le blé en herbe de colette

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Page 1: Le Blé en herbe de Colette

Le Blé en herbe de Colette

    Roman paru en 1923.

Eveil de l' amour pour deux adolescents.

    Philippe et Vinca passent, comme d' habitude, leurs vacances en Bretagne, près du bord de mer, au rythme des marées. Le paysage est manifique et propice aux confidences, loin des oreilles indiscrètes.    Ce sont des amis d' enfance, très proches, et, jusqu 'à  l'été dernier, rien ne les séparait, ils vivaient une relation amicale simple, sans complications, ils se disaient tout, n' avaient pas de secrets l' un pour l' autre. . .    Mais cette année, âgés de 16 et 15 ans, ils découvrent tous deux, qu' une certaine gène s' installe entr'eux.. Philippe voit Vinca d' une autre façon, et le trouble le saisit devant la jeune fille. Le dialogue se complique et leur relation commence à en souffrir. La confusion dans laquelle ils se trouvent tous deux, les renvoie à eux-mêmes, à des sentiments plus ou moins avouables, qui, malgré leur amour profond, les obligent à une certaine réserve l' un vis-à-vis de l' autre.     Et c' est ainsi que ce nouveau comportement pousse Philippe à cacher à Vinca la rencontre faite sur la plage, et qui l' entraine à une vie de mensonges et de tromperies qui entâchera leur amour.   

    Extraits.

    Toute leur enfance les a unis, l' adolescence les sépare. L' an passé, déjà, ils échangeaient des répliques aigres, des horions sournois; maintenant le silence, à tout moment, tombe entre eux si lourdement qu' ils préfèrent une bouderie à l' effort de la conversation.

    Je n' ai donc jamais su ce qu' elle pensait?

    Tais-toi, méchant, tais-toi. . . Qu' est-ce que tu m' as fait. . .

    Vinca et moi, un être juste assez double pour être deux fois plus heureux qu' un seul, un être qui fut Phil-et-Vinca va mourir ici, cette année..    Il n' imaginait pas qu' un plaisir mal donné, mal reçu, est une oeuvre perfectible

"Leur humeur d'adolescents était vieillie par l'amour prématuré, le secret, le silence et l'amertume des séparations." Je crois que cette phrase est un bon résumé de la relation de Vinca et Philippe.

La fin du roman transmet le passage de l’enfance à l’adolescence quand une amitié se transforme en amour. Ils ont compris dans ce point que leurs relations ont dépassé cette amitié pure et simple et qu’un autre saison de leur vie est prête à commencer.

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Cet été-là, leur amitié se transforme en amour grandissant et cette sensation nouvelle vient bousculer leur naïveté d’enfants . De la complicité et l’insouciance qui les unissaient, il ne reste plus que souffrance, incompréhension et trahison.En luttant contre leurs sentiments confus, ils quittent peu à peu le monde de l’enfance et découvrent, amers, les tourments de l’adolescence.

Mon avisLe blé en herbe n’est pas un roman que l’on lit pour l’intrigue puisque le thème de l’initiation à l’amour de deux adolescents est plutôt banal et que le dur passage de l’enfance à l’adolescence a été maintes fois abordé. 

La raison pour laquelle on lit les romans de Colette en général et Le blé en herbe en particulier c’est l’écriture de Colette : subtile, riche, absolument maîtrisée et très poétique. 

Les passionnés d’intrigues peuvent donc passer leur chemin sans s’attarder alors que les amoureux de la langue française et de la syntaxe passeront un très agréable moment.

L’histoireVinca et Philippe passent depuis toujours leurs vacances ensemble, en Bretagne, au bord de la mer. Mais cette année, tout est différent : Vinca découvre le plaisir de séduire et Philippe, troublé par un sentiment qu’il ne connaît pas encore, va s’abandonner aux bras d’une énigmatique femme toute de blanc vêtue, Camille Dalleray. C’est donc l’histoire de deux jeunes gens qui découvrent le fracas de l’adolescence et qui petit à petit quittent le monde insouciant de l’enfance. 

Le Blé en herbe est un roman réaliste, en ce sens qu'il évoque, à la manière des peintres impressionnistes, non pas le paysage breton, mais les sensations provoquées par sa beauté. Sur cette magnifique toile de fond, Colette explore, avec sobriété et finesse, la complexité de la force tranquille qui unit Phil à Vinca et replonge le lecteur, non sans une certaine nostalgie, dans des apprentissages amoureux qu'il croyait enfouis dans le passé.

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Depuis des années, Vinca et Phil passent leurs vacances avec leurs parents respectifs en Bretagne, plus exactement à côté de Cancale. Monsieur et Madame Audebert, parents de Phil louent une maison pour moitié avec Monsieur et Madame Ferret pour l’autre moitié, parents de Vinca. Celle-ci n’a que quinze ans et demie et Phil, depuis quelques mois a furieusement tendance à la toiser du haut de ses seize ans et demie. Or, Vinca est amoureuse de Phil, amoureuse comme on peut l'être à cet âge, totalement, inaltérablement. Phil, quant à lui, estime que Vinca lui appartient sans discussion aucune, mais ne se considère nullement lié à elle pour autant, autrement que par une très grande amitié. Un jour, tout à fait par hasard, Phil se trouve face à une très jolie femme d'une trentaine d'années qui lui demande le chemin. Vinca le surprend lui parlant et, instinctivement, se hérisse. Elle n'a pas tort, puisque Phil et cette femme se reverront et qu’elle deviendra même sa toute première maîtresse. Malgré tout il n’oublie pas Vinca, mais la comparaison est difficile quand d’un côté il y a le corps rude et ascétique d’une jeune fille, alors que de l’autre il y a un parfum envoûtant, une chair chaude, accueillante et tout en courbes douces. La découverte d’un vrai corps de femme et de l'amour physique ne se fait pas sans laisser de traces… J'ai aimé ce livre qui, par ailleurs, se lit très facilement, comme tous les livres de Colette. Tout d'abord il convient de rendre hommage à la beauté de l’écriture de Colette. Sa langue coule délicatement, souple et déliée.

Mais elle nous donne aussi ici de très belles études psychologiques. Tout d’abord celle de l'adolescence, que ce soit pour Vinca ou pour Phil. «

- Patienter, patienter. (répond Phil à Vinca)… Un mot détesté venait d'empoisonner sa sieste heureuse de lycéen en vacances, dont les seize ans vigoureux s’accommodaient d’oisiveté, de langueur immobile, mais que l'idée d’attente, de patiente évolution exaspérait. » Les deux adolescents sont très différents, mais très crédibles. Phil est plus égoïste, plus léger, volage et trouve normal de l'être. Il se voit bien prolongeant sa nonchalance quelques bonnes années encore, n'ayant aucune idée de ce qu’il voudrait devenir. Il n’a qu'une certitude : en aucun cas il ne fera le métier de son père ! Il ne peut résister à l'attirance que représente « la femme », mais à la fois il entend bien conserver ses droits sur Vinca.

Quant à elle, elle devinera ce qui se passe en Phil et le mènera à tout lui avouer. Alors qu’il est convaincu qu’il l'a perdue, elle reste inébranlable : c'est elle qu'il épousera et personne d'autre. Elle fera ce qu’il faudra et ira même loin. Vinca sait ce qu'elle veut, c’est déjà une petite femme, quand lui n'est qu’un jeune homme assez pataud et empêtré. Et puis, il y a la petite sœur de Vinca et les parents. Ces derniers ne voient rien et ne se mêlent quasiment de rien. D'ailleurs, Phil et Vinca les appellent des « Ombres », ce qui est assez conforme à ce que des adolescents pensent de leurs parents à cet âge. ( « .et quelque Ombre s’arrêta de remuer », « - Laissez donc, dit une Ombre indulgente. » etc.)

Et enfin il y a cette phrase superbe « . Il est peu d'heures dans la vie d’un homme où le corps content, les yeux récompensés et le cÏur léger, retentissant, presque vide, reçoivent en un moment tout ce qu'ils peuvent contenir, et je me souviendrai de celle-ci. »

Je ne peux m’empêcher de la mettre en parallèle avec la phrase de Camus qui écrira quelques années plus tard dans « Noces », lui aussi adolescent : « Le visage mouillé de sueur mais le corps frais dans la

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légère toile qui nous habille, nous étalons tous l'heureuse lassitude d’un jour de noces avec le monde. »Lui a pu sentir ce moment de plénitude d’un instant magique.

Ce livre, à l'époque où il a été publié, a du en choquer plus d'un, plus d’une !… Un autre parallèle à faire, mais avec Raymond Radiguet et son « Diable au corps » !

Une villa au bord de la côte cancalaise, où deux familles liées par l'amitié se retrouvent chaque année pour les vacances d'été. Les "enfants": Phil (16 ans) et Vinca (15 ans), aux yeux de pervenche. "L'amour, grandi avant eux, avait enchanté leur enfance et gardé leur adolescence des amitiés équivoques. Moins ignorant que Daphnis, Philippe révérait et rudoyait Vinca en frère, mais la chérissait comme si on les eût, à la manière orientale, mariés dès le berceau..." Et puis, Phil rencontre inopinément, dans les dunes, la mystérieuse "dame en blanc", locataire d'une villa voisine qui ne tarde pas à l'envoûter... Suit le récit d'une double initiation amoureuse qui est aussi un adieu à l'enfance - sa pureté ou son inconscience, une initiation amoureuse marquée du sceau de la mélancolie et qui laisse un arrière-goût un peu amer: "un peu de douleur... un peu de plaisir..." Ce n'est que cela...

C'est très joliment écrit. Colette a des accents d'une sensualité frémissante pour décrire le trouble naissant entre Phil et Vinca, les couleurs changeantes de la mer et la caresse du vent sur la peau des baigneurs. C'est magnifique bien sûr, mais cela me laisse sur ma faim... Je me prends à penser que, compte tenu des sentiments en jeux, ce livre aurait dû brûler de toute l'intransigeance passionnée de l'adolescence... Et puis, non... "Le blé en herbe" m'a procuré deux jours de lecture très agréables, mais il ne m'a pas fait vibrer. D'où une cote éminemment subjective et qui peut paraître sévère pour un livre aux qualités indéniables.

Leur complicité de toujours connaît un changement qui révèle leur intuition des mystères du désir amoureux. Philippe remarque que Vinca n’est plus la même que l’année précédente . Invité à la table familiale de Vinca , Philippe prend conscience des talents de séductrice de son amie. Il la souhaiterait aussi plus douce tandis qu’elle semble se complaire à jouer la parisienne en vacances . Philippe connaît également les tourments de l’adolescence . Il supporte difficilement de se glisser dans le moule scolaire et d’accepter benoîtement cet avenir trop prévisible que lui dessinent ses parents et ses professeurs. Vinca est plus sereine et plus docile. C‘est avec une spontanéité souriante qu’elle accepte de se frotter aux tâches ménagères et d’aider sa mère, atteinte de rhumatisme.

Un jour Philippe croise une belle dame vêtue de blanc qui demande son chemin. Il se sent flatté par ces quelques mots échangés avec cette belle inconnue.

Lors des grandes marées du mois d’août, Vinca a le désir non dit de se laisser glisser avec Philippe vers les gouffres marins. Mais Philippe a envie de vivre et la ramène à la raison.

Les vacances s’achèvent et la rentrée approche. L'insouciance et la confiance des années précédentes ont fait place à la suspicion et à la tristesse.

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Philippe croise à nouveau la belle inconnue en blanc qui l’invite chez elle. Il est hanté par l’image de cette femme et refuse d‘en parler à Vinca. Il saisit l'opportunité de porter un télégramme à la villa de la Dame en blanc et connaît le plaisir avec elle.

Troublé par cette aventure Philippe regagne la maison familiale. Il regarde Vinca se reposer et sent le fossé qui s’est creusé entre eux. La Dame en blanc n’obtenant pas de la part de Philippe l'engagement qu’elle espère, disparaît mystérieusement. Philippe se rend compte que Vinca a tout deviné de son idylle avec cette inconnue. Malgré cette aventure, elle souhaite le faire sien , et " l’emprisonner dans son désir". Elle "se donne à lui".

|Or, Vinca est amoureuse de Phil, amoureuse comme on peut l'être à cet âge, totalement, inaltérablement. Phil, quant à lui,|

|estime que Vinca lui appartient sans discussion aucune, mais ne se considère nullement lié à elle pour autant, autrement |

|que par une très grande amitié. |

|Un jour, tout à fait par hasard, Phil se trouve face à une très jolie femme d'une trentaine d'années qui lui demande le |

|chemin. Vinca le surprend lui parlant et, instinctivement, se hérisse. Elle n'a pas tort, puisque Phil et cette femme se |

|reverront et qu’elle deviendra même sa toute première maîtresse. Malgré tout il n’oublie pas Vinca, mais la comparaison |

|est difficile quand d’un côté il y a le corps rude et ascétique d’une jeune fille, alors que de l’autre il y a un parfum |

|envoûtant, une chair chaude, accueillante et tout en courbes douces. La découverte d’un vrai corps de femme et de l'amour |

|physique ne se fait pas sans laisser de traces… |

|J'ai aimé ce livre qui, par ailleurs, se lit très facilement, comme tous les livres de Colette. |

|Tout d'abord il convient de rendre hommage à la beauté de l’écriture de Colette. Sa langue coule délicatement, souple et |

|déliée. |

|Mais elle nous donne aussi ici de très belles études psychologiques. Tout d’abord celle de l'adolescence, que ce soit pour|

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|Vinca ou pour Phil. « |

|- Patienter, patienter. (répond Phil à Vinca)… Un mot détesté venait d'empoisonner sa sieste heureuse de lycéen en |

|vacances, dont les seize ans vigoureux s’accommodaient d’oisiveté, de langueur immobile, mais que l'idée d’attente, de |

|patiente évolution exaspérait. » Les deux adolescents sont très différents, mais très crédibles. Phil est plus égoïste, |

|plus léger, volage et trouve normal de l'être. Il se voit bien prolongeant sa nonchalance quelques bonnes années encore, |

|n'ayant aucune idée de ce qu’il voudrait devenir. Il n’a qu'une certitude : en aucun cas il ne fera le métier de son père |

|! Il ne peut résister à l'attirance que représente « la femme », mais à la fois il entend bien conserver ses droits sur |

|Vinca. |

|Quant à elle, elle devinera ce qui se passe en Phil et le mènera à tout lui avouer. Alors qu’il est convaincu qu’il l'a |

|perdue, elle reste inébranlable : c'est elle qu'il épousera et personne d'autre. Elle fera ce qu’il faudra et ira même |

|loin. Vinca sait ce qu'elle veut, c’est déjà une petite femme, quand lui n'est qu’un jeune homme assez pataud et empêtré. |

|Et puis, il y a la petite sœur de Vinca et les parents. Ces derniers ne voient rien et ne se mêlent quasiment de rien. |

|D'ailleurs, Phil et Vinca les appellent des « Ombres », ce qui est assez conforme à ce que des adolescents pensent de |

|leurs parents à cet âge. ( « .et quelque Ombre s’arrêta de remuer », « - Laissez donc, dit une Ombre indulgente. » etc.) |

|Et enfin il y a cette phrase superbe « . Il est peu d'heures dans la vie d’un homme où le corps content, les yeux |

|récompensés et le cÏur léger, retentissant, presque vide, reçoivent en un moment tout ce qu'ils peuvent contenir, et je me|

|souviendrai de celle-ci. » |

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|Je ne peux m’empêcher de la mettre en parallèle avec la phrase de Camus qui écrira quelques années plus tard dans « Noces |

|», lui aussi adolescent : « Le visage mouillé de sueur mais le corps frais dans la légère toile qui nous habille, nous |

|étalons tous l'heureuse lassitude d’un jour de noces avec le monde. » |

|Lui a pu sentir ce moment de plénitude d’un instant magique.

Au cours de l’été qui sert de cadre au roman, il

semble que tout ait changé. Les jeunes se sentent différents et ne sont plus capables de

communiquer comme avant. Ils s’aiment, comme toujours, mais il est difficile d’être au seuil de

l’âge adulte, puisqu’ils savent pas comment se comporter, soit comme des adultes, soit comme des

enfants perdus dans un monde nouveau et étrange. C’est pour cela qu’ils sont impatients, en

particulier Phil, de devenir adultes et d’avoir dix ans de plus.

Les événements se compliquent quand Phil rencontre Madame Dalleray, « une femme blanche »

d’une trentaine d’années qui le séduit et en fait son amant. L’intrigue du roman devient alors celle

d’un triangle amoureux entre ces trois personnages. Les quelques autres personnages du roman, les

parents des jeunes, sont décrits comme « des ombres » qui n’ont aucune importance ni pour les

personnages principaux, ni pour le lecteur.

Vinca qui connaît bien Phil s’aperçoit facilement qu’il a une amante. Même si elle est triste et se

sent trompée, elle s’adapte aux changements en tant que femme, et utilise sa force intérieure et

naturelle pour vaincre la crise et ramener vers elle Phil tout en dominant la situation.

Les deux femmes du roman qui sont l’objet de mon analyse sont à première vue très différentes.

L’une est une jeune fille gâtée qui n’a aucune expérience du monde des adultes et l’autre une

femme indépendate et forte, presque masculine, qui sait ce qu’elle veut. Cela se voit dans leur

description aussi. Chacun des deux personnages possède sa propre couleur d’identification et ses

manières affectées dans les expressions et les habitudes gestuelles. En même temps, elles

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représentent toutes les deux « l’archétype féminin » ou « la femme colettienne » qui se maitrise et

trouve en soi-même, comme le décrit Resch, le désir de vivre et la puissance de surmonter les

revers. La description de chaque femme lui donne sa propre identité et approfondit sa personnalité

de manière à les distinguer l’une de l’autre.

Colette :

* Née en 1873

* Amoureuse de la nature et de la sensibilité

* A obtenu un Goncourt

* Décédée en 1954

Le blé en herbe :

Qui ?

* Vinca (fille d’Auguste et Mme Ferret, 15 ans ½, amoureuse de Phil, surnommée la Pervenche)

* Philipe (fils de Marthe et M. Audebert, 16 ans ½, surnommé Phil, il « possède » Vinca)

* Camille Dalleray (34 ans, amante de Phil)

* Lisette (sœur de Vinca)

* Les Ombres (pâles) (les parents).

Quoi ? Une histoire d’amour

Où ? A la mer, en Bretagne

Quand ? Pendant les vacances d’été.

Page 9: Le Blé en herbe de Colette

Événements :

I :

* Vinca va à la pêche avec Philipe qui compare la Vinca d’avant et celle de maintenant. Ils ont passaient leur enfance ensemble, mais l’adolescence les sépare. Ils pêchent mais se chamaillent.

II :

* Ils se baignent chaque matin, mais cette année Vinca n’est jamais contente.

* Les familles parisiennes louent la même villa et mangent ensemble.

III : - Ils se connaissent depuis 15 ans. Mais depuis quelques temps Philipe n’aime pas son âge et veut déjà être vieux.

* Vinca est une femme de maison, elle devra gérer la maison car sa mère est atteinte de rhumatisme.

IV : - Ils marchent comme à leur habitude vers la mer. Mais Philipe est appelé par une dame en blanc. Il essaie de cacher ça à Vinca.

V : -Philipe et Vinca disent qu’ils ne s’aiment par mais s’appartiennent. Ce jour là, il pleut. Cette fin de vacances se passe mal.

VI : -Ils se sentent seuls, il ne reste plus qu’eux sur la côte. Lisette, Vinca, et Philipe vont tous les trois manger à la mer. Philipe fait une sieste et rêve de « son avenir ».

VII :- Philipe fait du dessin industriel, il veut que ce soit son futur métier. Les parents parlent en rigolant de fiancer Vinca et Philipe.

VIII :- Philipe est allé à vélo jusqu’à Saint-Malo sans Vinca. Sur le chemin du retour il s’arrête devant Ker Anna et la Dame en Blanc lui propose une orangeade, il est obligé de rentrer et elle le retient de force. Il cache cet épisode à Vinca.

IX : - Il cueille des chardons bleus pour Mme Dalleray et va lui apporter chez elle. Lorsqu’il les lance dans son jardin elle sort, fâchée et le fait rentrer chez elle (de force).Il vit alors son premier amour. Et en partant elle dit à Philipe qu’elle n’accepte que les mendiants.

X : -Vinca et Philipe s’éloignent de plus en plus au cours des vacances. Quant à Philipe il enchaîne les visites chez Mme Dalleray en le cachant à sa famille et à Vinca. Cependant Vinca suspecte quelque chose.

XI : -Il sort de chez Mme Dalleray vers 1h30, et pleure en rentrant à la villa, il a vu que la lumière était allumé dans la chambre de Vinca. Il finit par rentrer dans sa chambre lorsque le soleil se lève.

XII : - Il dort sur le matin, la famille et Vinca l’embête et lui disent qu’il est une marmotte. Après son réveil, ils se rendent à la mer. A la pêche il se met à pleurer devant Vinca. Vinca s’en va à ce moment.

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XIII : -Ils marchent après le repas et revient sur ce qu’il s’est passé. Vinca le pardonne.

XIV : -Philipe retourne comme à son habitude chez Mme Dalleray. Il lui dit qu’il part le 25 septembre. Elle s’appelle en réalité Camille Dalleray. Ils parlent tous les deux à propose de leur relation et se demandent s’ils s’aiment.

XV : -Le lendemain il pleut et Vinca commence à rassembler ses affaires pour le départ. Philipe se fâche comme Vinca car elle ressemble à une ménagère.

XVI : - Phil pense que « l’être Philipe et Vinca »va mourir cette année. Il veut retourner une dernière fois chez Mme Dalleray. Philipe pense à son avenir sur la plage et en veut à Mme Dalleray de lui avoir « volé » son adolescence.

* Le garçonnet de Cancale, un jeune vendeur de poissons, vient annoncer à Philipe que Mme Dalleray est partie.

* Les parents préparent le départ et avouent qu’ils veulent acheter la villa.

* Pendant le repas, Philipe a fait un malaise. Vinca s’occupe de lui et lui avoue qu’elle sait tout. Elle fait croire devant Philipe que ça lui est égal mais en réalité elle est jalouse.

* Après un mauvais rêve, Philipe sort et rencontre Vinca. Ils se retrouvent et font l’amour et sont heureux.

XVII : - C’est le départ.

Remarque :- C’est un roman sur l’adolescence.

* C’est la découverte de l’amour qui les fait changer.

* " L’amour naissant et le dur passage de l’enfance à l’adolescence "

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Le blé en herbe de Colette

Extrait d’une discussion entre Phil et Vinca.

Passage étudié :

Il approcha, nonchalant, se pencha sur le petit abîme

Pullulant:

–Naturellement! C’est que tu ne sais pas...

–Je sais très bien, cria Vinca aigrement, seulement je n’ai

pas la patience.

Phil enfonça le havenet dans l’eau et le tint immobile.

–Dans la fente de rocher, chuchota Vinca derrière son

épaule, il y en a de belles, belles... Tu ne vois pas leurs

cornes?

–Non. Ça n’a pas d’importance. Elles viendront bien.

–Tu crois ça!

–Mais oui. Regarde.

Elle se pencha davantage, et ses cheveux battirent, comme

une aile courte et prisonnière, la joue de son compagnon. Elle

recula, puis revint d’un mouvement insensible, pour reculer

encore. Il ne parut pas s’en apercevoir, mais sa main libre

attira le bras nu, hâlé et salé, de Vinca.

–Regarde, Vinca... La plus belle, qui vient...

Le bras de Vinca, qu’elle déroba, glissa jusqu’au poignet

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dans la main de Phil comme dans un bracelet, car il ne le

serrait pas.

–Tu ne l’auras pas, Phil, elle est repartie...

Pour suivre mieux le jeu de la crevette, Vinca rendit son

bras, jusqu’au coude, à la main demi-fermée. Dans l’eau

verte, la longue crevette d’agate grise tâtait du bout des

pattes, du bout des barbes, le bord du havenet. Un coup de

poignet, et... Mais le pêcheur tardait, savourant peut-être

l’immobilité du bras docile à sa main, le poids d’une tête

voilée de cheveux qui s’appuya, un moment vaincue, à son

épaule, puis s’écarta, farouche...

–Vite, Phil, vite, relève le filet!... Oh! elle est partie!

Pourquoi l’as-tu laissée partir?

Phil respira, laissa tomber sur son amie un regard où

l’orgueil, étonné, méprisait un peu sa victoire; il délivra le

bras mince, qui ne réclamait point de liberté, et brouillant, à

coups de havenet, toute la flaque claire:

–Oh! elle reviendra... Il n’y a qu’à attendre...

Explication de texte :

L’extrait étudié se situe au début de l’œuvre dans le premier chapitre. Il correspond à une scène de pêche à la crevette.

Cet extrait est composé de dialogues entre Phil et Vinca, interrompus par des interventions du narrateur. Ces interventions mettent en scène une gestuelle complexe entre les deux personnages.

Page 13: Le Blé en herbe de Colette

Dans ce passage, on peut se demander comment Colette met en scène la relation de Phil et Vinca en ce début de roman.

Nous pourrons d’abord essayer de décoder la gestuelle des deux personnages, puis nous observerons le contraste entre lenteur et vivacité, entre ce qui s’attrape et ce qui s’échappe, et enfin, nous observerons la relation entretenue par Phil et Vinca.

D’emblée, on peut constater le caractère calme de Phil avec l’adjectif « nonchalant » (l.1). Cet adjectif est en contraste avec l’adjectif « pullulant » (l.2) qui qualifie la mare ou Vinca pêche. Cet adjectif sous entend un mouvement intense. Cette première phrase annonce donc le contraste entre la lenteur et la vivacité, que l’on retrouvera au cours de l’extrait.

A la ligne 4, Vinca vient troubler le calme qui accompagne Phil. En effet, on relève le verbe « crier » ainsi que l’expression « je n’ai pas la patience » (l.5). On note dans ces lignes un contraste entre les comportements de Phil et Vinca. Cette attitude vive de la jeune fille trahit sa tension.

Des lignes 6 à 12, on constate toujours un désaccord entre les deux adolescents. Phil, lui, est toujours immobile, dans l’attente que la crevette vienne d’elle-même (l.10) (il est intéressant de s’interroger sur la connotation érotique de la crevette dans tout l extrait), tandis que Vinca semble impatiente. Cette impatience est traduite par la répétition (l.8) « il y en a de belles, belles… »,elle s’interroge, s’exclame.

On assiste ensuite, à partir de la ligne 13, à toute une scène basée sur la gestuelle. Cette gestuelle paraît tout à fait anodine au premier abord. Mais elle permet une mise en scène visuelle pour le lecteur, elle est également une sorte de langage parallèle entre les deux adolescents.

A la ligne 13 : « Elle se pencha davantage », « elle recula, puis revint d’un mouvement insensible pour reculer encore », les mouvements de Vinca rappellent le mouvement des crevettes qui fuient lorsqu’on tente de les attraper, et reviennent prudemment observer le filet, comme le montrent les lignes 25 et 26 : « la longue crevette d’agate grise tâtait du bout des pattes, du bout des barbes, le bord du havenet. »

Phil, ensuite, attrape le bras de Vinca. Ce geste semble innocent, inconscient de la part du jeune homme, puisqu’à la ligne 16, on dit qu’ « il ne parut pas s’en apercevoir ». Cependant, le narrateur insiste sur la nudité, la couleur, le goût de la peau de Vinca, ce qui en fait une description extrêmement sensuelle (comme Colette les aime), et met en valeur toute la féminité de la jeune fille. On observe alors les prémices d’une sensualité entre les deux adolescents, dont ils sont plus ou moins conscients. Malgré leur jeunesse, ils ne sont plus tout à fait aussi innocents qu’ils le pensent. A la ligne 18, les points de suspension dans le discours de

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Phil, révèlent l’attente d’un instant, une hésitation. Cette attente est une nouvelle manifestation de lenteur. Attend-t-il que la crevette approche, ou attend-t-il de voir si Vinca va lui abandonner son bras ?

Aux lignes 19 à 21, Vinca retire son bras de la main de Phil. Ce mouvement est à nouveau un geste de recule, qui trahit peut-être une forme de timidité, puis elle rend à nouveau son bras aux lignes 23 et 24. Les mouvements du bras de Vinca peuvent être mis en parallèle avec ses déplacements des lignes 15 et 16 où elle recule, revient, recule encore. Il y a sans cesse un jeu de va et vient dans la gestuelle de Vinca. Cette gestuelle peut signifier l’indécision ou la méfiance à l’égard de Phil et de leur relation changeante.

Phil laisse Vinca se mouvoir comme elle le souhaite. Il ne la retient pas. Il attend qu’elle décide tout comme il attend que les crevettes reviennent aux lignes 20 et 21. Le parallèle entre les mouvements de Vinca et ceux de la crevette est accentué à la ligne 23 : « Pour mieux suivre le jeu de la crevette ». Aux lignes 24,25, la crevette, bien que se rapprochant, demeure toujours insaisissable, même quand elle semble acquise, elle fuit. Tout comme Vinca avec Phil dans ce roman.

A la ligne 27, on retrouve l’éloge de la lenteur avec Phil qui « tardait » ou ligne 28 : « L’immobilité du bras docile ». Dans ces lignes, Phil commence à apprécier la sensualité du contact de Vinca. On observe en effet le verbe savourer à la ligne 27. Aux lignes 29 et 30, la phrase est hachée par des virgules. Cette ponctuation donne l’impression que l’instant est comme suspendu pour Phil, comme s’il voulait le faire durer. Cependant ce plaisir est nuancé par le « peut être » de la ligne 27. Cette nuance montre la nouveauté de la sensation pour Phil. Une sensation qu’il ne connaît pas et qu’il définit difficilement. Vinca, quant à elle, a toujours des gestes indécis. Des lignes 28 à 30, elle dépose sa tête sur l’épaule de Phil. Ce geste est incontrôlé, effectué avec aisance et insouciance. Il pourrait traduire sa dépendance, son approbation, sa soumission vis-à-vis de Phil. Cette soumission est renforcée par l’adjectif « docile » » à la ligne 28 ainsi que par l’adjectif « vaincue » à la ligne 29. Elle retire finalement sa tête à la ligne 30, dans un nouveau geste de recul, comme si elle prenait soudain conscience que Phil et elle n’étaient plus seulement des amis d’enfance, mais étaient devenus un jeune homme et une jeune femme. Une transition s’opère en elle, elle prend conscience que la signification de ses gestes change, et que sa relation avec Phil change par la même occasion.

Dans les lignes 31 à 37, on observe à nouveau le contraste qui existe entre les comportements de Phil et Vinca. On observe également le contraste entre la lenteur, la patience de Phil et la vivacité de la crevette qui fuit. La gestuelle de l’attente, de la sensualité est ici tranchée par la vivacité de ce qui s’échappe. A la ligne 31, Vinca se montre toujours aussi impatiente. On le voit encore une fois grâce à la répétition du mot « vite », grâce aux interrogations et aux exclamations, tandis que Phil respire à la ligne 33 et préconise toujours l’attente à la ligne 37.

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Aux lignes 32 et 33, on voit que Vinca aurait voulu que Phil retienne la crevette, peut-être comme elle aurait voulu qu’il la retienne, elle. Elle lui reproche de laisser partir la crevette, comme il la laisse partir, elle, quand elle recule, retire son bras, sa tête. On voit d’ailleurs ensuite que le bras de Vinca « ne réclamait pas sa liberté » (l.35). On note l’existence d’un jeu de séduction entre les deux personnages avec le terme « victoire » (l.34), tout comme on a pu observer le terme « vaincue » concernant Vinca à la ligne 29.

Aux lignes 35 et 36, la flaque claire brouillée par le havenet de Phil, en cette fin de premier chapitre, pourrait être le symbole de leur amitié d’enfance chamboulée par l’éveil de sentiments nouveaux, d’une sensualité jusqu’à lors ignorée. La dernière réplique de Phil est une annonce de la suite du roman (l.37). Phil parle de la crevette, mais l’ambiguïté persiste, car cette réplique pourrait tout aussi bien concerner Vinca.

Conclusion : Cet extrait présente toutes les apparences d’une scène de jeux enfantins entre deux amis : une simple scène de pêche à la crevette. Mais l’innocence des deux enfants est troublée, le jeu de pêche glisse insensiblement vers un jeu d’une toute autre nature. A travers une esthétique de la lenteur mise en contraste avec la vivacité, grâce à l’importance accordée à la mise en scène des corps et à une gestuelle minutieusement décrite, Colette exprime subtilement la transition qui s’amorce entre les deux compagnons.

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1. INTRODUCTION

2. DÉVELOPPEMENT

2.1 Selon les nombreux états d’âme de Phil et Vinca ainsi que leurs manières d’agir, il est possible d’établir respectivement deux visions de l’amour.

2.1.1 En premier lieu, l’attitude de Phil révèle que l’amour représente pour lui une liberté qui cependant n’est pas pleinement vécu de par la conformité de l’époque qui l’oblige à affirmer son rôle de dominateur et de protecteur : « il la voulait confiante, promise à lui seul, et disponible comme ces trésors dont il rougissait » (p.8, l.47-48).

2.1.2 En second lieu, l’attitude de Vinca révèle une profonde passion amoureuse qui traduit une conception conformiste de fidélité et de soumission rattachée à un avenir planifié d’avance sans la possibilité de choisir : « elle avait éclaté en larmes, en aveux désespérés, en amères constatations […] l’avenir hors d’atteinte, la fuite impossible, la résignation inacceptable… Elle avait crié : « Je t’aime ! » comme on crie « Adieu ! » et : « Je ne peux plus te quitter ! » avec des yeux pleins d’horreur. » (p.29-30, l.563-567).

2.2 Cependant, bien que Phil et Vinca paraissent contradictoires dans leur façon de concevoir l’amour, cette opposition n’existe qu’en surface puisque qu’une étude plus approfondie de l’attitude des deux personnages révèle une réelle convergence.

2.2.1 En effet, on remarque une opposition de par la simplicité de Vinca et sa détermination amoureuse envers Phil versus le dilemme de ce dernier, ses questionnements à propos du désir sexuel et son incertitude envers le vrai amour : « Tant d’années encore, Vinca, pendant lesquelles je ne serai qu’à peu près homme, à peu près libre, à peu près amoureux ! » (p.20, l.315-316).

2.2.2 Par contre, les deux adolescents font preuve du même conformisme dans leur vision de l’amour. Phil considère que son amour pour Vinca signifie qu’elle lui appartient et Vinca accepte cette appartenance.

3. CONCLUSION

3.1 Synthèse : En somme, l’évolution psychologique de Phil et Vinca fait surgir deux conceptions de l’amour qui, opposant conviction et doute, se rejoignent pour former un amour vrai qui se conforme cependant à la société de l’époque.

3.2 Ouverture : Il serait alors intéressant d’établir une comparaison entre l’amour de Vinca et Phil et l’amour courant des adolescents de la génération actuelle afin d’y constater progression mais aussi régression.

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PARAGRAPHE 2.1.2

En second lieu, l’attitude de Vinca révèle une profonde passion amoureuse qui traduit une conception conformiste de fidélité et de soumission rattachée à un avenir planifié d’avance sans la possibilité de choisir : « elle avait éclaté en larmes, en aveux désespérés, en amères constatations […] l’avenir hors d’atteinte, la fuite impossible, la résignation inacceptable… Elle avait crié : « Je t’aime ! » comme on crie « Adieu ! » et : « Je ne peux plus te quitter ! » avec des yeux pleins d’horreur. » (p.29-30, l.563-567). En effet, Vinca éprouve de forts sentiments amoureux qui ne cèderont ni devant les côtés méconnus de la personnalité de Phil : « Oh ! Phil, je t’aime toujours. Malheureusement, ça n’y change rien. » (p.70 l.1608-1609), ni devant la trahison de Phil avec la Dame en blanc. Effectivement, la réaction de jalousie et de colère de Vinca démontre à quel point la fidélité lui importe, même avant de début d’une relation amoureuse stable et sérieuse. Cela s’explique également par une longue et profonde amitié qui s’avère un pilier indestructible et préparatoire à l’amour. Enfin, Vinca est dépendante et soumise : elle blâme Phil de ne pas être la première femme qui le satisfait sexuellement et même de ne pas être celle qu’il battra en premier. Voilà d’ailleurs un trait de conformisme assez évident rattaché à l’époque du récit. En résumé, Vinca voit l’amour comme un attachement intense et prédéterminé, d’autant plus qu’elle se conforme à l’image de la femme de son temps.

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Depuis des années, Vinca et Phil passent leurs vacances avec leurs parents respectifs en Bretagne, plus exactement à côté de Cancale. Monsieur et Madame Audebert, parents de Phil louent une maison pour moitié avec Monsieur et Madame Ferret pour l’autre moitié, parents de Vinca. Celle-ci

n’a que quinze ans et demie et Phil, depuis quelques mois a furieusement tendance à la toiser du haut de ses seize ans et demie.

Or, Vinca est amoureuse de Phil, amoureuse comme on peut l'être à cet âge, totalement, inaltérablement. Phil, quant à lui, estime que Vinca lui appartient sans discussion aucune, mais ne se considère nullement lié à elle pour autant, autrement que par une très grande amitié.

Un jour, tout à fait par hasard, Phil se trouve face à une très jolie femme d'une trentaine d'années qui lui demande le chemin. Vinca le surprend lui parlant et, instinctivement, se hérisse. Elle n'a pas tort, puisque Phil et cette femme se reverront et qu’elle deviendra même sa toute première maîtresse. Malgré tout il n’oublie pas Vinca, mais la comparaison est difficile quand d’un côté il y a le corps rude et ascétique d’une jeune fille, alors que de l’autre il y a un parfum envoûtant, une chair chaude, accueillante et tout en courbes douces. La découverte d’un vrai corps de femme et de l'amour physique ne se fait pas sans laisser de traces…

J'ai aimé ce livre qui, par ailleurs, se lit très facilement, comme tous les livres de Colette.

Tout d'abord il convient de rendre hommage à la beauté de l’écriture de Colette. Sa langue coule délicatement, souple et déliée.

Mais elle nous donne aussi ici de très belles études psychologiques. Tout d’abord celle de l'adolescence, que ce soit pour Vinca ou pour Phil. «

- Patienter, patienter. (répond Phil à Vinca)… Un mot détesté venait d'empoisonner sa sieste heureuse de lycéen en vacances, dont les seize ans vigoureux s’accommodaient d’oisiveté, de langueur immobile, mais que l'idée d’attente, de patiente évolution exaspérait. » Les deux adolescents sont très différents, mais très crédibles. Phil est plus égoïste, plus léger, volage et trouve normal de l'être. Il se voit bien prolongeant sa nonchalance quelques bonnes années encore, n'ayant aucune idée de ce qu’il voudrait devenir. Il n’a qu'une certitude : en aucun cas il ne fera le métier de son père ! Il ne peut résister à l'attirance que représente « la femme », mais à la fois il entend bien conserver ses droits sur Vinca.

Quant à elle, elle devinera ce qui se passe en Phil et le mènera à tout lui avouer. Alors qu’il est convaincu qu’il l'a perdue, elle reste inébranlable : c'est elle qu'il épousera et personne d'autre. Elle fera ce qu’il faudra et ira même loin. Vinca sait ce qu'elle veut, c’est déjà une petite femme, quand lui n'est qu’un jeune homme assez pataud et empêtré. Et puis, il y a la petite sœur de

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Vinca et les parents. Ces derniers ne voient rien et ne se mêlent quasiment de rien. D'ailleurs, Phil et Vinca les appellent des « Ombres », ce qui est assez conforme à ce que des adolescents pensent de leurs parents à cet âge. ( «et quelque Ombre s’arrêta de remuer », « - Laissez donc, dit une Ombre indulgente. » etc.)

Et enfin il y a cette phrase superbe « Il est peu d'heures dans la vie d’un homme où le corps content, les yeux récompensés et le cÏur léger, retentissant, presque vide, reçoivent en un moment tout ce qu'ils peuvent contenir, et je me souviendrai de celle-ci. »

Je ne peux m’empêcher de la mettre en parallèle avec la phrase de Camus qui écrira quelques années plus tard dans « Noces », lui aussi adolescent : « Le visage mouillé de sueur mais le corps frais dans la légère toile qui nous habille, nous étalons tous l'heureuse lassitude d’un jour de noces avec le monde. »

Lui a pu sentir ce moment de plénitude d’un instant magique.

Ce livre, à l'époque où il a été publié, a du en choquer plus d'un, plus d’une !… Un autre parallèle à faire, mais avec Raymond Radiguet et son « Diable au corps » !