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DIMAKI Angeliki EXPLORATION ARCHÉOLOGIQUE DE DÉLOS LE DÔDÉKATHÉON E. WILL | 1955

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DIMAKI Angeliki

EXPLORATION ARCHÉOLOGIQUE DE DÉLOS

LE DÔDÉKATHÉONE. WILL | 1955

Avant-propos

Le présent travail est une analyse basée sur la publication redigée par Er-nest Will et publiée en 1955 à Paris concernant la restitution du temple des Douze Dieux [Dôdékathéon] à l’île de Délos.

SOMMAIREI | PRÉSENTATION GÉNÉRALE

II | ANALYSE

[Ernest Will, biographie]

Situation du temple

Historique des fouilles et identificationDatation

Le format du texte | Les illustrations Le contenu | le parcours de la restitution

introduction

l’assemblage des blocs

caractère du temple | datation

observations finales

placement du temple dans le sanctuaire et dans l’histoire

le soubassement

la colonne

l’entablement

les murs

l’élévation interne

DPEA Session 2012-2013

DPEA Session 2013 | DIMAKI Angeliki 7

Situation du temple

Le site archéologique de Délos consiste en deux grands ensembles-sanctuaires. Le sanctuaire d’Apollon au Sud vers le port sacré et le sanctuaire de Létô au Nord à côté du lac sacré. Ces deux ensembles sont séparés par une avenue d’une largeur moyenne de 20 mètres qui traverse le site d’Est en Ouest et qui obtient une largeur plus faible vers son bout Ouest. Elle continue à se prolonger contre le téménos d’Apollon mais elle est limitée au Nord par le Dôdékatheon, un sanctuaire qui se trouve entre le Létôon, le Monument de granit et l’Agora des Italiens.

Le Dôdékatheon consiste en un temple dorique et une série de bases et d’autels située devant le temple. E. Will nous informe qu’il ne reste plus en place que le soubassement du temple et les fondations des bases et des autels tandis que l’enceinte [réduite à une assise de fondation] était difficile à distinguer.

01 Agora of the Competialists02 Sacred Way03 Stoa of Philip V04 South Stoa05 Agora of the Delians06 Southwest Propylaea07 Oikos of the Naxians08 Early building

09 Temple of Apollo10 Temple of the Athenians11 Poros Temple12 Tressuries13 Stoa of the Naxians14 “Keraton”15 Temple of Artemis16 Monument of the Bulls

17 Stoa of Antigonus18 Agora of the Theophrastus19 “Hypostyle Hall”20 Temple of the Twelve Gods21 Temple of Leto22 Agora of the Italians23 Terrace of the Lions24 Sacred lake

fig.1: Délos, le site archéologique

I | PRÉSENTATION GÉNÉRALE

EXPLORATION ARCHÉOLOGIQUE DE DÉLOS LE DÔDÉKATHÉON | Ernest Will8

Historique des fouilles et identification

La première référence à l’ensemble a été faite par Th. Homolle en 1885. Dans son rapport, Homolle décrit que le temple « est situé au milieu d’une large plaine et entouré des petits édifices ou piédestaux, tantôt rasés jusqu’au sol, tantôt en partie conservés. Sur l’un d’eux on lit l’inscription ΑΘΗ]ΝΑΣ ΔΙΟΣ ΗΡΑΣ. Ils se divisent en deux groupes, l’un voisin du temple, l’autre adossé au mur extérieur de la schola des Italiens, entre lesquels un large passage est ménagé ». Ensuite, partant de la découverte de deux statuettes d’Asclépios et des fragments dans les ruines, mais aussi par la référence fréquente de l’Asclépieion au Comptes déliens, il attribue le monument au culte d’Asclépios.

A l’époque de la grande fouille [début du 20ème siècle] G. Leroux en réétu-diant toute cette zone a dégagé complètement les ruines et il les a laissées à l’état où E. Will les avait trouvées en 1955. En même temps, l’architecte J. Replat a relevé le monument et les pièces qui en proviennent en procurant un plan de base à E. Will qui utilise ce plan dans son publication. En 1929, R. Vallois dans son analyse vaste de la topographie de toute la région Nord-Ouest de la plaine délienne fait une identification différente du monument. En apportant des arguments décisifs qui reposent sur des in-dications fournies par les Inventaires et les Comptes et sur l’importance du groupe d’autels réunis devant le temple, il propose l’attribution du temple au Douze Dieux. Cette analyse de R. Vallois est utilisée par E. Will dans son étude comme un exemplaire.

Datation

Une fois le complexe identifié et attribué au Douze Dieux, la datation au moins du temple devient relativement facile à travers les mentions aux Comptes et aux Inventaires. La mention la plus ancienne, celle du Compte de Cléostratos date de 282 avant JC. Une série des mentions aux réparations apparaissent jusqu’à 179 avant JC.

DPEA Session 2013 | DIMAKI Angeliki 9

fig.2: Le Dôdékathéon et ses environs

EXPLORATION ARCHÉOLOGIQUE DE DÉLOS LE DÔDÉKATHÉON | Ernest Will10

Le format du texte | Les illustrations

La publication se compose d’un seul volume suivi d’un dossier contenant des photos et les plans généraux de la restitution. En ce qui concerne la forme du texte, la mise en page et la distinction des chapitres et des sous-chapitres est très propre et nette. La lecture est facile et agréable. Les illustrations utilisées par E. Will sont séparées dans deux groupes : Les illustrations incorporées au texte et celles inclues dans un dossier à la fin de la publication. Au fil du texte on rencontre tous les relevés et quelques dessins de restitution. Le reste des dessins de la restitution se trouvent dans le dossier complémentaire ainsi que des photographies. Cela cause une certaine confusion au lecteur, mais le fait que la plupart d’illustrations se trouvent au fil de texte rend en général la lecture fac-ile. D’autre part, quelques blocs architecturaux sont mentionnés dans plu-sieurs parties du texte et il faut les chercher dans les pages précédentes.

Pour ma propre commodité, j’ai fait une table de tous les relevés des blocs architecturaux, afin que je ne perde pas de temps à rechercher dans la pub-lication.

Les relevés sont toujours mélangés avec des dessins de restitution. Cela rend difficile la distinction entre la partie scientifique de l’étude du bâ-timent [constituée par des données] et la partie de la proposition de sa restitution [construite à partir des hypothèses fondées sur des données].

II | ANALYSE

fig.3: tableau de relevés des blocs

DPEA Session 2013 | DIMAKI Angeliki 11

On peut noter d’autres négligences sur le choix et l’incorporation des il-lustrations. Souvent, il n’y a aucun rapport entre le bloc relevé et le bloc restitué. L’auteur nous fournit des informations et des détails sur un bloc mais ensuite il nous présente la restitution sur un autre bloc. Par exemple, comme il explique sa logique sur la restitution du larmier il présente le relevé du bloc 128 [fig.13, page 45] avant de restituer les blocs 126 et 127 [fig.14, page 47]. Or, le bloc relevé a une ordonnance différente de celle des autres blocs.

Parfois, les dessins de la restitution précédent le relevé. Une logique spécifique de description des éléments est suivie dans tous les chapitres. Par exemple, dans le chapitre V la première image vue par le lecteur est celle du mur restitué de l’angle Sud-Ouest, sans être au préalable présenté les moyens utilisés pour construire ses hypothèses et les fragments archi-tecturaux retrouvés qui mènent à cette proposition.

Des petites différences entre les dimensions indiquées sur les dessins et ceux trouvées dans le corps du texte ainsi que le manque quelquefois de numérotation des blocs rendent la compréhension du texte assez pénible. Il faut prêter grande attention à chaque détail pour qu’on puisse faire la concordance entre les blocs présentés et les blocs décrits.

Une autre chose qui ne facilite pas l’étude de la monographie est que sou-vent les blocs relevés sont très nombreux dans une seule page [fig.33, page 89]. Cela cause du mal à la distinction et l’identification de chaque bloc. Le but des relevés est de permettre à ceux qui n’ont pas visité le site d’avoir une image aussi proche que possible de la réalité, de sorte qu’ils

fig.4: relevé du bloc du larmier 128 et restitution des blocs du larmier 126, 127

fig.5: relevés de 7 blocs dans la même page [page 89 de la publication]

EXPLORATION ARCHÉOLOGIQUE DE DÉLOS LE DÔDÉKATHÉON | Ernest Will12

puissent suivre le chemin de la pensée de l’auteur. Ce type de présentation, au lieu de rendre plus claires aux lecteurs les observations de l’auteur, est fatigant en raison de l’effort que l’on doit payer.

Les plans généraux de la restitution [plan général, élévations et coupes du bâtiment] se trouvent à la fin de la publication dans le dossier séparé. Cependant, le fait que l’auteur décide de diviser les dessins de la res-titution en deux groupes, pendant qu’il se réfère également aux illustra-tions imbriquées et à ceux isolées, est étonnant. De cette façon, des fois

DPEA Session 2013 | DIMAKI Angeliki 13

on trouve le dessin en parallèle de la lecture et d’autres on est obligé à consulter le dossier à la fin de la monographie. Par conséquent, cette divi-sion ne sert qu’à séparer les détails de la restitution des plans restitués généraux [c’est vrai que les plans généraux sont mentionnés dans plus d’un chapitre et c’est peut-être l’explication de la division ci-dessus].

Quant à la qualité des illustrations, les relevés des blocs sont assez dé-taillés. Ils présentent explicitement les caractéristiques de chaque bloc en rendant assez apparents les niveaux et les surfaces qui le composent. Les traces de scellement [traces des goujons, crampons...] sont illustrées avec grande intensité, mais parfois on manque certaines dimensions. Les plans de restitution sont très schématiques, sans valeur esthétique partic-ulière. Ils Mettent l’accent sur l’assemblée des blocs en laissant de côté les textures et les détails. Les textures des matériaux sont représentées seulement s’il est nécessaire ou important pour l’assemblage.

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Le contenu | le parcours de la restitution

INTRODUCTION

La restitution du temple est présentée selon la logique ci-dessous:

1/ PRESENTATION ET SITUATION DU TEMPLE2/ ASSEMBLAGE DE BLOCS3/ CARACTERE DU TEMPLE | DATATION4/ PLACEMENT DU TEMPLE DANS LE SANCTUAIRE ET DANS L’HISTOIRE

1

2

3

4

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L’ASSEMBLAGE DE BLOCS

Avant toute analyse sur la restitution proposée on doit d’abord noter que l’auteur afin de compléter les insuffisances de la documentation met en val-eur un système modulaire. Le module est la foulée des degrés de la krépis [0,33 mètres], qui représente le pied de Philétairos. Cette méthode lui permet de retrouver la façon dont l’architecte a fixé les dimensions essen-tielles. Malheureusement, il semble parfois piégé dans sa même hypothèse et même si les indices ne confirment pas cette méthode il va aussi loin que de donner aux blocs des côtes qui y répondent.

Le temple repose sur une assise de granit pas bien profondément fondée sur le sol. Cette assise [l’euthyntéria] est la seule qui reste entièrement en place. A partir d’un bandeau qui court tout au long de ses côtés et d’une hypothèse faite par l’auteur on peut tout de suite retrouver le niveau antique de la cour. E. Will suppose, à cause des irrégularités observées aux dimensions de ce bandeau, qu’il était apparent au-des-sus du sol antique. La pente légère de Nord en Sud masque certaines parties de l’assise au Nord en même temps qu’à l’Ouest une mou-lure particulière est créée à l’arête su-périeure de la même assise.

Des degrés de marbre au-dessus de l’assise de l’euthynteria, il reste en place 3 dalles courantes du côté Sud, 2 dalles des angles Sud-Ouest et Nord-Ouest pour le premier de-gré et 2 dalles du côté Sud pour le deuxième degré. Du troisième degré, celui du stylo-bate, il ne reste rien.

La restitution du soubassement est assez assurée comme les blocs sont chargés des indices matériels. Il est plus que certain

que le krépis comprenait trois degrés. Les traces sur les dalles existan-tes marquent la position des blocs au-dessus. L’auteur donc en mesurant le retrait de chaque assise nous donne les dimensions générales de la krépis et de ses degrés. Le premier degré de la krépis mesure 9,90 m. de largeur et 16,50 m. de longueur.

Ensuite, E. Will étude les trous de pince et les cavités de scellements

^ Le soubassement

EXPLORATION ARCHÉOLOGIQUE DE DÉLOS LE DÔDÉKATHÉON | Ernest Will16

Après la restitution du stylobate l’auteur continue avec l’implantation des colonnes. En ne présentant aucun raisonnement, malgré le fait qu’aucun élément du stylobate n’est conservé -donc sans indices matériels- il décide d’adopter une méthode classique. En plus, sans avoir au préalable recouru aux parallèles, par exemple aux autres temples de la même époque à Délos où on rencontre une disposition pareille, il place l’axe de chaque colonne à l’aplomb du joint du deuxième degré de la krépis.

Ensuite, il passe rapidement à certains calculs concernant la contraction de rive. Il utilise le diamètre moyen des tambours I et la restitution des antes et des angles [pas encore établie] comme preuve de son proposition. La référence au nombre 34 [le rayon de la colonne => 68 cm le diamètre] qui est indiqué sans explication, et le fait que l’auteur ne parle en détail des tambours qu’après quelques pages, causent de confusion au lecteur.

En tout cas, E. Will continue avec la description morphologique de la col-onne comme il en résulte de l’étude des 41 tambours retrouvés au site. Con-trairement à son proposition sur l’emplacement des colonnes, le calcul de la hauteur et la répartition des tambours suivent une logique qui peut être fragile, mais au moins la succession de raisonnement est compréhensible.

Le premier élément qui lui permet d’établir les séries de tambours est le diamètre. A travers cette dimension, facile ou difficile à mesurer dans la plupart de blocs, cinq catégories sont distinguées [page 26]. On observe que sur chaque série le diamètre varie [63-60, 61-58, 59-56, 58-52, 53-50 cm]. Cependant la classification demeure distincte. Ensuite, la hauteur des tambours est examinée. Il existe une corrélation entre le diamètre et la hauteur des tambours mais pas assez forte pour consolider la séparation ci-

laissés sur les blocs de l’euthynteria et de la krépis et placés en inter-valles réguliers. Il mesure les dalles existantes aux angles et finit par restituer les dalles de la krépis. Sur le côté court du premier degré les deux dalles angulaires mesurent 1,65 m. de long. Il relève la trace de qua-tre dalles intermédiaires. Il restitue donc six dalles de 1,65 m. De la même façon il restitue les dalles du côté long. Pour le deuxième et le troisième degré de la krépis il propose un dispositif basé sur les mesures faites en place qui semble assez crédible. Une observation importante est que chaque dalle est divisée exactement en son milieu par les dalles de l’assise su-périeure. Cette remarque va être ensuite utilisée comme une référence pour la restitution d’autres éléments du bâtiment. La proposition est bien fondée grâce aux blocs encore en place et au grand nombre d’indices matériels que ceux-ci fournissent. Le processus est décrit en détail en même temps que le relevé de l’état actuel de l’angle Sud-Ouest [fig.4, page 21] indique clairement clairement la relation entre les indices et les blocs architecturaux.

^ La colonne

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dessus. Plus la hauteur est réduite plus le diamètre est diminué ; C’est la tendance générale. Néanmoins, ce n’est que dans une seule catégorie [IV] où la différenciation est assez notable. Il n’y a donc qu’un élément sup-plémentaire qui peut contribuer à la restitution.

Ce n’est que des « dispositifs secondaires » qui, en combinaison avec ce qui précède, conduisent à la restitution de la hauteur. 1. Les lits intermédiaires portent tous deux cavités de scellements disposés sur un même diamètre et espacés soit de 35 cm soit de 25-30 cm en moyenne. 2. Un certain nombre de tambours portent au creux des cannelures des trous circulaires d’environ 3 cm de diamètre et au fond desquels des restes de fer sont trouvés. La distance de ces trous du lit d’attente est presque la même [0,20 m] dans tous les tambours.

A partir de ces deux observations et de la classification du tableau, E. Will présent une série de raisonnements avant de conclure à son hypothèse finale. Principalement, il soutient que les trous mentionnés ci-dessus font partie de la fixation pour une grille et de plus que ces tambours appartiennent aux séries II et IIa quand l’un d’entre eux est sûrement un tambour II. Il argue finalement qu’il y a seulement quatre séries de tambours et que par conséquence le fût de la colonne consiste en quatre tambours.

Il calcule ensuite la hauteur de la colonne en ajoutant la moyenne de chaque série des tambours et la moyenne de la hauteur des chapiteaux. Le résultat est 4,603 m. Pour assurer et vérifier le nombre ci-dessus, l’auteur donne un argument additionnel ; On connait que la plu-part de blocs courants des murs de la cella trouvés mesurent 0,33 m. de hauteur. Si on suppose que les murs consistent de 14 assises on obtient le chiffre 4,62 m. Il admet finale-ment que, comme la différence entre les deux chiffres est minime [1,7 cm], la colonne ai-nsi que les murs de la cella mesurent 4,62 m.

E. Will utilise essentiellement des rai-sonnements fondés sur des indices matériels [mesures, traces de scellements]. Cela nous permet de suivre facilement jusqu’à un point le parcours de sa pensée sur cette resti-tution. L’établissement du tableau, où les mesures des tambours sont registrées, est un exemple de pensée organisée. Mais ensuite il introduit den chiffres et des éléments en-core inconnus au lecteur [les blocs courants des murs, la grille] et bien qu’il fasse des recours aux parallèles [le petit temple de Sérapiéion C, page 38] il ne présente pas de dessins ni de photos ni d’informations sur ce temple afin de faciliter la compréhension et de renforcer ses arguments.

fig.6: relevé du châpiteau d’angle 90

EXPLORATION ARCHÉOLOGIQUE DE DÉLOS LE DÔDÉKATHÉON | Ernest Will18

Pour l’assise de l’architrave on ne possède que des indices indirects. Des indices comme ceux trouvés sur le lit d’attente des chapiteaux ainsi que les cavités des scellements conduisent E. Will à restituer une double ar-chitrave [architrave et contre-architrave]. Pour les dimensions des blocs de l’architrave il utilise comme un élément clef le chapiteau d’angle de la cella [bloc 90, fig. 28, page 79] qui porte à son lit d’attente un trait de repère, le divisant presque en son milieu. Il croit que cela indique l’axe de la colonne d’angle et à partir de cela il restitue l’épaisseur de l’architrave qui ne dépasse pas les 60 centimètres. Pour la hauteur il expliquera dans un prochain chapitre [elle est étudiée avec l’élévation interne du temple] comment il adopte le chiffre 41,25 cm.

La restitution très vite et sans illustrations [le relevé du bloc 90 se trouve au prochain chapitre et les côtes référées dans le texte n’y sont pas indiquées] ne nous permet pas de bien comprendre la logique de l’auteur. La documentation insuffisante et les raisonnements faibles manifestent une analyse lâche d’un auteur qui veut aller vite aux parts du bâtiment qui fournissent plus de données.

^ L’entablement

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Ensuite, il s’occupe de la frise dont 12 blocs sont conservés. Ces blocs groupent toujours une métope et un triglyphe et parfois des combinaisons comme p.ex. un triglyphe com-pris entre deux métopes etc. Tous les blocs sont en très mauvais état.

L’auteur a du mal à faire une restitution finale pour cette assise à cause du grand nom-bre de variations aux dimensions des blocs et du système des scellements qui n’est pas uniforme. Il explique que cela peut être le résultat d’un travail lâche ou que les dif-férentes dimensions sont en relation avec la place des blocs dans la frise. Ce qui précède, combiné avec le manque d’indices matériels aux blocs des assises inferieures et supérieures, conduisent à la proposition des arrangements possibles des blocs mais pas à une restitution sûre.

Au-dessus de la frise on rencontre l’assise du larmier. Il en subsiste onze pièces dont seulement trois conservent leur configuration primitive et offrent des informations sur la partie du larmier dont ils font part. L’auteur décrit les blocs trouvés et puis leur dispositif général. Bien qu’il dise que

chaque pièce du larmier courant comprend deux plaques de mutules et deux canaux, le bloc qu’il choisit de nous présenter [bloc 128, fig. 13, page 45] ne suit pas la disposition décrite ci-dessus.

Les blocs présentent des variations à leurs dimensions ; les mutules et les canaux montrent des variations d’environ 2 cm. Il soutient donc que les blocs du larmier sont en relation absolue avec les blocs de la frise ou les triglyphes et les métopes présentent des variations pareilles.

Son raisonnement sur la restitution de cette assise démarre par le bloc 128 qui porte seulement une plaque de mutules entre deux canaux. Il pose ce bloc au milieu d’un des longs côtés sans présenter d’indices matériels ; il simplement dit que cela semble vraisemblable. Ayant cela comme point de départ et en acceptant l’alternance régulière de canaux et mutules un agencement indicatif est proposé. La restitution du larmier latéral est complétée par l’étude du bloc d’angle [bloc 130, fig. 15, page 49]. Ce bloc montre à l’angle un canal et une plaque de mutules. A son avis, cette plaque se trouve au-dessus du triglyphe d’angle. Afin que la métope d’angle soit couronnée par le même bloc, il donne à ce bloc une longueur suffisante soit la succession canal-mutules… Cette proposition arbitraire n’est basée que sur les blocs correspondants du Temple des Athéniens et du Grand Temple [recours aux parallèles].

fig.7: Bloc du larmier [128] et bloc de la frise [116]. La relation entre les cavités de goujons aux lits d’attente de blocs de la frise et la largeur des canaux de blocs du larmier

EXPLORATION ARCHÉOLOGIQUE DE DÉLOS LE DÔDÉKATHÉON | Ernest Will20

La décision d’attribuer à la pièce d’angle cette disposition particulière est très cruciale pour la suite de la restitution de l’assise. Tous les calculs sont désormais basés sur cette pièce, à partir de laquelle il res-titue le larmier frontal ainsi que le larmier rampant.

Une confirmation générale de la disposition peut être faite par les scelle-ments que portent les blocs de la frise mais la façon dont ce raisonnement est présenté et illustré n’est pas convainquant. Il dédie seulement un pe-tit paragraphe aux indices matériels trouvés sur le lit d’attente des blocs de la frise et l’indication qui est marquée est la relation de l’emplacement des cavités de goujons avec la largeur des canaux de blocs du larmier.

La restitution du chêneau qui suit semble assurée et bien documentée. Bien que la plupart de blocs conservés de cette assise soient des fragments, leur forme générale, les cavités de scellements et les dimensions qui peu-vent être mesurées sont suffisants afin que l’assise soit restituée avec une grande certitude.

L’attribution des fragments aux différents côtés du temple est le premier pas. Il attribue les fragments qui portent des têtes des lions qui font office de gargouilles au chêneau latéral. Bien que cette attribution est vérifiée aussi par d’autres indices [dimensions des blocs], elle est plau-sible comme elle suit la logique de construction. Les gargouilles sont tou-jours trouvées au fond de la toiture en raison du rôle qu’ils jouent dans l’enlèvement de l’eau. La distinction donc des blocs était facile.

Le bloc d’angle du larmier [bloc 130, fig. 15, page 49] joue un rôle clé à cette restitution également parce qu’il donne l’inclinaison du chêneau rampant ainsi que celle du chêneau latéral. On aperçoit comme ça les deux systèmes différents utilisés pour établir la transition entre les assises à lits horizontaux et l’inclinaison de la toiture.

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D’abord on est informé sur la quantité de blocs des murs retrouvés dont la plupart proviennent du mur latéral Sud. Ainsi on a:

Et ensuite l’auteur nous fournit les mesures des pièces ordinaires et donc la longueur théorique moyenne. Cette longueur est plus ou moins 82 cm, mais il accepte le chiffre 82,5 cm qui est la moitié d’une des dalles de la krépis. C’est le résultat de son constant es-saie de retrouver le module de la construc-tion. La hauteur des blocs est uniformément de 33 cm. Enfin, il ne donne aucune information sur l’endroit où les blocs sont trouvés. Donc, on ne connait pas comment ils ont distingués d’autres blocs appartenant aux édifices voi-sines. La restitution des murs est présentée gradu-ellement. Il commence avec les antes et les angles, il continue avec les murs latéraux et le mur de fond et il conclue avec le mur de

- 12 blocs, antes ou pilastre d’angle Sud-Ouest

- 39 parpaings 5 pièces de largeur particulièrement forte 13 pièces à décrochement 21 pièces de dimensions et formes normales

- 82 carreaux 58 pièces courantes 24 pièces de dimensions insolites

^ Les murs

refend au pronaos. Il suit une logique de présentation de l’extérieur à l’intérieur. Ce parcours est interrompu par la restitution de départ des murs de tout l’édifice.

Concernant l’implantation des antes et des angles la plupart des données proviennent du soubassement. Des mesures qui peuvent être effectuées à la côté Ouest du temple [distance entre le toechobate du mur de fond encore en place et le bord du stylobate] en combinaison avec une hypothèse faite par l’auteur conduisent d’abord à l’implantation des amorces des murs. E. Will admet ici qu’il a tenu compte [comme pour l’implantation des colonnes] du joint du 2ème degré de la krépis.

La restitution des murs est donc basée sur deux hypothèses principales: 1. La côté Est du temple [côté du pronaos] est construite selon un dispositif

EXPLORATION ARCHÉOLOGIQUE DE DÉLOS LE DÔDÉKATHÉON | Ernest Will22

symétrique à celui de la façade Ouest et 2. L’axe médian du pilastre exté-rieur des antes et des angles coïncide avec le joint du 2ème degré de la krépis [l’entraxe préserve la même valeur].

L’auteur donne deux arguments afin de soutenir ses hypothèses: D’abord qu’on ne pourrait pas placer une colonne en retour sur les longs côtés sans supprimer complètement les antes et puis que l’hypothèse d’un entraxe de valeur particulière entraînerait des graves difficultés pour l’organisation de la frise au-dessus. Ces arguments ne sont pas basés aux indices matériels retrouvés aux blocs ou au soubassement. Ils sont des allégations arbitrai-res mais logiques qu’il va ensuite essayer les justifier.

Les blocs d’ante et d’angle vont de suite paraître très utiles au calcul de fruit et à la structure des murs. Ces blocs ainsi que le bloc d’orthostate d’ante [bloc 100, fig.29, page 79] fournissent pleins d’indices que révèlent avec une grande certitude la diminution des murs. Par exemple la pièce 55 [le relevé est absent] est attribuée à cause de sa forme à l’angle Sud-Ouest et plus précisément à la 7ème assise. Sa face antérieure est creusée d’une cavité carrée dont l’emplacement peut correspondre aux trous de grille de la colonnade. On connait déjà que ces trous se trouvent adaptés sur les tam-bours un peu au-dessous du niveau supérieur de la 7ème assise des murs. La combinaison avec le bloc d’orthostate nous fournit immédiatement le fruit de l’angle.

De la même manière il restitue assez de blocs aux quatre coins de l’édifice et notamment à l’angle Sud-Ouest où ils en subsistent beaucoup. La cor-respondance dimensionnelle entre ces blocs lui fournit de nombreux élé-ments afin de rétablir la continuité du pilastre. Après avoir constitué deux séries de blocs de deux types différents [un type court et un type long] il propose un système des assises alternantes [fig. 30, page 81].

Néanmoins, l’auteur n’évite pas les allégations arbitraires: « On adoptera ainsi le système aux deux extrémités de l’édifice, comme il est normal » [page 71]. C’est une hypothèse qui semble possible mais qui ne résulte pas des raisonnements cités et éprouvés par l’étude des blocs. Cette assertion va ensuite réapparaitre et jouer un rôle très important à la restitution de l’amorce des murs [des orthostates]. De suite en utilisant des blocs attribués aux endroits spécifiques de l’édifice, E. Will restitue la longueur et l’épaisseur du mur latéral. Les blocs 62 [fig.39, page 103] et 71 [fig.38, page 101] sont les pièces qui à travers des traces sur leurs faces fournissent des informations essenti-elles. Dans le cas du bloc 71 on peut observer que dans le texte il mention des côtes un peu différents que ceux indiqués dans le relevé. Bien qu’il utilise 3 chiffres après la virgule [dans un effort de démontrer la préci-sion dont la restitution est faite] la dimension 0,820 mètres indiqué au relevé devient 0,825 au texte. La même chose arrive avec la dimension 0,21 mètres qui dans le texte devient 0,22 mètres. Cette différentiation té-moigne, en dehors de la documentation peu soignée, l’obsession de l’auteur avec le module et l’existence des dimensions modulaires aux blocs.

fig.8: Bloc de mur lateral 71

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En respectant l’alternance régu-lière des joints et en utilisant des blocs spécifiques et plus préci-sément des blocs d’angle Sud-Ouest qui fournissent l’amorce du mur la-téral, il est amené à restituer une alternance régulière d’assises de parpaings et d’assises de carreaux. Mais, le fait qu’il utilise parfois des blocs dont le relevé est absent ou des dimensions qui ne sont pas indiqués aux relevés rend l’étude déficiente et pénible au lecteur à la comprendre.

Grâce aux nombreux blocs qui ap-partiennent à l’angle Sud-Ouest l’auteur possède assez de rensei-gnements à fonder ses théories afin de restituer le mur de fond Ouest. Ainsi les blocs 87 et 206 [fig.43, page 117] dont le relevé est mon-tré ainsi que les blocs 161 et 210 qui sont seulement décrits vérifient la structure proposée par l’auteur. Parfois, à cause de son obsession avec l’alternance régulière des joints il est tenté de donner aux blocs la longueur qui répondre à cette alternance [page 111].

Malheureusement, au lieu de suivre les indices afin de construire peu à peu ses hypothèses il fait des hypothèses qu’il par la suite essaie de prouver.

Le même phénomène se produit avec la restitution du socle. Bien qu’il reste trois blocs de marbre en place seulement sur le toechobate de granit de mur de fond, la grande quantité de pièces des longueurs inégales conduit E. Will à proposer que tous ces blocs appartiennent d’un socle sur les quatre côtés de la cella. L’attribution de ces blocs aux assises courantes est rejetée parce que leurs longueurs sont supérieures ou inférieures de la longueur modulaire ou ne sont pas de multiples exacts du chiffre modulaire [0,825 mètres].

Cependant, l’auteur lui-même admet que ces blocs particuliers pourraient être attribués aux parties hautes de l’édifice [contre-frise ou contre-architrave]. Mais, sans arguments sérieux il dit qu’il est possible des assises de type irrégulier de former la base des murs à l’intérieur de la cella, une partie peu visible par les visiteurs. On comprend donc que ce n’est pas une restitution documentée par des indices matériels ou dimensi-onnels mais surtout par des raisonnements par vraisemblance.

fig.9: Bloc d’ orthostate d’ante 100

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Suite à la restitution du socle traite celle des orthostates. La disposi-tion qu’il propose pour les orthostates et en particulier l’arrangement proposé pour la base des murs latéraux à l’intérieur du pronaos laissent place au doute. C’est difficile d’admettre que le système modulaire appliqué jusqu’à ce moment aux autres parties de l’édifice est abandonné pour une as-sise aussi importante que celle des orthostates. La solution adoptée avec le petit bloc servant comme cale entre l’orthostate de l’ante et ceux du pronaos semble contestable. Cette disposition n’est pas présentée dans la figure 32 [page 85] ni sur la planche F qui présentent un arrangement dif-férent. Cette absence d’unité reflète peut-être les hésitations de l’auteur. Toutes ces difficultés viennent de l’assise de socle au-dessous des murs de pronaos dont la présence n’est bien assurée. Plus précisément la face pos-térieure du bloc d’orthostate 100 fournit des informations importantes. Si un socle venait s’appuyer à cette face, le cadre d’anathyrose -très bien conservé- fournirait des traces laissés par ce bloc.

Il semble ici ainsi qu’à autres parts de la monographie que l’auteur est très influencé par la publication de F. Courby sur le Temple des Athéniens. Si ce socle est supprimé tout devient plus normal et cette solution simple correspond mieux aux éléments conservés.

fig.10: Restitution de l’ante Sud-est. Le petit bloc servant comme sale n’est pas présenté dans cette représentation

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La restitution de l’élévation interne est ba-sée principalement au bloc 149 [fig.52, page 137]. Après avoir présenté une série de rai-sonnements l’auteur propose un dispositif pour cette partie de l’édifice. En même temps il admet que elle est une restitution tout à fait hypothétique à cause de manque de données. D’abord, il attribue ce bloc à la contre-ar-chitrave en faisant une référence aux modèles. Il note que l’ordre dorique porte normalement une architrave lisse. Ainsi ce bloc ne pour-rait pas appartenir à l’assise de l’architrave à cause de la moulure qu’il présente en forme d’une saillie dans sa face antérieure.

Ensuite, il fait une première hypothèse qui est rejetée toute de suite. En donnant un rai-sonnement par analogie [le temple d’Athéna Po-lias de Pergame] il essaie de restituer un système analogue à Dôdékathéon. Le fait qu’en admettant ce système le rapport frise-archi-trave s’écarterait de celui fourni par les éd-ifices déliens de la même période ne lui permet pas d’avancer vers cette solution.

Une deuxième hypothèse cependant semble de lui offrir une solution acceptable. Il suppose donc que le bloc 149 appartienne à une façade

^ L’élévation interne

décorée qui se développe sur toute la hauteur de deux assises [architrave et frise]. En faisant encore une référence aux parallèles [Grand Temple] où des murs décorés sont observés à l’intérieur de la cella, il admet qu’il est possible dans le cas de Dôdékathéon une telle partie décorée de prendre place à l’élévation interne du pronaos. Cette hypothèse est vérifiée et par un calcul qui prouve que les assises de l’architrave et de la frise mesurent 99 cm, chiffre égal à trois assises courantes [0,33 x 3 = 0,99 cm]. La restitution de cette partie de l’édifice reste douteuse et insuffisante. L’auteur ne possède aucun élément afin de faire une restitution complète. Toutes les hypothèses sont faites par analogie avec d’autres édifices de la même époque ou de la même aire géographique [raisonnements par analogie, recours aux parallèles]. En plus, c’est une autre partie du temple où il quitte le module et on n’y rencontre aucune mention. Il est remarquable si on considère que dans autres parties de l’édifice il essaie d’appliquer ce système même s’il n’est pas certain qu’il a été initialement pris en compte par l’architecte.

fig.11: relevé du bloc 149

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CARACTERE DU TEMPLE | DATATION

Le module, les proportions, le décor, les méthodes de technique ainsi que les matériaux choisis donnent un caractère particulier à l’édifice. Ils aident aussi de manière significative à la détermination de la datation du monument.

A partir de l’application du module, l’auteur argue qu’on peut grossière-ment placer la construction du temple à l’époque hellénistique. Au cours de cette période l’application mécanique du nombre modulaire est assez fréquente. C’est la tentative de la continuation des principes acquis à l’époque classique. « Cet esprit de système semble être une excellente il-lustration des tendances d’une époque qui met en recettes les résultats acquis par celle qui la précède » [page 149], comme mentionné par l’auteur.

L’examen des proportions de l’édifice conduit l’auteur à la même conclusion ; le Dôdékathéon se place dans une série d’édifices appartenant à la deux-ième moitié du IVe siècle ou au début de l’époque hellénistique. La rédac-tion d’un tableau qui montre les proportions rencontrées aux temples qui datent plus ou moins à la même période permet au lecteur d’avoir une preuve visuelle de ce que l’auteur raconte. A travers ce tableau la datation du temple devient plus précise ; il est placé vers 300 av J.C.

Le décor en générale du temple et plus précisément les moulures est un au-tre élément décisif pour la datation. L’énumération d’une série de moulures retrouvées à Dôdékathéon et leur comparaison avec des moulures d’autres temples de la même période à Délos confirment la datation ci-dessus.

Finalement, les matériaux relevés [marbre pour les parties apparentes, granit pour le reste] et les techniques de construction ne fournissent pas d’indice chronologique précis. Le granit à Délos est rencontré aux édifices du début de l’époque hellénistique ainsi que les modes de scellements ob-servés.

L’auteur, en tenant aussi compte de la mention du temple dans le Compte de Cléostratos, propose comme date de construction « en chiffres ronds » le 300 av J.C.

fig.13: la tête colossale

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PLACEMENT DU TEMPLE DANS LE SANCTUAIRE ET DANS L’HISTOIRE

A l’étude du temple, qui occupe la plus grande partie de la publication, fait suite l’examen du téménos et les problèmes relatifs à l’identification et au culte des Douze Dieux à Délos. En suivant l’étude que R. Vallois avait donnée de cette région, E. Will présente son point de vue en ce qui concerne les divers problèmes soulevés par le groupe d’autels installé à l’Est du temple et enfermés à l’intérieur du même péribole.

Après avoir présenté en détail les ruines des sept autels et des cinq bases retrouvés dans l’enceinte, il admet à l’intérieur du téménos le groupe archaïque des Douze Dieux identifié par J. Marcadé mais en même temps il rejette leur accès du temple. Cette position semble douteuse car l’absence de toute pièce appartenant au dallage intérieur de la cella ne permet pas de prendre une position aussi nette. Au contraire, les similitudes que l’auteur suggère avec le Temple des Athéniens ainsi que les proportions très élargies de la cella peuvent bien s’expliquer par la nécessite de placer là un groupe ancien.

Ensuite, l’auteur récuse égale-ment l’hypothèse présentée par Ch. Picard qui avait reconnu un portrait de Démétrios Poliorcète dans la tête monumentale trouvée à proximité du temple. Selon cet aspect, l’histoire du sanctuaire des Douze Dieux et la construction du temple seraient marquées par l’action de Démétrios et Antigone. Après avoir rejeté les noms propo-sés, E. Will fait une hypothèse peu différente mais plus imprécise que celle de Ch. Picard : « S’il est permis d’avancer une hypothèse, nous verrons dans ce char sous le pronaos, les restes d’un ensem-ble destiné à glorifier le fonda-teur du temple, quelque souverain hellénistique, fier sans doute de la victoire de ses chevaux à une des grandes fêtes panhelléniques… » [page 182]. Mais qui était ce souverain selon l’auteur ?

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fig.12: tableau des dimensions principales du temple et leur transformation aux pieds

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OBSERVATIONS FINALES

Dans la présentation de chaque partie de l’édifice on note que l’auteur d’abord décrit la forme restituée de l’assise et puis il analyse la méthode dont il suit afin de faire la restitution. Ainsi, l’étude n’est pas présentée dans l’ordre où elle était produite. Ce fait est confondant pour le lecteur qui n’a pas l’opportunité de suivre la séquence de pensées [la découverte de blocs, puis leur dimensionnement, ensuite l’étude des indices et finalement leur restitution] qui ont conduit à la restitution spécifique.

On peut observer aussi une obsession avec le nombre modulaire de l’édifice [le pied de Philétairos: 0,33 mètres]. Dès la mise en place de la krépis on saisit l’emploi de ce module, qui se retrouve dans la longueur des dalles des degrés et du stylobate et détermine ensuite l’implantation de la cella et des colonnes. Pour l’élévation un système graphique qui respect ce mod-ule semble avoir imposé la hauteur de la colonne et la hauteur des murs dont chaque assise correspondait au pied de Philétairos. Il essaie de donner une dimension modulaire à toutes les parties de l’édifice. Quand il échoue il donne aux blocs des dimensions qui confirment sa méthode ou il attribue l’écart au travail lâche et pas de bonne qualité. Un point assez contestable dans la publication est la mention aux « vertus du chiffre 7 » [page 148]. Dans sa quête de découvrir le nombre modulaire il présent une série de dimensions ou de rapports qui sont multiples du chif-fre 7 [par exemple: la hauteur de la colonne est de 2x7 pieds]. Même s’il y a des inexactitudes aux résultats il les attribue aux erreurs pendant la construction du temple.

Son objectif est de présenter un monument notable en ce qui concerne le module. « L’intérêt du Dôdékathéon est de fournir un exemple particulière-ment net de cette méthode » selon ses mots.

Finalement, il est bien influencé par la publication de F. Courby sur le Grand Temple et le Temple des Athéniens. Il commence par le plan du temple et plus précisément de la largeur de la cella [elle tend vers le carré] qui sont similaires au Temple des Athéniens où F. Courby suppose que les dimensions étaient conditionnées par la nécessité de loger les bases de sept statues. Par analogie, E. Will propose que le logement des statues des douze divinités, auxquelles l’édifice était consacré, a imposé les dimen-sions du Dôdékathéon.

fig.14: l’archéologue Ernest Will

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[Ernest Will, biographie]

L’archéologue Ernest Will est né le 25 avril 1913 à Uhrwiller. Après ses études secondaires au gymnase protestant de Strasbourg, il entre à l’École normale supérieure, est reçu à l’agrégation de Lettres classiques et part pour l’École française d’Athènes, où il travaille à Thasos, à Délos et à Delphes. La guerre écourte son séjour : il est brièvement transféré au Liban avant de regagner la France. En 1946, sa carrière scientifique prend un virage décisif : Henri Seyrig l’appelle à Beyrouth comme pensionnaire de l’Institut français d’archéologie qu’il vient de fonder. Le Proche-Orient hellénisé sera désormais son terrain de prédilection.

Après son retour en France, sa carrière universitaire le conduit d’abord à Lille puis à la Sorbonne comme professeur de langue et littérature grecque et comme professeur d’art et archéologie. Il est élu membre libre de l’Académie des inscriptions et belles-lettres en 1973.

Sans se limiter à un seul domaine, Ernest Will sera remarqué par ses travaux sur l’art et l’archéologie du Proche-Orient hellénisé. Sa thèse sur le re-lief cultuel le confrontait au problème difficile des syncrétismes culturels et religieux. Sans renier ce goût pour la sculpture, il fut tôt attiré par les questions d’architecture.

H. Seyrig l’avait associé à la publication consacrée au presti-gieux temple de Bêl à Palmyre, et il fut l’initiateur des fouilles du palais des Tobiades en Jor-danie. Mais il s’intéressa aus-si bien aux monuments des cult-es orientaux en Méditerranée [à Délos ou à Rome], multiplia les études savantes sur les rites, les représentations, les pra-tiques funéraires, les questions d’urbanisme, voire les aspects économiques et sociaux, faisant vers la fin de sa vie la synthèse de ces multiples préoccupations dans un brillant petit livre con-sacré aux Palmyréniens. Il est mort le 24 septembre 1997.