le mythe climatique - benoit rittaud

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Le livre que vous avez entre les mains soutient le point de vue que la science actuelle ne permet pas d'affirmer l'origine humaine du réchauffement climatique observé au cours d'une partie du xxe siècle. Si je ne conteste pas la réalité de ce réchauffement, j ' affirme en revanche, à la suite de nombreux scientifiques de premier plan, que les causes de ce réchauffement sont encore très mal cernées, que rien ne prouve que les émissions humaines de «gaz à effet de serre» y jouent un rôle davantage que secondaire, et enfin que ce réchauffement récent n'est sans doute pas un épisode particulièrement notable de l'histoire climatique de notre planète. Je signale aussi dès à présent cette observation essentielle: le réchauffement dont il est question a été observé au xxe siècle mais ne s'observe pas, pour l'instant, au xxie. Les outils utilisés pour déterminer la température globale ne montrent en effet plus aucune tendance au réchauffement depuis environ l'année 2001.

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SCIENCE OUVERTE~ Seuil_1 _ BENOTRITTAUD Lemythe climatique Benot RITTAUD Le Mytheclimatique DITIONSDUSEUIL 27,rueJacob,ParisVIe ISBN: 978-2-02-101132-6 ditions duSeuil , fvrier2010 LeCodedelapropri tintellectuelleinterditlescopiesoureproductionsdestinesuneutilisation collective.Toutereprsentationoureproductionintgraleoupartiellefaiteparquelqueprocd quecesoit,sansleconsentementdel'auteuroudesesayantscause.estilliciteetconstitueune contrefaonsanctionneparlesarticlesL.335-2etsuivantsduCode delapropritintellectuelle. www.editionsduseuil.fr Avant-propos Dans une tribune publie le 28 juin 2009 dans le New York Times, Paul Krugman, prix Nobel d'conomie 2008, crivait que nier la crise climatique tait une forme de trahison contre la plante, la fois irresponsable etimmorale.Comment donc,ajoutait-il,par-donner ceux qui refusent de voir la ralit en face et mettent ainsi en danger 1' avenir du monde, alors que tous les spcialistes reconnus ne cessent de souligner la gravit du problme? Rchauffement climatique. Aussitt ces mots prononcs, des visions surgissent dans notre esprit. Celle des glaciers qui reculent, 1' image d'une nature quidoit toujourss'effacer devantune espcehumaine tropconqurante.Nesont-ellespasaccablantes,cesphotoscom-parant lesvertesvallesalpinesd'aujourd'huicelles,recouvertes de glace,d'il yaquelquesdcennies peine!Pourtant,une foisla premire motion passe,plusieursquestionssurgissent.Comment, par exemple,Hannibalaurait-ilbien pu franchirlesAlpesavecses lphants et ses dizaines de milliers de soldats si autant de glace s'y trouvait aussi en 218 avant notre re? Comment expliquer cette dcou-verte, en 2005, d'un site archologique mis au jour par le recul de cer-tainsglaciers de la rgion deBerne, enSuisse,attestant entre autres l'existence d'une voie de circulation rgulire entre l'Oberland et le Valais il y a quelques sicles, voie devenue impraticable par la suite en raison de la progression des glaces? De mme, bien qu'Erik le Rouge, au xe sicle, ait sans doute un peu idalis sa description du Groenland nouvellement conquis,lessites archologiques n'en tmoignent pas moins de la prsence d'une agriculture permanente jusqu'au XIve sicle. Quant aux dramatiques vnements mtorologiques rcents, comme 5 LEMYTHECLIMATIQUE l'ouragan Ka trina qui a frapp la Louisiane en 2005 ou la canicule de 2003enEuropedel'Ouest,personnenepeut srieusement soutenir qu'ilssontdavantage quedesmanifestationsdephnomneshlas rcurrents depuis que lemonde est monde. Le livre que vous avez entre les mains soutient le point de vue que la science actuelle ne permet pas d'affirmer l'origine humaine du rchauf-fementclimatique observ au cours d'une partie duxxesicle. Si je ne conteste pas la ralit de ce rchauffement, j ' affirme en revanche, la suitedenombreux scientifiques de premier plan, que les causes de ce rchauffement sont encore trs mal cernes, que rien ne prouve que les missions humaines de gaz effet de serre y jouent un rle davantage que secondaire, et enfin que ce rchauffement rcent n'est sans doute pasun pisode particulirement notable de l'histoire cli-matique denotreplante.Jesignale aussids prsent cette obser-vation essentielle: le rchauffement dont il est question a t observ au xxe sicle mais ne s'observe pas, pour l'instant, auxxie. Les outils utiliss pour dterminer la temprature globale ne montrent en effet plus aucune tendance au rchauffement depuis environ l'anne 200 l. Contrairement biendesdiscourssur leclimat,cet ouvrage ne prend pas parti sur ces autres sujets que sont la production d'nergie, l'exploitation des ressources naturelles ou encore la pollution.Non pas,biensr,qu'ils'agisse l deconsidrationsdepeud'intrt, maisla questionclimatique mesemblesuffisamment complexe et importante pour nepasla diluer dans d'autres,tout aussidlicates. Parce quelaquestiondel'volutionduclimat est d'abord affaire de science, cet ouvrage ne s'occupe pas non plus de ses dimensions sociologiques, politiques, diplomatiques, voire religieuses (pourtant cruciales beaucoup d'gards). Le seul point de vue rsolument poli-tiquesoutenudanscet ouvrage est lesuivant:nousavonsintrt cesser de consacrer temps, argent et matire grise ce faux problme du rchauffement climatique. Malgr cettemiseaupoint, je nepuisignorer qu'aujourd'hui, enmemontrantsceptiquesur lacrise climatique, jemefais 1' alliobjectif d'opinionspolitiquessansrapport avecleclimat. C'est pourquoiilm'aurait tincomparablementplusconfortable 6 AVANT-PROPOS de partager la position actuellement dominante sur le sujet J'aurais aimfairepartiedeceux quitentent d'veiller lesconsciences , treauxctsd'expertsportant courageusement leflambeaudela science face la mdiocrit et 1' gosme humain. Malheureusement pour mon confort intellectuel, la pertinence d'une opinion sur un sujet scientifique n'est pas proportionnelle la sympathie que j'prouve pour l'idologie de certainsde ses dfenseurs.JeanRostand a par-ticulirement biensouligncetypedetensionlorsqu'il crivait en 1956 que rappeler cette triste aventure [ ... ] n'est pas pour le plaisir [d' ]attaquer- sous un prtexte scientifique- une conception sociale quenoustenonspour minemment respectable et laquellenous serions prs de nous rallier si, expliquait-il, elle ne se faisait pas le complice de l'affaire Lyssenko, quioccupa l'Union sovitique sta-linienne pendant des annes avec une improbable biologie prolta-rienne prtendument fonde sur l'idologie marxiste. Je fais miens ces propos de Rostand et, comme lui peut-tre l'poque pour l'af-faire Lyssenko, je me dsole que le contexte autour de la question du rchauffement climatiqueme contraigne unetelle miseaupoint Je me dsole aussi que certains scientifiques n'aient pas fait leurs les avertissementsdeMaxWeber qui,ds1919,crivait quechaque foisqu'un homme de science fait intervenir son propre jugement de valeur,il n'y a plus comprhension intgrale des faits. Mme en en restant la seule science, la question du climat est si complexe qu'il est impossible de prtendre la traiter compltement Voil pourquoi l'ouvrage limite son analyse deux types de consid-rations. Le premier relve d'une discipline dont le rle dans l'affaire est essentiel: les mathmatiques. Mathmaticien professionnel vers dansla vulgarisationdecettediscipline, j'ai tchautant quepos-sible denepasme perdre dansla jungle des chiffres et descourbes, pour faire en sorte que mme les lecteurs lesmoins avertis soient en mesure de comprendre de quoi il retourne 1 Le grand intrt de 1' angle l.Les chapitres du livre tant construits indpendamment les uns des autres, lelecteur pourra sauter sans inconvnient les passages qui luiparatraient trop techniques. 7 LEMYTHECLIMATIQUE mathmatique est qu'il permet de prsenter certaines controverses de manire assez complte - une possibilit plutt rare dans le domaine des sciences du climat, o tant de phnomnes sont susceptibles d'in-fluer sur tant d'autres. L'autreangledecet ouvrage est pistmologique.L'affairedu rchauffement climatiqued'origine humainefournitun exemple duplus haut intrt pour tudier la faondont la science volue,et ilest curieux que,pour ce que j'en sais,aucun pistmologue n'ait encore retenul'ide des'y intresser avectout lerecul que permet cette discipline. Mme si, bien sr, des arguments techniques prcis sont indispensables pour venir bout de la thorie en vogue,ilme parat que 1'pistmologie peut aussi jouer un rle dcisif. Mme limits ces deux aspects, mathmatique et pistmologique, l'ouvrage nesaurait prtendre,et de loin, l'exhaustivit dans l'un ou l'autre. Ilneprend pasnon plus parti pour une explication alter-native quant l'origine des volutions actuelles du climat. Son auteur n'est pas un meilleur spcialiste que les climatologues- toutefois, si un pilote professionnel s'affirmait capable d'aller sur la Lune avec un avion de ligne, chacun serait fond se montrer sceptique, y compris ceux qui n'ontjamais pilot un avion. Je ne prtends pas tre dans une autre position vis--vis des climatologues qui s'affirment aujourd'hui capables deprvoir le climat l'horizon d'un sicle. Pour finir,je n'ai pas,et n'ai jamais eu,d'intrt professionnel d' aucune sorte li la ralit ou la non-ralit de 1' origine humaine du rchauffement climatique- mme si cela ne garantit videmment pas que les pages qui suivent soient exemptes de partialit. Cet ouvrage ne porte aucune accusation de malhonntet ou de malveillance envers quiconque.Ceux quiviendraient y chercher de petites phrases pro-vocatrices, des thories du complot ou de grands lans d'indignation polmique seront, je le souhaite, dus. J'espre en revanche qu' aux lecteurs qui sont disposs rflchir de manire non passionnelle, ceuxpour quien science iln'est pasde questionnement interdit, ceux quinesacrifient pas l'esprit du temps la rflexion raisonne, j'espre qu' ceslecteurs-l leprsent ouvrageapportera quelque chose. Le spectacle d'une ruption volcanique est splendide malgr 8 AVANT-PROPOS les drames qu'iloccasionne; de mme, cette trange phobie clima-tique,bienquedangereuse,est unobjet d'tude extraordinaire.Je faislepari que,dans quelques dcennies tout auplus, elle sera bien souvent cite comme un cas d'cole de ces erreurs qui jalonnent l'his-toiredesscienceset nousrappellentque,pour lemeilleur comme pour lepire,la science est une aventure profondment humaine. PROLOGUE Une tragdie plantaire Ainsi,ils'agit bien d'un mythe,[ ... ] c'est--dire unrcit imaginaire, organis et cohrent selonune logique psycho-affective, quiprtend se fonder enralit et en vrit. Edgar Morin, La Rumeur d'Orlans,1969 Lecteur,avant d'entrer dans le vif dusujet, je voudraispartager avecvous un pisode peu connu de l'histoire des sciences. Mme si celui-ci ne prouve rien par lui-mme, son droulement aussi bien que son dnouement nedevraient pas vouslaisser indiffrent. Or donc,encette findesicle,quelques chercheurs remarquent unphnomne toutfaitinattendu.D'abord prudentsbienqu'in-trigus, ils se mettent en devoir d'en donner une explication. Cela ne va pas de soi.Jamais une chose comparable n'a t observe aupa-ravant.Si, comme toujours en science, on peut citer certains prcur-seurs qui,quelquesannesplus tt,ont dj commenc suivrela piste,seules des conditions de travailoptimales seraient en mesure deconfirmer cesanticipations.Pour tirerauclair cetteaffairequi pourrait se rvler d'une importance considrable, de nouveaux ins-truments d'observation sont mis en place, avec de gros moyens. Des outils modernes, la hauteur de l'enjeu, voient le jour. Et bientt, les rsultats tombent. Non seulement les observations initiales sont valides, mais leurs implications sont d'une ampleur couper le souffle. Solidement taye par des confirmations de plus en plus nombreuses venues de scientifiques du monde entier, la ralit du 11 LEMYTHECLIMATIQUE phnomne ne fait bientt plus aucun doute. Compltes, structures, incontestables dansleurs grandeslignes mais aussi d'un grand raf-finement dans certains de leurs dtails les plus pointus,les explica-tions donnes par ces chercheurs honntes et comptents indiquent sans quivoque que le regard de toute l'humanit sur elle-mme va changer de faon irrmdiable. Le monde doit tre inform sans dlai de cette nouvelle d'importance capitale:une tragdiesilencieuse l'chelle plantaireacommenc,cause par dedramatiqueschan-gements climatiques. Les, scheresses dtruisent les rcoltes, les res-sources viennent manquer, aucune rgion ne semble l'abri, et cette lente agonie est probablement irrversible.La glace des ples aussi bien que lesanalysesatmosphriques annoncent lepire.Malgr sa prodigieuse technologie, ce monde serait-il condamn l'extinction? De toute vidence, les seuls remdes la hauteur del' enjeu sont une solidarit sansfailleconjugue des efforts herculens.Et encore, sans doute tout cela ne peut-il que retarder l'invitable ... L'histoire est tragique et belle. Elle capte l'attention des foules, et elle ne manque pas de reprsentants pour souligner les leons qu'elle nous enseigne.Que n'tons-nous enfin nos illres,que ne dpas-sons-nous nos gosmes pour fonder sans plus tarder une socit plus juste et plus solidaire ! Tandis que les recherches scientifiques se poursuivent, les journaux du monde entier en rapportent les progrs,non sans effets de style. Lenouveausiclevoit lestravauxdeschercheursdudomainese diffuser toujourspluslargement.Leslivresdevulgarisationsur lesujet fleurissentenlibrairie,tandisquedesscnaristes detalent l'exploitent comme matriau de base pour d'angoissantes histoires defindumonde quifontla joie dupublic.Unenouvelleculture s'bauche, des interrogations d'un nouveau type se posent. Personne ne peut s'y montrer indiffrent. C'est alorsque desvoixdiscordantes,initialement discrteset quelque peu touffes, tentent se faire entendre. Ds le dbut, certains chercheursont manifestleur scepticisme devantlesannoncesde leurs collgues. Mais leur opinion a contre elle d'tre trop pondre, et denaturebriser l'lan et l'apptit salutaire pour desquestions 12 UNETRAGDIEPLANTAIRE propres lever notre espce dans son humanit. Qui sont donc ceux qui prtendent couper les ailes d'un rcit aux si incalculables cons-quences sur le regard que nous portons sur le monde? Rares sont les gensextrieursauxcerclesspcialiss quienentendent seulement les noms.Les journaux, naturellement ports relater plutt ce qui sort de1' ordinaire,nerendent pas,oupeu,compte desobjections dessceptiques,dont les comptences de chercheurssont d'ailleurs sujettes caution, en croire certains tenants du discours dominant quinecessent par ailleursdemarteler queleursoutilsd'investi-gationsont bienplusfiablesqueceux qu'utilisent leurscontradic-teurs. Ainsi, en apparence du moins, le consensus des chercheurs les plus qualifis nefaitaucun doute. Les objections dessceptiques ne recevant pas d'cho,la vaste majorit de la populationn'en entend pas mme parler. Pendant que les sceptiques rongent leur frein, 1' affaire qui occupe lesscientifiques et 1' espace mdiatique est porte par unAmricain qui, ayant renonc sa carrire de diplomate, s'investit corps et me dansla diffusiondesrvlationsles plusstupfiantesettragiques, exhortant avecsuccs ses contemporains s'y intresser.Son inlas-sable proslytisme et ses confrences font de lui un symbole vivant. Il compte ses cts des scientifiques tout ce qu'il y a de srieux. L'un d'eux se fera connatre par l'emploi d'une technique appele dendro-chronologie pour reconstituer lestempratures terrestresdu pass partir de l'analyse des cernes des arbres. En France, une personnalit emblmatique de la diffusion du savoir auprsdugrand publicdevient la figuredeproue desannoncesles plus spectaculaires. L'homme sait captiver les foules.Confortablement soutenu par un certain appareil mdiatique, fondateur d'une organi-sation sur fondsprivs, tribun enthousiaste et non dnu de comp-tences, 1' opinion voit en lui, dont le rayonnement dpasse les frontires de l'Hexagone,une caution aussi bien scientifique que morale. Lecteur,vousavezpeut-trel'impression jusque-l debien connatre cettehistoire.Son dnouementvousintresserait-il? Le voici,tout aussi authentique que ce qui prcde. Bien que, donc, il n'en soit pas question dans la presse, les doutes 13 LEMYTHECLIMATIQUE des sceptiques portent sur plusieurs points cruciaux. Tout d' abord, il est par principe hautement suspect qu'on prtende tirer des conclusions si prcises et assures sur un objet d'tude aussi dlicat apprhender. Ensuite,desanalysesatmosphriquescomplmentaires semblent incompatiblesaveccesconclusions.Enfin,il s' avrequediverses mesures censes les corroborer relvent en ralit d'artefacts. mesurequeleschercheurssepenchent plusprcisment sur les travaux ayant conduit aux grandiloquentes annonces, des dfauts deplusenplusmanifesteset drangeantsviennenttroubler les certitudes.Les instruments de mesure ont beau s'affiner, les choses restent floues,ellessemblent mme deplus en plus incertaines,au point qu'il devient impossible de s'y retrouver. Progressivement, les doutes gagnent du terrain. Les arguments les mieux assis, les construc-tions les plus labores se dvoilent les unes aprs les autres pour ce qu'elles sont : des coquilles vides, dont le sduisant vernis ne masque dsormaispluslesdficiences,quivont dubiaisdanslesinterpr-tationsl'erreur mthodologiquebante autant quecoupable.Ces chercheurs contre-courant, disposant d'outils d'investigation plus finsautant que d'une imagination moins porte sur le moralisme ou 1' extravagance romanesque de leurs devanciers, finissent par dmolir l'ensemble desargumentsdeleursadversaires,dansl'indiffrence gnrale.Quelques annes aprs les premires annonces, il ne reste pas pierre sur pierre du si splendide rcit port par de trop imaginatifs savants de par le monde. Certains d'entre eux s'accrocheront pourtant jusqu'au bout, contre toute vidence, si bien que l'histoire n'est dfi-nitivement close que prs d'un sicle aprs son commencement. Le coup de grce est port en 1972. Cette anne-l, les clichs pris par la sonde spatiale amricaine Mariner 9 permettent de raliser la premire cartographie gnrale de la plante Mars, qui invalide dfi-nitivementlesobservations errones antrieures,ainsiquelestra-giques implications qui en dcoulaient. Reprenons. Quand,lafinduXI Xesicle,lesinstrumentsd'observation modernesainsiquedesconjonctionsastronomiquesfavorables rendent plus facile 1' tude de la surface martienne, divers observateurs 14 UNETRAGDIEPLANTAIRE se mettent en devoir de raliser la cartographie de la plante rouge. Certains croient alors y discerner ce qu'ils baptisent des canaux: un rseau de lignes rigoureusement droites zbrant la plante en un gigantesque quadrillage. Parce qu'ils sont trop rectilignes pour tre l'uvrede lanature,l'idenat quecescanauxsont lapreuvede l'existence d'unevieintelligentesur Mars,dont ledveloppement technologique est d'une ampleur siimpressionnante qu'ila permis aux tres peuplant cette plante de la couvrir d'un rseau d'irrigation qui ravale le canal de Suez ou celui de Panama (d'ailleurs tous deux contemporains de l'affaire des canaux de Mars) au rang de construc-tions frustestout juste dignes d'une re prindustrielle. Les canaux martiensne sortent pas de l'imagination du premier venu.GiovanniSchiaparelli, quifutleur premier observateur, tait unscientifiquerespectet scrupuleux,directeur del'Observatoire astronomique de Milan.C'est donc non sans logique que lesastro-nomes vont se pencher avec intrt sur le phnomne. Ces canaux seraient-ils le reflet de la dmesure de quelque pharaon martien ? La raison propose par Percival Lowell, un riche Amricain initialement diplomate et fondateurd'un observatoireFlagstaff, enArizona,est tout autre:cette ralisationgigantesque apour but d'irriguer uneplantedont lesconditionsclimatiquesdeviennent irrmdiablement impropres la survie de la civilisation martienne. L'union sacre des Martiens face l'adversit s'est impose comme une ncessit. Ces prodigieux canaux, qui exploitent l'eau fournie par les calottes glaciaires situes aux ples de la plante, sont la preuve du pouvoir de la volont et de la solidarit portes l'chelle mon-diale. Par cette ralisation immense au point d'tre visible de la Terre, les Martiens nous donnent une irremplaable leon d'humanit. Les spectateurs du film Une vrit qui drange (Davis Guggenheim, 2006) n'auront gure demalretrouver unsentimentalisme comparable dans la bouche de son principal protagoniste, Al Gare, ancien vice-prsident destats-Unis.Entre Lowell et Gare,seuleachangla plante suppose victime de changements climatiques majeurs. La personnalit de Lowell ne peut gure se rsumer celle d'un phi-lanthrope rveur et amoureux du ciel. Ses comportements autoritaires 15 LEMYTHECLIMATIQUE enverssescollaborateurssemblent avrs.Par exemple,ilpousse certainsdesesemployscorroborersesobservationssuggrant que des canaux sont galement visibles la surface de Vnus. L'un d'eux est Andrew Douglass, qui finira par tre renvoy en raison de ses doutes.Joliclin d'il de l'Histoire:Douglass est aussi le prin-cipalfondateurdela dendrochronologie(ilestmmel'inventeur du mot), une technique qui a t utilise par Michael Mann et deux de ses collaborateurs en 1998 pour proposer une reconstruction devenue fameusede1' volutiondestempraturesterrestres,la courbe en crosse de hockey, qui suggrait une augmentation brutale et indite destempraturesdenotrepoque etalongtempstconsidre commeunepreuvedcisive pour accuser nosmissionsdegaz effet deserred'tre responsablesdel'volution actuelleduclimat terrestre (voir chapitre 2). Lowell nemrite pas quedesreproches.Entreautrescontribu-tions1' astronomie,ilainiti la traque de la petite plante Pluton, finalement dbusque par Clyde Tombaugh en 1930, 1' observatoire Lowell, seize ans aprs la mort de son fondateur 1 Toujours en activit aujourd'hui,l'observatoire Lowell offreun cadre particulirement propice auxobservationsastronomiques,grcela grandepuret du cielde 1'Arizona.Ainsidonc,pasplusque Schiaparelli, Lowell ne peut tre considr comme un plaisantin un peu trop imprgn de science-fiction. Ce genrelittraire,alors encore ses dbuts,prend d'ailleurs son essor en bonne partie grce la thse des canaux mar-tiens. Les crits de Lowell inspirent notamment cet ouvrage de rf-rencedela science-fiction qu'est LaGuerredesmondes d'Herbert Wells (publi en 1898). Sans avoir une originalit comparable, le film LeJour d'aprs(Roland Emmerich,2004),quimet enscne une apocalypse imaginaire cause par unbrusque bouleversement cli-matique,at considr un temps par une certaine critique comme un possible catalyseur dansl'opinion publique pour uneprise de conscience de l' urgence climatique. 1. Lesigneastronomique dsignant Pluton,faitd' unPet d'un L enlacs, voque lesinitiales dePercival Lowell. 16 UNETRAGDIEPLANTAIRE RevenonsMars.EnFrance,le partisan leplusconnudela thoriedescanaux s'appelle Camille Flammarion.La contribution larecherchescientifiqueproprement ditede cefondateurdela Socit astronomique de France est bien relle.Mais son uvre est surtout remarquable par sestravauxdevulgarisationscientifique. Portspar unenthousiasmesanspareil,lescritsdeFlammarion, publis par son frre, fondateur et propritaire de la maison d'dition ponyme, lvent la science astronomique au rang d'pope des temps modernes. VritableVictor Hugodelavulgarisationdessciences, Flammarion dploie une formidable nergie littraire et faitinsrer dansseslivrescette innovationconsidrable:lespremiresphoto-graphies astronomiques. La gloire de Flammarion est internationale, mais l'lan de sa plume exalte le conduit souvent des excs qui fontsourire aujourd'hui. Outre que l'on y retrouve un scientisme qui, avec un sicle de recul, nous parat biennaf,ses prises de positionmoralisatricesne man-quent pasdecomique.Par exemple,aprsavoir dnonctellepra-tique de la socit de son temps, il explique avec le plus grand srieux que celle-ci est certainement inconnue chez les Vnusiens. Aussi voit-onpercer chez Flammarion unetendance quitransparat lar-gement chez certains acteurs de la vulgarisation scientifique actuelle : port par unpublicacquissa cause,ptride bonnes intentions et sefaisant une haute ide desa mission,Flammarion est en ce sens trsproche d' unchantre mdiatique durchauffement climatique d' origine humaine comme Nicolas Hulot, dont la notorit s'est btie sur ses missions tlvises ainsi que sur la fondation qu'il a cre. On peut aussi, et peut-tre mme plus encore, le rapprocher d' Hubert Reeves,clbre et talentueuxvulgarisateur d'astronomie quimle bien souvent ses irrprochables propos scientifiques diverses consi-drationstoutes personnelles sur la marche du monde 1 Ainsidonc,malgrla notoritet letalent deleursdfenseurs, 1.Prcisons que les comptences d'astronome professionnel de Reeves ne sauraient tre mises endoute, alors queFlammarion est,lui,toujours rest en marge de la science institutionnelle. 17 LEMYTHECLIMATIQUE lescourageux Martiensluttant avecl'nergie dudsespoir contre lesirrversibleschangementsclimatiques deleur plante ont fina-lement rejoint la terre creuse, la gnration spontane et l'harmonie dessphresaucimetire desthoriesmortes.Maisavant departir, ilsnousontlguunmythequin'attendait qu'uneoccasionpour germer et fleurir nouveau, sous une forme ou sous une autre. J'in-sistesur lefaitque,telle que je l'ai raconte,1' histoiredescanaux est,danssesgrandeslignes,parfaitement authentique,endehors sans doute de quelques points de dtail involontairement errons ou de traits unpeu forcs 1 Lescontre-attaques dessceptiquesdescanauxmartiensont t unelonguesuite dedmonstrationsaussipertinentesqu' ignores des journaux.Dupoint devuepurement scientifique,onaccorde Eugne Antoniadi,d'abord ferventet influentsoutiendescana-listes, lemrite d'avoir men les observations lesplus rigoureuses l'issue desquelleslapure illusiona tclairement et dfiniti-vement tablie comme telle. Il faudra cependant des annes, et mme desdcennies,avant quelescanauxdeMarscessent dehanter les manuels d'astronomie. De loin en loin, au fildu xxe sicle, quelques astronomes tout fait srieux dfendront encore ces fameux canaux. Et, de mme que les observations et les raisonnements rationnels les mieux assis parviennent rarement retourner la conviction d'un par-tisan rsolu d'une thorie quelconque, bien desadeptes des canaux dfendrontleur point devueau-del detouteraison.EarlSlipher, quidirigea l'observatoire Lowell dans les annes 50, en soutiendra 1' existence jusqu' sa mort, en1964. Onseperd en conjectures pour comprendre comment l'illusion descanauxmartiensa pugarer silongtempsunsigrandnombre descientifiquessrieux.Outrelesdiverseffetsd'optique quel'on peut invoquer, ilsemble bien que l'on ait affaire un cas d' cole du fait qu'un observateur ne voit pas seulement ce qu' il y a voir,mais aussicequ'ils'attend voir oumme,danscertainscas,cequ'il 1.Al Gore notamment, ancien vice-prsident des tats-Unis, n'a jamais t diplomate proprement parler, contrairement Lowell. 18 UNETRAGDIEPLANTAIRE esprevoir.La pressiondescollgues,l'enthousiasme desmdias, l'irrsistible attirancepourunehistoirequidonnesoudainunrle depremier plandeschercheursqui,autrement,resteraient dans lerelatif anonymat deleurslaboratoires ...voiluncocktaildont leseffetsenivrantssesont prolongsunsicledurant.Mieux:des dcenniesaprsla findel'affaire,l'on trouveencorelemoyende dfendre ceux qui se sont si lourdement tromps. Au muse de l'ob-servatoire Lowell,par exemple,maisaussiailleurs,l'on peut ainsi apprendre ladcharge deson fondateur que,mmesiles canaux n'existent pas,ilsont jou unrleprcurseurdanslarecherche dela vie extraterrestre; en particulier, les programmes SETI(Search for Extra-Terrestrial Intelligence)- qui tentent de dtecter d'impro-bables signaux venus d'ailleurs mais qui n'ont, en plusieurs dcennies d'existence, jamais rien produit de positif- y sont valoriss et pr-sents comme les hritiers spirituels directs de 1' lan jadis donn par Lowell.Aveccette remarqueentte,iln'est pasncessairede faire montre de beaucoup d'imagination pour concevoir que, lorsque l'agitation actuelle autour du climat sera retombe, quelle qu'en soit la conclusion,ilsetrouverasansdoutelongtempsdumonde pour soutenir que les alertes climatiques auront au moins eu le mrite de lancer undbat utile ...Ilest des sujets pour lesquels l'exactitude et la rigueur nesont que des outils bien drisoires. Nesoyonspastropdursenverslesinventeursdescanauxmar-tiens. Les mythes auxquels ils ont donn naissance sont de ceux qui ont fait,etfontencore,rverdesgnrationsentires.Leur lan crateur a permisbiendesimaginationsdesedployer dansdes directions nouvelles. L'enthousiasme communicatif des thurifraires descanauxest incontestablement mettreleur actif.l'poque des canaux de Mars, il ne semble pas que l'ide ait t avance selon laquellelesMartienstaient responsables(coupables)dela dgra-dationdeleur environnement.tait-ceparce que,malgrlescien-tisme triomphant d'alors, personne n'avait l'orgueil d'imaginer qu'il tait possible d'influer artificiellement sur leclimat? Quoiqu'il en soit, les partisans des canaux n'taient pas avares de descriptions flat-teuses du grand peuple deMars, alors que bien des prdicateurs du 19 LEMYTHECLIMATIQUE rchauffement de la plante n'ont jamais de mots assez durs pour nous dpeindre,nousautresTerriens.Enunsens,Lowellet sesadeptes tentaient de faire de la science partir d'un beau rve, l o certains tchent aujourd'hui d'en faire partir d'un cauchemar- celui d'un pch originel, d'une humanit qui neferait que souiller un paradis originel et qui ne saurait tre que l'ennemie de la nature. Sur leplanstrictement scientifique,onpourrait,certes,avancer une diffrence importante entre les deux histoires : la premire met en scne desastronomes dont lesinstruments d'observation taient encore rudimentaires,doncdifficilement comparables ceuxdela climatologie actuelle. La technique de la photographie astronomique n'tait pas encore suffisamment au point l'ore duxxe sicle pour produiredesclichsprcisd'un objet comme la planteMars,qui n'apparaissait danslestlescopesdel'poque,mmepuissants, que comme unobjet de taille trs rduite.La discussion autour des canaux tourna doncen premier lieuautour des dessinsralisspar lesastronomes. Quand desphotographiesfurentdisponibles,elles montrrent tout d'abord ...que les canaux existaient bel et bien,ce qui valut ces premiers clichs de faire la une duWall Street Journal en1907avant quel'on serendecompte que,la qualit destirages tant encore insuffisante, les photos avaient t manuellement retou-ches. Quant aux autres techniques d'observation comme la spectros-copie (pour tudier la composition atmosphrique de Mars), il fallut longtemps avant qu'elles soient en mesure de produire des rsultats fiables.Nosmodernesappareils,quiutilisent destechnologiesde pointe comme l'lectronique, l'informatique ou les mesures satelli-taires, sont d'une technicit qui semble bien loin du contexte matriel del'aventure descanauxmartiens.Lesintersticespar lesquelscet pisode a pu se glisser sont-ils dsormais bouchs ou, dfaut, suffi-samment combls pour que nul errement scientifique d'une ampleur comparable nepuisse plus se dployer? Prterauprsent unetellesuprioritsurlepassserait faire preuve d'une ignorance totale dela mcanique deserreurs quisont lelot dela science depuis ses origines.De nombreux exemples trs actuelsmontrent qu'aujourd' huicomme hierlesplusgrossires 20 UNETRAGDIEPLANTAIRE mprises scientifiques sont bel et bien possibles. De plus, si nos yeux subjectifs et imparfaits ne sont certes plus utiliss aussi directement qu'autrefois pour desobservations dont la prcisionne souffre pas 1' approximation,lesrverieslesplusfollesdisposent dsormais d'un nouveau et immense terrain de jeu: 1' ordinateur. 1' instar des astronomes de la findu XIXesicle ralisant des croquis de ce qu'ils pensaient voir la surface de Mars, les modlisateurs dessinent tout autant aujourd'hui sur leurs claviers ce qu'ils imaginent se passer sur la Terre. Et, comme nous le verrons dans les chapitres qui vont suivre, l'ordinateur est,bien despointsdevue,source detant d'erreurs que les instruments de dessin des astronomes de la fin du XIXe sicle n'ont finalement gure rougir de la comparaison. Aussi aurait-on bien tort de rire au nez des astronomes d'alors. Mme si nos normes machines nous laissent souvent croire le contraire, rien ne permet d'affirmer que la communaut scientifique contemporaine est diffrentede celle de ces Lowell,de ces Flammarionet de ces Schiaparelli, de ces amoureux de la science au-dessus de tout soupon, capables de produire des uvres qui sont la gloire de 1' esprit humain, maisqui,parfois,sefourvoientdesannesdurant dansce quel'on peroit aprs coup comme d'tranges errements dont on peine mme imaginer qu'ilsaient puexercer unetelle influence.Desrayons mitogniques (sorte de rayonnement ultravioletimagin dansles annes 20 et grce auquel des cellules taient censes communiquer entre elles) 1' effet Alli son (propos en 1927 et qui devait fournir unemthodervolutionnaired'analyse de composs chimiques) en passant par Jepolywater(uninexistant polymre del'eau quifit l'objet dediversestudestrssrieusesdanslesannes60-70),les exemples sont nombreux de ce qu'Irving Langmuir a appel en 1953 la science pathologique, dont certains cas ont impliqu de nombreux chercheurs de plusieurs pays durant des annes. Lorsqu'une commu-naut scientifique est victime d'une telle maladie, son honneur repose entrelesmains de sceptiquesqui,malgrla vracitdeleursides, peuvent ne parvenir que difficilement se faire entendre. Seul le temps permet de dpassionner lesdbats:aujourd'hui, sur Mars,le cratre Antoniadi est plus gros que les cratres Flammarion et Lowell runis. 21 LEMYTHECLIMATIQUE L'exercice destyleduprsent prologue aurapeut-treagac certainslecteurs,quiluireprocheront juste titreden'tre qu'une analogie, qui, comme toute analogie, prsente deux dfauts majeurs. Le premier est queleparallle qu'elle dressen'est pasparfait (la divergencemajeure tant iciquelescanauxdeMarsn'existaient pasalorsquela tempratureglobales'est, elle,belet bienleve auxxe sicle). Son second dfaut, que j'annonais ds le dpart, est qu'une analogien'est pasunlment depreuve.Commel'expli-quait si justement Paul Valry,L'histoire justifie ce que 1' on veut. Elle n'enseigne rigoureusement rien, car elle contient tout, et donne des exemples de tout. Redisons donc que le parallle entre 1' affaire des canaux de Mars et celle du rchauffement climatique n'est rien de plus qu'une analogie, qui nesaurait donc en aucun cas tenir lieu de dmonstration. Pour cette mme raison 1' on serait fond demander bien destenantsdurchauffement climatique d'originehumaine decesser leursamalgamestoutaussifacilesentrelessceptiques duclimat et ceuxquisoutiennent quel'administration amricaine serait 1' auteur vritable des attentats du11septembre 2001, ou ceux quis'imaginent que lesvidosdupremier passur la Lune auraient ttournesenstudio.Sanscompter lesmprisablesaccusations dervisionnismequisuggrent,parfoisdemanireexplicite, quelessceptiquesduclimatseraient comparer auxngateursde la Shoah. Je veux croire que ceux qui auront vu dans le prsent prologue un rapprochement arbitraire auront la mme attitude envers cet loquent passage del'un desprfaciersrcents deLaGuerredesmondes: Aujourd'hui,[le roman de Wells]pourrait prendre unersonance pluscologique.Car l'homme lui-mmeaparfoistendancese transformer enMartiensur sa propre Terre oil tente d'imposer sa violente empreinte ... Enscience,l'analogie est unmodederaisonnement gravement fautif.Pour cette raison, je ne souhaite absolument pas que le prsent prologue ait modifi 1' avis du lecteur sur 1' volution actuelle du climat. Je pense cependant que, bien que pitre moyen pour tirer des conclu-sions,uneanalogiepeut prsenter unintrt irremplaable:celui 22 UNETRAGDIEPLANTAIRE d'veiller 1'envie de rflchir. C'est avec une telle envie que, je 1'espre, lelecteur gardera les yeux grands ouverts pour partir la dcouverte de 1' histoire du rchauffement climatique d'origine humaine, ce mythe d'aujourd'hui qui se construit au cur mme de notre modernit. RFRENCESBIBLIOGRAPHIQUES L'ouvraged'Edgar MorinintitulLa Rumeur d'Orlans est paruaux ditions duSeuil en1969. L'histoire des canauxmartiensa traconted'une trsbelle manire par LudwikCelnikier (observatoiredeMeudon),dansunarticleintitul Grandeur et dcadencedesMartiens,Cielet Espace,hors-srieno6, p.60-67,1993,auquelceprologuedoitbeaucoup.Sur lesujet,onpeut aussi consulter Sur Mars: le guide du touriste spatial, EDP Sciences, 2003, dePierreLagrange et HlneHuguet.L'pisodedescanauxdeVnus dont Lowella pouss ses collaborateurs confirmer l'existence se trouve, ainsiqu'une bibliographie, dansl'article deStphane Lecomte Vnus et Lowell, L'Astronomie, vol.115,p.144-150,2001. Pour revivrel'enthousiasme delafinduXIXesicledelaviesurles autres plantes, je ne saurais trop recommander de plonger dans 1' uvre de Camille Flammarion, et notamment dans certains passages de La Pluralit des mondes habits,1868, deL 'Astronomie populaire, 1880, rdit en 2009 parlesditions Flammarion,ouencore desTerresduciel,1884,ausous-titrevocateur:Voyageastronomiquesurlesautresmondeset descrip-tions des conditions actuelles de la vie sur les diverses plantes du systme solaire.noter que cestrois ouvrages, ainsique denombreuxautresde Camille Flammarion,sont disponiblessur lesiteGallica,la bibliothque numrique dela Bibliothque nationale deFrance (http://gallica.bnf.fr). L'observatoireLowellest toujoursenactivitaujourd'hui,et cesont desrecherchestout faitsrieuses quiy sont menes dansledomaine de l'astronomie.Lesiteinternetdel'observatoire(http://www.lowell.edu/) contient quelques lments biographiques gnraux sur Lowell et certains de ses associs, dont Douglass. Ilne se montre toutefois gure loquace sur l'affaire descanaux. Le coup de grce port aux canaux par Mariner 9 ne fut que le dernier d'une longue srie.Entre autres,la mission Mariner 4 avait dj, en1965, dlivr despremires images de Mars. 23 LEMYTHECLIMATIQUE Les diffrents programmes de recherche regroups sous le nom de SET! (http://www.seti.org/) ont t soutenus puis abandonns par la NASA.Mme si SET! est aujourd' hui hberg par l'universit de Berkeley, il survit surtout par la volont de passionns.Iln'a pour l'instant aucun succs son actif, hormis quelques annonces occasionnelles quin'ont jamais t confirmes par la suite. UnexposdeLangmuirdanslequelilexpliquesavisiondela sciencepathologiqueatretranscritetpublisur internet 1'adresse http://www.cs.princeton.edu/-ken!Langmuir/langmuir.htm Le romancier amricain Michael Crichton, dcd en2008, a exprim pendant des annes son scepticisme sur l'affaire actuelle du rchauffement climatique.L'une desesinterventionssur lesujet atuneconfrence donneen2003l'Institut detechnologiedeCalifornie (CalTech)inti-tule, de faon dlibrment provocante, Les extraterrestres sont la cause du rchauffement climatique (A liens Cause Global Warming).Crichton y a expliqu de faonintressante comment, selon lui,la croyance en l'exis-tenced'unevieextraterrestres'est dployepartir desannes60 dans les cercles acadmiques selon desnormes scientifiques douteuses qui ont, d'une certaine manire, ouvert la voie l'affaire du rchauffement clima-tique.Letextedecetteconfrence est disponiblesur internet l'adresse http://www.michaelcrichton.net/speech-alienscauseglobalwarming.html Prcisons que le ct parfoishollywoodien des romans de Crichton ne doitpasocculter l'intrt decertainesanalysesduromancier amricain, notamment sur l'affaire du rchauffement climatique. La citation de Paul Valry est tire de son ouvrage intitul Regards sur lemonde actuel, Stock,1931. On trouve une analogie entre lessceptiques du climat et lestenants du complot interne desattentats du11septembre 2001dansunarticlede Sophie Gindensperger publi le 31juillet 2008 sur le site@rrt sur images (http://www.arretsurimages.net/contenu.php?id=l 028). Celle entre les scep-tiques du climat et ceux quipensent quelesimages dupremier pas sur la Lune ont t tournes en studio a t faite par Gore le 30 mars 2008, quia affirm que lessceptiques du climat sont pratiquement comme ceux qui croient toujoursquel'alunissagen'tait qu'unemise en scne tourne en Arizona, ou ceux qui croient que la Terre est plate. C'est peut-tre dnigrer un peu, mais ce n'est pas siloin. Pour l'anecdote, notons que Buzz Aldrin, le deuxime homme avoir march sur la Lune lors de la mission ApolloIl, s'est dclarsceptique duclimat (voirhttp://www.telegraph.co.uk!tech-nology/5734525/Buzz-Aldrin-calls-for-manned-flight-to-Mars-to-overcome-24 UNETRAGDIEPLANTAIRE global-problems.html).HarrisonSchmitt,unautremoonwalker (dela missionApollo17),gologueprofessionnel , enafaitautant(voirhttp:// www.heartland.org/custom/semod_policybot/pdf/25715. pdf). Parmilesmultiples amalgames entre sceptiques duclimat et rvision-nistesdelaShoah, citons Ellen Goodman qui,dansle journalTheBoston Globedu9 fvrier2007,a crit queles ngateursdurchauffement cli-matique sont dsormais comparables auxngateurs del'Holocauste. La citation de la prface La Guerre des mondes de Wells est de Christian Grenier,Gallimard,1993. CHAPITRE1 L'armedel'ombre L'espoir changea de camp,le combat changea d'me. Victor Hugo,LesChtiments,1853 Bien que la valeur d'une thorie scientifique ne se mesure pas au nombre de ses partisans, le principe d'conomie de moyens indique que l'attitude la plus rationnelle de la part d'un non-spcialiste pour dcider de son adhsion ou de sa non-adhsion une thorie consiste s'en remettre 1' avis des spcialistes. Il arrive certes, comme 1' illustre l'affaire des canaux de Mars, que ceux-ci se trompent, mais puisque nous ne pouvons pas individuellement nous interroger sur tout, nous n'avons,leplussouvent,pasd'autre choixquededonnernotre confiance ceux quiensemblent les plus dignes.S'agissant dela thorie du rchauffement climatique d'origine humaine, 1' application dece principesemblenaturellement conduirecette conclusion sans appel: puisque, vue de l'extrieur, cette thorie fait l'objet d'un consensusdesexpertslesplusqualifis,leplusrationnelconsiste s'y rallier. En ralit, le dcalage entre cette vision commune d'un consensus et la ralit frappequiconque sedonne la peine d'aller voir au-del des apparences. Bien que l'alarrnisme climatique puisse se prvaloir de nombreuses et spectaculaires victoires, ses conqutes ressemblent deplus enplus une campagne deRussie. l'image de Napolon entrant dans Moscou, sa domination cache de graves faiblesses, dont la stagnation de la temprature globale des dix dernires annes n'est paslamoindre(voir chapitre3).Ilestprobableque,plusencore 27 LEMYTHECLIMATIQUE qu'aux troupes pourtant fourniesduscepticisme climatique, l'issue de1' affrontementdevrabeaucoupaugnralHiver. ..Maisavant d'yvenir dansleschapitres quivontsuivre, je vaisd'abord tcher de montrer que l'application du principe d'conomie de moyens est bien loin,ici, de suggrer une adhsion inconditionnelle la thorie aujourd'hui dominante. Plongeons-nous pour commencer dans l'his-toirede cette extraordinaire affaire. Un sicle de retournements L'pope des tenants d'une crise climatique d'origine humaine est celle de lgions conqurantes qui ont connu des succs clatants sur lapresquetotalitdesfronts.l'origine toutefois,ceslgions ont eu bien du mal se choisir un tendard. Depuis plus d'un sicle eneffet,leregard port sur le climat hsite entre la peur du froid et celle duchaud, au gr des caprices du thermomtre. Ainsi, en1895, le New YorkTimes, comme d'autres journaux, s'inquite du possible avnement d'un ge glaciaire, prenant tmoin 1' extension de certains glaciers. En1896,lechimisteSvanteArrheniusest lepremier s'int-resser 1' effet de serre que peut provoquer le gaz carbonique. Dans des travaux ultrieurs, il suggre que les activits industrielles pour-raientprovoquerunrchauffement plantaire dequelquesdegrs. Si nous avons bien l le dbut de la thorie du rchauffement clima-tique d'origine humaine,onaurait bien tort decroire qu'Arrhenius s'inquitait d'une possible crise climatique, luiquise rjouissait aucontraired'un ventuelrchauffement induit par l'homme,y voyantdiversavantages.Quoi qu'ilensoit,lesidesd'Arrhenius, juges simplistes, sont vite balayes sans piti par les physiciens de l'poque. Danslesannes20,lerchauffement marquetoutefoisdenou-veauxpoints car lestempraturesont tendance monter.En1922, leBureaumtorologiqueamricainrapportequedesexpditions polairesdansl'Arctique ont observ quedesglaciersconnusont 28 L'ARMEDEL'OMBRE entirement fondu,et quel'eaus'est tellementrchauffequeles phoques commencent en ressentir douloureusement les effets. En1938, uningnieur et mtorologue amateur, Guy Callendar, remetaugot du jour l'ide d'Arrhenius. Luiaussiconsidreque la possibilit d'un rchauffement est une trsbonne nouvelle,mais d'autres ne partagent pas son avis, et les premires inquitudes autour du chaud commencent se dployer, parvenant se frayer un chemin jusqu'au bureau duprsident des tats-Unisviason Comit scien-tifique consultatif, quil'informe du risque en1965. Las ! Danslesannes70, latemprature recommence baisser (unebaisseamorceenfaitdslesannes40- voir chapitre3). L'opinion se retourne une nouvelle fois:la peur durefroidissement globalfaitlaunedesmagazines,desreportagestlvisset de certainsouvragesdevulgarisation.Degrandsnomsetdegrandes institutionsscientifiquesalertentsur lesdramesqu'un telrefroi-dissement plantaire nemanquerait pasd'engendrer.Lesouvrages spcialiss publis cette poque sont, comme ilse doit,beaucoup plusmesurs,maistout demmeassez clairs.PierreEstienne et Alain Godard crivent par exemple, dans leur Climatologie publie en1970(ArmandColin, rditen1993 ),quedepuisunequin-zaine d'annes, il semble que nous nous acheminions nouveau vers une pulsation froide;la temprature deseaux marines arctiques est enbaisse ; 1' levagegroenlandaisnesubsiste qu'avec desaliments imports ... .Certains ouvrages persistent voquer la crainte d'un rchauffement climatiqued' originehumaine,parfoismme enen dpeignant les dramatiques consquences potentielles, pour ajouter aussitt que la baisse observe de la temprature rend tout de mme la thorie d'Arrhenius et deCallendar plus quedouteuse. S'ilsembleexcessif deparler deconsensusdela communaut scientifique, la crainte diffuse d'un refroidissement majeur semble bien avoir effectivement exist pendant plusieurs annes dans 1' opinion des annes 70.Ilse peut que la fameuse canicule de1976 en Europe ait jou un rle psychologique dans l'ultime retournement de situation qui a vu nouveau le chaud supplanter le froid.Cependant, et ce sera peut-trelunesurprisemme pour deslecteursbieninforms,la 29 LEMYTHECLIMATIQUE possibilit d'un retour prochain un pisode froid n'a pas t aban-donne partout dscette poque.Uneillustrationparticulirement impressionnante enest donnepar la couvertured'un numrodu magazine Ciel et Espace, revue de rfrence des astronomes amateurs. On yvoitlesphinx et lespyramides d'gypte recouverts deneige, avec, en paisses majuscules rouges le titre du dossier du mois: Le retour des grands froids. Difficile croire, mais pourtant vrai: cette couverture date de 1988. Il y a vingt ans. Il y a vingt sicles, serait-on tent de dire la lecture de 1' introduction de 1' article intitul Retour 1' ge glaciaire? quiouvre ledossier:Hiver glacial.tfroid. Voilpeut-trel'essentiel desprvisionsmtorologiquespour les prochaines annes[ . . . ] Le plus difficile reste encore de rpondre la question : " quand la prochaine vague de froid ?" L'article, sign de Jean-Franois Robredo, dtaille les influences solaires sur le climat. Ilseconclut par cesmots:Concrtement,sila tendanceactuelle devaitsepoursuivre[ ... ],onnepeut exclureunretourprochain du froid. Faut-il en conclure qu'une (petite) re glaciaire frappe dj notreporte? Pour certains,lests"pourris" et leshiversfroids de ces dernires annes en sont dj des signes prcurseurs. Les scien-tifiques restent plusprudents .. . et plus optimistes 1 L'anne1988estpourtantcelleolerchauffementprend l'ascendant pour de bon, notamment suite une dposition devenue clbre deJamesHansen,unscientifique delaNASA,auCongrs amricain. Trois mois aprs la parution de son dossier, Ciel et Espace publie d'ailleurs le courrier d'un lecteur qui s'interroge : se dirige-t-on donc vers un rchauffement ou vers un refroidissement? La rponse de la rdaction finit par ces mots sans quivoque: ... [l'on a]raison d' annoncer, aujourd'hui, un lger rchauffement de la Terre, d la 1. Deux courtes mentions de la possibilit d'un rchauffement sont tout de mme donnes dans l'article:l' une audtour d'un encadr expliquant le ph-nomne de l'effet de serre, l'autre dans une note de bas de page qui prcise que 1' ventuelle tendance au refroidissement se doit d' tre nuance par 1' influence propre de l'homme sur le climat, qui va plutt dans le sens d'un rchauffement del'atmosphre ! >>. 30 L'ARMEDEL'OMBRE seule activit humaine, qui rejette dans l'atmosphre des milliards de kilowattspar an.Iln'empche, tout compte faitet moyen et long terme, nos arrire-arrire-petits-enfants, et les leurs, verront bien les glaciers et les banquises gagner du terrain, et nos belles plages gagner sur la mer. .. Les arrire-arrire-petits-enfants en question natront dans la seconde moiti duxxie sicle. Le discours actuel est, faut-il ledire, bien loin de leur prdire la mme chose. La victoire du chaud la findesannes80,donc,malgrquelquesvoixrsiduelles, la chaleur supplante dfinitivement le froid comme tendard de l'in-quitude climatique. Les troupes se mettent en ordre de marche pour la conqute en 1988, anne o se cre ce qui va se rvler une redou-tablemachinedeguerre:leGIEC(Grouped'expertsintergouverne-mental sur l'volution du climat). Structure sui generis sans quivalent dans l'histoire des sciences et dont la fonction principale est de forger l'opinion des dcideurs sur les questions climatiques, le GIECmane de l'Organisation mtorologique mondiale d'une part, du Programme des Nations unies pour l'environnement d'autre part. Cet enfant de la science et de la politique s'est impos comme interlocuteur privilgi sur touteslesquestionsclimatiques.Ilaffirmerassembler lesdeux mille cinq cents scientifiques les plus comptents sur ces questions. Les thses duGIECpeuvent se rsumer ainsi: -la tempraturemoyenne de la planteaaugmentd'environ 0,7oc depuis le dbut de l're industrielle (c'est--dire le milieu du XIXesicle); -les missions de gaz carbonique (ou dioxyde de carbone, ou C02) d'originehumaineont fortementaugmentdepuiscette poque,si bien que la concentration atmosphrique de ce gaz est passe d'en-viron 280 ppm (parties par million) environ 380 ppm enun sicle et demi; -entre autres choses, l'augmentation de la concentration atmos-phrique en gaz carbonique a eu pour effet,via divers mcanismes, 31 LEMYTHECLIMATIQUE d'accentuer le phnomne physique connu sous le nom d' effet de serre, dont 1'une des consquences est que, prise dans son ensemble, la plante se rchauffe ; -ce sont donc les activits humaines qui sont la principale cause de 1' augmentation constate de la temprature du globe ; - moinsd'une rduction forteet rapidedenosmissionsen gazcarbonique(maisaussid'autresgazeffet deserre,comme lemthane),latempraturedela Terrevaaugmenter encoreau x xie sicle, dans une fourchette dont les moyennes varient entre 2 oc et 4 oc selon les scnarios, sans exclure la possibilit d'un rchauf-fement plus important quipourrait dpasser les 6 oc; -cette augmentation de la temprature aura des effets dramatiques dansbeaucoup d'endroitsdumonde,quiseront frapps,selonles rgions,par lascheresse,lespluiestorrentielles,descatastrophes naturelles plus frquentes, des canicules, une augmentation excessive duniveau des mers, etc. Les troupes des partisans de ces thses ont conquis tour tour les territoires associatifs, scientifiques, mdiatiques, politiques, ducatifs et mme publicitaires. En une petite vingtaine d'annes seulement, pratiquement tous les bastions de rsistance sont tombs entre leurs mains. Sommet de la Terre, protocole de Kyoto ou confrence de Bali sonnent leursoreilles comme autant devictoires,qu'ellessoient illusoires, symboliques ou relles. Les revues scientifiques les plus prestigieuses leur sont dsormais acquises, les magazines de vulga-risationleur ont,logiquement,embot lepas,et aveceux tousles grandsmdiasd'information.Lesenfantsapprennentaujourd'hui lesmfaits durchauffement venir aussibien autravers de livres illustrscritsleur intentionqu' l'cole,olefilmUnevrit qui drangeest parfois diffus.La publicit n'est pas enreste,qui nousvantergulirementlesbienfaitspour laplantedenotre consommation detelou tel produit.Enfin,iln'est plus aucun parti politique un tant soit peu reprsentatif qui n'ait dans son programme unebatteriedepropositionspourlutter contrelerchauffement climatique. Dela clbrerevueNaturela Royal Societybritanniqueen 32 L'ARMEDEL'OMBRE passant par l'oNu, ilserait fastidieux d'noncer la liste de toutes les respectables institutions qui se sont aujourd'hui rallies ces thses. Le triompheattotal,achang enseulement quelquesannes la facedelascienceclimatologiqueets'est infiltrdanstousles aspectsdenotresocit.Siaucune dnominationnes'est impose pour dsigner les troupes victorieuses, c'est parce qu'elles n'en ont mmepaseubesoin.Certes,d' alarmistes rchauffistes ,les noms d'oiseaux ne manquent pas venant de leurs adversaires. C'est envain,enrevanche,quel'on chercherait unednominationla foisneutreet couranteendehorsdecelle quivoquelesclima-tologues- procd delangage quiapour effet d'ignorer l' exis-tence mme de leurs opposants. Dans la suite, j'utiliserai de manire systmatiquelenologismedecarbocentristes,leplusneutreque j'ai sutrouver 1 Les masses silencieuses Face la dferlante carbocentriste, ceux que l'on appelle les scep-tiques ont donc t contraints de reculer.Qui sait seulement qu'ils existent, part lorsque telle personnalit mdiatise s'en fait l'cho, parfois de manire tapageuse et finalement contre-productive? Iln'est pasncessairederappeler que,demaniretymologi-quement paradoxale, nos mdias contemporains sont contraints par l'immdiatet. Or, rien n'est plus loign de la dmarche scientifique qu'une tellecontrainte.Si la science faitbien sr, l'occasion, des percesfoudroyantes,bienplussouvent elleprogresseparhsita-tions,par discussions lentes.De la mcanique quantique la tecto-niquedesplaques,la plupart desgrandesthoriesscientifiquesne se sont dveloppes qu' l'issue de longues et indcises discussions, rarement hautes en couleur. Cette observation tout fait banale suffit, 1.Ilest toutefois entendu que le simple fait d'attribuer un nom relve d'une intentiondecirconscrire cedontilest question,et qu'une telle dmarchen' a riende neutre. 33 LEMYTHECLIMATIQUE me semble-t-il, dmontrer deux points: d'une part, la machine mdia-tique n'est gure adapte pour rendre compte de manire fidle de la marche de la science. D'autre part, le consensus proclam par les carbocentristes est a priori hautement suspect: ilsupposerait que les annoncesalorssanslendemain d'ArrheniusouCallendar auraient soudainmisd'accordl'ensemble dela communaut scientifique, alorsmmequ'aucunethoriegnralen'a vule jour concernant cet objet extraordinairement compliququ' estlamachine clima-tique. Un tel vnement serait assez exceptionnel dans l'histoire des sciences,quimontrebien plussouvent quedelonguesannes,des dcennies mme sont ncessaires avant que l'unanimit scientifique ne s'impose au sujet d'un systme d' une telle complexit. En ralit, le consensus affich en faveur du carbocentrisme n'existe pas.Venuesd'horizonsdeplusenplusdivers,desvoixs'lvent pour s'y opposer. Bien sr,objectera-t-on par avance, il existe aussi quelquesscientifiques quisoutiennent encorelavaliditdesexp-riences sur la fusion froide. Cependant, comme nous allons le voir plusloin,l'arme desscientifiquessceptiquesduclimat,bienque rejetedansl'ombre,n'a rienvoir aveclesimple reliquatd'une opinion scientifique discrdite. Parcequele discoursdominant arussiinstiller l'ide qu'il est 1' expressionde 1' avisdetouslesspcialistes,ilne faitaucun doute que denombreuxscientifiquesd'autresdisciplinesadhrent aucarbocentrisme par simple confianceenversleurscollgues.Il est bien vident que,le plus souvent,cetteconfiance est tout fait lgitime.J'ai eupendant desannescette naturelleconfiance,qui alongtempsfaitdemoil'undesinnombrablessoutienspassifsdu carbocentrisme. Comme sans doute bien des personnes de formation scientifique,monseulscepticisme portait sur ceque je percevais comme une probable exagration mdiatique. Mais sur Je fond, toute ma cultureuniversitaireme portait penser que lecarbocentrisme tait fond- et je priemeslecteursdecroire qu'ilnem'a pas t anodin d'avoir d ainsi le questionner. Concernant les nombreux scientifiques et laboratoires de recherche quicautionnent plusexplicitementlecarbocentrisme,ilconvient 34 L'ARMEDEL'OMBRE d'observer deux choses. La premire est que,souvent, cette caution n'est qu'indirecte,ausenso biendesrecherchesportentsur les effets supposs des thses carbocentristes, et non sur leur pertinence. Tellequipederecherchevaainsis'intresser auxconsquences conomiques possibles d'une hausse duniveau desmers, tandis que telindustrieltravaillera lasquestrationdugazcarbonique.Le rchauffement climatiquesera belet bieninvoqu,maiscomme simple postulat 1 Durant mon sjour de six ans la section de comp-tabilit carbone de l'Office australien de l'effet de serre, personne ne m'a parl des preuves accusant les missions de gaz carbonique.La chose tait tout simplement accepte: je tiens pour certain que cette rflexion de David Evans, aujourd'hui sceptique aprs avoir conu et dvelopp un modle complet de comptabilit carbone (FullCAM), est largement partage au sein de nombreux organismes engags dans la cause carbocentriste. William Schlesinger, membre de 1' Acadmie amricainedesscienceset carbocentristerput,areconnupubli-quement que,parmi les deuxmille cinq cents scientifiques du GIEC, environ 20% seulement sont lis aux sciences du climat. Ouvrons ici uneparenthse pour noter queparmi euxsetrouvent denombreux dissidents, dont certains ont choisi de dmissionner de leur fonction auGIEC.Lesplusconnusdecesdissidentssont RichardLindzen, PaulReiter,Christopher Landsea ou encore John Christy.Parmiles sceptiques que le GIEC compte en son sein, citons Vincent Gray, Peter Dietze, et surtout Yury Izrael, vice-prsident du GIEC qui a notamment affirm en 2005 que [le]problme [du changement climatique] est obscurcipar denombreuseserreurset conceptionsfautives[ ... ]. Il n'y a aucun lien dmontr entre les activits humaines et le rchauf-fement climatique. Un autre point observer est que, de toute vidence, certains sou-tiensaucarbocentrismenesont pastrsprofonds.Lespages d'in-troduction de bien des ouvrages des sicles passs rendaient grces Dieu,ouausouveraindumoment:devait-onlescomprendre 1.Danscetteveine,unegrossepartiedesrapportsduGIECtraitenonpas dela thorie elle-mme,mais desespossibles consquences. 35 LEMYTHECLIMATIQUE comme l'affirmation dela foideleursauteurs,ou deleur adhsion sansfailleaurgimeenplace? Croit-onvraiment quelesscienti-fiquessovitiques taient tous dupes del'efficacit du matrialisme dialectique pour faireprogresser la science? Bien destmoignages recueillis par dessceptiques sous lesceau de l'anonymat suggrent qu'une part non ngligeable des soutiens au carbocentrisme nesont gure plus que de faade. Ilnesaurait tre question ici desuggrer que lecarbocentrisme n'aurait plus de partisans. Tout au contraire, bien sr, il est denom-breuxscientifiquescarbocentristesinfluentset comptents.Leur visibilit me semble suffisante pour que je me dispense d' en faire la recension. Mais, une fois carts les miroirs grossissants prcdents, la supriorit des carbocentristes n'est pas si crasante. Bien qu'ef-fectivement moins nombreux, moins organiss et pour l'instant peu observs,leursadversairessont l et bienl.Alorsque lestroupes sceptiquesserduisaientcommepeaudechagrinilyaquelques annes, cestroupes reoivent dsormais de plus en plus de soutien. Aucune dfectionnes'observe plusdansleursrangs,et mesure queletempspasse,leurspositionsse renforcent.Voyonscela plus en dtails. Les troupes sceptiques Le premier corps d'arme de sceptiques dont il convient de parler se compose des nombreux climatologues et spcialistes del' atmos-phrequicombattent farouchementlespositionsduGIEC.Leplus minent d'entre eux est probablement Richard Lindzen,professeur auclbreMassachusettsInstituteof Technology.Btenoiredes carbocentristes,sceptique delapremire heure,ila bataill depuis le dbut de l'affaire. SiLindzen est probablement leclimatologuesceptiqueleplus rput, il est loin d'tre le seul.Le corps d'arme sceptique des cli-matologues compte bien d'autres personnalits comme Roger Pielke Sr (universitduColorado)et sonquipedusiteinternetClimate 36 L'ARMEDEL'OMBRE Science, Roy Spencer (universit de l'Alabama), Marcel Leroux (uni-versitLyon-3),rcemment dcd,Tim Bali(universitdeWin-nipeg), Fred Singer (universit de Virginie), Red Bryson (universit duWisconsin) ...Citonsencore John Theon, physicien del'atmos-phre, qui fut le suprieur direct de James Hansen de1982 19941 Dans ce corps d'arme comme dans les autres, les opinions sont bien entendu trs diverses, et le degr derejet des thses carbocentristes varie grandement selon les personnes. Unsecond corps d'arme,particulirement fourniet structur, est celuides solaristes ,commeHenrikSvensmark,EigilFriis-Christensen (tous deux du Centre nationaldanois de l'espace), Nir Shaviv (universit de Jrusalem) ou encore Nicola Scafetta (universit Duke, Caroline duNord).Selon lessolaristes, l'essentiel desvaria-tions climatiques rcentes s'expliquent par des phnomnes solaires. S'il est facile d'accepter que notre toile joue un rle crucial dans l'volution de notre climat et que nous devons donc considrer avec la plusgrandeattentionsesoccasionnellessautesd'humeur,ilest toutaussifacileauxcarbocentristesderpliquer queleurscalculs en tiennent bien videmment dj compte- on ne voit pas d'ailleurs comment il pourrait en aller autrement. moins, donc, d'y regarder deplus prs,ilpourrait sembler que les solaristes nemnent qu'un combat d'arrire-garde l'aide d'arguments simplistes qui n'abuse-raient que des esprits crdules. Les variations de 1' clairement solaire (dont la priode est d'environ onze ans) sont effectivement intgres dans les calculs carbocentristes et ne peuvent, elles seules, expliquer l'volution actuelle de la temprature du globe. Cependant, ce n'est passur lesvariationsd'clairement queles solaristes attirent l'attention, maissur les cycles d'ruption solaire. Si vousaviez des yeux pour voir les rayons X,commente le scep-tiqueNigelCalder, ce quinesemble qu'une jolie et amicale boule jaune vous apparatrait comme un tigre enrag. Pour prolonger cette 1.Rappelonsquec' est la dpositiondeHansenauCongrsamricainen 1988quia tlepoint dedpartmajeur de1' affairedurchauffement clima-tique d' origine humaine. 37 LEMYTHECLIMATIQUE belle image propose par cet ancien rdacteur en chef dumagazine NewScientist,lesgriffes dece fauvecleste sont les protubrances solaires,immenses jaillissements dontlataillepeut dpasser plu-sieursfoiscelledenotreplante.L'effet decescyclesruptifsest que la quantit de particules ionisantes qui nous parvient en perma-nencedel'espacevarie.Pour donneruneexplicationimage,les choses se passent un peu comme si le Soleil crait un vent qui balayait avecplusoumoinsd'efficacitlefluxdeparticules ionisantesqui nousparvient par ailleursdel'espace.Or,ilsemblequecesparti-cules jouent unrle crucial dans la formation desnuages,lesquels, leur tour,ont un effet sur la temprature de la Terre.Ainsi,l' aug-mentation de la temprature globale auxxe sicle s'expliquerait par uneactivitsolaire qui,pour desraisons quirestent comprendre, seserait leve unniveau assez exceptionnel1 Telle est, en quelques lignes videmment simplifies, l'ide gnrale de la thse solariste.Elle donne lieu nombre de publications dans desrevuesscientifiquesduplushautniveauetsusciteaujourd'hui l'intrt de nombreux chercheurs2. Mmesicertaines courbesmontrent unlien tout faitfrappant entrel'activit solaire et la temprature terrestre,ilserait abusif de prtendre que le solarisme fournit une rponse tout. Il faut le prendre pour cequ'ilest:unethoriescientifique encoursd'laboration, 1.L'exprienceCloud,actuellement encoursauCERN(Organisation europenne pour la recherche nuclaire) de Genve, doit permettre d'claircir des points importants de la thorie solariste. Programme sur plusieurs annes, lesrsultats de cette exprience sont trs attendus. 2.En2002,douardBard(CollgedeFrance),dontlespositionssont nettement carbocentristes,commentaitlathoriesolaristeencrivant que les opinions divergentes sur le rchauffement global pourraient tre dpartages dans un futur proche car nous entrons actuellement dans la phase descendante ducyclesolaire.D'ici2006,l'influencedesgazeffet deserredominera, sil'on en croit la plupart des spcialistes. Si[les solaristes ont] raison, alors la baisse d'activitsolairepourrait ralentir unpeulerchauffement.Lebilan des observations ultrieures va encore plus loin : comme nous y reviendrons au chapitre 3,la Terre s'est lgrement refroidie. 38 L'ARMEDEL'OMBRE dontlesdfenseursprocdent par essaiset erreurset qui,mmesi elle aboutit, n'aura pas pour fonction de tout expliquer mais de com-prendre un lment de plus de la machinerie climatique. S'il existait unecauseuniquel'volutiondelatempraturesur lesderniers siclesoulesderniresdcenniescoules,elleauraitsansdoute dj t trouve; ilne faut donc gure s'attendre ce qu'un jour un scientifiquepublietriomphalementdeuxcourbesidentiques,l'une montrant1' volutiondelatempratureet 1' autrecelled'un ph-nomne quelconque,naturel ouartificiel.La comprhension nces-sitera, de toute vidence, le croisement de plusieurs facteurs.Ilreste que, parmi ces facteurs,il est fort possible que les cycles d'ruption solairesoient appels jouer unrle bien plusimportant que celui que les carbocentristes leur accordent. Untroisimecorps d'armesceptiqueregroupeceuxquel'on pourrait appeler les ocanistes .Reprsentspar desspcialistes telsqueDemetrisKoutsoyiannis(universitd'Athnes),lesoca-nistess'intressent desphnomnes comme ElNifio,La Nina et autreoscillationdcennale duPacifique,imparfaitement compris et dontl'influence exactesur l'volution duclimat est encoremal prise encompte.L'nergie thermique contenue danslesocans est immensmentplusgrandequecelle quecontient l'atmosphre,si bienque1'volutiondestempraturesocaniquesestunlment probablement beaucoup plus significatif que celle des tempratures atmosphriques pour comprendre l'volution climatique l'chelle globale 1 Selon les ocanistes, il est impratif de mieux comprendre les inter-actionsentrel'ocan etl'atmosphre.Lesocans(qui,en passant, sont d' immensesrservoirsdegaz carbonique- ilsen contiennent bienplusquetoutcequel'humanitpourra jamaisenvoyerdans l'atmosphreavecsonptrole)disposent d'une grandemmoire 1.En 1' occurrence, undbat existe pour dterminer si le contenu thermique des ocans augmente ou pas. Selon certaines observations, dont celles de Pielke, aprsunepriodedehausse,cecontenuthermiqueest stationnaire,voireen baisse, depuis quelques annes. 39 LEMYTHECLIMATIQUE thermique,quifaitque,par exemple,l'nergie thermiquereue par lesocanspeut fort bien (et c'est mme le plus souvent lecas) n'trelibredans1' atmosphre qu'avecundcalagede plusieurs sicles.Parmi les multiples articles qui s'intressent auxliens entre ocans et climat, citons celui de Gilbert Cambo et Prashant Sardes-hmukh (universit du Colorado) paru en 2008 dans la revue Climate Dynamics, qui propose une explication selon laquelle les variations de temprature des continents seraient dictes par celles des ocans, et non par 1' effet de serre. Notons enfin que solarisme et ocanisme ne sont pas des thories antagonistes. Diverses publications tentent aujourd'hui d'articuler les deuxmcanismes ; parvenir unesynthsedes deuxpoints devue est unenjeuimportant de la recherche actuelle. Unquatrimeet puissant corpsd'armesceptique est compos de gologues.La gologie, explique par exemple Jan Veizer (uni-versit d'Ottawa), nous apporte une grande quantit de preuves de la perptuelle variabilit naturelle du climat. De nombreux gologues estiment que la faon carbocentriste d'envisager le climat est biaise, accordant tropd'importance detropcourtespriodes.Lesques-tionsdesgologuessont autant d'pines danslepied dela thorie carbocentriste: comment concilier cette thorie, par exemple, avec la ralit avre de priodes glaciaires durant lesquelles la teneur atmos-phrique en gaz carbonique tait pourtant beaucoup plus importante qu'aujourd'hui (cinq fois plus durant la priode Crtac-Jurassique, quinze foisplus lors dela priode Ordovicienne-Silurienne)? Comparativement leur importance dansledbat,l'onparle relativementpeudesgologueslorsqu'on voquelessceptiques duclimat.Sansdoutefaut-ilyvoirl'effet dufaitqueceux-cine mettent pas ncessairement en avant une thorie alternative comme le font les solaristes. Pourtant, selon Tom Segalstad, gologue l'uni-versit d'Oslo et ancien expert du GIEC,La majorit des gologues de premier plan travers lemonde sait que le point devue du GIEC sur lefonctionnementdela Terreestimprobable,pour nepasdire impossible. Le congrs international de gologie qui s'est tenu en aot 2008 a confirm ce point de vue en montrant que de nombreux 40 L'ARMEDEL'OMBRE spcialistes dudomainesont endsaccordfrontalaveclesthses carbocentristes. Uncinquimecorpsd'armesceptique,quipourraitbiense rvlertermeparticulirement important,estcomposdephysi-ciens. Comme indiqu plus haut, le mcanisme de base selon lequel legaz carbonique serait responsable del'augmentationdestemp-raturesest 1' effet de serre. L'ide gnrale trssimplifie est, en substance, que le gaz carbonique (entre autres) jouerait plus ou moins pour l'atmosphre le rle de la vitre qui, dans une serre, emprisonne la chaleur; ainsi, donc, en en augmentant la teneur dans 1' atmosphre, l'homme serait responsable d'un rchauffement global. Or, une telle reprsentation est violemment critique par des physiciens, pour de nombreuses raisons. Non seulement il est tabli que, bien plus impor-tante que le gaz carbonique, la vapeur d'eau est responsable elle seule d'au moins 60% de l'effet de serre (des auteurs vont jusqu' 95 %), mais,plus grave,le mcanisme propos pour cet effet et ses cons-quences est gravement fautif du point de vue de la thermodynamique. C'est notamment ce que soutiennent Gerhard Gerlich (universit tech-nique Carolo-Wilhelmina, Allemagne) et Ralf Tscheuschner, auteurs en 2007d'une prpublication quia faitcouler beaucoup d'encre et dont letitrersume bienlecontenu:Rfutation, danslecadre de la physique, de l'effet de serre du C02 atmosphrique. La posture condescendanteadoptepar certainscarbocentristespour dcrdi-biliser cette prpublication n'a pas empch celle-cideparatre, un an et demi plus tard, dans International Journal of Modern Physics, unerevue dont le haut niveau scientifique est incontestable. Autre exemple relevant de la physique: en 2008, la Socit am-ricaine de physique (APS),une association dont la position officielle est alignesur lecarbocentrisme,afaitparatre en juillet 2008un point de vue sceptique, prsent par Christopher Monckton (ancien conseiller deMargaret Thatcher) dansl'une deleurspublications, Physics and Society.Cette publication a cr des remous dans cette socit savante mondialement respecte et certains membres ont pris la dfense de Monckton. Par la suite, plusieurs dizaines de membres del' APSont exprim unepositionsceptiquesur lerchauffement 41 LEMYTHECLIMATIQUE climatique,contraignant soncomit directeur formerungroupe derflexiondestinrevoirla positionofficielledel' APSsur le carbocentrisme. En octobre 2009, plus de cent soixante physiciens, dontIvar Giaever,prixNobeldePhysique1973,ontadressun courrier auSnat amricain pour dnoncer laposition officielle de 1' APS, affirmer que le consensus affich est un leurre, et insister sur le fait qu' un consensus n'est pas un test acceptable de validit scien-tifique. Malgr tout, quelques lments secondaires prs, l' APSa dcid en novembre de maintenir sa position gnrale sur la question, ce qui a dcid un groupe de physiciens lancer une ptition auprs des membres de 1' APS. Parmi les physiciens, il convient enfin de faire une place Freeman Dyson, l'un des plus clbres physiciens de sa gnration, moins cri-tique sur le carbocentrisme proprement parler que sur certaines des mthodes de sespromoteurs et sur l'importance prise par l'affaire, uneimportanceselonluiexagrehorsdetoutesproportions raisonnables. En plus de ces corps d'arme, les sceptiques peuvent compter sur l'appui de nombreux bataillons venus des sciences de l'environnement, des sciences de la Terre, de la mtorologie, de l'analyse des prvi-sions, dessciences de l'ingnieur, etc.Par exemple, Syun Akasofu, fondateur et directeur jusqu'en 2007 du centre derecherchesinter-nationalsur l'Arctique (universitd'Alaska Fairbanks),n'a pasde mots assez durs pour contester l'image vhicule par leGIECet les mdias de l'volution de la banquise. Divers spcialistes des ouragans comme Christopher Landsea(Agencefdraleamricainesur les ocans et 1' atmosphre), ou de la diffusion des pidmies comme Paul Reiter (Institut Pasteur) se sont tout aussi violemment levs contre certaines affirmations du GIEC.D'autre part,le rchauffement cli-matiqueamorc dans lesannes1980 quis'observe sur certaines desplantesdusystmesolaire(Mars,Jupiter,Neptune,ainsique la petite plante Pluton et leplusgros satellite de Neptune, Triton) suscite pour la thse solariste l'intrt de certains astronomes, comme KhabibulloAbdusamatov (Observatoire astronomique de Pulkovo, Russie). Un point de vue carbocentriste publi par Rudy Baum dans 42 L'ARMEDEL'OMBRE une publication du22 juin 2009 de la Socit amricaine de chimie s'est attir les foudres de nombreux membres de cette socit savante. Enfin,enFrance,Vincent Courtillot (Institut de physique duglobe deParis)est devenul'une desprincipalesfiguresduscepticisme climatique, notamment grce sa clbre confrence du 8 juin 2009, tenue l'universit de Nantes. De l'Acadmie polonaise dessciences1'Union japonaise des gosciences en passant par un rapport officiel commandit par le gou-vernement indien, l'on pourrait multiplier les exemples qui montrent qu'il n'existe pas de consensus autour ducarbocentrisme.Seulela volont de ne pas noyer le lecteur sous des flotsde noms de scienti-fiques prestigieuxme conduit nepas en allonger icila liste,sice n'est pour mentionner encoreFrederick Seitz,ancienprsident de l'Acadmie amricaine dessciences et cautionscientifique d'une ptition sceptique rassemblant aujourd'hui plus de trente mille signa-tures, dont plus de neuf mille titulaires d'un doctorat 1 Les grands maquis Paralllement ces sceptiques du monde acadmique, qui consti-tuent en quelque sorte 1' arme rgulire du scepticisme, certains oppo-santsaucarbocentrisme sont dessceptiques dont l'action n'est pas inscrite dans leur carrire de scientifique. Ils forment des maquis de francs-tireurs, certains ont acquis une force de frappe considrable. Le plusclbrede cesmaquis est sans contestelesiteinternet ClimateAudit,crparSteveMclntyre.Danslacommunaut dessceptiques,leprestigede Mclntyre est immense.Le plus haut faitd'armesde cettefigureduscepticismeest d'avoir,avecRoss 1. Mentionnonsaussiunrapport delaminoritsnatorialeamricaine (MinorityReport)quidonneunelistedtaillededclarationsdenombreux scientifiques sceptiques lis auxsciences duclimat.Rgulirement mi s jour augr dessoutiensdeplusenplusnombreuxreuspar lecamp sceptique,il contient aujourd' hui plus desept cents noms. 43 LEMYTHECLIMATIQUE Mc Ki trick(universitdeGuelph),dmystifila clbrecourbe encrossedehockey,quifutlongtempsunemblme ducarbo-centrisme conqurant (voir chapitre 2).Changeant subitement les drapeaux en haillons, pour reprendre les mots du pote de Waterloo, Mclntyres'est faitunespcialit de dcortiquer donneset pro-grammes informatiques utiliss par les carbocentristes. C'est peu dire que ces derniers redoutent comme la peste les incursions des infati-gables hordes d'informaticiens la solde de Climate Audit,hordes qui ne craignent pas de se lancer l'assaut des dizaines de pages de programmes remplies d'arides lignes de code pour en dbusquer les nombreuses faillesquirendent sisouvent caduques les conclusions de leurs concepteurs. Un second maquis sceptique, dont la notorit a rejoint celle du pr-cdent, est le site internet Watts Up With That, d'Anthony Watts.Cet ancien prsentateur de la mto la tlvision a notamment lanc en 2007la campagne SurfaceStations consistant rassembler toutesles donnes possibles sur la localisation exacte des stations mto utilises pour calculer la moyenne destempraturesauxtats-Unis.Aidde ses troupes qui cument joyeusement le pays armes de leurs appareils photo, c'est avec un humour souvent explosif qu'il fait rgulirement voler en clats quantit d'affirmations errones issues de l'utilisation des donnes dlivres par ces stations (voir chapitre 3). Les coups de boutoir de l'arme des sceptiques n'ont pas encore entam l'affichage descertitudes carbocentristes. Ce n'est pourtant plus gure qu'une question de temps, tant les signes avant-coureurs d'un retournement se font de plus en plus nets.Si le carbocentrisme tient encore ses places fortesles plus visibles, ila en revanche irr-mdiablement perdusespositionslesplusvitales.La sciencese drobesoussespieds.La Terrerefusede se plier sesprvisions. La chance elle-mme,quil'a untempsservi,semble avoir chang de camp.Voilpourquoiilmesemble quele jour n'est sansdoute plus trs loin o, avec le pote, 1' on pourra crire sur la grande arme des carbocentristes que: Comme s'envole auvent une paille enflamme, S'vanouit ce bruit qui fut lagrande arme. 44 L'ARMEDEL'OMBRE RFRENCESBIBLIOGRAPHIQUES Unrecensementdequelques-unesdesdclarationsayant,selonles poques, annonc la venue du froid ou du chaud est disponible sur internet 1' adresse http://www.businessandmedia.org/specialreports/2006/fireandice/ fireandice_execsum.asp Lapeur durefroidissement global desannes70 estexposesur beaucoup desitesinternetsceptiques,surlesquelsonpeut dcouvrirles unes de journaux del'poque sur lesujet (Time,Newsweek)ainsique denombreusesdclarationsd'alors(voir par exemplePenseUnique: http://www.pensee-unique.fr/betisier.html). L'une des pages dusite Skyfal regroupeunensemble decitations choisiesdontplusieursconcernent cet pisode (http://skyfal.free.fr/?page_id=248). Uneanalysecritiqueselonlaquellelesclimatologuesn'auraient jamais adhrl'ide d'unrefroidissementglobaldanslesannes70 (autrement qu' la marge) est propose par John Fleck et William Connolley (enanglais)surlesitecarbocentristederfrenceRealCiimate(http:// www.realclimate.org/index.php/archives/2008/03/the-global-cooling-mole/langswitch_lang/fr) . Uneversionplusdtaillesetrouvedansun texte enanglais de Thomas Peterson, William Connolley et JohnFleck, TheMythof the1970sGlobalCoolingScientificConsensusparu dansleBulletinof theAmerican MeteorologicalSociety,vol.89,n9, p. 1325-1337, 2008, que l'on peut consulter sur internet 1'adresse http:// ams.allenpress.com/perlserv /?request=get -abstract&doi= 10.117 5 %2F20 08BAMS2370.1 Le dossier Le Retour des grands froids est paru dansCiel et Espace n221, p.20-36,1988, la raction d'un lecteur et la rponse de la rdaction dans len224,p.5,1988. LesrapportsduGIEC(IPCCenanglais)sontdisponiblessur sonsite (http://www.ipcc.ch/),quicontient plusieurslmentsdedocumentation enfranais. La citation de David Evans figuredans untexte sur lequelnous revien-drons, My Life with the AGO and Other Reftections (voir rfrence aux notes bibliographiques duchapitre 6). La reconnaissance par William Schlesinger du fait que seulement 20 o/o desmembresduGIECsont desscientifiques duclimat peut tre entendue, enanglais,surlavidoquisetrouvesurinternet1'adressehttp:/1 45 LEMYTHECLIMATIQUE www.youtube.com/watch?v=08hdl41-Hac(laphraseestprononce 3 min35 s). Le texte (traduit en anglais) dans lequel Yuri Izrael, vice-prsident du GIEC et membre de J'Acadmie russe des sciences, a exprim son scepticisme sur 1' affaire du rchauffement climatique peut tre consult sur Je site internet Ria Novosti 1' adresse http://en.rian.ru/analysis/20050623/407 48412.html Notrerevuedestroupessceptiquesn' est,nous1' avonsdit,quetrs partielle.Lelecteurquisouhaiteavoirunevisionpluscomplteet plusprcisepourra notamment consulter JesitePenseUniquedeJean Martin (voir adresse ci-dessous), sur lequel se trouve une liste impression-nantedechercheursrenommsquisesont exprimsenfaveurducamp sceptique (le prsent chapitre luiest trs redevable cet gard). Voiciunelistede quelques sites internet sceptiques et scientifiques de rfrence (lessitesprcds d'un astrisque sont francophones,lesautres sont anglophones): Jose ph D' Aleo (dir. ),icecap, http://icecap. us/index. php William Briggs, http://wmbriggs.com/ John Brigueil, Number Watch,http://www.numberwatch.co.uk/ C02 Science, http://www.co2science.org/ Friends of Science, http://www.friendsofscience.org/ Jeff Id,The Air Vent,http://noconsensus.wordpress.com/ Lucia Liljegren, The Blackboard, http://rankexploits.com/musings/ *Jean Martin,Pense Unique,http://www.pensee-unique.fr/ Warren Meyer, Climate Skeptic, http://www.climate-skeptic.com/ Steve Mclntyre, Climate Audit, http://www.climateaudit.org/ PatrickMichaels(dir.),WorldClimateReport,http://www.worldcli-matereport.com/ *CharlesMuller,Climat Sceptique,http://climat-sceptique.over-blog. co ml Roger Pielke (dir.),Climate Science, http://climatesci.org/ *Skyfal,http://skyfal.free.fr/ *Robert Vivian, Le Glacioweb, http://virtedit.online.fr/glacioweb.html AnthonyWatts,WattsUpWithThat? http://wattsupwiththat.word-press.com/ La citation d' douard Bard est extraite de son article intitul Les humeurs dusoleil changent notre climat, LaRecherche U0 352, avril2002. La lettre de Christopher Landsea (enanglais)expliquant sa dmission duGIECat renduepubliquesurinternet(http://www.lavoisier.com.au/ papers/articles/landsea.html). 46 l'ARMEDEl'OMBRE Une interview de Marcel Leroux est disponible sur Jesite internet Daily-motion (http://www.dailymotion.com/video/x33184_marcel-Jeroux -clima-tologue-non-peop_tech) .Lesitedulaboratoiredeclimatologie,risques, environnement o exerait Lerouxcontient galement deslmentsint-ressantssur lamthodologiedela climatologie (http://Jcre.univ-lyon3.fr/ climato/rechercheclimat.htm).Signalonsaussisonouvrage,cocrit avec Jacques Comby,GlobalWarming- Mythor Reality:TheErringWaysof Climatology,paru chez Springer en 2005. Une requte explicite adresse (en anglais) au GIEC par Syun Akasofu peut tre consulte enintgralitsurinternet (http://icecap.us/images/uploads/ REQUEST_TO_THE_IPCC.pdf). Une traduction franaiseest disponible sur Jesite Skyfal (http://skyfal.free.fr/?p=l89). Sur Jesite Pense Unique est disponible, entre beaucoup d'autres choses, unetraductionfranaised'uncontre-rapport duNIPCC(leNon-GIEC ) pilot par Frederic Singer (la version originale se trouve l'adresse http:// heartland.temp.siteexecutive.cornlpdf/22835.pdf). Le numro de juillet 2008 de Physics &Society, dans lequel est paru l'ar-ticle de Christopher Monckton, peut tre consult sur internet (http://www. aps.org/units/fps/newsletters/200807 /upload/july08.pdf). La polmique qu'a entrane la publication de cet article peut galement tre suivie (en anglais) sur internet (http://www.webcommentary.com/aps.htm). Signalons notamment Jesoutien apport Monckton par Roger Cohen: (http://scienceandpublic-policy.org/images/stories/papers/commentaries/Roger_Cohen-On_IPCCs_ view_of_AGW.pdf).La lettre des physiciens adresse au Snat amricain, ainsiquela listedessignataires,est disponible J'adresseinternet http:// tinyurl.cornllg266u L'actionengage par desphysiciensauprsdesmembresdel' APSest dtaille cette adresse http://bishophill.squarespace.com/blog/2009/ 12/5/ more-cracks-in-the-facade.html L'articledeRudyBaum(Socitamricainedechimie)du22 juin 2009 est paru dansChemical and Engineering News(voir http://pubs.acs. org/cen/editor/87 /8725editor.html),lescommentaires,parfoistrsviru-lents,se trouvent 1' adresse http://pubs.acs.org/cen/Jetters/87 /8730letters. html La confrence deVincent Courtillot donne Nantes se trouve en int-gralitsurJesitede1'universit,1'adresse http://www.js.univ-nantes. fr/14918022/0/fichepagelibre/&RH=JSFR 1 La ptition initie par Frederick Seitz peut tre consulte sur internet 1' adresse http://www. petitionproject.org/ 47 LEMYTHECLIMATIQUE Le rapport de la minorit snatoriale amricaine quireprend les dcla-rationsdenombreuxscientifiquessceptiquesest disponiblel'adresse internet http://epw.senate.gov /public/index.cfm ?FuseAction=Files. View &File Store_id=8394 7f5d-d84a-4a84-ad5d-6e2d71 db52d9 Signalons enfin le documentaire dsormais classique de Martin Durkin TheGreat GlobalWarmingSwindle, quipeut tre vu enversionanglaise sous-titre enfranaissurlesiteGoogle Video(http://video.google.fr/ videoplay?docid=-4123082535546754758). Aprs sa diffusion en 2007 sur la chane detlvisionbritannique Channel 4,ce documentairesceptique atlacibledeplusieursplaintesdposesauprsdel'Ofcom,l'Office britannique dergulationdestlcommunications.Letexteoriginal(en anglais) de cesplaintes figuresur unsite spcialement ddi (http://www. ofcomswindlecomplaint.net/). Le jugement de l'Ofcom, qui a dmoli l'es-sentieldesaccusations1' encontre dudocumentaire,est parudansson bulletinn114,quipeuttreconsult enintgralitsur lesite officiel del'Ofcom(http://www.ofcorn.org.ukltv/obb/prog_cb/obbll4/).Notons qu'une analyse trs pertinente de ce jugement a t donne par Mclntyre sur sonsite(http://www.climateaudit.org/?p=3328).Une traductionfranai se decetteanalysefigureen annexedela traductiond'un texte(par ailleurs trsintressant et surlequelnousreviendronsauchapitre6)deLindzen sur la climatologie contemporaine,publiesur lesite Pense Unique.Un dbat(enanglais)organis par la chane detlvisionaustralienne ABC autour dufilmde Durkin se trouvesur lesiteYouTube(http://fr.youtube. com/watch?v=lljGynF4qkE). Comme il arrive souvent lors d' entretiens avec dessceptiques du climat,le journaliste quiinterviewe Durkin faitmontre d'une louable prcision dans ses critiques sans concession, prcision dont onnepeut qu'esprer qu'ellefinisseun jour par s'exercer aveclamme acuit envers les tenants du carbocentrisme. Le prsent ouvrage dispose d'un site compagnon, l'adresse http://lemy-theclimatique.wordpress.com/ (Ce site est prvupour tre prochainement hberg par le site Skyfal, l' adresse http//skyfal.free.fr). CHAPITRE2 Grandeur et misre d'une courbe ...s'ilavaittcontraireaudroitdedominationde quelqu'un[ ... ] que les trois angles d'un triangle fussent gaux aux deux angles d'un carr, cette doctrine aurait t,sinondbattue,dumoinsrprimepar unautodaf de tousleslivresde gomtrie [ . .. ] Thomas Hobbes,Lviathan,165 1 IlestdouteuxqueThomasHobbesait imagin quecepassage duLviathanpourrait servler prophtique,quetoutunpan des mathmatiques serait un jour rellement contest et disput par des personnesauxintrtscontraires.Aveclapolmiqueautour dela courbeencrosse dehockey,l'inventif scnario duphilosophe anglais du xvne sicle est pourtant devenu ralit. Cette controverse aujourd'huifinissanteest l'une despluspiques.Elleest decelles sur lesquelles les historiens des sciences auront bien des choses dire lorsque letemps aura permis d' en clarifier certains points. La douce poque mdivale Jusquedanslesannes90,la communautscientifiquevoyait l'histoire delatemprature dela Terresousla formed'une courbe ressemblantcelle-ci,tiredupremier rapport duGIEC,publi en 1990 (figure 7 .le). Cette courbe schmatise cequitait alorsacceptcomme des-cription gnrale de 1' volution de la temprature de la Terre durant le 49 LEMYTHECLIMATIQUE dernier millnaire. Les annes (Year) y sont reprsentes sur l'axe hori-zontal, tandis que l'anomalie de temprature (Temperature Change), c'est--direl'cart avecunetempraturederfrenceconvention-nelle, figure sur l'axe vertical. (trangement, 1' axe vertical des tem-pratures n'a pas d'chelle clairement indique.) Medieval Warm Period 1000 AD Little lee Age 1500 AD Year 1900 AD Pour obtenir une courbe de ce genre, le principe gnral consiste reconstituer l'volutiondelatempratureendiffrentspoints duglobeetdiffrentespoques,pour ensuitefaireunemoyenne pour chacune de ces poques.Comme ons'en doute,il s'agit d'un travaildlicat,impliquant destechniquesextrmement fines(voir chapitre 3). L'histoire decettecourbe dupremier rapport duGIECestassez obscure.Ilsemblequ'elle ait t dessine,sansdouteunpeuhti-vement, partir d'un article de Hubert Lamb crit en1965 et qui ne concernait en fait que les tempratures du centre de l'Angleterre. La valeur scientifique decette courbe peut donc tre mise en question, mais iln'en reste pas moins qu'elle montre ce que pouvait tre 1' avis gnral de la communaut scientifique en1990 sur la question de la temprature globale dudernier millnaire. Un simple coup d'il montre que cette courbe ne va gure dans le sens d'un quelconque alarrnisme climatique. Deux priodes attirent spcialement 1' attention.La premire,1' Optimummdival (Medieval Warm Period), englobe les xne et xme sicles et correspond 50 GRANDEURETMISRED'UNECOURBE aux tempratures les plus leves du millnaire. La seconde, le Petit ge glaciaire (Little lee Age), o les tempratures ont t les plus bassesdesmillederniresannes,concernenotamment lesxvie et xvne sicles. La priode actuelle, elle, nese distingue enrien. La conclusionquidcouledecette courbereprsentativede 1'esprit gnral du milieu scientifique des annes 90 est assez claire: nousvivonsunpisode climatiquetoutfaitquelconque.Quand bienmmeunrchauffementserait-ilprovoqupar l'homme que cela n'y changerait pas grand-chose: la temprature actuelle n'a pas encore rejoint celle del'Optimum mdival,quin'a aucune raison de constituer une quelconque limite ne pas dpasser. Quand la foudre frappe Jusqu' la fin des annes 90, la thorie d'un rchauffement clima-tique d' origine humaine bute contre l'Optimum mdival et le Petit ge glaciaire. Sans la rfuter proprement parler, ces priodes clima-tiques affaiblissent considrablement le carbocentrisme. Les choses se retournent brutalement en 1998, date laquelle Michael Mann (uni-versit du Massachusetts) et deux collaborateurs, Raymond Bradley (idem)et MalcolmHughes(universitdel'Arizona),publient une tude quifaitl' effet d'un coup detonnerre.Celle-ci propose une nouvelle reconstitution de l'volution de la temprature globale qui fait disparatre d'un trait de courbe l'Optimum mdivalaussibien que le Petit ge glaciaire. Cette nouvelle courbe est complte un an plustard pour reconstituer lestempratures de l'hmisphre Nord; l'une des versions publies par le GIECdans son rapport de 2001est la suivante (voir page suivante). Cette courbe quireprsentela tempratureglobale enfonction du temps n'a plus rien voir avec celle de1990. Cette fois,en effet, la tendance sculaire est d'abord un trs lger refroidissement (de l'ordre de deux centimes de degr par sicle), jusqu' une cassure impressionnante aumilieuduXIXesicle,quiannuleenquelques dcenniesseulement lerefroidissement deshuitsiclesantrieurs. 51 LEMYTHECLIMATIQUE Et ce rchauffementbrutalsepoursuit,inexorable,durant tout le x xesicle:lacourbe en crosse de hockey est ne. Year lire cette courbe, l'pisode climatique actuel est remarquable par sonampleur et sa rapidit.Ilnesemblepouvoir s'expliquer que par un facteur diffrent de ceux ayant rgi le climat des sicles passs.L'Optimum mdival et le Petit ge glaciaire ont dispa