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Jean Prir s animaux sacrés dans l'antiquité Art et religion du monde méditerranéen fouest� rance Extrait de la publication

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Jean Prieur

Les animaux sacrés

dans l'antiquité

Art et religion du monde méditerranéen

fouest� rance..,

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L'IJISTOIRE AUX ÉDITIONS OUEST-FRANCE

Dans la collection « De mémoire d'homme: l'histoire» (dirigée par Lucien Bély) :

A la rencontre des Etrusques (J.-R. Jannot)

Archives du corps (J. Léonard)

Bagnards à Brest (P. Henwood)

La Cour de Henri III (J. Boucher)

Les Druides (C.-J. Guyonvarc'h et F. Le Roux)

Le Fer contre la forêt (F. Domie)

La Grande époque de la marine à voile (M. Aeerra, J. Meyer)

La Mort dans l'antiquité romaine (J. Prieur)

Pêcheurs d'Islande (J .-L. Avril et M. Quéméré)

Les Petites écoles sous l'Ancien Régime (B. Grosperrin)

La Rue au Moyen Age (J .-P. Leguay)

Saint Bruno, le premier chartreux (B. Bligny)

Saint Jacques à Compostelle (J. Chocheyras)

Les Sépulcres flottants (P. Masson)

Dans la collection « L'histoire et nous» (dirigée par Lucien Bély) :

Archives secrètes de Bretagne 1940-1944 (H. Fréville)

L'A venir se présente bien (A.-D. Kergal)

5 000 ans d'histoire du livre (R. Salles)

Les Cohortes du Christ (P .-R. Gaussin)

Faites entrer le témoin suivant (P .-H. Teitgen)

Moreau, rival républicain de Bonaparte (P. Savinel)

Rennes pendant le procès Dreyfus (C. Cosnier)

Suzanne Bidault: Souvenirs (S. Bidault)

Histoire de la Bretagne en 12 volumes (dirigée par André ChédeviIle) :

Préhistoire de la Bretagne (P.-R. Giot, J. L'Helgouach, J.-L. Monnier)

Protohistoire de la Bretagne (P .-R. Giot, J. Briard, L. Pape)

La Bretagne des saints et des rois (A. ChédeviIle, H. Guillotel)

La Bretagne Féodale (A. Chédeville, N.-Y. Tonnerre)

Fastes et malheurs de la Bretagne ducale 1213-1532 (J.-P. Leguay, H. Martin)

Histoire de la Savoie en 4 volumes (dirigée par Jean-Pierre Leguay) :

La Savoie des origines à l'an mil (J. Prieur, A. Bocquet, M. Colardelle, J.-P. Leguay, J. Loup, J. Fontanel)

.

La Savoie de l'an mil à la Réforme (R. Brondy, B. Demotz, J .-P. Leguay)

La Savoie de la Réforme à la Révolution (R. Devos, B. Grosperrin)

La Savoie de la Révolution à nos jours (A. Palluel-Guillard, C. Sorrel, G. Ratti, A. Fleury, J. Loup)

© 1 988 - OUEST-FRANCE

ISBN : 978-2-73-735196-9

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DU MÊME AUTEUR :

La province romaine des Alpes Cottiennes, Villeurbanne , 1 969.

La Savoie antique: recueil de documents, Grenoble, 1 977 .

Aix-les-Bains dans l 'antiquité. Guide du musée archéologique, Aix-les-Bains, 1 978.

L 'âge du Fer, « Catalogue des collections des musées de Chambéry » , Chambéry, 1 98 1 .

L 'époque romaine, « Catalogue des collections des musées de Chambéry » , Chambéy, 1 984 .

« Les arcs monumentaux dans les Alpes Occidentales : Aoste, Suse, Aix-Ies­Bains » , étude publiée dans A ufstieg und Niedergang der Rdmischen Welt, I I , 1 2 , Berlin ( 1 982) .

La mort dans l 'antiquité romaine, Ouest-France, 1 986.

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INTRODUCTION

PRÉSENCE DES ANIMAUX

DANS TOUTES LES RELIGIONS ANTIQUES

De grandes civilisations ont leur berceau dans les pays méditerranéens: Egypte, Mésopotamie, Palestine, Grèce, Rome. Entre les plus ancien­nes et les plus récentes s 'établissent des rapports créant un amalgame compliqué de croyances et de rites, avec des influences qui se propagent de l 'Orient vers la Grèce, puis vers Rome et l 'Occident. A notre épo­que, les mythes et les images de ces antiques religions semblent parfois pleins de contradictions et leur interprétation est délicate: on se trompe peut-être et on altère l 'étude quand on transporte à ces lointaines pério­des des questions qui n 'ont de sens que pour des esprits imprégnés de notre civilisation contemporaine. A insi la présence et l 'importance de l 'animal dans toutes les religions du monde méditerranéen ancien susci­tent des explications qui ne sont souvent que des hypothèses.

Les deux pays où les animaux se mêlent le plus aux dieux sont l 'Egypte et la Gaule.

En Egypte, à l 'origine chaque canton ou bourgade avait son dieu; puis, avec l 'unification du pays, les dieux des pharaons deviennent préé­minents et sont finalement adorés par tous les Egyptiens; quand la capi­tale se déplace, ce sont les dieux de la nouvelle capitale qui l 'empor­tent : Ptah, dieu de Memphis, fut en grand honneur sous l 'Ancien Empire, alors qu 'Amon-Rê, dieu de Thèbes, triomphe au Nouvel Empire.

Mais les dieux officiels reconnus par le pharaon n 'évincent pas les dieux locaux. Dans le Delta, à Saïs on vénère Neith, déesse de guerriers et de chasseurs; à Bubastis, on honore Bastet, représentée en chatte; plus à l 'Est trône Seth, appelé à un brillant avenir, puisqu 'il sera adopté par les Hyksos arrivant en Egypte, avant d'être particulièrement vénéré par Ramsès II, lorsque ce souverain fixera sa capitale dans le Delta orien­tal au treizième siècle avant J.-c.; le même dieu Seth se retrouve encore tardivement dans le mythe d 'Osiris: il symbolise alors le mal à l 'épo­que où la religion égyptienne subit l 'influence du dualisme iranien .

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Héliopolis est le siège des divinités solaires: A toum, lion ou sphinx; Rê, représenté en disque solaire au-dessus de la tête du faucon; Maat, fille de Rê, qui porte un diadème à plumes d 'autruche; Khépri, le sca­rabée, qui pousse le disque solaire. L 'oasis du Fayoum vénère Sobek, à tête de crocodile. En remontant le Nil, on trouve, à Hermopolis, Thot, ibis ou babouin, protecteur des scribes. Le sanctuaire d 'A bydos abrite une célèbre triade: Osiris, Isis, Horus. Denderah est le siège de Hathor, déesse céleste, qui porte le disque solaire entre ses cornes bovines. Thè­bes est le siège d 'une nouvelle triade: A mon à tête de bélier, son épouse Mout à forme de vautour et leur fils Khonsou . Edfou vénère Horus à tête defaucon; Cyn opolis, A nubis à tête de chacal; Assouan, Khnoum à tête de bélier . . . Cette liste, fragmentaire, nous donne une idée de la multiplicité des dieux locaux dans l 'antiquité: les dieux sont nombreux en Egypte, comme à Rome où, à la fin de la République, Varron en dénombrait trente m ille !

La plupart de ces dieux égyptiens sont en relation étroite avec les ani­maux. Lorsque le pharaon est représenté devant le dieu, celui-ci est figuré soit par un homme, soit par un animal, soit par un homme à tête d 'ani­mal. Pour l 'époque tardive, on a retrouvé par milliers les corps embau­més des diverses espèces d'animaux sacrés: sur le site de Tounah el­Djebel (près d 'Hermopolis), on peut visiter trois nécropoles souterrai­nes destinées aux animaux sacrés, surtout aux ibis et aux babouins, les animaux de Thot, le dieu d'Hermopolis. Dans la religion égyptienne, l 'animal occupe une place exceptionnelle: ignorants des dogmes et des théologies élaborés par les prêtres, les hommes du peuple s 'attachent aux animaux, considérés comme les substituts ou les compagnons des dieux.

Les Celtes fixés en Gaule au second âge du Fer vénèrent des dieux individualisés vivant en société: le panthéon gaulois est proche du pan­théon romain, si l 'on en croit César (Guerre des Gaules , VI, 16-17). Mais, à la différence de Rome, la Gaule donne une place importante à l 'ani­mal dans le mythe et dans l 'art religieux. Les dieux gaulois sont presque toujours associés aux animaux: le dieu de Lezoux porte des cornes de taureau, le dieu de Bouray a des jambes qui se terminent en sabot de cervidé, Cernunnos est un dieu aux bois de cerf, Epona est inséparable de son cheval, le dieu d'Euffigneix est orné en relief d'un sanglier . . . A vec les Egyptiens, les Celtes sont les seuls peuples anciens qui aient fait aux bêtes une telle place dans leur dévotion.

Dans les religions de l'Asie Antérieure, l 'animal est présent partout, mais il ne sert le plus souvent qu 'à représenter les seules divinités infé­rieures et à fournir les victimes du sacrifice.

En Mésopotamie, chaque royaume, chaque ville a son dieu. A u temps d 'Hammourabi (1792-1750), les trois grands dieux devenus universels (A nou, dieu du ciel; Enlil, dieu de la terre; Ea, dieu des eaux) sont détrô­nés par le dieu de Babylone, Mardouk. A côté des dieux existe unefoule

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de Génies, le plus souvent méchants,' ceux-ci sont représentés par des animaux ou par des hybrides. Les prêtres sont des devins qui interprè­tent les songes et qui observent le foie des victimes animales offertes aux dieux.

Comme dans les pays voisins, à l 'époque la plus ancienne chaque vil­lage d'A natolie (pays des Hittites) possédait ses divinités tutélaires et ses lieux de culte; lors de la réunion de plusieurs communautés, les dieux sont conservés et il en résulte un panthéon d 'une grande complexité. Les principales divinités universelles sont, avec la Déesse-Mère, la déesse solaire d 'A rinna, le dieu de l 'orage ou des éléments Tarou, le dieu de la végétation Télépinou et une douzaine d 'autres divinités de moindre importance. A vec l'arrivée des Indo-Européens, la déesse-mère de la Terre est quelque temps supplantée par un dieu PÎrva, étroitement lié au che­val. Dans le culte, l 'objet essentiel est la statue, représentant souvent un animal: à l 'intérieur des sanctuaires d 'A lacahoyük (ou Euyuk) et de Horoztepe, de lourdes figurines de cerfs, de taureaux et de lions, fixées sur des enseignes de bronze en forme de disque, sont des objets d 'ado­ration rituelle; mais, vers la fin de l 'Empire, les représen tations an­thropomorphes l 'emportent. Les fêtes consistent principalement à trans­porter l 'image du dieu jusqu 'à une stèle, devant laquelle on pratique un sacrifice, suivi d 'un repas en commun.

Dans la religion phénicienne et dans la religion juive, l 'animal appa­raît surtout comme victime sacrificatoire; les textes et l 'iconographie l 'utilisent seulement comme symbole. En Phénicie et dans les colonies phéniciennes, les deux plus grands dieux sont El et Baal; mais chaque ville a son « maître» " Melqart ou Moloch à Tyr, Tanit à Carthage . . . En Israël, tout l 'effort des gou vernants, de Moïse aux rois et aux pro­phètes, tend à amener et à maintenir le peuple dans le culte du seul vrai dieu, Yahweh; les autres dieux ne sont que des morceaux de bois ou de pierre. Chez ces deux peuples, les principales cérémonies du culte sont les sacrifices, avec immolation d 'animaux ou offrande des fruits de la terre.

Dans le monde gréco-romain, l 'animal n 'est pas assimilé aux dieux à l 'époque classique, mais il leur est souvent associé comme attribut. En Crète, aux temps les plus anciens les dieux étaient représentés sous forme animale,' il en restera la célèbre légende du Minotaure, dieu figuré par un homme à tête de taureau. Plus tard, en Grèce comme à Rome, seules les puissances inférieures appartiennent encore au monde animal ou aux formes hybrides; avec les grands dieux, en tête desquels vient Zeus ou Jupiter, les animaux n 'interviennent qu 'occasionnellement, réduits au rôle de serviteurs ou d 'attributs. Mais les sacrifices sanglants se retrouvent à toutes les époques et permettent l 'observation des entrailles en vue de connaître la volonté des dieux.

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A des degrés divers, l 'animal intervient dans toutes les religions anti­ques du monde méditerranéen: assimilé aux dieux, associé aux dieux, soumis aux dieux, sacrifié aux dieux. Une interprétation simple a été proposée: chaque peuple à l 'état primitif a adoré les animaux (toté­misme), puis ce même peuple a assimilé les dieux aux animaux (zoo­morphisme), enfin il a représenté les dieux sous forme humaine en com­pagnie des animaux (anthropomorphisme), avec parfois des réminiscences des états antérieurs (hybrides, dieux humains avec tête ou pieds d 'ani­mal). L 'évolution ne se serait pas achevée dans des civilisations plus conservatrices: c 'est le cas, notamment, de l 'Egypte.

La réalité semble plus complexe. A vant l 'irruption de l 'hellénisme dans le monde méditerranéen, l 'homme ne se considère pas encore comme la mesure de toutes choses. Dans les plus anciennes civilisations, on croit à l 'unité fondamentale de la vie, qui se manifeste de diverses façons; l 'animal est en tout semblable à l 'homme, il a une vie sociale, une orga­nisation en clans avec ses chefs, par ses dons il est parfois supérieur à l 'homme. Bêtes et h ommes ont la même aptitude à représenter les dieux: puisque les dieux ne peuvent jamais être appréhendés totalement, quel­que forme qu 'ils prennent, il leur est loisible de se manifester sous les aspects les ph,s divers. Euripide conclut ses tragédies (Les Bacchantes , Alceste , Andromaque) par cette simple évidence: «Multiples sont les formes que revêtent les puissances divines. »

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CHAPITRE PREMIER

LES POUVOIRS MYSTÉRIEUX DE L'ANIMAL

Le grand nombre d ' animaux représentés par les chasseurs de la Pré­histoire témoigne de l ' existence d ' un véritable culte : c ' est à eux que s 'opposent les hommes pour obtenir nourriture et vêtement , ce sont eux qui incarnent les forces vives de la nature.

Au Paléolithique supérieur , il Y a quinze mille ans , apparaissent les premières œuvres d ' art dans les peintures des cavernes , dont les sites les plus célèbres sont Altamira et Lascaux , dans la zone franco­cantabrique . Plus tard , des figurations semblables se t rouvent dans les gravures rupestres de l 'Europe Occidentale, du Sahara et de la vallée du Nil . Peintures et gravures représentent des animaux , des êtres humains et des signes ; mais l ' animal est de loin le thème préféré, il représente environ 80 % des sujets dans l 'art pariétal et dans l 'art mobilier des grottes franco-cantabriques : le cheval et le bison viennent en tête avec 401170 du total , suivis par le bouquetin, le renne , l 'aurochs , le cerf, l ' ours , le poisson, le félin , l ' oiseau . . .

Des études récentes ont démontré le caractère de sanctuaire des grot­tes peintes ou gravées : loin des entrées et de la lumière , les salies ne servaient pas d 'habitat , mais étaient uti lisées pour les cérémonies , et le décor ne pouvait avoir un rôle purement ornemental . Traditionnelle­ment , on interprète ces représentations animales dans un sens magique : magie de la chasse, avec les figures d 'animaux blessés ; magie de la fécon­dité , avec les animaux gravides . Les blessures sont l ' argument maj eu r de l a magie d 'envoûtement : les hommes du Paléolithique auraient blessé l ' image des animaux pour s 'assurer le succès de la chasse. Mais les ani­maux blessés ne représentent que 41170 des figures animales .

Pour une interprétation plus sûre , il faut renoncer à considérer telle ou teile figure en particulier , hors de l ' agencement auquel elle appar­tient . Les animaux associés dans les grottes de Lascaux ne vivent pas ensemble dans la nature : dans une salle, les groupes vaches-taureaux sont encadrés par des cerfs et des bouquetins ; dans une autre salle , les groupes bisons-chevaux sont encadrés par des fél ins , des cerfs , un rhi­nocéros et de nombreux signes abstraits . Si les animaux sont représen-

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Orphée charmant les animaux. Mosaique romaine ; m usée de Palerme. Le poète légendaire de la Grèce est assis sous un arbre ; des animaux domestiques ou sau vages, des oiseaux de toute espèce l 'entourent, charmés par les accents magiques que le musicien tire de sa lyre (Cliché A linari-Giraudon).

tés avec leurs formes exactes , leur att i tude n 'est pas réaliste . Les bêtes les plus utiles n 'occupent pas une place prééminente : le renne, qui cons­titue 95 1170 des restes osseux dans certains sites magdaléniens , n 'occupe que 5 % des figurations animales . I l y a donc un décalage entre les espè­ces figurées et le gibier chassé . Le thème animalier , accompagné de signes ,

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correspond probablement au thème b inaire de la représentation des symboles masculin et féminin ; il est à peu près sûr que signes féminins et blessures étaient des symboles interchangeables . Aux figures mascu­l ines et féminines (souvent représentées à travers des signes) s ' ajoute un couple statique constitué par le b ison et le cheval ; un troisième animal intervient souvent , représenté par le mammouth , le cerf ou le bouquetin .

Nous sommes en présence d ' un système figurati f cohérent et r iche, symbolisant une certaine image de l ' ordre universel . Ces mythes restent pour nous un mystère ; i l semble bien que ces animaux peints ou gravés par les hommes préhistoriques ne représentent pas des figures de scènes magiques : ils évoquent des puissances supérieures .

Cet aspect mystérieux et quasi divin de l 'animal se retrouve plus tard dans les croyances populaires , comme nous le montrent de nombreux exemples de l ' histoire religieuse , depuis la Bible où les l ions se couchent auprès du prophète j usqu 'aux légendes romaines représentant les fau­ves qu i entourent Orphée, ou les chiens gardiens du temple capitolin qui renoncent à attaquer Scipion faisant secrètement une visite à son père Jupiter , ou encore les poissons venant sans crainte effleurer la grande main de Domitien . Selon la même tradition , au Moyen-Age les oiseaux deviennent les amis attentifs de saint François d 'Assise . Dans tous ces cas , l ' attitude de l ' animal est respectueuse et amicale, car i l est part icu­lièrement apte à percevoir la force divine mystérieuse qui se cache sous les traits humains d ' un personnage surnaturel .

1. DES ETRES PRESTIGIEUX

Les auteurs anciens ont été séduits par le cas de certains animaux qui surclassent l ' homme grâce à leurs particularités physiques ou grâce à des vertus qui leur sont propres . Les qualités de l ' animal ont souvent été exagérées ou exaltées ; à la limite, on considère qu ' i l détient une par­celle du divin . Après avoir longuement analysé l ' instinct des abeilles qui les guide dans leur travail et leur vie communautaire, Virgile (Géorgi­ques, I V , 2 1 9-220) rappelle que « d ' après ces signes et en s 'attachant à ces exemples , on a dit que les abeilles avaient en elles une parcelle de l ' intelligence divine et des émanations de l 'empyrée (demeure des dieux) ». Dans leurs divers domaines (sur terre , sous terre , dans les airs ou dans les eaux) , de nombreux animaux apparaissent comme des êtres supé­rieurs à l ' homme .

Le taureau impressionne par sa corpulence et par son impétuosité ; dans l ' art , les représentations sont caractéristiques : la patte avant sou­levée pour frapper le sol , la tête fièrement dressée , la queue relevée en cercle et balayant les reins . Selon Pl ine (Histoire Naturelle, VI I I , 70) , « la noblesse du taureau se voit à son aspect : le front ramassé, les oreil­les velues , les cornes en bataille et réclamant le combat » . La puissance de l ' animal se manifeste dans les cornes , armes terribles quand il fonce

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tête baissée . Comme le taureau féconde les troupeaux , la corne devient un symbole de force et de fécondité (corne d 'abondance) .

Le plus puissant des quadrupèdes domestiques impressionne surtout quand on le voit à l ' état sauvage . Mais l ' animal décrit de manière sai­sissante par Diodore de Sicile (Bibliothèque Historique, III, 34) ressemble plus à l 'hippopotame qu' au taureau sauvage : « Dans l 'Ethiopie , le tau-

Statère et didrachmes de Lucaniefrappés à Thurium vers 400 avant J. -c. A rgen t ; pOids = environ 7,70 grammes. L 'a vers représente A théna ; le revers, un taureau marchant ou fonçant à droite.

reau carnivore est le plus sauvage des anim aux ; il est entièrement indomp­table . Il est bien plus fort que le taureau domestique ; il ne cède point en vitesse au cheval et i l a la gueule fendue j usqu 'aux yeux . Son poil est tout roux , ses yeux sont plus glauques que ceux du l ion , et ils bril­lent pendant la nuit . Ses cornes sont d 'une nature particulière : il les remue d'ordinaire comme les oreilles ; mais quand i l se bat , i l les tient droites et immobiles .

Le cerf, hôte des forêts le plus noble par sa taille et son agilité , était la principale nourriture de l ' homme au Néolithique ; i l est l ' animal sacré des civil isat ions arctiques . On a comparé la civilisation arctique du cerf à la civil isat ion méditerranéenne du taureau : dans les légendes irlan­daises , les dieux se métamorphosent en cerfs ; on le raconte même dans la vie de saint Patrick . La réputation du cerf dépasse le monde celtique et Pline (Histoire Naturelle, VIII, 50) dans une longue description de cet animal , note surtout sa vitalité et sa longévité : « Les mâles ont des cornes , et seuls de tous les animaux , i l s les perdent tous les ans à une époque fixe du printemps . . . On dit qu ' on ne trouve j amais leur corne droite , comm e si elle avait quelque vertu médicale ; fait d 'autant plus étonnant , avouons-le , que , même dans les parcs , ils sont sujets à la mue annuelle : on pense qu ' i l s l ' enfouissent . . . La longévité des cerfs est un fait reconnu ; on en a repris après cent ans , qu i portaient encore des colliers d 'or qu 'Alexandre le Grand leur avait fait mettre, et qui étaient enfouis dans les plis de la peau , tant les animaux avaient engraissé . Cet

Cerf. Bronze ; haut. totale 35 cm ; pro vient du trésor gal/o-romain de Neuvy-en-Sullias (Loiret). Musée d 'Orléans. L 'animal est représenté debout, en position d 'arrêt; sa ramure est amovible: simple astuce de fabrication ou évocation de la chute et de la repousse des bois ? (cliché Bul/oz).

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animal n ' est pas sensible aux fièvres , et même il les guérit . Nous savons que certaines dames de rang princier avaient coutume naguère de man­ger un peu de viande de cerf chaque matin , et que durant leur longue vie elles échappèrent aux fièvres . » Partout , le cerf est considéré comme un animal combat if et rapide dans sa course ; mais ce qui intrigue , c 'est que , à chaque printemps , il perd sa ramure et la voit repousser . Les bois du cerf sont une image de vie , avec mort et renaissance au rythme de la nature ; ils ont toujours passé pour avoir des vertus médicinales .

Le cheval n'est pas un animal comme les autres : inséparable de l 'homme à qui i l assure le transport le plus rapide , i l est le conducteur des âmes vers le séjour des Bienheureux ; il a même un sens moral . Elien (Sur les animaux, IV , 7) raconte comment une j ument et son poulain tentèrent de résister à une union sexuelle qu 'on voulait leur imposer : « Un roi des Scythes possédait une j ument de grande qualité , qui deman­dait le cheval ; i l avait aussi un poulain , de la même race . Comme i l ne trouvait pas un cheval de même qualité auquel i l présenterait la j ument , ni une j ument digne de recevoir la semence d 'un tel poulain , il prépara la j ument et le poulain à s 'unir : l ' un et l ' autre manifestèrent beaucoup d 'affection en se caressant mutuellement , mais ne parvinrent pas à l 'union . Ces animaux réduisant à néant le projet du Scythe, on les déguisa l 'un et l ' autre pour permettre l ' union incestueuse ; mais lorsqu ' il s réali­sèrent l ' événement , ils eurent honte de leur acte impie et se j etèrent du haut d ' un précipice . » Les auteurs anciens attribuent au cheval une intel­ligence et des sentiments semblables à ceux des hommes : dans l 'Iliade (XV I I , 437-440) , les chevaux d 'Achille « pleurent . . . , des larmes brûlan­tes coulent de leurs yeux à terre , tandis qu ' ils se lamentent dans le regret de leur cocher » ; selon Virgile (Enéide, XI , 90) , aux obsèques de Pal­las , son cheval Aéthon « pleure et de grosses larmes mouillent sa face » et selon Pline (H.N. , VII I , 64) , « quand le roi Nicomède eut été tué , son cheval se laissa mourir de faim . » Aussi l ' homme est-i l attaché à son cheval . Pline (H.N., VI I I , 64) cite quelques exemples célèbres : « Bucéphale (le cheval d 'Alexandre) , blessé au siège de Thèbes , ne souffrit pas qu 'Alexandre passât sur un autre cheval ; et maints autres exploits de ce genre , pour lesquels après sa mort le roi lui mena ses funérailles , et bâtit autour de son tombeau une ville à laquelle il donna son nom (Bucephala, dans l ' I nde) . . . Le divin Auguste éleva aussi à son cheval un tombeau , qui fait le sujet d 'un poème de Germanicus . A Agrigente, les tombeaux de nombre de chevaux ont des pyramides . Sémiramis s 'éprit à ce point d'un cheval qu 'elle eut commerce avec lui : du moins c 'est Juba qui l 'affirme:;)·D'après Suétone ( Vie de Caligula, XLV) , Caligula eut beaucoup de gratitude envers son cheval : «(Outre une écurie de mar­bre et une crèche d ' ivoire, outre des housses de pourpre et des licous ornés de pierres précieuses , il alla j usqu'à lui donner un palais , des escla­ves et un mobilier , pour recevoir plus magnifiquement les personnes invi­tées en son nom ; il projeta même, dit-on , de le faire consul . »

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Le cheval est un animal fougueux et les poètes latins le représentent soufflant le feu par les naseaux ; il est en rapport avec les eaux de la mer qui bondissent comme lui . La j ument est particulièrement réputée pour ses ardeurs amoureuses , comme le rappelle Virgile (Géorgiques, I I I , 266 sp . ) : « C 'est surtout , à n ' en pas douter , chez les cavales que la frénésie amoureuse est remarquable ; Vénus elle-même leur a donné cette ardeur , quand les j uments de Potnies attelées à quatre déchirèrent de leurs mâchoires les membres de Glaucus . L 'amour les entraîne au­delà du Gargare (montagne de Mysie) , au-delà du bruyant Ascanius (rivière de Bithynie) ; elles franchissent les montagnes , traversent les fleu­ves à la nage , et aussitôt que la flamme du désir s ' est allumée dans leurs moelles - au printemps surtout , car c ' est au printemps que la chaleur recommence à gagner les os - elles se dressent toutes sur les hauts rochers , face au zéphyr (vent d 'ouest) , elles se pénètrent des brises légè­res et souvent , sans aucun accouplement , fécondées par le vent , ô mer­veille ! elles détalent à travers les rochers . . . » Dans cette description poé­tique, Virgile évoque la fin tragique de Glaucus, fils de Sisyphe, qui pos­sédait les pouliches de Potnies en Béotie : pour les garder plus légères , il ne les livrait pas à la monte ; rendues furieuses par le désir amoureux , elles dévorèrent leur maître .

Le lion évoque le soleil par la couleur de son pelage et parce qu ' i l vit dans les pays chauds ; mais surtout , i l représente la force et la puis­sance . En Mésopotamie , le roi s ' ident i fie au lion dans les inscriptions et dans les bas-reliefs ; son caractère léonin est souvent évoqué par son nom . Chez Homère , le lion qualifie l ' attitude du guerrier au combat ; il exprime le courage et l ' honneur ; ce fauve , qui dispute à l ' homme sur son propre terrain le bétail nourricier , est à la fois modèle symbolique et double complet du héros . Roi des animaux, le lion est un gardien sûr : dans les pays orientaux, des lions sculptés encadrent symétriquement la porte des palais , des temples , des tombeaux ; on les retrouve sur la célèbre « porte des lionnes » à Mycènes et , plus tard , sur les toits des temples grecs et romains où les têtes de lion servent souvent de gargouilles et d'antéfixes . Enfin , d 'après Pline (H. N. , VII I , 1 9) , cet animal est plein de bons sentiments : « Le lion est le seul fauve qui montre de la clémence envers les suppliants ; il épargne ceux qu ' il a terrassés , sa fureur s ' exerce plutôt sur les hommes que sur les femmes , et il n ' attaque les enfants qu 'en cas de famine . On croit en Libye qu ' il comprend le sens des priè­res ; en tout cas , j 'ai entendu dire à une captive revenant de Gétulie (Afri­que du Nord) qu'elle avait dans les bois arrêté l ' assaut de maints lions , en osant leur parler et leur dire qu'elle était une femme, fugitive, malade, une suppliante aux pieds du plus noble de tous les animaux, de leur roi à tous , et une proie indigne de sa gloi re . »

Les animaux vivant comme l ' homme sur le sol terrestre tiennent leur supériorité essentiellement de leur force physique : tel est le cas du tau­reau , du cerf, du cheval et du lion . Ce sont d 'autres particularités , sou-

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vent mystérieuses , qui sont admirées par les hommes de l ' antiquité dans le reste de la faune . En apparence , i l n ' y a rien de plus simple que le serpen t : créature froide, sans pattes , n i poils , ni plumes . Mais cet ani­mal est énigmatique et secret : il n ' a pas de paupières mobiles et dort les yeux ouverts ; sa peau meurt et renaît tous les ans , comme le bois du cerf ; il est redoutable par son venin mortel . Comme beaucoup d'autres animaux , i l est l 'objet de nombreuses légendes . D ' après Pline (H.N. , VI I I , 3 5) , « l 'aspic mâle et l 'aspic femelle vont presque toujours par cou­ples , et ne peuvent vivre l ' un sans l ' autre. Aussi , quand l ' un d 'eux est tué, l ' autre met à le venger un acharnement incroyable : i l poursuit le meurtrier , par une sorte d ' instinct qui le lui fait reconnaître dans la foule la plus nombreuse , i l s ' en prend à lui seul ; i l brise tous les obstacles , traverse les espaces , et n ' est arrêté que par les rivières , ou par la vitesse du poursuivi . » Mais surtout , pour les Anciens , le serpent est l ' être qui est en contact incessant avec la terre , i l glisse pour se réfugier dans le monde du dessous où il demeure toute la nuit , pour ne sortir que le matin, et tout l ' hiver, pour resurgir à chaque printemps avec le renouveau de la végétation . Pénétrant dans les entrailles de la terre , le serpent lui arra­che ses secrets et devient un symbole de la science et de la sagesse : en Egypte , dès la première dynastie (vers 3 000 avant J . -C . ) , un pharaon porte le nom de Serpent (il est représenté sur une célèbre stèle du musée du Louvre) ; par la suite, le pharaon est représenté portant sur le front un cobra dressant la tête .

Si les reptiles fréquentent les dieux d ' en bas , les oiseaux approchent les dieux d ' en haut . Doués d 'une grande vélocité et capables d 'émettre des cris effrayants , les oiseaux sont les habitants du ciel ; i ls ont les qua­lités des êtres surnaturels , qui voient haut et loin . D ' un vol rapide, i ls parcourent continuellement le ciel ; leurs mouvements aux lignes impré­visibles semblent inspirés par une volonté supérieure . Chez les Celtes , les oiseaux sont divins et appartiennent à l ' autre monde . D 'après Elien (Sur les animaux, XVII ) , « quand des nuées de sauterelles envahissent leur pays , les Galates font certaines prières et accomplissent certaines cérémonies sacrées qui, parfois , ont la vertu d 'appeler les oiseaux . Ces oiseaux obéissent , i ls arrivent tous ensemble en foule , et anéantissent les sauterelles . » Le corbeau est l ' oiseau sacré par excellence en Gaule ; lors de la fondation de Lyon , selon le pseudo-Plutarque, « on creusait des fos sés quand tout à coup apparurent des corbeaux qui , volant ça et là , couvrirent les arbres des alentours . »

Certains oiseaux sont liés au malheur et à l ' horreur . Dans le monde romain , le corbeau est un oiseau déchu : son châtiment a consisté en une métamorphose du plumage blanc en plumage noir ; son symbolisme est toujours péjorat if ; le christianisme le chargera d ' opprobre . La cor­neil le a à peu près la même réputation : selon Pline (H.N. , X, 1 2) , « cet oiseau a un croassement babillard de mauvais augure ; cependant cer­tains le j ugent favorablement . . . ; i l est du plus mauvais augure à l ' épo-

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que de la couvaison , c ' est-à-dire après le solstice (d ' été) . » La chauve­souris , la chouette ne sont pas aimés à Rome, comme le hibou . Ecou­tons le témoignage de Pline (H. N. , X, 1 2) : « Le hibou (bubo), oiseau funèbre et plus que tous abhorré surtout dans les auspices publics , habite les lieux déserts et les solitudes , et même les endroits sinistres et inacces­sibles , monstre de la nuit , qui n'émet aucun chant mais un gémissement . Aussi , qu ' il se montre dans les villes ou en plein jour , c ' est un funeste présage . Mais je sais qu ' i l s 'est posé plus d ' une fois sur des maisons par­ticulières sans annoncer de mort . I l ne vole jamais d roit au but , mais il louvoie obliquement . Un hibou pénétra jusque dans le sanctuaire du Capitole , sous le consulat de S . Palpellius Hister et de L. Pedanius ; c ' est pourquoi Rome fut purifiée cette année-là, aux nones de mars . »

En Grèce , dès l ' époque pré-hellénique la chouette est un oiseau pro­tecteur , qui éloigne les influences malignes par la vertu de son regard : sa pupille est énorme et dilatée, son œil perce les ténèbres . L'oiseau , présent dans toute la Grèce, est particulièrement vénéré dans l 'Attique , l 'Eubée, l ' Achaïe . . . Mais c ' est surtout à Athènes que ces oiseaux noc­turnes se trouvent en grand nombre : « porter des chouettes à Athènes » est un proverbe grec qui exprime l ' inutilité des tâches trop faciles . A la fin du septième siècle , sur les monnaies qui circulent en Attique appa­raît le type de la chouette, emblème de prospérité . Au sixième siècle , elle est associée à Athéna, déesse protectrice d 'Athènes : dès lors , les monuments qui représentent la déesse avec cet attribut , les monnaies de la ville à cette effigie forment un ensemble imposant . La chouette est naturalisée athénienne et devient l ' attribut officiel d 'Athéna , à côté du serpent et de l ' olivier .

Enfin, certains oiseaux sont appréciés pour leur sagesse ou pour leur vigilance . La sagesse des grues est réputée : ce sont elles qui permirent de découvrir le meurtrier d ' Ibicus (poète grec du sixième siècle avant J . -C . ) ; elles savent adapter leur vol aux conditions atmosphériques . L' opinion des Anciens sur ces oiseaux migrateurs est résumée par Pline (H.N. , X, 23) : « La nation des Pygmées jouit d ' une trève au départ des grues , qui lui font la guerre . . . Leur traj et est immense si l 'on songe qu 'elles viennent de la mer d 'Orient . Elles conviennent d ' un jour pour le départ ; elles volent haut pour voir loin devant elles ; elles choisissent un chef comme guide ; à l ' arrière-garde , elles placent des serre-file qui se relaient , pour pousser des cris et maintenir par leurs appels la cohé­sion de la troupe. Elles ont la nuit des sentinelles tenant dans leur patte un petit caillou ; si, en s ' endormant , elles le lâchent et le laissent tom­ber , il décèle leur négligence ; les autres dorment , la tête cachée sous l 'aile, se tenant sur l ' une ou l ' autre patte, alternativement . . . » Le thème du combat des grues et des Pygmées relève d ' un mythe oriental ; ses repré­sentations artistiques connaissent un grand succès dans le monde gréco­romain : un vase chypriote du septième siècle avant J . -c. (musée de Nico­sie) figure un gros oiseau (grue) affrontant un nain ; par la suite, le combat

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Combat des grues et des Pygmées. Mosaique de pavement d 'une maison romaine. flalica (Espa­gne). Etres petits et difformes, habitant un pays torride au sud de la L ibye, les Pygmées disputent leur vie chétive aux coups d 'oiseaux plus raisonnables qu 'eux et subissent un insuccès comique.

est reproduit sur des peintures et sur de nombreuses mosaïques d 'épo­que romaine .

Selon P line (H. N. , X, 22) , « l 'oie est célèbre à Rome pour sa vigi­lance , attestée par la défense du Capitole , dans un moment où le silence des chiens trahissait la cause publique . On a même pensé que les oies avaient la connaissance de la sagesse : ainsi , une oie , dit-on , se tint constamment aux côtés du philosophe Lacydès , sans j amais le quitter , ni en public, ni aux bains , ni le jour , n i la nuit . . . » Les mêmes qualités de vigilance sont reconnues par Pline chez le coq ; mais , en Grèce , cet animal est surtout un symbole de victoire et plus précisément de vic­toire à caractère amoureux, d 'où sa v

'aleur érotique . Dans l ' iconogra­

phie, les coqs accompagnent souvent les Amours (Eros) et sont donc associés à Aphrodite ; Priape, personnage ithyphallique, est parfois repré­senté en coq, ou avec une tête de coq , ou tenant un coq .

Dans les espèces aquatiques , l ' animal qui surclasse tous les autres est le dauphin . Aristote (Histoire des animaux, 48) est émerveillé par sa vitesse : « C'est de tous les animaux, aussi bien aquatiques que terres­tres , celui qui passe pour être le plus rapide : les dauphins sautent même par-dessus les mâts des grands cargos . Cela leur arrive surtout quand ils poursuivoot un poisson pour s 'en nourrir . » Pline (H. N. , IX, 8) s ' ins­pire d'Aristote qu 'i l i l lustre avec des anecdotes : « Sous le règne du divin

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TABLE DES MATIÈRES

Introduction. - Présence des animaux dans toutes les religions antiques . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 7

Chapitre premier. - Les pouvoirs mystérieux de l 'animal . . . . I l 1 . Des êtres prestigieux . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 1 3

I I . Les animaux, guides et bienfaiteurs . . . . . . . . . . . 2 1 I I I . Les animaux tutélaires . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 27

les emblèmes (p . 27) , la louve romaine (p .29) .

Chapitre I I . - Images ou attributs des dieux . . . . . . . . . . . . . . . 3 3 1 . Les diversités régionales . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 3 3

l 'Egypte (p . 33) , l 'Asie Antérieure (p . 52) , l e monde gréco-romain (p . 54) , la Gaule (p . 64) .

I I . Les animaux prééminents . . _ . . . . . . . . . . . . . . . . . 72 l ' aigle (p . 73), le serpent (p . 78) , le taureau (p . 93) .

I I I . Les animaux fabuleux . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 1 04 l ' animal monstrueux (p . 1 06) , l ' hybride homme­animal (p . 1 10) , l 'espèce animale imaginaire : le phé-nix (p . 1 1 4) .

Chapitre III . - Serviteurs des dieux . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 1 2 1 1 . D u maître des animaux au dieu chasseur . . . . . . . 1 2 1

I I . Emissaires des dieux . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 1 3 5 I I I . Véhicules des dieux . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 1 4 1

Chapitre IV. - Interprètes des dieux . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 1 5 1 1 . Les signes et les présages fortuits . . . . . . . . . . . . . . 1 52

I I . Les auspices . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 1 56 I I I . L 'extispicine . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 1 60

Chapitre V. - Victimes sacrificatoires . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 1 69 1 . Le plaisir des dieux . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 1 70

la Préhistoire (p . 1 70) , le Proche-Orient (p . 1 7 1 ) , Israël (p . 1 72), la Grèce (p . 1 75) , le monde romain (p . 1 76) , l ' animal substitut de l ' homme ? (p . 1 82) .

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I I . Le salut des hommes . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 1 86 le sacrifice dionysiaque (p . 1 86) , la tauroctonie mith­riaque (p . 1 87) , le taurobole métroaque (p . 1 88) .

Conclusion . - Le christianisme réduit le rôle de l ' animal dans la religion . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 1 9 1

Bibliographie . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 1 93

Tableau synchronique . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 1 99

Cartes. - Egypte, Proche-Orient , Monde Grec , Empire Romain 200

Index des animaux . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 203

Dictionnaire-Index . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 205

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