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••• n°156 mai 2012 leNSEIGNANT 15 J JE ME SUIS IMMERGÉE dans une classe de CM1 parisienne, la @Classe_Acou. Dans cette classe qui tweete depuis quelques mois, aucun matériel informatique. Pourtant figure au mur une charte Twitter ; sur les tables, des brouillons avec 140 cases pour les fameux 140 caractères. Mais comment font-ils ? C’est ce que je vais vous faire découvrir… Les élèves entrent et découvrent une lettre du Clemi (1) qui leur annonce qu’ils sont lauréats au concours de blogs (2) organisé à l’occasion de la semaine de la presse. Le jury les félicite d’avoir su produire des articles courts de qualité, mais regrette qu’on ne voie pas davantage qui ils sont. Réaction immédiate d’un élève : «mais on peut pas mettre des photos de nous sur le blog car des parents ne seraient peut-être pas d’accord !». Je leur demande de m’expliquer ce que cela leur apprend de faire un blog et de tweeter. Samy dit tout de suite que ça aide à mieux écrire car «sur Internet, des millions de personnes peuvent nous lire alors que quand on écrit dans notre cahier, pratiquement personne ne lit, seulement le maître et les parents». Assentiment de la classe, même si Samy tient à préciser que c’est important aussi de s’entraîner à écrire bien, même sur son cahier ! Ensuite est évoqué le fait que publier leur permet de connaître des gens et, très vite, ils évoquent la charte, qu’ils ont tous signée, qui fixe des règles importantes comme É É d d u u q q u u e e r r a a u u W W e e b b 2 2 2 . . . 0 0 0 De nombreux enseignants expérimentent l’utilisation du Web 2 en classe, avec leurs élèves, et en découvrent les richesses pédagogiques. Il serait dommage de laisser à la porte de l’École des outils aussi précieux pour les apprentissages par méconnaissance ou crainte. Et si ce n’était pas si compliqué ? DOSSIER

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ÉÉÉÉ dddd uuuu qqqq uuuu eeee rrrr aaaa uuuu WWWW eeee bbbb 2222 .... 0000 De nombreux enseignants expérimentent l’utilisation du Web 2 en classe, avec leurs élèves, et en découvrent les richesses pédagogiques. Il serait dommage de laisser à la porte de l’École des outils aussi précieux pour les apprentissages par méconnaissance ou crainte. Et si ce n’était pas si compliqué ? n°156 • mai2012 • l’ e NSEIGNANT 15 •••

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n°156 • mai 2012 • l’eNSEIGNANT 15

JJE ME SUIS IMMERGÉEdans une classe deCM1parisienne, la @Classe_Acou. Dans cetteclasse qui tweete depuis quelques mois,aucun matériel informatique. Pourtantfigure aumur une charte Twitter ; sur lestables, des brouillons avec 140 cases pourles fameux 140 caractères.Mais commentfont-ils ? C’est ce que je vais vous fairedécouvrir…Les élèves entrent et découvrent unelettre du Clemi(1) qui leur annonce qu’ilssont lauréats au concours de blogs(2)

organisé à l’occasion de la semaine de lapresse. Le jury les félicite d’avoir suproduire des articles courts de qualité,mais regrette qu’onne voie pas davantagequi ils sont. Réaction immédiate d’unélève : «mais on peut pas mettre desphotos denous sur le blog car des parentsne seraient peut-être pas d’accord !». Jeleur demandedem’expliquer ce que celaleur apprend de faire un blog et detweeter. Samydit tout de suite que ça aideà mieux écrire car «sur Internet, desmillions de personnes peuvent nous lirealors quequandonécrit dansnotre cahier,pratiquement personne ne lit, seulementle maître et les parents». Assentiment dela classe, même si Samy tient à préciserque c’est important aussi de s’entraîner àécrire bien,même sur son cahier ! Ensuiteest évoqué le fait quepublier leur permetde connaître des gens et, très vite, ilsévoquent la charte, qu’ils ont tous signée,qui fixe des règles importantes comme

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De nombreux enseignants expérimentent l’utilisation du Web 2en classe, avec leurs élèves, et en découvrent les richesses

pédagogiques. Il serait dommage de laisser à la porte de l’Écoledes outils aussi précieux pour les apprentissages par

méconnaissance ou crainte. Et si ce n’était pas si compliqué ?

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beaucoup plus de place et que ses plusgrandes qualités sont aussi ses limites. Eneffet, les 140 caractères qui imposent unformat court permettent de limiter le tempspassé à rédiger et l’outil est plus maniable.L’utilisation du smartphone personnel dumaître s’est imposée : pas de wifi nid’équipement dans la classe, une seule salleinformatique pour l’école, c’était le plussimple… Il fait confiance aux élèves et n’a eu aucunemauvaise surprise. Il constate même, àl’usage, que le petit format de l’écran favoriseun travail individuel sans distraire les autres.Il trouve ses élèves particulièrement motivéspour écrire, soucieux d’envoyer desmessages bien écrits, valorisés d’utiliser unoutil dans l’air du temps et de discuter avecdes adultes. Finalement cela a l’air simple et banal, Twitterest un outil, parmi d’autres, qui s’intègre auquotidien de la classe et qui, sans nécessiterbeaucoup de temps, permet de lire, écrire,échanger, réfléchir dans de vraies situationsde communication. Et si devenir une classe Web 2 était plus aiséqu’on ne le pense ?

Stéphanie de Vanssay(1) Centre de liaison de l’enseignement

et des médias d’information.(2) Blog «Les infos de Classe formidable»

http://47-ivryb.over-blog.com

Alexandre AcouAlexandre Acou est professeurdes écoles depuis 10 ans, ilenseigne actuellement à l’écoleélémentaire B du 13e arrondis-sement de Paris, dans une classede CM1 de 23 élèves. Utilisateurde Twitter à titre personneldepuis la rentrée 2011, il adécidé de se lancer avec saclasse sur ce réseau...

••• celle de ne pas diffuser des informations oudes photos de personnes sans leur accord.Le travail reprend, il s’agit d’utiliser l’impératifpour rédiger des conseils de sorcière à lamanière de Jean Tardieu sur un brouillon«spécial Twitter». Et là je découvre, stupéfaite,comment ces élèves tweetent : le maître leurconfie tout simplement son smartphone !Chacun leur tour, des élèves sont les «journa-listes de la classe» chargés de répercuter, surle réseau, les évènements marquants de lajournée. Jacky vient me demander si je suismaîtresse ou journaliste «pour ne pas écrirede bêtises» me précise-t-il ; le souci de vérifierl’information est présent ! Le message estensuite soumis à la relecture du maître etenvoyé : «À 13h30 nous avons reçu unemaîtresse qui va faire un article sur ce qu’onfait : Twitter, blog et comment on travaille.Jacky et Johanna». Les tweeteurs du jour lisent les messages quiont été adressés à la classe, les réponses sontrapidement déterminées. Ensuite le smart-phone circule dans la classe au gré des élèvesayant fait valider la rédaction de leur conseilde sorcière. Le maître indique aux élèves qu’ila tweeté le lien vers la poésie pour que ceuxqui auraient oublié leur cahier puissentcommencer quand même à l’apprendre. Par rapport au seul usage d’un blog,Alexandre Acou trouve que Twitter prend

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Claire Krepper, secrétaire nationaleSYNDICAT

L’AV

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Le ministère de l’Éducationnationale peine à rentrer dans l’èredu web 2. De nombreusesressources sont proposées en ligne(Eduscol, Académie en Ligne ou plusrécent le site «English by yourself»(1))mais on reste bloqué au Web 1, pasd’interactivité, de participation, decollaboration, de possibilitéd’adapter les contenus... Lessolutions «fermées» de type ENTl’emportent largement (cf. notredossier 150). Quant aux ressources

produites par les professeurs, de leurpropre initiative ou dans le cadred’associations, elles sont peureconnues et encore moins indexéeset échangées via des sites institu-tionnels. C’est bien dommage !Heureusement une initiative sort dulot, il s’agit du réseau social profes-sionnel «Respire»(2) créé à l’occasiondes dernières journées del’innovation.

(1) www.englishbyyourself.fr(2)www.respire-education.fr

NNE NOUS VOILONS PAS LA FACE,même si des ensei-gnants de plus en plus nombreux s’emparentdu Web 2, au plus grand bénéfice de leursélèves, ce n’est pas sans mal ni sans obstacle.S’il apparaît évident que, pour préparer nosélèves au monde de demain, nous ne pouvonsfaire l’impasse sur les nouvelles technologieset si officiellement l’institution nous y invite, leschoses ne sont pas si simples.

Par méconnaissance, peur d’êtredépassés par ces outils régulièrement diabo-lisés dans les médias, les cadres de l’Éducationnationale mettent en place des filtrages quiempêchent enseignants et élèves d’accéderlibrement aux ressources du Net dans lesétablissements... De plus, c’est toute une culture professionnellequi est à réviser : l’enseignant n’est plus le seuldétenteur du Savoir, mais un outil (certesessentiel) parmi d’autres, au service des appren-tissages de ses élèves. Cette évolution supposeune remise en question des types d’exercicesproposés à l’École et des modalités d’examen. Les outils du numérique devraient faciliter letravail et l’évaluation des élèves à travers destâches complexes de haut niveau. Il est tempsque l’institution scolaire passe des déclarationsd’intentions, contenues dans ses multiplesrapports sur le numérique à l’École, à une vraiepolitique volontariste et incitative !

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LE WEB 2.0 C’ESTAUSSI• Les outils collaboratifs,comme Etherpad ouGoogleDoc qui permettent derédiger à plusieurs un mêmedocument ;

• La visio-conférence pouréchanger entre classes etdialoguer ;

• Des réseaux français,respectant notre législation,pour des premiers pas plussécurisés dans l’univers desréseaux sociaux : Lemini-reseau, Famicity ;

• Produire des vidéos, desdiaporamas... pour présenterun travail ;

• Utiliser la géolocalisationlors de sorties par exemple ;

• Utiliser des agrégateurs decontenus comme Storify pourréunir de la documentationou rendre compte d’unévènement...

• En TPS/PS, où l’acquisition du langage est une priorité, Caroline Coudé-Gouiffès observecomment ses très jeunes élèves s’approprient le TNI (*) fraîchement arrivé dans la classe.Elle crée des liens avec les parents via le blog de la classe où l’on voit les élèves en activitésur des photos, de courtes vidéos, où on les entend parler aussi. Le blog permet demontrer ce qui se fait en classe et favorise la discussion parents/enfants devant l’écran.

(*) Tableau numérique interactif

• En GS, Philippe Guillem, à Talence, utilise Twitter avec ses élèves comme cahier de vie.Tweeter la phrase du jour est un travail d’écriture quotidien porteur de sens : langage,mise en mots, clarté du message... L’exercice permet d’allier travail de production d’écrit,communication avec les parents et une première réflexion sur ce qui est publiable ou non.En primaire, la tenue de blog ou l’utilisation de Twitter amènent les élèves à rédiger pourde vrais lecteurs et à déterminer une charte avec les règles à respecter pour un usageraisonné.

• Au collège, Géraldine Duboz professeur d’histoire-géographie, utilise de faux profilsFacebook pour faire travailler ses élèves de 4e sur des personnages historiques lesamenant par là même à effectuer des recherches documentaires pertinentes sans céder àla facilité du copier/coller. Bruno Franceschi, professeur d’anglais à Paris, intègre à ses cours l’utilisation des traduc-teurs en ligne pour faire expérimenter aux élèves leurs limites au lieu de simplement lesmettre en garde contre leur usage.

• Et au lycée, Delphine Regnard, professeur de lettres classiques fait tenir à ses élèves unwebzine, les fait tweeter en français (et en latin !), poussant même l’une de ses élèves,Mélina Kéloufi à devenir une tweeteuse aguerrie et à ouvrir un blog personnel de grandequalité !

Vous trouverez sur le blog «École de demain» un dossier complet détaillant ces initiatives et d’autres,n’hésitez pas à venir les découvrir !

Née sur Twitter, e.l@b est uneassociation qui regroupe desacteurs du monde éducatif, del’école primaire à l’université, quiveulent sortir de leur isolementpour échanger sur des pratiquespédagogiques qui inscriventrésolument l’École dans la sociéténumérique. Nous réfléchissons àl’éducation au Web 2 à l’École etœuvrons pour qu’elle se fasse dansun contexte d’utilisations accom-pagnées en classe. En effet, on nepeut laisser les parents seuls face àce défi ni renoncer à former lesélèves aux usages qui sont utilesaux apprentissages.

Caroline Jouneau-Sion - Présidente d’e.l@b

Plusieurs initiatives d’utilisation du web 2 à différents niveaux de la scolarité

«

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personnels, hors des murs del’école. Une évolution qui ases bons et ses mauvais côtés. La diffamation existait bienavant Internet. Avec les réseaux sociaux, c’est la portée descritiques qui est inédite. Les élèves ne mesurent pas les consé-quences de leurs actes sur Internet. Il appartient à l’institutionde se saisir de la question des réseaux sociaux, par laformation des professeurs et la sensibilisation des élèves.On ne pourra pas aller contre le mouvement d'importationde la vie privée dans l’espace public. Il faut que la relationprofesseur-élève reste fondée sur la transmission des savoirs.

Y a-t-il des règles du bon usage des réseaux sociaux surlesquelles appuyer une réflexion ?R. C. : Encore faut-il pour cela que les règles du bon usagesoient connues et être enseignant utilisateur d’un réseau estcertainement un enjeu formidable pour la pratique du métier.Mais tout se dit, tout se voit. Élèves, parents, institution, toussont sur le même réseau. Sans paranoïa, il vaut tout de mêmela peine de s’interroger si, en dehors d’un réseau, on livreraitainsi sa vie intime, devant une foule attentive, au centre dela cité. La Commission nationale informatique et libertés,dans ses publications, rappelle avec justesse que la paged’échanges avec les élèves ne peut que s’inscrire dans uncadre professionnel. Cette page ne doit exister que tantqu’existe la relation pédagogique et lorsqu’elle cesse, l’élèvene doit plus être un correspondant. S’il le reste, il entre alorsdans un autre espace, celui de la vie privée.

Faut-il avoir peur des réseaux sociaux à l’École ? R. C. : Certainement pas, pas davantage que la radio, la téléou toutes les techniques qui sont venues seconder l’acted’enseigner à travers les époques. Mais il faut raison garder,ne pas sous-estimer les transformations concrètes dans lasociété. On ne peut pas être «contre l’Internet». Il convient plutôt de considérer que des discours tropenflammés risquent de nous empêcher d’en voir les vraiespotentialités.

propos recueillis par Stéphanie Valmaggia

Roger Crucq, président de la Fédération des autonomes de solidarité a bien voulu nous faire part de son analyse sur l’utilisation du Web 2.0.«L’Enseignant : Y a-t-il une augmentation du nombre desconflits nés de l’usage de l’Internet et des réseaux sociauxen particulier ?Roger Crucq : Les chiffres que nous publions chaque annéemontrent que les conflits liés à l’usage de l’Internet sontrelativement stables et que l’on ne peut parler d’unphénomène gravissime qui détruirait la relation entre lesélèves et leurs enseignants. Lors de l’année 2009-2010, sur environ 5000 dossiers dits de«protection juridique», environ 6% relevaient de l’usage decet outil. L’année suivante, la proportion était équivalente.Si ce chiffre est, malgré tout, en augmentation depuis 5 à 10ans, nous notons surtout que les raisons des conflits évoluentau rythme des évolutions technologiques. D’un usage«débridé» d’un nouvel outil, utilisé par certains élèves«téméraires» pour y porter des jugements désobligeants surleurs enseignants, nous avons vu naître d’autres attitudes,où ce sont des enseignants eux-mêmes qui se sont engagésdans des échanges avec leurs élèves, en dehors de pages«professionnelles» laissant parfois libre cours à la rumeur.

En quoi l’introduction des réseaux sociaux a-t-elle un impactsur la relation entre les professeurs et leurs élèves ?R. C. : Pour la première fois peut-être dans l’histoire del’Éducation, l’outil est mieux maîtrisé par l’élève que par lemaître. La détention d’un savoir s’inverse, troublant ainsi lerapport professeur-élève. La vitesse à laquelle se sontdéveloppées ces nouvelles technologies est sans précédent,bien plus importante que celle à laquelle il était possiblede former les personnels. Nos élèves, nos enfants sont de lagénération du Web. Ils en connaissent les usages et les codesmême s’ils n’en maîtrisent pas toujours les règles. Deuxmondes peuvent alors se contrarier et c’est parfois le cas,même si nombre d’expériences pédagogiques naissentpartout, dans de nombreuses classes, qui s’approprient lesréseaux sociaux pour développer de nouvelles connaissanceset acquérir de nouvelles compétences. À côté des traditionnels rapports hiérarchiques, limités à lasalle de classe, ces sites rendent possibles des contacts

USAGE DU WEB

Le point de vue de la Fas-Usu

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LLEESS VVAALLEEUURRSS DDEESS AAUUTTOONNOOMMEESS DDEE SSOOLLIIDDAARRIITTÉÉ LLAAÏÏQQUUEESS ((AASSLL))

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Le droit du webEspace de libre communication, le Web est aussi celuide nombreux abus de la liberté d’expression et derisques d’atteintes aux droits des tiers : délits de diffa-mation, d’injure, comme ceux d’atteintes à la vie privée(droit à l’image, conversations privées…) ou les provo-cations à la haine, discrimination ou violence pour desmotifs de race ou de religion. L’attention des utilisateurs d’Internet, et particulièrementdes jeunes élèves, doit être attirée sur ces risquesjuridiques, comme sur ceux d’une exploitation nonsouhaitée des données personnelles qui sont fournies.Ils doivent être invités à s’autocensurer pour garantir lerespect de leur vie privée. Il y a là un rôle éminent del’École.

Les acteurs du webSelon leur place sur la toile, les différents acteurs du Webn’engageront pas le même type de responsabilité.• Les fournisseurs d’accès (Orange, Free…) n’ont qu’un rôletechnique et n’ont pas d’emprise sur le contenu. Ils doiventmettre en place des dispositifs permettant de dénonceret d’informer rapidement les autorités en cas d’infractionset conserver les données permettant l’identification dequiconque a créé du contenu. Ils peuvent être contraintsà suspendre l’accès à un contenu illicite.• Les fournisseurs d’hébergement sont les structuresd’hébergement de contenus. Ce peuvent être des sociétés

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WEB

commerciales (Facebook, Twitter, Youtube, Dailymotion,Wikipedia, Picasa..) mais aussi un employeur, une associationou un simple particulier (blog). Ils n’engagent pas leur respon-sabilité civile et pénale du fait du contenu véhiculé par lesutilisateurs et stocké dans leur serveur, sauf s’ils ont euconnaissance de leur caractère illicite ou portant atteinte auxdroits des tiers et n’ont pas agi promptement pour retenir lecontenu ou en rendre l’accès impossible. Ils sont tenus deconserver les données permettant d’identifier toute personneayant contribué à la création du contenu. Ils peuvent êtrecontraints de bloquer l’accès à un contenu illicite ou portantatteinte aux tiers. Ils doivent transmettre les demandes dedroit de réponse.• Les éditeurs de site, éditeurs d’un service de communi-cation au public en ligne, assurent la maîtrise éditoriale ducontenu. L’éditeur de service ou de contenu engage saresponsabilité civile et pénale s’il met en ligne un contenuportant atteinte aux droits des tiers. Le directeur de publi-cation, l’éditeur d’un blog, d’un forum de discussion, ne peutêtre poursuivi du fait des propos mis en ligne par un inter-naute que s’il a effectivement connaissance du contenu illiciteavant sa mise en ligne ou si, quand il en a eu connaissance,il n’a pas agi promptement pour le retirer (cette obligationne pèse pas sur l’éditeur non professionnel -blog personnel).Toute personne nommée ou désignée en ligne a un droit deréponse et de correction ou suppression du messageincriminé.

Charles Emmanuel Ricchi, avocat conseil de l’Autonome de solidarité laïque

de Haute-Savoie

Droits et devoirs

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