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Le nouveau pouvoir judiciaire Revue de l’Union Syndicale des Magistrats N° 392 • Livre blanc bilan 2010 L L I I V V R R E E B B L L A A N N C C 2 2 0 0 1 1 0 0 L L E E T T A A T T D D E E L L A A J J U U S S T T I I C C E E E E N N F F R R A A N N C C E E Bilan d’un an de visites dans les juridictions

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Le nouveaupouvoirjudiciaire

Revue del’Union Syndicale des Magistrats

N° 392 • Livre blanc bi lan 2010

LLLIIIVVVRRREEE BBBLLLAAANNNCCC 222000111000LLL’’’EEETTTAAATTT DDDEEE LLLAAA JJJUUUSSSTTTIIICCCEEE EEENNN FFFRRRAAANNNCCCEEE

Bilan d’un an de visites dans les juridictions

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Revue de l’Union Syndicale des Magistrats33, rue du Four - 75006 Paris - Tél. : 01 43 54 21 26 - E-mail : [email protected] de l’USM : www.union-syndicale-magistrats.org - CCP : USM 0411 S 07816 PARISTrimestriel - Abonnement : 37 euros - Commission paritaire : 948D73Directeur de la publication : Christophe REGNARD - Rédactrice en chef : Virginie VALTONMaquette, réalisation, impression : Imprimerie BELLÊMOISE - Tél. : 02 33 73 10 10

s o m m a i r e

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L’édito du Président, Christophe REGNARD

Les ressources humaines

L’immobilier

La sécurité

Le budget de la justice

CASSIOPÉE

La réforme de la carte judiciaire

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L’éditodu Président

CHERS COLLÈGUES,

Ces dernières années n’ont guèreété favorables pour la Justice. Lesréformes se sont enchaînées, laplupart régressives au plan desstandards internationaux, souventsans cohérence les unes avec lesautres et non financées.

Parallèlement, la précédente Gardedes Sceaux n’a eu de cesse de cri-tiquer les magistrats dès lors quecela pouvait améliorer son image.L'actuelle se contente souvent dusilence.

L’USM s’est opposée clairement etfermement à la réforme des peinesplanchers, à la rétention de sureté,au jugement des irresponsables, à laréforme de la composition du CSM,à la réforme du secret-défense, à laréforme de la carte judiciaire …

2010 nous a conduits vers d’autrescombats, notamment celui de laréforme de la procédure pénale. Le bureau et le conseil national de

l’USM ont décidé, début 2010,d'amplifier leur mobilisation, tout aulong de l’année 2010, pour défen-dre une certaine conception de laJustice dans un état démocratique.

Le combat de l’USM pour la recon-naissance des personnels deJustice, l’amélioration de leursconditions de travail et l’augmenta-tion de leur traitement s'est naturel-lement poursuivi.

Le choix a été fait de travailler enpartenariat. Ainsi, l’USM, avec lesdeux autres syndicats de magistratset l’ensemble des associations pro-fessionnelles, a appelé à l’organisa-tion de la manifestation sur lesmarches du palais de justice deParis le jour de la rentrée solennellede la Cour de Cassation, auxcontre-rentrées dans les juridic-tions, autant d’événements quis’avèrent être des succès large-ment relayés par la presse.

L’USM a également appelé à l’orga-nisation de la grande journée pourla Justice du 9 mars.

Parallèlement, le bureau de l’USM amultiplié les relations :

- avec le conseil national desbarreaux en créant 2 groupes detravail composés de manière pari-taire, l'un sur les évolutions de laprocédure pénale, l'autre sur la for-mation des magistrats et avocats,

- avec les associations de vic-times sur la réforme de la procédurepénale

- avec l’UNSA Justice sur laréforme du droit pénal des mineursavec le syndicat des psychiatresdes hôpitaux et l’association natio-nale des psychiatres experts judi-ciaires sur les textes en matière derécidive, de soins pénalementordonnées et les hospitalisationsd'office et sur l’expertise.

Nous avons en outre maintenu noscontacts internationaux avec l’UnionInternationale des Magistrats et leConseil de l’Europe.

Mais au-delà des inquiétudes liéesaux réformes à venir, notammentcelle régressive annoncée de laprocédure pénale, l’USM a pleine-

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L’ÉDITO DU PRÉSIDENT

Christophe REGNARD

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ment conscience des difficultésmatérielles dans les juridictions,plus encore après la mise en œuvrede la réforme de la carte judiciaire.

Au moment des annonces de sup-pression de juridictions faites parRachida DATI, le bureau de l’USMs’était rendu dans tous les TGI sup-primés pour faire le point sur lasituation et répondre aux légitimesinquiétudes. Nous avions ensuitecommuniqué et fait remonter lesinformations à la chancellerie.

Depuis lors, la situation dans bonnombre de juridictions, qu’ellessoient impactées ou non par laréforme de la carte judiciaire, nes’est pas améliorée.

Après les livres blancs édités parl'USM en 1989,1998, 2002 et 2003,un nouveau bilan était nécessaire. Iln’a jamais été fait par le Ministère.La communication positive, sur lethème « tout va très bien », s'est eneffet poursuivie, y compris à l'occa-sion de la parution du rapport 2010de la CEPEJ, malgré une nouvelle« dégringolade » dans les classe-ments internationaux.

Aussi, sur proposition du bureau, leconseil national de l’USM a validéen janvier le principe d’un déplace-ment des membres du bureau danstous les TGI (métropolitains dansun premier temps), l’objectif étantde dresser un audit de la situation :état de l’immobilier, surcharges detravail, manque de personnels …

Un questionnaire détaillé a été éla-boré. Il a servi de base à cette publi-cation destinée à montrer l'état réelde la Justice en France.

L'USM a ainsi vérifié les juridictionssuivantes :

Janvier : TGI de Metz, Thionville,Sarreguemines, Tarascon,Marseille, Nice, Bressuire et CAd’Aix en Provence

Février : TGI de Bordeaux,Libourne, Tours, Orléans, Blois,Montargis, Poitiers, Niort, Limoges,Guéret, Brive la Gaillarde, Tulle,Boulogne sur Mer, Valenciennes,Thonon-les-Bains, Bonneville,Grenoble

Mars : TGI de Dunkerque, Lille,Bourges, Châteauroux, Nevers,Avesnes-sur-Helpe, Rennes, SaintMalo, Saint Nazaire, Macon,Chalon-sur-Saône, Chaumont,Dijon, Hazebrouck, Saverne,Strasbourg, Gap, Mulhouse,Colmar, La Roche-sur-Yon,Beauvais, Senlis, Compiègne,Saumur, les Sables d’Olonne, SaintEtienne, Lyon, Montbrison

Avril : TGI de Valence, Bourgoin-Jallieu, Vienne, Châlons-en-Champagne, Troyes, Reims,Charleville-Mézières, Moulin,Cusset, Annecy, Albertville,Clermont-Ferrand, Chambéry,Dieppe, Le Havre, Bernay, Rouen

Mai : TGI de Nîmes, Alès, Avignon,Carpentras, Privas, Nantes,Montpellier, Nanterre, Béziers,Narbonne, Carcassonne,Perpignan, Draguignan, Grasse,Toulon, Aix en Provence, Digne lesBains, Béthune, Dole, Besançon,Montbéliard, Belfort,

Juin : Bobigny, Melun, Saintes,Rochefort, La Rochelle, Alençon,

Argentan, Paris, Angers, Evry,Meaux, Bergerac, Bourg en Bresse,Villefranche sur Saône, Roanne,Angoulême, Périgueux, Bergerac,Nancy, Verdun, Bar le Duc, Caen,Douai, Amiens, Péronne, Roanne,Montauban, Toulouse, Abbeville,

Septembre : Briey, Saint-Dié-Des-Vosges, Epinal, Aurillac, Le Puy enVelay, Montluçon, Vannes, Lorient,Quimper, Brest, Morlaix, Guingamp,Saint Brieuc, Cherbourg,Avranches, Coutances, Soissons etLaon

Octobre : Pau, Tarbes, Mont-de-Marsan, Dax, Bayonne, Versailles,Pontoise, Lons-le-Saunier, Vesoul,Abbeville, Saint Omer, Cambrai,Arras, Ajaccio, Bastia, Agen,Marmande, Auch, Cahors, Laval,Le Mans, Saint Quentin, Lisieux,Pontoise, Versailles.

Nous avons ainsi visité en 9 moisplus de 165 juridictions, organiséautant de réunions riches de discus-sions avec des collègues syndiquésou non et rencontré de nombreuxchefs de juridictions, dont certainsnous ont semblé particulièrementinquiets au vu des difficultés qu’ilsrencontrent au quotidien dans leurjuridiction.

Nous vous remercions tous pourl’accueil chaleureux que vous nousavez réservé.

Ces réunions nous ont permis deconfirmer l’existence d’une pro-fonde crise dans la magistrature,crise morale, crise financière, crisejuridique.

Crise morale liée à l’absence de

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reconnaissance de notre travail, auxattaques et aux critiques récurrentessur les décisions que nous rendons,au refus du gouvernement, malgrénos demandes insistantes, d’enfinfaire évoluer le régime indemnitairedes magistrats.

Crise financière, conséquence d’unbudget notoirement insuffisantdepuis des années, qui conduit àdes baisses drastiques d’effectifstant côté magistrats que côtés fonc-tionnaires, à l’incapacité de faireface aux dépenses courantes, àfaire travailler les personnels de jus-tice et accueillir les justiciables dansdes locaux souvent indignes.

Crise juridique enfin avec l’ava-lanche de textes, de propositions oude projets de lois, faisant souvent fides principes généraux du droit etdes standards européens quidevraient pourtant guider touteréforme dans un pays démocratique.

Ces éléments ne font que démon-trer les constats alarmants quenous avions déjà faits, dans nosprécédents livres blancs.

Vous trouverez le bilan de nosvisites, sur les plans des effectifs,de l'immobilier, de la sécurité, deCassiopée, des budgets de fonc-tionnements, des frais de justice etde la carte judiciaire.

Notre objectif n’était pas, et n’esttoujours pas, de faire un audit detoutes les juridictions.

L’objectif était de vous écouter, derecueillir vos doléances et vosinquiétudes, de vous entendre nousparler des problèmes au quotidien

de votre juridiction, des manquesd’effectifs, des problèmes de finan-cement, des questions de sécurité...

Tous ces éléments ont été recueillisau cours de nos visites tout au longde l'année et ont naturellement puévoluer : des fonds ont pu êtredébloqués en urgence pour permet-tre de régulariser des impayés.Enfin et surtout, un mouvementimportant de magistrats s’est réa-lisé en septembre.

Ils sont la photographie d'une situa-tion à un moment donné.

Mais la permanence des problèmesd’effectifs dans toutes les juridic-tions, les problèmes budgétairesrécurrents et les difficultés liées à laréforme de la carte judiciaire mon-trent que le problème n’est pasconjoncturel, mais structurel.

Chritophe REGNARDPrésident

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Les chiffres qui figurent ci-des-sous ont pu évoluer depuis nosvisites, des magistrats placés ontpu être délégués pour combler lesmanques les plus criants et lessituations les plus scandaleuses.

Chacun sait que dans les classe-ments internationaux, notam-ment celui de la CommissionEuropéenne Pour l'Efficacité dela Justice (CEPEJ), la France estparmi les plus mauvais élèves dela classe européenne pour lenombre de ses magistrats rap-porté à sa population et pour lenombre des personnels de greffepar magistrat.

D'après le dernier rapport de laCEPEJ diffusé en octobre 2010,le nombre de Procureurs pour100 000 habitants s'élève à 3 (lamoyenne des pays du Conseil del'Europe est de 10,4) et le nombrede juges professionnels pour 100000 habitants s'élève à 9,1 (lamoyenne des pays du Conseil del'Europe est de 20,6). Par ailleurs,la France reste classée 39èmesur 45 (contre 39ème sur 43 en2008) pour le nombre de fonc-tionnaires de justice pour 100000 habitants (29,1 pour 100 000habitants), derrière l'Arménie etla Géorgie...

Les conséquences de la faiblessede ce budget, que l’USM dénoncedepuis de nombreuses années,se manifestent clairement et sont

d’ailleurs depuis peu admises auMinistère de la Justice.

On nous avait ainsi reconnu, il ya quelques temps, qu’environ200 postes de magistrats avaientdisparu ces deux dernièresannées.

Nous en avons par ailleurs eu lapreuve. Chaque année pour diffu-ser le flash « vos droits » quevous avez reçu en juin 2010, noussollicitons le fichier contenant lesadresses professionnelles demagistrats. En 2009, y figuraientles coordonnées de 8225 magis-trats. En 2010, les magistrats nesont plus que 8023…

La présentation du budget pourl’année 2011 ne peut quant à elledissimuler la disparition, au titrede ce seul exercice, de 76 postesde magistrats.

Une autre preuve se trouve sur leterrain.

Voici quelques exemples, nonexhaustifs, de juridictions subissantdes vacances de postes, étant pré-cisé que ces chiffres ne tiennentpas compte des congés maladie oumaternité, des manques d’ETPT :

Avesnes-sur-Helpe (-3 au siège et-2 au parquet), Chalons enChampagne (- 2 au siège, absencede Procureur), Charleville-Mézières (-2 au siège, - 1 au par-

quet), Reims (-2 au parquet),Besançon (-3 au siège), Belfort (- 2au siège), Aix en Provence (-3 auparquet), Beauvais (-2 au parquet),Compiègne (-1 au parquet, -2 ausiège), Senlis (-1 au parquet),Bressuire (-1), Marseille (-2 ausiège), Tarascon (-2 au siège),Toulon (-4 au siège, - 2 au par-quet), Draguignan (- 5 au siège, -1au parquet), Grasse (-1 au siège, -1 au parquet), Montargis (-1 ausiège, -2 en septembre), Tours (-1au parquet), Blois (-1 au siège),Mulhouse (-1 au siège), Colmar(-1 au siège, -1 au parquet),Strasbourg (-2 au siège, -2 au par-quet), Sarreguemines (-2 ausiège), Nice (-1 au siège), Poitiers(-2 au siège), Angers (-3 au siège,-1 au parquet), Thionville (-2 ausiège), Metz (-2 au siège, -2 au par-quet), Clermont-Ferrand (-2 auparquet pendant plusieurs mois),Moulins (-2 au siège), Bobigny (-9au parquet et manque au siège),Nantes (-5,6 ETPT au siège, -1 auparquet), Lille (- 2 au siège, -2 auparquet), Dunkerque (-2 au siège,-1 au parquet jusqu’en septembre),Boulogne sur Mer (-3 au siège),Béthune (-4 au siège, -2 au par-quet), Caen (-3 au siège, -1 au par-quet), Argentan (-1 au siège),Alençon (-2) Bar le Duc (-3),Verdun (-3), Troyes (-3 au siège),Poitiers (-2 au siège), La RocheSur Yon (-1 au siège), Angoulême(-1 au siège, -1 au parquet),Albertville (-6 sur 14), Vienne (-1),Toulouse (-2 au siège), Saint

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Nazaire (-2,5 ETPT sur 22), Toulon(- 4 au siège, -2 au parquet),Bergerac (-1 au siège, -1 au par-quet), Grenoble (Cour d’appel : -2juges placés sur 8, -1 parquetierplacé sur 3), Dax (-1 au siège, -1 auparquet (Procureur)), Mont deMarsan, Saint-Dié-Des-Vosges (-1au siège sur 5 magistrats, -1 au par-quet, sur 2), Pau (-1 au parquet),Quimper (-1 au parquet, -2 ausiège), Vannes, Lorient (-4 ausiège, -2 au parquet), CAMontpellier (-2 au siège), TGIMontpellier (sous-effectif chro-nique au parquet), Perpignan(notamment au Tribunal PourEnfants), Narbonne (sous-effectifthéorique même si un juge a étécréé pour compenser l’augmenta-tion des affaires civiles),Carcassonne (en septembre 2010,le TGI compte 10,5 magistrats alorsqu’il en comptait 11 il y a 20 ans etque la population a augmenté de20% depuis cette même période),Cahors (-1 au parquet, -1 ausiège), Auch (-1 au parquet ; ausiège, le poste créé en 2008 auregard de la réforme des tutelles aété supprimé en 2010), à Pau (2Vice-Présidents placés sont àtemps complet à la Cour et la cham-bre de l’application des peines a étécréée sans moyens supplémen-taires alors qu’un centre péniten-tiaire de 700 places a été créé àMont de Marsan), Cherbourg, LePuy en Velay (-2 dont le Président),Montluçon (-3 sur 7 au siège et 2placés sont affectés dans la juridic-tion), Brest (siège et parquet),Soissons (-3 au siège), Laval (-2au siège, et -4,5 à compter de jan-vier 2011 ; -1 au parquet), Le Mans(-1 au parquet), Saint Omer (-1 ausiège, -1 au parquet), Ajaccio (-1

au siège), Lisieux (-1 au siège),Arras (-2,2 au siège, sur 16),Abbeville (-1 au siège, -1 au par-quet), Saint Quentin (-2 au siège),Pontoise (-2 au parquet, nombreuxau siège), Versailles (-5 au siège),Laon (-1 au parquet), Paris.

Dans certains cas, les postesn’étant plus pourvus depuis desannées, la chancellerie ne lesconsidère même plus commevacants !

Des constats similaires peuventêtre effectués pour les effectifs degreffe :

Chalons en Champagne (aumoins 6 postes vacants),Strasbourg (15 et 20 postesvacants), Sarreguemines (-4),Bressuire (- 3), Les Sablesd’Olonne (- 3 ; -6 en ETPT),Angers (-14 ETPT, outre unedizaine de congés (maternité,parentaux...) à compter de l’été),Saintes (-9,8 ETPT sur 35), Cusset(-4), Thonon les Bains (25% depostes vacants), Grenoble (10% depostes vacants), Valenciennes(-4,1 ETPT), Lille (-23 ETPT augreffe sur 208 emplois cibles, soit11% de postes vacants),Hazebrouck (-2 ), Boulogne surMer (-9 ETPT), Draguignan (-5),Senlis (-10 sur 50 postes de caté-gorie C, -3 sur 18 postes de gref-fiers) Aix en Provence (-9 greffiers,Aix ayant le plus mauvais ratiomagistrats-greffiers de la Cour),Béziers (une dizaine), Dole (le TGIest passé de 19 personnes en2008, à 13 en 2009 et 10 en 2010,dont seulement 1,8 toujours effecti-vement en poste), Nancy (-10 %),Verdun (-3), Bar le Duc (-5),

Dunkerque, Toulouse, Marseille,Poitiers, La Roche Sur Yon,Bergerac, Rochefort (-5), SaintEtienne (-3,5 selon outil greffe, cequi démontre l'importance despostes vacants, tant on connait lapropension de ce logiciel à réduireà la baisse les effectifs au regardde ce qui est nécessaire), Bar leDuc (-5 sur 17), Saint Nazaire(-10,5 ETPT sur 58), Grenoble (-8sur 100, après un pic à 110 fonc-tionnaires), Bayonne, Dax,Tarbes, Pau, Lorient, Perpignan(par exemple, un fonctionnaire àtemps partiel pour tenir le greffe del’audiencement de la juridiction,alors qu’il y a 10 audiences correc-tionnelles par semaine),Montpellier, Auch (-2), Agen,Briey (il manque un 5ème deseffectifs, soit 5 sur 25), Soissons,Laon, Brest, Aurillac,Cherbourg, Le Puy en Velay, Laval, Le Mans (-8), Saint Omer(-5), Ajaccio (-2), Bastia (lachaine pénale est sinistrée, notam-ment), Arras, Abbeville, SaintQuentin, Vesoul, Pontoise,Versailles (perte de 15 postes dugreffe parquet, en quelquesannées ; plusieurs aux enfants),Lons le Saunier, Nice, Paris (plu-sieurs dizaines de postes de fonc-tionnaires sont évoqués commemanquants, voire une centaine, ycompris dans les Tribunauxd'Instance).

Dans certaines juridictions, la situa-tion est catastrophique notammentdu fait de l’absence, parfois inexpli-cable, de candidatures tant demagistrats que de personnels degreffe, les postes n’étant pourvus,lorsqu’ils le sont, que par les sortiesd’école…

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La réforme de la carte judiciaire estpar ailleurs propice à la suppressionde nombreux postes.

LES MAGISTRATS PLACÉS

Les magistrats placés ne peuventpallier toutes les absences ouvacances de postes.

Statutairement, le nombre de jugesplacés ne doit pas dépasser le quin-zième des emplois de magistrats dela cour d’appel et des tribunaux depremière instance du ressort.

Actuellement, de nombreux magis-trats placés sont affectés dans lesjuridictions bientôt supprimées, afinde leur permettre de continuer àfonctionner avant leur fermeture.S’il ne s’agit pas de contester cettepratique, force est de constater quecela ne peut qu’affecter les autresjuridictions où les problèmes d’ef-fectifs sont également patents.

Peu à peu on assiste à un dévoie-ment des missions des juges placés,à savoir « remplacer temporairementles magistrats de leur grade destribunaux de première instance et dela cour d’appel qui se trouventempêchés d’exercer leurs fonctionsdu fait de congés maladie, delongue maladie, pour maternité ouadoption ou du fait de leur partici-pation à des stages de formation,ou admis à prendre leur congéannuel » (article 3-1 alinéa 1 del’ordonnance du 22 décembre 1958).

Loin de pouvoir remplacer les col-lègues en congés (quelles quesoient leurs raisons), les magis-trats placés sont souvent affectéspour pallier les vacances de postes

de nombreux mois. On s’éloigneainsi de plus en plus des disposi-tions statutaires selon lesquelles« les juges placés peuvent êtretemporairement affectés dans lesjuridictions pour exercer, pour unedurée qui n’est pas renouvelable, etqui ne peut excéder 8 mois, lesfonctions afférentes à un emploivacant de leur grade » (article 3-1alinéa 2 de l’ordonnance du 22décembre 1958).

Ainsi, par exemple, un juge placéest affecté depuis 16 mois àAlbertville, tandis qu’un autre estaffecté depuis 19 mois au servicede l’instruction de Carcassonne. ASoissons, des juges placés onttenu un cabinet d'instruction laissévacant pendant 2 ans, et à nouveauvacant depuis le départ du juged'instruction en titre.

Le caractère insuffisant des effectifsdans les juridictions peut ainsi êtredissimulé par l’affectation de magis-trats placés dans le long terme maisle problème resurgit lorsque cesmagistrats sont indisponibles pourremplacer d’autres magistratsabsents ou ne sont pas remplacésà leur départ.

Par ailleurs, le coût lié aux frais dedéplacement des magistrats placéset le manque de moyens justifientparfois leur affectation dans unejuridiction proche de leur lieu delogement (Nice), à titre d’écono-mies.

Les magistrats placés doivent êtrerestaurés dans leurs missions pre-mières et non utilisés comme modede gestion des ressourceshumaines !

Enfin, certaines juridictions géogra-phiquement enclavées connaissenten permanence un taux de postesvacants très élevé (à Avesnes surHelpe : 40% des effectifs parquetpourvus par des placés, 16 % ausiège), Brest, les juges placésdemandant régulièrement à « tour-ner » sur ces juridictions, éloignéesde leur domicile, instaurant de fait unobstacle à la gestion au long coursd'un service ou d'un contentieux...

Malgré diverses demandes, tendantsoit à fournir un logement, soit uneprime pour rejoindre ces postes, lachancellerie reste sourde, mettantces juridictions en réelle difficulté.

LES PARQUETS ENDIFFICULTÉ

Alors que les charges des parque-tiers s’accroissent régulièrement(notamment du fait des réformesdes tutelles, de l’instruction, de la loipénitentiaire…), les moyens ne leursont pas donnés pour exercer leursmissions.

De nombreux parquets souffrentd’un effectif insuffisant, même sitous les postes y sont officiellementpourvus.

C’est le cas à Digne les Bains ou àAlençon…

A Troyes, le parquet est composéde 7 magistrats alors que la juridic-tion est pôle instruction et que leressort compte 3 établissementspénitentiaires (Centrale deClairvaux, CD de Vilnaux et maisond'arrêt de Troyes) ; en outre, le VPRqui partira en septembre n'est pas

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remplacé, alors que le plus anciensubstitut a 3 ans d'ancienneté ; àBeauvais, bientôt 2 postes serontvacants alors que le ressort compte1200 détenus ; à Boulogne surMer, le parquet est sous-dimen-sionné alors même qu’un poste JAPa été créé, qu’un nouveau poste deJE est sollicité et que le TGI est pôlede l’instruction ; à Chalons enChampagne, pour un parquet com-posé de 4 magistrats, l'intérim duProcureur de la République doit êtreassumé par un collègue ayantmoins de deux ans de fonction; àBobigny, le service de l’exécutiondes peines compte 2,8 magistratsau lieu de 4, voire 5 et le service desmineurs compte 6 personnes sur 8théoriquement ; au parquet civil deNantes (dont la compétence natio-nale ne cesse d’augmenter), lesproblèmes de greffes sont sourcesd’importants retards que ne peuventpallier les magistrats : l’annulationd’un mariage de 2006 donne lieu àune assignation en 2007…pour uneaudience en mai 2010 !!! A Saintes,le parquet est en sous-effectif : seuls4 postes sont localisés alors qu'unposte a été créé au siège du TPE etque la juridiction récupère la compé-tence commerciale de Maresnes…à Gap et Bourgoin-Jallieu, les par-quets sont réduits à 2 magistrats,les départs en 2010 n’étant pasremplacés …

De manière générale, les parque-tiers ressentent de plus en plus diffi-cilement la pression résultant del’augmentation incessante du nom-bre de procédures, mais égalementdu développement incontrôlé destâches indues, de nature administra-tive, bureaucratique, ou « communi-cationnelle », et des demandes

incessantes de rapports et decomptes rendus, qui génèrent lesentiment d’être l’objet de ladéfiance de la hiérarchie.

Force est de constater que cemalaise entraîne une désaffectioncertaine pour les fonctions du par-quet, de nombreux parquetiers solli-citent en effet leur passage au siègeaprès quelques années d’exercice,et de nombreux postes de parquetrestent vacants, même des postesa priori attractifs.

Certaines conséquences en sontl’augmentation du nombre depostes de parquet en sortie d’écoleet le fait que certains parquets sontdépourvus de tout encadrementintermédiaire, de jeunes magistratsse trouvant à exercer des fonctionsauparavant réservées à des par-quetiers expérimentés.

LES INCOHÉRENCES DANSLA MISE EN PLACE DESPÔLES INSTRUCTION

La création des pôles instructionn'a pas été accompagnée de lacréation effective de postes, tant àl’instruction qu’au parquet alorsmême qu’en l’état, la collégialitédoit se mettre pleinement en œuvreau 1er janvier prochain…

En effet, si le report de l'entrée envigueur de la réforme au 1er janvier2014 a été annoncé dans le projetde loi de finances, force est deconstater que la loi n'a toujours pasété adoptée et que des oppositionsse sont manifestées au Parlementsur le choix retenu de la Loi definances pour différer l'application

d'un texte de procédure pénaleadopté à l'unanimité en 2007 commeréponse à l'affaire d' Outreau.

Au cours de l’été 2010, la Directiondes Services Judiciaires n'était tou-jours pas en mesure d'indiquer si laréforme du 5 mars 2007 instaurantla collégialité entrerait effectivementen vigueur au 1er janvier 2011....Elle a pourtant fait choix de ne paspourvoir des postes pourtantrécemment créés dans des pôles,et au contraire, d'affecter au moisde septembre, y compris pour despremières nominations après lascolarité à l’ENM, des juges d'ins-truction sur des postes censés êtresupprimés quatre mois plus tard.

Quoi qu’il en soit, en l’absence detoute organisation de la réformepar les deux ministres qui se sontsuccédées, son entrée en vigueurau premier janvier 2011 ne pourraitque se traduire par un désastregénéralisé dans l’ensemble desjuridictions.

Ainsi, par exemple, à Reims, aucunposte de juge d'instruction n'a étécréé alors que le TGI a récupéré lacompétence criminelle de deux TGI(Charleville-Mézières et Châlonsen Champagne) ; à Aix enProvence, qui a récupéré la com-pétence de Tarascon et Digne, lesjuges d'instruction sont passés de 6à 8 en 2 ans mais aucun poste deparquetier n'a été créé ; à Bobigny,2 postes de juge d’instruction ontété créés, mais sans greffiers etalors même qu’il n’y aura plus desecrétariat commun en septembre ;à Béziers, l’instruction connaît d’im-portants problèmes d’effectifs, alorsmême que la juridiction est pôle et

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que les cabinets comptent 120 dos-siers environ : il n’y a pas de secré-tariat commun et seulement 2greffiers pour 3 juges ; à Narbonne,également pôle instruction, 2 jugesd’instruction sont affectés et non 3et le poste de greffier n’a été crééqu’un an après celui du juge d’ins-truction ; le TGI de Grenoble arécupéré la compétence pôle detrois autres tribunaux, sans aucunecréation de poste, ce qui, à l’heureoù les dossiers sont transmis aurèglement, crée une surcharge detravail au parquet, après avoirsaturé les cabinets d’instruction ; siun troisième poste de juge d’ins-truction a été créé à Montauban etpourvu en septembre 2009 par unmagistrat sortant d’école, aucuncabinet n’a été créé, le juge étantprincipalement affecté au servicedes affaires familiales.

Le poste de juge d’instruction deTarbes a été supprimé et remplacépar un poste de juge, affecté àl’instruction.

Un poste de Laval a disparu en2008 alors même qu’il participaitau traitement du reste du conten-tieux du Tribunal de GrandeInstance ; à compter de janvier2011, la juridiction n’aura plus dejuge d’instruction alors même quel’entrée en vigueur de la réformede l’instruction risque d’êtrerepoussée jusqu’en janvier 2014.

A Bourges, des travaux ont étéengagés pour la mise en place dupôle de l'instruction à hauteur de400 000 euros. Non seulement lacollégialité risque de ne pas êtremise en place, mais l'un des postesde l'instruction du pôle est vacant

depuis plusieurs mois, et n'a mêmepas été proposé à la sortie d'école.

Il n’est prévu aucun bureau de juged’instruction dans le futur TGI deVillefontaine, qui regroupera lesTGI de Vienne et Bourgoin-Jallieu,et le parquet ne sera pas renforcé.

Le poste de juge d'instruction deVesoul est vacant depuis 4 ans,alors qu'il participait au traitementdu reste du contentieux de la juri-diction.

Quant aux magistrats exerçantdans les « infra-pôles », ils n'ontaucune visibilité sur leur avenir au1er janvier 2011 alors qu'ilsdevraient faire leurs demandes demutation en application de l’article31 du statut de la magistrature.

L’ABSENCE DE HIÉRARCHIEINTERMÉDIAIRE

La baisse des effectifs de magis-trats se traduit souvent par unmanque de hiérarchie intermédiaireentre les chefs de juridiction et lesjeunes magistrats, nécessairementproblématique.

Ainsi, 2 VP et 1 VPR manquent àAvesnes sur Helpe ; Chalons enChampagne n’a pas de Procureur ;Troyes ne compte ni VP instruction,ni VP instance, ni VP enfant ; àBesançon, 3 postes de VP ne sontpas pourvus ; à Melun, le Procureur,le Vice Procureur et un PRA enca-drent seuls 12 substituts ; àMontargis, le poste de Vice-Procureur n’est jamais pourvu, lespostes du parquet étant très généra-lement dévolus aux magistrats sor-

tant d’école ; à Bobigny, le manquede hiérarchie intermédiaire conduitde jeunes substituts, avec peu d’an-cienneté, à être chefs de sections ;aucune hiérarchie intermédiairen’est présente au parquet deValenciennes ; Béthune souffreégalement du manque d’encadre-ment intermédiaire. Alors qu’unevingtaine de VP devrait être affectéeà Meaux, seulement 12 VP y sonteffectivement en poste et au par-quet, le Procureur et le PRA enca-drent seuls les 12 substituts, dans unparquet très régulièrement renou-velé de jeunes magistrats : le TGId'Amiens manque de hiérarchieintermédiaire au siège et au parquet ;à Mont de Marsan, les substitutsvont être seuls pendant plusieursmois, en l'absence de Procureur etde Vice-Procureur ; il n’y a aucunvice-président à Soissons, un postede vice-procureur est confié à unsubstitut à Ajaccio.

La transformation de postes du 1ergrade en postes du 2nd grade favo-rise les économies budgétaires…Dans le contexte actuel, faut-il y voirune relation de cause à effet ?

LES CONSÉQUENCES DESSOUS EFFECTIFS

Une charge de travail de plus enplus lourde

Malgré le manque de considérationsubi par l’ensemble des membresdes juridictions et des conditionsmatérielles d’exercice de plus en plusdifficiles, magistrats et personnels degreffe font preuve d’un dévouementimportant pour permettre aux juridic-tions de poursuivre leur activité…

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Nous savons tous que les juridic-tions ne fonctionnent que grâce àl’abnégation et la conscience pro-fessionnelle des magistrats et desfonctionnaires.

Beaucoup de magistrats renoncent àleurs congés ou travaillent pendantceux-ci. Beaucoup de greffiers necomptent pas leurs heures, malgrédes traitements trop faibles.

« Compte Epargne temps » pourrait-on nous répondre ! Mais depuis lamodification des dispositions en lamatière (que l’USM avec les syndi-cats des magistrats administratifs aattaquée devant le conseil d’Etat),l’utilisation du CET a été complexi-fiée. Il est notamment de plus en plusdifficile d’utiliser les jours épargnés, lenombre de jours pouvant être épar-gnés chaque année ayant en outrediminué. Ce sont ainsi plus de 200Equivalents Temps Plein Travaillésmagistrats qui ont été économisés en2008, soit près de 4% du corps !

Les magistrats ne comptent pasleurs heures de travail, y compristrès tôt, très tardivement ou pen-dant les week-ends. Combien derécupérations sont effectivementprises par les magistrats du parquetqui pourtant y ont droit ?

La suppression progressive despostes d'assistants de justice etde juges de proximité, du fait desrestrictions budgétaires, ne feraqu'accroître cette situation dansles mois qui viennent.

Une généralisation des déléga-tions

Pour pallier certaines vacances de

postes, il arrive de plus en plus fré-quemment que des magistrats dejuridictions avoisinantes soientdélégués :

Ainsi les magistrats de Montbéliardsont affectés, à temps partiel, àBelfort, Vesoul et Lure. Des magis-trats de Caen ont dû aller tenir desaudiences à Lisieux pendant quedes magistrats de la Cour d’Appeltenaient des audiences dans d’au-tres juridictions du ressort. Pour queHazebrouck puisse fonctionnerpendant les vacations, des déléga-tions de collègues de Dunkerquesont prévues pour les ComparutionsImmédiates et, pour le fonctionne-ment courant, les Juges des Libertéset de la Détention sont mutualisésavec Dunkerque et St Omer (d’au-tant que les Vice-Présidents sont ennombre insuffisant à Dunkerque) ; 3magistrats de La Rochelle sontdélégués à Rochefort en l'attentede sa fermeture ; des magistrats deValence sont délégués à Vienne ouà Gap pour la Cour d’assises desmineurs, les juges placés étant ennombre insuffisant.

Le Tribunal de Dole ne fonctionneque grâce aux vacataires, aux gref-fiers placés et aux personnes deBesançon et Lons le Saunier,déléguées par la Cour d'Appel. Il enest de même dans de nombreuxTGI en attente de fermeture,comme Avranches.

Faire de tous les magistrats desmagistrats placés, n’est ce pas là lebut ultime de la chancellerie ?Faire des économies est manifeste-ment l’un des objectifs !

Comment comprendre autrement

qu’à l’heure du développement pré-tendu des ressources humaines auMinistère de la Justice, la gestiondes mutations laisse, de manièredésormais courante, des postesvacants pendant plusieurs mois,entre deux mouvements ?

Les audiences correspondant auservice vacant sont tenues demanière « exceptionnelle » par lescollègues présents, la situationrevenant ensuite à la normale aprèsl’installation du remplaçant…deséconomies de temps de travail sontainsi réalisées… pendant que lesautres services prennent à leur tourdu retard et que les finances del’Etat ne permettent plus le verse-ment des primes pour travaux sup-plémentaires !

Du travail de greffe effectué pardes magistrats

Pour que les juridictions puissentfonctionner, en l’absence de gref-fiers, les magistrats contribuent deplus en plus au travail du greffe,notamment pour des convocations,des mises en forme de jugements.

Plutôt que de recruter greffiers, per-sonnels de catégorie C et assistantsautour des magistrats, on consacrele temps, pourtant déjà compté desmagistrats, à des tâches autres quecelles de décider …

Dans de nombreuses juridictions,les magistrats (juges des enfants,juges de l'application des peines,juges d'instruction, juges destutelles...) préparent, y compris leweek-end, eux-mêmes des cour-riers de notification d'une décisionou d'une expertise, en remplissant

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les accusés de réception, faute degreffiers ou de fonctionnaires.

Le travail juridictionnel enquestion

Malgré cette surcharge de travail, lagestion des juridictions s’apparentetrès souvent à la gestion de lapénurie et des choix drastiques doi-vent être faits, avec toujours lesmêmes questions :

Vaut-il mieux accepter un certainretard dans tous les services ouprendre le risque de laisser sombrerun service au profit d’autres ?

Vaut-il mieux statuer hors la pré-sence de son greffier et risquerl’annulation de la procédure ouexiger la présence du greffier etrendre des décisions dans desdélais déraisonnables ?

Dans les deux cas, c’est la loi qui nepeut être respectée. On pourrait citerbien d’autres exemples de ce qu’ilfaut bien appeler des dysfonctionne-ments, dont les magistrats ne peu-vent être tenus pour responsables.

De même, le contentieux civil peutêtre sacrifié au profit du pénal, particu-lièrement lorsque la juridiction compteplus de magistrats spécialisés que demagistrats non spécialisés.

Souvent, des juges des enfantssont contraints de présider lesaudiences d’assistance éducativesans greffier (Vienne, Caen) ousont dans l’impossibilité de tenir lesaudiences en cas d’absence pourmaladie de leur greffier, en l’ab-sence de greffier placé disponible(Grenoble). Il en va de même pour

de nombreux Juges aux affairesfamiliales, lorsque les cabinets nesont pas fermés faute de greffier(Grenoble, 4 cabinets de jugesaux affaires familiales alors qu’il enfaudrait 6).

De nombreuses copies de piècesne peuvent être délivrées, notam-ment à l’instruction (à Perpignan,Bobigny …).

Un peu partout, les délais de traite-ment des affaires s’allongent dansde multiples services, particulière-ment au JAF, pour les recourstutelles…des audiences sont sup-primées ou des dossiers renvoyés.

A Pontoise, il est estimé que lesdossiers en stock représentent400h d'audience ; actuellement, lesdossiers sont audiencés en... 2012.Dès lors que de tels délais peuventposer des problèmes de prescrip-tion, des audiences sont organiséespour renvoyer les dossiers et ainsi,éviter leur prescription. Par ailleurs,des audiences ont du être suppri-mées pendant le temps du procèsdu crash du Concorde (qui a duréplusieurs mois) car 4 magistrats dusiège composaient la juridiction.Mais le stock de dossier est telle-ment important que des audiencesdoivent être recréées alors mêmeque les juges de proximité ne peu-vent plus siéger, faute de crédits. Ilen a été de même des sessionsd'assises, reportées, avec la chargede travail y afférant.

Le manque de greffier a un impactdirect sur le travail juridictionnel desmagistrats. Des cabinets de magis-trats spécialisés doivent fonctionnersans greffier pendant de longs

mois : 6 mois pour un juge d’instruc-tion de Senlis, 10 mois pour unjuge d’application des peines deMontpellier, plusieurs mois pour unjuge des enfants de Tours, le JAP àBar le Duc, les 3 cabinets de JAPde Grenoble qui se partagent 2greffiers...

Des juges d’instruction ne peuventpas maîtriser leur calendrier et doi-vent fixer les actes en fonction de ladisponibilité des greffiers surchar-gés, lorsque leur poste n’est pasvacant. Ainsi, à Béthune, il a étédemandé aux deux juges d’instruc-tion, mutés en septembre et devantmettre à jour leur cabinet, de neconvoquer qu’un acte par semaineet par cabinet, exclusivement lematin du fait des problèmes degreffe (deux congés maternité nonremplacés sur 4 postes de greffiers,devant assumer en outre les fonc-tions de greffier JLD, poste vacant).Une juge d'instruction de Béziersdoit réaliser ses actes en fonctiondes disponibilités du seul greffier àmi-temps, non formé à l'instruction,qui est affecté au cabinet.

Des dossiers ne peuvent être com-plets pour les audiences correction-nelles (manque de Casiersjudiciaires, erreurs sur les convoca-tions des victimes ou des experts),des demandes d'extraction n'ont puêtre réalisées...

Des procédures pénales ne sontpas enregistrées. Des dossierspénaux ne peuvent être audiencés.Les jugements peuvent aussi êtrefrappés avec beaucoup de retard (9 mois à Montpellier au servicecorrectionnel, 7 mois à Béthune) etne peuvent alors être exécutés.

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Les vacataires, qui aidaient parfoisau maintien d'un certain équilibre,sont désormais concentrés surl'absorption des retards liés à l'im-plantation de Cassiopée (comme àBordeaux).

Les bâtonniers en sont parfois ame-nés à effectuer des démarchesauprès des chefs de cour et de juri-diction pour que certains servicessoient renforcés (Affaires Familiales,Bureau d’Aide Juridictionnelle…).A Juvisy Sur Orge, ce n'estqu'après intervention du bâtonnieret des huissiers que l’effectif du tri-bunal d'Instance a été provisoire-ment renforcé, alors que lesmagistrats alertaient leur hiérarchiedepuis des mois, par des rapportscirconstanciés.

Cette intrusion dans la gestion desjuridictions est compréhensible.Est-elle pour autant normale ?

Des réformes difficiles à appli-quer : l'exemple de la réformedes tutelles

Depuis la loi n°2007-308 du 5 mars2007 portant réforme de la protec-tion juridique des majeurs, lesmesures de protection des majeursprises avant le 1er janvier 2009 doi-vent être révisées dans les 5 anssous peine de caducité.

Cependant, le greffe ne peut pasabsorber la charge des dossiers derenouvellement, particulièrementlorsque le greffier assiste auxaudiences. Plusieurs demi-journéessupplémentaires par semaineseraient en effet nécessaires pouradresser les convocations, assisteraux audiences, formaliser les déci-

sions puis les envoyer alors que leseffectifs demeurent, au mieux,constants.

Ainsi, le manque de greffe ne per-met souvent pas de réviser l'inté-gralité des dossiers avantl'échéance. Des choix doivent êtrefaits ; dans certaines juridictions, lesmagistrats sont contraints de nepas réviser les mesures de tutelleou curatelle concernant les per-sonnes les plus âgées ; de nom-breux comptes de tutelles nepeuvent être contrôlés, avec lerisque que des irrégularités plus oumoins graves dans la gestion desbiens des personnes protégées nesoient pas détectées.

A Dax, 300 dossiers ont pu êtrerévisés sur les 2700 du Tribunald'Instance. Au Puy en Velay, 2%des mesures ont pu être réviséesseulement au dernier trimestre2010 alors que 40% des dossiersauraient du être revus pour que laloi puisse être respectée.

Au TI de Juvisy Sur Orge (TGId'Evry), les juges ont du faire deschoix cornéliens compte tenu dessous-effectifs chroniques desmagistrats et du greffe. Afin de per-mettre la révision des mesures detutelles, des audiences civiles ontdu être supprimées, portant à 9mois les délais entre la saisine dutribunal et la date de la premièreaudience.

A Saint Brieuc, il est déjà consi-déré qu'un tiers seulement des4000 dossiers tutelle pourra êtrerevu à l'échéance de fin 2013. Leseul juge des tutelles de Saint-Etienne devrait réviser 950 dos-

siers par an ; ainsi, la conjugaisonde la réforme de la carte judiciaire(suppression du TI de Chambon-Feugerolle) et de la loi du 5 mars2007 entraîne une augmentation de79% de la charge de travail du jugedes tutelles à moyens constants,voire restreints…

Des problèmes similaires se ren-contrent à Montpellier, Agen,Saint Etienne, Paris…

Polyvalence et souffrance augreffe

Au greffe, les problèmes d'effectifsnécessitent une polyvalence desgreffiers, très mal vécue ou deschangements réguliers de services,voire même la suppression de ser-vices entiers (cabinets JAF). Parexemple, à Grenoble, tous les services de greffe étant en sous-effectif, aucune marge de manœu-vre ne permettant de gérer lescongés maladie ou autresabsences inopinées, des fonction-naires ont pu être amenés à changer trois fois de services entrois mois, courant 2010.

Les accueils sont souvent sacrifiéset les accueils téléphoniques du justiciable limités à certainespériodes de la journée pour permet-tre au personnel de se consacrer àd’autres tâches de greffe (Le Puyen Velay, Paris, Abbeville).Essayez donc d'appeler un Tribunalde Grande Instance !

En pratique, les greffiers et fonc-tionnaires cumulent de nombreusesheures supplémentaires sans certi-tude de pouvoir les récupérer auregard de l’importance de la charge

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de travail. Une société privée seraitsans nul doute condamnée si ellene payait pas les heures supplé-mentaires ou ne permettait pas àses salariés de les récupérer...

Dans les juridictions où les effectifsde greffe paraissent moins en souf-france, il est clair qu’il n’existeaucune marge de manœuvre.L’effectif complet correspond austrict minimum nécessaire et toutaléa lié aux congés maladie oumaternité, aux départs à la retraite,au temps partiel ou aux mutationsnon remplacées est source de diffi-cultés insurmontables, voire mêmede baisse d'activité.

Le pire est qu’au regard des difficul-tés liées à la charge de travail,conséquence directe du manqued’effectifs, des arrêts maladie semultiplient, tant le personnel estsous pression et démoralisé.

L’ESPOIR

Très régulièrement lors de nosvisites, l’absence de tout espoird’amélioration à court terme a étémise en avant. Il faut dire que surles questions d’effectifs, nousavons tout à craindre.

Chacun sait que les recrutementsde ces dernières années par voiede concours, même augmentés desrecrutements latéraux ne suffirontpas à combler les vacances depostes liées aux départs importantsde collègues en retraite.

Cela vient d'être admis officielle-ment par la Chancellerie puisque 76postes de magistrats seront suppri-més en 2011.

Mais la chancellerie commence àintégrer dans ses plans deconstruction de nouvelles juridic-tions cet élément.

Ainsi, pour les programmes immo-biliers d’Aix en Provence et Caen,les suppressions de postes de fonctionnaires sont déjà actées (-15 à Aix en Provence àéchéance 2030, - 17 à Caen àéchéance 2015).

Les praticiens savent que la justicefrançaise ne continue à fonctionnerque grâce au dévouement et à l’en-gagement personnel des magistratset fonctionnaires…jusqu’à quandcela pourra-t-il durer ?

L’USM porte depuis des annéesl’idée de mettre en place la« démarche qualité » qui, si elleétait généralisée, montreraitrapidement qu’avec les moyensactuels, sans l’abnégation et laconscience professionnelledes magistrats et fonction-naires, sans quelques arrange-ments avec les textes, la justicene pourrait plus du tout fonc-tionner.

Dans le cadre des actions uni-taires avec les syndicats et asso-ciations de magistrats, mais aussiavec les représentants des organi-sations professionnelles des avo-cats, des personnels de greffe, del’administration pénitentiaire et dela Protection Judiciaire de la jeu-nesse, l’USM a souhaité que cetteidée essentielle soit reprise.

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L’ IMMOBILIER

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« C’est l’odeur du neuf ! C’estvrai qu’on n’est pas habitué,dans la Justice ». Telle a été laréponse d'un magistrat à uneinterrogation quant à la forteodeur régnant dans une salled'audience récemment rénovée.

La réforme de la carte judiciairea été annoncée comme basée,notamment, sur les enjeuximmobiliers.

Souvent plus que centenaires,parfois logés dans des bâtimentshistoriques, de nombreux palaisde justice ne permettent plus dedonner à l'Institution Judiciaire ladignité qui devrait être la sienne.

Les locaux, majoritairement tropexigus, ne sont souvent pasfonctionnels, et les personnelsde justice sont contraints detrouver des arrangements orga-nisationnels favorisant la pour-suite de leurs activités, ycompris en délocalisant dansdes locaux extérieurs, certainsservices.

Les moyens immobiliers n'ontpas évolué en même temps quele contentieux et de nombreuxprojets de rénovation ou réfec-tion sont prioritaires....depuisdes années....ce qui permet defaire patienter les personnels...

Et, même quand des bâtimentssont rénovés ou construits, des

difficultés apparaissent malheu-reusement trop régulièrement, enraison de malfaçons ou dumanque de budget.

Par ailleurs, la sécurisation desbâtiments et la gestion matérielledes scellés et archives sont trèsdifficiles.

Les réels progrès, certes réalisésdepuis quelques années, ne suf-fisent pas à rattraper des décen-nies de retard en la matière.

Les personnels, collaborateursde justice et justiciables sontainsi confrontés au quotidien àdes problèmes matériels trèsconcrets qui pourraient, isolé-ment, faire sourire s'ils nedémontraient pas l'état déplora-ble de l'Institution Judiciaire.

Enfin, il est navrant de voir quel'Institution n'est pas à même derespecter elle-même les normesd'accueil du public qui serventpar ailleurs de fondement auxcondamnations d'entreprisesprivées....

DES LOCAUX DÉGRADÉSOU PEU FONCTIONNELS

Le site principal du TGI deStrasbourg, installé dans un bâti-ment classé, étant trop exigu, unnouveau site a été créé en l’attentedes travaux d’agrandissement.

Cependant, ce projet de reconstruc-tion du premier site (maintien desfaçades du bâtiment classé etréaménagement de l'intérieur) a étéinterrompu de sorte qu’il n'y a pas eude travaux depuis 10 ans.Magistrats, fonctionnaires, collabo-rateurs de justice et justiciables sontcontraints d’utiliser un bâtiment danslequel les câblages posent difficul-tés, des murs s'effritent, des moisis-sures apparaissent ; dans la salle devisioconférence, les câbles doiventêtre réhaussés sur des chaises, enraison d'infiltrations et d'interfé-rences... Un 3ème étage a étérajouté mais il s'avère trop lourd....

Un arrêté de péril n’avait pu êtreévité que du fait du projet de réali-sation de nouveaux locaux et de lamise aux normes de l’électricité. Lecoût des travaux était jusqu’alorsévalué à 25 millions d’euros maisle financement prévu est insuffi-sant et les travaux ne peuvent êtreréalisés.

Les locaux du TGI de Dunkerquesont vétustes. Du fait de problèmesde toiture, des traces sombres deruissellement sont visibles sur lesmurs de la salle des pas perdus.Les problèmes de financementn’ont pas permis de réaliser tous lestravaux en 2009 : la seconde partiedes travaux de la toiture sera réali-sée en 2010 et financée grâce aux« crédits carte judiciaire », accordéspour l’absorption du TGId’Hazebrouck.

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Le TGI de Colmar est installé dansun lieu de grande traditionjudiciaire : le siège du ConseilSouverain d'Alsace, dont une partiedate du 16e siècle. Cependant, leslocaux ne sont absolument pasfonctionnels : des escaliers, desponts en bois, sont présents dansles grandes pièces de travail. Lasuperficie des locaux est insuffi-sante et l'aménagement obsolète.Un projet de réfection de la toitureest en cours depuis plusieursannées mais demeure à l’arrêt,compte tenu de son coût, s’agissantd’un patrimoine classé.

La Maison d'Arrêt contigüe devraitêtre supprimée et le tribunal pour-rait donc s'étendre. Cependant,outre que ce projet demeure égale-ment en suspens, la suppression dela prison n'apparaît pas nécessaire(au regard de sa taille raisonnable(130 détenus) et du quartier desemi-liberté).

Le TGI de Sarreguemines estinstallé dans un bâtiment datantde 1902. La salle d'audience cor-rectionnelle est mal isolée et subitdes infiltrations d'eau. Les fenê-tres ne sont pas jointives, lesportes ferment mal et le bâtimentest donc particulièrement difficileà chauffer.

Aux TGI de Metz, Montpellier(ainsi qu’à la cour) exigus, lesmagistrats doivent partager leursbureaux. La salle du traitement entemps réel de Nantes est tropexigüe pour les 3 magistrats duservice. Le personnel du TGId'Arras doit partager, à plusieurs,des bureaux très étroits encombrésde dossiers. Un substitut est resté

plusieurs mois sans bureau, occu-pant les postes des collègues encongés, stages...le TGI deThionville est lui aussi devenu tropétroit ; le TGI de Caen pourrait nepas être trop étroit si la majeurepartie du bâtiment n'était pas inter-dite d'accès à cause du risque d'ef-fondrement....

Le vieux bâtiment accueillant leTGI de Compiègne est trop étroit,surtout depuis la fermeture de sonannexe qui a du être évacuée dufait d'un risque d'effondrement. Leservice civil et du JAF sont instal-lés dans des locaux très exigus ; iln'y a plus de bureau pour accueillirles auditeurs de justice et les jugesde proximité qui n'ont donc pasd'accès informatique, et l'installa-tion d'un nouveau parquetier poseun réel problème matériel. Lesdeux personnes chargées de lanumérisation et de la gestion desscellés sont installées dans ce quipeut être qualifié de « placard àbalais de 5m2 » et peinent à fairele tour de leur bureau.

Les locaux du TGI d'Aix enProvence sont particulièrementdégradés. Le TGI est en effetaccueilli provisoirement, depuis 31ans (!) dans une ancienne clinique(on y retrouve encore des carre-lages muraux bleu clair et rose). Cebâtiment principal est dans un étatlamentable, n'ayant fait l'objet d'au-cune rénovation depuis 1970, sur-tout les geôles. Le mobilier,obsolète, a tendance à s'effondrer.Les quelques travaux de peinturerécents sont insuffisants.

Le TGI de Digne les Bains est ins-tallé dans des locaux anciens

datant du17e siècle, auxquels a étéaccolée une autre partie dans lesannées 50. Des fissures sont appa-rues entre les deux bâtiments. Lesfaçades ne sont plus entretenuesdepuis 1972 et l'intérieur du bâti-ment depuis 1989. Les moquettesmurales devraient être changées,les peintures refaites...quelquesbureaux seulement ont été repeints.Du fait de l'affaissement du bâti-ment, les fenêtres du bureau duprésident n'ouvrent plus et celles duprocureur ne ferment plus. Lesvolets de la salle d'audience sontfermés en permanence, car ils ser-vent à maintenir les arches desfenêtres...

A Nancy, l'accès d'un des deuxescaliers du perron a été condamnéquelques jours, sans que l'on sachevraiment si cette condamnation estliée à l'état des marches ou à celuide la façade en baie vitrée, quimenacerait de s'effondrer. Le localà poubelles, détruit par un incendiemalveillant il y a trois ans, voisin dequelques mètres de l'escalier, n'apas été remis en état, faute de cré-dits...Par ailleurs, le bâtiment estvictime d'une infiltration d'eau, duea priori à une conduite d'eau plu-viale défaillante, entrainant par ail-leurs un risque d'effondrement duplafond. L'accès à la zone située endessous du plafond menacé d'ef-fondrement est interdit pour unedurée indéterminée : la solution auproblème nécessiterait l'utilisationd'une caméra dans les tuyauteriespour déterminer l'emplacementexact de la fuite mais ne peut êtrefinancée...

Les locaux du TGI de Saint Nazaireont été reconstruits en 1950 et sont

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actuellement en cours de rénova-tion. Ils sont inadaptés et obligent àprendre les confrontations dans lesdossiers d'instruction dans d'autressalles ; les WC sont insalubres(y compris pour le personnel) et nepermettent pas l'intimité ; en l'ab-sence de salle d'attente pour leJAF, les justiciables doivent atten-dre dans le couloir ; il n'y a pas d'in-sonorisation pour les audiences decabinet.

Le TGI de Moulins est situé dansun ancien couvent magnifique,classé, ce qui implique descontraintes importantes pour lestravaux (gouttières en cuivre, toitsen tuile...). Mais ces locaux nesont absolument pas fonctionnels :le bâtiment est en U et chaqueporte de celui-ci correspond à unservice. Ainsi, pour aller d'un ser-vice à l'autre, il faut ressortir dubâtiment, la cour du tribunal ser-vant ainsi de salle des pas perduset de parking. Le juge d'instructionet le procureur ont un bureau aurez-de-chaussée, dans lesquelson peut entrer directement de l'ex-térieur. La salle d'assises est unesalle ancienne, équipée d’unevitre blindée pour le box des accu-sés, d’apparence anachronique.Pour autant, cette salle d'assisesn'est pas aux normes d'accessibi-lité. La salle civile, sombre, com-porte un très beau plafond maisest très mal insonorisée, en l'ab-sence de micro. Malgré tout cela,les collègues estiment travaillerdans des conditions matériellessatisfaisantes.

Les juridictions ne disposent pastoujours de salles adaptées aunombre de justiciables concernés

par une affaire (nombre de préve-nus par exemple), ou à l'impor-tance du public. Ainsi, il est difficilede tenir des audiences correction-nelles dans « la petite salle » dePerpignan lorsque l'autre salled'audience, plus fonctionnelle, estutilisée pour les assises, régu-lières. En outre, les fenêtres setrouvent à hauteur du trottoir, cequi pose des problèmes en termede sécurité.

A Vesoul et dans certains servicesdes TGI de Paris et Thionville(lorsqu'ils ne se perdent pas) lesjusticiables attendent dans l'escalierou le couloir.

L'une des salles d'assises deDouai, où se tiennent en perma-nence deux sessions, est située ensous-sol, très sombre. Les projetsde travaux ont du être abandonnésà l'annonce de la réforme de lacarte judiciaire, puisque les fondsont été conservés pour les juridic-tions impactées.

Les magistrats de la Cour d'Appeld'Amiens sont installés, jusqu'àquatre par bureau, dans des piècestrès exigües, parfois en entre-sol, oudans un "placard". La seule fenêtreest au ras du sol, vestige d'unefenêtre coupée en deux lors de lacréation de deux bureaux dans unemême pièce. Certains magistratsn'ont pas de lumière du jour, ni vuesur l'extérieur. Certaines fenêtresn'ont aucune sécurité alors mêmeque des câbles courant sur le solsont susceptibles d'entraîner deschutes. Le greffe civil et les conseil-lers civils sont séparés par 2 étages,sans ascenseur, ce qui compliquetrès largement le transport des dos-

siers. Des odeurs nauséabondessont régulièrement constatées. Lessanitaires sont notoirement insuffi-sants, inadaptés aux personneshandicapées (qui pourtant travaillentdans ces locaux), sans hygiènesatisfaisante...

Depuis 3 ans, le 2ème juge desenfants du TGI du Puy En Velay aun bureau si exigu qu’il ne peut yrecevoir les familles. Les 2 jugesdes enfants sont donc contraints des’entendre pour échanger leurbureau et partager l’unique bureaupouvant matériellement accueillir lesfamilles. Des travaux étaient promisrapidement mais ne seront possi-bles que du fait de la délocalisationdu TI, devenu lui aussi trop exigupar le rattachement de 2 autres TIaprès la réforme de la carte judi-ciaire. En l’attente, les deux jugesdes enfants continuent à recevoirles familles dans des conditions nonsécurisées (en 1994, un juge desenfants avait été pris en otage sousla menace d’un fusil).

Le Palais de Justice de Paris estmalheureusement célèbre pourson exiguïté. Quand ils disposentd'un bureau, certains magistratssont installés à 6 dans un mêmebureau, avec 3 ordinateurs seule-ment et de nombreux magistratssont obligés de travailler à leurdomicile. D'autres sont à 4 dans unmême bureau, mais ne peuvents'asseoir à 2 simultanément, fautede place.

A la Cour d'Appel de Paris, dessalles d'audience et de délibérédoivent être partagées. Des justi-ciables doivent patienter dans lescouloirs. Certains bureaux de la

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Cour d'Appel sont installés dans cequi est surnommé « le bocal » ou« le sous-marin supérieur » : desbureaux sans fenêtre ni air, particu-lièrement fatigants du fait du bruitde soufflerie permanent. D'autressont en haut d'escaliers en boisbranlants, dangereux. La chambrede l'instruction est tellement exigüeque les dossiers s'empilent dansles couloirs, où de ce fait, il estimpossible de se croiser à deux.Compte tenu du volume de certainsdossiers, les magistrats sontcontraints de les étudier dans lecouloir ou directement dans lesarmoires...

Le TGI de Vienne est égalementlogé dans un ancien bâtiment, quidevra fonctionner jusqu'à sa ferme-ture prévue en 2014, alors que lessurfaces sont insuffisantes et quedes investissements, notammentpour l'entretien, devraient être réali-sés. Par exemple les joints desfenêtres ont fondu lors de la cani-cule de 2003, et n’ont pu être chan-gés, les fenêtres conservant doncune apparence crasseuse.

Le TGI de Gap avait été, lui, frappéd'une interdiction d'accueillir dupublic en 2008. Des travaux ontpermis de lever cette interdictionen 2010.

Les locaux de nombreux TGI sontdans un état déplorable : Lisieux,Périgueux...Il en est de même pourLorient et Perpignan, ces derniersoffrant des conditions de travail par-ticulièrement difficiles à certainsfonctionnaires (des bureaux sousles soupentes, avec un accès parun escalier particulièrement raide etdangereux).

LE MANQUE DE FONC-TIONNALITÉ DES JURIDIC-TIONS LES PLUS RÉCENTES

Bien que le TGI de Bordeaux soitrécent et moderne, il s'avère déjàtrop exigu et non fonctionnel. Il aété construit à une époque où iln'était pas question de supprimerl'instruction mais les contingencesde cette fonction n'ont pas étéprises en compte : ainsi, afin d'as-surer la confidentialité des interro-gatoires, les magistrats ont durecouvrir les baies vitrées de leursbureaux, en utilisant pour certains,du papier-journal.

La Cour d'Assises d'Amiens a puêtre rénovée en 2009, suite à unincendie survenu en ...2000 maisun surcoût a été rendu nécessairepar des erreurs de conception. Eneffet, sourds aux avis des profes-sionnels, les architectes ont créé unbox pour les accusés complètementfermé par une vitre blindée, sanspossibilité de communication avecl'avocat. Cette installation a du êtredémontée et réorganisée. Demême la barre des témoins a duêtre reculée car, en raison de lahauteur et de la largeur de l'estrade,la cour et les jurés ne pouvaient pasvoir les personnes déposant à labarre. Par ailleurs, le présidentd'assises a du insister pour qu'unonduleur soit installé et que lesapplications informatiques ne soientplus régulièrement déconnectéesdans la salle entièrement équipéeen visio-conférence et écrans.

La salle d’assises de Pau a été, trèsrécemment, entièrement rénovéemais les anciens fauteuils, d’un

style tout à fait adapté à celui de lasalle, ont été maintenus alors qu’ilssont particulièrement inconfortablespour les longues heures de débats.Le médecin de prévention a étésaisi.Toujours à Pau, un immense Christen croix demeure dans la 1èrechambre civile ; un rideau a été ins-tallé pour le masquer lors de lavenue de Rachida Dati.

Les magistrats du TGI de Nantesn'ont pas oublié les chutes desdalles du toit sur le parvis du tribu-nal...juste après son ouverture.

Le bâtiment d’Avesnes Sur Helpe,construit en 2007, est déjà tropétroit, car la création de postesn’avait pas été envisagée alorsque la juridiction va accueillir plu-sieurs conseils de prud’hommes(soit 88 conseillers et le greffe). Ilest donc prévu d’installer de nou-veaux bureaux dans la salle despas perdus.

De même, le TGI de Pontoise,inauguré en 2005 a, dès le départ,été conçu trop petit : il manque dela place au service d'applicationdes peines qui a élu domicile dansles sous-sols, ainsi que des sallesd'audience.

DES JURIDICTIONS ÉCLA-TÉES EN PLUSIEURS SITES

Les juridictions sont régulièrementséparées en plusieurs sites, parfoiséloignés. Les magistrats, les per-sonnels et les avocats sont soumis,de ce fait à d'importantes contin-gences matérielles, nécessairementchronophages, notamment pour le

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transport et la consultation des dos-siers. Par ailleurs, conséquenceimmédiate de la réforme de la cartejudiciaire, les Tribunaux d’Instancesont souvent externalisés.

Le TGI de Mulhouse, dont les bâti-ments sont anciens (1870) etdégradés est séparé en 3 sites. Lacommunication des dossiers avecle Parquet est rendue difficile parl'existence de 2 sites détachés(TPE et chambre commerciale),certes à proximité (100 m).

Un nouveau site a été organisé pen-dant la durée des travaux d’agran-dissement du TGI de Strasbourg(cf ci-dessus). Les services de laCour d'Assises, du commercial, dujuge aux affaires familiales, et ducivil sont donc éloignés du site prin-cipal, dans des structures censéesêtre temporaires...depuis 2007. Desstructures modulables ont été instal-lées en 3 mois, pour un coût de 3millions d'euros (déménagementcompris, mais réalisé par les magis-trats eux-mêmes) alors que le coûtde construction du nouveau bâti-ment était évalué, jusqu'à présent, à25 millions d'euros.

Le TGI de Mont de Marsan est luidivisé en 3 sites, particulièrementnon fonctionnels, voire dégradés(outre le Conseil de Prud'hommeset le Tribunal de commerce, chacunsur 2 sites différents) :

- un premier bâtiment, dégradé,accueille les services pénaux et letribunal pour Enfants. Le bâtimentest en bordure de route et seul unétroit trottoir permet l'accès àl'unique porte d'entrée du bâtiment.Ainsi, lorsque des services de

police doivent amener un prévenupour un déferrement ou uneaudience (y compris aux assises),ils ne peuvent que "déposer" la per-sonne et l'escorte avant que le véhi-cule ne reparte rapidement.

Les jours d'audience, des dizainesde justiciables se massent sur letrottoir avant l'ouverture du tribunal,et risquent ainsi d'être percutés parles véhicules circulant sur la routefréquentée.

Au vu de la configuration des lieux,les magistrats, avocats, prévenus,accusés, victimes, et jurés utilisentle même, unique, accès.... et juréset magistrats sont parfois obligésd'attendre de longues minutesavant de quitter le tribunal, le tempsque les prévenus et leur familleaient pu quitter les locaux.

- une maison de ville, à quelquesdizaines de mètres du précédentbâtiment, accueille le service civil dutribunal, sans salle des pas perdus,ni réel lieu d'attente pour lesaudiences, qui peuvent être suiviesde l'extérieur, par les fenêtres don-nant directement sur la rue.Lorsque le TI était installé dans cebâtiment, les nombreuses per-sonnes convoquées pour lesaudiences civiles attendaient régu-lièrement directement dans la rue.

- le TI, à une dizaine de minutesà pieds est installé dans des locauxadaptés mais sans sécurité... ce quipose problème lorsque le plan vigi-pirate impose de renforcer lesmesures de sécurité.

A Montauban, le TGI est installédans 4 bâtiments adjacents,

anciens, reliés les uns aux autrespar des passerelles, avec des demi-étages. Un autre bâtiment vientd'être acquis. Le TGI est un vrailabyrinthe, peu fonctionnel.

Le TI et le TGI d'Angers sontactuellement géographiquementséparés et une scission du TGI estenvisagée. La configurationactuelle des locaux ne permet eneffet pas d'accueillir le TI de Segréet le TGI de Saumur, supprimés. LeTGI pourrait alors être étendu dansles locaux du TI, situé à 20 minutesde marche, qui déménagerait. Ceseraient alors 5 sites qui devraientêtre utilisés : le TGI (2 sites), le TI,le Conseil de Prud'hommes, et leTribunal de Commerce.

Le fait que le TGI d'Aix en Provencesoit séparé en 2 sites pose des pro-blèmes de fonctionnement, notam-ment en terme d'accueil dujusticiable et des avocats. Pour unmême service, (TPE) le parquet estsur un site, les juges des enfantsdans l'autre.

Le service du Jap de Troyes estdans un bâtiment distinct de celui duTGI. Du fait de la réorganisation desservices rendue nécessaire par l'ab-sorption de 3 TI, le TI va lui aussiêtre externalisé mais les travauxprennent du retard, au regard d'undéblocage des fonds tardif et de lanécessité de l'intervention de l'archi-tecte des bâtiments de France,s'agissant d'un site protégé.

Le TGI de La Rochelle est éclatéen 3 sites relativement éloignés lesuns des autres. En outre, le TI et leConseil de Prud'hommes sont éga-lement sur des sites séparés.

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La Cour d'Appel et le TGI de Douaise partagent 3 sites : l'ancien parle-ment de Flandre, classé, sur lequelune tour des années 70 a étéadjointe ; une annexe dans lamême rue, pour accueillir le CPH,les assistants de justice et certainsconseillers, qui devrait être aban-donnée et dans laquelle il n'y adonc plus de travaux alors que laconfiguration des escaliers, étroitset en colimaçons, entraîne de nom-breuses chutes ; enfin, un autrebâtiment, éloigné, accueillant lachambre sociale et bientôt, le greffedes tutelles de la cour.

Un tel inventaire pourrait être pluslong. En effet, les mêmes caracté-ristiques se retrouvent aux TGI deThionville, Strasbourg, Saverne,Caen, Metz, Argentan,Avranches, Béthune, Lens, Lille(location d’un bâtiment pour le TIpour un loyer de 850 000 euros paran), Dunkerque, Boulogne surMer, Metz (3 sites), Argentan(2 sites), Charleville-Mézières,Poitiers, Hazebrouck, Les Sablesd'Olonnes, Perigueux (2 sites),Toulon (3 sites), Draguignan(2 sites), Niort (3 sites), Avranches(2 sites), Bergerac (2 sites),Lorient, Cahors (2 sites), Laon,Laval (2 sites), Agen (2 sites), LePuy en Velay, Limoges, Brest(quand il aura accueilli le TGI deMorlaix), Ajaccio, Cambrai (2sites), Evreux (2 sites, bientôt 3lorsqu'il aura accueilli le TGI deBernay), Moulins (2 sites),Quimper (2 sites), Valencienne(3 sites, à terme), Arras (2 sites).

Les Cours d’Appel sont parfois sou-mises aux mêmes difficultés : àRennes notamment. A Reims, des

bureaux de magistrats sont installésau SAR (Service AdministratifRégional), externalisé, mais ne sontpas utilisés et donc inutiles.

DES JURIDICTIONS INAC-CESSIBLES AUX PER-SONNES HANDICAPÉES

De nombreuses juridictions, trèsanciennes, sont inaccessibles auxpersonnes handicapées.

Ainsi, lorsqu'une personne handica-pée est concernée par uneaudience, des audiences doiventêtre « délocalisées » pour se tenirdans une salle plus accessible aurez-de-chaussée ou des justiciables,personnels de greffe, collaborateursde justice, agents de sécurité oumagistrats sont mis à contributionpour porter la personne si quelquesmarches doivent être montées.

A Béthune, le Ministère, l'EcoleNationale de la Magistrature et lecentre de stage s'étaient misd'accord pour l'accueil d'un auditeurde justice handicapé, puisque lajuridiction était aux normes pourl'accueil du public handicapé et nenécessitait que quelques aménage-ments pour l'accueil de travailleurshandicapés. La chancellerie (délé-gation aux droits des personneshandicapées) s'était engagée àfinancer la construction de rampesd'accès aux estrades de trois sallesd'audience. Dans l'attente desdevis, le stage de l'auditeur avaitété organisé en conséquence, pourse terminer par les fonctions avecaudience. Fin mai 2010, laChancellerie a annoncé son refusde financer les travaux (40 000

euros au total). Seuls les courriersdu directeur de centre de stage àl'ENM, et de l'USM au Ministre ontpermis que la situation soit réexami-née. Toutefois, à ce jour, les fondsn'ont toujours pas été débloqués etseules des rampes provisoires,amovibles, instables, sont mises àdisposition, ne permettant nulle-ment à l'intéressé l'autonomie et lasécurité qu'il est en droit d'attendre.

Des travaux sont prévus àSoissons. A Saint Omer, des tra-vaux d’adaptation aux normes han-dicapés ont été réalisés (ramped’accès, toilettes, ascenseur), l'inté-rieur des locaux du TI permet ainsila circulation d'une personne enfauteuil.... qui ne peut pourtant pas-ser la porte d'entrée, tropétroite…et le service de l’applica-tion des peines demeure inaccessi-ble aux personnes handicapées.

A Strasbourg, les toilettes pour han-dicapés existent. Malheureusement,elles sont situées au 2èmeétage...Et il n'y pas d'ascenseurpour y accéder !

Le TI de Belfort est installé dansles locaux de la Mairie, difficilementaccessibles aux handicapés, enl’absence d’ascenseur, de sorte quedes audiences sont parfois délocali-sées au TGI.

Les locaux des TGI de Bergerac,Auch (où un projet de restructura-tion est en cours), Briey ne dispo-sent pas d'accès pour lespersonnes handicapées, auxaudiences. Il en va de même pourle TI de Montmorrency (TGIPontoise) et le TGI de Vesoul, où iln'existe aucune salle de plein pied,

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ce qui pose problème pour les per-sonnes handicapées que les agentsde sécurité doivent porter dans lesescaliers.

A Caen, des rampes d'accès ontété installées pour permettre auxpersonnes handicapées de franchirles quelques marches d'entréedans la juridiction. Mais l'une de cesrampes, mal conçue, a une pentetrop importante pour certains fau-teuils roulants. Un magistrat atémoigné avoir dû intervenir enurgence pour éviter la chute d'unepersonne handicapée dont le fau-teuil roulant commençait à tomberen arrière.

A Vannes, le juge des tutelles deVannes est parfois amené àconduire les entretiens dans levéhicule du justiciable handicapé,en précisant, sur le procès-verbald’audition : « en transport dans levéhicule de … ».

Le TI de Saint Nazaire ne disposepas d’un accès pour les handica-pés, alors qu’il reçoit, notammentpour le service des tutelles, la plu-part des personnes à mobilitéréduite du site judiciaire. Il y aquelques mois, une personne âgée,en fauteuil roulant, est tombée latête la première sur le bitume, encirculant sur un chemin non adapté.Ses blessures ont nécessité 17points de suture.

DES LOCAUX AMIANTÉS

Un déflocage a été réalisé dans lafin des années 1990 àValenciennes, mais des plaquesd'amiante demeurent dans les cloi-sons. De même à Dunkerque, où le

désamiantage est prévu à l'occa-sion des travaux de rénovation. Siles nouveaux arrivants sont engénéral avisés qu'ils ne doivent paspercer les cloisons, ni planter declou pour accrocher un cadre, la rai-son ne leur en est pas systémati-quement donnée...

Il en est de même à la Cour d'Appelde Douai où les agents techniquesont reçu interdiction de déplacer lesmeubles dans certaines salles,pour éviter de créer de la poussièred'amiante, le sol en étant recouvert.Les magistrats non informés, ontcontinué à bouger chaises et tablespendant plusieurs semaines avantde connaître la raison de cetteinterdiction.

Des plaques d'amiante sont égale-ment encore présentes dans l'un desparkings du TGI de Caen. Il y aquelques années, interdiction totaleavait été faite de boire l'eau courantedu bâtiment, du fait de la présencede plomb dans les canalisations.C'est à cette époque qu'avaient étéinstallées des fontaines à eau, dontune seule subsiste aujourd'hui.

Les travaux de la cour et du TGId'Amiens, nécessaires pour accueil-lir les TGI de Peronne etd'Abbeville, ont du être interrompus,du fait de la présence d'amiante.

De même, le TGI de Beauvais,construit en 1972, subit de nom-breuses malfaçons et est amianté.

Bien que le bâtiment du TGI deSenlis soit assez récent, vaste etbien entretenu, il rencontre un pro-blème d'amiante dans les dallesdu sol, ce qui pose problème dans

certaines pièces où les dalles sontabîmées.DES JURIDICTIONS ENTRAVAUX

L'état des juridictions est tel quedes travaux conséquents sont indis-pensables pour tenter de faire res-pecter les termes de la loi etsécuriser les juridictions.Cependant, le coût de ces travauxempêche ou freine leur réalisationcomplète et de nombreux projetsdoivent être reportés.

Ainsi, à Hazebrouck des travauxde mise aux normes d'accès despersonnes handicapées sont pré-vus jusqu'en 2015. A Saverne, 1,2millions d'euros devraient êtreengagés pour l'accessibilité (outrela sécurisation de la juridiction).

La sécurisation de l'installation élec-trique de Colmar est programméepour le printemps 2010.

Des projets de travaux existent parailleurs à Montauban. Un projet deréfection (1,8 million d'euros) duTGI de Digne les Bains a reçul'accord des services immobiliersde la Chancellerie et le dossier esten attente à Bercy (mai 2010). Leprojet de construction d'une citéjudiciaire au coeur de la ville deValenciennes a du être aban-donné, les locaux envisagésn'étant plus disponibles après lesmultiples report du projet. Leslocaux étant trop exigu, le pôle civilva donc être délocalisé dans un4ème site.

Le projet de rénovation du TGI deLille, qui n'est pas aux normesincendie, où des plaques

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d'amiante subsistent, et où toutesles huisseries devraient être chan-gées, est prévu en 2012, pour uncoût de 600 000 euros, hors coûtdu déménagement et de la locationd'un bâtiment pour la durée destravaux.

La création d'une Cité judiciaire àChâlons en Champagne était ini-tialement envisagée pour la miseaux normes, d'accessibilité et desécurité, du Tribunal. Si des crédits"carte judiciaire" ont permis d'obte-nir des investissements supplémen-taires, le million d'euros prévu nepermet ni d'effectuer le changementdes huisseries, alors même qu'ellessouffrent d'importants problèmesd'infiltrations et d'isolation, ni d'êtreassuré que l'ensemble des travauxprévus sera réellement financé.

Des travaux sont nécessairesnotamment pour la mise auxnormes de la sécurité du TPE deMoulins, mais du fait du projetannulé de suppression du TGI, touta été gelé pendant 2 ans. 200 000euros ont déjà été dépensés.Aujourd'hui, malgré les annoncesde déblocage des enveloppes, desinterrogations demeurent quant audélai dans lequel des travaux pour-ront être effectués au TPE et dansla salle de Cour d'Assises. Al'époque, était envisagée une enve-loppe de 750 000 euros : 250 000euros pour la sécurisation des boxet des geôles de la Cour d'Assises,l'accessibilité de la salle, la créationd'un bureau pour l'avocat général etle président de la Cour d'Assises(lorsqu'ils ne siègent pas), 230 000euros pour la sécurisation du TPEet 93 000 euros pour l'indemnisa-tion des entreprises car les travaux

du TPE ont été suspendus. Des tra-vaux sont nécessaires dans l'en-semble du Tribunal : toutes leshuisseries doivent être changées,des ascenseurs pour handicapésdoivent être mis en place,...

Un projet de restructuration du TGIde Laon, nécessitant la restabilisa-tion des fondations du Palais épi-scopal, était en cours depuis 10ans, mais son coût aurait été 2 foissupérieur à celui de la créationd’une nouvelle cité judiciaire. Leprojet a donc été abandonné. Seulela remise aux normes électriques etd’incendie a permis de fairequelques travaux supplémentairesd’amélioration du bâtiment, quireste pourtant peu fonctionnel.

Des travaux de consolidation du TGIde Lons le Saunier sont en courssuite à un affaissement du bâtimentdu fait d'infiltrations d'eaux pluviales.L'accueil prochain du TGI de Dole apermis de faire des travaux d'am-pleur non encore achevés.

Mais les contraintes budgétairessont colossales et les travaux sontsources de désorganisation ouannonciateurs de mauvaises nou-velles telles la suppression depostes. En tous cas, les projets sontnombreux et parfois très longs...

Pendant les travaux de mise auxnormes du TGI de Boulogne surMer, prévus pour 3 ans, notammentpour l'accès aux personnes handi-capées, une annexe a été louée à200 mètres du tribunal. Ainsi, lesservices tournent successivement àl'annexe pendant environ 18 mois,puis, ce sera le Tribunal d'Instancequi y sera transféré pendant la

rénovation de ses locaux.Cependant, cette annexe est tropexigüe et ne comporte ni salle d’au-dience adaptée à l’accueil de nom-breux justiciables, ni geôles, ni sallede visio-conférence. Toutefois,outre les retards annoncés, il sem-ble que les financements ne soientplus suffisants pour envisager laréfection du Tribunal d'Instance.

On ne peut que souhaiter àBoulogne Sur Mer de ne pas subirle même sort que Strasbourg, ins-tallé dans des locaux temporairesdepuis 2007, sans perspectivesd'évolution.

A Châlons-en-Champagne, lacondamnation de l'entrée principalependant les travaux oblige àemprunter un accès arrière, avantde traverser 2 cours successivessans signalétique. La juridiction estactuellement inaccessible aux per-sonnes handicapées et les servicessont dispersés.

Les travaux d'implantation d'unecité judiciaire dans une anciennecaserne classée de Tarascon ontdébuté en mars 2007. Si plusieursservices sont maintenus dans l'an-cien TGI, les services du TPE, duJAP et du TI (après absorptiond'Arles) sont déjà installés dans leslocaux encore en travaux, conti-nuant d'accueillir des servicesmunicipaux. Outre les problèmesliés aux câblages informatiques etaux nuisances sonores, les gref-fiers, magistrats, avocats et justicia-bles sont donc confrontés à unmanque de sécurité. Des désorga-nisations sont attendues du fait denouveaux déménagements à l'inté-rieur de ces locaux au fur et à

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mesure de l'avancement des tra-vaux, ou de l'extériorisation du TIsur un autre site. Les magistratssont contraints de prendre acte desmanques de moyens : un magistratdu TGI de Tarascon, auquel onavait annoncé que la mise en pein-ture de son bureau ne pouvait êtrefinancée que pour 2 des 4 murs, achoisi de repeindre lui même sonbureau...

Des Algecos ont été loués pendantla durée des travaux de regroupe-ment des sites du TGI et du TI dePoitiers, pour un coût de 150 000euros, outre 2000 euros par mois,en cas de retard des travaux.

De même, les Algecos loués pen-dant la durée des travaux du TGIde Saintes, pour accueillir le TI deSaint Jean d'Angely, le Tribunalpour Enfants et le greffe détaché deRoyan, fuient lors des intempéries.Le programme de travaux a pris duretard et les conditions d'accueildes justiciables sont très variablesd'un service à l'autre.

Durant les travaux nécessaires àl'accueil des TGI de Péronne etAbbeville par Amiens, qui ont prisdu retard, l'accès à la juridiction estparticulièrement malaisé pour lespersonnes handicapées. Le TPEest installé dans des algecos dansla cour d'honneur : si des climati-seurs ont du être loués pour pallierl'intense chaleur des locaux, lesutilisateurs des lieux ne se plai-gnent pas : les conditions de travailétaient en effet pires dans lesanciens locaux. Certaines lignestéléphoniques ayant été coupéespendant les travaux, des magis-trats de la Cour sont sans télé-

phone depuis plus de 8 mois...maispeuvent emprunter le téléphoned'un de leur collègue de bureaupuisqu'ils peuvent être jusqu'à 4dans un même bureau.

A Troyes, les locaux sont devenusexigus, suite à la réforme de lacarte judiciaire. Dans l'attente dutransfert du TI sur un autre site, encours de travaux, il a donc fallu ins-taller des Algecos, pour accueillirdes bureaux.

La décision de construction d'unecité judiciaire à Aix en Provence(15ème TGI de France) a été prisemais le budget a été divisé pardeux : 45 millions d'euros seule-ment au lieu de 90. D'où un projetde densification et l'anticipation dela perte, à échéance 2030, de 15fonctionnaires dans un ressortpourtant en hausse exponentiellede population (670 000 habitants en1999 - 750 000 en 2010), même siles contentieux civil et pénal stag-nent. Les effectifs de magistratsdevraient être maintenus en 2030,dont 12 juges d'instruction !!! etmoins de juges généralistes.

Le TGI de Toulon devrait être réin-stallé dans une cité judiciaire en2020, notamment du fait de ladémolition de la Maison d'Arrêtadjacente. Actuellement scindé en3 sites, il rencontre des problèmesde sécurité, d'infiltrations, de clima-tisation (les câbles électriques nepouvant en supporter d'avantage)et de place.

Les membres du TGI de Caen, dontde nombreux bureaux sont interditsd'accès en raison d'un risque d'ef-fondrement, qui est entouré d'écha-

faudages pour éviter la chute depierres sur les passants depuis 5ans, espèrent depuis des décen-nies la création effective d'un nou-veau palais. En attendant, les filsélectriques continuent à pendredans certaines salles d'audience,les seaux recueillent l'eau de pluie,des morceaux de faux plafond chu-tent, des poutres porteuses mon-trent des signes de faiblesse...

Un projet de construction d'un nou-veau TGI à Mont de Marsan estenvisagé, pour un coût de 18 mil-lions. Ce projet avait déjà été déclaréprioritaire par Alain PEYREFITTEen...1978 ! Et un terrain a été acquispar le Ministère de la Justice en1989... Au cours d'une visite,Rachida Dati avait indiqué qu'il fallait"voir grand" mais aujourd'hui, le pro-jet n'intègre plus le Tribunald'Instance, le Tribunal de Commerceet le Conseil de Prud'hommes.

Même les bâtiments rénovés ounouvellement construits sont sou-mis à d’importantes difficultés.

Ainsi le TGI de Toulouse construittrès récemment, subit d'impor-tantes malfaçons. Des bureauxont des fissures et un très grosdégâts des eaux est survenu,entraînant l’effondrement d'un pla-fond, heureusement au cours d'unweek-end. Le bâtiment est néan-moins esthétique mais sembleavoir été « construit pour la duréede la garantie décennale », selonses utilisateurs.

Les locaux du TGI d’Avesnes surHelpe n’ont que 3 ans mais subis-sent d’importantes infiltrations, soitdu sol par capillarité, soit des

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terrasses. De nombreux seaux sontdonc installés dans le TGI.

Les seaux sont également indis-pensables en cas de pluie àBethune, dans les escaliers et surl’une des passerelles, sous une ver-rière, menant à l’audiencement. AGrenoble, le palais de justiceouvert en 2002 souffre égalementde fuites en divers endroits, d’où laprésence de seaux dans les cou-loirs et les bureaux.

L'état des locaux du TGI deDraguignan, construit en 1982 etdont la façade en bois n'a pas étéentretenue depuis l'origine, sedégrade, du fait notamment defuites non réparées.

Malgré les travaux de rénovationdes locaux du TGI de Béziers (pourun coût de 600 000 euros), la créa-tion d’une nouvelle cité judiciaire esten projet.

Le TGI de Briey est grand et fonc-tionnel mais ne dispose pas de cré-dits pour l’immobilier : un morceaude la façade est tombé suite à unincendie de poubelles mais ne peutêtre réparé.

LES SCELLÉS ETARCHIVES DIFFICILEMENTGÉRABLES

Les scellés sont les objets néces-saires à la manifestation de la vérité,saisis dans le cadre d’une procé-dure pénale, et, pour la grandemajorité transmis par les enquêteursavec les procès-verbaux à la juridic-tion, et déposés au greffe.

Certains scellés, en raison de leurvolume (véhicule, avion...), de leurnature (animaux ou prélèvementshumains) ou du danger qu'ils peu-vent représenter (explosifs) peu-vent faire l'objet d'un gardiennage.

Dans un de ses rapports, l'inspectionGénérale des Services Judiciairesrelevait que "la conservation desscellés est gérée comme on met aurebut un bric-à-brac dont on ne veutni se préoccuper ni se séparer". Lesscellés, toujours cachetés à la cire,sont gérés manuellement au moyende liasses papiers, en l'absenced'outil informatique.

Régulièrement, des faits divers rap-pellent ces difficultés au souvenirdes médias. Ainsi en a-t-il été desscellés relatifs à la mort de RobertBoulin en 1979, retrouvés au boutd'un mois, de ceux en lien avec l’af-faire des disparus de l’Isère en1983, non retrouvés pour certains.

En août 2010, suite à cette affaire,la Ministre de la Justice a annoncéla mise en place d'un système decode-barres et a demandé aux juri-dictions de dresser le relevé desscellés. Elle souhaite égalementque les scellés inutiles soientdétruits plus rapidement, notam-ment les armes et munitions, et lesstupéfiants, par l'intermédiaired'établissements de la SécuritéCivile, de la Douane et par la créa-tion de l'Agence des biens saisis au1er janvier 2011.

Pour autant, les problèmes de ges-tion des scellés, objets particulière-ment sensibles, subsistent etnécessiteraient de réels moyens.

Les scellés du TGI d’Avesnes surHelpe sont stockés dans unimmeuble à l’hygiène particulière-ment déplorable : rats, humidité,problèmes d’éclairage… les fonc-tionnaires ayant fait valoir leur droitde retrait, un nouveau local a étéenvisagé mais le projet a été entiè-rement remis en cause du fait desprojets immobiliers pour la réformede la carte judiciaire.

Des problèmes similaires se rencon-trent à Poitiers, La Roche Sur Yon,Angoulême, Amiens, Caen,Cambrai, Valenciennes,Hazebrouck, Aix en Provence...

L’absence de gestion efficiente etsécurisée des scellés se traduit pardes disparitions : une arme à étévolée à Boulogne sur Mer, un cou-teau à Dunkerque,

Au-delà des problèmes matériels, lagestion des scellés pose égalementdifficulté, tant le manque de fonc-tionnaire affecté à cette tâche peutêtre insuffisant : il en va ainsi àBethune, Hazebrouck

Le coût de la gestion des scellés peutêtre tellement déstabilisateur pourune petite juridiction que des choixdoivent être effectués : c’est ainsi quele coût du gardiennage du fourgon deMichel Fourniret (dans lequel ses vic-times ont été séquestrées, violées ettuées) étant trop important, le véhi-cule reste entreposé dans la cour dupalais de Charleville Mézières, aumilieu du parking du personnel… Ilne peut être détruit, puisqu’une ins-truction demeure en cours au TGI deParis, qui pour des raisons de placeet de coût, ne veut le récupérer.

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Les archives des dossiers traitéspar les juridictions et des décisionsrendues sont extrêmement volumi-neuses. Leur gestion ajoute auxproblèmes de place déjà évoqués.

Les TGI de Mulhouse, Troyes,Poitiers, La Roche Sur Yon, Metz,Angers, Brest, Quimper, Auch,Saumur, Caen, Troyes, LesSables d'Olonne peinent àstocker leurs archives de manièreefficace et sécurisée. Lesarchives s’entassent dans lesbureaux, et parfois même dansles couloirs, ce qui augmente lesrisques en cas d'incendie.

Les juridictions sont alors amenéesà louer des centres d’archivage : àReims (de sorte que 4 à 5 jourssont nécessaires pour récupérer undossier archivé) ; aux Sablesd’Olonnes ; à Douai (où elles nesont pas classées) ; à Vannes ; àBoulogne Sur Mer, les archivessont stockées sur plusieurs sites.

Lors du déménagement du TGI dePéronne, il a été demandé de trans-férer toutes les archives, y comprisde 2009, dans le nouveau centred’archivage d’Amiens, moderne etgéré informatiquement. Il a éténécessaire d’empêcher les déména-geurs d’y emporter toutes lesarchives 2009, y compris les dossiersencore en cours (dossiers tutelles…).

Le TGI de Colmar rencontre d’im-portants problèmes d'archivage.Une partie des archives est stockéeà l'extérieur du tribunal, pour uncoût prohibitif, et l'état-civil estconfié à une entreprise de garde-meuble.

Le TGI de Strasbourg stocke sesscellés dans un ancien bâtimentmilitaire, et ses archives dans unsilo, loué 7000 euros par mois. Maisces deux bâtiments prennent l’eau.

Le TGI de Digne les Bains entre-posait jusqu'alors ses archives dansun bâtiment appartenant à la Mairie.Du fait de la démolition de celui-ci,les archives sont désormaisstockées dans les couloirs d'unbâtiment pourtant particulièrementdégradé.

Les archives du TGI d’Avesnes surHelpe ont été installées dans lenouveau palais mais ont été totale-ment inondées du fait d’infiltrationsd’eau. La perte d'un dossier auraitpu engager la responsabilité del’Etat.

Et ces exemples ne sont pasexhaustifs…

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LA SÉCURITÉ

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Les magistrats, greffiers et fonc-tionnaires reçoivent quotidienne-ment, dans leurs bureaux et lessalles d'audience, des justicia-bles souvent agressifs, mena-çants, alcoolisés ou atteints depathologies diverses...

Suite aux agressions d'une gref-fière brûlée vive par une justicia-ble, et d'un juge des enfantspoignardé par une mère defamille, au suicide d'un accuséen Cour d'Assises, les person-nels de justice s'étaient très for-tement mobilisés pour dénoncerl'absence totale de sécurité desjuridictions. En 2007, 20 millionsd'euros ont été débloqués, pourmoitié pour la mise en place deportiques de détection de métauxet d'équipe de sécurité, et pourl’autre moitié pour le finance-ment de travaux immobiliers.

Force est de reconnaître que leséléments de sécurité ont été instal-lés avec célérité et se révèlent effi-caces et nécessaires. En effet, demultiples armes sont interceptéeset les agents de sécurité intervien-nent régulièrement pour faire ces-ser des situations dangereuses,désamorcer les conflits, voiremême pour orienter les justicia-bles entre les différents services.Jusqu'alors, il n'avait pas été rarede croiser des justiciables prèsdes bureaux des magistrats etgreffiers, y compris à des heurestardives les jours d'audiences.

Selon la recommandation n°R(94) 12 du Comité des Ministresaux Etats Membres relative à l'in-dépendance, l'efficacité et le rôledes juges (adoptée par le Comitédes Ministres le 13 octobre 1994,lors de la 516ème réunion desDélégués des Ministres), « toutesles mesures nécessairesdevraient être prises afin de veil-ler à la sécurité des juges, notam-ment en assurant la présence degardes dans les locaux des tribu-naux ou en faisant protéger par lapolice les juges qui peuventdevenir ou sont victimes degraves menaces ».

On ne peut dès lors que s'émou-voir du projet porté par leMinistre de l'Intérieur, et reprispar le Ministre de la Justice, ten-dant au désengagement desforces de police des juridictionsalors même que parallèlement,les budgets ne permettent sou-vent plus de renouveler lescontrats avec les sociétés pri-vées de sécurité.

L'USM est très vigilante sur lemaintien de la sécurité et n'hési-tera pas, si celle-ci n'était pasassurée en janvier prochain, àappeler à l'exercice du droit deretrait.

Le Tribunal de grande instanced’Ajaccio vient de rouvrir, début sep-tembre, sur son site d’origine, en pleincentre ville, après plusieurs années

de travaux de réhabilitation etd’agrandissement au cours des-quelles les magistrats ont été dansdes locaux provisoires de typeAlgéco, dans la périphérie de la ville,éloignés de tout. Les très gravescarences de sécurité du bâtiment pro-visoire qui avait été mitraillé, et l’inter-vention de l’USM, indignée de lasituation des magistrats et fonction-naires, miraculeusement indemnes,avait amené le ministère à doublerl’avant de ce bâtiment provisoire devitres blindées.

Entièrement reconstruit, et tenantcompte de l’expérience du passé, lenouveau bâtiment est gardé 24heures sur 24 heures par des CRS.Les vitres des bureaux donnantaccès sur la rue sont blindées.L’intérieur du bâtiment est pour sapart sous la surveillance d’unesociété de gardiennage qui contrôleégalement les entrées dans lepalais (portique de sécurité).L’accès du public est contrôlé dansles salles d’audience et les locauxdu greffe et des magistrats par lebiais de ladite société.

Chaque magistrat et fonctionnairedispose d’un badge qui permet l’ac-cès sécurisé à chacun des locauxdu greffe et à chacun des bureaux.

L’entrée des magistrats et fonction-naires se fait par une ouverturedédiée dans le palais, composéed’un double sas, dont l’accès n’estpossible que par le badge sécurisé.

LA SÉCURITÉ

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On ne peut que se réjouir que lesmultiples interventions de l’USMaient enfin amené les pouvoirspublics à offrir aux magistrats deCorse du sud des conditions desécurité dignes de ce nom.

On ne peut également que se féli-citer des efforts déployés dansles autres juridictions pour sécu-riser les juridictions et, par làmême, les personnels, collabora-teurs de justice et justiciables.

Cependant, au delà des inquié-tudes pour la pérennisation desinstallations et des services desécurité, au regard de leur coût,des juridictions demeurent insuf-fisamment sécurisées.

La future sécurisation des juri-dictions et des personnels inter-roge également puisque leMinistre a annoncé le retrait desservices de police pour lesescortes et la présence auxaudiences en 2011.

DES JURIDICTIONS INSUF-FISAMMENT SÉCURISÉES

Seul l'un des trois sites du TGId'Evreux dispose d'un accueilsécurisé. Les Juges de l'Applicationdes Peines vont devoir s'installer,du fait de l'absorption du TGI deBernay, dans des locaux inadaptésà l'accueil du public.

A Troyes, alors qu'aucun portiquene semble prévu pour le futur TI, leslocaux de l'Application des Peines,installés dans d'anciennes écuries,séparées du reste du TGI, ne sontpas sécurisés. Les Juges

d'Application des Peines ne dispo-sent que de Talkies Walkies (!) pourappeler le service de sécurité.

De même, à Thionville, seule l’en-trée principale dispose de portiquesde sécurité (et non le site secon-daire). La juridiction ne dispose enoutre d’aucun système anti-intru-sion. A Angers, seules 2 des 3entrées pour le public disposent deportiques.

A La Rochelle, un seul des 5 sitesdispose d'un portique de sécurité,de sorte que les entrées des ser-vices de l'instance, du TPE et duJAF ne sont pas filtrées, alorsmême que ce sont les services oùles agressions sont majoritaires.

Le TGI et le TI de Colmar disposentd’un portique de sécurité et d’unappareil de contrôle des sacs pourle TGI, pour un coût annuel de108 000 euros, soit 25 % du budgetde fonctionnement.

Le coût du fonctionnement des por-tiques de sécurité de Belfort estégalement très important par rap-port au budget contraint de la juri-diction.

Au TGI de Pau, des portes à codeont été installées à l’instruction.Mais, 10 mois après cette installa-tion, elles ne sont toujours pasmises en fonctionnement et n’em-pêchent donc pas le public d’accé-der aux locaux. Par ailleurs, lemanque d’insonorisation permet aupublic d’entendre le déroulementdes actes dans le cabinet du juged’instruction.

A Versailles, il n'existe pas de

sécurisation au niveau des étages ;les couloirs des Juges des Libertéset de la Détention et des Jugesd'instruction sont ainsi accessiblessans badges.

La configuration des locaux ne per-met souvent pas leur sécurisationefficace.

La partie du TGI d'Aix enProvence installée dans des pré-fabriqués est soumise à desdysfonctionnements. Le bâtimentn'est pas conforme aux normesde sécurité et une partie est inter-dite d'accès au public : le plafondde la salle réservée aux témoinss'effondre et la pièce est donccondamnée. Les témoins patien-tent à l'extérieur. Des morceauxde plâtre tombent au cours desactes.

Au Havre, une grille a été installéepour assurer la sécurité.Cependant, elle est ajourée etlaisse un espace de 80 cm entreelle-même et le plafond, permettantainsi son escalade.

La salle d’assises du TGI deMontauban n’est pas sécurisée. Siun portique est effectivement ins-tallé pour l’accès au TGI, il resteinutile pour la salle d’assisespuisqu’il faut repasser par la ruepour y accéder… Des travaux sontprochainement prévus.

Devant le TI de Manosque, dépen-dant du TGI de Digne les Bains,existe un immense parvis, zone desdealers… Ainsi en l’absence devigiles et de concierges au TI, lesjeunes se réunissent dans le hall duTI où des dégradations (notamment

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des vitres brisées par des tirs depistolet) et des violences sont com-mises. Le personnel (1 juge et 4greffiers) est obligé de travaillerdans un climat de crainte.

De même, le TGI de Montbeliard,situé au cœur d’une cité sensible,est confronté à des problèmes desécurité : un coktail molotov a étéjeté dans une salle d’audience fin2009 et la porte d’entrée dutribunal a été dégradée à la fin del’année 2009. Les choses se sontcependant apaisées et lesaudiences sont moins tenduesdepuis qu’une société privéeassure la sécurité à l’entrée de lajuridiction.

Le Tribunal Pour Enfants (TPE) deMoulins est le seul service du TGIcomportant un portique. Mais dufait du manque de crédits, uneseule personne est présente poursurveiller et faire fonctionner ceportique. Or, le seul accès au TPEest un grand escalier en bois de 3niveaux, ne desservant que ce ser-vice, en bas duquel est installé leportique de sécurité. Ainsi, en casde difficulté au TPE, il faut monter3 étages ; l'agent de sécurité nepeut à la fois surveiller l'entrée dubâtiment et le TPE. Par ailleurs, ilest très facile de sauter de l'esca-lier...alors qu'il s'agit d'un conten-tieux éminemment difficile etsoumis aux tensions. Il n'y aaucune sécurité dans le reste dubâtiment. Il n'y a aucune salle d'at-tente (sauf au TPE), ni aucun lieude convivialité (pas même uneseule machine à café).

Au contraire, si le TGI de ClermontFerrand est « bunkerisé », par des

badges de sécurité nécessaires àl’entrée dans chaque service, cettesécurisation paraît peu cohérente :des contournements sont possi-bles, notamment par le tribunald’instance ; on ne peut plus entrerdans le TPE après en être sorti,après 17heures ; on ne peut accé-der au TPE entre 12h et 14heures,y compris avocats et éducateurs ;un bouton d’alarme a été installédans le bureau d’étude des dos-siers de l’instruction mais pas dansles bureaux où des justiciablessont entendus….

DES TRIBUNAUX D'INS-TANCE NON SÉCURISÉS

De nombreux TI ne sont pas sécu-risés, en l'absence de finance-ment, alors même que cesjuridictions, souvent séparées desTGI, accueillent un public difficile,souvent socialement ou intellec-tuellement démuni, voire mêmeatteint de lourdes pathologiespsychiatriques.

Pourtant, tous les bureaux sont des-tinés à recevoir le public et de nom-breuses audiences se déroulentdans les locaux des tribunaux d'ins-tance : audiences civiles d'instance(y compris les résiliations de bail),de proximité, de baux-ruraux, desaisies arrêts, audiences de tribunalde police, auditions de personnesprotégées...

Le TI de Montauban ne disposepas d’un système de sécurité. Lesvigiles acceptent cependant de sedéplacer ponctuellement à l’ins-tance (de même qu’au TPE) en casde dossiers difficiles.

A Saint Nazaire, le TI ne disposepas d’un portique de sécurité ; lesystème d’alarme anti-intrusionfonctionne mal et était, lors denotre visite, en cours de répara-tion ; l’alarme anti-agression estinefficace car elle ne permet pasd’identifier le bureau appelant, endétresse.

Le TI de Belfort, installé dans leslocaux de la Mairie, n’est passécurisé.

A Tarascon, la future cité judiciaire,dans laquelle sont déjà installés lesJuges d'application des peines, lesJuges des enfants et le tribunald'instance, accueille encore desservices municipaux et leurs diversusagers. De ce fait et du fait des tra-vaux en cours, il est difficile d'assu-rer la sécurité du personnel et desjusticiables. Une juge des enfants aainsi été agressée physiquementdébut 2010.

Il en va également, notamment,des TI de Maubeuge (où unemagistrate a pourtant été victimede violences en mai 2010),Avesnes Sur Helpe, Liévin (oùun pavé a été jeté dans la vitre dubureau du juge d'instance),Béthune, Lens, Boulogne,Valenciennes, Reims, Fontenayle Comte, Les Sables d'Olonne,Bressuire, Niort (ce qui a poséproblème en période électoralelors des permanences tardives),Sarlat, Bayonne, Mont deMarsan (2 des 3 sites), Agen(pôle civil), le Puy en Velay, SaintOmer, Paris, Vesoul (la fermetured'un accès par le parking résou-drait ce problème mais est troponéreuse), Lons le Saunier.

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LA PÉRÉNISATION DESFINANCEMENTS DESSOCIÉTÉS DE SÉCURITÉEN SUSPENS

La question du maintien du finance-ment des sociétés de surveillance sepose dans de nombreuses juridic-tions : Thionville, Sarreguemines(coût de 86 000 euros par an),Poitiers, La Roche Sur Yon, lesSables d'Olonne, La Rochelle,Saintes, Angers, Angoulême,Vannes, Lorient, Auch (où un jugedes enfants a été agressé il y a 18mois), Agen, Soissons, Brest,Laval, Abbeville, Versailles,Béthune, Boulogne Sur Mer…

Après la suppression du TGI deRochefort, il n'est pas certain queles personnels dédiés à la sécuritéseront maintenus pour le Tribunald'Instance, le Conseil dePrud'hommes, l'antenne du SPIP etles éventuelles audiences foraines,demeurant sur le site. Les mêmesinterrogations se posent pour lasuppression du TGI de Saumur etle maintien de son TI.

De même, la juridiction de Savernedoit faire un choix : soit elle paie lasociété de sécurité mais ne peutalors plus accueillir de vacatairespour l’implantation de Cassiopée,soit elle accepte les caméras vidéosproposées par la cour en remplace-ment du personnel…pourtant, ledispositif de sécurité a montré sonefficacité puisque des armes sontrégulièrement confisquées (35depuis le début de l'année, dont,une baïonnette sur un poing améri-cain) et un individu a pu être arrêtéalors qu’armé d’un couteau, il disait

« vouloir faire la peau » duProcureur et du juge des tutelles...

Avant l'été 2010, il avait été indiquéque faute de crédits, les contrats desécurité des TGI du ressort de laCour d'Appel d'Amiens pourraientêtre résiliés à compter du 30 sep-tembre 2010. Il a été demandé auxchefs de juridiction de recruter desréservistes de la police (vacataires)et non des réservistes de l’adminis-tration pénitentiaire qui seraientconsidérés comme des EquivalentsTemps Plein Travaillés (ETPT) sup-plémentaires. Après médiatisationde ces difficultés par l'USM, descrédits supplémentaires ont étédébloqués.

A Saint Quentin, le contrat desécurité a finalement été renouveléen septembre malgré les craintes,mais avec une limitation des ampli-tudes horaires de présence desvigiles.

A Laon, le contrat a été reconduitdu 1er octobre au 31 décembremais le vigile ne sera plus présentle week-end et l’effectif du servicede sécurité sera diminué de 4 à 3personnes.

A Limoges, les organisations syn-dicales de magistrats et fonction-naires dénoncent la suppressionou le redéploiement, à compter du1er janvier 2011, des agents desécurité. Cette annonce est d'au-tant plus choquante qu'elle a étéeffectuée concomitamment à celledu renforcement du plan vigipirate.Au 1er octobre 2010, la juridictionde Limoges a accueilli 10 693 jus-ticiables ; 767 armes ont été sai-sies et il a fallu une dizaine

d'interventions (par la police et lesagents de sécurité)

LES CONSÉQUENCES DELA SÉCURISATION DESJURIDICTIONS SUR LETRAVAIL JURIDICTIONNEL

Les dispositifs de sécurité, aussiutiles soient-ils, ont des répercus-sions sur le fonctionnement des juri-dictions ou le travail despersonnels.

Les magistrats doivent ainsi impé-rativement quitter le TGI deStrasbourg avant 19 heures, heurede fin du service de sécurité

Certaines audiences se terminentsans sécurité: les vigiles deSarreguemines terminent leur ser-vice à 18 heures même si lesaudiences correctionnelles, du jugedes tutelles ou du TPE se prolon-gent au-delà ; de même à Cusset,où les vigiles quittent la juridiction à17 heures ; ou à Beauvais et Laonoù les vigiles quittent la juridiction à18 heures ; à Mont de Marsan, lesagents de sécurité quittaient leurservice à 17 heures, soit avant la findes audiences et une renégociationdu contrat a été nécessaire pourpermettre le prolongement de leurprésence les jours d'audience encontrepartie d'un raccourcissementde leur temps de présence lesautres jours.

A Dignes les Bains, le coût desheures supplémentaires des vigilespour la durée des audiences tar-dives est important.

Les TGI de Besançon et Dole, dont

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le fonctionnement des portiques estassuré par une société privée dansle cadre d’un contrat régional, réflé-chissent à une nouvelle organisa-tion de leur juridiction, notammentpar des audiences moins tardives,afin de diminuer le coût lié auxheures supplémentaires des vigiles.

DES AUDIENCES NONSÉCURISÉES

Les audiences ne se déroulent pastoujours en présence d’escorte poli-cière : Sarreguemines, Dignes lesBains (audiences à juge unique,régulièrement), Beauvais (sauf auxassises ; ce sont alors les substitutsqui reconduisent le public à l’exté-rieur après les audiences, fermentles portes et éteignent leslumières !), Boulogne sur Mer(depuis le 1er mars 2010), Angers,Niort, Amiens, Mont de Marsan (ilne s'agit pas d'une priorité des ser-vices de police), Pau (où le policierqui assure l’accueil ou un vigilevient s’assurer du bon déroulementdes débats de temps en temps),Vannes, Lorient, Auch (juge uniquecorrectionnelle), Agen, Grasse,Cambrai, Arras, Versailles (le ser-vice de sécurité fait des rondes pen-dant les audiences).

Aux Sables d'Olonne et à Dignesles Bains, les escortes sont seule-ment présentes en correctionnellecollégiale et non lors des audiencesà juge unique.

Il n’y a ainsi pas de gardes àColmar, mais il est possible de sol-liciter une escorte lorsqu’uneaudience risque de poser difficulté.A Strasbourg, aucun policier n’est

présent en dehors des sessionsd’assises, de sorte que les jugesaux affaires familiales audiencentlorsqu’une session d’assises est encours.

A Belfort, la police nationale estprésente aux audiences correction-nelles mais peu réactive…si cen’est pour demander à un prévenude ramasser le caillou qu’il avait jetésur le président de l’audience cor-rectionnelle.

Les parquetiers de permanence etle substitut des mineurs du TGI deBesançon ne disposent pas d’unbouton d’alarme dans leur bureau.De même à Dunkerque, àCharleville-Mézières, et dans tousles bureaux du TGI de La RocheSur Yon, La Rochelle (le systèmed'alarme ne fonctionne pas),Bressuire (le système n'a pas étéréparé), Poitiers (sauf au TPE),Saintes. A Angers, le systèmed'alarme du TPE est relié au com-missariat mais les policiers nesavent pas d'où provient l'appel, àGrasse (le service de l’applicationdes peines n’est pas sécurisé).

LA SÉCURITE INCENDIEDEFECTUEUSE

La sécurité incendie n'est pas assu-rée dans de nombreuses juridictions.

Le TGI d'Aix en Provence est dan-gereux en cas d'incendie, faute detrappes de désenfumage des esca-liers. Des portiques de sécuritésont installés et surveillés par unservice de gardiennage privé,comme dans toute la cour d'appeld'Aix. Les portes du TGI ferment

cependant à 17h30, ce qui poseproblème pour la publicité desaudiences.

La « tour » des années 70 du TGIde Lille, n'est plus du tout auxnormes incendie, notamment dufait de l'archivage dans les étagessupérieurs. En cas d'incendiedans les archives toute la tours'effondrerait.

Les TPE de Mont de Marsan,Moulins, ne sont pas réellementsécurisés contre l'incendie du faitde la configuration des lieux.

Les juridictions plus récentes nesont pas épargnées : le TGId'Avesnes sur Helpe pourtantinauguré en 2007, suite à construc-tion pour un montant de 21 millionsd'euros, a été menacé de fermetureen mars 2010. En effet, en cas d'in-cendie, un important risque d'as-phyxie est encouru du fait de laconcentration des fumées, au pre-mier étage, où se trouvent de nom-breux bureaux et les salles pour lesaudiences de famille. Le problèmea du être réglé, notamment par l'ins-tallation d'extracteurs de fumées.Par ailleurs, le TGI a été construitautour de la sécurité, à la demandede la chancellerie et le coût du fonc-tionnement du service de sécurité,confié à une société privée, est de300 000 euros par an. Cependant,à titre d'économies, il est mainte-nant nécessaire de réduire l'ampli-tude horaire d'utilisation dubâtiment et le contrat avec lasociété privée ne sera sans doutepas renouvelé après 2010.

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LE BUDGET DE LA JUSTICE

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La Chancellerie se félicite régu-lièrement de l'augmentation dubudget de la Justice. Pour 2011,le budget a été annoncé enhausse substantielle : + 4,15 %,ce qui pourrait apparaitre dansun contexte de crise économiqueet budgétaire comme une excel-lente nouvelle.

Mais cette nouvelle n’est pasaussi excellente qu’il n'y parait.

Tout d’abord depuis des annéesles budgets sont annoncés enhausse (+ 14 % par rapport à2007 peut on lire) et pourtantjamais les juridictions n’ont été àce point en état de quasi faillite.

Chacun sait en outre ce qu’il enest des reports et des annula-tions de crédits.

Enfin si augmentation il y a, ilfaut la mettre en parallèle avecl’augmentation des recours à lajustice, plus encore en situationde crise.

Le Ministre de la Justice sembleprendre conscience de la misèrede la Justice en France, commeen témoigne son audition auSénat du 21 juin dernier à l’occa-sion du débat sur le règlementdes comptes et du rapport degestion pour l’année 2009 :« Tout d'abord, je rappelle queles budgets sont désormaistriennaux, et que je suis arrivée à

la Chancellerie en cours d'exer-cice. Le budget du ministère estla conséquence d'une situationancienne, la Chancellerie n'ayantpas bénéficié sur la longue duréedes mêmes efforts que d'autresministères. L'activité de la justicea sensiblement augmenté : de2002 à 2008, le nombre d'affairesciviles a augmenté de 58 %, lesdécisions en matière pénale, de10 %, tandis que le taux deréponse pénale passait de 68 % à85 %. Or, parallèlement, le budgetn'a augmenté que de 5 %... »

« Le problème des tutelles, trèschronophages, est réel : cetteréforme n'a pas été accompa-gnée de la création de postes demagistrats correspondants, etson impact financier n'a pas étémesuré ».

« L'an dernier, les juridictionsétaient dans le rouge dès juillet.Nous avons réussi à débloquerdes crédits et à finir l'année enlimitant les reports. Le dégelobtenu en mars a évité d'accu-muler les retards. Nousdevrions obtenir les moyensnécessaires pour répondre auxbesoins des juridictionsjusqu'à la fin de l'année, d'au-tant que nous avons renégociédes contrats avec les opéra-teurs extérieurs. C'est unecourse permanente entre notrecapacité à réduire les coûts etl'augmentation des volumes ! »

« Je l'ai dit ce matin au Premierministre, si chacun doit consentirdes efforts, certains avaient vuleurs crédits augmenter plus qued'autres depuis cinquante ans.En outre, l'évolution de la sociétéa entraîné une augmentation del'activité ».

Faire ce constat est une bonnechose, changer en profondeur lasituation et doter la Justice d’unbudget digne d’un pays comme lenotre en est une autre. Même sides efforts sont faits, ils sont mani-festement largement insuffisants.Comme tous les ans, l’essentieldes augmentations budgétairesqui permettent d’accroitre lesmoyens matériels et de créer despostes est affecté à l’administra-tion pénitentiaire. Il est évidentque compte tenu de l’état de nosprisons et de la politique pénalemenée, un effort massif doit êtremis en œuvre en ce domaine.

Les augmentations du budgetdes services judiciaires restentquant à elles trop limitées pourfaire rattraper les retards dupassé et faire face à des mis-sions en hausse.

Au delà même de ces observa-tions, les constats européenssont identiques.

En effet, dans son rapport 2010sur la qualité de la Justice, laCommission Européenne pour

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l'Efficacité de la Justice (CEPEJ)souligne que :

- alors qu'il y a 2 ans, la Franceétait déjà classée au 35ème rang,elle n'est aujourd'hui plus que37ème sur 43 pays, pour le bud-get public annuel total alloué ausystème judiciaire (tribunaux,ministère public et aide juridic-tionnelle) rapporté au ProduitIntérieur Brut (PIB) par habitant.

Elle se situe ainsi derrière laFinlande, l'Azerbaïjan, l'Arménie...

- le budget total annuel allouéaux services judiciaires n’a aug-menté en France que de 0,8%entre 2006 et 2008. Dans le mêmetemps, ce budget augmentait de26,8 % en Espagne de 24,5 % auPortugal, de 20,1 % en Autriche,de 10,3 % en Belgique et de 7,7 %aux Pays Bas, la moyenne euro-péenne étant fixée à 17,7 % !

La CEPEJ relève même dans sonrapport que « la France note uneffet de ciseaux sur le budget dela justice judiciaire, entre uneévolution négative ou stagnantedes crédits et une évolutioncroissante des besoins, qu'ils'agisse des personnels, des cré-dits de fonctionnement ou desfrais de justice ».

DES DÉPENSES IMPAYÉES

Les juridictions se voient allouer unbudget de fonctionnement, destinéaux dépenses courantes, ainsiqu’un budget pour les frais de jus-tice, qui correspondent au coût desdifférentes procédures, pris encharge par les juridictions.

Les frais en matière pénale repré-sentent plus de 60% des dépensesglobales. Ils constituent parfois desdépenses contraintes, car liées àdes actes de procédure obligatoires(par exemple, les expertises psy-chiatriques obligatoires en matièrecriminelle, en matière d'infractionssexuelles, ou pour les mis en causesous protection de justice, les exa-mens médicaux de droit pour lespersonnes gardées à vue…).

Surtout, ce sont des dépenses qui,souvent, ne sont pas décidées parles magistrats eux-mêmes (parexemple lorsqu'elles sont induitespar un placement en garde à vue,décidé par un Officier de PoliceJudiciaire)

Selon la Chancellerie, une revalori-sation du tarif des frais médicaux estintervenue. De même, dans ledomaine des réquisitions adresséesaux opérateurs de téléphonie et enmatière d'analyses génétiques, lesdépenses ont été diminuées par desmarchés.

Ces revalorisations des tarifs d'ex-pertises pourraient être bénéfiquessi le problème essentiel ne demeu-rait pas lié à l'effectivité du paiementdes experts...

En effet, l'Etat n'est pas bon payeuret s'adonne à ce qui ressemble énor-mément à de la cavalerie financière :incapable de payer ses interlocu-teurs, il les oblige à patienter, parfoisde nombreux mois, avant d'honorerses dettes sur le budget de l'annéesuivante, grevé d'autant, dès ledébut de l'exercice budgétaire.

Cette absence de paiement est insti-

tutionnalisée puisque dans le projetde budget pour l'année 2011, leMinistère indique que depuis 2006,60% des mémoires (factures) del'année sont payés dans la mêmeannée et 40 % le sont dans lesannées suivantes. Pire, pour 2011, ilest estimé que 55% seulement desmémoires seront payés dans l'annéeet 45 % dans les années suivantes.

Dans toutes les juridictions, lesmoyens alloués sont notoirementinsuffisants et les magistrats peu-vent avoir le sentiment que toutedépense est susceptible de leurêtre reprochée.

Un dossier d'instruction particulierpeut nécessiter des frais particuliè-rement importants et en consé-quence grever l'enveloppe globaledestinée aux frais de justice.

Le TGI de Montargis a été en ces-sation de paiement dès octobre2009. Au vu des budgets allouéspour 2010 (diminution de 40% del’enveloppe de crédit, déjà trèsjuste), une cessation de paiementétait crainte à compter de juin. Celacréé des problèmes pour les fraisde justice et les frais de fonctionne-ment. Il était alors envisagé que lesavocats fournissent leur papier pourles photocopies de pièces.

A Tours, l’enveloppe 2010 pour lesfrais de justice a été diminuée de10% par rapport à l’année passée.En 2009, la juridiction n’a plus pufaire face à ses dépenses (1,7mil-lions d’euros ) à compter de sep-tembre (l’enveloppe était de 1,260Millions d’euros).

De même, à Blois, l’enveloppe

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globale de 2010 a été diminuée de30% par rapport à celle de 2009A Nice également. A Montbelliard,la dotation initiale a été réduite de14% mais une dotation complémen-taire a été attribuée fin mai. Des éco-nomies ont dû être faites sur lescodes et les jurisclasseurs. A Senlis,le budget de fonctionnement est enbaisse. Sans abondement supplé-mentaire, il n'y aura plus de créditpour l'électricité et le chauffage au4ème trimestre 2010. A Bergerac,les crédits ont été diminués d'un tiersen 2010. A Compiègne, le budgetnettoyage est à la baisse. Le budgetde fonctionnement courant ne per-met pas de gérer les dépenses obli-gatoires. La dernière facture de gaz(chauffage) ne pourra pas êtrepayée. C'était déjà le cas en 2009 etcette année le budget a été réduit de15 000 euros. A Moulins les paie-ments ont été interrompus le 30 sep-tembre 2009 pour l'année 2009. Lacour d'appel de Metz n'a obtenu que60% du budget sollicité. Le TGI deMontluçon avait été en cessation depaiement en octobre 2009. Cetteannée, la cessation de paiementintervient courant septembre.

Au TGI de Cusset, les dépensesnon obligatoires ne bénéficient plusde budget, alors que 1200 eurosseraient nécessaires pour mettre ensécurité la chaudière, que la char-pente devrait être traitée et que letribunal ne peut être chauffé l'hiver.Quant aux frais de justice propre-ment dits, ils sont bloqués depuisplusieurs mois : le tribunal était encessation de paiement, pour l'an-née 2009, dès septembre. Bien quedes fonds aient été débloqués, lesexperts n'ont pas été payés pen-dant plusieurs mois.

L’enveloppe du Tribunal d’Instancede Briey a été diminuée de 20%alors même que cette juridiction aabsorbé le TI de Longwy. Un petitbudget permettait auparavant dediligenter des enquêtes sociales oud’avancer des frais de certificatsmédicaux en matière de tutellespour les personnes indigentes (celaconcernait 20 à 30 mesures par an)et ces avances étaient ensuiterecouvrées par le Trésor Public.Cependant, ces dépenses ne sontplus possibles, au détriment desjusticiables les plus fragiles.

Il manque 2 millions d’euros à laCour d’Appel de Pau, depuis octo-bre, pour payer les dépenses jusqu’àla fin de l’année 2010. Il faut préciserque le budget 2010 a, dès le débutde l’année, été amputé de 600 000euros pour payer les dépenses de2009, qui n’avaient pu être régléesavec le budget 2009. Des sommessupplémentaires vont certainementêtre accordées mais ces abonde-ments au « lance-pierre » empê-chent une gestion à moyen ou longterme et sont nécessairement chro-nophages pour définir les prioritésde paiements…Les juges d’instruc-tion de Pau ne peuvent plus payerles frais de justice depuis juin.

A Aurillac, le paiement des frais dejustice a été interrompu en septem-bre, pour l’année 2009, de mêmeque pour l’année 2010. Pourtant,une gestion rigoureuse des frais dejustice avait permis des économies,alors même que l’enveloppe budgé-taire avait été diminuée. Mais10 000 euros ont été prélevés surl’enveloppe d’Aurillac pour réglerd’autres frais de justice de la Courd’Appel.

Le TGI du Mans s’est vu affecter unbudget d’1,6 millions d’euros pourl’année 2010 (versés en février etavril). Une dotation complémentairede 250 000 euros a déjà été accor-dée en juin. Pour autant, débutoctobre 2010, plus de 350 000euros manquent (majoritairementau pénal), étant précisé que ceschiffres ne tiennent pas compte desdépenses à venir à la fin de l’année.Il est estimé que 2,2 millions d’eu-ros seraient nécessaires pour fonc-tionner correctement mais le budgetalloué au TGI diminue chaqueannée (2,1 millions en 2008, 1,9millions en 2009).

A Gap, le budget est en grandediminution : 12 millions d’euros ontété demandés, 7 ont été alloués,dont 3 pour payer l’arriéré 2009.Par exemple, le budget pour lesfrais de justice est passé de510.000 euros en 2008 à 230.000euros en 2009. Il est désormaisinsuffisant pour couvrir lesdépenses obligatoires, telles queles visites médicales en garde àvue, les expertises psychiatriques,les citations, les frais liés à la Courd’assises (défraiement des jurés,témoins..), qui ne peuvent être infé-rieurs à 350.000 euros. Afin de faireface au problème, des consignesécrites ont été données par leProcureur de refuser les actes d’en-quête trop coûteux eu égard à l’en-jeu du dossier. Des consignes ontégalement été données pour limiterle nombre de gardes à vue, et limi-ter ainsi les frais. Pour l’entraideinternationale, certaines pièces nesont pas traduites pour limiter lesfrais. Aucune réquisition bancairen’est payée. Malgré ces efforts, cer-tains experts, interprètes, labora-

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toires ADN ou opérateurs télépho-niques ne sont pas payés depuisplusieurs mois, les paiements à par-tir de juin 2009 ayant été bloquésjusqu’au versement de créditsdébut 2010. Les délégués du procu-reur sont payés avec 6 mois deretard. Globalement, on peut consi-dérer que la juridiction sera ensituation de cessation de paiementau plus tard en juin 2010.

A Digne les Bains, il n'y a plus debudget suffisant depuis le 1er mai2010. Le budget alloué était de moitiéinférieur à celui de l'an passé. En2005, il était de 240 000 euros. En2010, il était de 35 000 euros (+100000 euros au titre des marchéspublics souscrits au niveau régional).

La juridiction de Beauvais est elleaussi paupérisée. En septembre2009, il ne restait que 27 euros pourfinir l'année. Les contrats « espacesverts » ont été résiliés, faute de cré-dit. Des personnes condamnées àdes Travaux d'Intérêt Général sontemployées pour les travaux d'archi-vage. Il n'y a aucun budget pour lesdépenses non obligatoires et lebudget est insuffisant pour payerles dépenses obligatoires.

A Paris, le budget initialement attri-bué en début d'année est régulière-ment insuffisant au bout de quelquesmois seulement. Des rallonges sontaccordées pour permettre à la juri-diction de tenir jusqu'à l'automnemais les dernières dépenses de l'an-née sont généralement payées surle crédit budgétaire de l'année sui-vante. Il devient alors impossible decontinuer à employer des personnesprivées pour la frappe des décisionsdes magistrats.

Alors que le TGI de Bordeaux estpôle d'expérience pour la médiationfamiliale, la participation financièrede la juridiction diminue.

250 000 euros manquent, depuismai 2010, à Mont de Marsan pourpayer les frais de justice. Des éco-nomies doivent être réalisées, parexemple en mettant à la charge desmajeurs protégés le coût de l'exper-tise indispensable à la procédure deprotection...

Les magistrats placés de la Courd'Appel d'Aix En Provence sontaffectés en fonction de leur domi-cile, à titre d'économies. Ceux de laCour d’Appel de Pau ne seront rem-boursés que sur le budget de l’an-née suivante pour les frais exposéspar eux lors de leurs délégations àcompter de septembre.

A Briey, on a demandé, il y a plusd’un an, au service du juge auxaffaires familiales de ne notifier lesdécisions que par lettre simple sansles doubler d’une lettre recomman-dée avec accusé réception, à titred’économie.

En l'absence de fonds suffisantsdès la deuxième session d'assises,les jurés devant siéger à Saintes nepeuvent plus se voir octroyerd'avances financières s'ils doiventexposer des frais importants pourleur hébergement, leurs transportsou leur alimentation. La Courd'Assises est alors contrainte d'ac-corder des dispenses de siéger,quasi d'office à des chômeurs ettitulaires du RMI.

Pour éviter que des sessions d’as-sises ne doivent être reportées,

faute de budgets suffisants pourindemniser les jurés, les experts,les témoins… des chefs de courbloquent maintenant les sommesnécessaires pour tenir l’ensembledes sessions de l’année, au détri-ment d’autres frais.

LE MANQUE D'EXPERTS,INTERPRÈTES...

L'Allier, ressort du TGI de Cusset,ne dispose que d'un seul expertpsychiatre, qui pour des raisons fis-cales (le paiement d'expertises l'an-née suivante, au mieux, de leurréalisation a une incidence fiscalenégative s'il en réalise trop), sou-haite limiter ses expertises à 20 paran. Ne souhaitant pas venir témoi-gner aux assises, les experts deClermont-Ferrand, du départementvoisin, ne veulent pas venir réaliserd'expertises dans l'Allier. Lesmagistrats de l'Allier doivent doncrecourir aux experts de Nevers ouBourges, qui dépendent d'une Courd'Appel différente. Le juge d'instruc-tion peut également être confrontéà un manque total d'expert dansdes procédures où l'expertise estpourtant obligatoire (notamment lesexperts psychiatres pour les vic-times) et des dossiers d'instructionont ainsi été retardés pour qu'unchangement d'exercice permette lepaiement de l'expert (2009-2010).Pour l'année 2009, le tribunal a étéen cessation de paiement dès sep-tembre et des fonds ont du êtredébloqués pour payer les experts,après plusieurs mois d'attente.

Les experts du TGI de Riom refu-sent de continuer à intervenir, fautede paiement. Les enquêteurs n'ont

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pas plus les moyens de leurs mis-sions : un véhicule dégradé, les 2seuls enquêteurs de la BR ne peu-vent plus aller effectuer des com-missions rogatoires....

Un expert du TGI d'Abbeville a 10000 euros de mémoires en souf-france. La juridiction compte, débutoctobre 195 000 euros d'impayés etun abondement a été sollicité pouréviter que ces impayés ne s'ajoutentà ceux du TGI d'Amiens, juridictionabsorbante.

Le TGI de Saint Quentin a quant àlui 40 000 euros d'impayés à l'égarddes seuls médecins légistes.

A Montauban, les frais de justicesont payés très en retard et les psy-chiatres sont très réticents à réali-ser des expertises pénales (137missions impayées depuis plus de 6mois) ou dans le cadre du renouvel-lement des mesures de tutelles. Lesexperts psychiatres ont mis endemeure la juridiction de régulariserles paiements dans un délai de 6mois, la menaçant de démissionnercollectivement. Un abondement aété effectué après demande insis-tante des chefs de juridiction auprèsdes chefs de cours mais un impor-tant problème de recrutement desexperts subsiste, pour des raisonsfinancières. Par ailleurs, un expert adémissionné de la liste, n'ayant passouhaité venir déposer aux assises,à défaut de paiement.

A Belfort, la situation est égalementtrès difficile ; des économies ont étéréalisées mais il est impossible d'al-ler plus loin : une meilleure gestiondes scellés a été mise en place ; il aété imposé que le parquet donne

son autorisation pour toute dépenseengagée par un OPJ, ce qui consti-tue une charge supplémentairepour les magistrats.

Dans les juridictions de la Courd'Appel de Douai, les paiements desfrais de justice n'ont pu être effec-tués que jusqu'en novembre 2009puisque 4,5 millions d'euros man-quaient. En 2010, l'enveloppe glo-bale n'était que de 20 millionsd'euros, soit au moins 6 millionsmanquants de sorte qu'il était envi-sagé que les paiements de frais dejustice ne puissent être honorés àpartir de la rentrée. C'est ainsi qu'unexpert de Boulogne Sur Mer arefusé de continuer à réaliser desexpertises psychiatriques, malgrél'absence de demande de rembour-sement de ses frais de déplacement,puisqu'il n'était plus payé depuis plusde 8 mois. Les juges de l’applicationdes peines de Saint Omer etBoulogne Sur Mer ne disposentplus d’expert sur le ressort, pas plusd’ailleurs que de médecin coordon-nateur, et malgré la présence d’unétablissement pour peines.

Il est souvent difficile de trouver desexperts, notamment légistes ou psy-chiatres, acceptant de réaliser desexpertises, en l'absence de paie-ment. Il en va ainsi à Tarascon, àTours, à Bordeaux (1,2 millionsd'euros était dus aux experts),Albertville, Bergerac (les expertsne sont payés qu'un an et demiaprès leur mission), Briey (où ilmanque des experts psychiatres etmédecins légistes), le Puy en Velay,Aurillac, Tarbes, Bayonne.

En l'absence de médecin coordon-nateur dans le ressort, les magistrats

du TGI de Nice recourent à ceux deGrasse mais ceux-ci n'acceptent pasplus de 20 mesures.

A Nancy, les experts travaillent àcrédit, la juridiction ayant plus de 9mois de retard de paiement, et envi-ron 1 million de dettes. Certainesaffaires ou certains procès peuventgrever le budget de la juridiction :un procès d'un proxénète étranger,qui a duré 3 semaines, a entraînédes frais très importants du fait desinterprètes. Il semble que ces diffi-cultés soient nées du fait qu'aumoment du passage à la LOLF, lesbudgets ont été évalués en fonc-tion des crédits qui avaient alors étéengagés (or, il y avait, à ce momentlà, de nombreux impayés). Lesassociations de Nancy et Epinalsont au bord du dépôt de bilan. Lajuridiction a plus de 80 000 euros dedettes à l'égard de SOS médecins.

A Caen, il a fallu donner des enga-gements de paiements à SOSmédecins pour que les médecins sedéplacent à nouveau, tant lesdettes étaient importantes.

A Verdun, les médecins expertsne veulent plus intervenir enmatière de tutelles car ils ne sontplus payés. Les frais de justiceont été diminués de 30 % par rap-port à l'année précédente où ilsétaient déjà insuffisants. Au 9 juin(jour de la visite), les dépenses de2009 n'étaient pas toutes payées.Ce manque de moyens a conduitle parquet à former appel contreune décision d'expertise sollicitéepar le juge d'instruction. Des gara-gistes ne veulent plus récupérerdes véhicules. La juridiction doitfonctionner avec 2 experts

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psychiatres seulement. Il n'y a pasd'expert psychologue. Le JAP deVerdun fait appel aux experts de laCour d'Appel voisine de Reims,pour les expertises du Centre deDétention. La juridiction a unedette très importante à l'égard dumédecin légiste. Le problème d'ar-gent pose également problèmepour les interprètes : l'un d'entreeux, qui devait avancer ses frais detransports pour de nombreux kilo-mètres, a du renoncer.

A Nice, un risque de renvois dedossiers d'assises a été évoqué etdes audiences correctionnelles (ycompris avec des détenus) ont duêtre renvoyées, en l'absence d'ex-perts ou d'interprètes. En effet, desexperts (légistes, psychiatres, inter-prètes... - la juridiction devaitnotamment 10 mois de rémunéra-tion à l'interprète en arabe pour sonintervention lors des audiences cor-rectionnelle) ont fait grève et lespaiements seront repris en janvier2011. L'enveloppe 2010 était large-ment insuffisante.

Le TGI de Laon a été en difficul-tés pour payer les frais de justiceà partir de l’été 2010 mais un sur-croît de financement lui a étéaccordé. La chancellerie a par ail-leurs demandé à la juridiction depayer prioritairement un labora-toire. Les experts ne refusentpour l’instant pas de mesuresmais se plaignent des retards depaiement.

L'association d'aide aux victimesde l'Allier est au bord du dépôt debilan, en l'absence de paiementdes enquêtes sociales et des sub-ventions.

LES JUGES DE PROXIMITÉ :DES VACATIONS NONREMUNÉRÉES

Les juges de proximité ont étécréés, dans le but de désengorgerles tribunaux d'instance et de rap-procher la justice des citoyens, parla loi d'orientation et de programma-tion sur la justice du 9 septembre2002, complétée par la loi organiquedu 26 février 2003 et les lois du 26janvier 2005 et du 5 mars 2007.

En matière civile, ils statuent sur lesactions personnelles ou mobilièresjusqu'à la valeur de 4000 euros. Encas d'absence ou d'empêchementdu juge de proximité, ses fonctionssont exercées par le juge d'instance.

En matière pénale, ils statuent surles contraventions des 4 premièresclasses et siègent en qualité d'as-sesseurs aux audiences correction-nelles collégiales.

Ils sont nommés, parmi les prati-ciens du droit, pour une durée de 7ans non renouvelable, et suivent uneformation de 12 jours à l'EcoleNationale de la Magistrature. Ils sontrémunérés au titre de vacations (62euros pour une demi-journée de tra-vail et 300 euros, forfaitaires, pourles audiences civiles).

Le plafond annuel de vacations estfixé à 200.

Les juges de proximité, qu'on avaitprésentés comme devant désengor-ger les tribunaux et rapprocher laJustice des justiciables, ne peuventsouvent plus exercer leurs missions.Pour certains, les vacations consti-

tuent un complément non négligea-ble de revenus et ces interruptionsde paiement s'apparentent à deslicenciements, ou rupture de contrat,qui, dans le secteur privé, seraientdénoncés, voire condamnés.

Le besoin de la juridiction de proxi-mité de Nantes a été estimé à 1000vacations, pour les 7 juges de proxi-mité, qui, en 2009, ont rendu 1418décisions civiles. Cependant, lenombre de vacations a du êtreréduit à 717, bien que les audiencesauxquelles ils devaient participeraient déjà été prévues. Des magis-trats professionnels doivent doncdésormais siéger aux audiencesauxquelles les juges de proximité nepeuvent plus participer : correction-nelles, injonctions de payer,audiences pénales 4ème classe,audiences civiles. Par ailleurs, il estdéjà acté que le budget alloué pour2011 sera en nette diminution.

A Rennes, le solde de vacations nepermettra pas aux juges de proxi-mité de continuer à siéger 3 fois parsemaine en correctionnelle, outreaux audiences de comparutionimmédiate. A compter du 1ernovembre, les vacations ne pour-ront plus être payées. Le quota devacations pour le TGI et le TI deRennes est de 760 vacations,devant être partagées en 6 juges deproximité, qui ne peuvent donc êtreemployés à temps plein.

A Pontoise, le problème est iden-tique : les juges de proximité nepeuvent siéger en correctionnelleentre septembre et décembre, fautede budget suffisant pour les rému-nérer. La charge pèse directementsur les magistrats professionnels

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dont le nombre déjà notoirementinsuffisant est encore réduit par desarrêts maladie et par l'affectation àtemps plein, pendant plusieursmois, de 4 magistrats du siège pourjuger le dossier de l'accident duConcorde.

Des réductions similaires de vaca-tions des juges de proximités sontconstatées dans de multiples autresjuridictions : Valenciennes (où il n'ya plus de juge de proximité),Troyes (les juges de proximité ontdécidé de siéger en audience cor-rectionnelle malgré l’absence depaiement), Saintes, les Sablesd'Olonne, La Rochelle, Le Puy enVelay (la juge de proximité peut sié-ger à l’instance mais non en correc-tionnelle, faute de vacationssuffisantes), Tours (diminution desvacations de 200 à 100 par mois),Blois, Rennes, Cusset, Montauban(ils peuvent seulement continuer àl'instance), Toulouse (les juges neproximité ne font plus d'ordon-nances pénales ni d'injonctions depayer), Perpignan.

Au TI de Puteaux (TGI Nanterre),l'ensemble des affaires audiencéesdébut octobre 2010 a du être ren-voyé au 7 février 2011, les juges deproximité ne siégeant plus, du faitdu défaut de paiement de leursindemnités.

Au contraire, des juges de proximitésupplémentaires sont recrutés àLaval, alors que la juridiction n’en apas besoin.

A Versailles, le budget alloué pourles juges de proximité est limité à107 vacations par an et par juge carles 43 juges de proximité du ressort

ne peuvent recevoir les 200 vaca-tions autorisées annuellement.Cependant, le nombre de vacationsdisponibles et attribuées a du êtrerestreint au fur et à mesure desmois. Les dysfonctionnements ontentraîné une réduction de la partici-pation des juges de proximité auxaudiences correctionnelles à comp-ter du mois de mai 2010 puis unesuppression de toute participation àces audiences à compter de sep-tembre 2010 sans qu'aucuneaudience ne soit supprimée malgréla charge de travail supplémentairesur les magistrats. Dans les tribu-naux d'instance du ressort, l'activitédes juges de proximité est réduitefaute de vacations suffisantes et lesjuges d'instance sont déléguésdans les fonctions de juge de proxi-mité pour traiter le contentieux.Par ordonnance du 28 juillet 2010,le président du tribunal indique que :« considérant que nonobstant l'ab-sence de toute vacation envisagéeen rémunération de la participationà une audience correctionnelle àpartir du mois de septembre 2010,les crédits des vacations des jugesde proximité pouvant être engagésd'ici la fin de l'année 2010 ne per-mettront pas de faire fonctionner lesjuridictions de proximité dans lesconditions prévues et renduesnécessaires par la compétence decette juridiction définie dans le codede l'organisation judiciaire ; consi-dérant que le défaut des moyenssuffisants de rémunération pourque les juges de proximité tiennentles audiences de la juridictionconstitue un empêchement imposéà ces juges de proximité ;Vu l'article L232-2 du code de l'or-ganisation judiciaire, Disons qu'entre le 1er septembre et

le 31 décembre 2010, les fonctionsde juge de proximité seront exer-cées par les magistrats en chargedu service des tribunaux d'instance(…) chaque fois qu'il apparaîtra queles vacations des juges de proxi-mité ne pourront pas être payéesau titre des crédits de l'exercicebudgétaire 2010 ».Les juges de proximité du ressort etl'Association Nationale des Juges deProximité ont diligenté un recoursdevant le tribunal administratif pourdétournement de pouvoir et détour-nement de procédure. Ils soutiennentque cette ordonnance contrevient auprincipe à caractère constitutionnelselon lequel la décision de nomina-tion et d'affectation d'un juge relèvedes dispositions relatives au statut dela magistrature.

DES POSTES D'ASSISTANTSDE JUSTICE SUPPRIMÉS

Les assistants de justice apportentleur concours aux magistrats, eneffectuant des travaux derecherche de documentation ou dejurisprudence, des notes de syn-thèse de dossiers, en traitant ducourrier ou en rédigeant des pro-jets de décisions sur les instruc-tions des magistrats. Ils effectuentpar ailleurs parfois des fonctionsdévolues aux fonctionnaires, ensous-effectif.

Ils sont recrutés, parmi les titulairesd'un diplôme sanctionnant 4 annéesd'études après le baccalauréat, pourune durée de 2 ans, renouvelable 2fois, et perçoivent un salaire de 450à 500 euros par mois, pour exercerleurs fonctions à temps partiel dansla limite de 720 heures par an.

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On constate régulièrement unebaisse du recrutement de nouveauxcontrats d'assistants de justice etun non renouvellement des contratsarrivant à échéance.

Même si, lors de la présentation dubudget 2010, le Garde des Sceauxa annoncé une hausse du recrute-ment des assistants de justice, pourpermettre aux magistrats de se« recentrer » sur leurs fonctions, laréalité est loin de ces annonces.

Il en va ainsi à Châlons enChampagne, Angers, à Marseille,les contrats des assistants de jus-tice ne sont pas renouvelés alorsqu'ils sont 5 au siège et 8 au par-quet. Ils sont appelés à disparaîtreau profit des vacataires, notammentpour l’implantation de Cassiopée ;de même le contrat de 2 assistantsde justice de Bayonne ne sera pasrenouvelé ; à Mont de Marsan,Tarbes (un magistrat est contraintde ranger la bibliothèque), àNarbonne (qui a perdu 3 assistantsde justice), au Puy En Velay (oùpour autant, aucun vacataire n’a étérecruté, en l’absence de crédit), àSoissons, au Mans (où 3 assis-tants n’ont pas été renouvelés), àLaon, à Laval, Pontoise, Versailles,Rennes, Compiègne, Tours, Blois,Caen, Perpignan, Albertville, Gap,Draguignan.

A la Cour d’Appel de Montpellier,11 assistants de justice ne serontpas remplacés en 2011, au TGI deMontpellier, il n’y a plus d’assis-tants de justice au service desaffaires familiales, où ils ont pour-tant pré-rédigé 595 décisions en2009 de sorte qu’un système degestion de pénurie se met en place.

DES BUDGETS DE FONC-TIONNEMENT INSUFFI-SANTS

"Il n'y a plus rien à gratter, on a atta-qué l'os" a dit un magistrat pour leséconomies que cherchent à réaliserles juridictions dans des conditionsde plus en plus difficiles.

De nombreuses juridictions ne peu-vent engager de dépenses non obli-gatoires, ou très difficilement :Belfort, Aix en Provence, Aurillac,Montluçon, Rennes…

Il est particulièrement difficile de seprojeter pour prévoir certains tra-vaux. Les chefs de juridiction et degreffe doivent donc toujours avoir unpetit projet (réfection de la peintured’un bureau, achat de mobilier…)pour pouvoir utiliser, au derniermoment, en urgence, et avant la finde l’année, les crédits pouvantéventuellement être débloqués.

Au delà des frais de justice, lemanque de financement desdépenses de fonctionnement desjuridictions a un impact direct sur lavie de la juridiction et les conditionsde travail des personnels.

Au TGI de Rennes, l'absence debudget pour les dépenses non obli-gatoires se traduit par des petitesmesquineries : les post-it sontdécoupés, les stylos usagés doiventêtre restitués pour en obtenir desneufs... et des dysfonctionnements :les avocats obtiennent des renvoisen correctionnelle car ils n'ont paseu copie des dossiers à temps...

La juridiction de Montauban a du

terminer l'année 2009 sans papier nisoit-transmis (photocopiés). Fautede papier, le tribunal de Montargisdemande aux avocats de fournircelui-ci pour l'obtention de photoco-pies de pièces de dossiers. Peuavant notre visite à Charleville-Mézières, au printemps 2010, unerupture de stock de papier étaitdéplorée, le budget y afférant pourl'année 2010 n'étant toujours pasparvenu. Un TI de Paris n'a plusd'enveloppes...

Les magistrats du TGI d'Aix enProvence se sont vus demander,par note interne de service, d'impri-mer les documents recto-verso etse voient accorder des crayons aucompte-goutte. Un magistrat attendle changement du néon de sonbureau depuis un an. Le juge destutelles de Montargis a dû acquérirpersonnellement un tamponencreur et l'ancien tampon encreurdu TI de Gien, supprimé, est main-tenant utilisé par le TI de Montargis,en rayant la mention "Gien".

Des économies de papier sont éga-lement demandées aux personnelsdu TGI de Troyes. Certains magis-trats et fonctionnaires du TGI deVerdun amènent leur propre maté-riel (classeurs, crayons...) et denombreuses ampoules grillées nepeuvent être remplacées, faute decrédits. A Sarreguemines, les post-it et stylos sont distribués à l'unité,lorsque les magistrats n'achètentpas eux-mêmes leur matériel. Desproblèmes similaires se rencontrentà Marseille. les post-it doivent êtreéconomisés à Dax et à Cambrai ; leTribunal Pour Enfants de Bayonnene peut plus bénéficier de chemises(trop onéreuses) sur lesquelles sont

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déjà fixées les cotes transparentespour insérer les noms des mineurs,à Pau, il n’est plus possible d’obtenirles chemises colorées déjà impri-mées (pour les côtes des dossiers)car trop onéreuses et il est doncdemandé aux greffiers de découperet coller eux-mêmes les films trans-parents pour ajouter les mentionssur les chemises des dossiers ; ilfaut également « quémander » lepapier et les stylos.

A Albertville, l'entreprise assurantl'entretien des photocopieuses ne sedéplace plus avec toute la célériténécessaire, n'étant pas payée. Ilmanque des photocopieurs dans denombreuses juridictions, notammentLa Roche Sur Yon, Strasbourg (unseul photocopieur pour un étage),Bobigny (les magistrats et fonction-naires du TPE ont du réclamer l'ins-tallation d’un photocopieur pendant 2ans avant d'obtenir 2 appareils, dontl'un a très rapidement été remplacépar un ancien, fonctionnant mal...)

DU MATÉRIEL INFORMA-TIQUE OBSOLÈTE OUINADAPTÉ

Le modèle d'imprimantes équipanttous les personnels du ministèretombe très régulièrement en panne,même lorsque l'encre n'est pasmanquante.

La pénurie d'encre est un problèmerécurent pour tous les matériels...Au TPE de Bobigny, l'encre manquerégulièrement et deux greffières separtagent la même cartouche, ce quiest problématique en cas d'au-diences simultanées. Le fax de cemême service n'a pas fonctionné

pendant plus de 10 jours, rendant leservice injoignable en cas d'urgence.

Le service de l’application despeines de Quimper n’a ni fax niphotocopieur. Le TGI ne disposepas du nombre suffisant de photo-copieurs.

Pendant plusieurs semaines, leTPE de Sarreguemines n'a pas eude toner et de cartouches d'encredans le fax et devait faire la navette,pour emprunter ce matériel au par-quet, lorsqu'un service avisait del'envoi d'un fax...

Le Tribunal Pour Enfants de Briey,lui, n’a pas de fax propre au serviceet les greffiers doivent faire lesallers-retours toute la journée àl’étage inférieur pour utiliser un fax.

A la Cour d’Appel de Pau, il estenvisagé de mutualiser les impri-mantes entre 2 et 3 magistrats, cequi pose de réels problèmes deconfidentialité. Il en va de même àAurillac.

En décembre 2009, c'est en l'ab-sence de toner dans la machine àaffranchir que le courrier n'a pu partirde cette même juridiction deSarreguemines. Les services del'instruction et du TPE se rendaientau Tribunal d'Instance pour affranchirle courrier urgent.

Les ordinateurs sont souvent peuperformants.

Ainsi, à Thionville, Sarreguemines,Metz certains magistrats sontencore dotés de vieux matériels, lesnouveaux demeurant parfois dansdes cartons pendant de longs mois

avant de pouvoir être installés. Lesordinateurs du TGI de Montargis,particulièrement anciens, ne dispo-sent pas de lecteurs DVD et lesmagistrats ne peuvent donc pasvisionner les auditions filmées...lerenouvellement du parc informa-tique du TGI de Colmar est difficile.

Les ordinateurs sont égalementanciens à Lorient, Agen, Riom (lesjuges placés n’ont pas de portablesrécents).

Lors du renouvellement d’ordina-teurs en 2007, des postes datantde 2002 ont été installés dans cer-tains bureaux du TGI de SaintOmer et sont tombés rapidementen panne ; pour autant, il fautencore attendre pour pouvoir lesremplacer, au motif que la dotationdate de moins de 5 ans.

La juridiction de Cusset est dotéed'un accès internet bas débit, cequi est très problématique pour lesrecherches jurisprudentielles. AVersailles, les magistrats doiventacquérir eux-mêmes leurs ordina-teurs portables et les logiciels (480euros) et ne peuvent se servir declés USB pour éviter les risquesde virus.

Ces vastes économies exigées despersonnels de justice sont en déca-lage certain avec les implantationsde matériels perfectionnés parfoisinutiles....

A Toulon, les économies en termesd'entretiens, de parc automobile etde fournitures contrastent avec lesachats de scanners, graveurs etmatériels de visio-conférence dansles cabinets d'instruction.

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Les 4 juges des enfants deClermont-Ferrand n'utilisent pas,faute de besoin, le matériel d'enre-gistrement vidéo dont ils ont tousété dotés, pour un budget de 12000 euros.

De même, les juges d'instruction,juges des libertés et de la détentionet juges d'application des peines duTGI de Tarascon se voient imposerl'implantation de matériels très coû-teux de visioconférence (15000euros pièce), mais peu opérants enpratique. Les matériels d'enregistre-ment vidéo, installés y compris pourl'instruction vouée à disparaître danscette juridiction infra-pôle, sont peuutiles et performants car d'impor-tants problèmes de son subsistent.

A Pau, les magistrats sont invités àutiliser le plus possible la visiocon-férence, les économies ainsi réali-sées étant destinées à recruter unvacataire. La Cour d’Appel de Paudispose ainsi de 3 sites de visiocon-férence (pour le cadre administratif,dans la chambre de l’instruction etla salle d’assises), mais seulementde 2 lignes téléphoniques dédiées(de sorte que seuls 2 sites peuventêtre utilisés simultanément). Il en vade même au TGI.Cependant, l’utilisation de la visio-conférence est très chronophage,notamment pour le greffe : environ2 heures sont ainsi nécessairespour s’assurer, dans chaque local(par exemple à la cour d’appel et àla maison d’arrêt), que le matérielsera disponible, à une heure pré-cise…par ailleurs, l’absence de faxpour permettre la signature des pro-cès-verbaux dans les salles devisioconférence allonge d’autant ladurée des débats.

La visioconférence reste en outretrès onéreuse, et soumise à desproblèmes techniques. Ainsi, aumoment de notre visite, la Courd’Appel ne pouvait appeler l’exté-rieur : l’interlocuteur doit lui-mêmeappeler la Cour pour créer le lien etdébuter la visioconférence.

A Montargis, le matériel de visio-conférence a été installé dans unesalle dédiée à la visio-conférenceadministrative et dans une salled'audience dans laquelle le logicielpour le Juge des Libertés et de laDétention (JLD) n'est pas installé :la greffière JLD doit donc faire desallers-retours dans son bureaulorsque la visio-conférence est utili-sée. La visio-conférence va par ail-leurs être installée dans le bureaudu Juge d'Application des Peines,qui ne l'a pas sollicitée.

A Briey, le matériel de visioconfé-rence n’est réellement utilisé quedans le cadre administratif et estdonc peu rentable.

A Bordeaux, 7 scanners ont étéinstallés au Tribunal Pour Enfants etau parquet-mineurs, sans mêmeavoir été sollicités. A Thionville, 3scanners non sollicités ont étélivrés, semble-t-il par le biais de laDirection de la Protection Judiciairede la Jeunesse.

A Bethune, chaque juge d'instruc-tion dispose d'un scanner individueldepuis 2 ans, mais sans logiciel defonctionnement....alors qu'à Arras,juridiction voisine, le logiciel a étéinstallé sur les ordinateurs maissans les scanners....

Un logiciel à commande vocale a

été acquis pour un magistrat duPuy en Velay…mais n’est pas com-patible avec l’ordinateur, tropancien.

Saint Omer, juridiction pilote pourla numérisation, a été dotée d’uneseconde station de numérisation en2007 alors qu’elle ne l’avait pas sol-licitée et n’en avait pas besoin. Parailleurs, les 3 scanners individuelsreçus en 2007 n’ont toujours pasété installés. L’imprimante livréed’office au service d’application despeines paraît, elle également, inu-tile, car le service disposait déjàd’un photocopieur couleur enréseau.

La numérisation des dossiersnécessite une réelle organisation,liée à une formation et à desmoyens humains, puisqu'un dossiernumérisé sans nomenclature claireet/ou inventaire détaillé peut êtreinexploitable pour les magistrats.Ceux-ci doivent en effet pouvoirconsulter une pièce cotée sansavoir à faire défiler toutes les pagesdu dossier, sur un écran adapté àune telle consultation. Le dossierdoit par ailleurs être facilementconsultable, y compris en salled'audience et de délibéré.

Dans le cas contraire, tout le béné-fice lié à la numérisation peut êtremis à néant.

A Paris, les magistrats ne disposentpas de matériel adapté et la qualitéde la numérisation des dossiers estaléatoire, puisqu'il est matérielle-ment impossible pour les greffiersde procéder eux-même à cettenumérisation, qui repose donc surdes personnels non formés. Il n'y a

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pas de postes informatiques dans lasalle de délibéré de la chambre del'instruction et les dossiers sont diffi-cilement consultables, de sorte quela numérisation n'a d'intérêt que pourles petits dossiers et que la détentionpeut être problématique à gérer.

Dans beaucoup de juridictions, lesformations des personnels à lanumérisation ne sont intervenuesque plusieurs mois après la livrai-son des stations de numérisation(pour délivrer rapidement copie desdossiers aux avocats).

DU MATÉRIEL JURIDIQUEÉCONOMISÉ

L'achat de codes est délégué àchaque juridiction de sorte que lesprix négociés sont très différentssur tout le territoire national. LaDirection des Services Judiciairesenvisage de négocier les prix descodes au niveau national pour opti-miser les dépenses.

Au regard de l'insuffisance des bud-gets, les chefs de juridiction et degreffe sont contraints de réaliser deséconomies, y compris sur le maté-riel juridique pourtant essentiel etcertains magistrats acquièrent desouvrages sur les contentieux spé-cialisés avec leurs propres deniers.

A Bergerac et Laval, les abonne-ments des bibliothèques ont étésupprimés même si Lexis Nexis(abonnement internet pour desrecherches jurisprudentielles) a étéimplanté ; à la Cour d'Appel deRennes, les codes ne sont pas àjour, y compris dans la bibliothèqueet Lexis Nexis n'a pas été implanté.

Lexis Nexis n’est pas installé àQuimper, Agen, le Puy en Velay(alors que les avocats en dispo-sent), Lorient (où la bibliothèquen’est pas à jour), à Brest.

A Cahors, Auch et Agen, aucontraire, Lexis Nexis a été installémais le marché ne sera pas recon-duit par la Cour d’Appel, au regard deson coût, trop important pour l’utilisa-tion qui en est faite, ou un seul accèspourrait être disponible par juridic-tion. Pour autant, la bibliothèquen’est plus mise à jour (il n’y a plusd’abonnements à des revues juri-diques « papier ») et les magistratsdemeurent peu informés des suitesdonnées au contrat d’abonnement.

A Montargis et Saint Nazaire, LaRochelle, les Sables d'Olonne,Amiens, Saintes, Angers les codeset/ou ouvrages ne sont pas à jour ;à Strasbourg, les jurisclasseurs nesont pas mis à jour depuis plus d'unan, les codes ne sont pas à jourdans la bibliothèque, le Lamy pro-cédure collective (ouvrage tech-nique très complet) date de 2007 (ily a eu plusieurs réformes depuiscette date) ; à la Cour d'Appel deMetz, la bibliothèque n'est pas àjour et les revues jurisprudentiellessont dans les placards et inaccessi-bles sans l'aide des assistants dejustice...dont les contrats ne sontpas renouvelés ; à Aix en Provence(un parquetier n'a pas eu de guidedes infractions ; un autre, chargé del'environnement, n'a qu'un code del'environnement de 2007 à sa dis-position) ; à Avesnes Sur Helpe,les abonnements pour les revuesont été supprimés avant même lamise en place de Lexis Nexis et lesmagistrats n'ont pas tous droit à des

codes à jour, notamment les nom-breux placés affectés à la juridiction ;à Dax, les 2 juges d'instancedevront désormais se partager lesséries de codes nécessaires àl'exercice de leurs fonctions ; ondemande aux magistrats de Vannesde ne pas trop commander decodes ; les magistrats des tribunauxd'instance de Paris n'ont pas tousdes codes et les crédits sont insuffi-sants pour acheter des ouvrages debase ; de même à Bayonne, il a étéconseillé aux parquetiers de limiterleurs demandes aux codes pénal etde procédure pénale ; à la Courd’Appel de Caen, les magistratsn'auront que certains codes, choisis« après arbitrage » (non défini dansla note écrite diffusée), au prétextequ'il y a une collection complète à labibliothèque...des codes 2009 !

A Sarreguemines, les codes nesont fournis aux magistrats ques'ils sont considérés commenécessaires au service. C'est ainsique le parquetier chargé desaffaires civiles a du se battre pourobtenir un code civil.... le juged'instruction et le juge d'applicationdes peines ont eu un code maispas de guide des infractions. Labibliothèque, qui n'est pas à jour,n'est accessible qu'après avoir sol-licité une clé au secrétariat deschefs de juridiction.

De même, les magistrats deBethune peinent à obtenir lesouvrages de base. Plus de deuxans ont été nécessaires à un col-lègue pour obtenir un guide desinfractions et des poursuites alorsque le substitut chargé de l'exécu-tion des peines n'a pas un tel guidedepuis 4 ans.

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Dans ces conditions, de nombreuxgreffiers et fonctionnaires ne peu-vent disposer d'un code.

DES CONDITIONS MATÉ-RIELLES DE TRAVAIL ETD'ACCUEIL DÉPLORABLES

Au Tribunal d'Instance deDunkerque, les fientes d'oiseaux etles pigeons morts sont laissés dansla cour intérieure et attirent lesmouches, qui peuvent pénétrerdans les bureaux.... Le même pro-blème se relève au TGI de Caen,où, par ailleurs, une souris morteest restée tout au long de sadécomposition sur la plaque grilla-gée surplombant une salle d'au-dience. De même à Reims, il arriveque des fientes de pigeon tombentsur la table autour de laquelle lacour d’assises délibére, à traversune verrière dont des vitres man-quent...

La salle d'audience correctionnelled'Aix en Provence ne dispose pasde micros pour entendre les préve-nus dans le box et la configurationdes locaux oblige les victimes às'installer à côté des prévenus.

Le standard téléphonique du TGI deThionville pose problème, les lignesgrésillent. Le fax n'a pas fonctionnépendant 15 jours au début de l'an-née. Le Tribunal Pour Enfants nepeut pas être joint directement. Lesaudiences du Tribunal Pour Enfantsdoivent être limitées, pendant lestravaux en cours dans la juridiction,à 3 demi-journées pour les 2 jugesdes enfants qui ont pourtant besoinde 10 demi-journées par semaine.

A Sarreguemines, le téléphone aété coupé pendant 2 jours ennovembre 2009. Seul le parquet,disposant d'une ligne directe, pou-vait être contacté.

Les magistrats du parquet du TGI deBlois n'ont aucun moyen dédié à lapermanence téléphonique, ni locauxni secrétariat. Ils doivent donc faireeux mêmes les photocopies, appelerles avocats en préparation desaudiences de comparution immé-diates ou déferrements... et sont dif-ficilement joignables par lesenquêteurs.

Le service du Traitement en TempsRéel du parquet du TGI de Béziersn’a été doté d’un fax que depuis ledébut de l’année 2010.

Les juges aux affaires familiales duTGI de Strasbourg reçoivent lesjusticiables dans une salle d'au-dience sans fenêtre. De même pourles audiences du tribunal pourenfants de Caen. Dans cette mêmejuridiction, les marches de l'escaliercentral sont irrégulières. Il semblequ'il s'agissait initialement d'unchoix délibéré des architectesroyaux, voulant empêcher l'éven-tuelle fuite de prévenus, qui, ferrésaux pieds, chutaient ...cependant,aujourd'hui, ce ne sont plus les pré-venus qui chutent régulièrement,mais le personnel. 6 marches seu-lement ont pu être réhabilitées.

Les problèmes de l'éclairage insuffi-sant du TGI de Colmar sont récur-rents. Par ailleurs, la vétusté del'électricité oblige à enlever l'une des6 ampoules du lustre du bureau duProcureur...pour éviter que toutesles ampoules ne grillent...Dans cette

même juridiction, plusieurs bureaux,notamment des magistrats du par-quet, donnent directement sur lacour de la promenade de la Maisond'Arrêt, adjacente au tribunal. Lesmagistrats ne peuvent donc ouvrirles fenêtres s'ils veulent échapperaux insultes régulières des détenus.Parallèlement, les plexiglass instal-lés devant les fenêtres à titre de pro-tection, servent de buts pendant lesparties de foot dans la cour de pro-menade. Le bruit, assourdissant,créé des conditions de travail parti-culièrement stressantes pour lescollègues qui attendent donc la fer-meture de la maison d'arrêt....

Deux années ont été nécessairespour réparer le système d'éclairagede l'escalier du TGI deSarreguemines et des chutes onteu lieu. Aujourd'hui, la lumière resteallumée y compris la nuit...A Aix EnProvence, les agents techniquesrécupèrent les ampoules dans lesparties condamnées et désaffectéesdu bâtiment pour remplacer lesampoules grillées. A Lisieux, le juged'application des peines attenddepuis 10 mois le remplacement de3 des 4 néons de son bureau et doitrecevoir les justiciables avec seule-ment une rampe de lumière ; quantau juge d'instruction, la poignée dela porte de son bureau, cassée,n'est pas remplacée.

La lumière entre dans le servicede l’application des peines du TGIde Lille, transféré en sous-sol, parde grands soupiraux à hauteur duplafond avec vue plongeante surles bureaux et les entretiens s’ydéroulant. La lumière artificielleest indispensable.

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A Dignes les Bains, les deux agentstechniques, particulièrement perfor-mants et débrouillards, récupèrentdu matériel pour permettre à la juri-diction de fonctionner sans achatssupplémentaires (faux-plafonds,meubles de bureau dans le bâti-ment à rénover, pots de peinturepour repeindre des bureaux, fuel...)

Du fait du manque de salles d'au-dience du TGI de Cusset, lesaudiences du juge aux affairesfamiliales et des criées se déroulentaux mêmes lieu et moment. LeJuge aux Affaires familiales pro-cède donc à l'appel des causesavant de laisser la salle d'audiencepour l'audience des criées puis detenir l'audience. Cependant cetteorganisation est largement mise àmal en cas de vente à la criée, obli-geant les justiciables et avocats àpatienter avant que l'audience duJuge aux Affaires Familiales puissereprendre.

La juridiction de Saint Omer dis-pose de 2 véhicules, dont l’un a étéaccidenté il y a 7 ans mais n’a pasété remplacé, malgré une certainedangerosité : les freins en étantdéfaillants, ce véhicule est réservéaux trajets en ville, et ne peut doncêtre utilisé pour les déplacementsdes juges de tutelles, les jugesd’application des peines au centrepénitentiaire…

DES JURIDICTIONS SUR-CHAUFFÉES OU NONCHAUFFÉES

Dans de nombreuses juridictions, laconfiguration des locaux, le matérielde chauffage et de climatisation et le

coût de fonctionnement de ceux-cine permettent pas d'assurer aux uti-lisateurs des locaux une tempéra-ture adaptée.

Souvent, également, l'anciennetédes huisseries favorise le passagedu froid et parfois même de lapluie...Ainsi en va-t-il à Dunkerque,au TPE de Reims, à Châlons enChampagne, à Douai, à Nantes(malgré le caractère récent deslocaux), Avesnes Sur Helpe (cer-tains bureaux n'ont pas de fenêtres,comme conçu par les architectes), àl'annexe du TGI de Boulogne SurMer (la chaudière tombe régulière-ment en panne), Lille (manque d'iso-lation), La Roche Sur Yon,Beauvais, Saintes, la Cour d'Appeld'Aix-En-Provence, Lons LeSaunier, Brest (où les magistrats ontun chauffage d’appoint) Angers, àLa Rochelle (où il est impossibled'ouvrir les fenêtres du service del'instruction, pour éviter un appel d'airsoulevant les dalles du plafond...),Colmar, Thionville, Mulhouse (oùle problème d'isolation a égalementdes répercussions sur l'insonorisa-tion puisqu'il est possible de suivre laconversation du bureau voisin),Strasbourg, Paris, Sarreguemines,Draguignan, Abbeville, Montauban(l'hiver 2009-2010 a été marqué parde nombreuses coupures de chauf-fage, faute de crédits pour les répara-tions), Perpignan (sauf dans la salled'audience principale, l'acte de jugerdevient une épreuve physique, parforte chaleur), Agen (ce qui crée desproblèmes de bruit et de chaleurpuisqu’il peut faire jusqu’à 41° danscertains bureaux), Auch, dans l'undes trois sites du TGI de Metz (oùdes températures très élevées ont puentraîner des malaises du person-

nel), le service d'accueil de la Courd'Appel de Toulouse, Montbelliard(absence totale de climatisation, mal-gré des locaux entièrement vitrés),Albertville (il n'y a plus de créditspour le chauffage et les fenêtresfuient), Sarreguemines, Vannes (il afait 10 à 12 degrés dans la salle d’au-dition des tutelles pendant 15 jours,fin avril), Lorient (le chauffage estcoupé le week-end et il fait très froidle lundi matin), Laval (il peut fairejusqu’à 35 ou 40° l’été car les locauxsont vitrés), Pontoise (il n'y a nichauffage ni climatisation, alors queles bâtiments ont été inaugurés en2005), Versailles (certains bureauxn'ont ni store ni rideaux ; des storesont été commandés en 2006...).

A Cambrai, la commission de sécu-rité a exigé la remise en marched'un système de ventilation du bâti-ment qui a de nouveau été coupé,car il diffuse de l'air froid dans toutle bâtiment. En hiver, le bâtimentest très froid le matin, notammentcar la dalle du premier étage est enpanne et ne peut être réparée fauted'argent pour la réparer. Le person-nel utilise des chauffages d'appoint,encore plus onéreux.

La juridiction de Montluçon financeplus facilement des petits travaux sil’hiver n’est pas trop rigoureux et sides économies de chauffage peu-vent être réalisées. En octobre2010, la juridiction dispose du bud-get suffisant pour payer la moitiéd’une livraison de fuel alors que 2,5livraisons seraient nécessaires pourchauffer la juridiction…jusqu’à la findécembre 2010.

Au Mans, seul le 5e étage de la citéjudiciaire dispose de la climatisa-

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tion, de sorte qu’il fait plus de 40°dans les bureaux des autres étagesl’été alors même que les locauxsont récents. Le TGI étant constituéde nombreuses surfaces planes, unsystème de réfrigération par vapori-sation d’eau a été installé. Mais, dufait d’un problème de canalisation,l’eau ainsi vaporisée est chaude etentraîne un risque de légionellose.

A Moulins, de gros problèmes dechaudière ne permettaient pas dechauffer la juridiction. Mais l'argenta fini par être débloqué aprèsqu'une audience solennelle a ététenue par 7,5°C....

A Cusset, qui ne peut être suffisam-ment chauffé l'hiver, 1200 eurosseraient nécessaires pour mettre ensécurité la chaudière mais les tra-vaux ne peuvent être engagés. Latoiture devrait être traitée, également.

A Compiègne, la dernière facturede gaz, pour le chauffage, nepourra pas être payée. C'était déjàle cas en 2009 et le budget a étéréduit de 15 000 euros cette année.

Dans le bâtiment du TGI deBesançon, en partie vitré, la clima-tisation initialement prévue a duêtre abandonnée faute de crédits. Iln'est pas possible d'ouvrir les fenê-tres et il peut faire 35 degrés danscertains bureaux, l'été, de sorte qu'ila été nécessaire d'aménager leshoraires du greffe, notammentpénal. Le service de reprographie,situé dans des locaux en sous-soldans les anciennes cellules degarde à vue, n'a pas de fenêtres etest extrêmement confiné, sansaération.

Heureusement, le sens pratiquedes agents techniques permet sou-vent aux tribunaux de connaître desconditions de fonctionnementmoins difficiles. Ainsi, à Digne lesBains, situé à 700 m d'altitude, lesbudgets de fonctionnement n'ontpas permis de chauffer le bâtimentdu Tribunal de Grande Instance àcompter de l'automne 2009. Lesagents techniques ont alors pompéles 2500 litres restant dans la cuvedu Tribunal d'Instance sur le pointde fermer, pour faire fonctionner lechauffage du Tribunal de GrandeInstance. Cependant, une tellesolution ne pourra être utilisée en2010...

UNE HYGIÈNE DÉFECTUEUSE

De même, les contraintes budgé-taires ne permettent pas unménage régulier, qui se limite sou-vent à la poussière et au vidage despoubelles : Colmar, Caen,Sarreguemines, Lille, Avesnes(où des allergies se développent dufait des moquettes), Dunkerque,Reims, Troyes, Poitiers, LesSables d'Olonne, Niort, Angers,la Roche Sur Yon, Amiens,Toulon, Compiègne, Quimper,Cahors, Auch et Brest, Versailles,Arras, Paris.

Dans de nombreuses juridictions,les moquettes, murales ou pour lessols, posent des problèmes d'hy-giène, faute d'entretien. A Argentan,un magistrat a dû arracher elle-même sa moquette murale, où sedéveloppaient des champignons dufait de fuites d'eau. Des magistratsde Versailles ont repeint eux-mêmes leur bureau. Des problèmesd'acariens et d'hygiène se rencon-

trent également à Perpignan.Les magistrats et fonctionnaires duTGI de Caen s'inquiètent des condi-tions d'hygiène : plusieurs ont eneffet vu leur problème d'asthme naî-tre ou s'aggraver depuis leur arrivéeau TGI...et disparaître à leur départ.

Un magistrat de Paris a du jeter àterre ses papiers pendant plusieursjours avant de pouvoir bénéficierd'une simple corbeille à papiers...

Aux TGI de Dunkerque, Bobigny,Aix En Provence, les toilettes sontrégulièrement bouchées et laissentéchapper des odeurs nauséa-bondes. Le TGI de Quimper a éga-lement été confronté à un problèmede chasses d’eau. Cahors connaitun problème d’entretien. Les toi-lettes du TGI de Paris sont notoire-ment insuffisantes, de même qu’àAmiens.

Le TGI de Vannes a connu une rup-ture de stock de papier toilette pen-dant 1 semaine en 2009. A Briey,les 60 personnes du TGI se parta-gent 42 toilettes…mais sans papier.

LE BUDGET DE LA JUSTICE

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CASSIOPÉE

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Depuis maintenant 2 ans, les tri-bunaux de grande instance sonttour à tour concernés par l'im-plantation de « Cassiopée »,application informatique desti-née à créer un bureau d'ordrenational, autrement dit unechaîne pénale complète avec deséchanges inter-applicatifs per-mettant à terme : d'une part, unealimentation en amont par lesservices enquêteurs (pour éviterdes saisies de données à chaquestade de la chaîne pénale,lorsque les procédures sonttransmises au procureur de laRépublique) ; d'autre part, enaval, une alimentation desfichiers du trésor pour le paie-ment des amendes, des fichiersGIDE, du casier judiciaire, et sur-tout le contrôle automatique desfichiers police (FNAEG,STIC….)… L’outil permettra enoutre, dans le cadre de la poli-tique de la ville, d’obtenir desoutils tels qu’une cartographiede la justice pénale, communepar commune.

Cassiopée est ainsi vouée à rem-placer les différents « applicatifsmétiers » de la chaine pénale.

Les juridictions sont reliées parIntranet à la base nationale(constituée de plusieurs centresde serveurs), qu'elles alimententet par laquelle elles peuventaccéder à de multiples informa-tions, au niveau national, alors

que jusque là, les seules don-nées consultables étaient cellesde la juridiction. Ainsi, les par-quetiers peuvent, par exemple,accéder à tous les antécédentsd’un individu, y compris dans lesautres juridictions françaises...

Bien en amont du début de l'im-plantation, des juridictionspilotes ont été choisies sur descritères de volumétrie et dereprésentativité par rapport à lamoyenne nationale (TGId'Angoulême, TGI des cours deCaen et Rouen). Cette contribu-tion a d'abord concerné la valida-tion de fiches procédurales deseptembre 2001 à novembre2002, par des réunions. Puis, lesutilisateurs des sites pilotes ontparticipé au maquettage de l’ap-plication de juin à septembre2004. Pour tester Cassiopée etcontribuer à son amélioration età son développement, ces juri-dictions ont été implantées enpremier (Angoulême en janvier2008, les TGI des cours de Caenet Rouen à l'automne 2008) et ontessuyé les plâtres d'une applica-tion expérimentale, imparfaite, etchronophage.

Sur le papier, cette applicationapparaît à terme une réellemodernisation de l'outil de travaildes juridictions pénales mais il ya loin de la théorie à la pratique.

Si chacun peut comprendre la

nécessité, après tests en labo-ratoire, de la confrontation à laréalité, nul ne peut comprendre,à part l'obstiné Ministère, lavolonté du secrétariat généralet de la direction des servicesjudiciaires de poursuivre ledéploiement à marche forcéed'un outil qui a pour consé-quence immédiate d'achever de« couler » bon nombre de juri-dictions déjà asphyxiées parl'accumulation des réformessans moyens supplémentaires(voire avec des moyens de plusen plus restreints).

Toutes les organisations syndi-cales de fonctionnaires et magis-trats, dans le cadre del'observatoire national dudéploiement Cassiopée, ontréclamé un moratoire, évoquantpour cela les chiffres catastro-phiques des retards accumulésdans les juridictions implantées.Pourtant, sans contester ceschiffres et ces difficultés, lachancellerie a poursuivi ledéploiement.

En octobre 2008 au congrès del'USM, le Secrétaire Général duMinistère, répondant aux interro-gations quant à la fiabilité dulogiciel, a indiqué que l'implanta-tion de Cassiopée dans les 175TGI cibles devrait être achevée àla fin de l’année 2009 et la pré-sentait comme un « succès endevenir ».

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Jean-Marie Bockel, lors de laséance des questions orales du11 mai 2010 a indiqué « Et je vousassure que, quand ce logicielfonctionne, il fonctionne trèsbien. Nous faisons tout notrepossible pour mettre fin aux dys-fonctionnements et rattraper lesretards bien réels que vous avezeu raison de souligner ».

UN SYSTÈME DÉFAILLANT

Pourtant, le rapport des sénateursYves DETRAIGNE et SimonSUTOUR (avis du Sénat, présentéau nom de la Commission des Lois)précisait que « lors de sa visite à lacour d’appel et au Tribunal deGrande Instance de Rouen, (le rap-porteur) a pu constater que la miseen place de l’application Cassiopéeperturbait le bon fonctionnement decette juridiction pilote (…) Il estimequ’il convient d’apporter aux juridic-tions pilotes tout le soutien logis-tique nécessaire lorsqu’elles sontconfrontées à la mise en placed’une nouvelle application de cetteampleur. A fortiori, il serait souhaita-ble que cette mise en place n’inter-vienne qu’au moment où la fiabilitéde la nouvelle application paraît suf-fisamment assurée ».

A ce jour, l'agenda n'a pas été res-pecté, non pas parce que la chan-cellerie aurait écouté les demandesdes utilisateurs, mais uniquementdu fait des difficultés rencontrées :

- les dernières juridictions (cou-ronne parisienne) serontdéployées début 2011 alors qu'enoctobre 2008 la chancellerieannonçait la date de fin 2009,- l'interconnexion avec lecasier, prévue (février 2009) en

début d'année 2010, n'est pasencore d'actualité- l'interconnexion avec la gen-darmerie n'aura lieu qu'en mars2011.

En réalité, Cassiopée est, souvent,un outil de déstabilisation des juri-dictions et de dégradation de condi-tions d'exercice des personnels, quise voient, à moyens réduits,contraints de résorber des stocksde plusieurs mois induits par l'im-plantation de Cassiopée, sans lamoindre reconnaissance de leurministère.

Ainsi, au delà du temps d'adapta-tion lié à une nouvelle application, afortiori aussi exigeante et rigide queCassiopée dans les données àenregistrer, force est de constaterque les défaillances du système ontentraîné d'importants retards sur ledéploiement.

En raison des dysfonctionnementstrop importants constatés àAngoulême, l'implantation des juri-dictions des cours de Caen etRouen, prévue en mars 2008, a étéreportée à septembre et octobre2008.... sans pour autant que tous lesdéfauts constatés aient été corrigés.

A plusieurs reprises, alors quemagistrats et fonctionnairess'étaient formés, que la juridictions'était préparée à l'implantation,gelant toute activité pour permettrela reprise des données et que lesgreffiers de l'équipe Cassiopéeétaient sur site pour permettre l'as-sistance des personnels, lesimplantations ont été reportées enraison de problèmes sur le serveurnational (TGI de la cour de Rennes

en fin d'année 2009, Charleville-Mézières et Troyes en juin 2010)obligeant notamment à changer enurgence le serveur, pour un coûtsupplémentaire de 1,5 million d'eu-ros (sur un budget estimé début2009 de 40 à 45 millions d’euros)alors qu'un nouveau serveur seranécessaire pour l'implantation enrégion parisienne.

Régulièrement, des ralentisse-ments ou même l'indisponibilité duserveur (national, régional ou local,souvent sous-dimensionnés poursupporter cette application quipasse par internet, au même titreque la numérisation, la visio-confé-rence....) empêchent les utilisateursde travailler, ou retardent considéra-blement leur travail en les contrai-gnant à utiliser les anciennesapplications encore disponibles, àgeler complètement leur activité pourles services qui ne sont plus autori-sés à travailler que sous Cassiopée,voire à ré-enregistrer à plusieursreprises des données perdues lorsdes déconnexions intempestives ;ainsi, le serveur a régulièrement étéindisponible courant 2010.

De nombreuses erreurs apparais-sent en outre dans les éditions, obli-geant les utilisateurs à une grandevigilance et à consacrer du tempssupplémentaire aux corrections.

Dans le langage Cassiopée, les édi-tions correspondent à la formalisa-tion des décisions, au documentpapier qui sera édité après fusionde toutes les données entrées aupréalable dans l'application. Outreles fautes d'orthographe, apparais-sent de nombreuses erreurs procé-durales ou des oublis flagrants.

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Ces problèmes de serveur, ceserreurs et le fait que cette applica-tion exige d'entrer de très nom-breuses données, entraînent desretards conséquents sur toute lachaîne pénale.

Les mêmes difficultés ont été évo-quées dans toutes les juridictionsayant déjà été implantées lors desvisites de l'USM.

Les deux indicateurs de perfor-mance retenus par la chancelleriesont : le nombre de procédures enattente d'enregistrement au bureaud’ordre et le nombre de jugementsen attente de frappe, ce qui poussecertaines juridictions à fausser leschiffres en exigeant des greffes quetous les jugements soient tapés,même s'ils ne sont ni relus ni signéset donc pas transmis aux servicesde l'exécution et de l'application despeines.

L'AUGMENTATION DESSTOCKS

Dans beaucoup de juridictions où lasituation était saine avant implanta-tion, les bureaux d'ordre ont vuapparaître des stocks (notammentAngoulême, Belfort, Aurillac,Nancy, Cambrai, Abbeville...) qu'ilfaut plusieurs mois pour résorber, lasituation n'étant toujours pas assai-nie près d'un an après l'implantation(Quimper, Vannes, Laval...).

A Caen, deux mois après l'implan-tation, plus de 4000 procéduresdemeuraient en attente d'enregis-trement au BO, ce service fonction-nant à 45% de son rendementnormal ; à la Roche sur Yon, près

d'un an après l'implantation, 750procédures étaient en attente d'en-registrement au BO bien que leretard se soit stabilisé ; à Bressuire,650 procès-verbaux sont en attented'enregistrement ; aux Sablesd'Olonne, le retard, qui était montéà près de 3000 procédures enattente d'enregistrement à la fin del'été, pour une implantation en juin2009, n'était résorbé qu'au prin-temps 2010 ; à Niort, le retard estmonté jusqu'à 2 500 procédures(soit plus de 19% des 13 000 PVenregistrés chaque année) ; àBeauvais, un an après l'implanta-tion, les délais d'audiencement ontaugmenté de 4 mois, desaudiences ayant du être annuléespour permettre le renforcement duBO (où ont notamment été affectéstous les vacataires) ; il y a 2 900procédures en attente d'enregistre-ment puisqu'il était possible aupara-vant d'enregistrer 300 procédurespar jour contre 100 sous Cassiopée ;à St Nazaire : augmentation de22% des dossiers en attente d'enre-gistrement, soit un retard de 6 moisentraînant une pénurie de dossiersà audiencer ; au Mans : le stock dedossiers en attente d'enregistre-ment est passé de 1500 avant l'im-plantation en janvier 2010 à 3000 ;ainsi, le 12 octobre l'enregistrementportait sur les procédures du 2 août ;à Senlis : des stocks se sont consti-tués au parquet malgré la redistri-bution des personnels entre lesservices ; ces retards ont entraînéune chute de l'audiencement, fautede dossiers, qu'il faut désormaisrattraper, et des répercussions enchaîne sur toute la juridiction.

Le retard le plus important aubureau d'ordre a été sans conteste

celui de Bordeaux première grossejuridiction implantée. Si des pro-blèmes structurels préalables ontété évoqués pour justifier une partiede ce retard, il n'en reste pas moinsque l'agenda a été mal choisi, l'im-plantation s'étant faite alors qu'il n'yavait plus ni directeur de greffe, nigreffier en chef pénal depuis plu-sieurs mois pour réorganiser lesservices en vue de l'implantation. Enjanvier 2009, avant implantation,suite à un effort important, le stockde dossiers en attente d'enregistre-ment était de 5 000 selon l'équipeCassiopée chancellerie (le chiffre de1000 ayant été avancé par ailleurs).Il était passé au printemps 2009 à25 000. En février 2010, malgré lacréation de deux postes supplémen-taires de fonctionnaires, 18 à 20 000procès-verbaux sont toujours enattente d'enregistrement.

Dans les greffes correctionnels, enseptembre 2010, la chancelleriereconnaissait que dans les 89 juri-dictions jugées représentatives(sur les 140 implantées) le retardmoyen pouvait être estimé à 4 mois.A titre d'exemples, ont été évo-quées lors de nos visites desretards conséquents un an aprèsl'implantation aux Sables d'Olonne,à Quimper, à Moulins (alors pour-tant que des audiences avaient étéannulées en prévision de l'implanta-tion) ; à Aurillac, quelques moisaprès l'implantation et alors que desretards subsistent au BO, le nombrede jugements en attente de frappecommence à gonfler ; au Mans, lestock de jugements en attente defrappe lors de l'implantation était de382 ; 10 mois plus tard, il est passéà 639 ; à St Nazaire le nombre dejugements en attente de frappe a

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augmenté de 34% entraînant unretard important à l'exécution despeines (jugements non tapés, nonsignés, 385 dossiers en attenteaprès retour des significations desjugements contradictoires à signi-fier) et donc, par voie de consé-quence à l'application des peines ;à Arras, sept mois après l'implanta-tion, plus de 500 jugements étaientencore en attente de frappe ; àBordeaux, au greffe correctionnelet à l'audiencement, les délais senormalisent. Il a été évoqué lors dela visite de l'USM, que la prépara-tion d'une seule audience par leservice de l'audiencement prenaitdésormais 24 demi journées de tra-vail contre 4 sous l'ancienne appli-cation. Le stock au greffecorrectionnel au bout d'une annéed'implantation est de 1200 à 2000jugements ce qui s'explique aussipar un poste vacant.

DES AUDIENCES DE COM-PARUTION SUR RECON-NAISSANCE PRÉALABLEDE CULPABILITÉ PLUSLONGUES

De nombreuses erreurs ont étérelevées dans les éditions des juge-ments d'homologation de CRPC(comparution sur reconnaissancepréalable de culpabilité, « plaidercoupable »).

De plus, le fait que l'application soit« verrouillée » empêche de prépa-rer à l'avance les procès verbauxd'homologation et les trames desjugements. Auparavant en effet, lestrames étaient préparées àl'avance, ne nécessitant que d'y

insérer les propositions de peinefaites le jour même par le procureurde la République juste avant l'au-dience d'homologation. Désormais,il faut attendre la proposition depeine pour préparer les trames, cequi prend énormement de temps,alors que les procès verbaux doi-vent être édités à l'audience. Pourrestreindre ces délais, la solutionserait la saisie en temps réel de laproposition de peine faite par le pro-cureur de la République, et donc laprésence d'un greffier à ce stade,ce que l'état des effectifs interdit.

Des juridictions se plaignent deslenteurs de l'application sur cetteprocédure (Avesnes sur Helpe, LaRoche sur Yon, Angoulême,Alençon, Lons Le Saunier....).Ainsi, à Valenciennes, lesaudiences d'homologation, quiduraient une heure durent désor-mais 4 heures, notamment lorsqu'ily a des victimes. A Beauvais, il n'estdésormais possible de passer que15 dossiers de CRPC par audience,contre 20 ou 25 auparavant.

Dès lors, de nombreuses juridic-tions ont fait choix de n'envisagerles CRPC que dans les procéduressans victime, voire même de ne trai-ter cette procédure que sous lesanciennes applications, notammentsur la quasi intégralité des TGI dela cour d'appel d'Amiens.

DES RÉORGANISATIONSDIFFICILES

Des problèmes sont égalementévoqués dans les procéduresrelevant du juge des libertés et dela détention (Laon, Béthune,

Bordeaux...), avec notamment deserreurs procédurales dans les édi-tions (articles manquants, cause denullité dans un contentieux touchantpourtant aux libertés).

Toute une cour d'appel étant impac-tée, il n'est pas possible pour gérerces difficultés de déléguer des fonc-tionnaires placés ou relevant d'au-tres juridictions de la même cour.

On constate que les seules juridic-tions n'ayant pas connu de retardsliés à Cassiopée ou ayant pu lesabsorber très rapidement sont depetites ou moyennes juridictions quiont pu anticiper l'implantation parune réorganisation des services,une pré-selection des dossiers àenregistrer, voire la chance d'avoirdes effectifs complémentaires lorsde l'implantation : Alençon, Dole,Compiègne, Moulins (où le stockavait été traité en intégralité avantl'implantation et les audiencesannulées le premier mois),Avesnes sur Helpe, Abbeville.

C'est donc à effectifs constants(donc en sous effectif chronique)que l'essentiel des juridictions intè-gre ces changements. Si en débutd'année 2010 la chancellerieannonçait des crédits fléchés« vacataires Cassiopée » permet-tant le recrutement de contractuelspour venir en soutien ponctuel, il nes'agissait nullement d'un budgetsupplémentaire mais d'une priorisa-tion des budgets, dans une enve-loppe contrainte et encore réduite.

Des vacataires sont donc venus enrenfort dans de nombreux endroits(Bressuire, les Sables d'Olonne,Moulins, Arras, Quimper,

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Beauvais, Senlis, Gap, Cambrai,Abbeville...), au détriment destâches habituelles auxquelles ilssont affectés (ce qui entraînera àterme des problèmes sur les ser-vices des scellés, des archives....).Il a fallu les former « sur le tas »puisque, recrutés après les sessionsde formation organisées par la chan-cellerie, ils n'ont pu en bénéficier.

Pourtant, leurs contrats étant limi-tés dans le temps, pour éviterd'avoir à leur payer de trop lourdesindemnités, ils ont déjà quitté la juri-diction quelques mois après l'im-plantation, comme à Béthune, ousont en voie de partir, laissant lespersonnels dans l'inconnu(Montpellier,...).

En termes d'économies, à l'heurede l'Etat « éco responsable » et desbudgets de fonctionnement de plusen plus réduits (au point que, sousles anciennes applications, les juri-dictions étaient régulièrement dansl'impossibilité d'imprimer des déci-sions, faute de papier), Cassiopéeest grande consommatrice depapier du fait des mises en pagedes éditions, à La Roche sur Yon,Arras…

En outre, la collecte des statistiquessera faussée pour l'année 2010concernant notamment :

- l'activité des parquets quin'ont pu procéder à l'enregistre-ment des procédures contre X,du fait de la priorité mise à l'éva-cuation des stocks ;

- l'activité des juridictions sup-primées et par voie de consé-quence les statistiques des

juridictions absorbantes, du faitdes déconnexions des serveursparfois plusieurs semaines avantla fermeture réelle empêchantl'enregistrement de l'activité surcette période, ce qui aura uneincidence sur l'ajustement deseffectifs pour l'année 2011 ;

- plus généralement, dans l'at-tente de la mise en œuvred'INFOCENTRE (qui permet lacollecte automatisée de don-nées et offre de nouveaux ins-truments de pilotage auxjuridictions), les juridictionsimplantées devaient procéder àdes comptages manuels pourrenseigner les documents rela-tifs par exemple au dialogue degestion avec la chancellerie, lerapport annuel de politiquepénale du parquet, les statis-tiques demandées régulière-ment par la chancellerie.... ;depuis, il existe une différenceentre les données recueillies vial'INFOCENTRE et un comptagemanuel...

Ces difficultés ne sont pas la preuved'un refus d'adaptation des person-nels qui s'investissent pleinementmalgré les obstacles rencontrés. Eneffet, hormis dans certaines juridic-tions (comme Bordeaux, où il estévoqué un retour 20 ans en arrière),Cassiopée, malgré ses défauts, estconsidérée comme une avancée(Valenciennes, Hazebrouck,Quimper, Auch, Briey,Montbéliard, Péronne, Abbeville...)par rapport aux applications obso-lètes qu'étaient notamment au par-quet la micro pénale et la minipénale (les fonctionnaires travail-lant encore sous DOS) voire

comme un bond en avant dans lesservices d'exécution des peines quin'étaient pour certains pas encoreinformatisés et travaillaient surfiches cartonnées.

A l'inverse, les services d'exécutiondes peines déjà informatisés trou-vent Cassiopée moins performantequ'EPWIN (Béthune, Le Mans) etdans les fonctions spécialisées dontles applicatifs métiers étaient per-formants, Cassiopée est vécuecomme une régression, bien qu'elleles intègre dans la chaîne pénale.

A l'application des peines, l'outilAPPI n'ayant que 5 années, il avaitété décidé de ne pas l'intégrer àCassiopée, mais de prévoir uneinter-connexion évitant la reprisemanuelle des données. Celle-ci,annoncée en fin d'année 2008 pourle début d'année 2009, n'est tou-jours pas effective (ni program-mée). Ainsi, alors que la connexionavec les services de gendarmeriedoit se faire en mars 2011, le boutde la chaîne pénale au sein mêmede la juridiction ne sera pas relié àl'outil Cassiopée, ce qui ne permetd'ailleurs pas d'avoir de visibilité surle taux d'exécution des décisions dejustice pénale.

UN LOGICIEL INADAPTÉPOUR LE TRIBUNAL POURENFANTS

A l'origine, Cassiopée devaitregrouper les dossiers d'assistanceéducative et les dossiers pénaux,avec une interconnexion APPI, per-mettant le traitement de toute lacompétence du juge des enfantsavec un seul outil, alors que jusqu'à

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présent, les services du tribunalpour enfants travaillaient sousWineurs pour le civil et le pénal, etsous APPI pour l'application despeines. Cassiopée devait doncconstituer une avancée.

Or le volet « assistance éducative »(enfance en danger) de Cassiopéen'a pas été développé obligeant lesservices du tribunal pour enfants àtravailler sous trois applications :Cassiopée, Wineurs et Appi, ce quimultiplie les manipulations d'autantque Cassiopée ne permet pasd'éditer un « historique » du mineurpour avoir une vue d'ensemble desa situation.

Dès lors, certaines juridictionscontinuent à travailler essentielle-ment les dossiers pénaux sousWineurs (quitte à faire un doubleenregistrement pour alimenter leBO national tout en conservant lesfonctionnalités accrues de Wineurs)même après un an d'implantation :Angers, Vannes, Cahors, Pau,Brest, Laon, Belfort, Besançon(sauf un cabinet), Compiègne,Senlis; d'autres ne travaillent dés-ormais plus qu'avec une des deuxapplications: Cassiopée àBordeaux ou Angoulême ; Wineursà Quimper, Lons Le Saunier, Brest,Soissons malgré l'annonce de lasuppression, à terme, de cetteapplicatif métier.

L'INSTRUCTION : UNE VER-SION NON ABOUTIE

Au prétexte de la réforme de la pro-cédure pénale et du projet de sup-pression du juge d'instruction, laversion instruction n'a pas connu

d'évolution depuis plus d'un an, l'in-cidence essentielle pour les greffesétant donc le double enregistrementdes dossiers sous Cassiopée (pours'inscrire dans la chaîne pénale etassurer la reprise des données parl'audiencement et le parquet) etsous Winstru pour respecter l'obli-gation légale de transmission desnotices semestrielles au présidentde la chambre de l'instruction et per-mettre à cette juridiction d'effectuerun contrôle effectif de l'activité descabinets (cette fonctionnalité, pour-tant prévue par la loi, n'ayant pasété envisagée dans Cassiopée).

Cela entraîne une augmentationconsidérable du travail de greffe(estimée à Libourne ou Compiègneà 4 à 5 fois le temps que nécessitaitWinstru).

Ce double enregistrement, ajouté àl'inaccessibilité régulière du serveurest aussi source d'erreur : le greffierqui, dérangé dans son travail, auraenregistré un changement d'avocatsous Cassiopée et non sousWinstru, prend le risque, en casd'impossibilité de se connecter àCassiopée (ce qui, nous l'avons vu,n'est pas une hypothèse d'école), etconfronté à l'urgence, de notifierune décision au mauvais avocat...De plus, Cassiopée n'est pas enl'état adapté au traitement des dos-siers complexes (plusieurs auteurset/ou infractions) que l'on trouvenotamment à l'instruction (instruc-tions visant des home-jaking, destrafics de stupéfiants, des infra-ctions commises en bande organi-sée...), ce à quoi la chancelleriecommence à réfléchir.

Autre détail qui a son importance :

l'utilisateur est déconnecté automa-tiquement après 50 minutes sansmanipulation, ce qui n'est pas rare àl'instruction et a entraîné, dans denombreux cabinets (qui n'avaientpas été informés de cette particula-rité), la perte de toute la partie d'in-terrogatoire déjà retranscrite. Il n'estpas non plus possible, du fait duverrouillage du système, de prépa-rer une ordonnance la veille pour lelendemain.

Pour toutes ces raisons, Cassiopéen'est pas utilisée dans de nombreuxcabinets d'instruction (sauf le dou-ble enregistrement pour alimenterla chaîne pénale) : Nantes,Béthune, Valenciennes, Saumur,Vannes, Cahors, Pau, Brest,Laon, Belfort, Besançon,Compiègne, Senlis, SaintNazaire, Bergerac, Cambrai,Saint Omer, Vesoul, Soissons,Caen, Lisieux...

Ce n'est finalement que de manièreanecdotique que l'application estmajoritairement utilisée : Sablesd'Olonne, 3 des cabinets borde-lais, Arras et elle n'apparait utiliséeà 100 % qu'à Abbeville où lesnotices semestrielles, en accordavec la chambre de l'instruction, nesont donc plus transmises selon laforme prévue d'autant que toutesles données enregistrées sousWinstru ne pourraient être reprisespar la juridiction absorbante à la fer-meture du TGI en décembre 2010.

UNE FORMATION A L’AP-PLICATION CHAOTIQUE

Dans de nombreuses cours, pourdes questions budgétaires, tous les

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fonctionnaires et magistrats ame-nés à travailler sur la chaîne pénalen'ont pu recevoir la formation (unejournée de formation générale etdeux jours sur une fonction spéciali-sée) soit parce qu'elle n'était pasproposée, soit parce que les datesétaient diffusées tardivement :Avesnes sur Helpe, Montbeliard,Arras, Béthune, Dunkerque...d'autant que cette formation n'étaitpas obligatoire.

De plus, il est unanimement relevéque Cassiopée est une applicationqui est basée sur une bonneconnaissance de la procédure,alors qu'elle a vocation à être utili-sée majoritairement par des fonc-tionnaires de catégorie C (voire desvacataires) qui n'ont pas toujoursles bases suffisantes sur l'ensemblede la chaîne pénale.

Cette absence de formation de tousles personnels pose problème encas de changement de service ausein d'une même juridiction ou demutation. De plus, l'ENG et l'ENMn'ayant pas été intégrées au pro-gramme de formation, les promo-tions entrant en fonction ne sontpas formés à l'outil. Ainsi, le jour dela présentation de Cassiopée àl'ENM pour la promotion qui vientd'entrer en fonction, le serveur étaitindisponible..... la présentation n'adonc eu lieu qu'à partir d'écransfixes, présentés à un amphithéâtreregroupant des dizaines de futursparquetiers, juges des enfants,juges d'instruction...

Dès lors, même là où Cassiopéeétait utilisée, les changements depersonnels vont entrainer unerégression : à Arras, les deux cabi-

nets d'instruction fonctionnaientmajoritairement sous Cassiopée ;l'entrée en fonction d'un juge sortantd'école et d'un greffier non formé àcette application vont réduire l'utili-sation de Cassiopée de 50%...

Le ministère aurait pu tirer lesenseignements du déploiementd'autres applications récentes, parla « mission modernisation » :

LES AUTRES APPLICA-TIONS INFORMATIQUES

L'application APPI, pour l'applica-tion des peines, via intranet justiceet dont les lenteurs avaient réguliè-rement été dénoncées ; si sur cepoint, au bout de 5 ans, la situations'est améliorée, tous les juges d'ap-plication de peines (notamment àLille, Boulogne sur Mer, SaintOmer, Dunkerque, Abbeville,Cambrai, Bergerac, Thionville)dénoncent encore l'impossibilitéd'éditer des statistiques dans uncontentieux qui appelle pourtant demanière très régulière desdemandes d'informations chiffréesde la part de la chancellerie elle-même, incapable de fournir lesoutils adaptés à ses propresbesoins.... De plus, aucune mise àjour n'a été faite depuis l'entrée envigueur de la loi pénitentiaire et dela loi visant à amoindrir le risque derécidive criminelle, pourtant votéesen novembre 2009 et mars 2010.

MINOS, destinée au traitement descontraventions, application décritecomme particulièrement chrono-phage (lenteur et complexité) danssa version 1 (Boulogne sur Mer,Avesnes sur Helpe) entraînant une

augmentation des stocks ; siMINOS 2 a amélioré la situation, ilexiste encore de nombreusesdéconnexions intempestives et leséditions sortent parfois en alphabetcyrillique (Saint Omer).

TUTI, logiciel de suivi des dossiersde tutelle qui n'a pas subi d'adapta-tion en vue de l'absorption de trèsnombreux TI, obligeant les TIabsorbant à ré-enregistrer les don-nées de tous les dossiers de la juri-diction supprimée pour éviterqu'elles n'« écrasent » tous les dos-siers enregistrés sous un mêmenuméro dans le tribunal absorbant(même quand les logiciels sontcompatibles) : Avesnes sur Helpe,Peronne, Tarascon... Les tramesn'ont en outre pas été adaptées à laréforme des tutelles pourtant entréeen vigueur depuis de nombreuxmois, obligeant chaque tribunald'instance à créer ses proprestrames, aucune alerte n'étant parailleurs prévue pour les fins demesure de protection (points rele-vés à Avesnes sur Helpe,Peronne) ; quand les trames exis-tent, elles sont imparfaites et nesont pas modifiables aisément (lesSables d'Olonne). La juridiction bordelaise évoqueen outre les nombreux bugs de l'ap-plication qui ne permettent pasl'édition de statistiques.

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LA RÉFORME DE LA CARTE JUDICIAIRE

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En juin 2007, lorsque RachidaDati a posé les principes de laréforme de la carte judiciaire,elle a expliqué que cetteréforme était nécessaire dansl'intérêt des justiciables souhai-tant une justice de qualité, pouraméliorer le fonctionnement desjuridictions, favoriser une poli-tique judiciaire coordonnée,adaptée aux évolutions du droitet mieux comprise et assurerune bonne administration de lajustice.

Dans son discours, elle avaitexpliqué que les critères deréforme de la carte judiciaireseraient :

- l'évolution de l'activité desjuridictions- l'évolution démographiqueet économique- les caractéristiques géo-graphiques- le nombre de magistrats etde fonctionnaires- l'effectif des professionsjudiciaires (avocats...)- les enjeux immobiliers.

Malheureusement, ces annoncesne correspondent pas à la réalitéde la réforme de la carte judiciaireoù les considérations politiquessemblent l'avoir souvent emportésur les principes au point queceux-ci ne sont absolument pas

lisibles et sont contredits par denombreuses exceptions...

Certains tribunaux suppriméslaissent un « désert judiciaire »sur une partie du territoire natio-nal, restreignant ainsi trèsconcrètement l'accès à une jus-tice que la Chancellerie reven-dique par ailleurs comme plusproche du justiciable...

Par ailleurs, la réforme doit semettre en œuvre sans moyensadaptés.

En 2007, lors des annonceseffectuées par Rachida DATI, unbudget global de près de 900 mil-lions d’euros avait été promis. Cebudget global a été ramené peuaprès par le secrétaire général duministère à 427 millions d’eurosdont 385 pour l’immobilier.

Au titre du budget 2008, seulsquelques millions d’euros ont étédégagés. 80 millions supplémen-taires l’ont été dans le budget2009, dont 44 millions pour l’im-mobilier.

77 millions d’euros pour l’immo-bilier, 4,5 au profit des person-nels, 7 pour accompagner lesavocats et 12 pour les crédits defonctionnement ont été prévusau budget 2010.

Le projet de budget 2011 neconsacre plus en crédits de fonc-tionnement courant que 3,9 mil-lions d’euros (autorisationsd’engagement) et 4,2 millionsd’euros (crédits de paiement)pour la mise en œuvre de laréforme de la carte judiciaire.40,5 millions d’euros devraientpar ailleurs être débloqués pourpoursuivre les mandatements etordonnancements de dépensesen matière immobilière.

Au final sur les 3 années definancement de cette réforme, ondemeure donc très loin desannonces initiales : moins de 250millions d’euros auront pu êtredébloqués sur les 4 exercicesbudgétaires concernés.

Courant 2009 un certain nombrede tribunaux d’instance et 2 tri-bunaux de Grande instance ontété fermés. Au 1er janvier 2010,ce sont près de 200 tribunauxd’instance qui ont été suppri-més. Au 1er janvier 2011, 21 TGIfermeront.

C'est donc une réforme sansmoyens dédiés, insuffisammentpréparée et dont l'objectif pré-tendu de « rationalisation » setraduit en réalité par de nouvellessuppressions inquiétantes depostes.

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L'OBJECTIF NON AVOUÉDE LA RÉFORME DE LACARTE JUDICIAIRE DESTRIBUNAUX D'INSTANCE :LA SUPPRESSION DENOMBREUX POSTES

L’USM ne peut que déplorer queses craintes, largement dévelop-pées au moment de l'annonce de laréforme de la carte judiciaire, sevérifient : de multiples fermeturesde Tribunaux d'Instance se caracté-risent par des suppressions conco-mitantes de postes de magistrats etde fonctionnaires.

Des postes de magistrats sup-primés

Ainsi, à Charleville Mézières, 4 des5 magistrats des TI du ressort sub-sistent après la suppression des TIde Rethel et Rocroy ; à Besançon,un poste de juge d'instance a étésupprimé et seuls 2 des 3 fonction-naires du TI ont rejoint le TI absor-bant ; le magistrat du TI de Hayangen’a pas été remplacé lorsque le TI aété absorbé par le TI de Thionville ;les 2 juges instance d’Issoire etd’Ambert, qui participaient au TGIde Clermont Ferrand, ont quitté lajuridiction sans être remplacés ; dufait du rattachement des TId’Aubusson et de Bourganeuf auTI de Guéret, un poste de magistratest perdu ; de même, l’absorptiondes TI de Limoux et Castelnaudarypar le TI de Carcassonne se traduitpar la suppression de 2 postes ;Chambéry et Grenoble ont accueillile contentieux des TI supprimés deleur ressort, mais sans transfert desmagistrats, ni des greffiers, et sans

locaux… Tarbes a perdu un juged’instance ; Montpellier, qui aabsorbé le TI de Lodève, a vu undemi-poste de juge d’instance sup-primé ; le TI du Puy en Velay, qui aaccueilli Brioude et Yssingeaux, necompte que 3 des 4 magistrats telsque prévus ; le TI de Vesoul vaabsorber celui de Gray à moyensconstants (les postes de juge etfonctionnaires sont supprimés) ; leposte de vice président du TI deHayange a été supprimé du fait del'absorption par le TI de Thionville ;de même, celui du TI deBarcelonnette, rattaché àManosque, celui de Toul (rattaché àNancy), Chambéry, Grenoble,Albertville (-1 du fait de la suppres-sion des TI de Moutiers et de SaintJean de Maurienne), Charleville-Mézières (-1 sur 5), Châlons enChampagne (-1), Poitiers (-1),Saintes (-1), Angoulême (-2), lejuge d'instance d'Arles n'a pas rejointTarascon ; le TI de Perpignan n’aaccueilli qu’un des 2 juges d’ins-tance des TI de Ceret et Prades ; leTI de Béziers a absorbé les TI deSaint Pons, Pezenas, Bedarieux,sans aucun apport de magistrats nide fonctionnaires et alors même queles juges d’instance continuent departiciper au service général du TGI ;Aurillac a perdu l’un des 4 jugesd’instance du ressort, « transformé »en juge du siège pour le TGI.Cependant, les juges d’instance par-ticipaient déjà au contentieux du TGIde sorte qu’il s’agit d’une perte pourle TI, d’environ 25%.

Du fait du rattachement des TI deSaint Calais et de Mamers au TIdu Mans, on ne peut pas considé-rer qu’il y ait eu une nouvelle sup-pression de poste puisque le poste

de juge d’instance de Saint Calaisétait déjà supprimé depuisquelques années.

Comme l’USM l’avait expliqué aumoment de l'annonce de la réformede la carte judiciaire, la suppressiond’un poste de juge d’instance peutavoir des répercussions directessur les autres services du TGIlorsque le juge d’instance participe(parfois de manière très importante)aux autres contentieux du TGI. Lesjuridictions supprimées sont juste-ment celles dans lesquelles le juged'instance occupait souvent près de50% de son temps au TGI.

Même lorsque le poste du juged’instance n’est pas supprimé, lafermeture du Tribunal d’instance lui-même induit de nouvelles chargespour le magistrat, souvent dans desressorts particulièrement pauvres etmal desservis.

Le juge d’instance doit multiplier les« tournées » d'auditions de tutellespour entendre les personnes qui nepeuvent se déplacer au tribunal derattachement, en l’absence detransports en commun, voire mêmeprévoir des audiences forainesdans les locaux du TI officiellementsupprimé.

Le juge qui pourtant participaitjusqu’alors au service du TGI doitalors être déchargé de certainscontentieux. La charge de travail denombreux magistrats est ainsialourdie.

Des postes de fonctionnairessupprimés

La réforme de la carte judiciaire des

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tribunaux d'instance est égalementsynonyme de suppression depostes de fonctionnaires.

Un seul des 4 greffiers de Hyèresest arrivé au TI de Toulon ; 1 seuldes 4 fonctionnaires de Pithiviersest effectivement arrivé à Orléans ;seuls 8 des 10 greffiers et fonction-naires des TI de Chinon et Lochesont rejoint la juridiction de Tours ; leTI de Chalons en Champagne, quia absorbé Vitry le François,Epernay et le greffe détaché deSézanne, perd 7 fonctionnaires, etplusieurs vont partir en retraite ;Senlis subit la perte de 2 greffiers ;4 postes de greffiers et fonction-naires ont été perdus, du fait de lasuppression du TI de Vendôme etRomorantin-Lanthenay, rattachésà Blois ; le TI de Metz ne vaaccueillir qu’un seul des 5 fonction-naires en activité à Château-Salinsavant sa suppression (étant préciséque 2 postes de greffiers en chefont été perdus, y compris depuisplusieurs années) ; pour ce mêmeTI de Metz, sur 14 fonctionnaires enposte avant la suppression desgreffes détachés de Faulquemont,Bouzonville et Phalsbourg, 9 seu-lement ont rejoint la juridiction derattachement ; seules 3 des 8 per-sonnes affectées aux TI deLoudun, Montmorillon et Civray,absorbés par le TI de Poitiers ontrejoint cette juridiction (4 postesayant été offerts à la CAP, un posteest au moins perdu) ; le TI deRochefort a absorbé le TI deMarennes mais n’a récupéré que5,5 de ses 10 ETPT ; le TI deNeufchâtel n’a vu qu’un de ses 5agents rejoindre le TI de Dieppe ; lasuppression du greffe détaché dePessac et des TI de Bazas, La

Réole et Lesparre où travaillaient13 fonctionnaires ne s’est traduiteque par l’arrivée de 6 personnes àBordeaux ; l’absorption du TI deMolsheim et du greffe détaché deSarre-Union par le TI de Savernes’est accompagnée de la suppres-sion de la moitié des greffiers etfonctionnaires ; à l’absorption du TIForbach par celui de Saint-Avold(ressort de Sarreguemines), 1poste de greffier a été supprimé ;2,5 postes ont disparu en mêmetemps que le TI de Lodève ; seuls 3des 5 fonctionnaires du TI deLongwy ont rejoint le TI de Briey ;après la suppression des TI deBrioude et Yssingeaux, 4 à 5 per-sonnes (sur 14) n’ont pas rejoint leTI du Puy en Velay ; seule la moitiédu personnel des TI deCastelnaudary et Limoux a purejoindre le TI de Carcassonne lesaccueillant alors que ce TI est éga-lement en sous-effectif de magis-trats ; seule la moitié du personneldu TI de Loudéac a été récupéréepar le TI de Saint Brieuc, déjà ensous-effectif chronique (c'est ainsique 200 Injonctions de Payer ontété déclarées caduques en l'ab-sence de renforcement du greffe) ;la moitié du personnel du greffedétaché de Creil, rattaché à Senlis,a été perdue ; 3,5 postes du TI deClermont de l'Oise, rattaché àBeauvais, ont été supprimés ;aucun des 3 fonctionnaires du TI deGray n'a rejoint le TI de Vesoul ; iln'y a aucun transfert de fonction-naires du TI de Ecouen à Gonesse ;3 personnes du TI de ChambonFeugerolles n'ont pas rejoint le TIde Saint Etienne ; 1 seul des 2postes de fonctionnaires du TI deBarcelonnette a été rattaché àManosque ; seuls 2 des 5 fonction-

naires du TI de Toulle sont venus àNancy ; seul 1 des 2 fonctionnairesdu greffe de Pont à Mousson arejoint Nancy ; 2 fonctionnaires sur3 des TI de Moutiers et Saint Jeande Maurienne sont arrivés àAlbertville ; 1 seul des 4 fonction-naires du TI de Hyères est arrivé àToulon ; du fait de la suppressiondu TI de Paimboeuf et de la dispa-rition progressive des greffes déta-chés de Savenay et Guérande, ilpeut être conclu que la réforme dela carte judiciaire a entraîné la dis-parition de 8 postes à Saint-Nazaire. Tous les fonctionnairesdes TI de Carvin et Liévin n'ontpas rejoint Lens ; de même àCharleville-Mézières ; à Châlonsen Champagne, la fermeture de 3TI s'accompagne de la perte de 7fonctionnaires ; 1 des 3 fonction-naires du TI de Melle n'a pas rejointNiort ; 5 des fonctionnaires des 3 TIabsorbés par le TI de Poitiers n'ontpas rejoint celui-ci ; 4 des fonction-naires du TI de Maresnes n'ont pasrejoint Rochefort ; 1 fonctionnairede Saint Jean d'Angely n'a pasrejoint Saintes ; Libourne a perduplus de 3 fonctionnaires ; 2 fonc-tionnaires de Baugé n'ont pasrejoint Saumur ; plus de la moitié(7 sur 13) des postes des 3 TIabsorbés par Bordeaux a été sup-primée ; de même à Cognac etAngoulême ; à Besançon, seuls 2des 3 fonctionnaires du TI suppriméont rejoint le TI absorbant ; du faitde la suppression du greffe détachéde Sarre-Union, le TI de Saverne arécupéré tout le contentieux maisaucun personnel.

C’est ainsi la moitié des postes desfonctionnaires des TI qui est suppri-mée, contrairement aux déclara-

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tions faites lors de l’annonce de laréforme de la carte judiciaire.

Pourtant, l’entrée en vigueur conco-mitante de la réforme des tutellesentraîne un surcroît d'activité à l'ins-tance, qu'il est difficile de mettre enœuvre concrètement.

Les autres réformes (pénitentiaire,implantation Cassiopée.....) ont desrépercussions sur l'activité desfonctions spécialisées au TGI, lesempêchant souvent de participer auservice général et d'apporter uneaide aux tribunaux d'instanceengorgés.

LES CONTRAINTES MATÉ-RIELLES LIÉES AUX SUP-PRESSIONS DE TRIBUNAUXD'INSTANCE

De nombreux tribunaux d'instanceétaient installés, souvent conforta-blement, dans des locaux mis à dis-position par les collectivités locales.

Les tribunaux d'instance absor-bants sont généralement trop exi-gus pour permettre l'accueil desdossiers et du personnel des juridic-tions supprimées. Ainsi, dans denombreux ressorts, il a été néces-saire de louer ou d'acheter deslocaux pour réimplanter les tribu-naux d’instance regroupés.

Ces coûts locatifs pèsent lourdementsur les budgets des juridictions. A cetégard les sommes relativementmodestes affectées à ces dépensesdans le projet de budget ne peuventqu’inquiéter.

De nouveaux locaux doivent être

trouvés pour organiser des démé-nagements : à Tarbes, les servicesde l’instance sont donc installésdans deux locaux distincts ; du faitde la suppression du TI de Lodève,les magistrats du TI de Montpellierse transportent à la maison de jus-tice de Lodève pour y recevoir lesjusticiables, outre les visites detoutes les maisons de retraites duressort.

En accueillant les TI de Biarritz etde Saint Palais, le TI de Bayonne,jusqu'alors situé dans le bâtiment duTGI, n'a pu loger tous les servicesdu TI en un lieu unique. Un localextérieur est ainsi loué, pour unesomme de 4500 euros par mois(outre les travaux d'aménagement)pour les tutelles "majeurs", alors queles autres services du TI demeurentdans les locaux du TGI. Ce nouveaubâtiment, accueillant des popula-tions particulièrement fragilisées,n'est pas sécurisé ni ne disposed'un accès handicapé "fléché".

Du fait de l'absorption, par le TGId'Arras, du TI de Saint Pol surTernoise, jusqu'alors hébergé gra-tuitement par le Conseil Général, etdu Tribunal de commerce deBéthune, une réorganisation deslocaux a été nécessaire, par l'acqui-sition d'un bâtiment, pour un coûtde 900 000 euros. Par ailleurs, lesjusticiables peinent à rejoindre cenouveau Tribunal d'Instance enl'absence de transport en commun.

Les juridictions du livre foncier deSarrebourg, Château Salin etBoulay (pour lesquelles l'Etat étaitpropriétaire des locaux) ont étéregroupées dans une annexe louéepar le TGI de Metz auprès de la gare.

La suppression du TI de Pithivierset la nécessaire réorganisation deservice engendrent un problème deplace à Orléans.

Alors que les locaux des TI deChinon et Loches étaient mis àdisposition à titre gracieux, il estnécessaire de louer des locauxpour le TI absorbant à Tours, pourun coût de 18 000 euros par mois.

Le TI de Colmar doit faire l'objet degros travaux pour permettre l'ac-cueil des services rapatriés deRibeauvillé, de Sainte Marie auxMines, de Kayserberg et deMunster suite à la réforme de lacarte judiciaire. Des gros travauxd'aménagement sont nécessairesau TI, sur 3 ou 4 ans : il faut refaireune dalle qui ne supporterait pas lacréation d'un étage. Les locaux deKayserberg appartenaient à l'Etatet ont été revendus.

De même pour le Livre foncier deMolsheim. Les Conseils dePrud'hommes de Saverne etMolsheim ayant fusionné, des nou-veaux locaux ont du être loués etaménagés, entraînant un coûtfinancier important.

Le TGI du Puy en Velay ne pouvaitplus accueillir le TI, absorbant 2autres juridictions. Des locaux ontdu être acquis, à distance du TGI,sans sécurité ni portique.

Il a été profité de la réforme de lacarte judiciaire pour réorganiser lesservices du TGI au sein du palaisde justice de Metz. Le TI a ainsi étéremembré par délocalisation dulivre foncier dans des locaux pris enlocation près de la gare et du

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Registre du commerce, dans deslocaux initialement occupés parl'application des peines. Le servicede l'application des peines a réinté-gré le TGI et le TPE a été installé aurez-de-chaussée.

Les magistrats arrivés au TI deMetz ou au Livre Foncier se sontretrouvés sans matériel informa-tique et sans mobilier lorsque ledéménagement a été planifié sur lapremière quinzaine de janvier alorsque la plupart des avocats et huis-siers avaient bloqué les procéduresdurant le mois de décembre 2009.En raison des travaux entreprispour l'accueil du service d'applica-tion des peines et du TPE, une par-tie du service du droit local a duprovisoirement déménager avantl'installation définitive dans d'autreslocaux. Plusieurs services et lesmagistrats du TI ont du subir plu-sieurs déménagements dans deslocaux provisoires avant installationdéfinitive. Une partie du mobilierdes juridictions supprimées a étéstockée dans les couloirs, faute deplace, et l'autre a été détruite, ycompris des armoires murales....Iln'y a pas eu d'informatique et detéléphone pendant plusieurs jours.

A Blois, il a été nécessaire deréaménager les horaires de travailpour permettre aux personnels deprendre le bus pour rentrer à leurdomicile de Vendôme ouRomorantin.

Le TGI de Soissons a du réaliserdes travaux pour l'intégration du TIde Château Thierry, par l'aménage-ment de combles. Mais ces travauxs'avèrent d'ores et déjà insuffisants.En effet, le TGI doit accueillir, en

outre, en urgence, le Conseil dePrud'hommes logé jusqu'à présentdans des locaux très anciens et nonentretenus, dont le bail est résilié etqui n'a pas les moyens de financer lalocation d'autres locaux.

UNE RÉFORME ÉLOIGNANTLES JUSTICIABLES DESJURIDICTIONS

La Chancellerie présente le Tribunald'Instance comme une juridiction« proche et accessible »...qui traitela plupart des petits litiges de la viequotidienne (le TI traite en effet leslitiges civils portant sur une sommeinférieure ou égale à 10 000 euroset a compétence exclusive pourd'autres contentieux, dont certainsconcernent les personnes les plusdémunies : crédit à la consomma-tion, résiliation de bail d'habitation,régimes de protection...).

Pour autant, loin de favoriser lemaintien d'une justice accessible àtous, la réforme de la carte judiciaire,en créant de larges zones géogra-phiques sans tribunal, contraint lesjusticiables à parcourir de très nom-breux kilomètres, parfois dans desconditions difficiles.

Concrètement, ce désert judiciaire setraduira à terme par une baisse ducontentieux : les justiciables renon-ceront à introduire une procédurepuisque les frais (transports, voirehébergement) qu'ils devront engagerseront trop importants au regard deleur demande : d'autres ne se pré-senteront pas aux audiences et ver-ront des décisions rendues à leurencontre sans avoir pu faire valoirleurs arguments au cours d'un débat.

La justice d'instance risque de neplus avoir d'intérêt que pour les jus-ticiables les plus favorisés.

Concomitamment, les diminutionsd’effectifs auront pour effet d’aug-menter les délais dans les procé-dures que les justiciables pourrontdiligenter.

Suite à la suppression des 2 TI rat-tachés à celui du Puy en Velay,aucun tribunal ne subsiste entre lePuy en Velay et Clermont-Ferrand,distants de 2 heures et de 125 kilo-mètres. Cette suppression, incom-prise, est mal vécue : lesjusticiables ne peuvent se déplaceret être présents aux audiences.

Le TI de Paimboeuf, supprimé etrattaché au TI de Saint Nazaire, à21km, se justifiait davantage avantla création du pont de Saint Nazairemais l'accès au TI de Saint Nazaire,reste difficile et la distance toujoursimportante pour les populationssans ressources et sans moyens delocomotion. Le déplacement du TIvers Pornic aurait été plus rationnel.Par ailleurs, le TI de Saint Nazaire adu absorber celui de Paimboeufsans surface supplémentaire et unproblème s'est posé pour la nou-velle organisation du stockage desdossiers de tutelle. Enfin, pendant 5mois, les services ont dû fonction-ner avec deux bases de donnéesdistinctes.

Le TI de Barcelonnette, suppriméet rattaché à Manosque, est situé à1H40 de route de celui-ci. Pourautant, il n'y a pas de transports encommun. De même, pour le TI deCarvin, absorbé par Lens, et le TId'Houdain, absorbé par Bethune,

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alors même que les populations dubassin minier sont peu mobiles,ainsi que pour les justiciables duConseil de prud'hommes deMolsheim, qui ne peuvent sedéplacer à Saverne, en l'absencede transports en commun. Demême, à Blois une diminutionsignificative de la présence auxaudiences peut être notée.

Des constats similaires peuvent seretrouver dans de très nombreuxressorts.

La fermeture du Tribunal d’instancede Sartène et du greffe détaché dePorto-Vecchio apparaît à tous lesprofessionnels du droit comme uneabsurdité totale, compte tenu de cequ’il n’existe aucun transport ferro-viaire dans cette partie sud de laCorse et de ce que les autres trans-ports en commun, par route, n’ysont pas fréquents non plus. Ainsi,plus de 4h de voiture peuvent êtrenécessaires à un justiciable du res-sort de Porto-Vecchio pour se ren-dre à Ajaccio. Le sud de l’îleapparait désormais comme un véri-table désert judiciaire.

Parallèlement, à Paris, les 20 tribu-naux d'instance ont été maintenus,certains n'étant éloignés que d'uneou deux stations de métro...

LA RÉFORME DE LACARTE JUDICIAIRE DANSLES TGI : DES SITUATIONSINQUIÉTANTES

La fermeture de 21 TGI sera effec-tive au 1er janvier 2011.

On peut d'ores et déjà prévoir,

comme l'USM l'avait dénoncé, que denombreux postes seront supprimés.

En l'attente de ces fermetures, lesjuridictions impactées, qui jusqu'alorsfonctionnaient correctement, peinentà remplir leurs missions, tandis queles juridictions absorbantes s'inquiè-tent des conditions pratiques danslesquelles elles accueilleront lecontentieux et le personnel des juri-dictions supprimées.

La Chancellerie avait annoncé destextes portant adaptation du codede l'organisation judiciaire et sur le« sort des procédures en cours encas de suppression d'une juridic-tion ». Ces textes sont importantsconcrètement puisque, par exem-ple, la question d'une convocationou d'un renvoi, après le 1er janvier2011, devant une juridiction qui n'estactuellement pas compétente terri-torialement pour statuer sur uneaffaire, nécessite un aménagementdes textes.

Mais, le décret promis n'a finalementété publié que le 20 octobre 2010,c'est à dire trop tardivement pour lesjuridictions déjà confrontées au pro-blème. Certaines avaient donc cessétoutes convocations depuis plusieursmois dès lors que ces convocationsauraient été adressées pour unedate postérieure au 1er janvierdevant la juridiction absorbante. Desdossiers sont donc en attente.D'autres ont choisi de renvoyer ouconvoquer pour des audiences de lajuridiction absorbante malgré l'ab-sence de textes, en accord avec lesavocats et la cour d'appel, en envisa-geant d'ores et déjà de nouvellesconvocations pour le cas où justicia-ble concerné ne comparaîtrait pas.

Par ailleurs, le manque d'anticipa-tion des conséquences concrètesdes déménagements de juridictionsinflue directement sur le traitementdu contentieux civil par les juridic-tions. En effet, chaque juridiction,absorbante et absorbée, disposed'une base de données des dos-siers civils, qui ne peuvent êtrefusionnées entre elles. La juridictionabsorbante devra donc gérer deuxbases distinctes en parallèle, avecdes conséquences chronophagespour la mise en état des dossiers (laprocédure de préparation des dos-siers avant audience). Pour éviterun tel écueil, certaines juridictionsont décidé de réenregistrer tous lesdossiers de la juridiction absorbée,ce qui engendre une perte detemps indéniable et un effet faussédes statistiques (par un accroisse-ment artificiel de l'activité).

DES JURIDICTIONSABSORBÉES EXSANGUES

A Hazebrouck, juridiction suppri-mée, 3 postes sont vacants, dont 2au parquet (et un seul placé), alorsmême que le Procureur, qui seretrouve donc seul, doit organiser lafermeture de sa juridiction. Entreseptembre 2010 et la fermeture duTGI, seuls le juge d’instance, le Vice-président assurant l’intérim du prési-dent et le procureur subsistent, etsont aidés par 4 magistrats placés.

En l’attente de sa fermeture, lasituation de Bernay est catastro-phique puisque 3 collègues restenten poste actuellement. Pendantl’absence de l’un d’entre eux, le tri-bunal tente de « fonctionner » avec2 magistrats du siège, outre le

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Parquet et la moitié du personnelde greffe (6 sur 12 personnes).

A Riom, 2 magistrats placés sup-pléent les 5 magistrats encore enposte. Cependant, il n’y a plus niPrésident, ni Procureur, ni greffieren chef. Un avocat général est pro-cureur deux jours par semaine.

En l'attente de sa fermeture, le TGIde Morlaix ne fonctionne qu’avec 11fonctionnaires. Le TGI de Rochefortdoit poursuivre son activité jusqu'àsa fermeture sans Président et avecdes délégations de magistrats pla-cés et de La Rochelle.

De même, le TGI de Saumur,absorbé par celui d'Angers, doitfonctionner, entre juillet et décembreavec seulement 4 magistrats dusiège, dont 2 du TI et plusieurs délé-gations de la cour. Le parquet estuniquement constitué d'un magistratplacé et du Procureur, dont l'installa-tion dans ses nouvelles fonctions aété différée. Cependant, la chargede travail est particulièrement lourdepour deux parquetiers et sourced'importantes inquiétudes.

En l'attente de sa fermeture, la juri-diction d'Avranches est, elle aussi,dans une situation difficile, et fonc-tionne grâce aux délégations exté-rieures : un vice-procureur, unvice-président instance et un juged'application des peines (à mi-temps). Par ailleurs, le déménage-ment de la juridiction est prévu du13 au 17 décembre et la gestiondes audiences urgentes, au pénal,risque d’être problématique, en l'ab-sence de matériel et pour composerles audiences correctionnelles col-légiales.

Le TGI de Saint-Dié-Des-Vosges, rattaché à Epinal, estcontraint de fonctionner en sous-effectifs jusqu'à sa fermeture : 2postes de magistrats sur 7 ne sontpas pourvus et 13 postes de per-sonnel de greffe sont vacants,seuls 6 fonctionnaires demeuranten juridiction. Depuis le 1er sep-tembre, les magistrats rédigentdes décisions qui ne peuvent êtrenotifiées, faute de greffe. Lesaudiences seront donc réduites àcompter de novembre.

A quelques semaines de la ferme-ture du TGI d'Abbeville absorbépar Amiens, 12 postes de greffe,sur 19, demeurent pourvus, maissans greffier en chef. Les prépa-ratifs pour la fermeture ont étécompliqués par les vacances deposte des Président (pendant 6mois) et Procureur. Le déménage-ment est prévu pour le 17 décem-bre, ce qui va poser des questionsmatérielles, pour le personnelcontinuant de travailler dans cettejuridiction, vide, jusqu'au 31décembre.

Le TGI de Saint Gaudens, absorbépar Toulouse, alors que la juridic-tion comptait 5 magistrats du siègeet 2 du parquet, doit poursuivre sonactivité jusqu'à sa fermeture avecseulement 3 magistrats du siège et2 du parquet, outre, parfois, unmagistrat placé. Le parquet ne fonc-tionne qu'avec des fonctionnairesplacés.

Dans l'attente de sa fermeture au1er septembre 2010, le TGI deBressuire a fonctionné depuis ledébut de l'année avec 4,5 ETPT(dont 1,5 magistrats placés).

UNE RÉFORME INCOHÉ-RENTE : DES PRINCIPES ?SURTOUT DES EXCEPTIONS

La situation de la juridiction deColmar compétente sur deuxdépartements (Haut-Rhin et Bas-Rhin) n'a pas été prise en comptedans le cadre de la réforme de lacarte judiciaire. Pourtant, une tellesituation entraîne des contraintesmatérielles particulièrement lourdespour les magistrats : participationsaux réunions des deux départe-ments pour le schéma départemen-tal de protection de l'enfance, pourla sécurité routière....

La réforme de la carte judiciairedans le Nord-Isère a été, et restegérée de manière « abracada-brante » : depuis de nombreusesannées était avancée l’idée d’ununique tribunal du Nord-Isère, vouéà regrouper les TGI de Vienne etde Bourgoin-Jallieu. Alors que lesite de Bourgoin-Jallieu disposaitde plusieurs solutions immobilièresdans la ville même, dont le terrainde l’ancienne prison, aujourd’huirasée, immédiatement adjacent autribunal, et que les projets d’exten-sion du tribunal étaient très avan-cés et financés, 500.000 eurosayant même été dépensés,Rachida DATI a décidé de la sup-pression de ce même TGI deBourgoin et du transfert de sonactivité au TGI de Vienne. Or, per-sonne n’ignorait localement que leslocaux de Vienne, situés au cœurde la vieille ville, ne peuvent enaucune façon accueillir les person-nels de Bourgoin… La résurrectiondu TGI de Bourgoin étant inconce-vable, un autre terrain a donc été

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sélectionné, dans une autre com-mune, Villefontaine, à quelqueskilomètres de Bourgoin, dans unezone industrielle éloignée de touteagglomération, dépourvue detransports en commun. Le projet detribunal est de surcroît en concur-rence avec un projet de magasinsd’usines… L’ouverture de ce nou-veau tribunal est prévue en 2014,pour un coût qui sera nécessaire-ment très important, et qui à l’heureactuelle ne semble pas financé.Les magistrats et fonctionnaireslocaux restent donc dans l’incerti-tude depuis plus de 3 ans, et le res-teront sans doute pendant 4 ans aumoins…

L'absorption du TGI de Dole parcelui de Lons le Saunier est unautre exemple de la logique pluspolitique que pratique ayant pré-valu à cette réforme. En effet,Lons Le Saunier était jusqu’à pré-sent une plus petite juridiction quecelle qu’elle accueille et moinsaccessible, géographiquement,notamment du fait des transportsen commun. Les travaux néces-saires à l’accueil de la juridictionabsorbée devraient se poursuivrejusqu’en 2012 ou 2013 à Lons LeSaunier (puisque le Tribunald'Instance et le Conseil dePrud'hommes devraient être exter-nalisés et qu'un projet de créationd'un nouveau bâtiment est encours). Par ailleurs, alors que lesdeux juridictions comptaient àelles deux 18 magistrats du siègeet 6 magistrats du parquet, le futurTGI départemental n’en compteraplus que 14 au siège et 4 au par-quet. C’est ainsi une suppressionde 6 postes de magistrats qui estopérée.

L’EXEMPLE DE LA CARTEPOLITICO-JUDICIAIRE DELA BRETAGNE

La gestion de la carte judiciaire bre-tonne concentre sans doute tousles errements qui ont pu êtreconstatés sur la question enmatière d'arrangements politiques.

2008 … après une réunion hou-leuse au Parlement de Bretagne,Rachida DATI annonce derrièretrois cordons de gendarmesmobiles, la fermeture de la plupartdes Tribunaux d'instance et de 3Tribunaux de Grande Instance(Guingamp, Morlaix et Dinan) dela Cour d'appel de Rennes.

Comme partout, les élus et lesreprésentants de l'USM dénoncentune réforme menée à la serpe quitransforme le territoire en désertjudiciaire.

Première surprise, la fermeture duTGI de Morlaix dont l'activité juridic-tionnelle et l'implantation géogra-phique entre Brest et Saint Brieucauraient fort bien pu justifier unefusion avec son voisin Guingampais,plutôt qu'une disparition. L'étiquettepolitique PS de Marylise Lebranchu,députée de Morlaix a-t-elle jouéedans la balance ?

Plus à l'est, le TGI de Saint Maloest sur la sellette. Son absorptionpar Rennes, chef lieu de départe-ment, pourrait paraître logique avecéventuellement maintien sur placed'un Tribunal d'instance. Mais,deuxième surprise, l'on a décidé decréer un nouveau TGI du « Paysde la Rance » qui regroupera les

ressorts de Saint Malo (35) et Dinan(22). Problème, cela aboutit àfusionner deux morceaux de dépar-tements distincts (Côtes-d'Armorpour Dinan et Ille-et-Vilaine pourSaint Malo) avec l'inextricablemaquis administratif que celaimplique. A titre de simple exemple :un crime commis sur le ressort duTGI de Dinan relève de la compé-tence du futur TGI de « la Rance »(à Saint Malo), infra-pôle pour l'ins-truction. Il sera donc instruit … àRennes (pôle de l'instruction) etjugé … par la Cour d'assises deSaint Brieuc (compétente territoria-lement pour le département desCôtes-d'Armor).

Cette solution administrativementinédite et ingérable a-t-elle un lienavec l'étiquette politique UMP deRené Couanneau, le député deSaint Malo et rapporteur spécial dubudget de la Justice à l'assembléeNationale ?

Par ailleurs, aux marches de laBretagne (Vitré et Fougères), mal-gré l'opposition frontale des élus,tous les Tribunaux d'instanceavaient été balayés.

Le député-maire de Vitré n'est autreque Pierre Mehaignerie, Présidentde la commission des affairessociales de l'Assemblée Nationaleet l'un des chefs de file du courantcentriste de l'UMP.

Il n'a jamais fait mystère de sa mau-vaise entente avec Rachida Dati etdit à qui veut l'entendre qu'il ferarouvrir « son » Tribunal d'instance.La Chancellerie reste sourde indi-quant qu'aucune exception ne peutêtre faite sous peine de prendre le

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risque d'ouvrir « la boite dePandore ».

Le poids politique de PierreMehaignerie a-t-il joué ? Coup dethéâtre, fin août 2010, sans aucuneconcertation préalable, la Directiondes Services Judiciaires diffuse unappel à candidature pour pourvoirun poste de Juge d'instance à …Vitré !

L'USM s'interroge et la presse,locale et nationale, s’en empare.

Le porte-parole de la Ministreannonce alors que, nonobstant ladiffusion du poste à Vitré, la ques-tion est à l'étude et que les éluslocaux doivent s'accorder...

Plus tard, depuis la Préfecture de larégion Bretagne, les élus annon-cent que dans un souci de « solida-rité d'arrondissement » et àl'occasion « d'un jour historique », leTribunal d'instance rouvrira finale-ment à … Fougères... une ville avecun maire PS ! Pierre Mehaignerieespère que « le sacrifice de VITRE »sera utile mais maintient sa volontéde la présence … d'un greffe déta-ché de Fougères à Vitré.

La concorde règne donc entre lesélus. Personne ne se soucie plusdes 364 000 euros dépensés pourtransférer les Tribunaux d'instanced'Ille-et-Villaine vers Rennes, duchiffrage de la Chancellerie à hau-teur de 500 000 euros pour fairel'opération en sens inverse, dusort des fonctionnaires et magis-trats mutés contre leur gré ou des3 000 dossiers de tutelles reclas-sés à RENNES et qu'il va falloirrechercher manuellement pour les

réaffecter au nouveau ressort deVitré-Fougères...

Une belle harmonie que la presselocale vient rompre le 4 octobre enpubliant une lettre de Michèle Alliot-Marie à Pierre Mehaignerie, portantdes annotations manuscrites de laMinistre et datée du 3 août, parlaquelle elle annonçait à l'éluvitréen qu'elle lui avait donné gainde cause et que Vitré était bienchoisi dès cette date, quoique l'onait pu ensuite tenter de donner àcroire à l'opinion publique pour justi-fier le cafouillage.

Le journal publie également une let-tre du Conseiller de la Ministre qui,visionnaire, lui fait observer que« rien n'a été convenu quant auxmodalités de l'annonce de la réou-verture du Tribunal d'instance ».

C'est là tout le problème... il estsouvent plus facile d'annoncer unedécision lorsqu'elle est transparenteet prise en considération de seulsmotifs d'intérêts publics que dans lecas contraire...!

L'INQUIÉTUDE DES JURI-DICTIONS ABSORBANTES :UN CONTENTIEUX SUPPLÉ-MENTAIRE SANS MOYENSADAPTÉS

Les juridictions absorbantes s'in-quiètent de leur futur fonctionne-ment. Le contentieux leur étantdévolu contraste avec le manquede moyens alloués. Les magistratsdevront envisager des suppres-sions d'audiences ou une priorisa-tion de certains contentieux.

La question du transfert de tous leseffectifs du TGI de Dinan (magis-trats et greffiers) vers Saint Malon’est pas réglée.

Le TGI d’Evreux, absorbant Bernay,va devoir se contenter de l’arrivéede 2 magistrats et de la moitié dugreffe de Bernay, au mieux, pourcompenser la prise en compte ducontentieux de cette juridiction.

Le rattachement du TGI de Saumur(qui compte 19 greffiers et fonction-naires) au TGI d’Angers en janvierprochain semble ne devoir s’ac-compagner que de l’arrivée de 11personnes.

La suppression du TGI de Tulle rat-taché à celui de Brive la Gaillardeva engendrer la perte de 3 postesde magistrats.

Le TGI de Brest n’accueillera que 4des 6 magistrats du siège et 1 des 2magistrats du parquet de Morlaix,et seulement 6 ou 7 de ses 15 fonc-tionnaires.

Les effectifs du TGI de Toulousen'augmenteront pas en consé-quence de la suppression deseffectifs de Saint Gaudens puisque2 postes sont perdus au parquet etun au siège.

Si les 5 magistrats du siège deBressuire sont arrivés à Niort, il enva différemment des fonctionnaires(13 postes sont localisés maisseules 9 personnes sont effective-ment arrivées).

Pour évaluer les effectifs demagistrats nécessaires au fonc-tionnement de la future juridiction

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Avranches/Coutances les chefs dejuridiction ont additionné les donnéesINSEE et les chiffres des activitésciviles et pénales des deux juridic-tions, avant de procéder à une com-paraison de ces données avec desjuridictions existantes équivalentes.Celles-ci comprenant en moyenne17 magistrats du siège et 5 du par-quet, ils en ont conclu que la futurejuridiction devrait non seulementconserver l'ensemble des effectifsadditionnés de Coutances (10 jugeset 3 parquetiers) et Avranches (5juges et 2 parquetiers) mais bénéfi-cier de la création de 2 postes ausiège. Dans les faits, 15 postes ontété localisés au siège et l'effectif nesera que de 14 magistrats du siègeau 1er janvier 2011, alors que lecontentieux de la nouvelle juridictionde Coutances va doubler. S'agissantdes effectifs en fonctionnaires, ilrésulte d'outil greffe et des prévisionspour 2011, que la nouvelle juridictionva connaître un sous effectif de 6,71Equivalents Temps Plein Travaillésne lui permettant pas de fonctionnernormalement.

Par ailleurs, les locaux des juridic-tions absorbantes sont souvent tropexigus pour accueillir le personnelet les dossiers des juridictions fer-mées. Des travaux apparaissentdonc fréquemment nécessaires.

Il en va ainsi à Coutances. Demême, le TGI d'Amiens accueillera2 TGI (Abbeville et Péronne) et plu-sieurs tribunaux d'Instance mais n'apas de locaux suffisamment spa-cieux. Le TGI de Brest va accueillirle TGI de Morlaix sans que leslocaux le permettent, matérielle-ment. Des travaux d'agrandissementsont donc prévus.

Le TGI de Vesoul, actuellementlogé dans des locaux exigus, obso-lètes et non fonctionnels (de trèsnombreux escaliers), qui absorbe leTI de Lure, n'a pas d'espace suffi-sant pour accueillir les 7 magistratset les 15 à 20 greffiers. Le tribunald'Instance, jusqu'alors installé dansle bâtiment principal, a déménagédans 2 endroits distincts d'un bâti-ment de l'Agence Régionale deSanté. Le service d'accueil de cetteAgence est ainsi amené à accueilliret orienter les justiciables. Lesconséquences matérielles de cetteabsorption ne sont pas encoreréglées et plusieurs projets sont àl'étude :

- installer une cité judiciairedans les locaux de l'ancien hôpi-tal. Ce projet serait long et coû-teux (12 à 18 millions) au regarddes contraintes de désamian-tage des locaux- agrandir le palais actuel parl'ajout d'une aile. Ce projet seraitégalement très onéreux.- démanteler le service civildont une partie rejoindrait le tri-bunal d'instance- demeurer dans les bâtimentsactuels, avec le risque que l'ins-tallation provisoire du tribunald'instance à l'Agence Régionalede Santé devienne définitivealors qu'il n'y a pas de salled'audience dans ces locaux.

LE DÉVELOPPEMENT DESAUDIENCES FORAINES

Les juridictions ont été suppriméesdans un but de rationalisation descharges et personnels.

Cependant, ces suppressions sont

souvent réalisées au mépris de l’in-térêt du justiciable qui rencontredes problèmes de transport. Pourpallier ces difficultés, des audiencesforaines sont organisées dans lesjuridictions pourtant officiellementsupprimées…

Ces audiences pourraient paraître àpremière vue séduisantes pour lesmagistrats des juridictions suppri-mées, qui peuvent ainsi continuer àprésider des audiences dans le res-sort duquel, souvent, ils habitent.

Cependant, lorsque ces magistratssont remplacés par d'autres qui nerésident pas dans le ressort de lajuridiction supprimée, ces audiencesforaines sont nécessairement coû-teuses en temps et en argent. Lesdéplacements des magistrats etgreffiers doivent être financés etpèsent lourdement sur le temps detravail.

On demande ainsi aux magistrats,qui doivent se déplacer, de remé-dier aux problèmes créés par uneréforme non sollicitée….

L'USM est opposée à ces audiences :la suppression de juridictions doitclairement être assumée.

Ainsi, 2 audiences foraines d’affairesfamiliales par mois et une audiencecorrectionnelle (pour les conduitesen état alcoolique) par mois, serontorganisées à Avranches, TGI sup-primé. Il n'existe en effet pas detransport en commun entre le sud dela Manche et le TGI de Coutances(distant de plus d'une heure etdemie).

Des audiences foraines sont égale-

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ment envisagées à Abbeville pourles affaires familiales.

Le juge des tutelles de Montargisira procéder à des auditions dansdes locaux mis à disposition par lamairie de Gien, dont le Tribunald'Instance a été supprimé. Demême, il a été demandé aux magis-trats du TGI d’Albertville de tenirdes audiences sur le site du TI sup-primé de Saint Jean de Maurienne,au motif que les « juges doivent êtreproches du justiciable » !

Les audiences des affaires fami-liales et correctionnelles sont main-tenues à Bernay (soit 70% del'activité) en faisant des travauximportants (toiture, ascenseur...)dans des bâtiments appartenant àla mairie. Les travaux sont pris encharge, pour moitié, par le Ministèrede la Justice.

L’EXEMPLE DE MOULINS,UN TGI ACCABLÉ PUISOUBLIÉ

Après l’annonce, dans les condi-tions que chacun connait, de la sup-pression du TGI de Moulins, leseffectifs ont diminué peu à peu augré des mutations et des départs enretraite.

L’annulation de la suppression duTGI par le Conseil d’Etat, dans sonarrêt du 19 février 2010, ne s’estpas traduite par une recrudescencedes effectifs de greffe. Alors qu’en2010, 22 emplois budgétaires degreffe devaient être affectés àMoulins, la juridiction est contraintede fonctionner avec 11 greffiers etfonctionnaires.

Des délégations extérieures sontorganisées (notamment pour leDirecteur de greffe) et des vaca-taires sont pour l’instant présentsmais les membres du TGI s’interro-gent sur l’avenir de la juridiction auregard des départs prévisibles.Parallèlement, aucune arrivée n’estprévue. En pratique, chaque ser-vice fonctionne grâce à une seulepersonne. Tout départ, toute mala-die, tous congés qu’ils soientannuels ou de formation, auxquelsles agents ont pourtant droit, pour-raient avoir des conséquences trèsimportantes pour la juridiction.

Après avoir vécu dans une ambiancemorose pendant 2 ans, les greffierset magistrats ont été particulièrementheureux de l’annonce du maintien dela juridiction. Mais après quelquesmois, le moral est de nouveau enberne tant les difficultés de fonction-nement sont grandes et insuffisam-ment prises en compte.

La presse locale titrait, suite à l’arrêtdu Conseil d’Etat « Moulins libéré ».Elle pourrait également titrer« Moulins oublié »…

Enfin, la décision du Conseil d'Etatest susceptible d'avoir une consé-quence directe sur le sort du pôleinstruction de l'Allier.

En effet, ce pôle instruction avaitété fixé à Cusset au moment où lafermeture du TGI de Moulins étaitprévue. Cependant, puisque le TGIne fermera pas, que la prison estsituée à Moulins, que le Tribunalpour Enfants (départemental) et laCour d'Assises demeurent àMoulins et que les services sociauxsont également localisés à Moulins,

un recours a été introduit par lesavocats du barreau de Moulins. Lerapporteur public du Conseil d'Etata soutenu ce recours.

Le pôle de l’instruction, si la réformede la collégialité n’était pas repor-tée, pourrait donc être localisé àMoulins…

L'EXEMPLE DE PÉRONNE,JURIDICTION SUPPRIMÉEPAR ANTICIPATION

Alors que la fermeture était prévuefin décembre 2010, c'est au prin-temps 2010 qu'il a été décidé d'unefermeture anticipée au 30 juin, ren-dant d'autant plus difficile l'organi-sation du déménagement enurgence d'un tribunal exsanguedepuis déjà plusieurs mois.

Coté fonctionnaires, la fermeture adu s'organiser sans directeur degreffe, le poste étant vacant. Lesmutations anticipées ont vidé cer-tains services.

Côté magistrats, depuis septembre2009, seuls 4 des 8 postes étaientencore pourvus. Si un substitutgénéral a été délégué (de fait, àtemps partiel) sur le poste de procu-reur, le siège n'a quant à lui bénéfi-cié d'un placé que durant un mois,puis uniquement pour assurer lesaudiences.

Mieux encore ! Alors que la collégia-lité pouvait encore se réunir, bon anmal an (hors périodes de formationcontinue, de congés,...) la chancel-lerie a cru bon, au printemps,d'avancer la date de départ d'unmagistrat.

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Les anciens locaux du TGI vontdésormais accueillir le TI, le CPH etune antenne SPIP ; le montant deces travaux avoisinera les 57 000euros mais les budgets ne permet-tront plus le maintien du personnelde sécurité dans un bâtiment pour-tant équipé d'un portique et quicontinuera d'accueillir du public...

Alors que dans les années 80, ilavait été proposé de rattacher leressort du TI de Montdidier (TGId'Amiens) à Péronne, plus proche,pour rééquilibrer les contentieuxentre les deux sites, les justiciables,pour se présenter à l'audience,devront désormais prendre l'uniquebus reliant Péronne à Amiens à 6heures du matin.

Au delà de la question de la légitimitéet des problèmes générés par toutdéménagement, de nombreuxaspects auraient pu être anticipés etlaissent craindre l'apparition de nou-velles difficultés lors des nombreusesfermetures prévues en fin d'année :

- d'un point de vue humain, ilétait prévisible que la courd'Amiens, qui a vu disparaître 5TI en janvier 2009 et 2 TGI surl'année 2010 aurait besoin deplus que les 9 juges et 4 substi-tuts placés qui y sont affectés ;

- du point de vue de la conser-vation des données, outre le faitque les dossiers d'instruction ontété repris sous Cassiopée(implantée en avril 2009) au titrede la juridiction de Papeete (!!!)toutes les données n'ont pu êtrere-vérifiées sous Cassiopée.Par ailleurs, tous les dossiersd'instruction (dont un dossier cri-

minel de 40 tomes) devront êtreà nouveau saisis intégralementsous Winstru pour que les jugesd'instruction d'Amiens puissenttransmettre à la chambre del'instruction des notices semes-trielles conformes à la situationde leurs cabinets...

- un centre d'archivage a étécréé, en périphérie d'Amiens,pour accueillir notamment lesdossiers de Péronne... Y com-pris ceux de 2009... ce qui vagénérer de nombreux transfertsde dossiers puisque les dossiersde 2009 peuvent notammentdevoir être consultés, par exem-ple à l'occasion de la révocationd'un sursis prononcé en 2009...

- le déménagement lui-mêmea été prévu sans cohérence :tout devait disparaître au coursdu week end des 26 et 27 juin(cartons, meubles, matérielinformatique....) alors pourtantqu'Amiens n'en récupéraitqu'une infirme partie, et surtoutque la juridiction était encorecensée fonctionner jusqu'au 30juin, au moins pour le traitementdes urgences (permanences,comparutions immédiates, enre-gistrement des dossiers....)

- enfin, le TGI de Péronneétait concerné par l'absence detextes adaptant le code de l'or-ganisation judiciaire (cf supra).

Voici donc un bel exemple de l'éner-gie et des fonds dépensés pourpalier l'impréparation de laChancellerie qui semble avoirattendu la date buttoir pour commen-cer à réfléchir aux modalités pra-

tiques d'un tel transfert, alors qu'ilaurait été aisé d'y réfléchir depuistrois ans qu'étaient annoncées cesfermetures et en tirant les leçons desdifficultés déjà rencontrées lors desfermetures de TI en janvier 2009....

Les derniers jours de l'année 2010risquent d'être bien difficiles pourles juridictions absorbées.

Quant aux juridictions absorbantes,2011 s'annonce d'ores et déjàcomme le début de moments biendélicats...

Ainsi en va-t-il de la réforme de lacarte judiciaire.

En 2003, dans son précédent livreblanc, l'USM évoquait de nom-breux problèmes, tels qu'un bud-get en trompe l'œil, une mise enplace laborieuse des juges deproximité, un manque cruel defonctionnaires dans les juridic-tions et des tribunaux en péril, surle plan de l'immobilier...

Malheureusement, ces constatsdemeurent d'actualité.Le Ministère feint l'ignorance et vamême jusqu'à se féliciter de l'aug-mentation du budget de laJustice.

A supposer celle-ci réelle pour lesservices judiciaires, il reste àconstater comment elle peut setraduire concrètement tant lescarences sont importantes.

La pauvreté de l'InstitutionJudiciaire n'est pas un leurre. Ellenuit à l'indépendance del'Institution et à son autorité...ainsi qu'à celle de l'Etat.

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