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Le Mag Septembre 2019 ISSN 2609-0112 Que faire de nos déchets radioactifs ?

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Le Mag

Septembre 2019ISSN 2609-0112

Que faire de nos déchets radioactifs ?

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Le Monde de l’Energie - Le Mag - Septembre 2019 3

Déchets radioactifs : on en fait quoi ?Que faire des déchets nucléaires et comment les gérer ? Depuis le 17 avril et jusqu’au 25 septembre, les Français ont l’opportunité de s’exprimer sur cette épineuse question posée à l’occasion du débat public national sur la gestion des matières et déchets radioactifs. Depuis le printemps, nombreux sont les citoyens, curieux, parfois antinucléaires, souvent préoccupés légitimement par la question, qui participent aux échanges et réunions publiques organisés par la Commission nationale du débat public (CNDP). Une bonne nouvelle car ce sujet nous concerne tous. Car la question de la gestion des matières radioactives, encadrées par trois lois depuis 1991, ne doit pas être comme la poussière qu’on glisse discrètement sous le tapis en attendant que nos enfants, dans quelques décennies, s’emparent du sujet.

Il faut agir, et vite. Si la gestion des déchets (bien encadrée) ne concerne pas uniquement le nucléaire, certains dossiers sont brûlants, comme la saturation des espaces de stockage. La question est d’autant plus pressante que l’Agence nationale pour la gestion des déchets radioactifs (Andra) a révélé qu’il y avait, sur notre territoire, l’équivalent de 400 piscines olympiques, disséminés dans 950 sites.

A chaque problème une solution.

Et parmi les solutions proposées, le projet Cigéo, piloté par l’Andra, fait l’objet d’oppositions de la part d’activistes et d’associations environnementales

qui craignent une contamination radioactive des eaux et des sols. Inspiré du site d’enfouissement finlandais « Onkalo », Cigéo, à Bure dans la Meuse, est un centre de stockage pour l’heure expérimental des déchets nucléaires les plus dangereux dans une couche d’argile, à 500 mètres de profondeur. Particularité : Cigéo a été conçu pour être réversible pendant au moins 100 ans, c’est-à-dire que les déchets stockés géologiquement doivent pouvoir être remontés à la surface au cas où les générations futures trouveraient une meilleure solution de gestion des déchets.

La question n’est donc pas prise à la légère. Ce nouveau magazine vous emmène dans les entrailles du projet Cigéo et les coulisses du traitement des déchets radioactifs en France. Cela vous permettra sûrement de vous forger un avis sur la question… et de pourquoi pas de participer au débat public… Bonne lecture !

OLIVIER DURIN

Directeur de publication

Edito

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Le Monde de l’Energie - Le Mag - Septembre 2019Le Monde de l’Energie - Le Mag - Septembre 2019 54

Sommaire

1

3

LE STOCKAGE

DE DÉCHETS,

KEZACO ?

CIGÉO, LA

MEILLEURE

SOLUTION ?

Stockage géologique : immersion dans les entrailles de la Terre .......................................................... 8

L’Entreposage à sec est-il une solution viable pour stocker le combustible nucléaire usé ? .....................11

Le traitement des déchets nucléaires, une spécificité française ? ..................................................... 14

Traitement et recyclage du combustible usé : un processus bien huilé ! ......................................................... 17

Déchets nucléaires : l’enfouissement est « la meilleure solution » estime Emmanuelle Wargon ...................................................20

Déchets nucléaires : où est le problème ? ...............21

Nucléaire et déchets de très faible activité, le mieux serait-il l’ennemi du bien ? ......................24

Sûreté nucléaire : un enjeu de taille en France ... 27

2LES ENJEUX

CIGÉO : la meilleure solution ............30

Déchets nucléaires : l’impérieuse nécessité de Cigéo ......... 34

Cigéo, un héritage pour les « générations futurres » ...................... 36

Les déchets nucléaires en débat : les contraires ne s’y épousent pas ! ..39

Plan national de gestion des déchets radioactifs : « les débats peuvent créer de l’intelligence collective » ..... 42

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1LE STOCKAGE

DE DÉCHETS,

KEZACO ?

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Stockage géologique : immersion dans les entrailles de la TerreReportage par Olivier Durin - publié le 25.01.2017

Claustrophobe ? Le voyage au centre de la Terre à Bure n’est pas fait pour vous ! Aventuriers ? A vous la visite de Cigéo, le laboratoire industriel de stockage géologique des déchets radioactifs ! Après les consignes de sécurité nécessaires et les explications sur la conception de ce laboratoire unique, Eric Sutre, notre guide et géologue du jour, nous fournit casques, blouses, chaussures de sécurité et appareils respiratoires en cas de problème. Commence alors la descente en ascenseur dans l’un des deux puits construits en 2000. Sept minutes plus tard, nous voilà déjà dans les entrailles du laboratoire, à 500 mètres sous terre au cœur d’une épaisse couche d’argile (100 mètres d’épaisseur). L’aventure peut commencer. Les uns derrière les autres, nous arpentons la première galerie. Plusieurs ingénieurs, techniciens, et ouvriers posent des capteurs et testent les couches géologiques, et leur fiabilité. Une centaine de mètres plus loin, au fond d’un autre tunnel, nous tombons sur un brise-roche hydraulique, engin qui agit à la manière d’un marteau piqueur de grande taille. « Cet engin permet de vérifier, mètre après mètre, que les couches géologiques traversées sont bien régulières et n’ont pas été altérées par des phénomènes naturels, comme des séismes », nous explique notre guide. Et ce n’est pas par hasard si le laboratoire de l’Andra, validé par l’Etat et cofinancé par EDF, Areva et le CEA, se trouve dans cette région : aucun tremblement de terre n’a été recensé ici depuis des millions d’années. Une zone géographique idéale donc, couplée à une épaisse couche d’argile où devraient être stockées les matières radioactives que l’on extrait de nos centrales nucléaires. Nous apercevons, ici et là, l’argile marron entre les coulées de béton qui forment les tunnels.

L’argile, nécessaire au stockageCette couche géologique, choisie pour l’implantation de l’installation souterraine, est une couche sédimentaire argileuse âgée de 160 millions d’années. Son nom : les argilites du Callovo-Oxfordien. Épaisse

de 145 mètres et située entre 400 et 600 mètres de profondeur, elle est stable depuis plus d’une centaine de millions d’années et très faiblement perméable. La question du stockage des déchets radioactifs est le fruit de plus de 25 ans de recherches, de trois lois votées respectivement en 1991, 2006 et 2016 et de deux débats publics organisés en 2005 et 2013. « L’objectif de ce projet industriel est de ne pas léguer la charge de la gestion de ces déchets à nos enfants », explique Eric Sutre en nous montrant les alvéoles qui devraient accueillir les fameux colis de déchets.

“ Ce n’est pas par hasard si le laboratoire de l’Andra, validé par l’Etat et cofinancé par EDF, Areva et le CEA, se trouve dans cette région : aucun tremblement de terre n’a été recensé ici depuis des millions d’années ”

OLIVIER DURIN

Directeur de publication Le Monde de l’énergie

L’Agence nationale des déchets radioactifs (Andra) développe depuis 1998 à Bure, dans la Meuse, un laboratoire unique de stockage géologique des déchets radioactifs produits en France. Reportage à 500 mètres sous terre.

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Mais de quels déchets parlons-nous ?

Avant d’être stockés dans ces galeries, les déchets ultimes de la production électronucléaire, une fois vitrifiés et noyés dans une matrice de verre, seront entreposés dans des colis en acier. « Le combustible qui sert à produire l’électricité dans les centrales nucléaires se présente sous la forme de grande barre de plusieurs mètres de haut. Après plusieurs années dans le réacteur, une fois usé, il est envoyé dans l’usine d’Areva à La Hague pour être recyclé. On y récupère l’uranium et le plutonium. Les cendres non recyclables, noyées dans le verre, vont ensuite constituer les fameux colis de déchets que Cigéo devrait recevoir, a priori, en 2030 », explique Eric Sutre. Les colis de haute activité devront d’abord refroidir une soixantaine d’années sur les sites de production de La Hague pour être ensuite descendus dans le futur centre de stockage en profondeur. Ils voyageront par train de la Manche jusqu’à Bure où une installation en surface permettra de les réceptionner et de les placer dans des surconteneurs. Une fois conditionnés, ils seront ensuite descendus à 500 mètres de profondeur par une galerie inclinée (pente de 10%) où ils seront repris par des véhicules qui les amèneront, de façon automatisée, sous une hotte de radio protection, jusqu’aux alvéoles de stockage, tunnels horizontaux de 70 cm de diamètre, longs pour la plupart de 40 mètres. Les colis, installés, un par un, devront y être stockés définitivement. En attendant, la visite se termine pour nous dans un endroit qui ressemble plus à un complexe minier qu’à un véritable labo. L’ascenseur revient à la surface de la terre. Le temps semble s’être arrêté.

10 000 m3 de déchets

Deux centres de stockage permettent déjà de gérer 90% du volume des déchets produits chaque année. Mais les 10% restants ne peuvent pas, pour des raisons de sûreté, être stockés dans les centres existants en surface. Soit pas moins de 10 000 m3 de déchets de haute activité (HA) et 70 000 m3 de déchets de moyenne activité à vie longue (MA-VL) si les réacteurs actuels fonctionnent jusqu’à 50 ans. Ces déchets HA et MA-VL seront stockés au futur centre industriel de stockage réversible profond de déchets radioactifs Cigéo, sous réserve de la validation finale du projet. 30% de ces déchets HA et 60% des déchets de MA-VL sont déjà produits et entreposés à l’usine de retraitement de La Hague et à Marcoule.

L’Entreposage à sec est-il une solution viable pour stocker le combustible nucléaire usé ?La Rédaction - publié le 28.05.2019

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L’énergie nucléaire est considérée comme un atout pour la transition énergétique française et la lutte contre le réchauffement climatique. Le nucléaire est une composante historique du mix électrique : l’atome permet en effet aux Français de disposer au quotidien d’une électricité largement décarbonée et bon marché.

Bémol, et de taille : il génère des déchets.

Le code de l’environnement prévoit l’élaboration d’un Plan national de gestion des matières et des déchets radioactifs (PNGMDR) par le ministère de la Transition écologique et solidaire et l’Autorité de sureté nucléaire (ASN) : il s’agit d’un véritable outil de pilotage afin de faciliter la gestion des matières radioactives de façon durable, dans le respect de la protection des citoyens et de l’environnement.

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Comment sont stockés les déchets nucléaires français ?

En février dernier, Chantal Jouanno, présidente de la Commission nationale du débat public, a demandé aux experts de l’Institut de radioprotection et de sûreté nucléaire (IRSN) de rédiger un rapport sur les différentes solutions d’entreposage actuellement disponibles pour gérer les combustibles usés Mox (combustibles fabriqués à partir de plutonium et d’uranium appauvri recyclés) et URE (Uranium de recyclage enrichi) issus des centrales électronucléaires.

L’entreposage des combustibles usés est un des sujets abordés dans le cadre de la préparation du débat public sur le PNGMDR 2019-2021. Il faut en effet savoir qu’il existe deux techniques : un entreposage dit “en piscine” (également appelé “sous eau”) et un entreposage dit “à sec”.

En France, c’est l’entreposage en piscine qui est mis en œuvre, dans des piscines de désactivation des centrales nucléaires et dans celles de l’usine de La Hague qui est en charge de la première étape du recyclage des combustibles.

Cette technique consiste à stocker les assemblages de combustibles usés dans de grandes piscines, à une petite dizaine de mètres de profondeur. L’eau a un double avantage : elle protège efficacement contre les rayonnements des combustibles et elle agit comme un liquide de refroidissement qui permet de contenir les dégagements de chaleur des combustibles usés.

La technique d’entreposage des combustibles à sec, utilisée dans des pays comme les Etats-Unis, l’Allemagne, la Suède, ou encore la Corée du Sud, consiste à entreposer les assemblages de combustibles usés dans des emballages spécialement conçus pour cela : il s’agit de conteneurs en acier et en béton, disposés en surface.

L’entreposage en piscine, une solution avantageuse…

Dans son rapport notamment sur les combustibles MOX usés, l’IRSN indique que les deux techniques d’entreposage de combustibles usés sont des concepts sûrs voire complémentaires qui doivent être considérés au regard de plusieurs caractéristiques, et notamment le type de combustible et sa puissance thermique.

L’entreposage à sec n’est, par exemple, pas autorisé pour les assemblages de combustibles dont la puissance thermique excède les 2 kW.

“En tenant compte des dates de mise en œuvre des différents types de combustibles et de la valeur repère de 2 kW, il apparaît que les combustibles MOX usés à 5,30% de plutonium et la plupart de ceux à 7,08 % sont compatibles, du point de vue de l’évacuation de la puissance thermique, avec certains concepts d’entreposage à sec. En revanche, les premiers combustibles MOX à 8,65 % de plutonium usés ne seraient compatibles avec un entreposage à sec qu’à l’horizon 2040”, expliquent les experts de l’IRSN.

Ces derniers estiment cependant qu’il est possible de réduire cette durée, en faisant évoluer le concept d’entreposage à sec.

Il s’agirait par exemple de limiter la puissance thermique en ne chargeant pas complètement les emballages d’entreposage (20 emplacements laissés vacants pour 4 emplacements occupés). Une solution viable mais qui augmenterait de manière significative les surfaces dédiées au stockage à sec voire l’impact en termes de radioprotection.

L’entreposage en piscine apparait ainsi comme une étape préalable indispensable pour la gestion des combustibles usés : elle permet de refroidir plus efficacement et plus rapidement les assemblages de combustibles lorsqu’ils sortent des réacteurs électronucléaires.

Une récente analyse prospective, réalisée dans le cadre du PNGMDR, a permis de mettre en exergue la nécessité de construire de nouvelles capacités d’entreposage de combustibles usés de type MOX ou URE.

À ce titre, EDF a indiqué à l’Autorité de sûreté nucléaire sa volonté de construire une nouvelle piscine d’entreposage sur un site à déterminer mais dont les critères techniques et de sûreté seront pris en considération. L’électricien français espère être en mesure de déposer une Demande d’Autorisation de Création avant fin 2020 pour un début d’exploitation à l’horizon 2030.

… avant le recyclage des combustibles usés

Permettant une reprise plus aisée des combustibles, la technique d’entreposage en piscine s’avère également appropriée pour les pays qui, comme la France, ont mis en place des opérations de traitement et de recyclage de leurs combustibles nucléaires usés.

La France a en effet fait le choix de traiter ses combustibles nucléaires usés afin de réduire la quantité et la nocivité de ses déchets radioactifs : 96% du combustible tricolore utilisé dans les réacteurs électronucléaires peuvent aujourd’hui être recyclés (les 4 % restant, dits “déchets ultimes”, sont conditionnés de manière sûre et pérenne).

Les combustibles usés contiennent en effet des matériaux valorisables qui permettent à la France de réaliser des économies importantes sur ses matières premières (près d’une ampoule sur 10 fonctionne aujourd’hui grâce à des matières nucléaires recyclées).

Mieux, le recyclage de l’uranium et des combustibles Mox fait l’objet d’un programme de recherche et développement, conformément à la stratégie de retraitement-recyclage définie par la Programmation pluriannuelle de l’énergie 2019-2028.

Il s’agit notamment d’étudier leur recyclage à grande échelle dans les réacteurs à eau pressurisée. L’introduction d’un assemblage test en réacteur est prévue à l’horizon 2025-2028. Les MOX usés pourront également être recyclés ultérieurement dans la filière de 4ème génération (RNR).

La stratégie française a fait ses preuves

L’entreposage en piscine apparait donc comme une solution parfaitement sûre, sur le court comme sur le long terme.

Elle permet un refroidissement plus efficace, une surveillance mieux contrôlée et une reprise plus facile des combustibles. Notamment dans le cadre des opérations de recyclage.

Le recyclage apparait d’ailleurs comme la manière la plus efficace d’éviter l’accumulation des combustibles usés mais également pour économiser els matières et réduire le volume et la toxicité des déchets

En revanche, l’entreposage à sec ne constitue pas une réponse complète à la gestion des combustibles usés. Il s’agit d’une solution sûre mais temporaire qui s’avère adaptée aux pays n’ayant pas encore tranché sur la question de la gestion de leurs matières nucléaires.

L’entreposage à sec reporte ainsi la gestion définitive des déchets sur les générations futures.

“ L’entreposage en piscine apparait ainsi comme une étape préalable indispensable pour la gestion des combustibles usés : elle permet de refroidir plus efficacement et plus rapidement les assemblages de combustibles lorsqu’ils sortent des réacteurs électronucléaires. ”

La Commission nationale du débat public (CNDP) a décidé de soumettre la constitution de la 5ème édition du PNGMDR (2019-2021) à un débat public.

Les Français sont donc invités à exprimer leur avis ou à poser des questions aux maîtres d’ouvrages depuis 17 avril et ce jusqu’au 25 septembre.

L’entreposage et le traitement des combustibles usés sont notamment au centre des débats.

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Le traitement des déchets nucléaires, une spécificité française ?Tribune rédigée par Pierre Dacquin - Publiée le 08.02.2018

Outre la prolongation de la durée de vie des centrales en activité et la conception de réacteurs plus sûrs et plus performants, l’industrie nucléaire doit également s’adapter au vieillissement des centrales anciennes générations et organiser leur déconstruction progressive dans des conditions de sûreté optimales.

Ces chantiers devraient se multiplier dans les années à venir selon les chiffres de l’Agence internationale de l’Energie atomique, et nécessiteront logiquement la mise en place de capacités de traitement et de stockage suffisantes pour intégrer la hausse des déchets radioactifs qui en découlera.

Reconnus pour leur expertise en la matière, les grands groupes français du nucléaire misent depuis plusieurs années déjà sur ce marché prometteur et font progressivement de l’assainissement nucléaire, une véritable spécificité française.

Démantèlement et traitement des déchets, un marché prometteur Si de nombreux réacteurs nucléaires verront leur durée de fonctionnement prolongée après validation des autorités de sûreté compétentes, ces installations de production d’électricité n’en ont pas moins une durée de vie limitée et les réacteurs les plus anciens (généralement conçus dans les années 1960) arrivent aujourd’hui en fin de vie.

Or, qui dit fermeture de réacteurs, dit également démantèlement de centrales et réhabilitation des sites. Selon une étude récente de l’Agence internationale de l’Energie atomique (AIEA), un total de 164 réacteurs nucléaires ont déjà cessé leur activité à travers le monde, et sur les 448 réacteurs nucléaires encore en activité, plus de la moitié approchent de la fin de leur vie opérationnelle. Le nombre de chantiers de démantèlement devrait donc logiquement augmenter dans les prochaines décennies, faisant du traitement des déchets, un marché des plus prometteurs pour l’avenir.

Clairement identifiés sur ce domaine d’activité, les grands industriels français du nucléaire proposent déjà une chaîne complète d’expertises allant de l’accès sécurisé aux zones contaminées, à la stabilisation des déchets et comprenant la caractérisation, la mesure, le tri, la séparation, le transport, et la décontamination.

Ces solutions innovantes et efficaces permettent de lutter contre la pollution sous sa forme la plus complexe, tout en limitant les impacts sur la santé et

l’environnement, et dénotent d’un véritable savoir-faire national.En mission dans l’Hexagone du 15 au 24 janvier 2018, une délégation composée de 10 experts internationaux, a d’ailleurs récemment confirmé, sous l’égide de l’AIEA, le sérieux de l’organisation française en matière de gestion des déchets radioactifs, et la bonne réputation des opérateurs français en Europe et dans le monde.

Premier contrat pour EDF en ItalieEn Italie par exemple, le chantier de démantèlement de la centrale nucléaire de Garigliano accumule les retards du fait d’un problème récurrent de gestion des déchets, pour lequel la société publique Sogin en charge du démantèlement, cherchait un partenaire européen depuis plusieurs mois.

A la suite d’un appel d’offres lancé au printemps 2017, son choix s’est finalement porté vers le groupe français EDF. Sa filiale Cyclife a en effet remporté mardi 6 février 2018, un premier contrat de 28 millions d’euros pour le traitement de 1 800 tonnes de déchets métalliques issus de trois centrales nucléaires en déconstruction en Italie (Trino, Garigliano et Latina), sur une période de cinq ans.

Selon Cyclife, la prestation débutera dès cette année par une phase d’études et de planification avant de se poursuivre en 2019 par la mise en œuvre des premiers travaux sur site et la délocalisation des déchets. Leur transport sera assuré par le groupe français vers son usine en Suède où les déchets seront traités par fusion.

PIERRE DACQUIN

Consultant nucléaire et énergies fossiles

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Le Monde de l’Energie - Le Mag - Septembre 2019Le Monde de l’Energie - Le Mag - Septembre 2019 1716

Ce type de traitement permettra une réduction significative du volume des déchets qui se traduira, pour Sogin, par une diminution des coûts de stockage.

« Le marché du démantèlement nucléaire et du traitement des déchets radioactifs est amené à croître dans les années à venir. Grâce à sa filiale Cyclife, EDF ambitionne d’en devenir un acteur de référence, en proposant des services à forte valeur ajoutée, s’appuyant sur plus de 10 années d’expérience sur nos chantiers de déconstruction et sur une plate-forme de traitement des déchets avec des usines en France, au Royaume-Uni et en Suède », a déclaré Sylvain Granger, Directeur des Projets Déconstruction et Déchets d’EDF.

Des groupes français bien positionnés à l’internationalMais EDF n’est pas le seul acteur français positionné sur le marché. Le groupe Veolia par exemple, spécialiste mondial de la gestion de l’eau et des déchets, a créé en février 2017 la société Nuclear Solutions, avec pour objectif d’offrir aux industriels du secteur nucléaire une gamme complète de technologies,

d’expertises et de services, pour l’assainissement et le démantèlement des installations, ainsi que pour le traitement des déchets faiblement et moyennement radioactifs.

Très bien perçu à l’international, Veolia a déjà remporté dans ce cadre deux contrats significatifs : un premier en mars 2017 avec l’exploitant de centrales nucléaires britannique Magnox Limited pour le déploiement de systèmes de traitement des eaux contaminées de quatre sites nucléaires, puis un second en juin 2017, auprès du groupe Canadian Nuclear Laboratories dans le but d’élaborer une solution robotique de traitement de déchets radioactifs au Canada.

De son côté, le groupe Areva, désormais baptisé Orano, a annoncé début janvier 2018 avoir signé un préambule d’accord commercial avec le groupe chinois China National Nuclear Corporation (CNNC), relatif à la construction d’une usine de traitement des combustibles nucléaires usagés.

L’industriel français, recentré sur la valorisation des matières nucléaires et la gestion des déchets depuis la cession de son activité réacteur à EDF, avait déjà remporté un contrat auprès du groupe Vattenfall en juin 2017 concernant le démantèlement interne du réacteur de la centrale nucléaire de Brunsbüttel, située au nord de l’Allemagne.

“ Le nombre de chantiers de démantèlement devrait donc logiquement augmenter dans les prochaines décennies, faisant du traitement des déchets un marché des plus prometteurs pour l’avenir ”

Traitement et recyclage du combustible usé : un processus bien huilé !La Rédaction - publié le 23.08.2018

Malgré les interrogations du récent rapport Pompili, le traitement et le recyclage des combustibles nucléaires constituent une étape incontournable de l’industrie nucléaire française. Dans ce domaine, la France affiche un savoir-faire reconnu dans le monde entier, comme le prouve le récent accord signé en Chine.

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Fin juin 2018, Orano et China National Nuclear Corporation (CNNC) ont signé via leurs filiales respectives, Orano Projets et CNLA, un contrat historique visant à lancer les travaux préparatoires pour la réalisation d’une usine de recyclage nucléaire d’une capacité de 800 tonnes.

La construction du premier établissement chinois de ce type pourrait débuter dès la fin de l’année 2018, près de 100 employés d’Orano étant déjà mobilisés sur le projet.

Confirmée lors de la visite du premier ministre Édouard Philippe en Chine, cette étape majeure fait suite à l’accord commercial conclu en janvier par Orano Projets et CNLA en présence des présidents

Xi Jinping et Emmanuel Macron.La future usine chinoise sera construite sur le modèle de celles d’Orano La Hague (Manche) et d’Orano Melox de Marcoule (Gard). Si l’expertise française en matière de traitement et de recyclage du combustible usé s’exporte aussi loin, c’est qu’elle repose sur une pratique éprouvée depuis plus de 40 ans, qui place la France au rang de leader mondial.

Alors que l’économie circulaire commence seulement à faire l’unanimité pour le plastique, le verre ou encore les métaux, l’industrie nucléaire hexagonale a fait du cycle fermé le pilier de son fonctionnement grâce à un processus de traitement initié dès 1976 à La Hague.

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“ l’État et les acteurs du nucléaire français planchent depuis 25 ans sur la construction d’un centre industriel de stockage géologique (Cigéo), qui devrait voir le jour dès 2030 à Bure (Meuse) ”

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Aujourd’hui, 96 % de la matière (95 % d’uranium et 1 % de plutonium) peut être réutilisée pour fabriquer de nouveaux combustibles, ce qui permet d’économiser 25 % de l’uranium naturel.

En termes d’énergie produite, 1 gramme de plutonium (ou 100 grammes d’uranium) équivaut ainsi à 1 tonne de pétrole, 1,5 tonne de charbon, 2,5 tonnes de bois ou 11 MWh d’électricité.

L’assemblage de combustibles usés avec d’autres à l’état naturel, baptisé MOX, permet de fournir 10 % de l’électricité issue du nucléaire, pourvoyant ainsi à plus de 7 % de la consommation électrique française. Grâce au recyclage de l’énergie nucléaire, la France a déjà largement atteint les objectifs fixés par le GIEC (Groupement d’experts intergouvernemental sur l’évolution du climat) avec une électricité décarbonée à plus de 95 %.

Déchets nucléaires : la performance du système de traitement françaisPrincipal argument des opposants à l’atome, le traitement des 4 % de combustibles non-réutilisables fait lui aussi l’objet d’une procédure bien rodée.

Conditionnés dans des colis vitrifiés et stockés sur les sites de La Hague et de Marcoule, les déchets nucléaires ont vu leur volume et leur radiotoxicité respectivement divisés par 5 et 10. Ils représentent à présent moins de 200 m3 par an, soit 5 grammes par habitant ou le poids d’une pièce d’1 euro.

Cette quantité ne prend évidemment pas en compte les déchets étrangers traités en France, qui sont ensuite renvoyés dans leur pays d’origine.

Afin de pouvoir continuer à stocker les résidus non-recyclables dans des conditions optimales de sécurité, l’État et les acteurs du nucléaire français planchent depuis 25 ans sur la construction d’un centre industriel de stockage géologique (Cigéo), qui devrait voir le jour dès 2030 à Bure (Meuse).

Mais alors que les autres industries sont tenues depuis peu de réutiliser leurs produits usagés, un rapport parlementaire remis le 5 juillet 2018 par les députés Paul Christophe et Barbara Pompili interroge sur la pertinence des méthodes de traitement et même du recyclage dans le secteur nucléaire, pourtant précurseur en la matière.

Dans leur recommandation n°19, les élus invitent ainsi à « mener une réflexion sur la poursuite ou non du retraitement des combustibles usagés, ceux-ci n’étant majoritairement pas réutilisés et présentant plusieurs risques ».

Un point de vue pour le moins surprenant au regard de la part quasi-totale de matière recyclée (96 %) et de l’ampleur du dispositif de protection sur les installations de traitement.

À La Hague, 140 gardes armés surveillent les bassins où sont refroidis les combustibles usés. La zone est par ailleurs contrôlée en permanence par un radar, entourée de nombreux barrages et interdite de survol à moins de 2 000 mètres d’altitude.

Semblant ignorer ces mesures, le rapport Pompili préconise également dans la recommandation n°16 de préférer une solution d’entreposage à sec des déchets non-recyclables plutôt qu’en piscine.

Jusque-là privilégié en France, le refroidissement dans l’eau est pourtant reconnu comme « plus rapide », « facilit[ant] les opérations de retraitement » et, au final, « incontournable » car obligatoire avant un éventuel entreposage à sec, notent toutefois les parlementaires.

D’où le sentiment de confusion qui s’installe au fur et à mesure de la lecture du document…

À l’heure de dresser le bilan de la consultation publique sur la PPE (Programmation pluriannuelle de l’énergie), pas sûr que le rapport Pompili et ses recommandations pour le moins bancales fassent mouche auprès de l’exécutif.

2LES ENJEUX

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Déchets nucléaires : l’enfouissement est “la meilleure solution” AFP - publié le 25.01.2019

L’enfouissement des déchets nucléaires, en projet à Bure (Meuse), est “la meilleure solution”, a assuré la secrétaire d’Etat à la Transition écologique, Emmanuelle Wargon, lors d’un déplacement vendredi sur le site.

Mme Wargon a parcouru le laboratoire du Centre industriel de stockage géologique (Cigéo), qui vise à enfouir à 500 m sous terre les déchets les plus radioactifs ou à vie longue du parc nucléaire français.

Sur environ 1,8 km de galeries, creusées dans la roche à la même profondeur, les techniques de creusement, l’évolution de la roche, les méthodes de soutènement, le scellement, sont expérimentés par l’Agence nationale pour la gestion des déchets radioactifs (Andra).

“Le stockage géologique en couche profonde est la meilleure solution pour faire face à des déchets qu’il faut stocker, de façon satisfaisante sur une longue période”, a dit Mme Wargon à la presse.

La secrétaire d’Etat a relevé “l’importance et la diversité des recherches conduites (à Bure) pour assurer la sécurité à moyen, long terme et même très long terme”.La consultation nationale sur le programme national de gestion des matières et déchets radioactifs, annoncée en septembre 2018 et prévue en mars, sous l’égide de la Commission nationale du débat public (CNDP) permettra, selon elle, de “poser les fondamentaux”.

“L’enjeu du stockage des déchets radioactifs, les différents types de déchets et de solutions, ainsi que les raisons pour lesquelles on en est arrivé (au projet Cigéo, NDLR), après l’analyse d’alternatives dans les types de stockage et la localisation” seront abordés, a souligné la secrétaire d’Etat. Tout comme, a-t-elle ajouté, “la réversibilité, l’adaptabilité et la capacité du projet (Cigéo) à intégrer au fur et à mesure l’état de la science”.

“A la question sur la bonne manière de gérer les déchets les plus radioactifs, on va retomber sur la solution qui est développée ici”, a souligné Mme Wargon.

Le projet Cigéo suscite une farouche opposition de nombreuses organisations de défense de l’environnement et de lanceurs d’alerte.

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“ Le stockage géologique en couche profonde est la meilleure solution pour faire face à des déchets qu’il faut stocker, de façon satisfaisante sur une longue période ”

Déchets nucléaires : où est le problème ?Tribune rédigée par Michel Gay - publiée le 05.11.2018

MICHEL GAY

AuteurSimple citoyen français, désireux de défendre l’intérêt général, Michel Gay est membre de l’Association des écologistes pour le nucléaire (AEPN), de la Fédération environnement durable (FED), et de la Société française d’énergie nucléaire (SFEN). Souhaitant faire connaître la réalité au plus grand nombre en adoptant un vocabulaire accessible, Michel Gay a choisi de concentrer des vérités soigneusement «oubliées» en publiant cet ouvrage «Vive le nucléaire heureux !» en autoédition. Le 15 décembre 2016 à Marseille, Michel Gay a reçu le prix Yves Chelet décerné par la Société Française d’Energie Nucléaire (SFEN / PACA) qui récompense «l’auteur d’œuvres médiatiques objectives et pédagogiques pour la diffusion et la promotion des sciences et techniques nucléaires».

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Les déchets nucléaires cristallisent les passions alors qu’ils n’ont jamais provoqué d’accident de transport ni de stockage, ni d’aucune sorte. Et ils n’en provoqueront jamais selon toute probabilité.

Les craintes suscitées par les déchets nucléaires reposent principalement sur de fausses croyances répandues par une propagande anti-nucléaire malveillante.

Toutes les catégories de déchets nucléaires disposent, ou sont en voie de disposer, de solutions de traitement adaptées. Le futur centre industriel de stockage géologique Cigéo complètera notre dispositif national au-delà de 2030.

Jusqu’où faut-il aller dans les dépenses de sûreté nucléaire ?L’Autorité de sûreté nucléaire française (ASN) exige de traiter les déchets de très faible activité (TFA) comme s’ils présentaient un risque Or, les autres pays européens appliquent un seuil d’exemption qui permet de les recycler. Cette position “politique” entraîne des coûts inutiles pour le consommateur et le contribuable français.

Une des stratégies des anti-nucléaires est d’appeler à dépenser toujours plus d’argent pour étouffer la technologie nucléaire sous les coûts (coups ?).

Or, les 40 ans d’existence de notre programme électronucléaire ont apporté la preuve de sa sûreté. Pourquoi continuer à durcir la réglementation, à abaisser des normes de rejets inférieures à la radioactivité naturelle inoffensive et à refuser un seuil d’exemption ?

La radioactivité est même parfois bénéfique, y compris dans les stations thermales, même si elles sont rares à le souligner.

En juillet 2003, l’Académie de médecine considère que l’électricité nucléaire “s’avère avoir le plus faible impact sur la santé par kilowattheure produit par rapport aux filières utilisant des combustibles fossiles, les biomasses ou l’incinération des déchets, ou même les énergies éolienne et photovoltaïque”.

En janvier 2012, l’Académie des sciences confirme que “les centrales nucléaires sont aujourd’hui le seul moyen de produire massivement de l’électricité concentrée, permanente et sans émission de gaz à effet de serre”.

Elle souligne aussi que “quatre décennies d’expérience ont montré que l’impact sanitaire du nucléaire est bien moindre que celui d’autres sources principales d’énergie, le charbon en particulier”.L’exposition moyenne des Français aux radiations est de 4,5 millisievert par an (mSv/an), dont 2,9 mSv/an d’exposition naturelle et 1,6 mSv/an d’exposition médicale. Les activités industrielles et militaires représentent moins de 1% de ce total

Une énergie durable et propre

Environ 55 réacteurs nucléaires sont en construction dans le monde et 450 en fonctionnement parce que le nucléaire est une énergie propre, sûre et bon marché. Le nucléaire a aussi l’avantage d’utiliser un combustible abondant et bien réparti sur toute la planète (l’uranium) et de produire des quantités de déchets beaucoup plus faibles que toutes les autres technologies.

Certes, ils sont radioactifs mais les filières de traitement et de stockage ultime sont maîtrisées[3] , et leur radioactivité décroit avec le temps contrairement aux produits chimiques qui restent éternellement toxiques.

Enfin, le nucléaire est une énergie durable grâce aux réacteurs surgénérateurs déjà en fonctionnement en Russie et en Inde. Ce fut aussi le cas pour les surgénérateurs français Phénix et Superphénix qui ont fonctionné pendant plusieurs années avant d’être démantelés pour des raisons politiques.

Ils sont capables d’utiliser cent fois plus efficacement qu’actuellement l’uranium naturel pendant… plusieurs milliers d’années. La quatrième génération

des réacteurs nucléaires (surgénérateurs) est en préparation en France, en Russie, en Inde, en Chine et aux États-Unis, et elle produira encore moins de déchets pour produire la même quantité d’électricité.

Même si des idéologues antinucléaires veulent “asphyxier” le nucléaire par des exigences de sûreté contreproductives et démesurées, notamment sur ses déchets, ne pas donner toute sa place à cette source d’énergie exceptionnelle serait une erreur stratégique.

Au-delà des manœuvres politiciennes et des lobbies divers, il serait dramatique de ne pas offrir à nos enfants un avenir énergétique respectueux de l’environnement et durable grâce à l’énergie nucléaire (pour la production d’électricité et de chaleur) puisque ses déchets, bien gérés comme ils le sont en France, ne représentent, et ne représenteront jamais, aucun danger pour les populations selon les (vrais) spécialistes.

Alors, où est le problème ?

Crédit photo : Andra

“ Les craintes suscitées par les déchets nucléaires reposent principalement sur de fausses croyances répandues par une propagande anti-nucléaire malveillante ”

“ Il est clair que la réversibilité qui ne faisait pas partie du projet initial a été ajoutée pour une meilleure acceptabilité par l’opinion. Pesant avantages et inconvénients (dont l’accroissement des coûts), le législateur a donc choisi d’entrefermer la boite pour une centaine d’années. ”

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Nucléaire et déchets de très faible activité, le mieux serait-il l’ennemi du bien ?Tribune rédigée par Maxence Cordiez - publiée le 09.07.2019

MAXENCE CORDIEZ

Ingénieur

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En France, plusieurs secteurs d’activité produisent des déchets radioactifs. Si l’industrie électronucléaire vient naturellement à l’esprit, elle n’est pas la seule à en générer. La défense (avec la propulsion navale et la recherche), l’industrie non électronucléaire (extraction de terres rares, contrôle des soudures, stérilisation alimentaire ou de matériel médical…), la médecine et la recherche en produisent également.

Le tri des déchetsSelon leur nature et leur origine, les déchets ne sont pas tous égaux en activité et en durée de vie. Ils vont de gravats très faiblement voire pas radioactifs mais provenant de sites nucléaires, à des verres contenant des produits de fission et actinides mineurs issus de combustible usagé, très actifs pendant plusieurs milliers d’années, en passant par les déchets de structure métalliques ayant contenu le combustible (moyenne activité à vie longue), des effluents liquides ou gazeux de faible ou moyenne activité à vie courte, etc.

Afin d’adapter leur gestion à leur dangerosité, les déchets sont triés en six catégories, selon leur durée de vie et leur activité : haute activité (HA), moyenne activité à vie longue (MA-VL), faible et moyenne activité à vie courte (FMA-VC), faible activité à vie longue (FA-VL), vie très courte (VTC) et, spécificité française, très faible activité (TFA).

En pratique, l’essentiel de la radioactivité (95%) est contenue dans les déchets de haute activité qui représentent 0,2% du volume total, soit 3740 m3 à fin 2017 (l’équivalent du volume d’une piscine olympique). Les déchets FMA-VC et TFA constituent l’essentiel du volume (60% soit 938 000 m3 pour les déchets FMA-VC et 31% soit 537 000 m3pour les déchets TFA) mais ils ne contiennent que peu d’activité : 0,03% du total pour les FMA-VC et 0,0001% pour les TFA.[1]

Cas des déchets TFA : gestion par « zonage » et seuil de libérationEn France, tout déchet produit dans certaines zones à production potentielle de déchets radioactifs est obligatoirement considéré comme déchet radioactif,

qu’il le soit ou non. C’est le cas des équipements de protection individuels (charlottes, gants…), des consommables (pots de peinture, bidons, boulons…) et machines industrielles (pompes, générateurs de vapeur, etc.).

C’est ce qu’on appelle une gestion par zonage. L’avantage de cette méthode est de ne pas avoir à mesurer des activités très faibles afin de détecter quel déchet est très légèrement contaminé et quel déchet ne l’est pas. Le stockage des déchets TFA ne coûtant pas très cher en France, cette approche est rentable tant que les volumes générés restent modérés.

Dans de nombreux autres pays, tels que le Royaume-Uni ou l’Allemagne, ne sont considérés comme déchets radioactifs, et gérés comme tels, que ceux qui le sont dans les faits. Il existe ce qu’on appelle un seuil de libération, qui correspond à une activité en-deçà de laquelle le déchet n’est pas considéré comme radioactif et peut être soit traité comme déchet conventionnel, soit recyclé s’il est valorisable. Ce seuil correspond environ à 1/450ede la radioactivité naturelle (10 µSv/an contre une exposition à la radioactivité naturelle en France d’environ 4,5 mSv/an[2] ). Cette approche présente l’avantage de minimiser la quantité de déchets à traiter en tant que déchets nucléaires. Elle permet également de valoriser ce qui peut l’être (métaux, gravats…), mais elle requiert de mesurer de très faibles activités, ce qui peut être complexe.

Les limites de l’approche françaiseL’approche française de gestion des déchets « par zonage » ne pose pas de problème en opération, car des quantités relativement modérées de déchets TFA sont générées. Les choses se compliquent avec le démantèlement des installations anciennes (centrales, usines, laboratoires…) et le remplacement de composants du parc nucléaire.

Ces étapes produisent d’importants volumes de matière. La synthèse du dossier du maître d’ouvrage établie par l’Autorité de sûreté nucléaire dans le cadre du débat public sur le plan de gestion des déchets et

La législation française impose de traiter comme radioactifs tous les déchets produits dans certaines zones d’une installation nucléaire, indépendamment de leur activité réelle.

Cette spécificité française empêche de recycler de grandes quantités de matière valorisable, ce qui est contestable sur le plan écologique et soulève des interrogations quant aux volumes de déchets de très faible activité à stocker.

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“Alors que la crise écologique impose de recycler ce qui peut l’être pour économiser les matériaux et l’énergie (nécessaire pour extraire et raffiner les métaux), la rigidité des procédures françaises actuelles devrait conduire à gaspiller par principe des centaines de milliers de tonnes d’acier, destinées à être mises au rebut dans des sites de stockage ”

matières radioactives estime que le démantèlement de toutes les installations existantes devrait générer 2 200 000 m3 de déchets de très faible activité. Or le centre de stockage dédié, le CIRES, a une capacité maximale de 650 000 m3. Même en ouvrant un nouveau centre de stockage, ces volumes restent élevés. En outre, une partie de la matière destinée à être mise au rebut est valorisable.

Les exploitants d’installations (EDF, CEA, Orano) estiment que 240 000 tonnes de gravats seront ainsi produites entre 2012 et 2033, dont 64 000 tonnes pourraient être valorisées. Du côté des métaux, le démantèlement de l’ancienne usine d’enrichissement d’uranium George Besse 1 devrait générer 140 000 tonnes d’acier, ce à quoi il faut ajouter 100 000 tonnes d’acier avec le remplacement des générateurs de vapeur du parc EDF, ainsi que « 650 000 tonnes de métaux en vrac dont les exploitants nucléaires estiment qu’une partie significative est exempte d’activité. »[3]

C’est-à-dire que 900 000 tonnes de métaux relevant de la catégorie TFA pourraient potentiellement être valorisées. Si la mesure de l’activité précise de gravats TFA peut être complexe et explique la frilosité de l’ANDRA et de l’ASN quant à la mise en place d’un seuil de libération, il en va différemment des métaux.Ceux-ci peuvent être fondus, ce qui permet une homogénéisation de la matière et une mesure plus simple.

L’entreprise Cyclife Sweden, filiale d’EDF, qui recycle des métaux issus de l’industrie nucléaire suédoise, produit ainsi des lingots qui peuvent ensuite circuler librement sur le marché mondial, être dilués avec du métal conventionnel pour assurer une marge par rapport aux seuils de libération ou être renvoyés au client pour être gérés comme déchets en cas de non-conformité (activité supérieure au seuil de libération).

Les lingots libérés peuvent l’être soit de façon inconditionnelle si leur activité est inférieure au dixième du seuil de libération, soit de façon conditionnelle, ce qui suppose une procédure entre Cyclife Sweden et l’industrie réceptrice des lingots, dans le cas d’une activité inférieure au seuil de libération mais supérieure au dixième de celui-ci.

Alors que la crise écologique impose de recycler ce qui peut l’être pour économiser les matériaux et l’énergie (nécessaire pour extraire et raffiner les métaux), la rigidité des procédures françaises actuelles devrait conduire à gaspiller par principe

des centaines de milliers de tonnes d’acier, destinées à être mises au rebut dans des sites de stockage.

Peut-être la France pourrait-elle s’inspirer sur ce point de ses voisins (Royaume-Uni, Allemagne, Suède…) et rationaliser la gestion de ses déchets très peu voire pas radioactifs, ce qui représenterait un gain à la fois écologique et économique.

[1] ANDRA, Inventaire national des matières et déchets radioactifs, 2019[2] IRSN, Base de connaissances, Quelle est la dose annuelle moyenne de radioactivité naturelle reçue en France ?, consulté le 2 juillet 2019,https://www.irsn.fr/FR/connaissances/faq/Pages/Quelle_est_la_dose_annuelle_moyenne_de_radioactivite_recue_en_France.aspx[3] ASN, Rapport du groupe de travail sur la valorisation de matériaux de très faible activité, 28 juillet 2015Crédit photo : Cyclife Sweden

Consulter l’article en ligne

Sûreté nucléaire : un enjeu de taille en FranceLa Rédaction - publié le 28.11.2018

L’autorité administrative indépendante a notamment estimé, dans son rapport sur l’exploitation nucléaire pour 2018 remis le 16 mai dernier, que le projet Cigéo avait atteint une “maturité technologique satisfaisante” au regard de la sûreté.

Contrairement à ce que certains Cassandre prédisaient, l’exploitation nucléaire française a traversé l’année 2018 sans anicroches. Telle est la conclusion du rapport de l’Autorité de sûreté nucléaire (ASN), remis à l’Office parlementaire d’évaluation des choix scientifiques et technologiques (OPECST), au sujet de l’état de la sûreté nucléaire et de la radioprotection en France l’an dernier.

« L’ASN estime qu’en 2018 la sûreté de l’exploitation des grandes installations nucléaires et la radioprotection dans les domaines industriel et médical se sont globalement maintenues à un niveau satisfaisant. Le dialogue technique avec les exploitants et les responsables d’activité a permis un approfondissement suffisant des dossiers traités au regard des enjeux de sûreté et de radioprotection », note effectivement l’autorité administrative indépendante sur son site Internet.

“Dispositif dual”

Mais avant de poursuivre, de quoi s’agit-il exactement ? Trop souvent confondus par le grand public – parfois même dans les médias –, les termes de sûreté nucléaire et de sécurité nucléaire diffèrent pourtant fondamentalement.

Du premier, l’ASN note la définition suivante : « L’ensemble des dispositions techniques et des mesures d’organisation relatives à la conception, à la construction, au fonctionnement, à l’arrêt et au démantèlement des installations nucléaires de base, ainsi qu’au transport des substances radioactives, prises en vue de prévenir les accidents ou d’en limiter les effets. »

Autrement dit, la sûreté nucléaire, garantie par EDF, l’exploitant des 58 réacteurs français (répartis dans 19 centrales), consiste à prévenir les risques et à

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prendre en compte pour cela de façon systématique les défaillances techniques ou humaines potentielles afin de s’en prémunir.

Dès la conception des centrales, des systèmes automatiques et autres mécanismes de sécurité ont été prévus pour parer à tout incident éventuel. La sécurité nucléaire, quant à elle, englobe la sûreté nucléaire, mais également la radioprotection et, plus largement, les actions de sécurité civile en cas d’accident.

Si l’électricien français est donc responsable de la sûreté nucléaire de ses installations, l’ASN, en tant qu’autorité administrative indépendante, doit toutefois veiller à ce qu’il respecte bien la réglementation en vigueur. Et contrôle ainsi régulièrement les centrales.

Grâce, notamment, à l’expertise de l’Institut de radioprotection et de sûreté nucléaire (IRSN), les deux entités formant ce qu’il est convenu d’appeler le « dispositif dual » de sûreté nucléaire et de radioprotection.

“Prophéties alarmistes”Dans son rapport sur l’exploitation des centrales en 2018, l’ASN note ainsi d’emblée : « Le nombre d’événements significatifs a été globalement stable en 2018 par rapport à 2017. Aucun événement significatif n’a dépassé le niveau 1 de l’échelle INES » (l’échelle internationale de classement des événements nucléaires), qui en compte 7.

Mieux, « l’ASN a constaté en 2018 qu’EDF a davantage privilégié, par rapport aux années précédentes, la remise en conformité rapide de son installation après la détection d’un écart. » Des bons points attribués

également à Orano Cycle, exploitant de deux installations nucléaires (La Hague et Tricastin), au Commissariat à l’énergie atomique (CEA), qui pilote des réacteurs dévolus à la recherche par exemple, et ceci « malgré un contexte budgétaire préoccupant », relève l’autorité.

Pas de quoi s’affoler, par conséquent. Car régulièrement, dans la presse, certains regrettent que la France ait encore recours à l’atome, quand d’autres Etats nucléarisés – comme l’Allemagne – l’ont abandonné il y a quelques années.

Le sujet, assez sensible dans l’Hexagone, revenant au gré de l’actualité, lorsqu’il est question du stockage des déchets nucléaires par exemple. L’an dernier, Francis Sorin, membre honoraire du Haut comité pour la transparence et l’information sur la sécurité nucléaire (HCTISN), et conseiller à la Société française d’énergie nucléaire (SFEN), faisait pourtant ce constat (implacable) : « En France, depuis 50 ans qu’elles fonctionnent, les centrales nucléaires n’ont fait aucune victime ».

Un brin alarmiste, les Français ? Oui, selon lui. « Le nucléaire demeure chez nous un champ inépuisable de prophéties alarmistes désignant chaque centrale comme le lieu d’un accident inéluctable. Un bref aperçu sur la situation de la sûreté nucléaire en France doit conduire à des appréciations moins angoissées », estimait-il à l’époque. Le rapport de l’ASN pour 2018 lui donnant d’ailleurs plutôt raison.

A propos du stockage des déchets, d’ailleurs, sujet brûlant s’il en est, l’autorité « constate une nette amélioration au cours des dix dernières années pour les activités d’agréments et de surveillance des colis de déchets faible et moyenne activité à vie courte […] . »

Et concernant le projet Cigéo (Centre industriel de stockage géologique), l’ASN d’ajouter que sa conception « a atteint globalement une maturité technologique satisfaisante au stade du dossier d’option de sûreté. » De quoi battre en brèche ses contempteurs, alors que vient de s’ouvrir un débat public sur le Plan national de gestion des matières et déchets radioactifs (PNGMDR).

“ L’ASN constate une nette amélioration au cours des dix dernières années pour les activités d’agréments et de surveillance des colis de déchets faible et moyenne activité à vie courte ”

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3CIGÉO, LA MEILLEURE SOLUTION ?

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Cigéo : la meilleure solutionTribune rédigée par Michel Gay - publiée le 15.04.2019

Bonne nouvelle : techniquement et financièrement, le problème des déchets nucléaires est résolu. L’essentiel est déjà acquis pour le projet de Centre industriel de stockage géologique des déchets nucléaires (Cigéo) fondé sur des études et des essais démarrés il y a plus de quinze ans, et encadré par le Parlement.

Plus de 90 % en volume des déchets radioactifs sont aujourd’hui gérés de façon définitive dans plusieurs centres de stockage en service depuis plus de 20 ans.

Pour les 10% restants, c’est-à-dire pour les déchets radioactifs de haute et moyenne activité à vie longue (HA et MA-VL qui contiennent la majeure partie de la radioactivité), la solution reconnue internationalement comme sûre et pérenne, depuis 2011, est le stockage définitif à grande profondeur (500 mètres), encore appelé “stockage géologique”.

La France prépare ce stockage définitif à Bure (entre Meuse et Haute-Marne) depuis la loi “Birraux” de 2006.

En 2025, le gouvernement devra prendre des décisions qui relèvent de son pouvoir régalien pour autoriser ce type de stockage (définitif, ou provisoirement réversible pendant une centaine d’années).

Le stockage géologique comme référenceLe Conseil de l’Union européenne a adopté le 19 juillet 2011 la directive 2011/70/Euratom mentionnant que le stockage géologique est la solution de référence pour les déchets HA et MA-VL.

Les réflexions de l’Agence international de l’énergie atomique en 2003, de l’Agence pour l’énergie nucléaire de l’OCDE en 2008, et de l’Union européenne en 2011, convergent toutes pour considérer que le stockage géologique est la meilleure solution disponible.

Le stockage géologique s’est donc imposé comme la solution à long terme dans la plupart des pays.

Faut-il en avoir peur ?Pourquoi certaines personnes ont-elles peur de ce stockage alors que les éléments radioactifs ne remonteront jamais à la surface ? Ou après une si longue période de plusieurs dizaines de milliers d’années que leur dangerosité aura totalement disparu.

En effet, la radioactivité décroît avec le temps et elle se confondra alors avec la radioactivité naturelle ambiante du sol qui contient en moyenne 3 grammes d’uranium par tonne de terre. Et elle restera inférieure à celle des régions granitiques en France (Massif central, Bretagne, Alpes) qui en contiennent naturellement jusqu’à 20 grammes, et où elle est bénéfique.

En juillet 2003, l’Académie de médecine considère que « l’électricité nucléaire s’avère avoir le plus faible impact sur la santé par kilowattheure produit par rapport aux filières utilisant des combustibles fossiles, les biomasses ou l’incinération des déchets, ou même les énergies éolienne et photovoltaïque ».

En janvier 2012, l’Académie des sciences confirme que « les centrales nucléaires sont aujourd’hui le seul moyen de produire massivement de l’électricité concentrée, permanente et sans émission de gaz à effet de serre”. Elle souligne aussi que “quatre décennies d’expérience ont montré que l’impact sanitaire du nucléaire est bien moindre que celui d’autres sources principales d’énergie, le charbon en particulier ».

Actuellement, la totalité de l’électricité nucléaire, soit 75% de la production nationale, est produite par la fission d’un gramme d’uranium par Français et par an ! (60 tonnes d’uranium fissionnées par an pour 60 millions de Français, ce qui représentent moins de… 4 mètres cubes).

L’ensemble des déchets HA et MA-VL (donc comprenant aussi les gaines des combustibles) représente moins de 500 m3 par an après conditionnement dans des cylindres de verre et d’acier à la Hague. Et moins de 2000 m3 après les avoir revêtu des protections supplémentaires en béton pour le stockage géologique. Ce qui reste un volume faible et gérable sans difficulté insurmontable.

Et le financement ?En France, selon la Cour des comptes, le coût de ce stockage géologique est financé. Il est provisionné dans le prix de vente de l’électricité, pourtant parmi les moins chers d’Europe.

Et le montant de notre facture d’électricité ne « s’envolera » pas, même si cette provision s’avére insuffisante. Si le coût du stockage venait à doubler, l’électricité facturée aujourd’hui 15 c€/kWh augmenterait de moins de 0,3 c€/kWh[1] .

MICHEL GAY

AuteurSimple citoyen français, désireux de défendre l’intérêt général, Michel Gay est membre de l’Association des écologistes pour le nucléaire (AEPN), de la Fédération environnement durable (FED), et de la Société française d’énergie nucléaire (SFEN). Souhaitant faire connaître la réalité au plus grand nombre en adoptant un vocabulaire accessible, Michel Gay a choisi de concentrer des vérités soigneusement «oubliées» en publiant cet ouvrage «Vive le nucléaire heureux !» en autoédition. Le 15 décembre 2016 à Marseille, Michel Gay a reçu le prix Yves Chelet décerné par la Société Française d’Energie Nucléaire (SFEN / PACA) qui récompense «l’auteur d’œuvres médiatiques objectives et pédagogiques pour la diffusion et la promotion des sciences et techniques nucléaires».

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Rappel : le prix de l’électricité est de plus de 30 c€/kWh en Allemagne pour les particuliers, dont une grande partie sert à subventionner les énergies renouvelables (“Energiewende”).

L’indécision politique actuelle qui rallonge les délais de mise en stockage définitif, représente un coût faible sur la facture d’électricité du consommateur : moins de 0,1 c€/kWh.

Peurs irrationnelles et décisionsDes peurs irrationnelles traversent la population parce que des antinucléaires, habiles en communication, jouent sur l’émotion en agitant régulièrement des épouvantails bardés d’amalgames, de raisonnements biaisés et de mensonges.

Ensuite, parce que l’humain peine naturellement à appréhender des temps longs (comme 10.000 ans) et il se méfie de ce qu’il ne comprend pas. Il est donc réceptif aux messages effrayants distillés régulièrement par les médias.

Les gouvernements successifs ne prennent pas de décision parce qu’ils ne veulent pas ouvrir ce dossier sensible et… qu’il n’y a pas d’urgence technique.

En effet, les déchets nucléaires vitrifiés conditionnés dans des cylindres d’acier doivent refroidir en surface pendant plusieurs dizaines d’années (au moins 60 ans et même un siècle) avant d’être définitivement stockés.

Plus ils refroidissent, moins cher sera le stockage des déchets dont le dégagement de chaleur constitue un facteur dimensionnant.

Les responsables politiques ne voient donc pas l’intérêt pour le moment de s’engager dans cette voie épineuse (il faudrait faire preuve de pédagogie) qui pourrait déplaire à certains électeurs potentiels….Cette attitude “frileuse”, encouragée par les antinucléaires, contribue à accréditer l’idée fausse mais clamée « urbi et orbi » : « on ne sait pas quoi faire des déchets nucléaires ».

Convergence d’intérêts… divergents ?

Toutefois, ni les adversaires du nucléaire, ni les responsables de ce stockage en profondeur ne semblent pressés de déclarer que la solution existe, et qu’elle s’appelle Cigéo.

En effet, d’une part, les antinucléaires ont fait des déchets un sujet fédérateur contre le nucléaire. Ils ne veulent donc pas que le problème des déchets soit résolu puisqu’il constitue leur principal point d’appui pour justifier l’arrêt du nucléaire. L’objectif est de « constiper » la filière nucléaire pour qu’elle meure d’une « occlusion intestinale ».

Le raisonnement tient en quelques mots : « Puisqu’on ne sait pas quoi faire des déchets, il faut tout arrêter immédiatement ! ». Et une fois prise la décision politique de sortir du nucléaire, comme en Allemagne, par miracle la solution acceptable par les antinucléaires[2] … est le stockage géologique combattu en France.

D’autre part, les responsables du stockage géologique, aidés involontairement par les antinucléaires, voient dans ces controverses interminables, une source durable de recherches et de démonstrations dans le prolongement de la phase d’expérimentation.

Prendre son temps permettrait aussi « d’apaiser les craintes, d’optimiser la conception et d’améliorer l’ingénierie pour diminuer les coûts des travaux de réalisation »[3] .

Pour des raisons différentes, voire opposées, chacun semble y trouver son compte. Les tergiversations politiques sur le stockage définitif des déchets nucléaires HA et MA-VL peuvent donc malheureusement durer encore jusqu’en… 2025.

Cependant, même s’il n’y a pas d’urgence, il est temps que nos responsables politiques s’engagent franchement pour soutenir le stockage géologique. Ce revirement courageux mettrait un terme à cet argument antinucléaire fallacieux qui sème le trouble dans les esprits et qui nuit à une adhésion populaire en faveur du nucléaire.

Ce soutien affiché aurait le mérite de clarifier la situation et de fixer un cap énergétique stable pour le bien de nos entreprises qui attendent une énergie abondante et bon marché sur le long terme.

Un stockage géologique historique

Le stockage naturel d’éléments radioactifs existe depuis… très longtemps ! Des concentrations naturelles d’éléments radioactifs, tels que l’uranium et le thorium, sont enfouies dans l’écorce terrestre depuis des milliards d’années. Au Canada, le gisement de Cigar Lake dans la province de l’Athabasca est resté confiné sans émanation sous 400 mètres de sédiments pendant plus d’un milliard d’années avant sa découverte.

Mieux, au Gabon, dans le gisement d’Oklo, des réacteurs naturels découverts en 1972 se sont déclenchés il y a 1,7 milliard d’années. Ils ont « fonctionné » pendant des milliers d’années en produisant plusieurs tonnes de déchets radioactifs, dont le plutonium. Il n’y a pas eu de dispersion dans le milieu naturel puisque les éléments ultimes (qui ne sont plus dangereux) de la désintégration des radioéléments ont été retrouvés sur place.

La nature, seule, a su confiner des déchets nucléaires et les conserver plus d’un milliard d’années, bien après que le potentiel agressif de leur radioactivité ait disparu. L’homme, en ajoutant des connaissances et des techniques, peut aussi confiner ses déchets nucléaires de manière sûre et pérenne. Il sait le faire aujourd’hui aussi bien, sinon mieux, que la nature pour assurer sa sécurité, son bien-être et son développement.

Il sera toujours temps d’agir…Le stockage géologique des déchets nucléaires ne présente aucun danger, ni aujourd’hui, ni dans le futur lointain pour les générations suivantes. Il est d’un coût raisonnable et les élus doivent le comprendre et le dire pour rassurer les Français qui n’entendent que des antinucléaires s’agiter dans les médias.

La production massive d’électricité d’origine nucléaire constitue incontestablement un atout pour la France. Elle représente un gisement de création d’emplois non délocalisables, et elle est le seul moyen pour doter la France d’une politique énergétique efficace à long terme.

En Allemagne, le rêve fou d’une société sans nucléaire alimentée par le vent et le soleil est un échec. Sa consommation de gaz et de charbon (et aussi de lignite existant en abondance dans son sous-sol) ne baisse pas, et ses émissions de gaz à effet de serre stagnent malgré des centaines de milliards d’euros injectés dans sa “transition énergétique” qui visait le contraire…

Le combat des antinucléaires contre Cigéo est un mauvais combat d’arrière-garde mené par des activistes à des fins idéologiques et politiques. L’enjeu est de rallier l’opinion à la cause (autoproclamée) des «sauveurs des futures générations».

Toutefois, le stockage géologique Cigéo représente la meilleure solution « pour la planète » de la nécessaire gestion des déchets nucléaires. Les seuls obstacles ne sont pas d’ordre technique ou financier, mais d’ordre social et psychologique… et donc politique.

[1] Rapport Cour des comptes, janvier 2012, p 379 : “Le calcul du coût de production (5 c€/kWh) est peu sensible aux incertitudes portant sur les charges futures de démantèlement ou de gestion des déchets, le coût total évoluant de 5% environ si celles-ci venaient à doubler” ; (et donc de 2% sur le prix consommateur qui est de 15c€/kWh).

“La Cour des Comptes évalue la sensibilité du coût à un doublement du devis du stockage profond des déchets à 1 %. En effet, la période considérée étant extrêmement longue, l’actualisation ramène le coût à un niveau peu élevé“.

[2] Revue de l’UARGA “Nucléaire et énergies” n°62 de décembre 2013, page 20.

[3] Luc Oursel, Président du directoire d’Areva, audition à l’Assemblée nationale le 20 mai 2014.

“ Le stockage géologique s’est imposé comme la solution à long terme dans la plupart des pays ”

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Déchets nucléaires : l’impérieuse nécessité de CigéoTribune rédigée par Bertrand Barré - publiée le 15.09.2017

Au début des années 1980, quand j’arpentais les États-Unis pour promouvoir le nucléaire en donnant en exemple le programme français, j’en soulignais l’exceptionnelle cohérence : nous ne développions pas que les réacteurs mais tout le cycle du combustible, y compris le retraitement et la vitrification des déchets de haute activité avec recyclage des matières fissiles dans ce que l’on n’appelait pas encore les réacteurs de quatrième génération, le Phénix et le futur Superphénix en construction.

Honnêtement, je précisais qu’il nous manquait le dernier maillon de la chaîne, le stockage géologique des déchets, mais que l’Andra, l’Agence nationale pour la gestion des déchets radioactifs, alors unité du Commissariat à l’énergie atomique (CEA), y travaillait. L’entreposage des verres, en toute sûreté, permettait d’attendre…

Le stockage géologique validé par le ParlementA la fin de la décennie 1980, de violentes manifestations contre les forages exploratoires de l’Andra ont amené le premier ministre, Michel Rocard, à décréter un moratoire sur ces recherches de site de stockage. La loi de décembre 1991 a ainsi organisé quinze ans d’études complémentaires avant de décider d’un mode de gestion des déchets nucléaires de longue durée de vie. A l’issue de cette période, en juin 2006, après des débats publics et au vu des premiers résultats des études menées dans le laboratoire souterrain de Bure en Moselle,

les parlementaires français ont choisi le stockage géologique et décidé la future construction de Cigéo (Centre industriel de stockage géologique), supposé recevoir les premiers colis de déchets nucléaires dans quelques années, en 2030.

Les déchets sont là et il faut bien s’en occuper !Depuis des décennies, les militants antinucléaires tirent argument de l’absence de stockage des déchets nucléaires civils pour affirmer qu’il n’y a pas de solution à leur gestion et qu’il faut donc cesser d’en produire, c’est à dire arrêter immédiatement le nucléaire.

Bien évidemment, la mise en service de Cigéo leur retirera leur meilleur argument et, logiquement, ils se mobilisent pour la retarder au maximum voire l’empêcher complètement. D’où les manifestations de l’été dernier ! Et d’où l’impérieuse nécessité de cette mise en service. D’autant plus qu’un arrêt du nucléaire ne ferait pas disparaître les déchets nucléaires déjà produits depuis plus de 50 ans, « détail » que les antinucléaires omettent trop souvent de mentionner.

“ Un arrêt du nucléaire ne ferait pas disparaître les déchets nucléaires déjà produits depuis plus de 50 ans, « détail » que les antinucléaires omettent trop souvent de mentionner ”

BERTRAND BARRÉ

Ingénieur physicien

Ingénieur de formation, Bertrand Barré entre en 1967 au Commissariat à l’Energie Atomique, le CEA. Alternant les postes de Recherche, d’encadrement et de conseil, il connaît en profondeur certains aspects techniques de la production d’énergie. Il a également été attaché Nucléaire auprès de l’Ambassade de France aux États-Unis, Directeur des Réacteurs nucléaires au CEA, Directeur de l’Ingénierie à Technicatome, Directeur de la Recherche et du Développement à Cogema et Directeur de la Communication scientifique à Areva.

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Cigéo, un héritage pour les « générations futures »Tribune rédigée par Eric Vidalenc - publiée le 29.08.2017

Les manifestations à Bure dans la Meuse pendant la semaine du 15 août 2017 ont remis sous le feu de l’actualité le projet d’enfouissement des déchets nucléaires, CIGEO. Occupations, confrontations, répressions ont rythmées de manière tragique pour certains les journées d’été du côté du Bois Lejuc. Et pourtant, aux abords du site, on voit plus d’éoliennes et de lignes électriques que quoi que ce soit d’autres. C’est que tout l’enjeu des « discussions » se trouve à 500 mètres sous terre.

Et cet enjeu est considérable, il s’agit de stocker ici, à Bure dans la Meuse, à 500 mètres sous terre, tous les déchets les plus radioactifs produits par le parc nucléaire français.

Quelques milliers de m3 de déchets radioactifs dans 200km de galeriesLes déchets radioactifs de haute activité et moyenne activité à vie longue (HA-VL et MA-VL, soit 47 000m3 déjà produits, dont 3000 pour les plus radioactifs et 5000 d’ici 2050) sont aujourd’hui entreposés temporairement en France à la Hague, Bugey, Marcoule ou encore Cadarache. Bien que de faibles volumes, ces déchets nécessitent en surface une surveillance continue, que ce soit pour des questions environnementales, sanitaires ou de sécurité (terrorisme, trafic…). Surveillance évidemment impossible à garantir sur des siècles… et plusieurs millénaires, d’où le besoin de trouver un site de stockage durable, c’est-à-dire stable pour des échelles de temps de centaines de milliers d’années.

Généralement pour gérer les impacts de la pollution, on la dilue limitant ainsi ses impacts sur le milieu ou sur l’homme. Ici, la caractéristique des déchets, leur dangerosité et toxicité ont conduit à retenir au contraire un principe opposé : concentrer les déchets pour mieux les gérer.

Un intéressant film docu-fiction Into Eternity explorait ces enjeux, questions et dilemmes il y a quelques années par rapport au site de stockage choisi par les finlandais : Onkalo, site lui situé à proximité d’une centrale existante (et de l’EPR Finlandais), contrairement à Bure.

On se trouve à 500 mètres sous terre, mais rien à voir avec les anciennes mines de charbon, leurs étais en bois et atmosphère poussiéreuse et humide. Ici, c’est plutôt au tunnel sous la manche ou à l’infrastructure de métro auquel le site fait penser. Et si les quelques galeries actuelles du laboratoire ne contiennent aucun déchet, à terme ce sera 200 km qui seront creusées « à côté ». Une paille à côté des centaines de milliers de kilomètres de galeries réalisées pour l’exploitation du charbon en France… mais une somme s’il faut intervenir en urgence sur un incendie souterrain par exemple.

Entre rusticité et high-techPourtant, l’ambiance est ambivalente dans ce lieu. Entre high-tech de notre temps et rusticité de la roche.

C’est à la fois un lieu de haute technologie, avec tous les moyens d’instrumentation, de communication et de suivi d’aujourd’hui. Un lieu avec une vocation industrielle forte, qui va

ERIC VIDALENC

Responsable à l’AdemeConseiller scientifique de Futuribles International (https://www.futuribles.com/fr/auteur/vidalenc/), Eric Vidalenc tient un blog sur le site Alternatives économiques (http://blogs.alternatives-economiques.fr/vidalenc/2017/08/27/cigeo-un-heritage-pour-les-generations-futures-12). Il est par ailleurs responsable du Pôle transition énergétique à la Direction Régionale Hauts de France de l’Agence de l’environnement et la maîtrise de l’énergie (ADEME).

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“ L’enjeu n’est pas de faire du high-tech « seulement », il faut surtout du robuste, de l’autonome en cas de défaillance de surveillance ou d’un quelconque incident. ”

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concentrer l’ensemble des déchets issus de quelques 20 000TWh produits par les centrales françaises.

Et en même temps, l’enjeu est de penser et puis de construire ces lieux et leurs fonctionnements hors conditions « normales ». Si la possibilité de l’effondrement de nos sociétés industrielles n’est pas certaine, il faut tout de même envisager des scénarios tels que ceux décrits par Yves Cochet dans Libération en août 2017. Il est donc nécessaire de répondre aux gestions d’incidents, d’accidents, et concevoir l’autonomie du site. Il s’agit ici de trouver des conditionnements stables, simples et passifs. L’enjeu n’est pas de faire du high-tech « seulement », il faut surtout du robuste, de l’autonome en cas de défaillance de surveillance ou d’un quelconque incident.

Pour des centaines de milliers d’annéesAinsi, ce que fait l’ANDRA, à la demande de la représentation nationale à travers la loi de 2006, dépasse tout ce que l’humanité a pu construire par le passé en termes de durée de vie. Il faut évidemment concevoir ce projet en se posant la question des sociétés humaines (françaises ?, européennes ?, mondiales ?) de 2 500 ans, et de 20 500 aussi. Et au-delà évidemment, même si la radioactivité aura très significativement décrue.Pourtant il faut tenter de répondre à des questions aussi insondables que : Faut-il laisser des informations, des traces sur ce site et ce que l’on y a fait ? Ou stocker ces informations ? Jusque quand ? Sous quelles formes, en quelles langues ? Sur quels supports physiques, numériques ?

Ne faut-il pas au contraire essayer de faire que les générations futures oublient ce lieu ? Peut-on alors programmer la volonté d’oublier, organiser l’oubli ?

Ce sont toutes ces questions incommodes, avec aucune réponse parfaite et absolument consensuelles, que l’ANDRA tente de résoudre aujourd’hui avec de nombreuses parties prenantes.Nous rentrons là sur le terrain des temps géologiques, où l’unité est celle du million d’années.

Alors que les premières écritures de l’humanité datent de quelques -3500 ans avant JC, et que certaines restent encore indéchiffrées aujourd’hui, nous nous lançons donc (ou plus exactement, nous nous sommes lancés lorsque nous avons lancé les premières installations nucléaires au milieu du siècle dernier) dans un projet qui doit nous amener à considérer des échelles de temps qui dépassent l’entendement.

Quelle science-fiction aurait abordé des horizons si éloignés ? Quelles leçons issues de nos explorations au-delà du système terrestre nous sont d’un quelconque recours ici ? Que l’on se tourne vers le passé, vers le futur, nous nous trouvons bien esseulés dans notre présent pour tirer quelques enseignements de ces travaux et réflexions et penser la manière de transmettre convenablement cet héritage. Crédit photo : Olivier Durin

Article du blog d’Eric Vidalenc initialement publié sur le site Alternatives économiques.

Les déchets nucléaires en débat : les contraires ne s’y épousent pas !Tribune rédigée par Gérard Petit - publiée le 02.08.2019

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GÉRARD PETIT

Ancien membre de l’Inspection Générale

Ingénieur diplômé dans l’énergie, avec des activités de R&D, d’ingénierie, d’exploitation, de formation et, in fine, d’inspection, Gérard Petit est un ancien cadre supérieur d’EDF et membre de l’Inspection Générale en charge de la Sûreté Nucléaire.

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Le Débat Public sur le « plan national de gestion des matières et déchets radioactifs » (PNGMDR) bat son plein.

C’est l’occasion d’une forte mobilisation des opposants au nucléaire, dont c’est l’un des chevaux de bataille et d’une contre argumentation des partisans.

En 2015, Francis Sorin, spécialiste reconnu des questions de sûreté nucléaire, a écrit un ouvrage : « Déchets radioactifs, où est le problème ? ».

Faisant le tour de la question, il présentait les positions des uns et des autres, mais donnait aussi suffisamment d’éléments pour qu’on puisse considérer qu’un problème qui possède des solutions n’en est plus vraiment un.

Mais il est difficile de dépasser les -a priori- et sur ce terrain propice où ils foisonnent, les différentes contributions au débat PNGMDR précité et les réactions qu’elles suscitent, en attestent.

Les positions s’excluent les unes les autres, affirmation idéologique qu’il est impensable « d’oublier nos miasmes nucléaires en les mettant sous le tapis… » contre affirmation pragmatique qu’il nous revient, au contraire, de régler radicalement la question par l’enfouissement profond.

Mais que des solutions puissent exister priverait les contempteurs d’une formidable martingale, celle permettant de mettre le nucléaire échec et mat en jouant ce coup gagnant sur les déchets. En effet, une impasse pour les déchets et c’est toute la filière qu’on taxerait d’inconséquence.

CIGÉO, au coeur des débats

Au centre de la polémique, CIGEO, le projet de stockage dans des couches géologiques profondes auxquelles sont dévolues le rôle de confinement ultime, c’est-à-dire la protection du biotope.

La loi impose que ce stockage soit réversible, c’est-à-dire qu’en cas d’avancées technologiques permettant de réduire notablement les durées de stockage, voire le niveau d’activité des déchets, on puisse retirer les colis et retraiter leurs contenus.

Il est clair que la réversibilité qui ne faisait pas partie du projet initial a été ajoutée pour une meilleure acceptabilité par l’opinion. Pesant avantages et inconvénients (dont l’accroissement des coûts), le législateur a donc choisi d’entrefermer la boite pour une centaine d’années.

Le retraitement des combustibles nucléaires usés permet, en outre, la récupération de matières valorisables (plutonium, uranium) et la concentration des cendres de la réaction nucléaire, deux avantages insignes par rapport aux pays qui considèrent les combustibles usés comme des déchets ultimes.

Ces cendres sont un mélange de noyaux brisés (les produits de fission) et d’éléments fabriqués par la capture de neutrons, sans fission, par l’uranium (les actinides mineurs).

Les premiers sont très radioactifs, mais en conséquence leur virulence va décroître relativement rapidement, les seconds, moins radioactifs le resteront plus longtemps, voire très longtemps.

« Ils sont dangereux, ils s’accumulent et on ne sait qu’en faire… » ! Vous avez forcément deviné qu’on parle ici des déchets nucléaires, dans la présentation classique qu’en font les opposants.

Les tenants rétorquent qu’il est facile de parler d’impasse quand on considère des solutions techniques crédibles, certaines déjà à l’œuvre, comme de faux palliatifs, voire d’une inconséquente fuite en avant.

La forte radioactivité des produits de fission produit de la chaleur et on doit attendre quelques dizaines d’années pour que par diminution continue de cette radioactivité, les déchets refroidissement assez pour permettre leur stockage définitif.

Cette latence est souvent présentée par les opposants comme le signe tangible que la situation est bloquée.

En réalité, le mélange -produits de fission-actinides mineurs- a été intégré et fixé au sein de matrices de verre (un procédé développé en France et devenu référence mondiale) créant un premier obstacle efficace et durable à la migration des produits dangereux.

Encapsulés dans des conteneurs étanches, ces « verres » attendent dans des alvéoles ventilées que les conditions thermiques d’admission au stockage définitif soient réalisées.

Les lois de la physique

On a choisi pour CIGEO une vaste et épaisse couche d’argilite au seuil du plateau lorrain. Stable depuis 150 millions d’années cette roche anhydre apparaît comme un réceptacle idoine.

Au lieu retenu, elle se situe à environ 500 mètres de profondeur.Un laboratoire (situé sur la commune de Bure) a été implanté -in situ- pour vérifier la possibilité de créer pratiquement le stockage et s’assurer que la roche présente bien l’homogénéité et les capacités de confinement requises.

Ces propriétés qu’elle devrait conserver à l’échelle des temps géologique (millions d’années) bien supérieure à la durée de décroissance radioactive des produits confinés (dizaine de milliers d’années) constituent l’option de base de sûreté et la raison d’être du projet.

Lancé par loi de 1991, confirmé par celle de 2006, le stockage profond en couche géologique, en appui sur les nombreuses études et expériences menées depuis, reste la pierre de touche de la résolution de la question des déchets radioactifs en France et ailleurs.

Différer sa réalisation confine à la procrastination au détriment des générations futures, un argument qui peut faire pièce au fameux « legs empoisonné » que nous laisserions à environ mille cinq cents pieds sous terre, mais menacerait de rejaillir demain ou après demain, le diable sachant se jouer des lois de la physique.

“ Les positions s’excluent les unes les autres, affirmation idéologique qu’il est impensable « d’oublier nos miasmes nucléaires en les mettant sous le tapis… » contre affirmation pragmatique qu’il nous revient, au contraire, de régler radicalement la question par l’enfouissement profond ”

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Plan national de gestion des déchets radioactifs : « les débats peuvent créer de l’intelligence collective »Interview de Bertrand Pancher - publiée le 07.06.2019

BERTRAND PANCHER

Député de la Meuse

Sensible aux questions environnementales, Bertrand Pancher est secrétaire de la Commission du développement durable et de l’aménagement du territoire de l’Assemblée nationale. Membre de l’UDF puis de l’UMP, il rejoint le Parti radical en mai 2011. Le député de la Meuse s’est distingué par sa participation aux travaux du Grenelle de l’environnement. Souhaitant renforcer la concertation avec l’ensemble des acteurs concernés par les dossiers sensibles de son département (Laboratoire de Bure sur le stockage des déchets nucléaires..) il a créé l’Institut local du débat public dont il confia l’animation à Dominique Bourg, sociologue proche de Nicolas Hulot, préfigurant ainsi « Décider Ensemble » qu’il préside sur le plan national

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Êtes-vous convaincu par le projet de stockage Cigéo que vous avez visité ?Les conditions de sécurité et de sûreté de Cigéo, projet mené par l’Andra, me paraissent remarquables. C’est un endroit où l’on va entreposer les déchets nucléaires dans une couche d’argile très dure et hermétique de plusieurs centaines de mètres d’épaisseur.

Le vrai problème pour les déchets nucléaires est celui de la contamination de la nature par l’eau c’est à dire qu’il faut à tout prix éviter que les déchets se mélangent et soient emportés par l’eau, ce qui pourrait contaminer la végétation et l’alimentation.

La vraie question pour ces déchets de Haute activité à vie longue (HAVL) est de savoir si on les laisse sur le sol protégé et gardienné en permanence, ou bien si on les entrepose dans un endroit où il n’y a aucune possibilité de contamination et notamment d’interaction sur le plan humain.

Je suis personnellement rassuré par le projet même s’il y a la question de la sécurité lors de l’entreposage. Il faut faire très attention pour qu’il n’y ait pas d’incendie à l’intérieur quand on entrepose, de façon à protéger ceux qui seraient en train de travailler ou de manipuler. C’est ce qui est d’ailleurs ressorti lors du dernier débat public sur Cigéo.

Jusqu’en septembre, un débat national sur la gestion de ces déchets radioactifs est organisé. Ce débat est-il utile ?

Clairement oui, la démocratie en sort grandie. A travers ce débat démocratique, c’est la question de la gestion de toute la filière qui est posée.

Et pas uniquement les déchets radioactifs à vie longue mais aussi l’ensemble des déchets radioactifs nucléaires, civils et médicaux. Première observation : j’ai le sentiment que ce débat a été très bien préparé en amont par la Commission nationale du débat public.

Seconde observation : pour la première fois, toutes les grandes organisations, qu’elles soient favorables ou défavorables au stockage en profondeur des déchets nucléaires, ont accepté de participer au débat. C’est le cas notamment de France Nature Environnement qui a été interrogée.

La contribution de l’ensemble des acteurs a été résumée et mise en ligne par la Commission nationale du débat public. Quelle que soit la catégorie de déchets, on va pouvoir recueillir l’avis argumenté de toutes les organisations concernées.

Cela va aider à la compréhension du problème et à la possibilité évidemment d’y répondre parce que je crains, comme d’habitude, que les concertations sous forme de débat public soient perturbés par ceux qui n’ont pas envie de débattre.

Jusqu’au 25 septembre 2019, le PNGMDR (Plan national de gestion des matières et déchets radioactifs) fait l’objet d’un débat public sur tout le territoire. Objectif : permettre l’expression des points de vue et des arguments de l’ensemble des citoyens sur la gestion des matières et déchets nucléaires.

Nous avons recueilli le point de vue de Bertrand Pancher, député de la Meuse, département où se trouve le laboratoire Cigéo à Bure, projet français de centre de stockage profond de déchets radioactifs.

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La gestion des déchets est-elle transparente du coup ?Pour ceux qui se donnent la peine de travailler sur le sujet, la documentation de la Commission est très fournie. Et j’ajoute que tous ceux qui le souhaitent peuvent visiter le site. Je recommande d’ailleurs de le faire, c’est très instructif !

Et j’attire votre attention sur le fait que plus les personnes habitent à proximité de Bure, plus ils sont rassurés. Une observation d’une enquête réalisée par un cabinet complètement indépendant a démontré que, dans le bassin économique de “Bure Cigéo”, les gens sont beaucoup plus rassurés qu’ailleurs parce que justement ils y sont allés.

Je note que le premier débat public avait éclairé les pouvoirs publics en considérant qu’il fallait inscrire dans la loi la question de la réversibilité pendant un délai d’un siècle.

Les personnes experts sont unanimes pour dire que le débat est bien organisé. C’est un travail collectif pour une probable solution pérenne. Cela n’empêchera pas de rencontrer des gens génétiquement opposés.

Et j’en suis persuadé : les débats peuvent créer de l’intelligence collective nationale.

Peut-on être contre le nucléaire mais pour Cigéo ?Bonne question… L’énergie nucléaire n’a pas dit son dernier mot car elle ne produit pas de gaz à effet de serre et que la réduction de la consommation énergétique n’est pas pour demain.

Que l’on soit pour ou contre le nucléaire, c’est comme le nez au milieu de la figure, les déchets nucléaires sont bel et bien là ! Je pense qu’il faut absolument traiter la question des déchets nucléaires. Si nous avons une solution pour traiter en toute sécurité la question pendant des milliers d’années, il ne faut pas hésiter et le faire !

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“ Les conditions de sécurité et de sûreté de Cigéo, projet mené par l’Andra, me paraissent remarquables ”

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