpétuent encore actuellement. Mike

Woodman, responsable de la Santé des expatriés à MSF Suisse nie le principe de la black

liste, mais ajoute que si quelquřun est considéré instable, les sanctions peuvent aller jusquřà

ne plus pouvoir travailler avec MSF pendant deux ans par exemple, ce qui en définitif, est un

genre de blacklisting63

. Cependant, si on prend le cas susmentionné, ne serions-nous pas dans

des techniques RH illégales, discriminatoires et dépourvues dřhumanité ? Ceci semble

contradictoire avec les valeurs prônées par les initiateurs de la dénonciation humanitaire. Un

traitement digne des expatriés ne serait-il pas une cause assez noble pour lřONG ?

Des investigations sur ces méthodes demanderaient un nombre important de contacts et de

temps, mais un exemple actuel peut nous faire supposer que les progrès effectués ne sont pas

si considérables. Quand on demande à une des responsables des ressources humaines sřils

pratiquent effectivement des black listes, la réponse est : « Oui, mais ils ne nous disent pas

toujours les raisons du black listage (…) quand je les contacte pour leur demander des

références sur quelqu’un ; ils font très attention lors de la prise de référence (selon la loi ils

n’ont pas le droit de dire des propos négatifs), ils vont simplement formuler, pour nous, nous

ne le ferons pas repartir, point. » Elle rajoute quřelle ne sait pas si ce sont des problèmes

dřalcoolisme, de compétences managériales ou quoi que se soit dřautre.64

Dans le cas de Marc Vachon, on peut discerner un fort trauma, le soutien a été le rejet et non

lřaccompagnement. Avec lřévolution des connaissances sur le sujet, des progrès ont-ils été

faits ? Lřexemple que jřai obtenu des RH de MSF-OCG est le recrutement dřun coordinateur

logistique pour le Sud Soudan. Il avait dřexcellentes références de MSF France avec plus de 8

ans dřexpérience dans la logistique chez MSF. Deux mois après le début de son contrat, un

grave problème dřalcoolisme est découvert. MSF Suisse décide de lui payer une cure de

désintoxication au Kenya auprès de sa famille avec une prise en charge totale. Le responsable

des ressources humaines a envoyé un mail aux autres sections pour un partage des coûts,

puisquřil avait plus de 15 ans dřancienneté, dans les différentes sections opérationnelles de

MSF. Mais les intéressés ont ignoré la demande.

En comparaison, le programme stress du CICR a régulièrement des gens qui sont renvoyés du

terrain, de tous les niveaux de la hiérarchie. Ils sont pris en charge avec un contrat spécial de

deux ans (actuellement 5-6 personnes bénéficient de ce programme). Une répartition des frais

est ventilée comme suit : un tiers est payé par lřassurance maladie, un tiers par lřinstitution et

63

Interview de Mike Woodman le 19 décembre 2011 64

Interview Christine Gayral du 5 décembre 2011

- 40 -

le dernier par le collaborateur pour lřimpliquer de manière plus active dans sa guérison. MSF

dispose de sections interdépendantes et il semblerait quřavancer dans la même direction pour

un soutien approprié soit difficile. Le responsable de la santé des expatriés de MSF explique :

« il est compliqué d’interagir avec toutes les sections et que MSF a tendance à bouger le

problème. Ne voulant pas vraiment résoudre l’embarras et ne voulant pas nécessairement

black listé l’individu, il y a pas mal de gens comme ça qui circulent à MSF(…) Alors que

peut-on faire d’autre ? Que vont-t-ils devenir ? Ils vont errer d’une section à l’autre à cause

du désistement général (…). Mais cela arrive aussi à l’interne, dans la maison, entre les

cellules. L’exemple d’un logisticien qui travaille dans une cellule, et ses subordonnés ne

veulent plus travailler avec lui en raison de tels ou tels problèmes donc la mission est

raccourcie et ensuite il se retrouve avec une autre proposition, ce qui prouve que

l’information ne se diffuse pas très bien et qu’il n’y a pas de prise de décision claire.»65

La RH manager qui a travaillé dans la section française de MSF assume quřil y a des grosses

différenciations entre les sections opérationnelles. Les Français prennent leurs employés pour

un numéro. Le nombre important de postulants explique peut-être une pratique

dépersonnalisée des entretiens et du soutien aux expatriés66

. Dans ces imposantes entreprises

de lřhumanitaire, que sont le CICR et MSF, un nombre incalculable de travailleurs

internationaux tournent dans le siège, entre départ et arrivée, entre briefing et débriefing. Il

faut réussir à assurer un certain professionnalisme dřun point de vue logistique et dřun point

de vue organisationnel en tout temps. Certes MSF travaille au nom des populations qui ont

des besoins dřextrême urgence et vivent dans une précarité et une détresse dramatique.

Cependant, en offrant aux collaborateurs un contexte incertain de travail, en exposant leur

santé, il ne faudrait pas oublier de traiter leur détresse psychologique favorisée par

lřorganisation elle-même qui nřa pas un soutien approprié.

3.3 Le mouvement MSF : principes refoulés pour les employés ?

Les ressources humaines ont essayé de standardiser les procédures de recrutement entre toutes

les différentes sections. Théoriquement donc, tout employé engagé dans lřune ou lřautre des

sections a dû passer par le même processus. Toutefois, il semblerait quřil nřy ait pas une

entente cordiale entre les pools RH des cinq centres dřopération. Le manque de collaboration

semble évident. La politique de stress qui est en grande partie du ressort de la politique des

ressources humaines est complètement dissemblable dans chaque entité. Une différence de

65

Interview de Mike Woodman le 19 décembre 2011 66

Interview de Christine Gayral du 5 décembre 2011

- 41 -

mentalité se fait également ressentir entre ONG anglo-saxonnes et francophones. Les

francophones sont plus basés, en général, sur le volontarisme, le don de soi, la responsabilité

individuelle alors que les Anglo-Saxons vont se focaliser sur un soutien aux salariés, une

possibilité de carrière à long terme, un accompagnement plus spécifique, plus personnalisé.

Pour voir concrètement la différence entre ces deux bassins culturels, le programme de

soutien de MSF Hollande est représentatif de cette dissemblance ; elle est la section de MSF

qui est la plus avancée dans la question de lřaccompagnent de lřexpatrié. En 1993 déjà, ils

commencèrent à mettre en place une unité qui prenait soin de lřaspect psycho-social (PSCU).

Ils offraient un soutien, une formation du personnel avant, pendant et après la mission ainsi

quřun soutien par les pairs alors quřaucune des autres sections opérationnelles, France,

Espagne, Belgique ou Suisse nřavaient engagé un soutien aussi important. Si lřon prend

lřexemple dřun employé anglais engagé au Royaume-Unis par MSF UK, il aura donc un

contrat du Royaume-Uni, ensuite recruté par MSF Suisse en mission dans un pays

quelconque ; il disposera dřun débriefing complet en Suisse mais aussi dřun soutien par des

volontaires de retour en Grande Bretagne. Ce soutien par les pairs a été défini par un senior

manager RH :

En termes de santé psychologique, la disponibilité de disposer dřune personne externe et dřappel

téléphonique confidentiel suivi par un volontaire, est l'une des pratiques les plus utiles. Initier une

conversation avec le personnel, leur donne au retour lřoccasion de parler de l'expérience de rentrée

et leur offre une voie pour un soutien psychologique professionnel à travers un psychologue, si

besoin, alors qu'ils ne le feraient pas autrement67

(People in Aid, 2009, p. 1).

La différence de traitement est donc très variable. Le contrat dřorigine de lřexpatrié, allant

dřun soutien personnalisé et humanisé à une étiquette avec un numéro dans un dossier

administratif. Peut-on parler dřhumanité et dřimpartialité ? En réservant un meilleur

traitement quand on signe dans une section ou dans une autre ne discrimineraient-ils pas une

partie des employés ? Le lieu dřorigine de la section contractuelle ne devrait pas déterminer le

soutien reçu. Pour avoir un accompagnement parfait, faudrait-il aller quémander un contrat

Anglais et partir avec les Hollandais ? Les initiateurs, les maîtres de la standardisation

humanitaire nřarrivent-ils pas à avoir une cohésion dans lřaccompagnement et le soutien de

leur personnel humanitaire ? Alors quřune indépendance dans lřaction entre les sections, des

divergences sur des principes ou sur des positionnements peuvent être compréhensibles dans

certains cas ; comment peut-on expliquer de tels écarts entre les différentes sections

contractuelles dans le soutien à leurs collaborateurs qui doivent se confronter dřune manière

67

Traduction personnelle

- 42 -

ou dřune autre au stress sur le terrain et à leurs ravages collatéraux au retour ? Les employés,

légitimes bénéficiaires des programmes de soutien, ne sont pas traités avec impartialité ; et

dans certains cas, on peut se demander sřil nřy a pas un manque dřhumanité pour ces

personnes souffrant de blessures invisibles qui ont un besoin évident dřaccompagnement. On

peut voir que faire partie du mouvement MSF ne donne pas lřaccès aux mêmes droits.

Lřuniformité de MSF est une façade idéaliste.

3.4 La prise en compte de la santé mentale chez MSF Suisse

En 2009, une responsable des ressources humaines de MSF a écrit un rapport sur lřétat de la

prise en compte de la santé physique et mentale à lřintérieur de la section Suisse. Le résultat

est affligeant pour lřorganisation et démontre un grand décalage. Grâce à ce rapport, un poste

de responsable de la santé des expatriés a été créé. LřONG dispose donc actuellement dřune

seule personne en charge de la santé physique et mentale des expatriés. La psychologue

indépendante, employé par MSF confirme quřil y a un net progrès depuis lřarrivée du

responsable de la santé des expatriés : « j’ai vu une amélioration avec la venue d’une

personne centrale à MSF suisse68

; je ne sais pas comment ils ont fait pour la prendre si

tard »69

. Alors que beaucoup dřONG ont une personne responsable de la santé mentale en son

sein, MSF-OCG préfère se limiter à un médecin en charge des deux gros domaines, la santé

physique et la santé mentale. Pourquoi MSF OCG semble-t-elle ignorer la question dřun

responsable de la santé mentale du personnel dans leur siège ?

A MSF-OCG Mike Woodman, qui a pris le poste du responsable de la santé des expatriés, dit

quřil souhaiterait un poste interne pour un psychologue dans lřavenir, il raconte que : « c’est

quelque chose qui prend un peu de temps pour convaincre les gens, pour montrer la nécessité

et les bénéfices d’avoir quelqu’un à l’intérieur. »70

Pourquoi cette ONG ne voit-elle pas

lřintérêt de travailler plus profondément sur la minimisation des impacts psychologiques sur

les humanitaires ? Les Suisses ont un psychologue en freelance que les expatriés peuvent

consulter si besoin. Les Hollandais, ont deux psychologues en interne puisquřils pratiquent

des débriefings psychologiques71

obligatoires. En outre les avantages dřavoir un responsable

de la santé mentale sont nombreux.

Mais principalement il peut aider dans la dynamique des équipes et dans la cohésion, il peut

former le personnel et le sensibiliser aux problèmes relatifs à la santé des expatriés, défendre un

68

La venue dřun responsable de la santé des expatriés (Mike Woodman) a facilité la communication entre la

psychologue et lřONG. 69

Interview de Sylvie Rombaldie Juan-Torres psychologue indépendante de MSF-OCG le 02 février 2012 70

Interview de Mike Woodman le 19 décembre 2011 71

En fin de mission, chaque expatrié passe devant un psychologue pour un débriefing psychologique obligatoire.

- 43 -

budget, être utiliser pour les crises, etc. Les désavantages sont les problèmes de confiance,

dřindépendance, de confidentialité et dřobjectivité que pourraient percevoir les staffs. Les

environnements dřorigines des employés diffèrent et un psychologue du lieu de résidence pourrait-

être plus approprié dans la connaissance de la culture de lřexpatrié72

. (People in Aid, 2009, pp. 18-

19)

Avoir un responsable au siège serait-il pertinent ? Observant la montée inquiétante du nombre

dřincidents de sécurité sur le terrain humanitaire et lřaugmentation de la charge de travail du

responsable de la santé du personnel, il aura bien du mal à travailler sur les deux fronts. Alors

comment expliquons-nous cette mentalité antipsychologique que les francophones

privilégient ? Une peur de lřétiquette ? Dřune assimilation de la psychologie à la folie ? Ou

sommes-nous dans un conflit générationnel entre les anciens qui ne veulent pas entendre

parler de ces docteurs du cerveau pour leur propre assistance et de cette génération

dřhumanitaires plus ouverte à la santé mentale et consciente du problème ? Alors que le

responsable de la santé des expatriés de MSF dit quřil désire arriver à obtenir les ressources

nécessaires pour prendre en charge la santé mentale : « mais qu’il faut d’abord changer la

mentalité d’ici et ce n’est pas facile. Donc on ne peut pas songer à partir de rien, à

directement deux psychologues ; il va aussi falloir penser aux contraintes budgétaires ». Il

ajoute que cřest toujours une question de ressources disponibles et que : « Le problème c’est

que tout le monde n’est pas du même avis, car il y a aussi la génération avant-gardiste ».73

Ce

responsable travaillait chez MSF France et il reconnaît quřà cette époque lřorganisme nřétait

pas sensibilisé à lřaide psychologique. Il conclut en mentionnant quř : «aujourd’hui l’enjeu de

MSF-OCG, est de changer et d’être plus professionnel sur ce côté, comme le CICR ».74

Toutefois certains efforts ont été réalisés ces dernières années pour augmenter la résilience

individuelle de lřexpatrié. Sur 435 personnes interrogées chez MSF Suisse, 63.9% disent avoir

reçus un briefing sur Security policy, guidelines et 51.3% sur Stress management/ coping

strategies (Guss, 2012). Lřefficacité de ces formations a été traduite dans ce tableau qui

montre une majorité de satisfaction.

Qualité de la préparation avant départ (n=274) (Guss, 2012)

Perception Own health Security Stress/coping

Very effectively 50 (18.2%) 38 (13.9%) 22 (8%)

Effectively 145 (52.9%) 154 (56.2%) 137 (50%)

Not effectively 30 (10.9%) 38 (13.9%) 51 (18.6%)

Not at all effectively 5 (1.8%) 5 (1.8%) 9 (3.3%)

72

Traduction personnelle 73

Interview de Mike Woodman le 19 décembre 2011 74

Idem

- 44 -

Dřautres problèmes peuvent se poser, comme le fait que le débriefing psychologique est

facultatif ; cela rend la tâche de MSF compliquée dans l'identification des expatriés et dans

leur besoin de soutien et/ou de traitement. Il arrive que certains expatriés aient choisi

délibérément de ne pas être examinés pour augmenter leurs possibilités d'aller dans une autre

mission. En raison de difficiles relations de travail dans certains cas, ou par crainte d'être

refusé à une autre mission, les expatriés cachent parfois des informations ou refusent le

débriefing au siège et donc ne partagent pas toujours leur niveau de stress ou leur problème de

santé. Sans compter dřautres facteurs comme une violation de la confidentialité due au fait

que le problème des expatriés est analysé au sein du bureau et que les reçus mentionnant leurs

noms transitent à travers lřadministration afin d'être envoyés à l'assurance-maladie de la

Section contractante. (Gayral, 2009, pp. 10,16,17) La stigmatisation de la psychologie et la

confidentialité sont les principales difficultés. La confiance entre lřorganisme et lřemployé

nřest pas assurée. Les chiffres démontrent quřil reste encore du travail pour augmenter le taux

de confiance dans les mécanismes de soutiens. Sur 260 personnes interrogées 167 sont

satisfaites et 93 sont insatisfaites du soutien psychologique (Guss, 2012). En ne proposant

quřun seul type de service, lřexpatrié ne dispose pas de choix et préfère éviter dřexprimer ses

besoins par crainte dřêtre mis sur le banc de touche. Perdre son emploi, où sa réputation parce

quřon a trop parlé de sujets embarrassants habite lřopinion collective du monde occidental.

Mais en ne proposant quřun seul type de service, lřorganisation ne facilite pas la démarche de

lřexpatrié. Il est laborieux de confier ses problèmes personnels à son employeur lorsque lřon

ne se sent ni entendu, ni en confiance et que lřon risque de perdre son emploi. On peut donc se

demander pourquoi une ONG comme MSF ne prend-elle pas exemple sur ses concurrents ?

Le CICR a-třil un programme que lřon peut transposer sur une ONG telle que MSF ?

3.5 Le CICR

Pour visualiser la différence entre les deux fonctionnements, une introduction du CICR ainsi

quřune explication de son programme est nécessaire.

Le Comité International de la Croix Rouge, créé en 1863, précise sur son site quřil :

Œuvre dans le monde entier pour fournir une assistance humanitaire aux personnes frappées par un

conflit ou une situation de violence armée et faire connaître les règles qui protègent les victimes de

la guerre. Institution neutre et indépendante, son mandat découle essentiellement des Conventions

de Genève de 1949. Basée à Genève, en Suisse, elle emploie quelque 12 000 personnes dans 80

pays ; elle est financée principalement par des dons provenant de gouvernements et de Sociétés

nationales de la Croix-Rouge et du Croissant-Rouge. Organisation impartiale, neutre et

indépendante, le Comité international de la Croix-Rouge (CICR) a la mission exclusivement

- 45 -

humanitaire de protéger la vie et la dignité des victimes de conflits armés et d'autres situations de

violence, et de leur porter assistance (CICR, 2008).

Le programme de soutien du CICR :

Le CICR a une approche totalement différente de MSF sur le soutien psychologique, mais a

aussi deux unités en charge du personnel. Lřunité RH santé du personnel, donne un appui et

donne des recommandations lorsque lřexpatrié part en mission. Cette unité fait également un

travail de sensibilisation au stress au sein du siège ; lřéquivalent se fait sur le terrain par

rapport à tous les collaborateurs75

.

Lřautre unité, lřunité Stress et Sécurité, est rattachée aux opérations et a un rôle

complémentaire. Elle examine les conditions de travail de lřéquipe, surtout au niveau de la

sécurité ainsi que le climat de travail, le climat dans la délégation et répond aux situations de

crises, dřincidents de sécurité ou de tensions entre personnes. Elle vient de fusionner avec

dřautres unités dont celle du déploiement rapide, pour devenir une nouvelle entité dénommée

Security and Crisis Management Support.

Avant la mission : la prise en compte du stress se déploie, tout comme MSF, dès la phase de

recrutement où les candidats sont questionnés par des collaborateurs expérimentés. Une

attention particulière est portée aux dimensions de résistance au stress et motivation et un

module e-Learning sur la connaissance du CICR est envoyé individuellement. Par la suite une

formation avant le départ de deux semaines (uniforme pour tous les expatriés), est organisée

avec des jeux de rôles représentants une réalité de lřenvironnement humanitaire. Un module

Vie, santé et stress en délégation est aussi organisé, où la cellule RH intervient 2h sur la

santé physique et 2h sur la santé mentale. Des outils développés par le CICR sont donnés

concernant le stress, en insistant sur la responsabilité individuelle. Il est également intéressant

de savoir quřun lien internet leur donne accès à un nombre important dřinformations qui

concerne le stress et la sécurité ; un numéro de téléphone ouvert 24/24h est distribué avant la

mission en cas de besoin pendant ou après la mission. Un briefing stress et santé spécifique

à la région de la mission est offert au siège avant le départ ainsi quřà lřarrivée sur le terrain.

En cours de mission : Les six premiers mois se font généralement accompagnés de personnes

expérimentées, et un module de renforcement sur des cas vécus par le nouveau membre est

organisé après cette période. Le soutien durant la mission est surtout assuré par lřécoute active

des collaborateurs ; et si un incident apparaît, un defusing76

individuel ou collectif sera

75

Les informations ont été collectées par interview aux deux responsables des cellules du stress ainsi que sur

lřévaluation de 2002 du CICR (Dr.Bierens De Haan) 76

Voir Glossaire

- 46 -

proposé. Le chef de délégation lřorganise ou une personne ayant de lřexpérience dans la

mission peut sřen charger. Si lřincident est grave, un membre de la délégation de la cellule

stress de Genève se déplacera.

Au retour : Un débriefing systématique au retour, à Genève, par un membre de la cellule

stress est obligatoire (mais sřil ne se présente pas, la cellule va respecter son choix, car lřauto-

responsabilité de lřemployé est importante). Des contacts sont assurés par la cellule pour le

personnel qui a vécu un évènement traumatique.

3.6. MSF vs CICR : deux programmes, un combat

Le CICR a un programme de gestion du stress élaboré, venant dřune réflexion de plus de

quinze ans. Les expériences de la mort dřun collègue à Sarajevo (92), du post Rwanda(94) et

des 6 expatriés tués en Tchétchénie (96) ont grandement encouragé le siège à renforcer leur

politique de soutien aux expatriés. Il aura donc fallu attendre des évènements désastreux, pour

encourager les institutions et les expatriés à prendre note du problème qui était clairement

visible : « La croyance qui dit : si tu n’es pas capable de gérer ton stress, tu n’es pas à la

bonne place, a évolué chez certains employeurs. Mais elle reste ancrée chez un nombre

important d’expatriés ; Cela fait un peu partie de la culture des humanitaires (…) à la

conférence de Paris des ONG, il a été mentionné que les ONG créent un nombre

impressionnant de cas sociaux »77

. Le CICR, qui a fait énormément de recherches sur le

stress, insiste beaucoup sur la responsabilité individuelle, lřécoute active et le soutien de

managers formés et efficaces. Leur programme de soutien et leurs expériences ont été

reconnus dans le milieu professionnel humanitaire. MSF Suisse, qui a aussi pris cette

thématique en compte, a mis en place une politique de gestion du stress, le SPAM coordonnée

depuis Genève. Malgré tout cela lřONG semble en retrait, par rapport au CICR. Dřun autre

côté, la structure organisationnelle des deux protagonistes nřest pas semblable ; le nombre de

personnes à prendre en charge78

, le mandat, les financements, la liberté de paroles ne sont pas

comparables. Au CICR il y a eu aussi un certain écrémage, un filtrage sur les employés

sélectionnés, qui ont déjà une expérience conséquente et sřengagent sur des contrats de plus

longue durée que MSF. Il y a donc une logique de fonctionnement différente qui existe entre

les deux institutions ; néanmoins des comparaisons de fonctionnement sont intéressantes à

examiner, dans les évaluations, la réinsertion, le suivi de lřexpatrié, son assurance ainsi que

dans la dénonciation.

77

Boeckli René, responsable de la cellule stress et sécurité, interviewé le 1 mars 2012 78

20'000 staffs pour le mouvement entier de MSF et 12'000 pour le CICR (chiffre incluant staff nationaux).

(MSF,CICR,2012)

- 47 -

3.6.1 Evaluations, suivis / réinsertions

Les évaluations sont primordiales pour avoir une connaissance de lřefficacité dřun

programme :

Les activités de suivis et d'évaluations facilitent l'apprentissage. Un processus d'évaluation montre

les forces et les faiblesses du programme et permet aux organisations de faire des choix éclairés et

de prendre des décisions sur l'endroit où investir. Sans suivis et sans évaluations du personnel du

programme de soutien du personnel, les organisations ne peuvent pas prouver que leurs

interventions sont peu coûteuses et bénéfiques. (People in Aid, 2009, p. 47)

Mais malgré cette affirmation, il semblerait que les évaluations sont faites partiellement. Le

rapport dřune responsable des ressources humaines de MSF en 2009 décrit avec précision le

soutien donné aux expatriés avec des propositions concrètes dřamélioration. Lřélément

déclencheur a été le supplément de travail dans certains départements, comme la responsable

médicale du siège qui devait prendre en compte, en plus de sa charge de travail journalière,

certains aspects de la santé des expatriés. Chronologiquement, depuis sa création en 1981, il y

a eu certaines mesures prises pour la gestion du stress, mais la responsable RH qui a écrit le

rapport dit : « c’est tout nouveau, personnellement, quand j’ai fait l’analyse pour voir ce que

l’on offrait au niveau de la santé en 2009, il n’y avait rien, à part les procédures

d’évacuation. »79

Maintenant que le programme est développé, il reste à faire des suivis et des

évaluations de ce soutien. Une étudiante80

, intéressée au stress chez MSF, a distribué un

questionnaire qui a eu un réel succès vu le nombre de répondants (plus de 400). Cela prouve

aussi lřintérêt particulier que porte les expatriés pour ce sujet, en soulignant que ce fut une

initiative personnelle de la part de lřétudiante. MSF nřa pas commandé dřexpertise, dřaudit,

de contrôle interne et/ou dřévaluation sur son programme. Aucun outil nřest mis en place pour

permettre le feedback de satisfaction de lřexpatrié sur lřONG et sur la mission quřil vient

dřeffectuer. On pourrait tout à fait imaginer des questionnaires anonymes après la mission,

comme cela a été fait lors de lřenquête de lřétudiante avec la collaboration du directeur des

RH. Une analyse du système ne devrait pas être limitée à des initiatives personnelles mais à

une procédure organisationnelle et une standardisation ; aussi pour améliorer

lřaccountability de lřONG quřelle doit envers ses collaborateurs. Les mêmes critiques

pourraient-être faites au CICR, qui eux, ont réellement fait deux évaluations conséquentes, en

1997 et la dernière en 2002. Dix ans ont passé et aucune évaluation du programme nřa été

79

Interview Christine Gayral, du 5 décembre 2011 80

Isabelle Guss, qui a fourni ses résultats quantitatifs sur MSF pour ce mémoire

- 48 -

effectuée. De plus, un changement dans la structure du soutien vient dřêtre amené.81

Il faudra

donc encore attendre pour constater lřefficacité de ces nouvelles mesures. Lřapprentissage de

la gestion du stress sur le terrain est un domaine qui existe pour aider le travailleur

humanitaire ; mais est-ce quřon lui donne réellement les moyens dřexprimer son ressenti, sans

avoir de répercussions sur sa carrière professionnelle ? Un questionnaire sur la situation de

santé personnelle de lřexpatrié, et pas seulement sur le soutien ressenti par lřorganisation

pourrait-être mis en place. Le Dr. Bouvier du CICR dit : « on est dans une situation un peu

floue, on a des données mais qui ne sont pas récoltées de manière systématique. Si on

disposait de questionnaires, comme une enquête, cela pourrait constituer une base de

données fiables, alors que maintenant, on le fait plus au flair. Ce qui veut dire plus de

variabilité dans les analyses. On pourrait prendre le temps à chaque fois d’aller à travers un

questionnaire, il y aurait une vision plus claire. Cela démontrerait peut-être une tendance à

la hausse ; aujourd’hui les gens sont plus préparés à en parler qu’il y a dix ans. Le côté tabou

est un peu minimisé et si on en parle, il y a un réel bénéfice qui nous laisse le temps d’agir

précocement dans une action préventive, avant d’éventuels dégâts et pas seulement pour le

PTSD, mais pour la dépression, le stress chronique, le comportement de défense voire violent,

la psychose, etc. »82

Alors que les expatriés rentrent de

plusieurs mois voire dřannées de

mission, ne pourrait-on pas mettre

en place un système de suivi plus

efficace qui rendrait compte des

lacunes, des progrès à faire et

dřavoir un système de détection et

de suivi du rapatrié pendant la

difficile réintégration dans la

société occidentale. Ce système

sřintègrerait à la sensibilisation qui

est pratiquée par lřinstitution. Lors du débriefing le travailleur revenant de mission est averti

du décalage, particulièrement des situations vécues quřil ne pourra pas partager, dřune

émotivité exacerbée et de souffrances souvent incomprises par la majorité des personnes qui

lřentourent. Si physiquement il est inchangé ; mentalement cřest différent et ce tableau montre

81

La cellule Stress et Security a fusionné avec un département. 82

Dr. Paul Bouvier, Responsable du HELP au CICR, interviewé le 15 février 2012

Problèmes de réajustement lors du retour des expatriés (n=274) de MSF-OCG (Guss, 2012)

- 49 -

les problèmes dřajustements auxquels sont confrontés les travailleurs humanitaires lors de leur

retour sur 274 expatriés. Des solutions peuvent être mises en place pour partager ces moments

de souffrance tel le soutien des pairs pour les retours, qui se font dans certaines institutions et

peuvent prodiguer quelques précieux conseils. Mais, souvent, les humanitaires restent en

contact avec dřanciens collègues pour ressasser les moments épiques, créer un groupe

dřanciens combattants, se marginalisant dřune société dont ils ne comprennent plus le

fonctionnement. Le danger pour ces âmes abandonnées, est la perte de repères sociaux, le

manque de liens entre ces mondes hétérogènes, qui les éloignent dřune quelconque réinsertion

sociale ou professionnelle et les font tomber dans le cercle vicieux de lřenchaînement des

missions. La responsable RH du CICR confirme que : « l’idéal, serait de faire un mélange,

faire une pause, retravailler dans son propre métier, pour mieux repartir. Donc s’ils peuvent

revenir dans la société normale et qu’ils enchaînent sur dix/quinze ans ça devient un choix et

pas une obligation. Par contre quand ils décident de partir parce que c’est trop difficile de

revenir entre deux, dans ce cas, il y aura de plus grands risques. Pour résumer, ceux qui

possèdent une base solide, sont ceux qui ont un métier transposable dans les deux univers, ce

sont ceux qui peuvent retomber sur leurs jambes. »83

3.6.2 Suivi/assurance

Il est intéressant de voir comment sont suivis ces expatriés après leur mission. Dans ce

contexte, lřexemple de Nago Humbert est représentatif :

En décembre 1999, Nago Humber travaille pour le Croissant Rouge ; il sřest trouvé par hasard au

milieu dřune manifestation de femmes Israéliennes et Palestiniennes à Jérusalem. Alors quřil

sřapprêtait à venir en aide à une manifestante blessée, il fut arrêté puis tabassé. Un délégué a pu le

conduire dans un théâtre pour lřéloigner de la manifestation. Il fut ensuite évacué. Deux ans après

à Montréal, il fût pris dřune crise de panique violente, dans un fast food, avant dřaller voir une

pièce de théâtre. Ceux qui sont physiquement malmenés sřen sortent moins bien ; ils veulent

réparer le corps, mais oublient lřesprit » (Humem, 2011).

Après ce récit, une question peut se poser, celle du fonctionnement de lřassurance-maladie

dans le cas de soins pour des traumatismes anciens ? Qui dans ces cas va payer ? « MSF

suisse étend l’assurance à trois mois ou paie un suivi psychologique pour 5 séances et s’il y a

un besoin de prolonger, une décision est prise au cas par cas. S’il y a une problématique

claire liée à l’exposition à la mission, une certaine flexibilité existe »84

; cependant il nřy a pas

83

Sigiriya Aebischer Perone, responsable de la Cellule RH Santé des expatriés au CICR, interviewée le 15 mars

2012 84

Interview de Mike Woodman le 19 décembre 2011

- 50 -

de politique officielle sur de longues périodes. Le cas de Nago, peut faire penser à « un PTSD

incomplet, quelqu’un qui n’a pas tous les symptômes mais un petit évènement peut lui faire

déclencher un PTSD ; il peut avoir un réel risque pour la personne touchée si aucun soutien

n’est prescrit »85

. Les RH du CICR souscrivent une assurance spéciale, en cas dřexposition

traumatique, qui couvre les expatriés sur une période de deux ans. Le CICR a donc pris en

compte cet aspect dřeffet à long terme. Mais les dossiers RH de chaque employé, contenant

des informations sur les différentes expositions subites sur le terrain, évacuations, troubles

médicaux, sont-ils remis à un autre employeur en cas de changement dřONG ? Lřalternance

des missions est facile à gérer quand lřemployé est basé dans la même ONG, mais la réalité

du marché du travail constitue un obstacle dans lřaccompagnement RH. La confidentialité des

dossiers sera remise en cause. Comment assurer un bon suivi si lřorganisation ne coopère pas

dans lřévolution de carrière de lřemployé avec les autres employeurs humanitaires ? En

interne on peut déjà voir des problèmes se dessiner, comme le soulignait le responsable de la

santé chez MSF. Un suivi, une confidentialité lors dřun passage à une autre institution semble

difficile. Les informations seront éparpillées entre employeurs. La responsabilité de soin

dépendra de la bonne volonté et de la maturité de lřemployé voguant entre les différentes

institutions. « Il y a aussi pas mal de gens qui rentrent chez eux où il n’y a pas de bureau

MSF, ce qui complique le suivi à long terme »86

Si les RH du CICR ont conscience que

lřexpatrié à vécu un évènement traumatique, ils le recontactent régulièrement quřil ait ou non

un contrat avec eux. Cette procédure systématique nřest pas en place chez MSF, ce qui peut

être un peu dommageable, car les RH sont formés à détecter une détresse et peuvent déceler

dans certaines confidences, un appel au secours. Un simple appel téléphonique peut donner

une considération à lřexpatrié et une meilleure perception de lřinstitution défendant un certain

principe dřhumanité. Un suivi personnalisé et humanisé donne lřopportunité à lřexpatrié qui

hésite à faire le premier pas pour demander de lřaide ou pour parler dřune blessure non

apparente87.

3.6.3 Dénonciation

Le CICR est une organisation, suisse, un peu militarisée. Elle ne se cache pas dřune

organisation structurelle hiérarchique, avec un pouvoir décisionnel du haut vers le bas. Il est

important de stipuler cela, car le stress sur le terrain peut également venir aussi dřun supérieur

85

Sigiriya Aebischer Perone, responsable de la Cellule RH Santé des expatriés au CICR, interviewée le 15 mars

2012 86

Interview de Mike Woodman le 19 décembre 2011 87

Terme extrait du titre du livre de Jean-Paul Mari

- 51 -

ayant un comportement inapproprié, immoral, ou souffrant dřaddictions diverses. Comment

annoncer, aider, voire dénoncer de tels cas, pouvant mettre réellement en danger la mission et

le personnel expatrié et national ? Lřexpatrié a un pouvoir fort sur les nationaux, il est craint ;

le revenu de lřemployé donc de toute sa famille dépend de son bon jugement. De plus, il y a

une tendance à laisser passer la tempête sachant que de toute façon un autre expatrié va venir

le remplacer tôt ou tard. Que se soit un expatrié ou un national, dénoncer un supérieur nřest

jamais aisé. Lřombudsman, le médiateur, est une personne instituée par le CICR et

indépendante de lřinstitution. Tous les employés, nationaux et internationaux disposent de son

numéro et e-mail et peuvent demander conseil sur une situation problématique à laquelle ils

font face. Le médiateur peut faire suivre la demande dans un autre service, mais nřa en aucun

cas un pouvoir décisionnel. Le pouvoir ultime reste dans les mains du siège. Il nřy a pas

dřindépendance formelle dans la structure ; les affinités de certains dirigeants du siège

pourraient par leur manque dřobjectivité, leur non-neutralité, compromettre lřéquilibre de la

raison. Il y a deux obstacles potentiels à la dénonciation : le premier, est la crainte dřêtre mis

sur liste noire ou dřun renvoi. Le second, est que le(s) dénonciateur(s) mettent la faute de

leur(s) échec(s) sur leurs supérieurs. Mais comment ce médiateur peut-il juger équitablement

les deux parties sans compromettre lřune ou lřautre ? Comment peut-il investiguer, avoir une

vision claire de ce qui se passe et être objectif depuis Genève ?

Le système de MSF-OCG pour pallier à ce genre de problèmes est intéressant ; ils ont mis au

point un système nommé le CRACK, le comité de réaction au problème dřabus du

comportement. Il nřest pas composé dřemployés en relation directe avec les opérations. Tous

les expatriés qui partent sur le terrain sont renseignés sur cet organe neutre et indépendant et

comment le joindre. Nřimporte quel expatrié peut contacter le CRACK sřil ne désire pas

passer par son chef, parce que cřest lui qui est impliqué ou par manque de confiance dans ses

supérieurs. Le CRACK ne prend pas les rapports anonymes. Il ne divulguera pas

lřinformation, en garantissant si possible, lřanonymat de la personne. Il a 72h pour réagir ; Les

membres du comité cherchent des informations par téléphone ; si la situation est difficile, ils

se déplacent, enquêtent, voient les personnes en lien avec lřaffaire, écrivent un rapport et

prennent une décision non négociable. Le CRACK peut donc annoncer au RH quřune

personne rentre, sans que cette dernière ne sache pourquoi elle est rapatriée ; ce qui pose des

problèmes dans le suivi RH de la personne. « Est-elle accusée ou victime ? Suite au suivi

médical assuré par le responsable de la santé des expatriés, les RH peuvent lui proposer une

nouvelle mission, avec des conditions spécifiques ; la décision dépendra de l’aval de l’organe

- 52 -

de MSF »88

. Une évaluation de lřefficacité de chaque méthode apporterait une valeur ajoutée

aux deux programmes de soutien du CICR et de MSF. La politique de confidentialité joue

également un rôle important dans le processus de dénonciation et de liberté dřexpression. Le

contexte spécifique de lřhumanitaire ne permet pas dřerreur grossière de management.

Lřimage de lřONG pourrait être dégradée et avoir un impact négatif pendant de nombreuses

années. Un processus de contrôle, de libre échange, dřécoute active doit être mis en place

avec rigueur si lřon veut éviter des conséquences néfastes.

On peut donc distinguer que malgré les failles de chaque programme de soutien aux employés

du CICR et de MSF, une réelle prise en compte de la sécurité de la santé physique et

psychique de leurs employés a été faite.

Satisfaction des expatriés de MSF sur la prise en compte du Staff Care (Guss, 2012)

Health support Security Psychological support

Satisfied 243 (90%) 230 (84.2%) 167 (64.2%) Not satisfied 27 (10%) 43 (15.8%) 93 (35.8%)

Comme le montre ce tableau ci-dessus, les expatriés de MSF restent majoritairement satisfaits

du soutien proposé. Toutefois, 36% semblent insatisfaits du soutien psychologique proposé. Il

reste donc, un travail important pour atteindre lřobjectif des 100%. Quand au travail effectué

par le CICR, il commence à être reconnu dans le monde scientifique médical, médecine

tropicale89

. De grand progrès ont été donc fait, depuis la naissance de lřhumanitaire moderne.

Conclusions

Lřhumanitaire moderne, vu par certains critiques, aurait pour origine le champ de bataille de

Solferino, une bataille entre deux nations, qui laissa un nombre incalculable de blessés à

lřabandon. Henri Dunant, venu initialement pour affaire, fut atterré par cet effroyable

spectacle. Dans un geste dřhumanité, il organisa des secours primaires. Traumatisé par cette

expérience, des visions terribles de morts, de souffrance, des blessés et des conséquences de la

guerre, il écrivit un livre90

trois ans plus tard, pour exorciser ses propres démons. Peut-être

cela a-t-il eu un effet thérapeutique. Un PTSD aurait-il pu être diagnostiqué dans le cas

Dunant ? Il est intéressant de noter, que lřaction humanitaire moderne est née en partie par

la vision dřun homme marqué par le traumatisme. De Solferino à nos jours, lřaide humanitaire

a évolué, sřest professionnalisé. On a dépassé aussi le temps du soutien sporadique pendant un

88

Interview Christine Gayral, du 5 décembre 2011 89

Sigiriya Aebischer Perone, interviewée le 15 mars 2012 90

Titre du livre « Un souvenir de Solferino »

- 53 -

conflit ouvert en Afghanistan, où les travailleurs de MSF sřintégraient aux locaux,

voyageaient par mules, traversaient des cols à pied et restaient incorporés aux villages sur de

longues périodes ; cette époque est révolue.91

Lřenvironnement sur le terrain sřest

complexifié. Ce qui est resté et qui a toujours été présent, nocif ou porteur, cřest le stress. De

nos jours, le stress et le traumatisme sont des réactions connues. Malgré les évolutions

prodigieuses depuis dix ans et lřévolution de la pathologie de la santé mentale à la

psychologie du travail, lřanalyse des deux organisations de MSF et du CICR permet de

formuler quelques suggestions qui pourraient-être bénéfique pour lřensemble des acteurs

concernés.

Les expatriés, en première ligne sur le front, font partie des ayants droit qui méritent un

soutien afin de diminuer les risques liés au stress. Le travail dřinstitution comme le CICR, a

fait évoluer la pensée humanitaire. Selon le Dr. Bouvier, « ce sujet est au cœur de l’action

humanitaire. Pour avoir une pertinence du travail humanitaire il faut admettre que les

travailleurs ne sont pas des robots. (…) Au CICR, le stress est mal géré. C’est le début de la

réponse. Le défi, c’est le management. Il y a encore beaucoup de travail (...) Le défi actuel,

c’est de travailler sur les facteurs de la résilience(…) Cela nous fait revenir au cœur du

travail humanitaire (…). »92

Pourtant peu dřorganismes indépendants travaillent sur lřétat de

stress des acteurs humanitaires ; seuls quatre instituts travaillent sérieusement sur ce

phénomène : People in Aid, Headington Institute, Antares Foundation et le Centre de

Psychologie Humanitaire (CHP). Claire Colliard, psychologue précurseur et défenseur du

staff care, a créé cette fondation indépendante. Elle a réalisé que les ONG nřétaient pas

neutres et nřoffraient pas une aide indépendante ; ce point a été souligné par les expatriés, qui

demandaient une possibilité dřaccéder à un soutien psychologique gratuit et un suivi dans la

durée (Resonnances humanitaires, 2002). La fondation a fonctionné depuis plus de douze ans

et a donné, notamment, un soutien/conseil gratuit par mail, aux expatriés. « Maintenant on

manque d’argent parce que l’on ne trouve pas de fond pour le moral des expatriés. On voyait

que les ONG ne pouvaient pas répondre aux besoins. C’est hallucinant, comme disait un

banquier les humanitaires on ne leur a pas demandé de partir sur le terrain, donc ils n’ont

qu’à se débrouiller ».93

91

Référence aux travailleurs MSF dans le conflit en Afghanistan. La BD « Le photographe » de MSF illustre

bien lřintensité et le fonctionnement des « french doctors » dans les années 1986, histoire basée sur le

témoignage de Didier Lefèvre 92

Dr. Paul Bouvier, interviewé le 15 février 2012 93

Interview de mars 2012 de Claire Colliard,

- 54 -

Les ONG et les bailleurs de fonds : Récemment, MSF Canada a déclaré que 50% des

travailleurs humanitaires ne font pas plus d'une mission (Lisa Schwartz, 2010, p. 10). Une

étude sur la pratique Humanitaire de sept ONG94, a démontré que pour de nombreux travailleurs,

le stress a pesé dans leur décision de quitter lřorganisation : « Un leadership insuffisant, un

manque de perspectives de carrière, le surmenage, la déception, la frustration, la bureaucratie et

un mauvais fonctionnement » font partie des facteurs cités (Antares Foundation, 2008, p. 7). Le

taux élevé de turn-over a donc un impact économique important lorsque lřon regarde les

coûts directs et indirects comme lřon peut le voir dans le tableau ci-dessous dans lřétude des

anglo-saxons95

.

Estimated total cost of recruitment* and labour turnover** per employee (David Loquercio, 2006)

Occupational group Cost (CHF) of recrutement*

Cost (CHF) of labour turnover**

Senior manager/directors 22588 18070

Managers/professionals 11294 11294

Administrative/secretarial&technical 4517 7906

Services (customer, personal, protective and sales) 3941 6776

Manual/craft workers 2258 9035

All employees 8922 10447

*Advertising cost, agency or search fees **Vacancy cover, redundancy cost, recruitment selection, training and induction cost ; Taux de change 2.2587 (moyenne mensuelle janvier 2006) 1CHF=0.4427£

Même sřil est minime, il peut y avoir des avantages, des deux côtés. Dřune part, les expatriés

bénéficieraient dřun suivi plus approprié et dřautre part, lřONG récupèrerait lřinvestissement

sur les coûts économisés et sur lřaugmentation des normes qualitatives pour la prise en charge

de ses employés. Toutefois il semble persister une indifférence pour la création de cellule de

staff care, confidentielle et indépendante. La difficulté dans la collecte de fonds à laquelle fait

face le centre de psychologie humanitaire est édifiant. Si les expatriés pouvaient disposer des

deux systèmes, le système interne dřune institution et le système dřun organisme indépendant,

les départements RH nřauraient pas lřoccasion de cocher la case ne repart plus et ne

donneraient pas le sentiment de stigmatiser les employés traumatisés en cochant la case des

dérangés mentaux ou des inadaptés. Pourrait-on sřattendre à une réelle intention, une réelle

optimisation de la santé des expatriés de la part des donateurs et des ONG ? Le problème

revient toujours à la pierre angulaire de notre société, lřargent. Une collectivité dřONG

réceptifs à la santé des expatriés ne pourrait-elle pas former un consortium pour financer des

institutions indépendantes telles que le centre de psychologie humanitaire ? En France,

94

Loquencio, 2006 ŖUnderstanding and addressing staff turnover in humanitarian agenciesŗ. 95

Annexe table originale

- 55 -

Résonnances Humanitaires96

travaille en partenariat avec des ONG de la solidarité

internationale et possède une base à Paris pour les expatriés où elle travaille dans le domaine

de la réinsertion professionnelle. Le même principe pourrait-être appliqué en ajoutant un

accompagnement sur la santé physique et mentale. Les gros bailleurs institutionnels et

étatiques ne pourraient-ils pas aussi mettre des fonds pour de telles initiatives ou créer une

nouvelle attribution dans leur budget pour le staff care ? Une montée aux créneaux de la part

des institutions mais aussi des travailleurs humanitaires qui sont, pour une fois, les

bénéficiaires du projet est nécessaire. Le fait que lřorganisation effectue ces actions dans un

but non lucratif, ne lřexempte pas de la responsabilité de protéger son personnel. La

professionnalisation de lřaide humanitaire ne permet plus aux ONG de sřesquiver. Cela serait

tout à lřavantage des ONG de travailler sur cette zone grise. Le stress est directement lié à :

« une diminution de lřefficacité, à une augmentation dřaccidents et de maladies et à un

engagement amoindri envers lřemployeur qui est soumis à un taux de rotation élevé (turn-

over)» (Antares Foundation, 2008).

L’Etat : les acteurs humanitaires vivent donc dans un marché instable, où le travail ne dépend

que du malheur des autres. Le business de la charité a ses temps de crise. Les années noires

pour lřhumanitaire sont celles sans grandes catastrophes, sans détresse humaine massive, sans

famine, etc. Par manque de financement, les staffs expatriés sont mis sur des listes dřattente,

en espérant une éventuelle ouverture de poste ou une crise humanitaire qui donnera sens à leur

existence. La fluctuation, la spécificité du marché et le manque de financement des ONG, les

font entrer dans ces catégories dřentreprises dřintérim philanthropique. Elles nřont aucune

raison administrative, voir législative, de prendre soin de leurs ex-employés après leur période

contractuelle. Mais les dommages psychiques causés par un travail exigeant et intense,

devraient-être au frais de lřemployeur. Légiférer pour obliger les ONG à prévenir ces maux,

semble donc une solution adéquate, créer une loi sur le travail, non-spécifique aux ONG, et

responsabiliseraient tous les employeurs qui mettent leurs collaborateurs face à des situations

potentiellement traumatisantes. Ils seraient alors dans lřobligation de financer le traitement

jusquřà la guérison. Ce texte de loi pourrait suggérer que :

96

http://www.resonanceshumanitaires.org/ Résonances Humanitaires est une association dřintérêt général à but

non lucratif, créée en Juillet 2002. Sa vocation est dřaider les « humanitaires» à se repositionner sur le marché de

lřemploi, à leur retour en France. Lřaction de RH est soutenue et appuyée par : Des bailleurs de fonds publics ;

Fonds Social Européen ; Fonds National pour le Développement de la Vie Associative ; Des entreprises et des

cabinets de recrutement, sensibilisés aux profils et aux compétences des acteurs la Solidarité Internationale ;

AXA Investment Manager ; Transdev ; Bouygues Bâtiment Ile de France ; Pierre et Vacances

- 56 -

En cas d'exposition de l'employé à des situations potentiellement traumatisantes durant le

temps du contrat, l'employeur est tenu comme responsable et doit indemniser l'employé pour

tous traitements médicaux reçus. Il doit verser des dommages-intérêts pour toutes blessures

physiques ou mentales. Cette disposition reste applicable après la résiliation du contrat

d'emploi, s'il est démontré qu'il y a un lien de causalité entre l'exposition à une situation

traumatisante durant l'emploi et les blessures mentales de l'ancien employé.

Des lois existent pour la gestion de lřaspect psychosocial pendant la période de contrat, à

propos de lřengagement que doit prendre lřemployeur pour la diminution des risques.

Malheureusement les états ne soutiennent sa mise en application ce qui nřencourage pas les

employeurs et les assurances à prendre des initiatives sur lřaide octroyée post-contrat.

Les expatriés et les ONG : les états et les ONG ne sont pas les seuls à devoir se

responsabiliser. Avec lřévolution des communications et du savoir, les expatriés devraient

sřinformer sur la réalité complexe du travail sur le terrain, (idéalisation, intérêts, problèmes de

santé, etc…) : « la nature insidieuse de l'environnement typique de l'humanitarisme, où les

idéaux contradictoires, les intérêts concurrents, et les maux cachés assaillent la santé

psychologique des travailleurs humanitaires97

» (Walkup, 2002, p. 353). Hugo Slim suggère

que : « des attentes réalistes signifient moins de frustrations et évitent la continuité et les

sentiments dřéchecs déplacés, qui peuvent-être corrosifs dans une équipe humanitaire. Des

attentes réalistes sont meilleures pour le moral et le programme »98

(2005, p. 22). Lors du

recrutement ou lors des séances dřinformations, MSF-OCG donne de manière inconstante ces

données essentielles99

. Il est essentiel de définir les conditions de vie des expatriés, les

dilemmes, les problèmes éthiques, politiques que peuvent rencontrer les travailleurs sur le

terrain, les risques de détérioration de leur santé mentale pendant et au retour dřune longue

période et les risques concernant leur sécurité (kidnapping, agression, viol). Il est certes

difficile de visualiser, de ressentir tous ces aspects avant de partir en mission. Des cours

dřintégration comme le fait le CICR, en insérant le délégué dans une simulation du terrain,

peut permettre aux postulants dřavoir une vue plus concrète. Minimiser ou éviter ces sujets

avant le départ, ne peut quřexposer lřexpatrié à une frustration qui le conduira peut-être à un

arrêt de son engagement dans le monde humanitaire. Une page internet pourrait-être mise en

place pour expliquer les principaux enjeux de lřhumanitaire, ces défis géopolitiques, ces

97

Traduction personnelle 98

Idem 99

Séance dřinformation des 10.01.2012 informations sur la vie des expatriés, leurs conditions de vie, du stress et

des horaires de travail pénible et sur la sécurité difficile. Pas dřinformation sur la santé mentale, dilemmes

éthiques, viol, kidnapping (viol/kidnapping sont traité lors de la préparation avant départ)

- 57 -

nombreux questionnements éthiques, le fonctionnement de lřONG. MSF-OCG a mis une

auto-évaluation sur son site100

, qui consiste en quatre pages dřexplications générales sur la vie

des expatriés avec quelques considérations éthiques, de sécurité, de politique de lřONG, les

conditions de travail stressantes, mais ce dossier est loin dřêtre exhaustif. Cřest un début mais

une sensibilisation poussée plus en profondeur, à lire avant de postuler, pourrait encourager le

futur expatrié à réfléchir plus amplement avant de prendre une décision qui peut bouleverser

le cours de sa vie. La sensibilisation avant départ permettrait peut-être dřéviter, certaines

frustrations, car ainsi que le disait Albert Camus le bonheur sřestompe et lřabsurde

apparaît101

:

Beaucoup dřhumanitaires recherchent des expériences enrichissantes : aider les autres, les aident

eux-mêmes, ils peuvent construire la paix… ; nombreux sont amères et rapportent quřils ont trouvé

cupidité, connivence, personnes ingrates qui mentent, trichent, et volent pour survivre. Lřespoir de

recevoir des remerciements, de vivre un accomplissement de soi et une expérience de camaraderie,

fait place à une réalité acerbe qui mine leur estime et leur vision du monde. (Walkup, 2002, p. 356)

Une sensibilisation des employés doit donc être instaurée.

Le CICR : une reconnaissance du problème de la santé mentale des expatriés par une entité de

lřhumanitaire tel le CICR est essentielle. La prise en compte de la responsabilité de protéger

des employés doit être diffusée avec un large écho. Lřarticle 9 du célèbre code de conduite du

CICR et de la FICR mériterait une modification telle :

9. Nous nous considérons responsables, à l'égard des bénéficiaires potentiels de nos activités, de nos

employés ainsi que vis-à-vis de nos donateurs

Nous avons un devoir de redevabilité102

« entre ceux qui souhaitent offrir une assistance financière, » ceux qui

travaillent dans le but de soulager la souffrance avec des actions directes ou indirectes « et les victimes de

catastrophes qui ont besoin d'aide. Nous nous considérons par conséquent investis d'une responsabilité envers »

ces trois groupes. « Tous nos rapports avec les donateurs, » nos employés « et les bénéficiaires seront marqués

par une attitude de franchise et de transparence. Nous reconnaissons pleinement la nécessité de rendre compte de

nos activités, tant sur le plan financier que sur celui de l'efficacité. Nous reconnaissons l'obligation de contrôler

strictement les distributions de secours et d'en évaluer régulièrement les effets. Nous chercherons en outre à

rendre compte ouvertement de l'impact de nos activités et des facteurs qui limitent ou qui favorisent cet impact.

Nos programmes s'appuieront sur des critères très sévères de professionnalisme » dont un suivi adéquat des

100

En annexe, à noter que lřONG donne des liens dans sa rubrique FAQ sur des ouvrages sur lřhumanitaire pour

mieux se préparer au départ 101

Citation du livre « La Peste » un roman publié en 1947 102

En Glossaire ; Redevabilité vient de la traduction du concept anglais accountability, la traduction nřexistant

pas en français, le mot redevabilité est le concept francophone correspondant le plus proche. (Prise en compte,

responsabilité)

- 58 -

employés pendant et après leur contrat avec « un savoir-faire afin de réduire au minimum le gaspillage de

ressources précieuses » (CICR, 1996).

Une publication sur ce changement de la part du mentor de lřhumanitaire ainsi que des

conseils avisés pour toutes ces ONG qui prennent ce code de conduite comme carte de visite,

pourrait avoir un effet électrochoc dans le milieu de lřhumanitaire. Il y a des leaders qui

sont souvent au cœur de la zone dřattention, de médiatisation. Ce sont ces acteurs, comme

MSF et le CICR qui ont un pouvoir de sensibilisation, le pouvoir de changement et qui

pourrait apporter cette démocratisation de lřassistance aux employés sans se focaliser sur les

travailleurs de terrain, mais sur lřensemble des employés de lřONG103

.

Il reste malgré tout, ces ONG moyennes et petites qui ne disposent pas nécessairement de

procédure de sécurité, de soutien avant, pendant et après la mission et qui se permettent

dřenvoyer des volontaires, des bénévoles dans des situations comportant des risques

physiques et psychologiques. Il y a peu de recherches sur ce genre dřONG, ne disposant

souvent dřaucun fonds pour les volontaires. Ces expatriés partant pour des petites

associations, mériteraient que lřon sřintéresse aussi à leurs besoins et à leur droit de disposer

dřune assistance. Une partie dřentre eux seront peut-être la future relève des expatriés actuels,

une mauvaise expérience pourrait compromettre un éventuel engagement. La même critique

pourrait-être développée à lřégard des travailleurs nationaux. Peu dřétudes spécifiques sur leur

sujet104

ont été faites. Il y a néanmoins un travail de recherches et des réflexions au sein des

ONG pour proposer un soutien adapté culturellement. Ce travail de réflexion doit se faire

aussi en partenariat avec dřautres institutions. Le CICR pratique des débriefings

psychologiques, les militaires ont une grande expérience sur le screening militaire, lřEtat

français a obligé certaines entreprises à faire des plans psychosociaux pour leurs employés,

lřONU a une plateforme e-Learning avant départ, etc. On peut donc voir un ensemble de

pratiques dont chacun pourrait tirer des avantages. De nombreuses solutions existent pour

accompagner les expatriés. Avec la contribution des Etats, des ONG et des expatriés, une

mitigation des effets du stress sur les travailleurs humanitaires affectés à court et à long terme

pourrait-être réalisée. Si les organisations humanitaires désirent entreprendre des projets

efficients pour la population cible, il est indispensable quřelles aident leurs employés. Ils

subissent des maladies invisibles liées au stress qui génèrent des conséquences graves et un

état de souffrance permanent transformant la vie dřun expatrié en une torture ininterrompue.

103

Comme par exemple : le personnel du siège, les documentalistes, psychologues, rédacteurs de rapports… 104

Des guides payants pour un support à la santé des staffs nationaux existent au Headington Institue.

- 59 -

Ce sont les suites normales de situations anormales et comme le disait Publius105

: « La

douleur de l'âme pèse plus que la souffrance du corps ». Le soutien aux employés est

indissociable de lřaide humanitaire et doit-être inclus à tous les projets. Travailler dans

lřhumanitaire et sřoccuper dřautrui exige de prendre soin de soi et de bénéficier de la part de

son employeur de conditions adéquates faites de dignité, de confiance et de respect.

105

Venant de la citation latine : « Dolor animi multo gravior est quam corporis », de Publilius Syrus né en Syrie

vers 85 Av. J.-C., poète latin.

- 60 -

Travaux cités Abby Stoddard, A. H. (2009). Providing aid in insecure environments, 2009 Update: Trends

in violence against aid workers and the operational response. Londre: ODI.

Antares Foundation, . (2008). Gestion du stress dans l'action humanitaire: Stratégies de

réduction des risques.

Antares. (2006). Gestion du Stress chez les travailleurs humanitaires. Diemen.

Bauber, L. R. (2003). Soigner malgré tout: Trauma cultures et soins Tome1. Paris: La penséé

Sauvage France.

Bauer, N. (2009). The Dangerous Buisness of Aid ; A Report on the Risks to Aid Workers in

the Field. Washington.

Bierens De Haan, . (2005). Sauveteur de l'impossible: un engagement à haut risque. Berlin.

Cardozo BL, H. T. (2005). Mental health of expatriate and Kosovar Albanian humanitarian

aid workers. Dans ODI, Disaster (pp. 152-170).

Cardozo, B. L. (2004). Burnout Among Humanitarian Aid Worker and Human Service

Providers in Post-Conflict Societies. TRAUMA AND THE ROLE OF MENTAL IN POST-

CONFLICT RECOVERY. Rome: Richard F. Mollica, M.D., M.A.R.

Centre d'apprentissage interculturel . (2009). Réintégration du personnel à la suite d’une

affectation dans une mission à risque élevé;Bonnes pratiques en matière d’appui aux

travailleurs internationaux de l’aide humanitaire et du développement.

Centre d'apprentissage interculturel. (2009).

Centre d'étude sur le trauma, . (2008-2012). www.hlhl.qc.ca. Consulté le Mai 11, 2012, sur

www.hlhl.qc.ca.

CHP, . (2009). Centre de psychologie humanitaire. Consulté le mai 10, 2012, sur

humanitarian-psy.org: http://humanitarian-psy.org/

Christopher H. Warner, M. G. (2011). Effectiveness of mental health screening and

coordination of in-theater care prior to deployment to Iraq. Am J psychiatry , pp. 378-385.

CICR. (1995). « Principes et intervention en matière d'assistance et de protection dans le

cadre de l'action humanitaire internationale; XXVIe Conférence internationale de la Croix-

Rouge et du Croissant-Rouge ». Genève.

CICR. (2008, Juin 19). La mission du CICR. Consulté le Avril 04, 2012, sur CICR.org:

http://www.icrc.org/fre/resources/documents/misc/icrc-mission-190608.htm

CICR. (1996, Février 29). Le code de conduite pour le Mouvement international de la Croix-

Rouge et du Croissant-Rouge et pour les ONGs lors des opérations de secours en cas de

catastrophes. Revue internationale de la Croix-Rouge, 817 .

CICR/FICR. (1996). Annexe VI : Le code de conduite pour le Mouvement international de la

Croix-Rouge et du Croissant-Rouge et pour les ONGs lors des opérations de secours en cas de

catastrophes. Revue international de la Croix-Rouge,817 .

David Loquercio, . (2006). Turnover and retention. UK: for People in Aid.

Davidson, S. (1998). Consultative Meeting on Management and Support of Relief Workers.

WHO.

Ditzler, T. (2001). Mental health and Aid Worker. The journal of humanitarian assisstance .

Ditzler, T. (2001). Mental Health and Aid Workers: The Case for Collaborative Questioning.

The Journal of humanitarian assistance .

Dr. Bierens de Haan, H. B.-C. (2002, février). Le programme de soutient psychologique des

intervenants humanitaires du comité International de la Croix-Rouge. Revue Française de

psychiatrie et de psychologie Médicale , p. 2.

Ehrenreich, J. &. (2004). Managing Stress in Humanitarian Aid Workers : A Survey of

Humanitarian Aid Agencies’Psychosocial Training and Support of Staff .

Ellen Connorton, M. J. (2011). Humanitarian Relief Workers and Trauma-related Mental

Illness. Oxford University , 145-155.

- 61 -

Eriksson, H. V. (2001). Trauma Exposure and PTSD Symptoms in International Relief and

Development Personnel1. Journal of Traumatic Stress, , Vol. 14, No. 1, p1.

Evelyne Josse, . (2006). Le traumatisme dans les catastrophes humanitaires. Consulté le mai

13, 2012, sur Psycho-solution: http://www.psycho-solutions.be

Feinstein, A. J. (2002). Journalist, War, and Post Traumatic Stress Disorder. Dans Y. Danieli,

Sharing the Front Line and the Black Hills: Peacekeepers, humanitarian Aid Workers and the

Media in the Midst of Crisis (pp. 305-317). New-York: Baywood Publishing Company, INC.

Gayral, C. (2009). Final report of Staff Health dec09. Genève: MSF.

Guss, I. (2012). Focus on Staff Care. Basel.

Headington institute. (2007). Study in Darfur and Easterns Chad.

Health Alliance International. (2009). NGO Code of Conduct for Health Systems

Strengthening.

Hugo Slim, . (2005). Idealism and Realism in Humanitarian Action. Two Talks Given at the

ACFID Humanitarian Forum. Camberra: Center for humanitarian Dialogue.

Humem (Réalisateur). (2011). L'autre côtès du monde [Film].

Josse, E. (2006). Le débriefing psychologique dans un cadre professionnel.

Josse, E. (2007). Le stress: quelques repères notionnels. La Hulpe, Belgique. Récupéré sur

psycho-solution.

Larousse. (1994). Le Petit Larousse Illustré. Paris: Larousse.

Les autorités Fédérales de la Confédération Suisse, . (2012, mars 1). Site de la confédération

Suisse. Consulté le avril 23, 2012, sur Admin.ch: http://www.admin.ch/ch/f/rs/220/a328.html

Lisa Schwartz, C. S. (2010, Aout 27). Ethics in Humanitarian Aid Work:Learning From the

Narratives of Learning From the Narratives of. AJOB Primary Research , pp. 45-54.

Lopes Cardozo, H. T. (2005). The Mental Health of Expatriate and Kosovar Albanian

Humanitarian. Disasters , pp. 152-170.

Loquencio, D. (2006). Understanding and addressing staff turnover in humanitarian

agencies.

Mari, J. P. (Réalisateur). (2008). Sans blessures apparentes enquêtes chez les damnés de la

guerre [Film].

Maureen McCall, P. S. (1999, Janvier 09). Selection, training, and support of relief workers:

an occupational health issue. BMJ 318 , pp. 113-116.

MSF. (2009). Carnet de route. Genève.

MSF. (2012, Avril 02). MSF. Consulté le avril 04, 2012, sur MSF.CH: http://www.msf.ch/a-

propos-de-msf/

ODI. (1995). Gestion et Soutien des Agents de l'Aide Humanitaire et du Développement:`Peut

Mieux Faire'.

ONU. (2008). Charte des Nations Unis Chapitre VII Action en cas de menace contre la paix

et , de rupture de la paix et d'acte d'agression. NY: Nation Unis Archives.

Peace Corps, . (2007). 2007 report.

Pelcran, F. (2012, avril 21). Humanitarian protection. Consulté le avril 21, 2012, sur

humanitarianprotection:

http://humanitarianprotection.org/FR_Humanitarianprotection.org/Statistiques.html

People in Aid. (2003). Code de bonne pratique dans la gestion et le soutien du personnel

humanitaire 2003. Londre.

People in Aid, . (2009). Approaches to Staff care in International NGOs.

People In Aid, . (2011). Développer des cadres résilients dans les organisations

humanitaires: Renforcer les structures organisationnelles et les compétences personnelles clé

qui promeuvent la résilience dans des environnements difficiles.

People in Aid, . (2009). Médecins Sans Frontières UK: Returners' Talk and Volonteer Link.

Perone, S. A. (2012, mars 15). RH santé chez les expats. (C. Vionnet, Intervieweur)

- 62 -

Poole, S. M. (2010, Février 18). Relief workers, volunteers feel stress of Haiti disaster.

Consulté le Février 15, 2012, sur AJC The Atlanta Journal-Constitution:

http://www.ajc.com/news/relief-workers-volunteers-feel-

290335.html?cxtype=rss_news_128746

Raynard, P. (2000). MAPPING ACCOUNTABILITY IN HUMANITARIAN ASSISTANCE.

ALNAP.

Resonnances humanitaires, . (2002). Etude des résultats de l’enquête sur le thème des retours

de mission des expatriés de la solidarité internationale. Paris.

Ros, T. (2004). Aid Worker Safety and Security as a Source of Stress and Distress: Is

Psychological Support Needed?

S. Aebischer Perone H, v. (2008, 05 14). Stress et santé mentale chez les expatriés. Revue

Médicale Suisse .

Sharon Forrence. (2008). Helper’s Fire II,Conference works to build resilient communities for

humanitarian and development assistance field staff. Monday Developpements.

SPHERE. (2011). The Sphere Project. Northampton: Belmont Press.

Stuart C Carr, D. M. (2012). Humanitarian Work Psychology. Palgrave Macmillan.

TSR (Réalisateur). (2010). Stress post traumatique; quand le coeur des héros vacilles [Film

Vachon, M. (2002). Like a Squeezed Lemon. Dans Y. Danieli, Sharing the front line and the

back hills (p. 186). New York: Baywood Publishing Company.

Walkup, M. (2002). Sharing the front line and the back hills/chapter: Humanitarianism at

Risk: From Threatened Aid Workers to Self-Deceiving Organisations. New-York: Yael

Danieli .

WHO. (2011). Psychological first aid: Guide for field workers. Genève.

Wikipedia. (2012, Avril 09). Expatrié . Consulté le 06 2012, 01, sur

http://fr.wikipedia.org/w/index.php?title=Expatri%C3%A9&action=history:

Bibliographie

Aebischer Perone Sigiriya, Hendrica van Beerendonk, Jacqueline Avril et Gérard Bise, Pr

Louis Loutan Stress et santé mentale chez les expatriés, Rev Med Suisse 2008 ; 4 : 1206-11

Antares foundation, Gestion du stress chez les travailleurs humanitaires, Guide de Bonnes

Pratiques, 2006, www.antaresfoundation.org

Antares foundation, Managing stress in humanitarian workers Guidelines for good practice

second edition , July 2006, www.antaresfoundation.org

Arias Victoria , Contribution à l'étude du stress post-traumatique : le cas de la Colombie, Face

à face , 2003, http://faceaface.revues.org/435

Augsburger Rick, William Sage, Lisa McKay, Dr. Laurie Pearlman, Dr. Jim Guy, Bree

Hulme, Alicia Jones, Headington Institute, Pasadena, NGO Staff Wellbeing in the Darfur

Region of Sudan & Eastern Chad

Assessment Report for InterAction November, 2007

Bacqué Marie-Frédérique , deuil post-traumatique et catastrophes naturelles, L'Esprit du

temps | Etudes sur la mort , 2003/1 - no 123, pages 111 à 130, http://www.cairn.info/revue-

etudes-sur-la-mort-2003-1-page-111.htm

- 63 -

Bauer Noel , The Dangerous Business of Aid, A Report on the Risks to Aid Workers in the

Field , October 2, 2009

Bierens de Haan B. [Emotional group debriefingof humanitarian aid workers: the

experienceof ICRC.] Schweiz Arch Neurol Psychiatr 1998;149:218Ŕ28.

Bierens de Haan B. [Emotional group debriefing of humanitarian aid workers: the experience

of ICRC.] Schweiz Arch Neurol Psychiatr 1998;149:218Ŕ28.

Bilal Muhammad Sami; Mowadat Huassain Rana, MBBS, FCPS Psychiatry, MCPS

Psychiatry,MRC Psych; Sajid Rahim,MBBS; Sohail Ali,MBBS Psychiatry,FCPS

Psychiatry,MCPS Classified Psychiatrist , Psychological Trauma in a Relief WorkerŕA Case

Report from Earthquake-Struck Areas of North Pakistan Prehospital Disast Med

2007;22(5):458Ŕ461.

Centre d'apprentissage interculturel Institut canadien du service extérieur,

Staff Reintegration Following High-Risk Missions

Good Practices in Supporting International Development and Aid Workers, 2009

Charrière Anne, Impact du stress sur la santé mentale des travailleurs humanitaires

Une revue de littérature étoffée, 4 juillet 2011

Comoretto Amanda understanding resilience in aid workers 2011 (PowerPoint)

Connorton Ellen, Melissa J. Perry, David Hemenway, and Matthew Miller, Humanitarian

Relief Workers and Trauma-related Mental Illness, Epidemiol Rev 2012;34:145Ŕ155

Côté Louis, Les facteurs de vulnérabilité et les enjeux psycho-dynamiques dans les réactions

post-traumatiques, santé mentale au Québec, vol. 21, n° 1, 1996, p. 209-227.

http://id.erudit.org/iderudit/032388ar

Ehrenreich John H., Ph.D. Center for Psychology and Society State University of New York

College at Old Westbury , A Guide for Humanitarian, Health Care, and Human Rights

Workers Caring for Others, Caring for Yourself, July 2002

http://www.mhwwb.org/disasters.htm.

Eriksson Cynthia B. Hendrika Vande Kemp, Richard Gorsuch,, Stephen Hoke, and DavidW.

Foy, Trauma Exposure and PTSD Symptoms in International Relief and Development

Personnel1, Journal of Traumatic Stress, Vol. 14, No. 1, 2001, p.205-212

Gayral Christine, Outline of the various stakeholders, services and problems related to the

health care of expatriates, HQ staff and recommendations, December 2009

Güss Isabelle, Focus on staff care Assessing safety and security support of expatriate field

staff in Switzerland based humanitarian organisations, 2012

Holtz Timothy H., Peter Salama, Barbara Lopes Cardozo, and Carol A. Gotway, Mental

Health Status of Human Rights

- 64 -

Workers, Kosovo, June 2000, Journal of Traumatic Stress, Vol. 15, No. 5, October 2002, pp.

389–395

HR Today, La souffrance au travail en Suisse: difficile de faire tomber les masques, n°6

décembre 2009

Hunt Matthew R. , Resources and constraints for addressing ethical issues in medical

humanitarian work: Experiences of expatriate healthcare professionals, p.261-271,

www.disastermedicinejournal.com

IASC, Guidelines on Mental Health and Psychosocial Support in Emergency Settings, Inter-

Agency Standing Committee 2007, http://www.humanitarianinfo.org/iasc

IASC, Mental Health and Psychosocial Support in Humanitarian Emergencies: What Should

Humanitarian Health Actors Know? , 2010

International Congress of Ministers of Health for Mental Health and Post-Conflict Recovery,

book of best practices - trauma and the role of mental health in post-conflict recovery, December 3-4,

2004 Rome

International Federation of Red Cross and Red Crescent Societies (2001), Managing stress in

the field, IFRC, Helping the helpers, Community-based psychological support Ŕ Module 6

International Federation of Red Cross and Red Crescent Societies , Managing stress in the

field, 2009 - Fourth edition

Josse Evelyne, Comment gérer un incident critique survenu dans le cadre dřune expatriation ?,

2006

Kaspersen Marianne , Stig Berge Matthiesen and K..Gunnar Götestam, Social network as a

moderator in the relation between trauma

exposure and trauma reaction: A survey among UN soldiers

and relief workers, Scandinavian Journal of Psychology, 2003, 44, 415Ŕ423

McCall Maureen, Peter Salama, Education and debate - Selection, training, and support of

relief workers:

an occupational health issue, bmj volume 318 9 january, p.113-116 1999 www.bmj.com

McKay Lisa , Helping the Helpers - Understanding, assessing, and treating humanitarian

workers experiencing acute stress reactions, 2004

www.headington-institute.org

Mollica R F, B Lopes Cardozo, H J Osofsky, B Raphael, A Ager, P Salama, Mental health in

complex emergencies, www.thelancet.com Vol 364, December 4, 2004: p. 2058Ŕ67

MSF, Psychosocial and mental health interventions in areas of mass violence, 2005

Objectifs Ŕ stress , 2007 Ŕcours sur stress, Bioforce 2010

- 65 -

Palen Alice , Posttraumatic stress disorder (PTSD) , Reaction Paper, Cross-Cultural

Psychopathology, F650, October 7, 2008

People In Aid , Rehausser la qualité de la gestion des ressources humaines dans le secteur

humanitaire Ŕ un guide pratique, Manuel 2, People In Aid Mai 2004

ROS Thomas, Aid worker safety as a source of stress and distress : is psychological support

needed ?, 2004

Rose SC, Bisson J, Churchill R, Wessely S, Psychological debriefing for preventing post

traumatic stress

disorder (PTSD) (Review), The Cochrane Library

2009, Issue 1http://www.thecochranelibrary.com

Siddharth Ashvin Shah, Elizabeth Garland, and Craig Katz, Secondary Traumatic

Stress:Prevalence in Humanitarian Aid Workers in India , Volume 13 Number 1

March 2007 p.59-70 http://tmt.sagepub.com hosted at http://online.sagepub.com

Simmonds Sandra, Gilbert-Miguet Pascale, Siem Harald, Carbello Manuel, Zeric Damir,

Occupational Health of field personnal in complex emergencies : background document, 1998

Sinding Christina, Lisa Schwartz, Matthew Hunt, Lynda Redwood-Campbell, Laurie Elit,

Jennifer Ranford, ŘPlaying God Because you Have toř: Health Professionalsř Narratives of

Rationing Care in Humanitarian and Development Work, PUBLIC HEALTH ETHICS 2010

p.1Ŕ11

Schwartz Lisa ; Christina Sindinga; Matthew Hunt; Laurie Elit; Lynda Redwood-Campbell;

Naomi Adelson; Lori Luther; Jennifer Ranford; Sonya DeLaat, Ethics in Humanitarian Aid

Work: Learning From the Narratives of Humanitarian Health Workers AJOB Primary

Research, 2010,p. 45 ŕ 54

http://www.informaworld.com/smpp/title~content=t91441750

The People In Aid, Code of Good Practice, 2003, is a revision of the People In Aid Code

of Best Practice, 1997 Code of g ood practice in the management and suppor t of aid

personnel

The People In Aid , Code de bonne pratique dans la gestion et le soutien du personnel

humanitaire de People In Aid (2003) remplace lřédition originale publiée en 1997

The People In Aid, Code of Good Practice, 2003, is a revision of the People In Aid Code

of Best Practice, 1997 Code of good practice in the management and suppor t of aid personnel

Walsh Denise Susan , Interventions to reduce psychosocial disturbance

following humanitarian relief efforts involving

natural disasters: An integrative review, International Journal of Nursing Practice 2009; 15:

p.231Ŕ240

WarnerChristopher H. , George N. Appenzeller, Jessica R. Parker, Carolynn M. Warner,

Charles W. Hoge, Effectiveness of Mental Health Screening and

Coordination of In-Theater Care Prior to

- 66 -

Deployment to Iraq: A Cohort Study, Us military 2010, ajp.psychiatryonline.org

World Health Organization, Psychological first aid: Guide for field workers, WHO Library

Cataloguing-in-Publication Data 2011

World Health Organization, improving health systems and services for mental health , 2009

Page web

Aid Workers, Too, Suffering Post-Traumatic Stress

http://news.nationalgeographic.com/news/2003/12/1203_031203_aidworkers.html

Aider les travailleurs humanitaires | Grotius International

http://www.grotius.fr/aider-les-travailleurs-humanitaires/

Antaresfoundation - Homepage

http://www.antaresfoundation.org/

Agenda des actualités en victimologie

http://www.victimology.be/fr/articles/index.htm

Annexe VI : Le code de conduite pour le Mouvement International de la Croix-Rouge et du

Croissant-Rouge et pour les ONG lors des opérations de secours en cas de catastrophes

http://www.icrc.org/fre/resources/documents/misc/code-of-conduct-290296.htm

Australian Psychological Society : Supporting the workers: Psychology and humanitarian aid

http://www.psychology.org.au/publications/inpsych/humanitarian/

Centre de Psychologie Humanitaire

http://humanitarian-psy.org/fr

Colo. and N.M. Differ on Medical Marijuana for PTSD - NYTimes.com

http://www.nytimes.com/2010/03/25/us/25pot.html?scp=5&sq=+PTSD&st=nyt

Conditions de travail ŕ OSHA ŕ European Agency for Safety and Health at Work

http://www.respectautravail.be/fr/conditions-de-travail

DPPD International | …when you are working internationally and need to focus on yourself

http://dppd-international.com/en/

France Télécom Ŕ Wikipédia http://fr.wikipedia.org/wiki/France_T%C3%A9l%C3%A9com

Questionnaire sur le Stress Post-Traumatique (QSPT) ŕ OSHA ŕ European Agency for

Safety and Health at Work

Headington-institute.org > HOME > The experiences of national staff

http://www.headington-institute.org/Default.aspx?tabid=2635

Intervention International Journal of Mental Health, Psychosocial Work and Counselling in

Areas of Armed Conflict

http://www.interventionjournal.com/

- 67 -

La préparation et la formation des opérateurs de la solidarité et coopération internationales |

Grotius International

http://www.grotius.fr/la-preparation-et-la-formation-des-operateurs-de-la-solidarite-et-

cooperation-internationales/

La sécurité humanitaire : « une question dřacceptation, de perception, de comportement… »

http://www.icrc.org/fre/resources/documents/misc/5ybfdc.htm

Le programme de soutien psychologique des intervenants humanitaires du Comité

International de la Croix-Rouge (CICR)

http://www.icrc.org/fre/resources/documents/misc/5fzjgf.htm

Mental Health and Aid Workers: The Case for Collaborative Questioning

http://sites.tufts.edu/jha/archives/1482

MSF Perceptions Conference: MSF Canada

http://www.msf.ca/themes/msf-perceptions-conference/#schwartz

Observatoire de l'action humanitaire

http://www.observatoire-humanitaire.org/methodologie/geo.htm

OneWorld South Asia Home / News / Editorial: Guest editorials - Securing the Safety of Aid

Staff / http://archive.oneworld.net/article/view/75669

Pascal Dereau - Psycho-Solutions, Psychologue et Psychothérapeute à Bruxelles

http://www.psycho-solutions.be/

PLoS Medicine: Research Ethics Review in Humanitarian Contexts: The Experience of the

Independent Ethics Review Board of Médecins Sans Frontières

http://www.plosmedicine.org/article/info:doi/10.1371/journal.pmed.1000115

Pour sřinformer sur les humanitaires, la solidarité, le DIH, la CPI …

http://www.grotius.fr/

Psychology & Humanitarian Assistance

http://sites.tufts.edu/jha/archives/80

Relief workers, volunteers feel stress of Haiti disaster | ajc.com

http://www.ajc.com/news/relief-workers-volunteers-feel-

290335.html?cxtype=rss_news_128746

Preparing humanitarian workers for disaster response a Red Cross/Red Crescent field training

model - Issue 46 - Humanitarian Exchange Magazine - Humanitarian Practice Network

http://www.odihpn.org/humanitarian-exchange-magazine/issue-46/preparing-humanitarian-

workers-for-disaster-response-a-red-crossred-crescent-field-training-model

Quels sont les symptômes de lřÉSPT? | Hôpital Louis-H. Lafontaine

http://www.hlhl.qc.ca/cet/etat-de-stress-post-traumatique/symptomes-de-espt.html

Résonances Humanitaires » Qui sommes-nous

- 68 -

http://www.resonanceshumanitaires.org/categorie/qui-sommes-nous/

Risques psychosociaux - faits et arguments

http://bernard-romain.over-blog.com/article-les-risques-psychosociaux-dans-les-entreprises-

37256315.html

Stresseurs | Centre d'études sur le stress humain (CESH)

http://www.stresshumain.ca/le-stress/quest-ce-que-le-stress/stresseurs.html

Stress | Aid Workers Network

http://www.aidworkers.net/?q=advice/handling_stress

Syndicat ASSO

http://syndicat-asso.fr/

RS 220 Art. 328 C. Obligations de lřemployeur / VII. Protection de la personnalité du

travailleur / 1. En général (Loi fédérale complétant le Code civil suisse)

http://www.admin.ch/ch/f/rs/220/a328.html

The Psychological Health of Relief Workers Some Practical Suggestions - Issue 15 -

Humanitarian Exchange Magazine - Humanitarian Practice Network

http://www.odihpn.org/humanitarian-exchange-magazine/issue-15/the-psychological-health-

of-relief-workers-some-practical-suggestions

Trauma and Posttraumatic Reactions in German Development Aid Workers: Prevalences and

Relationship to Social Acknowledgement

http://isp.sagepub.com/content/52/2/91.short

UNHCR - Gérer les tensions du personnel et sa sécurité : un défi pour le HCR

http://www.unhcr.fr/4b30a6031d.html

What is vicarious trauma?

http://www.headington-institute.org/Default.aspx?tabid=2648

Filmographie

Stress post traumatique: quand le cœur des héros vacille - Césariennes: la Suisse championne

du bistouri - tsr.ch - vidéo - émissions - 36.9°

http://www.tsr.ch/video/emissions/36-9/2657427-36-9.html#/emissions/36-9/2657425-stress-

post-traumatique-quand-le-coeur-des-heros-vacille.html

Sans Blessures Apparentes, Enquête chez les damnés de la guerre, film de Jean-Paul Mari,

Réalisateur : Jean-Paul Mari, Franck Dhelens (2009)

Humem (Réalisateur). (2011). L'autre côtès du monde [Film].

- 69 -

Table des matières Annexes

Annexe I : Le Code de conduite (CICR/FICR) 70-72

Annexe II : Auto-évaluation de MSF-OCG 73-74

Annexe III : Code de conduite des ONG de People in Aid 75

Annexe IV : Tableau CICR ; stress 76

Annexe V : Document original sur le turn-over 77-78

Annexe VI : Chiffres d’ODI sur la sécurité des expatriés 79-80

Annexe VII : Résultats MSF-OCG par Isabelle Guss 81-88

Annexe VIII : Aide psychologique de premier secours 89-90

Annexe IV : Questionnaire dur le PTSD 91-92

Glossaire 93

- 70 -

Annexe I

Le code de conduite pour le Mouvement International de la Croix-Rouge et du Croissant-Rouge et pour les ONG lors des opérations de secours en cas de catastrophes 29-02-1996 Article, Revue internationale de la Croix-Rouge, 817

Préparé conjointement par la Fédération internationale des Sociétés de la Croix-Rouge et

du Croissant-Rouge et le Comité international de la Croix-Rouge

Dans ce code la prise en compte de la santé de l’employé, de la responsabilité de l’ONG a

donné tout le nécessaire pour assurer un suivi décent est inexistant (auteur).

Objet

Le présent Code de conduite a pour objet de préserver nos principes de comportement. Il n'aborde pas les

questions opérationnelles de détail, telles que la façon de calculer les rations alimentaires ou d'installer un camp

de réfugiés. Il vise en revanche à sauvegarder les critères élevés d'indépendance et d'efficacité auxquels aspirent

les ONG fournissant des secours en cas de catastrophe et le Mouvement international de la Croix-Rouge et du

Croissant-Rouge. Il s'agit d'un code volontaire, dont l'application repose sur la détermination de chacune des

organisations qui y adhère de respecter les normes qu'il définit.

En cas de conflit armé, le présent Code de conduite sera interprété et appliqué conformément au droit

international humanitaire.

Code de conduite : Principes de comportement pour le Mouvement international de la Croix-Rouge et du

Croissant-Rouge et pour les ONG dans l'exécution de programmes de secours en cas de catastrophe

1. L'impératif humanitaire, priorité absolue

Le droit de recevoir et d'offrir une assistance humanitaire est un principe humanitaire fondamental dont devraient

bénéficier tous les citoyens de tous les pays. Membres de la communauté internationale, nous reconnaissons

l'obligation qui nous incombe d'apporter une assistance humanitaire partout où le besoin s'en fait sentir. Il en

découle que l'accès sans restriction aux populations sinistrées revêt une importance fondamentale pour l'exercice

de cette responsabilité. La raison primordiale de nos interventions en cas de catastrophe est de soulager les

souffrances des victimes les moins aptes à en supporter les conséquences. En fournissant une aide humanitaire,

nous accomplissons un acte qui n'est ni partisan, ni politique, et qui ne doit en aucun cas être considéré comme

tel.

2. L'aide est apportée sans aucune considération de race, de croyance ou de nationalité du bénéficiaire, et

sans discrimination d'aucune sorte. Les priorités en matière d'assistance sont déterminées en fonction des

seuls besoins

Nous nous engageons, dans toute la mesure du possible, à fonder l'apport des secours sur une évaluation

approfondie des besoins des sinistrés et des capacités locales existantes pour y pourvoir. Nous tiendrons compte,

dans chaque composante de nos programmes, du principe de la proportionnalité. Les souffrances humaines

doivent être soulagées où qu'elles se manifestent; la vie est également précieuse en tout lieu. Nous apporterons

donc nos secours en fonction de l'ampleur des souffrances qu'ils visent à soulager. Nous sommes pleinement

conscients, en appliquant ce principe, du rôle crucial qu'assument les femmes dans les communautés exposées

aux catastrophes, et nous veillerons à ce que nos programmes d'aide, loin d'affaiblir ce rôle, le renforcent. La

mise en œuvre d'une telle politique, universelle, impartiale et indépendante, requiert la possibilité, pour nous-

mêmes et pour nos partenaires, d'avoir accès aux ressources nécessaires pour apporter de tels secours de façon

équitable, ainsi que la possibilité d'accéder à toutes les victimes des catastrophes, sans distinction.

3. L'aide ne saurait être utilisée au service de convictions politiques ou religieuses, quelles qu'elles soient

- 71 -

L'aide humanitaire est fournie en fonction des besoins des particuliers, des familles et des communautés. Si toute

IHNG peut légitimement professer des convictions politiques ou religieuses, nous déclarons qu'en aucun cas

l'assistance ne saurait dépendre de l'adhésion des bénéficiaires à ces opinions. En aucun cas nous ne lierons la

promesse, la fourniture ou la distribution de l'assistance à l'adhésion à des convictions politiques ou religieuses

déterminées ou à leur acceptation.

4. Nous nous efforcerons de ne pas servir d'instrument à la politique étrangère des gouvernements

Les IHNG sont des institutions qui agissent indépendamment des gouvernements. Nous définissons donc nos

propres lignes de conduite et nos stratégies d'application, et nous nous abstenons d'appliquer la politique de

quelque gouvernement que ce soit, sauf dans la mesure où elle coïncide avec notre propre politique, formulée en

toute indépendance. Ni sciemment, ni par négligence, nous ne permettrons que nos institutions, ou le personnel

que nous employons, soient utilisés pour réunir, à l'intention de gouvernements ou d'autres instances, des

informations délicates de portée politique, militaire ou économique qui pourraient être utilisées à des fins autres

que strictement humanitaires; de même, nous ne servirons pas d'instrument à la politique étrangère des

gouvernements donateurs. Nous utiliserons l'assistance qui nous sera remise pour répondre aux besoins; cette

assistance ne saurait être guidée par la nécessité pour les donateurs de se débarrasser de leurs excédents, ni par

les intérêts politiques de tel ou tel donateur. Nous apprécions et encourageons les dons volontaires en services et

en espèces offerts par des particuliers soucieux d'appuyer nos activités, et nous reconnaissons l'indépendance

d'une action fondée sur cette motivation. Afin de sauvegarder notre indépendance, nous tenterons de ne pas

dépendre d'une seule source de financement.

5. Nous respecterons les cultures et les coutumes

Nous nous appliquerons à respecter la culture, les structures et les coutumes des communautés et des pays dans

lesquels nous menons nos activités.

6. Nous chercherons à fonder nos interventions sur les capacités locales

Même sous le coup d'une catastrophe, toutes les populations et les communautés recèlent des capacités, alors

même qu'elles apparaissent vulnérables. Nous prenons l'engagement de renforcer ces capacités chaque fois que

cela sera possible, en recrutant du personnel local, en achetant des matériaux disponibles sur place et en traitant

avec des entreprises locales. Nous collaborerons dans toute la mesure du possible avec les IH NG locales pour

associer nos efforts en matière de planification et de mise en œuvre de nos opérations, et nous coopérerons avec

les pouvoirs locaux si nécessaire.

La bonne coordination de nos interventions en cas de catastrophe sera pour nous une tâche prioritaire. Pour être

efficace, cette coordination doit être assurée sur place par les personnes les plus directement engagées dans les

opérations de secours; il convient d'y associer des représentants des organes compétents des Nations Unies.

7. Nous nous emploierons à trouver des moyens d'associer les bénéficiaires des programmes à la gestion

des secours

L'assistance en cas de catastrophe ne doit jamais être imposée aux bénéficiaires. Pour garantir l'efficacité des

secours et une reconstruction durable, les bénéficiaires potentiels doivent être associés à la conception, à la

gestion et à l'exécution du programme d'assistance. Nous chercherons à assurer la pleine participation de la

communauté à nos programmes de secours et de reconstruction.

8. Les secours doivent autant viser à limiter les vulnérabilités futures qu'à satisfaire les besoins

essentiels

Toutes les opérations de secours exercent un effet - positif ou négatif - sur les perspectives de développement à

long terme. Nous chercherons donc à mettre en œuvre des programmes de secours qui limitent la vulnérabilité

des bénéficiaires à l'égard de catastrophes futures et qui les aident à subvenir à leurs besoins. Nous accorderons

une attention particulière aux préoccupations relatives à l'environnement dans la conception et la gestion des

programmes de secours. En outre, nous ferons tout pour réduire au minimum les effets négatifs de l'assistance

humanitaire, en cherchant à prévenir la dépendance durable des bénéficiaires à l'égard de l'aide extérieure.

- 72 -

9. Nous nous considérons responsables, tant à l'égard des bénéficiaires potentiels de nos activités que vis-

à-vis de nos donateurs

Nous faisons souvent fonction d'intermédiaire entre ceux qui souhaitent offrir une assistance et les victimes de

catastrophes qui ont besoin d'aide. Nous nous considérons par conséquent investis d'une responsabilité envers

ces deux groupes. Tous nos rapports avec les donateurs et les bénéficiaires seront marqués par une attitude de

franchise et de transparence. Nous reconnaissons pleinement la nécessité de rendre compte de nos activités, tant

sur le plan financier que sur celui de l'efficacité. Nous reconnaissons l'obligation de contrôler strictement les

distributions de secours et d'en évaluer régulièrement les effets. Nous chercherons en outre à rendre compte

ouvertement de l'impact de nos activités et des facteurs qui limitent ou qui favorisent cet impact. Nos

programmes s'appuieront sur des critères très sévères de professionnalisme et de savoir-faire afin de réduire au

minimum le gaspillage de ressources précieuses.

10. Dans nos activités d'information, de promotion et de publicité, nous présenterons les victimes de

catastrophes comme des êtres humains dignes de respect, et non comme des objets de commisération

Les victimes d'une catastrophe méritent en tout temps le respect et doivent être considérées dans nos activités

comme des partenaires à traiter sur un pied d'égalité. Dans nos campagnes d'information du public, nous

donnerons une image objective de la catastrophe en mettant en valeur, non seulement les vulnérabilités et les

craintes des victimes, mais encore leurs capacités et leurs aspirations. Tout en coopérant avec les médias afin de

sensibiliser au mieux le public, nous ne permettrons pas que des demandes externes ou internes de publicité

prennent le pas sur l'objectif de développer au maximum les secours. Nous éviterons toute compétition avec

d'autres organisations de secours pour gagner l'attention des médias au cas où cette publicité risquerait de porter

atteinte aux services fournis aux bénéficiaires, à la sécurité de notre personnel ou à celle des bénéficiaires.

Note

1. Parrainé par: Caritas Internationalis*, Catholic Relief Services*, la Fédération internationale des Sociétés de la

Croix-Rouge et du Croissant-Rouge*, International Save the Children Alliance*, la Fédération luthérienne

mondiale*, Oxfam*, le Conseil cuménique des Eglises*, Comité international de la Croix-Rouge (*membres du

Comité directeur de l'intervention humanitaire).

- 73 -

Annexe II

Auto-évaluation trouvé sur le site de MSF-OCG, qui est proposé comme une première vue

d’ensemble de l’ONG et de son travail avant une séance d’information ou un entretien.

(Il y a une précision sur les risques accrus d’avoir un stress de base assez élevé, mais un manque de transparence sur les risques sur la santé physique et psychologique sont a relevé, puis sur les dimensions éthiques, sur les réalités politique du terrain et de la politique interne de la maison MSF)

Ce qu’il faut savoir sur la vie en mission avant de

postuler

Lřimage véhiculée par Médecins Sans Frontières (MSF) est souvent celle du médecin risquant sa vie

pour pratiquer la chirurgie en temps de guerre. Bien entendu, prodiguer des soins primaires à des

populations en détresse représente un défi en soi. Mais cette situation nřest pas toujours aussi

impressionnante et héroïque quřelle nřy paraît.

Avant dřentreprendre les démarches pour travailler avec MSF à lřétranger, vous devez comprendre les

raisons qui vous poussent à prendre une telle décision. Avez-vous idéalisé notre travail ou faites-vous

plutôt un choix éclairé? Vos motivations et vos valeurs vont-elles de pair avec la mission de MSF?

Il est important de connaître la réalité quotidienne des employés de MSF. Ils vivent et travaillent

souvent en terrain inconnu dans des conditions stressantes et difficiles. La démarche suivante est

conçue pour vous aider à évaluer vos motivations, vos aspirations professionnelles et votre équilibre

émotionnel. En dřautres termes, il sřagit dřune occasion pour faire un retour sur vous-même et sur

votre engagement envers lřaide humanitaire dans les contextes où intervient MSF. Prenez aussi le

temps de songer aux embûches que vous pourriez rencontrer en apportant cette aide.

MSF cherche des expatriés ayant une grande maturité dřesprit, possédant les habiletés techniques et

professionnelles et les aptitudes personnelles qui leur permettront de sřadapter facilement aux

différentes cultures, aux conditions de vie difficiles et au stress. Pour travailler sur le terrain, la

capacité dřadaptation est essentielle. MSF a besoin de personnes pouvant évoluer dans un milieu en

constante instabilité.

Sécurité

Pour MSF, la sécurité du personnel est une priorité. Vous pourrez être appelé à vivre et à travailler

dans des pays instables où votre vie pourra être en danger. Pour chaque projet, de multiples exposés,

plans, lignes de conduite et guides ont été conçus afin de minimiser les risques. Lorsquřils travaillent

sur un projet, les expatriés doivent comprendre quřils représentent MSF jour et nuit, 7 jours sur 7,

même durant leur temps libre et leurs congés. Chacun est responsable de sa propre sécurité ainsi que

de celle de lřéquipe. Lřapplication des règles de sécurité de MSF peut limiter vos allées et venues ainsi

que vos interactions avec la population locale en dehors des heures de travail. Votre journée terminée,

il peut arriver que vous ayez à respecter un couvre-feu et que vous soyez contraint de rester dans

lřenceinte de MSF.

Conditions de vie

En travaillant à lřétranger avec MSF, vous devrez vous adapter à plusieurs changements en ce qui

concerne la nourriture, le logement, le rythme de vie, les loisirs, la langue et les collègues. Un nouveau

style de vie vous attend dans lequel lřintimité et les temps libres peuvent être rares. Il est possible que

vous partagiez votre chambre ainsi que la salle de bain et la pratique de votre sport préféré devra

éventuellement attendre la fin de votre mission. Les projets MSF peuvent se dérouler dans des endroits

où les conditions météorologiques ne sont pas toujours clémentes (chaleur ou froid extrême, taux

- 74 -

dřhumidité élevé, pluie abondante ou climat désertique). Habiter une hutte de boue sans ventilateur ni

climatisation, tolérer le bourdonnement des insectes, devoir composer avec une source dřélectricité

restreinte et un choix limité de nourriture pendant des mois: voilà à quoi peut ressembler votre

mission.

À lřopposé, vous profiterez peut-être dřun confort quasi habituel dans une maison spacieuse, et vous

pourrez même avoir des cuisiniers et du personnel de maison alors que les gens à qui vous venez en

aide tentent de survivre avec des moyens rudimentaires. Certaines personnes éprouvent de la difficulté

à vivre avec un tel paradoxe. Assurez-vous de pouvoir vous passer de votre confort matériel avant de

vous engager avec MSF. Vous allez aussi être éloigné de votre famille, de vos amis, pour une période

de plusieurs mois.

Stress

Lřaide humanitaire en situation dřurgence sait faire grimper le niveau de stress. Plusieurs facteurs

peuvent créer un climat tendu et vous démotiver: les tensions entre coéquipiers, les problèmes de

santé, lřéloignement de vos parents et amis, le sentiment dřinsécurité, les changements fréquents de

projet, les relations parfois difficiles avec les autorités locales, les conditions de vie sommaires, ainsi

que lřalimentation.

Comment gérez-vous le stress dans votre vie quotidienne?

Faire partie dřune équipe sur le terrain exige dřêtre prêt en tout temps à proposer des solutions.

Avez-vous déjà vécu et travaillé en groupe de 3 à 10 personnes durant de longues périodes?

Êtes-vous bon communicateur et bon animateur?

Pouvez-vous mettre de côté vos problèmes personnels afin de réaliser le travail demandé?

Quelles sont vos sources de stress et comment les gérez-vous au sein dřune équipe?

Famille et vie privée

Travailler à lřétranger signifie quitter vos proches pour un certain temps, habituellement entre 6 et 12

mois. Certains voient le travail humanitaire comme une échappatoire à leurs problèmes personnels. La

fuite nřest jamais une bonne idée.

Quelles seront les répercussions dřune absence pouvant aller jusquřà un an sur votre vie personnelle?

Songez aussi à lřeffet dřun milieu de travail difficile sur votre moral. Se voir affecter à une mission à

lřétranger est certes excitant, mais le retour peut sřavérer éprouvant pour vous et votre famille: le

travail sur le terrain laisse des traces.

Choc des cultures

Le travail dans une culture autre que la sienne entraîne parfois des malentendus. Les habitants du pays

dans lequel vous travaillerez risquent dřavoir une vision différente de la ponctualité au travail, de la

responsabilité et du respect de lřespace vital. Même si vous avez de lřexpérience dans les pays en

développement, cet atout ne vous assure pas une mission avec MSF. La tolérance envers des gens qui

pensent et agissent différemment de vous est primordiale.

Conclusion

Les problématiques abordées ont pour but de vous faire prendre conscience des exigences du travail à

lřétranger. Des milliers de personnes qui ont travaillé avec MSF au cours des années ont trouvé leur

expérience sur le terrain exigeante, mais valorisante. Pour plusieurs, la mission a marqué un tournant

dans leur vie. Travailler pour MSF relève dřun engagement plutôt que dřune simple aventure ou dřune

recherche dřemploi. En tant quřexpatrié, vous devenez solidaire des populations dans le besoin. Votre

présence en temps difficiles aux côtés de ces hommes, femmes et enfants leur envoie un message

important: «Vous nřêtes pas tombés dans lřoubli.»

- 75 -

Annexe III Code de conduite des ONG de People in Aid

1 Principe directeur : Les personnes sont essentielles pour la réalisation de notre mission Stratégie relative aux ressources humaines Les ressources humaines font partie intégrante de nos plans stratégiques et opérationnels.

Politiques générales et pratiques en matière de personnel Nos politiques générales en matière de ressources humaines visent à être efficaces, justes et transparentes.

La gestion des personnes La qualité du soutien, de la gestion et du leadership de notre personnel est essentielle à notre efficacité.

Consultation et communication Le dialogue avec notre personnel sur les questions susceptibles d’affecter son travail améliore la qualité et l’efficacité de nos politiques générales et de nos pratiques.

Recrutement et sélection Nos politiques générales et pratiques visent à attirer et à sélectionner une maind’œuvre diverse dotée des compétences et capacités nécessaires pour répondre à nos exigences.

Apprentissage, formation et développement L’apprentissage, la formation et le développement du personnel sont encouragés dans l’ensemble de l’organisation.

Santé, sûreté et sécurité La sécurité, la santé et la sûreté de notre personnel constituent une responsabilité primordiale pour notre organisation.

“Nous espérons que le principe directeur influencera toutes les déclarations de stratégies et de valeurs organisationnelles ou qu’il y figurera.”

“Le Code pose une norme globale de bonne pratique, sans établir des normes spécifiques que les ONG pourraient se voir incapables de satisfaire.” Code de bonne pratique dans la gestion et le soutien du personnel humanitaire (2003)

76

Annexe IV : CICR (Sigiriya Aebischer Perone)

- 77 -

Annexe V : Document original sur le turn-over

Turnover and retention: General summary prepared by Davd Loquercio for People in Aid ;

January 2006

Costing turnover

Looking more closely at the cost and impact of turnover, we need to include here both direct

and indirect costs. There are differences in what exactly should be included, but if we only

keep broad categories, we can mention (CIPD 2005b)

• Administration of the resignation

• Recruitment costs

• Selection costs

• Cost of covering during the period in which there is a vacancy

• Administration of the recruitment and selection process

• Induction training for the new employee

CIPD (2005b) says that "many of these costs consist of management or administrative staff

time (opportunity costs), but direct costs can also be substantial where advertisements,

agencies or assessment centres are used in the recruitment process." Direct costs are easier to

calculate, however, according to research, it only constitutes the tip of the iceberg. The most

important costs are related to the wider impact of turnover. This includes the cost of mistakes,

efficiency loss for new staff and departing ones, loss of knowledge and delays in ongoing

projects. For example, Gray et al. (1996:121) reported that for nurses in the UK, the average

- 78 -

efficiency loss over the first 6 months of employment was estimated to be 30%, climbing to

50% in some cases. Estimations of recruitment and turnover costs in the UK are provided

below (from CIPD 2005a).

Finally, even though measuring the costs of turnover can appear in some cases as subjective,

CIPD (2005b) reminds that "measurement of the costs to the employer as a result of turnover

is vital in building the business case for thorough and effective recruitment and retention

initiatives. These costings can be a powerful tool for winning line manager and Board-level

support for people management activities in these areas." In the humanitarian sector,

according to discussions held at EPN (2005), the impact of turnover on humanitarian

agencies' work output is such that the overall quality of the work delivered is compromised,

despite standards being set and a desire to raise them through accountability. Costs related to

turnover are not fundamentally different in the humanitarian sector. Here again, one can

mention direct costs such as:

• Costs and time related to the recruitment, selection and training of new staff

• Costs related to departure, such as medicals, visas, briefing, handover or flight tickets. These

costs are always incurred but will be higher when staff rotation is quick.

• Separation costs with debriefing and administrative procedures are also mentioned.

Indirect costs, which are also substantial according to Loquercio (2005) include:

• The impact of role overload and open vacancies on staff morale.

• Initial inefficiency, mistakes and short productive time incurred by frequent staff rotation

• Loss of knowledge, especially informally captured knowledge and the negative impact on

the continuity of programmes.

Loquercio does however make a distinction between emergencies and longer term contexts,

considering the impact of staff turnover in emergencies as less detrimental because

substitution approaches are more often used in such cases. In terms of strategic HR

management, EPN 2005 also noted that if because of high staff turnover, those recruited that

showed promise are lost to the system, a problem in terms of renewal of future senior

managers will emerge.

- 79 -

Annexe VI : Chiffres d’ODI sur la sécurité des expatriés

- 80 -

The incidents recorded in the AWSD were compiled from systematic monitoring of public

reports, augmented and verified by information provided directly from organisations and

field-level security consortia. They comprise major security incidents affecting the staff of aid

organisations working in humanitarian relief, defined as killings, kidnaps and attacks resulting

in serious injury. For each incident recorded from 1997 to 2008, the dataset includes the

number of aid workers affected (victims); their institutional affiliation (UN/Red

Cross/NGO/other [donor government, international financial institute]); their nationality

(national/international staff); the outcome of the incident (number of victims

killed/injured/kidnapped); the tactic or means of violence (ambush/armed incursion, etc.); and

the country or emergency in which the incident took place. Where possible, the motive for the

incident was also recorded as it related to the victimřs status as an aid worker (i.e., if the

attack was purely economic or opportunistic in nature, whether political motivations were a

factor, or if the victimřs status as an aid worker was incidental or irrelevant to the violence, as

in a crossfire or landmine incident). In addition, the study benefited from extensive research

to quantify the population of aid workers in the field over time. By calculating a reasonable

estimate of this humanitarian Řdenominatorř, the study has, for the first time, been able to

show the relative rates of aid worker attacks, and track changes year to year.

Number (n) for table in the second chapter

- 81 -

Annexe VII

Results MSF Isabelle Güss a écrit un mémoire: “Focus on staff care: Assessing safety and security

support of expatriate field staff in Switzerland based humanitarian organisations”

A thesis submitted to the Swiss Tropical and Public Health Institute, University of Basel, in

partial fulfilment of the tropEd Masters Programme in International Health (February 2012)

Les données de ce mémoire viennent de sa récente collecte dřinformation chez MSF.

Uniquement les données spécifiques à MSF suisse ont été utilisées dans ce mémoire. Les

graphiques ont été conceptualisés par lřauteur.

Characteristics of responding expatriates

N (%)

Age <30 years 30-44 years >45years

37 167 69

13.6% 61.2% 25.3%

Sex Male Female

130 142

47.8% 52.2%

Experience First mission > 1 mission

44 226

16.3% 83.7%

Background Medical Non Medical

151 117

56.3% 43.7%

Type of work Emergency Relief Long-term relief/Rehabilitation Development Mixed Other

107 68 18 70 11

39.1% 24.8% 6.6% 25.5% 4%

Position/Role Management Role Non Management Unknown

127 135 12

46.4% 49.3% 4.4%

Country of mission Africa America/Caribbean Asia/Pacific Middle East Russia/Eastern Europe

150 89 17 9 9

54.7% 32.5% 6.2% 3.3% 3.3%

Length of mission < 1 month 1-6months 6-12 months 13months-2years > 2 years > 3 years

18 158 62 22 8 5

6.6% 57.9% 22.7% 8.1% 2.9% 1.8%

1. Recruitment:

Informal chat 41 15%

Formal interview, but the only candidate

78 28.5%

Competitive interview 40 14.6%

- 82 -

Interview for a register 34 12.4%

General + specific interview 89 32.5%

Assessment day with several activities 93 33.9%

Psychological assessment 15 5.5%

None 3 1.1%

2. Capabilities correspond to mission:

Strongly agree 137 50.4%

Agree 121 44.5%

Disagree 13 4.8%

Strongly disagree 1 0.4%

3. Pre-departure training (multiple answer question)

Type of training n=274 (%) that received training

n=274 (%) that would have liked training

Security training 105 (38.3%) 35 (12.8%)

Group/team working 89 (32.5%) 27 (9.9%)

Handling the media 68 (24.8%) 30 (10.9%)

Radio training 46 (16.8%) 26 (9.5%)

Language training 34 (12.4%) 55 (20.1%)

First aid 19 (6.9%) 32 (11.7%)

Four wheel driving 15 (5.5%) 29 (10.6%)

Fire safety 10 (3.6%) 26 (9.5%)

No training 82 (29.9%)

4. Pre-departure briefing

Type of briefing n=274 (%) that received briefing

All (435) n=274 (%) that would have liked briefing

Programme information

238 (86.9%) 83.4% 13 (4.7%)

Management structures

166 (60.6%) 60.7% 32 (11.7%)

Communication procedures

125 (45.6%) 47.8% 36 (13.1%)

Country information 227 (83.2%) 79% 12 (4.4%)

Cultural information 125 (45.6%) 46.2% 47 (17.2%)

Security policy, guidelines

177 (64.6%) 63.9% 31 (11.3%)

Evacuation procedures

72 (26.3%) 24.8% 51 (18.6%)

Personal equipment list

67 (24.5%) 30.6% 46 (16.8%)

Stress management/ coping strategies

148 (54%) 51.3% 29 (10.6%)

- 83 -

Accommodation details

106 (38.7%) 43.7% 41 (15.0%)

No briefing 16 (5.8%) 6%

5. Quality of preparation

Own health Security Stress/coping

Very effectively 50 (18.2%) 38 (13.9%) 22 (8%)

Effectively 145 (52.9%) 154 (56.2%) 137 (50%)

Not effectively 30 (10.9%) 38 (13.9%) 51 (18.6%)

Not at all effectively

5 (1.8%) 5 (1.8%) 9 (3.3%)

6. Medical examination before departure

7. In-country briefing

Type of in-country briefing N= 274 (% )reporting

Country information 241 (88%)

Management systems 132 (48.2)

Introduction to staff 193 (70.4%)

Cultural/Social awareness 127 (46.4%)

Personal health 131 (47.8%)

Security situation 249 (90.9%)

Security incident/ evacuation procedures

124 (45.3%)

No in-country briefing 6 (2.2%)

Yes 218 80.1%

No 54 19.9%

1 2 3 4 5 6 7 8 9 10

6.80%

8.50%

16.90%

10.20%

13.60%

15.30%

13.60%

11.90%

1.70% 1.70%

Score of stress level

Stresslevel

- 84 -

9. Most stressful aspects (multiple answer question)

Stressful aspects n= 274 (%) reporting

Your workload 142 (51.8%)

Organisational issues 121 (44.2%)

Management structures 94 (34.3%)

Your expatriate colleagues 82 (29.9%)

Security 65 (23.7%)

Communications 61 (22.3%)

Lack of privacy 49 (17.9%)

Separation from family/friends 39 (14.2%)

Witnessing suffering 56 (20.4%)

Your health 20 (7.3%)

11. Strategies to reduce stress (multiple answer question)

Strategies to reduce stress n= 274 (%)

Talking about problems 148 (54%)

Contact to family/friends 125 (45.6%)

Socialising 127 (46.4%)

Exercise/sport 94 (34.3%)

Sleeping 75 (27.4%)

Being on your own 65 (23.7%)

Talking about unrelated subjects

59 (21.5%)

Relationships 53 (19.3%)

Working longer hours 56 (20.4%)

Smoking more than usual 64 (23.4%)

Meditation/yoga 41 (15%)

Drinking more than usual 55 (20.1%)

Drugs 3 (1.1%)

12. Working hours

<6h 1 0.4

6-8h 17 6.2%

8-10h 87 31.8%

10-12h 102 37.2%

12-14h 48 17.5%

>14h 19 6.9%

13. Time off (N=265):

Enforced for all 139 52.5%

Enforced for some 32 12.1%

Not enforced 73 27.5%

Not permitted 9 3.4%

No policy 12 4.5%

- 85 -

14. Medical support if sick during mission (N=271):

Yes, available 178 65.7%

Not available 4 1.5%

Not sick 89 32.8%

23. Debriefing:

With program staff 209 76.3%

With HR staff 224 81.8%

With security staff 47 17.2%

Psychological debriefing 74 27%

Presentation of final report

88 32.1%

None 13 4.7%

Still on mission 14 5.1%

24. Debriefing satisfaction (N=254)

Satisfied 203 80%

Not satisfied 51 20%

25. Return medical (N=262)

Yes 157 59.9%

No, but offered 61 23.3%

None offered 35 13.4%

26. Discussion of emotional impact (N=253)

Very helpful 56 22.1%

Helpful 82 32.4%

Not helpful 24 9.5%

Not at all helpful 7 2.8%

Not discussed 42 16.6%

No opportunity 42 16.6%

27. Who should be offered a psychological debriefing (N=266)

To all 128 48.1%

Only for those in difficult post

76 28.6%

On request 60 22.6%

Never 2 0.8%

28. Adjustment problems

N=274 %

Sleep disturbance 55 20.1

Disorientation 77 28.1

Lack of understand of friends 67 24.5%

Loneliness 39 14.2%

Lack of understanding of partner/family 28 10.2%

Lack of understanding, adaptation 20 7.3%

- 86 -

problems of work

Depression 15 5.5%

No job 59 21.5%

Nowhere to live 40 14.6%

Financial problems 41 15%

No adjustment problems 77 28.1%

30. Summary of experience

Personally Professionally

Very satisfying 107 (39.2%) 113 (41.4%)

Satisfying 142 (52%) 124 (45.4%)

Unsatisfying 20 (7.3%) 31 (11.4%)

Very unsatisfying 4 (1.5%) 5 (1.8%)

31. Staff care satisfaction

Health support Security Psychological support

Satisfied 243 (90%) 230 (84.2%) 167 (64.2%)

Not satisfied 27 (10%) 43 (15.8%) 93 (35.8%)

MSF Security

17. Security risks:

Active war zone 6.2%

Violence related to conflict

32.5%

Civil unrest 33.2%

Widespread Criminality 27.7%

Unsafe traffic conditions 36.5%

Kidnapping

None 20%

0%

10%

20%

30%

40%

50%

60%

7%

25%

47%

34%

55%

20%

Security risks in mission

- 87 -

18. Security guidelines:

Yes, enforced by the management 199 73.2%

Yes, not enforced 25 9.2%

Security guidelines inadequate 26 9.6%

Security guidelines not tested 14 5.1%

No security guidelines 5 1.8%

Security guidelines not required 3 1.1%

Total 272 100%

19. Anxiety about personal safety and security:

Most of the time 2 0.7%

Sometimes 52 19.1%

Rarely 119 43.8%

Never 99 36.4%

Total 272 100%

10. Most difficult event: severe traffic accidents, evacuation because of threat of hurricane, evacuation because of security situation, fear of attack of rebels, theft of relief goods by employees without reaction from the management, Cholera outbreak, kidnapping of colleagues, burnout, incorrect behaviour towards national staff, superior does not accept his responsibility, HQ does not accept facts about management errors, , mobbing by other expatriates, premature end of mission due to management problems, difficult cooperation with MOH, malaria drug side effect (depression). Poor quality of care provided, stalking, car ambush, mental collapse of expats 20. Critical events ever experienced in any mission:

Very frightening situation 103 37.6%

Verbal/Physical threats to life 87 31.8%

Armed attack/robbery 40 14.6%

Bombing of office/house 15 5.5%

Life threatening illness 52 19%

Road accident 41 15%

Other 43 16.9%

21. Psychological support after critical incident (N=261)

Yes, available 94 36%

No, not available 69 26.4%

No critical incident 98 37.5%

22. Insurance coverage

Health insurance 250 96.9%

Evacuation insurance 233 95.5%

War risk insurance 89 54.3%

No coverage 3 5.4%

Approach Based on similar strategies applied in previous research (Macnair, 1995;Simmonds et al., 1998; McCall and Salama, 1999; Moresky, et al., 2001;People in Aid, 2009) the

- 88 -

aim of this cross sectional survey is to gather qualitative and quantitative data on staff care practices and expatriates’perceptions of staff care. Therefore 20 Swiss or Swiss based humanitarianorganisations covering a broad spectrum of aid work were contacted by mail and invited to take part in the study. The literature review provided information about existing codes, guidelines and practice of staff care in humanitarian organisations. Based on this information an Internet based questionnaire was developed and distributed to former or current expatriate staff by their HR department. Structured interviews at headquarters with human resources representatives added qualitative data about the management point of view and were completed with a review of written material provided to field staff before leaving. The data collection took place from December 2010 to April 2011. Study population Twenty humanitarian organisations were selected including the UN, Red Cross/Red Crescent movement, Swiss branches of major international humanitarian organisations and members of the Medicus Mundi Switzerland network (list available in annex III). Eighteen agencies responded; after three attempts of telephone contact an organisation was considered as a nonresponder. Agencies not employing expatriates were excluded (3). While 9 agencies were not interested in the study, 6 organisations agreed to participate; two were faith-based agencies working mainly in development aid, the others respond primarily to emergencies. Two were small organisations with less than 20 expatriates; the largest employed more than 800 expatriates in 2010. Interviews were held at their Headquarters across Switzerland with staff from human resources (5), staff health (2) and security (1) departments. The field staff questionnaire was sent to 1422 expatriates with various backgrounds, some were members of an emergency roster, others were currently employed in the field or former employees on mission in 2010. Ethical considerations The study protocol was approved by the selection committee of the SwissTropical and Public Health institute.

- 89 -

Annexe VIII Psychological First Aid (PFA)

According to Sphere (2011) and IASC (2007), psychological first aid (PFA) describes a

humane, supportive response to a fellow human being who is suffering and who may need

support. PFA involves the following themes:

providing practical care and support, which does not intrude

assessing needs and concerns

helping people to address basic needs (for example, food and water, information)

listening to people, but not pressuring them to talk

comforting people and helping them to feel calm

helping people connect to information, services and social supports

protecting people from further harm.

It is also important to understand what PFA is not:

It is not something that only professionals can do

It is not professional counselling

It is not Ŗpsychological debriefingŗ1 in that PFA does not necessarily involve a

detailed discussion of the event that caused the distress

It is not asking someone to analyse what happened to them or to put time and events in

order

Although PFA involves being available to listen to peopleřs stories, it is not about

pressuring people to tell you their feelings and reactions to an event.

PFA is an alternative to Ŗpsychological debriefingŗ which has been found to be ineffective. In

contrast, PFA involves factors that seem to be most helpful to peopleřs long-term recovery

(according to various studies and the consensus of many crisis helpers2). These include:

feeling safe, connected to others, calm and hopeful

having access to social, physical and emotional support; and

feeling able to help themselves, as individuals and communities.

Who is PFA for?

PFA is for distressed people who have been recently exposed to a serious crisis event. You

can provide help to both children and adults. However, not everyone who experiences a crisis

- 90 -

event will need or want PFA. Do not force help on people who do not want it, but make

yourself easily available to those who may want support.

There may be situations when someone needs much more advanced support than PFA alone.

Know your limits and get help from others, such as medical personnel (if available), your

colleagues or other people in the area, local authorities, or community and religious leaders.

In the following box we have listed people who need more immediate advanced support.

People in these situations need medical or other help as a priority to save life.

People who need more immediate advanced support:

people with serious, life-threatening injuries who need emergency medical care

people who are so upset that they cannot care for themselves or their children

people who may hurt themselves

people who may hurt others

When is PFA provided?

Although people may need access to help and support for a long time after an event, PFA is

aimed at helping people who have been very recently affected by a crisis event. You can

provide PFA when you first have contact with very distressed people. This is usually during

or immediately after an event. However, it may sometimes be days or weeks after, depending

on how long the event lasted and how severe it was.

Where is PFA provided?

You can offer PFA wherever it is safe enough for you to do so. This is often in community

settings, such as at the scene of an accident, or places where distressed people are served, such

as health centres, shelters or camps, schools and distribution sites for food or other types of

help. Ideally, try to provide PFA where you can have some privacy to talk with the person

when appropriate. For people who have been exposed to certain types of crisis events, such as

sexual violence, privacy is essential for confidentiality and to respect the personřs dignity.

- 91 -

Annexe IX Questionnaire sur le PTSD

- 92 -

Le QSPT est un relevé de symptômes que la recherche a identifiés en relation avec le stress

post-traumatique. Il relève 17 symptômes associés au stress post-traumatique, appartenant à

trois dimensions :

Les situations sont constamment revécues

Lřévitement de ce qui rappelle les situations vécues

Lř « activation neuro-végétative » (trouble du sommeil, de lřhumeur et de la vigilance)

Les symptômes en question sont pris en compte sřils durent au moins un mois, et on vérifie

quřils sont toujours présents au moment du diagnostic ou sřils sont passés (dernières

questions).

Le sens de cet outil dans le cadre du diagnostic des violences relationnelles au travail dérive

de la similitude, relevée dans la littérature (1), entre les conséquences de violences graves et

durables au travail et les symptômes de stress post-traumatiques. La différence majeure réside

évidemment dans lřabsence du "critère A" du DSM-IV, relatif à lřévénement déclencheur

dans le diagnostic du stress post-traumatique. Par contre, les conséquences à long terme sur la

santé peuvent être similaires.

Lřadministration du questionnaire ne dispense pas du constat dřune souffrance et de

lřobservation dřune altération du fonctionnement personnel, social et/ou professionnel. Il est

indiqué dans les cas où une suspicion existe de conséquences graves et/ou durables suite aux

violences subies. Il permet alors une objectivation de ces conséquences en référence à une

échelle dřinterprétation des scores de réponse.

A qui s’adresse cet outil ?

Le QSPT sřadresse en priorité à ceux, parmi les professionnels et intervenants en matière de

souffrance et de violence au travail, qui ont pour mission la prise en charge de la victime

(conseillers en prévention, médecins du travail ou autres thérapeutes appelés à traiter ou

instruire les conséquences de violences au travail). Il est par nature destiné à être administré

individuellement, comme support au diagnostic des conséquences psychologiques.

BONAFONS, Claire. (2003) . Harcèlement moral au travail et état de stress post-traumatique,

Mémoire, Université Pierre et Marie Curie, Paris

DSM-IV, rubrique F43.1, "Etat de stress post-traumatique"

- 93 -

Glossaire

Organismes de soutiens et de recherches

Définition du centre d’apprentissage interculturel du Canada

Antares

La fondation Antares13, qui compte des bureaux aux Pays-Bas et en Australie, a également

contribué au discours sur les politiques et les pratiques des organismes de développement et

des ONG en matière de ressources humaines. La fondation a formé un partenariat avec les

American Centers for Disease Control and Prevention afin dřexaminer les problèmes associés

au stress et à la santé du personnel, et a produit des lignes directrices sur les « pratiques

exemplaires » à appliquer pour réduire le stress chez les travailleurs humanitaires. En outre, la

fondation élabore actuellement un modèle de mise en oeuvre de processus de gestion du stress

dans les ONG.

People In Aid

People In Aid (PIA)12est un réseau dřorganismes dřaide et de développement établi au

Royaume-Uni qui est financé par le Department for International Development (DFID).

Trente-neuf organisations provenant principalement dřEurope, dřAustralie et des États-Unis

sont actuellement membres du réseau qui continue de sřétendre. PIA a élaboré un « code de

pratique » qui fournit des informations utiles sur les politiques organisationnelles en matière

de ressources humaines. Le code contient de lřinformation sur les pratiques exemplaires liées

aux soins du personnel, notamment des éléments liés au processus de réintégration.

Headington Institute

Le Headington Institute est un organisme américain privé qui offre de lřinformation ainsi que

du soutien et des conseils dans le but de réduire le stress chez les travailleurs humanitaires. La

fondation privilégie une démarche personnelle plutôt quřorganisationnelle face à la résolution

des problèmes liés au stress. Le site Web de la fondation présente une série de ressources

dřautoanalyse portant sur le stress de la réintégration.

- 94 -

Le centre Humanitaire de Psychologie

Le CPH a construit, au fil des années et de sa collaboration avec de nombreuses organisations

humanitaires, un modèle générique de programme de gestion et de soutien du personnel de

terrain. Il peut être adapté à la mission spécifique et aux objectifs des organisations

humanitaires, dans la mesure où il est conçu comme une construction flexible de modules, à

différents moments du programme, organisés autour de trois temps : avant, pendant et après

les missions Ŕ ainsi quřun protocole de gestion de stress après un incident critique.

Le CHP offre aussi un soutient gratuit par e-mail aux expatriés, ou des conseils psychologique

plus en profondeurs mais se service est payant106

Gestion des ressources humaines

Définition du Centre d’apprentissage interculturel

Bilan personnel : Intervention visant à aider les travailleurs à analyser leur expérience vécue

sur le terrain. Peut être réalisé en groupes ou individuellement et peut ou non requérir la

présence dřun professionnel psychosocial. Il semblerait que ce bilan permette de diminuer le

risque de stress après une affectation

Évaluation des risques : Processus dřévaluation des risques en matière de sécurité liés aux

menaces internes et externes à lřégard dřun organisme, de son personnel ou de ses biens.

Évaluation du stress : Examen du niveau de stress dřun travailleur mesuré, en règle générale,

pendant un projet ou à la fin de celui ci.

Incident critique : En règle générale, incident qui représente une menace importante pour la

santé physique ou mentale du travailleur, notamment les catastrophes de grande envergure, les

guerres, les agressions sexuelles ou physiques, le décès ou les blessures dřun proche,

notamment un collègue. Le bilan relatif au stress attribuable à un incident critique doit être

fait sur le terrain, le plus tôt possible après lřincident.

Indicateur : Mesure permettant dřévaluer le rendement dřun organisme ou dřun individu;

peut être utilisé à lřintérieur dřun organisme et entre organismes

106

Définition du site internet humanitarian-psy.org lu le 12.06.2012

- 95 -

Rapatriement : Retour dřun travailleur dans son pays de résidence, souvent avant la fin

prévue de son mandat (rapatriement dřurgence).

Réintégration : Dans le cadre du présent document, renvoie au processus entrepris par un

travailleur humanitaire pour se réintégrer dans un environnement professionnel, social et

familial dans son pays de résidence au retour dřune affectation.

Résistance : Force psychologique dřun travailleur qui lui permet de supporter des expériences

stressantes, de se rétablir et dřen tirer des enseignements.

Retour : Période du retour au pays à la fin dřune affectation à lřétranger. Cette période peut

durer au moins six mois.

Stress/Syndrome du retour : Aussi connu sous le nom de choc culturel inversé. Réaction

psychologique au retour dřune affectation sur le terrain. Cette période de transition est parfois

accompagnée de difficultés psychosociales, notamment un sentiment dřisolement et de

dépression.

Suivi : Dans le cadre du présent document, il sřagit du suivi des facteurs de stress et des

réactions au stress des travailleurs pendant quřils sont sur le terrain et à leur retour.

Transfert : Processus de communication de renseignements sur un projet à un nouveau

membre du personnel ou à un supérieur à la fin dřune affectation. Également connu sous le

nom de bilan opérationnel. Peut comporter lřévaluation du programme et des discussions sur

lřenvironnement de travail. (2009, p. 16)

Humanitaire

Définition action humanitaire

Lřaction humanitaire est celle qui vise, sans aucune discrimination et avec des moyens

pacifiques, à préserver la vie dans le respect de la dignité, à restaurer lřhomme dans ses

capacités de choix ». (Rony Brauman MSF)

Acte humanitaire (non juridique)

- 96 -

Un acte humanitaire est un acte accompli par une personne pour protéger la vie ou la dignité

humaine de quelquřun quřelle ne connaît pas nécessairement ou quřelle ne serait pas encline à

aider ou à protéger en temps ordinaire ; un acte humanitaire implique souvent un risque

personnel ou un sacrifice. (Dans le cadre du programme : Explorons le Droit Humanitaire du

CICR)

Sphère

Le Projet Sphère est une initiative à but non lucratif rassemblant un vaste panorama d`agences

humanitaires autour d'un objectif commun : améliorer la qualité de l'aide humanitaire ainsi

que la redevabilité des acteurs humanitaires vis-à-vis de leurs mandants, de leurs bailleurs de

fonds et des populations sinistrées.

Le manuel Sphère, La Charte humanitaire et les standards minimums de l'intervention

humanitaire, constitue l'un des ensembles de principes communs et de standards universels

minimaux des domaines de l'intervention humanitaire destinés à sauver des vies jouissant de

la plus grande notoriété et de la meilleure reconnaissance à l'échelle internationale.

Le Projet Sphère, créé en 1997, n'est pas une organisation d'affiliés. Ce projet, dirigé par un

Conseil d'administration composé de représentants de réseaux mondiaux d'agences

humanitaires, incarne aujourd'hui une communauté énergique de praticiens de l'intervention

humanitaire.

Principes du CICR

Humanité

Né du souci de porter secours sans discrimination aux blessés des champs de bataille, le

Mouvement international de la Croix-Rouge et du Croissant-Rouge, sous son aspect

international et national, s'efforce de prévenir et d'alléger en toutes circonstances les

souffrances des hommes. Il tend à protéger la vie et la santé ainsi qu'à faire respecter la

personne humaine. Il favorise la compréhension mutuelle, l'amitié, la coopération et une paix

durable entre tous les peuples.

- 97 -

Impartialité

Il ne fait aucune distinction de nationalité, de race, de religion, de condition sociale et

d'appartenance politique. Il s'applique seulement à secourir les individus à la mesure de leur

souffrance et à subvenir par priorité aux détresses les plus urgentes.

Neutralité

Afin de garder la confiance de tous, le Mouvement s'abstient de prendre part aux hostilités et,

en tout temps, aux controverses d'ordre politique, racial, religieux et idéologique.

Indépendance

Le Mouvement est indépendant. Auxiliaires des pouvoirs publics dans leurs activités

humanitaires et soumises aux lois qui régissent leur pays respectif, les Sociétés nationales

doivent pourtant conserver une autonomie qui leur permette d'agir toujours selon les principes

du Mouvement.

Volontariat

Il est un mouvement de secours volontaire et désintéressé.

Principes de MSF

Le souci d'indépendance

L'indépendance de MSF se caractérise avant tout par une indépendance d'esprit, qui est une

condition de son indépendance d'analyse et d'action, c'est-à-dire du libre choix de ses

opérations, de leur durée et des moyens pour les mettre en œuvre.

Cette indépendance se manifeste à la fois au niveau de l'organisation et de chacun de ses

volontaires.

L'organisation MSF travaille sur la base d'une indépendance stricte à l'égard de toute structure

ou pouvoir (qu'ils soient d'ordre politique, religieux, économique ou autre). MSF ne peut en

aucun cas servir d'instrument de politique étrangère de quelque gouvernement que ce soit.

Ce souci d'indépendance étant également financier, MSF s'applique à rassembler un

maximum de ressources privées, à diversifier ses financeurs institutionnels, et parfois à

refuser certains financements qui porteraient atteinte à son indépendance.

- 98 -

De leur côté, les volontaires MSF sont tenus au devoir de réserve, et doivent éviter par leur

attitude personnelle de lier ou d'impliquer MSF (politiquement, institutionnellement ...).

L'impartialité

L'impartialité est le fondement de la mission de MSF; elle est indissociablement liée à son

indépendance d'action. L'impartialité est définie par les principes de non-discrimination et de

proportionnalité:

- non-discrimination en fonction de l'appartenance politique, la race, la religion ou le sexe,

ainsi que de tout autre critère analogue;

- proportionnalité de l'assistance par rapport à l'intensité des besoins. C'est vers les personnes

les plus gravement et les plus immédiatement en danger que l'action de MSF se dirige en

priorité.

Un esprit de neutralité

MSF ne prend pas part aux conflits armés, et dans ce sens adhère au principe de neutralité.

Cependant, la dénonciation est l'ultime moyen d'action pour aider les populations assistées par

MSF, dans certains cas extrêmes, quand les volontaires sont témoins de violations massives

des Droits de l'Homme. Dans ce cas, la seule assistance est rendue vaine du fait de la

persistance de ces violations. C'est pourquoi MSF sort de l'observation stricte du principe de

neutralité et exprime son témoignage, pour mobiliser les consciences en vue de faire cesser

ces exactions et d'améliorer le sort des populations auprès desquelles les volontaires d'MSF

sont présents.

Une organisation de volontaires

MSF est une organisation basée sur le volontariat. Cette notion implique principalement :

- un engagement individuel envers les personnes en situation précaire, et par conséquent une

responsabilité de chaque volontaire, sur qui repose la responsabilité de MSF;

- le désintéressement, qui atteste du caractère non-lucratif de l'engagement des volontaires.

Le volontariat est un facteur déterminant pour maintenir l'esprit de résistance aux

compromissions, à la routine, et à l'institutionnalisation.

- 99 -

Psychologie et concepts

Communauté internationale

Un ensemble très universel incluant en son sein les Etats, les organisations internationales à

vocation universelle, les particuliers et l'opinion publique internationale107

Defusing

Le terme anglo-saxon « defusing » se traduit généralement par « déchoquage »

ou « désamorçage ». Il sřagit dřentretiens collectifs et individuels dont le but est de constituer

un passage entre le chaos engendré par une situation dřurgence et le début dřune période

de reconstruction et de reprise des activités quotidiennes. Le defusing nřest pas

une psychothérapie mais une démarche préventive non experte de soutien basé sur

lřempathie.

Par Evelyne Josse, psychologue, psychothérapeute (hypnose, EMDR, EFT), consultante en

psychologie humanitaire, www.resilience-psy.com

Résilience

De nombreuses recherches sur la question ont abouti ces dernières années à définir le terme de

résilience. Elle est la capacité à surmonter les épreuves de la vie en sřappuyant sur ses

ressources personnelles. On a constaté que, face aux mêmes difficultés de lřexistence,

certaines personnes sřen sortaient mieux que dřautres. Ce sont elles que lřon appelle ŗ

personnalités résilientes ŗ (coping personalities). Et on a pu déterminer plusieurs des

caractéristiques générales de ces individus :

1. La compétence sociale :

Bonne capacité de communication, sens de lřhumour, comportement sociable,

empathie, capacité de construire des relations.

Capacité de relativiser les choses

2. Le sens de l’autonomie:

Capacité dřagir avec indépendance, fort sentiment dřidentité

Bonne capacité de contrôler son environnement à partir de la connaissance de ses

besoins

3. Les capacités de résoudre les problèmes :

107

J.SALMON, Dictionnaire de droit international public, Bruxelles, Bruylant, 2001, p.205.

- 100 -

Capacité dřabstraction, de réflexion. Pensée à la fois concrète et flexible

Capacité de trouver des solutions alternatives

4. Avoir des projets de vie et être déterminé à les atteindre :

Connaître ses attentes vis-à-vis dřautrui et bien les gérer

Capacité de se fixer un but

Capacité dřanticipation

Persévérance

Plein dřespoir

Sentiment de cohésion, que son projet de vie est cohérent. On sait où on va.

On nřa bien sûr pas toutes ces merveilleuses qualités! Mais ce tableau général peut nous

donner quelques idées sur les aspects de sa personnalité quřil faudrait développer AVANT

dřêtre pris au piège des difficultés de la vie.

Essayez de faire le test sur la résilience…

(CPH 2009)

Trouble de stress post-traumatique : Trouble psychologique caractérisé par une anxiété et

un dysfonctionnement accrus, généralement causés par lřexposition à des incidents

extrêmement stressants sur le plan physique ou émotif. (Centre d'apprentissage interculturel,

2009, p. 16)

Usure de compassion : Résultat dřune exposition extrême à des conflits et à des souffrances.

Forme dřépuisement professionnel ou de stress dont sont atteints certains travailleurs

humanitaires qui « absorbent » la souffrance de la population avec laquelle ils travaillent.

(2009, p. 16)

Neurofeedback

Le neurofeedback, ou encore appelé biofeedback EEG, est une technologie permettant au

cerveau de se réorganiser lui-même pour apprendre de nouveaux fonctionnements. En

décrivant lřaction du neurofeedback on parle donc plus souvent dřun apprentissage, plutôt que

dřune thérapie. Cřest pourquoi cette technique est souvent utilisée pour réapprendre les bons

réflexes dans la gestion du stress. En ce sens, le neurofeedback peut aider à améliorer les

conséquences du stress sur la santé : troubles du sommeil, de la digestion, migraines, anxiété,

accès fréquents de colère, attaques de panique, tinnitus, problèmes de concentration,

dřattention, trous de mémoire, etc… Le neurofeedbakc est aussi utilisé dans les cas plus

- 101 -

graves comme lřépilepsie, et lřautisme. Pour les victimes dřun traumatisme psychologique, il

nřest pas nécessaire de se remémorer ce traumatisme pour sřen libérer, contrairement à ce qui

se fait au cours de thérapies plus classiques. Le neurofeedback nřefface pas le souvenir

traumatique, mais il peut permettre dřen dissiper la charge émotionnelle. En ce sens, les

résultats sont similaires à la technique de lřEMDR. Le neurofeedback peut également

améliorer sa résilience et ses performances mentales et émotionnelles, car il améliore

lřattention, la capacité de concentration, la mémoire, le quotient intellectuel (les processus de

réflexion devenant plus fluides), la créativité, lřintuition, le Ŗpotentiel spirituelŗ,etc.

(theresilientmind.org)

EMDR

EMDR en anglais signifie: Eyes (yeux), Mouvement (M), Désensibilisation (D) et

Restructuration de lřinformation ®. En dřautres termes, cřest lřintégration par le cerveau

émotionnel de souvenirs traumatiques Ŕ au moyen de mouvements oculaires.

Lorsquřun évènement traumatique bouleverse notre vie (la mort dřun proche, un viol, un

accident), il ouvre une plaie dans notre cerveau émotionnel. Pourtant notre cerveau a une

capacité innée à Ŗdigérerŗ des évènements difficiles, comme la peau a la capacité à se

refermer après une blessure.

En pratique, on y parvient en stimulant les deux hémisphères du cerveau par des mouvements

oculaires volontaires et rapides de gauche à droite, et de droite à gauche.

En imitant les mouvements des yeux qui ont lieu spontanément pendant les rêves (durant le

sommeil dit paradoxal), la thérapie EMDR permet au cerveau de digérer les résidus de

traumatismes passés. Mais pas seulement. LřEMDR est aussi utilisé pour mieux digérer les

multiples « petits » traumatismes de la vie quotidienne, lesquels, sřils sřaccumulent, peuvent

dégénérer en dépression ou en burnout. (theresilientmind.org)

Accountability

Est un concept en matière d'éthique et de gouvernance avec plusieurs significations. Il est

souvent utilisé comme synonyme de concepts tels que s'expliquer, la culpabilité, la

responsabilité, et les autres conditions associées à l'attente de rendre des comptes.

Comme un aspect de la gouvernance, il a été au centre des discussions liées à des problèmes

dans le secteur public, à but non lucratif et privés.

Dans des rôles de leadership

Dans la responsabilité de la reconnaissance

- 102 -

Dans la prise de responsabilité pour ses actions, ses produits, ses décisions et sa politique, y

compris dans son administration, sa gouvernance et sa mise en œuvre.108

Dans lřhumanitaire, l'Institut de responsabilité sociale et éthique (ISEA) met l'accent sur la

qualité de ces processus. Il définit la responsabilité (accountability) comme ayant trois

composantes principales:

transparence concernant l'obligation de rendre des comptes à ceux ayant un intérêt

légitime

réactivité concernant la responsabilité de l'organisation, de ses actes et omissions, y

compris les processus de prise de décision et les résultats de ces décisions

respect concernant l'obligation de se conformer à des normes convenues en ce qui

concerne à la fois les politiques, les pratiques organisationnelles et les rapports sur les

politiques et performance.

Ainsi, le processus de reddition de comptes peut être considéré comme un cycle en quatre

étapes principales :

Accord de clarté des rôles et des responsabilités des organisations et

du personnel

Prendre des mesures de responsabilité

Rapporter sur la comptabilité et de ces actions

En se conformant aux normes convenues et aux points de vue et besoins des

différentes parties.

(Raynard, 2000, pp. 5-7)

108

http://en.wikipedia.org/wiki/Accountability