le regard de jacqueline st jean
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L’ŒIL explore d’étranges architectures labyrinthes de métal créatures géantes épouse leur élan leur mouvement écoute l’espace vibrer à travers les formesTRANSCRIPT
L’ŒIL explore d’étranges architectures
labyrinthes de métal créatures géantes
épouse leur élan leur mouvement
écoute l’espace vibrer à travers les formes
traverser les corps les orbites les bouches
suit les courbes les torsions les entrelacs
retrouve vive la frappe des couleurs
tourne autour s’enroule se perd
touche les nœuds les creux les sutures
déchiffre des alphabets nomades
de lune de source et de pistes
venus de lointains déserts
joue à travers les replis les tamis
les grilles les hublots les boucles
se déplace multiplie les perspectives
les lumières les métamorphoses
L’ŒIL change imagine
La vision intérieure anime LA MAIN puissante
qui enfante le futur des matières
pierre acier bois béton cuivre terre verre résine
découpe accouple soude hisse
« voit grand avec des fragments »
écoute « les contraintes qui font sens »
impulse élance rythme plante
dans le béton ses oiseaux ses planètes
érige ses tours ses généalogies
ses emblèmes ses chemins
ouverts aux quatre vents
PLANETES de métal aux milles
trouées
courbes de tulipes ou de mains levées
célébrant les couleurs primaires
sur la blancheur de brume ou de neige
Géométries de l’imaginaire
Jour et contrejour
Elles tournent dans l’air inconnues
tamis des mondes miroir des leurres
enfance des formes jeux des possibles
Ouvertes comme une question
Et soudain l’homme qui court
enjambe les collines en foulées de sept lieues
les yeux pleins d’air ou d’effroi
tête tournée vers quels poursuivants
La vitesse ou la fuite l’emportent vers
l’horizon
Il fait claquer ses couleurs comme un défi
Et l’espace fou s’engouffre dans la bouche
et le traverse
FENÊTRES insolites déboitées déjetées
dormants rebelles sous leurs hiéroglyphes
Plantée sur tige une fenêtre fleur
où s’enroule la grande interrogation
de l’horizon
Une PORTE d’air s’est ouverte
face aux frontières
une porte à mille fenêtres
Ce qui la tient debout sort de terre
ou du temps du plus profond des racines
anaconda de mémoire enfouie
qui resurgit tellurique
se déroule au soleil se fait chemin
ivre de couleurs et d’espace
La mémoire mère monte dans la main
hisse la matière en ses hauts lignages
Muettes présences ancêtres et totems
tour murmurante des filiations
contes et chroniques magies et mélopées
Osmose millénaire
qui nous pétrit nous interroge
Regards d’air ou de pierre
bouches béantes qui nous hèlent
ou crient du fond du TEMPS
Les pistes s’étreignent se séparent
Rose des vents rebelle échappée de sa roue
ouvrant la cage claire aux quatre vents
aux oiseaux voyageurs aux migrations du regard
Palombe bleue des PASSAGESà travers les plombs les cimes les saisons
Saxophone immense fou d’infini
Souffle qui nous appelle nous illimite
Sans frontière l’Espace peint déploie
sa matrice noire ses roulis ses marées
ses tentures ses lignes de fuite
lait de lune soleil d’encre
lumière de jade ou d’oranger
constellations pluies de couleurs
Source bruissante dans le lit de papier
Chorégraphie des quatre saisons du désir
CORPS qui s’approchent s’étreignent s’affrontent
fuient parades séduction danse du feu
Corps nocturnes lunaires ou solaires
liés ou déliés piégés bâillonnés divisés
printaniers grisés d’horizon rayonnants
Onirique dramaturgie des métamorphoses
Sylphides mauves Amazones lisses Sorcière
Baigneuse de ciel et d’eau sirène d’azur
Femme épineuse à peau de rosier
Bouquet de visages morose désirant renaissant
crânes ras mannequins masques en charpies
gymnastes équilibriste bleu athlètes bondissants
Danse ardente du temps floraisons et blessures
à travers les corps
Les COULEURS claquent s’entrechoquent chantent
primaires solaires ou printanières
fleurissent les seins de myrtilles ou jasmin
feuillissent de saisons mêlées
fuient dans la nuit les galaxies
tombent en pluie coulent des visages
s’étirent se figent grillagent
Ou bien plongent oniriques sur la toile
dans leur creuset de mystère
mauves de songe astre de jade feu d’agrumes
corps lunaires chair crevette ou fuchsia
jaune faune chevelures méthylène
Les couleurs ont leurs secrets
Dehors autour de l’atelier chutes épaves choisies
les métaux attendent suscitent leurs devenirs
fresque de fonderie célébration de la roue
cercles arceaux plaques d’acier où le temps dessine
des portulans de patine et de rouille
La matière rêve
Dedans au milieu des machines
l’atelier plante ses projets ses démiurgies
Tour des Quatre gardiens géants trois aux yeux peints
le quatrième aux yeux caves
qui s’allument s’éteignent sur quatre faces
Deux profils patinés qui se regardent
Une Sentinelle des Spirales de fer un Dolmen étonnant
le Prisonnier le Passage l’Infini
et ce haut visage d’acier aux yeux de marbre
qui nous fixe du fond de l’énigme
Jacqueline Saint-Jean (février 2011)
(Les passages entre guillemets sont extraits d’un entretien avec Christian Aguirre,
quelques titres d’œuvres sont en italique)
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Présentation Jacqueline Saint-Jean
Née dans les Côtes d’Armor, Jacqueline Saint-Jean vit près de Tarbes, au
pied des Pyrénées. Membre du comité de rédaction d’Encres Vives, co-fon-
datrice puis rédactrice de la revue Rivaginaires.
Ecrivain, elle a publié une vingtaine de recueils de poésie et d’autres en-
sembles, nouvelles, articles, notes de lecture, dans de très nombreuses re-
vues et anthologies. Traduite en anglais, bulgare, russe. Prix Poésie-jeunesse
1994 pour Entre lune et loup (Hachette jeunesse Livre de poche). Prix Max-
Pol Fouchet 1999 pour Chemins de bord, préface de Vahé Godel (Le Castor
Astral). Prix Xavier Grall 2007,pour l’ensemble
de son œuvre.
Dernière publication, « La clairière des ombres », roman policier, 2011.
Bibliographie sur les pages des sites de la Maison des écrivains et de la lit-
térature, du Printemps des poètes, du Centre Régional des Lettres de Midi
Pyrénées, de Rivaginaires, de Texture, de La Charte des auteurs et illustra-
teurs.
Adresse : 10 chemin de Pouey Ardoun, 65380 HIBARETTE