le nouvel essor des relations entre la chine et madagascar

8/7/2019 Le nouvel essor des relations entre la Chine et Madagascar

1/21

______________________________________________________________________

Le nouvel essor des relationsentre la Chine et Madagascar

__________________________________________________________________

Mathieu Pellerin

Mars 2011

.

NNoottee ddee ll II ff rr ii

ProgrammeAfrique subsaharienne


2/21

LIfri est, en France, le principal centre indpendant de recherche,dinformation et de dbat sur les grandes questions internationales.

Cr en 1979 par Thierry de Montbrial, lIfri est une association reconnuedutilit publique (loi de 1901).

Il nest soumis aucune tutelle administrative, dfinit librement ses activits etpublie rgulirement ses travaux.

LIfri associe, au travers de ses tudes et de ses dbats, dans une dmarcheinterdisciplinaire, dcideurs politiques et experts lchelle internationale.

Avec son antenne de Bruxelles (Ifri-Bruxelles), lIfri simpose comme un desrares think tanksfranais se positionner au cur mme du dbat europen.

Les opinions exprimes dans ce textenengagent que la responsabilit de lauteur.

ISBN : 978-2-86592-849-1 Ifri 2011 Tous droits rservs

Site Internet : Ifri.org

Ifri-BruxellesRue Marie-Thrse, 21

1000 Bruxelles BELGIQUETl. :+32(0)22385110Fax:+32(0)22385115

Email : [email protected]

Ifri27, rue de la Procession

75740 Paris Cedex 15 FRANCETl. : +33 (0)1 40 61 60 00Fax : +33 (0)1 40 61 60 60

Email : [email protected]


3/21

Sommaire

Introduction ....................................................................................... 4

Aux racines des relations sino-malgaches ......................................... 6

Anciens et nouveaux Chinois :

une coexistence pacifique ................................................................. 6De la coexistence la coopration ..................................................... 7

Les nouveaux Chinois :une classification globalisante et imparfaite ....................................... 9

La renaissance de la sinit des anciens Chinois ? ........................................................................ 9

Lintensification progressive

des relations bilatrales ................................................................ 11

De Formose la reconnaissance de la Rpublique Populaire deChine ................................................................................................ 11

La Chine Madagascar :menace ou opportunit commerciale ? ............................................. 13

Les relations sino-malgaches durant le rgime de transition .... 15

La cohrence de la diplomatie chinoise mise lpreuve : non lingrence politique, oui la continuit technique ........................... 15

Le pari chinois de la HAT : une alternative durable et crdible auxbailleurs traditionnels ? ..................................................................... 17

Conclusion : Dconstruire le mythe de lacteur chinoismonolithique ................................................................................... 20


4/21

M. Pellerin / Les relations entre la Chine et Madagascar

4 Ifri

Introduction

La Chine est la solution tous nos problmes . Cette phrase,prononce par un haut responsable du rgime de transition Madagascar1, illustre merveille lesprit qui habite la plupart desdirigeants malgaches. Au lendemain de la chute du rgime de MarcRavalomanana, Madagascar sest retrouve mise lindex de lacommunaut internationale, gelant de facto les aides publiques quialimentaient prs de 70 % du budget dinvestissement de ltat

malgache. Ds lors, Andry Rajoelina, prsident de la HAT (HauteAutorit de Transition), cre en 2009 une commission charge derflchir des financements parallles , et lide de se tournervers des bailleurs moins regardants en termes de gouvernancesimpose trs rapidement. Le rgime songe alors renouer avec lacompagnie minire chinoise Wisco2, qui avait rpondu un appeldoffres international lanc par le prsident Ravalomanana et quiavait mme t choisie par ce dernier, avant quun problme dordrefinancier ne vienne bloquer les ngociations. Wisco se voit alorsattribuer le permis dexploration du gisement de fer de Soalala par lergime de transition et annonce un volume dinvestissements de huitmilliards de dollars. Conformment au cahier des charges, la

compagnie verse un droit de mise disposition de 100 millions dedollars, officiellement destin renflouer les caisses de ltatmalgache.

Le pari de trouver des financements alternatifs semble alorsrussi et depuis, les dlgations trangres se sont succdes Antananarivo, quelles soient kowetiennes, saoudiennes, turques,pakistanaises, thalandaises, hongroises ou encore russes. Mais cestessentiellement lempire du Milieu qui retient toutes les attentions etalimente tous les fantasmes des dignitaires du rgime de transition.

Mathieu Pellerin est chercheur associ au programme Afrique subsaharienne depuis juin 2010. Il est charg de mission au Club des Directeurs de Scurit desEntreprises et travaille comme consultant en risque pays, sret et intelligenceconomique.1 Pour un historique de la crise politique qui secoue Madagascar depuis un an etdemi, voir le rapport dInternational Crisis Group, Madagascar : la crise un tournantcritique ?, 18 novembre 2010. Sur les causes et origines de la crise, voir MathieuPellerin : Madagascar : un conflit dentrepreneurs ? , Politique Africaine, n113,mars 2009, p. 152-165.2 Wuhan Iron and Steel (Wisco) est un important producteur dacier chinois. Elle estle principal actionnaire du consortium implant Madagascar, Hong Kong WiscoGuangxinKam Wah Resources Ltd,dans lequel figure aussi le Guangdong ForeignTrade Group Co., Ltd (le Guangxin Group)


5/21


5 Ifri

Lacuit de la question chinoise Madagascar nous offre loccasionde dresser un tat des lieux, inexistant ce jour, des relations sino-malgaches. Aprs un rappel de la profondeur historique des relationsqui lient Madagascar la Chine, nous nous focaliserons sur ledveloppement de ces relations au lendemain de la reconnaissancemalgache de la Rpublique Populaire de Chine (RPC), notammentdun point de vue conomique, avant danalyser la nature desrelations qui lient la Chine Madagascar depuis le dbut du rgimede transition, le 17 mars 2009.


6/21


6 Ifri

Aux racinesdes relations sino-malgaches

Anciens et nouveaux Chinois :une coexistence pacifique

Madagascar fait partie de ces pays du sud-ouest de locan Indiendans lesquels se sont succd plusieurs gnrations de Chinois, linstar de lancienne le Bourbon, de lle Maurice, du Kenya ou biende lAfrique du Sud. Tant et si bien que cohabitent aujourdhui lesdescendants de communauts chinoises arrives sur la cte est dupays la fin du XIXme et au dbut du XXme sicle3, qualifislocalement danciens Chinois 4, et les nouveaux Chinois ,regroupant par dfaut les Chinois arrivs sur la Grande le aulendemain de lindpendance5. Les anciens Chinois sont desdescendants de coolies, achemins par la France afin de raliser destravaux dans le pays. Trois vagues migratoires chinoises

Madagascar ont donc t enregistres entre 1896 et 1901, pour laconstruction de la route, puis du chemin de fer, reliant Antananarivo Toamasina et du canal des Pangalanes6. En dehors de cesmigrations de main-duvre, la plupart des premiers immigrsarrivaient Madagascar en transitant par Maurice et surtout laRunion. Toutefois, partir des annes 1930, la majorit des Chinoisarrivant Madagascar venaient directement de Chine,essentiellement de Canton, par regroupement familial, pour alimenteren main-duvre les rseaux de collecte dpices, ou encore pourdes raisons de politique intrieure chinoise. Ainsi, un trs fort afflux

3 Des fouilles archologiques ralises actuellement Vohemar accrditeraient uneprsence chinoise ds le XIIIe sicle.4 Voir ce sujet Lucile Rabearimanana, Les commerants chinois lest deMadagascar et leur intgration la socit autochtone au XXme sicle , in,Catherine Coquery-Vidrovitch : tre tranger et migrant en Afrique au XXme sicle,Paris, LHarmattan, 2003.5 Voir les travaux de Catherine Fournet-Gurin, La nouvelle immigration chinoise Tananarive , Perspectives chinoises, n95, 2006, ou Les Chinois de Tananarive(Madagascar) : une minorit citadine inscrite dans des rseaux multiples toutes leschelles ,Annales de gographie, 2009/5. (n669).6 Cet vnement peu connu et trs peu document est rapport par ChantalSerrire ; Pangalanes, retour Madagascar, Arbre Vert, 2002.


7/21


7 Ifri

de Chinois fut enregistr entre 1937 et 1939, la suite de linvasiondes troupes japonaises en Chine, au point que Madagascar comptaiten 1946, 5 573 Chinois (contre 2780 en 1936)7. Par la suite lesautorits coloniales ont frein la progression migratoire destrangers, mais les Chinois acquirent des positions conomiquesavantageuses au lendemain de la Seconde Guerre mondiale. Dslors, les tablissements chinois dimport-export concurrencent lescomptoirs coloniaux et contrlent certaines filires dexportation,notamment avec lappui de la Banque franco-chinoise Antananarivo. Encore aujourdhui spcialise dans limport-exportmais relativement discrte, cette ancienne communaut chinoise estvieillissante et dcline numriquement, notamment en raison descrises politiques qui, de 1972 jusqu 20098, ont entran le dpart decertains dentre eux au Canada, Hong-Kong, en Chine continentaleou en France. Les nouveaux Chinois , quant eux, viennentmajoritairement de la province du Fujian et du nord de la Chine et

pratiquent le mandarin, ce qui ne manque pas de fixer les diffrencesavec les anciens Chinois , lesquels pratiquent un cantonais teint de laccent patois quon ne retrouve dans plus aucun villagechinois selon un ancien chinois . Les diffrences ne sarrtentpas l, et stendent la culture culinaire, entrepreneuriale, et mmereligieuse. La grande majorit des anciens Chinois , de traditionbouddhiste, est aujourdhui catholique tandis que la nouvellegnration reste attache au bouddhisme. Les deux communautsftent le Nouvel An des dates distinctes et sont reprsentes ausein dassociations diffrentes. En effet, aprs avoir vainement tentde rcuprer le contrle de la Congrgration chinoise9 de la capitaleen soutenant un candidat dissident, les nouveaux Chinois ont

cr lASECMA, qui regroupe prs de 90 entreprises chinoises.

De la coexistence la coopration

Cette dichotomie entre anciens et nouveaux Chinois est bel et bienrelle mais elle cache malgr tout des rapports interpersonnels,essentiellement fonds sur des relations daffaires, qui nuancentlide dune coexistence froide entre eux. Ainsi, le restaurant LeTRAM sis au rez-de-chausse du btiment Casino 2000,appartenant un nouveau Chinois, est gr par le directeur gnral

7 Mihariniaina Andrianaivoson, La communaut chinoise et la ville de Tamatave,Universit dAntananarivo, aot 2009, 121 p.8 Depuis lindpendance, Madagascar a connu six crises, en 1972 (renversement duPrsidentPhilibert Tsiranana), en 1975 (coup dtat du capitaine de frgate DidierRatsiraka), en 1991 (renversement du Prsident Didier Ratsiraka), en 1996(destitution du Prsident Albert Zafy), en 2002 (crise postlectorale opposant DidierRatsiraka Marc Ravalomanana) et en 2009 (coup dtat entranant le dpart duPrsident Marc Ravalomanana).9 Les diasporas chinoises au 19me sicle se runissaient au sein de congrgationsen fonction de leur rgion dappartenance en Chine.


8/21


8 Ifri

de TRAM, Marcel Chan, un descendant des Chinois de la premiregnration. Ce mme Marchel Chan, qui entretient encore desrelations tnues avec sa rgion dorigine en Chine, avait cr en2001 le Malagasy Chinese Business Chamber (MCBC), avec NtsoaRandriamifidimanana, le PDG du Groupe PACOM, FidyRaharimanana, prsident de Harson Development, Ramaroson AuTaive Paul, un sino-malgache bas Hong Kong et Shunde(Province de Guanggong), ainsi que Jacky Radavidra, ex-prsidentdu Groupement des Entreprises Franches de Madagascar (GEFP) etaccessoirement beau-pre de la fille de Marc Ravalomanana. travers le MCBC, il a organis la visite de plusieurs dlgationsdentreprises locales (malgaches ou trangres) en Chine, parmilesquelles les entreprises Gamo (peinture), MCI (Chimie), SMEF(Matriels de froid), Pacom (Quincaillerie gnrale), Gerbor(Boulangerie) ou encore Synergie Communication. Dans le mmeesprit, le milliardaire hong-kongais Hui Chi Ming10 confie la gestion de

ses affaires malgaches un ancien Chinois de Madagascar,William Chan Kong, qui se trouve tre le neveu du vice-prsident dela Congrgation chinoise et de lassociation Amiti MadagascarChine, Georges Chan Kong. Dernire illustration, limmeuble TradingCentre, situ sur lavenue de lIndpendance avant dtre incendi audbut de lanne 2009, est le fruit de la coopration entre un nouveau chinois , Chan Rakotofiringa, et un ancien chinois ,Jacquelin Chan Kong. juste titre, il est dusage de rappeler que les anciens Chinois sont des citoyens de seconde zone , tantdonn que la Chine ne permet pas davoir la double nationalit.Nombre danciens Chinois doivent donc se rendre en Chinemunis dun passeport malgache. Cela nempche pourtant pas le

prsident de la Congrgation chinoise, M. Fong, un ancienChinois , davoir su jouer de ltroitesse de ses relations aveclambassade de Chine pour prosprer dans le monde des affaires, la tte de lentreprise familiale Samkowa. Le sens des affaires sembledonc occulter certaines barrires culturelles parfois prsentes tortcomme insurmontables. Le trafic de bois de rose actuellement en estle meilleur exemple : des Chinois tablis en Chine continentaleviennent Madagascar et, pour une partie dentre eux, sappuient sur danciens Chinois bass lest du pays et directement impliqusdans la collecte de bois de rose. Ainsi que le prcise un ancienChinois , cest davantage un problme de temporalit : lesnouveaux Chinois ne viennent ici que pour gagner de largent courtterme et repartir en Chine. Nous, notre pays de naissance et de mort,cest Madagascar, on ne voit pas les choses de la mme manire .

10 Ancien Prsident de Sunpec, il est aujourdhui prsident fondateur de la banqueBICM (Banque Industrielle et Commerciale de Madagascar) et de plusieursentreprises minires et ptrolires dont Madagascar Petroleum International etMadagascar Mining Group.


9/21


9 Ifri

Les nouveaux Chinois :une classification globalisante et imparfaite

Toute catgorisation rduit le champ des nuances. La dnominationde nouveau Chinois est imparfaite et doit tre affine. Il estdusage dassocier cette communaut un ensemble de strotypespeu flatteurs pour les intresss. Or, cette qualification cache enralit une multitude de profils, auxquels sassocient des trajectoires,des comportements sociaux et des activits conomiques fortsdiffrents. Rien ou presque ne rassemble les nouveaux Chinois installs de leur plein gr jusquau dbut des annes 1990, commeRen Yujie (Directeur des magasins Bao Lai), Li Yao Min (PDG de lacimenterie Maloci et auparavant architecte), ou bien encore Shang Li(ancien secrtaire de lambassade de Chine et aujourdhuiexportateur de girofle et de raphia en province) et ceux qui ont t

envoys Madagascar par des encouragements financiers ( Go outpolicy11) ou par des socits dtat. Les premiers dmontrent unevolont dintgration, qui se traduit par une maitrise du malgache, desrapports cordiaux avec la population locale et un taux dembauchelocale lev, tandis que les seconds sont encore peu intgrssocialement, avant tout parce quils ne considrent pas leur prsence Madagascar comme sinscrivant dans la dure, linverse despremiers. Sans mme le savoir, ceux-ci formulent en somme lesmmes critiques que les anciens Chinois lgard des nouveauxarrivants qui ternissent limage gnrale de la communautchinoise pour reprendre les termes dun ancien chinois . Deuxfaits divers rcents alimentent ce sentiment : lexpulsion dun Chinois

qui travaillait Namakia aprs quil a renvers dnervement lamarmite contenant le repas des ouvriers, affront moral qui engendraune grve des ouvriers malgaches, et la dcouverte fin 2010 par desagents de la Caisse Nationale de Prvoyance Sociale (CnaPS) dundirigeant chinois du btiment Manangana (Behoririka) en train debattre une employe.

La renaissance dela sinit desanciens Chinois ?

Depuis 2009, un Institut Confucius est ouvert au sein de luniversitdAntananarivo, comme cest le cas dans seize autres pays dAfrique.Ce pilier stratgique du soft power chinois a pour objectif lapropagation de la culture chinoise travers le monde et, de manireplus prosaque, offre une base dinterprtes auprs des nouveaux

11 Depuis 1999, le gouvernement chinois, avec le Council for the Promotion ofInternational Trade (CCPIT), a lanc des programmes de soutien aux entrepriseschinoises pour les encourag investir ltranger.


10/21


10 Ifri

investisseurs souhaitant simplanter Madagascar. Ainsi, pas moinsdune dizaine dentreprises chinoises, parmi lesquelles la compagnieminire Wisco, sont venues linstitut en qute dinterprtes. Mais lasingularit de lInstitut Madagascar est quil fait renatre la sinit des anciens Chinois et des mtis sino-malgaches, pour la pluparttablis sur la cte est. Mme Monique, vice-prsidente de lInstitutConfucius, le confirme : nous avons une majorit de mtis sino-malgaches qui suivent nos cours. De nombreux tudiants viennent deAntalaha, Sambava, et de Toamasina , villes qui ont constitu lefoyer darrive et dimplantation des Chinois de la premiregnration. La direction ambitionne dailleurs louverture prochainedun institut Toamasina. Cette tendance, appele se renforcer aufil des annes, se conjugue avec un tropisme chinois naissant au seinde la jeunesse malgache, comme nous le confirmait au cours dunentretien Jean Eric Rakotoarisoa, vice-prsident de luniversitdAntananarivo.


11/21


11 Ifri

Lintensification progressivedes relations bilatrales

De Formose la reconnaissancede la Rpublique Populaire de Chine

Les relations sinomalgaches ont longtemps t parasites par laproximit entretenue par Madagascar avec Tawan. Si Madagascarna reconnu la souverainet chinoise sur Tawan quen 1972, lorsdune visite en Chine du ministre des Affaires trangres, DidierRatsiraka, les relations diplomatiques entre la Chine et Madagascarremontent pourtant 1958, avec ltablissement dun ConsulatGnral, puis dune ambassade en 1960. Dans une politiqueconcurrentielle avec lURSS, la Chine, sous la prsidence de DidierRatsiraka (1975 1991), a consenti la reconstruction de la RN2entre Antananarivo et Toamasina, la construction dhpitaux et ldification du stade Mahamasina, dans la capitale, confie la

Socit Sino-malgache des Travaux Publics (SMATP), encoreaujourdhui prsente Madagascar.

Depuis 1972, Madagascar ne reconnat que la Chinecontinentale, bien que la position malgache lgard de Tawan aitt teinte dambigit jusquen 1998. Au cours des annes 1990 eneffet, un accord permettait Taipei dtre reprsente travers une dlgation spciale de la Rpublique de Chine , permettant Madagascar de bnficier de laide tawanaise. Certains acteurs delpoque rapportent que le prsident Albert Zafy a mis dans labalance cette aide afin de recevoir un appui financier consquent dela part de la Chine, tout comme ce fut le cas de Didier Ratsiraka lors

de son retour en 1997. Sous pression chinoise (visites du vice-Premier ministre Jiang Chunyun en 1997 et du vice-prsident HuJintao en 1999), Madagascar a mis dfinitivement un terme cettesituation ambivalente et ferm la reprsentation tawanaise en 2000,consacrant alors le dbut dune relation troite avec la Chine qui nacess de se renforcer jusqu aujourdhui. Ce revirement sexpliquedavantage par la volont de la Rpublique Populaire de Chine (RPC)daccrotre ses investissements trangers au nom de la Going outpolicy nonce par le prsident Jiang Zemin la fin des annes1990. Selon certaines sources, le rgime dAndry Rajoelina auraitsong discuter avec Tawan en 2009, ce qui, de nouveau, naurait


12/21


12 Ifri

pas manqu de susciter de vives ractions de la part des autorits dela Chine continentale.

Ce rapide retour sur lhistoire des relations diplomatiques sino-malgaches montre que la soudaine mdiatisation de la prsence

chinoise sur la Grande le, conscutive quelques contrats ouannonces denvergure, occulte un renforcement continu de cesrelations depuis la fin des annes 1990.

Le plein essor des relations bilatrales est mettre au crdit duprsident Marc Ravalomanana, dont lambition douvrir Madagascar la mondialisation a rencontr les intrts chinois dexpansioninternationale. La frquence des visites bilatrales tmoigne ducaractre troit de ces relations12. De nombreux projets ont en effett initis par son rgime, tel le lancement dune deuximecimenterie dans le pays avec lentreprise chinoise Maloci. loccasion de laccueil du 13me sommet de lUnion Africaine cens

se tenir en juillet 200913

, la Socit de lconomie extrieure et deconstruction de Madagascar (SOGECOA)14, filiale de la socit dtatAnhui Fergen Construction Company (AFEC), sest vue octroyer deuximportants contrats de construction : un htel cinq toiles et le Centrede Confrence International dIvato (CCII). Par ailleurs, lancienprsident avait confi la socit chinoise Complant la location-grance de certaines usines sucrires appartenant la compagnienationale, la Societ Siramamy Malagasy (SIRAMA). Enfin, au coursdune visite en Chine, lancien prsident avait obtenu lengagementde lExim Bank pour soutenir financirement la construction dunbarrage par la socit CAMC Engineering.

Cest dans le domaine minier et ptrolier que cette croissancedes investissements chinois fut la plus notable. La compagniechinoise Sunpec sest ainsi vue octroyer un permis dexploration surle trs prometteur bloc 3113. Sunpec est une junior qui uvrerait Madagascar pour la compagnie nationale China National Offshore OilCorp Chemical Ltd (CNOOC). En tmoigne le profil du directeurexcutif de Sunpec, Wang Tao, galement directeur de la CNOOC.Dans le domaine minier, la compagnie provinciale Mainland MiningLtd est prsente depuis 2006 sur la cte est et continue dexplorer lesfilons dilmnite (oxyde de fer et de titane) au sud de Toamasina. Demme, la socit Changyi Zhanguyuan Tungsten, originaire deGuanzhou, travers sa filiale AMI SARL15, a obtenu en 2007 un

permis minier Maevatanana pour lexploration aurifre. Enfin,

12 Les visites bilatrales sont recenses sur le site de lAmbassade de Madagascaren Chine. http://www.ambamadbeijing.com/fr/about.asp?type1=4 (15/02/2011)13 En raison des sanctions internationales infliges au rgime de transition,lorganisation du sommet fut finalement confie la Libye.14 La SOGECOA est prsente Madagascar depuis la renaissance des relationssino-malgaches en 1997. Elle bnficie du soutien de ltat chinois et fut charge dela construction du Palais des Sports de Mahamasina et du supermarch HorizonIvato15 Industrie Minire Sino-Afrique


13/21


13 Ifri

comme prcis en introduction, lappel doffres pour lexploration dugisement de fer de Soalala fut lanc par Marc Ravalomanana.

La Chine Madagascar :menace ou opportunit commerciale ?

Depuis son essor considrable au dbut des annes 2000, la balancecommerciale de Madagascar est reste dficitaire, les exportationstant largement infrieures aux importations. Cette structure de labalance commerciale risque dtre bouleverse par lesinvestissements miniers et ptroliers chinois, pour ne pas voquer lesexportations illgales de bois de rose destination de la Chine, dunevaleur de plusieurs centaines de millions de dollars16.

En 2008, les importations malgaches taient majoritairementcomposes de produits chinois, dont 50 % de la valeur tait destineaux entreprises de zones franches, notamment dans le domaine dutextile (en trs grande majorit venues de Tawan et Honk-Kong). Or,deux-tiers de ces importations ne sont pas destines au marchintrieur malgache, mais la fabrication locale avant rexportationvers les marchs europen et amricain. Madagascar a servi de huben raison des conditions prfrentielles accordes par lAfricanGrowth and Opportunity Act(AGOA). Par consquent, la suspensionde Madagascar de ce dispositif fin 2009 a entran le dpart deplusieurs dizaines dentreprises chinoises tablies en zone franche,ce qui se traduit par la suppression de plusieurs milliers demplois .

Comme dans la plupart des pays africains, les importations deproduits chinois et la prsence de commerants chinois sontfrquemment accuses de casser lindustrie malgache et deconcurrencer les petits commerants locaux. Quand bien mme ceraisonnement demeure pertinent concernant Madagascar, il ne doitpas occulter lintrt que tirent de nombreux Malgaches de laprsence chinoise. Le quartier de Behoririka, dans le centredAntananarivo, qualifi tort de Chinatown17, concentre un nombreconsidrable de boutiques de commerants chinois en apparenceconcurrentes des vendeurs malgaches. En lespce, il convient derappeler que le rgime foncier Madagascar interdit la proprit aux

16 Investigation Into the Global Trade in Malagasy Precious Woods: Rosewood,Ebony and Pallisander, Environmental Investigation Agency, octobre 2010.http://www.eia-global.org/17 Comme le prcise justement Catherine Fournet-Gurin, qualifier Behoririkade Chinatown est abusif en raison dune dispersion de limplantation chinoise(notamment Ivato) et du fait que Behoririka reste un quartier o la trs grandemajorit des habitants sont malgaches. Catherine Fournet-Gurin, Les Chinoisde Tananarive (Madagascar) : une minorit citadine inscrite dans desrseaux multiples toutes les chelles , Annales de gographie, 2009/5.(n 669).


14/21


14 Ifri

trangers et la quasi-totalit des Chinois bnficient de baux, lexception des rares naturaliss Malgaches. Les magasins restentdonc la proprit de Malgaches. En outre, si les boutiques decommerce sont diriges par des Chinois (notamment les boutiquesGlobe, Venice, Advance Center), celles-ci sont composes dunemultitude de stands lous prs de 80 % des Malgaches. Parailleurs, les commerants chinois sont dsormais directementconcurrencs par des Malgaches. En effet, la mise en place duneligne directe AntananarivoGuangzhou par Air Madagascar en 2007a permis bon nombre de Malgaches de contourner lesintermdiaires chinois et de sapprovisionner directement auprs defournisseurs bass en Chine. Des Malgaches ou danciensChinois , parmi lesquels le fils de Georges Chan Kong, ont dailleursexploit ce filon en tablissant quelques htels Guangzhou et enoffrant sur place des services dinterprtariat et dintermdiation. Ilsont considrablement dynamis la venue de Malgaches en Chine.


15/21


15 Ifri

Les relations sino-malgachesdurant le rgime de transition

La cohrence de la diplomatie chinoise mise lpreuve : non lingrence politique, oui la

continuit techniqueLe refus de toute ingrence dans les affaires intrieures est un pilierde la diplomatie chinoise, ce qui sert tout la fois ses intrts ltranger (au Soudan ou au Zimbabwe par exemple) autant que sesintrts intrieurs (Tibet). Cette position est de plus en plus difficile tenir face au reste de la communaut internationale et la Chine veille se montrer solidaire de celle-ci ds que la prservation de sesintrts stratgiques ne le lui interdit pas. Madagascar ne fait paspartie des tats stratgiques aux yeux de ltat chinois, et force estde constater que la Chine a suivi la lettre la position de lacommunaut internationale depuis que des sanctions ont tadoptes contre le rgime de transition en 2009. De nombreuxexemples en tmoignent : lors du sommet Afrique-Chine de Cham El-Cheikh en dcembre 2009, la Chine a demand au rgime de la HATque ni le prsident ni aucun ministre ne vienne reprsenterMadagascar. Lambassadeur de Madagascar en Chine, VictorSikonina, et une dlgation de techniciens ont ainsi t convis. Demme, lors de la clbration de la fte nationale chinoise le 1eroctobre Antananarivo, aucun ministre na t invit, mais seulementdes techniciens ministriels.

Cette volont de ne pas se mettre en marge de la communautinternationale a t manifeste tout au long de lanne 2010 o la

Chine na jamais t reprsente lors des vnements organiss parla HAT, linverse de la plupart des autres acteurs bilatraux, parmilesquels la France, les tats-Unis, le Japon ou lAllemagne. Laclbration des vux en ce dbut de 2011 a confirm cettetendance : les reprsentants diplomatiques Chinois se sont alignssur les chancelleries occidentales et nont pas fait le dplacement.Plus tt dans lanne, la Chine avait boud la crmonie deproclamation de la IVme Rpublique, la clbration de la ftenationale le 26 juin ou encore la runion dinformation sur le projet deConstitution soumis rfrendum en fin danne.


16/21


16 Ifri

Cette absence de reprsentation diplomatique chinoise oudinvitation adresse aux membres de la HAT ne doit pas trecomprise comme lexpression dune sanction lgard du rgime detransition, la diffrence du reste de la communaut internationale,mais davantage comme la traduction dune position de non-ingrencepolitique, afin de se couvrir contre dventuelles critiques de lacommunaut internationale. De mme, lambassade de Chine veillescrupuleusement ne jamais se prononcer sur la situation politiquemalgache et encore moins sur la lgitimit ou non du rgime actuel.Lors de la crmonie commmorant le 61me anniversaire de lafondation de la Rpublique de Chine en septembre 2010, ShenYongxiang, charg daffaires chinois sest content de saluer lacoopration sincre et amicale entre les deux pays, sans jamaisvoquer le contexte de transition et labsence de reconnaissanceinternationale de la HAT. Cette politique de non-ingrence politiquepermet ainsi la Chine de se couvrir contre les critiques ventuelles.

Parce quelle ne singre pas dans les affaires politiquesintrieures, la Chine peut donc fermer les yeux et poursuivre sacoopration technique bilatrale avec nimporte quel rgime. Tous lesprogrammes de coopration engags avant la crise de 2009 sontrests actifs. Ainsi en est-il des programmes de formation, dans ledomaine de la sant, de lduction ou de lenvoi du personneldiplomatique malgache en Chine. Les programmes de cooprationentre polices et armes malgache et chinoise se sont galementpoursuivis en dpit dun ralentissement. Les dons dquipementmilitaire nont pas non plus t interrompus. Au mois de fvrier 2009,lorsque le prsident Ravalomanana devait faire face au mouvementde contestation men par lactuel prsident de la transition, la Chine afait parvenir des lots dquipement de maintien de lordre. Le mmeprsident de la transition qui profite aujourdhui de ces dons. Non-ingrence politique et indiffrence technique donc

De mme, la Chine a encourag un rquilibrage de la balancecommerciale avec Madagascar en accordant en mai 2010 untraitement douanier de 0 % pour les produits exports vers la Chine.Si, linstar des autres bailleurs, les dons durgence et caractrehumanitaire se sont poursuivis, cest galement le cas de lensembledes programmes de coopration. Le principal projet de cooprationchinois, Riz Hybride , sest vu accord un don de trois millions deyuans, tandis que les traditionnelles missions mdicales chinoises se

sont succdes. Toutefois, la cohrence de la diplomatie chinoise estquelque peu branle par certains comportements. Un responsabledu ministre des Affaires trangres malgache note en effet un lgerinflchissement de la part des Chinois : Avant la crise, linversede tous les autres bailleurs, ctait la Chine qui nous proposait desprogrammes de coopration. Or, depuis le dbut de la crise, la Chinenous a refus quelques demandes en la matire . Sans douteconsciente que le choix dune continuit technique peut susciter lirede ses partenaires internationaux, la Chine cherche donc lesmnager en rduisant quelque peu la voilure La baisse du volume


17/21


17 Ifri

financier dappui la coopration technique en tmoigne galement.Selon certaines sources, la Chine aurait mme choisi dannuler uneimportante aide budgtaire accorde au rgime de transition.

Les autorits chinoises se sont galement retrouves

confrontes lannonce publique de projets dinvestissementdentreprises chinoises conclus avec un rgime non reconnu par lacommunaut internationale. En guise de dfense, lambassadeurchinois a expliqu maintes fois dans la presse malgache quil ntaitpas au courant du contrat liant Wisco ltat chinois, laissant mmeentendre quil ne connaissait pas les responsables de la compagnieminire chinoise. Ce projet fut demi-mot dnonc par lacommunaut internationale, au motif quun rgime de transition estcens grer des affaires courantes sans sengager dans des projetsdinvestissement long terme. Dans ce contexte, une cautionapporte par lambassade de Chine ce projet lisolerait du reste dela communaut internationale. La diplomatie chinoise a donc prfr

adopter une posture dindiffrence : elle maintient sa cohrence en sedmarquant de Wisco, et maximise les intrts stratgiques chinois(besoins en fer) en laissant la compagnie oprer librement. Derrirecette habilit diplomatique, il y a tout lieu de penser que Wisco nestpas inconnue des autorits chinoises, notamment parce que cestune compagnie nationale de la Rpublique Populaire de Chine et nonune compagnie provinciale et, surtout, parce quelle est le troisimeproducteur dacier chinois.

Le pari chinois de la HAT : une alternative

durable et crdible aux bailleurs traditionnels ?

Depuis la signature du contrat avec Wisco, la HAT a mobilis sesrseaux pour attirer les capitaux chinois. Mamy Ravatomanga, PDGde Sodiat, est lun de ces intermdiaires de premier plan. Ministres etconseillers luttent ardemment pour faire partie des missionschinoises , et les dlgations chinoises se succdent Madagascar,comme celle compose des socits chinoises INTERDES et deCMEC (Compagnie de machinerie et quipement de la Chine) en juin2010. Mais depuis quelques mois, les regards malgaches sont rivsvers le China International Fund (CIF), avec lequel ltat malgache a

cr une holding, Madagascar Development Corporation, semblable la socit sino-guinenne de dveloppement que le CIF a essayde fonder fin 2009 en Guine. Lhomme-cl lorigine de la venue duCIF est lancien ministre guinen des Mines, Mahmoud Thiam,proche de linfluent ministre malgache des Mines et desHydrocarbures, Mamy Ratovomalala. Le CIF doit tre le principalartisan des projets denvergure annoncs en grande pompe ennovembre 2010 : la plus grande cimenterie de locan Indien selon les mots dAndry Rajoelina, un tramway dans la capitale,10 000 logements sociaux et un renouvellement de la flotte dAir


18/21


18 Ifri

Madagascar. Ces package deals signs par les compagnieschinoises en Afrique prvoient traditionnellement la constructiondinfrastructures en change de permis miniers et ptroliers. Le CIFest coutumier du fait, ne serait-ce quen Angola, o il est lorigine deldification de nombreuses infrastructures. En Tanzanie, le CIF avaitpromis de racheter 49 % dAir Tanzania en change de lattributionde permis ptroliers. Or, la compagnie daviation tanzanienne nayantpas pu garantir cette attribution, le CIF na au final pas inject un seuldollar dans la compagnie. Madagascar, le rgime a annonc sonintention de racheter quatre blocs sur cinq Madagascar Oil, afin deles rtrocder, semble-t-il, la China Sonangol (mme groupe que leCIF). Afin de faciliter cette opration, la ralisation de la missiondaudit lance par le rgime de la HAT a t confie au CIF, qui setrouve ici juge et partie. Faut-il sattendre un scnario tanzanien sila HAT ne parvient pas rcuprer les permis de Madagascar Oil ?

Au demeurant, les projets annoncs relvent pour linstant de

la dclaration dintention, voire de leffet dannonce, mais leurralisation nest aucunement garantie. Quant la plus grandecimenterie de locan Indien , promise par Andry Rajoelina, elle nerpond aucun besoin dans le pays si lon en croit certainsoprateurs du march du ciment et ne permettrait gure de fairebaisser le prix du ciment par le jeu de la mise en concurrence.

Lexamen des actions du CIF sur le continent autorise semontrer dubitatif quant aux investissements promis Madagascar.Entreprise chinoise dont la prsence sur le continent africain suscitele plus de controverses, son activit est entoure dune grandeopacit. Elle appartient au groupe Dayuan, tabli Hong-Kong et qui

dirige le 88 Queensways Group Company, nom qui provient deladresse Hong-Kong o sont inscrites les 30 filiales du Groupe,parmi lesquelles le CIF et la China Sonangol. Le CIF, qui opre enAngola o il dispose dun immeuble de quarante tages, a dsormaispour stratgie de prendre des positions dans les pays mis au ban dela communaut internationale : Zimbabwe, Guine-Conakry, Niger etdsormais Madagascar. Suspect de blanchiment dans le cadre deses activits en Angola, o le groupe est proche du rgime de DosSantos, il est galement accus de ne pas tenir nombre de sesengagements. En Guine, au Niger et en Angola les ambassadeursde Chine se sont mme officiellement dsolidariss desengagements pris par le CIF, en critiquant ouvertement les projets

engags par la compagnie. En Guine, la presse locale etinternationale na eu de cesse de relayer toutes les bonnes intentionsdu CIF depuis la signature dun contrat avec ltat guinen en 2009.Or, le 8 fvrier 2011, le secrtaire gnral du ministre des Minesguinen, Guillaume Curtis, annonait publiquement quaucun cadredu ministre des Mines ne disposait de la moindre information sur lecontrat, exprimant des doutes quant la transparence et la rigueur decette entreprise.

Les autorits chinoises ne semblent pas contrler le CIF, envertu de lautonomie conomique et commerciale dont bnficient


19/21


19 Ifri

Hong-Kong et ses entreprises. Par ailleurs, lcheveau dintrts quise croisent au sein du pouvoir central chinois paralyse quelque peuson action.Ceci tant, on peut lgitimement se poser la question delintrt quaurait la Chine empcher le CIF dinvestir dans dessecteurs qui rpondent aux intrts stratgiques du pays, ici lesressources minrales. Pour cette raison, il y a lieu dimaginer que laChine fait preuve dune indiffrence stratgique : afin de sauvegarderses intrts nergtiques, elle brandit lautonomie dont jouitlentreprise hong-kongaise pour viter davoir contrler sesactivits. Le prix payer est la mauvaise rputation que le CIFconfre indirectement lempire du Milieu.


20/21


20 Ifri

Conclusion : Dconstruire le mythede lacteur chinois monolithique

Au mme titre que la communaut chinoise Madagascar, nouslavons vu, nest pas homogne, la Chine nest pas un acteurmonolithique guid par des intrts homognes et des stratgiescontrles par le Parti communiste chinois. Cela se vrifie toutparticulirement dans le domaine conomique o coexistent de

nombreuses catgories dentreprises chinoises

18

. Le Bureauconomique et commercial de lambassade de Chine ne contrleabsolument pas toutes les entreprises qui simplantent sur leterritoire, comme nous lavons vu avec le cas du CIF ou de Sunpec.Si les socits dtat sexposent des sanctions en cas decontournement de la reprsentation diplomatique, lambassade sirriteen coulisse de voir de nombreux investisseurs se passer de sesconseils, notamment les compagnies bases Hong-Kong. Le casde lhomme daffaires Hui Chi Ming, dj voqu dans larticle, estassez emblmatique cet gard. Celui-ci ne compte aucunement surlambassade pour mener bien ses projets. Revendiquantpubliquement son amiti aussi bien avec Marc Ravalomanana

quavec son successeur Andry Rajoelina, il fait reposer la russite deson entreprise sur ses relations politiques. Bnficiant de lanationalit malgache, il tait consul honoraire de Madagascar Hong-Kong avant de devenir rcemment numro trois delambassade malgache en Chine. Il a t nomm conseiller spcialen charge des affaires conomiques et asiatiques auprs duprsident Andry Rajoelina, et de son Premier ministre, Camille Vital.

Les entreprises chinoises ne sont pas que le simple levierdune politique globale conue dans les mandres de la Cite interdite.De nombreuses entreprises chinoises se retrouvent parfois enconcurrence, selon quelles viennent de provinces diffrentes, ou

quelles se trouvent bases Hong-Kong ou en Chine continentale.Les exemples ne manquent pas sur le continent africain etMadagascar ne droge pas la rgle. Dans lattribution du gisementde Soalala, Wisco tait en concurrence avec Sunpec, la prfrenceayant t accorde la compagnie nationale, Sunpec ntant quune junior rattache la province du Shaanxi. Pourtant, cette dernire

18 Voir ce sujet Jing Gu : Chinas Private Enterprises in Africa and theImplications for African Development , European Journal Development Research,2009, 21.4.


21/21

le nouvel essor des relations entre la chine et madagascar

Documents