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AMBASSADE DE FRANCE AU CONGO – SERVICE ECONOMIQUE Le secteur pétrolier au Congo Brazzaville © DG Trésor octobre 2011 Avec une moyenne de production de 305 000 barils/jour (b/j) en 2010, le Congo s'est hissé au 4ème rang des producteurs d'Afrique Subsaharienne. L’or noir est le principal moteur de la croissance, représentant les deux tiers du PIB, plus de 75% des recettes publiques et 90% des recettes d’exportations. Brazzaville est bien conscient de la fragilité de cette manne. Le cours du baril est versatile, de nombreux champs sont vieillissants et les nouveaux champs en mer profonde nécessitent de gros investissements. C'est pourquoi le gouvernement tente de diversifier ses ressources, en commençant par les mines et forêts dont les inventaires demeurent incomplets. Par ailleurs Brazzaville affiche désormais des efforts pour rendre la gestion des ressources pétrolières plus transparentes, pour intégrer l’Initiative pour la Transparence dans les Industries Extractives (ITIE). Généralités Une économie trop dépendante de la manne pétrolière Le Djéno subit une décote par rapport au Brent. 2008 2009 Brent 96,99 61,03 Djéno 91,02 56,80 Nkossa 98,03 61,57 Source : Ministère des finances Le prix du baril de Brent, selon Economist Intelligence Unit, devrait baisser en 2012 et 2013 pour atteindre respectivement 94,5$ et 90$, au lieu de 110$ en 2011. La production pétrolière du Congo est l'une des plus anciennes du continent. Elle avait débuté en 1960 avec le gisement « on-shore » de Pointe Indienne. En 1973, la production a bondi avec la mise en exploitation du gisement « off shore » Emeraude par la société Elf-Congo. De nombreux investissements ont suivi visant des objectifs en mer de plus en plus profonds. Les réserves, estimées actuellement à 1,6 Mds de barils, se situent principalement au large de Pointe Noire, d’où proviennent environ 80% de la production. Le Congo est le premier producteur d'Afrique Centrale et le quatrième en Afrique Subsaharienne après le Nigeria, l’Angola et la Guinée Equatoriale. L’apport des nouveaux gisements, dont le site de Total "Moho Bilondo", a permis d’accroître le rythme de production jusqu’à 335 000 b/j fin 2010. Pour l'année 2011, la production pourrait atteindre 122 Mio de barils, (+10%). De nouveaux projets, notamment en eau profonde, sont à l’étude, pour contrer le déclin inéluctable des champs. Pour réaliser ces projets d’importants investissements seront nécessaires, requérant au préalable un aménagement de la fiscalité des contrats de partage de production. La croissance de la production cumulée à la forte hausse du prix du baril s’est traduite par des rentrées fiscales exceptionnelles. Ces recettes fiscales, couplées au succès de l’initiative PPTE (effacement de la dette souveraine), ont permis au pays de dégager d'importants excédents budgétaires. Le solde budgétaire est passé de -425 à 1 785 Mds de F CFA. L’or noir est le premier produit d’exportation, loin devant le bois et les minerais, drainant à lui seul plus de 90% des recettes en devises. Les Etats Unis, la Chine et la Corée du Sud sont les principaux acheteurs de brut congolais. Les deux variétés locales sont le Nkossa, léger et peu acide (proche du Brent), et le Djéno, plus lourd et plus acide.

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Page 1: Le secteur pétrolier au Congo Brazzaville - africa-onweb. · PDF filerequérant au préalable un aménagement de la fiscalité des contrats de partage de production

A M B A S S A D E D E F R A N C E A U C O N G O – S E R V I C E E C O N O M I Q U E

Le secteur pétrolier au Congo Brazzaville

© DG Trésor octobre 2011

Avec une moyenne de production de 305 000 barils/jour (b/j) en 2010, le Congo s'est hissé au 4ème rang des producteurs d'Afrique Subsaharienne. L’or noir est le principal moteur de la croissance, représentant les deux tiers du PIB, plus de 75% des recettes publiques et 90% des recettes d’exportations. Brazzaville est bien conscient de la fragilité de cette manne. Le cours du baril est versatile, de nombreux champs sont vieillissants et les nouveaux champs en mer profonde nécessitent de gros investissements. C'est pourquoi le gouvernement tente de diversifier ses ressources, en commençant par les mines et forêts dont les inventaires demeurent incomplets. Par ailleurs Brazzaville affiche désormais des efforts pour rendre la gestion des ressources pétrolières plus transparentes, pour intégrer l’Initiative pour la Transparence dans les Industries Extractives (ITIE).Généralités Une économie trop dépendante de la manne pétrolière

Le Djéno subit une décote par rapport au Brent.

2008 2009Brent 96,99 61,03Djéno 91,02 56,80Nkossa 98,03 61,57

Source : Ministère des finances

Le prix du baril de Brent, selon Economist Intelligence Unit, devrait baisser en 2012 et 2013 pour atteindre respectivement 94,5$ et 90$, au lieu de 110$ en 2011.

La production pétrolière du Congo est l'une des plus anciennes du continent. Elle avait débuté en 1960 avec le gisement « on-shore » de Pointe Indienne. En 1973, la production a bondi avec la mise en exploitation du gisement « off shore » Emeraude par la société Elf-Congo. De nombreux investissements ont suivi visant des objectifs en mer de plus en plus profonds. Les réserves, estimées actuellement à 1,6 Mds de barils, se situent principalement au large de Pointe Noire, d’où proviennent environ 80% de la production. Le Congo est le premier producteur d'Afrique Centrale et le quatrième en Afrique Subsaharienne après le Nigeria, l’Angola et la Guinée Equatoriale.

L’apport des nouveaux gisements, dont le site de Total "Moho Bilondo", a permis d’accroître le rythme de production jusqu’à 335 000 b/j fin 2010. Pour l'année 2011, la production pourrait atteindre 122 Mio de barils, (+10%). De nouveaux projets, notamment en eau profonde, sont à l’étude, pour contrer le déclin inéluctable des champs. Pour réaliser ces projets d’importants investissements seront nécessaires, requérant au préalable un aménagement de la fiscalité des contrats de partage de production. La croissance de la production cumulée à la forte hausse du prix du baril s’est traduite par des rentrées fiscales exceptionnelles.

Ces recettes fiscales, couplées au succès de l’initiative PPTE (effacement de la dette souveraine), ont permis au pays de dégager d'importants excédents budgétaires. Le solde budgétaire est passé de -425 à 1 785 Mds de F CFA. L’or noir est le premier produit d’exportation, loin devant le bois et les minerais, drainant à lui seul plus de 90% des recettes en devises. Les Etats Unis, la Chine et la Corée du Sud sont les principaux acheteurs de brut congolais. Les deux variétés locales sont le Nkossa, léger et peu acide (proche du Brent), et le Djéno, plus lourd et plus acide.

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Le secteur pétrolier au Congo Brazzaville - 7 octobre 2011 - @ DG Trésor

A M B A S S A D E D E F R A N C E A U C O N G O – S E R V I C E E C O N O M I Q U E

Caractéristiques du secteur

Multiplicité d'opérateurs tant d’amont que d’aval

En cinq ans, la part des agents congolais dans les effectifs de Total E&P a progressée, passant de 56,3% à 66,8%. Le nombre de cadre congolais a doublé.

Les contrats de partage de production (CPP) pour les différents champs pétroliers sont disponibles sur le site du Ministère des finances www.mefb-cg.org

En moyenne sur 100 barils : 15 reviennent à l’État au titre de la redevance, 50 vont à l’opérateur pour couvrir les investissements et le solde est partagé entre les deux parties.

Le Congo utilise environ 5% de sa production de brut pour couvrir ses besoins intérieurs.

De la prospection à la distribution, les opérateurs du secteur pétrolier sont aussi nombreux qu'hétéroclites: les grands majors internationaux s'entourent d'un réseau de sous-traitants doté de technologies de plus en plus sophistiquées, nécessitant la présence de nombreux corps de métiers issus de différents pays. Sur les huit opérateurs installés à Pointe Noire, le français Total - via sa filiale Total E&P - assure près de 60% de la production, avec 179 000 b/j fin 2010.

Depuis 2008, Total E&P exploite le permis en eaux profondes de Moho-Bilondo, où le Groupe contracteur (Total E&P Congo : 53,5%, Chevron : 31,5%, SNPC : 15%) a investi plus de 2,9 M$ US fin 2010, pour une production de 90 000 b/j environ. Son principal concurrent, la filiale de l’italien ENI, produisait la moitié : 30% du total, soit 97 000 b/j. Les autres acteurs sont les filiales des groupes : Maurel&Prom (France), Perenco (Franco-britannique), Esso (Royaume-Uni) et Murphy (USA). La compagnie publique congolaise SNPC gère les puits nationaux et détient des participations minoritaires dans certains champs.

Autour des activités de production et d’exploration s’est développé un tissu d'entreprises parapétrolières, particulièrement dense dans les activités de chaudronnerie, maintenance, assistance technique en forage, exploration sismique... Les principaux acteurs sont Baker Hughes, Diestmann, Spie Oil & Gas, Géoservices, Halliburton et Schlumberger.

A l’exception des champs pétroliers de Yombo et d’Azurite, près de 95% de la production transite par le terminal pétrolier de Djéno (photo ci-contre). Le Congo et les sociétés pétrolières se partagent cette production selon les modalités définies par les contrats de partage de production (CPP). Ces contrats prévoient que la compagnie contractante reçoit en contrepartie des importants investissements, une part de la production en nature (le "cost oil"). Après déduction de la redevance minière due au Congo, le reste de la production "profit oil " est partagé entre la compagnie et l’Etat, par application des termes spécifiques à chaque CPP.

La Congolaise de Raffinage (CORAF), filiale de la SNPC, est l’unique raffinerie du pays. Conçue pour traiter un mio de T/an de brut (moins de 10% de la production), elle n'en dépasse guère la moitié, pour livrer surtout du gaz butane, du lampant et des carburants (super, jet, gasoil, fuel), vendus sur le marché local à des prix bloqués. Son déficit est assorti d’importantes subventions de l’Etat. La distribution du gaz domestique est gérée par Société congolaise des Gaz de pétrole liquéfiés (GPL SA).

La part de la production de l'Etat est gérée par la SNPC, qui en détient le monopole de commercialisation, et dont le rôle principal est de vendre le brut sur le marché international. Le transport des carburants terrestres et d’aviation ainsi que le stockage sont confiés à la société commune de logistique (SCLOG), dotée de huit dépôts. SCLOG était à l’origine une société mixte détenue à parts égales entre l’Etat et trois opérateurs privés (Total, Chevron-Texaco, et PEX). Suite au rachat par l’Etat en 2009 des parts de Chevron (réseau de stations-services Texaco), le couple SNPC-AOGC est devenu majoritaire, annihilant la perspective initiale de privatisation des activités d'aval.

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Le secteur pétrolier au Congo Brazzaville - 7 octobre 2011 - @ DG Trésor

A M B A S S A D E D E F R A N C E A U C O N G O – S E R V I C E E C O N O M I Q U E

Transparence Vers une plus grande transparence des finances publiquesLe processus de l’ITIE se déroule en quatre étapes : adhésion, préparation, divulgation et dissémination.

Ce processus, soutenu par la BM et le FMI, vise à publier tous les paiements (effectués par les compagnies pétrolières) et les recettes (reçues par l’Etat) générées par l’exploitation pétrolière, gazière et minière. Quatre objectifs ont été formulés dans le plan d’action 2008-2010 : définition et création des structures de l’ITIE ; identification, élaboration et publication des outils nécessaires ; renforcement des capacités de la société civile et des autorités dans le domaine de la communication ; élaboration et publication des rapports.

Le Gabon et l’Angola ont été exclus de la liste des pays de l’ITIE, tandis que le Nigéria est entré en phase de préparation.

L’initiative pour la transparence des industries extractives (ITIE) est animée par des représentants de trois collèges distincts: 1) des autorités locales, dont trois ministères : hydrocarbures, mines et finances; 2) des industries extractives : Total E&P, ENI Congo, Maurel&Prom Congo... 3) et de représentants de la société civile dont "Publiez ce que vous payez".

Chaque collège est représenté au sein du comité exécutif, placé sous l’autorité du ministère des finances. Un comité consultatif, sous tutelle du ministère des hydrocarbures assiste le comité exécutif en rendant des avis. Un conciliateur indépendant, le cabinet français Ghelber & Gourdon (G&G) sélectionné par le comité exécutif, croise les données des entreprises avec celles de l'Etat.

Le Congo avait adhéré à l’ITIE en juin 2004 avant d'être admis comme pays candidat en février 2008. Pour devenir membre à part entière, il doit fournir au conseil d’administration de l’ITIE une évaluation indépendante des progrès accomplis. Un premier rapport G&G, sur les recettes pétrolières de 2004 à 2006, affichait un écart de plus de 130 Mds de F CFA (200 Mio€) entre versements de la SNPC et encaissements du Trésor Public. Le second "rapport de conciliation" avait également échoué, sans perte du statut de pays candidat. L'instruction d'un troisième rapport, déposé en juin 2011, est retardée dans l'attente des comptes de la SNPC.

Perspectives Relancer les investissements et la production

Le Congo a organisé en octobre 2011, la première conférence internationale sur les hydrocarbures, en vu de « développer un environnement économique et durable » dans l’industrie congolaise.

La SNPC partage le permis MKB avec Panoro Energy (20%) et Petroci (20%).

La mise en exploitation des gisements en eaux très profondes nécessite des techniques qui sont aussi coûteuses que sophistiquées. Total a réussi au sud de Moho-Bilondo et compte sur son projet de Moho Bilondo Nord (MBN) pour accroître sa production de 50%. Associé à Chevron, dans l’exploitation de MBN, l'opérateur français a déjà investi près de 100 Mio €. Les premiers forages "d’appréciation", entre 850 et 1 100 m de profondeur, ont dévoilé des réserves de près de 350 Mio de barils. Près de 7 Mds de $ devraient être investis dans une nouvelle unité flottante, deux appareils de forage et des nouvelles plateformes et réseaux sous-marins... MBN pourrait entrer en production en 2016, à condition que l'administration congolaise accepte de réviser le cadre juridique et fiscal datant des années 1990, peu adapté aux opérations en eaux profondes. Les nouveaux textes devraient entrer en vigueur à la fin 2011, après examen en conseil des ministres puis à l’Assemblée.

Dans le département du Kouilou, le permis « on-shore » de Mengo Kundji Bindji (MKB) attribué à 60% à la SNPC (60%), permet à l’opérateur public pour la première fois de mener de bout en bout les phases "étude-conception-évaluation", forage et exploitation. Sa filiale, la Société des forages pétroliers (SFP), a lancé ses premières activités en septembre 2011, pour déterminer les réserves du champ de Kundji.

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Auteur : Service ÉconomiqueAdresse : B.P. n° 2089BRAZZAVILLECONGO

Rédigée par : Emilie LE ROY Revue par : Xavier DEMERLÉ

Version du Version originelle du 7 octobre 2011