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L'empreinte 2010-2011 : l'action des écologistes au Sénat

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Page 1: L'empreinte 2010-2011 : l'action des écologistes au Sénat
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Session parlementaire 2010-2011

PJL d'orientation et de programmation pour la performance de la sécurité intérieure

PJL de finances pour 2011

PJL interdisant la dissimulation du visage dans l'espace public

PJL organique/PL ordinaire relatif à la gestion de la dette sociale

PJL organique relatif au Défenseur des droits

PJL portant diverses dispositions d'adaptation de la législation au droit de l'Union européenne en matière de santé,

de travail et de communications électroniques

PJL portant nouvelle organisation du marché de l'électricité

PJL portant réforme des retraites

PJL relatif à l'élection des représentants au Parlement européen

PJL relatif à l'immigration, à l'intégration et à la nationalité

PJL relatif à la bioéthique

PJL relatif à la garde à vue

PJL relatif à la lutte contre la prolifération des armes de destruction massive et de leurs vecteurs

PJL relatif au contrôle des importations et des exportations de matériels de guerre et de matériels assimilés, à la simpli‐

fication des transferts des produits liés à la défense dans l'Union européenne et aux marchés de défense et de sécurité

PJL relatif aux droits et à la protection des personnes faisant l’objet de soins psychiatriques et aux modalités de leur

prise en charge

PJL sur la participation des citoyens au fonctionnement de la justice pénale et le jugement des mineurs

PPL de simplification et d'amélioration de la qualité du droit

PPL modifiant certaines dispositions de la loi n° 2009‐879 du 21 juillet 2009 portant réforme de l'hôpital et relative

aux patients, à la santé et aux territoires

PPL organique visant à interdire le cumul du mandat de parlementaire avec l'exercice d'une fonction exécutive locale

PPL relative à l'aide active à mourir

PPL relative à l'atténuation de responsabilité pénale applicable aux personnes atteintes d'un trouble mental ayant

altéré leur discernement au moment des faits

PPL relative à l'indépendance des rédactions

PPL relative à l'organisation de la médecine du travail

PPL relative aux œuvres visuelles orphelines et modifiant le code de la propriété intellectuelle

PPL tendant à améliorer le fonctionnement des maisons départementales des personnes handicapées et portant

diverses dispositions relatives à la politique du handicap

PPL visant à abroger les permis exclusifs de recherches d'hydrocarbures non conventionnels et à interdire leur

exploration et leur exploitation sur le territoire national

PPL visant à faciliter la mise en chantier des projets des collectivités locales d'Île‐de‐France

PPL visant à lutter contre l'absentéisme scolaire

PPL visant à moderniser le droit de la chasse

PPR relative à la politique énergétique de la France

PROJET DE LOI (PJL) / PROPOSITION DE LOI (PPL) / PROPOSITION DE RESOLUTION (PPR) VOTE EELV

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Projet de loi : texte déposé par le Gouvernement.Proposition de loi : texte déposé par un parlementaire.Proposition de résolution : texte déposé par un parlementaire qui ne sera pas traduit sous forme de loi mais d’une déclaration deprincipe relative par exemple à un projet d'acte de l'Union européenne.Abstention : permet de ne pas voter pour ou contre tout en participant au scrutin. Marque généralement un accord global maisune divergence sur une disposition précise.NPPV : “Ne prend pas par au vote” signifie que l’on n’est pas comptabilisé dans les votes. Marque le refus de participer à la dis‐cussion d’un texte jugé indigne.

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M. Ladislas Poniatowski. Mme la ministre,Mme la sénatrice, je vous invite toutes les deux

à venir voir mon grand duc artificiel et je vaisvous expliquer comment on l’utilise…

Mme Nathalie Kosciusko‐Morizet. Je demande qu’il soitnoté au compte rendu intégral que M. le rapporteur nousinvite à venir voir son grand duc artificiel, avec plein desous‐entendus ! M. Ladislas Poniatowski. Mme la ministre, Mme la séna‐trice, avez‐vous déjà vu un grand duc artificiel ?Mme Marie‐Christine Blandin. Je ne fréquente pas lesgrands ducs artificiels !

Échanges entendus lors de l’examen de la proposition de loi sur lachasse. Le grand duc artificiel est un faux hibou servant d’appât.

L’empreinte 2010/11 - 3

Imaginons un peu l’avenir : unParlement français avec unechambre haute vraiment repré‐sentative des territoires et de leurpopulation : un peu plus defemmes que d’hommes, le justepoids des quartiers, avec touteleur diversité, des élus engagés àplein temps sur leur mandat desénateurs, dont l’ancrage local se‐rait une activité intense d’écoutedes acteurs, de débat sur lestextes à venir, de rencontres avecceux dont l’expertise d’usager, deconsommateur ou de profession‐nel qualifierait la réflexion.Des sénateurs et sénatrices en recherche des meilleurs arbi‐trages pour l’intérêt général, loindes lobbies ou des habitudes bétonneuses et polluantes. Dansleur discours : la coopération plutôt que la compétition, unavenir pour chacun plutôt que lacroissance.Des élus qui, pour chaque vote,revisiteraient la phrase de GroBrundtland : « un développementqui répond aux besoins des géné‐rations du présent sans compro‐mettre la capacité des géné‐rations futures à répondre auxleurs », sans oublier la fin dutexte, « en commençant par lesbesoins des plus démunis ».

Imaginons une commission desaffaires économiques et un officeparlementaire d’évaluation deschoix scientifiques et technolo‐giques qui auraient tiré les consé‐quences de Fukushima, et cons‐truiraient l’alternative énergé‐tique : économiser, transporter etconsommer sans gâcher, produireautrement.Des commissions qui travaille‐raient sur la richesse : celle du solvivant, de l’emploi paysan, du savoir‐faire des hommes et desfemmes, de sa transmission et deson acquisition tout au long de lavie. Celle de la culture et de l’épa‐nouissement humain, de l’éduca‐

tion qui construit l’autonomie, dela solidarité. Celle de nos diffé‐rences. Celle du patrimoine santé,pour lequel seraient développésdes trésors d’élimination descontaminants, de prévention, etd’accès aux soins pour tous.Des élus garants des droits hu‐mains, et vigilants sur toutes lesConventions que la France signeet ne respecte pas. Des élus ouverts à l’international, curieuxd’en reproduire les réussites, soucieux de ne pas faire de dégâts là‐bas pour créer de la richesse ici. Des élus attentifs auxréfugiés, au climat, à l’eau, à labiodiversité, capables d’expliqueraux plus égoïstes que notre destinest commun.Un Parlement respecté, qui don‐nerait le la de la volonté populaireà un Gouvernement vertueuxchargé de la mettre en œuvre etde faire des propositions.

Imaginons un peu un grouped’élus écologistes qui pèserait surles décisions, qui donneraitl’exemple de la sobriété et del’éthique, rajeuni, métissé, ren‐forcé par le travail coopératif deses collaborateurs/trices, à lapointe d’innovations sociales, démocratiques, économiques,qui veillerait chaque jour à ce quele bien commun ne soit pas aliénéau profit de quelques‐uns.

Imaginons que ce travail, élaboréavec les députés, contribue à l’in‐telligence du parti et de la coopé‐rative, après avoir été enrichi deleurs aspirations et observations.

Imaginons, et peut‐être que sivous y pensez tous les jours, nousy arriverons, car si nous avons étéles premiers à donner l’alerte,nous sommes aussi les premiersà construire des chemins pratica‐bles pour une utopie désirable etindispensable.

Marie Blandin

• 2 ‐ Session parlementaire 2010‐2011• 4 ‐ Planète sous hypothèque• 6 ‐ Boucs émissaires• 8 ‐ Jeu de lois• 9 ‐ Security is business• 10 ‐ Travailler plus pour vivre moins• 12 ‐ Impressions de mandat• 14 ‐ Valeurs actuelles• 16 ‐ À bout de souffle• 18 ‐ Intoxication volontaire• 19 ‐ Carte vitale gold• 20 ‐ Grande promo sur le vert !• 22 ‐ Democrazy• 23 ‐ Canons à vendre

Sommaire

L’Empreinte • Direction de la publication : Marie‐Christine Blandin • Conception : La p'tite bulle verte ‐ Cesson ‐[email protected] • Mise en page : Natacha Ferjoux ‐ Clairefontaine ‐ contact@nf‐communication.fr

• Impression : L’imprimerie du bocage ‐ Les Lucs‐sur‐Boulogne ‐ [email protected]

Impression encre végétale sur papier recyclé ‐ Ne pas jeter sur la voie publique

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Échos de séance

Imaginons...

Dans l'hémicycle, Jean Desessard explique le fonctionnementdu Sénat aux jeunes du Conseil municipal des jeunes de Pierrefitte

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4 - L’empreinte 2010/11

Planète sous hypothèqueC'est une fuite en avant que rien ne semble pouvoir arrêter. Une insatiable course au profit sans projet, au progrès sansdessein, une société fictive dont le modèle n'est jamais remis en question. Le déficit public est colossal et la facture so‐ciale sera lourde pour les générations à venir. Dans ce climat d'urgence, le Gouvernement affiche de curieuses priorités,remettant toujours à plus tard les mesures salvatrices mais passant en urgence les revendications des lobbies.

« Pour le Gouvernement, faire des économies revient à suppri‐mer des postes dans l’éducation, à trancher dans le budget dela culture, à supprimer les réductions d’impôt qui profitent auplus grand nombre et permettent de créer des emplois. » JeanDesessard

> LOIN DU GRENELLE, LOIN DU COEUR« Le développement durable doit devenir une dimension essentiellede toute l’action publique. Ce n’est pas un choix, c’est une urgence,une nécessité. » déclinait le programme de la campagne Sarkozyen 2007... Les sénatrices et sénateurs EELV ont depuis longtempsdénoncé l'abandon du Grenelle. Mais si les grandes déclarationsd'intention peuvent laisser des doutes, les choix révélés par le projet de loi de finances sont malheureusement très clairs.

Objectif Grenelle : 23% d'énergies renouvelables en 2020.À commencer par le photovoltaïque : « les besoins dans ce sec‐teur sont satisfaits » nous dit François Baroin, ministre du Budget. Satisfaits ? Malgré une politique d'impulsion frileuse,cette filière prometteuse emploie déjà 150 000 personnes quece moratoire met en danger. Le crédit d'impôt est réduit de 50 à 25% pour la France métropolitaine et les autorisationsde nouveaux projets sont suspendues le temps d'une remise àplat du soutien public à la production d'énergie solaire. Pour lesterritoires ultra‐marins, censés être à 50% autonomes en énergied'après le Grenelle, le dispositif d'aide à l'investissement est suspendu sine die. Limites techniques, spéculation, tout est prétexte pour mettre à mal une filière qui n'a clairement jamaisété prise au sérieux puisque rien n'a été fait pour développerune production française génératrice d'emplois durables.

Objectif Grenelle : réduction de 20% desGES dans les transports d'ici 2020Un « bricolage sympathique »... c'est la mention que récoltentles sénatrices/teurs EELV lorsqu'ils abordent la question destransports en commun. Dans la discussion qui a suivi la proposi‐tion de Jean Desessard d'indemnisation kilométrique pour lescitoyen‐ne‐s se rendant à leur travail en vélo, il est apparu combien ‐ même pour des parlementaires censés concevoir la

politique d'un pays à l'échelle du siècle ‐ il est difficile de repen‐ser entièrement nos modes de vie. Même une mesure simplecomme la suppression de la déductibilité des frais de déplace‐ments domicile‐travail de moins de dix km en zones desserviespar les transports collectifs n'a pas pu passer la barrière du formatage automobile.

En matière de pollution automobile, Jean Desessard a salué lebon bilan du bonus/malus mais il a souhaité le rééquilibrer, carle malus ne compense le financement du dispositif qu’à hauteurde 200 M € pour un coût global de 700 M €. Il a donc proposéd’augmenter le malus pour les véhicules de classe E (161‐190 gde CO2 par km) et d’abaisser les seuils d'émission pour les caté‐gories E, F et G en affectant le produit à l’Agence pour le finan‐cement des infrastructures de transport. Réponse invariable :c'est une bonne idée, on en reparlera bientôt. « Le rôle des par‐lementaires se réduit à rien, sinon à parler. […] ou bien les amen‐dements ne sont pas pris en compte, ou bien les mesures viséesne seront examinées qu’en 2013. » Jean Desessard

Quant aux transports aériens, qui émettent le plus de gaz car‐bonique par tonne transportée, Jacques Muller a proposé de « rétablir une fiscalité plus conforme aux objectifs de lutte contrele changement climatique » pour les vols intérieurs, afin de gom‐mer la distorsion de concurrence préjudiciable au train. Inima‐ginable bien sûr, de peur de pénaliser les aéroports frontaliers !La mise en place d'une contrainte carbone pour le secteur aérienrésoudra tout. Quand ça ? « Dans les prochaines années »...

« Être écologiste, c’est utiliser au mieux les ressources, les ré‐partir justement et les investir utilement. C’est s’assurer que lesdépenses de l’État ont bien une utilité sociale et environnemen‐tale. C’est soutenir la conversion écologique de la société. »Alima Boumediene‐Thiery

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L’empreinte 2010/11 - 5

> JUSTICE FISCALE CONTRE FRACTURE SOCIALE

Pour Jean Desessard, le budget pour 2011 est « désolant ». Ilrenforce un peu plus les inégalités qui se sont creusées ces dernières années entre la France d'en haut et celle d'en bas. Depuis dix ans, les baisses d’impôts sur le revenu, la baisse desdroits de succession et la multiplication des niches fiscales, représentant environ 125 Mds € annuels, n'ont favorisé qu'uneinfime partie de la population.

Afin de réintroduire la notion de justice fiscale, Alima Boume‐diene‐Thiery a proposé une série de mesures comme l'augmen‐tation de la contribution sociale généralisée (CSG) de 1 % à 5 %sur les hauts revenus, ou bien le retrait des impôts locaux et dela CSG dans le calcul du bouclier fiscal. Relever la tranche margi‐nale qui est passée de 57 à 40 % en 15 ans alors que le nombrede très hauts revenus est en hausse ? Rien d'urgent, François Ba‐roin, chantre d'un impôt « au service du développement écono‐mique » lui donne rendez‐vous fin 2011 pour tout remettre àplat. Utopistes ? Beaux parleurs ? À l'Assemblée comme au Sénatles parlementaires EELV ont proposé des mesures très précisesde suppression des niches sociales et fiscales, permettant de ré‐cupérer 8 milliards d’euros.

Dans la même logique, il semble assez juste d'aligner la fiscalitédes revenus du capital sur celle des revenus du travail et de réin‐tégrer les dividendes, les intérêts, les plus‐values à l’impôt sur lerevenu, au barème progressif. Toutes ces mesures ont été accueillies avec intérêt... et renvoyées à un prochain débat sur lafiscalité. Débat qui s’est tenu au début de l’été et qui a vu le Gou‐vernement contraint de renoncer au symbolique bouclier fiscal.Mais son abrogation est largement compensée par la réforme del’ISF, qui exonère 300 000 contribuables de la première trancheet abaisse le taux d’imposition dans un esprit de « justice socialeet fiscale », dixit François Baroin.

« Les financements innovants, la taxation des transactions finan‐cières, nous pouvons le décider ici. Pourquoi attendre ? » tançaitNicolas Sarkozy au sommet de l'ONU en 2010. Cette même année,BNP Paribas a versé 1 Md € de bonus à ses 4 000 traders. Plus ma‐lins, certains établissements ont contourné les bonus avec unehausse de 100% des rémunérations fixes. Philippe Marini, sénateurUMP nous rassure : un dispositif se mettra en place entre 2013 et2019. « Il en résultera de nouvelles contraintes pour les établisse‐ments financiers, qu’il ne serait pas très raisonnable d’anticiper oud’aggraver par le biais d’une législation nationale, au risque de ré‐duire la capacité des banques à financer l’économie. »

« Une démocratie ne peut pas prospérer durablement sur unefracture sociale ! » Jean Desessard

> PUBLIC PRIVÉ DE SERVICE

Tandis que les emplois s'amenuisent dans la fonction publique(enseignants, infirmiers, aide‐soignants, postiers ruraux), le Gouvernement tente de créer de l'emploi dans le privé àcoup/coût de cadeaux fiscaux sans grand succès. Ainsi, la baissede la TVA dans la restauration devait inciter à la création d'emplois, la régularisation du travail au noir et la baisse de lanote pour les consommateurs. Pour 3 Mds € investis, ce sont seulement 21 700 emplois qui ont vu le jour sur les 40 000 prévus, majoritairement précaires, sans impact sur le travail

dissimulé qui a même aug‐menté, ni sur l'addition. Investidans le secteur public, un telbudget aurait permis de créerenviron cinq fois plus d’emplois.

Côté sodas, snacking et grossesvoitures, la taxe de 3% sur les re‐venus publicitaires des chaînesprivées devait être un outil majeur du financement des télévi‐sions publiques. Elle est aujourd'hui passée à 0,5% sous des prétextes fallacieux qui favorisent un peu plus les groupes privéset fragilisent le service public télévisuel dont la dotation publiquechute également. Privatisation partielle en vue ? Concurrencefaussée et « temps de cerveau disponible » supplémentaire,conclut Jacques Muller.

Déjà mobilisé l'année dernière contre le projet de loi destiné à « moderniser » La Poste, Jean Desessard continue de se battre auxcôtés des postiers et des citoyen‐ne‐s, vent debout contre les fer‐metures croissantes de bureaux de proximité et de centres de tricomme celui de Livry‐Gargan : « L'objectif de La Poste, ce n'est plusle service public mais la rentabilité. Les zones rurales et les quartierspopulaires sont les premiers à en souffrir ! » Malgré le Plan Ambition2015 qui réaffirme la mission de service public et de développementdu territoire dans le respect du développement durable, la nouvelleSociété Anonymesonne le glas duservice postal.

Plus fort encore, lecloisonnement so‐lidaire qui fait fi‐nancer les pauvrespar les pauvres.Tandis que les mé‐nages dépensenten moyenne 40 à50% de leur re‐venu dans le loge‐ment et que 14000 familles priori‐taires n'ont tou‐jours pas vu leslogements promispar la loi DALO, labulle immobilièrecontinue de gonfler.Pourtant, pour financer le pic de chantiers ANRU modélisé dès2006, le Gouvernement a décidé de ponctionner les organismesHLM en prétextant une péréquation ! L'occasion pour Jean Deses‐sard de rappeler que des logements performants sur le plan éner‐gétique sont plus économiques à long terme pour les locataires etpour les bailleurs. Pendant ce temps au 69 de la rue de Sèvres, im‐meuble vacant depuis 10 ans, ce sont 460 000 € qui sont réclamésaux militants de Jeudi Noir qui avaient eu l'audace de demanderl’application de la loi de réquisition.

Jean Desessard à Livry‐Gargan. Manifestation à vélo en soutien aux postiers en

grève (31 mai 2011)

q"Excellent : remboursonsla dette, monsieur Deses‐sard ! Nous sommes tousécologistes !"

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Réponse : Philippe Marini,sénateur UMP de l'Oise.

Bercy part à la chasseContrairement à son engagement de réduire les niches fis‐

cales, le Gouvernement poursuit ses cadeaux arbitrairescomme avec l'exonération de taxe foncière sur le non‐bâtiqui bénéficiera aux propriétaires d’installations de chasse

dans les zones humides !

Qui a dit?

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6 - L’empreinte 2010/11

Boucs émissaires« Avec plus de 17 textes relatifs à la sécuritéprésentés depuis 8 ans, et une année 2010marquée par des discours de plus en plusexplicites venant du plus haut niveau del’État, vous tentez de gouverner par la com‐munication et la désignation de coupables,que vous trouvez de préférence parmi lesplus précaires. » Marie Blandin

> LE FOU

Chronique de la « déraison d’Etat ».Comme au siècle de Louis XIV, c’est le retour au « Grand renfermement » quecraignent aujourd’hui les associations et lesfamilles d’usagers, vent debout contre letexte de réforme de la psychiatrie. Une ré‐forme qui ne repose sur aucune concerta‐tion, sur aucune des mesures d’urgenceissues des Etats généraux de la psychiatriede 2003 mais qui est née, comme beau‐coup d’autres, à la suite d’un fait divers dra‐matique récupéré par Nicolas Sarkozy.

Punir ou guérirIgnorant 82 % des malades qui choisissentl’hospitalisation libre sur 1,7 M de Françaispris en charge chaque année, ce texte pri‐vilégie une approche sécuritaire au détri‐ment du sanitaire. S’opère alors unglissement grave du régime d’hospitalisa‐tion sans consentement vers un régime desoins sans consentement qui permettra « d'enfermer les gens chez eux » à coup demédicaments. Jean Desessard dénonce un« contrôle social généralisé de la normalitédes comportements ».

Au nom de la sécurité publique, les soi‐gnants deviennent des auxiliaires de police,

les préfets effectuent des choix thérapeu‐tiques et c’est un décret en Conseil d’Etatqui établit le programme de soins ! Placésous la contrainte, le malade dispose dequinze jours pour déposer un recours. Unafflux de travail ingérable pour les tribu‐naux du fait des moyens sanitaires et judi‐ciaires requis. Une solution ? Lavisioconférence ! Les établissement hospi‐taliers devront aménager, coût supplémen‐taire, des salles pour que les patientspuissent rencontrer virtuellement lesjuges. Simplification toujours, le médecinpourra rendre un avis médical sans exa‐men, sur simple consultation du dossiermédical.

Dans ce triste contexte, une bulle d’espoir:l’adoption, contre l’avis du Gouvernement,d’une proposition de loi PS instituant l’atté‐nuation de la responsabilité pénale en casde trouble mental. Une vision progressistedu droit pénitentiaire, défendue par AlimaBoumediene‐Thiery, et qui va dans le sensdu droit des malades atteints de troublesmentaux. En France ce sont en effet prèsde 10 % des détenus qui souffrent de trou‐bles psychiatriques très graves et la mala‐die mentale est considérée comme unfacteur aggravant.

Quelle hospitalitépour la folie ?Qu’en est‐il réellement ? 3% seulement desactes de violence sont commis par des in‐dividus souffrant de troubles mentaux. Parcontre, il sont eux‐mêmes sept à dix‐septfois plus victimes de violences que l’ensem‐ble de la population. Ces dernières années,de petites unités ont vu le jour, qui travail‐lent patiemment avec le patient et l’entou‐rage familial pour instaurer un dialogue etun contrat de confiance. Pour elles, l’obli‐

gation de soins est un contresensclinique.

Pour les sénatrices/teurs EELV, lasociété ne peut traiter l’approchede la folie que par des structuresouvertes, en lien réel avec la so‐ciété. Mais il s’agit aussi de donnerdes moyens à l’hôpital, de formeret d’embaucher du personnel enpsychatrie. Or ce texte rejoint lalongue liste de ceux qui ne sont quedes effets d’annonce sans aucunmoyen pour être réellement appli‐qués. Des moyens pourtant, il y ena eu : en 2009, le Gouvernement aalloué 70 millions d’euros aux hô‐

pitaux psychiatriques... pour la sécurisationdes locaux ! Barreaux, caméras, grilles, alorsqu’en dix ans, 50 000 lits ont été supprimés !Pour Jean Desessard, ce texte marque doncl’avènement de la « flichiatrie ».

> L'ÉTRANGER

Pour Alima Bou‐mediene‐Thieryla légitimité deClaude Guéant àdéfendre un pro‐jet de loi relatif àl’immigration, àl'intégration et àla nationalitéaprès avoir dé‐claré que « lesFrançais, à forced’immigration in‐contrôlée, ontparfois le senti‐ment de ne plusêtre chez eux » est clairement remise encause. Sous prétexte de transposer des di‐rectives communautaires, ce texte est sanssurprise une charge violente et cynique di‐rigée contre les étrangers résidant enFrance.

Escroqueries en tout genreAu palmarès des lieux communs repris parla majorité, les étrangers qui viennent enFrance pour se faire soigner, faire des curesthermales ou de la chirurgie esthétique !Bien qu’Alima Boumediene‐Thiery ait rap‐pelé l’obligation d’avoir souscrit une assu‐rance pour obtenir un visa, le cliché a la viedure. Désormais, le droit au séjour desétrangers malades sera conditionné à une"absence" de traitement dans leur paysd’origine.

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Manifestation contre la loi sur les soins psychiatriques le 10 mai devant le Sénat avec

Dominique Brengard du groupe de travail santé mentale d'EELV.

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Manifestation contre la loi sur les soins psychiatriques le 10 mai devant le Sénat

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Soutien aux jeunes Tunisiens deLampedusa occupant un im‐

meuble à Paris

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L’empreinte 2010/11 - 7

Mourir en prisonUn établissement pénitentiaire n’est

pas un lieu de soins. Une évidence qui n’estmalheureusement pas encore comprise enFrance, déjà condamnée par la Cour euro‐péenne des droits de l'Homme, pour « traite‐ment inhumain et dégradant en raison dumaintien en détention ». C’est la raison pour la‐quelle Alima Boumediene‐Thiery a déposé uneproposition de loi afin de revoir les procéduresde grâce médicale et de rendre possible unesuspension de la détention provisoire, dès lorsque l'état de santé de la personne détenue estincompatible avec la détention. Elle proposepour cela l’intervention conjointe du juge d'ins‐truction, du juge des libertés et de la détentionet de la Chambre de l'Instruction, fondée surdes expertises médicales concordantes, ainsiqu’une procédure de certificat médical uniqueen cas d’urgence.

Chantage au cartableL’école française manque de profes‐seurs et de moyens mais la seule

solution trouvée pour lutter contre l’absen‐téisme scolaire passe par la suppression desallocations familiales : une mesure « ineffi‐cace, populiste et agressive » dénonce MarieBlandin. Qui est concerné ? Pas les plusriches, pas les familles avec un enfant (50%)qui ne perçoivent pas d'allocations. C’est auxfamilles les plus pauvres, avec plusieurs en‐fants, souvent monoparentales, à celles quivivent aux franges du seuil de pauvreté quecette mesure s'adresse. Indécent.

Dissimulation...des intentions« Le voile intégral questionne notre capacité àélaborer des réponses adaptées et proportion‐nées à des phénomènes certes marginaux, sec‐taires, mais qui portent en eux les germes del’exclusion de la femme et de son enfermementphysique et psychique.» C’est ainsi qu’AlimaBoumediene‐Thiery a abordé le projet de loiinterdisant la dissimulation du visage, réaffir‐mant que la burqa n’est pas une exigence del’Islam. Mais elle a surtout dénoncé un texteinsincère, apparu dans un contexte d’islamo‐phobie assumée au plus au niveau de l’Etat quiassocie sciemment burqa, polygamie, délin‐quance et fraude aux prestations sociales.Quid du statut de la femme ? Aucune solutionn’est proposée. Une impasse à mettre en perspective avec le recul de l’égalitéfemme/homme depuis la réforme des retraites ou avec les inégalités salariales qui nepréoccupent pas tant la majorité.

Quant aux étrangers en situation irrégulière, le votedu budget de l’Aide Médi‐cale d’Etat (AME) a mis enplace des mesures que JeanDesessard a qualifiées depopulistes et discrimina‐toires : limitation de l'AMEaux actes dont le servicemédical rendu est moyen ouimportant, conditionne‐ment de certains soins à un agrément préalable, récupération des sommes « indûment versées ». Les bé‐néficiaires de l'AME viventdans une grande précarité et dévelop‐pent des pathologies extrêmementlourdes dont il faut craindre l'aggrava‐tion, faute de prévention, entraînantdes coûts élevés pour l'assurance maladie.

Enfin, après la chasse au mariageblanc, qui ne concerne que 0,45% desmariages binationaux, voici le mariagegris et le concept d'escroquerie au sen‐timent développé par Brice Hortefeux.

Nationalitéde seconde classeAutre mesure phare, la tentative dedéchoir de la nationalité française lesauteurs de crimes à l’égard des repré‐sentants de l’État. Tous ? Uniquementles étrangers naturalisés depuis moinsde 10 ans ! Cette disposition qui me‐naçait d’ouvrir une brèche terribledans le droit français est finalementrejetée mais marque l’avènementd’une xénophobie d'État décom‐plexée. Prompte à brandir l’impé‐rieuse nécessité de réunir les Françaisderrière des valeurs républicainescommunes, la majorité a pourtant denouveau refusé le droit de vote auxélections municipales pour les rési‐dents de plus de 5 ans, réclamé parAlima Boumediene‐Thiery.

Les Gens du voyage, eux aussi, sonttraités comme des citoyens de secondezone. Tandis que les Roms sont réguliè‐rement exclus du bénéfice de la sécu‐rité sociale, les Français appartenant àla communauté des Gens du voyage sevoient de plus en plus refuser l’accès auPôle Emploi. Marie Blandin a donc interpellé le Premier ministre sur la nécessité de soutenir les collectivitéslocales dans leurs efforts pour faciliterleur intégration (accès au marché dutravail, logement décent).

Zones de non‐droitpour sous‐citoyensLes étrangers en situation irrégulière vi‐vent en France dans une situation denon‐droit et de grande précarité, incapa‐bles de contracter un prêt ou un bail mal‐gré un travail régulier et le paiement del’impôt. Dénoncées par Marie Blandinun an et demi après le démantèlementde la “jungle” de Calais, ces conditions sedurcissent pour les demandeurs d’asile,particulièrement pour les mineurs vic‐times de violence policière.

La transposition de la directive «Re‐tour» fournit quant à elle un prétexteau bannissement des étrangers sans au‐torisation de séjour et une « doublepeine administrative ». D’une part,parce que l’expulsion est réalisée avantque tout recours puisse aboutir, portantatteinte aux droits de la défense, d’au‐tre part parce que l’autorité préfecto‐rale peut y ajouter une interdiction deretour sur le territoire français, étendueà tout le territoire Schengen. Autre pos‐sibilité dénoncée par Alima Boume‐diene‐Thiery, l’assignation à résidenceavec bracelet électronique sans déci‐sion judiciaire, assimilant les migrants àdes coupables potentiels.Les sénatrices/teurs EELV exercent régulièrement leur droit de visite dansles centres de rétention administratif.Dominique Voynet à Palaiseau, AlimaBoumediene‐Thiery à Vincennes, JeanDesessard au Mesnil‐Amelot, MarieBlandin à Coquelles, tou‐te‐s ont puconstater la grande vulnérabilité desétrangers qui peuvent y être retenusdans des conditions parfois inhu‐maines. Plus grave encore, la créationd’un « Guantanamo à la française » : lescondamnés pour terrorisme ayant déjàpurgé leur peine seront placés en réten‐tion administrative pour une duréepouvant aller jusqu’à 18 mois.

Visite à l'Établissement Pénitentiaire pour Mineurs(EPM) de Marseille

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Quand il ne s’agit pas de mettre soudaine‐ment le droit français en conformité avecle droit européen, c'est une promesse deNicolas Sarkozy qu'il faut mettre enœuvre, la plupart du temps après un faitdivers tragique. À grand renfort d’effetsd’annonce, la justice devient un objet mé‐diatique et médiatisé.

> JURYS POPULISTES

Lorsque Michel Mercier indique que leGouvernement souhaite simplement « queles Français exercent leur citoyenneté », onest en droit d'avoir des doutes au regarddes propos tenus précédemment par Nico‐las Sarkozy dont l'objectif affiché en dé‐cembre dernier était de protéger la Franceet les Français « de la violence chaque jourplus brutale de la part de délinquants mul‐tirécidivistes en ouvrant nos tribunaux cor‐rectionnels aux jurés populaires. Ainsi c'estle peuple qui pourra donner son avis sur lasévérité de la réponse à apporter à descomportements qui provoquent l'exaspéra‐tion du pays. » L’ajout de deux « citoyensassesseurs » au sein du tribunal correction‐nel et de la chambre correctionnelle de lacour d’appel constitue une vraie déclara‐tion de défiance vis‐à‐vis de la magistraturedont la formation est longue et complexe.La durée des procès et la formation som‐maire des nouveaux jurés appelés à statuerjusqu'en appel laissent craindre des dériveset un ralentissement supplémentaire desaudiences. Sans compter le coût pour l'ap‐

pareil judiciaire et la pression sur les ma‐gistrats. Ces « citoyens assesseurs » sta‐tueront sur des cas graves d'atteinte à lapersonne ou des cas complexes d'at‐teinte à l'environnement mais pas sur lesdélits financiers ! Quant à la volonté affi‐chée de « rendre la justice aux Français»,cet afflux de citoyens dans le processusjudiciaire correctionnel est compensépar une diminution du nombre de jurésen assises !

« La véritable surprise eût été que leGouvernement présentât un texte no‐vateur et respectueux de la justice fran‐çaise et de nos droits fondamentaux. »Alima Boumediene‐Thiery

> PÉRIL MAJEURSurprise, derrière cette réforme annoncéeà grand bruit, se cache la révision de l’or‐donnance de 1945 relative à l’enfance dé‐linquante. L'idée ? Les mineurs d'aujour‐d'hui ne sont pas ceux de l'après‐guerre, etla délinquance des mineurs explose. Deuxassertions fausses mais qui sous‐tendentun rapprochement de la justice des mi‐neurs avec celle des majeurs en simplifiantles procédures de jugement rapide et deprésentation immédiate. Ce qui conduit àprécipiter la réponse pénale à l’encontredes mineurs, sans tenir compte ni de leurâge ni de leur parcours. Dans cette mêmeligne, Alima Boumediene‐Thiery a dénoncéla possibilité d'envoyer des mineurs non ré‐cidivistes en centre éducatif fermé dès lorsqu’ils auront commis un délit puni de cinqans de prison, en soulignant qu'il s'agissaitde la quasi totalité des cas puisque la com‐mission du délit en réunion ou à proximitéd’un établissement scolaire constitue unecirconstance aggravante augmentant lequantum de la peine.

Au palmarès du durcissement des me‐sures, la possibilité d'assignation à rési‐dence avec placement sous surveillanceélectronique des mineurs dès l’âge de 13ans ! Une peine incompatible avec l’obliga‐tion de scolarité jusqu’à l’âge de 16 ans. Àcela s'ajoute le remplacement de la procé‐dure de convocation devant le juge des en‐fants par une convocation de l'officier depolice judiciaire devant le tribunal pour en‐fants. Comme l'a souligné Jean Desessard,cette justice expéditive ne tient aucuncompte du contexte dans lequel évolue lemineur mais prévoit le développement descentres éducatifs fermés et la possibilité decontraindre les parents à comparaître, me‐sure contre‐productive qui méconnaît le

quotidien de ces familles.

Un texte qui va donc à l'encontre des pré‐conisations du Conseil constitutionnel etsera probablement retoqué.

> GARDE À VUE

Condamnée deux fois en 2010 par laCour européenne des Droits de l’Hom‐me, la France s’est finalement pliée à ladécision du Conseil constitutionnel luienjoignant de réformer au plus vite ledroit pour le gardé à vue de bénéficier del’assistance d’un avocat. Une « réfor‐mette tardive et insuffisante » pourAlima Boumediene‐Thiery qui avait dé‐posé une proposition de loi en ce sens enjanvier 2010, rejetée.

Premier problème, le seuil de déclenche‐ment de la garde à vue : le placement peuten effet intervenir dès qu’il y a soupçon decrime ou délit passible d’une peine de pri‐son. On se retrouve donc bien dans uneprésomption de culpabilité prompte à gé‐nérer l’inflation du nombre de gardes àvue. De son côté, l’avocat voit sont rôle ex‐trêmement réduit malgré quelques avan‐cées lui permettant d’assister son client lorsdes auditions ou des confrontations (pas d'accès au dossier, entretien limité à30 minutes). Plus grave : là où le juge deslibertés et de la détention devrait avoir unrôle prégnant dans le déroulement de laprocédure, c’est au Parquet que revient lecontrôle et le renouvellement de la gardeà vue, en prise directe avec l’exécutif. Enfin,pour des raisons discutables de sécurité, legardé à vue soupçonné de crime organisé,de trafic de stupéfiants ou de terrorismen’a pas droit à un avocat pendant les pre‐mières 24 h.

Jeu de lois

Fonds de tiroirsPetites économies, grands

symboles. L’Etat ne prendra désor‐mais plus en charge le droit de plai‐doirie dans le cadre de l’aidejuridictionnelle aux plus démunisafin de les “responsabiliser”. Lacharge retombera donc sur les avo‐cats qui choisissent par convictiondes causes peu rémunératrices.

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Visite au Centre éducatif fermé de Brignoles

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L’empreinte 2010/11 - 9

Security is businessInsécurité ou sentiment d’insécurité ?Pour combattre ce phénomène qu’il ali‐mente lui‐même et que les médias am‐plifient, le Gouvernement multiplie leseffets d’annonces sans jamais agir sur lescauses réelles de la délinquance. Moinsd’argent pour la police de proximité,moins d’argent pour l’animation desquartiers, mais la privatisation de la mis‐sion régalienne de sécurité publique.

> ABANDON DE POSTEAprès les “biocarburants”, les “produitsphytopharmaceutiques”, voici la “vidéo‐protection”. Les choix sémantiques nesont pas anodins et rappellent que loind’être un outil de protection des citoyen‐ne‐s, la vidéosurveillance est avant toutun mensonge électoraliste. A‐t‐elleprouvé son efficacité ? Non. A‐t‐elle uncoût ? Oui. Comment y faire face ? En laprivatisant bien sûr ! Conséquence grave:le quadrillage de l’espace public par desopérateurs privés, sans obligation d’infor‐mation sur la présence de caméras nidroit d’accès aux images. Alima Boume‐diene‐Thiery alerte donc sur le risque deconcentration entre les mains d’un seulopérateur privé de vastes centres de vi‐sionnage d’images de la voie publique.Dans la même lignée, un étrange amen‐dement défendu par Brice Hortefeux, estvenu permettre à des “chercheurs” d’uti‐liser des images prises par les caméras surla voie publique à des fins « de recherchetechnologique ». Frissons garantis sur lesbancs de l’opposi‐tion ! L’acharnementd’Alima Boumediene‐Thiery, face à unedroite décomplexée, anéanmoins permisd’introduire l’autosai‐sine de la Commissionnationale de vidéo‐protection et la trans‐mission de sonrapport d’activité auParlement, afin d’éva‐luer en toute transpa‐rence l’efficacité du procédé.

Privatisation toujours, après cinq ans“d’expérimentation”, le transport de per‐sonnes maintenues en centre de réten‐tion administrative ou en zone d’attenteest définitivement ouvert aux opérateursprivés dont il faut rappeler que les em‐ployés sont armés. Au nom de la maîtrisedes finances publiques, alors que les éco‐nomies invoquées sont loin d’être au ren‐

dez‐vous, c’est encore une missionrégalienne qui est privatisée avectous les risques de dérives que celacomporte.

> DOMMAGES COLLATÉRAUXLe 14 octobre 2010 à Montreuil, unlycéen de 16 ans qui manifestaitcontre la réforme des retraites a étégrièvement blessé à l’oeil par un tirde flashball. Le 30 novembre, c’estun homme de 38 ans qui est décédéaprès avoir reçu deux décharges deTaser lors de son interpellation. Cesbavures ne sont pas isolées maiss’inscrivent au contraire dans unemontée de la violence policière. Cesarmes dites de “quatrième catégo‐rie”, dont la mission est initialement d’évi‐ter le recours aux armes à feu, sontutilisées par la police, l’armée, la gendar‐merie et la police municipale. Malgré desconsignes d’utilisation très strictes, leurbanalisation et leur usage comme armesoffensives génèrent des incidents de plusen plus nombreux. En 2009, il a fallu uneenquête de la Commission Nationale deDéontologie et de la Sécurité pour décou‐vrir que l’usage de Flashball, de nuit, pardes hommes casqués et sur des cibles mo‐biles pouvait occasionner des dérapages...En 2010, c’est le Conseil d’Etat qui est in‐tervenu pour que la police municipalen’utilise plus le Taser, faute de formationgarantissant un usage correct. Mais face à

l’absence de me‐sures juridiques v é r i t a b l e m e n tcontraignantes, lesincidents graves sepoursuivent.

C’est la raison pourlaquelle DominiqueVoynet a proposéun moratoire ainsiqu’une propositionde loi visant à inter‐dire l'utilisation

d'armes de quatrième catégorie par la po‐lice ou la gendarmerie contre des attrou‐pements ou manifestations, leurcommercialisation ou leur distributionpour des polices municipales ou des par‐ticuliers. Faut‐il les remplacer par des ca‐nons à eau ou l’augmentation deseffectifs ? Pour Brice Hortefeux, l’alterna‐tive est simple : en cas de moratoire, lesmanifestations seraient contenues avecdes armes à feu.

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EuropolTrafic de stupéfiants, terrorismeet pédophilie sont traités àl’échelle européenne par le Euro‐pean Police Office (Europol). En2010 sa compétence a été renfor‐cée et son contrôle par le Parle‐ment européen accru. Dansl’ensemble des pays concernés,les parlements nationaux s’in‐quiètent du contrôle exclusive‐ment indirect dont ils bénéficientvia de rares questions au Gouver‐nement. La Commission euro‐péenne a donc proposé de créerun Forum interparlementaire. Auniveau français, Jérôme Lambertpour l’Assemblée et Alima Bou‐mediene‐Thiery pour le Sénat ontdéposé une proposition de réso‐lution européenne donnant lapréférence à une commissioncomposée de représentants duParlement européen et des parle‐ments nationaux. Le texte veille àce que la représentation des deuxchambres soit bien assurée pourles régimes bicaméraux, à la pos‐sibilité d’entendre la directiond’Europol et d’être informés trèsrégulièrement de son travail. Parailleurs, Alima Boumediene‐Thiery a insisté sur la nécessité degrouper ces dispositions avec lecontrôle parlementaire nationald’Eurojust dont l’évaluation nesaurait être dissociée de celled’Europol.

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10 - L’empreinte 2010/11

Travailler plus pour vivre moinsLe dossier de presse gouvernemental consacré à la réforme des retraites énumère les priorités du Gouvernement etindique que « les salariés doivent être physiquement usés au moment du départ à la retraite ». Cette énorme mala‐dresse semble prémonitoire. A l'heure où les travailleurs français sont assimilés à des paresseux, les chômeurs à desprofiteurs et les bénéficiaires du RSA à des assistés, la droite ne fait plus mystère de ses choix : sacrifier notre modèlesocial dans l'espoir de rattraper la croissance.

> UNE VIE À L'ATTENDRE« La réforme sur les retraites de 2003 a constitué une avancée ma‐jeure pour la préservation de notre régime de retraite par répar‐tition. En 2020, 100% des besoins de financement seront couverts[...]. Toute proposition d’abrogation de cette loi est irresponsableet même dépourvue de toute crédibilité. » Contrat de législature2007‐2012 de l’UMP

Réformons la réformeLe bel ouvrage issu du Conseil National de la Résistance en 1944a vécu. Mutations sociétales, crise économique, essor démogra‐phique ont modifié en profondeur notre société, appelant une né‐cessaire réforme du système de retraites. En 2003, prétextant déjàl’allongement de la durée de vie, la réforme Fillon claironnait avoirréglé le problème des retraites jusqu'à l'horizon 2020. Horizon vitebouché semble‐t‐il puisqu'il faut déjà réformer la réforme. Car lacrise est passée par là. Mais silence, c’est « parce que l’on vit pluslongtemps » qu’il faut accepter de travailler plus longtemps. Il fau‐dra donc passer de 60 à 62 ans pour l'âge légal de départ à la re‐traite et de 65 à 67 ans pour la retraite à taux plein d'ici 2018, etcompter sur le retour de la croissance et du plein emploi. Un scé‐nario bâti sur des « si » qui ne résiste pas à l'examen de la réalité.

A l'heure où la croissance reste un fantasme et le plein emploi unsouvenir, rallonger le temps de travail consistera pour partie enun simple transfert des coûts de l’assurance vieillesse sur l’assu‐rance chômage. Cerise sur le gâteau, ce n'est plus le Parlementqui assurera le suivi de cette réforme mais le seul Comité de pilo‐tage (COPILOR).

« Voici comment est abordée la question du chômage au traversde ce projet de loi : les chômeurs resteront au chômage deux ansde plus ! » Marie Blandin

Plein emploiSi la croissance joue l’Arlésienne, qu'en est‐il du plein emploi ? Lessénatrices/teurs EELV ont insisté sur l'incohérence d'une politiquede réforme des retraites qui ne s'accompagne pas de mesures significatives en faveur de l'emploi. Marie Blandin a interpellé leMinistre du travail sur la baisse de 50% des crédits alloués au dispositif Nacre qui accompagne durablement les créateurs et repreneurs d'entreprises. Elle a par ailleurs regretté la fin de l'Allocation en faveur des demandeurs d'emploi en formation(AFDEF) qui leur permettait d'effectuer un changement de parcours professionnel dans les meilleures conditions.

Au cours de l'examen de la loi de finances, Alima Boumediene‐Thiery a quant à elle défendu la suppression des exonérations decotisations sociales sur les heures supplémentaires, mise en placepar la loi TEPA (Travail Emploi Pouvoir d’Achat), proposant ainsid'économiser 4 Mds d'euros sur cette niche fiscale mais surtoutde partager le travail, plutôt que de diviser la société entre salariés

surbookés et chômeurs surdéprimés ! A l'inverse, Jean Desessarda défendu le maintien des exonérations de charges pour les Ser‐vices à la Personne (SAP) afin de lutter contre le travail dissimuléet de favoriser un secteur où le lien humain est capital.

Il est demandé à chacun‐e de prendre part à l’effort collectif, dedonner un peu pour le bien de tous. Mais côté entreprises, la peurde la fuite des capitaux et le spectre de la délocalisation étouffenttoute contrainte significative. Rien ne favorise l'emploi des seniors(taux d'activité le plus bas d'Europe), l'embauche des jeunes, lacréation de CDI, les accords sur les salaires. En d'autres termes,tandis que les dividendes s'envolent, ce sont toujours les mêmesqui sont solidaires !

La retraite à deux vitessesCette fonte assumée de la masse salariale remet donc vivementen question le système par répartition qui repose sur l'économieréelle et non sur des profits espérés de l'économie financiarisée.Car la seconde moitié du XXe siècle a vu d'une part une hausseconsidérable de la productivité mais aussi une explosion des revenus du capital qui sont allés alimenter non des investisse‐ments mais des placements au sein d'une bulle financière.Dans le texte même, Jean Desessard a dévoilé ce glissement versun système de retraites par capitalisation via la possibilité pour lessalariés de verser des journées de RTT non prises sur leur Pland’Épargne pour la Retraite Collectif (PERCO) : « Les acquis sociaux

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L’empreinte 2010/11 - 11

Syndicalismevolontaire obligatoireCe sont les CRS qui ont accueilli la délégationd’élus et de représentants syndicaux venus ren‐contrer le Ministre de l’Agriculture pour contesterles règles de représentativité syndicale au sein del'interprofession laitière. Noyautés et pressuréspar une véritable « french connection » de l'agri‐culture, les éleveurs laitiers sont à bout. Repré‐sentés exclusivement depuis trente ans par laFNSEA et ses filiales dans laquelle 73% d'entreeux ne se reconnaissent pas, ils sont pourtantsoumis à une Contribution Volontaire Obligatoire!Principale conséquence depuis le vote de la Loide Modernisation de l'Agriculture, ce syndicat né‐gocie seul le prix du lait avec les industriels del'agroalimentaire. Jacques Muller, Jean Desessardet Dominique Voynet ont donc interpellé le Mi‐nistre de l'Agriculture et soutenu la ConfédérationPaysanne qui occupait le Siège du Centre NationalInterprofessionnel de l’Economie Laitière (Maisondu Lait). Le Ministre botte en touche...

Ressources humaines à la mode Camaïeu

Dix ans d'ancienneté et c'est le RSA qui vientcompléter le salaire à la fin du mois... Chez Camaïeu, le management est optimisé pour minimiser la masse salariale. Chez Camaïeu, cesont les salariés qui défilent au rythme d'un fortturn‐over. Chez Camaïeu, les établissementssont gérés dans leur globalité mais déclarés in‐dividuellement pour réduire les contributionsobligatoires au‐delà de 20 salariés. Chez Ca‐maïeu l'égalité professionnelle homme‐femmeest une caricature. Chez Camaïeu, on prend lessubventions mais on ne crée pas d'emplois. Quitrouve à y redire ? Pas la Direction du travail entout cas. Grève, soutien de Marie Blandin etd'Eva Joly... les négociations se poursuivent ettandis que les grévistes fatiguent financière‐ment, l'action Camaïeu continue de monter...

"Lire, écrire, compter"... déprimer !

Panique sur la formation des enseignants. 16 000 suppressions de postes sont prévuescette année, et la suppression de l'année de

formation théorique a de quoi inquiéter quandon sait que les jeunes professeurs seront priori‐

tairement envoyés dans des établissements difficiles. Pour Marie Blandin les outils non

« académiques » que constituent la résolutionnon‐violente des conflits ou la médiation néces‐

sitent un apprentissage particulier et l'on imagine sans peine les dégâts durables d'une

telle mesure pour l'équipe enseignante commepour les élèves.

ne sont pas optionnels : ce n’est pas RTT ou retraite ! ». Inévitablement cetteépargne donnera lieu à une spéculation galopante et à des erreurs de place‐ments aux conséquences dramatiques. En pleine discussion du texte, l'ac‐tualité a offert en écho les négociations entre la Caisse des dépôts etconsignations et Malakoff‐Médéric, groupe privé de Guillaume Sarkozy, pourcréer un géant de l’épargne‐retraite promettant déjà 650 % d'augmentationdu chiffre d’affaires.

Pauvres vieux !Tandis que le Gouvernement martèle qu’un texte sur les retraites n'est pasle lieu pour corriger les inégalités de la vie, il semble pourtant que tout soitfait pour les renforcer ! Jean Desessard a donc défendu l'âge de départ àla retraite comme un bouclier social destiné à protéger « les salariés lesmoins bien payés, ceux qui sont employés à temps partiel, qui effectuentdes travaux pénibles, qui ont des temps de transport importants, bref lespersonnes les plus malheureuses dans notre société ». Un symbole : lespoly‐pensionnés. Seuls 52 % de ces hommes et 27% de ces femmes ayantcotisé à plusieurs régimes de retraites ont pu valider une carrière complètealors qu’ils ont travaillé toute leur vie. Pour les non‐salariés agricoles,champions des travaux pénibles et de l'espérance de vie réduite, la retraiteest inférieure à 750 € et malgré les efforts de Jacques Muller, elle le restera.Situations d'urgence, drames quotidiens, précarité permanente n'ont eudroit qu'à la rédaction de rapports d’information, quand lessénatrices/teurs EELV demandaient des mesures justes et immédiates.

Ils ont également demandé la prise en compte des stages à rallonge, desétudes longues ou des périodes de chômage dans le calcul des trimestres,et proposé de sortir d'une logique de temps partiel qui arrange les entre‐prises : à productivité horaire plus élevée, cette variable d'ajustementidéale prépare de faibles pensions pour ceux et surtout celles qui y sontcontraints. C'est pourquoi, les sénatrices/teurs EELV ont tenté d’interdireaux entreprises d’embaucher des salariés pour une durée inférieure au mi‐nimum requis pour la validation de trimestres.

Entre la majorité et l'opposition, la ques‐tion de la pénibilité a déchaîné les pas‐sions. D'un côté, un monde du travailconçu comme une « bataille pour sélec‐tionner les meilleurs éléments » (GérardLonguet), de l'autre, la volonté de prendreen compte les difficultés quotidiennesrencontrées par des millions de Françaisqui subissent la souffrance au travail, lacompétition, la tentation du suicide et lerecours massif aux anxiolytiques.Lorsqu'Alima Boumediene‐Thiery sou‐ligne les inégalités en matière d’espérancede vie selon les métiers et les risques psy‐chosociaux en constante augmentation,le démantèlement du rôle rempart dumédecin du travail se fait plus criant.

L'Histoire à contre sensInlassablement, les sénatrices/teurs EELV ont développé le volet emploid'un projet de société écologiste : travailler moins et mieux pour travaillertou‐te‐s ! « Encore moins ? » s'exclament avec effroi des sénatrices UMP.Et Jean Desessard de décrire une organisation sociale où activité n'est pasforcément travail, où une carrière est faite de hauts et de bas, de pauseset de reconversions. Un monde où l'on parle de coopération économiquemondiale et non de compétition économique internationale. Un mondeoù le progrès social permet de profiter pleinement de la vie après le travailavec la satisfaction d'avoir œuvré pour tou‐te‐s et d'en retirer les fruits.

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Impressions de mandat

Le Sénat c’est : Une institution où en tant que parlemen‐taire, j'ai dû construire en permanence un équilibre entremes convictions écologistes et non‐violentes, et les exi‐gences du travail parlementaire au sein d'une assemblée oùla droite est majoritaire.

Ce mandat a été : Une belle aventure humaine et c'estaussi une succession de "petites victoires", qui finiront parporter leurs fruits.

Elle n’aurait jamais dû être adoptée : La loi NOME, quireprésente un pas de plus en direction de l’abandon de

l'électricité au secteur privé, touchant prioritairement les plus modestes qui chauffent leurslogements mal isolés à l’électricité.

Quelques grammes d’optimisme : La capacité d'amplification médiatique et politiquequ'offre le Sénat aux militant‐e‐s des Droits de l'Homme.

Si c’était à refaire : Continuer à écouter, concilier, résister, inventer et créer !

La minute d’auto-satisfaction : Avoir contribué à l'échec d'amendements UMP tendant àaffaiblir la "loi littoral"et à accélérer la main‐mise de l'agro‐business sur les graines et se‐mences.

Jean DesessardSénateur de Paris Mandat : 2004‐2011

Le Sénat c'est : À l'heure de l'Europe, une petitechambre dont le rôle tend de plus en plus à améliorertechniquement les dossiers préparés à la hâte par leGouvernement. Mais le Sénat reste une chambreconservatrice, qui passe encore aujourd'hui à coté desenjeux sociaux et environnementaux... Aux grands élec‐teurs d'inverser cette tendance lors du prochain renou‐vellement !

Pendant ce mandat : J'ai apprécié de travailler en profondeur les lois, même s'il est dés‐agréable de voir nos amendements constamment rejetés.

Ils n'auraient jamais dus être adoptés : Les projets de loi de privatisation des servicespublics, comme La Poste ou Aéroports de Paris. De même, cette législature a été marquée parle recul des droits sociaux.

Quelques grammes d’optimisme : Même si nous sommes peu nombreux, le travail desécologistes a été entendu et reconnu. Vivement le renfort de septembre 2011 !

Les deux minutes de satisfaction : Lorsque les sénateurs UMP ont mangé leur chapeauen votant, à la suite des manifestations estudiantines, le retrait du CPE ; et suite au campementdes Don Quichotte, la loi DALO, qu'ils avaient refusée un an auparavant.

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Jacques MullerSénateur du Haut‐Rhin ‐ Mandat : 2007 ‐ décembre 2010

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L’empreinte 2010/11 - 13

Dominique VoynetSénatrice de Seine‐Saint‐Denis

Mandat : 2004‐2011

Le Sénat c’est : Une grande maison, pen‐sante, trop masculine, trop secrète, trop peumétissée, qui oscille entre salutaires sursautsrépublicains et bouffées rétrogrades, et qui sedépoussiérerait sans le cumul.

Ce mandat a été : « Défricheur ». Seule pen‐dant 3 ans, puis à 4 puis à 5, et toujours seuleà l’Office Parlementaire d’Évaluation des Choix

Scientifiques et Technologiques, là où l’on fustige encore le principe de précaution,et où l’on pense encore que la science résoudra tous les problèmes…

Il n’aurait jamais dû être adopté : Le petit Nicolas à la tête de l’Etat car c’estdans sa tête que naissent les textes liberticides, antisociaux, ultralibéraux, et leshymnes au nucléaire.

Quelques grammes d’optimisme : La chasse aux conflits d’intérêts fait son che‐min, dans l’Institution, dans la loi, dans les Agences sanitaires…

Si c’était à refaire : Travailler moins et communiquer mieux ?... Je ne sais pasfaire !

La minute d’auto-satisfaction : Avoir en quelques années fait respecter et ap‐précier les élus écologistes et leur travail.

Marie BlandinSénatrice du Nord ‐ Mandat 2001‐2011

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Le Sénat c’est : Une deuxième chambreplus indépendante, car moins soumise à lapression médiatique, mais qui doit cepen‐dant encore évoluer, afin d’être davantagereprésentative de la diversité de notre popu‐lation (sociale, générationnelle, culturelle...).

Ce mandat a été : Passionnant, et cou‐ronné de belles victoires en dépit d’unedroite sécuritaire.

Il n’aurait jamais dû être adopté : L’aticle 17 ter de la loi relative à l’immigration,qui réduit à néant le droit au séjour pour soins, et expulse vers une mort certaineles étrangers gravement malades.

Quelques grammes d’optimisme : L’espoir d’un Sénat prochainement àgauche, et enfin progressiste.

Si c’était à refaire : Un second mandat sénatorial !

La minute d’auto-satisfaction : Avoir réussi à faire entendre les « sans voix » etfaire tomber certains tabous sociaux ou juridiques, notamment à l’égard des homo‐sexuels, et des personnes détenues.

AlimaBoumediene-ThierySénatrice de Paris ‐ Mandat : 2004‐2011

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Le Sénat c’est : Comme l'AssembléeNationale, mais sans son agitation mé‐diatique.

Ce mandat a été : Un combat dechaque instant pour que les lois élabo‐rées répondent davantage à l’ambitionsociale et écologique qui nous anime, etune lutte quotidienne devant tant deconservatismes.

Il n’aurait jamais dû être adopté :Parmi d'autres décisions relatives auxaffaires étrangères, le ralliement dugouvernement français au projet debouclier anti‐missiles. Inutile et dispen‐dieux, il a été adopté sans aucuneconcertation parlementaire...

Quelques grammes d’optimisme:Le renouvellement sénatorial du 25septembre prochain : pour la premièrefois dans l'histoire de la Vème Répu‐blique, le "Sénat conservateur" a deschances de passer à gauche !

Si c’était à refaire : Le Grenelle del'Environnement. Un texte vidé de toutson sens...

La minute d’auto-satisfaction :Fière d'avoir pu défendre au sein decette assemblée les propositions écolo‐gistes si longtemps moquées et dont jeme réjouis qu'elles aient progressé.

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14 - L’empreinte 2010/11

Valeurs actuellesEn France, il y a celles qui partent en Bel‐gique ou aux Pays‐Bas pour faire un bébéet ceux qui se rendent en Suisse pourmourir dans la dignité. Ou comment allerchercher à l’étranger le choix, le respectque l’on n’a pas chez soi. C’est le rôle dulégislateur de faire preuve d’écoute etd’audace face aux enjeux de son siècle.Mais les sénatrices/teurs EELV, défen‐seurs d’un « pluralisme moral », se sontvu opposer l’urgence de ne rien faire,l’éternel « possible progrès » de lascience ou la valeur symbolique de la vie.

> ÉTIQUE BIOÉTHIQUEC’est dans une grande confusion que sesont déroulés les débats sur le texte re‐latif à la bioéthique, transcendant tota‐lement les clivages politiques habituels.Prônant une loi ambitieuse qui donne àchacun‐e la possibilité de faire un choixde vie en connaissance de cause, JeanDesessard a fortement dénoncé un texte« en décalage avec la réalité de l’évolu‐tion de la société du XXIe siècle ». Aprèsun toilettage extrêmement rétrogradepar l’aile la plus conservatrice de la ma‐jorité en deuxième lecture à l’Assemblée,le Sénat a au moins réussi à rétablir laclause de révision, laissant quelque es‐poir d’être enfin à la hauteur des en‐jeux... dans sept ans !

Grossesse nerveuseÀ mille lieues de l’actualité, le texte avaitfait l’impasse sur la Gestation Pour Au‐trui (GPA), introduite dans le débat parAlima Boumediene‐Thiery. Pourtant, lerefus de la cour de Cassation de trans‐crire les actes d’état civil des jumelles,

nées par GPA aux États‐Unis de parentsfrançais dans la célèbre affaire “Mennes‐son”, a placé les parlementaires devantleurs responsabilités. Or, ils ont fait lechoix de ne pas reconnaître de droits àces enfants nés à l’étranger, dont certainsseront dès lors apatrides, la nationalitéfrançaise ne pouvant leur être accordéesans transcription des actes d’état civil.La GPA soulève des passions et malgréles propositions visant une perspectiveéthique, altruiste et non lucrative, sansmarchandisation du corps humain, lesparlementaires sont restés bien frileux.

La vie devant soiManque de courage encore, les cher‐cheurs français sont entravés par le main‐tien de l’interdiction de la recherche surles embryons et les cellules souches, saufdérogation. L’enjeu ? 150 000 embryonscongelés surnuméraires, issus de l’assis‐tance médicale à procréation et voués àla destruction. “Vies humaines”, “sym‐bole”, “statut de l’embryon”, sous le re‐gard d’un Gouvernement particuliè‐rement tiède, la France joue le jeu deslobbies conservateurs.

La question des donneurs de gamètes aquant à elle opposé les tenants du déter‐minisme génétique et ceux du caractèresocial et affectif de la filiation et il s’en estfallu de peu que l’anonymat du donneurpuisse être levé à la majorité de l’enfant.Mais c’est finalement la recommandationdu Comité consultatif national d’éthiquequi a été suivie, afin de ne pas fragiliser laposition des parents receveurs en accor‐dant une place au donneur au sein de lafamille.

Vivre et laisser mourirSouffrance pour le malade, impuissancepour la famille, risque pour le médecin, la si‐tuation actuelle des personnes en fin de viesouhaitant mourir ne satisfait personne.Trois propositions de loi, émanant de parle‐mentaires de gauche comme de droite, ontdonc tenté de créer un cadre juridique quiédicte la « primauté du respect de la volontéindividuelle ». En France, ce sont chaqueannée 15 000 actes qui viennent abréger lessouffrances d’un malade. Or, Jean Desessardrelève l’absurdité du code pénal qui ne faitaucune distinction entre la mort donnée parcompassion à la demande du malade et l’as‐sassinat. La loi Léonetti en 2005 a permis deréaliser des progrès en termes de soins pal‐liatifs mais elle reste méconnue et les mé‐decins, peu formés, ne répondent auxbesoins que de 15 à 25 % des maladesconcernés.Alors qu’il s’agissait d’une des nombreusespromesses de campagne de Nicolas Sarkozy,le projet de loi a été retoqué. Préférant l’hy‐pocrisie d’un système qui laisse mourir parabandon des soins ou par augmentation dela dose de morphine, la majorité des parle‐mentaires s’est concentrée sur la seule souf‐france physique, oubliant le « désespoirlucide qui va au‐delà de la douleur » (JeanDesessard). Dans un climat pourtant serein,où seuls quelques rares sénateurs se sontabaissés à parler de « meurtre compassion‐nel », ou « d’eugénisme », le Gouvernementn’a pas fait preuve d’un grand courage. Évoquant les « possibles progrès de la mé‐decine », Xavier Bertrand a refusé de légifé‐rer pour « accorder le droit de donner lamort ». Livré à ceux pour qui la mort est unprocessus programmé par une entité supé‐rieure, le texte n’a pas survécu.

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Qui a dit?q“ À mon avis, un rapport par an ne suffitpas à assurer la fertilité ! ”

Réponse : Jean Desessard à propos durapport annuel de l’Inserm sur la re‐cherche des causes de stérilité.

La femme est un hommecomme les autres

Sur le site du Sénat, il y a deux poidsdeux mesures en matière de genre :

là où Mme Alima Boumediene‐Thiery est sénatrice de Paris,

Mme Marie‐Thérèse Hermange est... sénateur de Paris.

Sa collègue, sénateur de Gironde,Mme Des Egaulx nous explique :“vous le savez tous les uns et les autres, je ne suis pas féministe”.

En effet...

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L’empreinte 2010/11 - 15

> OVER THE RAINBOW

Contre‐indicationsAprès son explication sur l’importancedu symbole concernant le respect del’embryon, Nora Berra aurait peut‐être dû éviter d’insister : « s’agissantdu don de sang, le critère consistenon à discriminer mais à exclure. »Une nuance qui n’aura pas échappéaux hommes homosexuels ou bi‐sexuels souhaitant faire don de leursang. Car depuis 1983, les hommesayant eu des rapports sexuels avecd’autres hommes sont exclus du dondu sang pour des raisons de risquesanitaire. Une explication anachro‐nique pour Alima Boumediene‐Thiery qui a rappelé que ce sont lescomportements qui sont à risque,non les orientations sexuelles, et quechaque prélèvement est contrôlé.Mais les parlementaires n’ont paschoisi de condamner la discrimina‐tion et se sont contentés d’évoquerde sobres « contre‐indications médi‐cales ».

L’assistance médicale à la procréation,elle, est clairement réservée aux cou‐ples hétérosexuels, qu’on se le dise.Toute tentative pour l’étendre auxcouples de femmes ou aux femmescélibataires s’est heurtée à de nom‐breux faux‐semblants. Pourtant, laCour européenne des droits del’homme a rappelé que l’orientationsexuelle des futurs parents relève du

domaine de leur vie privée. Mais pourXavier Bertrand, « le Gouvernementn’est pas prêt à suivre les auteurs desamendements sur cette voie ».

Droitsexuellement orientéAu cours de la discussion sur la réforme des retraites, les sénatrices etsénateurs EELV ont cherché à étendrele bénéfice de la pension de réversionau conjoint survivant dans un couplepacsé : refus motivé par l’article 40 dela Constitution*, ce qui entretient defait une inégalité de traitement fon‐dée sur l’orientation sexuelle malgréles recommandations de la HALDE etde la Cour Européenne des Droits del’Homme.

Profitant de la discussion du texte surla simplification du droit, Alima Bou‐mediene‐Thiery a, pour sa part, pro‐posé d’étendre au secteur privé lebénéfice du congé pour événementfamilial aux salariés qui contractent unPACS, comme pour les salariés qui semarient. Refus encore, au prétexte,entre autres, de ne pas faire peser unenouvelle charge sur les entreprises enpériode de sortie de crise... Petite vic‐toire, la sénatrice a en revanche faitadopter l’inscription de l’identité dupartenaire survivant d’un PACS surl’acte de décès du défunt. Un amen‐dement voté malgré l’opposition duGouvernement.

Quelle politiquepour la dépendance ?

Face à la perte d’autonomie des seniors, quiconcerne aujourd’hui 12 % des plus de 75 ans,Jean Desessard a posé clairement la questionde la solidarité nationale. Aujourd’hui 600 000 personnes vivent en établissementspécialisé, attisant la convoitise du marchéprivé. À l’opposé, les sénatrices/teurs écolo‐gistes proposent un véritable service publicde la compensation de la perte d’autonomiepour pallier les inégalités en matière de ni‐veau de vie et d’espérance de vie en bonnesanté. Grand plan de l’habitat senior, valori‐sation des métiers de la dépendance, créationde structures alternatives et à taille humaine,autant de mesures qui créeraient de l’emploi« socialement utile, non délocalisable et nonpolluant ».

Parallèlement, la pérennité du financementdes Maisons Départementales des PersonnesHandicapées (MDPH) est mise à mal depuisquelques années, alors même qu’elles sontchargées de nouvelles missions telles que l’octroi de l’allocation aux adultes handicapésou la mise en place de la convergence des po‐litiques liées au handicap. Pire, à la fin del’exercice 2008, l’État a décidé de ne pas ver‐ser les crédits qui leur étaient alloués ! JeanDesessard a donc fait adopter, lors de l’exa‐men du texte sur le fonctionnement desMDPH, une convention pluriannuelle d’objec‐tifs et de moyens entre ces établissements, laCaisse nationale de solidarité pour l’autono‐mie, le conseil général et l’État. Mais le texteprévoit malheureusement des dérogations enmatière d’accessibilité des logements.

Dans un autre registre, Marie Blandin a inter‐pellé la Ministre de l’enseignement supérieursur les grandes difficultés rencontrées par lesjeunes bacheliers en situation de handicappour poursuivre leurs études (éloignement,accessibilité des locaux et des logements, fatigabilité accrue, suivi médical). Un parcourssemé d’embûches qui génère une concur‐rence avec les bacheliers valides.

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X. Bertrand. Je n’ai pas dit cela !J. Desessard. Mais si, je l’ai entendu !

X. Bertrand. De quelle oreille avez‐vous entendu ?J. Desessard. Quand vous parlez, il est vrai que j’entends de l’oreille gauche !

Échos de séance

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Campagne des Jeunes écologistes ‐ mai 2011

*L’article 40 permet de rejeter un amendement sansdébat au motif qu’il entraîne des charges supplémen‐taires pour le budget de l’Etat.

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À bout de souffleCe n’est plus du « greenwashing », c’est laméthode Coué. Lorsqu’il annonçait dansson programme en 2007 que la Franceavait la chance de « maîtriser » l’énergienucléaire, Nicolas Sarkozy ajoutait quevouloir sortir du nucléaire mettait « gra‐vement en danger notre indépendance ».Si danger il y a, c’est dans la politiqueénergétique française qui fait le lit de dé‐sastres comme Fukushima, où l'entrepriseTEPCO a préféré faire passer les bénéficesdes actionnaires avant la sécurité des ci‐toyens et de la planète.

> LE SÉNAT AU COEURDE L’ATOME

Un texte « absolument essentiel pour lacompétitivité de notre pays ». C’est en cestermes que Jean‐Louis Borloo a présenté leprojet de loi “NOME” (Nouvelle Organisa‐tion des Marchés de l’Électricité). Électriciténucléaire s’entend, car il n’est bien sûr pasquestion d’autre chose. S’abritant, commetoujours, derrière les condamnations euro‐péennes pour non‐transposition de direc‐tives, ce texte a principalement pour butd’ouvrir la participation au secteur privé vial’acquisition d’électricité. Pour Jacques Mul‐ler, ce n’est rien moins qu’une « Nouvelleopération de mainmise sur l’électricité » auprofit du secteur privé. Benoist Apparu yvoit, lui, « la régulation la plus forte qui soitdans un contexte juridique donné » !

Ce texte, très technique, au terme duquel25 % de la production nucléaire serontconcédés par EDF au prix de revient, n’a passeulement divisé la majorité entre pro‐nu‐cléaires gaullistes et pro‐nucléaires libéraux.Il a surtout révélé le piège nucléaire. Carcette énergie est si coûteuse à court termequ’il faut y réinvestir toujours plus pour yvoir un semblant de rentabilité. On peut sedemander ce qu’aurait été le débat s’il avaiteu lieu après Fukushima. Ladislas Ponia‐towski aurait‐il autant regretté que « leGouvernement n’ait pas exploré la piste del’ouverture du capital des centrales nu‐cléaires » ?

Cet automne, le nucléaire était encore tout‐puissant dans l’hémicycle. Et si la gauche re‐grettait la privatisation rampante dusecteur énergétique, seul Jacques Mullertentait d’en finir avec le mythe de l’énergiela plus rentable. En quelques mots, il a dé‐monté l’illusion du nucléaire propre, le bluffdu nucléaire rentable, l’utopie de l’indépen‐dance énergétique par l’atome. Rappelant

tout d’abord la provenance nigérienneet la quantité limitée d’un mineraidont les conditions d’exploitation nesont pas une gloire pour la France, il apointé les émissions de gaz carboniquenécessaires à sa transformation et àson transport. Mais il a surtout dé‐noncé l’imposture intellectuelle quiconsiste à nier ou minimiser le coût duretraitement des déchets et du déman‐tèlement des centrales, à ce jour in‐connu, et qui n’est pas internalisé dansle calcul final du coût de l’électricité.Mais pour Benoist Apparu, les charges delong terme du nucléaire sont « provision‐nées et payées dès aujourd’hui »...

« Construire le futur, ce n’est pas s’appuyersur une énergie fossile limitée, mais réflé‐chir en termes d’énergies renouvelables. »Jacques Muller

Quid des énergies renouvelables ? Malgréles arguments de Jacques Muller, la droitene cache pas son souhait de « modérer lacharge financière que représente pour ERDFl'envolée des énergies renouvelables » !L’amendement de Jacques Muller visant àles développer, en permettant que desfournisseurs alternatifs comme Enercooppuissent bénéficier du dispositif de laContribution au Service Public de l’Electri‐cité (CSPE), a été qualifié de trop « révolu‐tionnaire ».

Mais avec cette introduction du secteurprivé dans la gestion de l’énergie, c’est aussiune hausse à court terme de 12 à 15% quise profile, avec une tarification dégressiveanti‐sociale et anti‐écologique, pénalisantles plus modestes dont les logements sontdes passoires énergétiques. L’amendementde Jacques Muller pour faire participer lesfournisseurs aux impayés d’énergie, finan‐cés à 80% par les collectivités territoriales,a bien sûr été rejeté.

Il s’agit donc bien, en conscience, de mettresous perfusion l’ensemble du parc nucléairefrançais afin de le prolonger vingt ans deplus, vingt ans de trop. Un choix drama‐tique, dangereux et incohérent qui va coû‐ter 35 milliards d’euros mais qui se chiffreaussi en années de retard pris dans la recherche sur d’autres technologies. Carmalgré les engagements de la France d’atteindre 23% de production d'énergiesrenouvelables d'ici à 2020, c’est une « politique énergétique sans aucune cohé‐rence ni stabilité » que Marie Blandin a cri‐tiquée, énumérant le durcissement des

conditions d'implantation des éoliennes, lamise au pas des filières éoliennes en merou de biogaz, l’abandon du solaire ther‐mique ou encore le moratoire sur les aidesau développement du photovoltaïque.

Le grand blond avec unappareil radioactifOn avait déjà les détecteurs d'incendieau plutonium, voici les détecteurs deplomb au cadmium ou l'art de traiter lemal par le pire : Charybde et Scylla auroyaume du risque ! La loi de simplifica‐tion du droit a tout simplement supprimé l'agrément extrêmementcontraignant pour les professionnels dela détection de plomb dans l'habitat.Tandis que toutes les instances depuis lespréfectures jusqu'à l’Autorité de sûreténucléaire s'accordent pour alerter sur lerisque de dissémination incontrôlée encas de perte ou de vol d'un appareil,Marie Blandin a rappelé qu'en un antrois appareils avaient déjà été égarésdans le métro. C'est la transpositionaveugle d'une directive européenne quiest à l'origine de cette absurdité, en to‐tale non‐conformité avec le droit françaisqui n'autorise pas la libre circulation detelles substances...

Fréquence radioAu cours de l’examen du texte sur labioéthique, Marie Blandin et Jean Des‐essard ont proposé d’encadrer les exa‐mens d’imagerie médicale afin deréduire les doses de rayonnements io‐nisants délivrées aux patients suite àl’alerte donnée par l’Autorité de sûreténucléaire elle‐même. Refus de XavierBertrand qui précise que cela ne relèvepas de la loi et que la France est sortie« de la préhistoire » dans ce domaine.

Manifestation pour la fermeture de Fessenheim

© Jacques Muller

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30 juin - Non, c'est non à untexte indulgent écrit par des rap‐porteurs peu curieux qui pren‐nent le parti d'améliorer la filièrenucléaire, de vanter la transpa‐rence, malgré tout ce que nousavons vu. Signe de leur audace :ils demandent une"étude" sur la sous‐trai‐tance alors qu'ellen'existe que sous déro‐gation motivée. Oui, ilfaut sortir du nucléaire.

L’empreinte 2010/11 - 17

Road Movie radioactif par Marie Blandin

20 mai - Visite de La Hague sous haute sécurité.Contrôle de sécurité. Vestiaire. Contrôle de sécurité.Confiscation des téléphones. Visite de la salle"chaude" où l’on sort les tubes contenant l’uraniumavec des machines robotisées, puis la piscine d’entre‐posage, immense. Au‐dessus de nos têtes un simpletoit de tôle ondulée mais je suppose qu’aucun avionne pourrait s’y écraser. Notre sécurité aérienne est sû‐rement aussi infaillible que nos centrales. En cas depanne comme à Fukushima, la piscine pourrait tenir7 jours. J’échappe de peu à la photo‐souvenir en com‐binaison blanche destinée au marketing. Je maugréeet obtiens un tour de car supplémentaire dans l’en‐ceinte. Nous passons devant un silo des annéessoixante qui attend d’être retraité, un jour, peut‐être...Plus loin c’est un des tout premiers sites d’enfouisse‐ment. Le nucléaire a déjà une histoire et des fossiles !Rencontre avec les syndicats. Sous‐traitance, suicides,réduction des coûts... Ici, 80% des doses de radioacti‐vité sont absorbées par le personnel extérieur.

14 mars - À Fukushima‐Daiichi, les trois coeurs sont désormais entrés en fusion et la catas‐trophe naturelle laisse place à la catastrophe nucléaire. Cette centrale datant de 1970 venait d’êtreprolongée de dix ans...

14 avril - L’Office Parlementaire d’Évaluation des Choix Scientifiques et Technologiques(OPECST) dont je suis membre lance une étude sur “La sécurité des centrales nucléaires fran‐çaises, la place de la filière et son avenir”. J'entame un marathon de visites de terrain et d’au‐ditions, en vue du rapport prévu pour le 30 juin. Sans grand espoir car la présence desrapporteurs Bataille et Sido, fervents soutiens de la filière nucléaire, ne présage rien de révolu‐tionnaire. In extremis, je parviens à ouvrir le conseil scientifique à Yves Marignac (Global chance)et Monique Sené (Groupement Scientifique pour l’Information sur l’Énergie Nucléaire).

26 avril - Anniversaire de Tchernobyl... Aujourd’hui tout

le monde sait que le nuage ne s’est pas arrêté à la frontière

mais les victimes de nombreux cancers de la thyroïde ne

sont toujours pas reconnues. Depuis quelques jours, au

Japon, on commence à mesurer l’ampleur des dégâts. Ici, en

France, on continue d’affirmer que notre parc est en totale

sécurité et que tout est sous contrôle.

13 mai - Nous auditionnons les services de l’État pour tenter d’éva‐luer la gestion d’une crise nucléaire. En dehors de l’urgence et des alen‐tours immédiats, rien n’est réellement anticipé. Déni total de lapossibilité d’une conjonction de facteurs à Gravelines (59) qui cumule14 sites SEVESO, des vents dominants dirigés vers les 4 millions d’habi‐tants, un risque majeur de marée noire... Nichées au coeur des discours

ultra‐techniques des acteurs institutionnels pro‐nucléaires, de petitesphrases tentent de préparer à “l’improbable” : « Personne ne peut ga‐rantir qu’il n’y aura jamais d’accident grave en France » nous déclareainsi... le président de l’Autorité de Sûreté Nucléaire. AREVA et EDF dé‐taillent avec insistance l’impact de la filière nucléaire sur l’économie lo‐cale et le rayonnement international.

10 juin - Fessenheim, la plus ancienne centrale française après 30 ans d’exploi‐tation. Un des combats de mon ami Jacques Muller... Ici, l’urgence est criante et lasituation rappelle celle de Fukushima par la possibilité d’un effet domino avec la rup‐ture de digue de la centrale hydroélectrique. Ici, tout est obsolète, jusqu’au radierd’1,50 m quand au Japon il en faisait 8 ! Ici, la centrale repose sur une gigantesquenappe phréatique dans laquelle des fuites de tritium restent encore inexpliquées.

17 juin - La technologie française n’a rienpu faire contre l’atome désormais incontrôla‐ble. L’usine construite en urgence par AREVApour décontaminer les 100 000 tonnes d’eaude refroidissement des réacteurs à Fukus‐hima n’aura fonctionné que cinq heures avantque les boues radioactives ne stoppent défi‐nitivement son travail. Conséquence possible,le déversement de cette eau dans la mer.

23 juin - C’est sûr désormais,

l’ASN va autoriser la prolongation

de Fessenheim pour dix ans.

Certes, un petit lifting est prévu

mais les leçons de Fukushima ne

sont pas tirées : un canal qui

passe en surplomb, un radier

d’1,30 m, un réacteur inchangé

depuis 1977, une zone à risque

sismique...

Centrale de Gravelines

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Centrale du Tricastin

Centrale de Fessenheim

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18 - L’empreinte 2010/11

Intoxication volontaireCe sont des hommes et des femmes pourqui la retraite devait être le début d'unenouvelle vie. Martyrs de l'amiante, dessolvants, des éthers de glycol, des fibrescéramiques ou des sels de métaux lourds,pour eux ce sera la maladie, la souffranceet la mort. Ce sont des enfants intoxiquésau plomb dans des quartiers insalubres.Ce sont des familles d'agriculteurs dontles enfants naissent de sexe indéterminé.

> MOURIR A LA TÂCHEAu cours de l’examen de la proposition deloi relative à l’organisation de la médecinedu travail, Marie Blandin a pointé le cy‐nisme avec lequel la réforme de la méde‐cine du travail vient porter un double coupà celles et ceux « qui quittent le monde dutravail avec un cancer sous le bras ». Letexte inverse une fois encore la charge dela preuve en créant une commission char‐gée d'instruire les preuves apportées parles victimes. Comment imaginer que desimples employés puissent prouver leurcontamination au travail, là où la société amis un siècle pour protéger les salariés del'amiante ? A moins qu'il ne s'agisse de ga‐gner du temps puisqu'il est vrai qu'un plai‐gnant mort coûte moins cher qu'unplaignant vivant.

« Qui paye décide » a défendu la sénatricecentriste Anne‐Marie Payet. En vidant lamédecine du travail de sa substance, c'estle dernier rempart entre le salarié et l'en‐treprise qui tombe. Car l'indépendance dumédecin, sa juste information par l'entre‐prise et la confidentialité du dossier médi‐

cal sont seules garantes de la protection,du diagnostic et de l'indemnisation éven‐tuelle du salarié. Là encore, deux concep‐tions s'opposent : l'une qui considère laresponsabilité collective d'un secteur pro‐fessionnel, l'autre qui s'arrête à la porte ducabinet médical pour ne voir qu'une juxta‐position de cas individuels, garantie abso‐lue qu'aucune étude épidémiologique neviendra troubler la productivité de l'entre‐prise. Et comme l'a souligné Jean Deses‐sard, lorsque la fiche médicale cesse d'êtreun outil de diagnostic collectif, elle devientun dossier à charge pour le salarié. Dansun contexte de très forte pénurie de mé‐decins du travail, c'est bien une démédica‐lisation assumée de la prévention desrisques professionnels qui se prépare.

> L'ÉCHARPEET L'ÉPROUVETTEÀ l'heure des nanotechnologies et desOGM, la question du choix en politique sepose plus que jamais. Ce choix peut‐il êtreobjectif ? D'un côté, le chercheur dépenddu politique pour son financement, del'autre, le politique dépend du chercheurpour orienter ses actions. A l'occasion ducolloque « La science face aux citoyens »organisé cet hiver par Politis, Marie Blan‐din a tenté d'identifier les relations entreces deux mondes.

Elle avait fait adopter en juillet 2009 lacréation d'une instance spécifique de ga‐rantie de l'indépendance de l'expertise,permettant également la protection deslanceurs d'alerte et une médiation en casd'expertises contradictoires. Elle n'a ja‐mais été mise en place, et l'élu‐e ne dis‐pose donc pour s'informer que dedonnées issues d'un important lobbyingjusque dans les enceintes les plus préser‐vées : colloques parlementaires organiséspar des laboratoires, rapports de l'OPESCTsouvent co‐rédigés par les protagonistesdu dossier. En dépit d'études de qualité,les conclusions de ces travaux concluentinvariablement à l'innocuité des pesti‐cides, à la mortalité naturelle des abeilles,à l'impossibilité de prouver l'impact d'unincinérateur sur la santé des populationsalentour. Et lorsque le Sénat a souhaitérenforcer l’indépendance de l’Agence debiomédecine, Nora Berra a été catégo‐rique : « le sujet des conflits d’intérêts estlargement abordé au cours des assises dumédicament. » Circulez...Parallèlement, les crédits alloués à la re‐cherche sont en chute libre et font la partbelle aux niches fiscales (3,5 Mds € pour le

crédit d'impôt recherche). Les secteurs lu‐cratifs et rapidement rentables ramassentla mise, au détriment de la recherche fon‐damentale, des sciences humaines ou desfilières gênantes comme la toxicologie.

Du plomb dans la têteCe sont probablement 85 000 en‐fants en France qui sont atteints desaturnisme, maladie irréversible,qui touche le système nerveux cen‐tral. Encore présent dans des écoleset les logements insalubres au sude tous, le plomb touche aussi lesfamilles et les ouvriers du BTP. C’estdonc à la problématique du mal‐lo‐gement et de l’indifférence despouvoirs publics qu’Alima Boume‐diene‐Thiery a souhaité s’attaquer,aux côtés de l’Association des Fa‐milles de Victimes du Saturnisme,avec la projection du film Du plombdans la tête suivie d’un débat le 30juin dernier au Sénat. Elle a par ail‐leurs soutenu le lancement d’uneantenne locale de l’AFVS dans le Vald’Oise.

A tort et à traverseLes anciennes traverses de chemin de

fer traitées à la créosote, hautementtoxique, sont désormais remplacées par

des traverses en béton. Appât du gainou inconscience, elles sont réutilisées

pour l'étayage des berges du Parc Natu‐rel Régional Audomarois‐Boulonnais.

Parce que je le vote bienLe secteur cosmétique payera enfin lataxe de financement de l'Agence fran‐

çaise de sécurité sanitaire des pro‐duits de santé (AFSSAPS). Alain Milon,

sénateur UMP, qui présentait cetamendement depuis deux ans contre

l'avis du Gouvernement a été bienétonné qu'il soit enfin adopté !©

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L’empreinte 2010/11 - 19

Carte vitale Gold

> RECHERCHE BLOUSE BLANCHE DÉSESPÉRÉMENT

La réforme de la loi Hôpital, patients,santé, territoires de 2009 intervientavant même que le rapport d'évalua‐tion de cette loi ne soit achevé ! Quellesmesures, interroge Jean Desessard,pour limiter l'installation des médecinsdans des zones "sur‐denses" ? Des mesures incitatives pour les étudiantsen médecine et une invitation à ceuxqui s’approchent de la retraite à prolon‐ger leur activité en attendant que le relèvement du numerus clausus fasseeffet... Aucune mesure contraignantecomme c'est le cas pour les infirmiersou les pharmaciens : on ne touche pasà la liberté d'installation !

Pourtant la situation est critique dansde nombreux départements. Dans leVal‐d'Oise, Alima Boumediene‐Thierya dénoncé une baisse constante dunombre de généralistes (251 pour 100 000 habitants contre 373 sur l'en‐semble de l'Île‐de‐France). Côté ser‐vice public hospitalier, ses questionsau Gouvernement de 2008 sont tou‐jours sans réponse et la réforme del'hôpital a produit les effets attendusà Argenteuil ou à Pontoise : privatisa‐tion du système de santé, fermeturesde services, réductions de personnel...Seule la décentralisation des servicesde santé permettrait de préserver uneoffre médicale de proximité. À Paris,la situation de l'hôpital Tenon s'estaméliorée après plusieurs mois de

grève, mais la réforme suit son courset n'épargnera ni les emplois, ni lecentre IVG, non rentable. Sur l'ensem‐ble de la France, le nombre d'infir‐miers et particulièrement ceuxspécialisés pour le bloc opératoire esten chute libre. Marie Blandin a tiré lasonnette d'alarme sur le manque d'at‐tractivité et de reconnaissance au seinde la profession, qui se traduit déjàpar une pénurie au sein des écoles.Côté médecine du travail, le constatest plus tragique encore : sur les 6800médecins en exercice, 75% ont plus de50 ans.

Quelle place pour une vraie politiquede santé publique dans une société oùles maladies modernes sont cancer,stress et suicide ? Pour Jean Desessardseule une vraie politique de préventionpermettrait « une approche globale,qui mettrait l’accent sur l’éducation enmatière de santé, qui s’appuierait surune médecine du travail indépendanteet proposerait une meilleure offre desoins sur l’ensemble du territoire. »

> UN DÉPISTAGE À BON ESCIENTLa question du dépistage fait souventdébat dans le monde médical, tantpour le coût qu'il induit que pour lebouleversement qu'il instaure dans lavie des patients. Pour pallier un diag‐nostic des troubles de l'audition troptardif chez les nourrissons (entre 16 et18 mois) un énième cavalier législatif aété introduit en plein texte réformantla loi Hôpital, patients, santé et terri‐

toire, et proposant le dépistageultra‐précoce avant 3 mois. Trop pré‐coce répondent Dominique Voynetet bon nombre d'associations, car lerisque de faux‐positif est de 80%avant 3 mois et menace fortementl'établissement du lien parent‐en‐fant. Elle a donc déposé une propo‐sition de loi visant à faire intervenirle dépistage entre le 4e et le 9e moisdans le cadre de la Protection Mater‐nelle et Infantile (PMI) afin d'accom‐pagner au mieux les familles avec lamise en place d'un congé parentalde 12 semaines.

Le constat est simple : la population vieillit, les inégalités sociales s'accroissent,nos modes de vie nous intoxiquent et l'offre de santé publique diminue. Com‐ment se soigner quand on gagne à peine de quoi se nourrir ? Où se soigner quandles médecins quittent les territoires ruraux et que des services entiers ferment ?

Culture pub Il y aurait beaucoup à dire sur l'impactde la publicité, véhiculant des stéréo‐types sociaux ou ethniques, une imagedu corps féminin réifiée et dégradante,et des valeurs consuméristes. Mais c'estune question de santé publique, la luttecontre l'obésité qui a poussé JacquesMuller à déposer une proposition de loivisant à interdire toute publicité à desti‐nation des enfants de moins de douzeans. Toutes les études prouvent en effetque l'enfant est perçu et instrumentalisécomme prescripteur essentiel desachats familiaux. Les publicités qui luisont imposées durant ses émissions sontà 87 % pour des produits trop riches engraisses, en sucre ou en sel qui impacte‐ront durablement son organisme.

Médiator :la pilule ne passe pas !Il y a tous les ingrédients d'un retentis‐sant scandale sanitaire : experts en‐glués dans les conflits d’intérêt, failledans la procédure d'Autorisation deMise sur le Marché, complicités en hautlieu, dossiers qui disparaissent... Le laboratoire Servier a détourné les règles : en faisant labelliser son médi‐cament comme anti‐diabétique, il a pule maintenir sur le marché alors quedes produits utilisant la même molé‐cule étaient retirés. En réalité prescritcontre l'obésité, ce médicament re‐lance la polémique sur le puissant lob‐bying des visiteurs médicaux et rendplus que jamais nécessaire la Haute Au‐torité de garantie d'indépendance del'expertise votée en 2009 et jamaismise en place. Au terme d’une centained’auditions, la Mission commune d'in‐formation du Sénat, dont est membreMarie Blandin, rendra ses conclusionsdébut juillet.©

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Jacques Muller lors d'une manifestation"Pas de pub pour les enfants"

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20 - L’empreinte 2010/11

Grande promo sur le VertAvant d’être une question d’écologie, la préservation de l’environ‐nement est une question de philosophie. Qu’est‐ce que le vivant ?Quel est notre rapport avec lui ? Comme l’a montré Marie Blandinlors des débats de l’Institut National de la Recherche Agronomique(INRA) au Salon de l’agriculture, la distinction bien privé/bien pu‐blic ne prend son sens que si l’on y ajoute la notion de bien com‐mun. Ce qui nous fait comprendre que l’on ne paye pas l’eauelle‐même mais seulement son retraitement et sa distribution.

L’eau, la fertilité des sols, le climat n’ont pas de valeur marchandecar ce sont des composantes fondamentales de l’environnement,qui concourent à la survie élémentaire des espèces. Notion biencomprise au Japon où existent des terres “sacrées” qui ne serontjamais bâties. Faut‐il alors mettre un prix sur le vivant pour le pré‐server des appétits colossaux qu’il soulève ? Faut‐il le mettre souscloche et le défendre les armes à la main ? Autant de questionsdont les réponses feront le XXIe siècle...

> LE VIVANT À PRIX D'OR

Qu’est‐ce que l’Institut Vavilov ? Rien,quelques centaines d’hectares cultivés de‐puis un siècle près de Saint‐Pétersbourg.Qu’est‐ce que l’Institut Vavilov ? Tout, uncatalogue de 330 000 variétés de fruits etlégumes conservées sous forme d’herbiergéant quand un pays comme la France encompte seulement... 7 000 ! Sans la mobi‐lisation scientifique et politique à traversla planète, la pression immobilière détrui‐sait les quelques hectares classés au Patri‐moine de l’Unesco. Pourtant, cettebanque de semences est bien plus qu’unsimple jardin‐musée. Comme l’a rappeléMarie Blandin, le lobbying des semenciersest fort pour privatiser ces variétés, aurisque d’un très fort appauvrissement dela biodiversité qui pourrait se révéler dra‐matique quand le dérèglement climatiqueaura bouleversé les écosystèmes.

Pillage lucratif de richesses immatériellesC’est la raison pour laquelle Jean Deses‐sard a posé au Ministère de l’écologie unequestion dont la réponse risque de se faireattendre : à partir du moment où la Francea signé le protocole de Nagoya, engageantles pays à reconnaître et protéger lesconnaissances de leurs communautés au‐tochtones, elle se voit dans l’obligation de

s’en donner les moyens. Or lesconnaissances des Amérindiens, desKanaks, des Polynésiens, ne peuventrépondre aux critères de propriété in‐tellectuelle occidentaux dans la me‐sure où elles existent depuis desmillénaires et sont généralement despropriétés collectives.

« La France doit adapter son droitpour respecter les spécificités. Voilàqui demandera de l’imaginationpour faire cohabiter dans les procé‐dures citoyenneté et coutumes. »Marie Blandin

Après le colloque “Biopiraterie” en 2009,Marie Blandin et Jean Desessard ont par‐rainé le colloque “Urgence Guyane” qui apermis de faire le point sur la question àtravers l’exemple du territoire amazoniendont la richesse en fait une proie facile :biopiraterie et orpaillage offrent à sa po‐pulation des perspectives bien sombres. LeCollectif biopiraterie a en effet montré quela concentration des brevets issus de labiopiraterie entre les mains de quelquesacteurs des filières cosmétique, pharma‐ceutique ou agronomique génère unehausse des prix des matières premières quiprive les populations autochtones de l’ac‐cès à ces ressources souvent nécessaires àleur survie. Celles‐ci se voient par ailleurssouvent flouées par les laboratoires de re‐

cherche qui leur font signer des autorisa‐tions dont ils ne comprennent pas les en‐jeux. Les élu‐e‐s EELV guyanais se battentdonc pour la mise en place d’un coded’éthique et de déontologie.

Face à cette complexité, l’exemple d’Aïny,jeune marque de cosmétiques qui a beau‐coup travaillé avec le gouvernement péru‐vien et les populations autochtones, estune piste à creuser. Leur choix : travailleren partenariat pendant la phase de re‐cherche, rémunérer justement les ma‐tières premières au titre du commerceéquitable, ne pas déposer de brevet maispublier les recherches créant une antério‐rité écrite qui interdit tout brevet d’uneautre entreprise.

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Colloque "Urgence Guyane" ‐ Novembre 2010

Après l'octroi des “permis Borloo” dansdes conditions pour le moins opaques, sans

aucune concertation et au mépris du principe deprécaution, le Gouvernement s’est trouvéconfronté à une mobilisation inattendue des élu‐e‐s et des citoyen‐ne‐s contre l'exploitation desgaz de schiste. Forcé de reculer, il n'a toutefoispas prononcé l'abrogation des permis, laissantainsi la porte ouverte à toute nouvelle techniquede fissuration de la roche mère. Car la loi interditla fracturation hydraulique sans la définir ! Les in‐dustriels conservent donc leurs permis et atten‐

dent que l'orage soit passé pour relancer leursfracturations, sous un autre nom... Pour Domi‐nique Voynet et Jean Desessard, ce texte n'estdonc que de la poudre aux yeux, visant à faire re‐tomber la mobilisation. Et ce n'est pas la toutenouvelle commission, destinée à « garantir latransparence de projets d’expérimentation scien‐tifiques », qui rassurera les écologistes quant àl'innocuité d’une technique aux méfaits avéréset probablement à l’origine des tremblements deterre qui ont secoué le Lancashire juste avant lesdébats !

Opération mains propres

© Géraldine Boÿer

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L’empreinte 2010/11 - 21

Chasseurs à la niche« Des salariés et des agri‐culteurs se suicident, desécoles ferment, il n’y aplus de médecins dans lescampagnes, la sécuritésanitaire vacille sous lapression des influences,mais, environ tous lestrois ans, et de préfé‐rence avant les élections,il faut que nous occu‐pions le Parlement avecla chasse. » C’est dansune ambiance particuliè‐rement virile que MarieBlandin a tenté d’endi‐guer le nouveau sacredes chasseurs « premiersgestionnaires de la biodi‐versité ». Las, les interven‐tions « pédagogiques »des fédérations dechasse dans les écolessont désormais inscritesdans la loi, rapprochantainsi de l’école « l’imagi‐naire des armes ». Mal‐gré les démonstrationsd’infractions multiples àla préservation de la floreet de la faune et lesconnaissances parfoistrès approximatives, les chasseurs pourrontcontinuer de faire passerleur message. MarieBlandin a rappelé que 48 % des espèces d’oi‐seaux chassables enFrance sont pourtantclassées par l’Union in‐ternationale pour laconservation de la natureparmi les espèces vulné‐rables et que la chassevient accentuer la régres‐sion de ces espèces.

Régime bioComme pour le photovol‐taïque, le Gouvernement

doit considérer que l’agricul‐ture biologique est “satis‐

faite” puisque le créditd’impôt baisse de 50%,

portant le budget global à 17 M €. Petit rappel, les

agrocarburants sont financésà hauteur de... 196 M €.

Si loin, si proche...Le positionnement de l’État n’est pas toujoursclair sur la question de l’orpaillage. En Guyane,l'orpaillage alluvionnaire illégal est depuis long‐temps une plaie pour l'environnement et la santédes populations autochtones. Les boues rési‐duelles, saturées de mercure, de cyanure et de carburants empoisonnent très gravement plu‐sieurs générations d’Amérindiens dans l’indiffé‐rence des autorités, tandis que l’afflux depopulations clandestines épuise durablement lesressources locales. Les opérations Anaconda, Harpie 1 puis 2 ne suffisent pas à endiguer les migrations transfrontalières alimentées par uncours de l’or en hausse vertigineuse et destiné àalimenter... nos téléphones portables !

Or non seulement le pré‐fet vient d'autoriser l'ins‐tallation légale d'orpail‐leurs sur les anciens sitesillégaux, entérinant unesituation de fait queMarie Blandin a dénon‐cée au Sénat, mais sousl’impulsion du Présidentde la République, se pré‐pare le développementd’un Schéma d’orientation minière. Garimpeiroscharriant drogue, alcool et prostitution d’un côté,multinationales de l’autre creusant la roche sousle contrôle de l’État sans que les collectivités locales aient leur mot à dire. Autant de fléaux quine seraient pas permis en métropole...

Pour la plus grande gloire de la FranceLes entreprises françaises possèdent un réel savoir‐faire technologique qui s’exporte dans lemonde entier. Problème : quand il s’agit decontrats juteux avec des gouvernements peu soucieux d’écologie, ce qui ne se concevrait pasici ne pose aucun problème là‐bas.En Russie, la construction de l’autoroute Moscou‐

Saint‐Pétersbourg est momentanément interrom‐pue face à la colère des riverains et des ONG sou‐cieuses de la disparition programmée d’uneréserve considérable de biodiversité, la forêt deKhimki. Loin de ces préoccupations, la filiale deVinci chargée de sa réalisation exerce de fortespressions pour la reprise des travaux sans modifi‐cation du tracé. Dominique Voynet a interrogé laministre de l’Écologie sur la « non‐volonté de l'in‐dustrie française de concilier les enjeux industriels,environnementaux, économiques et sociaux dansun pays partenaire ». La réponse est claire : le Gou‐vernement russe décide et Vinci s’inclinera...quelle que soit la décision. Connaissant le position‐nement écologique de ce gouvernement, il y atout lieu d’être rassuré.

En Amazonie, l'image du chef indien en pleurs afait le tour du monde et ce n'est qu'un début. Envalidant la construction du troisième barrage leplus puissant au monde, à Belo Monte sur le Xingu,le Gouvernement brésilien a fait un choix terriblepour l'Amazonie puisqu'il signifie la disparition de600 km² d'un écosystème d'une valeur inestimableen termes de biodiversité. Mais il annonce surtoutla disparition des populations indiennes installéesen aval avec la disparition de leur forêt primaire,des stocks de poisson nécessaires à leur survie etde l'isolement qui préservait leur culture. Bientôt,au nom de l'approvisionnement électrique desgrandes villes, du développement du pays et desnombreux emplois à la clef, la France sera cautiond'une catastrophe humanitaire. Marie Blandin aalerté la ministre de l'Environnement et celui del'Industrie sur l'implication des entreprises fran‐çaises GDF‐Suez (détenue à 35% par l'État) ou Als‐tom, alors que la France a contribué aux accordsde Nagoya sur le respect de la forêt primaire et deses habitants. Elle a également reçu une déléga‐tion d'Indiens concernés par trois projets de bar‐rages en Amazonie. Au lieu de multiplier les petitescentrales de proximité et de diversifier les énergiescomme la biomasse et le solaire, le Brésil a choisila démesure et la France son rayonnement... À quel prix !

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Rencontre avec des indiens d'Amazonie ‐ 25/02/2011

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« C’est un pouvoir qui est inquiet de nepas être assez absolu et de devoir se re‐mettre en cause. C’est un pouvoir qui estincapable de balayer devant sa porte etde reconnaître que les collectivités terri‐toriales pourraient inspirer l’État de parleurs efforts de conduite des projets ouleurs capacités d’innovation. » Domi‐nique Voynet

> DE LA BIODIVERSITÉ APPLIQUÉE AUPAYSAGE POLITIQUE

La réforme des collectivités territorialesest finalement arrivée à terme. Les séna‐trices/teurs ont bataillé avec force contreun mode de scrutin anti‐démocratique :recul de la parité et de la diversité dans lesassemblées territoriales mais aussi renfor‐cement du bipartisme. Jusqu’au bout, JeanDesessard aura tenté de convaincre lescentristes que le mode de scrutin adoptépour les futurs conseillers territoriaux si‐gnait la mort de la diversité politique dansles territoires. Ce n’est d’ailleurs pas un ha‐sard si le Président de la République a faitreporter le remaniement après ce vote,afin de convaincre les plus indécis... Il sem‐ble malgré tout que nombre de parlemen‐taires, virulents dans l’hémicycle,reconnaissent dans les couloirs attendre2012 pour balayer un texte aussi inappli‐cable.

“Nos assemblées doivent être à l’imagede nos cours d’école.” Alima Boume‐diene‐Thiery

Face à une telle crise institutionnelle, laproposition de loi organique socialiste in‐terdisant le cumul du mandat parlemen‐taire avec l'exercice d'une fonctionexécutive locale avait pour objectif unecertaine réhabilitation du politique. Pro‐fessionnalisation des élu‐e‐s, frein au re‐nouvellement de la classe politique,obstacle à la parité et à la diversité, AlimaBoumediene‐Thiery a dépeint les consé‐quences du cumul sur le paysage politiquefrançais. Sans parler de l’absentéisme ausein du Sénat, favorisé par le scrutin pu‐blic qui fait voter les absents. A peineavait‐elle pointé le conflit d’intérêt induitpar le cumul Sénat/mandat exécutif local,que le texte était renvoyé en commissionpour « approfondir notre réflexion sur lesquestions annexes » grâce au... scrutinpublic demandé par un parlementaire ensituation de cumul.

> LES COMMUNESSAIGNÉES À BLANC

« La situation des collectivités estgrave, et parfois désespérée. »Dominique Voynet se fait l’échode la détresse profonde des éluslocaux. Grandes perdantes de laréforme des finances locales dontles impacts ont été mal évalués,les communes sont exsangues etbien seules face à la colère mon‐tante de leurs habitant‐e‐s. Diffi‐cile de leur expliquer que lestransferts de compétences nes’accompagnent pas du transfertdes moyens et que les collectivi‐tés doivent se substituer à une so‐lidarité nationale défaillante :service postal, élargissement desmissions de la police municipale,financement du TGV... Seule alter‐native : des coupes douloureusesdans les politiques publiques locales oul’augmentation des impôts locaux. Criti‐quant un énième débat sur la péréquationentre les communes dont le taux proposéest dérisoire (3%), Dominique Voynet acité l’exemple de la communauté d’agglo‐mération Est Ensemble où la réforme coû‐tera cette année 1,8 million d’euros !

> LE FAIT DU PRINCE

Nicolas Sarkozy rêve d’un Grand Paris quis’étende de la Manche à la Marne et quirivalise avec les plus grandes métropolesmondiales. Un projet faisant fi du quoti‐dien des Francilien‐ne‐s, de leurs difficul‐tés à trouver un logement, des heurespassées dans des transports vétustes. Etdans sa précipitation, le Président de laRépublique a bloqué le parcours juridiquedu Schéma Directeur de la Région Ile‐de‐France (SDRIF) pour faire voter en premierson projet de loi Grand Paris. En atten‐dant, le SDRIF en vigueur reste celui de1994, obsolète et par conséquent incom‐patible avec nombre de projets et chan‐tiers en cours au niveau francilien ! D’oùle vote en catastrophe d’une propositionde loi socialiste, co‐signée par DominiqueVoynet, permettant aux communes de ré‐viser leurs documents d’urbanisme sui‐vant le SDRIF 2008 sur toutes lesdispositions non contradictoires aveccelles du Grand Paris. Kafkaïen ! Las, lefeuilleton ne s’arrête pas là puisqu’unamendement voté durant la discussioninstaure un “SDRIF à la carte” dont le flou

ne bénéficiera pas aux zones naturelles,agricoles et forestières.Les sénatrices/teurs EELV se sont doncabstenus. Tandis que les enjeux financierscolossaux sont en train de rendre fous lessecteurs de l’immobilier, du bâtiment oude l’industrie, les citoyen‐ne‐s de Clichy‐Montfermeil, de Val‐de‐Fontenay et detous les territoires délaissés par ce projetpharaonique attendent autre chose quedes mesquineries juridiques.

Démocrazy

Tambouilledans les urnesEn décembre 2009, six mois aprèsles élections européennes, le Traitéde Lisbonne a attribué deux siègesd’eurodéputés supplémentaires à laFrance, rééquilibrage annoncé de‐puis 2008. Non contente de ne pasavoir anticipé cette augmentation dunombre de sièges, la France se dis‐tingue encore par un déni de démo‐cratie assumé. Rappelant que lesonze autres états concernés dési‐gnent leurs parlementaires supplé‐mentaires sur la base des résultatsdes européennes, Alima Boume‐diene‐Thiery a dénoncé le choix dela France de désigner les deux nou‐veaux membres au sein de... l’As‐semblée Nationale ! « Une réponsepragmatique à une situation transi‐toire » serine le Gouvernement.

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L’empreinte 2010/11 - 23

« Programmes coûteux, objectifs fu‐meux». Les mots sont durs mais Domi‐nique Voynet ne peut que constater legâchis budgétaire en matière de dé‐fense. Là où 3,4 milliards d’euros pour‐raient être consacrés chaque année àl’équipement des troupes, à leur forma‐tion et à leur maintien en condition opé‐rationnelle, les crédits se tournent versdes opérations aussi dispendieusesqu’inutiles.

> LE SYNDRÔMEMAGINOT

American dreamSi loin, si proche. Le déploiement d’unevéritable politique de défense euro‐péenne est à portée de main depuis la si‐gnature récente du traité de Lisbonne.Pourtant, c’est une tout autre directionque prennent les pays européens et enparticulier la France ! Dans le miroir auxalouettes, le visage de l’Oncle Sam et levieux rêve de la course aux technologiesspatiales. Le retour de la France au seindu commandement intégré de l’OTAN,sans aucun débat et malgré les doutes ex‐primés par Hervé Morin puis Alain Juppé,a provoqué de fortes interrogations dansle paysage politique européen. Le Sénat,appelé à débattre bien après la décisionélyséenne, n’a pu que constater le nouvelengagement de la France dans le projetde bouclier anti‐missile si cher aux États‐Unis. Dominique Voynet n’a pas manquéd’en souligner l’incohérence : commentenvisager qu’un pays comme l’Iran, ciblénommément par le Président de la Répu‐

blique, puisse oser tirer un missile surl’Europe malgré la “force” de sa dissua‐sion nucléaire ? À moins de remettre encause l’efficacité même de cette dissua‐sion. De là à imaginer que ces missiles nesont qu’un prétexte à relancer le com‐merce des armes... Pendant ce temps, lavraie menace du terrorisme ne trouve au‐cune solution. Alors ? Alors la contribu‐tion française à l’OTAN va passer de 140à 240 M € et la suprématie américaine vas’affirmer au détriment de la politique européenne de défense tant attendue, enparticulier par les pays de l’Est. Et Domi‐nique Voynet de poser le problème déli‐cat de la souveraineté partagée. Lesdécideurs seront bien sûr les payeurs,ceux qui consacrent le plus gros budgetsur ce bouclier qui n’a de défensif que lenom : les Etats‐Unis, seuls maîtres à bordde la défense européenne.

« Il n'y a pas de guerre juste, il n'y a pasde guerre propre. Devoir faire la guerre,devoir s’y résoudre, relève toujours d’unconstat d’échec.» Dominique Voynet

Dissuasion massiveLe texte destiné à adapter la résolution del’ONU au droit français concernant la luttecontre la prolifération des armes de des‐truction massive a forcément rencontréune adhésion... massive. Il vise à interdirel’accès des armes nucléaires, biologiqueset chimiques à des “acteurs non éta‐tiques”. Là encore, l’intention est louablemais l’efficacité discutable tant la forcedissuasive de ce texte peut sembler fai‐ble au regard des enjeux politiques et fi‐

nanciers colossaux. Toutes lesétudes montrent par ailleurs unlien évident entre le développe‐ment du nucléaire civil et la pro‐lifération du nucléaire militaire.

Mais Dominique Voynet sou‐lève surtout un problèmeéthique : qui peut, et surquelles bases, déterminerqu’un État a droit à l’arme nu‐cléaire et pas un autre ? On levoit bien avec l’exemple de laLibye, à deux doigts d’obtenirRafales et centrales soi‐disant àvocation civile. La prétenduedissuasion n’est donc qu’unélément supplémentaire de laprolifération. Seule issue : la li‐mitation des arsenaux et la sor‐tie du nucléaire.

Devoirde mémoire

Les photos du dictateur serrantla main de notre Président ontdisparu du site de l’Elysée maisle souvenir en est resté ; celuid’un tapis que l’on déroule sousles pas du porteur de billets.Celui des amitiés dérangeantes,au plus haut de l’Etat, avec cethomme aujourd’hui unanime‐ment rejeté. Tandis que laFrance intervenait en Libye sousmandat de l’ONU, le débat auSénat sur l’opportunité, lesconditions et les objectifs de cetengagement militaire semblaitquelque peu décalé. Rappelantles hésitations qui ont caracté‐risé la diplomatie vis‐à‐vis de laLibye, Dominique Voynet a re‐gretté l’absence de constancedans la politique étrangère fran‐çaise. Elle a surtout rappelé queles avions français bombardentdes infrastructures militaireséquipées par la France. Où laperspective de juteux contratsfait oublier Lockerbie et les infir‐mières bulgares...

Les forces françaises sont doncenfin en action avec un mandatclair : protéger les civils sans oc‐cuper le territoire par le biaisd’une zone d’exclusion aérienneet un gel des avoirs de Khadafi.Dominique Voynet voit là unpas supplémentaire dans laconstruction de la gouvernancemondiale.Mais elle met en garde contreles conséquences dramatiquesd’un éventuel dépassement dece mandat et si les populationsciviles venaient à être touchées.Objectifs : la constitution d’ungouvernement de transition etla tenue d’élections libres, sansoublier le démantèlement de lamilice du dictateur. Mais aprèsquatre mois de présence sur leterrains et les premiers “dom‐mages collatéraux”, un débatsuivi d’un vote interviendra le12 juillet pour statuer sur la pro‐longation de la présence fran‐çaise en Libye, conformément àl’article 35 de la Constitution.

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Dominique Voynet brandit une balle de flashball dans l’hémicycle

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Dans uneprofessionassez sinis‐trée parl'évolutiondu mondedes médias,il est devenuplus rapideet plus éco‐

nomique (bien qu'illégal) pour les utili‐sateurs d'images d'apposer la seulemention « D.R » (Droits Réservés) sansprendre le temps de rechercher leursauteurs. Double préjudice pour les pho‐tographes puisque la spoliation inter‐vient tant au niveau du droit moral(reconnaissance de l'auteur) que dudroit patrimonial (rémunération de l'au‐teur). Or une étude de l’Union des pho‐tographes professionnels montre que le

code de la propriété intellectuelle n'estplus respecté que dans 2 cas sur 5.

C'est pourquoi Marie Blandin, associéeaux plus grands noms de la photogra‐phie et soutenue par plus de 500 pro‐fessionnels, a proposé de mettre fin àcette pratique en définissant clairementles œuvres réellement orphelines viaune instance à même de collecter desdroits d'auteurs et de les restituer sil'auteur est finalement retrouvé. Il s'agitbien évidemment de lutter contre laspoliation des professionnels et nond'empêcher la création bénévole et lespratiques coopératives enrichissantespour la culture.Le Sénat a adopté cette proposition deloi à l'unanimité cet automne. La na‐vette suit son cours et ne devrait pasamener de mauvaise surprise.

Les orphelines... adoptées !

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À l'agenda• 25 septembre ‐ Élections sénatoriales• 10 octobre ‐ Journée Parlementaire à Rambouillet (Yvelines)

État d’application des loisC'est un rapport du Sénat qui l’affirme :91,4 % des lois votées pendant la session2009‐2010 n'ont pas été mises en applica‐tion, ou seulement très partiellement. Bienévidemment les 8,6 % d'heureuses éluessont celles mises en avant et médiatiséespar le Gouvernement. Reconnaissance etindemnisation des victimes des essais nu‐cléaires français contre laquelle les écolo‐giques avaient bataillé, Grand Paris,transformation de la Poste en société ano‐nyme, ont vu leurs décrets d'application ra‐pidement publiés. De l'autre côté, loipénitentiaire, élimination des bombes àsous‐munitions pourtant votée à l'unani‐mité, ne sont toujours pas appliquées. Lacapacité du Gouvernement à prendre desdécrets d’application est donc corrélée àl’intérêt qu’il porte à une réforme. À ce jour,la réforme des retraites votée cet hiver adéjà fait l'objet de 30 décrets. Celle du Gre‐nelle, votée en 2009, n'en a reçu que... 2 !