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10 10 ‘17 — 21 01 ‘18 Wayang kulit LES ARTS EN INDONESIE P1 LES ARTS EN INDONESIE Wayang (‘ombre’ en javanais) désigne le théâtre d’ombre en Indonésie. Il en existe plusieurs sortes, mais c’est le wayang kulit qui est le plus célèbre dans le monde entier. Il se joue derrière un écran illuminé, avec des poupées en peau de buffle actionnées par des tiges en corne, en bois ou en bambou. Une autre forme de wayang, moins connue, est le wayang beber. Au lieu de marionnettes, on utilise un long rouleau de papier (50 cm de haut sur 2-3 mètres de large). Il est déroulé lentement tandis qu’un acteur raconte l’histoire illustrée dessus. La télévision et le cinéma ont malheureusement été fatals pour la popularité de cet art ancien. Le wayang kulit a plus de mille ans d’âge, et il s’est à peine adapté aux temps modernes. On utilise aujourd’hui des lampes halogènes derrière l’écran plutôt que des lampes à huile et on voit parfois apparaître des marionnettes en forme de voitures, d’avions ou de bateaux (ce qui fait rire le public), mais sinon, la tradition est restée presque inchangée. Derrière l’écran, un seul marionnettiste : le « dalang ». Ce dalang est un artiste extraordinaire : il manipule à chaque représentation une centaine de poupées différentes il dit et chante les dialogues de tous les personnages, maîtrisant des dizaines de voix et accents différents ( une jeune servante, par exemple, ne parle pas comme un vieux paysan ou une reine arrogante ) il dirige l’orchestre et donne le rythme aux musiciens assis derrière lui plus compliqué encore : il doit tenir toute la nuit à raconter son histoire, en restant animé et passionnant, car on ne voudrait pas que le public s’endorme, non ? il doit avoir une résistance à toute épreuve, beaucoup de souffle et une grande vessie. Une représentation dure en moyenne neuf heures, sans la moindre pause, pas même pour faire pipi. Ceci ne vaut que pour le dalang, car le public, lui, peut manger, bavarder, somnoler ou se promener à sa guise lors de la représentation. © Steve Van Hoyweghen © Marc Bardyn © Matteo d’Antonio

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10 10 ‘17 — 21 01 ‘18Wayang

kulit

LES ARTS EN INDONESIE – P1

LES ARTS ENINDONESIE

Wayang (‘ombre’ en

javanais) désigne le théâtre d’ombre en Indonésie. Il en

existe plusieurs sortes, mais c’est le wayang kulit qui est le plus célèbre

dans le monde entier. Il se joue derrière un écran illuminé, avec des poupées en

peau de buffle actionnées par des tiges en corne, en bois ou en bambou. Une autre forme de

wayang, moins connue, est le wayang beber. Au lieu de marionnettes, on utilise un long rouleau de papier (50

cm de haut sur 2-3 mètres de large). Il est déroulé lentement tandis qu’un acteur raconte l’histoire illustrée dessus. La

télévision et le cinéma ont malheureusement été fatals pour la popularité de cet art ancien.

Le wayang kulit a plus de mille ans d’âge, et il

s’est à peine adapté aux temps modernes. On utilise

aujourd’hui des lampes halogènes derrière l’écran plutôt que des lampes

à huile et on voit parfois apparaître des marionnettes en forme de voitures, d’avions

ou de bateaux (ce qui fait rire le public), mais sinon, la tradition est restée presque inchangée.

Derrière l’écran, un seul marionnettiste : le « dalang ». Ce dalang est un artiste extraordinaire :

il manipule à chaque représentation une centaine de poupées différentes il dit et chante les dialogues de tous les personnages, maîtrisant des dizaines de voix et accents différents ( une jeune servante, par exemple, ne parle pas comme un vieux paysan ou une reine arrogante )il dirige l’orchestre et donne le rythme aux musiciens assis derrière lui plus compliqué encore  : il doit tenir toute la nuit à raconter son histoire, en restant animé et passionnant, car on ne voudrait pas que le public s’endorme, non ? il doit avoir une résistance à toute épreuve, beaucoup de souffle et une grande vessie. Une représentation dure en moyenne neuf heures, sans la moindre pause, pas même pour faire pipi. Ceci ne vaut que pour le dalang, car le public, lui, peut manger, bavarder, somnoler ou se promener à sa guise lors de la représentation.

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© Matteo d’Antonio

LES ARTS EN INDONESIE – P2

Un dalang accompli a des années de formation derrière lui : cinq années d’académie et plusieurs années de stage auprès d’un maître. Les meilleurs dalangs sont des superstars en Indonésie, et gagnent des fortunes.

Les instruments d’un orchestre ne peuvent être construits que par un seul

forgeron et l’ensemble est considéré comme un instrument unique et indivisible. Ainsi, il est

absolument hors de question d’emprunter le gong d’un gamelan pour le jouer dans un autre.

On fait appel au gamelan pour des grandes occasions, telles les mariages, les naissances, les

crémations, les purifications ou les circoncisions. Les indonésiens attribuent au gamelan une force surnaturelle,

car il était utilisé autrefois pour communiquer avec les forces surnaturelles. C’est pourquoi ils traitent les instruments avec

beaucoup de respect.

Le gamelan (‘gamel’ signifie

marteau) est un ensemble musical emblématique des îles

de Java, Sunda et Bali. Celui-ci est composé de gongs, métallophones,

tambours et autres percussions en tous genres, auxquels peuvent se rajouter des

flûtes, instruments à cordes ou même des voix.

Gamelan

Les compositeurs Claude Debussy et Erik Satie ont découvert le gamelan à l’Exposition universelle de Paris en 1889. Ils ont été tellement fascinés qu’ils s’en sont inspirés dans certaines de leurs compositions.Le gamelan a également influencé le jazz. On l’entend aussi parfois dans les bandes-son de films, comme dans le célèbre dessin animé japonais Akira.

© Matteo d’Antonio

© I Wayan Gde Yudane

© I Wayan Gde Yudane

© I Wayan Gde Yudane© I Wayan Gde Yudane

LES ARTS EN INDONESIE – P3

Également nommé la ‘danse des mille mains’, le saman est une danse traditionnelle

des Gayo de la province d’Aceh (Sumatra). Il est pratiqué en ligne et à genoux, traditionnellement

par des jeunes hommes portant des vêtements richement brodés de motifs qui symbolisent la

nature et les belles valeurs de la vie.

Les autres danseurs font les percussions : ils frappent dans les mains, sur leur poitrine et leurs cuisses, ils claquent des doigts et chantent à tue-tête, tout ça pour célébrer la vie et la nature.

Cette tradition a été inscrite en 2011 par l’UNESCO sur la liste du patrimoine immatériel nécessitant une sauvegarde urgente.

Le chef de l’équipe se place au milieu de la rangée et chante des poèmes de la langue gayo. Ceux-ci sont pleins de bons conseils, un panaché de religion, de romantisme et

d’humour.

Saman

Cette danse rituelle, qui s’accompagne de chants et d’incantations, met les danseurs

en transe. Un esprit prend alors possession du corps des danseurs et les manipule comme des

marionnettes dans une chorégraphie très stylisée et synchronisée, presque rituelle.

Le groupe des danseurs est composé d’hommes, portant des pagnes à carreaux noirs et blancs. Ils sont

assis en cercle autour du personnage central et balancent les bras et les mains, en chantant de manière ininterrompue,

à des tempos divers, un ‘chak-a-chak-a-chak’ très caractéristique.

Bon à savoir : Steven Spielberg s’est inspiré du kecak dans sa célèbre scène de sacrifice humain dans

‘Indiana Jones et le temple maudit’.

© Cewek Tari Cinta Budaya via http://sumutpos.co/

© YouTube: KFT (indonesia) performing in Jaca, España

© Gerry Smet

© Saman Dance as the opening act of the cultural night - The blue bottle

Le kecak, également

appelé ‘la danse des singes’, met en scène le dieu-singe

du Ramayana, Hanuman, et des danseurs qui représentent son armée

de singes.

Kecak

LES ARTS EN INDONESIE – P4

Le baris est une série de danses ‘guerrières’ traditionnelles de Bali.

Il illustre les sentiments d’un jeune guerrier sur le point de partir au

combat, de sa peur initiale au triomphe de la victoire. Baris signifie littéralement

‘ligne’, et renvoie aux rangées de soldats ayant servi sous les Rajas.

Comme son nom l’indique, Wayang Hip Hop est la combinaison improbable

de deux cultures qu’apparemment tout sépare  : l’ancienne tradition du

wayang kulit (théâtre d’ombre) javanais et le hip hop des jeunes indonésiens

urbains et globalisés. Wayang Hip Hop adapte les

anciennes histoires et sagesses javanaises pour illustrer les problèmes dans la société actuelle. Ainsi, vêtus de costumes mi-traditionnels, mi-grunges, les chanteurs critiquent en rappant par exemple les habitudes toxicomanes de leurs marionnettes. Brisant les règles millénaires du wayang kulit, Wayang Hip Hop a néanmoins réussi à attiser l’intérêt de toute une génération de jeunes pour cette tradition.

Que se passe-t-il quand un collectif metalleux se réveille

un matin avec une furieuse envie de s’attaquer à des instruments

traditionnels indonésiens ? C’est ce qui arriva avec les groupes Bandoon Sindekeit

et Ujunberung Rebels. À la suite d’une soirée probablement bien arrosée, ils sont devenus

obsédés par le karinding, une sorte de guimbarde en bambou. Quelque mois plus tard, le groupe Karinding

Attack était né ! Les musiciens ont appris à maîtriser toutes sortes d’instruments traditionnels en bambou ( des flûtes, des

xylophones, des percussions bizarroïdes… ) et y ont rajouté des éléments de metal et de punk.

KarindingAttack

Wayanghip hop

Baris

© I Wayan Gde Yudane

© Karinding Attack

© Kania R.

LES ARTS EN INDONESIE – P5

Les femmes ne sont pas absentes dans le paysage hip-hop. La rappeuse Yacko, notamment, fait depuis quelques années la pluie et le beau temps en Indonésie, même si – contrairement à Wayang Hip Hop – elle ne fait aucune référence aux traditions culturelles de son pays. Elle rappe uniquement en anglais. Son cheval de bataille est l’égalité hommes – femmes, critiquant entre autres la manière avec laquelle les hommes obligent les musulmanes indonésiennes à se vêtir d’une certaine manière.

Cracher les rimes les plus

rudes en se baladant vêtu d’un joli bermuda, d’un polo rose

boutonné jusqu’au cou et d’une pochette assortie, et quand même

compter Ghostface Killah (Wu-Tang Clan) parmi ses plus grand fans… il faut le faire !

Rich Chigga, 18 ans à peine, y est pourtant arrivé. Ce rappeur-comédien a commencé sa carrière

sur YouTube, à 11 ans, où il poste diverses courtes (et sombres) vidéos depuis 2010.

© Yacko on http://5beat.com

© Rich Chigga from his video clip «Who that be»

Effrontées et bruyantes, les filles cassaient la baraque et se déchainaient sur

scène. Ceci n’était pas évident en Indonésie à cette époque-là, car toutes influences

occidentales – et particulièrement la musique, considérée comme « une forme de maladie mentale »

– étaient formellement interdites par le président Sukarno.

Écouter les Beatles était un crime passible d’emprisonnement. Dara Puspita a d’ailleurs eu beaucoup de

problèmes avec la police, et a dû fuir un jour vers la Thaïlande.

Lors des années 60, le

groupe Dara Puspita ( The Flower Girls ) prit d’assaut

l’Indonésie avec un garage rock et une girl power décomplexés.

TheFlower Girls

© Untuk Film ini, Saya Hanya

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