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L’École des femmes Texte de Molière Mise en scène de Philippe Adrien LUN 23 MARS / 21h Dôme de Gascogne 2h 17€/13€ 14 / 15

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L’École des femmes

Texte de Molière

Mise en scène de Philippe Adrien

LUN 23 MARS / 21h Dôme de Gascogne

2h

17€/13€

14 / 15

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Le spectacle

Arnolphe a élevé sa pupille Agnès dans l’isolement le plus total a�n de faire d’elle une épouse soumise et �dèle. Mais l’innocence équivaut-elle à l’ignorance ? La violence semble être la langue naturelle d’Arnolphe : parler, pour lui, c’est dominer. Vivre ? « Se garantir de toutes les surprises. » Aimer ? Posséder et façonner : « Ainsi que je voudrai, je tournerai son âme. » Le sérieux du projet se donne pour sagesse, mais Chrysalde, l’ami, ne s’y trompe pas : « Je le tiens pour fou de toutes les manières. » Aveuglé, Arnolphe se prend pour un héros de tragédie, mais il n’y a là d’autre fatalité que la logique d’une lubie qui se retourne contre lui : « Jusqu’où la passion peut-elle faire aller ? ». Hélas, le bonhomme se trompe de genre : il n’y a pas de tragédie du cocuage ! Agnès, sous nos yeux, s’éveille aux sensations, au sentiment, à la parole en�n qui, une fois conquise, constitue la véritable école de liberté. L’oiseau est prêt à s’envoler. L’École des femmes, ou la défaite d’une tyrannie… Oui, Molière toujours, pour le dé�, l’irrespect, la liberté par émancipation, qui laisse Arnolphe pantelant, « ne pouvant plus parler – Oh ! » sera son dernier mot. Exit. Sous les rires.

La distribution

Texte de Molière Mise en scène de Philippe Adrien Avec Patrick Paroux (Arnolphe) Valentine Galey (Agnès) Pierre Lefebvre (Horace) Joanna Jianoux (Georgette) Gilles Comode (Alain) Pierre Diot (Chrysalde) Raphaël Almosni ou Dominique Boissel (en alternance) (Le notaire, Enrique) Vladimir Ant (Oronte) Décor Jean Haas Lumières Pascal Sautelet assisté de Maëlle Payonne Musique et son Stéphanie Gibert Costumes Cidalia Da Costa assistée de Anne Yarmola Maquillages Sophie Niesseron Collaboration artistique Clément Poirée Direction technique Martine Belloc Régie Erwan CreI, Ivan Paulik… Habillage Emilie Lechevalier ou Françoise Ody (en alternance) Production ARRT/Philippe Adrien, compagnie subventionnée par le ministère de la Culture, Culture, avec le soutien de l’Adami (l’Adami gère les droits des artistes-interprètes et consacre une partie des droits perçus à l’aide à la créa-tion, à la diIusion et à la formation), en coréalisation avec le Théâtre de la Tempête.

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Le mot du metteur en scène

Elle commence pour moi par une commande d’écriture, celle d’un texte français de La Cabale des Dévots, pièce historique sur l’aIaire de Tartu�e, l’auteur, Boulgakov, étant lui-même biographe de notre poète dramatique national. Le texte de Boulgakov me tombe des mains, mais dans la foulée, je dévore son Monsieur de Molière qui me fait aussitôt partager la belle empathie de l’écrivain soviétique pour l’homme de théâtre du XVIIe. Là, je comprends tout, et je vois bien le rapport entre les deux couples, Molière – Louis XIV et Boulgakov – Staline. Déjà pris, je me plonge dans La Vie de Molière de Grimarest et me voilà embarqué, disons-le, pour toujours. Du coup, je reprends le point de départ de Boulgakov ou plutôt ce que j’arrive alors à démêler des raisons qui furent celles de Molière de se lancer dans l’aventure de Tartu�e, et je fais une pièce sur cet épisode de la vie de l’homme de théâtre incomparable : Le Dé� de Molière. Le reste s’ensuit, je monte en Allemagne George Dandin et Dom Juan puis à Reims, ce Dé� commandé par Jean-Pierre Miquel qui me suggère ensuite de mettre en scène Monsieur de Pourceaugnac, à quoi viendront s’ajouter Amphitryon et Le Médecin volant avec la Comédie-Française. Depuis lors, à part la belle aventure du Malade imaginaire avec Bruno Netter et sa Compagnie du 3e Œil et une recréation de Pourceaugnac au théâtre du Vieux-Colombier, je me réserve, attendant l’heure de quelque grand rendez-vous avec l’une ou l’autre des pièces majeures. Tout récemment, il m’est tombé une bonne occasion de m’énerver devant le poste à l’écoute d’une émission consacrée à la question de savoir si Molière, ce saltimbanque n’est-ce pas, était bien l’auteur des pièces qu’on lui attribue. Et de prétendre que Corneille serait le véritable écrivain, lui dont l’inspiration, si l’on se réfère à son œuvre originale, n’a pourtant rien de commun avec celle de l’auteur du Misanthrope, de quoi tomber de sa chaise ! La preuve du reste cette École des femmes qui paraît l’année même où Molière épouse Armande Béjart, de 20 ans sa cadette. Une jeune

femme dont il y a tout lieu de penser que, tel Arnolphe avec Agnès, il l’a d’abord considérée comme sa �lle. Passons sur l’hypothèse odieuse avancée par certains contemporains d’un Molière père d’Armande et, par voie de conséquence, incestueux. Là n’est pas la question. Si, comme on l’admet généralement,

un voile sépare la vie et l’œuvre, et aussi bien l’homme de l’écrivain, il faut noter qu’ici un

fantasme traverse cette limite et guide Molière, pour la première fois, au cœur même de son inspiration, c’est-à-dire de son génie. C’est évidemment d’amour qu’il s’agit, de cet amour qui se confond avec le désir. Remontant aux premiers émois de la petite enfance, l’énergie dont il est porteur anime bien sûr tout homme dans sa jeunesse et sa maturité, elle peut même resurgir de manière aussi incongrue qu’illusoire jusque dans sa vieillesse. De cela Molière, reprenant quelques idées de nouvelles et de pièces de son temps, fait une comédie sociale qui encore aujourd’hui nous semble traiter avec pertinence de la fameuse question des relations entre homme et femme. Au départ, l’idée de combiner les termes d’un paradigme dont le maître mot pourrait être : printemps. Oui, pour Agnès et Horace qui sont de tout jeunes gens, c’est bien sûr le printemps de la vie. Mais la belle saison du renouveau est aussi là, dehors, dans le jardin et dans la nature, certes domestiquée, où Arnolphe a choisi d’élever sa pupille pour la protéger des autres mâles et bientôt l’avoir toute à lui. Le sang d’Arnolphe palpite à l’unisson du monde, le malheureux n’y voit plus clair. Susciter une écoute sensible et rigoureuse du texte. N’en rabattre ni sur la réalité, ni sur la poésie. Soutenir jusqu’au bout ce paradoxe.

Philippe Adrien

MOLIERE, C’EST POUR TOUT HOMME DE

THEATRE UNE HISTOIRE SINGULIERE.

P. Adrien

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« Il n’est pas incompatible qu’une personne

soit ridicule en de certaines choses, et

honnête homme en d’autres. »

L’AMOUR-PROPRE DÉLIRANT D’ARNOLPHE

se manifeste surtout dans sa cruelle persécution

des maris trompés. Il s’érige, par suite de son

obsession, en témoin absolu de tous les cocus

de la ville : selon lui, toutes les femmes, à part

son Agnès, sont vouées à l’in�délité, et il

soupçonne même l’honnête épouse de son ami

Chrysalde. Sa tâche, son devoir dans le monde

consiste à rendre ces in�délités publiques, voire

éclatantes ! Comment s’étonner alors qu’un tel

héros �nisse par devenir le témoin, le spectateur

terriblement lucide – comme ne l’a été aucun

cocu avant lui – de son propre malheur, ou

plutôt de la disgrâce de Monsieur de la Souche,

cet autre lui-même. Et Molière a choisi à dessein,

pour lui inViger ces tortures, une jeune �lle

naïve, incapable de déguiser ses vrais

sentiments et de ménager les susceptibilités

d’autrui ; et un jeune homme, étourdi au

possible qui par ses révélations répétées lui fait

assister au spectacle sans cesse varié de son

propre désastre causé par sa propre bêtise.

J.-D. Hubert

CE MATIN AU REVEIL, dans ma boîte mail, le

message d’encouragement d’un excellent ami :

« Je ne doute pas qu’en montant L’École des

femmes, tu vas nous apporter un autre point de

vue que celui tant de fois rabâché du vieux

grigou au démon de midi luxurieux. »

Eh bien mon cher Ahmed, pour l’heure, ce

que j’y vois et qui m’emporte dans cette pièce,

c’est justement cette folle conviction, oui cette

énergie qui jusque dans la destruction, la

vieillesse et la mort est approbation de la vie, du

jaillissement de la vie et de l’amour, cette

capacité de renaître à l’in�ni… Tu me diras que

ce n’est là rien de neuf, mais je crois que le

public se rend au théâtre aussi bien pour

découvrir que pour retrouver, se retrouver, se

reconnaître soi-même.

Ainsi je suis persuadé que déjà pour moi

ce retour à Molière était nécessaire. Chaque

répétition m’est un bonheur. Comme toujours,

premier spectateur, je suis assis dans la salle.

Ce qui me retient : la matière que les acteurs

ont à mettre en jeu recèle une telle richesse de

contradictions, une telle diversité de

mouvements et de rythmes qu’on ne �nit

jamais d’avoir à y répondre. D’autant que ce

texte en alexandrins, loin d’être

contraignant, autorise et valorise toutes

sortes de variations et acrobaties aussi bien

verbales que physiques, voire oniriques. En

fait d’école, Molière, dans ce théâtre qui sans

cesse combine le dramatique et le comique

jusqu’au burlesque, me donne à revisiter

nombre d’aspects contradictoires mais

précisément dynamiques dont j’ai toujours

cherché le secret.

J’ai l’impression du reste d’avoir choisi

cette pièce justement parce qu’elle mêle le

registre de la farce et celui des grandes

comédies. Au fond, cela va de soi, L’École des

femmes (1662) est l’œuvre du surgissement : le

talent si singulier de Molière s’y découvre d’un

coup en totalité et j’admire in�niment qu’il

sache si bien, lui le farceur, à la fois garder la

verve et nous confronter à des parcours de

personnages d’une pareille complexité : d’une

part le chemin d’Agnès, de la petite �lle

ignorante et soumise à la femme qui soudain

se révolte et en�n parle en son nom. Et surtout

bien sûr celui d’Arnolphe.

Oui, cher Ahmed, tu as raison, le

« luxurieux » dont tu parles – je me mé�e de

reprendre ton « vieux grigou » qui correspond

à une tradition contestable – n’empêche,

Arnolphe semble bien avoir passé sa triste vie

dans le seul souci de « se garantir de toute

surprise ». Ainsi, a-t-il fait élever Agnès chez

les sœurs, pour « la rendre idiote autant qu’il

se pourrait » et conjurer par là sa hantise de se

marier et �nir cocu. Hélas, il confond

ignorance, sottise, et innocence. Agnès est

autrement douée : d’intelligence et de

�nesse…

Comme tu peux le deviner, j’ai songé à

certain intégrisme ; il serait facile de situer la

pièce en milieu fondamentaliste musulman.

Comme si à part cette anomalie de l’islam

radical, qui, entre nous, joue idéalement le rôle

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du bouc émissaire, la question des hommes

et des femmes, et du juste équilibre de leurs

relations était aujourd’hui réglée. Outre

qu’elle ne l’est pas, ces torsions qu’on inVige

aux classiques ne vont jamais sans

simpli�cations abusives.

J’ai choisi la �n du 19e en tant

qu’époque charnière : la

situation des femmes s’y

trouve sur le point

d’évoluer de façon

signi�cative ; l’histoire

que raconte Molière y

demeure plausible, et son

éloignement relatif se

prête à l’examen de

formations archaïques ou

culturelles dont nous

sommes encore aujourd’hui loin d’être

débarrassés.

Arnolphe s’est forgé une cuirasse, mais

sa rencontre avec le �ls de son meilleur ami,

émigré en Amérique, va sans tarder en

révéler le défaut : bon garçon, Horace se

con�e tout simplement à l’ami de son père,

ignorant qu’Arnolphe, pour s’ennoblir, se fait

appeler maintenant d’un nom à particule. Il

lui révèle son béguin pour une certaine

Agnès dont le tuteur se nomme, dit-il, « de la

Zousse ou Souche »… Aïe ! C’est sur ce

quiproquo que l’intrigue se noue. Il su\rait

qu’Arnolphe avoue : « Monsieur de la Souche,

c’est moi ! » et il n’y aurait pas de pièce. Ou une

autre. Mais voilà, subjugué par la jeunesse, l’élan,

la beauté de son rival, il se tait et, in-petto, jure

de se battre jusqu’au bout. C’est alors que

l’intérêt, l’aIection qu’il

porte à Agnès, se

métamorphose en

passion. Le souci de soi

fait place au sacri�ce. Et le

bonhomme, bardé de

certitudes égocentriques,

est prêt à sauter dans le

vide. Le voici au comble

de la déréliction.

« Veux tu que je me tue ?

Oui, dis si tu le veux : / Je suis tout prêt cruelle à

te prouver ma Vamme »

Oui sans doute cher Ahmed, « démon de midi »,

mais quelle pitié que l’amour et cette humanité

ainsi abandonnée !

J’espère que tu viendras nous voir à ton

retour des Cyclades et que tu partageras avec

nous et notre public rires et compassion.

Philippe Adrien

La biographie de P. Adrien

• Fonde en 1985 l’Atelier de Recherche et de Réalisation Théâtrale (ARRT).

• Directeur du Théâtre de la Tempête.

• Auteur de Instant par instant, en classe d’interprétation (éd. Actes Sud-Papiers).

• A réalisé récemment : L’Ecole des femmes de Molière ; Protée et Partage de midi

de Paul Claudel ; Exposition d'une femme d'après Blandine Solange ; Bug ! et

L’A�aire de J.-L. Bauer et Ph. Adrien ; Les Chaises de E. Ionesco ; La Tortue de

Darwin de J. Mayorga ; Le Dindon de G. Feydeau (4 nominations aux Molières

2011), Le Projet Conrad, Un avant-poste du progrès d’après J. Conrad ; Œdipe de

Sophocle ; Ivanov et La Mouette de A. Tchekhov…

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La revue de presse