le manuel du généraliste antibiothérapie

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Page 1: Le manuel du généraliste   antibiothérapie
Page 2: Le manuel du généraliste   antibiothérapie

Antibiothérapie chez la femme

enceinte et allaitante

Véronique Isnard, A Bongain, JY Gillet

L a grossesse ne protège pas contre l’infection. Traiter une femme enceinte impose de tenir compte de deuxpatients : la mère et le fœtus. L’ensemble des antibiotiques traverse le placenta de sorte que l’embryon ou le

fœtus sont exposés à d’éventuels effets indésirables. Les conséquences du passage transplacentaire des médicamentsrevêtent toutefois un aspect plus positif lorsqu’il s’agit d’administrer un traitement à la mère dans le but de traiter lefœtus.© Elsevier, Paris.

■Modifications physiologiques

de la grossesse

Toutes les étapes de la pharmacocinétique desantibiotiques peuvent être influencées par lagrossesse. L’augmentation du volume sanguin (de40 à 50 %) provoque un accroissement du volumede distribution et une diminution de la concentrationdes protéines plasmatiques [5].

L’augmentation du débit cardiaque, et du taux defiltration glomérulaire (50 %) entraîne uneaugmentation de la clairance des antibiotiquesexcrétés par voie rénale. A contrario, la clairance dela créatinine est souvent transitoirement diminuéeau cours d’une pyélonéphrite aiguë ce qui devraitfaire diminuer les doses d’antibiotiques à éliminationrénale prépondérante.

L’imprégnation en progestérone induit unaccroissement du métabolisme hépatique, unediminution de la mobilité intestinale, un retard à lavidange gastrique et l’absorption des antibiotiquesdonnés par voie orale se fait souvent de manièreimprévisible. Le passage transplacentaire desantibiotiques, qui varie vraisemblablement selon leterme de la grossesse, détourne un pourcentageimportant de l’antibiotique du compartimentmaternel vers le compartiment fœtal (tableau I).

Ce passage des antibiot iques dans lecompartiment fœtal se fait sans interventionénergétique. Le placenta se comporte comme unemembrane semi-perméable laissant passer lesmolécules de poids moléculaire assez faible selonune loi de diffusion où interviennent : surfaceplacentaire, épaisseur du placenta, concentration depart et d’autre des membranes et caractéristiquesphysicochimiques du médicament. Si l’antibiotiquese fixe plus facilement sur les protéines, saconcentration sera réduite chez le fœtus, parexemple l’érythromycine.

Ces notions demeurent toutefois très théoriqueset nous ne possédons que peu de données sur lesconcentrations sériques et tissulaires des différentsantibiotiques au cours de la grossesse.

Les rares études sur la pharmacocinétique desantibiotiques pendant la grossesse sont sujettes àdes critiques car effectuées pendant le travail, avecun placenta sénescent, ou au cours de la grossesse à

l’occasion d’un prélèvement par ponction du cordonombilical ; dans les deux situations, il est rare quel’on puisse obtenir plus d’une paire de valeurs(fœtale et maternelle) et donc une cinétique dumédicament. Quoi qu’il en soit, il semble que les tauxsériques des antibiotiques soient inférieurs à ceuxobtenus en dehors de la grossesse [5] et le corollaireest que les doses devraient être augmentées, ce quiparadoxalement est rarement le cas, par inquiétudevis-à-vis de la mère et de son fœtus.

Il importe de noter que les taux sériques obtenussont la plupart du temps bien supérieurs auxconcentrations minimales inhibitrices et peu depublications relatent des échecs dus à des dosesd’antibiotiques insuffisantes.

■Différentes classes

d’antibiotiques et indications

pendant la grossesse

Il est difficile de mettre en évidence latératogénicité d’un médicament tant les facteurs quiinterfèrent sont nombreux et rendent impossible lamise en évidence d’une relation de cause à effet(variations individuelles, effet-dose, moment del’administration, effet possible de l’affection causale,fréquence des multimédications, études souventrétrospectives, etc [3]. Les enquêtes françaises etanglo-saxonnes, ainsi que les études des centres depharmacovigilance n’ont pas décrit de malforma-tions chez le nouveau-né par prise d’antibiotiques endébut de grossesse. Ces résultats contrastent avec lesétudes expérimentales effectuées chez l’animal. Il nesemble pas que la prise d’antibiotiques, quels qu’ilssoient, en début de grossesse, puisse justifier uneinterruption médicale de grossesse.

‚ Bêtalactamines

Risque tératogène et embryotoxicitéLes bêtalactamines ont fait la preuve de leur

innocuité. Les pénicillines sont les antibiotiques lesplus fréquemment prescrits. Elles traversent leplacenta et donnent des taux élevés dans le cordonombilical et le liquide amniotique. L’inconvénientmajeur est le risque allergique. La littératures’accorde à ne leur reconnaître que de rares effetssecondaires sur le fœtus et ce médicament estconsidéré comme sans danger pendant lagrossesse [4]. Les céphalosporines (première,deuxième et troisième générations) sont égalementconsidérées comme sans danger.

Indications des bêtalactaminesLes pénicillines sont utilisées aussi bien à visée

thérapeutique que prophylactique.

¶ Infection urinaireL’infection urinaire peut être responsable

d’accouchements prématurés et d’infectionsnéonatales. L’infection urinaire peut revêtir troisaspects : la bactériurie asymptomatique, la cystite, lapyélonéphrite aiguë. L’amoxicilline est volontiersemployée en première intention lors de la cystite (1,5à 2 g /j) [1, 6]. En deuxième intention, on aura recoursà l’association amoxicilline-acide clavulanique (1comprimé à 500 mg 2 fois par jour) ou à unecéphalosporine de première ou deuxièmegénération (1 comprimé à 500 mg 2 fois par jour).L’éventail des bactéries est identique à celui desfemmes non enceintes.

On conseillera une antibiothérapie orale bienrépartie sur le nycthémère durant 1 semaine, bienque l’on note l’absence de consensus concernant ladurée optimale du traitement. La fréquenceparticulière de la bactériurie asymptomatique aucours de la grossesse et son risque ultérieurd’entraîner une pyélonéphrite amène à la traiterimpérativement, pour certains par le traitementminute, qui serait aussi efficace qu’un traitementd’une semaine. Une rechute (même souchebactérienne) faisant évoquer une atteinte du hautappareil urinaire ou une réinfection (souchedifférente) conduiront à donner une antibiothérapieadaptée pendant 10 à 14 jours dans le premier caset 1 semaine au moins dans le second [1].

Tableau I. – Perméabilité placentaire auxantibiotiques.

100 % 25-75 % 5-10 %

Spiramycine Bêtalactamines ÉrythromycineAminosides PolymyxineColistine BacitracineTétracyclines

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La pyélonéphrite aiguë et ses complications(accouchement prématuré, rupture prématurée desmembranes, infection néonatale, choc septique) seratraitée d’emblée en traitement parentéral (en règlecéphalosporine de troisième génération). Le relaisper os, après apyrexie d’au moins 48 heures, seraprolongé pendant 2 semaines.

¶ ListérioseLa listériose chez la femme enceinte se signale

par une symptomatologie banale, pseudo-grippalele plus souvent. Plus évocateurs sont l’apparitiond’une température précédant de peu l’accou-chement ou l’existence d’un épisode fébrile en deuxtemps séparé par une apyrexie d’une dizaine dejours. Rappelons que le diagnostic de grippe chez lafemme enceinte doit être réfuté jusqu’à preuve ducontraire et que toute fièvre chez une femmeenceinte doit conduire à pratiquer des hémocultureset un examen cytobactériologique urinaire. Cetteinfection est une urgence thérapeutique. La gravitédes complications contraste avec la simplicité dutraitement, qui doit être commencé avant le résultatdes hémocultures [3 , 6 ] : i l repose sur uneantibiothérapie par ampicilline (3 g/24 h enintramusculaire [IM] ou per os pour au moins 15jours, voire plusieurs semaines, la bactérie pouvantpersister longtemps dans la muqueuse de l’utérus).

¶ SyphilisLe tréponème pâle ne traverse la barrière

placentaire qu’après 16 semaines de grossesse. Letraitement avant le quatrième mois écarte touteatteinte fœtale. Le traitement pendant la grossessene diffère pas de celui de l’adulte et fait appel auxpénicillines retard. En cas de syphilis récenteprimosecondaire, on pourra donner au premiertrimestre 12 millions d’extencilline (1,2 milliond’unités en IM profonde, 3 fois par semaine pendant3 semaines, à renouveler au début du troisièmetrimestre). En cas d’allergie à la pénicilline, on utiliseun macrolide. Mais l’érythromycine (2 g/j pendant 3semaines) traverse insuffisamment le placenta et nemet pas l’enfant à l’abri d’une syphilis congénitale.

¶ EndométriteLes germes en cause dans les endométrites et les

abcès de paroi sont des germes d’origine vaginale.L’amoxicilline, l’association amoxicilline/acideclavulanique et les céphalosporines de première etde deuxième génération sont utilisées en premièreintention.

‚ Aminosides

La grossesse n’est pas une contre-indicationabsolue pour les aminosides, mais les risquespotentiels d’ototoxicité et de néphrotoxicité nedoivent pas les faire prescrire en première intention.Ceci est démontré pour la streptomycine et lakanamycine, contre-indiquées au cours de lagrossesse. On utilise donc la gentamicine(Gentallinet) ou l’amikacine (Amiklint).

‚ Tétracyclines

Les tétracyclines traversent le placenta et sedéposent au niveau des dents et des épiphyses desos longs. Il peut en résulter une hypoplasie ainsiqu’une coloration jaune ou brune des dents de lait,voire un retard de croissance. Les tétracyclines nedoivent donc pas être prescrites.

‚ Macrolides

Ils ne présentent pas de toxicité majeure, maiscertains produits apparentés comme la lincomycinepeuvent se trouver à concentration élevée au niveauhépatique.

Érythromycine

L’érythromycine n’a pas d’effet secondaire chez lefœtus mais sa tolérance est plus ou moins bonne.Elle entraîne des manifestations digestives (nausées,vomissements, gastralgies, diarrhées). L’érythro-mycine est fortement liée aux protéines et donc lepassage transplacentaire est plus faible (5 à 10 %)que celui des bêtalactamines (40 % pourl’ampicilline). Elle est principalement utilisée dans letraitement des infections à Chlamydia et égalementdes mastites puerpérales pour son efficacité sur lestaphylocoque doré souvent en cause [2].

Spiramycine et toxoplasmose

L’étude du passage transplacentaire de laspiramycine a montré que :

– chez la mère, les concentrations sériques sontrelativement stables au cours de la grossesse maissemblent un peu plus élevées en fin de grossesse ;

– chez le fœtus, les concentrations sériques sontsignificativement plus basses que chez la mère, maisil apparaît que le passage transplacentaire estmeilleur en fin de grossesse et en cas d’infestationfœtale confirmée. Il n’est pas prouvé que laspiramycine ait un effet thérapeutique sur un fœtusinfecté. La spiramycine diffuse très peu dans leliquide céphalorachidien et ne prévient pasl’encéphalite toxoplasmique. L’avantage principal dela spiramycine réside dans son entière innocuitéchez la femme enceinte et le fœtus. Elle n’a aucuneffet tératogène et est bien supportée.

La toxoplasmose, maladie bénigne pour la mère,peut avoir des conséquences fœtales redoutables.En cas de séroconversion toxoplasmique, laconduite à tenir dépend du terme de lacontamination.

Jusqu’à 6 semaines d’aménorrhée (SA), la patientesera traitée par spiramycine (Rovamycinet), 9millions UI/j jusqu’à la fin de la grossesse. Le risquede transmission est très faible mais ce traitementpermettrait une réduction de la transmissionmaternofœtale.

Entre 7 et 24 SA, le risque d’atteinte est faible etcelle-ci est grave. Si l’atteinte fœtale n’est pasconfirmée par polymerase chain reaction (PCR) sur leliquide amniotique, le traitement continu parspiramycine sera associé à une surveillanceéchographique. Une interruption médicale degrossesse est proposée si l’atteinte fœtale seconfirme.

Au-delà de 24 SA, en cas d’atteinte fœtale, lapatiente sera traitée par l’association pyriméthami-ne-sulfadiazine qui peut réduire l’atteinte clinique dufœtus, alors que la spiramycine n’a qu’un effetpréventif.

‚ Métronidazole

Il traverse le placenta. L’antibiotique est retrouvédans le sang du cordon et le liquide amniotique àdes taux élevés. Les imidazolés interfèrent avec lasynthèse de l’ADN et bien qu’il n’y ait pas eu demalformations décrites en cours de grossesse, cemédicament doit être évité au cours du premiertrimestre [4]. Il est essentiellement utilisé au cours de

la grossesse pour le traitement du Trichomonasvaginalis (Flagylt, 1 ovule intravaginal/ j pendant 7 à10 jours).

‚ Fluoroquinolones

Les études sur l’animal ont montré que lesquinolones se déposent au niveau des cartilages etentraînent des lésions dégénératives provoquantdes arthropathies irréversibles [2, 4]. Aucun effettératogène n’a été rapporté à ce jour mais ellesdemeurent contre-indiquées.

‚ Sulfamides

Leur effet tératogène, constant en expérimen-tation animale, n’a pas été prouvé chez l’homme. Ilssont contre-indiqués au premier trimestre. Dans lapériode néonatale, les sulfamides favorisent ladiffusion de bilirubine dans les tissus et parconséquent l’ictère nucléaire. Ce mécanisme estparticulièrement dangereux chez les prématurésdont les fonctions hépatiques et rénales encoreimmatures sont à l’origine d’une hypoalbuminémieet une hyperbilirubinémie. En règle générale, onrenoncera aussi aux sulfamides en fin de grossesseet durant le travail.

Association sulfaméthoxazole-triméthoprime(Bactrimt)

Elle ne doit être employée qu’au deuxièmetrimestre. Son utilisation la plus fréquente est lapyélonéphrite aiguë, parfois l’infection urinaire au vudes résultats de l’antibiogramme.

Association sulfamide-pyriméthamine

La pyriméthamine, non tératogène, enassociation avec un sulfamide, habituellement lasulfadiazine, constitue le traitement habituel le plusefficace contre la toxoplasmose. Les deux agentssont des antagonistes de l’acide folique, et l’onassociera volontiers de l’acide folinique (50 mg tousles 15 jours per os) afin de prévenir la thrombocyto-pénie et la leucopénie.

‚ Nitrofuranes

Ils sont largement prescrits comme traitement depremière intention de la bactériurie asymptomatiqueou de la cystite aiguë. Ils peuvent provoquer uneanémie hémolytique chez une patiente porteused’un déficit en G6PD. De même, le nitrofurane(Furadantinet) peut causer des hémolyses et parconséquent une hyperbilirubinémie et une anémiechez les enfants atteints d’un déficit en G6PD.

‚ Antituberculeux

Les quatre antituberculeux les plus utilisés sontl’isoniazide, la rifampicine, l’éthambutol et lepyrazinamide. Les trois premiers traversent leplacenta, la diffusion tissulaire du pyrazinamide estmal connue. L’expérience clinique est maintenantgrande pour l’isoniazide, la rifampicine etl’éthambutol, qui constituent les antituberculeux dechoix chez la femme enceinte. À noter que sur degrandes séries, le déroulement de la grossesse n’estpas affecté par l’existence d’une tuberculosepleuropulmonaire traitée.

‚ Phénicolés

Ils peuvent provoquer chez le fœtus une aplasiemédullaire par accumulation de la drogue et pareffet inhibiteur des synthèses protéiques dans lescel lules immatures. En fin de grossesse,

5-0190 - Antibiothérapie chez la femme enceinte et allaitante

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l’accumulation de chloramphénicol peut entraînerchez le prématuré un « syndrome gris » aveccollapsus vasculaire dont l’issue peut être fatale pardéfaut d’excrétion et de conjugaison. Ils sont doncformellement contre-indiqués.

■Antibiotiques et allaitement

Le lait est un compartiment de diffusion commeun autre et la barrière mammaire ne diffère guèredes autres barrières de l’organisme. Le passage del’antibiotique dans le lait maternel se fait surtout pardiffusion passive et dépend donc de ses propriétésphysicochimiques d’une part et de sa concentrationdans le compartiment plasmatique maternel d’autrepart [5]. Sur le plan pratique, le problème del’allaitement est particulier car :

– il est facultatif et peut à tout moment êtrestoppé en cas de nécessité d’utiliser un antibiotiquedont l’innocuité n’est pas démontrée chez lenourrisson ;

– les éventuelles conséquences néfastes sur lenourrisson sont presque toujours immédiatementvisibles (diarrhée, vomissements).

Ainsi, pour être dangereux, un antibiotique prispar la mère devra :

– être potentiellement toxique pour le nourrisson(beaucoup ne le sont pas) ;

– franchir la barrière mammaire pour seretrouver à une concentration notable dans le lait ;

– être absorbé par le tube digestif du nourrisson.Il faut signaler que, du fait de son immaturité, labarrière intestinale du nourrisson est plus perméableau passage des antibiotiques que celle des adultes.

■Différentes classes

d’antibiotiques et toxicité

pendant l’allaitement

Les bêtalactamines (pénicillines et céphalospo-rines) passent peu dans le lait. Aucun incidentclinique n’a été décrit.

Les macrolides sont sans danger pour lenourrisson. La Rovamycinet a une concentrationélevée dans le lait de la mère : il doit en être tenucompte dans la décision de maintenir ou non unallaitement, cet antibiotique étant par ailleursparfaitement toléré par le nouveau-né. Lesbêtalactamines et macrolides sont toujours préférésen première intention même si pour les premiers, lerisque d’allergies et d’induction de futures résistancesbactériennes est classiquement mis en avant. Lescyclines passent dans le lait de façon modérée. Lestaux sériques sont indétectables chez le nourrissonet le danger potentiel pour l’émail dentaire n’ajamais été démontré au cours de la lactation [5].

Les aminosides ont un passage lacté réduit.L’absorption digestive par l’enfant est nulle mais

l’effet sur l’établissement de la flore digestive n’a pasété étudié. Il y aurait un risque très faibled’otonéphrotoxicité [6].

Compte tenu des risques articulaires, les pédiatrespréfèrent encore éviter les quinolones.

Les antituberculeux : les passages sont trèsfaibles ou nuls dans le lait. Les risques sont malconnus et il est conseillé d’éviter l’allaitement chezune mère tuberculeuse.

Les sulfamides sont déconseillés lorsque l’enfantnourri est un prématuré ou un nouveau-né ensituation de détresse, ou s’il présente un ictère.L’association triméthroprime-sulfamide (Bactrimt) estclassiquement contre-indiquée car présente lesmêmes inconvénients.

Les antiseptiques urinaires, acide nalidixique(Négramt), nitrofurantoïne (Furadantinet) etnitroxoline (Nibiolt) sont considérés commecompatibles avec l’allaitement, le Nibiolt étantlargement utilisé en pédiatrie, dès la périodenéonatale.

■Conclusion

L’administration d’antibiotiques à la femmeenceinte doit tenir compte des modificationsphysiologiques propres à la grossesse.

Le choix de l’antibiotique doit être guidé avanttout par la meilleure connaissance des effetssecondaires sur la mère et son enfant.

Quand il est nécessaire de traiter une femme quiallaite, il conviendra de choisir des antibiotiques pourlesquels des données fiables existent.

Véronique Isnard : Praticien hospitalier.André Bongain : Praticien hospitalier.

Jean-Yves Gillet : Professeur des Universités, praticien hospitalier.Service de gynécologie-obstétrique, reproduction et médecine fœtale, centre « Femme-Mère-Enfant », hôpital de l’Archet II, 151, route de Saint-Antoine-de-Ginestière,

BP 3079, 06202 Nice cedex 03, France.

Toute référence à cet article doit porter la mention : Véronique Isnard, A Bongain et JY Gillet. Antibiothérapie chez la femme enceinte et allaitante.Encycl Méd Chir (Elsevier, Paris), AKOS Encyclopédie Pratique de Médecine, 5-0190, 1998, 3 p

R é f é r e n c e s

[1] Delcroix M, Zone V, Cheront C, Adam MH, Duquesne G, Noel AM. L’infec-tion urinaire de la femme enceinte. Entretiens de Bichat, Gynécologie. Paris :Expansion Scientifique Française, 1993 : 144-152

[2] Duff P. Antibiotic use in obstetrics and gynecology.Obstet Gynecol ClinNorth Am1992 ; 19 : 1-614

[3] Gillet JY, Sol JF, Dellamonica P. Antibiothérapie en obstétrique. Mises à jouren gynécologie et obstétrique. Collège national des gynécologues et obstétriciensfrançais. Paris : Vigot, 1982 : 189-209

[4] Leng JJ. Médicaments et grossesse.Gynecol1993 ; 1 :144-161

[5] Rolland M, Tricoire J, Assouline C, Damase-Michel C. Médicaments et allai-tement maternel.Encycl Med Chir(Elsevier, Paris), Obstétrique, 5-111-A-10,1995 : 1-10

[6] Tchobroutsky C, Oury JF. Prendre en charge et traiter une femme enceinte.Paris : Arnette Blackwell, 1995 : 1-463

Antibiotiques et grossesse en pratique✔ Peuvent être utilisés : pénicillines, céphalosporines, macrolides, nitrofuranes.✔ Sont contre-indiqués : cyclines, sulfamides (premier et troisième trimestre),triméthoprime (premier et troisième trimestre), phénicolés.✔ À éviter sauf indications précises et traitements brefs : aminosides,fluoroquinolones, rifampicine, imidazolés (premier trimestre).

Antibiothérapie chez la femme enceinte et allaitante - 5-0190

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Antibiothérapie probabiliste

sans prélèvements bactériologiques

et avec prélèvements bactériologiques

K Chemlal, C Carbon

M ettre en place un traitement antibiotique, devant un syndrome infectieux, est devenu un acte extrêmementcourant en médecine de ville. Cependant, il est important de garder à l’esprit que, si l’antibiothérapie

empirique se justifie dans un certain nombre d’infections bactériennes (heureusement les plus fréquentes), il peut êtredangereux de débuter un traitement antibiotique dans des situations infectieuses où l’identification du germe estindispensable pour assurer un traitement optimal. Toute la difficulté consiste donc à identifier les différentes situationsoù l’on peut se passer d’une documentation bactériologique.© Elsevier, Paris.

■Circonstances et objectifs

du prélèvement bactériologique

Le traitement antibiotique d’une infection supposéebactérienne est nécessairement rapide pour éviter ladissémination de l’infection et les dommages locauxsusceptibles de s’aggraver mais aussi, dans les cas lesplus bénins, pour permettre rapidement le retour à uneactivité normale. Cet objectif n’est que rarementcompatible avec un diagnostic bactériologiqueimmédiat de certitude.

La démarche thérapeutique doit concilier untraitement précoce avec une sécurité d’efficacité tenantcompte des impacts éventuellement défavorables dutraitement sur le patient et l’environnement.

L’antibiothérapie probabiliste (encore appeléeempirique ou de première intention) doit donc tenircompte :

– des données cliniques qui mettent en évidenceun foyer potentiellement bactérien ;

– du spectre bactériologique possiblement encause dans l’infection considérée en tenant compte duou des germes les plus fréquents et de ceux quirisquent d’avoir l’influence la plus fâcheuse sur lepronostic ;

– de la connaissance du profil local de sensibilitédes bactéries aux antibiotiques ;

– d’un certain nombre de données propres aupatient.

Au terme de la démarche clinique initiale, il faut seposer la question de savoir si un examenbactériologique est nécessaire avant la mise en routedu traitement.

Deux objectifs peuvent être recherchés à travers leprélèvement bactériologique :

– une confirmation diagnostique ;– un accès à l’étude de la sensibilité de la bactérie

causale aux antibiotiques.On peut considérer que le prélèvement

bactériologique est nécessaire en cas de doutediagnostique ou lorsqu’il est difficile de prévoir lasensibilité de la bactérie causale pour des raisonsépidémiologiques.

Dans la pathologie communautaire ne requièrantpas l’hospitalisation, le prélèvement sera envisagé s’ildonne un accès facile à un site normalement stérile, sil’interprétation du résultat n’est pas difficile et, surtout,si la pathologie en question fait appel à des bactériesdont la sensibilité est facilement prévisible. En pratiquecourante, cela signifie que le seul prélèvementréellement indispensable en pathologie bénigneextrahospitalière est le prélèvement urinaire quirépond à tous les critères mentionnés ci-dessus.

Dans l’infection communautaire requièrantl’hospitalisation, le prélèvement sera nécessaire quelleque soit la localisation de l’infection lorsqu’apparais-sent des signes de sévérité, et lorsque l’infection sedéveloppe sur un terrain particulier, par exempleimmunodéprimé en raison de la diversité des micro-organismes possibles. Dans l’infection nosocomiale, leprélèvement est indispensable dans toutes lessituations pour donner accès à une évaluation précisede sa sensibilité aux antibactériens. Dans cessituations, il est nécessaire de limiter les risques decontamination du prélèvement en recourant à destechniques de prélèvement protégé (par exemple dansles voies respiratoires) et de recourir, pour les milieuxnormalement contaminés par des bactéries, à destechniques quantitatives qui permettront de discerner,au sein de la flore objectivée, le ou les pathogènesresponsables.

Dans tous les cas, le prélèvement bactériologiquesera utile lorsque le traitement de première intentionaura échoué.

Il est clair que de nouvelles techniquesmicrobiologiques permettant un diagnostic rapide del’espèce bactérienne, mais aussi un diagnostic rapidedu profil de résistance, seront susceptibles de modifierla démarche thérapeutique et permettront de ciblerdavantage l’antibiothérapie initiale qui ne sera plusprobabiliste mais objective.

Nous considérerons dans une première partie, letraitement probabiliste des infections ne nécessitantpas de prélèvements bactériologiques et dans laseconde partie les infections où une documentationmicrobiologique est impérative avant d’initier unethérapeutique empirique. Nous n’envisagerons que letraitement des infections survenant chez l’adulte.

■Infections sans documentation

bactériologique

‚ Infections en ORL

Angines

Bien que 70 à 80 % des angines soient d’originevirale, l’attitude générale en France est de traitersystématiquement toute les angines afin de réduire lerisque de survenue d’un rhumatisme articulaire post-streptococcique [7]. L’antibiothérapie probabiliste sedevra d’être active sur les streptocoques â -hémolytiques du groupe A et repose sur les pénicillinespar voie orale (oracilline ou amoxicilline) ou en casd’allergie sur les macrolides. La durée du traitement estde 10 jours. La possibilité d’un traitement court a étédémontré pour l’azithromycine. Les céphalosporinesorales de deuxième (C2G) et troisième génération(C3G), autorisent des durées de traitement plus courtes,mais n’ont pas d’autorisation de mise sur le marchédans cette indication [9].

Sinusites aiguës

Les prélèvements bactériologiques ne sont pasindispensables lors d’un premier épisode de sinusiteaiguë chez un patient qui n’a pas reçu d’antibiotiquesdans les semaines précédentes. La fréquence élevéede bactéries sécrétant des â-lactamases (35 % dessouches d’Haemophilus et 90 % des Moraxella) faitque l’utilisation de l’amoxicilline en première intentionn’est pas souhaitable dans cette indication [5]. Sil’origine de la sinusite paraît dentaire, l’antibiothérapieprobabiliste doit être efficace sur les anaérobies. Lechoix le plus raisonnable repose sur l’associationamoxicilline-acide clavulanique (3 g/j) per os ou sur lapristinyamicine pendant une durée de 10 jours. Onpeut également utiliser une C2G (céfuroxime axétil :Zinnatt, Cépazinet) ou une C3G orale (cefpodoximeproxétil : Oreloxt, Céfodoxt). Il est important de noterqu’en région parisienne, Streptoccocus pneumoniaeprésente une diminution de sensibilité à la pénicillinedans plus de 30 % des cas et que le céfixime (Orokent)est moins efficace que les autres C3G orales sur lepneumocoque. La sparfloxacine (Zagamt) ne doit pasêtre utilisée en traitement empirique dans cetteindication.

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‚ Infections bronchopulmonaires

Pneumopathie communautaire de l’adulteLe consensus français datant de 1991 [4] propose,

en cas de pneumonie de l’adulte présumé sain, sanssigne de gravité, une alternative entre amoxicilline etmacrolide, privilégiant l’amoxicilline en cas depneumonie franche, à la posologie de 1g x 3/24 h, etun macrolide en cas de pneumopathie bénigned’allure atypique, avec la possibilité d’inverser letraitement en cas d’échec clinique. La durée dutraitement est de 10 jours.

Surinfection bronchiquedes bronchopneumopathies chroniquesobstructives (BPCO), pneumopathiesur terrain fragilisé

En l’absence de signes de gravité nécessitant unehospitalisation, on peut proposer la formulationamoxicilline-acide clavulanique (1 g x 3/24 h) ou laceftriaxone (1 g x 2/24 h) pour une durée de 10 jours.En cas d’échec clinique à 48 heures, l’association à unmacrolide ou une fluoroquinolone est possible. Uneréévaluation clinique est capitale au bout de 48 heuresde traitement.

‚ Infections digestives

Diarrhées aiguësLa grande majorité des diarrhées infectieuses de

l’adulte sont d’évolution bénigne avec un traitementsymptomatique. Les examens bactériologiques et lestraitements antibiotiques sont justifiés en cas de fièvreprolongée, d’une diarrhée de durée supérieure à 3jours, de selles sanglantes ou d’un séjour récent enzone d’endémie (choléra, typhoïde). L’antibiothérapieprobabiliste repose sur les fluoroquinolones,administrées oralement, actives sur la plupart desbacilles à Gram négatif impliquées dans les diarrhéesaiguës (Shigella sp, E coli, Salmonella sp) pour unedurée de 3 à 5 jours (ciprofloxacine 500 mg x 2,norfloxacine 400 mg x 2, ofloxacine 200 mg x 2,péfloxacine 400 mg x 2) [12].

Lorsque une diarrhée aiguë survient au cours ouaprès une prise d’antibiotique, l’antibiothérapieprobabiliste est dirigée contre C difficile. On peutproposer le métronidazole par voie orale à la dose de250 mg x 4/24 h ou 500 mg x 2/24 h pendant 10jours. La vancomycine per os est également efficace(250 mg x 4/j) mais sont coût est élevé.

SigmoïditeDans les sigmoïdites non compliquées, on peut

proposer l’association amoxicilline-acide clavulaniqueper os à la dose de 1 g x 3/24 h pendant une durée de10 jours avec une réévaluation clinique à 48 heures.

‚ Infections cutanées

ÉrysipèleL’antibiothérapie empirique sera dirigée contre les

streptocoques et repose sur l’amoxicilline orale à ladose de 3 g/24 h ou, en cas d’allergie aux â-lactamines, sur les macrolides (pyostacine 3 g/24 h).

Furonculose, panari, surinfectiondes dermatoses chroniques

S’il n’y a pas d’indication à un traitement chirurgical,l’antibiothérapie probabiliste devra être active sur lesstaphylocoques. L’utilisation d’une synergystine orale(Pyostacinet, 3 g/24 h) est recommandée.

‚ Infections urinaires

Cystite aiguë de la femme jeune non enceinteLe traitement monodose ou court (< 3 jours) est

aussi efficace qu’un traitement conventionnel dans lescystites non compliquées de la femme jeune non

enceinte, sans antécédent néphro-urologique,apyrétique, non immunodéprimée ou diabétique,n’ayant pas fait l’objet d’intervention ou d’explorationurologique récente. Le traitement monodose per osrepose sur les fluoroquinolones (ofloxacine 400 mg,péfloxacine 800 mg, ciprofloxacine 500 mg), leBactrimt Forte 3 cp ou Fosfo-Trométanol 3 g [2].

■Infections avec documentation

bactériologique

‚ Infections du système nerveux central

Méningite

Les méningites bactériennes sont des urgencesmédicales absolues et la mise en route d’un traitementantibiotique bactéricide ne doit en aucun cas êtredifféré. La présence d’un purpura fébrile au cours detout syndrome méningé ou lorsqu’il existe unesuspicion de méningite impose de pratiquer unepremière dose d’antibiotique par voie intraveineuse(ceftriaxone 1 g ou amoxicilline 2 g) avant le transferten milieu hospitalier si le patient est vu au domicile.Dans les autres cas, ponction lombaire et hémocultureseront pratiquées immédiatement et l’antibiothérapiesera débutée avant les résultats de ces prélèvements.La stratégie thérapeutique probabiliste dans lesméningites purulentes de l’adulte dépend du contexteépidémiologique, de la présence de signes de gravitéet d’une porte d’entrée identifiée. Chez l’adulte jeune,les bactéries les plus fréquentes sont Streptococcuspneumoniae et Neisseria meningitidis. Les méningites àListeria s’observent essentiellement après 50 ans.

Il est clair que l’évolution des résistancesbactériennes est venue compliquer la stratégiethérapeutique empirique des méningites. Ainsi, si lasensibilité du méningocoque aux pénicillines restestable, Haemophilus influenzae présente unerésistance aux aminopénicillines par production de â-lactamases dans environ 50 % des cas, et Spneumoniae une sensibilité diminuée à la pénicillineen augmentation constante (25 % chez l’adulte en1994).

Le choix et les modalités de l’antibiothérapieempirique d’une méningite présumée bactérienne, àexamen direct négatif du liquide céphalorachidien(LCR), repose sur des arguments épidémiologiques(essentiellement l’âge du patient), cliniques (alcoolisme,porte d’entrée pulmonaire ou ORL, début brutal,grossesse, infection par le virus d’immunodéficiencehumaine [VIH], splénectomie, notion d’épidémie, etc)et sur les données cytologiques du LCR. Lespropositions de la dernière conférence de consensussur la prise en charge des méningites purulentes àexamen direct négatif du LCR sont les suivantes [6] :

■ en l’absence d’éléments d’orientation :amoxicilline 200 mg/kg/j par voie veineuse ouceftriaxone 70-100 mg/kg/j ou céfotaxime 200-300 mg/kg/j. S’il existe des signes de gravité :amoxicilline intraveineuse associée à la ceftriaxone ouau céfotaxime. Si la cytologie du LCR est panachée,et/ou si le patient est âgé de plus de 50 ans, uneméningite listérienne est possible et le traitementempirique repose sur l’association C3G (céfotaxime ouceftriaxone)-amoxicilline, car les C3G sont inactives surListeria monocytogenes ;

■ s’il existe des éléments d’orientation, enparticulier si un pneumocoque de sensibilité diminuéeà la pénicilline est suspecté et/ou qu’il existe des signesde gravité : céfotaxime ou ceftriaxone aux mêmes

doses, associée à la vancomycine 40-60 mg/kg/j enquatre perfusions ou en continu (après une dose decharge de 15 mg/kg) ;

■ si un méningocoque est suspecté (épidémie parexemple), amoxicilline ou cefotaxime ou ceftriaxone.

Lorsque l’examen direct du LCR est positif, il nes’agit plus d’un traitement probabil iste etl’antibiothérapie est adaptée en fonction du germeprésumé.

Abcès cérébral

La présence d’un abcès cérébral impose derechercher une immunodépression acquise rétroviralecar la stratégie thérapeutique est complètementdifférente. En dehors du sida, le traitement probabilisted’un abcès cérébral est fonction du contexte danslequel il survient. Les hémocultures sont systématiqueset une endocardite doit absolument être recherchée.La recherche d’une porte d’entrée est capitale pourorienter la thérapeutique empirique et réaliser desprélèvements locaux. Lorsqu’il s’agit d’un abcèscérébral de contiguïté dont le point de départ est ORL(otite, mastoïdite, sinusite dentaire) ou pulmonaire,l’antibiothérapie sera dirigée contre les pathogènes lesplus fréquemment en cause, c’est-à-dire streptocoques,Haemophilus, bactéroïdes, Fusobacterium voireentérobactéries, et le traitement empirique reposerasur l’association céfotaxime ou ceftriaxone-métro-nidazole pour une durée d’au moins 6 semaines. Encas d’échec ou d’aggravation, une ponction à viséebactériologique par voie stéréotaxique, si elle estréalisable, est souhaitable. Lorsqu’il s’agit d’un abcèspostopératoire ou post-traumatique, le traitementprobabiliste doit prendre en compte le staphylocoque ;l’association que l’on peut proposer comprendra doncune C3G associée à la vancomycine, ou à lafosfomycine ou à la rifampicine, ces deux dernièresmolécules pénétrant bien dans les méninges.Lorsqu’une endocardite est suspectée, le traitementprobabiliste sera celui d’une endocardite àstaphylocoque.

Au cours de l’infection VIH, (en dehors d’uneendocardite patente), la présence d’un abcès cérébraldoit faire débuter un traitement antitoxoplasmique(Malocidet 100 mg/j, associée à la sulfadiazine (6 g/24 h) dès que les hémocultures ont été réalisées.

‚ Infection de l’arbre urinaire

Pyélonéphrite

Chez la femme non enceinte, l’antibiothérapieprobabiliste, dans les pyélonéphrites aiguës d’originecommunautaire non compliquées, doit être active surles germes les plus fréquemment en cause c’est-à-direEscherichia coli, Proteus et Klebsiella. Après laréalisation d’un examen cytobactériologique desurines (ECBU) et de deux hémocultures, le traitementprobabiliste repose, soit sur les fluoroquinolones parvoie orale pendant une durée de 10 à 14 jours, soit surune C3G (céfotaxime ou ceftriaxone) par voieveineuse [1]. Dans les formes sévères, ou compliquées(septicémie, obstacle, abcès rénal, immunodéprimés),l’adjonction d’un aminoside est justifiée, mais la duréede l’association doit être la plus courte possible (etarrêtée en règle après 24 heures d’apyrexie). La duréedu traitement est de 3 semaines. De plus, il convientd’être extrêmement prudent chez les sujets âgés et/oulorsqu’il existe une altération rénale préexistantelorsqu’on envisage d’utiliser un aminoside.

Chez la femme enceinte, le traitement empiriquerepose sur une C3G (céfotaxime ou ceftriaxone)administrée par voie veineuse.

5-0130 - Antibiothérapie probabiliste sans prélèvements bactériologiques et avec prélèvements bactériologiques

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Page 7: Le manuel du généraliste   antibiothérapie

Prostatite

Dans les formes non compliquées, le traitementempirique des prostatites aiguës repose, après avoirréalisé des prélèvements bactériologiques (ECBU,hémocultures), sur les fluoroquinolones données parvoie orale [1].

Dans les formes compliquées, septicémiques, surterrain immunodéprimé ou diabétique, s’il existe uneobstruction ou un abcès prostatique, l’antibiothérapieempirique est administrée par voie intraveineuse etcomprend, soit une fluoroquinolone, soit une C3G(céfotaxime ou ceftriaxone) associée à un aminoside,l’aminoside étant arrêté 24 heures après l’obtention del’apyrexie.

Infection urinaire basse de la femme enceinte

Après l’ECBU, l’antibiothérapie repose surl’amoxicilline ou une céphalosporine orale detroisième génération pendant une durée de 10 jours.

‚ Infections génitales

Salpingites

Dès les prélèvements réalisés (hémocultures,prélèvements vaginaux et cervicaux), l’antibiothérapieprobabiliste doit être efficace sur Chlamydiatrachomatis, Neisseria gonorrhae, les bacilles à Gramnégatif, les streptocoques et les anaérobies.L’amoxicilline-acide clavulanique à la dose de 3-6 g/j,(par voie intraveineuse pendant 3 à 4 jours puis parvoie orale), est associé, soit à des cyclines (doxycycline,minocycline 200 mg/j) soit à une fluoroquinolone(ofloxacine 200 mg x 2) per os, la durée del’association étant de 3 semaines. On peut égalementutiliser une C2G active sur les anaérobies (céfoxitine,céfotétan) en association avec une cycline, ou unetriple association ceftriaxone-métronidazole-cycline (laceftriaxone n’étant pas active sur les germesanaérobies).

‚ Infections ORL

Sinusite chronique et récidivante

Il est rare d’avoir à débuter une antibiothérapieempirique en urgence. Si les signes infectieux sontimportants, on peut proposer une associationamoxicilline-acide clavulanique-fluoroquinolone,l’infection étant le plus souvent polymicrobienne.

Phlegmon et cellulite du cou

Le traitement empirique est débuté en urgence, parvoie intraveineuse, en attendant le résultat desprélèvements périphériques (hémocultures) etperopératoires (drainage chirurgical). En l’absence desyndrome infectieux sévère, la formulationamoxicilline-acide clavulanique à forte dose (4-6 g/j),associée à un aminoside est efficace sur les principauxpathogènes responsables (streptocoques, anaérobies,Haemophilus influenzae). En présence d’un syndromeinfectieux sévère, ou si le patient est immunodéprimé(diabétique, leucopénique, cancer...), l’associationpiperacilline-tazobactam (Tazocillinet 4 g x 3/24 h)-aminoside est recommandée.

‚ Infections osseuses

Ostéite aiguë

Un traitement chirurgical étant dans l’immensemajorité des cas indispensable, il est rare d’avoir àdébuter un traitement antibiotique en urgence. Lanature du traitement antibiotique initial est fonction del’examen direct des prélèvements bactériologiquesperopératoires. Il faut tenir compte de tous les germes

isolés, car l’infection est très souvent plurimicrobienne,notamment dans les ostéites post-traumatiques.

Arthrite aiguë

Chez l’adulte, les bactéries responsables d’arthritesaiguës sont le gonocoque, le Staphylococcus aureus(60 % des cas), les streptocoques â-hémolytiques(15 % des cas), et les entérobactéries. Après avoirréalisé des prélèvements bactériologiques au niveaude la porte d’entrée éventuelle et/ou du liquidearticulaire, l’antibiothérapie probabiliste seraadministrée initialement par voie veineuse.L’interrogatoire recherchera une porte d’entréeéventuelle : morsure de tique en faveur dune maladiede Lyme, à traiter par ceftriaxone ou amoxicilline, voirepar une cycline en cas d’allergie aux â-lactamines,morsure d’animal en faveur d’une pasteurellose.Lorsqu’il n’existe aucun élément d’orientation, on peutproposer l’amoxicilline-acide clavulanique (3-6 g/j),associé à des fluoroquinolones. Si le contexte estévocateur de maladie sexuellement transmissibleassociée à l’infection articulaire, un gonocoque estprobablement en cause et un traitement parceftriaxone 2 g/j par voie intraveineuse est justifié.

Spondylodiscite

La recherche de l’agent infectieux pathogène doitêtre minutieuse : hémocultures, prélèvements d’uneporte d’entrée éventuelle, ponction à l’aiguille, biopsiechirurgicale et sérologie. Chez l’adulte, lesspondylodiscites résultent d’une disséminationhématogène dans la plupart des cas. En dehors desspondylodiscites tuberculeuses, les bactéries les plusfréquemment en cause sont Staphylococcus aureus etcoagulase négatif, les entérobactéries et lesstreptocoques. En attendant les résultats bactériologi-ques ou histologiques, l’antibiothérapie probabilistecomprend l’association fluoroquinolones/rifampicineou céfotaxime/fosfomycine par voie intraveineuse.

‚ Infections pulmonaires

Abcès du poumon

En l’absence de signes de gravité, l’antibiothérapieprobabiliste doit être efficace sur S pneumoniae et lesgermes anaérobies. Le pathogène responsable peutêtre identifié par l’examen cytobactériologique del’expectoration, s’il existe une vomique, ou par unefibroscopie bronchique avec prélèvement distalprotégé. La ponction de l’abcès sous scanner dontl’intérêt est double, diagnostique et thérapeutique(évacuation de l’abcès) est un geste simple et peuinvasif. On peut proposer, en attendant les résultatsdes prélèvements bactériologiques, l’associationamoxicilline-acide clavulanique à la dose de 1 g x 3/24 h per os ou par voie intraveineuse si les signesinfectieux sont importants.

‚ Endocardites

Valve native

L’antibiothérapie probabiliste en urgence ne seconçoit que si l’endocardite est fortement suspectée,qu’il existe une mauvaise tolérance hémodynamiqueou un état infectieux sévère. Dans les autres cas, onpeut attendre le résultat des hémocultures. Si la ported’entrée n’est pas connue ou si le point de départ estd’origine dentaire, l’antibiothérapie empirique doit êtreactive sur Streptococcus viridans, Streptococcus bovis etles entérocoques. On peut proposer l’associationamoxicilline (150-200 mg/kg/24 h) associé à unaminoside (gentamycine) par voie intraveineuse, ouen cas d’allergie connue aux â -lactamines,l’association vancomycine (30 mg/kg/j)-aminoside. S’il

s’agit d’un toxicomane, l’association oxacilline par voieveineuse (100-150 mg/kg/j) associée à un aminosideest active sur les staphylocoques [8].

Prothèse valvulaire

Si l’endocardite est précoce (moins de 2 mois aprèsla pose), ou tardive (< 2 mois), l’antibiothérapieprobabiliste doit être active sur Staphylococcus aureuset epidermidis résistants à la méticilline, lesstreptocoques, les bacilles à Gram négatif, lescorynébactéries et l’entérocoque. L’antibiothérapieprobabiliste sera de type vancomycine-aminoside parvoie intraveineuse.

Endocardites à hémocultures négatives

L’antibiothérapie empirique de première intentiondoit être active sur les streptoccoques et les germes dugroupe HACEK. On peut proposer l’associationamoxicilline (150-200 mg/kg/j)-aminoside ou C3G(céfotaxime ou ceftriaxone)-aminoside.

‚ Fièvre chez le neutropéniqueL’instauration d’un traitement antibiotique, chez un

patient fébrile et neutropénique, est une urgence, et lesprélèvements bactériologiques (hémocultures, ported’entrée présumée) ne doivent pas retarder le débutdu traitement [10]. L’antibiothérapie probabiliste doitêtre efficace sur les bacilles à Gram négatif et enparticulier sur Pseudomonas aeruginosa , êtrerapidement bactéricide et présenter un moindre risquede sélection de résistance. Il est donc clair quel’antibiothérapie initiale doit comporter uneassociation qui comprend une â-lactamine et unaminoside. Le choix de la â-lactamine doit être guidépar l’épidémiologie locale, d’éventuels antécédentsrécents infectieux (notamment à Pseudomonas) et del’existence éventuelle d’un foyer clinique. En l’absenced’allergie aux â-lactamines, les C3G sont les moléculesles plus utilisées en France (ceftazidime, cefpirome,céfépime). La notion d’allergie aux â-lactamines doitêtre soigneusement documentée. Si elle est certaine,l’association quinolone-aminoside ou aztréonam-aminoside peut être proposée mais il est impératifd’adjoindre d’emblée un glycopeptide car aucune deces deux associations ne présente une activitésuffisante sur les cocci à Gram positif. Si l’épidémiologielocale fait redouter une origine staphylococcique,l ’adjonction initiale d’un glycopeptide estrecommandée. S’il existe une forte suspiciond’infection à germes anaérobies (phlegmon, cellulitegangreneuse, etc) l’adjonction de molécules actives surles anaérobies (métronidazole, ornidazole) oul’utilisation d’une association piperacilline-tazobactam(Tazocillinet)-aminoside est justifiée. Lorsquel’antibiothérapie initiale est inefficace (persistance de lafièvre par exemple) et que l’infection n’est pasdocumentée microbiologiquement, l’attitude ultérieuredépend du choix initial : élargissement du spectre enutilisant les dernières C3G (cefpirome, céfépime) si laceftazidime avait été initialement choisie, adjonctiond’un glycopeptide puis d’un antifongique.

‚ PéritonitesLes péritonites primaires sont celles pour lesquelles

le foyer initial n’est pas identifié. Chez l’adulte, lesprincipaux facteurs prédisposants sont l’ascite et lescirrhoses d’origine alcoolique ou virale. Les principalesbactéries en cause sont des bacilles à Gram négatifd’origine digestive dans la très grande majorité des cas(avec une nette prédominance d’E coli), puis lesentérocoques et de façon plus rare les streptocoques(du groupe B et pneumocoques) et les anaérobies [11].L’antibiothérapie probabiliste sera instituée par voie

Antibiothérapie probabiliste sans prélèvements bactériologiques et avec prélèvements bactériologiques - 5-0130

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Page 8: Le manuel du généraliste   antibiothérapie

veineuse dès les prélèvements réalisés (hémocultures,liquide d’ascite) sans en attendre les résultats et reposesur une C3G (céfotaxime, ceftriaxone) ou sur laformulation amoxicilline-acide clavulanique qui al’avantage de prendre en compte l’entérocoque et lesanaérobies.

Les péritonites secondaires communautairessurviennent à partir d’un foyer intra-abdominalprofond et sont de traitement mixte médicochirurgical.S’il existe des signes de choc septique, une tripleassociation C3G (céfotaxime, ceftriaxone)-aminoside-métronidazole est justifiée. Si l’infection est moinssévère, une monothérapie par le céfotétan, ou lacéfoxitine ou une bithérapie associant céfotaxime-métronidazole peut être proposée.

Les péritonites postopératoires ou nosocomialesjustifient d’une antibiothérapie probabiliste dont lespectre doit être large en raison de la diversité desgermes possiblement en cause et d’une multirésis-tance fréquente aux antibiotiques. Le choix d’une tripleassociation de type C3G (céfépime, cefpirome,ceftazidime)-aminoside (amikacine)-métronidazole, oudouble, pipérilline-tazobactam-aminoside ouimipénème-aminoside repose essentiellement sur lesfacteurs épidémiologiques locaux (écologie de l’unitéde soins, antibiothérapie antérieure, infectionpersistante).

‚ États septiques sévèresd’origine communautaire

Le traitement antibiotique probabiliste est uneurgence médicale s’il existe des signes de chocinfectieux. La recherche d’une porte d’entrée estcapitale pour orienter l’antibiothérapie empirique. Enattendant les résultats des prélèvements locaux et deshémocultures, le choix est fonction de la porte d’entréeprésumée. Si la porte d’entrée est cutanée, l’associationamoxicilline-acide clavulanique-aminoside ou

oxacilline-aminoside est active sur les staphylocoqueset les streptocoques. Si le point de départ de l’infectionest urinaire ou digestive, l’utilisation d’un aminosideassocié à la pipérilline ou la formulation pipérilline-tazobactam est active sur les entérobactéries, lesanaérobies et les entérocoques. L’association C3G-métronidazole est peu active sur les entérocoques. S’iln’existe aucun élément d’orientation, l’associationC3G-aminoside peut être proposée. Chez les sujetssplénectomisés, l’utilisation de la ceftriaxone ou ducéfotaxime permet d’être actif sur le pneumocoque.

‚ Infections nosocomialesUne infection nosocomiale est une infection

acquise en milieu hospitalier. Les signes et symptômesinfectieux apparaissent au moins 72 heures aprèsl’hospitalisation et n’étaient pas présents à l’admissiondu patient. Les infections les plus fréquentes sont lesinfections postopératoire, les infections urinaires, lesinfections sur cathéter, les infections respiratoires et lessepticémies. Les investigations microbiologiques(même invasives) sont indispensables pourdocumenter l’infection et adapter l’antibiothérapiecurative. Toutes les infections nosocomiales nejustifient pas une antibiothérapie. Ce sont parexemple, les infections urinaires asymptomatiques etles bactériémies sur cathéter endoveineux. Dans cedernier cas, l’ablation du cathéter peut suffire àentraîner la résolution de l’infection.

Le choix du traitement empirique des infectionsd’origine nosocomiale dépend d’un certain nombre defacteurs :

– le terrain (immunodéprimé ou non) ;– le type supposé de l’infection ;– le délai de survenue de l’infection par rapport à

l’admission : précoce, le pathogène sera le plussouvent sensible aux antibiotiques, tandis que lesinfections tardives sont plutôt le fait de bactériesmultirésistantes ;

– la gravité clinique de l’état septique ;– l’écologie de l’unité de soins.L’antibiothérapie empirique ne peut donc faire

l’objet d’une proposition standardisée et doit êtreadaptée en fonction de chaque cas. Les molécules leplus souvent utilisées sont :

– les C3G qui diffèrent entre elles par leur activitésur les cocci à Gram positif (céfotaxime, ceftriaxone),Pseudomonas aeruginosa (ceftazidime) ou les souchesproductrices de céphalosporinases déréprimées(cefpirome, céfépime). Elles sont peu actives sur lesentérocoques et les staphylocoques Méti-R ;

– l’imipénème actif sur l’entérocoque, lesanaérobies, les entérobactéries communautaires etnosocomiales, inactif sur les staphylocoques Méti-R ;

– l’association piperilline-tazobactam, de spectrevoisin de l’imipénème mais dont l’efficacité estinconstante sur les entérobactéries d’originenosocomiale.

L’association antibiotique incluant un aminosidepermet d’être rapidement bactéricide et de diminuerl’émergence de germes résistants dès l’identificationdu germe obtenue.

■Conclusion

Reconnaître les situations dans lesquelles il estimpératif d’obtenir l’identification de l’agentresponsable doit être la première étape de ladémarche thérapeutique face à une infectionsupposée bactérienne. À ce titre, le rôle du médecinpraticien est essentiel car la qualité de la prise encharge initiale est le meilleur garant d’un traitementoptimal.

Kadoudja Chemlal : Chef de clinique-assistant.Claude Carbon : Professeur des Universités, praticien hospitalier.

Service de médecine interne, hôpital Bichat, 46, rue Henri-Huchard, 75877 Paris cedex 18, France.

Toute référence à cet article doit porter la mention : K Chemlal et C Carbon. Antibiothérapie probabiliste sans prélèvements bactériologiques et avec prélèvementsbactériologiques. Encycl Méd Chir (Elsevier, Paris), Encyclopédie Pratique de Médecine, 5-0130, 1998, 4 p

R é f é r e n c e s

[1] Conférence de consensus (2e) en pathologie anti-infectieuse. Antibiothérapiedes infections urinaires.Med Mal Infect1991 ; 21 : 51-54

[2] Conférence de consensus (2e) en pathologie anti-infectieuse de la Société depathologie infectieuse de langue française (SPILF). Med Mal Infect 1992

[3] Conférence de consensus (3e) en thérapeutique anti infectieuse. Les infectionsbactériennes ostéo-articulaires en dehors des infections à mycobactéries.Med MalInfect1991 ; 21 : 37-43

[4] Conférence de consensus (4e) en thérapeutique anti-infectieuse de la Sociétéde pathologie infectieuse de langue française (SPILF). Les infections des voiesrespiratoires. Med Mal Infect 1992 ; 22 (no spécial)

[5] Conférence de consensus (4e) en thérapeutique anti-infectieuse.Med MalInfect1991 ; 21 : 1-8

[6] Conférence de consensus (9e) en pathologie anti-infectieuse de la Société depathologie infectieuse de langue française (SPILF). Les méningites purulentescommunautaires.Med Mal Infect1996 ; 26 (suppl) : 1-8

[7] Conférence de consensus de la SPILF. Les infections ORL.Med Mal Infect1996 ; 26 : 1-8

[8] Groupe de travail du bureau des consensus de la Société de pathologie infec-tieuse de langue française (SPILF). Endocardites infectieuses de l’adulte. Propo-sitions pour une antibiothérapie curative.Med Mal Infect1992 ; 22 (suppl) :370-378

[9] Carbon C, Chatelin A, Bingen E, Zuck P, Rio Y, Guetat F et al. A double-blindrandomized trial comparing the efficacy and safety of a 5-day course of cefotiamhexetil with that of a 10-day course of penicillin V in adult patients with pharyngi-tis caused by group A beta-haemolytic streptococci.J Antimicrob Chemother1995 ; 35 : 843-854

[10] Ladeb S, Dhedin N, Belhadj K, Cordonnier C. Stratégies de l’antibiothérapieau cours des épisodes fébriles des malades neutropéniques.La lettre del’infectiologue1996 ; 16 : 519-526

[11] Martin C, Viviand X, Potier F, Thomachot L. Antibiothérapie des péritonites.Med Mal Infect1995 ; 25 : 896-903

[12] Akalin HE. Quinolones in the treatment of acute bacterial diarrheal diseases.Drugs1993 ; Suppl 3 : 114-118

5-0130 - Antibiothérapie probabiliste sans prélèvements bactériologiques et avec prélèvements bactériologiques

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Page 9: Le manuel du généraliste   antibiothérapie

Antibiotiques à activité

antistaphylococcique

MC Meyohas

L es staphylocoques sont très fréquemment responsables d’infections, que ce soit en milieu communautaire ouhospitalier. Les antibiotiques antistaphylococciques sont nombreux, puisqu’il en existe dans presque toutes les

familles d’antibiotiques. Mais la prescription de ces médicaments n’est pas toujours aisée car différents facteursinterviennent, liés au germe, à l’hôte et à l’antibiotique lui-même.© Elsevier, Paris.

■Principes de prescription

antistaphylococcique

‚ GermeLes staphylocoques sont des cocci à Gram positif

aérobies dont on distingue usuellement deux formes :– Staphylococcus aureus (S aureus) ou staphyloco-

que doré ;– staphylocoque à coagulase négative (SCN),

appelé également staphylocoque « blanc », représentéprincipalement par S epidermidis et S saprophiticus.

Il est indispensable de différencier les infectionsstaphylococciques communautaires, habituellementdues à des souches sensibles aux antibiotiques, desinfections staphylococciques nosocomiales, liées à Saureus ou à S epidermidis, résistant fréquemment auxantibiotiques. Le traitement de première intention desstaphylococcies de ville et des staphylococciesacquises à l’hôpital est donc différent [1, 2]. L’exemple leplus démonstratif est celui de la sensibilité de S aureusaux pénicillines M dans 90 % des cas en ville, maisseulement dans 40 à 80 % des cas à l’hôpital [3, 4].

‚ Terrain

Les infections à staphylocoques peuvent survenirchez n’importe quel sujet. Néanmoins, des facteursfavorisants sont souvent retrouvés :

– sujets âgés ;– nouveau-nés et nourrissons ;– diabète ;– dénutrition ;– antibiothérapie à large spectre ;– corticothérapie ;– immunosuppresseurs ;– matériel prothétique ;– séjour en chirurgie ou en réanimation ;– toxicomanie intraveineuse.

‚ Site de l’infection

Les manifestations cliniques sont très variées et lalocalisation de l’infection à staphylocoque est trèsimportante à déterminer pour décider de la stratégiethérapeutique. Il peut s’agir de situations variées.

■ Il existe des infections cutanéomuqueuses avecstaphylococcies :

– épidermiques (impétigo, dermatose bulleuse,onyxis et périonyxis, tourniole) ;

– du follicule pilosébacé ;– du tissu cellulaire sous-cutané ;– des canaux glandulaires (hidrosadénite).■ Il existe également des infections bactériémiques

parfois très aiguës, comme la staphylococcie malignede la face, ou dans le cadre d’une endocardite.

■ Il peut enfin s’agir de localisations viscéralesostéoarticulaires, pleuropulmonaires, urogénitales ouneuroméningées.

Les antibiotiques (tableau I) prescrits serontdifférents selon le site infecté, le caractère local ougénéral de l’infection, la notion ou non denosocomialité. Ainsi, un macrolide ou l’oxacilline nesont pas prescrits pour une méningite, puisqu’ils nepassent pas la barrière hématoméningée ; uneendocardite nécessite une antibiothérapie enassociation bactéricide.

‚ AntibiotiqueL’antibiotique de choix sera celui qui est adapté au

germe, communautaire ou nosocomial, qui pénètrebien dans le site infecté (tableau II), qui est conformeau terrain (éviter les aminosides chez le sujet âgé, lesquinolones chez l’enfant), dont la forme galénique estadaptée (il n’existe pas de synergistine disponible chezle jeune enfant), dont le risque d’effets secondaires estfaible (tableau III) et dont le coût est le moins élevé, àactivité et toxicité comparables.

■Antibiotiques

antistaphylococciques

‚ BêtalactaminesLes pénicillines du groupe M (oxacilline et

cloxacilline) sont actives sur les staphylocoquessensibles à la méticilline (méti-S), comme lescéphalosporines de première et de deuxièmegénération, les carbapénèmes (thiénamycine) et lesassociations avec les inhibiteurs de bêtalactamases,

comme l’amoxicilline avec l’acide clavulanique. Lescéphalosporines de troisième génération sont peuactives sur les staphylocoques. La mauvaisebiodisponibilité orale des pénicillines M (30 à 60 %)rend inappropriée leur utilisation par voie orale dansles infections graves. Les réactions allergiques sont lesprincipales complications de cette familled’antibiotiques.

‚ Macrolides, lincosamideset streptogramines (M, L, S)

Macrolides

Les macrolides à noyau à 14 atomes (érythromy-cine, roxithromycine, clar i thromycine etdirithromycine) et à 15 atomes (azithromycine)semblent plus actifs sur les souches sensibles que lesmacrolides à noyau à 16 carbones (josamycine,spiramycine). Il est difficile de différencier lesindications et les avantages préférentiels des différentsmacrolides entre eux. Les souches de staphylocoquesméti-S sont sensibles à 90 % aux macrolides. Ils sontbactériostatiques. Leur absorption orale est soumise àdes variations individuelles qui sont variables avec lesmolécules. La diffusion tissulaire est bonne, sauf dansle liquide céphalorachidien (LCR) et le tissu nerveux. Ilssont métabolisés au niveau hépatique et éliminésmajoritairement par la bile. Les effets indésirables sontreprésentés essentiellement par :

– des troubles digestifs ;– des réactions cutanées ;– une hépatite cytolytique ;– des acouphènes, voire une surdité chez le

sujet âgé en cas d’insuffisance rénale ouhépatique.

Lincosamides

Les lincosamides sont représentés par lalincomycine, peu utilisée du fait de sa mauvaiseabsorption et de sa toxicité, et la clindamycine, bienabsorbée avec une bonne diffusion tissulaire ycompris dans l’os et le cerveau, ce qui fait son intérêt.

Ils sont métabolisés par le foie et éliminés par la bileet les urines.

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Tableau I. – Posologies et voies d’administration des principaux antibiotiques antistaphylococciques chez l’adulte (liste non exhaustive).

Dénomination communeinternationale Spécialité Forme pharmaceutique Voie et rythme

d’administrationPosologie et modalitéd’administration/jour

Bêtalactamines

Oxacilline Bristopent Gélule 500 mg Per os 3 à 4/j 2 à 8 gSirop 250 mg/5 mL Per os 3 à 4/j 3 à 4 foisFlacon 1 g IV (IM)

Cloxacilline Orbéninet Gélule 500 mg Per os 2 à 8 gFlacon 1 g IV (IM) 3 à 4 fois

Synergistines

Pristinamycine Pyostacinet Comprimé 500 mg Per os 2 à 3 g2 à 3 fois

Aminosides

Gentamicine Gentallinet Solution 160 mg 3 mg/kgGentamicinet Solution 10, 20, 40, 80, 160 mg IM, IV 1 à 2 fois

Tobramycine Nebcinet Solution 25, 75 mg IM, IV 3 mg/kg 1 à 2fois

Nétilmicine Nétromicinet 25, 50, 100, 150 mg IM, IV 4 à 6 mg/kg 1 à 2fois

Amikacine Amiklint Flacon 250, 500 mg, 1 g IM, IV 10 à 15 mg/kg1 à 2 fois

Glycopeptides

Vancomycine Vancocinet Flacon 125, 250, 500 mg, 1 g IV 1,5 à 2 g2 fois

Teicoplanine Targocidt Flacon 100, 200, 400 mg IV, IM 10 mg/kg 1 à 2fois(doses de charge)

Fluoroquinolones

Ofloxacine Oflocett Comprimé 200 mg Per os 400 mgFlacon 200 mg IV 2 fois

Ciprofloxacine Cifloxt Comprimé 500 mg Per os 1 à 1,5 gComprimé 750 mg (hôpital) Per os 2 foisFlacon 200 mg IV 400 à 600 mg

Autres antistaphylococciques

Rifampicine Rifadinet Gélule 300 mg Per os 20 mg/kg/jSuspension 50 ou 100 mg/mesure Per os 2 prisesFlacon 600 mg IV

Fosfomycine Fosfocinet Poudre 1 g, 4 g IV 8 à 12 g3 perfusions de 4 heures

Acide fusidique Fucidinet Comprimé 250 mg Per os 1,5 à 3 gSuspension buvable (100, 250 mg) Per os 2 à 3 prisesFlacon 500 mg IV

Tableau II. – Diffusion des antibiotiques antistaphylococciques dans les organes infectés.

Peau Poumon Méninges Rein Os Prostate

Pénicillines M + + - + + +/-

Synergistines +++ +++ - - ++ ++

Aminosides + + - +++ +/- -

Glycopeptides + + +/- ++ + +/-

Fluoroquinolones +++ +++ +++ +++ +++ +++

Rifampicine ++ +++ + +++ + +

Fosfomycine + ++ ++ +++ + +/-

Acide fusidique +++ ++ + - +++ +/-

Diffusion : +++ : très bonne ; ++ : bonne ; + : modérée ; +/- : variable ; - : mauvaise.

5-0120 - Antibiotiques à activité antistaphylococcique

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Page 11: Le manuel du généraliste   antibiothérapie

Synergistines ou streptogramines

Les streptogramines (pristinamycine, virginiamy-cine) sont composées de deux constituants à activitésynergique : streptogramines A et B. Elles sontbactéricides. Leur élimination est biliaire. Il n’existequ’une forme orale de pristinamycine avec une bonneabsorption, mais une forme injectable est enévaluation. Cette forme pourrait représenter unealternative à la vancomycine dans le traitementparentéral des infections à staphylocoques résistants àla méticilline (méti-R). La diffusion tissulaire est bonnemais elles ne passent pas dans le LCR. Leur excrétionest surtout biliaire. Les effets indésirables sont surtoutdigestifs (épigastralgies, nausées, vomissements),beaucoup moins fréquents quand l’antibiotique estingéré en fin de repas. Les allergies cutanées sontrares.

‚ Aminosides

Les aminosides sont toujours utilisés en association,en particulier avec les bêtalactamines ou lavancomycine, dans les infections graves. Leur intérêtest d’emblée limité par le fait que plus de 90 % dessouches de staphylocoques méti-R sont résistantesaux aminosides. S’ils sont actifs, leur bactéricidie estrapide et puissante. Ils ne sont pas absorbés par voieentérale. La diffusion est médiocre dans le LCR. Lestaux sont très élevés dans le cortex rénal et le liquidesynovial. Les taux tissulaires sont inférieurs le plussouvent aux taux sériques. L’élimination se fait parvoie rénale sous forme active. Les effets secondairespeuvent être graves avec néphrotoxicité, toxicitécochléovestibulaire. Le dosage de l’aminoside estnécessaire pour atteindre un taux thérapeutique nontoxique.

‚ Glycopeptides

La vancomycine et la teicoplanine sont desantibiotiques bactéricides, actifs de manière quasiconstante sur les staphylocoques. Ils ne sont pasabsorbés par voie orale. Leur diffusion tissulaire estbonne dans les séreuses sauf dans le LCR. La demi-viede la vancomycine est de 6 heures. L’élimination estrénale sans métabolisation préalable. La vancomycineest utilisée par voie intraveineuse dans les infections àstaphylocoques méti-R ou en cas d’allergie auxbêtalactamines. La teicoplanine a l’avantage depouvoir être administrée aussi par voie intramuscu-laire, fait appréciable quand le capital veineux estfaible, en particulier chez les toxicomanes. Sa demi-vieest plus longue (24 heures) permettant une seule

administration par jour, mais son coût est plus élevé.Les effets indésirables consistent en :

– une intolérance locale ;– une réaction d’hypersensibilité ;– des manifestations générales.La toxicité rénale et auditive est rare en l’absence

d’association à d’autres molécules néphro- ouototoxiques, si l’hydratation est bien assurée et si lesconcentrations sériques sont surveillées.

‚ Rifampicine

Cet antibiotique possède de nombreuses qualitésdans le traitement des staphylococcies : bactéricidie,biodisponibilité per os à jeun et par voie veineuse,pénétration dans les cellules phagocytaires, diffusiontissulaire satisfaisante (rein, os, LCR, foie, poumon,prostate), sa tolérance, sa facilité d’administration et lasensibilité des souches de S aureus méti-R. Mais lafréquence de survenue de résistance est importante.C’est pourquoi la rifampicine doit toujours être utiliséeen association. Les antibiotiques les plus fréquemmentassociés sont les glycopeptides et les fluoroquinolones.La rifampicine est éliminée dans la bile. Elle induit lesenzymes microsomiaux hépatiques. De ce fait, lesinteractions médicamenteuses sont nombreuses, avecdiminution de la demi-vie et de l’efficacité dumédicament associé. La posologie recommandéedans les infections staphylococciques est de20 mg/kg/j. Les effets secondaires les plus fréquentssont :

– le rash cutané ;– la fièvre ;– des nausées et des vomissements ;– une cytolyse hépatique, surtout en début de

traitement.Les hépatites sont exceptionnelles.

‚ Fluoroquinolones

Seules les fluoroquinolones synthétisées depuis1980 (péfloxacine, ofloxacine, ciprofloxacine) ont unspectre d’activité étendu aux staphylocoques. Ellessont bactéricides. Leur absorption digestive est trèsbonne et leur diffusion tissulaire est excellente enparticulier dans l’os, les méninges et le tissu nerveux, lerein, le poumon, la prostate. La résistance auxfluoroquinolones est croisée entre les différentesmolécules, bien que son niveau d’expression varie. Laréponse obtenue est cependant valable pour les troismolécules. Ces antibiotiques sont susceptibles desélectionner l’émergence de mutants résistantsd’origine chromosomique. Il est nécessaire de lesassocier à un autre antibiotique (rifampicine,fosfomycine, aminoside). L’élimination des

fluoroquinolones se fait par voie urinaire. Les effetsindésirables sont dominés par le risque detendinopathie avec rupture tendineuse ayant faitretirer la péfloxacine des pharmacies de ville danscette indication. Les autres effets secondaires sont :

– des arthralgies ;– des myalgies ;– une photosensibilisation ;– des troubles neurosensoriels ;– des troubles digestifs.

‚ Acide fusidique

Cet antibiotique demeure très actif contre lesstaphylocoques malgré l’évolution des résistances. LesSCN sont cependant plus fréquemment résistants.L’acide fusidique est bactériostatique mais peut êtrebactéricide à forte concentration. Le mécanisme derésistance est principalement chromosomique d’où lanécessité, là encore, d’une association à un autreantibiotique. L’acide fusidique a une bonnebiodisponibilité orale (autour de 90 %). L’éliminationest presque exclusivement biliaire. Sa diffusion n’estpas bonne dans le LCR, la prostate et les urines, maissa diffusion osseuse est importante. Les effetssecondaires, lors de prises orales, sont dominés par lestroubles digestifs (épigastralgies, nausées,vomissements, diarrhées). Avec la forme intravei-neuse, il peut apparaître des veinites, des anomalieshépatiques plutôt de type cholestatique.

‚ Fosfomycine

Il s’agit d’une petite molécule très diffusible et trèssoluble dans l’eau. Elle n’est pas absorbée par voieorale. La fosfomycine est bactéricide. Lesstaphylocoques hospitaliers, en particulier les SCN,sont malheureusement très fréquemment résistants.Mais les staphylocoques communautaires restent leplus souvent sensibles. Le taux de mutationchromosomique à la fosfomycine est élevé,nécessitant toujours une association à un autreantibiotique (bêtalactamines). La demi-vie sérique estcourte (2 heures) mais sa persistance dans lesméninges et surtout dans l’os est beaucoup plusprolongée. Sa diffusion est très bonne dans l’os, lesméninges, les voies biliaires, les sécrétionsbronchiques, le poumon, le rein et les urines.L’élimination est rénale, sous forme active. Les effetsindésirables sont principalement :

– des veinites ;– une surcharge sodée ;– une hypokaliémie ;– des nausées et des vomissements.

Tableau III. – Principaux effets secondaires des antibiotiques antistaphylococciques.

Allergie (dont peau) Tube digestif Foie Rein Cochléovestibulaire Veines Autres

Pénicillines M ++ + + + Hématologique

Synergistine + +++

Aminosides +++ +++

Glycopeptides + + + + ++ Neutropénie

Fluoroquinolones + + Troubles neurosensoriels, photosensibili-sation, tendinopathie

Rifampicine + ++ ++ Neutropénie

Fosfomycine + ++ Surcharge sodée, hypokaliémie

Acide fusidique + +++ ++ ++

Fréquence : +++ : importante ; ++ : moyenne ; + : faible.

Antibiotiques à activité antistaphylococcique - 5-0120

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Page 12: Le manuel du généraliste   antibiothérapie

■Indications thérapeutiques

‚ Infections de la peau et des tissus mous

Infections du follicule pilosébacé

Les soins locaux sont au premier plan. Uneantibiothérapie par voie générale doit être mise enroute dans des conditions bien précises :

– atteinte du follicule très inflammatoire, caused’abcès chronique ;

– furoncle simple localisé à la face ou survenant surterrain favorisant (diabète, immunodépression,malnutrition, prothèse) ;

– furoncle récidivant.Elle consiste en une monothérapie par pristinamy-

cine (Pyostacinet : 1 g 3 fois/j à la fin des repas), avecune très bonne diffusion cutanée, ou par pénicilline M(Bristopent ou Orbéninet : 3 à 4 g/24 h en 3 à 4 prisespar jour). La durée du traitement est de 5 à 10 jourspour les folliculites ou les furoncles simples, de 15 à 21jours pour les furoncles récidivants.

Infections épidermiques, dermo-épidermiqueset dermohypodermiques

L’impétigo peut être staphylococcique mais aussistreptococcique ou mixte. Cette pyodermite trèscontagieuse doit être traitée par des soins locaux trèsméticuleux et par une antibiothérapie généralependant 10 jours, avec une synergistine ou unepénicilline M. Les formes galéniques de cesmédicaments sont mal adaptées aux enfants. Unmacrolide peut alors être prescrit.

Une lymphangite secondaire à une infection devoisinage ou un panaris nécessite parfois untraitement antistaphylococcique par une monothéra-pie de même type.

Les plaies infectées peuvent être dues à unstaphylocoque ou à un autre germe. Si besoin, untraitement par amoxicilline - acide clavulanique ou parpristinamycine est prescrit.

Infections des parties molles

Si S aureus est fréquemment impliqué dans lesinfections des parties molles, d’autres germes sontincriminés ou associés. Le traitement antibiotiqueprobabiliste est large dans les fasciites nécrosantes, lescellulites nécrosantes synergistiques ou les myosites,nécessitant une couverture antistaphylococcique. Il nedoit pas retarder la chirurgie.

‚ Infections bactériémiqueset localisations viscérales

Staphylococcie maligne de la face

Elle requiert une antibiothérapie parentérale dans lecontexte d’une infection bactériémique. Il s’agit enrègle d’une infection communautaire pour laquellel’association pénicilline M-aminoside est recomman-dée. Une alternative thérapeutique est l’associationfluoroquinolone avec rifampicine ou acide fusidique,ces antibiotiques ayant une bonne pénétrationcutanée.

Bactériémies

Le traitement des bactériémies reste souventdifficile. Il demande une documentation bactériologi-que, avec étude des associations bactéricides etdosage des antibiotiques. Une association synergiqueest nécessaire. Le choix du traitement antibiotique doitprendre en compte la sensibilité ou non dustaphylocoque à l’oxacilline, la pharmacocinétique dechaque antibiotique, sa diffusion dans le site infecté etla gravité de l’infection [1, 2, 5].

On peut proposer plusieurs solutions.■ Pour un staphylocoque méti-S, le traitement sera

le suivant : pénicilline M-aminoside. En cas d’allergieaux pénicillines, une association céphalosporine depremière ou de deuxième génération ou glycopeptideou synergistine avec un aminoside.

■ Pour un staphylocoque méti-R, plusieurstraitements sont possibles :

– glycopeptide-rifampicine ou fosfomycine ouacide fusidique ou aminoside ;

– rifampicine-synergistine ou acide fusidique oulincosamide ou aminoside ;

– fosfomycine-céfotaxime ou ceftriaxone ouimipénème ou pénicilline M ou aminoside.

Endocardites

La localisation sur l’endocarde doit êtresystématiquement recherchée au cours de toutebactériémie, du fait de son évolution qui peut êtrerapidement défavorable. La bactéricidie avec uneassociation d’antibiotiques est impérative sans retard.Le traitement est prolongé jusqu’à 6 semaines.

Méningites

L’association céfotaxime-fosfomycine estrecommandée, que le staphylocoque soit méti-S ouméti-R. Le traitement de deuxième intention comprend

fluoroquinolone et rifampicine si le staphylocoque estméti-S, vancomycine et un autre antibiotique à bonnepénétration cérébroméningée (rifampicine,fluoroquinolone, fosfomycine, cotrimoxazole) si lestaphylocoque est méti-R.

Infections osseuses

Pour un staphylocoque méti-S, en alternative avecla pénicilline M-aminoside, l’association d’unefluoroquinolone à la rifampicine ou à l’acide fusidiqueest tout à fait optimale du fait de la bonne pénétrationosseuse de ces molécules. Pour un staphylocoqueméti-R, en alternative à un glycopeptide associé à unacide fusidique ou à la rifampicine, on peut proposerl’association céfotaxime-fosfomycine ou encorefosfomycine ou fluoroquinolones et rifampicine ouacide fusidique. Le traitement doit souvent êtreprolongé de 6 semaines à 3 mois, voire plus dans lesformes chroniques.

Cas particulier : infection à SCN

Les SCN sont avant tout des bactéries opportunis-tes, nosocomiales ou iatrogènes. La symptomatologieest souvent moins bruyante, polymorphe. Il peut s’agir,par exemple, d’une infection sur cathéter, d’uneendocardite postopératoire, d’une méningoencépha-lite postopératoire, d’une infection sur prothèse dehanche ou de genou. Le diagnostic est difficile car ils’agit d’un germe saprophyte. À noter les infectionsurinaires basses chez la jeune femme à Ssaprophyticus. Le traitement repose sur les mêmesprincipes que celui de S aureus, mais la résistance auxantibiotiques est fréquente. Les antibiotiques de choixsont représentés par les glycopeptides, la rifampicine,la pristinamycine et l’acide fusidique.

■Conclusion

L’utilisation des antibiotiques antistaphylococciquesfait intervenir différents concepts : S aureus ou SCN,caractère communautaire ou nosocomiale del’infection, sensibilité ou non à l’oxacilline, bactériémieou infection localisée, diffusion dans les différents sites,tolérance des antibiotiques. Un traitement probabilistedoit être débuté en attendant la réponse clinique et laréponse bactériologique.

Marie-Caroline Meyohas : Praticien hospitalier,service des maladies infectieuses et tropicales, hôpital Saint-Antoine, 184, rue du Faubourg-Saint-Antoine, 75012 Paris, France.

Toute référence à cet article doit porter la mention : MC Meyohas. Antibiotiques à activité antistaphylococcique.Encycl Méd Chir (Elsevier, Paris), AKOS Encyclopédie Pratique de Médecine, 5-0120, 1998, 4 p

R é f é r e n c e s

[1] Besnier JM, Bastides F, Choutet P. Thérapeutique des infections àStaphylo-coccus aureussensible à la méticilline (SAMS).Med Mal Infect1997 ; 27 (suppl) :S225-S240

[2] Domart Y. Thérapeutique des infections àStaphylococcus aureusrésistant à laméticilline (SAMR).Med Mal Infect1997 ; 27 (suppl) : S241-S251

[3] Musher DM, Lamm N, Darouiche RO, Young EJ, Hamill RJ, Landon GC. Thecurrent spectrum ofStaphylococcus aureusinfection in a tertiary care hospital.Medicine1994 ; 73 : 186-208

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[5] Turnidge J, Grayson ML. Optimum treatment of staphylococcal infections.Drugs1993 ; 45 : 353-366

5-0120 - Antibiotiques à activité antistaphylococcique

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Page 13: Le manuel du généraliste   antibiothérapie

Antibiotiques chez le sujet âgé

C Jeandel, H Blain

T roisième cause de mortalité primaire, la pathologie infectieuse du sujet âgé se caractérise par un mode deprésentation volontiers paucisymptomatique ou atypique, une évolution souvent traînante et parfois

entretenue par les pathologies associées (dénutrition protéinoénergétique, pathologie iatrogénique...), des morbiditéet mortalité élevées et la nécessité d’une prise en charge globale de l’individu.© Elsevier, Paris.

■Introduction

Une présentation souvent fruste est à l’origined’un fréquent retard diagnostique et nécessite unedémarche clinique systématisée. Si l’infectionurinaire représente l’infection la plus fréquente chezle sujet âgé, la première cause d’infection fébrilereste dominée dans cette tranche d’âge par lesinfections bronchopulmonaires.

Le mode de révélation est souvent trompeur ouatypique. Les signes neuropsychiques peuventapparaître au premier plan. Le syndromeconfusionnel, volontiers inaugural et favorisé par unsyndrome démentiel préexistant, résultera trèsfréquemment de la conjonction de facteurs multiples(fièvre, troubles métaboliques, iatrogénie...), serafréquemment entretenu par ses conséquencesmétaboliques (déshydratation, hyperthermie...) sielles ne sont pas précocement prévenues et pourraêtre à la source de difficultés de prise en chargethérapeutique de l’infection causale.

L’évolution est souvent traînante, en raison :– de la réduction fréquente des moyens de

défenses naturelles (diminution des défensesimmunitaires humorales et cellulaires, effets duvieillissement sur les structures et fonctions del’appareil bronchopulmonaire) ;

– de la présence fréquente de facteursd’autoentretien, au premier rang desquels il fautplacer la dénutrition protéinoénergétique par sesconséquences sur les fonctions respiratoires :dénutrition d’apport et par hypercatabolisme(dénutrition endogène) à l’origine fréquente d’uncercle vicieux (hypercatabolisme --> dénutrition -->diminution de la réponse immunitaire --> infection--> hypercatabolisme --> dénutrition).

La morbidité, la mortalité sont élevées. Après 65ans, la pathologie infectieuse est responsable deprès de 30 % des décès et représente la troisièmecause de mortalité primaire après les néoplasies etles affections cardiovasculaires. Chez le sujet âgé, lesinfections bronchopulmonaires sont la première

cause de décès d’origine infectieuse et la quatrièmecause de décès toutes origines confondues.

■Influence de l’âge

sur la pharmacocinétique

des médicaments

Les modifications pharmacocinétiques etpharmacodynamiques induites par le vieillissementexpliquent en partie l’incidence plus élevée des effetsiatrogènes médicamenteux chez le sujet âgé. Leseffets du vieillissement sur le comportementpharmacocinétique sont appréciés par lacomparaison, entre sujets jeunes et âgés, descourbes de concentration dans le temps et desparamètres en étant dérivés (Tmax, Cmax, aire sousla courbe, demi-vie et clairance plasmatique, tempsde résidence moyen, volume apparent dedistribution). Les modifications de ces paramètreschez le sujet âgé traduisent les effets duvieillissement sur l’absorption, la distribution, lemétabolisme et l’excrétion des drogues.

‚ Modifications de l’absorption

Les modifications de l’absorption résultent :– de la diminution de la vidange gastrique

(allongement du temps moyen de demi-vidange de47 à 123 minutes chez le sujet âgé, favorable pourles médicaments à absorption gastrique et lesmédicaments peu solubles mais responsable d’unretard d’absorption pour les médicaments àabsorption duodénale) ;

– de l’augmentation du pH gastrique (diminuantl’absorption des acides faibles et favorisant celle desbases faibles) ;

– de la diminution de la surface digestive et de lamotilité gastroduodénale (favorable à la résorptionpar augmentation du temps de contact) ;

– de la réduction du flux sanguin splanchnique(retard de l’absorption par diffusion passive) et dunombre de certains systèmes de transport.

Ces modifications peuvent avoir des effetsopposés (la diminution de la surface d’absorptionpouvant être compensée par l’augmentation du

temps de transit et la réduction de l’acidité gastriquepar la diminution de la vidange gastrique, rendantcompte de l’absence de modification de labiodisponibilité de la majorité des drogues chez lesujet âgé. La quantité (Cmax) de la plupart desmédicaments s’avère peu ou pas modifiée ; enrevanche, un grand nombre d’entre eux sontabsorbés de manière retardée.

‚ Modifications du transportet de la distribution

La diminution des masses liquidiennes etl’augmentation de la masse grasse au cours duvieillissement induisent des modifications desvolumes apparents de distribution des médicaments,augmentant les risques de surdosage pour lesdrogues hydrosolubles et les risques d’accumulationet d’activité différée pour les composés liposolubles.La diminution de la concentration en albumineplasmatique, la réduction du nombre de ses sites defixation et ses modifications stéréochimiques sontquant à elles responsables d’une augmentation de lafraction libre active et des risques d’interactionscompétitives pour les composés à fortes affinité etliaison protéiques. L’augmentation des concentra-tions de l’alpha-1 glycoprotéine acide (système detransport de certaines bases faibles) au cours desétats inflammatoires, témoigne de la nécessité de laprise en compte des facteurs pathologiques associésdans l’étude des modifications cinétiques.

‚ Modifications du métabolisme

Les biotransformations hépatiques desmédicaments font intervenir des réactions de phase1 (oxydation, réduction, déméthylation, hydrolyse),catalysées par les systèmes des mono-oxygénasesmicrosomales (cytochromes P 450, b5 et leursréductases, flavoprotéines) et des réactions de phase2 (glucurono- et sulfoconjugaison, méthylation,acétylation) pour lesquelles les effets duvieillissement ont été moins étudiés. Les capacitéshépatiques à métaboliser un grand nombre demédicaments diminuent avec l’âge chez l’homme.Cette diminution s’applique différemment d’unmédicament à l’autre et est soumise à des variations

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Page 14: Le manuel du généraliste   antibiothérapie

interindividuelles. Ces variations font intervenir desfacteurs génétiques et environnementaux, les étatspathologiques éventuels et la polymédication. Lamasse hépatique diminue de 35 % chez l’hommeâgé. La diminution du flux sanguin hépatique estproportionnellement plus élevée que celle de lamasse hépatique. Ces deux facteurs expliquent à euxseuls la diminution de la clairance hépatique d’ungrand nombre de médicaments chez les sujets âgés.L’âge n’affecte pas l’affinité des mono-oxygénasespour les différents substrats étudiés. Les activitésenzymatiques de conjugaison sont peu affectées parl’âge chez l’animal et probablement chez l’homme.Les phénomènes d’induction et d’inhibition desenzymes du métabolisme des médicaments ne sontpas modifiés au cours du vieillissement.

‚ Modifications de l’excrétion rénale

La diminution du flux sanguin rénal et de lafiltration glomérulaire chez le sujet âgé rend comptedes principales modifications des paramètrescinétiques (augmentation de la demi-vie et du tempsde résidence moyen, diminution de la clairanceplasmatique) et de la nécessité d’utiliser desposologies adaptées à la fonction rénale (appréciéespar la clairance à la créatinine ou mieux de l’insuline,à défaut à partir du monogramme de Kampmannou de l’équation de Cockcroft et Gault (1)).Cependant, les résultats de deux étudeslongitudinales [13] démontrent que cette modificationde la fonction rénale épargne certains individus âgéset résulterait davantage des effets cumulés dedifférents processus pathologiques (immunologi-ques, infectieux, toxiques, ischémiques...) que deseffets propres du vieillissement.

Les variations interindividuelles résultant deseffets additifs du vieillissement intrinsèque et desévénements pathologiques successifs impliquent lanécessité d’une adaptation posologique individuelle(tableau I). Aux risques de surdosage les plussouvent encourus, il faut opposer les risquesd’inefficacité thérapeutique induits par unediminution de posologie systématique injustifiée.

■Infections respiratoires basses

non tuberculeuses

Les infections respiratoires aiguës sont fréquenteschez le sujet âgé.

Hodder dans une étude prospective sur 3 ansportant sur une population non institutionnalisée,âgée de plus de 65 ans, mentionne que 41 % dessujets étudiés ont présenté un ou plusieurs épisodesde la sphère ORL ou respiratoire avec une variabilitésaisonnière.

Cinquante neuf pour cent des patients suivis enhôpital de jour par Falsey, sur une période de 15

mois et dont l’âge moyen était de 79 ans, ontprésenté un épisode infectieux des voies aériennessupérieures ou inférieures. Quarante cinq pour centdes infections étaient documentées, 18 % étantd’origine bactérienne (Haemophilus influenzae,Streptococcus pneumoniae, Moraxella catarrhalis,Klebsiella pneumoniae , streptocoque non A,Chlamydiae pneumoniae). Si dans le groupe témoin,(personnel d’encadrement), l’évolution fut toujoursfavorable, dans le groupe âgé, 6 % durent êtrehospitalisés et 2 % des patients décédèrent.

En milieu institutionnalisé, la fréquence desinfections respiratoires est élevée. Dans la série deLee, les infections respiratoires occupent le deuxièmerang (26 %) derrière les infections urinaires (47 %).Dans l’étude de Poupet [24] réalisée dans un servicede moyen séjour gériatrique, les infectionsrespiratoires représentent 9 % des infectionsnosocomiales (les autres étant représentées par lesinfections urinaires 64 %, cutanées 9 % etsepticémiques 9 %).

Les infections respiratoires demeurent doncfréquentes chez le sujet âgé, tout particulièrement lespneumonies qui sont grevées d’une mortalitéélevée. L’âge est un facteur de surmortalité commel’atteste la récente méta-analyse de Fine [14]. Parmiles autres facteurs pronostiques, il faut mentionnerles signes cliniques (tachypnée, hypotension,hypothermie), le terrain (diabète, néoplasie,affections neurologiques), la présence d’uneleucopénie, l’atteinte de plus d’un lobe pulmonaire etl’existence d’une bactériémie.

‚ Pneumopathies

Bien que l’incidence réelle des pneumonies chezle sujet âgé en milieu communautaire ne soit pasconnue, elle serait estimée entre 25 et 44 pour 1000habitants par année. En milieu institutionnalisé, elleserait de 68 à 114 pour 1000 sujets par an. Cetteincidence élevée dans la population âgée traduitl’effet des pathologies sous-jacentes, dont ladénutrition, à l’origine d’une modification desmécanismes de défense locale de l’arbretrachéobronchique (appareil mucociliaire, sécrétionslocales d’IgA) favorisant la colonisation des voiesaériennes supérieures par des bacilles à Gramnégatif [2]. La contamination des voies aériennesbasses se fait habituellement à partir del’oropharynx, par la flore gastrique, à partir d’unesonde nasogastrique ou par voie hématogène,durant une phase bactériémique (Escherichia coli,Staphylococcus aureus). Cette colonisation peut êtreà l’origine d’une pneumonie si les mécanismes dedéfense sont dépassés. Parmi les facteurs de risquefavorisant la colonisation, il faut mentionner :l’antibiothérapie antérieure, la bronchite chronique,la corticothérapie, les états d’immunodépression, lamalnutrition, une infection virale, l’intubation,l’institutionnalisation, la trachéotomie, l’atteinte de lafonction ciliaire.

Pneumonies bactériennesen milieu communautaire

Les agents pathogènes les plus fréquemment encause sont Streptococcus pneumoniae (40 - 60 %),Haemophilus influenzae (2,5 à 20 %), bacilles à Gram

négatif (3 à 37 %), Staphylococcus aureus (2 à 10 %),Legionella (0 à 22,5 %), mycoplasmes et anaérobies.

¶ Streptococcus pneumoniaeIl en représente, comme dans les autres tranches

d’âge, le premier agent étiologique. Les principauxfacteurs de risque sont : l’alcoolisme, l’immunodé-pression, l’existence d’une pathologie pulmonairesous-jacente, le diabète et l’âge. Le risqued’acquisition d’une infection pneumococcique etl’incidence des formes invasives augmentent ainsiavec l’âge. Dans l’étude de Mufson, la fréquence desformes invasives est de 8 à 25 pour 100 000 par andans la population de plus de 65 ans, alors qu’elleest inférieure à 8 pour 100 000 dans la populationadulte. Les infections pneumococciques sont grevéesd’une mortalité plus élevée, tout particulièrement s’ils’agit de formes invasives (septicémie, méningite).Dans la série de pneumonies à pneumocoque deLéophonte [21], l’âge moyen de 21 des 30 patientsdécédés était de 75 ans. Cette surmortalité résulteraitd’une réponse immunitaire amoindrie à l’égard desérotypes plus virulents. Une prise en chargethérapeutique des pneumonies peut permettre d’enaméliorer le pronostic, la différence des taux demortalité étant significative lorsqu’une antibiothé-rapie adaptée est débutée dans les 24 heures.

¶ Haemophilus influenzaeIl est responsable de pneumopathies survenant

sur un terrain de bronchite chronique. Les souchesnon typables sont le plus souvent impliquées chez lesujet âgé et sont parfois à l’origine de septicémies.Son isolement dans les sécrétions bronchiques estd’interprétation délicate car il peut n’être qu’unsimple germe de colonisation sans caractèrepathogène. La mortalité des pneumopathies àHaemophilus s’élève avec l’âge (33 à 57 %).

Pneumonies en milieu institutionnalisé

Leur écologie est intermédiaire entre l’écologiecommunautaire et l’écologie nosocomiale, enremarquant que le milieu institutionnalisé recouvredes populations différentes selon que l’on s’adresseaux maisons de retraite ou aux services de soins delongue durée. Outre Streptococcus pneumoniae etHaemophilus influenzae, le terrain est souventpropice aux infections à bacilles à Gram négatif(Klebsiella ), à Staphylococcus aureus et auxanaérobies (pneumopathies d’inhalation). Le taux demortalité est plus élevé dans cette population. Dansl’étude de Watanakunakorn, relative à despneumonies à pneumocoques compliquées desepticémie, la mortalité des patients issus de maisonsde retraite est de 55 % contre 36 % chez des patientsâgés non institutionnalisés.

‚ Thérapeutique

L’instauration d’un traitement ne doit souffriraucun retard. Les recommandations de la quatrièmeconférence de consensus [6] préconisent, dans lespneumonies communautaires chez les sujets àrisque, l’utilisation des céphalosporines orales ou del’amoxicilline-acide clavulanique (associée à unmacrolide ou une quinolone dans l’éventualité d’uneinfection à Legionella) ce qui permet de couvrir lepneumocoque et Haemophilus influenzae sécréteur

(1) L’équation de Cockroft et Gault permet d’évaluer la clairance dela créatinine en l’absence de recueil urinaire et apparaît bien corréléeà la clairance mesurée. Cl créatinine = rapport de [(140 - âge) x poids(kg)] sur [72 x créatinine plasmatique (mg/dL)] (rapport multiplié par0,85 chez la femme).

5-0200 - Antibiotiques chez le sujet âgé

2

Page 15: Le manuel du généraliste   antibiothérapie

ou non de bétalactamase. Des critères de gravité liésau terrain ou à la situation clinique (Score de Fine), oul’absence de réponse au traitement initial doiventinciter à l’hospitalisation. La bithérapie initiale esthabituelle et doit couvrir le pneumocoque.Habituellement, une association bétalactamine +fluoroquinolone (ou aminosides) est préconisée,permettant d’élargir le spectre aux germesintracellulaires et aux bacilles à Gram négatif.L’utilisation d’un inhibiteur des bétalactamases ou demétronidazole est indiquée chez les patients à risquede pneumopathie de déglutition (couverture desanaérobies) . L’émergence de souches depneumocoques de sensibilité anormale à lapénicilline G est en constante progression en France(3,8 % en 1984, 16,9 % en 1991 et 23,1 % en1993) [15] et porte essentiellement sur les souchesnon invasives. Dans le doute, (critères de Pallares),l’amoxicilline à fortes doses ou une céphalosporinede troisième génération sera substituée à lapénicilline G.

L’antibiothérapie sera adaptée en fonction durésultat clinique et des résultats bactériologiques. Ladocumentation bactériologique doit être en effetentreprise sans délai : examen cytobactériologiquede l’expectoration, hémocultures, sérologies, voirefibroscopie bronchique (lavage bronchoalvéolaire,brossage protégé).

‚ Prophylaxie

Il faut rappeler que nous disposons d’un vaccinantipneumococcique qui couvre les valenceshabituellement en cause dans les infectionspneumococciques. Son utilisation est préconiséechez le sujet âgé de plus de 65 ans mais il n’existeactuellement aucune recommandation nationalefrançaise pour la vaccination antipneumococciquechez les personnes âgées. Par ailleurs, lespneumopathies virales faisant le lit des infectionspneumococciques, il est licite d’encourager lavaccination antigrippale chez le sujet âgé [17].

■Infections urinaires

‚ Problématique

Les infections urinaires représentent les infectionsbactériennes les plus fréquentes chez la personneâgée et la première porte d’entrée des bactériémies.Leur prévalence augmente avec l’âge pour atteindre20 % des femmes entre 65 et 75 ans, et de 20 à50 % après 80 ans ; 3 % des hommes entre 65 et 75ans et 20 % après 80 ans. Plusieurs facteurs souventintriqués rendent compte de l’augmentation de leurincidence avec l’âge, tels que les pathologiesfavorisant la stase urinaire (adénome prostatique,prolapsus), le sondage vésical, l’incontinence anale,l’état d’hydratation, le statut nutritionnel, la présenced’une affection maligne à l’origine d’une baisse desdéfenses immunitaires, la grabatisation... Après 65ans, 17 à 33 % des femmes à domicile contre 32 à50 % à l’hôpital présentent une infectionurinaire [7, 23].

‚ Épidémiologie bactérienne

Comme chez le sujet jeune, les entérobactériessont le plus souvent responsables des infectionsurinaires et le principal germe en cause estEscherichia coli. Proteus mirabilis (notamment chezl’homme), Klebsiel la , Enterobacter , Serratia ,Pseudomonas et les streptocoques du groupe D(enterocoques) concernent plus particulièrement lespatients institutionnalisés porteurs d’anomaliesorganiques de l’appareil urinaire, les patients soumisà un nombre élevé de manœuvres instrumentalesou à des antibiothérapies répétées à l’origine d’unesélection des germes. On observe une augmentationcroissante de souches d’E s c h e r i c h i a c o l imultirésistantes : 30-40 % de résistance àl’ampicilline ; 8-15 % au cotrimoxazole ; 8-12 % auxpénici l l ines associées aux inhibiteurs debêtalactamases.

‚ Particularités cliniques

L’infection urinaire du sujet âgé est très souventlatente. L’atteinte du haut appareil est fréquente.Chez la femme âgée, la pyélonéphrite aiguë estresponsable d’un état de choc dans 22 % des cas.Les complications systémiques (endocardite,méningite...) ou locorégionales (abcès) sont plussouvent observées chez le sujet âgé.

‚ Principes du traitement

De par leur gravité, les infections urinaires sévèresdu sujet âgé justifient habituellement l’hospitali-sation et le recours à une double antibiothérapiebactéricide par voie intraveineuse. La recherche puisle lever d’un obstacle devra être systématique. Lechoix de l’antibiothérapie doit répondre à l’impératifde concentrations bactéricides rapidement obtenuesdans les urines et le parenchyme rénal ouprostatique (tableau I). Les antibiotiques répondant àces critères sont :

– aminosides ;– ampicilline + inhibiteur de bétalactamase ;– céphalosporine de deuxième et troisième

génération ;– fluoroquinolone ;– cotrimoxazole ;– aztréonam ;– carbapénème ;– uréido-carboxypénicilline + inhibiteur de

bêtalactamase.

Recommandations thérapeutiques actuelles

¶ Pyélonéphrite sévère ou compliquéeLe traitement repose sur une bithérapie

intraveineuse associant un aminoside à unecéphalosporine de troisième génération ou unefluoroquinolone ou l’aztréonam ou le cotrimoxa-zole [7]. Les posologies doivent être adaptées à lafonction rénale et les taux plasmatiquesd’aminosides rigoureusement surveillés. En casd’insuffisance rénale et/ou de déficit auditif, lesaminosides seront contre-indiqués et l’associationfluoroquinolone-céphalosporine de troisièmegénération préconisée. La durée du traitement serade 20 jours. L’apyrexie doit être obtenue en 24 à 48heures et l’étude cytobactériologique des urines

(ECBU) stérilisée en 24 heures. Le relais oral seraeffectué avec une fluoroquinolone ou unecéphalosporine de troisième génération.

¶ Prostatite aiguë sévèreAssociation d’une céphalosporine de troisième

génération ou d’une fluoroquinolone à unaminoside, puis relais oral par une fluoroquinolone,une céphalosporine de troisième génération ou lesulfaméthoxazole-triméthoprime pendant 3semaines au minimum. Contrôle de l’ECBU à 48heures et à la fin du traitement, et échographieprostatique en fin de traitement.

Remarques

La prévalence de la bactériurie asymptomatiqueaugmente avec l’âge dans les deux sexes. Le risquede voir se développer une infection symptomatiqueen dehors des manœuvres instrumentales ouchirurgicales chez ces patients n’est pas démontré.Par ailleurs, la bactériurie asymptomatique n’est pasliée à un risque de décès prématuré. Elle est souventtransitoire. Son traitement n’est donc pas nécessaireen raison des risques d’émergence de résistances.

■Septicémies

‚ Problématique

La survenue d’une septicémie chez une personneâgée est toujours redoutée car il est admis que sonpronostic est plus sévère que chez le sujet jeune.Entre 1985 et 1986, parmi les 788 épisodessepticémiques analysés dans le cadre du projetsystème expert septicémie (SES), 47 % survenaientchez les patients de plus de 65 ans, une fois sur deuxd’origine nosocomiale avec une mortalité globale de20 %.

‚ Épidémiologie bactérienne

Les septicémies monomicrobiennes sont les plusfréquentes ; dans moins de 10 % des cas, plusieursgermes sont isolés entrant dans le cadre dessepticémies plurimicrobiennes de pronostichabituellement plus sombre. Les septicémies àbacille à Gram négatif sont les plus fréquentes, avechabituellement prédominance de Escherichia coli :53 % des isolats chez Breux [3] (29 % Escherichia coli),60,4 % chez Meyers (22 % Escherichia coli). DerrièreEscherichia coli sont fréquemment isolés Proteus,Klebsiella, Enterobacter sans différence significativepar rapport aux sujets plus jeunes [3]. Les cocci àGram positif viennent généralement au second rang,avec trois germes principaux : Streptococcuspneumoniae , streptocoques du groupe D -enterocoques et Staphylococcus aureus. Chez Breux,43 % de cocci à Gram positif (12 % de SPneumoniae, 6 % de streptocoques D - entéro-coques, 13 % de Staphylococcus aureus), chezMeyers, 30,2 % de cocci à Gram posit i f(respectivement 4 %, 10 %, 13 %). Les germesanaérobies représentent moins de 10 % des germesisolés, (4 % dans la série de Breux) [3]. En milieuinstitutionnalisé, l’écologie se modifie. Dans l’étudede Muder, les bacilles à Gram négatif prédominent

Antibiotiques chez le sujet âgé - 5-0200

3

Page 16: Le manuel du généraliste   antibiothérapie

(59 %), représentés majoritairement par Escherichiacoli (13 %), Providencia (13 %) et Proteus (13 %). Lescocci à Gram positif (35 %) sont majoritairementStaphylococcus aureus (14 %) et entérocoques (8 %) ;22 % de septicémies étaient polymicrobiennes.

‚ Portes d’entrée

Présumée ou identifiée dans 80 % des cas, laporte d’entrée urinaire prédomine chez le sujet âgé :35 % dans la série de Breux [3], 27 % dans celle deMeyers et 26,1 % dans celle d’Azoulay. Quand laporte d’entrée est urinaire, les bacilles à Gram négatifprédominent (80,3 % dans la série d’Ackermann) etsont principalement représentés par Escherichia coli.

Chez les porteurs de sonde vésicale, le risque desepticémie à bacille à Gram négatif non Escherichiacoli ou à entérocoques est plus important. L’étude deMuder portant sur une population institutionnalisée,confirme ces données : Providencia stuarti pour lesbacilles à Gram négatif et Enterococcus pour les coccià Gram positif se révèlent les germes les plusfréquemment isolés dans une population où 84 %des patients bénéficiaient d’un système de recueild’urines (46 % d’un sondage vésical, 5 % d’uncathéter suspubien et 33 % d’un recueil externe).Dans ce contexte, des germes multiples étaient isolésdans 27 % des cas avec une mortalité de 29 %(10 % en cas d’isolement d’une seule espèce). La

relation entre cathétérisme, sondage vésical etacquisition d’une septicémie à point de départurinaire est largement débattue : s’agit-il d’unerelation directe effet/cause ou d’une relationindirecte due à un terrain favorisant l’acquisitiond’infections ? Les autres portes d’entrée sont :cutanées (staphylocoques, bacilles à Gram négatif,anaérobies), pulmonaires (pneumocoques,Klebsiel la ) et abdominales (entérobactéries,entérocoques, anaérobies). Les portes d’entréeiatrogéniques sont soulignées par la plupart desauteurs (manœuvres instrumentales dont lesondage vésical, voie veineuse) expliquant lafréquence des bacilles à Gram négatif et deStaphylococcus aureus méti-R.

‚ Mortalité

La mortalité globale, au-delà de 65 ans, varie de15,7 % à 70 %. L’âge apparaît comme l’un desprincipaux facteurs pronostiques (30 % de décèsentre 60-69 ans, 46,5 % entre 70 et 79 ans, 58,8 %au-delà de 80 ans) [1]. Néanmoins, une telle disparitédes taux de mortalité suggère que l’âge nereprésente pas le seul facteur pronostique. D’autreséléments sont à considérer, notamment :

– la gravité du choc endotoxinique ou ducollapsus ;

– le caractère nosocomial de l’infection ;– certains germes sont grevés d’une surmorta-

lité : anaérobies (66, 1 % de décès chez Terpenning),Staphylococcus aureus (57 % de décès chez Meyers),Pseudomonas aeruginosa (100 % de décès chezBreux) [3] ;

– les portes d’entrée urinaires sont réputées demeilleur pronostic, mais là encore, le germeintervient : la mortalité est de 10,1 % pourEscherichia coli, de 20 % pour Enterococcus et de37,5 % pour Staphylococcus aureus. Les septicémiesd’origine respiratoire sont de mauvais pronostic :58 % de décès (contre 30 % pour les septicémiesd’origine urinaire) chez Meyers ; 43 % de décès surpneumonie à pneumocoque, 67 % sur pneumonie àStaphylococcus aureus chez Muder ;

– l’existence d’une localisation secondaire,notamment ostéoarticulaire grève le pronostic ;

– et surtout le terrain. Qu’il soit apprécié par lesindices de Mac Cabe ou par le nombre depathologies sous-jacentes, le terrain apparaît commel’élément déterminant du pronostic. Ainsi, pourAzoulay, à âge moyen identique, la mortalité estmultipliée par deux (69,25 %) chez un patientporteur de deux tares viscérales ou plus par rapportà un sujet porteur d’une seule tare viscérale.

‚ Thérapeutique

La gravité potentielle des septicémies impose uneprescription rapide et adaptée, un traitementempirique inadapté apparaissant comme un deséléments de surmortalité [20]. Les septicémiesd’origine communautaire, souvent d’origine urinaire,doivent bénéficier d’une antibiothérapie couvrantEscherichia coli et éventuellement d’autres bacilles àGram négatif. La bithérapie est habituelle (C3G +aminosides, C3G + fluoroquinolones, fluoroquino-lones + aminosides). Dans les septicémies decaractère nosocomial survenant en institution,

Tableau I. – Antibiotiques et insuffisance rénale. (d’après P Dorosz Guide Pratique des médica-ments. Maloine et Dictionnaire Vidalt 1996).

Espacement des doses en fonction de la clairance de la créatinine

Dose unitaire < 10 mL/mn 10 à 50 mL/mn 50 à 80 mL/mn

Aminosides

Amikacine 7,5 mg/kg 48-96 heures 18-36 heures 12-18 heuresGentamicine 1 mg/kg 48 heures 24 heures 12 heuresTobramycine 1 mg/kg 48 heures 24 heures 12 heuresStreptomycine 7,5 mg/kg 48-72 heures 48 heures 24 heures

Fluoroquinolones

Norfloxacine 400 mg Non établie si clairance< 30 mL/mn Pas d’adaptationPéfloxacine 400 mg Pas d’adaptation posologiqueOfloxacine 200 mg 200 mg/48 h 200 mg/24-48 h Pas d’adaptationCiprofloxacine 200 mg 100 mg/12 h 100 mg/12 h si clairance

< 20 mL/mn

Céphalosporines injectables (première et deuxième générations)

Céfalotine 20 mg/kg 6-12 heures 4-6 heures 50-100 mg/kg/jCéfazoline 15 mg/kg 48-72 heures 12-24 heures 20-100 mg/kg/jCéfradine 8-15 mg/kg 24 heures 12 heures 8 heuresCéfoxitine 20 mg/kg 12-24 heures 4-6 heures 50-200 mg/kg/jCéfamandole 20 mg/kg 6-12 heures 4-6 heures 100-200 mg/kg/jCéfuroxime 20 mg/kg 12-24 heures 6-12 heures 50-100 mg/kg/jCéfotiam 8-15 mg/kg 12 heures 6-8 heures 6-8 heures

Céphalosporines injectables (troisième génération)

Ceftriaxone 1 g Pas d’adaptation posologiqueCéfotaxime 1 g 0,5 g x 3/j (si clairance< 5 mL/mn) Pas d’adaptation

posologiqueCeftazidime 1 g 0,5 à 1 g/36-48 h 1g x 1 à 2/j Pasd’adaptation

Céphalosporines orales

Céfaclor - 185 mg/j 250-375 mg/j 750 mg/jCéfadroxil - 25 mg/kg/j 25 mg/kg/j 25 mg/kg/jCéfalexine 8-15 mg/kg 24 heures 12 heures 8 heuresCéfatrizine 8-15 mg/kg 24 heures 12 heures 8 heures

Pénicillines

Pénicilline G ≤ 10 M UI/j ≤ 15 M UI/j ≤ 30 M UI/jMéticilline 30 mg/kg 8 heures 6 heures 100-200 mg/kg/jOxacilline 30 mg/kg 6-12 heures 100-200 mg/kg/j 100-200 mg/kg/jAmoxycilline 8-15 mg/kg 12-24 heures 60 mg/kg/j 30-60 mg/kg/jAmoxycilline-acideclavunalique

1 g 1 g puis 500 mg/j 1 g puis 500 mg/12 h pas d’adaptation

Ticarcilline - 2 g/24 heures 5 g/12-24 heures 5 g/8 heures

Autres antibiotiques

Clindamycine 7-15 mg/kg 12 heures 30 mg/kg/j 30 mg/kg/jThiamphénicol 7-10 mg/kg 24 heures 12 heures 8 heuresMétronidazole 30 mg/kg 24 heures 30 mg/kg/j 30 mg/kg/jÉthambutol - ≤ 5 mg/kg/j ≤ 10 mg/kg/j 20 mg/kg/j

5-0200 - Antibiotiques chez le sujet âgé

4

Page 17: Le manuel du généraliste   antibiothérapie

l’antibiothérapie doit s’élargir vers des germessouvent multirésistants (bacilles à Gram négatif),Staphylococcus aureus méti-R). L’utilisation desbêtalactamines à spectre élargi ou le recours auxglycopeptides doivent alors être envisagés.

■Endocardites bactériennes

‚ Épidémiologie

L’endocardite infectieuse intéresse un nombrecroissant de personnes âgées : inférieure à 10 %dans les années 1940, son incidence atteintactuellement 68 % à l’âge de 50 ans pour culminerentre 70 et 74 ans chez les hommes et entre 75 et79 ans chez les femmes. L’âge moyen s’élève ainsirégulièrement dans le temps, passant de 50 ansdans l’étude française de 1983, à 60 ans dansl’étude française la plus récente (1991), avec uneprépondérance masculine. L’espérance de vie enconstante progression, les procédures invasives,thérapeutiques (remplacement valvulaire...) oudiagnostiques (endoscopie, exploration vasculaire...),l’avènement de l’échographie transthoracique et del’échographie transœsophagienne, en facilitant lediagnostic, rendent compte de l’augmentation deleur incidence.

État antérieur des valves

Des conditions prédisposantes au dévelop-pement sont plus fréquemment observées chez lespatients âgés : si les valvulopathies rhumatismalessont en constante régression, les calcificationsaortiques ou mitrales, les valvulopathies aortiques(surtout rétrécissement aortique), les valvulopathiesmitrales (insuffisance mitrale, prolapsus mitral) fontactuellement le lit des endocardites sur valvesnatives. Les endocardites tricuspidiennes chez lespatients porteurs de pacemaker sont rares (0,07 à0,15 %). Rançon d’une chirurgie valvulaire plussouvent proposée au sujet âgé, l’endocardite surprothèse valvulaire est en progression avec unrisque accru chez les patients âgés (7 % chez lespatients de moins de 50 ans versus 30 % dans legroupe d’âge > 70 ans).

‚ Présentation clinique

Si le délai de prise en charge en milieucardiologique n’est pas différent de celui du patientjeune, il apparaît néanmoins que la séméiologie estmoins franche chez le sujet âgé : fièvre moinsfréquente et moins élevée, retrouvée chez 51 à 90 %des patients selon les séries, présence oumodification d’un souffle cardiaque dans 70 à 86 %des observations. L’altération de l’état général ou desmodifications du statut neurologique (confusion,accident vasculaire cérébral), peuvent faire errer lediagnostic. Dans l’étude de Terpenning, le diagnosticd’endocardite n’était initialement évoqué que chez32 % des patients de plus de 60 ans contre 61 % dela tranche d’âge 40-60 ans.

‚ Portes d’entrée

La distribution des portes d’entrée diffère selonl’âge des patients : après 50 ans les portes d’entréedigestives (17 %), urinaires (4,1 %) et iatrogéniques

(10,4 %) apparaissent plus fréquentes, à côté desclassiques portes d’entrée dentaire (26,1 %) etcutanée (5 %) [11].

‚ Germes

Les streptocoques demeurent les germes les plusfréquents (45 à 80 %) suivis par les staphylocoques.Chez les porteurs de prothèse et dans lesendocardites à porte d’entrée iatrogénique, laproportion des staphylocoques est plus élevée. Lesstreptocoques D - entérocoques en rapport avec uneporte d’entrée urinaire ou digestive, sontproportionnellement plus nombreux chez le sujetâgé que chez le sujet jeune : 29,3 % des isolats chezles patients de plus de 60 ans et 8,1 % chez lespatients de moins de 60 ans chez Van der Meer,48 % des isolats après 70 ans versus 20 % avant 70ans chez Selton-Suty. L’association Streptococcusbovis et néoplasie colique, connue depuis 1970, doitinciter le clinicien à des explorations digestives encas d’isolement de ce germe.

‚ Échocardiographie

Le diagnostic d’endocardite (présence devégétations, abcès de l’anneau) est parfois plusdifficile chez le sujet âgé : échogénécité, végétationsplus petites et moins mobiles [12]. Chez Werner, 45 %des diagnostics étaient posés par l’échographietransthoracique dans le groupe des plus de 70 anscontre 75 % de diagnostics positifs dans le groupedes moins de 50 ans. L’échographie transœsopha-gienne trouve tout son intérêt chez le sujet âgé, toutparticulièrement en cas d’endocardite sur prothèsevalvulaire.

‚ Évolution - mortalité

La mortalité hospitalière globale est stable, si l’onse réfère aux deux enquêtes françaises : 21 % en1982-1983 contre 20 % en 1990-1991 avec un tauxd’intervention chirurgicale respectivement de 28 %et de 30 %. Chez les sujets âgés, la mortalité globalevarie de 20 à 45 %. L’âge, le type de micro-organisme (S t a p h y l o c o c c u s a u r e u s ) , lesmanifestations emboliques, l’insuffisance cardiaqueapparaissent selon les séries comme des facteurs desurmortalité. Cependant, la prise en chargechirurgicale, moins fréquente chez le sujet âgé, peutprobablement expliquer une mortalité élevée chezdes patients traités médicalement. L’endocardite dusujet âgé reste donc une pathologie infectieusegrave, caractérisée par une clinique moins riche etatypique, une proportion accrue de Staphylococcusaureus (portes d’entrée iatrogénique ou cutanée,prothèse valvulaire), de streptocoques non viridans(porte d’entrée digestive) et une mortalité globaleimportante.

‚ Thérapeutique

Sur le plan thérapeutique, le clinicien doit savoiradapter son antibiothérapie au cas par cas, enanalysant le contexte : valvulopathie sous-jacente,acquisition nosocomiale ou communautaire, ported’entrée présumée et en tenant compte de l’écologiedu milieu (acquisition nosocomiale). Les schémasthérapeutiques proposés chez l’adulte [5] sont

appliqués chez le sujet âgé en assurant unmonitorage précis de l’utilisation des aminosides etdes glycopeptides :

– endocardite à staphylocoque méti-S : pénicillineM + aminoside ;

– endocardite à staphylocoque méti-R :vancomycine + aminoside (+ rifampicine siendocardite sur prothèse valvulaire) ;

– endocardite à streptocoque : pénicilline G ouamoxicilline ± aminoside.

L’utilisation de l’amoxicilline au lieu de lapénicilline G peut être judicieuse face à unstreptocoque en voie d’identification dont l’originedigestive peut toujours être suspectée dans cettetranche d’âge. Les mesures d’antibioprophylaxieélaborées lors de la dernière conférence deconsensus en 1992 méritent d’être connues etappliquées chez le patient âgé [9].

■Méningites purulentes

‚ Problématique

Moins fréquentes que les infections bronchopul-monaires et urinaires, les méningites purulentesconstituent une urgence médicale non exception-nelle et en recrudescence après l’âge de 60 ans. Leurévolution sous traitement reste péjorative avec untaux de mortalité variant entre 39 et 51 % [16] enraison d’un fréquent retard diagnostique, d’unesymptomatologie souvent atypique, des affectionsassociées ou de la prédominance de certainsgermes.

‚ Épidémiologie bactérienne

Le pneumocoque occupe le premier rang desgermes isolés avec une fréquence variant de 31 à51 % selon les études [16]. Les résultats cumulés dequatre séries de méningites purulentes cumulant uncollectif de 395 sujets âgés de plus de 65 ans placentensuite respectivement en fréquence, leméningocoque, Listeria, le Stapholococcus aureus etles entérobactéries, ces deux derniers germes separtageant la responsabilité des infections decaractère nosocomial qui concernent 10 à 15 % despatients. Dans près de 25 % des cas, il s’agit d’uneméningite puriforme dont le caractère aseptiquesévère secondaire à une antibiothérapie préalabledans près d’un cas sur deux. L’infection méningéeapparaît primitive chez près d’un patient sur deux.Dans les autres cas, elle s’intègre dans le cadre d’unesept icopyohémie, est secondaire à unepneumopathie ou à une otite moyenne oucomplique encore une brèche ostéodure-mérienne.

‚ Spécificité clinique

La méningite se caractérise, dans cette tranched’âge, par un mode de début volontiers progressif etatypique. Les formes comateuses d’emblée,psychotiques, pseudo-ictales et septicémiques,représentent plus de la moitié des cas, et rendentcompte d’un délai diagnostique excédantfréquemment 24 heures. À la phase d’état, la raideurméningée constitue le signe le plus fidèle du trépied

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méningitique, les troubles psychiques et les troublesde la conscience sont respectivement observés dans25 et 80 % des cas [16].

‚ Évolution et pronostic

L’évolution est péjorative dans près de 50 % descas. Les facteurs de mauvais pronostic sontreprésentés par le début atypique de lasymptomatologie, tout particulièrement les formessepticémiques et comateuses, témoignant d’unegravité initiale, le caractère nosocomial de l’infection,l’aspect paucicellulaire du liquide céphalorachidien,certains germes (staphylocoque, pneumocoque) et ledélai d’instauration du traitement.

‚ Recommandationsthérapeutiques actuelles

Le choix de l’antibiothérapie doit répondre à troiscritères : une excellente diffusion méningée, unebactéricidie rapide et une concentration minimaleinhibitrice ou minimale bactéricide du germe 10 à 15fois supérieure à la concentration obtenue dans leliquide céphalorachidien.

L’antibiothérapie de première intention sefondera sur les signes cliniques associés(pneumopathie, purpura, paralysie des pairescrâniennes), l’analyse cytologique du liquidecéphalorachidien, le terrain (éthylisme, splénectomie,immunodépression), la porte d’entrée et le caractèrecommunautaire ou nosocomial de l’infection. Laneuvième conférence de consensus en thérapeu-tique anti-infectieuse [10] recommande, en traitementde première intention des méningites purulentescommunautaires à examen direct négatif, enl’absence d’éléments d’orientation étiologique et designes de gravité, l’utilisation d’amoxicilline(200 mg/kg/j) ou d’une céphalosporine de troisièmegénération. Elle recommande l’util isationpréférentielle de céphalosporine de troisièmegénération en présence d’éléments d’orientation enfaveur d’un pneumocoque, l’association d’une C3Get de vancomycine (40 à 60 mg/kg/j) si l’on suspecteun pneumocoque de sensibilité diminuée à lapénicilline et/ou en présence de signes de gravité(purpura fulminans, coma profond, défaillancecardiorespiratoire), l’association d’amoxicilline et degentamicine ou cotrimoxazole en présenced’éléments d’orientation en faveur de Listeriamonocytogenes et une amoxicilline ou céphalos-porine de troisième génération en présenced’éléments d’orientation en faveur d’une méningiteà méningocoque.

■Infections digestives

‚ Infections biliaires

Les pathologies biliaires représentent la premièrecause d’admission de la personne âgée en chirurgiedigestive. L’incidence de la lithiase biliaire est deux àtrois fois plus élevée chez le sujet de plus de 60 ansque chez l’adulte jeune. Les infections des voiesbiliaires (cholécystites ou angiocholites) résultent leplus souvent d’une gène à l’écoulement biliaire par

obstacle lithiasique. La cholécystite alithiasique serencontre essentiellement en milieu de réanimationou en période postopératoire. Les infections biliairespeuvent être à l’origine de complicationslocorégionales (abcès hépatique, péritonite) et debactériémies. Le tableau clinique de l’infection biliaireétant moins spécifique que chez l’adulte jeune, iln’est pas exceptionnel qu’une de ces complicationsen soit le mode de révélation. Souvent fragilisé par lapolypathologie et la dénutrition, le sujet âgé s’avèreparticulièrement exposé à ce type d’infections et àleurs complications.

Épidémiologie bactérienneLes bactéries les plus souvent isolées sont de type

Gram négatif, avec, par ordre de fréquencedécroissante : Escher ich ia col i - K lebs ie l lapneumoniae - Enterobacter cloacae. Plus rarement ils’agit de Streptocoque viridans, de streptocoque D -entérocoque ou d’anaérobies (Bacteroïdes fragilis).

Mesures thérapeutiques

¶ Cholécystites aiguësL’attitude thérapeutique varie en fonction du délai

diagnostique et de l’état général du patient. Latendance actuelle est de traiter médicalement dansun premier temps par une double antibiothérapieparentérale reposant sur l’association céphalos-porine de deuxième ou troisième génération etaminosides, ou fluoroquinolones et aminosides, ouuréidopénicillines et aminosides. Si l’on suspecte uneinfection par Bacteroïdes, on associera éventuel-lement du métronidazole. Dans un second temps, (1à 2 mois plus tard), une cholécystectomie par voiecœlioscopique pourra être envisagée.

¶ AngiocholitesParallèlement à la double antibiothérapie (cf

supra), un drainage de la bile infectée devra êtreeffectué, soit par voie endoscopique, soitéventuellement par voie transcutanée. Dansl’éventualité d’une angiocholite lithiasique, unecholécystectomie par voie cœlioscopique seraenvisagée dans un second temps [25].

‚ Diarrhées infectieuses

ProblématiqueL’intérêt pour les diarrhées infectieuses du sujet

âgé s’est particulièrement développé ces dernièresannées, à la suite d’épidémies de gastroentéritessurvenues en milieu hospitalier et en institution. Lamorbidité et la mortalité élevées qui les caractérisent,imposent qu’elles soient reconnues précocement etmaîtrisées rapidement. Les différentes études descenters for disease control font nettement apparaître,aux États-Unis, leur mauvais pronostic dans cettetranche d’âge. Parmi les sujets décédés de diarrhéesdurant la période 1979-1987, plus d’un sur deuxétait âgé de 75 ans et plus. Plus de huit décès sur dixconsécutifs ou imputés à des diarrhées aiguësinfectieuses concernaient des sujets de plus de 60ans et le taux de mortalité par diarrhées était de 3 %chez les plus de 80 ans [18].

Facteurs favorisantsLe vieillissement du tube digestif s’accompagne

de modifications favorisant l’apparition d’infectionsintestinales. Le sujet âgé présente souvent un

ralentissement du transit intestinal d’origineiatrogénique (neuroleptiques, antidépresseurs) ouconsécutif à une pathologie neurologique ouneurovégétative telle que la parésie intestinale dudiabétique. Cette baisse de la motricité intestinalefavorise les pullulations microbiennes. Il existe parailleurs une modification de la flore digestive liée àl’hypo- ou l’achlorydrie gastrique au profit descolibacilles chez des patients dont les prises répétéesd’antibiotiques entraînent l’émergence de bactéries àGram négatif résistantes aux antibiotiques d’usagecourant.

Épidémiologie bactérienne

Le plus souvent, il s’agit de diarrhées à germesnon invasifs (Escherichia coli entérotoxigène,Staphylococcus aureus) ; plus rarement, il s’agit dediarrhées à germes invasifs dont les plus fréquentssont : Salmonella non typhi, Campylobacter jejuni,Shigella, Yersinia (la colite pseudomembraneuse àClostridium difficile sera traitée à part).

Mesures thérapeutiques

La diarrhée infectieuse menace le sujet âgé par lerisque de déshydratation et de dénutrition chez despatients souvent déjà dénutris et polypathologiques,et par le risque septique lors des diarrhées de typedysentérique.

Il convient donc de palier ces risques :– par une réhydratation et renutrition précoces,

au besoin parentérales, en secteur hospitalier enraison des conséquences potentiellement sévères ;

– en instituant un traitement antibiotique enprésence de signes évoquant une diarrhée à germesinvasifs.

Cette antibiothérapie, le plus souvent probabiliste,pourra faire appel aux fluoroquinolones et seraéventuellement réadaptée en fonction des donnéesde l’antibiogramme.

‚ Colite à Clostridium difficile

Épidémiologie

Elle représente la première cause d’infectionnosocomiale gastro-intestinale (27 %). Dans 95 %des cas, une prise d’antibiotique est responsable dudéveloppement du Clostridium difficile. Un tiers desselles étudiées après traitement antibiotique sontpositives en culture. Le plus souvent, les symptômessurviennent au court du traitement ou après un délaicourt de quelques jours, même si le délai peut êtreparfois plus long (> 6 semaines). Une seule prisemédicamenteuse peut suffir. Tous les antibiotiquesont été incriminés, mais plus fréquemment lesampicillines et leurs dérivés, les céphalosporines, laclindamycine [19].

Bactériologie

Le C difficile est un bacille anaérobie à Grampositif qui peut sporuler, n’appartenant pas à la florecolique normale, et dont il existe plusieurssérogroupes (par exemple : C toxinogène, D nontoxinogène). Le diagnostic de l’infection repose sur lamise en évidence dans les selles des toxines A et Bpar test Elisa et sur la présence de C difficile à lacoproculture. Le développement d’une colite à C

5-0200 - Antibiotiques chez le sujet âgé

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Page 19: Le manuel du généraliste   antibiothérapie

difficile peut être lié à la prolifération de germesprésents dans l’intestin mais aussi par latransmission de micro-organismes exogènes,notamment à partir du personnel soignant. Lesspores du C difficile persistent plusieurs mois etrésistent à la plupart des produits de désinfection [22].

Facteurs favorisants chez le sujet âgé [19]

L’âge est un facteur de risque majeur. Laprévalence du portage du C difficile ne semble pasaugmenter avec l’âge mais l’incidence des formessymptomatiques est plus élevée entre 70 et 80 ans(250 cas/106/an). D’autres facteurs favorisantsapparaissent : la durée de séjour en milieuhospitalier ou en institution (1 % des maladeshospitalisés recevant une antibiothérapiedéveloppent une infection à C difficile contre 1 à3/100 000 traités en ville), la promiscuité, lescoprescriptions (atropiniques, neuroleptiques,antiparkinsoniens, antiacides...), la nutrition entéraleet l’utilisation de sondes nasogastriques, ou encorel’existence d’une incontinence fécale, de plaies depression, d’un syndrome démentiel ou d’unedénutrition. L’acquisition de C difficile est complexe etimplique les porteurs asymptomatiques, le terrain, lepersonnel soignant et le milieu de vie, rendantcompte de la survenue d’épidémies en milieuhospitalier ou en institution. Les porteursasymptomatiques constituent un réservoir degermes à la source de la dissémination du germe etdes spores dans l’environnement. De hauts niveauxde colonisation sont maintenus en institution enraison des admissions nouvelles en provenance dumilieu hospitalier. Le terrain intervient par laprévalence élevée de la polypathologie, de ladénutrition, de la polymédication et des facteurs decontamination féco-orale (perte d’autonomiepsychique, incontinence sphinctérienne, sondenasogastrique...). Le personnel est un maillon de lachaîne de contamination par l’intermédiaire ducontact direct avec les selles mais également àtravers les gestes pluriquotidiens tels que la prise detempérature, l’examen clinique, l’alimentation. Leport de gants, lors des contacts avec des patientsdans une chambre à plusieurs lits, favorise ladissémination du germe. La contamination del’environnement est maximale en présence deporteurs ayant des symptômes mais l’isolemententérique n’est pas toujours réalisable en institution.

Particularités cliniques chez le sujet âgé [19]

Certaines formes cliniques et évolutivesinhabituelles de colite pseudomembraneuse serencontrent plus volontiers chez le sujet âgé, tellesque les formes fébriles, fulminantes, prolongées etrécurrentes. D’évolution insidieuse ou d’apparitionbrutale, les formes fulminantes réalisent un tableaude mégacôlon toxique (choc hypovolémique, fièvre,iléus paralytique) et évoluent, en l’absence detraitement rapide, vers une péritonite parperforation. Les formes prolongées sont à l’origined’une hypoalbuminémie, d’une déshydratation et detroubles hydroélectrolytiques. Dans les formesrécurrentes avec symptômes, les rechutes ne sontpas liées au type de traitement de l’épisode initial,surviennent parfois plusieurs semaines après son

interruption et pourraient être favorisées parl’existence d’une diverticulose colique. L’isolementde C difficile dans les selles de patients en institutionfaisant l’objet d’une antibiothérapie, est associé à unexcès de mortalité à 12 mois (83 % de décès chez lespatients à coproculture positive contre 50 % chez lespatients non infectés).

Traitement

Deux antibiotiques peuvent être proposés :métronidazole à la posologie de 250 mg quatre foispar jour ou vancomycine à la posologie de 125 mgquatre fois par jour par voie orale. Tout traitementralentisseur du transit doit être proscrit. La guérisonest obtenue dans 96 à 98 % des cas. La diarrhées’amende en général vers le quatrième oucinquième jour. Quinze jours de traitement sontnécessaires. On observe 10 à 20 % de récurrencescliniques dans les trois premières semaines nerésultant pas toujours d’une résistance au traitementutilisé. Le même antibiotique peut être réutilisé dansce cas. Des études semblent montrer une diminutiondes récurrences cliniques en associant Saccharo-myces boulardii à l’antibiotique prescrit en premièreintention. L’adjonction de Saccharomyces boulardii àla dose de 500 mg deux fois par jour, permettrait dediminuer les rechutes après traitement desrécurrences. Dans l’éventualité d’une impossibilitéd’utilisation de la voie orale et notamment en cas demégacôlon toxique, la voie intraveineuse utilisant lemétronidazole sera préconisée à la posologie de500 mg toutes les 6 heures. En cas de dilatationcolique majeure, un lavement intracolique devancomycine pourra être envisagé au cours d’unecoloscopie de décompression.

‚ Complications infectieusesde la diverticulose colique

Problématique

La prévalence de la maladie diverticulaire estestimée à plus de 50 % après 80 ans et pourraitconcerner jusqu’à 2/3 de la population de plus de 70ans avec deux pics de fréquence : le premier entre50 et 60 ans (un tiers des cas), le second après 80ans (un quart des cas). L’évolution actuelle de ladémographie laisse entrevoir l’augmentation de lapathologie diverticulaire [4] et de ses complications :infectieuses (sigmoïdite diverticulaire, abcèspérisigmoïdien, péritonite généralisée, fistule interneou externe), hémorragiques, occlusives sur sténosecicatricielle. La diverticulose sigmoïdienne secomplique de sigmoïdite diverticulaire dans 10 à40 % des cas. Fréquemment paucisymptomatique,la sigmoïdite diverticulaire est assez souventdécouverte tardivement. Principalement consécutiveà ses complications infectieuses, la mortalité de ladiverticulose est étroitement corrélée à l’âge :inférieure à 0,5/100 000 avant 65 ans, égale à30/100 000 chez la femme de plus de 80 ans.

Épidémiologie bactérienne

Elle est le plus souvent plurimicrobienne etassocie : entérobactéries (Escherichia coli surtout),anaérobies (Bacteroïdes fragilis, Peptococcus,Clostridies), voire des entérocoques (S fecalis le plus

souvent). La diffusion hématogène de ces bactérieset la libération de toxines sont à l’origine dedéfaillances multiviscérales.

Mesures thérapeutiques

¶ Sigmoïdites diverticulaires– Alimentation parentérale exclusive.– Sonde nasogastrique d’aspiration si syndrome

occlusif.– Antibiothérapie parentérale orientée vers les

bactéries sus-citées, associant par exemple : C3G +aminoside + métronidazole, amoxicilline-acideclavulanique + aminoside + métronidazole, uréidopénicilline + aminoside ou fluoroquinolone.

– Traitement chirurgical dont l’indication et lesmodalités seront à discuter secondairement.

¶ Abcès périsigmoïdien– Drainage chirurgical.– Antibiothérapie selon les principes déjà cités.– Résection sigmoïdienne secondaire.

¶ Fistule– Résection chirurgicale.– Antibiothérapie.

¶ Péritonites– L’attitude chirurgicale est variable selon le

terrain et l’équipe chirurgicale.– Le principe de l’antibiothérapie reste identique.

■Infections ostéoarticulaires

non tuberculeuses

Le caractère de gravité des infectionsostéoarticulaires du sujet âgé tient au fait qu’ellessont fréquemment à l’origine d’une aggravation dustatut fonctionnel quand elle ne mettent pas en jeule pronostic vital par une diffusion septicémique etdes localisations septiques à distance. Leur caractèrefréquemment paucisymptomatique rend compted’un délai d’instauration du traitement, parfoisretardé, pouvant favoriser le passage à la chronicité.

‚ Épidémiologie bactérienne

Staphylocoque aureus est au premier rang descauses de spondylodiscites non tuberculeuses quisurviennent préférentiellement après 60 ans [26]. Lesbacilles à Gram négatif occupent le deuxième rangavec par ordre de fréquence décroissante :Escherichia oli, Pseudomonas, Proteus, Serratia,Salmonel la, Klebsiel la et Enterobacter . Cesspondylodiscites se localisent dans plus de la moitiédes cas à l’étage lombaire, et sont le plus souventconsécutives à une dissémination hématogène àpartir d’une infection cutanée ou urinaire. Lesostéoarthrites infectieuses périphériques affectentpréférentiellement le genou (42 à 45 %), la hanche(14 à 36 %), le poignet (17 %) et l’épaule (11 %). Leslésions arthrosiques et de polyarthrite rhumatoïdesont reconnues comme facteurs favorisants degreffe bactérienne. Staphylococcus aureus est lepremier germe en cause devant les bacilles à Gramnégat i f dominés par E s c h e r i c h i a c o l i etPseudomonas.

Antibiotiques chez le sujet âgé - 5-0200

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Page 20: Le manuel du généraliste   antibiothérapie

‚ Critères pharmacocinétiqueset microbiologiques

L’antibiothérapie doit couvrir le spectre desgermes en cause et assurer une bonne diffusionosseuse, tenant compte des caractéristiquespharmacocinétiques de la personne âgée. Ce choixse portera donc préférentiellement vers lespénicillines du groupe M, les céphalosporines detroisième génération injectables, la fosfomycine, lesaminosides, la pristinamycine, les quinolones denouvelle génération et la rifampicine.

‚ Recommandations thérapeutiques

La nécessité d’une double antibiothérapieparentérale, couplée à un lavage et drainagearticulaires, impose une hospitalisation. Lesinfections à staphylocoque doré et staphylocoquecoagulase négative méticillinosensible relèventd’une association pénicilline M-aminoside,céfazoline-aminoside, pénicilline M-rifampicine oufluoroquinolone-rifampicine. Les infectionsostéoarticulaires à staphylocoque doré etstaphylocoque coagulase négative méticillino-résistant devront faire recourir à l’association

vancomycine-acide fusidique ou céfotaxime-fosfomycine avec relais oral par pristinamycine-rifampicine. La troisième conférence de consensusen thérapeutique anti-infectieuse [8] recommandel’association céphalosporine de troisièmegénération-aminoside ou céphalosporine detroisième génération-fluoroquinolone dans lesinfections ostéoarticulaires à cocci ou bacilles à Gramnégatif (sauf Pseudomonas ) et l’associationceftazidime-aminoside ou aztréonam ouceftazidime-fluoroquinolone dans les infections àPseudomonas aeruginosa.

Claude Jeandel : Professeur de médecine interne et de gérontologie.Hubert Blain : Assistant chef de clinique.

Service de médecine interne B, CHU de Nancy-Brabois, 54500 Vandœuvre-Les-Nancy, France.

Toute référence à cet article doit porter la mention : C Jeandel et H Blain. Antibiotiques chez le sujet âgé.Encycl Méd Chir (Elsevier, Paris), Encyclopédie Pratique de Médecine, 5-0200, 1998, 8 p

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5-0200 - Antibiotiques chez le sujet âgé

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Page 21: Le manuel du généraliste   antibiothérapie

Antibiotiques et reins

H Mommeja-Marin, F Martinez

L a toxicité rénale des antibiotiques est observée surtout avec les aminosides. Les traitements courts, le respectdes doses ont réduit son risque.

© Elsevier, Paris.

■Introduction

En cas d’insuffisance rénale, il faut adapter lesdoses de certains antibiotiques, pour éviterl’expression de leurs effets secondaires et ou lerisque d’interaction médicamenteux.

■Néphrotoxicité des antibiotiques

Elle est largement dominée par la toxicité rénaledes aminoglycosides, qui reste une des premièrescauses d’insuffisance rénale aiguë iatrogène.

‚ Aminoglycosides

Généralités

Les aminoglycosides ont tous une néphrotoxicitédirecte par concentration dans le cortex rénal. Ilsinduisent des lésions de nécrose des cellulestubulaires proximales. Cette toxicité se manifesteessentiellement par la survenue 5 à 10 jours après ledébut du traitement, d’une insuffisance rénaleorganique, le plus souvent à diurèse conservée.Quand elle complique une insuffisance rénalepréexistante, cette néphrotoxicité n’est parfois quepartiellement réversible. Cette toxicité est dosedépendante. Une bonne adaptation posologique, etle maintien des concentrations sériques dans lesfourchettes thérapeutiques sont toujoursnécessaires. En revanche, elles n’excluent pas lapossibil ité de survenue d’un accident denéphrotoxicité.

Facteurs prédisposants

Ce sont des situations essentielles à connaître carle risque de néphrotoxicité des aminosides est trèsnettement majoré en leur présence. Dans certainesconditions d’insuffisance rénale ou de cirrhose, lerecours aux aminosides ne doit être envisagé quedans des situations exceptionnelles, quand il n’existepas d’alternative thérapeutique satisfaisante.

Prévention de la néphrotoxicité

Sauf cas rares, les aminosides doivent êtreutilisées de façon brève, moins de 8 jours sansdépasser les posologies recommandées dans leVidal. Il est nécessaire de connaître la fonction rénaleen particulier l’estimation de la clairance de lacréatinine avant toute prescription, cf « Posologie desantibiotiques en cas d’insuffisance rénale ».

‚ Bêtalactamines

Pénicillines

La néphrotoxicité des pénicillines (groupes G, V, A,M, uréidopénicillines et carboxipénicillines) est rare etgénéralement non prévisible. Si l’on excepte laméticilline, on peut même dire qu’elle estexceptionnelle. Quand elle survient, cettenéphrotoxicité résulte d’un accident immuno-allergique touchant l’interstitium rénal (néphriteinterstitielle aiguë). Les signes rénaux associent defaçon variable hématurie micro- ou macroscopique,protéinurie et augmentation de la créatinine. Dessignes généraux sont possibles : fièvre, arthralgies,éruption cutanée. Biologiquement, outre la

dysfonction rénale, on peut constater unehyperéosinophilie, une cytolyse hépatique, uneéosinophilurie. Si un accident de ce type survient, ilest recommandé de consulter un néphrologue.L’intérêt d’un traitement par corticoïdes n’est pasdémontré. Sauf exception, ce type d’accident doitfaire renoncer à l’utilisation ultérieure de l’ensembledes bêtalactamines car des réactions croisées sontpossibles.

Céphalosporines

Quand elles étaient administrées à fortes doses, lacéfaloridine et la céfalotine (céphalosporines depremière génération) ont été rendues responsablesd’accidents de nécroses tubulaires. Pour les autrescéphalosporines, la toxicité rénale, de typeimmunoallergique, est très rare (cf « Les pénicillines »).

‚ Vancomycine et téicoplanine

Ces médicaments possèdent un faible potentielnéphrotoxique. La néphrotoxicité est plus fréquentechez l’insuffisant rénal, si un autre médicamentnéphrotoxique est administré simultanément ou encas de posologie excessive. Une adaptationposologique, aidée par la surveillance desconcentrations plasmatiques, est indispensable encas d’altération même modérée de la fonctionrénale.

‚ Sulfamides

Les sulfamides peuvent induire, de façon rare, desaccidents rénaux immunoallergiques. La sulfadiazinepeut entraîner la formation de cr istauxmédicamenteux dans les tubules rénaux. Laprécipitation de ces cristaux peut induire uneobstruction tubulaire ou la formation d’une véritablelithiase médicamenteuse. Une hydratationabondante (supérieure à 2 000 mL/j) et alcaline (eaude Vichy ou gélules de bicarbonate) favorise lasolubilité des cristaux de cette molécule dans lesurines.

‚ Autres antibiotiques

De rares cas de néphrites interstitielles aiguës ontété rapportés avec la rifampicine, l’érythromycine,les fluoroquinolones.

Facteurs pouvant majorer la toxicitérénale des aminoglycosides

✔ administration inadaptée : tropprolongée ou à des doses tropfortes ;✔ insuffisance rénale préexistantemême mineure ;✔ néphropathie chronique même sansinsuffisance rénale ;✔ âge avancé ou prématurité ;✔ cirrhose hépatique ;✔ déshydratation ;✔ diabète mal équilibré ;✔ association à des traitementspouvant altérer la fonction rénale :diurétiques, produits de contrastesiodés, amphotéricine B, ciclosporine,cisplatine, vancomycine.

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■Posologie des antibiotiques en

cas d’insuffisance rénale

Généralités

De très nombreux antibiotiques sont éliminéspar voie rénale. L’adaptation de la posologiedes antibiotiques au niveau de fonction rénalepermet d’éviter des accidents de néphrotoxicité,mais aussi des effets secondaires extrarénaux. Acôté de leur potentiel néphrotoxique, les amino-sides, la vancomycine et la téicoplanine fontcourir un risque de toxicité cochléovestibulaire,qui est nettement majoré en cas d’insuffisancerénale. Les pénicillines à fortes doses, lesfluoroquinolones, l’éthambutol, la nitrofuran-toïne, l’acide nalidixique, la colistine, l’isoniagideRimifon® comportent un risque de toxiciténeurologique centrale ou périphérique selon lescas.

Schématiquement, l’adaptation posologiquepeut être obtenue en réduisant la dose unitaireet en gardant le même intervalle entre lesadministrations ou en espaçant les intervallesd’administration et en gardant les mêmes dosesunitaires. Pour un antibiotique devant maintenirpendant un temps suffisant une concentrationsanguine supérieure à la concentrationminimale inhibitrice du germe, il est souventpréférable de conserver les intervalles habituelset de réduire la dose unitaire (bêtalactamines engénéral ) . Pour d’autres antibiot iques(aminosides, fluoroquinolones), il semble plus

intéressant d’espacer les administrations (parfoisde façon importante) en gardant la doseunitaire. Dans tous les cas il est essentiel d’êtreen accord avec les recommandations fourniesdans le dictionnaire Vidal.

Comment estimer la fonction rénale

Il ne faut pas méconnaître une insuffisancerénale avant de débuter certains antibiotiques.Le risque d’insuffisance rénale est possible dansde nombreuses situations pathologiques(patients âgés, hypertendus, insuffisantscardiaques, diabétiques, cirrhotiques...). Souvent,la seule mesure de la créatinine plasmatiquereflète mal le niveau réel de la fonction rénale. Ilfaut préférer la clairance de la créatinine,estimée à partir de la formule de Cockroft etGault.

Quelques règles générales d’utilisation desantibiotiques chez l’insuffisant rénal

■ La prescription d’un antibiotique, quel qu’il soit,chez un patient dialysé, transplanté ou ayant uneclairance de la créatinine inférieure à 15 mL/min doitêtre effectuée en accord avec l’avis du spécialiste(néphrologue ou réanimateur).

La céfalotine et la céfaloridine, la colistine, l’acidenalidixique, la nitrofurantoïne, les tétracyclines (saufdoxycycline et minocycline) sont à proscrire en casd’insuffisance rénale (même modérée)

■ Les aminoglycosides, la vancomycine, latéicoplanine ne seront utilisés chez l’insuffisantrénal qu’en l’absence d’alternative thérapeu-tique. Ils seront alors utilisés en suivant lesrecommandations du dictionnaire Vidal,l’adaptation posologique étant nécessaire dès lamoindre réduction de fonction rénale. Autroisième jour, il faudra vérifier que le tauxrésiduel est en dessous du seuil toxique.Pendant le traitement, la surveillance de lafonction rénale (créatinine) est nécessaire.

■ Pour les pénicil l ines en général, lesfluoroquinolones, le cotrimoxazole : l’adaptation desdoses n’est nécessaire que si la clairance de lacréatinine est inférieure à 30 mL/min (lesrecommandations à suivre sont celles dudictionnaire Vidal).

■ Les macrolides et les synergistines, ladoxycycline et la minocycline, la rifampicine, lemétronidazole sont utilisables sans réduction dedose.

Hervé Mommeja-Marin : Interne des hôpitaux de Paris.Frank Martinez : Ancien chef de clinique-assistant.

Service de néphrologie, groupe hospitalier Pitié-Salpêtrière, 75651 Paris, France.

Toute référence à cet article doit porter la mention : H Mommeja-Marin et F Martinez. Antibiotiques et reins.Encycl Méd Chir (Elsevier, Paris), Encyclopédie Pratique de Médecine, 5-0180, 1998, 2 p

R é f é r e n c e s

[1] Cronin RE, Henrich WL. Toxic nephropathy. In : Brenner B ed. The Kidney.WB Saunders Philadelphia : 1996 : 1680-1711

[2] Deray G, Martinez F, Baumelou A, Jacobs C. Néphrotoxicité des médica-ments. Principes de la prescription médicamenteuse chez le patient insuffisantrénal. Médicaments néphroprotecteurs.Encycl Med Chir(Elsevier, Paris), Théra-peutique, 25-364-A-10, 1997 : 1-7

[3] Kaloyanides GJ. Aminoglycoside nephropathy. In : Schrier RW, GottschalkCW eds. Diseases of the Kidney. Boston : Little Brown, 1993 : 1131-1164

[4] Talbert RL. Drug dosing in renal insufficiency.J Clin Phamacol1994 ; 34 :99-110

Formule de Cockroft et Gault pourestimer la clairance de la Ccr(créatinine)Hommes :Ccr (mL/min) = [140 - âge (ans)]x poids (kg) x 1,23 / créatininémie(µmol/L)Femmes :Ccr (mL/min) = [140 - âge (ans)]x poids (kg) x 1,05 / créatininémie(µmol/L)

5-0180 - Antibiotiques et reins

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Page 23: Le manuel du généraliste   antibiothérapie

Antifongiques

K Chemlal, P Yeni

L e traitement initial des mycoses profondes est institué dans l’immense majorité des cas en milieu hospitalier enraison, d’une part de la gravité de ces infections et d’autre part, de la toxicité de certaines molécules

antifongiques lorsqu’elles sont administrées par voie parentérale. Si un traitement prolongé est nécessaire, la qualitéde la prise en charge ultérieure est le meilleur garant d’un traitement optimal. A ce titre, le rôle du médecin praticiendevient alors essentiel. Ces molécules, également disponibles sous d’autres formes galéniques, sont par ailleurslargement employées en médecine de ville dans le traitement des mycoses superficielles.© Elsevier, Paris.

■Antifongiques utilisés

dans les mycoses superficielles

‚ Molécules disponibles per os

Les mycoses superficielles peu graves maisinvalidantes, sont fréquentes et représentées par lesdermatophytes, l’agent du pityriasis versicolor et lescandidoses (essentiellement Candida albicans).

Les dermatophytes sont des champignonsfilamenteux ayant une affinité particulière pour lakératine de la peau et des phanères de l’homme etdes animaux, sans aucune affinité pour lesmuqueuses et les viscères profonds. Les agentsresponsables des dermatophytoses appartiennentaux genre Microsporum, Epidermophyton etTrichosporon qui possèdent des caractéristiquesmorphologiques en culture permettant de lesdifférencier. Les aspects cliniques induits par ceschampignons sont multiples et varient en fonctionde leur localisations ; la peau glabre (herpès circiné),les plis (eczéma marginé de Hébra), les poils (sycosiset folliculite), les cheveux (teigne et favus) et lesongles (onychomycoses).

Griséofulvine

La griséofulvine (Griséfulinet, Fulcine Fortet) estun antifongique fongistatique dont le spectred’activité est strictement limité aux dermatophytes.Elle est inactive sur Candida et l’agent du pityriasisversicolor. Cet antifongique est bien absorbé aprèsadministration orale et est métabolisé au niveauhépatique en un substrat inactif. La liaison auxprotéines plasmatiques est forte, de l’ordre de 80 %.Il est éliminé principalement dans les fécès. Lesinteractions médicamenteuses sont importantes àconnaître. La griséofulvine diminue l’efficacitécontraceptive des œstroprogestatifs oraux (nécessitéd’une contraception mécanique associée) etaugmente le catabolisme des anticoagulants oraux(adaptation de la posologie). Elle induit une baisse dutaux circulant de ciclosporine. Les effets secondaires

principaux sont mineurs et régressent à l’arrêt dutraitement (céphalées, troubles digestifs,photosensibilisation, effet antabuse). L’hémo-gramme doit être surveillé lors des traitements delongue durée en raison de la possible survenued’une leucopénie ou d’une anémie. Des hépatitescholestatiques ont été rapportées. La griséofulvineest disponible en comprimés et en pommade. Il n’y apas de forme injectable. La posologie usuelle est de10 à 20 mg/kg/j. La durée du traitement varie enfonction de la pathologie, de 2 à 4 semaines dans leslésions de la peau glabre à 3 à 6-12 mois dans leslésions du cuir chevelu et des ongles.

Terbinafine

La terbinafine (Lamisilt) appartient à la classe desallylamines. Le mécanisme d’action de ce nouvelantifongique est proche de celui des dérivésimidazolés car il agit en inhibant la synthèse del’ergostérol par une voie enzymatique indépendantedu cytochrome P450. La terbinafine esr fongicidevis- à-vis des dermatophytes et fongistatique vis-à-visde C albicans. L’absorption du produit est bonne (picsérique obtenu 1heure après ingestion), la liaisonaux protéines plasmatique forte (> 70 %) etl’élimination essentiellement urinaire. La forme oraleest inactive dans le pityriasis versicolor. Laterbinafine est contre-indiquée en cas d’insuffisancerénale ou hépatique sévère. En raison d’un passagedans le lait maternel, la terbinafine ne doit pas êtreprescrite au cours de l’allaitement. Les effetssecondaires les plus fréquents sont digestifs(nausées, anorexie, perte du gout). Les éruptionsurticariennes ne sont pas rares et des toxidermiessévères (syndrome de Lyell, pustulose aiguëexanthématique généralisée) ont été rapportées.Des leuconeutropénies et des hépati tescholestatiques sont également décrites. Laterbinafine est disponible en comprimés (dosés à250 mg) et indiquée essentiellement dans lesdermatophytoses très étendues ou résistantes aux

traitement locaux et dans les onychomycoses aprèsprélèvements mycologiques. La posologie usuelleest de 250 mg/j.

Les formes topiques (Lamisilt 1 % crème) sontutilisées dans les dermatophytoses, les candidosescutanées et dans le pityriasis versicolor. Il n’y a pasde forme injectable.

Kétoconazole

Le kétoconazole (Nizoralt) est indiqué dans lesmycoses superficielles extrêmement étendues ourésistantes aux antifongiques locaux aprèsprélévements mycologiques. Dans les onychomy-coses, le Nizoralt à la posologie de 200 à 400 mg/jest efficace mais la tolérance du traitement doit êtresurveillée.

Itraconazole et fluconazole

Bien que ces deux molécules soient efficaces dansle traitement des onychomycoses grâce à unediffusion particulièrement rapide dans la tabletteunguéale, elles ne sont pas utilisées dans cetteindication.

‚ Formes topiques

Polyéniques (tableau I)

Les polyéniques à usage topique sont utilisésessentiellement dans les candidoses oropharyngéeset les vaginites à Candida.

Imidazolés (tableau II)

Les dérivés imidazolés en forme topique sontutilisés dans les dermatophyties de la peau glabre,les teignes du cuir chevelu, les folliculitestrichophytiques et les sycosis de la barbe, lesintertrigos des grands plis et des espaces inter-digitaux et les candidoses cutanéomuqueuses etgénitales. De nombreuses spécialités sontcommercialisées mais leur efficacité et leur tolérancesont équivalentes.

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Amorolfine et ciclopiroxolamine

L’amorolfine (Locérylt) est disponible en vernis etutilisée dans les onychomycoses. La ciclopiroxo-lamine (Mycostert) est disponible en vernis, encrème (1 %) et en solution (1 %). Elle est utilisée dansles dermatophytoses des plis et des ongles.

Sulfure de sélénium

Le sulfure de sélénium (Selsunt) a un spectreétroit, actif sur Pitiyrosporon orbiculare, agent dupityriasis versicolor. Avant la mise à disposition destopiques imidazolés, il était utilisé dans les dermitesséborrhéiques du cuir chevelu. L’acceptancemédiocre de ce produit fait qu’il n’est plus guèreutilisé.

■Antifongiques utilisés

dans les mycoses profondes

Les infections fongiques systémiques sont desinfections sévères dont l’évolution sans traitementest mortelle. Elles surviennent essentiellement chezdes patients immunodéprimés. L’incidence de cesinfections est en augmentation ces dernièresannées, du fai t d ’un accroissement desthérapeutiques immunosuppressives utilisées dansles cancers solides et les hémopathies, et au coursdes greffes d’organes ou de moelle osseuse. Chez lespatients infectés par le virus de l’immunodépressionhumaine (VIH), l’émergence de mycoses rares, le plussouvent importées, pose dans un certain nombre decas des problèmes thérapeutiques difficiles.

Certaines particularités des traitementsantifongiques méritent d’être soulignées :

– le choix en matière de molécules est assezrestreint ;

– certaines d’entre elles sont de maniementdifficile et sont mal tolérées ;

– l’interprétation de l’antifongigramme estdifficile car la corrélation sensibilité in vitro etefficacité clinique n’est pas claire.

‚ Amphotéricine B

Mécanismes d’action

L’amphotéricine B (Fungizonet) a longtemps étéle seul antifongique majeur utilisé dans le traitementdes mycoses profondes. Cette molécule est unpolyénique dont le mécanisme d’action, assezcomplexe, n’est pas totalement élucidé. L’ergostérolest le principal constituant membranaire des cellulesfongiques alors que les lipides membranaires desmammifères sont essentiellement composés decholestérol. L’amphotéricine B (AmB) possède uneaffinité élevée pour l’ergostérol membranaire descellules fongiques et s’insère dans la membranecellulaire. Cette interaction est responsable d’undéséquilibre ionique au sein de la cellule provoquantdes troubles de la perméabilité, une accumulation deradicaux toxiques et une fuite ionique aboutissant àla mort cellulaire. L’affinité non négligeable de l’AmBpour le cholestérol membranaire des cellules desmammifères explique sa toxicité chez l’homme.

Effets secondaires et toxicité de l’AmB(tableau III)

La toxicité rénale de l’AmB est constante,réversible à l’arrêt du traitement et passe pardifférents mécanismes. La toxicité hématologique estplus rare. L’intolérance immédiate lors del’administration d’AmB se traduit par la survenue defrissons et de fièvre pendant la perfusion, ou dans lesheures qui suivent, chez plus de la moitié despatients traités et représente une complication trèsinvalidante qui peut parfois conduire à l’arrêt dutraitement. Cette intolérance immédiate et la toxicité

rénale peuvent être prévenues ou tout du moinsdiminuées par le respect de certaines règles simplesde prescriptions.

Indications

L’AmB, malgré sa toxicité, est très largementprescrite car elle reste l’antifongique de référencedans un grand nombre d’infections en particulier austade initial du traitement d’une l’infection sévère.

Elle est indiquée dans :– le traitement des septicémies à Candida des

patients neutropéniques ;– le traitement des infections profondes à

Candida (endocardite, ostéite, endophtalmie) ;– le traitement initial des aspergilloses invasives ;– le traitement initial des infections à

cryptocoque ;– le traitement initial des formes graves des

infections à Histoplasma capsulatum ;– le traitement des infections à Penicillium

marneffei ;

Tableau I. – Polyéniques locaux.

DCI Nom commercial Présentation Indications

Amphotéricine B Fungizonet Comprimé gynécologique,suspension capsule, lotion,pommade Candidoses oropharyn-

gées et génitalesNystatine Mycostatinet Comprimé gynécologique,pommade, dragées

Tableau II. – Principaux imidazolés locaux (liste non exaustive).

DCI Nom commercial Présentation Indications

Bifonazole Amycort Crème, solutionButoconazole Gynomyct Ovule

Econazole Pévarylt, Lait, crème, spray Candidoses et autreslévurosesGynopévarylt Ovule

Clotrinazole Trimystent CrèmeIsoconazole Fazolt Crème, ovule Dermatophytes

Kétoconazole Kétodermt Crème,shampoing monodose

Miconazole Daktarint Comprimé, lotion, poudre,gel, ovule

Mycoses à champignonsfilamenteux

Sulconazole Mykt 1 % crème, solution

Tableau III. – Toxicité de l’amphotéricine B.

Toxicité Mécanismes Conséquences

Glomérulaire Vasoconstriction artérielle ↓ Filtration glomérulaireTubulaire Toxicité directe Acidose tubulaire distaleImmédiate Libération des cytokines ? Fièvre, frissons

Hématologique Baisse de l’érythropoïétine Baisse de l’hématocrite

Règles d’utilisation de l’AmB

Pour prévenir l’intolérance immédiate✔ Corticoïdes : 0,5 mg/kg IV avant lamise en place de la perfusion.✔ Paracétamol : 500 mg à 1g avant lamise en place de la perfusion.Pour atténuer la toxicité rénale✔ Hydratation suffisante au sérumphysiologique.✔ Apport de potassium et demagnésium

Règles de prescription de l’AmB

✔ Administration dans du glucosé à5 %.✔ Dose test de 1mg IV (chocanaphylactique possible maisexceptionnel).✔ Posologie rapidement progressive(pleine dose en 3 jours dans lesinfections graves).✔ Posologie usuelle : 0,7-1 mg/kg/j enperfusion de 4 à 6heures.✔ Surveillance quotidienne de lafonction rénale et de la diurèse.✔ Surveillance quotidienne du sited’injection (risque dethrombophlébite locale).✔ Attention aux facteursnéphrotoxiques associés,médicamenteux (AINS, diurétiques)et radiologiques (contraste iodé).

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– le traitement des infections à Fusarium sp ensachant que le pronostic est lié à la restaurationhématologique ;

– le traitement des leishmanioses viscérales ;– les formes sévères des infections à

Sporotrichum schenkii (sporotrichose) ;– le traitement d’entretien des infections à

cryptoccoques des patients infectés par le VIH (si lefluconazole n’est pas disponible ou contre-indiqué) àla dose de 1mg/kg/semaine ;

– en traitement empirique des patients neutropé-niques restant fébriles sous une antibiothérapie àlarge spectre (incluant la vancomycine).

Nouvelles formes galéniques d’AmB

La mise au point de nouvelles formulationsd’AmB (tableau IV) a pour but essentiel de diminuerl’intolérance immédiate et la toxicité rénale de cettemolécule. La vectorisation dans les liposomespermet d’améliorer l’index thérapeutique de l’AmBen diminuant sa toxicité tout en maintenant uneefficacité identique. Seule l ’a m p h o t e r i c i nB-lipid-complex (ABLC), Abelcett, a l’autorisation demise sur le marché (AMM) en France chez despatients dont l’infection justifie un traitement parl’AmB et alors que celle-ci est contre-indiquée oun’est plus tolérée (apparition d’une insuffisancerénale par exemple). La place de l’AmB dansl’Intralipidet mérite d’être précisée car si elle al’avantage d’un faible coût, la néphrotoxicité nesemble que partiellement réduite.

Les doses utilisées de ces nouvelles formulationssont supérieures à celle de l’AmB classique (de l’ordrede 3-5 mg/kg/j) et les taux de guérison sontsuperposables.

‚ Flucytosine

Mécanismes d’action

La fluorocytosine (Ancotilt), après transformationpar une enzyme spécifique du champignon,provoque la mort cellulaire à la fois par le biais deson incorporation dans l’ARN cellulaire et par uneinhibition de la synthèse d’ADN.

Effets secondaires et toxicité

La toxicité essentielle de la flucytosine esthématologique et corrélée à l’existence d’un

surdosage éventuel. En effet, les pancytopéniessurviennent le plus souvent lorsque les taux sériquessont supérieurs 100 µg/mL. Le dosage est effectué 2heures après l’administration du produit (pic) et justeavant l’administration suivante (résiduelle). Lors del’administration concommitante d’AmB, la baisse dela fil trat ion glomérulaire peut favoriserl’accumulation de fluorocytosine et majorer ainsi satoxicité. Les autres effets secondaires sontessentiellement d’ordre digestif (diarrhées) oucutanées (éruption). La posologie est de 150mg/kg/jrépartie en trois prises. La fluorocytosine estdisponible par voie intraveineuse (IV) et per os.

Indications

La flucytosine ne s’administre pas en mono-thérapie en raison du risque d’émergence derésistance secondaire. En association avec l’AmB elleest utilisée dans les infections à cryptocoque et lessepticémies à Candida (lorsque la souche estsensible).

‚ Azolés (tableaux V, VI, VII, VIII)

Généralités

Les dérivés azolés ont en commun le mêmemécanisme d’action. Ils agissent sur le cytochromeP450 des mitochondries, indispensable à latransformation du lanostérol en ergostérol, principalconstituant des membranes fongiques. Cettemodificat ion des const i tuants l ipidiquesmembranaires conduit à la mort cellulaire. De plus,ils inhibent la respiration endogène et latransformation levure- forme filamenteuse. Il existeun grand nombre de dérivés à usage topique et unnombre plus restreint de molécules utilisables per os

ou IV. Ce sont ces dernières que nous détailleronsdans le chapitre suivant. Le tableau V résume lesprincipales caractéristiques pharmacocinétiques desazolés actuellement utilisés.

Miconazole

Le miconazole (Daktarint) a été le premier azolédisponible par voie IV. L’absorption est médiocre etvarie en fonction des patients. L’intolérance digestiveest fréquente lorsqu’il est administré per os. En fait,les indications du traitement injectable sontrestreintes depuis la mise à disposition d’azolésmieux tolérés et mieux absorbés. Elle peut être utileen dernier recours dans les infections àScedosporium sp.

Kétoconazole

Le kétoconazole (Nizoralt) a été le premier azolébien absorbé après administration orale. Les effetssecondaires sont peu marqués et rares. Les troublesdigestifs imposent rarement l’arrêt du traitement. Latoxicité hépatique est la plus relevante cliniquementse traduisant par une cytolyse modérée, le plussouvent asymptomatique, touchant moins de 10 %des patients. Des cas d’hépatites mortelles ayant étérapportées, il convient d’arrêter le traitement lorsqueles enzymes hépatiques sont supérieures à trois foisla normale. L’interférence hormonale observée avecle kétoconazole concerne essentiellement latestostérone et le cortisol et consiste en une chutetransitoire de la testostéronémie et une chute ducortisol sanguin. Chez l’homme, diminution de lalibido, impuissance, oligospermie et gynécomastieont été rapportées au cours de traitement. Ces effetssecondaires sont réversibles à l’arrêt du traitement.Enfin, le kétoconazole est contre-indiqué chez lafemme enceinte.

¶ IndicationsElles sont limitées aux mycoses rares comme les

infections à Scedosporium sp et les basidiobolomy-coses. Le kétoconazole est efficace dans lesinfections profondes à Malassezia furfur (agent dupytiriasis versicolor). Efficace également surHistoplasma et Blastomyces, le kétoconazole estdélaissé au profit de l’itraconazole.

Fluconazole

Le fluconazole (Triflucant) est un bis-triazoléhydrosoluble et donc administrable par voieveineuse. Son absorption est bonne, proche de95 %. C’est une molécule très bien tolérée. Ses effetssecondaires sont mineurs et essentiellement d’ordre

Tableau IV. – Amphotéricine B et formulations lipidiques. Données comparatives de toxicité et decoût.

Molécule Nomcommercial

Posologie(mg/kg/j)

Toxicité* Coût**

Immédiate Rénale FF

AmB Fungizonet 0,6-1 - - 20

ABCD Amphocilt 1-4 ↓ ↓↓ ND

ABLC Abelcett 1-5 ↓↓ ↓↓ 500

AmB-liposomale AmBisomet 1-5 ↓↓↓ ↓↓ 1500

AmB-Intralipidet - 1-3 ↓↓ ↓ 50

* Par rapport à la Fungizonet ; ** Pour 50 mg de produit (prix approximatif) ; AmB : amphotéricine B.

Tableau V. – Pharmacocinétique des azolés.

Molécule Miconazole Kétoconazole Fluconazole Itraconazole

Nom commercial Daktarint Nizoralt Triflucant SporanoxtAbsorption

digestive (%)faible variable > 85 variable

Liaisonprotéique (%) 98,5 99 11 99

1/2 vie (heures) 0,5 8 25 20ConcentrationLCR/sérum (%) <10 <10 60-80 <10

Excrétion urinaire faible faible forte faible

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digestif. L’interruption du traitement en raisond’effets indésirables ne s’observe que chez 1 à 2 %des patients environ.

¶ IndicationsLe fluconazole est indiqué dans :– le traitement initial des septicémies à Candida

du sujet non granulopénique ;

– le traitement des infections urinaires (y comprisles prostatites) à Candida ;

– le traitement des candidoses hépatospléniques(200 à 400 mg/j pendant au moins 6 mois), soit entraitement initial, soit en relais de l’AmB ;

– le traitement des candidoses oropharyngéesou œsophagiennes des patients immunodéprimés(100 mg/j pendant 15 jours).

En relais de l’Am B dans le traitement desinfections à cryptocoque des patients immunodé-primés ou non (400 mg/j pendant 8 semaines).

Le traitement d’entretien des cryptococcoses despatients infectés par le VIH (200 mg/J).

Le traitement des coccidioïdomycoses soit enrelais de l’AmB (200 à 400 mg/j), soit en traitementinitial dans les formes peu sévères (800mg/j).

En association avec l’Am B dans le traitementinitial des infections à Trichosporon des patientsinfectés par le VIH, puis en monothérapie entraitement d’entretien.

Itraconazole

L’itraconazole (Sporanoxt) est le plus récent azolémis sur le marché. Il n’est disponible que par voieorale. Son absorption est variable selon les sujets,favorisée par la prise concommitante d’aliments. Laprise d’antiacide concommitante entraîne une baissede l’absorption de l’itraconazole. Les taux sériquesdoivent être surveillés (pic 3 à 4 heures après laprise). Les gélules ne peuvent être ouvertes et nesont pas administrables dans une sondenasogastrique.

Indications

L’itraconazole est utilisé dans :

– les aspergilloses invasives des sujets infectéspar le VIH ou non (400 mg/j) en relais de l’Am B ;

– le traitement initial des histoplasmoses peusévères (400 mg/j pendant 3 mois puis à demi-dosependant au moins 1 an), et en relais de l’Am B dansles formes graves. Chez les patients infectés par leVIH, l’itraconazole doit être administrée à vie ;

– les candidoses oropharyngées et/ou œsopha-giennes résistantes au fluconazole (l’itraconazole estadministrée en solution) ;

– les sporotrichoses cutanées (200-400 mg/jpendant 4 semaines) ou ostéoarticulaires (doseidentique pendant 1 à 2 ans).

■Conclusion

Les infections fongiques profondes sont desmaladies rares et graves de pronostic redoutable quipeuvent nécessiter l’utilisation de moléculespotentiellement toxiques. Le respect de quelquesrègles simples de prescription permet de réduire leurtoxicité.

Les infections fongiques superficielles, fréquenteset bénignes, posent peu de problèmes thérapeu-tiques car les antifongiques en topique sont efficaceset bien tolérées. En revanche, la mise en place d’untraitement par voie générale (donc source d’effetssecondaires) dans ce type d’indication doit êtresoigneusement discutée.

Tableau VI. – Spectre d’action des dérivès imidazolés.

Kétoconazole Fluconazole Itraconazole

Habituellement sensibles

C albicans C albicansC albicans et nonalbicans

C tropicalis C tropicalisC parapsilosis C parapsilosis

P brasilensis C neoformans C neoformansH capsulatum C imitis Aspergillus spB meristoporus* B dermatidis C imitisScedosporium H capsulatum B dermatidisB dermatidis S schenckii H capsulatumP orbiculare P orbiculare S schenckii

Fusarium sp ?

Inconstamment sensibles C glabrata C glabrata Fusarium spScedosporium

RésistantsAspergillus sp C kruseiMucorales Aspergillus sp Mucorales

Mucorales sp C glabrata

* Agent de la basidiobolomycose.

Tableau VII. – Dérivés azolés : présentation, posologie.

Molécules Nom commercial Présentation Posologie

Miconazole Daktarint Amp 200 mg 0,6-3,6 g/24 hKétoconazole Nizoralt Cp 200 mg suspension 100-800 mg/24 h

(1 mg/goutte)Fluconazole Triflucant Gélules 50, 100, 200 mg 100-800 mg/24 h

Amp 200 mgItraconazole Sporanoxt Gélules 100 mg 100-400 mg/24 h

Solution orale

Tableau VIII. – Dérivés azolés : effets secondaires, interactions médicamenteuses.

Molécules Effets secondaires Interactions médicamenteuses

Miconazole (Daktarint) Digestifs, cutanés, neuropsychi-ques, thrombopénie, hypercholes-terolémie, collapsus cardiovascu-laire

AVK, sulfamides(1)

Kétoconazole (Nizoralt) Digestifs, cutanés alcalins gastriques et antisécrétoi-res(2), rifampicine(3), ciclospo-rine(4), astémizole, terfénadine(5),antiprotéases(6)

toxicité hépatiqueinterférences hormonales avec latestostérone et le cortisol,↓ libido,gynécomastie,

Fluconazole (Triflucant) Digestifs, cutanés, céphalées, hé-patite biologique

phénytoïne(7), sulfamide (rare),rifampicine, ciclosporine (rare),antihistaminique, cisapride(5), an-tiprotéases(6)

Itraconazole (Sporanoxt) Digestifs, cutanés, céphalées, hé-patite biologique, hypokaliémie,HTA, œdèmes, impuissance

phénytoïne, sulfamide (rare), ri-fampicine(2), ciclosporine (rare),antihistaminique, cisapride(5),antiprotéases(6)

(1) Potentialisation des AVK et sulfamides,(2) diminue l’absorption du kétoconazole,(3) Effondrement des taux sériques des azolés,(4) Élévation des tauxsériques de ciclosporine,(5) Risque de torsade de pointe,(6) les taux sériques des imidazolés et des antiprotéases (sauf Saquinavir) doivent être surveillés,(7) Augmentation des taux sériques de phénytoïnes.

5-0220 - Antifongiques

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K Chemlal : Chef de clinique-assistant.P Yeni : Praticien universitaire, praticien hospitalier.

Service de médecine interne, Hôpital Bichat, 46 rue Henri-Huchard, 75877 Paris cedex 18, France.

Toute référence à cet article doit porter la mention : K Chemlal et P Yeni. Antifongiques.Encycl Méd Chir (Elsevier, Paris), Encyclopédie Pratique de Médecine, 5-0220, 1998, 5 p

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Antifongiques - 5-0220

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Associations d’antibiotiques

en pratique de ville

O Launay, AC Cremieux

L a prescription d’une association d’antibiotiques a pour buts principaux, d’élargir le spectre bactérien en casd’infection non documentée ou d’infection plurimicrobienne, de limiter l’émergence de mutants résistants

fréquente avec certaines espèces bactériennes, et, parfois, d’accélérer la vitesse de contrôle de l’infection (effetsynergique).© Elsevier, Paris.

■Introduction

En « pratique de ville », une monothérapie estsuffisante dans la plupart des situations cliniquesjustifiant la prescription d’une antibiothérapie. Danscertains cas, cependant, la prescription d’uneassociation d’antibiotiques peut s’avérer nécessaire.Nous verrons successivement les bases rationnellesde la prescription d’une association d’antibiotiques,les inconvénients potentiels de ces associations etleurs indications en « médecine de ville ».

■Bases rationnelles

La prescription d’une association d’antibiotiques aplusieurs objectifs (tableau I).

‚ Élargir le spectre antibactérien : motifle plus fréquent

Deux situations cliniques justifient l’élargissementdu spectre antibactérien.

Traitement empirique d’une infection sévère

Dans l’attente des résultats des prélèvementsmicrobiologiques.

Dans cette situation, une antibiothérapieinitialement inefficace peut entraîner uneaggravation du pronostic. Après les résultatsbactériologiques, le prescripteur envisagera toujoursle retour à une antibiothérapie à spectre plus étroit.L’association est donc poursuivie jusqu’à obtentiondes résultats bactériologiques.

Traitement d’une infection plurimicrobienne

Elle est en particulier à point de départ digestif ougynécologique, où les prélèvements sont le plussouvent insuffisants ou inappropriés pour mettre enévidence les différents agents bactériens en cause.Dans ces situations cliniques, l’association estnécessaire pendant toute la durée du traitementantibiotique.

Malgré la tendance à l’élargissement du spectreantibactérien des antibiotiques disponibles en ville, ilexiste des situations où une bithérapie restenécessaire pour couvrir l’ensemble des germes

potentiellement responsables de l’infection. Ainsi, lesfluoroquinolones sont insuffisamment actives sur lesanaérobies et les streptocoques, en particulier lepneumocoque (la sparfloxacine, Zagamt, présentel’avantage d’une activité accrue sur le pneumocoquemais son utilisation s’est accompagnée d’une toxicitécutanée fréquente et sévère qui limite considéra-blement son utilisation). Les céphalosporines detroisième génération (qu’elles soient administréespar voie orale ou parentérale) ne sont actives ni surles anaérobies ni sur les germes intracellulaires.Enfin, l’association amoxicilline-acide clavulanique(Augmentint) est inactive sur les intracellulaires etsur un pourcentage non négligeable de bacilles àGram négatif (en particulier Escherichia coli) devenusrésistants à l’association.

En pratique de ville, trois types d’infectionspeuvent justifier la prescription d’une bithérapie « àlarge spectre » (tableau II) :

La pneumopathie sévère, où peuvent êtreimpliqués des germes intracellulaires (et enparticulier les légionnelles) mais aussi extracellulaires(les streptocoques et en particulier le pneumocoque,

Tableau I. – Motif et durée de l’association d’antibiotiques.

Motif de l’association d’antibiotiques Durée de l’associationélargir le spectre antibactérien— traitement empirique d’une infection sévère — jusqu’aux résultats bactériologiques— infections plurimicrobiennes — tout le traitementprévenir émergence de mutants résistants — phase initiale du traitementeffet synergique— obtenir un effet bactéricide — tout le traitement— augmenter la vitesse de bactéricidie — début de traitement

Tableau II. – Les indications des associations d’antibiotiques en « pratique de ville » : motif et du-rée de l’association.

Situations cliniques Raison (s) de l’association Durée de l’association

Infections en pneumologiepneumopathie communautairesévère, pneumopathie d’inhalationet abcès du poumon

élargir le spectre antibactérien(traitement empirique)

jusqu’aux résultats micro-biologiques si prélèvements faits,sinon, toute la durée du traitement

Infections en gynécologie et ma-ladies sexuellement transmissi-blessalpingite, urétrite à gonocoque élargir le spectre antibactérien

(infection plurimicrobienne)toute la durée du traitement

Infections urinaires hautes (pyé-lonéphrites ou prostatites)infection urinaire haute à entéro-coque

effet synergique toute la durée du traitement

formes sévères augmenter la vitesse de bactérici-die

début du traitement

élargir le spectre antibactérienInfections en hépato-gastro-entérologieéradication d’Helicobacter pyloriau cours de la maladie ulcéreuse

prévenir l’émergence de mutantsrésistants

toute la durée du traitement

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les bacilles à Gram négatif, les anaérobies...), et pourlesquels on ne dispose pas à l’heure actuelle d’unantibiotique ayant à la fois une activité comparableaux pénicillines sur le pneumocoque et une activitésur les germes intracellulaires.

Les infections génitales hautes (salpingites) etmaladies sexuellement transmissibles, où sontimpliqués des germes intracellulaires (chlamydiae etmycoplasmes) et extracellulaires (bacilles à Gramnégatif, anaérobies, gonocoques).

Les infections intra-abdominales, où les germesen cause sont ceux de la flore digestive(streptocoques, bacilles à Gram négatif, anaérobies).

‚ Prévenir l’émergence de mutantsrésistants

Les mutants résistant à un antibiotique utilisé sontle plus souvent présents de façon naturelle au seinde l’espèce bactérienne en cause dans l’infection. Letaux de mutation définit les chances de survenue dela mutation à chaque division cellulaire.

Plusieurs facteurs favorisent l’émergence de cesmutants résistants au sein de l’inoculum bactérien aucours du traitement antibiotique.

Couple antibiotique /bactérie

Le taux de mutation est variable avecl’antibiotique utilisé et l’espèce bactérienne en cause.Ainsi, les couples antibiotique/bactérie à taux élevéde mutation sont par exemple, la rifampicine, lafosfomycine, l’acide fucidique avec le staphylocoque,les â -lactamines, les fluoroquinolones, lafosfomycine avec certains bacilles à Gram négatif(Pseudomonas, Enterobacter, Serratia, Citrobacter,Acinetobacter), les antituberculeux et le bacille deKoch.

Importance de l’inoculum bactérien

Plus l’inoculum bactérien au site de l’infection estimportant, plus le risque qu’un germe résistant soitprésent et donc sélectionné est élevé.

Posologie insuffisante

Des doses unitaires trop faibles ou des intervallesd’administration trop longs peuvent favoriserl’émergence de mutants résistants dont la sensibilitéest diminuée à l’antibiotique (augmentation de laCMI) et qui se multiplient à la faveur d’uneconcentration devenue inférieure aux concentra-tions inhibitrices au niveau du foyer infectieux. Lepourcentage de risque de voir émerger un mutantrésitant est d’autant plus élevé que le rapportconcentration de l’antibiotique au foyer infectieuxsur concentration minimale inhibitrice (CMI) del’antibiotique pour l’espèce en cause est bas.

Présence d’un corps étranger

Le but de l’association est de rendre improbable lasélection d’un double mutant résistant (mutantrésistant aux deux antibiotiques présents) en utilisantdes antibiotiques dont les mécanismes d’action, etdonc de résistance, sont différents.

La preuve clinique de l’intérêt des associationsd’antibiotiques pour prévenir l’émergence demutants résistants a surtout été faite au cours de la

tuberculose. Pour les infections bactériennes nontuberculeuses, les démonstrations sont le plussouvent faites in vitro ou sur des modèlesexpérimentaux.

Dans cette indication, l’association d’antibiotiquesest surtout utile en début de traitement, jusqu’à ceque l’inoculum bactérien soit réduit et donc, que lerisque de sélectionner un mutant résistant soitdiminué. La durée de l’association est variable selonle site infectieux, généralement courte, en dehorsdes infections à mycobactéries ou de sites infectieuxparticulièrement longs à contrôler (os).

‚ Augmenter la vitesse de bactéricidie

Pour un contrôle plus rapide de l’infection, uneffet synergique est recherché dans deux situationsbien distinctes.

Nature du germe en cause

Elle est telle qu’une bithérapie est nécessaire pourobtenir une antibiothérapie bactéricide : c’est le casde l’entérocoque, pour lequel une monothérapie parles pénicillines n’est que bactériostatique. Uneassociation pénicilline-aminoside est nécessaire pourtuer le germe. L’effet synergique est alorsindispensable à la guérison et l’association doit êtremaintenue pendant toute la durée du traitement.

Rapidité de contrôle de l’infection

Une monothérapie est bactéricide mais labithérapie va augmenter la vitesse de bactéricidie etdonc la rapidité de contrôle de l’infection.

S’il s’agit d’une infection sévère ou survenant surun terrain fragilisé, la bithérapie se justifie pouraugmenter la vitesse de bactéricidie et, si possible,améliorer l’efficacité du traitement (bien que cet effetsoit souvent difficile à démontrer). Dans cessituations, les aminosides, très rapidementbactéricides, ont montré leur intérêt en associationavec les béta-lactamines. Ainsi, chez l’immunodé-primé où la vitesse de bactéricidie est un facteuressentiel de guérison, une association d’antibio-t iques synergique permet d’améliorer lepourcentage de guérison. De même, la vitesse decontrôle de l’infection est un élément important de laguérison des méningites. Dans ces situations, l’effetsynergique de l’association est surtout nécessaire audébut du traitement et la durée de l’associationgénéralement courte, surtout avec les aminosides(toxicité rénale et auditive des traitements prolongéspar les aminosides)

Un contrôle plus rapide de l’infection peut aussipermettre de raccourcir la durée du traitementantibiotique : cela a été bien documenté au cours del’endocardite mais n’est actuellement pasdocumenté dans d’autres infections.

‚ Situation de la fièvre du patientimmunodéprimé

Chez l’immunodéprimé, et en particulier chez lepatient neutropénique, la documentationbactériologique est le plus souvent négative.L’association d’antibiotiques sur ce terrain répondgénéralement à une triple indication : nécessitéd’augmenter la vitesse de bactéricidie, diminuer lerisque d’émergence de mutants résistants et élargirle spectre antibactérien.

Nous signalerons ici qu’un certain nombred’antibiotiques à notre disposition sont déjà desassociations à doses fixées de deux moléculesantibiotiques dans le but essentiel d’élargir le spectreantibactérien mais également d’augmenter labactéricidie par l’association des deux composés.C’est le cas du cotrimoxazole (Bactrimt), qui associetrimethoprime et sulfamethoxazole, des associationsâlactamine-inhibiteur des âlactamases telles quel’amoxicilline-acide clavulanique (Augmentint),p iperac i l l ine - tazobactam (Tazoc i l l inet ) ,ticarcilline-acide clavulanique (Claventint), et dessynergistines (pristinamycine, Pyostacinet etquinupristine-dalfopristine, Synercidt). Nous nereviendrons pas dans cet article sur les indications deces médicaments.

■Inconvénients potentiels

L’intérêt de la prescription d’associationsd’antibiotiques, en particulier dans le traitement desinfections sévères, ne doit pas faire oublier lesinconvénients potentiels de ces traitements (tableauIII).

‚ Possibilité théorique d’antagonismeIn vitro, la possibilité d’interactions négatives ou

effet antagoniste en rapport avec l’association deplusieurs antibiotiques est bien documentée.Cependant, la traduction clinique de cetantagonisme est exceptionnelle, en dehors decertaines situations sévères comme les méningites(ex : antagonisme entre pénicillines et cyclines oupénicillines et macrolides dans la méningite àpneumocoque de l’enfant), ou chez les patientsneutropéniques, pour lesquels, effectivement,l’augmentation de la vitesse de bactéricidie peutinfluencer l’issue thérapeutique (cf effet synergique).La crainte d’un antagonisme ne doit donc pas êtreun effet limitant dans la prescription d’uneassociation d’antibiotiques en pratique « de ville ».

‚ Effets secondairesOn comprendra aisément que l’administration

concommitante de deux ou plusieurs antibiotiquesaugmente le risque de survenue d’un effet

Tableau III. – Avantages et inconvénients potentiels de la prescription d’une associationd’antibiotiques.

Avantages Inconvénients potentiels

Élargir le spectre antibactérien Fréquence de survenue d’effets secondairesPrévenir l’émergence de mutants résistants. Colonisation par des micro-organismes résistantsObtenir un effet synergique pour renforcer la bacté-ricidie

Coût

5-0150 - Associations d’antibiotiques en pratique de ville

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secondaire. De plus, il est souvent difficile, dans cettesituation, de distinguer l’antibiotique en cause dansla survenue de l’effet indésirable. Enfin, un plusgrand nombre de gélules ou de comprimés àabsorber rend plus aléatoire la bonne adhérence(compliance) du patient à son traitement.

‚ Colonisation par des micro-organismesrésistants

L’utilisation d’une association d’antibiotiques,comme toute antibiothérapie « à large spectre »,expose à la colonisation du patient par desmicro-organismes résistants à cette antibiothérapie :espèces fongiques (en particulier Candida) oubactéries multirésistantes.

‚ Coût

Le meilleur rapport coût/efficacité est égalementun facteur important dans le choix d’uneantibiothérapie. Le coût d’une association est plusimportant que celui d’une monothérapie mais cecipeut être contrebalancé par un gain d’efficacitéclinique (difficile à mettre en évidence).

■Indications en pratique de ville

‚ Infections en pneumologie

La pneumopathie communautaire, sans signe degravité de l’adulte sain, n’est pas une indication à laprescription d’une association d’antibiotiques enpremière intention. En cas d’échec après 48 heuresde traitement, une association amoxicilline-macrolide ou amoxicilline-fluoroquinolone est alorsjustifiée pour élargir le spectre. À titre d’exemple,amoxicilline 1g/3 fois/j pendant 48 heures, puisassociation après 48 heures d’un macrolide pourune durée de 15 jours.

En revanche, la pneumopathie communautairesévère, avec signes de gravité, justifie d’emblée laprescription d’une association active à la fois sur lesgermes intra et extracellulaires qui peut êtrel ’assoc iat ion amoxic i l l ine-macro l ide ouamoxicilline-fluoroquinolone ou ceftriaxone-macrolide pendant 15 jours.

La pneumopathie d’inhalation et l’abcès dupoumon, généralement plurimicrobiens, justifientune antibiothérapie active sur les anaérobies, lescocci à Gram positif et les bacilles à Gram négatif quipeut être l’association amoxicil l ine-acideclavulanique 1g/3 fois/j.

‚ Infections en gynécologie et maladiessexuellement transmissibles

Le traitement de la salpingite doit être actif sur lesgermes intracellulaires (Chlamydiae trachomatis,

Ureaplasma urealiticum, Mycoplasma hominis),Neisseria gonorhoeae, les bacilles à Gram négatif, lesstreptocoques et les anaérobies. Les associationsrecommandées sont : amoxici l l ine-acideclavulanique plus cycline, ou amoxicilline-acideclavulanique plus ofloxacine, ou encore ceftriaxoneplus metronidazole plus cycline. À titre d’exemple,amoxicilline-acide clavulanique 1g/3 fois/j pendant10 jours plus doxycycline 100mg/2 fois/j pendant 3semaines.

Le traitement de l’urétrite purulente doit prendreen compte le gonocoque (sauf si l’examen direct estnégatif) et les germes intracellulaires et repose surl’association d’une dose unique d’une céphalospo-r ines de trois ième générat ion ou d’unefluoroquinolone et d’une cycline ou d’un macrolide(ex : ceftriaxone125 mg IM en dose unique plusdoxycycline 100 mg/2 fois/j pendant 7 jours).

‚ Infections urinaires

Il n’y a pas d’indication à une associationd’antibiotiques dans les infections urinaires basses.

Au cours des infections urinaires « hautes »(pyélonéphrite aigüe ou prostati te) , unemonothérapie est le plus souvent suffisante.L’adjonction d’un aminoside, pour une durée le plussouvent brève, est nécessaire en cas d’infection àentérocoque et dans les formes sévères quinécessitent le plus souvent une prise en chargeinitiale hospitalière.

‚ Infections en hépato-gastro-entérologie

L’éradication d’Helicobacter pylori au cours de lamaladie ulcéreuse repose toujours sur uneassociation d’antibiotiques pour limiter le risqued’émergence de mutants résistants. Les associationsrecommandées sont amoxicilline-clarithromycine ouclarithromycine-métronidazole (ex : clarythromycine500 mg/2 fois/j plus amoxicilline 1g/2 fois/j pendant7 jours) associées à un traitement antiulcéreux.

Le traitement des diarrhées infectieuses ne justifiepas d’association d’antibiotiques.

Une association d’antibiotiques est nécessairepour le traitement des abcès hépatiques, despéritonites, des angiocholites et cholécystites, à lafois pour élargir le spectre antibactérien et pouraugmenter la vitesse de bactéricidie mais nécessiteune prise en charge en milieu hospitalier.

‚ Infections en ORL

En dehors de l’association amoxicilline-acideclavulanique qui peut être indiquée dans letraitement de la sinusite aigüe ou de l’otite moyenneaigüe, les associations d’antibiotiques n’ont pasd’indication dans le traitement des infections ORL enpratique de ville.

‚ Infections en dermatologieL’érysipèle de jambe ou de la face, dont l’agent

pathogène est le streptocoque, ne justifie pas laprescription d’association d’antibiotiques.

Par contre, en raison de leur caractèreplurimicrobien, les cellulites et fasciites doivent êtretraitées par une association d’antibiotiques, maisnécessitent, dans tous les cas, une prise en chargehospitalière.

‚ Traitement empiriquechez l’immunodéprimé

Le traitement empirique chez l’immunodéprimérepose le plus souvent sur une associationd’antibiotiques, débutée en urgence sans attendreles résultats des prélèvements bactériologiques, et sefait, en règle générale, en milieu hospitalier.

‚ Autres situations

TuberculoseLa tuberculose doit toujours être traitée par une

association d’antibiotiques (tri ou quadrithrapie) pouréviter l’émergence de résistances. Le diagnostic etl’initiation du traitement sont réalisés, au mieux, enmilieu hospitalier.

BrucelloseLa brucellose justifie, de même, d’une association

cyclines-rifampicine, initiée en milieu hospitalier.

■Conclusion

Les principales indications d’associationsd’antibiotiques en pratique de vil le sontl’élargissement du spectre antibactérien, enparticulier dans les infections plurimicrobiennes,mais également la prévention de la sélection demutants résistants. Les trois situations cliniques lesplus fréquentes pour le médecin généraliste sont lapneumopathie communautaire sévère ou sur terrainfragilisé, les infections génitales et l’éradicationd’Helicobacter pylori. Dans ces situations cliniques, larelation médecin-patient est particulièrementimportante et le patient doit être soigneusementinformé de la nécessité du traitement et del’importance de la prise des différents antibiotiques.

Odile Launay : Chef de clinique-assistant.Anne-Claude Cremieux : Maître de conférences des Universités, praticien hospitalier.

Service de médecine interne, hôpital Bichat-Claude Bernard, 46, rue Henri-Huchard, 75877 Paris Cedex 18, France.

Toute référence à cet article doit porter la mention : O Launay et AC Cremieux. Associations d’antibiotiques en pratique de ville.Encycl Méd Chir (Elsevier, Paris), Encyclopédie Pratique de Médecine, 5-0150, 1998, 4 p

Règles d’or des associationsd’antibiotiques en pratique de ville :– la durée de l’association est le plussouvent courte et son utilité doit êtrerapidement réévaluée ;– la durée de traitement par lesaminosides doit être courte pouréviter les effets toxiques (rénaux etauditifs).

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Page 31: Le manuel du généraliste   antibiothérapie

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Bêtalactamines

M Grappin, P Chavanet, H Portier

L es â-lactamines sont les antibiotiques les plus prescrits en médecine générale. Leur spectre d’activité et leurdiffusion sont très variables en fonction de chaque groupe de molécules et parfois même au sein d’un même

groupe. Ce sont souvent des molécules à spectre très large dont l’utilisation doit être réfléchie afin de respecterl’écologie bactérienne et d’éviter ou tout au moins de limiter la sélection de germes résistants.© Elsevier, Paris.

■Introduction

Famille d’antibiotiques majeure, les bêtalacta-mines regroupent : (tableau I) les pénicillines ; lesinhibiteurs de bêtalactamases (IBL) ; les carba-pénèmes, monobactams ; les céphalosporines.

Ces différents groupes se caractérisent par : unestructure de base commune (le noyau â-lactame) ;un mode d’action commun (lyse bactérienne parinhibition de la synthèse du protéoglycane parfixation sur les protéines de liaison des pénicillines(PLP), au niveau de la membrane cytoplasmique) ;des mécanismes de résistance bactériennesecondaires à ce mode d’action : productiond’enzymes d’inactivation appelées bêtalactamases,diminution de la perméabilité de la paroibactérienne, modification des PLP.

Nous ne présenterons dans cette synthèse que lesantibiotiques disponibles en ville et leur utilisationpratique en médecine générale.

■Pénicillines

‚ Spectre d’activité et mécanismesde résistance (tableau II)

Pénicillines G et V

Ces pénicillines n’ont aujourd’hui plus d’activitésur le staphylocoque (< 5 % de sensibilité), qui aacquis la capacité de résistance par production d’unebêtalactamase de type pénicillinase, sensible auxIBL.

Vis-à-vis du pneumocoque, on a noté durant cesdernières années une diminution de leur activité. Letaux de pneumocoques de sensibilité diminuée auxpénicillines (PSDP) est variable en fonction desrégions, mais toujours par le même mécanisme demodification des PLP, insensible aux inhibiteurs de labêtalactamase (IBL) et affectant l’ensemble desâ-lactamines.

Il persiste, pour l’instant en France, une activitéconstante sur le streptocoque du groupe A.

Chez N gonorrhoeae, la résistance est très variableselon les pays, mais parfois très élevée (Thaïlande,Mexique, Kenya…). En France, elle est de l’ordre de10 à 20 %. Elle peut être due à une pénicillinasesensible aux inhibiteurs de la bêtalactamase ou àune modification des PLP rendant inactif l’ensembledes â-lactamines.

Pénicillines M

En pratique, ces molécules sont les antibiotiquesdu staphylocoque quand celui-ci est méticillinesensible, ce qui est le cas pour plus de 95 % dessouches de ville. La méticillinorésistance est due àl’apparition d’une PLP anormale, toujours associée àla production d’une pénicillinase. Elle affecte en faitl’ensemble des â-lactamines.

Pénicillines A

Les pénicillines A avaient, à l’origine, une exten-sion du spectre de la pénicilline G à certains bacilles àGram négati f et aux entérocoques. Elles ne sont pasactives sur le staphylocoque pénicilline G résistant etcomme pour la pénicilline G, on note l’apparition desouches de pneumocoques de sensibilité diminuéeaux aminopénicillines qui restent cependant parmiles â-lactamines les plus actives. Certains bacilles àGram négatif ont acquis des mécanismes derésistance : E coli dans 40 % des cas, H influenzaedans 30 %, dans les deux cas par production d’unepénicillinase sensible aux IBL. Cependant 2 à 3 %des H influenzae sont résistants aux pénicillines A parun mécanisme non enzymatique, et donc insensibleaux IBL.

Pénicillines A et inhibiteurs de â-lactamases

Il s’agit de l’association de l’amoxicilline ou del’ampicilline à deux types d’IBL respectivement,l’acide clavulanique et le sulbactam.

L’intérêt de ces associations est d’élargir le spectredes pénicillines A aux germes producteurs depénicillinases. Il en résulte une augmentation dunombre de bacilles à Gram négatif sensibles et une

restauration de sensibilité de certains germesproducteurs de pénicillinases (H influenzae ,staphylocoques et E coli). En ce qui concerne E coliproducteur de pénicillinase, l’association péni-A + IBLest active dans 90 % des cas. En effet, E coli a acquisla capacité de résister aux IBL dans 10 % des cas parproduction d’une â-lactamase particulière nomméeTRI.

Ces associations sont actives sur les staphylo-coques sensibles à la méticilline mais résistants à lapénicilline par production de pénicillinases.

À noter que l’utilisation d’un IBL dans le trai-tement des infections à PSDP ne présente aucunintérêt puisque le mécanisme de résistance dans cecas concerne les PLP et non la production deâ-lactamase.

‚ Pharmacocinétique

Pénicilline V

Après ingestion orale, le pic sérique est obtenu en30 à 60 minutes. La demi-vie d’élimination est courte(environ 30 minutes chez l’adulte, 1 à 3 heures chezle nourrisson) d’où un rythme d’administration de 3à 4 prises par jour. La diffusion tissulaire est bonnemais insuffisante pour traiter une infectionméningée, osseuse, oculaire ou prostatique.

Sur le plan pharmacodynamique, l’activité est detype temps-dépendant ce qui justifie desadministrations fréquentes pour maintenir desconcentrations au site infectieux supérieures à laconcentration minimale inhibitrice (CMI). Cependant,dans les infections à cocci à Gram positif, cettenotion peut être tempérée du fait d’un effet post-antibiotique qui pourrait permettre d’espacer lesprises.

Pénicillines G retard

Elles doivent être administrées par voie intra-musculaire. Le pic sérique est obtenu en 4 heuresavec maintien des taux sériques pendant quelquesjours (procaïne pénicilline), voire quelques semaines(benzathine pénicilline).

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Pénicilline M

Il existe des formes pour administrationintramusculaire (IM), intraveineuse (IV) ou orale. Lepic sérique est obtenu en 30 minutes par voie IM ouIV et en 30 minutes à 1 heure par voie orale.Comme pour les molécules précédentes, la demi-viecourte va imposer un rythme d’administration de 3 à4 prises par jour. Il n’est pas nécessaire d’adapter laposologie en cas d’insuffisance rénale.

La diffusion tissulaire reste correcte, mais lespénicillines M ne pénètrent pas ou mal dans leliquide céphalorachidien (LCR), la prostate et l’os.

Les caractéristiques pharmacodynamiques sontles mêmes que pour la pénicilline V.

Pénicillines A

Ces molécules peuvent être administrées par voieIM, IV ou orale.

Le pic sérique est obtenu en 2 heures aprèsingestion orale et 1 heure par voie IM. La demi-vied’une heure amène à proposer 3 à 4 administrationspar jour, sauf dans les infections à cocci à Grampositif (cf pénicilline V).

La diffusion tissulaire est bonne. Si lesaminopénicillines ne pénètrent peu ou pas dans laméninge saine, elles sont d’un grand intérêt dans letraitement des méningites dans leur forme injectablepuisque l’inflammation de la méninge favorise leurpassage dans le LCR.

Les caractéristiques pharmacodynamiques sontles mêmes que pour la pénicilline V.

Pénicillines A et inhibiteurs de â-lactamase

La pharmacocinétique est la même que celle despénicillines A. Cependant, il est important desouligner que contrairement aux aminopénicillines,les inhibiteurs de â-lactamases ne passent pas labarrière méningée qu’il y ait ou non une inflam-mation.

■Céphalosporines

Bien qu’elles possèdent un noyau commun avecles pénicillines, leur structure chimique est différente.Il en résulte une activité antibactérienne plusétendue que celle des pénicillines, notamment surles bacilles à Gram négati f.

Les cliniciens en distinguent trois classes, selonleurs propriétés antibactériennes : céphalosporinesde 1re, 2e, 3e génération.

Dans chaque classe, on retrouve des moléculesadministrables soit par voie orale, soit par voieparentérale. Il n’existe pas d’équivalence en termede pharmacocinétique et d’activité antibactériennepour une même céphalosporine entre sa formeorale et sa forme injectable. Cela est notamment trèsmarqué pour les céphalosporines de 3e génération.

‚ Spectre d’activité (tableau III)

Céphalosporines de 1re génération

Ces antibiotiques ont une bonne activité sur lescocci à Gram positif. Parmi les céphalosporinesutilisables en ville ce sont elles qui ont l’activité laplus puissante sur le staphylocoque quand il estsensible à la méticilline. La méticillino-résistanceaffecte également l’ensemble des céphalosporines.

Sur le pneumocoque, leur activité est comparableaux pénicillines. Elle est en revanche plus altérée encas de PSDP.

Les entérocoques présentent une résistancenaturelle à l’ensemble des céphalosporines.

Leur activité sur les bacilles à Gram négatif estsuperposable à celle des aminopénicillines mais lesniveaux de sensibilité des germes sont en généralplus bas. Elle est en revanche moins étendue quecelle des céphalosporines de 2e et 3e génération.Certaines espèces (Enterobacter, Serratia) possèdentune céphalosporinase inductible inactivant lescéphalosporines de 1re et 2e génération. Parfois, unecéphalosporinase est acquise chez E coli inactivantles céphalosporines de 1re génération.

La production de céphalosporinases peut êtreaugmentée ou hyperproduite (Enterobacter, Serratia)conférant une résistance à toutes les â-lactaminescommercialisées en ville.

Les céphalosporines de 1re génération ont uneactivité médiocre sur H influenzae.

Céphalosporines de 2e génération

Seul le céfuroxime axétil est disponible en ville.

Tableau I. – Classification desâ-lactamines utilisables « en ville ».

DCI Noms de spécialités

Pénicilline V : OracillinetOspent

Pénicillines G retard : BiclinocillinetExtencillinetBipenicillinet

Pénicillines M : BristopentOrbeninet

Pénicillines A :Amoxicilline A-Gramt

AmodextAmophartAmoxicilline-RatiopharmtBactoxtBristamoxtClamoxyltFlemoxinetGramidiltHiconciltZamocillinet

Ampicilline AmpicillinetAmpicilline PanpharmatTotapent

Bacampicilline BacampicinetPenglobet

Métampicilline Suvipent

Pivampicilline Proampit

Pénicillines A + inhibiteurs deâ-lactamase :Amoxicilline + acide clavulanique Augmentint

Ciblort

Ampicilline + sulbactam Unacimt

Céphalosporines de 1re génération :Alfatiltcéfaclor

céfalexine Cefacet, Ceporexine, Keforalt

céfapirine Cefalojecttcefradrine Kelsef, Doncef, Zadyl, Zeefratcéfadroxil Oracefalt

Céphalosporines de 2e génération :Cepazine, Zinnattcéfuroxime axétil

Céphalosporines de 3e génération :

Oreloxtorales

cefpodoxime proxétilcéfixime Orokentcéfotiam hexétil Taketiam, Texodilt

injectablesRocephinetceftriaxone

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Il est actif sur les staphylocoques résistant à lapénicilline. Sur le pneumocoque, son activité estsupérieure aux précédentes. En cas de PSDP,l’activité est légèrement inférieure à celle del’amoxicilline.

En ce qui concerne les bacilles à Gram négatif,son activité est supérieure à celle des céphalospo-rines de 1re génération sur H influenzae , etnotamment sur les souches productrices depénicillinase.

Céphalosporines de 3e génération

Les spectres d’activité des céphalosporines de 3e

génération injectables et orales sont très différents. Ilexiste par ailleurs une grande variabilité de cetteactivité en fonction des molécules.

¶ Céphalosporinesde 3e génération injectables

La seule disponible en ville est la ceftriaxone.Son activité est moindre sur le staphylocoque

méticilline sensible que celle des molécules des deuxclasses précédentes.

En revanche, elle possède une forte activité sur lepneumocoque et notamment sur les souches dePSDP. Cependant, on a signalé quelque souches depneumocoques présentant une résistance auxcéphalosporines de 3e génération. Ces situationssont actuellement encore rares mais imposentd’utiliser cette molécule avec prudence et dans desindications adaptées.

Sur les bacilles à Gram négatif, le spectre estétendu à de nombreuses bactéries telles que E coli,Enterobacter, Proteus…

La ceftriaxone n’est pas active sur Pseudomonasaeruginosa.

Elle est très active sur H influenzae y compris surles souches productrices de â-lactamases.

¶ Céphalosporines de 3e génération, oralesL’activité sur les staphylocoques méticilline

sensibles est médiocre. En ce qui concerne lepneumocoque, leur activité est globalement bonne.Seul le céfixime a une moins bonne efficacitéamenant à limiter son utilisation dans les infectionssuppurées dues à cette bactérie.

Sur les bacilles à Gram négatif, leur spectred’activité est moins étendu que celui descéphalosporines de 3e génération injectables, maiscela ne représente pas de réelle limitation enpratique communautaire. Le céfixime est le plus actifsur H influenzae.

‚ Pharmacocinétique

Céphalosporines de 1re génération

Avec la céfapirine, utilisée par voie parentérale, lepic sérique est obtenu en 20 à 70 minutes selon quel’administration est faite en IM ou en IV. La demi-vied’élimination est courte, d’environ 30 minutesimposant une administration toutes les 6 à 8 heures.La diffusion est bonne. On note cependant unpassage faible dans le LCR. Elle pénètre peu dans l’osou la prostate. L’élimination rénale impose uneadaptation des doses en cas d’insuffisance rénale.

Pour les céphalosporines orales, les pics sériquessont obtenus entre 30 minutes et 1 heure. Les

Tableau II. – Spectre utile des pénicillines.

Spectre utile Péni G et V Péni M Péni A Péni A + inhibiteurs

Cocci à Gram positif :0 + 0 +Staph méti S

Staph méti R 0 0 0 0Strepto A, B, C, G + + + +S pneumoniae + + 0Enterococcus faecalis 0 0 + +Enterococcus faecium 0 0 + +

Bacilles à Gram positif :0 + +Listeria

Cocci à Gram négatif :0 (+) +/_ +/_N gonorrhoeae

N meningitidis +(péni G) (+) + +/_

Bacilles à Gram négatif :0 0 +/_ +H influenzae

E coli 0 0 +/_ +/_

Salmonella 0 0 +/_ +Shigella 0 0 +/_ +Proteus mirabilis 0 0 + +Proteus vulgaris 0 0 0 +Pseudomonas aeruginosa 0 0 0 0Yersinia 0 0 0 +/_

Anaérobies :0 0 0 +Bactéroïdes fragilis

Peptococcus +(péni G) 0 + +Clostridium perfringens + + +

Bactéries spiralées+Tréponème

0 = soit pas actif in vitro, soit sans intérêt en pratique+ = habituellement sensible+/_ = pas toujours sensible

Tableau III. – Spectre utile des céphalosporines.

Spectre utile C1G orales C1G inject C2G orales C3G orales C3G inject

Cocci à Gram positif :+ + + + +Strepto A, B, C, G

S pneumoniae+ + + + +péni S

péni R +/_ +/_ +/_ +Entérocoques 0 0 0 0 0Staph Méti S + + + +/_ +/_

Staph Méti R 0 0 0 0 0

Cocci à Gram négatif :0 + + + +N gonorrhœae

N meningitidis 0 0 0 0 +

Bacilles à Gram positif :0 0 0 0 0Listeria

Bacilles à Gram négatif :+/_ +/_ + + +H influenzae

E coli +/_ +/_ + + +Salmonelle 0 + + + +Shigelle 0 + + + +Klebsiella sp + + + + +Proteus

0 + + + +mirabilisvulgaris 0 0 0 + +

Pseudomonas aeruginosa 0 0 0 0 0

Anaérobies :0 0 0 0 0Bacteroides fragilis

Clostridium perfringens + + +Peptostreptococcus + + +

0 = soit pas actif in vitrosoit sans intérêt en pratique

+ = habituellement sensible+/_ = pas toujours sensible

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demi-vies sont courtes imposant un rythmed’administration en 3 à 4 prises par jour. Leurabsorption n’est globalement pas modifiée par laprise alimentaire. Elles ne diffusent ni dans le LCR, nidans l’os.

La pharmacodynamie est la même que celle despénicillines.

Céphalosporines de 2e génération

Leurs propriétés pharmacocinétiques sontéquivalentes à celles des céphalosporines de1re génération orale en ce qui concerne la diffusionet le mode d’élimination. La différence essentielleconcerne leur demi-vie d’élimination longue(80 minutes pour le céfuroxime axétil) ce qui permetde ne proposer que deux prises quotidiennes.

L’absorption du céfuroxime axétil étant augmen-tée par la prise alimentaire, il est recommandé de leprescrire au milieu des repas.

Céphalosporines de 3e génération

¶ Céphalosporines de 3e génération oralesLes pics sériques sont obtenus entre 2 et 4 heures.

La demi-vie d’élimination de 2 à 3 heures permetune administration en deux prises par jour. Leurabsorption est saturable. Une augmentation desposologies est donc sans intérêt. Elle n’est en généralpas modifiée par les repas sauf pour le cefpodoximeproxétil. Il est en effet recommandé de prescrirecelui-ci au milieu des repas du fait d’une augmen-tation non négligeable du taux d’absorption lors desprises alimentaires.

Si la diffusion est équivalente à celle des autresmolécules de leur classe, leur concentration tissulaireest en revanche beaucoup plus faible qu’avec lesformes injectables.

¶ CeftriaxonePar voie intraveineuse lente, le pic sérique est

obtenu en 20 à 40 minutes, alors qu’il est à 120minutes par voie intramusculaire. La demi-vied’élimination est de 8 heures. La diffusion est bonneavec notamment une pénétration dans lesméninges malades. L’élimination est biliaire pour 30à 40 % et urinaire pour l’autre part.

■Indications [5] (tableau IV)

‚ Infections ORL [1]

Angines

¶ Angines aiguësLe traitement de l’angine aiguë a pour cible

essentielle le streptocoque â-hémolytique du groupeA. Il doit aussi prendre en compte l’éventualité del’association fusospirillaire. Le problème de ladiphtérie reste d’actualité dans certains pays. C’est unproblème spécifique. Son traitement reposeuniquement sur la pénicilline V et la sérothérapie.

Aujourd’hui, le traitement de référence de l’angineaiguë reste la pénicilline V à la dose de 50 000 à100 000 U/kg/j chez l’enfant et 3 millions d’unités

par jour chez l’adulte, à condition que la durée detraitement soit de 10 jours.

L’amoxicilline peut être également utilisée, maisn’apporte rien de plus que la pénicilline V. Il se posepar ailleurs avec cet antibiotique un risque desélection de germes résistants notamment au niveaude la flore oropharyngée (pneumocoques…). Lescéphalosporines de 1re génération orales sontégalement susceptibles de sélectionner desrésistances.

Aujourd’hui, les références médicales opposablesprécisent que les céphalosporines de 2e et 3e

génération et l’association pénicilline A + IBL n’ontpas leur place dans le traitement des angines aiguës.

Un certain nombre d’études ont récemment viséà réduire la durée de traitement des angines pouren améliorer la compliance en assurant un mêmetaux d’éradication du streptocoque A qu’avec les10 jours de pénicilline V. Les travaux menés avecl’amoxicilline, les céphalosporines de 1re, 2e et 3e

génération ont montré un taux d’éradication dustreptocoque â-hémolytique du groupe A identiqueet permettent d’envisager une réduction de duréede traitement à 4 à 6 jours. Ces variantes

Tableau IV. – Principales indications pour chaque groupe deâ-lactamines

Indications

Péni G/V Angines (Streptocoque, diphtérie, association fusospirillaire)SyphilisProphylaxie du RAA

Péni A OMA chez l’enfant> 2 ans sans risque de PSDPSurinfection de bronchite aiguëSurinfection de BPCOPneumopathies communautairesErysipèleProphylaxie de l’endocardite infectieusePiqûres de tiques

Péni M Infections à staphylocoques sensiblesImpétigoFuroncle sur terrain fragiliséErysipèle

Péni A + inhibiteurs deâ-lactamases Angines récidivantesOMASinusitesSurinfection de BPCOPneumopathies sur terrains fragilisésInfections urinaires basses compliquées (+/_)Salpingites (en association)ImpétigoFuroncle sur terrain fragiliséMorsures

Céphalosporines de 1re génération OMA du grand enfant sans risque de PSDPAngines aiguësSinusitesSurinfection de bronchites aiguësSurinfection de BPCOImpétigoFuroncle sur terrain fragilisé

Céphalosporines de 2e génération Angines ? (traitements courts)Angines récidivantesOMASinusitesSurinfection de BPCOInfections urinaires basses compliquées

Céphalosporines de 3e générationorales

Angines ? (traitements courts)Angines récidivantesOMA (sauf céfixime)SinusitesSurinfection de BPCO (sauf céfixime)Infections urinaires basses compliquéesGonococcies (uniquement céfixime)

Céphalosporines de 3e générationinjectables= ceftriaxone

Infections urinaires hautesProstatites aiguësGonococcies

RAA = rhumatisme articulaire aigu.OMA = otite moyenne aiguë.PSDP = pneumocoque de sensibilité diminuée à la pénicilline.BPCO = bronchopneumopathie chronique obstructive.

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thérapeutiques n’ont pas, pour l’instant, étévalidées par des autorisations de mise sur lemarché (AMM). Elles sont susceptibles d’entraînerun moindre risque de sélection de bactériesrésistantes.

¶ Angines récidivantesDans l’angine récidivante, les germes impliqués

sont les mêmes que lors des angines aiguës, mais onnote une moindre efficacité de la pénicilline V du faitde modifications anatomiques amygdaliennes et demodifications de la flore.

Seules l’association pénicilline A + IBL et lescéphalosporines de 2e et 3e génération ont obtenuune AMM dans cette indication, le cefpodoxime seulayant l’indication en traitement court de 5 jours.

Otites moyennes aiguës de l’enfant (OMA)

Le traitement probabiliste doit couvrir Strepto-coccus pneumoniae (25 à 30 % des cas) et H influen-zae (40 à 45 % des cas).

Le consensus actuel propose deux attitudes enfonction du risque ou non d’infection à PSDP.

■ Chez l’enfant sans facteur de risque de PSDP(âge > 2 ans). L’amoxicilline seule à 100 mg/kg/j en3 prises, l’association amoxicilline-acide clavulaniqueà 80 mg/kg/j en 3 prises, les céphalosporines de1re génération orales à 25 à 50 mg/kg/j en 2 à3 prises, le céfuroxime axétil à 30 mg/kg/j en2 prises, le céfixime et le cefpodoxime proxétil à8 mg/kg/j en 2 prises sont, entre autres, des solu-tions thérapeutiques possibles.

■ Chez l’enfant avec facteurs de risque de PSDP(âge < 2 ans, fréquentation de collectivité, antécé-dents d’otite moyenne aiguë, prise d’antibiotiquesdans les mois précédents) , le traitementrecommandé repose sur l’association amoxicilline-acide clavulanique (80 mg/kg/j), sur le céfuroxime-axétil (30 mg/kg/j), sur le cefpodoxime-proxétil(8 mg/kg/j). La durée de traitement est de 8 à 10jours.

Sinusites

La problématique est la même que pour l’otitemoyenne aiguë de l’enfant de plus de 2 ans.

Les thérapeutiques proposées par analogie avecle consensus « otite » sont :

– aminopénicillines + IBL : 80 mg/kg/j ;– C1G orales : 25 à 50 mg/kg/j ;– céfuroxime axétil : 30 mg/kg/j ;– céphalosporines de 3e génération orales :

8 mg/kg/j.

La durée de traitement recommandée est de 7 à10 jours.

‚ Infections respiratoires basses [2]

Bronchites

Dans les bronchites aiguës, le traitementantibiotique est habituellement inutile sauf en casd’évolution prolongée (> 7 jours). On peut alorsproposer l’amoxicilline ou une céphalosporine de 1re

génération au même titre que les macrolides.

Lors des poussées aiguës de bronchite chronique(BC) et des surinfections de bronchopneumopathiechronique obstructive (BPCO) sans insuffisance

respiratoire, les germes en cause sont principa-lement H influenzae, Streptococcus pneumoniae etMoraxella catarrhalis.

En 1996, un groupe de travail de la Société depathologie infectieuse de langue française a préciséles situations durant lesquelles il serait licite deproposer une antibiothérapie (tableau V) [6].

Si l’antibiothérapie est nécessaire, le traitement depremière intention peut comporter une amoxicillineou une céphalosporine de première générationorale. En cas d’échec, on peut proposer uneassociation amoxicilline-acide clavulanique, unecéphalosporine de 2e ou 3e génération orale. Uneantibiothérapie par voie parentérale n’est nécessairequ’en cas de signes de gravité, chez l’insuffisantrespiratoire.

Pneumopathies communautaires

Ici, le problème des PSDP n’a pas d’influence surl’issue thérapeutique. L’amoxicilline garde donc uneplace de choix dans le traitement des pneumopa-thies de l’adulte sain. Elle doit être prescrite enpremière intention devant toute symptomatologiepulmonaire associant toux, fièvre et foyer systé-matisé à l’auscultation.

La dose proposée est de 1 g 3 fois par jour chezl’adulte pendant une durée de 12 à 14 jours avecréévaluation de l’efficacité du traitement à 48 heures.En cas d’échec du traitement à 48 heures, chez lesujet jeune sans signes de gravité, un changementde traitement au profit d’un macrolide est indiqué.

Il n’y a en revanche pas de place pour les â-lacta-mines dans l’antibiothérapie des pneumopathies detype atypique qui doivent être traitées parmacrolides.

En ville, il n’y a pas d’indication pour utiliser uneassociation â-lactamine + macrolides ou fluoro-quinolone.

Dans les pneumopathies communautaires sanssignes de gravité mais sur terrain fragilisé (âge >60 ans, éthylisme chronique…), le traitement doitêtre actif à la fois sur le pneumocoque et les bacillesà Gram négatif. L’utilisation d’une associationpénicilline A + IBL est recommandée avec uneévaluation de l’efficacité à la 48e heure car cetteassociation ne répond pas à toutes les étiologiespossibles. Il est alors prudent de rajouter del’amoxicilline pour assurer 3 g/j.

‚ Infections urinaires [3]

Infections urinaires basses de la femme

Dans le traitement de l’infection urinaire bassenon compliquée de la femme jeune, il est licite deproposer des traitements courts avec d’autres typesde molécules compte tenu de la fréquence desrésistances de E coli. Les â-lactamines n’ont plus leurplace dans cette indication.

En cas d’infections urinaires basses compliquées,chez des patientes de plus de 65 ans, des diabé-tiques ou des immunodéprimés, on peut proposerun traitement classique comportant des cépha-losporines de 2e génération, de 3e générationpendant une durée d’au moins 5 jours.L’amoxicilline associée à un IBL est moins indiquéeactuellement du fait de la fréquence augmentéed’isolement d’E coli avec des â-lactamases de typeTRI.

Pyélonéphrites

La résistance des E coli conduit à restreindre lechoix parmi les â-lactamines à la ceftriaxone à ladose de 1g/j en IV ou en IM, après réalisation d’unexamen cytobactériologique des urines (ECBU) etd’une hémoculture. Ce traitement doit être adaptédès réception de l’antibiogramme. La durée detraitement est de 14 jours.

Prostatites aiguës

L’infection urinaire basse n’existe pas chezl’homme. Toute infection urinaire doit faire évoquerune prostatite aiguë.

Parmi les â-lactamines, seule la ceftriaxone a saplace dans le traitement des prostatites aiguës, dufait de sa bonne diffusion tissulaire et de son activitésur les E coli résistants. Elle ne peut être utiliséependant les 4 à 6 semaines du traitement. Le relaispar voie orale est assuré au mieux par une fluoro-quinolone quand la bactérie est sensible.

‚ Infections génitales

Syphilis

Le traitement de la syphilis repose sur lespénicillines.

Dans la syphilis précoce (< 1 an), on peutproposer :

– benzathine pénicilline 2,4 millions d’unité :3 injections IM à 1 semaine d’intervalle ;

Tableau V. – Indications de l’antibiothérapie en cas d’exacerbation de BPCO

Origine infectieuse del’exacerbation

BC isolée BC + TVO BC + TVO + I. resp.

Très probable R R R

Probable D R R

Possible NR D R

Origine infectieuse très probable = apparition ou aggravation d’une dyspnée, et/ou apparition ou augmentation du volume de l’expectoration et/ou purulencede cette expectoration associée à de la fièvre et/ou de nouvelles anomalies radiologiques évocatrices de pneumopathie.Probable = présence d’un ou plusieurs éléments définissant l’exacerbation de BC, associés à un infection aiguë des voies aériennes supérieures ouassociation des trois critères définissant la surinfection de BC.Possible = présence seulement d’un ou deux éléments définissant l’exacerbation.BC = bronchite chronique, TVO = trouble ventilatoire obstructif, R = antibiothérapie recommandée, D = antibiothérapie discutée, NR = antibiothérapie nonrecommandée.

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– pénicilline G procaïne : 1 million d’unités parjour en IM pendant 10 jours.

Dans la syphilis tardive (> 1 an), le schéma est lemême pour le traitement par benzathine pénicilline.Si le choix se porte sur l’utilisation de pénicilline Gprocaïne, la durée du traitement devra être étendueà 15 jours.

Le traitement de la neurosyphilis doit comporterde la pénicilline G à forte dose et être réalisé enhospitalisation.

Salpingites

Dans les salpingites, le traitement est en généralprobabiliste et doit prendre en compte plusieurstypes de germes comprenant Chlamydia tracho-matis, Neisseria gonorrhoeae, E coli et les strepto-coques.

Le traitement des salpingites aiguës doitcomporter une antibiothérapie par voie intra-veineuse et donc être réalisé en milieu hospitalier.

Dans les salpingites subaiguës ou paucisympto-matiques, i l est possible de réaliser uneantibiothérapie per os en utilisant l’associationamoxicilline-acide clavulanique à 2 à 3 g/j associée àune cycline ou à de l’ofloxacine.

La ceftriaxone à 2 g/j en intramusculaire, enassociation avec du métronidazole et une cycline, estun autre schéma possible.

La durée du traitement est de 3 semaines maisl’arrêt des â-lactamines peut être envisagé à2 semaines.

Infections gonococciques

Qu’il s’agisse d’urétrites ou de cervicites, letraitement actuel des infections à Neisseriagonorrhoeae repose sur des traitements minutes. Lesâ-lactamines ne sont pas les seules alternativesthérapeutiques à la prise en charge de ces infectionscompte tenu des résistances observées. Parmi lesâ-lactamines, la ceftriaxone à 250 mg IM une fois etle céfixime 400 mg per os en une fois restent lesseules possibilités thérapeutiques.

‚ Infections cutanées et des tissus mous

Impétigo

Il nécessite une antibiothérapie par voie généraleet une désinfection locale par antiseptiques. Du faitde la grande fréquence de surinfections àStaphylococcus aureus, le choix de l’antibiotique(parmi les â-lactamines) peut se faire entre uneassociation de pénicilline A à un IBL, une pénicillineM ou une céphalosporine de 1re génération. Ladurée du traitement peut être réduite à 5-7 joursdans les formes non compliquées.

Furoncles de la face ou furonculosessur terrains particuliers

En règle générale, le furoncle ne nécessite qu’untraitement local.

L’antibiothérapie s’impose en cas de localisation àla face au-dessus d’une ligne passant par lacommissure labiale (risque de staphylococciemaligne de la face), de localisations multiples etd’apparition sur un terrain fragilisé. Le choix peut

alors se faire, parmi les â-lactamines, entre uneassociation pénicilline A à un IBL, pénicilline M ouune céphalosporine de 1re génération sur une duréed’au moins 7 jours. Il est préférable d’y associer unaminoglycoside pendant les 2 ou 3 premiers joursen cas de furoncle de la face et d’éviter laprescription d’anti-inflammatoires même si lessignes locaux sont importants. La staphylococciemaligne de la face impose l’hospitalisation et laprescription d’une antibiothérapie intraveineuse àdiffusion méningée.

Érysipèle

En cas de localisation au visage, l’antibiothérapieseule suffit : soit dans le cadre d’une hospitalisationavec la pénicilline G (200 000 unités/kg/j) au débutpuis avec un relais oral, soit au domicile avecl’amoxicilline (IM ou IV : 1g x 2 /j ; per os : 1 g x 3/jchez l’adulte) ou une pénicilline M (en cas de doutesur un staphylocoque) aux mêmes posologies. Lescéphalosporines de 1re génération sont égalementefficaces mais en général plus coûteuses. La duréedu traitement est de 15 jours.

En cas de localisation sur les membres inférieurs, ilfaut associer au traitement antibiotique (cf supra) untraitement anticoagulant à dose prophylactique desthromboses.

En cas de récidives très fréquentes et surtout si lefacteur déclenchant (lymphœdème chronique, plaiechronique) est mal contrôlé, une antibioprophylaxiepeut être proposée par la benzathine pénicilline, àraison d’une injection IM toutes les trois semaines(1,2 million d’unités).

Infection de plaie

Lorsqu’elle est superficielle, sans signes dediffusion régionale (lymphangite) ou générale(fièvre), un traitement antiseptique local suffit. Dansles autres cas, un prélèvement microbiologique estnécessaire et l’antibiothérapie générale est fonctionde l’antibiogramme et de la sévérité des symptômes.Une hospitalisation est nécessaire si le dermeprofond est atteint et à fortiori en cas de suspicion defasciite et/ou de pyomyosite pour lesquelles untraitement médico-chirurgical est urgent.

‚ Place des â-lactaminesen antibioprophylaxie

Prophylaxie de l’endocardite infectieuse [4]

Chez le patient valvulaire, les mesures deprophylaxie doivent être appliquées lors de toutesituation à risque comprenant les soins dentairesbien sûr, mais également toute intervention sur lesvoies aériennes supérieures et la cavité buccale, lesinterventions sur les voies urinaires et les voiesbiliodigestives.

En cas de soins dentaires ou de gestes sur lesvoies aériennes supérieures, il faut proposer 3 gd’amoxicilline per os dans l’heure précédent le gestechez l’adulte et 75 mg/kg chez l’enfant. Cela bien sûren dehors d’allergie vraie connue aux â-lactamines.

Si ces soins sont réalisés sous anesthésiegénérale, l’amoxicilline doit être donnée à la dose de2 g en intraveineux (50 mg/kg chez l’enfant) dansl’heure précédant le geste puis 1 g per os 6 heuresplus tard.

Lors des interventions urogénitales ou digestives,le schéma proposé est différent du fait de lapossibilité d’un entérocoque : amoxicilline 2 g IVdans l’heure précédant le geste suivie degentamycine 1,5 mg/kg puis 1 g per os d’amoxilline6 heures plus tard chez l’adulte. Chez l’enfant la dosed’amoxicilline est de 50 mg/kg en IV 1 heure avantle geste puis 25 mg/kg per os 6 heures plus tard.

Morsures, Griffades

Après morsure ou griffade par un animaldomestique tel qu’un chat ou un chien, outrel’évaluation du risque de rage s’il s’agit d’un animalerrant dans une zone d’endémie, il est raisonnablede proposer une antibiothérapie.

Il convient bien entendu avant toutes choses depratiquer des soins locaux et de ne pas oublier lavaccination antitétanique s’il y a lieu.

Dans ces circonstances, le risque est essentiel-lement lié à Pasteurella multocida mais également àune surinfection par staphylocoque ou streptocoque.On peut alors proposer une antibiothérapie parassociation amoxicilline-acide clavulanique, pendant5 à 7 jours.

Morsures de tiquesAprès morsure de tique dans les zones d’endémie

de maladie de Lyme, si la morsure date de plus de24 heures (tique gorgée de sang, extraction difficile),il est licite d’instaurer une antibiothérapie paramoxicilline à la dose de 3 g par jour pendant3tsemaines.

Antibioprophylaxiedu rhumatisme articulaire aigu (RAA)

Son but est d’éviter les récidives après un premierépisode de rhumatisme articulaire aigu.

Ce traitement doit être commencé tout de suite enrelais du traitement curatif. Il repose sur l’utilisationde la benzatine pénicilline à 1,2 millions d’unitéstoutes les 2 à 3 semaines pendant 5 ans dans lesformes majeures (mono- et polyarthrites fébriles,cardite, chorée) et 1 an dans les formes mineures(polyarthralgie fébrile, troubles du rythme cardiaque,troubles de la conduction ou persistance d’unsyndrome inflammatoire subfébrile au décoursd’une angine streptococcique).

■Effets secondaires -

précautions d’emploi

‚ Effets secondaires communsà l’ensemble des â-lactamines

Réactions allergiques (tableau VI)

Leur fréquence est de 0,4 à 8 % au cours detraitements par pénicillines et de 3 à 10 % avec lescéphalosporines.

Elles comportent essentiellement des réactionsallergiques cutanées ou muqueuses :

– à type de rash urticarien, œdème de Quinckedans l’allergie vraie médiée par les IgE ;

– à type d’exanthèmes morbilliformes,scarlatiniformes, vésiculeux, purpuriques, dansl’allergie réaction.

5-0020 - Bêtalactamines

6

Page 38: Le manuel du généraliste   antibiothérapie

On peut également rencontrer des fièvres isolées,des vascularites, des atteintes hématologiques(leucopénie, anémie, thrombopénie).

Les réactions allergiques à une pénicilline sontcroisées avec les autres pénicillines et dans 10 % descas avec les céphalosporines.

On distingue :– les réactions immédiates : survenant dans la

1re heure après la prise de traitement (0,2 % des cas).Elles se manifestent par l’apparition d’une urticaire ±réaction anaphylactique, ± choc ;

– les réactions précoces : apparaissant entre la1re et la 72e heure. Elles se manifestent parl’apparition d’une urticaire ± réaction ana-phylactique ;

– les réactions tardives : apparaissant au-delà de72 heures. Les manifestations sont essentiellementcutanées.

Les deux premiers types de réaction défi-nissent l’allergie vraie (5 % des allergies) à lapénicilline et contre-indiquent l’emploi ultérieur

de pénicilline. Si l’utilisation de ces antibiotiquesest indispensable (neurosyphilis), la réintroductiondoit être réalisée en milieu hospitalier aprèsdésensibilisation.

Les réactions tardives (95 % des cas) ne sont pasune contre-indication à l’utilisation ultérieure depénicilline ou de céphalosporines.

Autres réactions

Des troubles de l’agrégation plaquettaire ont étédécrits lors de l’administration de pénicilline à fortesdoses.

De façon générale, les pénicillines et les cépha-losporines injectables sont à l’origine, en intra-musculaire, d’importantes douleurs aux pointsd’injection pouvant limiter de beaucoup leurutilisation. À certaines céphalosporines injectableson a d’ailleurs adjoint de la lidocaïne pour limiter ceteffet.

Comme avec tous les antibiotiques, l’adminis-tration de â-lactamines peut entraîner le déve-

loppement de colites pseudomembraneuses àClostridium difficile imposant l’arrêt du traitement etune thérapeutique spécifique.

Dans l’ensemble, toutes les â-lactamines sontéliminées par voie rénale et imposent uneadaptation des doses en cas d’insuffisance rénale,surtout lors d’utilisation de posologies élevées et defaçon prolongée.

‚ Effets secondaires spécifiques

Aux pénicillines

Avec la pénicilline M, on a montré une plusgrande fréquence de néphrites interstitielles. Celasemble plus être le cas avec la méticilline (nondisponible aujourd’hui), qu’avec les autres moléculesdu groupe.

Avec les aminopénicillines, on a montré un risqueaccru de réactions cutanées lors de l’administrationau cours d’une mononucléose infectieuse et lors dessyndromes prolifératifs lymphocytaires. De même,l’administration concomitante d’allopurinol expose àun risque augmenté de réactions cutanées.

Les associations de pénicilline A + IBL ont commeprincipaux effets secondaires une mauvaisetolérance gastro-intestinale avec notammentl’apparition sous traitement de nausées et surtout dediarrhées. Il semble que ces phénomènes soient unpeu moins fréquents avec le sulbactam qu’avecl’acide clavulanique. On a noté, par ailleurs, de rarescytolyses et/ou cholestases hépatiques.

Aux céphalosporines

L’administration de céphalosporines peut être àl’origine de troubles digestifs mineurs tels quenausées, douleurs abdominales et diarrhées. Il a étésignalé également des hyperéosinophilies et desélévations transitoires des transaminases avecl’ensemble des molécules de la classe. Avec laceftriaxone, on a constaté quelques cas depseudolithiases vésiculaires à l’origine, dans certainscas, de cholécystites aiguës. La symptomatologierégresse spontanément à l’arrêt du traitement. Ceteffet indésirable contre-indique la ceftriaxone chez letout petit.

Michèle Grappin : Assistant spécialiste.Pascal Chavanet : Professeur des Universités, praticien hospitalier.

Henri Portier : Professeur des Universités, praticien hospitalier.Service de maladies infectieuses et tropicales. CHU de Dijon, complexe du Bocage, 10, Bd Maréchal-de-Lattre-de-Tassigny, 21034 Dijon cedex, France.

Toute référence à cet article doit porter la mention : M Grappin, P Chavanet et H Portier. Bêtalactamines.Encycl Méd Chir (Elsevier, Paris), Encyclopédie Pratique de Médecine, 5-0020, 1998, 7 p

R é f é r e n c e s

[1] Anonymous. Les infections ORL. 10e Conférence de consensus en thérapeu-tique anti-infectieuse de la Société de pathologie infectieuse de langue française.Med Mal Infect1997 ; 27 (suppl) : 341-354

[2] Anonymous. Les infections des voies respiratoires. 4e Conférence de consen-sus en thérapeutique anti-infectieuse de la Société de pathologie infectieuse delangue française.Med Mal Infect1992 ; 22 : 51-62

[3] Anonymous. Antibiothérapie des infections urinaires. 2e Conférence deconsensus en thérapeutique anti-infectieuse de la Société de pathologie infectieusede langue française.Med Mal Infect1991 ; 21 : 59-82

[4] Anonymous. Prophylaxie de l’endocardite infectieuse. 5e Conférence deconsensus en thérapeutique anti-infectieuse de la Société de pathologie infectieusede langue française.Med Mal Infect1992 ; 22 (numéro spécial) : 1119-1141

[5] Association des professeurs de pathologie infectieuse et tropicale. Le généra-liste et la pathologie infectieuse (1re ed). 2M2. Montmorency, 1995 : 1-184

[6] Mayaud C, Tremolieres F, et le groupe de travail SPILF. Recommandationspour la prise en charge anti-infectieuse des exacerbations de bronchite chronique.Med Mal Infect1996 ; 26 : 344-347

Tableau VI. – Allergies auxâ-lactamines. Tableau résumé.

Délais d’apparitionaprès la prised’antibiotiques

Dans la 1re heure De 1 à 72heures Au-delà de 72 heures

Signes cliniques Urticaire Urticaire Exanthème morbilliformeRéaction anaphylactique Réaction anaphylactique scarlatiniformeChoc purpurique

VésiculesFièvreStevens JohnsonMaladie sériqueLyellNeutropénie, anémie,thrombopénie

Type d’allergie Allergie vraie* Allergie vraie* Allergie réaction**

Fréquence 5 % 95 %

Conduite à tenir Contre-indication défini-tive

Contre-indication défini-tive

Réintroduction possible

* + maladie sérique.** sauf maladie sérique.

Bêtalactamines - 5-0020

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Page 39: Le manuel du généraliste   antibiothérapie

Chloramphénicol, phénicolés

JP Brion

■Introduction

Le chloramphénicol a été identifié en 1947.Initialement produit par fermentation bactérienne, lechloramphénicol a été le premier antibiotique a êtreproduit à large échelle par synthèse chimiqueexclusive. Deux principaux représentants constituentcette famille, le chloramphénicol et le thiamphénicol.Bien que dotés d’un large spectre, de différentesformes galéniques et de propriétés pharmacociné-tiques intéressantes, ces antibiotiques ont vu leurdéveloppement limité par leur toxicité. Les infectionsneuroméningées et les fièvres typhoïdesreprésentent les indications encore actuelles de cesantibiotiques. Leur usage en topiques locaux, trèsrépandu en ophtalmologie, est actuellement remisen question car des accidents hématologiquesgraves ont été rapportés.

■Propriétés physicochimiques

et spectre antibactérien

‚ Relation structure et activité

Le chloramphénicol et le thiamphénicol sont deuxmolécules dont la structure est assez proche (fig 1).La chaîne centrale aminopropanediol est associée àl’activité antibactérienne de la molécule. Le noyauaromatique peut être remplacé sans que cetteactivité soit supprimée. Cette structure confère uneforte liposolubilité à ces molécules. La substitution du

groupement nitré par un groupement méthylsul-fonyl (CH3-SO2) en position para correspond authiamphénicol. Cette modification réduit l’activitéintrinsèque, mais diminue la toxicité.

‚ Mécanisme d’action

Le chloramphénicol pénètre dans la bactérie parun mécanisme actif. Il entraîne la mort de la bactérieen inhibant les synthèses protéiques de cettedernière, en se fixant au niveau du ribosomebactérien. Le chloramphénicol agit principalementau niveau du site d’élongation du peptide en coursde synthèse. Il bloque l’activité de la peptidyltrans-férase, enzyme impliquée dans cette phase desynthèse.

La toxicité hématologique dose-dépendante duchloramphénicol serait due à l’inhibition de lafonction mitochondriale au niveau des précurseurshématopoïétiques.

‚ Activité antibactérienne (tableau I)

Les phénicolés sont des antibiotiques à largespectre. Actif sur la plupart des bactéries aérobies àGram positif et négatif, le chloramphénicol demeureune référence sur les germes anaérobies. Par ailleurs,les pathogènes intracellulaires (Chlamydia ,Mycoplasme et Rickettsie) sont inclus dans le spectred’activité de ces molécules, ainsi que les spirochètes.Les résistances naturelles de cette famille concernentPseudomonas aeruginosa, Acinetobacter, Serratia etles mycobactéries. Les concentrations critiques tellesqu’elles ont été déterminées par le comité del’antibiogramme en 1996 retiennent uneconcentration inférieure ou égale à 8 mg/L pour uneespèce sensible et supérieure à 16 mg/L pour uneespèce résistante (les mêmes valeurs sont retenuespour le chloramphénicol et le thiamphénicol). Onpeut remarquer que les CMI 50 de la plupart desentérobactéries sensibles aux phénicolés sont de 10

à 100 fois plus élevées que celles observées avec lescéphalosporines de 3e génération ou lesfluoroquinolones.

Les phénicolés sont des antibiot iquesbactériostatiques sur la majorité des germessensibles, à l’exception de Haemophilus influenzae,Streptococcus pneumoniae et Neisseria meningitidis.

Il existe un antagonisme in vitro entre lesphénicolés et les antibiotiques bactéricides tels queles pénicillines et les aminoglycosides

La résistance par diminution de la perméabilité dela paroi est décrite et reste sans conséquenceclinique. Le principal mécanisme de résistance auxphénicolés dont le support génétique estplasmidique, est de nature enzymatique. Leschloramphénicols acétyltransférases gène cat vonttransformer la molécule d’origine en un dérivédiacétyl inactif. Ce phénotype de résistance a étérapporté lors de certaines épidémies de fièvrestyphoïdes et de shigelloses survenues en Amériquecentrale et en Asie du Sud-Est. En Francemétropolitaine, l’incidence des résistances doit êtreconnue pour les germes impliqués lors des infectionsneuroméningées. Les méningocoques restentlargement sensibles à ces antibiotiques. Les souchesde H influenzae isolées de méningites restentsensibles dans plus de 95 % des cas aux phénicolés.En ce qui concerne les pneumocoques, l’incidence dela résistance aux phénicolés augmente et concerneen particulier les souches de sensibilité anormale à lapénicilline G (36 % des souches portaient la doublerésistance pénicilline-chloramphénicol en 1992 et44,3 % en 1996). Des souches de Lister iamonocytogenes résistant aux phénicolés ont étédécrites. Cette résistance concernait d’autresantibiotiques.

En marge des germes impliqués dans lesinfections neuroméningées, la sensibilité aux

Chloramphénicol (Chloramphénicolt,Tifomycinet, Sintomycétinet,Solnicolt).Thiamphénicol (Thiophénicolt)Large spectre antibactérien ; activitéantianaérobies +++.Diffusion intracérébrale et diffusionintracellulaire.Toxicité hématologique (aplasiemédullaire) par voie générale et parvoie locale (collyre).Indications de première intention :abcès cérébraux et pays en voie dedéveloppement.Traitement alternatif : infectionsneuroméningées.Rickettsioses et fièvre Q.Fièvres typhoïdes.

NH

CH-CH-CH2OH

OH

O

C-CHCl2

Chaîne acyle

Noyauaromatique

Chaîneaminopropanediol

NH

CH-CH-CH2OH

OH

H3CSO2

O

C-CHCl2

1 A. Chloramphénicol.B. Thiamphénicol.

A B

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5-0070

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phénicolés apparaît conservée sur des bactériesnosocomiales telles que le staphylocoque dorérésistant à la méthicilline ou les entérocoques.

■Considérations

pharmacocinétiques (tableau II)

La biodisponibilité après une prise orale est de70 %. Elle n’est pas affectée par la prise alimentaire.Un taux sérique de 12 mg/L est observé 1 heureaprés la prise orale de 1 g de chloramphénicol.

La distribution tissulaire et dans les fluidesbiologiques est bonne, avec un volume apparent dedistribution voisin de 100 L (0,6 à 2,1 L/kg). Ladiffusion intracellulaire se fait à des tauxthérapeutiques.

Il existe une concentration au niveau desganglions mésentériques. Les phénicolés traversentla barrière placentaire et sont excrétés dans le lait.

Une des caractéristiques majeures de cesantibiotiques est représentée par leur excellentediffusion au niveau du système nerveux. Lesconcentrations observées dans le liquidecéphalorachidien (LCR) atteignent 30 à 50 % destaux sériques, et ceci quel que soit l’étatinflammatoire des méninges. La diffusion dans leparenchyme cérébral sain est remarquable, avec unrapport de concentration cerveau/sang pouvantatteindre 900 %. Les concentrations mesurées dansle pus d’abcès cérébral sont variables maisatteignent les taux thérapeutiques habituellementrequis pour ce type d’infections.

Après inactivation hépatique, le chloramphénicolest excrété sous forme inactive au niveau du rein.

L’intégrité de cette étape d’inactivation hépatiqueest fondamentale, en effet, en cas d’insuffisancehépatocellulaire, le seuil toxique de 30 mg/L desérum est facilement atteint ou dépassé. Lethiamphénicol n’est pas métabolisé au niveauhépatique, et seule l’insuffisance rénale conduit àadapter la posologie.

■Posologie et voie

d’administration (tableau III)

‚ Effets indésirables, précautionsd’utilisation

La toxicité médullaire constitue l’atteinte la plusgrave et la plus fréquente.

L’anémie aplasique est spécifique du chloramphé-nicol. Cet accident grave potentiellement mortel estpeu fréquent (1/20 000 à 60 000 traitements). Ils’agit d’une aplasie médullaire profonde etprolongée survenant de façon imprévisible, parfoisdes semaines ou des mois après l’arrêt dutraitement, et indépendante de la dose reçue. Sonmécanisme est mal connu (immunoallergique,métabolite toxique ?). Il semble que les traitementsdispensés par voie orale soient plus fréquemmentmis en cause. Les collyres à base de chloramphé-nicol, largement utilisés en ophtalmologie, ont étéclairement impliqués dans l’origine d’aplasiemédullaire chez certains patients traités par voielocale.

Cet effet toxique est de description plus récente, etbien que peu fréquent, il remet en questionl’utilisation de cet antibiotique dans ce typed’indication.

Les traitements par chloramphénicol ont étéassociés à un risque de leucémie. Ces hémopathiesont été observées dans les suites d’aplasies, maisaussi chez l’enfant, lors de traitements supérieurs à10 jours, et en l’absence d’aplasie.

L’insuffisance médullaire précoce et réversibleconcerne le chloramphénicol et le thiamphénicol.Cet événement est plus fréquent et dose-dépendant

(posologie journalière supérieure à 4 g). Il survient defaçon précoce et reste habituellement réversible àl’arrêt du traitement. L’atteinte des différentes lignéespeut être dissociée. Sa fréquence impose laréalisation d’une numération formule sanguinehebdomadaire lors de traitements prolongés.

Le syndrome gris ou grey baby syndrome est unaccident potentiellement mortel décrit chez leprématuré ou le nouveau-né. Il correspond àl’accumulation toxique de chloramphénicol parimmaturité hépatique. Un tableau équivalent a étérapporté chez le nouveau-né dont la mère a été

Tableau I. – Concentrations minimales inhibitrices (CMI) des principales espèces bactériennessensibles (modifié, d’après Shabed Y et al, J Infect 1989).

CMI (mg/L) % de souches inhibées

Aérobies à Gram positifStaphylococcus aureus 6,3-12,5 95Staphylococcus aureus methi R 6,3-25 20-90Streptococcus pyogenes 3,1-6,3 100Streptococcus viridans 12,5-25 50Streptococcus pneumoniae 3,1-6,3 50-100Listeria monocytogenes 1,6-6,3 100

Aérobies à Gram négatifHaemophilus influenzae 1,6-3 95-100Neisseria meningitidis 0,8-3,1 100Neisseria gonorrhoeae 0,8-3,1 100Bordetella pertussis 0,4-6,3 100Escherichia coli 3,1-12,5 100Enterobacter 6,3-25 70Serratia 12,5-25 50Proteus mirabilis 3,1-12,5 90Proteus indole+ 6,3-25 65Salmonella typhi 3,1-12,5 100Shigella sp 1,6-12,5 100Yersinia pseudotuberculosis 3,1-12,5 100Vibrio cholera 6,3-12,5 90Acinetobacter sp 12,5-25 30Pseudomonas aeruginosa > 25

Anaérobies à Gram positifClostridium sp 1,6-6,3 100Peptococcus sp 1,6-6,3 100

Anaérobies à Gram négatifFusobacterium sp 0,8-6,3 100Bacteroïdes fragilis 3,1-12,5 100Bacteroïdes sp 1,6-6,3 100Prevotella sp 1,6-6,3 100Veillonella sp 0,4-3,1 100

Tableau II. – Principales caractéristiques pharmacocinétiques.

Chloramphénicol Thiamphénicol

Palmitate Succinate Base Glycinate

Voie d’administrationper os + _ + _parentérale (IV, IM) _ + _ +

Biodisponibilité (%) 80-90 70 80

Concentration sérique (max per os mg/L) IV 10-13 10 (1g IV) 6,25 53 (1,5 g IV)Temps 30 min-3 h 2 h 2 h 1 h 30

Demi-vie (heures) 2-4 2-3

Fixation protéique (%) 25-50 10-20

Biotransformation (%) 70-90 5-10

Elimination (%) rénale inchangée 5 40 50-70 60-80(prodrogue)

5-0070 - Chloramphénicol, phénicolés

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Page 41: Le manuel du généraliste   antibiothérapie

traitée par cet antibiotique en fin de grossesse ou encas de surdosage chez l’enfant ou l’adulte.

‚ Autres effets secondaires

Les complications neurologiques à type de névriteoptique sont rares.

Une intolérance digestive mineure (nausées,vomissements, diarrhée) a été rapportée dans 10 %des cas.

Des réactions de Jarisch-Herxheimer sontsurvenues lors du traitement à doses pleinesd’emblée de fièvre typhoïde, de syphilis ou debrucellose.

‚ Interactions médicamenteuses

Sur le plan pharmacodynamique, le chloramphé-nicol prolonge la demi-vie du tolbutamide, de lachlorpromazine, des phénytoïnes, du cyclophos-phamide et de la warfarine.

Les phenytoïnes, la rifampicine et le phénobar-bi ta l diminuent les taux sér iques dechloramphénicol.

Une toxicité accrue est observée avec la plupartdes médicaments métabolisés au niveau hépatique,en particulier en cas d’insuffisance hépatocellulaire.

■Indications (tableau III)

Les effets secondaires graves et fréquents duchloramphénicol ont limité ses indications depremière intention. Le thiamphénicol, de toxicitémoindre, n’est pas soumis à d’aussi strictescontraintes. Largement utilisée il y a 30 ans, cettefamille d’antibiotiques a vu ses indications serestreindre au profit d’antibiotiques plus actifs etmieux tolérés.

‚ Infections neuroméningées

Les caractéristiques pharmacocinétiques de cesantibiotiques, tant au niveau de la diffusionhématoméningée que dans le parenchyme cérébralou dans le pus d’abcès cérébral, donnent une placede choix aux phénicolés pour le traitement de cetype d’infections.

Méningites bactériennes

Les phénicolés ont constitué durant des annéesles antibiotiques de référence du traitement desméningites purulentes de l’adulte et de l’enfant. La 9e

Conférence de consensus en thérapeutique

anti-infectieuse (février 1996), consacrée auxméningites purulentes communautaires, ne donnaitplus de place aux phénicolés dans cette indication.Malgré une activité conservée de ces antibiotiquessur les méningocoques et sur Haemophilusinfluenzae, confirmée par de nombreux travauxcliniques, le problème des résistances auchloramphénicol, observées avec le pneumocoquede sensibilité anormale à la pénicilline, a conduit àun autre choix. De plus, Friedland a rapporté deséchecs cliniques du chloramphénicol dans une étudeévaluant l’intérêt de cet antibiotique lors dutraitement des méningites à pneumocoquesrésistant à la pénicilline dans une populationpédiatrique. La raison principale de l’échec étaitattribuée à une bactéricidie insuffisante del’antibiotique au niveau du LCR.

Les phénicolés pourront être proposésuniquement en traitement alternatif chez les patientsintolérants aux céphalosporines de 3e génération ouà l’amoxicilline.

En ce qui concerne les infections à Listeriamonocytogenes, le chloramphénicol peut êtreenvisagé en cas d’intolérance aux amoxipénicillineset au cotrimoxazole, mais des échecs thérapeutiquesont été publiés dans cette indication.

Abcès cérébraux et empyèmes sous-duraux

Le chloramphénicol représente l’antibiotique lemieux référencé dans ces indications. Les posologiessont élevées et atteignent souvent 100 mg/kg/j. Ils’agit d’une indication potentielle de premièreintention, qui concerne les abcès cérébrauxcommunautaires ou les empyèmes cérébrauxsecondaires à une suppuration de voisinage(sinusite, otite, mastoïdite) chez le sujetimmunocompétent. Un contrôle hématologiquehebdomadaire est indispensable, car il s’agithabituellement d’un traitement de longue durée etrarement inférieur à 3 mois. La pénicilline G oul’amoxicilline sont fréquemment associées auchloramphénicol dans ces indications.

Il convient d’être plus nuancé lors des infectionspostopératoires, car il peut s’agir de germeshospitaliers, et l’utilisation de l’antibiogramme estindispensable pour le choix de la molécule.

‚ Fièvres typhoïdeset salmonelloses invasives

Les phénicolés demeurent un traitement deréférence des fièvres typhoïdes et restent efficaces etbien tolérés. Cependant, des études comparativesrécentes démontrent une efficacité comparable d’un

traitement de 14 jours de chloramphénicol contre 5jours pour les nouvelles fluoroquinolones ou laceftriaxone.

Des souches de Salmonella typhi résistantes auxphénicolés et responsables d’épidémies meurtrièresont été rapportées ces dernières années en Inde, auViêt-nam et au Mexique.

La résistance des salmonelloses mineures auxantibiotiques n’épargne pas les phénicolés, et leurutilisation dans les formes invasives nécessite devérifier l’antibiogramme.

‚ Rickettsioses

Les phénicolés conservent une place dansl’antibiothérapie des fièvres boutonneuses et destyphus. Cependant, l’intérêt des tétracyclines, enparticulier de la doxycycline, par rapport auxphénicolés a été clairement démontré lors d’essaiscontrôlés en terme d’efficacité clinique ou de taux derechute. Les phénicolés demeurent le traitement depremière intention chez l’enfant lors de cesinfections. La fièvre Q peut être traitée parphénicolés en alternative aux cyclines, avec uneefficacité probablement comparable.

‚ Autres indications

Les infections invasives à Haemophilus influenzae(épiglottite, arthrites) peuvent bénéficier d’untraitement par phénicolé. Le thiamphénicol estencore utilisé lors de la thérapeutique de maladiessexuellement transmissibles telles que la gonococcie,le chancre mou et la lymphogranulomatosevénérienne. Ces antibiotiques peuvent être proposéslors du traitement d’infections à germesintracellulaires comme les mycoplasmes etChlamydiae, en alternative au traitement deréférence (intolérance, toxicité, contre-indication).L’efficacité du chloramphénicol a été rapportée defaçon ponctuelle lors du traitement de la brucellose,de la tularémie et de la mélioïdose.

‚ Pays en voie de développement

La place des phénicolés est extrêmement réduitedans les pays occidentaux. De nombreusesmolécules aussi efficaces et moins toxiques commeles céphalosporines et les fluoroquinolones ontsupplanté cette famille d’antibiotiques dans laplupart de nos indications. En revanche, lechloramphénicol reste un produit extrêmementcompétitif dans les pays en voie de développement.Son coût est très faible, son spectre est large etpermet d’envisager le traitement de nombreusesmaladies infectieuses, sa conservation ne pose pasde problème et différentes formes galéniques sontdisponibles, en particulier pour l’usage pédiatrique.Pour les services de santé ayant des ressourceslimitées, le chloramphénicol huileux représente lemeilleur choix thérapeutique pour combattre lesépidémies d’infections à méningocoque. Une seuledose IM (100 mg/kg) est suffisante dans la plupartdes cas (Guide pratique OMS, 1996). En marge desindications habituelles, les phénicolés restentlargement utilisés lors du traitement des infectionsbronchopulmonaires, ORL et cutanées.

Tableau III. – Posologie et voie d’administration du chloramphénicol et du thiamphénicol.

Dénominationcommune

internationale

Nom commercialt Posologie usuelle

Chloramphénicol Chloramphénicol 25 à 50 mg/kg en 2 à 4prises per osTifomycine 25 à 50 mg/kg voie injectableSintomicétine 100 mg/kg/j (exceptionnel)Solnicol

ThiamphénicolThiophénicol (glycinate) 30 à 50 mg/kg en 2 à 4prises per os ou

750 à 1 500 mg/j par voie IM ou IVComprimés à 250 mgFlacon de 750 mg

Chloramphénicol, phénicolés - 5-0070

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Page 42: Le manuel du généraliste   antibiothérapie

‚ Infections à germes résistants

Cette indication potentielle concerne lesinfections à Cocci à Gram positif polyrésistantes. Ils ’agi t des infect ions à staphylocoquesméthicillinorésistants et à entérocoques. Il existeassez peu d’études cliniques validant cetteindication, mais il est notable que la sensibilité desstaphylocoques méthicillinorésistants hospitaliersest de l’ordre de 90 %. Norris et al ont souligné,dans une publication récente, l’intérêt duchloramphénicol lors du traitement d’infectionsgraves à entérocoque résistant à la vancomycine.

■Conclusion

Les phénicolés restent parmi les antibiotiques lesplus largement prescrits dans les pays en voie dedéveloppement.

Dans les pays occidentaux, la supériorité descéphalosporines de 3e génération a été clairementdémontrée dans le traitement des méningitesbactériennes, et les fluoroquinolones récentes ontsupplanté cette famille dans la thérapeutique dessalmonelloses.

Malgré les caractéristiques pharmacocinétiqueset l’activité antibactérienne de ces antibiotiques,leur toxicité hématologique fait préférer desmolécules aussi efficaces et bien tolérées dans lamajorité des indications courantes. Le traitementdes abcès cérébraux représente la principaleindication de traitement de première intention parphénicolés. L’évolution des résistancesbactériennes et la nécessité de traitement deseconde intention permettent à cette familled’antibiotiques de conserver sa place dans notrearsenal anti-infectieux.

Jean-Paul Brion : Praticien hospitalier,service des maladies infectieuses et tropicales, centre hospitalier et universitaire de Grenoble, 38043 Grenoble cedex 09, France.

Toute référence à cet article doit porter la mention : JP Brion. Chloramphénicol, phénicolés.Encycl Méd Chir (Elsevier, Paris), Encyclopédie Pratique de Médecine, 5-0070, 1998, 4 p

R é f é r e n c e s

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5-0070 - Chloramphénicol, phénicolés

4

Page 43: Le manuel du généraliste   antibiothérapie

Classification des antibiotiques :

relation structure-activité

MH Andre, O Lortholary, A Bryskier

■Introduction-principes généraux

de l’antibiothérapie

Les antibiotiques sont des agents antibactériensdont le rôle principal est de permettre unediminution de la taille de l’inoculum bactérien parleur effet bactéricide ou bactériostatique, facilitantainsi l’action des défenses immunitaires de l’hôte.Leur prescription doit être rigoureuse afin depermettre une éradication bactérienne, tout enpréservant un équilibre écologique individuel etcollectif à un moindre coût global du traitement. Laconnaissance des différentes familles d’antibiotiques,des avantages et des indications des nouveauxmédicaments, de la relation entre la structure et lespropriétés de l’antibiotique (pharmacocinétique,activité antibactérienne, toxicologique...) permettentde mieux orienter le choix d’une antibiothérapie enprésence d’une infection bactérienne, suspectée ouconfirmée.

D’autres paramètres sont également à considéreravant toute prescription d’un antibiotique [8] :

– existe-t-il une documentation bactériologiquede l’infection (antibiothérapie ciblée ou empirique) ?

– degré de gravité de l’infection et son site ;– terrain sous-jacent (pathologies associées

comme une insuffisance rénale ou hépatique, âgedu patient, existence d’un déficit immunitaire,allergies connues).

La surveillance du traitement permettra dedétecter les éventuels échecs de naturemicrobiologique ou non ainsi que des manifesta-tions d’intolérance.

■Classification des antibiotiques

Les antibiotiques interagissent avec une cible,entraînant une altération de la physiologiebactérienne : inhibition de la croissance (effetbactériostatique) ou du métabolisme, entraînant lamort cellulaire (effet bactéricide). Les différentescibles possibles des antibiotiques sont :

– les enzymes bactériennes à l’origine de lasynthèse de certains éléments de la paroibactérienne (par exemple les protéines liant lespénicillines [PLP]) ;

– les enzymes bactériennes à l’origine de lasynthèse de l’ acide désoxyribonucléique (ADN) ;

– inhibition de la synthèse des protéines.

La figure 1 situe les cibles des principauxantibiotiques.

Pour agir, un antibactérien doit être capable detraverser la paroi bactérienne, d’éviter certainesenzymes inactivantes (exemples : bétalactamases,enzymes inactivant les aminoglycosides) et enfin,d’atteindre leur cible cellulaire.

Pour simplifier, nous allons classer lesantibactériens en fonction de leur cible principale àl’intérieur de la bactérie, et ainsi de leur moded’action, comme indiqué par le tableau I.

‚ Antibiotiques inhibiteurs de la synthèsede la paroi bactérienne

Les principales familles agissant au niveau de lasynthèse de la paroi bactérienne sont : lesbétalactamines, les glyco- et lipoglycopeptides [9].

Bêtalactamines

La famille des bêtalactamines comporte denombreuses molécules bactéricides dont lesparticularités communes sont de posséder un noyaubêtalactame et un mode d’action identique eninhibant la dernière étape de la synthèse dupeptidoglycane. Les principaux mécanismes derésistance bactérienne à cette famille d’antibiotiquessont :

– altération de la perméabilité de la paroi ;– inactivation par des enzymes bactériennes

localisées dans l’espace périplasmique des bactéries,les bêtalactamases (exemple : Haemophilusinfluenzae). C’est le plus fréquent des mécanismes derésistance ;

– modifications de la cible, les PLP (par exemple,résistance des staphylocoques à la méticilline et dupneumocoque à la pénicilline G).

On peut schématiquement individualiser quatregrands groupes :

– pénicillines ;

La structure d’un antibiotique, oud’une famille d’antibiotiques,conditionne en grande partie l’activitéantibactérienne, les propriétéspharmacocinétiques et les éventuelseffets secondaires des différentesmolécules.

Les antibiotiques peuvent être classésselon leur mode d’action, en fonctionde leur cible principale à l’intérieur dela bactérie.

synthèseacide folique 50 s

30 s

PLP

1

2

a

b

3

7

6

5

4

1 Cibles des principaux antibiotiques.a. Paroi bactérienne ; b. espace périplasmique ; 1. bêtalactamine (PLP) ; 2. glycopeptides (D-ala) ; 3.dihydroptéorate synthétase (sulfamides) ; 4. fixation à la sous-unité 50 S du ribosome (macrolides, synergistines,lincosamides, phénicolés) ; 5. fixation à la sous-unité 30 S du ribosome (aminosides, tétracyclines) ; 6. acidesnucléiques (quinolones, rifamycines, nitro-imidazolés) ; 7. membranes cytoplasmiques (polymyxines).

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5-0015

Page 44: Le manuel du généraliste   antibiothérapie

– céphèmes ;– carbapénèmes ;– bêtalactamines monocycliques [4] (tableau II).

¶ Pénicillines

Pénicilline GLa pénicilline G et sa forme orale la pénicilline V

(Oracillinet), sont les premières molécules de lafamille des bêtalactamines. La pénicilline G estessentiellement utilisée dans les infectionsstreptococciques. Actuellement, on assiste à uneperte d’activité de la pénicilline G sur Streptococcuspneumoniae, Streptococcus viridans et sur Neisseriameningitidis.

Grâce à des modifications chimiques au niveaude sa structure, de nouvelles molécules ont étéobtenues.

Pénicillines MLes pénicillines M dont la méticilline et l’oxacilline

(Bristopent) ont un spectre d’activité comprenant lesstaphylocoques producteurs de pénicillinase. Enmilieu hospitalier, l’incidence des souches destaphylocoques résistantes à la méticilline, et alors leplus souvent multirésistantes, est importante.

Alpha-aminopénicillines et amidinopénicillinesLes alpha-aminopénicillines (pénicillines A,

représentées par l’ampicilline et ses dérivés) et lesamidinopénicillines (pivmécillinam), se caractérisentpar une bonne absorption orale pour certainsdérivés de l’ampicilline (amoxicilline) et une activitéantibactérienne élargie (entérobactéries comme

Escherichia Coli, Salmonella sp, Shigella sp et Proteusmirabilis), mais des résistances acquises fréquentessont décrites.

Alphacarboxypénicillines et uréidopénicillines

Elles sont des dérivés de l’ampicilline. Leur spectrecomprend certaines bactéries à Gram négatifrés is tantes aux alpha-aminopénic i l l ines(Enterobacter sp, Citrobacter freundii, Serratia sp,Proteus sp, Morganella morganii, Providencia sp etPseudomonas aeruginosa).

¶ CéphèmesOn regroupe sous ce terme les céphalosporines

proprement dites, les céphamycines (céfoxitine :Méfoxint, céfotétan : Apaceft) et les oxa-1-céphèmes (latamoxef : Moxalactamt, flomoxef).

La recherche d’une plus grande activitéantibactérienne et d’un meilleur profil pharmacoci-nétique a permis l’apparition de différentes classesde molécules qui répondent à un besoin médical àun moment donné.

Les céphèmes peuvent être oraux ouparentéraux.

Céphalosporines à usage parentéral

Les céphalosporines parentérales sontnombreuses et il a été nécessaire de les séparer enplusieurs groupes en fonction de leur spectreantibactérien. Quatre groupes (ou « générations »)ont été décrits [1].

Les premières molécules comprenant lacéfalotine (Kéflint, Céfalotinet) et la céfazoline

(Céfacidalt, Kefzolt) ont été synthétisées pourcontourner l’inactivité de la pénicilline G sur lessouches de S aureus productrices de pénicillinases.

L’émergence des problèmes thérapeutiques liésaux bactéries à Gram négatif a conduit à modifier lastructure des céphalosporines afin qu’elles soientefficaces sur ces bactéries. Deux découvertes vont sesuccéder, celle du céfuroxime (Zinnatt) et celle ducéfotaxime (Claforant). Ces molécules ont étéobtenues par modification des chaînes latérales dunoyau commun aux céphalosporines (noyaucéphème). L’activité du céfotaxime est 100 à 1 000fois supérieure à celle du céfamandole (Kéfandolt).

La troisième étape a été de prolonger la demi-vieapparente d’élimination, sans modification duspectre et de l’activité antibactérienne, avec laceftriaxone (Rocéphinet). Les céphalosporines ditesde « 4

egénération » (céfépime : Axépimt, cefpirome :

Cefromt) possèdent les mêmes caractéristiques queles céphalosporines de 3e génération, mais

partagent également une structure commune leurpermettant de pénétrer rapidement à travers la paroides bacilles à Gram négatif, d’avoir une faible affinitépour les bêtalactamases présentes dans l’espacepériplasmique et une bonne affinité pour leur ciblecellulaire.

Le céfotaxime et la ceftriaxone sont principa-lement destinés aux infections sévères comme laméningite bactérienne. La ceftriaxone peutégalement être utilisée en ville à la phase initiale despyélonéphrites aiguës et des pneumopathies aiguëschez des sujets à risque. Le spectre plus étendu ducéfépime et du cefpirome, qui englobe en plus lesentérobactéries productrices de céphalosporinases,permet, a priori, d’élargir les indicationsthérapeutiques en milieu hospitalier.

Céphalosporines orales

Les céphalosporines orales sont divisées enplusieurs groupes

[1]:

– alpha-aminocéphalosporines : céfadroxil(Oracefalt), céfaclor (Alfatilt), céfalexine (Keforalt,Céfacett) ;

– céphalosporines non alpha-aminées et nonestérifiées : céfixime (Orokent), ceftibuten, cefdinir ;

– céphalosporines non alpha-aminées etestérifiées : cefpodoxime-proxétil (Oreloxt),cé furox ime-axét i l (Z innatt , Cépaz inet ) ,céfotiam-hexétil (Texodilt, Taketiamt).

Le but des modifications chimiques a étéd’augmenter l’activité sur les bacilles à Gram négatif(Escherichia Coli, Proteus mirabilis, Klebsiella sp). Lesrelat ions entre la structure et l ’act iv i téantibactérienne suivent celles des composésparentéraux. Cependant, les céphalosporinesalpha-aminées sont modérément actives sur lesentérobactéries Haemophi lus influenzae etMoraxella catarrhalis. Les dérivés non alpha-aminésse divisent en molécules modérément actives(céfixime, ceftibuten) et celles possédant une bonneactivité sur les cocci à Gram positif comme lesstaphylocoques et les streptocoques, comprenant lespneumocoques (cefpodoxime, céfuroxime, cefdinir).La biodisponibilité de ces molécules est différente enfonction de leur structure chimique.

Tableau I. – Classification des antibiotiques en fonction de leur mode d’action.

Inhibition de la synthèse de laparoi bactérienne

Inhibition de la synthèsede l’ADN

Inhibition de la synthèsedes protéines

Lésions de lamembrane

bêtalactamines quinolones aminoglycosides polymyxinesglycopeptides et lipoglycopeptides ansamycines tétracyclinesfosfomycine 5-nitro-imidazolés macrolides

nitrofuranes lincosamidessulfamides streptograminesbenzylpyrimidines phénicolés

acide fusidique

Tableau II. – Les bêtalactamines.

Pénicillines Céphalosporines Carbapénèmes Monobactames

pénicillines G et V Céphalosporines orales* : imipénème aztréonampénicilline M (oxacilline) - céfadroxil méropénèmepénicilline A (ampicilline) - céfacloramidinopénicilline (piv- - cefpodoxime-proxétilmécillinam) - céfuroxime-axétilalphacarboxy- et - céfotiamuréidopénicilline - céfalexine

Céphalosporines parentérales* :- céfazoline- céfamandole- céfuroxime- céfotaxime- ceftriaxone- ceftazidime- céfépime- cefpiromeCéphamycines :- céfoxitine

* Liste non exhaustive.

5-0015 - Classification des antibiotiques : relation structure-activité

2

Page 45: Le manuel du généraliste   antibiothérapie

Les principales indications des céphalosporinesorales sont les infections ORL et respiratoires.

¶ CarbapénèmesLes carbapénèmes sont des bêtalactamines à très

large spectre. Actuellement, un médicament estdisponible à usage hospitalier, l’imipénème(Tienamt). Une autre molécule sera bientôt mise à ladisposition du corps médical, le méropénème. Cesmédicaments sont à usage parentéral. L’imipénèmeest partiellement hydrolysé par une enzyme, laDHP-1, d’où la nécessité de l’associer à un inhibiteurde cette enzyme, la cilastatine. Le méropénèmesemble moins hydrolysé et l’adjonction d’uninhibiteur est inutile.

¶ Bêtalactamines monocycliquesLes monolactames appartiennent à un autre

groupe de la famille des bêtalactamines. Seul unsous-groupe, les monobactames (aztréonam :Azactamt), a été développé. Ils sont actifsuniquement sur les bacilles à Gram négatif etdisponibles en milieu hospitalier.

¶ Inhibiteurs des bêtalactamasesCertaines bactéries possèdent des enzymes

capables d’hydrolyser la liaison carbonyle-lactamedes bêtalactamines, les bêtalactamases. On peutschématiquement distinguer les enzymes d’origineplasmidique et celles d’origine chromosomique ouportées par un transposon. Les enzymes dites detype I produites par certaines entérobactéries ou Paeruginosa hydrolysent principalement lescéphalosporines. Les autres enzymes comme lesenzymes à large spectre (TEM-1, SHV-1)n’hydrolysent pas les céphalosporines 2-amino-5-thiazolyle comme le céfotaxime, contrairement auxbêtalactamases à spectre élargi (TEM-3 à 26 ouSHV-2 à 8) qui hydrolysent de façon variable lecéfotaxime (Claforant), la ceftazidime (Fortumt) oul’aztréonam (Azactamt). Plusieurs inhibiteurs desbêtalactamases ont été développés : l’acideclavulanique, le tazobactam et le sulbactam [3]. Ilspossèdent une faible activité antibactérienneintrinsèque. En se liant à la bêtalactamase, ilspermettent l’activité de la bêtalactamine à laquelle ilssont associés. Il en résulte une action synergique etune augmentation de l’activité de la bêtalactamine.Actuellement, sont disponibles l’associationamoxicilline-acide clavulanique (Augmentint,Ciblort), ampicilline-sulbactam (Unacimt) etpipéracilline-tazobactam (Tazocillinet) ; le sulbactamest également disponible sans association fixe(Bétamazet).

Glycopeptides et lipoglycopeptides

Il existe deux molécules principales, lavancomycine (Vancocinet) et la teicoplanine(Targocidt), dont le mode d’action est similaire : ellesagissent en inhibant la dernière étape de synthèsedu peptidoglycane (D ala-D ala) [9]. Le mécanisme derésistance principal est médié par une modificationstructurale de la cible.

La teicoplanine diffère de la vancomycine par uneincidence plus élevée de souches de staphylocoquesà coagulase négative dont la sensibilité estdiminuée, mais une meilleure activité intrinsèque surles streptocoques et les entérocoques. Sa bonne

tolérance (moindre néphrotoxicité) et ses propriétéspharmacocinétiques (demi-vie plus longue)permettent une seule administration quotidiennepar voie intraveineuse ou intramusculaire et en fontune alternative de choix dans certaines situationscliniques comme l’ostéomyélite ou l’infection surcathéter central, avec la possibilité de continuer letraitement en ville avec une surveillance simple.

Fosfomycine

La fosfomycine (Fosfocinet) agit à la phase la plusprécoce de la synthèse du peptidoglycane et doitpénétrer à l’intérieur de la cellule pour être active [9].Elle est essentiellement utilisée dans le traitementdes infections urinaires (Uridozt) et en associationdans le traitement d’infections nosocomiales.

‚ Antibiotiques inhibiteursde la synthèse de l’ADN

Quinolones

¶ Premières quinolonesLa première molécule de cette famille est l’acide

nalidixique (Négramt) qui possède une activitémodérée sur un certain nombre d’espècesd’entérobactéries. La volonté d’élargir le spectreantibactérien, d’augmenter l’activité et de contournerles souches résistantes à l’acide nalidixique a donnénaissance à la fluméquine (Apuronet) et à l’acidepipémidique (Pipramt), qui ne présente qu’unerésistance croisée partielle avec l’acide nalidixique.

¶ Fluoroquinolones (fig 2)L’association d’un atome de fluor en position 6 du

noyau pipérazinyle a permis l’obtention d’unenouvelle classe d’agents antibactériens de synthèse,les fluoroquinolones [2]. Chaque partie de la moléculepossède un rôle particulier dans l’activitéantibactérienne et sa fixation au site de la cibleenzymatique. Les fluoroquinolones agissent eninhibant l’activité du complexe ADN/ADN-gyrase etde la topo-isomérase IV.

Elles possèdent un large spectre antibactérien,permettant des indications cliniques étendues.Cependant, on assiste à l’émergence de souchesrésistantes de S aureus et de P aeruginosa, maiségalement des entérobactéries (Escherichia Coli),notamment en cas d’utilisation large de cesmolécules en prophylaxie [5].

Les dérivés fluorés ont, ainsi, une meilleureactivité antibactérienne et des propriétés

pharmacocinétiques nettement améliorées avec unebonne distribution tissulaire et une biodisponibilitétrès satisfaisante par voie orale. Les nouvellesfluoroquinolones (lévofloxacine, trovafloxacine)possèdent, de plus, une activité large sur les bactériesà tropisme respiratoire, les faisant classer comme« fluoroquinolones respiratoires ».

La structure intervient également dans latolérance des molécules : photosensibilité, solubilité,génotoxicité, tendinopathies, effets sur le systèmenerveux central, cardiotoxicité et interactionsmédicamenteuses.

Les recherches actuelles en matière defluoroquinolones tendent à augmenter l’activitéantibactérienne sur les espèces de moindresensibilité, contourner la résistance acquise,augmenter la solubilité de ces molécules et éviter leseffets secondaires graves.

5-nitro-imidazolés

Leur spectre antibactérien couvre essentiellementles bactéries à développement anaérobie à Gramnégatif qui possèdent un système enzymatiqueindispensable à leur mode d’action.

Nitrofuranes

Ce sont des antibactériens à usage urinaire etintestinal dont la structure et le mode d’action sontsimilaires à ceux des 5-nitro-imidazolés. Lesmolécules les plus connues sont la nitrofurantoïne(Furadantinet) et le nifuroxazide (Ercéfurylt).

Ansamycines

La principale molécule de cette famille est larifampicine (Rifadinet). Elle agit par inhibition de latranscription de l’ADN en acide ribonucléique (ARN)messager et est bactéricide [4]. Elle est très peu activesur les bactéries à Gram négatif. Elle est par contretrès efficace sur les bactéries intracellulaires(Legionella sp et Brucella sp). Son utilisationprincipale est dans le traitement de la tuberculose etde la lèpre. Dans certaines régions (États-Unis,Afrique), on assiste à l’émergence de souches debacilles de Koch résistantes à la rifampicine, voiremultirésistantes. D’autres molécules sont endéveloppement comme la rifapentine, ou utiliséesdans la prévention ou le traitement des infections àMycobacterium avium intracellulaire comme larifabutine (Ansatipinet).

Spectre étroit Spectre large

Métabolisme < 5 % métabolisme Métabolisme < 5 % métabolisme

Acide nalidixique (Négram®) Acide oxolinique (Urotrate®) Fluméquine (Apurone®)

Acide pipémidique(Pipram®)

Péfloxacine (Péflacine®)Ciprofloxacine (Ciflox®)Norfloxacine (Noroxine®)Énoxacine (Enoxor®)Grépafloxacine*Gatifloxacine*Trovafloxacine*

Ofloxacine (Oflocet®)Lévofloxacine*Sparfloxacine (Zagam®)Loméfloxacine (Logiflox®)

* Non disponible en ville

2 Classification des fluoroquinolones.

Classification des antibiotiques : relation structure-activité - 5-0015

3

Page 46: Le manuel du généraliste   antibiothérapie

Sulfamides et benzylpyrimidines

Les sulfamides et les benzylpyrimidines(triméthoprime) sont des inhibiteurs de la synthèsedes folates. Ils agissent par inhibition d’enzymesbactériennes impliquées dans la synthèse de l’ADN.Ils sont bactériostatiques ; néanmoins l’associationdes deux agents antibactériens (triméthoprime +sulfaméthoxazole : Bactrimt) est synergique etbactéricide.

‚ Antibiotiques inhibiteursde la synthèse protéique

Aminoglycosides

Leur cible principale est l’un des constituants de lasous-unité 30 S du ribosome bactérien. Lesprincipaux mécanismes de résistance sont :

– le défaut de perméabilité cellulaire parmutation chromosomique ;

– une inactivation de la molécule par desenzymes bactériennes.

On peut les classer, en fonction de la structurechimique du noyau central, en trois groupes :

– les streptomycines ;– les 2-déoxystreptamines ;– les fortimicines.

Le groupe des 2-déoxystreptamines comprend lesmolécules les plus uti l isées. Des dérivéshémisynthétiques comme l’amikacine (Amiklint), lanétilmicine (Nétromicinet) et l’isépamicine(Isépallinet) permettent de contourner l’inactivationde la gentamicine (Gentallinet) ou de la tobramycine(Nebcinet).

Leur usage est en général réservé aux infectionssévères hospitalières [6], en association avec d’autresclasses d’antibiotiques.

La spectinomycine (Trobicinet) est par ailleursutilisée dans le traitement des gonococcies [8].

Macrolides (fig 3)

Les macrolides appartiennent à une famillecomplexe de molécules qui se différencient par leur

structure chimique. Celle-ci comporte deux parties :une structure centrale de type lactonique (aglycone)et des sucres neutres et/ou aminés. En fonction de lataille de l’aglycone, il est possible de séparer lesmolécules en trois groupes :

– molécules à 14 chaînons : érythromycine A(Érythrocinet), roxithromycine (Claramidt, Rulidt) ;clarithromycine (Zéclart) ;

– molécules à 15 chaînons : azithromycine(Zithromaxt) ;

– molécules à 16 chaînons : josamycine(Josacinet ) , spiramycine (Rovamycinet ) ,midécamycine (Mosilt).

L’érythromycine A est une molécule d’originenaturelle, la plupart des autres produits étantobtenus par hémisynthèse à partir de l’érythro-mycine A.

La structure chimique explique en partie l’activitéantibactérienne qui repose sur l’affinité pour lesribosomes bactériens. Cette affinité est liée pourl’érythromycine A à certains groupements du sucreaminé D-désosamine. Le sucre neutre L-cladinose estresponsable d’un certain nombre de caractéristiquesbiologiques : stabilité en milieu acide, induction de larésistance aux macrolides, activité antibactérienne.Son absence permet de contourner la résistance àl’érythromycine A chez les cocci à Gram positif(kétolides).

Les différences de structure peuvent aussiexpliquer certaines interactions médicamenteuses :ainsi, l ’érythromycine A interfère avec lathéophylline dont elle augmente les taux sériquesavec risque de surdosage, ce qui n’est pas le cas desmolécules à 16 chaînons.

Les nouvelles molécules obtenues parhémisynthèse à partir de l’érythromycine A peuventêtre classées en fonction de la modification deschaînes latérales de l’aglycone A (clarithromycine,roxithromycine), par modifications de l’aglycone(azithromycine) ou par modifications du sucreL-cladinose (kétolides).

L’érythromycine A, la clarithromycine, laroxithromycine et l’azithromycine possèdent lemême spectre antibactérien et la résistancebactérienne est croisée. Les nouvelles molécules, leskétolides, sont actives sur les souches de cocci àGram positif résistantes à l’érythromycine A.

En dehors des infections respiratoires et cutanées,il a été mis en évidence que certains macrolidescomme la clarithromycine possèdent une bonneactivité sur Mycobacterium avium complex [10].

Streptogramines et lincosamides

Ils agissent en se fixant à la sous-unité 50 S duribosome bactérien.

¶ Synergistines ou streptograminesIls contiennent deux composés A et B qui agissent

en synergie et confèrent un effet bactéricide auxmolécules de cette famille. Deux médicaments ontété commercialisés, la pristinamycine (Pyostacinet)et la virginiamycine (Staphylomycinet). Ils peuventêtre utilisés dans les infections cutanées (impétigo etérysipèle) et sont efficaces dans les infectionsostéoarticulaires ou respiratoires hautes (activité surles souches de pneumocoques sensibles ourésistantes à la pénicilline G).

¶ LincosamidesIls sont représentés par la lincomycine

(Lincocinet) et la clindamycine (Dalacinet) et sontbactériostatiques. En pratique de ville, laclindamycine peut être utilisée en relais dans lesinfections ostéoarticulaires dues à des souches destaphylocoques sensibles. Chez les patientsdiabétiques, elle peut être indiquée dans lesinfections cutanées et des parties molles en raisonde son activité sur les bactéries à développementanaérobie. Actuellement, la clindamycine est unealternative thérapeutique dans le traitement de latoxoplasmose chez les patients sidéens.

Tétracyclines

Les tétracyclines agissent en se fixant sur lasous-unité 30 S du ribosome bactérien. À partir de lapremière génération de tétracyclines ont été obtenusdes dérivés chimiques, la doxycycline (Vibramycinet)et la minocycline (Mynocinet), qui possèdent unemeilleure biodisponibilité et une distributiontissulaire accrue, ainsi qu’une plus longue demi-viepermettant une seule prise quotidienne.

Phénicolés

Les phénicolés agissent en se fixant sur lasous-unité 50 S du ribosome. Cette famille estreprésentée par deux molécules, le chloramphénicol(Tifomycinet) et le thiamphénicol (Thiophénicolt). Cesont des antibiotiques à large spectre, bactériosta-tiques. Actuellement, en France, leurs indicationscliniques sont limitées du fait de la toxicitémédullaire potentielle du chloramphénicol.

Acide fusidique

L’acide fusidique (Fucidinet) inhibe la synthèseprotéique en stoppant l’incorporation de nouveauxacides aminés dans la chaîne peptidique en cours deformation. C’est une molécule bactériostatique ayant

14 chaînons 16 chaînons

Groupe Inaturel

Groupe IIsemi-synthétique(érythromycine A)

Groupe IIInaturel

Groupe IVsemi-synthétique

Érythromycine A (Érythrocine®)Oléandomycine

Josamycine (Josacine®)Midécamycine (Mosil®)Spiramycine (Rovamycine®)

Miocamycine*Rokitamycine*

IA IIA IIIA

Roxithromycine (Rulid®) Clarithromycine (Zeclar®) Dirithromycine (Dynabac®)

Azithromycine(Zithromax®)

HMR 3647*

* Non disponibles en ville.

3 Classification des macrolides.

5-0015 - Classification des antibiotiques : relation structure-activité

4

Page 47: Le manuel du généraliste   antibiothérapie

une faible activité sur les bactéries à Gram négatif. Enpratique, il est surtout utilisé comme agentantistaphylococcique, en association.

‚ Polymyxines

Les deux molécules autrefois fréquemmentutilisées en pratique clinique sont la polymyxine B etE. Leurs cibles sont les constituants des membraneslipidiques (LPS, phospholipides, protéines) de labactérie dont elles désorganisent la structure. Ellespossèdent une action bactéricide rapide.

■Autres activités des antibiotiques

Les antibiotiques sont des agents antibactériensdont plusieurs sont également actifs sur certainsparasites ou champignons [4]. Ainsi, la rifampicine(Rifadinet) est active dans certaines formes deleishmanioses cutanées ou en association surAspergillus sp ; la minocycline (Mynocinet), ladoxycycline (Vibramycinet) et certains macrolidessont actifs sur Plasmodium falciparum et surToxoplasma gondii. La clindamycine (Dalacinet) etles nouveaux macrolides sont efficaces dans letraitement de la toxoplasmose. Le métronidazole(Flagylt), ou ses dérivés, est le traitement deréférence des amibiases digestives, et possèdeégalement une action sur Trichomonas vaginalis etLamblia intestinalis. Le cotrimoxazole (Bactrimt) estutilisé dans le traitement des pneumocystoses. Ceciincite donc à évaluer la possible extension duspectre d’activité clinique de chaque nouvellemolécule.

■Comment définir les nouveaux

antibiotiques ?

La plupart des familles d’antibiotiques connuesont été découvertes entre les années 1940 et 1980.

Le développement de nouvelles molécules danschaque classe d’antibiotiques a été réalisé pourpermettre une amélioration des propriétéspharmacocinétiques :

– meilleure absorption digestive (amoxicilline vsampicilline) ;

– meilleure distribution tissulaire (fluoroquino-lones, doxycycline) ;

– demi-vie d’élimination plus longue (ceftriaxone,doxycycline) ;

– meil leure tolérance (teicoplanine vsvancomycine ; absence d’allergie croisée entrel’aztréonam et les autres bêtalactamines) ;

– augmentation de l’activité intrinsèque(fluoroquinolones) ;

– élargissement du spectre sur des bactériesnaturellement résistantes, contournement de larésistance (céphalosporine de 4e génération,kétolides).

Il en résulte la possibilité de nouvelles indicationsthérapeutiques pour une classe donnée :fluoroquinolones ; céphalosporines de 3e génération(méningites purulentes). Il est possible également dediminuer la durée du traitement (typhoïde etfluoroquinolones) et de faciliter une meilleureadhérence au traitement pour les patients en villeavec des administrations uniquotidiennes(teicoplanine, ceftriaxone) ou le relais oral rapide(fluoroquinolones). Néanmoins, l’intérêt desnouveaux médicaments face aux traitementsclassiques doit toujours faire l’objet d’analyses :rapports coût/avantages et coût/utilité, pour lespratiques hospitalières et libérales, afin de préserverleur activité et de limiter les dépenses de santé.

■Aspects écologiques

de l’antibiothérapie

L’utilisation large et non contrôlée desantibiotiques a pour risque l’émergence rapide desouches résistantes. Cette donnée a un impact pourchaque patient colonisé pouvant développer unevéritable infection et être à l’origine d’une épidémie.Si ce problème est important en terme d’infectionnosocomiale (S aureus, S epidermidis, P aeruginosa,Enterococcus faecalis, Acinetobacter sp), il a aussi uneportée pratique en médecine de ville. En effet, cephénomène concerne également les bactériescommunautaires (S pneumoniae de sensibilité

diminuée ou résistant à la pénicilline G, Neisseria sp,H influenzae, Escher ich ia Col i résistants àl’ampicilline) avec possibilités d’épidémies (enfantsen crèche porteurs de pneumocoques résistantsdans la sphère ORL).

■Aspects économiques

de l’antibiothérapie

Les soucis d’économie de santé impliquent uncontrôle du coût global de l’antibiothérapie.

L’utilisation judicieuse de chaque médicament estprimordiale (à efficacité comparable, un antibiotiqueancien et moins cher doit être privilégié). Laréduction de la durée du traitement, l’utilisation de lavoie orale d’emblée ou en relais précoce(fluoroquinolone et typhoïde ou infections urinairesfébriles), la réduction du fractionnement à une oudeux prises quotidiennes (certaines fluoroquino-lones, teicoplanine, ceftriaxone, aminosides) etl’utilisation rationnelle des propriétés antibacté-riennes et pharmacocinétiques d’une molécule sontdes facteurs favorisant l’efficacité, la bonneobservance et tolérance d’une antibiothérapie. Parailleurs, certains antibiotiques à action rapidepermettent de réduire le temps d’hospitalisation despatients, dont le suivi peut être réalisé en ville,notamment dans le cadre d’une hospitalisation àdomicile, et donc de réduire les dépenses liées à cesinfections : c’est le cas par exemple du traitement derelais des endocardites dues aux streptocoquesviridans par la ceftriaxone (Rocéphinet) ou desostéomyélites par la teicoplanine (Targocidt) en uneinjection quotidienne [7].

Marie-Hélène Andre : Chef de clinique-assistant.Olivier Lortholary : Ancien chef de clinique-assistant.

Service de médecine interne, hôpital Avicenne, université Paris-Nord, 125, route de Stalingrad, 93009 Bobigny, France.André Bryskier : Ancien chef de clinique-assistant des hôpitaux de Paris, attaché-consultant,

laboratoire de microbiologie, centre hospitalier Victor Dupouy, 69, rue du Colonel-Prud’hon, 95107 Argenteuil cedex, France.

Toute référence à cet article doit porter la mention : MH Andre, O Lortholary et A Bryskier. Classification des antibiotiques : relation structure-activité.Encycl Méd Chir (Elsevier, Paris), AKOS Encyclopédie Pratique de Médecine, 5-0015, 1998, 6 p

Ceci implique la nécessité d’unesurveillance épidémiologique régulièredes infections communautaires,réalisée à l’aide des médecinspraticiens et des laboratoires debactériologie en médecine libérale,permettant une réévaluationpériodique des protocolesd’antibiothérapie de premièreintention.

Classification des antibiotiques : relation structure-activité - 5-0015

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Page 48: Le manuel du généraliste   antibiothérapie

R é f é r e n c e s

[1] Bryskier A, Aszodi J, Chantot JF. Parenteral cephalosporin classifications.Exp Opin Invest Drugs1994 ; 3 :145-171

[2] Bryskier A, Chantot JF. Classification and structure activity relationship offluoroquinolones.Drugs1995 ; suppl 34 : S16-S28

[3] Bush LM. Newer penicillins and beta-lactamases inhibitors. In : Kaye D ed.Infectious disease clinics of North America-Antibacterial therapy. Philadelphia :Saunders, 1995 : 653-686

[4] Carbon C, Régnier B, Saimot G, Vildé JL, Yeni P. Médicaments anti-infectieux. Paris : Flammarion Médecine-Sciences, 1995 : 1-507

[5] Hendershot EP. Fluoroquinolones. In : Kaye D ed. Infectious disease clinics ofNorth America-Antibacterial therapy. Philadelphia : Saunders, 1995 : 731-745

[6] Lortholary O, Tod M, Cohen Y, Petitjean O. Aminoglycosides. In : Cunha BAed. The medical clinics of North America-Antimicrobial therapy I. Philadelphia :Saunders, 1995 : 761-787

[7] Ma MA. Considerations in antimicrobial prescribing. In : Cunha BA ed. Themedical clinics of North America-Antimicrobial therapy I. Philadelphia : Saun-ders, 1995 : 537-550

[8] Mouton Y, Deboscker Y, Dubreuil L, Thabaut A. Antibiotiques-Antiviraux-Anti-infectieux. Paris : John Libbey Eurotext, 1997

[9] Tankovic J, Duval J. Mécanismes d’action des antibiotiques.Medecine Thera-peutique1997 ; hors série n°1 : 37-45

[10] Zuckerman JM. The newer macrolides: azithromycin and clarythromycin.In : Kaye D ed. Infectious disease clinics of North America-Antibacterial therapy.Philadelphia : Saunders, 1995 : 731-745

5-0015 - Classification des antibiotiques : relation structure-activité

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Page 49: Le manuel du généraliste   antibiothérapie

Échec apparent d’une

antibiothérapie au cours d’une

infection documentée

K Chemlal

L es infections documentées le plus fréquemment prises en charge en médecine de ville regroupent, dans lagrande majorité des cas, trois situations cliniques : les infections de l’arbre urinaire, les diarrhées aiguës et enfin

les infections du tractus génital. Le rôle du médecin généraliste est capital car toute la problématique est de pouvoirdiscerner l’échec thérapeutique vrai qui peut engager le pronostic vital et nécessite une hospitalisation rapide, des« faux échecs » qui ne nécessitent le plus souvent que de la patience et du bon sens...© 2000 Editions Scientifiques et Médicales Elsevier SAS. Tous droits réservés.

■Introduction

Considérer à tort qu’un traitement antibiotique estun échec a des conséquences médicaleséconomiques et écologiques qui sont loin d’êtreanodines (tableau I) . Un certain nombre desituations infectieuses ne sont pas envisagées dansce chapitre, car elles sont exceptionnellementrencontrées en médecine de ville (méningites,endocardites compliquées, fièvre postopératoire,etc).

■Définir l’échec

Pour donner des éléments de réponse à laquestion posée, il est nécessaire avant tout de définirles termes de la situation à laquelle il nous estdemandé de réfléchir.

L’infection est documentée, c’est-à-dire que legerme supposé responsable de l’infection (doncpathogène) a été isolé à partir d’un milieunormalement stérile. L’antibiothérapie n’est donc

pas une antibiothérapie probabiliste mais biendirigée contre une cible définie. L’antibiotique ou lesantibiotiques choisis sont censés être microbiologi-quement actifs, au mieux bactéricides vis-à-vis dugerme supposé responsable de l’infection. Enpratique, cette situation clinique est rencontrée dansles pathologies de l’arbre urinaire (cystites,pyélonéphrites, prostatites), génitales (vaginite,cervicite, uréthrite), digestives (diarrhées aiguës ouchroniques) et peut-être dans un avenir proche, lesangines.

Il existe un échec. On peut tenter de définirl’échec d’une antibiothérapie censée être activecomme l’absence d’amélioration, voire l’aggravationde l’état clinique d’un patient en situation infectieuse,en dépit de la prescription d’une antibiothérapieprésumée adaptée.

L’échec est apparent. En d’autres termes, l’échecthérapeutique est une réalité (échec vrai) ou bien lerésultat du traitement est interprété comme un échecalors que cela n’est pas le cas (faux échec). Retenir lediagnostic d’échec à une antibiothérapie présuméeefficace nécessite de prendre en compte un certainnombre de paramètres cliniques ou paracliniques ense référant aux données initiales.

■Démarche initiale

Lorsqu’un échec thérapeutique est suspecté, laréflexion peut se faire en deux étapes.

‚ Quand hospitaliser ?

Critères du groupe A

La dégradation de l’état hémodynamique et

Tableau I. – Faux échecs. Attitudes et impact.

Attitude Impact

Changer l’antibiotique ÉconomiqueÉcologique

Ajouter un antibiotique ObservanceÉconomiqueÉcologiqueEffets indésirables

Remplacer l’antibiotique et en ajouter un ObservanceÉconomiqueÉcologiqueEffets indésirables

Prescrire des examens biologiques Économique

Prescrire des examens d’imagerie ÉconomiqueEffets indésirables

✔ Première étape : définir les critèressur lesquels se fonde le diagnosticd’échec et parmi eux (tableau II),ceux qui vont conduire à proposerune hospitalisation urgente.✔ Deuxième étape : répondre à unesérie de questions dites « préala-bles » si le choix de maintenir lepatient au domicile est retenu(tableau III).

Tableau II. – Critères de l’échec.

Groupe A : arguments cliniques

Persistance d’une fièvrePersistance ou aggravation de la porte d’entréeDégradation de l’état hémodynamiqueApparition de localisations secondaires septiques

Groupe B : arguments microbiologiques

Apparition ou aggravation d’une hyperleucocytoseApparition ou majoration d’un syndrome inflam-matoire

Groupe C : arguments psychosociaux

Maintien au domicile impossibleImpossibilité de surveillanceDemande d’hospitalisation du patient et/ou del’entourage procheRaisons sociales diverses (linguistique, financière,etc)

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l’apparition de localisations secondaires septiquessont des critères d’échec majeurs du groupe A quinécessitent une prise en charge hospitalière urgente,qu’il y ait ou non d’autres critères.

La persistance d’une fièvre, de même quel’aggravation de la porte d’entrée, prises isolément,ne nécessitent pas en soi une hospitalisation, sauf s’ilexiste au moins un critère du groupe C.

¶ La fièvre persiste sous traitement (plus de72 heures de traitement)Il est indispensable d’analyser la courbe

thermique. L’idéal est de pouvoir pratiquer une oudeux hémocultures. Se reporter à la figure 1 et autableau III.

¶ Persistance ou aggravation de la porte d’entréeLa maîtrise du syndrome infectieux dépend du

contrôle de la porte d’entrée supposée de l’infection.Ainsi, il est indispensable :

– d’identifier le point de départ de l’infection ;– d’identifier les éléments qui vont pérenniser

cette porte d’entrée, alors même qu’un traitementantibiotique efficace est instauré. Les exemples citésdans le tableau IV permettent d’illustrer cetteproblématique.

La réalisation d’une ou deux hémocultures estégalement souhaitable.

Critères du groupe B

La présence de critères du groupe B en l’absencedu groupe A et/ou C ne suffit pas pour proposer unehospitalisation.

Critères du groupe C

La présence d’au moins un critère du groupe Cpeut constituer en soi un motif d’hospitalisation.

‚ Questions préalables lorsque le patientest maintenu à domicile

Pour cette deuxième étape, les questions sontdéveloppées dans le tableau III.

Persistance de la fièvre supérieure à 72 heuresPas de critère justifiant une hospitalisation urgente

Questions préalablesTableau IV

Analyse de la courbe thermique Hémocultures

Pics thermiques et frissonsFièvre élevée en plateau

Infection non contrôléeHospitalisation

Germe associé non identifiéPorte d'entrée non contrôléeMétastases septiquesAllergie médicamenteuse

Apyrexie initiale etreprise de la fièvre

Questions préalablesTableau IV

Train subfébrile

État général

Aggravation Amélioration

Surveillance

1 Algorythme.

Tableau III.

Questions Commentaires

Le traitement antibiotique est-il réellement pris ? Observance médiocre (traitement per os)Vomissements (avec rejet du produit)

Le produit donné est-il celui qui a été prescrit ? Médicaments de nom prochePrise d’un antibiotique stocké dans l’armoire à pharmacie du patient, etc

La posologie est-elle bonne ? Erreur du prescripteur, du pharmacien ou du patient

Quels sont les autres médicaments que prend le patient ? Interactions médicamenteuses (rifampicine...)Modifications de l’absorption (gel d’alumine et quinolones...)

Depuis quand le traitement a-t-il été débuté ? La date de prescription n’est pas toujours la date de la première priseUne antibiothérapie effıcace entraîne uneapyrexie en plusieurs jours dans la majorité desinfections bactériennesAinsi, il paraît raisonnable d’attendre 72 heuresaprès un début de traitement en tenantcompte du nombre de prises ou d’injections réellement effectuées avant de suspecter échec

Le germe est-il bien sensible à l’antibiotique prescrit ? Erreur de lecture de l’antibiogramme

Tableau IV. – Persistance ou aggravation de la porte d’entrée. Exemples.

Origine de l’infection Porte d’entrée/élément susceptiblede pérenniser l’infection Attitude Hospitalisation

Cutanée Abcès collecté Drainage/incision Pas obligatoireCorps étranger des parties molles Ablation

ORL Phlegmon Chirurgie Oui

Gynécologique Tumeur Traitement de la tumeur OuiCorps étranger (DIU) Ablation du corps étranger Pas obligatoire

Urinaire Lithiase Dérivation des urines OuiSténose Chirurgie

ORL : oto-rhino-laryngologie ; DIU : dispositif intra-utérin.

5-0140 - Échec apparent d’une antibiothérapie au cours d’une infection documentée

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Page 51: Le manuel du généraliste   antibiothérapie

■Conclusion

La prise en charge d’une infection bactériologi-quement documentée est assez fréquente en médecinede ville mais se résume à quelques situations cliniques.Quelques points méritent d’être soulignés.

Tout syndrome infectieux, documenté ou non,nécessite d’être réévalué à 48 heures pour s’assurer

de l’absence de critères cliniques ou psychosociauxdevant amener le praticien à proposer unehospitalisation urgente.

La persistance d’une fièvre isolée n’est pastoujours synonyme d’échec clinique et l’analysesoigneuse de la courbe thermique permet souventde clarifier la situation. De même, pouvoir répondreà quelques questions préalables de bon sens, avant

de considérer que le traitement est inefficace,permettrait d’éviter des hospitalisations excessivesou des changements thérapeutiques injustifiés dontles conséquences ne sont pas anodines.

Remerciements : docteur Isabelle Chevalier, médecin généraliste,95220 Herblay, France.

Kadoudja Chemlal : Praticien hospitalier,service de médecine A, hôpital Max Fourestier, 403, avenue de la République, 92014 Nanterre cedex, France.

Toute référence à cet article doit porter la mention : K Chemlal. Échec apparent d’une antibiothérapie au cours d’une infection documentée.Encycl Méd Chir (Editions Scientifiques et Médicales Elsevier SAS, Paris, tous droits réservés), AKOS Encyclopédie Pratique de Médecine, 5-0140, 2000, 3 p

Échec apparent d’une antibiothérapie au cours d’une infection documentée - 5-0140

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Page 52: Le manuel du généraliste   antibiothérapie

Fluoroquinolones

L Pourteau, O Launay, C Carbon

■Introduction

Les fluoroquinolones ont pris une part importantedans la prescription des antibiotiques, en particulier enpratique de ville, essentiellement en raison de leurlarge spectre antibactérien. Leur excellentebiodisponibilité par voie orale et leur bonne diffusiontissulaire les rendent particulièrement attractives pourune telle utilisation en ville.

Leurs indications sont cependant actuellementlimitées par leur inactivité sur les anaérobies et lesstreptocoques, en particulier sur le pneumocoque. Deplus leur utilisation très large s’est accompagnée del’émergence de souches résistantes en particulier chezles bacilles à Gram négatif et les staphylocoques.

Nous aborderons le spectre antibactérien, lespropriétés pharmacocinétiques et pharmacodynami-ques des fluoroquinolones, leurs indications enpratique de ville et leurs principaux effets indésirables.Nous ne traiterons pas des interactions médicamen-teuses et des problèmes liés au terrain qui serontabordés dans un chapitre spécifique.

■Spectre antibactérien

Les quinolones de première génération (dont lepremier représentant est l’acide nalidixique) ont unspectre limité aux entérobactéries et sont réservéesaux traitements des infections de la sphère urinaire enraison de leur importante concentration urinaire et del’absence de concentrations systémiques suffisantes(tableau I).

Les fluoroquinolones ou quinolones de deuxièmeet troisième génération, se distinguent des quinolonesde première génération par l’adjonction d’un groupefluoré et pipernizyl, qui permet une activitéantibactérienne accrue, un élargissement de leurspectre antibactérien, une bonne disponibilité par voieorale et une bonne diffusion extra- et intracellulaires.

‚ Quinolones de deuxième générationLes fluoroquinolones de deuxième génération

(norfloxacine, Noroxinet, ciprofloxacine, Cifloxt,péfloxacine, Péflacinet et ofloxacine, Oflocett) sontactives sur :

– les bacilles à Gram négatif : entérobactéries dontles bactéries du groupe KES (Klebsiella, Enterobacter,Serratia), Alcaligènes, Pseudomonas aeruginosa,Acinetobacter, Haemophilus, Campylobacter, Vibrio,Pasteurella ; il faut d’emblée noter les concentrationsminimales inhibitrices (CMI) plus basses de laciprofloxacine sur les entérobactéries et lePseudomonas ;

– les cocci à Gram négatif : Neisseria meningitidis etN gonorrheae, Moraxella catarrhalis ;

– les staphylocoques : les fluoroquinolones sontactives sur la plupart des souches de Staphylococcusaureus sensibles à la méthicilline mais seulement surun faible pourcentage de souches résistantes à laméthicilline ou de staphylocoques coagulasenégative ;

– certains « germes atypiques » : Mycoplasmapneumoniae et M hominis, Legionella, Chlamydiapneumoniae et C trachomatis, Brucella, Coxiella,Rickettsia, et les mycobactéries dont la lèpre.

‚ Quinolones de troisième générationLes quinolones de troisième génération,

sparfloxacine, trovafloxacine et lévofloxacineprésentent l’intérêt d’une activité accrue sur lesstreptocoques, en particulier sur le pneumocoque etsur Enterococcus faecalis.

La sparfloxacine (Zagamt) est actuellement la seulefluoroquinolone de « troisième génération »commercialisée en France mais ses indications selimitent aux sinusites à pneumocoque de sensibilitédiminuée (confirmation bactériologique ou forte

présomption clinique), et à certaines pneumopathiescommunautaires car leur utilisation s’accompagned’un risque accru de photosensibilité.

Inactivité des fluoroquinolones

Les fluoroquinolones sont peu actives ou inactivessur : Helicobacter pylori, Gardnerella vaginalis, Borreliasp, Listeria monocytogenes, Corynebacterium sp,Nocardia sp, les spirochètes et les anaérobies.

Rappelons que les fluoroquinolones de deuxièmegénération ne sont pas actives sur les streptocoques etsur l’entérocoque et que leur activité sur lepneumocoque est marginale.

■Pharmacocinétique

et pharmacodynamique

‚ Biodisponibilité

L’excellente biodisponibilité de la plupart desfluoroquinolones (100 % pour la péfloxacine et lalévofloxacine, 90 % pour l’ofloxacine, 70 % pour laciprofloxacine) permet leur administration par voieorale pour le traitement de la plupart des infectionssystémiques. Ainsi la voie intraveineuse doit êtreréservée aux contre-indications de la voie orale quesont les troubles de conscience ou l’existence detroubles digestifs (vomissements ou diarrhée). Lanorfloxacine (Noroxinet), en revanche, en raisond’une biodisponibilité plus faible (30 %) par voie oralemais d’une excellente concentration urinaire estréservée aux traitements des infections urinairesbasses.

La prise concomitante d’aliments ne diminue pas labiodisponibilité de ces molécules et les fluoroquinolo-nes peuvent donc être administrées au cours des

Les fluoroquinolones les plus récentes,dites de « troisième génération »,présentent l’avantage d’une activitéaccrue sur les streptocoques dont lepneumocoque et l’entérocoque.Cependant, leur utilisation est limitéepour certaines par des risques accrusde photosensibilité, pour toutes par desproblèmes économiques et écologiquesqui doivent freiner leur utilisation.

Tableau I. – Spectre d’activité des fluoroquinolones.

Bacilles à Gram négatif Entérobactéries (Escherichia coli, Citrobacter, Klebsiella,Enterobacter, Serratia, Proteus, Salmonella, Shigella)PseudomonasAcinetobacterCampylobacterHaemophilus influenzae

Cocci à Gram négatif Neisseria gonorrhaeN meningitidis

Cocci à Gram positif Staphylococcus aureus méthicilline sensiblesStaphylocoques coagulase négativeStreptocoques (pneumocoque)*Enterococcus faecalis*

Germes intracellulaires LegionnellaMycoplasmaChlamydiae

Mycobactéries Mycobacterium tuberculosisMycobactéries atypiques

* uniquement pour les fluoroquinolones de « troisième génération »

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repas. En revanche, leur absorption est diminuée parles pansements gastriques qui doivent donc être évitésau cours de ces traitements.

‚ Diffusion tissulaireLes fluoroquinolones ont une bonne diffusion

tissulaire dans le tissu osseux et les cartilages, lessécrétions bronchiques, le parenchyme pulmonaire,les muqueuses pharyngées et ORL, le tractus intestinal(concentrations élevées dans les ganglionslymphatiques mésentériques et dans les selles aprèsadministration orale), la salive, la peau, le tissucardiaque, les muscles, le foie et les sécrétions biliaires,la prostate et le parenchyme rénal, le liquidecéphalorachidien (la diffusion se fait par unmécanisme passif, facilitée par l’inflammation desméninges) et l’humeur aqueuse.

‚ Liaison protéique, activitéantibactérienne et élimination

La liaison des fluoroquinolones aux protéines estfaible. Leur activité bactéricide est rapide et leurconcentration dépendante. Les fluoroquinolonesprésentent un effet postantibiotique. L’élimination sefait soit par voie rénale pour l’ofloxacine (sous formemajoritairement inchangée donc active) et laciprofloxacine, soit par voie biliaire pour la péfloxacine(80 % sous forme métabolisée), la norfloxacine et lasparfloxacine. Leur demi-vie d’élimination est longue(respectivement de 4, 5, 12 et 20 heures pour lanoroxine, l’ofloxacine, la péfloxacine et la cifloxacine,et la sparfloxacine) permettant deux prises journalièrespour les quinolones de deuxième génération, et uneprise quotidienne pour les quinolones de troisièmegénération. L’état d’équilibre est atteint pour lasparfloxacine dès les premières 24 heures grâce àl’administration d’une dose de charge.

■En pratique : prescription,

résistance

En France, l’augmentation notable de laprescription des fluoroquinolones (plus 53 % entre1989 et 1992), s’est accompagnée de l’émergence derésistance parmi les souches d’entérobactéries isoléesen ville. Ainsi, au cours d’une étude multicentriqueréalisée aux mois de mai et juin 1995, sur desentérobactéries isolées d’infections urinaires, unerésistance à la ciprofloxacine était notée chez 3,4 %des souches d’Escherichia coli, 7,5 % de Proteusmirabilis et 26,4 % des autres entérobactéries. Uneétude plus ancienne montrait que la prévalence étaitplus élevée chez les patients ayant reçu un traitementpar fluoroquinolone dans le mois précédent, chez lessujets de plus de 60 ans, ou chez des patients ayant étéhospitalisés dans les trois mois précédents. À l’hôpital,l’apparition de résistances a été notée chez la plupartdes espèces bactériennes responsables d’infectionsnosocomiales, en particulier Pseudomonas ,Acinetobacter et le staphylocoque.

Dans les pays en voie de développement où lesfluoroquinolones sont largement prescrites, lesrésistances sont apparues chez un grand nombred’espèces bactériennes : entérobactéries, Neisseriagonorrheae, Haemophilus influenzae, Salmonellatyphi...

Enfin, il faut noter plus récemment la mise enévidence de résistance aux nouvelles fluoroquinolo-nes (sparfloxacine) chez Streptococcus pneumoniae.

‚ CoûtLe coût élevé des traitements par fluoroquinolones

(tableau II), en particulier par voie intraveineuse, est unfacteur limitant l’utilisation de ces molécules. En cas de

prescription par voie intraveineuse, réservée auxpatients présentant des troubles digestifs(vomissements ou diarrhées) ou des troubles deconscience, le retour à une prescription par voie oralesera envisagé le plus rapidement possible.

Le rapport bénéfice/coût apparaît cependantexcellent dans les infections chroniques touchant l’os,les muqueuses ORL, dans les infections urinaireshautes (pyélonéphrite et prostatite) et les infections dutube digestif.

■Indications des fluoroquinolones

en pratique de ville

‚ À quelle posologie ? Par quelle voie ?(tableau III)

Infections urinaires

¶ Cystite aiguë non compliquée de la femmejeune non enceinteLe traitement monodose par voie orale ou

« traitement minute » peut être proposé : ofloxacine400 mg, péfloxacine 800 mg ou ciprofloxacine500 mg. Un traitement de 3 jours est possible avec laloméfloxacine (400 mg/j) assurant alors une meilleureefficacité sur la stérilisation des urines à long terme. Lanoroxine (400 mg 2 fois/j) devrait avoir prochaine-mant cette indication. Un traitement classique de 7jours par la noroxine (400 mg 2 fois/j) est possible. Ilest plutôt réservé aux patientes de plus de 65 ans etaux cystites compliquées.

¶ Infections parenchymateuses(pyélonéphrites et prostatites)L’ofloxacine (200 mg x 2), la ciprofloxacine (500 mg

x 2) et la péfloxacine (400 mg x 2) peuvent êtreutilisées pour une durée de 15 jours pour lapyélonéphrite aiguë et de 4 à 6 semaines pour laprostatite. La voie orale doit être utilisée d’emblée enl’absence de contre-indication.

Les aminosides sont utiles en association en cas deformes sévères pour augmenter la vitesse de contrôlede l’infection et élargir le spectre antibactérien, enparticulier en cas de traitement antérieur parfluoroquinolones (risque de souches de sensibilitédiminuée ou résistantes aux fluoroquinolones) jusqu’àobtention de l’antibiogramme. Un traitement bref, enrègle inférieur à 2-3 jours, est suffisant dans la plupartdes situations.

Infections gynécologiques et maladiessexuellement transmissibles (MST)

Toutes les fluoroquinolones à dose unique sontefficaces pour le traitement des infections à

gonocoque, en particulier, dans les urétrites, cervicites,anorectites et pharyngites. On choisit alors 800 mg depéfloxacine ou de norfloxacine, 400 mg d’ofloxacineou 500 mg de ciprofloxacine.

Le traitement des urétrites doit être actif sur legonocoque en cas de prélèvement positif à l’examendirect et sur les mycoplasmes et Chlamydiatrachomatis. Le traitement peut comporter une doseunique d’ofloxacine (400 mg) ou de ciprofloxacine(500 mg) et un traitement par cyclines pour une duréede 7 à 10 jours.

Le traitement des salpingites doit être actif sur lesbacilles à Gram négatif, les streptocoques, lesanaérobies, Chlamydia trachomatis et le gonocoque.L’ofloxacine (200 mg x 2) peut être utilisée pour unedurée de 3 semaines en association à l’associationamoxicilline-acide clavulanique pendant 10 jours.

Le traitement des orchiépididymites doit être actifsur les entérobactéries, le gonocoque et Chlamydiatrachomatis. L’ofloxacine (200 mg x 2) peut êtreadministrée pour une durée de 10 à 21 jours.

Infections bronchopulmonaires

¶ Bronchite aiguëIl n’y a pas d’indication à une antibiothérapie de la

bronchite aiguë du sujet sain.

¶ Surinfection des bronchopathieschroniques obstructivesAprès échec d’une antibiothérapie active sur le

pneumocoque et Haemophilus influenzae , lesfluoroquinolones peuvent être prescrites en deuxièmeintention chez le bronchopathe chronique. Dans cettesituation seulement, l’ofloxacine (200 mg x 2/j) ou laciprofloxacine (500 mg x 2/j) peuvent être utiliséespour une durée de 10 jours.

¶ Pneumopathies communautaires du sujet sainLes fluoroquinolones actuellement disponibles ne

doivent pas être prescrites en première intention dansle traitement des pneumopathies communautaires, oùle pneumocoque est le plus souvent en cause. Ellespeuvent être utilisées en association avecl’amoxicilline soit d’emblée en cas de signes de gravitéou en cas d’évolution défavorable après 48 heures detraitement antibiotique bien conduit, pour élargir lespectre sur les germes intracellulaires (Mycoplasmapneumoniae, Chlamydiae pneumoniae, Legionellapneumophila).

¶ Pneumopathies communautaires sur terrainfragiliséSur certains terrains fragilisés (éthyliques,

immunodéprimés), la probabilité d’un bacille à Gramnégatif est élevée. L’antibiothérapie de premièreintention repose sur une association active sur lepneumocoque, les anaérobies, les entérobactéries et

Tableau II. – Coût journalier d’un traitement par fluoroquinolones (aux posologies recommandéespar le Vidal 1997).

Nom générique (DCI) Nom de spécialité Traitement par voie IV Traitement par voie oraleen francs en francs

péfloxacine Péflacinet 300 48Péflacine monodoset - 113,40

ofloxacine Oflocett 160 - 240 29,28

ciproflopacine Cifloxt 170 - 255 34,70Unifloxt - 98,10

sparfloxacine Zagamt - 36,38

norfloxacine Noroxinet - 12

loméfloxacine Logifloxt - 32,70

5-0100 - Fluoroquinolones

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Page 54: Le manuel du généraliste   antibiothérapie

les germes intracellulaires (en particulier Legionnellapneumophila), comme, par exemple l’associationamoxicilline-acide clavulanique-fluoroquinolone.

¶ Surinfection au cours de la mucoviscidoseLa ciprofloxacine, en raison de sa bonne activité sur

Pseudomonas aeruginosa, peut trouver sa place aprèsantibiogramme. C’est une des rares situations où laciprofloxacine peut être administrée chez l’enfant.

Infections gastro-intestinales

¶ Diarrhées aiguësLe choix des fluoroquinolones repose sur leur

activité sur les principaux bacilles à Gram négatif(salmonelles, shigelles, E coli) impliqués dans leurdiarrhée aiguës et leur concentration, en particulier parvoie orale, dans l’intestin et dans les selles.

Les fluoroquinolones (ciprofloxacine 500 mg x 2,ofloxacine 200 mg x 2, péfloxacine 400 mg x 2 ounorfloxacine 400 mg x 2) par voie orale sont letraitement empirique de première intention en cas dediarrhée aiguë ou en cas de diarrhée du voyageurpour une durée de 3 à 5 jours.

Dans la fièvre typhoïde, l’ofloxacine (200 mg x 2), lapéfloxacine (400 mg x 2) ou la ciprofloxacine (500 mgx 2) peuvent être utilisées, de préférence par voie oralepour une durée de 5 à 10 jours.

Le traitement des salmonelloses mineures parfluoroquinolones est plus controversé car il pourraitaugmenter la durée de portage chez l’adulte sain et estlimité aux formes sévères, aux immunodéprimés etaux sujets fragiles.

Les shigelloses peuvent être traitées par monodose(ofloxacine 400 mg, norfloxacine 800 mg,ciprofloxacine 750 mg).

En cas d’échec clinique, une coproculture estindiquée à la recherche d’une germe résistant auxfluoroquinolones en particulier en cas d’infection àCampylobacter.

¶ Infections intra-abdominalesDans l’infection du liquide d’ascite, l’antibiothérapie

doit être active sur les entérobactéries (E coli,Klebsie l la ), l’entérocoque et les anaérobies.L’hospitalisation est nécessaire et l’antibiothérapie depremière intention associe l’amoxicilline-acideclavulanique à l’ofloxacine (200 mg x 2).

Infections ostéoarticulaires

Leur bonne diffusion osseuse leur donne un rôle depremier choix, mais toujours en association, au moinsà l’initiation du traitement, dans les ostéomyélites,ostéites chroniques, infections sur prothèse, arthrite,spondylodiscite.

La prise en charge est initialement hospitalière.

Endocardites

L’utilisation des fluoroquinolones en clinique estpeu documentée, en dehors de l’endocardite droite àstaphylocoque du sujet toxicomane où elles sontutilisées en relais oral en association à la rifampicine.

Quant à la prise en charge des septicémies d’unemanière plus générale, elle est initialementhospitalière et ne sera pas développée ici.

Infections ORL

Les infections ORL aiguës ne sont pas uneindication des fluoroquinolones sauf dans le casparticulier de l’otite externe à Pseudomonasaeruginosa. La ciprofloxacine est alors prescrite enraison de sa bonne diffusion et sera associée à unebêtalactamine ou à un aminoside en début detraitement.

L’ofloxacine ou la ciprofloxacine peuvent êtreutilisées dans le traitement des sinusites chroniques ouen cas de surinfection de sinusite chronique.

La sparfloxacine ne peut être prescrite qu’en casd’otite moyenne à pneumocoque de sensibilitédiminuée au mieux après antibiogramme ou lorsqu’ilexiste une forte présomption clinique.

Autres indications

¶ MycobactériosesL’ofloxacine peut avoir un intérêt dans le traitement

des tuberculoses multirésistantes. La ciprofloxacinepeut être utilisée en association dans le traitementd’infections à mycobactéries atypiques. La prise encharge de ces infections particulièrement difficiles àtraiter est hospitalière.

¶ RickettsioseLes fluoroquinolones peuvent être utilisés dans le

traitement de la fièvre boutonneuse mais sansapporter de bénéfice par rapport aux cyclines quirestent le traitement de référence.

¶ Coxiella burnetiiL’utilisation des fluoroquinolones en association

avec les cyclines est recommandée pour le traitementdes formes graves de fièvre Q et en particulier pour letraitement de l’endocardite.

‚ Effets secondaires

Les fluoroquinolones sont généralement bientolérées (tableau IV) . La fréquence des effetssecondaires est évaluée à 4,5 % pour l’ofloxacine,7,9 % pour la ciprofloxacine, 13 % avec la péfloxacineou la norfloxacine.

Les effets secondaires observés sous fluoroquinolo-nes sont présentés ici par ordre de fréquencedécroissante.

Effets gastro-intestinaux

Les troubles digestifs (50 % des effets secondairessous fluoroquinolones) sont souvent modérés ettransitoires. Le plus souvent, il s’agit d’effets mineurs,anorexie ou nausées. Ils sont parfois plus importants àtype de douleurs abdominales, vomissements oudiarrhée et peuvent imposer l’arrêt du traitement.

De rares cas de colites à Clostridium difficile ont étérapportés.

Tendinopathies

Les tendinopathies représentent une complicationpotentiellement sévère des fluoroquinolones. Ellesatteignent plus fréquemment l’homme de plus de 60ans, et sont favorisées par l’insuffisance rénale ou unecorticothérapie associée. Elles surviennent en moyenne10 jours après le début du traitement mais peuvent aussisurvenir très rapidement (quelques heures) après ledébut du traitement. Le tendon d’Achille est la cibleprincipale mais d’autres tendons peuvent être touchés.Le patient doit être prévenu de la possibilité de survenuede cette complication car la constatation d’unesymptomatologie tendineuse impose l’arrêt immédiatdu traitement, la mise au repos absolu et la prescriptiond’anti-inflammatoires non stéroïdiens afin d’éviter lasurvenue de la principale complication qui est la rupture

Tableau III. – Principales indications, posologies et durées des traitements par les fluoroquinolo-nes en pratique de ville.

Indications Antibiotiques et posologies (mg/j) Durée du traitement

Infections urinaires Traitement courtCystite aiguë non compliquée de lafemme jeune (< 65 ans) non enceinte

Traitement monodose per os : Traitement minutePéflacine monodoset 800 mgOflocett 400 mgUnifloxt 500 mgTraitement 3 jours : 3 joursLogifloxt 400 mg x 1Noroxinet 400 mg x 2

Cystite compliquée et/ou femme deplus de 65 ans

Traitement classique 7 joursNoroxinet 400 mg x 2

Pyélonéphrite aiguë Oflocett 200 mg x 2 15 joursPéflacinet 400 mg x 2Cifloxt 500 mg x 2

Prostatites idem 4 à 6 semaines

Infections gynécologiques et MSTInfections à gonocoque Traitement monodose per os : Traitement minute

Péflacine monodoset 800 mgOflocett 400 mgUnifloxt 500 mg

Urétrite à gonocoque Traitement minute + cyclines 7-10 joursSalpingites Oflocett 200 mg x 2 enassociation

avec l’Augmentint3 semainesassociation 10 jours

Orchiépididymites Oflocett 200 mg x 2 10-21 jours

Infections bronchopulmonairesPneumopathies communautaires sévè-res du sujet sain ou pneumopathiescommunautaires sur terrain fragilisé

Association amoxicilline-acide clavu-lanique et fluoroquinolone

15 jours

Surinfections de BPCO idem 10 jours

Infections gastro-intestinalesDiarrhées aiguës Péflacinet 400 mg x 2 3-5 jours

Oflocett 200 mg x 2Cifloxt 500 mg x 2

Fièvre typhoïde Idem 5-10 joursInfections d’ascite Oflocett 200 mg x 2 enassociation

avec Augmentint3 semaines

Fluoroquinolones - 5-0100

3

Page 55: Le manuel du généraliste   antibiothérapie

tendineuse. Toutes les fluoroquinolones peuvent être encause mais les tendinopathies sont plus souvent décritesavec la péfloxacine.

Phénomènes de photosensibilité

Les phénomènes de photosensibilité représententl’effet secondaire le plus limitant pour l’utilisation desfluoroquinolones. Ils sont rapportés pour toutes lesfluoroquinolones mais avec une fréquence accrue etune sévérité plus grande pour la sparfloxacine. Lepatient doit être informé de la contre-indicationabsolue de toute exposition solaire. Si elle estinévitable, en particulier en été, l’utilisation de crèmesprotectrices est impérative.

Système nerveux central

Les effets secondaires sur le système nerveuxcentral, en particulier les effets psychiatriques sontessentiellement rapportés chez les sujets âgés et en casd’insuffisance rénale.

¶ NeurotoxicitéDes signes de neurotoxicité ont été observés en cas

de concentrations sériques élevées et chez les sujetsaux antécédents cérébraux (convulsions oudommages cérébraux), en particulier chez les sujetsâgés. Ils sont de présentation diverse : céphalées,vertiges, troubles du sommeil, perturbations visuelles,hypertension intracrânienne (HTIC) bénigne,syndrome cérébelleux, syndrome extrapyramidal ouconfusion.

¶ Toxicité neuromusculaireDes myalgies et des faiblesses musculaires ont été

décrites avec la ciprofloxacine et la norfloxacine chezune femme atteinte de myasthénie.

¶ Effets psychiatriquesIls ont été décrits avec l’ofloxacine à type

d’hypomanie, d’attaque de panique, de syndromedépressif, d’hallucinations visuelles, auditives. Larégression des troubles est obtenue environ 18 joursaprès l’arrêt du médicament. Ils sont décrits aussi avecla ciprofloxacine à type de délire chez un patientinfecté par le VIH ou bien avec la péfloxacine à type deconfusion, hallucinations, cauchemars, anxiété,confusion.

Réactions allergiques

Les effets secondaires allergiques sont rares (entre0,4 et 0,7 pour 100 000 patients), et surviennent leplus souvent sur un terrain atopique. On été rapportésdes prurits, des rash cutanés mais aussi desvascularites d’hypersensibilité. Il existe une réactioncroisée entre les fluoroquinolones.

Des réactions asthmatiques, d’urticaire et d’œdèmelaryngé ont été rapportées avec la norfloxacine, laciprofloxacine.

Effets hématologiques

Différents types d’effets hématologiques ont étérapportés : anémie hémolytique avec test de Coombs

positif, leucopénie immuno-allergique transitoire aprèsl’arrêt des antibiotiques, thrombocytopénie à J10 ouJ15 de traitement.

Effets néphrologiques et urologiques

On constate parfois un syndrome néphritique,interstitiel avec une insuffisance rénale aiguë. Lemoyen de prévention est une bonne hydratationpendant le traitement et une surveillance de lafonction rénale.

L’arrêt de la fluoroquinolone permet un retour àl’état antérieur sans dialyse.

Une cristallurie est rapportée avec la ciprofloxacineet norfloxacine, elle se prévient en maintenant le pHurinaire acide.

Autres

Ont été rapportés de façon isolée des élévations destransaminases et des phosphatases alcalines, dessyncopes d’origine cardiaque, des phénomènesd’onycholyse et de rash cutané lors des perfusions deciprofloxacine.

■Conclusion

Les fluoroquinolones de deuxième génération ontconquis les prescripteurs par leur large spectre et leurmaniabilité. Actuellement, leurs indications en pratiquede ville sont essentiellement représentées par letraitement des infections urogénitales et digestives.

L’arrivée prochaine de nouvelles molécules activeségalement sur les streptocoques, en particulier lepneumocoque, permettra probablement d’élargir leursindications au traitement des infections bronchopul-monaires, mais il est encore trop tôt pour définir leurplace en première intention.

Dans tous les cas, leur prescription doit resterlimitée aux indications reconnues pour des raisonsd’ordre à la fois économique et écologique.

Lise-Hélène Pourteau : Interne des hôpitaux de Paris.Odile Launay : Chef de clinique-assistant.

Claude Carbon : Professeur des Universités, praticien hospitalier, chef de service.Service de médecine interne, hôpital Bichat-Claude Bernard, 46, rue Henri-Huchard, 75877 Paris cedex 18, France.

Toute référence à cet article doit porter la mention : L Pourteau, O Launay et C Carbon. Fluoroquinolones.Encycl Méd Chir (Elsevier, Paris), Encyclopédie Pratique de Médecine, 5-0100, 1998, 4 p

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Tableau IV. – Principaux effets secondaires des fluoroquinolones.

Gastro-intestinaux Les plus fréquents :anorexie, nausées, vomissements, douleurs abdominales, diarrhées

Tendinopathies Tendinite, rupture tendineuse, arthrite, arthropathie

Photosensibilité

Système nerveux central Cauchemars, troubles du sommeil, hallucinations, HTIC bénigne, céphalée,vertige, convulsions, hypomanie, panique, dépression

HTIC : hypertension intracrânienne.

5-0100 - Fluoroquinolones

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Page 56: Le manuel du généraliste   antibiothérapie

Glycopeptides

YDomart

L es glycopeptides sont actuellement des antibiotiques irremplaçables dans le traitement des infections sévères àstaphylocoque résistant à la méticilline (souvent multirésistant aux autres antistaphylococciques), mais

également dans le traitement d’infections dues à d’autres bactéries à Gram positif, devenues résistantes auxâ-lactamines (entérocoques, streptocoques, pneumocoques) ou chez des patients allergiques aux â-lactamines. Leurutilisation doit rester ciblée et rationnelle, car l’apparition de souches résistantes aux glycopeptides devient uneréalité (entérocoques, staphylocoques). Les glycopeptides sont réservés à l’usage hospitalier. De plus, même au seind’une structure hospitalière, il est souhaitable de les inclure parmi les antibiotiques « de réserve », d’utilisationcontrôlée.© Elsevier, Paris.

■Introduction

Deux antibiotiques glycopeptidiques sontactuellement disponibles : la vancomycine, utiliséedepuis 1956, et la téicoplanine, disponible depuis1988. Ces molécules complexes, de poids moléculaireélevé (1 500 à 2000 daltons), inhibent la synthèse dupeptidoglycane de la paroi bactérienne, mais netraversent pas la membrane externe des bactéries àGram négatif. Leur spectre d’activité comprend doncexclusivement les bactéries à Gram positif, aérobies ouanaérobies (en pratique : staphylocoques,streptocoques, pneumocoques, Clost r id ium ,corynébactéries). Ce sont des antibiotiquesbactéricides, avec une bactéricidie relativement lente,une diffusion tissulaire faible et inégale, unebiodisponibilité négligeable par voie orale, nécessitantl’administration parentérale pour le traitementsystémique, une toxicité rénale et auditive sommetoute modeste et probablement surestiméeinitialement pour la vancomycine. Leur utilisationjustifie habituellement une surveillance desconcentrations sériques, leur coût n’est pasnégligeable.

■Spectre antibactérien

Le spectre des glycopeptides s’exerce uniquementsur les bactéries à Grampositif :– staphylocoques, qu’il s’agisse de Staphylococcus

aureus ou de staphylocoques à coagulase négative,qu’ils soient sensibles ou résistants à la méticilline. Lesconcentrations minimales inhibitrices (CMI), vis-à-visdes staphylocoques, sont comprises entre 0,5 et4mg/L ;– streptocoques, quels qu’ils soient, groupables ou

non groupables, S pneumoniae (pneumocoque), ycompris les souches de sensibilité diminuée à lapénicilline, S bovis, avec des CMI entre 0,25 et 1mg/L ;– entérocoques (Enterococcus faecalis et E faecium),

avec des CMI entre 2 et 4mg/L ;– Bacillus species et corynébactéries pathogènes ;

– anaérobies stricts à Gram positif : coccianaérobies, Clostridium (C perfringens et C difficile). Lavancomycine par voie orale est, notamment, letraitement de référence des colites pseudo-membraneuses à C difficile ;– Listeria monocytogenes : activité bactériostatique

in vitro, mais une mauvaise bactéricidie et unemauvaise diffusion neuroméningée et intracellulairerendent, en pratique, les glycopeptides inutilisablesdans les infections à Listeria.Il faut surtout retenir que :– l’on rencontre désormais, en clinique humaine,

des souches d’entérocoques (surtout chez E faecium)résistant aux glycopeptides ;– très récemment, en 1997, ont été publiées, au

Japon, des cas d’infections humaines à S aureusrésistant à la vancomycine ;– une proportion non négligeable de souches de

staphylocoques à coagulase négative, parmi lesquellesS epidermidis et S haemolyticus, sont résistantes à latéicoplanine.

■Caractéristiques

pharmacocinétiques

et pharmacodynamiques

Les principales caractéristiques de la vancomycineet de la téicoplanine sont comparées dans le tableau I.

■Posologie, modalités

d’administration

et de surveillance

‚ Vancomycine■ La posologie systémique préconisée pour la

vancomycine chez un adulte à fonction rénalenormale est de 30 mg/kg/j, soit 1,5 à 3 g/j(conditionnements de 125mg, 250mg, 500mg et1 g). Elle peut être administrée en perfusionintraveineuse (IV) discontinue, 2 à 4 fois par jour,suffisamment diluée (volume ramené à au moins 100ml par 500mg) pour diminuer la causticité veineuse, età débit suffisamment lent (au moins 1 heure par

Tableau I. – Caractéristiques de la vancomycine et de la teicoplanine.

Vancomycine Téicoplanine

Lipophilie ++ (affınité tissulaire)

Basique : causticité veineuse Acide faible

voie : perfusion IV + +

IV directe 0 +

IM 0 +

Biodisponibilité orale Négligeable Négligeable

Liaison protéique 30 à 60 % > 90 %

Demi-vie d’élimination 4 à 11 heures 30 à 100 heures

Élimination rénale 90 % en 24 heures 50 à 80 % en 5 jours

Modification en cas d’insuffısance rénale + +

Dialysance Non négligeable avec les membranes« haute perméabilité » en polyacrylo-nitrile ou polysulfone⇒ doser sihémodialyse ou hémofiltration

Négligeable

IV : intraveineuse ; IM : intramusculaire.

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EncyclopédiePratiquedeMédecine

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©Elsevier,Paris

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500mg) pour minimiser le risque d’histaminolibéra-tion avec réaction anaphylactoïde. Elle peut êtreégalement administrée en perfusion continue (dose decharge initiale de 500 mg en 1 heure, puis30 mg/kg/24 h en perfusion continue). L’objectifthérapeutique visé est de maintenir en permanencedes concentrations sériques de l’ordre de 20mg/L(concentration résiduelle en cas d’administrationdiscontinue, ou concentration à l’état stable en cas deperfusion continue). Les posologies nécessaires pouratteindre cet objectif peuvent aller jusqu’à 30 à50mg/kg/j chez le petit enfant, le grand brûlé, le sujetneutropénique, la femme enceinte, le grand obèse. Àl’inverse, chez le sujet âgé et l’insuffisant rénal, il estnécessaire d’espacer les administrations (réinjectionlorsque la résiduelle est inférieure à 20mg/L).

■ La posologie orale préconisée dans le traitementdes colites pseudomembraneuses à C difficile (ou danscertaines indications de décontamination digestive) estde 125mg à 500mg, 3 à 4 fois par jour (poudre poursuspension buvable).

‚ TéicoplanineLe schéma posologique actuellement recommandé

pour la téicoplanine administrée en intramusculaire(IM), en IV directe lente ou en courte perfusion est de6 mg/kg toutes les 12 heures pendant les 48premières heures (dose de charge), puis 6mg/kg/j. Enfait, la posologie optimale, notamment pour desinfections sévères (bactériémies, endocardites), n’estpas encore clairement déterminée, et, dans desinfections sévères, des posologies de 12, 15, voire30mg/kg/j, ont été proposées. L’objectif thérapeuti-que visé est une concentration sérique résiduelle (justeavant une injection) de l’ordre d’aumoins 20mg/L.

■Effets indésirables, toxicité

‚ VancomycineCausticité veineuse locale, nécessitant, sur voie

périphérique, une dilution suffisante.Histaminolibération avec réactions anaphylactoï-

des (érythème, « syndrome de l’homme rouge »,collapsus), dont le risque est atténué par une perfusionlente (pas plus de 500mg/h).Néphrotoxicité (tubulopathie) intrinsèque,

actuellement négligeable en monothérapie, mais avecune potentialisation importante lors d’associations àd’autres molécules néphrotoxiques : aminosides,ciclosporine, amphotéricine B...Ototoxicité cochléaire (acouphènes, hypoacousie),

qui semble corrélée à des doses totales administréesimportantes et/ou à des concentrations sériquessupérieures à 80mg/L.

Réactions d’hypersensibilité : éruption cutanéegénéralisée, hyperéosinophilie, fièvre, généralement àpartir du 7e jour.Neutropénie lors de traitements prolongés.

‚ TéicoplanineLes manifestations d’histaminolibération semblent

beaucoup plus rares qu’avec la vancomycine, lanéphrotoxicité et l’ototoxicité sont moindres. Desréactions d’hypersensibilité sont possibles, mais sansallergie croisée avec la vancomycine.

■Indications des glycopeptides

‚ En traitement curatif■ Infections sévères à S aureus résistant à la

méticilline, à staphylocoque à coagulase négativerésistant à la méticilline, ou à staphylocoque sensible àla méticilline, mais chez des patients allergiques auxâ-lactamines.

■ Infections sévères à streptocoque ou àentérocoque de sensibilité diminuée ou résistant auxâ-lactamines, ou chez des patients allergiques auxâ-lactamines.

■ Infections sévères à pneumocoque liées à dessouches de sensibilité diminuée à la pénicilline G etaux autres â-lactamines.

■ Infections à d’autres micro-organismes à Grampositif, résistant aux â-lactamines, généralement dansun contexte nosocomial et/ou d’immunodépression :corynébactéries pathogènes, Bacillus.

■ Schémas d’antibiothérapie empirique (ou avantidentification et antibiogramme de cocci à Grampositif) des états infectieux sévères dans un contextenosocomial ou chez le patient neutropénique.

■ Traitement de la colite pseudomembraneuse à Cdifficile.

‚ En prophylaxie■ Antibioprophylaxie de l’endocardite bactérienne

chez des patients porteurs d’une cardiopathie à risque,allergiques aux â-lactamines et devant subir un geste àrisque : glycopeptide seul (vancomycine en perfusion de1g en 1 ou plutôt 2 heures, ou téicoplanine 400mg enIV directe) pour un geste buccodentaire ou sur les voiesaériennes supérieures, glycopeptide + aminoside(gentamicine 1,5mg/kg en perfusion de 30 minutes ouen IM) pour une intervention urogénitale ou digestive.

■ Antibioprophylaxie des infections du siteopératoire dans des chirurgies à risque staphylococci-que (chirurgie cardiaque, vasculaire, orthopédique,neurochirurgie), dans des circonstances où le risqued’infection à staphylocoque résistant à laméticilline estaccru (reprise chirurgicale précoce, institution où

l’incidence des staphylocoques résistant à lameticillineest élevée) ou chez des patients allergiques auxâ-lactamines.

■ Utilisation dans des associations d’antibiotiquesnon absorbables (polymyxine, néomycine) sous formetopique oropharyngée et entérale, pour ladécontamination digestive dans certaines indications :aplasies induites, malades de réanimation (indicationcontroversée).

‚ Arguments pour le choix préférentiel del’un ou l’autre des deux glycopeptides

Pour le traitement initial d’une infection sévère àcocci à Grampositif, certains arguments plaident plutôten faveur de la vancomycine :– quasicertitude du spectre d’activité (la

téicoplanine peut avoir des « trous » vis-à-vis destaphylocoques à coagulase négative ; ceci sousréserve de l’évolution, en France, des entérocoquesrésistant aux glycopeptides ;– recul plus important et meilleure connaissance

des posologies efficaces ;– dosage des concentrations sériques plus

facilement accessible en pratique courante ;– nécessité, de toute façon, d’un abord veineux, et

patient non ambulatoire.La maniabilité et la bonne tolérance de la

téicoplanine, sous réserve de la vérification de sonefficacité sur la souche considérée, sont des argumentsen sa faveur dans certaines situations :– intolérance à la vancomycine ;– crainte de l’aggravation d’une fonction rénale

altérée chez un patient nécessitant l’association d’unglycopeptide avec une autremolécule néphrotoxique ;– capital veineux dévasté ;– malade ambulatoire, enfant ;– traitement prolongé. On peut citer, par exemple,

le traitement d’une infection chez le toxicomane, ou letraitement de relais, ambulatoire et prolongé, d’uneinfection ostéoarticulaire ;– indication prophylactique d’un glycopeptide,

antibioprophylaxie de l’endocardite ou antibioprophy-laxie périopératoire.Le coût direct actuel de la téicoplanine est

notablement supérieur à celui de la vancomycine,mais il est à mettre en balance dans un contexteambulatoire, avec les contraintes et les coûts indirectsinduits par la vancomycine.Enfin, toutes ces considérations ne doivent pas faire

perdre de vue l’importance capitale d’une prise encharge chirurgicale correcte, associée à l’antibiothéra-pie, dans bon nombre d’infections staphylococciques,et la possibilité de discuter, dans un contexteambulatoire, l’indication de molécules antistaphylo-cocciques utilisables per os lorsque la sensibilité de lasouche le permet.

Yves Domart : Ancien chef de clinique des Hôpitaux de Paris, praticien hospitalier, chef de service,service de réanimation médico-chirurgicale, centre hospitalier de Compiègne, 8, avenue Henri-Adnot, 60321 Compiègne cedex, France.

Toute référence à cet article doit porter la mention : Y Domart. Glycopeptides.Encycl Méd Chir (Elsevier, Paris), Encyclopédie Pratique de Médecine, 5-0060, 1998, 2 p

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5-0060 - Glycopeptides

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