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Institut Économique Molinari | Paris-Bruxelles LE JOUR OÙ LES ÉTATS DE L’UNION EUROPÉENNE ONT DÉPENSÉ TOUTES LEURS RECETTES ANNUELLES Nicolas Marques et Cécile Philippe Novembre 2017 — 3 ème édition

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Institut Économique Molinari | Paris-Bruxelles

LE JOUR OÙ LES ÉTATS DE L’UNION EUROPÉENNE ONT

DÉPENSÉ TOUTES LEURS RECETTES ANNUELLES

Nicolas Marques et Cécile Philippe

Novembre 2017 — 3ème édition

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SYNTHÈSE DE L’ÉTUDE — 2 OBJECTIF DE L’ÉTUDE — 3 SPÉCIFICITÉ DE LA DÉMARCHE — 4 DERNIER JOUR CONNU À PARTIR DUQUEL LES ADMINISTRATIONS CENTRALES DE L’UE ONT DEPENSÉ TOUTES LEURS RESSOURCES — 4 Calendrier des jours où les administrations centrales ont dépensé toutes leurs recettes — 4 Le calendrier se resserre, 15 administrations épuisent leurs recettes en décembre — 5 4 administrations centrales de l’UE sont à l’équilibre — 5 La situation globale de l’UE s’améliore pour la 7ème année consécutive — 5 Les administrations centrales restent la principale source de déficits publics — 5 ENSEIGNEMENTS FRANÇAIS — 10 La France prend la dernière position au sein de l’UE, avec 55 jours de dépenses non financées — 10 Un État dont la situation se dégrade sur 20 ans par rapport au reste de l’UE — 10 Un État dont la situation se dégrade de façon continue et régulière depuis 1980 — 12 Outre l’État, les administrations de sécurité sociale et les dépenses publiques globales restent dans le rouge — 13 Des déséquilibres français en dépit d’une augmentation significative des recettes — 16 Des déséquilibres français qui ne sont pas associés à plus de bien-être — 18 Une récurrence des déficits inquiétante d’un point de vue économique et sociétal — 21 GLOSSAIRE — 25 PRÉCISIONS SUR LES DONNÉES — 26 PRÉCISIONS SUR LES CALCULS — 26 CONTACT POUR TOUTE QUESTION OU INTERVIEW — 28 MISSION DE L’IEM — 28 POUR DEVENIR DONATEUR DE L’IEM — 29

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TABLE DES MATIÈRES

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SYNTHÈSE DE L’ÉTUDE Les administrations centrales, principale source des déficits publics dans l’UE Les États centraux de l’UE épuisent en moyenne leurs ressources le 6 décembre, 25 jours avant la fin de l’année. C’est quasiment 7 jours plus tard que l’année d’avant, ce qui représente une amélioration significative. Parmi les 28 administrations centrales de l’UE, 4 étaient en situation excédentaire l’an passé, dont la Suède, avec un excédent équivalent à 20 jours de dépenses, et l’Allemagne, avec un excédent de 7 jours de dépenses. Leurs recettes de l’année leur ont permis de financer toutes les dépenses de l’année et de se désendetter. Les 24 autres administrations centrales dépensaient la totalité de leurs recettes avant la fin de l’année. Pour 15 d’entre elles les ressources étaient consommées en décembre et pour 9 d’entre elles dès novembre. En dépit de cette amélioration, les États centraux restent le point noir des finances publiques européennes. Au niveau de l’UE, les administrations centrales expliquent l’essentiel des dérapages des comptes publics (25 jours non financés). Les administrations locales sont équilibrées depuis 2014 (4 jours d’excédent en 2016). C’est aussi le cas des administrations de sécurité sociale depuis 2016 (1 jour d’excédent). Conséquence, toutes administrations confondues, les différents pays de l’UE avaient consommé la totalité de leurs recettes publiques 13 jours avant la fin de l’année. C’est 5 jours plus tard que l’année d’avant. La situation de l’administration centrale française, dégradée, continue de se détériorer contrairement au reste de l’UE L’administration centrale française a dépensé l’intégralité de ses ressources le 7 novembre, 55 jours avant la fin de l’année. Elle représente désormais le plus grand déséquilibre au sein l’UE, devant l’Espagne (50 jours) et la Roumanie (48 jours). L’écart se creuse aussi entre la France et la moyenne de l’UE, il est maintenant de près de 30 jours, contre 22 jours l’année d’avant. Ces contre-performances s’expliquent par l’incapacité française à rééquilibrer durablement les comptes suite à la dernière crise. Alors que les administrations centrales de l’UE ont profité des 7 dernières années pour résorber leurs déficits, ce n’est pas ce qu’on constate en France. Le mouvement de rééquilibrage des comptes post-crise s’est enrayé de façon précoce, il y a 4 ans. Le déficit de l’administration centrale française est reparti à la hausse depuis 2014, au rythme d’un jour non financé en plus par an, tandis qu’en moyenne l’UE résorbait ses déficits de 5 jours par an. Cette contre-performance fragilise, une fois de plus, la position française. Les derniers équilibres connus pour l’État et les divers organismes d’administration centrale (ODAC) remontent à 1980.

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Depuis, tous les exercices ont été déséquilibrés et « le jour où toutes les ressources sont consommées » a avancé de 1,5 jour par an en moyenne. L’administration centrale n’est pas la seule à ne pas équilibrer ses comptes en France. C’est aussi le cas des administrations de sécurité sociale. Elles sont encore dans le rouge, en dépit de la multitude des réformes encadrant la progression des dépenses de santé et durcissant le fonctionnement des régimes de retraite. OBJECTIF DE L’ÉTUDE L’objectif de cette étude est de comparer les recettes et les dépenses des administrations centrales des 28 pays membres de l’Union européenne (UE) pour déterminer le jour à partir duquel elles ont épuisé toutes leurs recettes annuelles et commencent à vivre à crédit. Ce travail est fait au niveau des 28 pays de l’UE, à partir des dernières données annuelles d’Eurostat, mises à jour le 23 octobre 2017. Il permet de mesurer l’évolution des déséquilibres dans le temps et de comparer la situation des différents pays. Cette approche vise à éclairer les enjeux pour les citoyens, dans un domaine particulièrement difficile à suivre pour un non spécialiste. Les déficits sont fréquemment exprimés en pourcentage du PIB, notion complexe à appréhender. Les débats liés aux procédures budgétaires étatiques portent sur des milliards d’euros, tandis que le grand public est habitué à raisonner en centaines ou milliers d’euros. Les chiffrages des économies mis en avant par les pouvoirs publics sont souvent réalisés par rapport à des hypothèses de croissance tendancielle, et non par rapport aux dépenses réellement enregistrées. Cela brouille la compréhension des choses, les « économies » ne se traduisant pas mécaniquement par une réduction des dépenses. Ajoutons que le débat sur ces sujets complexes se résume fréquemment à des prises de position déconnectées des enjeux réels. Ce fut notamment le cas en France dans les dernières années, avec la multiplication des discours fustigeant une « austérité budgétaire » n’ayant pas d’assise factuelle dans un pays où les dépenses publiques ne diminuent pas en période de crise et diminuent moins vite qu’ailleurs en période de reprise. D’où l’intérêt d’une démarche permettant au grand public de visualiser, clairement et simplement, l’ampleur des enjeux et de suivre leur évolution dans le temps.

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SPÉCIFICITÉ DE LA DÉMARCHE Cette étude permet une meilleure compréhension des dérapages des administrations centrales, que l’on qualifie dans le langage courant d’États, grâce à une méthode solide et accessible. Les recettes sont divisées par les dépenses et multipliées par 365, ce qui permet d’exprimer les dérapages financiers en jours sur une année. Cette méthode s’apparente aux usages financiers, les analystes ayant par exemple l’habitude de présenter le Besoin de fonds de roulement (BFR) en jours de chiffre d’affaires. Elle présente aussi l’avantage d’être significative pour tout individu s’étant demandé comment « boucler ses fins de mois ». Ce travail est axé autour des administrations centrales, c’est-à-dire sur les organismes administratifs de l’État et les autres organismes centraux dont la compétence s’étend normalement sur la totalité du territoire. Au niveau de l’UE, il s’agit des administrations présentant les comptes les plus déséquilibrés. Néanmoins, les chiffrages portent aussi sur les autres administrations (États fédérés, collectivités locales et sécurité sociale). Cela permet d’apporter un éclairage complémentaire, tous les pays n’étant fort heureusement pas déficitaires au niveau de chacune de ces administrations. DERNIER JOUR CONNU À PARTIR DUQUEL LES ADMINISTRATIONS CENTRALES DE L’UE ONT DÉPENSÉ TOUTES LEURS RESSOURCES Calendrier des jours où les administrations centrales ont dépensé toutes leurs recettes

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Recettes épuisées en Recettes épuisées en Recettes épuisées en

Novembre Décembre Janvier année suivante 6 Moyenne UE 28 4 Chypre 7 Royaume-Uni 7 France (+ déficitaire) 7 Slovénie 7 Allemagne 8 Hongrie

11 Espagne 18 Autriche 10 Malte 13 Roumanie 19 Croatie 20 Irlande 20 Suède (+ excédentaire)

21 Pologne 21 Pays-Bas 22 Danemark 22 Grèce

26 Finlande 26 Rép. Tchèque 26 Portugal 27 Estonie 26 Italie 27 Luxembourg 27 Belgique 27 Lituanie 27 Slovaquie 29 Bulgarie 31 Lettonie

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Le calendrier se resserre, 15 administrations épuisent leurs recettes en décembre Par rapport à la précédente édition, on constate un resserrement du calendrier. Là où une administration centrale avait tout dépensé dès octobre, il n’en reste plus aucune. Là où 2 administrations étaient en excédent, on en compte désormais 4. 4 administrations centrales de l’UE sont à l’équilibre Parmi les 28 administrations centrales de l’UE, 4 étaient en situation excédentaire l’an passé, dont la Suède, avec un excédent équivalent à 20 jours de dépenses, et l’Allemagne, avec un excédent de 7 jours de dépenses. Leurs recettes de l’année leur ont permis de financer toutes les dépenses de l’année et de se désendetter. Les 24 autres administrations centrales ont dépensé la totalité de leurs recettes avant la fin de l’année. La France, l’Espagne et la Roumanie sont en queue de classement. La France est dans la situation la plus déséquilibrée (55 jours non financés, légère dégradation), suivie de l’Espagne (50 jours, légère dégradation) et de la Roumanie (48 jours, en nette dégradation). La situation globale de l’UE s’améliore pour la 7ème année consécutive Les derniers chiffres d’Eurostat montrent que les administrations centrales de l’UE ont au global dépensé toutes leurs recettes 25 jours avant la fin de l’année. Leur situation continue au global à s’améliorer, avec un gain de quasiment 7 jours par rapport à la précédente édition. Pour autant, en dépit d’une baisse significative depuis 2009, le nombre de jours de dépenses non financées reste supérieur aux derniers chiffres enregistrés avant la crise dans les 28 États (voir Graphique 1). Les administrations centrales restent la principale source de déficits publics Au niveau de l’UE, les dérapages des administrations centrales expliquent l’essentiel des dérapages des comptes publics. Les autres administrations génèrent désormais toutes des excédents, à l’exception des administrations d’États fédérés (voir Graphique 2). Les 4 administrations d’États fédérés étaient au global dans le rouge l’an passé, avec en moyenne 3 jours de dépenses non financées. On constate 8 jour d’amélioration entre 2015 et 2016. Elles étaient excédentaires dans 2 pays de l’UE et déficitaires dans 2 pays. L’excédent le plus significatif était en Allemagne, il équivalait à 4 jours de dépenses. Le déficit le plus significatif a été constaté en Espagne, avec des recettes intégralement dépensées 20 jours avant la fin de l’année (voir Tableau 2).

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Lecture : Excédents sur fond vert, déficits sur fond rouge. ● 1er quartile (25 % meilleures performances), ● 2ème quartile, ● 3ème quartile, ● dernier quartile (25 % plus mauvaises performances). L'administration centrale française avait épuisé ses recettes 55 jours avant la fin de l'année, le 7 novembre. Elle était 28ème sur 28 administrations centrales, ce qui la positionne dernière du 4ème quartile, composé du ¼ des moins bonnes performances.

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Les administrations locales étaient en équilibre de 4 jours l’an passé. On constate 1 jour d’amélioration entre 2015 et 2016. Elles étaient excédentaires dans 23 pays de l’UE et déficitaires dans 5 pays. L’excédent le plus significatif était à Malte, il équivalait à 42 jours de dépenses. Le déficit le plus significatif était constaté au Royaume-Uni, avec des recettes intégralement dépensées 13 jours avant la fin de l’année. Les administrations de sécurité sociale sont passées dans le vert l’an passé, avec 1 jour d’excédent. On constate 2 jours d’amélioration entre 2015 et 2016. Parmi les 25 pays de l’UE à propos desquels les données Eurostat sont disponibles, 17 avaient des sécurités sociales excédentaires et 8 enregistraient des déficits à ce niveau. L’excédent le plus significatif est au Luxembourg, il est équivalent à 37 jours de dépenses. Le déficit le plus significatif a été constaté en Espagne, avec des recettes intégralement dépensées 40 jours avant la fin de l’année.

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Agrégé au niveau global, toutes administrations confondues, les administrations publiques de l’UE avaient consommé la totalité de leurs recettes 13 jours avant la fin de l’année. On constate 5 jours d’amélioration entre 2015 et 2016. Elles étaient excédentaires dans 10 pays de l’UE et déficitaires dans 18 pays. L’excédent le plus significatif était au Luxembourg, il équivalait à 14 jours de dépenses. Le déficit le plus significatif était constaté en Espagne, avec des recettes intégralement dépensées 39 jours avant la fin de l’année.

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2006 2007 2008 2009 2010 2011 2012 2013 2014 2015 2016

Nombre de jo

urs 

Graphique 2 : nombre de jours de dépenses non financées dans l'UE 

Administrationslocales (28)

Administrations desécurité sociale (25)

Administrationsd'Etats fédérés (4)

Administrationspubliques (28)

Administrationcentrale (28)Source : Eurostat et caluls IEM

‐24‐18

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‐72‐69

‐52 ‐52

‐41‐37

‐32‐25

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2006 2007 2008 2009 2010 2011 2012 2013 2014 2015 2016

Nombre de jo

urs 

Graphique 1 : nombre de jours de dépenses non financées par les administrations centrales de l'UE

Source : Eurostat et caluls IEM

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Lecture : Excédents sur fond vert, déficits sur fond rouge. ● 1er quartile (25 % meilleures performances), ● 2ème quartile, ● 3ème quartile, ● dernier quartile (25 % plus mauvaises performances).

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ENSEIGNEMENTS FRANÇAIS La France prend la dernière position au sein de l’UE, avec 55 jours de dépenses non financées L’administration centrale française a dépensé l’intégralité de ses ressources le 7 novembre, 55 jours avant la fin de l’année. C’est le pire résultat de l’UE, devant l’Espagne (50 jours de dépenses non financées) et la Roumanie (48 jours). Un État dont la situation se dégrade sur 20 ans par rapport au reste de l’UE D’un point de vue relatif, on observe que la situation française est de plus en plus inquiétante. L’État (et ses ODAC) était 21ème en moyenne sur les 20 dernières années (premier du dernier quart). Il était tombé à la 24ème position sur les 10 dernières années et s’était maintenu à ce niveau sur les 5 dernières années. Il est devenu dernier, 28ème sur 28 l’an passé (voir Tableau 3).

Lecture : Excédents sur fond vert, déficits sur fond rouge. ● 1er quartile (25 % meilleures performances), ● 2ème quartile, ● 3ème quartile, ● dernier quartile (25 % plus mauvaises performances).

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Tableau 3 : nombre de jours de dépenses non financées des 28 administrations centrales de l'UE

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arti

le

Ran

g

Qu

arti

le

Ran

g

Qu

arti

le

Danemark 6 1 Suède 1 1 Allemagne 0 1 Suède 20 1Suède 5 2 Estonie -2 2 Estonie -2 2 Malte 10 2Estonie 4 3 Danemark -4 3 Suède -3 3 Allemagne 7 3Luxembourg -2 4 Luxembourg -10 4 Lituanie -9 4 Chypre 4 4Bulgarie -6 5 Bulgarie -16 5 Luxembourg -10 5 Lettonie -1 5Pays-Bas -16 6 Allemagne -18 6 Danemark -12 6 Bulgarie -2 6Finlande -19 7 Malte -19 7 Lettonie -13 7 Lituanie -4 7Irlande -23 8 Pays-Bas -20 8 Malte -13 8 Luxembourg -5 8Belgique -23 9 Autriche -23 9 Bulgarie -19 9 Estonie -5 9Autriche -24 10 Rép. Tchèque -27 10 Autriche -20 10 Rép. Tchèque -5 10Allemagne -27 11 Lituanie -28 11 Pays-Bas -20 11 Grèce -9 11Lettonie -31 12 Belgique -31 12 Rép. Tchèque -21 12 Danemark -9 12Royaume-Uni -31 13 Finlande -37 13 Belgique -31 13 Pays-Bas -11 13Lituanie -32 14 Lettonie -38 14 Hongrie -35 14 Irlande -11 14Rép. Tchèque -34 15 Italie -41 15 Roumanie -37 15 Croatie -13 15Malte -35 16 Hongrie -42 16 Italie -39 16 Autriche -14 16Italie -38 17 Chypre -47 17 Slovaquie -41 17 Hongrie -23 17Slovénie -41 18 Slovénie -50 18 Irlande -42 18 Slovénie -24 18Espagne -42 19 Slovaquie -51 19 Chypre -43 19 Royaume-Uni -25 19Roumanie -47 20 Royaume-Uni -51 20 Finlande -44 20 Slovaquie -34 20France -52 21 Roumanie -52 21 Pologne -44 21 Belgique -35 21Pologne -53 22 Pologne -52 22 Royaume-Uni -45 22 Italie -35 22Portugal -55 23 Croatie -53 23 Croatie -48 23 Portugal -35 23Hongrie -56 24 France -61 24 France -55 24 Finlande -36 24Slovaquie -58 25 Portugal -63 25 Portugal -56 25 Pologne -41 25Chypre -59 26 Irlande -67 26 Grèce -56 26 Roumanie -48 26Grèce -78 27 Espagne -68 27 Slovénie -60 27 Espagne -50 27

Grèce -77 28 Espagne -70 28 France -55 28

Moyenne UE -34 Moyenne UE -43 Moyenne UE -37 Moyenne UE -25

Moyenne sur 20 ans du nombre de jours d'épuisement des recettes (-) ou de désendettement (+)

Moyenne sur 10 ans du nombre de jours d'épuisement des recettes (-) ou de désendettement (+)

Moyenne sur 5 ans du nombre de jours d'épuisement des recettes (-) ou de désendettement (+)

Nombre de jours d'épuisement des recettes (-) ou de désendettement (+) en 2016

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Cette rétrogradation à la dernière place s’explique par une inaptitude de l’État et des administrations centrales à rééquilibrer durablement leurs comptes suite à la dernière crise. Alors qu’au global les États européens ont profité des 7 dernières années pour améliorer leurs soldes budgétaires, ce n’est pas ce qu’on constate en France. Le mouvement de rééquilibrage des comptes post-crise (2009-2013) s’est enrayé de façon précoce, il y a 4 ans. Le déficit de l’administration centrale française est reparti à la hausse depuis 2014, au rythme d’un jour non financé en plus par an, tandis qu’en moyenne l’UE résorbait ses déficits de 5 jours par an. C’est ainsi qu’en 2016, l’administration centrale française avait consommé toutes ses ressources quasiment 30 jours plus tôt que le reste de l’Union européenne (voir Graphique 3). Cette incapacité à améliorer durablement les comptes en période d’embellie n’est malheureusement pas nouvelle. Alors que sur la période 2003-2007 les soldes budgétaires moyens de l’UE s’étaient améliorés chaque année, on avait constaté pour l’État français une quasi stabilisation dès 2004, avec un gain d’à peine 2 jours sur la période 2004-2007 et une rechute dès 2007. De même entre 1997 et 2000, les soldes de l’UE se sont améliorés chaque année, alors qu’on constatait une rechute dès 2000 en France. Pour autant, il semble que la période récente soit encore plus préoccupante que ces 2 épisodes plus anciens. D’une part, le solde français décroche 3 ans plus tôt que le reste de l’UE, contre 1 an plus tôt lors des deux précédentes embellies. D’autre part, le niveau de consolidation (-52 jours en 2013) est bien moins satisfaisant que celui constaté dans les 2 épisodes précédents (-38 jours en 2006 et -33 jours en 1999). Tout se passe comme si les décideurs publics français se satisfaisaient d’un niveau de déficit supérieur à leurs homologues européens et/ou étaient dans l’incapacité de redresser les comptes durablement.

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1997 1998 1999 2000 2001 2002 2003 2004 2005 2006 2007 2008 2009 2010 2011 2012 2013 2014 2015 2016

Nombre de jours  

Graphique 3 : nombre de jours de dépenses non financées par l'administration centrale française vs la moyenne de l'UE 

Administration centrale UEAdministration centrale FR

Source : Eurostat et caluls IEM

1 an

3 ans

1 an

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Un État dont la situation se dégrade de façon continue et régulière depuis 1980 Au-delà de la période récente, les données d’Eurostat attestent d’une dégradation continue et régulière de la situation française depuis 1978. Les derniers équilibres connus pour l’État et les divers organismes d’administration centrale (ODAC) remontent à 1980 (voir Graphique 4). Depuis, tous les exercices ont été déséquilibrés. Indépendamment des chocs liés aux à-coups conjoncturels, la situation française s’est perpétuellement détériorée. En moyenne, « le jour où toutes les ressources sont consommées » a avancé de 1,5 jour par an depuis 1980. Les pires performances conjoncturelles représentaient 32 jours de dépenses non financées en 1984, 69 jours en 1993, 56 jours en 2003 et 93 jours en 2009 (voir Graphique 4).

Il en va de même des « meilleures » performances. L’embellie de 1980 avait permis d’équilibrer les comptes. Cette configuration ne s’est jamais reproduite et les phases d’amélioration sont depuis systématiquement associées à des déséquilibres toujours plus importants : -19 jours en 1989, -33 en 1999, -38 en 2006 et -52 en 2013.

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1978 1982 1986 1990 1994 1998 2002 2006 2010 2014

Nombre de jo

urs 

Graphique 4 : nombre de jours de dépenses non financées par l'administration centrale française depuis 1978

Administration centrale FR

Linéaire (Administration centrale FR)

Source : Eurostat et caluls IEM

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Outre l’État, les administrations de sécurité sociale et les dépenses publiques globales restent dans le rouge L’administration centrale n’est pas la seule à ne pas équilibrer ses comptes en France. C’est aussi le cas des administrations de sécurité sociale qui sont encore dans le rouge. (Tableau 4). En dépit de la multitude des réformes encadrant la progression des dépenses de santé et durcissant le fonctionnement des régimes de retraite depuis les années 1990, les administrations de sécurité sociale épuisaient leurs recettes 1 jour avant la fin de l’année en 2016. Contrairement aux discours récurrents insistant sur les moyens mis en œuvre et présentant le retour à l’équilibre comme acquis, il n’y a pas encore de quoi pavoiser. Le gain oscille entre 1 jour (vs la moyenne à 20 ans) et 4 jours (vs la moyenne à 5 ans). Certes, les administrations de sécurité sociale françaises sont sorties du dernier quart du tableau (elles sont désormais 18ème sur 25), mais ce gain peut même apparaitre faible eu égard aux changements opérés (mise en place de mécanismes de rationnement, baisse des pensions...)

Lecture : Excédents sur fond vert, déficits sur fond rouge. ● 1er quartile (25 % meilleures performances), ● 2ème quartile, ● 3ème quartile, ● dernier quartile (25 % plus mauvaises performances).

Le jour où les États de l’Union européenne ont dépensé toutes leurs recettes annuelles — 3ème édition Nicolas Marques, Cécile Philippe ● Novembre 2017 13

Tableau 4 : nombre de jours de dépenses non financées des 25 administrations de sécurité sociale de l'UE

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Chypre 140 1 Chypre 80 1 Luxembourg 33 1 Luxembourg 37 1Finlande 66 2 Finlande 53 2 Finlande 30 2 Portugal 25 2Luxembourg 40 3 Luxembourg 39 3 Estonie 21 3 Finlande 24 3Estonie 25 4 Estonie 24 4 Portugal 13 4 Pays-Bas 23 4Grèce 25 5 Suède 20 5 Grèce 9 5 Grèce 21 5Suède 18 6 Portugal 15 6 Roumanie 6 6 Rép. Tchèque 7 6Portugal 13 7 Grèce 5 7 Suède 6 7 Chypre 6 7Lettonie 12 8 Allemagne 4 8 Allemagne 5 8 Allemagne 5 8Danemark 9 9 Lettonie 4 9 Chypre 4 9 Croatie 5 9Espagne 5 10 Italie 3 10 Croatie 3 10 Suède 4 10Bulgarie 5 11 Autriche 2 11 Hongrie 2 11 Roumanie 3 11Roumanie 4 12 Hongrie 2 12 Italie 2 12 Estonie 3 12Italie 3 13 Danemark 1 13 Autriche 2 13 Danemark 2 13Slovaquie 2 14 Croatie 1 14 Danemark 2 14 Italie 2 14Belgique 2 15 Roumanie 0 15 Bulgarie 1 15 Autriche 1 15Pologne 2 16 Bulgarie 0 16 Slovénie 0 16 Lituanie 1 16Allemagne 1 17 Rép. Tchèque 0 17 Belgique 0 17 Bulgarie 1 17Autriche 1 18 Belgique 0 18 Rép. Tchèque -1 18 France -1 18Hongrie 0 19 Slovénie -1 19 Lettonie -1 19 Belgique -2 19Rép. Tchèque 0 20 Slovaquie -1 20 Slovaquie -3 20 Hongrie -2 20Slovénie -1 21 Pologne -3 21 France -5 21 Pologne -2 21Pays-Bas -1 22 France -4 22 Pays-Bas -7 22 Slovénie -3 22France -2 23 Espagne -7 23 Pologne -7 23 Lettonie -5 23Lituanie -13 24 Pays-Bas -8 24 Lituanie -23 24 Slovaquie -8 24

Lituanie -33 25 Espagne -29 25 Espagne -40 25

Moyenne UE 3 Moyenne UE 1 Moyenne UE -1 Moyenne UE 1

Moyenne sur 20 ans du nombre de jours d'épuisement des recettes (-) ou de désendettement (+)

Moyenne sur 10 ans du nombre de jours d'épuisement des recettes (-) ou de désendettement (+)

Moyenne sur 5 ans du nombre de jours d'épuisement des recettes (-) ou de désendettement (+)

Nombre de jours d'épuisement des recettes (-) ou de désendettement (+) en 2016

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En revanche, les administrations locales françaises ont basculé dans le vert l’an passé. Elles étaient excédentaires de 4 jours l’an passé (voir Tableau 5), alors qu’elles étaient déficitaires d’un jour l’année d’avant. On constate une inversion de tendance par rapport aux déficits sur 20 ans (-2 jours), 10 ans (-6 jours) et 5 ans (-4 jours). Le positionnement relatif par rapport au reste de l’UE s’améliore, avec une 20ème position l’an passé, contre une 23ème position à 10 et 5 ans. Pour autant, il reste du chemin à faire pour retrouver le positionnement moyen observé sur 20 ans (12ème).

Lecture : Excédents sur fond vert, déficits sur fond rouge. ● 1er quartile (25 % meilleures performances), ● 2ème quartile, ● 3ème quartile, ● dernier quartile (25 % plus mauvaises performances).

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Tableau 5 : nombre de jours de dépenses non financées des 28 administrations locales de l'UE

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Luxembourg 16 1 Luxembourg 23 1 Hongrie 46 1 Malte 42 1Malte 9 2 Hongrie 21 2 Grèce 35 2 Espagne 39 2Grèce 9 3 Grèce 17 3 Espagne 30 3 Rép. Tchèque 37 3Hongrie 6 4 Malte 10 4 Luxembourg 29 4 Grèce 33 4Irlande 1 5 Rép. Tchèque 3 5 Portugal 23 5 Slovaquie 32 5Roumanie -1 6 Allemagne 2 6 Malte 14 6 Portugal 30 6Espagne -1 7 Irlande 2 7 Rép. Tchèque 14 7 Lituanie 23 7Danemark -1 8 Danemark 0 8 Irlande 11 8 Luxembourg 22 8Slovénie -2 9 Espagne 0 9 Slovaquie 11 9 Hongrie 17 9Rép. Tchèque -2 10 Croatie 0 10 Chypre 9 10 Irlande 17 10Lituanie -2 11 Chypre 0 11 Roumanie 8 11 Belgique 11 11France -2 12 Italie -1 12 Italie 5 12 Lettonie 9 12Suède -2 13 Portugal -2 13 Lituanie 4 13 Slovénie 8 13Belgique -3 14 Belgique -3 14 Allemagne 3 14 Allemagne 8 14Autriche -3 15 Lituanie -3 15 Slovénie 3 15 Pologne 7 15Allemagne -3 16 Suède -3 16 Danemark 2 16 Italie 7 16Bulgarie -4 17 Slovaquie -4 17 Croatie 0 17 Roumanie 6 17Italie -7 18 Slovénie -4 18 Bulgarie 0 18 Estonie 5 18Pays-Bas -7 19 Estonie -5 19 Estonie -2 19 Bulgarie 4 19Portugal -7 20 Autriche -6 20 Autriche -2 20 France 4 20Royaume-Uni -8 21 Roumanie -6 21 Lettonie -2 21 Danemark 4 21Finlande -8 22 Bulgarie -6 22 Pologne -2 22 Chypre 3 22Estonie -10 23 France -6 23 France -4 23 Pays-Bas 2 23Lettonie -11 24 Royaume-Uni -7 24 Suède -5 24 Autriche -2 24Pologne -13 25 Finlande -9 25 Pays-Bas -6 25 Croatie -4 25Slovaquie -13 26 Pologne -9 26 Royaume-Uni -6 26 Finlande -7 26Chypre -16 27 Pays-Bas -11 27 Belgique -6 27 Suède -7 27

Lettonie -15 28 Finlande -11 28 Royaume-Uni -13 28

Moyenne UE -5 Moyenne UE -4 Moyenne UE 1 Moyenne UE 4

Moyenne sur 10 ans du nombre de jours d'épuisement des recettes (-) ou de désendettement (+)

Moyenne sur 5 ans du nombre de jours d'épuisement des recettes (-) ou de désendettement (+)

Nombre de jours d'épuisement des recettes (-) ou de désendettement (+) en 2016

Moyenne sur 20 ans du nombre de jours d'épuisement des recettes (-) ou de désendettement (+)

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Au global la France, toutes administrations publiques confondues, reste dans le rouge. Les administrations publiques épuisaient leurs recettes 22 jours avant la fin de l’année en 2016. Le gain oscille entre 2 jours (vs la moyenne à 20 ans) et 7 jours (vs la moyenne à 10 ans). Le déficit se résorbe plus lentement que dans l’UE au global. Aussi notre situation relative se dégrade par rapport à nos voisins (Tableau 6) : alors que les administrations publiques françaises étaient 14ème dans l’UE sur 20 ans (2ème quartile), elles étaient 25ème l’an passé (dernier quartile).

Lecture : Excédents sur fond vert, déficits sur fond rouge. ● 1er quartile (25 % meilleures performances), ● 2ème quartile, ● 3ème quartile, ● dernier quartile (25 % plus mauvaises performances).

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Tableau 6 : nombre de jours de dépenses non financées des administrations publiques

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Luxembourg 17 1 Luxembourg 11 1 Luxembourg 10 1 Luxembourg 14 1Finlande 9 2 Suède 1 2 Allemagne 3 2 Malte 11 2Estonie 4 3 Estonie 0,1 3 Estonie 0,1 3 Suède 8 3Danemark 4 4 Danemark -3 4 Suède -4 4 Rép. Tchèque 7 4Suède 3 5 Finlande -5 5 Danemark -8 5 Allemagne 7 5Bulgarie -4 6 Allemagne -5 6 Lettonie -9 6 Chypre 4 6Pays-Bas -12 7 Bulgarie -13 7 Rép. Tchèque -12 7 Grèce 3 7Allemagne -13 8 Autriche -17 8 Lituanie -13 8 Pays-Bas 3 8Belgique -13 9 Rép. Tchèque -19 9 Malte -13 9 Lituanie 3 9Autriche -17 10 Pays-Bas -19 10 Autriche -13 10 Lettonie 0,4 10Lettonie -20 11 Malte -19 11 Bulgarie -14 11 Bulgarie -0,4 11Irlande -23 12 Belgique -20 12 Finlande -16 12 Estonie -3 12Italie -23 13 Italie -23 13 Pays-Bas -16 13 Danemark -4 13France -24 14 Hongrie -26 14 Hongrie -17 14 Croatie -7 14Rép. Tchèque -26 15 Chypre -26 15 Italie -20 15 Irlande -9 15Slovénie -27 16 Lettonie -27 16 Belgique -20 16 Finlande -11 16Lituanie -28 17 France -29 17 Roumanie -22 17 Autriche -12 17Espagne -30 18 Lituanie -31 18 France -26 18 Hongrie -14 18Chypre -30 19 Slovaquie -34 19 Slovaquie -26 19 Slovénie -15 19Royaume-Uni -31 20 Slovénie -34 20 Pologne -29 20 Portugal -16 20Roumanie -33 21 Pologne -35 21 Croatie -30 21 Belgique -17 21Pologne -34 22 Croatie -35 22 Chypre -33 22 Italie -18 22Malte -35 23 Roumanie -39 23 Portugal -36 23 Slovaquie -19 23Hongrie -37 24 Portugal -44 24 Irlande -39 24 Pologne -22 24Slovaquie -40 25 Royaume-Uni -49 25 Slovénie -39 25 France -22 25Portugal -40 26 Espagne -53 26 Grèce -39 26 Royaume-Uni -26 26Grèce -53 27 Grèce -57 27 Royaume-Uni -44 27 Roumanie -32 27

Irlande -64 28 Espagne -53 28 Espagne -39 28

Moyenne UE -21 Moyenne UE -27 Moyenne UE -22 Moyenne UE -13

Moyenne sur 20 ans du nombre de jours

d'épuisement des recettes (-) ou de

désendettement (+)

Moyenne sur 10 ans du nombre de jours

d'épuisement des recettes (-) ou de

désendettement (+)

Moyenne sur 5 ans du nombre de jours d'épuisement des recettes (-) ou de

désendettement (+)

Nombre de jours d'épuisement des recettes (-) ou de

désendettement (+) en 2016

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Des déséquilibres français en dépit d’une augmentation significative des recettes publiques Précisons qu’au global, la persistance de déficits publics et la dégradation de la position française par rapport au reste de l’UE est avant tout liée à la hausse des dépenses publiques. Elles sont passées de 44,9 % du PIB en 1978 à 56,4 % en 2016 (voir Graphique 5). Cela représente une hausse de 11,5 points. Cette augmentation n’a pas été linéaire, loin de là. Elle a été concentrée sur 4 périodes : 1978-1985 (+7 points), 1989-1993 (+5,6 points), 2007-2009 (+4,6 points) et 2011-2014 (+1,1 points). En parallèle, les recettes publiques ont augmenté significativement en France depuis des décennies par rapport au PIB. Elles sont passées de 43,2 % du PIB en 1978 à 53,0 % en 2016. Cela représente une hausse de 9,8 points. Cette augmentation a été concentrée sur 3 périodes, 1978-1985 (+5,8 points), 1992-1996 (+2,9 points) et 2010-2016 (+3,4 points). Cette dernière hausse est à l’origine du sentiment de « ras le bol fiscal », largement répandu dans la population française depuis plusieurs années. La persistance de déficits est donc due à une augmentation, encore plus rapide, des dépenses publiques par rapport aux recettes. Cette spirale a avant tout été entretenue par la montée en puissance de la sécurité sociale (hausse des dépenses et recettes de 7,4 points de PIB), des collectivités locales avec notamment les vagues de décentralisation (hausse des dépenses de 3,3 % et des recettes de 4,8 %). En revanche, les dépenses de l’État proprement dit n’ont quasiment pas augmenté en proportion du PIB depuis 1978 (+0,1 point). En parallèle, ses recettes ont diminué en relatif (-3 points de PIB), dans un contexte de captation plus grande des ressources par les organismes de protection sociale et les collectivités locales.

Le jour où les États de l’Union européenne ont dépensé toutes leurs recettes annuelles — 3ème édition Nicolas Marques, Cécile Philippe ● Novembre 2017 16

43,2%

53,0%

44,9%

56,4%

‐8%

‐7%

‐6%

‐5%

‐4%

‐3%

‐2%

‐1%

0%

40%

45%

50%

55%

60%

1978 1982 1986 1990 1994 1998 2002 2006 2010 2014

Graphique 5 : évolution des recettes, dépenses et besoins de financement des administration publiques françaises depuis 1978 en % du PIB 

Besoin de financement en % du PIB (échelle de droite)

Recettes des administrations publiques en % du PIB (échelle de gauche)

Dépenses des administrations publiques en % PIB (échelle de gauche)

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Depuis le début 2007, les recettes publiques ont augmenté très significativement, de 3,3 points de PIB, soit 3 fois plus que ce que l’on constate en moyenne dans l’UE (+1 point). Dans le même temps, les dépenses ont augmenté encore plus vite, de 4,2 % du PIB, 2 fois ½ plus vite que dans la moyenne de l’UE (+1,7 points). Bilan : le déficit public s’est accru, avec 3,4 % du PIB. Il se situe au-dessus de la moyenne de l’UE (1,6 % du PIB), en dépit d’une augmentation notable de la fiscalité (voir Graphique 6). Comme évoqué précédemment, ce décalage est principalement lié à la période d’« embellie » pendant laquelle la France a eu un comportement atypique par rapport au reste de l’UE. En phase de crise, les administrations publiques françaises évoluent en général de façon synchrone au reste l’UE, tout en restant plus dépensières. Mais elles se sont désynchronisées dans la dernière période de reprise, de 2013-2016 (voir Graphique 6). Les dépenses publiques françaises n’ont quasiment pas reflué (-0,4 % par rapport à 2012), alors qu’elles baissaient de façon significative dans l’UE (-2,6 % par rapport à 2012). La France a écourté prématurément la traditionnelle phase post-crise de réduction du poids des dépenses publiques. Cela explique pourquoi les dépenses publiques françaises n’ont quasiment pas baissé par rapport au pic de de 2009 (56,4 %, avec une baisse de -0,4 % par rapport aux 56,8 % de 2009). Dans le reste de l’UE, elles ont diminué 9 fois plus vite (à 46,3 %, avec une baisse de -3,7 % par rapport aux 50 % de 2009). Cette évolution décalée par rapport au reste de l’UE montre l’ampleur des enjeux, dans un pays prompt à stigmatiser une « austérité budgétaire », qui n’est pas une réalité française, et à sous-estimer les effets d’une « austérité fiscale » bien concrète.

Le jour où les États de l’Union européenne ont dépensé toutes leurs recettes annuelles — 3ème édition Nicolas Marques, Cécile Philippe ● Novembre 2017 17

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Des déséquilibres français qui ne sont pas associés à plus de bien-être Ajoutons que contrairement à une idée parfois mise en avant, le manque de rigueur dans la gestion étatique comme le haut niveau de dépense publique n’est pas nécessairement associé à un supplément de bien-être. Plusieurs indicateurs axés sur la qualité de vie montrent que la situation française n’est pas optimale. Les Nations unies classent la France en 21ème position sur 188 pays dans leur Indice de développement humain (IDH). Au sein de l’UE, 7 pays équilibrant mieux les comptes de leur administration centrale obtiennent de meilleurs résultats que la France. Il s’agit de l’Allemagne, du Danemark, des Pays-Bas, de l’Irlande, de la Suède, du Royaume-Uni et du Luxembourg (voir Graphique 7). Ces mêmes pays ont des dépenses publiques moindres (voir Graphique 8) que la France, tout en se voyant attribuer selon l’ONU un meilleur niveau de développement humain. Même son de cloche du côté de l’OCDE. Les données de Better Life attestent, elles aussi, de performances médiocres. La moyenne des différents critères proposés par l’OCDE positionne la France 18ème sur 38 pays étudiés. Au sein de l’UE, 10 États obtiennent de meilleurs résultats que la France tout en équilibrant mieux les comptes de leur administration centrale. Il s’agit des 8 pays cités précédemment auxquels s’ajoutent la Finlande et l’Autriche (voir Graphique 9). Tous ces pays obtiennent de meilleures performances avec des dépenses publiques moindres (voir Graphique 10). Tous ces éléments laissent à penser que le haut niveau de déficit de l’État et de dépenses publiques ne va pas de pair avec une offre plus attractive de services administrés. Il semble, au contraire, que les prestations publiques françaises ne soient pas « bon marché ».

Le jour où les États de l’Union européenne ont dépensé toutes leurs recettes annuelles — 3ème édition Nicolas Marques, Cécile Philippe ● Novembre 2017 18

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Lecture : Tous les pays au-dessus du trait horizontal gris ont, selon l’ONU, un Indice de développement humain plus élevé que la France. Les pays à droite de la ligne verticale grise ont un nombre de jours de dépenses non financées des administrations centrales moindre que la France.

Lecture : Tous les pays au-dessus du trait horizontal gris ont, selon l’ONU, un Indice de développement humain plus élevé que la France. Les pays à gauche de la ligne verticale grise ont des dépenses publiques en % du PIB moindres que la France.

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Lecture : Tous les pays au-dessus du trait horizontal gris ont, selon l’OCDE, un Indice Better Life plus élevé que la France. Les pays à droite de la ligne verticale grise ont un nombre de jours de dépenses non financées des administrations centrales moindre que la France.

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Lecture : Tous les pays au-dessus du trait horizontal gris ont, selon l’OCDE, un Indice Better Life plus élevé que la France. Les pays à gauche de la ligne verticale grise ont des dépenses publiques en % du PIB moindres que la France.

Le jour où les États de l’Union européenne ont dépensé toutes leurs recettes annuelles — 3ème édition Nicolas Marques, Cécile Philippe ● Novembre 2017 20

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Une récurrence des déficits inquiétante d’un point de vue économique et sociétal Certains pensent enfin qu’il ne faut pas s’inquiéter des déficits publics. Au-delà du débat économique très riche sur l’effet du recours à la dette (voir Encadré 1), l’État serait parfaitement dans son rôle lorsqu’il intervient de façon conjecturelle pour lisser le cycle ou de façon structurelle pour financer des projets qui ne pourraient pas être menés à bien par le privé. Conformément à la théorie des stabilisateurs « automatiques », chère à la tradition keynésienne, l’action publique exercerait un effet de lissage sur le cycle économique. En phase de récession, le montant des impôts recouvrés diminuerait, ce qui aurait pour effet de soutenir les revenus privés et d’atténuer les fluctuations négatives de la demande globale. À l’inverse, dans une phase d’expansion, les prélèvements fiscaux augmenteraient, ce qui contrebalancerait la croissance de la demande globale. Les données d’Eurostat montrent que ce n’est pas ce qu’on observe en France depuis 35 ans s’agissant de l’État. Elles attestent d’un déséquilibre durable de la situation française. Comme vu précédemment, les derniers équilibres connus pour l’État et les ODAC remontent à 1980. Depuis, tous les exercices ont été déséquilibrés. Au-delà des chocs liés aux à-coups conjoncturels, la situation s’est détériorée. En moyenne, « le jour où toutes les ressources sont consommées » a avancé de 1,5 jour par an depuis 1980. Aussi, si la conjoncture peut expliquer une partie des déficits, elle ne justifie en aucun cas l’absence de retour à l’équilibre depuis 35 ans. De même, il est fréquemment avancé que les déficits seraient une nécessité dans la mesure où ils permettraient de financer un regain d’investissement public. Une partie de l’endettement des administrations serait lié à la nécessité de préparer l’avenir, en finançant des projets qui ne pourraient pas être menés à bien par le privé. Cette analogie avec le comportement d’autres acteurs économiques n’apparait pas probante. Là encore, les données à disposition ne corroborent pas cette vision. D’une part, le patrimoine économique des administrations publiques françaises décline. Il a été divisé par 3 en valeur nette depuis 2007 (voir Graphique 11). Il est même devenu négatif si l’on intègre les engagements au titre des retraites de la fonction publique (voir Encadré 2). La réalité diffère donc de l’image de l’État bon investisseur. L’évaluation du patrimoine des administrations montre qu’elles créent de la dette pour financer les dépenses courantes, le contraire de ce que ferait un bon gestionnaire. Ajoutons que ces déficits ne coïncident pas avec une création de richesse plus rapide qu’ailleurs. La richesse globale par habitant progresse, en effet, sensiblement moins vite en France que dans le reste de l’UE (voir Graphique 12). Il est donc difficile d’affirmer que les déficits et l’accroissement de la dette sont le corollaire d’une politique d’investissement à long terme. Si les déficits français étaient associés à une création de richesses collectives, cela devrait se voir dans les chiffres. La valeur nette du patrimoine public ne devrait pas reculer et/ou le PIB par habitant devrait augmenter significativement à moyen terme.

Le jour où les États de l’Union européenne ont dépensé toutes leurs recettes annuelles — 3ème édition Nicolas Marques, Cécile Philippe ● Novembre 2017 21

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Encadré 1 : La dette publique, risque ou opportunité ? Keynes, Morgenthau, Lucas, Barro, Musgrave et bien d’autres économistes ont abondamment débattu des avantages et des inconvénients de la dette publique. Dans 3 controverses de la pensée économique, Travail, dette, Capital (Odile Jacob, 2016), l’économiste Jean-Marc Daniel synthétise les principaux arguments qui alimentent le débat autour de la dette publique. Il distingue dans la littérature économique 4 arguments majeurs en faveur de la dette publique : 1. Lorsqu’il s’agit d’augmenter la production, la dépense publique est plus efficace que la dépense

privée. Elle va permettre d’utiliser des sommes que les particuliers n’avaient pas envie d’utiliser. 2. Parce que la dépense publique a un impact positif prolongé sur la croissance, il est normal de la

financer par l’emprunt qui lisse le coût de la dépense dans le temps. 3. Le financement par l’emprunt de certaines dépenses publiques limite la ponction fiscale et évite

l’effet d’éviction de la dépense privée par la dépense publique. 4. Une situation financière qui conduit à un excédent d’épargne, dont la traduction économique

naturelle est un excédent de la balance des paiements courants, rend judicieux un recyclage de cette épargne grâce à l’emprunt public.

Il distingue, a contrario, 5 arguments majeurs à l’encontre de la dette publique : 1. L’investissement privé se révèle supérieur à un investissement public car lorsque l’entrepreneur

privé met son capital en jeu, il va y regarder à deux fois avant d’investir. En cherchant à favoriser avant tout son revenu personnel, il rendra un grand service au revenu global de son pays.

2. L’investissement public est moins efficace, car il n’encourt aucune sanction automatique. L’État peut annuler une partie de sa dette ou pratiquer l’inflation. Plus encore, la distinction entre le bon et mauvais investissement public se heurte à des difficultés de mesure faute d’accord sur ces notions.

3. L’effet d’éviction lié à la croissance de l’investissement public est permanent et inévitable. La montée en puissance de l’investissement public réduit les possibilités d’investissement privé, même dans un contexte de création monétaire supposée limiter l’éviction.

4. La création monétaire pour financer la dette publique a un effet d’éviction permanent, la hausse de l’endettement public entraînant presque automatiquement une hausse de l’épargne des ménages limitant ainsi l’effet de la dette publique sur la croissance.

5. La dette publique perturbe le fonctionnement des marchés financiers et le mode naturel de détermination des taux d’intérêt, si bien que cela va nuire aux flux d’épargne et d’investissement.

On peut encore ajouter à cela l’argument anti-redistributif. Comme l’avaient mis en avant Melon puis Ricardo, la dette publique génère un transfert de revenus dans la société. Certains en profitent – ceux qu’on désignait sous le terme rentiers ou ceux qui aujourd’hui détiennent de l’assurance vie en euros –, mais ce n’est pas le cas de tout le monde. La dette appauvrit comparativement ceux n’ayant pas de capacité d’épargne. Comme le souligne Jean Marc Daniel, « C’est pour cela qu’au XIXème siècle les partis de gauche réclamaient l’équilibre budgétaire au nom de la nécessité de protéger les pauvres des générations futures. Paradoxalement, aujourd’hui, surtout en France, l’héritage keynésien fait de certains économistes qui se réclament de la gauche des défenseurs systématiques de la relance par la dépense publique et l’endettement. »

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Encadré 2 : En France, le patrimoine économique national est-il encore positif ? La dernière analyse du patrimoine économique national produite par l’INSEE (décembre 2016) évalue le patrimoine des administrations à 147 % du PIB. Les administrations sont propriétaires d’une multitude d’ouvrages de génie civil (routes, ports, aéroports, etc.), de terrains, de logements, de machines et d’équipements et aussi de titres financiers. Pour calculer le patrimoine net, il convient de déduire le passif financier et notamment les dettes publiques, soit 135 % du PIB. Aussi, la richesse des administrations françaises équivaut, in fine, à 12 % du PIB. Ce chiffre est en forte baisse. Il n’a jamais été aussi faible sur les 20 dernières années et a été divisé par près de 5 depuis 2007 (voir Graphique 11). Ajoutons à cela que la réalité est encore pire puisque le patrimoine des administrations est calculé par l’INSEE sans prendre en compte tous les engagements publics. Il n’intègre pas les promesses faites au titre des retraites des fonctionnaires et assimilés. Selon la Cour des comptes, ces promesses représentaient 76 % du PIB en 2014. Dès lors, le vrai patrimoine net des administrations est négatif avec une valeur équivalente à -64 % du PIB.

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58%

12%

‐150%

‐100%

‐50%

0%

50%

100%

150%

1995 1996 1997 1998 1999 2000 2001 2002 2003 2004 2005 2006 2007 2008 2009 2010 2011 2012 2013 2014 2015

Graphique 11 : évolution du patrimoine des administrations publiques (en 

% du PIB)

Actifs administrations publiques

Passifs financiers administrations publiques

Valeur nette patrimoine administrations publiquesSource : INSEE et calculs IEM

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89%

87%

82%

77%

71%

63%

60%

54%

38%

36%

29%

27%

27%

27%

25%

25%

21%

20%

19%

18%

17%

17%

14%

13%

6%

5%

3%

‐2%

‐18%

‐25% 0% 25% 50% 75% 100%

Bulgarie

Roumanie

Lituanie

Slovaquie

Malte

Lettonie

Estonie

Pologne

République tchèque

Irlande

Allemagne

Hongrie

Suède

Luxembourg

Slovénie

Autriche

Belgique

Finlande

Croatie

UE

Pays‐Bas

Danemark

France

Portugal

Espagne

Italie

Royaume‐Uni

Chypre

Grèce

Graphique 12 : Croissance du PIB par habitant sur 10 ans dans les différents pays de l'UE (cumul de 2006 à 2016)

Source : Eurostat, série prix courants, euros par habitant, PIB au prix du Source : Eurostat, série prix courants, euros par habitant, PIB au prix du marché. 

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GLOSSAIRE L’administration centrale comprend tous les organismes administratifs de l’État et les autres organismes centraux dont la compétence s’étend normalement sur la totalité du territoire économique d’un pays donné, à l’exception des administrations de sécurité sociale. Il s’agit en France des administrations publiques centrales (APUC), notion qui regroupe l’État et ses services déconcentrés ainsi que les organismes divers d’administration centrale (ODAC). Cette dernière catégorie rassemble les agences de l’État dotées de la personnalité morale (par exemple les universités ou Pôle emploi). Une administration d’État fédéré est une unité institutionnelle autonome exerçant certaines fonctions d’administration à un niveau inférieur à celui de l’administration centrale et supérieur à celui des unités institutionnelles d’administration locale, à l’exclusion des administrations de sécurité sociale. Cette notion a un sens dans 4 pays de l’UE. Les administrations locales recouvrent tous les types d’administrations publiques dont les compétences ne couvrent qu’une partie du territoire économique, à l’exception des antennes locales des administrations de sécurité sociale. Il s’agit en France des administrations publiques locales (APUL), notion qui regroupe l’ensemble des collectivités territoriales (régions, départements, communes et leurs établissements publics de coopération intercommunale) et divers organismes d’administration locale (par exemple des collèges et lycées ou les chambres consulaires). Une administration de sécurité sociale est une unité institutionnelle centrale, locale ou d’un État fédéré dont l’activité principale consiste à fournir des prestations sociales et qui répond aux deux critères suivants : Certains groupes de la population sont tenus de participer au régime ou de verser des

cotisations en vertu des dispositions légales ou réglementaires (à l’exception de celles s’appliquant aux salariés du secteur public) ;

Indépendamment du rôle qu’elles remplissent en tant qu’organismes de tutelle ou en tant qu’employeurs, les administrations publiques sont responsables de la gestion de ces unités pour ce qui concerne la fixation ou l’approbation des cotisations et des prestations.

En France, les administrations de sécurité sociale (ASSO) regroupent les hôpitaux et l’ensemble des régimes de sécurité sociale (régimes de base de sécurité sociale et régimes spéciaux) ainsi que les régimes de retraite complémentaire et l’assurance chômage.

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PRÉCISIONS SUR LES DONNÉES Cour des Comptes (2016) — Les pensions de retraite des fonctionnaires, des évolutions à

poursuivre — Octobre 2016 — 197 pages.

Eurostat (2017) — Série annuelle « Principaux agrégats des administrations publiques, y compris recettes et dépenses » [gov_10a_main] en millions d’euros, données mises à jour le 23 octobre 2017.

INSEE (2016) — Le patrimoine économique national en 2015, un modeste rebond — Insee Première n°1626 décembre 2016 — 4 pages.

OCDE (2016) — Better Life — Données extraites du site www.oecdbetterlifeindex.org le 1er juillet 2017.

Programme des Nations Unies pour le développement (2016) — Présentation Rapport sur le développement humain 2016 — 312 pages.

PRÉCISIONS SUR LES CALCULS Le calendrier des jours où les Administrations centrales de l’Union européenne ont dépensé toutes leurs recettes annuelles est construit en divisant le total des recettes des administrations publiques centrales par le total des dépenses des administrations publiques centrales. Le résultat est multiplié par 365 et on y soustrait 365, pour exprimer les dérapages financiers en jours sur une année et calculer la date où l’État a tout consommé. Cette méthode s’apparente aux usages financiers, les analystes ayant par exemple l’habitude de présenter le Besoin de fonds de roulement (BFR) en jours de chiffre d’affaires. Elle présente aussi l’avantage d’être significative pour tout individu s’étant demandé comment « boucler ses fins de mois ». Les calculs sont faits à partir de la série gov_10a_main publiée par Eurostat au titre de 2016 et des années précédentes, avec les lignes « Total des recettes des administrations publiques » (TR) et « Total des dépenses des administrations publiques » (TE). Les données trimestrielles disponibles au titre des 1er et 2ème trimestres 2017 n’ont pas été utilisées. La série « Comptes non-financiers trimestriels des administrations publiques » (gov_10q_ggnfa) ne permet pas d’isoler les dépenses de toutes les administrations centrales de l’UE.

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De même les données produites dans le cadre des processus nationaux ne sont pas utilisées. L’hétérogénéité des modes de présentation rend, en effet, impossible toute comparaison au niveau de l’UE. Ce choix méthodologique génère un calcul défensif à minima pour la France. L’utilisation des données publiées dans le cadre des Loi de Finances françaises aurait conduit à extérioriser un nombre de jours où l’État a dépensé toutes ses recettes, encore plus important. Eurostat comptabilise des transferts en faveur d’autres administrations. Cela majore les dépenses comme les recettes, et minore le nombre de jours de dépenses non financées.

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Administration centrale française. Nombre de jours où les recettes sont épuisées. 2014 2015 2016 2017 2017 2018

Calcul IEM à partir des données Eurostat -53 -54 -55 Vision alternative Loi de Finances -83 -70 -67 -66 -73 -78 Type de loi Exécution Exécution Exécution LFI Révisé PLF

Dépenses (milliards €) 2014 2015 2016 2017 2017 2017 Calcul IEM à partir des données Eurostat 495,8 503,3 509,8 Vision alternative Loi de Finances 374,0 366,7 376,2 381,6 384,8 386,3

Déficits (milliards €) 2014 2015 2016 2017 2017 2017 Calcul IEM à partir des données Eurostat -72,3 -74,5 -76,4 Vision alternative Loi de Finances -85,5 -70,6 -69,1 -69,3 -76,5 -82,9

Recettes (milliards €) 2014 2015 2016 2017 2017 2017 Calcul IEM à partir des données Eurostat 423,5 428,8 433,4 Vision alternative LF (yc comptes spéciaux) 288,5 296,1 307,1 312,3 308,3 303,4

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CONTACT POUR TOUTE QUESTION OU INTERVIEW Cécile Philippe, directrice générale : [email protected] Nicolas Marques, chercheur associé : [email protected] MISSION DE L’IEM L’Institut économique Molinari (IEM) est un organisme de recherche et d’éducation dont la mission est de favoriser la liberté et la responsabilité individuelles. L’Institut entend faciliter les changements, en suscitant un débat autour des idées reçues génératrices de statu quo. Il vise à stimuler l’émergence de nouveaux consensus en proposant une analyse économique des politiques publiques, en illustrant l’intérêt de l’échange, ou en montrant l’intérêt de réglementations et de fiscalités plus clémentes. L’IEM est une organisation à but non lucratif financée par les cotisations volontaires de ses membres : individus, entreprises ou fondations. Affirmant son indépendance intellectuelle, il n’accepte aucune subvention publique. www.institutmolinari.org

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