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LES 350 ANS DE CHARLEROI ÉLÉMENTS HISTORIQUES ET IDÉES POUR UNE EXPLOITATION PÉDAGOGIQUE

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LES 350 ANS DE CHARLEROIÉLÉMENTS HISTORIQUES ET IDÉES POUR UNE EXPLOITATION PÉDAGOGIQUE

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Rédaction : Bernard Lejeune, Enseignant de la Fédération Wallonie-Bruxelles à la retraite et Historien.

Avec la collaboration de la division de la Gestion Pédagogique de l’Enseignement et la division Communication de la Ville de Charleroi

Editeur responsable : Christophe Ernotte - Directeur général f. f. - Hôtel de Ville - Place Charles II - 6000 Charleroi

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PRÉFACE

Si les enfants auxquels ce dossier pédagogique est destiné appartiennent à la génération de la mondia-lisation, de la globalisation, la nécessité d’un ancrage régional et local n’a jamais été aussi impérieuse.

En effet, être ouvert sur le monde n’interdit pas de s’interroger sur qui l’on est, ni de tirer sur les fils d’une histoire collective et individuelle profondément inscrite dans notre paysage familier.Les identités ne se superposent pas mais elles s’imbriquent les unes dans les autres.Il est important que nos jeunes dont la plupart sait ce qui se déroule au bout du monde et ignore parfois ce qui se vit au bout de sa rue, disposent d’informations sur le passé de leur Ville, de leurs quartiers, sur son histoire.

La première métropole wallonne peut justement s’enorgueillir d’une longue et belle histoire, riche et même passionnante. Du 17e siècle à nos jours, en passant par la Révolution industrielle, les temps forts de l’histoire euro-péenne se sont vécus chez nous aussi, parfois même plus intensément qu’ailleurs.Cette histoire se poursuit et la Ville de Charleroi écrit en ce moment même une nouvelle page de cette aventure humaine.

Des chantiers s’ouvrent un peu partout sur notre territoire, et ils ne prennent pas que la forme de grues géantes ou d’excavations profondes.Il va de soi que le fait de rendre la Ville plus accessible, plus conviviale, plus sûre, plus verte et plus belle contribue certainement à la rendre encore plus aimable aux yeux de nos concitoyens.Mais cela ne peut suffire. Le capital humain, à travers des chantiers culturels ambitieux, des initiatives citoyennes qui se multiplient, la jeunesse qui aime la fête et l’organise un peu partout, le capital humain donc est celui grâce auquel un projet de ville existe, se déploie et s’ancre durablement.De cela Charleroi ne manque pas, au contraire, c’est une richesse et un défi.

La génération qui suit la nôtre et celle de nos enfants sera invitée à lire et à commenter le chapitre de ce livre d’histoire que nous sommes en train d’écrire.Le contenu de ce chapitre dépend de nous tous et en qualité d’enseignants vous êtes nos passeurs d’histoire privilégiés.

PAUL MAGNETTE BOURGMESTRE EN TITRE

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SOMMAIRE

1. Un chronogramme, acte de baptême de la forteresse de Charleroi (1666) ………………………………… P. 07

2. Le plan-relief (1696) de la place-forte de Charleroi ……………………………………………………………………… P. 09

3. Le bas-relief du plan de la forteresse de Charleroy (1966) ………………………………………………………… P. 13

4. Le puits de la place d’armes de la forteresse (fin XVIIe siècle) ……………………………………………………… P. 15

5. Le beffroi de l’Hôtel de Ville (1936) ………………………………………………………………………………………………… P. 17

6. La plaque commémorative du Général Comte Letort (1773-1815) ……………………………………………… P. 19

7. Le Tambour, monument aux armées françaises …………………………………………………………………………… P. 21

8. Les souterrains hollandais (1816-1825) ……………………………………………………………………………………… P. 25

9. La stèle commémorative dédiée au chansonnier Jacques Bertrand (1817-1884) …………………… P. 27

10. Les sculptures de lions en bronze (1890) appelées «Totor» et «Tutur», par Bouré (1890) ………… P. 29

11. Le Mineur et le Métallurgiste, sculptures en bronze de Constantin Meunier (ca.1890) ……………… P. 31

12. Les combats pour la prise de Charleroi (août 1914) ……………………………………………………………………… P. 33

13. La plaque commémorative dédiée au caporal Trésignies (1886- 1914) ……………………………………… P. 37

14. Le monument au pigeon - soldat, par Alphonse Darville (1951) ………………………………………………… P. 39

15. La plaque commémorative dédiée à la résistante Fernande Volral (1920-1944) ……………………… P. 41

16. Les personnages de bandes dessinées de l’Ecole de Marcinelle (1938 - nos jours) ………………… P. 43

17. Les Géants présents dans la cavalcade (1956 - à nos jours) ……………………………………………………… P. 47

18. La tragédie minière du Bois du Cazier, Marcinelle (8 août 1956) ………………………………………………… P. 49

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Quelques repères que l’on peut retrouver sur la carte

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1/ UN CHRONOGRAMME, ACTE DE BAPTÊME DE LA FORTERESSE DE CHARLEROI (1666)

1° Eléments historiques

En 1660, un pauvre et modeste village occupait partiellement l’ouest du plateau qui surplombe la vallée de la Sambre. Ses habitants l’appelaient Le Charnoy (= bois de charmes) en référence à un environnement autrefois boisé. Le site encore verdoyant abritait à l’époque un peu moins de 90 chefs de famille. Les habitants vivaient du produit de leurs maigres labours, auquel s’ajoutait le profit du commerce du charbon et du travail de la clouterie.

Leur destin bascula le jour où les autorités espagnoles, alors dirigeantes de nos provinces, décidèrent de le raser afin de construire sur l’éperon rocheux une forteresse censée se prémunir des risques d’invasions envisagées par la France depuis que celle-ci, par le traité des Pyrénées (1659), avait donné à Louis XIV les places-fortes de Mariembourg et de Philippeville. Autant dire que l’Entre-Sambre-et-Meuse était sous son contrôle et qu’elle menaçait désormais directement le Brabant et Bruxelles. Pour lui barrer la route, une place-forte devait être érigée.

Extrait du registre paroissial du Charnoy (Archives de l’Etat à Mons, collection des registres paroissiaux)

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Il fallait faire vite. En juillet 1666, le gouverneur espagnol, le marquis de Castel-Rodrigo fait tracer son plan sur le terrain et le 3 septembre de la même année, on y pose la première pierre et on lui donne un nom : Charle(s)roy, en hommage au souverain d’Espagne, Charles II, alors âgé de 5 ans seulement.

Pour immortaliser l’événement, quelqu’un - peut-être est-ce Castel-Rodrigo lui-même ? - inscrit en latin dans le registre des baptêmes de la paroisse du Charnoy le subtil jeu de mots : FVnDatVr CaroLoregIVM.

Nous sommes ici face à un merveilleux chronogramme. De quoi s’agit-il ? C’est ainsi que l’on désigne une inscription dont certaines lettres - celles qui sont aussi des chiffres romains - indiquent la date de l’événement auquel fait allusion cette inscription. Dans le cas présent, l’addition des lettres romaines - I (pour 1), V (pour 5), L (pour 50), C (pour 100), D (pour 500) et M (pour 1000) - donne pour millésime 1666.

2° Idées pour une exploitation pédagogique

- Préalablement à toute découverte de la Ville, l’enseignant peut laisser les élèves se pencher sur ces deux mots latins. Caroloregium, traduction latine de Charles Roy, et Fundatur, forme verbale latine de la 3e personne du singulier au subjonctif présent ( = que soit fondé(e)). Ces deux termes latins se traduisent donc par Que Charleroi soit fondée !

- Après quoi, par jeu, le repérage des lettres ayant valeur numérique dans notre chronogramme doit leur permettre d’accéder à la découverte du chiffre «magique», 1666.

- Enfin, il s’agira de leur expliquer ce qu’est un chronogramme en leur montrant les concordances établies par les érudits de la Renaissance entre certaines lettres et leur valeur romaine.

3° Bibliographie

Joseph HARDY, Charleroi : ses origines et son nom dans La Vie Wallonne, T.XXV, 1951, pp. 157-205.

Maurice - A ARNOULD, Comment naquit Charleroi dans Caroloregium Valde Concelebratur, pp. 41-76, Charleroi, 1966. Le chronogramme y est reproduit p.53.

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2/ LE PLAN-RELIEF (1696) DE LA PLACE-FORTE DE CHARLEROI

1° Eléments historiques

Sur proposition de Louvois, ministre français de la guerre, la collection des plans-reliefs avait été décidée par Louis XIV lorsqu’en 1668 furent rattachées à la France quelques places-fortes (dont celle de Charleroi) prises aux Espagnols. A l’origine, cette extraordinaire collection était installée dans la grande galerie du Bord de l’eau au palais royal du Louvre ; en 1776, devenue encombrante, elle fut transférée à l’Hôtel des Invalides. Comme son accès n’était pas aisé et l’espace réduit, le gouvernement français choisit de transférer en 1987 seize maquettes (dont 8 ressortant de l’espace belge) au musée des Beaux-Arts de Lille pour présentation au public.

Ces plans-reliefs, en principe secrets, avaient un triple objectif. Ils étaient d’abord d’utilité militaire : des débats d’état-major s’engageaient autour du plan et des projets d’attaque ou de défense pouvaient y être préparés. C’était aussi, étant donné leur lieu d’installation, des jouets princiers au service de la royauté française. Enfin, en tant qu’authentiques chefs-d’œuvre, ils étaient des objets de prestige qu’à l’occasion on dévoilait à d’éminents visiteurs étrangers dans le but de les impressionner sur la grandeur du royaume et de la richesse de ses cités.

Les levers de terrain étaient d’abord menés à bien par des ingénieurs militaires et ensuite des menuisiers, des dessinateurs et des « décorateurs » confectionnaient la maquette de la manière la plus réaliste qui soit. Même si des inexactitudes subsistent du fait de l’échelle, la décoration des édifices importants (églises, casernes, édifices publics, etc.) y est assez fidèle et surtout - forcément - celle des fortifications. La végétation qui s’y trouve fait partie du décor; elle était manifestement simplifiée mais il était, par convention, établi que l’état végétatif des arbres devait être celui d’un mois de mai.

Il semble que le plan-relief de Charleroi n’ait été réalisé qu’en 1696 et qu’il connut (au moins) deux réfections, l’une en 1743 et l’autre en 1789. Tous les plans-reliefs sont à l’échelle 1:600, ce qui signifie qu’1m du plan-relief

Plan-relief (copie) de la forteresse de Charleroy, Hôtel de Ville de Charleroi

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correspond à 600m sur le terrain. Etant tous de grande dimension, ils nécessitaient un large support de solides « tables » de 2m de côté rigoureusement assemblées. L’exemplaire exposé par la Ville (4m x 3,40m) est une réplique exacte de l’original.

La valeur historique et documentaire de chacun des plans-reliefs est évidemment indéniable même si rien ne subsiste aujourd’hui de la forteresse de Charleroi voulue par Louis XIV (si ce n’est une partie du tracé des rues, quelques toponymes locaux* et la fleur de lys dans ses armoiries).

2° Idées pour une exploitation pédagogique

1° L’enseignant peut demander aux élèves d’observer attentivement la maquette pour nettement distinguer deux parties, séparées par la Sambre. Ce sont la ville haute et la ville basse.

> La ville haute (la forteresse proprement dite) : demander aux élèves de définir la forme géométrique de sa place d’armes (aujourd’hui place Charles II). Il s’agit d’un hexagone d’où se détachent 6 rues qui, après avoir recoupé un second hexagone, atteignent chacune un des 6 bastions. Des trapèzes isocèles se partagent l’espace délimité par les deux hexagones concentriques. L’un d’eux est aujourd’hui occupé par l’Hôtel de Ville. La fonction militaire de la place est indéniable.

> La ville basse (parfois appelée «ville-neuve» au XVIIe siècle, elle était destinée à défendre le pont jeté sur la Sambre et à ménager aux Français, venant du sud, un accès permanent à la ville haute.) : demander aux élèves si son plan est le même que celui de la ville haute ? Oui ou non, pourquoi ? Non. Si le plan hexagonal de la forteresse (réservée aux soldats) est de création espagnole, celui de la ville basse (rapidement peuplée de civils) est une création française. Quoique présentant une certaine symétrie, ce n’est pourtant pas un plan en damier puisque les rues qui s’éloignent de la place d’armes (place Albert 1er) ne lui sont pas perpendiculaires. L’ingénieur militaire français Vauban en aurait été le concepteur.

2° L’enseignant peut poser aux élèves une question de stratégie! « Quels étaient les objectifs distincts des Espagnols et des Français dès lors qu’ils contrôlaient la forteresse ? » Stratégiquement, les Espagnols cherchaient surtout à empêcher le franchissement de la Sambre par un ennemi venu du sud tandis que les Français, au contraire, veillaient à assurer celui-ci; ceci explique le souci de ces derniers de contrôler les deux rives en créant la ville basse.

NB : A l’origine, le pont sur la Sambre était un pont en bois mobile (disparu de la maquette). Il sera remplacé vers 1750 par un pont dormant en pierre. Reconstruit en 1826, il perdit sa raison d’être lors du comblement de la Sambre en lieu et place du boulevard Tirou. On notera que, dans la toponymie locale, la modeste rue du Pont de Sambre (elle s’étend entre le boulevard Tirou et le bas de la rue de la Montagne ) en garde le souvenir.

* Les noms espagnols des six bastions de la forteresse furent rapidement rebaptisés par les autorités militaires françaises. Cinq d’entre eux ont survécu dans la toponymie carolorégienne. Du bastion du Dauphin, en l’honneur de Louis, fils de Louis XIV, subsiste la rue du Dauphin. Du bastion d’Orléans, ainsi nommé en l’honneur de Philippe d’Orléans, frère de Louis XIV, subsiste la rue d’Orléans. Du bastion de Turenne, vainqueur du siège de 1667 et bientôt maréchal de France, subsiste la rue Turenne. Du bastion de Montal, premier gouverneur de Charleroi, subsiste la rue Montal. Du bastion des Gardes, subsiste la petite rue des Cavaliers.

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3° Au niveau des défenses extérieures, les abords de la place-forte, ville basse comme ville haute, étaient renforcés par toute une série de travaux de fortification. Il peut être demandé aux élèves de les identifier et de les décrire.

Regardez les remparts au nord de la forteresse. Ils sont bordés d’un fossé sec ; on le franchissait en un seul endroit, sur un pont de bois, par la porte de Bruxelles ; son approche extérieure était défendue par plusieurs redoutes.

- Que voyez-vous à l’ouest ? Une vaste étendue d’eau (le Grand-Etang), née de l’accumulation des eaux du ruisseau de Lodelinsart et contenue par une digue (la place de la Digue en est le vestige).

- Que voyez-vous à l’est ? Egalement une étendue d’eau (le Petit-Etang), alimentée par un autre ruisseau et contenue par deux digues.

- Que voyez-vous au sud ? Une vaste zone d’inondation alimentée par un canal de dérivation (la Louvoise) creusé depuis l’Eau d’Heure, peu avant sa confluence avec la Sambre, à Marchienne-au-Pont. Cette zone marécageuse a disparu; c’est aujourd’hui l’espace occupé par la gare de Charleroi.

3° Bibliographie

L’examen et la compréhension du plan relief ne pourraient se passer de la remarquable étude qu’en a faite Maurice - A. ARNOULD dans la série Plans en relief de villes belges, Pro Civitate , Bruxelles, 1961 (un exemplaire est disponible à la bibliothèque Rimbaud).

La plaque de rue - c’est la seule !- est fixée bien en hauteur sur la première façade , côté rue de la Montagne

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3/ LE BAS-RELIEF DU PLAN DE LA FORTERESSE DE CHARLEROY

1° Eléments historiques

Conçu en 1966 par Alphonse Darville pour célébrer son 300e anniversaire, le bas-relief est censé représenter la ville à ses débuts. On notera que le plan n’est pas orienté comme le sont aujourd’hui les cartes de géographie : le sud est à droite et le nord à gauche. Cette particularité s’explique dans la mesure où Darville, soucieux de respecter la réalité historique, s’inspira de la disposition générale des plans français de la forteresse datant de la 1re moitié du XVIIIe siècle.

Beaucoup moins «chargé» que ces derniers, celui de Darville, bien que muet, n’en est pas moins intéressant avec les précisions topographiques rapportées. Ce sont surtout les particularités du système de défense (les six bastions, le Grand Etang, la zone inondée) mais aussi la Porte de Bruxelles, la ville haute et la ville basse séparées par la Sambre qui devraient retenir l’attention des enfants.

Sur la droite, à mi-hauteur, le blason de la Ville reprend deux dates : 1666 pour rappeler celle de sa fondation et 1966 quand fut commémoré son 300e anniversaire. On notera que ce blason incorpore la Fleur de Lys qui rappelle le rôle pris par la France dans l’histoire du développement militaire de la forteresse et de la Ville.

Charleroy, ville forte des Pays-Bas dans le comté de Namur, située sur une hauteur près de la Sambre. C’était autrefois un petit bourg nommé le Charnoy que les Espagnols fortifièrent en 1666 et lui donnèrent le nom de Charleroy.

Quai de Brabant, n°10. Bas-relief de la forteresse de Charleroi par Alphonse Darville ; l’intitulé est reproduit ci-dessous

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2° Idées pour une exploitation pédagogique

Idéalement, l’observation de ce bas-relief avec les élèves devrait être accompagnée, sur place, de celle de l’illustration du plan français (1709) jointe en annexe; ce plan cite nommément les principales clés du système défensif de la forteresse.

La vision en trois dimensions du plan en relief (voir fiche n°2) permettrait enfin aux enfants d’encore mieux comprendre les origines de Charleroi.

Plan de Charleroy. Ville Forte des Pays-Bas dans le Comté de Namur, Paris, 1709 (Collection Philippe Nonclerq)

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4/ LE PUITS DE LA PLACE D’ARMES (AUJOURD’HUI PLACE CHARLES II)

1° Eléments historiques

Un puits devait nécessairement être creusé dans l’enceinte même de la forteresse pour, en cas de siège, fournir de l’eau aux hommes.

Si le plan en relief ne conserve pas le souvenir du puits qui ornait autrefois la place, il était cependant bien présent. Une tradition locale prétendait que ce puits avait été une ancienne fosse à houille; c’est évidemment une grossière erreur historique.

Le puits est signalé en 1669 (la forteresse date de 1666) et, en 1671, Vauban, l’ingénieur militaire français chargé de fortifier l’endroit, projetait de faire attacher trois boules de cuivre à « la charpenterye du grans puys, avec chacune une chesne et deux seaux pour en pouvoir tirer de l’eau». Ce puits a subsisté jusque vers 1850 puisqu’il figure sur le plan cadastral de la Ville gravé par Popp* à cette époque. Sa profondeur était, dit-on, impressionnante : 160 pieds (environ 42,50m) et sa hauteur d’eau atteignait 108 pieds (soit 31m). La structure aérienne du puits disparut peu après du paysage urbain. Il fut redécouvert lorsque la Ville décida d’aménager sous le parvis de la place un vaste espace destiné à recevoir les locaux techniques de la machinerie hydraulique. La margelle** du puits est remarquable par ses dimensions. Le cuvelage mérite également d’être montré tant est soigné l’appareillage des pierres.

Place Charles II, en sous-sol. Margelle du puits de l’ancienne place d’armes

* L’atlas cadastral parcellaire de la Belgique de Philippe-Christian Popp (1805-1879) constitue une source précieuse pour l’histoire de la géographie des communes belges. Après avoir travaillé à l’établissement du cadastre, Popp entama l’édition de son travail sous la forme d’un atlas dès 1842. Le plan cadastral de Charleroi daterait de 1850.

** La margelle est l’assise de pierre circulaire qui forme le rebord d’un puits.

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2. Idées pour une exploitation pédagogique

Dans le cadre des 350 ans de Charleroi, ce site sera accessible dès septembre 2016. Des visites commentées seront proposées sur rendez-vous auprès de la Maison du Tourisme du Pays de Charleroi par téléphone au 071/86.14.14 et par e-mail [email protected].

3. Bibliographie

Le peu d’informations au sujet du puits nous est donné par Maurice -A. ARNOULD dans la série Plans en relief de villes belges, Charleroi, Pro Civitate, Bruxelles, 1961, pp. 90 et 92.

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5/ LE BEFFROI DE L’HÔTEL DE VILLE

1° Eléments historiques

C’est en décembre 1928 que le Conseil communal de Charleroi décida à l’unanimité la construction d’un nouvel Hôtel de Ville à l’emplacement de l’ancien. Les travaux débutèrent en 1932 sous la direction de l’architecte Joseph ANDRE. Conçu dans un style légèrement Renaissance (mais dont l’intérieur est clairement de style « Art Déco »), le bâtiment fut inauguré en novembre 1936.

Classé au patrimoine mondial de l’UNESCO, son beffroi - on parle également de campanile - est une tour de 70m de hauteur, construite en pierres bleues et blanches sur la hauteur des étages des bâtiments, en briques spéciales jusqu’aux étages supérieurs abritant les chambres du carillon et en pierres blanches sur la partie supérieure avec clocheton de couronnement en bronze.

Le beffroi de l’Hôtel de Ville de Charleroi

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La construction de ce beffroi a nécessité la solution de grands problèmes de construction et de stabilité en raison du poids de la tour (4 millions de kg) et de la nature du terrain fortement atteint par les mouvements miniers. La semelle d’assise sur ce terrain est construite en béton armé avec 160kg de fer par m3. Pour assurer la stabilité face à d’éventuels affaissements miniers, il a été aménagé à l’intérieur de chacun des 4 grands piliers du beffroi 4 vérins permettant de régler son aplomb en cas de mouvement.

Le carillon comprend 47 cloches, d’un poids total de 12,748 kg. Le bourdon à lui seul pèse 3 tonnes. Les sept grosses cloches se trouvent à l’étage inférieur et les autres, à l’étage supérieur. Indépendamment des concerts donnés par des carillonneurs, l’installation peut émettre automatiquement différents airs, déclenchés par le mécanisme de l’horloge. C’est ainsi qu’à chaque quart d’heure, on peut entendre quelques mesures d’airs populaires du chansonnier Jacques Bertrand comme Pays de Charleroi (à chaque heure), Lolote, sentèz come èm keur bat (à chaque demi-heure), Raculotons-nous (au premier quart d’heure) et El Quézène au Mambourg (au troisième quart d’heure).

2° Idées pour une exploitation pédagogique

- Dans le cadre des 350 ans de Charleroi, le beffroi sera accessible dès septembre 2016. Des visites commentées seront proposées sur rendez-vous auprès de la Maison du Tourisme du Pays de Charleroi par téléphone au 071/86.14.14 et par email [email protected].

- L’ascension au sommet du beffroi offre une vue imprenable sur la Ville et ses alentours. Au passage, l’enseignant pourra expliquer le pourquoi et le comment des vérins hydrauliques installés à mi-hauteur.

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6/ LA PLAQUE COMMÉMORATIVE DU GÉNÉRAL COMTE LETORT (1773-1815)

1° Eléments historiques

Louis-Michel Letort de Lorville, né à Saint-Germain-en-Laye (région parisienne) en 1773, participa pratiquement à toutes les guerres de la Révolution française et du 1er Empire. Volontaire de 1791, il combatit à la bataille de Jemappes et de Neerwinden. Blessé en Italie en 1799, il continua pourtant sa carrière militaire en Autriche puis en Prusse, en Pologne et en Russie malgré une nouvelle blessure reçue à Iéna. Il se signala en 1808 à la bataille de Burgos (Espagne) et mérita par sa conduite en Russie le grade de général de brigade en janvier 1813. Il se couvrit de gloire à Wachau (Autriche), et quoique blessé, n’en voulut pas moins prendre part à la bataille de Hanau (Hesse). Il fit, en février 1814, des prodiges de valeur à Château-Thierry (Aisne) et fut nommé le lendemain général de division.

Pendant les Cent-Jours, le général Letort reçut de Napoléon le commandement des dragons de la garde et devint son aide de camp. Le 15 juin 1815, Napoléon fut à Charleroi dans l’après-midi; il donna l’ordre d’attaquer à Gilly le corps d’armée prussien; le général Letort s’élança aussitôt sur l’infanterie prussienne mais il fut grièvement blessé d’une balle au bas ventre. Evacué en ambulance à Gilly et ensuite à Charleroi, il fut soigné dans l’habitation du notaire Delbruyère, alors située en bordure de Sambre et aménagée en ambulance de campagne. Il y mourut le lendemain. Il était âgé de 41 ans.

Boulevard Tirou, n°88. Plaque commémorative du Général Comte Letort

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2° Idées pour une exploitation pédagogique

La carrière militaire de ce haut gradé français n’a que très peu de liens avec Charleroi.

L’énoncé de sa mort dans la Ville peut toutefois être replacé dans le contexte historique propre à la dernière campagne de Napoléon dont les batailles de Ligny et Waterloo constituent, en 1815, le point d’orgue.

Selon le niveau d’enseignement, il peut être envisagé, en se servant d’une carte d’Europe, de demander à l’élève :

1° de montrer l’étendue des conquêtes napoléoniennes en demandant aux élèves de localiser les pays (ou régions) où cet officier de cavalerie a combattu (Belgique, France, Espagne, Allemagne, Autriche, Pologne, Russie).

2° d’établir une sommaire ligne du temps sur laquelle, il placerait les dates de vie de Letort, en les superposant avec celles de la France révolutionnaire (1789-1799) et de la France napoléonienne (1799-1814).

3° de poursuivre (ou d’entamer) la promenade en direction du monument - Le Tambour- érigé sur l’esplanade de la gare du Sud en souvenir des interventions militaires françaises.

3° Bibliographie

https://fr.wikipedia.org/wiki/Louis-Michel_Letort_de_Lorville.

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7/ LE TAMBOUR, MONUMENT AUX ARMÉES FRANÇAISES

1° Eléments historiques

Ce monument est l’expression des amitiés franco-belges.

Pourquoi un tambour ? La communication par tambour était utilisée pour transmettre les ordres sur les champs de bataille. En France, elle le fut pour la première fois sous François Ier. Les batteries de tambours, composées de roulements de caisse claire, servaient alors à communiquer certaines instructions aux régiments d’infanterie. Ce fut toutefois avec Napoléon que la pratique du tambour s’était grandement développée, notamment grâce aux grenadiers de la garde qui brillaient en la manière de battre.

Faut-il préciser que le souvenir de ces batteries de tambours est largement maintenu dans notre folklore régional puisque c’est au son des roulements de tambour que débutent, défilent et s’entendent les Marches militaires de l’Entre-Sambre-et-Meuse.

Plusieurs sociétés - Ville de Charleroi, Fondation Napoléon, Ministère français des anciens combattants - se sont réunies pour financer ce monument dédié Aux Armées françaises qui ont franchi la Sambre. Sur le socle, ont ainsi été gravés Jemappes 1792, Fleurus 1794, Ligny et Waterloo 1815, Louvain 1831, Anvers 1832, Charleroi 1914 et Gembloux 1940.

Cette énumération de batailles est censée témoigner de la fraternité qui s’établit entre les deux nations, française et belge, et singulièrement avec Charleroi depuis la fin de l’Ancien Régime.

NB: La région aura parfois plus à pâtir que de se réjouir de l’arrivée de l’armée française (ex : l’incendie de l’abbaye d’Aulne par les troupes du Général Charbonnier en 1794 ... ).

Esplanade de la Gare. Le Tambour, monument dédié aux armées françaises

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Période révolutionnaire (1789-1799)Jemappes (6 novembre 1792 ) - Charleroi était depuis 1715 partie des Pays-Bas autrichiens. Le déclenchement de la Révolution française entraîna l’Autriche à déclarer la guerre à la France. L’armée révolutionnaire française, commandée par le général Dumouriez, entra alors dans nos régions et remporta à Jemappes une victoire face à l’armée autrichienne. Celle-ci aboutit à la libération ou l’occupation (selon le point de vue) des Pays-Bas autrichiens. Ces derniers étaient repassés sous le contrôle de l’Autriche à l’issue de la bataille de Neerwinden (1793).

Fleurus (26 juin 1794) - Retour des Français. Sous les ordres du général Jourdan, la bataille avait lieu entre les coalisés (Royaume-Uni, Autriche, Hanovre) et la France. Les Français y remportèrent une victoire décisive. Les Autrichiens perdèrent définitivement le contrôle de nos régions. En septembre 1795, elles furent annexées par la France qui les administra jusqu’en 1814.

La bataille de Fleurus offrit aux révolutionnaires français l’occasion de surprendre leurs ennemis avec une arme secrète, un ballon captif. Ils l’avaient amené, tout gonflé, depuis Maubeuge. Après avoir contourné Charleroi assiégée, l’escorte à cheval qui tractait la montgolfière et sa nacelle s’arrêta à Jumet-Gohyssart. Là, la préparation du ballon étant achevée, les Français l’acheminèrent à proximité du champ de bataille où ils le laissèrent, bien arrimé, s’élever dans le ciel. Deux aérostiers, depuis leur observatoire aérien, renseignaient par messages lestés leur état-major sur les mouvements de troupes ennemies. ( Chr. DRAGUET, Le ballon de Fleurus. Itinéraire des aérostiers en juin 1794, 1994).

Comme le souvenir du passage du ballon s’était maintenu à Jumet, il fut décidé en 1994 que la place où il fut mis en service s’appellerait désormais Place du Ballon. Pour l’occasion, un monument et une plaque commémorative rappellent aux passants ce haut fait militaire en ces termes :

Le ballon parfaitement sphérique et imperméable - il avait une capacité de plus de 500 m3 - était gonflé à l’hydrogène, obtenu par le passage d’eau dans des tuyaux de fonte portés (et maintenus) au rouge, bourrés de copeaux de fer pour capter l’oxygène. L’aérostat pouvait atteindre l’altitude de 500m, mais en pratique, il suffisait qu’il s’élève entre 250 m et 400 m pour être opérationnel.

En hommage à L’Entreprenant aérostat militaire de 9 mètres de diamètre gonflé à l’hydrogène ainsi qu’à ses vaillants aérostiers passant à Goysart (Gohyssart) au soir du 24 juin 1794 en vue de la bataille de Fleurus. Cette nouvelle unité aérienne combattante créée par les Républicains français allait rejoindre le plateau du moulin de Jumet pour le premier engagement aérien de l’Histoire.

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Période napoléonienne (1799-1814)Ligny et Waterloo (16 et 18 juin 1815) : de retour de l’île d’Elbe, Napoléon cherche à rétablir son pouvoir. Après Paris, il marche sur Bruxelles (en passant par Charleroi) pour combattre les coalisés anglais et prussiens stationnés dans nos régions. Victoire à Ligny face à Blücher mais défaite à Waterloo face à Wellington.

Période belge (1830 - à nos jours)Louvain (1831) et Anvers (1832) : garante de notre indépendance acquise en 1830, la France envoya son armée, commandée par le Général Gérard, pour forcer les Néerlandais à quitter notre territoire. Les sièges victorieux de Louvain et de la citadelle d’Anvers marquèrent la fin de leur présence en Belgique.

Charleroi (1914) : garante de notre neutralité, l’armée française se porta en août 1914 sur la Sambre pour tenter d’y arrêter la progression des troupes allemandes. La bataille de Charleroi (21-23 août) leur fut très coûteuse en hommes. Ils furent finalement contraints à la retraite pour éviter l’encerclement.

Gembloux (mai 1940) : garante une nouvelle fois de notre neutralité, l’armée française franchit la Sambre pour tenter de ralentir la progression allemande en Hesbaye. Elle y parvint mais, menacée d’encerclement, elle fut finalement contrainte au repli.

2° Idées pour une exploitation pédagogique

L’intérêt du monument, pour de jeunes enfants, ne doit pas tant porter sur l’historique des interventions françaises en Belgique mais bien plutôt sur la signification du tambour. Différentes questions peuvent être posées aux élèves :

- Pourquoi un tambour ? A quoi servait-il autrefois dans les armées engagées au combat ? Pourquoi a-t-il été choisi comme symbole des interventions militaires de l’armée française ? Y a-t-il, dans nos traditions populaires, maintien de l’usage du tambour ? L’enseignant peut demander aux élèves de justifier leur réponse par des exemples (Gerpinnes, Thuin, Walcourt, Jumet, Fosses, Ham-sur-Heure, etc.).

- A partir de l’image du tambour-major, sous-officier commandant une batterie, l’enseignant peut demander aux élèves d’expliquer le type de déguisement choisi par les marcheurs et ce que cela leur inspire. Les marcheurs sont le plus souvent habillés d’uniformes semblables à ceux que portaient les soldats de Napoléon. Cela démontre une nouvelle preuve des amitiés établies avec la France. (Il ne viendrait à personne l’idée de défiler dans un costume militaire assimilé à un ennemi).

3° Bibliographie

http://marchesfolkloriques.e-monsite.com/pages/musique-dans-les-marches/le-tambour.html

Ce site fournit d’excellentes informations sur la confection, le rôle et les types de coups donnés par les tambours de marche.

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Au rythme des fifres et des tambours , un groupe de marcheurs défile en rangs serrés au pied du monument

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8/ LES SOUTERRAINS DE LA FORTERESSE (PÉRIODE HOLLANDAISE)

1° Eléments historiques

Dans le cadre du vaste remaniement territorial (Traité de Vienne) fixé en 1815 par les grandes puissances européennes au lendemain de leur victoire sur l’empire napoléonien, nos provinces cessaient d’être françaises pour être réunies au royaume des Pays-Bas, dirigé par le souverain hollandais Guillaume d’Orange.

Celui-ci, soucieux de préserver l’intégrité territoriale de son Etat, susceptible d’être encore menacé par la France, décida en 1816 de construire à Charleroi une nouvelle forteresse plus en conformité avec les concepts militaires de l’époque. Les travaux débutèrent en 1826 et s’échelonnèrent jusqu’en 1825 (ils ne concernaient que la ville haute ).

Boulevard Joseph II. Passage voûté des souterrains hollandais

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Ces fortifications, reprises par la Belgique indépendante en 1830, ne lui furent d’aucune utilité. Entrave au développement urbain et industriel de la cité, elles furent démantelées en 1870 pour céder la place aux boulevards actuels. Initialement destinés à faciliter le déplacement des soldats d’une redoute à une autre sans être vus de l’assiégeant, ne subsistaient que quelques tronçons de souterrains, sauvegardés sans qu’on en connut la raison véritable. Durant la Deuxième Guerre mondiale (1940-1945), certains furent sommairement réaménagés pour permettre à la population carolorégienne de s’y réfugier en cas de bombardement aérien. Un éclairage et des banquettes furent installés.

2° Idées pour une exploitation pédagogique

Dans le cadre des 350 ans de Charleroi, ce site sera accessible dès septembre 2016. Des visites commentées seront proposées sur rendez-vous auprès de la Maison du Tourisme du Pays de Charleroi par téléphone au 071/86.14.14 et par e-mail [email protected]

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9/ LA STÈLE COMMÉMORATIVE DÉDIÉE À JACQUES BERTRAND (1817-1884)

1° Eléments historiques

Jacques BERTRAND, né à Charleroi en 1817, y exerçait la profession de chaisier. Chansonnier à ses heures perdues, il est considéré comme un précurseur de la littérature wallonne. En tant que chansonnier, on retiendra de lui d’innombrables chansons (El Quézène au Mambourg, El ducasse du Bos, Sintès come èm coeûr bat, etc.) mais nous retiendrons avant tout son hymne au Pays de Charleroi dont voici le refrain et les couplets :

RefrainPays de CharleroiC’est toi que je préfèreLe plus beau coin de terre A mes yeux, oui c’est toi.

1er coupletJ’ai de maintes citésContemplé les merveillesLeurs palais tant vantésAux splendeurs sans pareillesDe ces beaux monuments Admirant la structure.Je regrettais nos champsEt leur verte parureQu’annonce le printemps. (Ref.)

Place du Bourdon. Stèle commémorative du chansonnier Jacques Bertrand

2e coupletSous des prés verdoyantsQue la Sambre caresse, Sous des bouquets riantsPleins de chants d’allégresse,Gît le sombre charbon,Ce pain de l’industrieQue le mineur wallon,Si cher à la patrieExtrait du puits profond. (Ref.)

3e coupletJ’aime les hauts-fourneauxFlamboyant dans la brumeEt le bruit des marteauxRésonnant sur l’enclumeJ’aime ces travailleursAnimant nos rivagesEt le chant des mineursEgayant nos villagesAprès leurs durs labeurs. (Ref.)

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2° Idées pour une exploitation pédagogique

A partir de l’observation de la plaque commémorative, une série de questions peut être posée aux élèves :

- Qui voyez-vous dans le médaillon de gauche ? Un homme, habillé d’un sarrau (tenue d’ouvrier) et coiffé d’une casquette, en pleine inspiration de ce qu’il est en train d’écrire.

- Quel est l’objet de sa réflexion ? Regardez attentivement la partie droite. Que pouvez-vous voir ? C’est un paysage industriel d’où émergent des cheminées de hauts-fourneaux crachant de la fumée et un chevalement de mine (la roue et le câble qui permettent de remonter de la cage des entrailles de la terre sont visibles au cœur du dispositif métallique). Il y a donc une relation entre ce à quoi pense le poète et le paysage qu’il observe.

- Quelle couleur aurait un paysage d’où s’échappent des fumées d’usine et d’où on extrait du sous-sol du charbon ? Le noir.

- Quel nom a -t- on donné à ce Pays de Charleroi où tout est noir ?

- Connaissez-vous le refrain de cette chanson chère à nous tous ? A chaque heure, le carillon de l’Hôtel de ville en donne les premières notes.

En classe, muni du texte, l’enseignant peut étudier la chanson Pays de Charleroi plus en profondeur pour faire comprendre aux enfants quels ont été les métiers qui ont fait la renommée du Pays de Charleroi. De plus, différentes tâches peuvent être demandées aux élèves :

- Localiser l’endroit : De quelle ville parle-t-il ? Quel est le nom de la rivière qui la traverse ?

- Rechercher les trois métiers qui animent ce Pays (mineurs, métallurgistes et verriers).

- Associer à chacun de ces métiers leur lieu de travail (houillère, puits profond (= fosse), haut-fourneau, enclume, four à verre).

- Identifier un mot qui qualifie le labeur auquel sont soumis ces hommes (dur).

- Préciser à quel moment la fête battait son plein et, dans l’allégresse, ce que chantaient les ouvriers (au moment de la quinzaine ; les ouvriers étaient payés tous les quinze jours et ils chantaient le refrain du chant).

- ...

3° Bibliographie

http://www.charleroi-decouverte.be/ lui consacre une bonne biographie.

Voir aussi les nombreuses occurrences qui lui sont consacrées dans Caroloregium Valde Concelebratur, Charleroi, 1966 (ouvrage disponible à la bibliothèque Rimbaud).

4e coupletLa nuit, j’aime ces feuxPrès de chaque houillèreEt quand l’éclair joyeux Jaillit des fours à verre.Verrier, à leur clarté, J’admire ton courageTu sais avec fierté Egayer ton ouvrageD’un chant de liberté. (Ref.)

5e coupletJ’aime à voir réunisAu jour de la quinzaineLes enfants du paysBuvant à chope pleine.La bière coule à flots,Pétillante et mousseuse.J’aime le bruit des potsEt la chanson joyeuseQui fait dire aux échos : (Ref.)

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10/ LES SCULPTURES DE LIONS EN BRONZE APPELÉES «TOTOR» ET «TUTUR»

1° Eléments historiques

A l’origine (depuis 1879), les lions flanquaient le péristyle du Tribunal de Charleroi, autrefois situé boulevard Audent. Suite à la décision de construire un nouveau Palais de Justice sur la plaine des manœuvres, les deux sculptures ont été replacées à cet endroit en 1967.

Le sculpteur Œuvres en bronze d’Antoine Félix Bouré, aussi connu sous les noms de Félix Bouré ou Antoine Bouré, sculpteur belge, né à Bruxelles en 1831 et décédé à Ixelles en 1883. Ce sculpteur a réalisé plusieurs oeuvres de ce genre puisqu’on lui doit, par exemple, le monumental Lion du barrage de la Gileppe.

Attention à ne pas confondre avec le Lion de la butte de Waterloo qui est une œuvre de Van Geel voulue par le souverain des Pays-Bas en 1826. On notera d’ailleurs que le lion de Van Geel est debout et aux aguets tandis que ceux de Bouré affichent une position assise, celle d’un animal au repos.

Boulevard Defontaine. Totor et Tutur sont disposés à nous accueillir...

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L’idée de donner les noms de Totor et Tutur aux deux lions proviendrait, apparemment, des prénoms des deux fils du concierge du Palais de Justice, Nestor et Arthur, communément surnommés par les habitués du Palais, Totor et Tutur.

Le journaliste Jules Bufquin des Essarts (Charleroi, 1849 - La Rochelle, 1914) les reprit et les immortalisa. Né au sein d’une famille d’origine française de conviction républicaine qui s’était réfugiée à Charleroi en 1830, il était devenu un homme politique, membre du P.O.B. (Parti Ouvrier Belge). En 1880, il succéda à son père comme directeur du Journal de Charleroi et lui donna une orientation d’abord libérale progressiste, puis socialiste.

Le journaliste avait imaginé pour son quotidien une chronique où les deux lions, Totor et Tutur, en voyant passer devant eux pas mal de monde, s’échangeaient à leur propos divers commentaires.

2° Idées pour une exploitation pédagogique

A partir de l’observation des deux sculptures en bronze, l’enseignant peut poser quelques questions aux élèves et leur donner différentes consignes :

- De quel animal s’agit-il ? Pourquoi un lion ? Cherchez-en la signification dans l’histoire et la littérature en général et ensuite pour la Belgique en particulier ?

- Regardez-bien le lion de gauche, qu’a-t-il à hauteur de son poitrail ? « Une cicatrice » Explication : il s’agit d’un impact de balle. En août 1914, l’endroit fut l’objet de tirs de l’armée allemande qui entrait dans la ville (la plupart des habitations du boulevard furent d’ailleurs incendiées).

- Où se trouve la signature du sculpteur ?

- D’où proviennent les surnoms qui leur furent donnés ? La réponse figure sur le panneau explicatif placé à l’entrée du site.

Pour en savoir plus : http://www.charleroi-decouverte.be

A l’origine, les lions siégeaient à l’entrée de l’ancien Palais de Justice, boulevard Audent (Collection Philippe Nonclercq)

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11/ LE MINEUR ET LE MÉTALLURGISTE, SCULPTURES EN BRONZE DE MEUNIER

1° Eléments historiques

Constantin Meunier (1831-1905) était un peintre et sculpteur réaliste belge du XIXe siècle qui devait sa réputation internationale à l’introduction des ouvriers, des dockers et des mineurs dans les arts plastiques comme icônes de la modernité. Son regard sur l’homme et sur le monde était plein d’empathie, engagé et lié à l’évolution industrielle, sociale et politique de son temps. Ce fut à partir de 1880 qu’apparurent chez l’artiste les premières scènes de travailleurs industriels (50e anniversaire de notre indépendance). À partir de 1885, Constantin Meunier multipliait les scènes de la vie dans les mines de charbon. Il se rendait sur place pour croquer ces paysages industriels fascinants. Dans les œuvres qui en résultaient, il montrait le travail épuisant et dangereux des mineurs. Il représentait aussi ces hommes, femmes et enfants voués à vivre dans l’obscurité, dans des tonalités sombres, à l’image de leur existence monotone, poussiéreuse et dénuée de toute perspective.

En Belgique, Bruxelles et Charleroi sont les seules à exposer quelques-unes de ses œuvres dans l’espace public. Les deux sculptures en bronze de Charleroi, Le Mineur et Le Métallurgiste, illustrent les deux principales activités industrielles de la ville : l’extraction du charbon et le travail du fer. La signature de Constantin Meunier est aisément lisible sur Le Mineur, beaucoup moins nettement sur Le Métallurgiste.

De part et d’autre du pont Roi Baudouin se dressent les deux statues de Constantin Meunier

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2° Idées pour une exploitation pédagogique

L’enseignant peut établir avec les élèves une analyse à partir de l’observation des deux sculptures :

1° Le Mineur : décrivez l’habillement de l’ouvrier (casque, torse nu, pantalon, pieds nus) et l’outil (une hache). Sa position est celle d’un homme accroupi. Pourquoi un casque ? Pourquoi est-il torse nu ? Pourquoi une hache ? (Danger, chaleur, abattage du charbon dans une mine). Pourquoi la position accroupie ? (La petitesse des tailles de charbon). C’est un mineur ! Aujourd’hui les mines de charbon ont cessé de fonctionner mais regardez autour de vous, sur la ligne d’horizon, vers le sud et l’est : Qu’en subsiste-t-il ? (Des terrils).

2° Le Métallurgiste (face à la gare) : décrivez l’habillement de l’ouvrier (gros pantalon, pas de chemise, pieds nus) et l’outil (un marteau). Sa position est assise. Pourquoi est-il torse nu ? (Chaleur des hauts-fourneaux - 1200° pour faire fondre du minerai de fer). Pourquoi un marteau ? (Pour frapper). Oui, mais quoi ? (Sur du fer pour le façonner sur l’enclume dès qu’il sort du fourneau). C’est donc un marteleur ! Qu’est-il en train de faire ?… Regardez autour de vous, sur la ligne d’horizon, vers l’ouest. Les usines d’où s’échappent des fumées sont des usines où on continue de travailler le fer. Il s’agit de TM (pour Thy-Marcinelle).

Ces ouvriers exerçaient-ils un métier facile ? Etait-il dangereux ? Expliquez . Y a-t-il parfois des accidents, des catastrophes ?

3° Bibliographie

BEHETS Armand, Constantin Meunier : l’homme, l’artiste et l’œuvre, 1942, Bruxelles.

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12/ LES COMBATS POUR CHARLEROI EN AOÛT 1914

En 2014, pour commémorer le centième anniversaire du déclenchement de la Première Guerre mondiale et les combats meurtriers qui se déroulèrent dans la vallée de la Sambre et connus dans l’histoire sous le nom de Bataille de Charleroi, la Maison du tourisme du Val de Sambre et Thudinie a réalisé un vaste programme placé sous le tourisme de mémoire. Il en résulte, à Charleroi, la pose de trois panneaux explicatifs rappelant les principaux faits et une capsule vidéo de 3 min. visible sur son site, http://www.sambrerouge14-18.be/ .

D’autres panneaux ont été réalisés et placés en d’autres lieux de mémoire : Couillet, Marchienne-au-Pont et Monceau-sur-Sambre.

1° Eléments historiques

1. Panneau explicatif : les chasseurs à pied pendant la Grande Guerre (extrait)

Emplacement : boulevard Général Jacques, face à la caserne Trésignies.

Eté 1914. La guerre est imminente. Le matin du 3 août 1914, sous les ovations de la foule, le 1er régiment Chasseurs et son dédoublement le 4e régiment de Chasseurs à pied quittèrent la caserne d’infanterie qu’ils occupaient depuis 1883. Les chasseurs embarquèrent dans un train pour Namur, point de concentration de la 4e division. L’invasion allemande de la Belgique commença le 4 août 1914. Les chasseurs furent immédiatement dirigés sur Huy avec mission de défendre les passages sur la Meuse. Deux jours plus tard, ils furent appelés en renfort pour prendre part aux combats de Liège. Durant la Grande Guerre, 1556 chasseurs tombèrent pour la Belgique. La caserne porta le nom du caporal Trésignies, en hommage à l’action héroïque accomplie par ce soldat du 2e régiment Chasseurs et durant laquelle il perdit la vie le 26 août 1914.

Boulevard Général Jacques. Cour intérieure de la caserne Trésignies

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2. Panneau explicatif : les premières victimes de la guerre 14-18 à Charleroi (extrait)

Emplacement : rue du Pont-Neuf, sur le terre-plein à hauteur de la rue de Montigny.

L’invasion allemande de la Belgique a commencé le 4 août 1914. Dès le 20 août, des avant-postes français s’établirent sur la Sambre et occupèrent les ponts de la ville. Le lendemain, vers six heures du matin, les premiers Allemands pénétrèrent à Charleroi, via la route de Bruxelles, sans être inquiétés car les passants les prenaient pour les Anglais, censés nous porter aide.

A Charleroi, arrivés au carrefour des rues de Montigny et du Pont-Neuf, les Allemands tombèrent sur des avant-postes français. De la barricade au fond de la rue, les mitrailleuses françaises tirèrent. Cette fusillade fit les premiers blessés et les premiers morts dans la cité. Ils furent transportés à l’hôpital civil de Charleroi et au collège du Sacré-Cœur.

3. Panneau explicatif : le 22 août 1914. Charleroi incendiée. Morts, pillages et désolation.

Emplacement : sur le terre-plein, à l’intersection de la rue de la Montagne et du boulevard de l’Yser.

L’invasion allemande de la Belgique commença le 4 août 1914. Les villes belges tombèrent les unes après les autres. Le 22 août, les troupes allemandes envahirent Charleroi. Des fusillades éclatèrent à la Porte de Waterloo et les Allemands déferlèrent sur la ville, entraînant dans leur sillage de lourds panaches de fumées. Ils incendièrent plusieurs quartiers de la ville et prirent des otages qu’ils utilisèrent comme boucliers humains pour se protéger des tirs français. Les soldats français furent submergés et se replièrent.

Sous prétexte de débusquer de possibles franc-tireurs, les Allemands brûlèrent méthodiquement les bâtiments au moyen de petites pastilles incendiaires. Les rues de la Montagne, du Grand-Central et tout le boulevard Audent ne furent plus qu’un gigantesque brasier. Au total, 155 immeubles furent détruits et 42 civils tués. Dans les jours qui suivirent, les Allemands pillèrent les lieux pour récupérer métaux, objets de valeur et œuvres d’art épargnés par les flammes, terminant de désoler ce qui était le cœur de la cité.

Remarque : le panneau où fut signé le traité de Couillet est installé au Château de Parentville (Couillet)

Le 23 août 1914 - Le Traité de Couillet (extrait)

Le dimanche 23 août, le bourgmestre, Emile Devreux, tenta une démarche auprès du général Von Bahrfeldt. Avec l’échevin Emile Buisset et quelques notables, il partit rencontrer l’état-major allemand installé au Château de Parentville (Couillet). Là, sous prétexte que des civils auraient tiré sur ses soldats, le général allemand imposa une indemnité de guerre à Charleroi, sans quoi le feu des canons se serait abattu sur la ville.

Contraintes et forcées, les autorités civiles signèrent le Traité de Couillet. La population du bassin de Charleroi fut condamnée à payer une rançon de dix millions de francs belges et d’importants avantages en nature. Le soir même, avec le concours des banques et de notabilités de la région, la première tranche fut payée. Quant aux réquisitions en nature, les communes de l’agglomération s’engagèrent solidairement à les fournir pour répondre aux exigences de l’envahisseur.

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2° Idées pour une exploitation pédagogique

L’enseignant peut engager une discussion avec les élèves à partir de différentes questions portant sur le contenu des panneaux repris ci-dessus :

Nous sommes en Belgique et pourtant quelle est la nationalité des soldats présents (ou censés l’être) dans les rues de Charleroi en août 1914 ? (Ce sont des Français, des Allemands et des Anglais). Pourriez-vous apporter une explication au pourquoi de leur présence respective sur notre territoire ? (Les Allemands envahiront la Belgique pour contourner le système défensif français installé sur leur frontière commune. Les Français et les Anglais, en se basant sur le principe de neutralité imposé à notre pays en 1830, se portent à la rencontre de l’armée allemande pour défendre notre neutralité et contraindre l’ennemi à la retraite).

La Bataille de Charleroi est donc un des premiers affrontements armés de quel conflit ? (La Première Guerre mondiale). Quelles étaient les clauses imposées par les Allemands à la ville de Charleroi dans le Traité dit de Couillet ? (D’importantes sommes d’argent et d’énormes quantités de ravitaillement. Cette rançon s’explique dans la mesure où le grand bassin industriel de Charleroi, avec ses banques et ses entreprises, était censé en 1914 les posséder. Ne pas y souscrire aurait été risquer sa destruction)...

3° Bibliographie

A. LEMAIRE, L’invasion allemande au Pays de Charleroi, Bruxelles, 1929. Ouvrage disponible à la bibliothèque Rimbaud. Etant donné sa rareté, cet ouvrage a été récemment réédité sous le titre Charleroi-août 1914 : crimes, incendies, pillages bombardements. « L’invasion allemande au Pays de Charleroi », par Philippe NONCLERCQ, Liège, 2013.

Voir aussi Le Carnet retrouvé. Louis Dermine raconte Charleroi en août 1914, Préface, commentaires et illustrations d’Etienne GRANDCHAMPS, Marcinelle, 2014.

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Boulevard Audent. Ruines des immeubles incendiés en août 1914 lors de l’entrée de l’armée allemande dans Charleroi

(Collection Etienne Grandchamps)

boulevard Audent. Destructions allemandes à Charleroi en août 1914 (collection Philippe Nonclercq)

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13/ LA PLAQUE COMMÉMORATIVE DÉDIÉE AU CAPORAL TRÉSIGNIES (1886-1914)

1° Eléments historiques

Léon Trésignies (1886-25 août 1914) était né à Bierges (entité de Rebecq, Brabant wallon). En 1906, par tirage au sort, il fut appelé sous les drapeaux pour être affecté au 2e régiment de Chasseurs à pied, caserné à Mons. Etabli à Bruxelles, il se maria en 1910 et fut bientôt père d’un enfant.

Début août 1914, suite à l’entrée en Belgique de l’armée allemande, le soldat reçut son ordre de mobilisation et rejoignit son unité dans la position fortifiée d’Anvers. Le 25 août, tentant une sortie, son peloton dut franchir à Pont-Brûlé le canal de Willebroeck mais le tablier du pont était levé et le mécanisme d’abaissement situé sur l’autre rive, était occupé par l’ennemi. Léon Trésignies se proposa comme volontaire pour effectuer la manœuvre en sachant que la mission serait très périlleuse. Ayant franchi le canal à la nage, c’est en actionnant le mécanisme du pont qu’il fut vu par l’ennemi et fut mortellement touché par ses tirs. Promu caporal à titre posthume et devenu héros national, de nombreux hommages lui furent rendus au lendemain du conflit.

Léon Trésignies ne fut jamais caserné à Charleroi mais comme son régiment intégra la caserne à partir de mai 1919, il fut décidé de la désigner du nom de son principal héros. La plaque commémorative qui rappelle son acte fut apposée sur l’édifice le 3 octobre 1920.

Boulevard Général Jacques. Jour de commémoration devant le monument dédié au caporal Trésignies

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2° Idées pour une exploitation pédagogique

Il serait judicieux de réunir sous un même thème l’histoire tragique du caporal Trésignies avec la découverte de la cour carrée de la caserne et de son musée. Comme le 2e régiment de Chasseurs a de nos jours quitté la caserne, l’accès à sa cour intérieure est désormais libre. Deux engins militaires y sont exposés en même temps que diverses autres plaques commémoratives. Le musée n’est ouvert que sur rendez-vous, après contact avec le conservateur. L’ensemble devrait permettre à l’enseignant de retracer dans les grandes lignes le rôle que joua notre armée depuis notre Indépendance. La caserne a été construite en 1879-1881 dans le style militaire néo-gothique.

3° Bibliographie et muséographie

http://www.1914-1918.be/soldat_tresignies.php.

http://www.charleroi-decouverte.be. le caporal Léon Trésignies.

http://www.chasseurs-a-pied-belges.be/musee/ - La Salle Caporal Trésignies est accessible sur rendez-vous préalable.

Charleroi. Musée des chasseurs à pied. Le prix de la liberté, s.d., (ca. 1990).

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14/ LE MONUMENT AU PIGEON SOLDAT

1° Eléments historiques

Situé dans le parc Astrid, le monument au pigeon soldat est l’œuvre du sculpteur belge Alphonse DARVILLE (Mont-sur-Marchienne, 1910 - Charleroi, 1990). Financé par les sociétés colombophiles, il a été inauguré le 11 novembre 1951 en mémoire du pigeon transmetteur de messages en période de guerre.

Les pigeons voyageurs étaient particulièrement utilisés puisqu’en 1914-1918 l’accès à des moyens de communication était encore aléatoire. Dès novembre 1914, des pigeons provenant de colombiers anglais sont acheminés en contrebande en Belgique occupée par les Pays-Bas, restés neutres dans le conflit. Par la suite, le contrôle accru de la frontière par les Allemands incitera les services britanniques à faire appel à la Royal Air Force pour procéder au largage de paniers de volatiles à l’arrière des lignes ennemies, à charge pour les Belges, les découvrant, de relâcher l’animal non sans avoir au préalable rempli le questionnaire de renseignements militaires et l’avoir fixé à la patte du volatile. Le pourcentage de pigeons rentrant au bercail était de 40%. Leur usage se poursuivit jusqu’à la fin du conflit.

Outre la transmission de messages, les pigeons furent parfois requis pour réaliser des photographies aériennes. Conscients du danger que constituait le recours à ces pigeons dans la transmission de renseignements militaires, les Allemands infligèrent aux civils détenteurs de pigeons une peine de prison.

Certains des pigeons qui se sont illustrés sur le front pendant les deux conflits mondiaux ont été décorés comme des soldats. C’est ainsi que le pigeon appelé Vaillant doit sa célébrité au fait qu’il fut le dernier à être lâché d’un fort

Parc Reine Astrid, côté boulevard Defontaine. Monument au pigeon soldat, œuvre d’Alphonse Darville

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de l’enceinte de Verdun en juin 1916, annonçant sa chute imminente. Le volatile parvint au colombier, fortement invalidé par les gaz de combat. Il vécut encore quelques années (NB : la commémoration de la bataille de Verdun a eu lieu en février 2016).

Seuls deux autres monuments rendant hommage aux pigeons soldats se trouvent à Lille et à Bruxelles.

2° Idées pour une exploitation pédagogique

A partir de l’observation du monument, l’enseignant peut susciter la réflexion des élèves en leur posant différentes questions :

- Que pouvons-nous lire sur sa face avant ? (Pigeon-soldat). Il n’a pas de casque et pourtant, c’est un soldat, donc logiquement en activité de service en période de guerre. Avez-vous une idée de la mission du pigeon en période de guerre ? - Réfléchissez à deux exemples de message qu’il pouvait donner.

- En période de paix, quelle est la mission généralement demandée à un pigeon ?

- Quelqu’un connaît-il un propriétaire de pigeons ?

- Comment désigne-t-on en bon français un propriétaire de pigeons ?

3° Bibliographie

- www.maisondusouvenir.be : Les pigeons voyageurs, agents de liaison des Forces armées en temps de guerre (Article de René Dax qui parut dans le journal « Le Soir » du 4 février 1980).

- http://www.bel-memorial. monuments Hainaut, Monument au pigeon-soldat à Charleroi .

- Jilly COOPER, Animals in War, 1983, London. (Remarquable article d’une douzaine de pages sur le recours aux pigeons au sein des forces armées britanniques pendant les deux conflits mondiaux).

- ENGELS Emile, Dans le dos des Allemands, 14-18, leur consacre un chapitre - Sur les routes d’Icare, pp. 233-236., Bruxelles, 2014. L’ouvrage est disponible à la bibliothèque Rimbaud, à Charleroi.

- Sur la transmission de renseignements par la voie des airs en Belgique à l’aide de pigeons, voir L. VAN YPERSELE et E. DEBRUYNE, De la guerre de l’ombre aux ombres de la guerre, Bruxelles, 2004, pp. 48-51. L’ ouvrage est disponible à la bibliothèque de l’Université du Travail.

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15/ PLAQUE COMMÉMORATIVE DÉDIÉE À LA RÉSISTANTE FERNANDE VOLRAL (1920-1944)

1° Eléments historiques

Fernande VOLRAL était née le 7 octobre 1920 en France mais sa famille était installée à Charleroi depuis 1930. En 1940, elle habitait Jette où elle venait de se marier et y exerçait la profession de modiste.

En 1941, elle rencontra Raoul Baligand (Partisans Armés) qui la recruta en qualité de courrier et, en 1942, elle entra en contact avec le groupe dit du 10 de la rue de la Perle, à Molenbeek Saint Jean.

Le 23 février 1943, suite à une dénonciation, elle fut arrêtée à son domicile. Elle tenta de s’échapper et tira, blessant un des deux policiers allemands venus pour l’appréhender. Incarcérée à la prison de Saint-Gilles (Bruxelles) jusqu’au 11 septembre 1943, elle fut ensuite déportée en Allemagne. On l’emmena à la prison de Leer (Saxe) pour y être jugée par le Volksgericht le même jour que Marguerite Bervoets. Les deux femmes suivirent ensuite le même trajet qui les conduisit à Wolfenbüttel (Basse-Saxe) pour y être exécutées le 7 août 1944. La lettre d’adieu adressée à sa mère est reproduite dans Partisans au Pays Noir, pp.44-45 suite au témoignage d’Yvonne LEDOUX (ouvrage disponible à la bibliothèque Rimbaud).

Boulevard des Alliés. Plaque commémorative dédiée à Fernande VOLRAL.

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2° Idées pour une exploitation pédagogique

A peine âgée de 23 ans au moment de sa mort, cette jeune femme dont le nom est aujourd’hui oublié devrait retenir l’attention par son abnégation et le courage dont elle a fait preuve dans la Résistance face à l’oppression nazie.

Pour ceux qui le souhaitent, il serait judicieux de rappeler que son destin tragique est similaire à celui de beaucoup d’autres, tombés eux-aussi dans l’anonymat, et qui cependant, dans la ville de Charleroi même, s’opposèrent à l’occupant. Quoique limité au groupe des Partisans Armés, émanation du PCB, l’intéressant mémorandum que lui consacre Yvonne Ledoux, Partisans au Pays Noir, en donne une large perspective.

Les actions de la Résistance sont nombreuses et variées (presse clandestine, transmission de courrier, aide aux illégaux, chaîne d’évasion de pilotes alliés, etc.) mais certaines actions d’éclat qui ont pour cadre Charleroi pourraient être racontées aux élèves.

- 12 avril 1942 : des résistants contrôlent, de nuit, un charbonnage de Marcinelle et y dérobent à l’insu de l’ennemi une grande quantité d’explosifs et de détonateurs.

- 11 novembre 1943 : trois résistants osent hisser le drapeau belge sur l’Hôtel de Ville, juste au-dessus de l’emblème nazi.

- Juin-septembre 1944 : sept prisonniers soviétiques évadés sont cachés dans le beffroi de l’Hôtel de Ville alors que la police allemande occupait le rez-de-chaussée.

3° Bibliographie

Partisans au Pays Noir, récit d’Yvonne LEDOUX, Bruxelles, 1995.

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16/ LES PERSONNAGES DE BANDES DESSINÉES DE L’ECOLE DE MARCINELLE

En surface, du square Hiernaux jusqu’au parc Reine Astrid, la Ville a disposé les personnages les plus représentatifs de la bande dessinée du Journal de Spirou. Leur accès n’est pas aisé car ils sont tous - à l’exception d’un seul - placés sur le promontoire d’un rond-point. Il convient donc de les découvrir le plus souvent à distance.

En sous-sol, les stations de métro Parc et Janson reprennent l’ensemble des personnages du journal. A la station Janson, ils y sont tous. A la station Parc, seuls y figurent Lucky Luke et les frères Dalton.

1° Eléments historiques

L’école de Marcinelle, ou école de Charleroi, est un style de bande dessinée associé au journal Spirou. Le nom vient de l’ancienne commune de Marcinelle, maintenant rattachée à Charleroi, où Jean Dupuis a fondé le Journal de Spirou.

Rond-point du square Jules Hiernaux. Le Marsupilami

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A. Le Marsupilami (rond-point du square Jules Hiernaux)Le Marsupilami est un animal jaune à tâches noires muni d’une force démesurée et d’une longue queue aux multiples fonctions (grâce à elle, il se déplace d’arbre en arbre, se protège en l’utilisant en tant qu’arme, se nourrit en l’utilisant pour pêcher…).

Cette créature imaginaire vivant dans la forêt de Palombie (en Amérique du Sud) a été créée par André Franquin en 1952. D’abord apparu dans les albums de « Spirou et Fantasio », une bande dessinée sera par la suite consacrée au Marsupilami afin d’illustrer ses nouvelles aventures. En 1987, le dessinateur Batem, avec le soutien de Franquin, lui a inventé ses propres histoires dont en voici quelques exemples : « Capturez un Marsupilami ! », « La queue du Marsupilami », « Le bébé du bout du monde »...

B. Boule et Bill (rond-point du square boulevard Dewandre, au croisement du boulevard Joseph II)

La bande dessinée « Boule et Bill » a vu le jour en 1959 dans le journal Spirou. Elle raconte les aventures et gags d’une sympathique famille : Boule, un enfant ayant pour meilleur ami Bill, un adorable cocker anglais facétieux, vivant avec ses deux parents dans un pavillon. Jean Roba en est l’auteur. Il a ensuite passé sa plume à Laurent Verron quelques années avant sa mort. Voici quelques exemples d’albums : « Tel Boule, tel Bill », « Boule et Bill déboulent », « Les copains d’abord »...

Boulevard Dewandre. Boule et Bill vous accueillent à proximité du Stade du Pays de Charleroi ...

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C. Spirou et Fantasio (rond-point du boulevard Zoé Drion, à l’angle du boulevard Paul Janson)Le personnage « Spirou » a été inventé par Robert Velvet en 1938. Avec la collaboration de son épouse, ils ont réalisé les scenarii des aventures du célèbre groom. La série a ensuite été reprise par Jijé (célèbre auteur de la bande dessinée européenne). Spirou, accompagné de son ami Fantasio et de son fidèle compagnon Spip, les deux reporters et l’écureuil vivront de nombreuses péripéties : ils combattront des gangsters, des savants fous…, ils iront en Palombie découvrir le mystère du Marsupilami… Voici quelques exemples d’albums : « La colère du Marsupilami », « Dans les griffes de la vipère », « La face cachée du Z »…

D. Lucky Luke et Jolly Jumper (parc Astrid, en bordure du boulevard Willy Ernst)En 1946, Morris (Maurice de Bévère) a créé le célèbre cow-boy Lucky Luke. Il lui fera parcourir l’Ouest américain où il y vivra différentes aventures afin d’y faire régner l’ordre et la justice. Avec son fidèle cheval, Jolly Jumper, « l’homme qui tire plus vite que son ombre » s’engagera dans une perpétuelle poursuite de bandits dont les fameux frères Dalton.

La station de métro Parc de Charleroi est consacrée au personnage et à ses comparses (qu’ils soient parmi les bons ou les méchants). Depuis les quais, dont l’accès est pour l’instant encore libre et aisé, surgissent d’un côté l’illustration concrète de Lucky Luke, de l’autre le récit, en B.D., de l’attaque d’un train par les frères Dalton, avec en conclusion la tirade habituelle prononcée par Lucky Luke : « I am a poor lone some cow-boy, and a long, long way from home ».

2° Idées pour une exploitation pédagogique

On notera que la bibliothèque Rimbaud, boulevard Defontaine, dans sa section jeunesse, met à la disposition du jeune public de très nombreux albums de bande dessinée dont il est question ci-dessus.

Il serait par ailleurs judicieux de demander aux enfants qu’ils s’adressent à leurs parents et grands-parents pour qu’ils en recherchent dans la bibliothèque de leur enfance. Si nous sommes, bien entendu, dans l’imaginaire, une portée pédagogique est toujours envisageable. Exemple : La Marsupilami est certes une fiction mais observons son biotope, son milieu naturel. La Palombie est manifestement une région d’Amérique du Sud, au cœur de la jungle amazonienne. Le Marsupilami est arboricole (lianes, canopée) et il fréquente les tapirs, aras et autres piranhas.

3° Bibliographie

- https://fr.wikipedia.org

- http://www.lexpress.fr/culture/livre/comment-le-marsupilami-est-il-ne_1077009.html

- http://www.franquin.com/marsu/index_marsu.php

- http://www.marsupilami.com

- http://www.bouleetbill.com/site/

- http://www.dupuis.com/

- http://www.spirou.com/album/spirou-et-fantasio.php

- http://www.bdcentral.com/Spirou/spirou_auteurs.php

De nombreux albums sont présents dans la section jeunesse de la bibliothèque Rimbaud, à Charleroi.

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Rond-point du boulevard Zoé Drion. Spirou et Fantasio

Station de métro Parc, boulevard W. Ernst. Un personnage de bande dessinée bien connu vous y attend...

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17/ LES GÉANTS

1° Eléments historiques

Les géants apparurent dans le folklore carolorégien dès le XIXe siècle mais ce n’est vraiment qu’à partir des fêtes de Wallonie de septembre 1936 qu’ils entrèrent progressivement dans les cortèges carnavalesques. Ils sont aujourd’hui 11.

Djean et son épouse Djènne étaient censés représenter un couple de Charleroi, parti aux Etats-Unis; Djean pour fournir son savoir-faire dans le secteur verrier. Leur retour en gare de Charleroi (sic), dicté par la nostalgie de leur région, allait être célébré en grande pompe en présence du maïeur et de son adjoint, el’ Champète, sans oublier el’ Facteur. On en perdit ensuite leur souvenir jusqu’à ce qu’ils réapparurent en 1956.

L’année suivante, en 1957, quatre autres géants, à l’image de personnages autrefois très populaires à Charleroi dans la vie associative, furent créés. Ce fut :

- Ferdinand DAVAUX (1878-1918), dit Nénesse, qui fut le rédacteur de nombreux textes dans le premier hebdomadaire patoisant du Pays Noir, intitulé L’Tonnia d’Charlerwet (1er numéro en 1895 ) qui vude ès trop plein tous les sam’dis matin à l’piquette du d’jou !

Sa biographie et la reproduction d’une plaque commémorative autrefois sise rue du Collège, n°5 sont disponibles dans http://www.charleroi-decouverte.be .

Scène populaire à Charleroi un jour de carnaval, les Géants défilent dans le cortège

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- François LAHOUSSEE (prononcez Lawousse) était connu pour être un musicien clarinettiste de talent. Ce virtuose était souvent l’animateur du bal des Climbias à Lodelinsart.

- Léopold WILLLEMS, dit Maka, bien connu de tous les débits de boisson de la Ville, devait son surnom au fait qu’avec une force comparable à un maka, marteau-pilon en usage dans l’industrie lourde, il portait les bagages des voyageurs qui arrivaient en train en gare de Charleroi-Sud.

- Le maïeur, en beaux habits et ceint de son écharpe mayorale, ne pouvait évidemment qu’être membre du cortège. En 1987, le cortège des géants vit apparaître El Djambo, le fils de Djean et Djènne, né au lendemain de leurs noces de perle (30 ans de mariage) .

En 2000, l’Echevin Escarmure, celui-là même qui maria Djean et Djènne, rejoignit le groupe. Enfin à une date indéterminée, le Mineur vint s’y ajouter.

L’apparition dans le cortège, à un moment donné, de ces personnages résulte toujours de la volonté du comité organisateur du carnaval de sauvegarder leur souvenir, soit symbolique (le facteur, le mineur, le bourgmestre, etc.), soit réel (Davaux, Lahousse, etc.).

2° Idées pour une exploitation pédagogique

La découverte des Géants sera toujours une surprise pour les enfants. Fruit du folklore wallon et carolorégien en particulier, il ne sera pas nécessaire de s’attarder sur l’origine et le rôle tenu par chacun d’eux. Le plus simple serait de laisser libre cours à leur imagination.

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18/ LA TRAGÉDIE MINIÈRE DU BOIS DU CAZIER, À MARCINELLE (8 AOÛT 1956)

1° Eléments historiques

A. La tragédie La catastrophe du Bois du Cazier s’inscrivait dans l’histoire de La Bataille du Charbon que le gouvernement belge lança au lendemain de la Deuxième Guerre mondiale, considérant que le charbon devait être l’élément clef de la relance économique du pays. Comme les pénibles conditions de travail et la relative insécurité qui régnait dans la fosse n’attiraient plus le mineur belge, les prisonniers de guerre allemands furent dans un premier temps contraints au travail dans les charbonnages mais leur libération en 1947 amena la Belgique à faire appel à l’immigration italienne. C’est ainsi que des dizaines de milliers de travailleurs transalpins furent engagés par les patrons charbonniers belges.

A Marcinelle, à la mine du Bois du Cazier, en ce matin du mercredi 8 août, 274 hommes du poste de jour sont descendus dans les profondeurs de la terre. A 8 heures 10, par maladresse ou suite au malentendu d’un message envoyé de la surface, le préposé à l’encagement des berlines à l’étage - 975m, commit une erreur : un wagonnet n’était que partiellement engagé ; lorsque la cage démarra pour remonter, le chariot arracha au passage des câbles électriques à haute tension, rompit une conduite d’air comprimé et une canalisation transportant de l’huile. La formation d’un arc électrique mit le feu à l’huile pulvérisée. L’incendie qui se déclencha prit aussitôt des dimensions incontrôlables, tragiques. Seuls douze mineurs parvinrent à s’échapper (ou furent retrouvés peu après) par les sauveteurs dépêchés sur les lieux. Les 262 autres mineurs de 12 nationalités différentes, 136 étant des travailleurs italiens, y trouvèrent la mort. Le charbonnage du Bois du Cazier ferma définitivement ses portes en 1967. Devenu un lieu de mémoire, il fut ouvert au public en 2002.

Le site minier est inscrit sur la liste du patrimoine mondial de l’UNESCO depuis le 1er juillet 2012.

Le site du charbonnage du Bois du Cazier à Marcinelle-Haies

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B. Le témoignage d’un enfant ...J’avais 6 ans et j’habitais Marcinelle, rue Vandervelde…* par Bernard Lejeune

Ce mercredi 8 août, la journée s’annonçait belle. Dans un ciel d’azur, pas un seul nuage ne pointait à l’horizon. Mon père, qui était enseignant, avait décidé de poursuivre des travaux de jardinage tôt le matin avant que le soleil ne darde ses rayons brûlants sur notre cité.

Il devait être 8h00; dans un souci d’imitation, en « habit de travail » et muni d’un petit arrosoir, j’étais à ses côtés, soucieux de montrer moi aussi mon aptitude à entretenir un potager.

Bien qu’absorbé par son travail, mon père interrompit rapidement celui-ci : en direction des Haies de Marcinelle, au-dessus des frondaisons du verger voisin, s’élevait droit dans le ciel… une colonne de fumée noire que pas un souffle de vent ne parvenait à dissiper. C’est comme un flash back : à chaque fois que je me remémore cette journée, je revois ces sinistres volutes.

Certes, dans l’innocence de ma prime enfance, je ne réalisai pas l’ampleur de l’événement ; sans doute mon père conclut-il qu’un incendie d’une extrême gravité avait éclaté quelque part sur les hauteurs de Marcinelle. Curieux d’en apprendre davantage, il résolut de s’en approcher et accepta… que je l’accompagne. Le trajet ne prit que quelques minutes. Je me vois, marchant à ses côtés et lui tenant la main, emprunter la rue de la Petite Chènevière avant de descendre dans le vallon qui s’étalait au pied du Tienne Bricout. Il devait être 8h30. Je n’ai aucune souvenance d’une quelconque agitation même si, face à nous, à mesure qu’on se rapprochait du Bois du Cazier, l’horizon s’obscurcissait de façon de plus en plus menaçante.

Arrivés à mi-chemin, nous marquâmes un temps d’arrêt à hauteur d’une rangée de maisons ouvrières. Sur le seuil de l’une d’elles, un mineur, accroupi dans la position la plus apte à soulager ses poumons atrophiés par la poussière de charbon, regardait, comme nous, en direction des tours à molettes du charbonnage. Mon père s’adressa à lui, en lui demandant : « Qu’est-ce qui se passe au Cazier ? ». Dans mes oreilles, résonne aujourd’hui encore sa réponse lourde de sens: « I gn-a èl’ feu dins l’fosse éyèt i vont tertous tchér dins l’ bougnoû »**. Réalisant en un instant la gravité de la situation, mon père résolut fort sagement de me reconduire à la maison…

Dans les jours qui suivirent, j’accompagnai à plusieurs reprises mes parents chez un cousin, Alfred Sabeau, chef d’atelier au Bois du Cazier. J’imagine qu’ils s’y rendaient pour y entendre des informations plus précises que ce que la presse était autorisée à communiquer. J’assistai là à un étonnant aparté. Notre cousin était officiellement en congé de maladie et son épouse clamait haut et fort qu’elle lui interdisait, vu son état, de prêter son concours aux sauveteurs. Mais, tandis qu’elle se rendait à la cuisine pour y préparer le café, je l’entendis souffler aux oreilles de mes parents : « Je suis descendu dans la mine mais ne le lui dites pas ! ». Ce n’était pas, de sa part - j’en suis certain - une fanfaronnade mais un humble geste d’assistance volontaire à ceux qui tentaient de sauver des vies.

L’extrémité du jardin de ce cousin - il habitait à droite, dans le bas de la rue des Sarts - donnait exactement sur le chemin d’accès au charbonnage. Aussi, lorsque j’étais lassé des conversations d’adultes, je m’y rendais et, juché sur un muret, j’appréhendais le drame qui se déroulait sous mes yeux d’enfant; vers moi, de la foule, agglutinée contre la grille, montaient des pleurs et des cris…

J’ai ainsi gardé en mémoire l’image de cette femme aux traits tirés, assise sur le rebord de la fenêtre de sa chambre, là, en face, dans une des maisons bordant la rue du Cazier.

Allégorie de la douleur humaine, elle fixait obstinément l’entrée du charbonnage, sans doute dans l’espoir d’en voir resurgir un être cher…

J’avais six ans et j’habitais Marcinelle…

* Ce récit est paru dans l’Edition spéciale Marcinelle 50e anniversaire 1956-2006, Les Nouvelles du Bois du Cazier, n°8-9, Mars-Août 2006.

** « Il y a le feu dans la mine et ils sont tous tombés dans le fond du puits».

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2° Idées pour une exploitation pédagogique

- Vivement conseillée à tous, la découverte de ce site industriel marqué par la tragédie se fait avec l’aide de guides attachés au mémorial. (Informations et réservations via le site internet www.leboisducazier.be).

- Après la visite du charbonnage, un détour par la Grand’ place de Marcinelle-Centre permet de découvrir le monument érigé en souvenir des mineurs morts au Cazier.

- L’ assemblage de dix blocs de marbre offerts par tous les Etats (situation géopolitique de 1956) qui comptaient parmi les victimes des nationaux mérite un arrêt. Preuve de l’universalité du monde du travail, il peut être demandé aux enfants de localiser sur une carte muette appropriée ces dix états européens. Ce sont la Belgique (pour la flèche en marbre), l’Italie, la France, la Grande-Bretagne, les Pays-Bas, l’Allemagne, la Pologne, la Hongrie, la Grèce et l’Union des Républiques Socialistes Soviétiques.

- Cet exercice de géographie politique devra nécessairement être précédé d’une recherche linguistique puisque chaque Etat donateur a tenu à graver sur son bloc de marbre son nom officiel selon sa langue et son alphabet. Certes quelques-uns des termes (ITALIA, FRANCE, GREAT BRITAIN) ne devraient pas poser un problème de compréhension mais qu’en sera-t-il de certains autres comme (HELLAS) pour la Grèce, de CCCP (en caractères cyrilliques russes) pour l’ URSS, de NEDERLAND pour les Pays-Bas, de DEUTSCHLAND pour l’Allemagne, de POLSKA pour la Pologne et de MAGYAROSZÀG pour la HONGRIE ?

- Et puisque le monument a été érigé et inauguré en 1960, l’ALGERIE, devenue indépendante en 1962, et l’UKRAINE, qui proclama son indépendance en 1991 suite à la dissolution de l’URSS, ont tenu à être ajoutées à la liste parce que certains de leurs ressortissants figuraient eux-aussi parmi les victimes. Voilà pourquoi, sur la Drève de la Mémoire, directement accessible à partir du site muséal, ont été plantées en 2005 douze (et non plus dix) essences végétales distinctes. Parmi elles, il sera aisé de reconnaître un palmier pour l’Algérie et un poirier pour l’Ukraine. Ces deux Etats sont donc à localiser également sur la carte muette.

- En classe, la lecture du récit d’un gamin de Marcinelle, âgé de 6 ans au moment des faits, devrait permettre aux élèves d’appréhender la façon avec laquelle un enfant a pu ressentir l’ampleur de l’événement.

3° Bibliographie

La librairie du site offre aux visiteurs un vaste choix de livres. Les bibliothèques de la ville en sont également largement pourvues. Voici quelques titres sélectifs :

- BOURGEOIS Willy, Marcinelle, 1035m., Verviers, 1956 (collection Marabout junior). Paru l’année même de la catastrophe.

- DELAET Jean-Louis, FORTI Alain et GROFF Francis, Le Bois du Cazier. Marcinelle, Bruxelles, 2003, présentent l’exploitation minière, la catastrophe et l’immigration italienne sous ses différents aspects. Nombreuses illustrations et photographies.

- FORTI Alain et JOOSTEN Christian, Cazier judiciaire, Bruxelles, 2006.

- En 2008, le site minier a lui-même publié Le Bois du Cazier. Le Guide. Fascicule de poche fort intéressant pour qui souhaite préparer la visite en classe.

- Les sites miniers majeurs de Wallonie, patrimoine mondial : le Grand-Hornu, Bois-du-Luc, le Bois du Cazier et Blegny-Mine, publication de l’Institut du Patrimoine wallon, 2012. Pour le Bois du Cazier, son auteur est J.-L. DELAET.

- Le Bois du Cazier : Patrimoine mondial / sous la coordination de Jean-Louis Delaet et Julie van der Vrecken. Bruxelles ; Marcinelle : Renaissance du Livre ; Le Bois du Cazier, 2016.

Ce document peut être téléchargé sur le site www.charleroi.be