le baromaître n°1 le renseignement

53
TRIBUNE LIBRE LE DÉBAT DES CANDIDATS AU BÂTONNAT LES STAGES EN 10 QUESTIONS CONFESSIONS ENTRE ÉLÈVES AVOCATS INTERVIEW DE MAÎTRE HENRI LECLERC LE MOT DE PIERRE-OLIVIER SUR, BÂTONNIER DE PARIS LE POINT DE VUE DES ÉLÈVES AVOCATS LE BAROMAÎTRE LE JOURNAL DES ÉLÈVES AVOCATS "LE RENSEIGNEMENT" LUMIÈRE SUR... SOMMES-NOUS EN 1984? AOÛT 2015 - #1 PROMOTION HENRI LECLERC

Upload: le-baromaitre

Post on 02-Aug-2016

244 views

Category:

Documents


15 download

DESCRIPTION

L’équipe du Baromaître de la promotion Henri Leclerc est fier de vous présenter son premier numéro consacré au Renseignement. Il est évident que la récente « loi sur le Renseignement » devait être décortiquée par nos rédacteurs mais aussi par Monsieur le Bâtonnier du Barreau de Paris, Maître Pierre-Olivier Sur, qui s’est vivement engagé contre « une loi liberticide qui met les Français sous surveillance généralisée ». Afin de marquer cette première édition, nous avons également eu l’honneur de rencontrer Maître Henri Leclerc dont l’interview, partiellement retranscrire dans l’édition est disponible en intégralité ci-dessous. https://www.youtube.com/watch?v=Kv6tYyB6rX8

TRANSCRIPT

TRIBUNE LIBRELE DÉBAT DES CANDIDATS

AU BÂTONNAT

LES STAGES EN 10 QUESTIONS

CONFESSIONS ENTRE ÉLÈVES AVOCATS

INTERVIEW DE MAÎTRE HENRI LECLERC

LE MOT DE PIERRE-OLIVIER SUR, BÂTONNIER DE PARIS

LE POINT DE VUE DES ÉLÈVES AVOCATS

LE BAROMAÎTRELE JOURNAL DES ÉLÈVES AVOCATS

"LE RENSEIGNEMENT"LUMIÈRE SUR...

SOMMES-NOUS EN 1984?

AOÛT

201

5 - #

1

PROMOTION HENRI LECLERC

Alors que les élèves avocats de la promotion Henri LECLERC participaient à leur première prestation de serment, ce 7 janvier 2015, la France s’apercevait que même le berceau des Droits de l'Homme pouvait être meurtri. Le 11 janvier, dans un élan prodigieux, le peuple

français rappelait, avec ardeur, son attachement aux valeurs de la République.

Nos représentants se préparaient, alors, à (re)lancer le débat concernant la « loi sur le renseignement ».

Ce contexte tendu a poussé l’équipe de rédaction du Baromaître à consacrer son premier sujet de réflexion sur le renseignement. Le lecteur devait être informé sur cette notion, tant d’un point de vue juridique qu’économique, voire social ou philosophique.

La notion de renseignement est sibylline dans la mesure où la signification de ce mot diffère en fonction du contexte dans lequel il s’inscrit mais aussi dans son usage commun au fil de l’Histoire. Etymologiquement, le « renseignement » est le dérivé de « re-enseigner ». L'usage le plus ancien du verbe recouvre l'idée d'apprendre quelque chose à quelqu’un, de donner une indication sur une chose. Dès le XIXe siècle, dans l'espionnage et le contre-espionnage français, le « service des renseignements », distinct de celui des « renseignements généraux », fournit des renseignements politiques au pouvoir étatique.

La littérature et le cinéma d’anticipation ont d’ores et déjà envisagé les dérives et les excès d’un renseignement sans limite.

Dès 1948, dans « 1984 », Georges Orwell élabore le personnage de Winston Smith, incrédule bureaucrate qui craint Big Brother. Il redoute la Police de la Pensée et les télé-écrans, objectifs de vidéo-surveillance permanents. Pourtant, sa soif de liberté le pousse à dépasser sa peur et lui permet de rédiger son journal, trace écrite immortelle d’une vie aseptisée, déshumanisée.

En 1985 dans « Brazil », Terry Gilliam bâtit un chef d’œuvre cinématographique emmené par Sam Lowry, jeune fonctionnaire fidèle au parti, machine bureaucratique impalpable et déshumanisée. Sam n’existera qu’à travers Harry Tuttle, ce révolutionnaire qui affronte le diktat des systèmes de surveillance de masse et l’Etat totalitaire.

Le renseignement peut, en effet, dégénérer en abus et devenir le bras droit d’un système politique autoritaire. À son paroxysme, le renseignement a vocation à diminuer le progrès, affaisser la création intellectuelle, délabrer nos différences et altérer nos libertés.

Quel plus fidèle défenseur des libertés devait être interrogé, si ce n’est le parrain de notre promotion, Me Henri Leclerc. Ardent protecteur des libertés individuelles, Président d’honneur de la Ligue des Droits de l’Homme, il a eu la gentillesse de répondre à notre interview filmée, dont certains extraits sont à découvrir dans ce numéro.

Il est évident que la récente « loi sur le Renseignement » devait être décortiquée par nos rédacteurs mais aussi par Me Pierre-Olivier Sur, bâtonnier du barreau de Paris, qui s’est vivement engagé contre "une loi liberticide qui met les Français sous surveillance généralisée".

Tout récemment, suite à une triple saisine, le Conseil Constitutionnel a validé l’essentiel de cette loi dans sa décision n°2015-713 DC du 23 juillet 2015. Il semble donc capital que chacun puisse prendre conscience de la substance et des conséquences de cette disposition législative, à l’heure où les Etats-Unis - tant critiqués ces derniers mois - adoptent le Freedom Act, qui limite le renseignement de masse.

Florent Gassies, Directeur de Publication.

#1 ÉDITO

ÉDITO

AEA PARIS - LE BAROMAÎTRE | 3

ENTRETIEN AVEC MAÎTRE HENRI LECLERC

ÉDITO

LUMIÈRE SUR... LE RENSEIGNEMENT

5

3

FAUT IL AVOIR PEUR DE LA LOI SUR LE RENSEIGNEMENT ? 8

LE RENSEIGNEMENT ET L'ÉTAT 10

LOI RENSEIGNEMENT : CONSTITUTIONNALITÉ VALIDÉE, MAIS QUID DE NOS LIBERTÉS ? 12

LES RESEAUX SOCIAUX NE SONT PAS VOS AMIS 14

LES ENJEUX JURIDIQUES DU RENSEIGNEMENT ÉCONOMIQUE 16

LES NOUVELLES GUERRES DE L'INFORMATION 18

L'AVIS DU SPÉCIALISTE, FRANCK DECLOQUEMENT 20

L'AVIS DU BÂTONNIER, PIERRE-OLIVIER SUR 24

LE 3 JUILLET 2048 26

TRIBUNE LIBRE 36

LE MOT DU PRÉSIDENT DE L'AEA 36

PRÉSENTATION DES PÔLES DE L'AEA 38

RETOUR SUR LE GRAND DÉBAT DES CANDIDATS AU BÂTONNAT DE PARIS 40

LE STAGE EN 10 QUESTIONS 44

TOUT POUR L'EMPLOI, VOUS AVEZ DIT TOUT ? 46

LA CLINIQUE JURIDIQUE : L'HEURE DES COMPTES 48

Sommaire

LES CONFESSIONS D'UN ÉLÈVE AVOCAT 50

5

4 | AEA PARIS - LE BAROMAÎTRE

LUMIÈRE SUR... LE RENSEIGNEMENT

Henri Leclerc a accepté de nous recevoir dans son cabinet pour répondre à nos questions. L'entretien complet a été filmé

et est disponible sur la chaîne youtube " Le Baromaitre " (https://youtu.be/Kv6tYyB6rX8). Nous vous proposons des extraits choisis.

Le Baromaître : Quelles sont les raisons qui vous ont poussé à accepter d'être le parrain de notre promotion à l'EFB ?

Henri Leclerc : Cela me donne l'occasion de parler à des gens qui arrivent dans la profession d'avocat. Çela m'a fait vraiment plaisir que les élèves de l'École puissent être intéressés par ce qu'un vieil avocat a à leur dire.

Le Baromaître : Depuis votre inscription au Barreau de Paris, quelles sont les évolutions les plus marquantes de la profession ?

H.L. : L'essentiel n'a pas changé, surtout pour ce qui est de la défense pénale. La place de l'avocat, sa fonction tribunitienne, l'essentiel existe toujours …

Ce qui changé, c'est la vie du Palais. Ce qui était le centre même de l'exercice de la profession, le Palais, a changé de fonction, ce qui se manifeste par un changement d'aspect. Lorsque je suis arrivé au Palais, il y avait une foule constante. Aujourd'hui, ce n'est plus qu'un instrument.

La profession s'est par ailleurs élargie notamment avec l'avocat aux conseils, l'avocat d'affaires.

Ce qui a également changé, c'est l'exercice collectif. Lorsque j'ai démarré, cela n'existait pas. L'association était interdite avant 1955. La plupart des avocats avaient leurs cabinets chez eux et les collaborateurs travaillaient de leur côté à leur domicile.

Les nouveaux moyens matériels ont eux aussi participé à l'évolution de la profession ; mais, dans le fond, le Droit n'a pas changé.

Le Baromaître : Vous qui parlez d'Albert Naud et de Maurice Garçon et vous-même qui appartenez à cette tradition de la parole, pensez-vous que celle-ci puisse disparaître du procès pénal ?

H.L. : Non. Cette idée me fait froid dans le dos.

Je pense qu'il y a un danger dans le procès : une forme de régression de la parole se manifeste. Les grandes affaires correctionnelles font toujours l'objet de grandes plaidoiries mais dans les petites affaires correctionnelles, la parole régresse un peu.

Ce qui est préoccupant c'est que je vois par exemple dans les cours d'assises, cette propension qu'il y a aujourd'hui à faire entendre les acteurs du procès par des

ENTRETIENHENRI LECLERC

AEA PARIS - LE BAROMAÎTRE | 5

LUMIÈRE SUR... LE RENSEIGNEMENT

vidéoconférences, les experts par exemple ne viennent plus. Cela coupe la chaleur du débat, la possibilité d'une confrontation réelle. Au pénal, je pense que le contact humain est indispensable.

Au cours de l'instruction aujourd'hui, l'avocat a un rôle plus important qu'il n'avait hier. Jusqu'aux années 2000, l'avocat intervient peu voire pas du tout dans l'instruction. Aujourd'hui, il peut demander des actes d'instruction, il peut soulever des nullités.

Un certain nombre de techniques se sont ajoutées mais dans l'ensemble, rien n'a beaucoup changé. Je pense que la profession, notamment dans le cadre de la défense pénale, ne changera pas énormément. Au fond, je plaide aujourd'hui comme je plaidais il y a 60 ans.

Le Baromaître : Votre carrière d'avocat a été marquée par la défense des libertés fondamentales. Que pensez-vous de la loi sur le renseignement qui vient d'être adoptée et qui est largement critiquée notamment par l'ordre des avocats de Paris ?

H.L. : J'ai été le rapporteur à la commission nationale des droits de l'homme ; j'ai donc été amené à étudier cette loi. L'avis de la Commission est extrêmement sévère.

Je suis critique à propos de cette loi pour plusieurs raisons.

Tout d'abord, elle a été débattue trop vite. L'accélération des mécanismes parlementaires est une tendance que je déplore.

Par ailleurs, le législateur justifie cette loi en disant que les nouveaux mécanismes mis en place étaient déjà pratiqués par la police qui était alors dans l'illégalité. Je m'étonne qu'on prenne ça de façon aussi légère. Les systèmes qui sont organisés, essentiellement les IMSI-catchers et les boites noires, constituent une surveillance généralisée.

Bien entendu, au début, il n'y avait aucune protection des avocats ; aujourd'hui, il y en a une un peu meilleure : cela ne peut pas être fait dans l'urgence sauf décision du premier ministre, la commission sera obligatoirement consultée … C'est un progrès heureusement !

La surcharge de la commission nationale de contrôle des techniques de renseignement, le fait qu'elle n'ait pas de véritable pouvoir décisionnaire d'empêcher une mesure, fait que le contrôle n'est pas suffisant.

Le Baromaître : Cette loi, que beaucoup ont qualifié de « Patriot Act à la française », a été vivement critiquée. Pensez-vous que cela soit lié au contexte dans lequel elle a été adoptée ?

H.L. : C'est tout le problème de la lutte contre le terrorisme. Chaque fois qu'un acte terroriste est commis, une nouvelle loi est adoptée : il y a eu une loi après l'affaire Merah, il y a eu une loi après les attentats contre le musée juif de Bruxelles …

Cette idée, qui était la grande idée du PATRIOT Act, est de dire qu'on est en guerre contre le terrorisme. Mais, il ne faut pas oublier que les terroristes ne sont pas des soldats, mais des criminels.

Ben Laden disait : « dans dix ans, la démocratie n'existera plus ». Il y a deux façons de supprimer la démocratie. La première, c'est de perdre la guerre. La seconde, c'est de perdre ce qui fait l'essence même de la démocratie, c'est cette idée que la suspension des libertés peut faciliter la lutte contre le terrorisme. Je ne le crois pas.

Au sujet de la loi sur le renseignement, l’État estime avoir été aussi loin que possible dans l'efficacité tout en respectant au maximum les principes fondamentaux. Néanmoins, tout d'abord, l'efficacité n'est pas prouvée. Puisque l'on nous dit que ces méthodes étaient déjà utilisées, elles n'ont donc pas démontré leur efficacité absolue.

Par ailleurs, la régression sur les principes fondamentaux est grave : la démocratie républicaine ne peut avoir de force réelle que si elle impose ce système par-dessus tout.

Or, malheureusement, ce n'est avec des lois que l'on résoudra le problème du terrorisme mais par d'autres systèmes et en particulier par des débats essentiels sur des éléments fondamentaux qui sont les difficultés de notre démocratie : les systèmes d'exclusion, les systèmes de ghetto, de pauvreté …

Le Baromaître : Quel est votre avis sur l'avenir de la loi sur le Renseignement suite à la saisine du Conseil constitutionnel ?

H.L. : Est-ce que cette loi est inconstitutionnelle ? C'est tout le problème.

Notre constitution est compliquée et a des faiblesses. Elle permet notamment de faire adopter un projet de loi qui n'a pas fait l'objet d'une discussion par le parlement par le biais de l'article 49 alinéa 3 de la Constitution.

Sur le contrôle général des lois, le Conseil constitutionnel a été une institution relativement faible jusqu'à présent à mon avis. Très peu de lois ont été annulées.

Concernant la loi sur le renseignement, je pense que la Conseil annulera peut-être quelques dispositions mais il ne remettra pas en cause la surveillance généralisée.

Le Baromaître : Vous évoquiez les événements du 7 janvier à la suite desquels la liberté d'expression a été largement

6 | AEA PARIS - LE BAROMAÎTRE

LUMIÈRE SUR... LE RENSEIGNEMENT

débattue. A titre personnel, pensez-vous que cette liberté d'expression devrait et doit être totale ?

H.L. : Certainement pas.

Au moment de la révolution française en août 1786, deux tendances s'affrontent : ceux qui veulent la liberté totale et ceux qui souhaitent la limiter. Une formule est trouvée par La Rochefoucauld et reprise dans l'article 11 de la Déclaration des droits de l'homme : la liberté de communiquer est l'un des droits les plus précieux de l'homme ; chacun est libre d'écrire, de parler, d'imprimer sauf à répondre des abus déterminés par la loi.

L'article 10 de la Convention européenne des droits de l'homme reprend le même raisonnement ; dans un premier temps, il prévoit la liberté et dans un deuxième temps, il énonce les restrictions.

La jurisprudence de la Cour européenne des droits de l'homme sur ce point est sans doute l'une des plus belles constructions de son histoire avec l'arrêt Handyside qui prévoit que la liberté d'expression vaut non seulement pour les idées communément acceptées mais également pour les idées qui choquent. Elle prône principalement la nécessité et la proportionnalité de la loi et de l'interdiction.

J'ai passé ma vie à défendre cette idée et à demander la relaxe des personnes qui étaient poursuivies pour des infractions à la liberté d'expression. Mais je n'ai jamais contesté le principe qu'il y ait des limites ; car il y a des paroles qui tuent. Tout le problème est de savoir où sont les limites et quelles sont-elles.

Le Baromaître : Que pensez-vous des modes d'interception de données utilisés par l’État (notamment les IMSIcatchers) ? L’État doit-il bénéficier de tous les modes de renseignement pour la protection des intérêts publics ?

H.L. : Je ne pense pas. La surveillance généralisée est quelque chose qui me préoccupe.

La protection de la vie privée, l'autonomie de la volonté et la protection des individus me paraissent très importants.

Il est évident que l’État est débiteur d'une certaine sécurité. Mais il y a une idée qui me préoccupe toujours, c'est cette idée de sécurité absolue. La vie en elle-même est porteuse de dangers qui doivent être limités. Il s'agit donc d'un problème d'équilibre : il faut effectivement qu'il y ait certaines surveillances – on ne peut pas les éviter – mais il faut également qu'elles soient limitées.

L'obsession sécuritaire ne peut pas s'imposer au-delà des libertés. Il est absurde de dire que la sécurité est la première des libertés.

Le Baromaître : Le rôle d'internet et des nouveaux moyens de communication a évolué ces dernières années, ce qui a permis à des lanceurs d'alerte individuels ou communautaires, tels que Snowden ou Wikileaks, de renseigner les populations sur des procédés étatiques qui étaient alors tenus secrets. Pensez-vous que le citoyen a un droit au renseignement ?

H.L. : Est-ce qu'il peut y avoir des secrets ? C'est un problème que je me suis posé depuis longtemps.

L’État a droit à ce que certains faits soient secrets, cela me paraît évident, notamment dans les relations internationales par exemple. Le problème est donc de savoir quels faits doivent être tenus secrets et quel est le contrôle de ce secret. Il s'agit encore une fois d'une question de proportionnalité.

Je pense que Snowden et Wikileaks ont permis de savoir des choses essentielles et fondamentales. Mais, en même temps, est-ce qu'il est normal que tout soit révélé alors que ces révélations peuvent porter atteinte à l'ordre public ?

On ne peut pas penser que l’État sera totalement transparent ; il doit l'être le plus possible jusqu'à une nécessité impérieuse, nécessité qui ne doit pas être déterminée par l’État lui-même. On en revient à la séparation des pouvoirs.

Comme citoyen, je suis content de ce qu'a fait Snowden mais je me dis tout de même qu'il ne peut pas avoir tous les droits et qu'il faut une instance indépendante du pouvoir qui détermine où se situent la nécessité et la proportionnalité.

Propos choisis par Margaux GuérinDirecteur de Publication.

AEA PARIS - LE BAROMAÎTRE | 7

LUMIÈRE SUR... LE RENSEIGNEMENT

« Présenté en Conseil des ministres le 19 mars 2015, le projet de loi sur le renseignement a été adopté en première lecture à l’Assemblée nationale le 5 mai. Fruit d’une réflexion approfondie, ce texte permet de renforcer les moyens d’action des services de renseignement tout en protégeant les Français dans le respect des libertés. » Ainsi est présentée la loi dite « renseignement » sur le site du Premier ministre, dans un article intitulé « La lutte contre le terrorisme ». Le texte, adopté à 438 voix contre 90 au lendemain des attentats contre Charlie Hebdo, serait donc une mesure antiterroriste. Son but ? Assurer la sécurité des français. Si simple en apparence ! Oui, mais…

Comment expliquer la rare virulence des critiques qui se sont élevées contre cette loi ? Pourquoi tant de craintes envers ce texte, dénoncé par certains comme une ingérence intolérable dans la vie privée des citoyens, et comparé par d’autres à un Patriot Act à la française ?

LES ÉCOUTES DES BOÎTES NOIRES ET LA TRAQUE DES IMSI-CATCHERS

Parmi les nouveaux moyens autorisés, les IMSI-Catcher et les boîtes noires ont cristallisé les tensions et déchainé les passions. Ils sont emblématiques de la résistance. Un coup d’œil.

Le fonctionnement des IMSI-catchers est des plus simples. Avec l’apparence d’une antenne-relais de téléphonie mobile, le dispositif capte les appareils proches qui s’y connectent automatiquement et

à l’insu de l’usager. L’équipement reçoit ensuite les communications de ces téléphones et peut même, dans certains cas, accéder à leur contenu. L’IMSI-catcher transmet ensuite à son tour les communications à un opérateur, et l'appel a lieu normalement, ni vu ni connu. Ainsi, ce dispositif n’est pas conçu pour des écoutes ciblées, et c’est bien en cela qu’il est honni par les défenseurs de la vie privée : tous les téléphones qui se trouvent à proximité sont piratés

Les boîtes noires peuvent être comparées à des sondes placées sur les réseaux. Leur but est double : d’abord, capter l’intégralité des communications Internet, les nôtres entre autres. Ensuite, déterminer automatiquement, à l’aide d’algorithmes uniquement, les internautes susceptibles de représenter une menace.

C’est le caractère généralisé et indiscriminé de la collecte des données qui a été pointé du doigt. Comment garantir la préservation de la vie privée si toutes les données d’un internaute, même les plus sensibles, peuvent être collectées ? Le gouvernement a tenté de rassurer les plus dubitatifs en garantissant que seules des données anonymes seraient collectées. En outre, l’identification de l’internaute n’interviendrait que si une menace était effectivement détectée.

Néanmoins, l’argument n’a pas convaincu les professionnels du secteur, et notamment l’Inria1. Selon cet institut, cela ne serait qu’un leurre, puisqu’il n’existerait actuellement aucune

FAUT-IL AVOIR PEUR DE LA LOI SUR LE RENSEIGNEMENT?

1 Institut national de recherche en informatique et en automatique

8 | AEA PARIS - LE BAROMAÎTRE

LUMIÈRE SUR... LE RENSEIGNEMENT

technique sûre d’« anonymisation ». C’est donc toutes les données personnelles des internautes qui pourraient être aspirées et passées au crible.

Aussi les critiques ont étrillé le projet de placer un algorithme au cœur du dispositif. En effet, un programme informatique, même bien réglé, produit systématiquement des erreurs, d’autant plus nombreuses que la masse de données à traiter est importante. Ainsi, il suffirait d’un algorithme mal codé, pour qu’un citoyen « lambda » soit surveillé comme un terroriste en puissance, pour peu qu’il souhaite réserver un vol vers une zone surveillée et qu’il s’intéresse aux armes... Bernard Cazeneuve a tenté d’apaiser les inquiétudes, en assurant que l’algorithme serait en permanence contrôlé et amélioré par des experts. Mais cela n’a pas suffit à calmer les esprits récalcitrants. Outre le risque de dérive, les opposants à la loi dénoncent son inefficacité. Selon eux, contourner la surveillance de l’algorithme serait un jeu d’enfant, puisqu’il suffirait d’installer un VPN2 pour y échapper (l’internaute se connecte alors, de manière sécurisée, vers un ordinateur tiers par lequel transite sa navigation sur Internet). Alors les citoyens sacrifieraient leur vie privée sur l’autel d’une surveillance défectueuse…

En outre, l’installation des boîtes noires se ferait sans l’accord préalable des acteurs du numérique, provoquant un véritable tollé parmi eux. Opérateurs, fournisseurs d’accès Internet et hébergeurs (mais aussi le Conseil National du numérique, Médiapart ou Libération) ont ainsi rejoint la cause du mouvement « ni pigeons ni espions » afin de lutter contre « la surveillance généralisée d’Internet ». Parmi ces derniers, certains ont menacé de délocaliser leur activité et d’autres l’ont déjà fait pour s’installer dans des contrées « plus respectueuses des libertés individuelles », faisant ainsi de cette loi, par ricochet, un possible frein à la croissance.

UN PARE-FEU SOLIDE ?

Difficile de concilier renforcement des moyens de renseignement et préservation des libertés individuelles. Pour tenter d’assurer cet équilibre extrêmement délicat, la loi du 5 mai a mis en place une Commission nationale de contrôle des techniques de renseignement (CNCTR), dont le rôle principal consiste à rendre un avis pour chaque demande de surveillance émise par les Services de renseignement auprès du ministre. Si les défenseurs de la loi comparent la CNCTR à un garde-fou contre toute ingérence abusive dans la vie privée, c’est car elle n’est pas seulement un filtre contre d’éventuels

excès de zèle mais aussi un recours. En effet, toute personne suspectant une surveillance non justifiée pourra saisir cette commission en première instance.

Le pouvoir de la CNCTR est néanmoins à relativiser : son avis ne sera que consultatif, la décision finale revenant au premier ministre. De plus, la seule possibilité de saisir la commission peut apparaître comme une protection des libertés bien insuffisante, comparée aux risques que font peser sur ces dernières les techniques de renseignement permises par la loi du 5 mai 2015.

UN CHAMP D’APPLICATION TRÈS VASTE

La controverse autour de ce dispositif est telle que ses détracteurs, notamment le Conseil national du numérique (CNNUM), voient dans ce texte un cheval de Troie légalisant une surveillance généralisée sous prétexte de lutte contre le terrorisme.

Il est vrai que le champ de la loi ne se borne pas à la lutte contre le terrorisme. Elle concerne aussi des domaines tels que « l’indépendance nationale », « l’intégrité du territoire », « la prévention des atteintes à la forme républicaine des institutions » ou « la criminalité et la délinquance organisées » Autant de termes aux contours mal définis. Ne permettraient-ils pas, par exemple, de surveiller des opposants politiques ou des mouvements radicaux comme les zadistes ? C’est pourquoi le flou des formulations retenues dans la loi a été particulièrement matraqué par les critiques. Celles-ci dénoncent une forme de malhonnêteté intellectuelle, celle d’utiliser l’émotion suscitée par les événements de janvier 2015 pour faire passer une loi beaucoup plus intrusive qu’elle ne le paraitrait.

Danger pour la démocratie ou texte protecteur ? Le débat semble désormais clos puisque le projet a été adopté par l’Assemblée nationale et le Sénat et le Conseil constitutionnel a déclaré conforme à la Constitution la majeure partie de la loi. Pouvons-nous pour autant affirmer qu’un équilibre entre surveillance et garantie des libertés, c'est-à-dire une solution à « la quadrature du net »3 a été trouvé ? Le doute subsiste…

Mûre MAESTRATIElève avocat

2 Virtual private network, ou réseau privé virtuel

3 Expression reprise du nom de l’association éponyme, défendant « les droits et libertés des citoyens sur internet »

AEA PARIS - LE BAROMAÎTRE | 9

LUMIÈRE SUR... LE RENSEIGNEMENT

Sortons du modèle romanesque de l’espion érigé en fantasme pour instaurer cet objet dans une dimension plus politique,

à l’épreuve des relations internationales. Le renseignement s’inscrit dans l’histoire des États, aussi bien comme garant de sa souveraineté que comme raison d’État. Le renseignement a en effet permis la protection de l’État contre des menaces extérieures et intérieures en autorisant notamment le recours à des moyens particuliers et singuliers, interdits aux autres structures étatiques. Le secret s’établit en pratique comme un élément incontournable à tout système politique.

Le renseignement, l’angle avec lequel est traité une information élaborée, a été défini dans le Code pénal de 1810 comme « l’intelligence avec l’ennemi ». Sa définition est compliquée tant elle peut être extensive. Le renseignement englobe à la fois, une forme de connaissance, les structures qui le recueillent ou encore les activités diverses1 qu’il entraîne, telles que les opérations spéciales, le contre-espionnage, le rassemblement d’informations prospectives, l’analyse géographique… Retenons la définition de Michael Warner, qui le conçoit comme une « activité secrète de l’État visant à comprendre ou à influencer les entités étrangères »2. Compte tenu de l’importance actuelle des centres d’intelligence, quelle part a joué le renseignement dans la protection et la construction de l’État moderne que

nous connaissons ? Par ailleurs le renseignement et l’État ne sont-ils pas deux notions qui peuvent également s’opposer tant le renseignement peut passer outre l’État et ses lois ?

Sous l’Ancien Régime, le renseignement et la diplomatie sont étroitement liés, puisque le renseignement extérieur du souverain repose à la fois sur l’appareil diplomatique et consulaire mais également sur des informateurs occasionnels tels que les commerçants ou les associations marchandes intervenant pour leurs intérêts économiques. L’espionnage est rendu difficile par la fonction que doit nécessairement assurer tout diplomate, celle de la représentation de son État. Cette pratique d’un espionnage par le biais d’un axe diplomatique, pourtant interdite par le jus gentium, évolue et entre par la suite dans la transparence et la légalité. Le renseignement cesse d’être le seul privilège des diplomates et les monarques européens autorisent progressivement ces contacts, jusqu’alors clandestins.

Sous l’Empire, Napoléon rompt avec l’Ancien Régime en favorisant une fonction de haute police3 élaborée par Joseph Fouché et s’appuyant sur les nouveaux préfets, la police, la gendarmerie et le Ministère de la Police Générale. Un tel fonctionnement est révélateur d’une volonté de l’Empereur de parvenir au contrôle des individus susceptibles de menacer l’État de

LE RENSEIGNEMENT ET L'ÉTAT

1 Sherman KENT, Strategic Intelligence for American World Policy, 1949.

2 Michael WARNER, Wanted : A defini-tion of Intelligence, Studies in Intelligence, Volume 46 number 3, 2002.

3 Lode VAN OUTRIVE, Les services de renseignement et de sécurité, Courrier hebdomadaire du CRISP 1999/35.

DESSIN DE MICHAËL VAZ D'ALMEIDA

ELEVE AVOCAT

10 | AEA PARIS - LE BAROMAÎTRE

LUMIÈRE SUR... LE RENSEIGNEMENT

l’intérieur et de mettre fin au contre-espionnage. Le réseau diplomatique se cantonne à la collecte du renseignement politique dès la IIIème République en France, alors que le renseignement militaire est désormais confié à l’Armée. La professionnalisation4 des Services Secrets est notamment actée en France par la création d’un bureau consacré au renseignement militaire au sein de l’État major général en 18745. Au sein de l’État, deux ministères ont désormais la charge des pratiques d’espionnage et de contre-espionnage : ceux de l’Intérieur et de la Guerre6. Par ailleurs, une coopération inter-étatique bilatérale se développe, notamment entre les services français et russes afin de maîtriser les événements révolutionnaires du XIXème siècle. Parallèlement, le Topographical and Statistical Department en 1855 et l’Intelligence Service en 1909 voient le jour en Angleterre, ils seront à l’origine des départements MI-5 et MI-67. Le poids du renseignement apparaît en définitive indéniable et essentiel à l’État tant il a participé à son édification, sa protection et à l’orientation des relations internationales par le passé.

Pour autant, le renseignement même s’il a aidé à la construction des États, participe aussi de sa limitation. En effet, même si le renseignement demeure une composante essentielle de l’édification et de l’action des États, en ce qu’il permet d’en assurer sa protection et de réduire l’aléa des relations internationales, sa collecte demeure ambiguë au regard de certains fondements des démocraties contemporaines.

À ce titre, le XVIIème siècle consacre la mise en place de cadres légaux du renseignement diplomatique : les privilèges d’extra-territorialité et l’impossibilité de l’espionnage. L’organisation des réseaux d’espionnage en temps de guerre est régulée par le droit international depuis les Conventions de la Haye de 1899 et 1907 qui imposent notamment le jugement des espions pris sur le fait et caractérisent la pratique de « clandestine »8. Cependant ce même réseau n’est pas régulé en temps de paix ce qui traduit une volonté par les États de ne pas imposer de contraintes en la matière. Une ambivalence demeure par conséquent dans les rapports entretenus entre la pratique du renseignement et les États, notamment du point de vue de sa légalité.

L’attitude des États à l’égard de la pratique du renseignement demeure paradoxale, car officiellement rejetée, elle demeure unanimement pratiquée. Pourtant les principes et modes d’action des services de renseignements, souvent

clandestins, demeurent une entorse à l’État de droit même s’ils se trouvent justifiés par le principe de la raison d’État. Cet impératif est notamment formulé en France par la devise de la Direction Générale de la Sécurité Extérieure « partout où nécessité fait loi ». La raison d’État est définie comme ce qui est nécessaire pour que la République conserve exactement son intégrité9. Ainsi le renseignement demeure « une activité politique à l’épreuve du droit », nécessaire à la sécurité des individus mais qui peut se révéler dommageable pour les libertés fondamentales10. Les critiques actuelles de la société civile relatives à la Loi Renseignement adoptée en première lecture par l’Assemblée Nationale le 5 mai dernier en sont une illustration. L’usage de nouvelles technologies en matière de couverture numérique tels que la légalisation de l’usage des IMSI Catcher, un matériel d’espionnage téléphonique, est vivement critiqué.

Néanmoins, la persistance et la prégnance du renseignement dans nos sociétés contemporaines demeurent, notamment au travers de l’idée de sécurité nationale, prégnance renforcée par un certain nombre d’actes terroristes au XXIème siècle. Face à un ennemi insaisissable, le renseignement, son analyse et son partage sont devenus un élément de puissance. L’information fait désormais l’objet d’une normalisation internationale et d’un partage dans sa collecte autour de la pratique de l’« Information Sharing » initiée par les États-Unis. Cette pratique est favorisée par l’inadaptation du cadre national face aux nouvelles menaces transnationales11.

Finalement l’histoire du renseignement est celle d’une réputation sulfureuse, de par son instrumentalisation d’abord et de l’ambivalence qu’il entretient avec la légalité ensuite. Fondamentalement, les services secrets sont au cœur de l’État parce qu’ils remplissent des fonctions régaliennes et garantissent la défense des intérêts nationaux. Actuellement, source de coopération, le renseignement voit ainsi son statut évoluer même si cet échange ne demeure envisageable qu’autour d’intérêts communs majeurs. La concurrence entre services demeure, à l’image des récentes révélations relatives à l’espionnage par l’Allemagne de plusieurs hauts fonctionnaires français et ce pour le compte de la National Security Agency américaine.

Maëva LagouteElève avocat

4 Marc-Olivier BARUCH, Vincent DUCLERT, Serviteurs de l’État. Une histoire poli-tique de l’administration française 1875-1945. Paris La Découverte, 2000.

5 Décret du 12 mars 1874 créant un 2ème bureau exclusivement dédié au renseigne-ment « statistiques militaires-bureau historique ».

6 Sébastien LAURENT, Aux origines de la “guerre des polices” : militaires et policiers du renseignement dans la République (1870-1914), in Revue historique, CCCXIV/4, p. 767-791.

7 Yves LACOSTE, Renseignement et intel-ligence économique, La Découverte, Hérodote, 2011/1.

8 Convention de La Haye de 1907, Chapitre II « Des Espions » article 29.

9 Michel FOUCAULT Sécurité, territoire et population, Gallimard, 2004.

10 Olivier FORCADE et Sébastien LAURENT, Secrets d’État, Pouvoirs et renseignement dans le monde contemporain, Paris, Armand Colin, 2005.a

11 Boris LE CHAFFOTEC, Promouvoir l’échange du secret. Les États-Unis et la lutte antiterroriste, 1990-2000, Bulletin de l’Institut Pierre Renouvin 2012/2

AEA PARIS - LE BAROMAÎTRE | 11

LUMIÈRE SUR... LE RENSEIGNEMENT

La loi sur le renseignement a largement été adoptée par l’Assemblée nationale le 5 mai 2015 en première lecture. Cette loi s’inscrit dans un climat particulier suite

aux attentats du mois de janvier dernier. Il semble aujourd’hui indispensable d’améliorer notre système de renseignement compte tenu des abus issus de la loi de 1991, mais surtout de l’évolution des technologies et du développement des moyens de communication et d’Internet. Pour autant, un tel dispositif ne justifie pas, sous couvert de lutter contre le terrorisme, de porter atteinte aux libertés individuelles de chacun.

Les cas permettant de recourir aux techniques de renseignement sont très larges. En effet, dès lors qu’il existera un lien, même minime, avec la prévention contre le terrorisme, les activités économiques, politiques et sociales pourront, d'après la loi, faire l’objet d’une surveillance de la part des services de l’Etat par l’intermédiaire de divers moyens comme, par exemple, les données informatiques, les boîtes noires et les IMSI-catchers. Ce large champ d’application laisse entrevoir de potentielles dérives, notamment en matière de protection des données personnelles, mais surtout en ce qui concerne les libertés individuelles tel que le respect de la vie privée et la liberté d'expression et d'opinion. Ces dérives pourraient être maitrisées

si le juge judiciaire effectuait un contrôle de ces procédures puisque, conformément à l’article 66 de la Constitution de 1958, il est le garant de nos libertés individuelles. Cependant, le Gouvernement a préféré totalement exclure l'autorité judiciaire de la loi, choisissant ainsi d’attribuer la protection des libertés individuelles au juge administratif, et plus précisément, au Conseil d'État.

La loi sur le renseignement instaure un droit de recours devant le Conseil d'État ouvert à tout citoyen ayant intérêt pour agir. Les juges exerceront un pouvoir de pleine juridiction et seront habilités ès qualité au secret de la défense nationale qui ne pourra donc leur être opposé. Le Conseil d'État pourra également être saisi par la Commission nationale de contrôle des techniques de renseignement (CNCTR) lorsqu’elle estimera qu’une autorisation a été accordée irrégulièrement. La haute juridiction aura le pouvoir d’annuler la décision litigieuse, d’indemniser le requérant, d’ordonner la destruction des données collectées et de saisir le procureur de la République si elle estime qu’une infraction a été commise (titre IV du projet de loi).

De son côté, la CNCTR, autorité administrative indépendante, se voit attribuer le rôle de « clef de voûte » du dispositif de

LA LOI SUR LE RENSEIGNEMENT : CONSTITUTIONNALITÉ VALIDÉE MAIS QUID DE NOS LIBERTÉS ?

12 | AEA PARIS - LE BAROMAÎTRE

LUMIÈRE SUR... LE RENSEIGNEMENT

régulation et de contrôle d’après le Gouvernement1. Cette commission sera composée de magistrats, d’une personnalité qualifiée pour ses connaissances en matière de communications électroniques et de parlementaires. La CNCTR exercera son contrôle dans plusieurs situations. Tout d’abord, elle agira a priori en formulant un avis, seulement consultatif, avant toute autorisation de mettre en œuvre une technique de renseignement. Ensuite, pendant la mise en œuvre de la technique, elle pourra demander que lui soient communiquées toutes les informations utiles. Enfin, elle aura également un pouvoir de contrôle a posteriori, une fois le recours à la technique terminé. Dans les cas d’urgence absolue, l’autorisation de mettre en œuvre une technique de renseignement pourra être délivrée par le Premier ministre et sans avis préalable de la commission. Elle devra néanmoins en être immédiatement informée et pourra recommander son interruption.

L'instauration de ces moyens de contrôle et de recours conduit le Gouvernement à affirmer que « les services de renseignement travaillent par nature dans la discrétion, voire dans le secret de la défense nationale. Cela ne signifie ni l’absence de contrôle indépendant ni l’arbitraire ». Pour autant, la CNTCR ne se verra pas dotée d’un pouvoir de décision car cela serait contraire à l’avis rendu par le Conseil d'État au sujet des autorités administratives indépendantes2. In fine, le pouvoir de contrôle reviendra donc à la haute juridiction qui, comme nous le savons, exerce à la fois un rôle de conseiller du Gouvernement et de juge administratif. Du fait de cette dualité de compétences du Conseil d'État et du défaut de réel pouvoir décisionnel confié à la CNCTR, il semble légitime de s’interroger sur le caractère indépendant et non arbitraire de cette procédure.

De plus, même à procéder à une interprétation extensive de l’article 66 de la Constitution, il est très surprenant de ne pas avoir intégré le juge judiciaire dans cette procédure de contrôle. D'un point de vue plus pragmatique, que va-t-il se passer si des écoutes révèlent la préparation ou la réalisation d’une infraction ? C’est bien le juge judiciaire qui sera compétent dans une telle situation, que ce soit en matière d’instruction ou pour juger l’issue du litige. En l’état, il ne pourra pas se prononcer sur la validité des écoutes et devra donc surseoir à statuer. Intégrer le juge judiciaire dans cette procédure aurait, d’une part, permis de garantir un contrôle effectif de nos libertés individuelles et, d’autre part, semblé plus logique dans la mesure où le juge judiciaire maîtrise parfaitement ces procédures d’exception, comme en témoigne la spécialisation des juges du pôle antiterrorisme du tribunal de grande instance de Paris. Les avocats et les principaux syndicats de la magistrature restent

fermement opposés à cette nouvelle loi. Ils n’ ont pas été les seuls à exprimer des doutes. En effet, le Président de la République ainsi que plus de soixante députés, toutes familles politiques confondues, avaient eux-mêmes saisi le Conseil constitutionnel qui a depuis prononcé la constitutionnalité de l’essentiel du texte malgré d’importantes interrogations soumises aux Sages.

Les députés avaient ainsi émis des réserves quant à la constitutionnalité de certaines dispositions, notamment au sujet de la dévolution du contrôle à l’autorité administrative, la composition de la CNCTR, la question des données collectées, et surtout la possibilité, dans certains cas, d’un traitement automatisé de ces données. De plus, le choix de certaines formules, jugées trop larges par les députés, pouvait porter atteinte à la sécurité juridique. Tel était, en particulier, le cas de l’article 2 du projet de loi qui définit les cas permettant de recourir aux techniques de renseignement mais également de l’absence de définition de la notion « d’informations et documents » pouvant être recueillis.

La saga constitutionnelle était loin d’être terminée car des organisations de défense des droits de l’Homme et des libertés comme Amnesty International France, le Cecil, le Creis-Terminal, la Ligue des droits de l’Homme, le Syndicat des Avocats de France et le Syndicat de la Magistrature avaient remis, début juillet, au Conseil constitutionnel, un mémoire sur la loi sur le renseignement. Jamais le Conseil constitutionnel n’avait été autant sollicité pour un même texte. La diversité des acteurs à l’origine de ces saisines, au-delà de traduire une véritable inquiétude pour nos libertés fondamentales, a eu le mérite de prouver qu’une mobilisation collective était possible.

L’essentiel de la loi sur le renseignement a été validé par le Conseil constitutionnel le 23 juillet 2015. Seules trois dispositions ont été censurées. Il s’agit tout d’abord de celle qui prévoit qu’il peut être dérogé à la nécessité d’obtenir l’accord préalable du Premier ministre en cas d’ « urgence opérationnelle ». Ensuite, l’article relatif aux mesures de surveillance internationale a été déclaré contraire à la Constitution au motif qu'en ne définissant ni les conditions d'exploitation, de conservation et de destruction des renseignements collectés, ni celles du contrôle, par la CNCTR, de la légalité des autorisations délivrées et de leurs conditions de mise en œuvre, la protection des libertés fondamentales des citoyens n’est pas assurée. Enfin, un article relatif aux crédits mis à la disposition de la CNCTR a été censuré car il relève du domaine réservé des lois de finances.

Joséphine de Beaucorps et Camille Quinton,Elèves avocats

1 Site Internet du Gouvernement : www.interieur.gouv.fr/Actualites/Dossiers/Projet-de-loi-sur-le-renseignement

2 Avis rendu préalablement à l’adoption de la loi de 1991 relative aux interceptions de sécurité, et rappelé dans son rapport annuel de 2001 consacré aux autorités adminis-tratives indépen-dantes « dans le domaine du pilotage des poli-tiques publiques mettant en jeu les responsabilités ré-galiennes de l'État (…) l’attribution d’un pouvoir de décision à une AAI ne saurait être envisagée ».

AEA PARIS - LE BAROMAÎTRE | 13

LUMIÈRE SUR... LE RENSEIGNEMENT

Le projet de loi sur le renseignement a été la source de nombreux débats et a inquiété la société civile, qui craint, sous

couvert de protection contre le terrorisme, une atteinte aux libertés individuelles. Le problème de la conciliation entre l’opportunité pour les autorités de surveiller les individus et le respect de leurs libertés n’est pas complètement nouveau en réalité. En effet, l'explosion des réseaux sociaux, tels que Facebook, et leur utilisation par l’employeur pour se renseigner sur les salariés, avant ou après leur embauche, a donné lieu à un contentieux prud’homal exponentiel.

AU STADE DU RECRUTEMENT

Qui dit réseaux sociaux, dit visibilité sur Internet, et les employeurs y ont vu un formidable outil de recrutement. Il convient cependant d’envisager deux cas de figure, celui des réseaux dits professionnels, d’une part, et des réseaux sociaux plus personnels, d’autre part.

Profiter d’Internet pour voir ou être vu lorsque l’on recherche un emploi est monnaie courante, ce qu’ont bien compris les développeurs de réseaux sociaux professionnels, de type LinkedIn ou Viadeo, conçus pour favoriser l’émergence d’un réseau professionnel et optimiser sa visibilité. De fait, l’utilisation de ces sites par l’employeur aux fins de dénicher le profil adéquat ou de se

renseigner sur un candidat pour décider de lui proposer un entretien, est parfaitement admissible. À charge pour les candidats de s’assurer de la cohérence des informations diffusées via ces réseaux et le CV soumis aux employeurs.

En revanche, il en est autrement des réseaux de type Facebook qui revêtent une dimension plus personnelle, à défaut d’être privée. En effet, l’article L1221-6 du code du travail fait interdiction à l’employeur de recueillir, sous quelque forme que ce soit, sur un candidat à un emploi, des informations ayant une autre finalité que d'apprécier sa capacité à occuper l'emploi proposé ou ses aptitudes professionnelles. La possibilité laissée à l’employeur de se renseigner sur un candidat à un poste trouve ici sa limite : les informations doivent présenter un lien direct et nécessaire avec l'emploi proposé ou avec l'évaluation des aptitudes professionnelles. Elles ne peuvent donc avoir trait à la vie personnelle que le salarié dévoilerait sur les réseaux sociaux, ou à l’exercice de ses libertés individuelles. Cette prohibition est renforcée lorsque le renseignement a pour objet d’écarter une personne d'une procédure de recrutement ou de l'accès à un stage pour des motifs discriminatoires1, agissement qui constitue un délit pénal2. On l’aura compris, s’il est admis que les employeurs fassent usage des réseaux sociaux pour se renseigner sur un postulant, ils ne disposent d’aucun droit à l’information, encore

TRAVAILLONS HEUREUX, VIVONS CACHÉS :

LES RÉSEAUX SOCIAUX NE SONT PAS VOS AMIS

1 Article L1132-1 du code du travail.

2 Article 225-2 du code pénal.

14 | AEA PARIS - LE BAROMAÎTRE

LUMIÈRE SUR... LE RENSEIGNEMENT

moins si cette information n’a pas un caractère purement professionnel.

Pour autant, il ne fait aucun doute que les employeurs, même les plus rigoureux, sont influencés par la nature des informations disponibles sur les réseaux sociaux. Cependant, au stade de la pré-embauche, il est extrêmement difficile de caractériser une infraction aux dispositions en vigueur, faute de preuve.

Ainsi, il est primordial de contrôler sa visibilité internet, et de faire un usage raisonnable des réseaux sociaux, d’autant plus que la surveillance des réseaux sociaux par l’employeur ne s’arrête pas toujours à la signature du contrat.

PENDANT L’EXÉCUTION DU CONTRAT DE TRAVAIL

Ici encore, l’employeur qui surveillerait ses salariés ne saurait invoquer une cause tirée de la vie personnelle du salarié pour mettre un terme au contrat de travail3. Ce principe souffre néanmoins de deux tempéraments : si le comportement du salarié cause un trouble à l’image ou au fonctionnement de l’entreprise.

Les choses énoncées clairement se comprennent aisément, dit-on. Rien n’est moins sûr. Et pour cause, l’usage des réseaux sociaux tend à gommer la stricte frontière entre vie professionnelle et vie privée, cette dernière étant affichée sur un espace regardé comme public. Doit-on comprendre que, lorsque le salarié s’expose sur des réseaux sociaux, il confère automatiquement un droit à l’information à l’employeur que ce dernier pourrait utiliser contre lui ? Faute de dispositions légales, c’est à la jurisprudence qu’est revenue la tâche de redessiner la sphère privée autour, notamment, de la liberté d’expression.

Il semblerait, au regard du droit civil, que tout ne serait alors qu'une question de paramétrage. La Cour d'appel de Lyon, dans un arrêt du 24 mars 2014, a retenu, comme étant fondé sur une cause réelle et sérieuse – mais sans toutefois reconnaître la qualification de faute grave – le licenciement du salarié, qui, « en n'activant pas les critères de confidentialité de son compte Facebook a pris le risque que ses propos, qu'il pensait privés soient accessibles à d'autres salariés de la société eux-mêmes titulaires d'un compte Facebook »4. Il suffirait donc de paramétrer un accès restreint pour que la

vie privée reste privée5, ce qui marquerait la volonté d’entretenir une correspondance confidentielle, dans la logique de l’affaire Nikon de 2007. Reste que, si les propos causent un préjudice à l’employeur, ils ne sont pas exempts d’être sanctionnés par un licenciement au regard du droit du travail, soit qu’ils entrainent un trouble objectif à l’image de l’entreprise, comme c'était le cas dans l'affaire John Galliano, soit qu’ils permettent de caractériser une faute professionnelle, même de chez soi et de son compte Facebook personnel. Une injure est par définition une faute, et le caractère professionnel de celle-ci est plus facilement caractérisable qu’on ne le pense. En effet, il suffit que les propos soient visibles par des collègues pour constituer une faute professionnelle, y compris lorsque l’accès y est restreint. Prudence donc quant au choix des collègues que le salarié invite à le suivre.

Quid si, sur Facebook, l’entreprise est « amie » avec un des salariés ? Rien ne lui interdit de partager l’intimité de ce dernier. C’est à l’employé que revient alors la charge de décider, ou non, d’accorder un droit de regard à son employeur sur sa vie privée. S’il accepte « l’invitation » de l’entreprise, c’est à ses risques et périls qu’il renseignera l’employeur. En revanche, il est interdit à l’employeur de créer un faux profil, ou d’en usurper un pour accéder à la vie personnelle du salarié, de sorte que, s’il venait à utiliser des éléments obtenus de façon déloyale pour licencier le salarié, la procédure serait requalifiée de licenciement sans cause réelle et sérieuse. Cette atteinte ouvrirait, de plus, la possibilité, pour le salarié, d’obtenir la réparation du préjudice qu’a entrainé la perte de l’emploi ainsi que l’atteinte portée au respect de sa vie privée et familiale.

Julia AZRIA,Elève avocat

3 Cass. Soc., 20 nov. 1991, n°89-44605

4 CA Lyon, 24 mars 2014, n°13/03463

5 Cass. Soc., 10 avril 2013, n°11-19530

AEA PARIS - LE BAROMAÎTRE | 15

LUMIÈRE SUR... LE RENSEIGNEMENT

Les médias se font régulièrement l’écho d’affaires d’espionnage industriel. Le mois de mai a ainsi été marqué par l’interpellation de six ressortissants chinois

soupçonnés d’espionnage économique et de vols de secrets commerciaux dans la téléphonie mobile aux États-Unis au bénéfice de la Chine. Quelques semaines auparavant, le groupe aéronautique européen Airbus faisait part de son intention de déposer plainte contre X pour espionnage à la suite de fortes suspicions d’espionnage industriel des services de renseignement allemand pour le compte de la NSA américaine.

Ces derniers événements illustrent la prégnance du renseignement économique sur la scène internationale et posent la question de son encadrement légal.

L’APPRÉHENSION DÉLICATE DU RENSEIGNEMENT ÉCONOMIQUE

Si le renseignement est une pratique millénaire, il s'est considérablement développé depuis la fin de la guerre froide et a été révolutionné par l'arrivée d'internet, devenu le terrain de prospection idéal à la collecte d'informations de tout type.

Le concept de « guerre économique » est contemporain de cette période : alors qu'auparavant les États s'affrontaient

pour la conquête des territoires, ils s'opposent désormais pour acquérir des parts de marché. L'affrontement demeure. Il revêt toutefois une nouvelle forme : autrefois ennemis, aujourd’hui concurrents.

Dans ce nouvel environnement hyperconcurrentiel, les acteurs publics et privés se livrent à des activités de renseignement afin de renforcer la compétitivité d’un État, d’une entreprise ou d’un établissement de recherche.

Le renseignement se distingue de la simple information, largement accessible sur internet, dans les médias ou différents travaux. Il correspond au contraire à un « cycle de l’information » : celle-ci est ciblée en fonction des besoins exprimés, collectée, traitée et analysée. Il sous-tend la confidentialité et la haute valeur ajoutée de l’information livrée.

L’espionnage industriel constitue une partie du volet illégal du renseignement économique. Les méthodes employées pour accéder à l’information sont strictement prohibées par la loi et peuvent aller de l’écoute téléphonique, à la corruption voire à des faits de violence.

LES ENJEUX JURIDIQUES DU RENSEIGNEMENT ÉCONOMIQUE

16 | AEA PARIS - LE BAROMAÎTRE

LUMIÈRE SUR... LE RENSEIGNEMENT

La « guerre de l’information » s’inscrit dans ce sillage. Elle désigne l’ensemble des actions ayant pour objectif de causer un dommage à un concurrent ou de garantir son hégémonie. Cela peut consister notamment à saboter la réputation d’une entreprise concurrente dans le but de capter ses clients et décourager les embauches de collaborateurs performants.

A l’inverse, l’Intelligence Économique (IE) est une méthode légale, qui se veut éthique et transparente. Elle a été principalement développée aux États-Unis et au Japon dans un contexte de fin de guerre froide.

Cette discipline part du postulat que la compréhension de son environnement est essentielle pour les acteurs économiques confrontés à une compétition internationale féroce.

L’IE repose traditionnellement sur trois piliers : la veille, l’influence et la sûreté.

- La veille se fait non seulement par le biais d’internet mais aussi par des contacts humains. Elle a pour objet la collecte et l’analyse d’informations permettant aux acteurs économiques de détecter d’éventuelles menaces ou d’élaborer des stratégies. Elle s’accompagne d’autres méthodes dont le benchmarking (processus d’analyse comparative) ou le knowledge management (gestion du patrimoine informationnel propre à une entreprise).

- L’influence d’une entreprise est essentielle et passe par une communication maîtrisée, tant en interne qu’en externe, au service d’une réputation positive.

- Enfin, la sûreté permet de protéger le patrimoine informationnel des entreprises et implique la formation des collaborateurs aux risques. Ceux-ci doivent ainsi faire preuve d’une vigilance accrue lors de leurs déplacements professionnels à l’étranger. La fouille des chambres d’hôtel ou des ordinateurs à la recherche d’informations confidentielles est en effet une pratique répandue.

En dépit de son importance majeure, l'IE ne s'est imposée que tardivement en France. En 1994, le rapport d’Henri Martre intitulé « Intelligence Économique et Stratégie des Entreprises » constitue le point de départ d'une prise de conscience nationale quant à la nécessité de mettre au point des méthodes permettant de protéger le patrimoine informationnel des entreprises françaises.

Depuis lors, la Délégation Interministérielle à l’Intelligence Économique1, rattachée au Premier

ministre, a été créée afin d’élaborer et coordonner l’action de l’État en matière d’IE.

L’ENCADREMENT LÉGISLATIF DU RENSEIGNEMENT ÉCONOMIQUE : UN RETARD FRANÇAIS ?

Face à l’essor du renseignement économique, la réponse juridique française apparaît incomplète en comparaison d’autres législations.

Les États-Unis ont très tôt mis en place une stratégie législative offensive. En s’appuyant sur des dispositions légales, Washington peut en effet avoir accès à des données sensibles d’entreprises étrangères. Par ailleurs, la procédure dite de discovery2, flirte avec l’espionnage industriel dans la mesure où elle permet l’appropriation de données confidentielles détenues par les entreprises. Enfin, une loi sur l'espionnage économique, dite « Cohen Act »3 du nom du sénateur qui l'a proposée, a été adoptée en octobre 1996 par le congrès américain. Ce texte permet de sanctionner les actes d'espionnage économique exercés par ou pour le compte d'un gouvernement étranger et prévoit une application extra-territoriale.

Si le droit positif français contient plusieurs textes visant à lutter contre l'espionnage économique – éparpillés notamment dans le code du travail, le code de propriété intellectuelle et le code pénal – il n'existe pas d'équivalent au « Cohen Act ». La loi du 16 juillet 19804, dite « loi de blocage », semblait constituer un outil de protection efficace contre les demandes de communication de preuves à l’occasion de procédure judiciaire à l’étranger, à l’instar de la discovery. En pratique, celle-ci est constamment écartée par les entreprises et demeure inappliquée.

Le récent retrait de l'amendement controversé sur le secret des affaires du projet de loi Macron atteste de la difficulté pour le gouvernement à construire un volet juridique à sa politique d'Intelligence Économique. Une large frange de la population française craint en effet qu’une telle loi porte atteinte aux libertés fondamentales et plus particulièrement à la liberté d’information.

Le recul de Bercy ne pourrait toutefois être que temporaire dans la mesure où une directive sur le secret des affaires est actuellement en discussion au Parlement européen. Si celle-ci est adoptée, elle sera transposée en droit interne et renforcera de facto l’arsenal législatif français en matière de renseignement économique.

Amanda DubarryElève avocat

1 Elle s’inscrit dans le nouveau dispositif mis en place par le décret du 22 août 2013.

2 Il s’agit d’une procédure d’investi-gation américaine qui oblige chaque partie à divulguer toute infor-mation susceptible de faciliter l’établissement des preuves lors d’un litige.

3 Clinger-Cohen Act 1996 (Information Technology Management Reform Act).

4 Loi n° 68-678 du 26 juillet 1968 relative à la communi-cation de documents et renseignements d'ordre économique, commercial, industriel, financier ou technique à des personnes physiques ou morales étrangères.

AEA PARIS - LE BAROMAÎTRE | 17

LUMIÈRE SUR... LE RENSEIGNEMENT

« L’émergence d’une société planétaire de l’information a nourri l’utopie d’une expulsion de la violence hors de nos cadres »1. Néanmoins par son acquisition, son altération, sa propagation, l’information peut produire un dommage aussi bien à un État qu'à une entreprise privée. L'information contribue désormais à accroître une puissance qui peut être à la fois économique, un avantage concurrentiel. Ainsi, si une société porteuse d'information facilite nos échanges, elle est aussi vectrice de conflits. Les conflits informationnels entre États ou entre entreprises se multiplient et sont le fait de nouveaux acteurs tels que la société civile et les médias. Le renseignement est devenu une arme, il est à l’origine de cyberguerre ou d’infodominance. En réalité, l’utilisation de l’information a donc beaucoup évolué face au rôle qui lui était auparavant assigné et nécessite d’être régulée par l’État.

La désinformation était en effet de rigueur au sein des tactiques militaires jusqu’à la seconde guerre mondiale. Définie comme le fait de propager des informations délibérément faussées, elle était le propre de tout gouvernement en temps de guerre. Toutefois, le concept de « désinformation » a été utilisé tardivement. L'auteur Vladimir Volkoff précisait ainsi que le mot désinformation n'est apparu qu'en 1953 lorsque le KGB créa

une section spéciale chargée de « désinformer sur les buts réels de l'URSS »2. Il s'agissait de manipuler l'opinion publique par la modification de l'information principale. Pourtant, la pratique est ancienne, puisque Sun Tzu dans son ouvrage "L'art de la guerre" préconisait déjà une approche indirecte du combat en déclarant que « qu’une armée victorieuse l’est sans combattre ». Il conseillait notamment une acquisition préalable de toute information utiles par le biais d’agents constitutifs des yeux et des oreilles d’une armée.

La désinformation a laissé place à une utilisation massive de l’information par les États. L’information est désormais devenue une arme au service d’États ou d'entreprises en guerre. Elle est une ressource disputée dont la volatilité entraîne des conflits. La guerre de l’information consiste à dérober, détruire, pervertir l’information que constituent aussi bien des connaissances intellectuelles que des données informatiques. Elle regroupe ainsi plusieurs types de menaces tels que la diffamation, la concurrence déloyale qui peut se manifester par le biais d’un acte de dénigrement ou la désorganisation d’un circuit de distribution.Cette guerre se caractérise principalement par l’art d’apparaître et d’utiliser la propagande pour éliminer son adversaire du champ du discours. La visibilité, l’art de l’illusion et la manipulation des

LES NOUVELLES GUERRES DE L'INFORMATION

1 Francois Bernard HUYGHE, L’ennemi à l’ère du numérique, PUF 2001.

2 Vladimir VOLKOF, La désinformation arme de guerre, 1986 .

18 | AEA PARIS - LE BAROMAÎTRE

LUMIÈRE SUR... LE RENSEIGNEMENT

langues sont devenus des enjeux pour détourner l’information. « Les nouveaux acteurs tels que les hypermédias, les nouvelles techniques de l’information et de la communication, sont autant de circuits d’information capables d’amplifier tout mouvement »3 et de retenir toute information par le biais des techniques de traçabilité. Le village global4 qu’est le notre, l’est au moins pour sa médisance. Les rumeurs infondées sont autant de menaces pour une entreprise ou un État dont les médias se font l’écho infini.

Par ailleurs, l’exploitation des données et des systèmes d’information est devenue une activité en pleine expansion. Il s’agit pour les entreprises de protéger leur patrimoine informationnel et de pratiquer l’intelligence économique. Cette dernière se caractérise par des cellules de veilles technologiques, économiques, concurrentielles et le développement de nouveaux outils comme le sourcing, les moteurs de recherche, les outils de classification ou le progiciel de veille… Les réseaux sociaux constituent également une source intarissable d’informations sur les personnes, leurs goûts, et permettent ainsi de pouvoir anticiper les réactions des internautes. Figure de proue de l’intelligence économique la veille est une activité opérationnelle permettant de suivre les évolutions susceptibles d’influer sur la stratégie d’une entreprise. Elle constitue essentiellement un rôle d’aide à la décision permettant de définir précisément l’environnement dans lequel évoluera une entreprise. La maîtrise des flux d’information est devenue un avantage concurrentiel indéniable5.

L’enjeu est de savoir tirer profit d’une information, qui ne saurait sans cadre, ni vecteur particulier, véhiculer aucune forme de renseignement utile. L’ensemble de ces techniques visant la maîtrise et la hiérarchisation de l’information est néanmoins soumis au respect de la légalité et des droits de chacun.

Dans ce contexte, la régulation et la protection de l’information sont également devenues deux enjeux que l’État français relève difficilement. La régulation de la recherche de l’information est nécessaire pour préserver les droits des individus, le secret des affaires et éviter les détournements de données personnelles ou sensibles. Un cadre national a été mis en place autour de la loi du 6 janvier 19786 instaurant la Commission nationale de l’information et des libertés et protégeant les données à caractère sensible, la loi du 24 janvier 20047 pour la confiance en l’économie numérique et la loi du 14 mars 20118 sur l’orientation et la

programmation pour la performance de la sécurité intérieure luttant contre la cybercriminalité et encadrant les agréments donnés aux sociétés d’intelligence économique.

La mise en place d’une protection efficiente de l’information suppose toutefois de développer une véritable industrie de la sécurité par le biais de moyens législatifs et opérationnels, ainsi qu’une innovation de rupture et non plus seulement incrémentale9. Les périmètres de la cyberdéfense doivent ainsi également être définis et la porosité des milieux économiques, militaires et commerciales reconnue. Cette démarche semble néanmoins compromise par la mobilisation des journalistes français qui craignent une atteinte à la liberté d'information et d'investigation. De fait, un amendement de la loi Macron qui instituait une véritable doctrine du secret des affaires a été retiré. La société civile œuvre actuellement pour une promotion de la transparence et du partage de l’ensemble des données. Les récents scandales tels que l’affaire Wikileaks, les mouvements tels Anonymous, en témoignent chaque jour. Or parallèlement, c’est bien l’ensemble de la société civile qui doit être impliqué dans la sécurisation des infrastructures nationales et sensibilisé aux protections qu’elle doit mettre en place afin d’éviter toute attaque informatique. Certains spécialistes à l’instar de François Bernard Huyghe préconisent quant à eux de réinstaurer le secret pour redonner une certaine latitude aux États. Il s’agirait de reprendre le leitmotiv de Baltasar Gracian « le secret est le sceau de la capacité »10.

Somme toute, la guerre de l’information peut se révéler extrêmement dommageable pour une entreprise ou un État. L’avantage est toujours à l’attaquant qui peut, avec des moyens peu coûteux, causer d’importants dommages. Les acteurs doivent désormais s’adapter et développer la matière que constitue l’intelligence économique afin d’être à même de lutter dans cette nouvelle guerre de l’information.

Maëva LagouteElève avocat

3 ALMEIDA, « La Manipulation », Que sais-je, 2011.

4 Expression utilisée par Mac LUHAN dans La Galaxie Gutenberg publié en 1963.

5 Etude McKinsey « Donner un nouvel élan à l’industrie en France », 2006.

6 Loi n°78-17 du 6 janvier 1978 relative à l'informatique, aux fichiers et aux libertés.

7 Loi n°2004-575 du 21 juin 2004 pour la confiance dans l'économie numérique.

8 Loi n° 2011-267 du 14 mars 2011 d'orientation et de programmation pour la performance de la sécurité intérieure

9 Cédric BLANCHET, propos rapportés dans le compte rendu du colloque de recherche « Cyber security : Innovation, regulation and strategic shifts », 21 novembre 2012.

10 Baltasar GRACIAN, L’homme de cour, 1647 (cité par François Bernard HUYGHE sur son site internet)

AEA PARIS - LE BAROMAÎTRE | 19

LUMIÈRE SUR... LE RENSEIGNEMENT

Pouvez-vous rapidement décrire votre parcours personnel et votre profession ?

Je suis expert en intelligence économique pour le groupe Ker-Meur, et ancien de l’Ecole de Guerre Economique de Paris (EGE). Je suis en outre professeur à l'IRIS (Institut de Relations Internationales et Stratégiques), où j’enseigne la « Géo-économie et l’intelligence stratégique », et conférencier sur les menaces émergentes liées aux actions d'espionnage et aux déstabilisations de nature informationnelle et humaine.

Je suis dernièrement intervenu pour la SCIA (Swiss Competitive Intelligence Association) à Genève, les assises 2015 de la FNCD (Fédération Nationale des Cadres Dirigeants) au Sénat, et la Direction du groupe ORANGE dans le cadre du séminaire « compliance » de la Direction Générale d’Ile de France sur le thème : « Intelligence des données & Intelligence économique ».

Quelle est la définition et quelles sont les différences fondamentales entre l’intelligence économique et l’espionnage ? Les modes d’action de l’intelligence économique sont-ils tous légaux ?

Il existe toujours une confusion des genres très prégnante dans les esprits entre les pratiques dites d’intelligence économique (IE), et les affaires qui relèvent des « pratiques d’espionnage » pures et simples. Les différences sont pourtant fondamentales entre ces deux méthodologies dont les pratiques sont parfaitement distinctes dans les faits.

L’intelligence économique (IE) - malgré une multitude de définitions conceptuelles - travaille schématiquement à partir de ce qui est en « source ouverte » ou « semi-ouverte ». Autrement dit, à partir de ce qui est en « libre accès », et le plus souvent « non structuré ». Sources qui ont donc une valeur ajoutée initiale très faible sur le marché de l’information qualifiée. Ainsi, il va falloir « raffiner » ces sources brutes

– un peu comme un produit pétrolier brut que l’on « raffine » pour lui faire rendre toute ses potentialités énergétiques – par le biais d’un processus de transformation, d’analyse et de filtrage complexe. A l’issue de ce processus de « traitement », des éléments susceptibles de générer une haute valeur ajoutée en fin de cycle vont ainsi être extraits de leur contexte de captation. Le tout de manière parfaitement légale, transparente et conventionnelle.

L’espionnage, c’est complètement autre chose. On est dans un autre registre d’action. On confond à l’envie « l’espionnage » avec les expressions très distinctes que sont « le renseignement », « l’intelligence économique et stratégique » ou « la veille ».

L’espionnage, c’est la partie congrue du renseignement – parce qu’il est toujours, in fine, question de « renseignement » – qui est obtenue de manière totalement illégale et clandestine. Ainsi énoncées, les choses sont beaucoup plus claires. La pratique de l’espionnage vise à acquérir l’information « noire », dite aussi « strictement confidentielle », soumise à une « stricte restriction d’accès » ou « sous embargo ». Cette captation ne peut être faite qu’en ayant recourt à des méthodes criminelles, totalement illégales.

Compte tenu de la démocratisation et de l’augmentation conséquente de la diffusion des « technologies de captation », mais aussi de leur faible coût à l’achat, cela peut être le fait d’individus seuls et agissant de leur propre chef (activistes, hackers, militants, etc.). Mais cela peut être également le fait de mafias très organisées ou d’Etats belliqueux agissant en vertu de pratiques offensives en vigueur entre nations concurrentes ou ennemies. Il existe parfois des problèmes liés à des décisions régaliennes de « Sécurité Nationale », d’Etat à Etat. Un Etat peut décider unilatéralement, par exemple, de « combler son retard » technologique ou de s’accaparer des denrées

L'AVIS DU SPÉCIALISTE

FRANCK DECLOQUEMENTEXPERT IE GROUPE KER-MEUR

ET ENSEIGNANT À L'IRIS EN GÉOÉCONOMIE ET INTELLIGENCE

STRATÉGIQUE

20 | AEA PARIS - LE BAROMAÎTRE

LUMIÈRE SUR... LE RENSEIGNEMENTassurant son « approvisionnement énergétique ». En conséquence de quoi les services de renseignement se livrent parfois à des guerres fratricides et secrètes, de nature économique, et usent de techniques de captations brutales, violentes, coercitives et totalement illégales pour parvenir à leurs fins. L’objectif prioritaire étant, bien entendu, de s’acquitter à tout prix de cette mission en mettant en œuvre toutes les méthodes d’actions nécessaires pour y parvenir (chantage, vol, coercition, corruption, écoutes illégales, interceptions de données, captation d’images satellites, survol de territoire, etc.). Dans ce cas précis, les fins justifient les moyens selon l’adage…

Quel rôle l’Etat joue-t-il dans la promotion de l’intelligence économique ? Doit-il en renforcer l’adoption par les parties prenantes, et de quelle manière ? Les sphères publiques et privées travaillent-elles en coopération ?

L’intelligence économique, dans ses dimensions de veille, d’influence et de sécurité économique, est une arme indispensable pour l’État et pour les entreprises qu’elle soutient, y compris, et peut-être surtout, pour les PME / PMI.

• Parce que la compétitivité des entreprises passe notamment par l’innovation et donc, par la recherche publique, source d’une plus grande part de cette innovation,

• Parce que la concurrence est de plus en plus rude et les attaques économiques sont de plus en plus fréquentes,

• Parce que la diffusion d’une véritable culture de l’intelligence économique passe nécessairement par une sensibilisation dès les études supérieures.

La visée principale et immédiate de l’IE pour l’Etat est de renforcer la « compétitivité » de notre économie et de favoriser plus généralement la croissance et l’emploi. C’est pourquoi l’État protège les entreprises en analysant les menaces et en sensibilisant les différents acteurs et « parties prenantes » du tissu économique et social, puisqu’il dispose, en outre, des pouvoirs régaliens nécessaires et des compétences requises à travers ses divers acteurs pour former, dans ses dimensions de veille, d’influence et de sécurité économique, les dirigeants et les salariés d’entreprises à cette « nouvelle culture stratégique », à cette pratique renouvelée du management des organisations complexes.

C’est pourquoi les services de l’État ont mis en œuvre, depuis plusieurs années, une véritable

stratégie en la matière. Cette stratégie est impulsée au plus haut niveau de l’État et déployée sur l’ensemble du territoire national notamment par la D2IE. Depuis sa création en 2009, c’est en effet la Délégation interministérielle à l’Intelligence économique (dite D2IE) qui élabore et coordonne ce déploiement territorial et s’attache, notamment, à mettre en place des outils opérationnels et des projets concrets au service des entreprises et des établissements de recherche publics au nombre desquels :

• un Guide du routard de l’intelligence économique et un guide pour la recherche. Ces guides formulent des préconisations concrètes visant à protéger et à valoriser le plus efficacement possible la recherche française pour qu’elle profite, en priorité, au développement des entreprises françaises innovantes ou en pointe.

• une formation de conférenciers en sécurité économique (label « Euclès »). Ces conférenciers sont issus d’entreprises ou d’organisations professionnelles et ont les compétences techniques requises pour former les dirigeants et les collaborateurs des entreprises à la sécurité économique.

• un dispositif, généralisé depuis la rentrée 2013 dans tous les établissements, en direction de tous les étudiants arrivant au niveau licence (bac +3) en mesure de leur faire bénéficier d’un module d’initiation à la veille stratégique, à la protection du patrimoine économique et scientifique et aux techniques d’influence. Parce que la diffusion d’une véritable culture de l’intelligence économique passe nécessairement par une sensibilisation des étudiants dès les études supérieures, l’objectif que s’est fixé la D2IE a été repris par le ministère de l’Enseignement supérieur et de la Recherche.

Il convient d’ajouter à ce florilège de nombreux projets déjà réalisés ou en cours : une législation sur la protection du secret des affaires, un outil d’autoévaluation du degré de protection des entreprises et des propositions pour renforcer l’influence de la France dans les enceintes internationales de normalisation remis par Claude REVEL (ancienne déléguée interministérielle à l’IE), il y a deux ans, au Premier Ministre.

Quel parallèle existe-t-il entre la Loi sur le renseignement et le Patriot act US ? Quels ont été les impacts du Patriot Act sur les « partenaires » économiques des US ? Dans la même perspective,

AEA PARIS - LE BAROMAÎTRE | 21

LUMIÈRE SUR... LE RENSEIGNEMENT L'AVIS DU SPÉCIALISTE

quelles seraient les conséquences pour les partenaires français ?

Dans la communauté du renseignement français, et particulièrement au sein de la DGSE (Direction générale de la sécurité extérieure), les dernières révélations en date sur l’espionnage massif de nos dirigeants et de nos acteurs économiques majeurs par les services de la NSA (National Security Agency) ont le même effet que celles d’Edward Snowden intervenues, voilà plus de deux ans, sur les écoutes systématiques mises en place par les Etats-Unis sur leurs « partenaires » européens.

De fait, les atermoiements et les manifestations d’indignation actuelles sont perçus par les professionnels du secteur pour ce qu’elles sont : de simples « postures politiques ». Car personne n’est dupe en vérité.

Lorsqu’en 2008, la CIA (Central Intelligence Agency) s’opposa à la signature d’un accord de « non-espionnage » avec la France qui l’avait sollicitée sur cette question, la fin de non-recevoir des Américains était très explicite. En matière de renseignement, les règles sont très claires pour les Etats Unis : « Il n’y a pas d’amis, pas d’alliés, uniquement des intérêts ». Des alliés précieux que la France assure ne pas espionner elle-même. Par déontologie ? Par manque de moyens surtout… En effet, le budget dévolu aux actions de renseignement outre-Atlantique est globalement équivalent à celui du budget de la Défense en France… Cela laisse rêveur. « Et puis, nous avons mieux à faire que de suivre les États-Unis ou l’Allemagne », élude souvent les cadres de la DGSE quand on les interroge. Le contre-terrorisme aspirant, en effet, l’essentiel de leurs ressources. L’économique est, en définitive, toujours le parent pauvre des services.

Avec le développement des nouvelles technologies de l’information et de la communication (NTIC) et le renforcement des affrontements économiques, comment envisagez-vous l’avenir de l’intelligence économique (IE) et de ses pratiques ?

Les quatre courants existant sur lesquels reposent les différentes approches conceptuelles de l’IE sont schématiquement : la guerre économique, la compétitivité économique, la sécurité économique et la diplomatie économique. Le cinquième courant qui emerge actuellement est pour moi celui de « l’économie de l’attention ». Chacun de ces courants spécifiques définit un système de croyances qui agit comme autant de prismes à travers lesquels est perçue la réalité économique

influençant directement notre rapport au monde et à la stratégie d’entreprise et étatique considérée.

Dés lors, l’avenir de l’IE relèvera beaucoup d’une posture construite et organisée autour de ces réalités complexes, perçues dans un contexte socioculturel beaucoup mieux compris qu’aujourd’hui. Cela ayant pour vocation d’offrir aux décideurs et aux cadres dirigeants la possibilité d’adapter leur politique d’IE, leur approche consécutive en fonction de la culture et des valeurs de leur organisation référente, mais aussi de leurs priorités stratégiques. L’opportunité d’une mise en cohérence offre l’avantage d’éviter les conséquences fâcheuses de l’expectative et du flou artistique actuel en la matière.

Pour une agence Européenne du renseignement économique ?

Il n’existe pas encore d’« école française du renseignement » comme le regrettent amèrement certains acteurs du secteur à travers la publication d’un livre éponyme paru aux éditions Ellipse en 2014. Personnellement, outre une coopération normale et toujours « améliorable » en la matière, je ne crois pas que cela puisse exister un jour. Chaque pays européen ne partageant pas les mêmes alliances, les mêmes allégeances, ni les mêmes objectifs économiques ou politiques avec ses partenaires, ceci semble pour le moins très improbable dans un avenir proche...

Pour paraphraser les auteurs de ce recueil de textes : « Le renseignement occupe une place de plus en plus importante dans la sécurité de nos États. Dans le monde incertain et dangereux du XXIe siècle, les grands acteurs internationaux ont tous compris que pour garantir la paix et la sécurité, anticiper les nouvelles menaces ou sortir vainqueur des rivalités mondiales, des services performants, s’appuyant sur une culture du renseignement diffusée dans l’administration, les entreprises et la société civile, étaient un atout de premier ordre.

Cependant, en France, le renseignement reste perçu encore trop négativement, victime d’une large méconnaissance et d’idées recues très ancrées. Les élites politiques et administratives, comme le grand public, ne connaissent de ces activités que quelques sombres affaires très peu représentatives de la réalité. L’une des raisons en est que le renseignement a longtemps échappé à l’intérêt du monde académique, dont le rôle pour établir la légitimité de la discipline est essentiel. Toutefois, trente ans après les États-Unis, vingt après la Grande-Bretagne, le monde universitaire et de la recherche français a enfin franchi le

22 | AEA PARIS - LE BAROMAÎTRE

LUMIÈRE SUR... LE RENSEIGNEMENTLUMIÈRE SUR... LE RENSEIGNEMENT L'AVIS DU SPÉCIALISTE

pas et a fait du renseignement un sujet digne d’étude et de considération, développant progressivement recherches, enseignements et publications en la matière.

Bien que tous les acteurs sérieux observent l’émergence d’un nouvel intérêt pour les questions de renseignement, tout cela est encore partiel et bien fragile, car trop lié à des initiatives individuelles. Il doit donc être consolidé. Ensemble, ils ont donc souhaité lancer, dans le cadre de ce livre, un vibrant plaidoyer pour l’émergence d’une véritable « École française du renseignement », combinant les réflexions de la communauté scientifique et des professionnels du renseignement, afin d’éclairer le légitime débat public sur le fonctionnement de l’information de l’Etat ».

L'équipe du Baromaître vous remercie.

LE BAROMAÎTRE RECRUTE DES RÉDACTEURS AUX BELLES PLUMES. N'HÉSITEZ PAS À NOUS CONTACTER ET VENEZ NOUS REJOINDRE :

[email protected]

AEA PARIS - LE BAROMAÎTRE | 23

LUMIÈRE SUR... LE RENSEIGNEMENT L'AVIS DU BÂTONNIER

Nous avons appris au mois de juin dernier que les services de renseignement américains auraient écouté et surveillé les trois derniers Présidents

de la République française.

Nos parlementaires ont exprimé leur indignation face à cet acte scandaleux.

Mais, hasard du calendrier, ils ont voté, la même semaine, la loi relative au renseignement qui, contrairement à ce qu’on tente de nous faire croire, ne concerne pas que le terrorisme et constitue une atteinte inadmissible aux libertés publiques de tous les citoyens, puisqu’elle permettra de surveiller tout un chacun sans contrôle effectif.

Un autre hasard du calendrier a conduit à une situation paradoxale en droit comparé, puisque la discussion du projet de loi en seconde lecture devant le Sénat est précisément intervenue au moment où le « Patriot Act » fut suspendu aux États-Unis. En effet, alors que les sénateurs français s'apprêtaient à voter la disposition très controversée du projet de loi autorisant l’installation

de « boîtes noires » analysant les métadonnées du trafic Internet des Français... les sénateurs américains ont adopté le « Freedom Act », texte qui aménagera le « Patriot Act » afin de réduire la marge de manœuvre des services de renseignement !

Avouons que le parallélisme est stupéfiant : tandis que le 11 septembre avait conduit au « Patriot Act » aux États-Unis, le 11 janvier aura apporté une loi sur le renseignement en France qui était pourtant en préparation depuis bien longtemps dans le plus grand secret et sans concertation. Heureusement ici et là-bas on reviendra en arrière, car nos grandes démocraties occidentales ne peuvent – passé le mouvement de réaction sécuritaire – céder au terrorisme et renoncer à certaines tranches de libertés publiques, pour se réfugier dans les bras de big brother.

Depuis quatre mois, je m’oppose fermement à cette loi qui va légaliser les pratiques des services de renseignement et renforcer les moyens de police administrative, impliquant une ingérence inacceptable dans la vie privée

LA LOI SUR LE RENSEIGNEMENT : UNE LOI LIBERTICIDE QUI MET LES FRANÇAIS SOUS

SURVEILLANCE GÉNÉRALISÉE

PAR PIERRE-OLIVIER SUR, BÂTONNIER DE L'ORDRE DES AVOCATS DU BARREAU DE PARIS

24 | AEA PARIS - LE BAROMAÎTRE

LUMIÈRE SUR... LE RENSEIGNEMENTLUMIÈRE SUR... LE RENSEIGNEMENT L'AVIS DU BÂTONNIER

de tous, sans contrôle effectif du juge judiciaire, seul gardien des libertés publiques.

Si tous les défenseurs des libertés publiques se sont unanimement insurgés contre ce texte, toutes tendances politiques confondues, c’est bien que celui-ci est véritablement liberticide.

Parmi eux, citons notamment le Défenseur des droits, la Commission nationale des interceptions de sécurité (CNIL), le Conseil national du numérique, les deux grands syndicats de la magistrature : l’Union syndicale des magistrats et le Syndicat de la magistrature, la CGT-Police ainsi que le Syndicat national des journalistes et Marc Trévidic, ancien juge antiterroriste. Enfin, n’oublions pas les nombreuses ONG telles Human Rights Watchs, Amnesty France, la Ligue des droits de l’Homme, qui ont également manifesté leur opposition à ce projet de loi, appelant les parlementaires français à voter contre.

On tente de nous faire croire qu’il s’agit d’une loi sur le terrorisme mais il s’agit d’un « projet de loi relatif au renseignement » qui a un champ d’application beaucoup trop étendu puisque ce texte vise « les intérêts majeurs de la politique étrangère et la prévention de toute forme d’ingérence étrangère », « les intérêts économiques, industriels et scientifiques majeurs de la France », « la prévention de la criminalité et de la délinquance organisées ».

Il va donc s’appliquer bien au-delà de la lutte contre le terrorisme. Ainsi, deux individus qui commettent un délit, même mineur, avec préméditation, se verront appliquer par dérogation au droit commun une législation censée prévenir les actes de terrorisme.

Cette loi est un mensonge d’Etat. Il s’agit d’un texte général alors que la lutte contre le terrorisme nécessiterait un texte spécial. À ce titre, cette loi aurait dû s’intituler « loi sur le renseignement en matière de terrorisme », ce qui aurait permis d’encadrer son domaine et de protéger les libertés publiques.

Par ailleurs, je dénonce le caractère dangereusement liberticide des moyens qui vont être utilisés. La sophistication des techniques d’investigation constitue un risque réel pour tous les Français. Les « IMSI catcher », les « boîtes noires » et les sondes permettront de capter, sans distinction, nos échanges, nos SMS et nos données dans un secteur géographique élargi. Le problème de l’algorithme, censé déterminer les individus à surveiller, c’est qu’on ne va plus se concentrer uniquement sur certaines personnes mais sur l’ensemble du territoire. Toute personne susceptible de participer à un rassemblement pourra ainsi être surveillée, ce qui est extrêmement choquant. En autorisant la mise

en œuvre de ces différents moyens de surveillance de manière pratiquement incontrôlée, ce texte met les français sous surveillance généralisée. Il représente également un danger pour le secret professionnel qui couvre les conversations entre certaines personnes. Ainsi par exemple, en installant un « IMSI catcher » Place Dauphine à Paris, les services de renseignements pourront avoir accès aux conversations des avocats, des magistrats, des journalistes et des particuliers.

En outre, la loi sur le renseignement n’invente rien, elle vise uniquement à légaliser les pratiques habituelles de nos services de renseignement. Rappelons que tous les terroristes ayant sévit en Europe et en France étaient déjà connus des services de sécurité avant que la surveillance ne cesse.

A ce titre, nous devons tenir compte de la résolution de l’Assemblée parlementaire du Conseil de l’Europe du 21 avril dernier qui explique que : « Les opérations de surveillance massive ne semblent pas avoir contribué à prévenir les attentats terroristes, contrairement à ce qu’affirmaient autrefois les hauts responsables des services de renseignement. Au contraire, des ressources qui pourraient servir à prévenir des attaques sont redirigées vers la surveillance massive, laissant des personnes potentiellement dangereuses libres d’agir ».

Enfin, ce projet de loi est périlleux car les garde-fous mis en place sont insuffisants. La Commission nationale de contrôle des techniques de renseignement, chargée de donner un avis purement consultatif sur les mesures envisagées, sera uniquement composée de hauts fonctionnaires. Je trouve déplorable l’absence de contrôle de la part du juge judiciaire, seul gardien des libertés publiques au sens de l’article 66 de notre Constitution. Cette carence est la porte ouverte à l’arbitraire et aux abus.

S'il faut que notre démocratie se dote des moyens nécessaires et proportionnés pour faire face aux dangers qui la menacent, et particulièrement le terrorisme, il convient de mettre en place des garde-fous pour garantir à chacun le respect de ses droits.

C’est pour toutes ces raisons que, le 10 juillet 2015, le Barreau de Paris a déposé un mémoire dans le cadre du recours devant le Conseil constitutionnel saisi par le Président la République.

Pierre-Olivier Sur, Bâtonnier de l’Ordre des

avocats du Barreau de Paris

AEA PARIS - LE BAROMAÎTRE | 25

LUMIÈRE SUR... LE RENSEIGNEMENT

Le 3 juillet 2048,

en sortant du cabinet je remarque immédiatement, malgré la pollution, la particulière douceur de cette soirée, à peine 36°.

Je décide donc de traverser, à pied, le jardin du Luxembourg.

Ce faisant, je croise un groupe d’adolescents, l’un d’eux tient entre ses mains un smartphone 7.5.9 d’où s’échappe un air de « rap » du début du siècle.

Je n’avais aucune envie de leur rappeler qu’ils risquaient jusqu’à 500 euros d’amende en écoutant de la musique interdite ; d’autant que cet air m’a soudainement fait penser à tout autre chose.

Etonnante mémoire involontaire !

En 2015, alors que j’étais un jeune élève-avocat, le Gouvernement avait fait voter la loi dite « renseignement »1 ; cette année-là, notre pays avait été frappé par de terribles attentats, et la

classe politique, unanime, avait décidé d’organiser la surveillance généralisée des Français.

Cette loi, que personne ne conteste aujourd’hui, a pourtant changé radicalement notre façon d’envisager la politique pénale.

Il y a trente ans, la classe dirigeante était divisée en deux sur la manière d’appréhender la répression.

Si à droite, la tentation sécuritaire l’avait largement emporté, la gauche essayait encore de proposer des alternatives à l’enfermement2.

La vague d’attentats-suicides qui a frappé l’Europe entre 2017 et 2025 a achevé tout espoir d’une incarcération permettant la réinsertion, et a permis l’avènement d’une réelle « rage sécuritaire »3.

Une série de lois avait été votée dans l’urgence afin de « lutter contre la terreur » et parmi cette avalanche législative s’élevait « la loi sécurité II ».

C’est cette loi qui a permis la création des trop célèbres Centres de rétention de « déradicalisation ».

1 Le projet de loi sur le renseignement a été adopté le 24 juin 2015.

2 Cf. notamment la loi relative à la prévention de la récidive et à l’individualisation des peines adoptée le 17 juillet 2014.

3 La rage sécuritaire de Christian Charrière-Bournazel aux éditions STOCK.

LE 3 JUILLET 2048

26 | AEA PARIS - LE BAROMAÎTRE

LUMIÈRE SUR... LE RENSEIGNEMENT

À partir des écoutes réalisées par les services de renseignement, les individus soupçonnés d’avoir des velléités terroristes étaient placés dans des centres fermés, où des équipes de psychiatres avaient alors la charge de les « déradicaliser ».

Certes, la loi sur la rétention de sûreté votée en 2008 avait déjà marqué un tournant, le législateur ayant en effet déjà admis le concept dit de « dangerosité »4. Mais il faut bien noter que celle-ci visait uniquement les individus ayant déjà été condamnés.

La « loi sécurité II » a rendu licite l’enfermement des terroristes présumés sur la seule foi, non pas d’actes préparatoires, mais de suspicions.

Les positivistes italiens du XIXème5 et les auteurs de science-fiction du XXème6 voyaient ainsi leurs théories triompher : surprenante coïncidence.

Aujourd’hui l’enfermement d’individus, qui n’ont encore accompli aucune action criminelle, est admis par la population. Pire, les Français se savent continuellement écoutés, constamment filmés, d’une façon que G.ORWELL7 n’eut pu imaginer, et ne trouvent rien à redire…

Pris dans le cours de mes pensées, j’esquive de justesse un drone-policier. Celui-ci, poussé par de petites hélices rotatives revient vers moi, je dois me plier au jeu du scanner optique. Ce ne sera jamais que la troisième fois de la journée, j’ai connu pire.

Mais où en étais-je ?

2030. Quelle terrible année! Les « attaques éclairs », comme nous devions désormais les appeler n’ont cessé d’augmenter. De même que notre surveillance.

Les Français, terrifiés et inquiets, ont continué leur fuite en avant.

La magistrature ayant été jugée trop laxiste et source d’erreurs, c’est l’intelligence artificielle Portalis qui a remplacé l’hermine. Cette décision, qui avait profondément choqué « les gens de justice »8, avait pourtant été adoptée par référendum d’initiative populaire avec plus de 80% de votes favorables.

Des algorithmes sophistiqués permettent donc aujourd’hui de déterminer la peine, non plus en fonction du principe dit d’individualisation de la peine9, mais en fonction du risque de récidive présenté par l’individu et de la gravité de son infraction. Le taux d’incarcération a aujourd’hui dépassé les 20%.

En 2045, la peine de mort a été rétablie, par référendum pour les individus que la justice-médicale n’arrivait pas à « déradicaliser ».

Je suis enfin arrivé chez moi.

Les caméras de l’entrée de mon immeuble, ont enregistré l’heure de mon entrée et ont transmis cette information à la police. Je ne peux désormais plus sortir, sauf dérogation spéciale du gardien-policier qui est chargé du contrôle du bâtiment.

Dans l’ascenseur, j’essaye d’imaginer les évolutions possibles des méthodes de renseignement et je me souviens de cette phrase d’Albert Einstein : « Je ne pense jamais au futur car celui-ci vient bien assez tôt ».

Malcolm MOULDAIA-MAUGER,Elève avocat

4 Loi no 2008-174 du 25 février 2008 relative à la rétention de sûreté et à la déclaration d'irresponsa-bilité pénale pour cause de trouble mental.t

5 Cesare Lombroso, Enrico Ferri et Raffaele Garofalo…

6 Rapport minoritaire de Philip K. Dick, publié en 1956.

7 1984 de George Orwell, paru en 1949.

8 Cf. Daumier et Cain.

9 Raymond Saleilles L’individualisation de la peine paru en 1898.

AEA PARIS - LE BAROMAÎTRE | 27

799_

ME1

4702

_A5_

Avoc

ats_

19

BN

P PA

RIB

AS, S

A au

cap

ital d

e 2

484

523

922

euro

s. S

iège

soc

ial :

16

bd d

es It

alie

ns.

7500

9 Pa

ris.

662

042

449

RCS

Par

is. I

dent

ifian

t CE

FR 7

6662

0424

49.

Doc

umen

t à c

arac

tère

pub

licita

ire.

Pho

tos

: D.R

.- S

TUDI

O A3

C◆

Agence Paris Place Dauphine20 rue de Harlay

75001 Paris

Votre contact

799_

ME1

4702

_A5_

Avoc

ats_

19

BN

P PA

RIB

AS, S

A au

cap

ital d

e 2

484

523

922

euro

s. S

iège

soc

ial :

16

bd d

es It

alie

ns.

7500

9 Pa

ris.

662

042

449

RCS

Par

is. I

dent

ifian

t CE

FR 7

6662

0424

49.

Doc

umen

t à c

arac

tère

pub

licita

ire.

Pho

tos

: D.R

.- S

TUDI

O A3

C◆

Agence Paris Place Dauphine20 rue de Harlay

75001 Paris

Votre contact

799_

ME1

4542

A_A5

_dep

_Eco

les_

557

STUDIO AS3C◆

BNP PARIBAS, SA au capital de 2 484 523 922 - Siège social : 16 bd des Italiens - 75009 Paris. Nº 662 042 449 RCS Paris - Identifiant CE FR 76662042449 - ORIAS n° 07 022 735 - Document non contractuel. - BNP Paribas

799_ME14542A_A5_dep_Ecoles_557 STUDIO A3C◆

Vos contacts

ETUD

IANT

S

Votre Agence Dédiée :

Agence Dauphine

20, rue de Harlay

75001 Paris

Horaires :

Du lundi au vendredi de 09h00 à 17h15

Un Conseiller Clientèle dédié :

Olivier BUSCAILLET

[email protected]

01.44.41.72.02

En partenariat avec

Profitez des avantages réservés aux

Elèves Avocats

799_

ME1

4542

A_A5

_dep

_Eco

les_

557

STUDIO AS3C◆

BNP PARIBAS, SA au capital de 2 484 523 922 - Siège social : 16 bd des Italiens - 75009 Paris. Nº 662 042 449 RCS Paris - Identifiant CE FR 76662042449 - ORIAS n° 07 022 735 - Document non contractuel. - BNP Paribas

799_ME14542A_A5_dep_Ecoles_557 STUDIO A3C◆

Vos contacts

ETUD

IANT

SVotre Agence Dédiée :

Agence Dauphine

20, rue de Harlay

75001 Paris

Horaires :

Du lundi au vendredi de 09h00 à 17h15

Un Conseiller Clientèle dédié :

Olivier BUSCAILLET

[email protected]

01.44.41.72.02

En partenariat avec

Profitez des avantages réservés aux

Elèves Avocats

TRIBUNE LIBRE

Chers élèves avocats, futurs confrères,

Chers amis,

« Il y a d'admirables possibilités dans chaque être. Persuade-toi de ta force et de ta jeunesse. Sache te redire sans cesse : Il ne tient qu’à moi ». Ces mots d'André Gide doivent résonner pour nous comme une exhortation à vivre ces dix-huit mois au sein de l'École et, au-delà, notre carrière d'avocat et notre vie avec détermination, avec enthousiasme, avec force !

Je tiens, tout d'abord, au nom de l’équipe de l’Association des Elèves Avocats, à vous remercier pour votre soutien. Il nous honore et nous oblige. Chacun de nous devra s'en montrer digne. Forts de cette confiance, les membres de notre équipe, unis et volontaires, s'investissent déjà à votre service et celui de notre École.

« N’hésitez pas à vous approprier cette École, c’est la vôtre ! ». Nous avons reçu ces paroles que le Président de l'École, Laurent Martinet, a prononcé dans son discours, lors de la rentrée solennelle - entre les murs de la Mutualité - comme une invitation à nous investir au sein de l’Association.

C’est en rencontrant d’autres élèves avocats, animés par cette même envie, par ce même désir, par cette même volonté que notre candidature nous est apparue comme une évidence afin de porter un projet que nous

avons voulu le plus fédérateur possible. Ensemble, nous espérons pouvoir l'accomplir et je vous assure de mon inaltérable motivation à m'investir dans cette mission.

Ambitieux et enrichissant, aussi bien professionnellement que personnellement, ce projet repose sur un équilibre entre le respect des traditions et l'indispensable renouveau. Ainsi, certains pôles ont été conservés, et nous nous attacherons à en pérenniser l’esprit tout en y apportant notre souffle. D'autres pôles, au contraire, ont été créés afin de développer des idées originales.

Nous voulons que chacun soit fier d'appartenir à cette belle École, et plus spécialement à notre promotion. D'aucuns diront mission impossible avec plus de 1 950 élèves avocats, répartis sur des périodes de cours différentes. Nous relevons le défi ! Nous voulons penser l’Association, ainsi que tous les événements qu'elle organisera, comme le fil rouge de notre formation. Que vous soyez d’Issy ou d’ailleurs (Créteil ou Bobigny), en cours, en PPI ou en stage final, l’Association doit rester, pour chacun d'entre vous, cet indéfectible lien avec les autres élèves.

Notre Association ne cherche pas seulement à renforcer la cohésion entre les élèves, dans l’esprit des principes régissant la profession que nous nous apprêtons à embrasser. Elle tend aussi à participer au rayonnement de l’École. Elle vise à créer les conditions d'un

LE MOT DU PRÉSIDENT

36 | AEA PARIS - LE BAROMAÎTRE

TRIBUNE LIBRE

environnement stimulant, à favoriser l’émulation, par exemple à travers l’organisation de forums, de soirées, de concours d’éloquence, de débats, de conférences, de manifestations sportives, culturelles, professionnelles, de voyages…

Notre ambition est grande, notre volonté immense, notre détermination intacte ! Notre engagement à votre service ne faillira pas. Mais il ne suffira pas.

L'École, c'est chacun d'entre vous ! Alors, hyper-actifs ou plus contemplatifs, n’hésitez pas à nous rejoindre, n'hésitez pas à nous proposer vos projets !

En somme, investissez-vous !

Mes chers amis, alors que notre folle et insouciante jeunesse estudiantine est sur le point de s'achever ici, alors que cette École que nous avons tant rêvé rejoindre peut parfois nous ennuyer, alors que nous nous interrogeons sur l’utilité de certains cours, n'abandonnons jamais notre fierté d'appartenir à cette École, et bientôt au Barreau !

Je ne résiste pas à l’envie de conclure par ces quelques mots prononcés par Maître Henri Leclerc, parrain de notre promotion, lors de la rentrée solennelle :

« Vous allez faire un beau métier, un très beau métier. Quelle que soit la façon dont vous allez le faire, engagez-vous. Engagez-vous complètement. Engagez-vous aux côtés de vos clients. Engagez-vous pour la justice. Faites que la justice soit force. Et soyez là simplement pour rappeler aux juges qu’ils jugent des humains, et pour dire à ceux que vous conseillez que le droit les protège et que les droits ne les humilient pas. Et que dans l’immense écheveau de lois de plus en plus complexe, ils ont besoin de quelqu’un qui tire les fils, mais que ce quelqu’un les tire dans leur intérêt, et uniquement dans leur intérêt. Oui, vous avez devant vous un beau métier. Croyez le ! ».

Chers amis, ne craignons pas, osons ! Ne renonçons pas, persévérons ! Ne suivons pas, menons !

Clémence Amara BettatiPrésidente de l’Association des Elèves Avocats

AEA PARIS - LE BAROMAÎTRE | 37

TRIBUNE LIBRE

Le Baromaître est fier de vous présenter l’Association des Elèves Avocats promotion Henri Leclerc de l’Ecole de formation professionnelle des Barreaux

de la Cour d’appel de Paris. L’AEA est une association dont tous les élèves de l’EFB sont membres de droit, elle est composée d’un bureau et de différents pôles Son ambition est de favoriser un véritable esprit de promotion à travers l’organisation d’évènements tout au long de l’année et de proposer à chaque élève avocat, des projets ambitieux et enrichissants tant sur le plan professionnel que personnel.

L’AEA aspire non seulement à renforcer la cohésion entre les élèves avocats, dans l’esprit des principes régissant la profession d’avocat que nous nous apprêtons à embrasser, mais aussi à défendre leurs intérêts et à participer au rayonnement de l’EFB.

Que vous soyez férus d’associatif ou plus contemplatifs, n’hésitez pas à rejoindre l’AEA, à proposer vos projets et venez participer à cette grande aventure !

Pour nous contacter : [email protected]

Pour suivre toutes nos actualités

Site web : http://www.aea-paris.net/

Facebook : la page : AEA – Association des élèves avocats le profil : Leclerc Aea

Twitter : AEA Paris @AEA_EFB

PÔLE EPICURISME

Le pôle Epicurisme a vocation à mettre en pratique les préceptes d’Epicure, philosophe grec, qui considérait que le sens de l’existence résidait dans la recherche du plaisir.

Laura et Marie, les référentes du pôle, se sont donc fixé comme objectif d’organiser des évènements en lien avec cette philosophie, notamment autour de la nourriture et de l’œnologie.

Le 1er évènement du pôle a eu lieu le 4 mai : il s’agissait de faire découvrir aux élèves de l’école le vin bio et bio-dynamique. Sous le fil rouge d’une dégustation autour de 6 vins pour 6 régions différentes dans une galerie d’art, une seconde dégustation a été organisée sur le même thème au cours du mois de juillet.

Le pôle Epicurisme souhaite organiser des évènements différents chaque mois, pour s’adapter aux préférences de chacun.

Ainsi, il est notamment prévu d’organiser des cours de cuisine, des dégustations de chocolat, de bière, ou encore d’effectuer des excursions dans les vignobles français.

Référents : Marie TOMI et Laura NAJBERG

PÔLE DROIT SOCIAL

Le Pôle Droit Social a pour objectif d'animer plusieurs évènements liés aux problématiques de droit du travail et de la sécurité sociale. Outre les publications régulières dans le Baromaître, le Pôle organisera des conférences et réunions sur la matière tout au long de l'année. Un groupe rassemblant les praticiens du droit social issu de l'EFB sera mis en place.

Référents : Pierre-Louis VIGNANCOUR et Grégoire SILHOL

PÔLE EVÈNEMENTIEL

Ce pôle regroupe les membres de l’AEA désireux d’organiser des évènements tels que des afterworks, des Jurisnights, des Noctures, le Gala.... Toutefois, le pôle ne se limite pas à l’organisation de ces soirées puisqu’il a une vocation générale d’auxiliaire à l’ensemble des pôles désireux d’organiser des évènements. Il est ouvert à tous, alors si vous avez des idées et que vous êtes motivés, n’hésitez pas à vous rapprocher des membres du pôle évènementiel afin de nous rejoindre !

Référents : Déborah ATTIAS, Charles-Amadou DRAME et Marie-Valentine GERONIMI

PÔLE INTERNATIONAL

Le pôle International se veut un pôle de soutien à tous projets de départ à l'international, qu'il s'agisse de stage ou de LLM. Il a pour vocation d'organiser des réunions d'informations, notamment en partenariat avec Findyourllm.com, mettre en relation les élèves avocats, et rédiger le guide des candidatures aux LLM pour aider les futures générations à préparer leurs départs.

Référents : Elsa MANDEL et Aglaé HUCHOT

PRÉSENTATION DES PÔLES DE L'AEAREJOIGNEZ-NOUS !

38 | AEA PARIS - LE BAROMAÎTRE

TRIBUNE LIBREPÔLE PÉNAL

Le Pôle Pénal a pour objectif d’offrir une meilleure vision pratique aux élèves avocats de la matière.

En partenariat avec le Barreau de Bobigny, des permanences pénales quotidiennes sont organisées et ouvertes aux élèves avocats. Ces derniers ont ainsi l’opportunité de passer une journée aux côtés d’un avocat de permanence (mineurs, droit des étrangers, ou permanence pénale "généraliste"), voire même de plaider un dossier. La mise en place de ce dispositif auprès d’autres Barreaux est actuellement en négociations.

Le Pôle organise également des « rencontres pénales » avec des professionnels spécialisés. La première a porté sur les aménagements de peines. La deuxième, réunissant la vice-présidente de l’instruction du TGI de Paris et un avocat de renom, portera sur l’instruction. Et bien d’autres sont en cours d’organisation !

Référents : Sarah PAPOULAR et Antoine LAMY

PÔLE SPORT

Courir entre le cabinet et le Palais sera une habitude bientôt pour grand nombre d'entre nous... c'est pourquoi le sport est essentiel à l'EFB ! Le Pôle Sport est en charge d'organiser des compétitions dans les différentes disciplines. En effet, au travers du Pôle Sport, l’EFB s’est d’ores et déjà illustrée en running avec « la Juris’Run » et « la Course des héros », en tennis lors d’un tournoi entre élèves avocats, au football, en tissu aérien, et l’EFB prendra prochainement la mer lors de la Juris’Cup. Alors n’hésitez plus à lasser vos baskets et venez transformez l'essai avec nous !

Référents: Paul MERGIER et Paul WORMS

PÔLE DROITS DE L’HOMME

Le Pôle Droit de l'Homme a de nombreux projets qui s'inscrivent dans les actions de notre Parrain Maître Henri Leclerc. En effet, nous proposons de nombreuses activités tout au long de notre cursus à l'EFB : participer à des concours de plaidoiries de défense des droits de l'Homme, assister à des audiences de QPC au Conseil Constitutionnel, à des audiences à la CEDH, rencontrer des militants associatifs actifs, soutenir la Ligue des Droits de l'Homme en participant aux permanences et ainsi suivre et aider des personnes concrètement dans leurs démarches de régularisation ou naturalisation.

Référents : Fadila OUADAH- BENGHALIA et Nina CAUX

PÔLE CULTURE

Le Pôle Culture de l’AEA est en charge de tous les évènements culturels des étudiants de l’EFB. Le Pôle a pour mission de créer des partenariats avec des musées,

des théâtres et des salles de cinéma afin de faire bénéficier les élèves-avocats de places et d’entrées à prix réduit ou gratuites, la participation à des avant-premières ou l’organisation de rencontres avec des artistes lors de divers évènements tels que des expositions ou des représentations cinématographiques ou théâtrales. Des cours d'expression scénique et de théâtre donnés par des professionnels sont également organisés chaque semaine.

Référents : Florent RABOTTIN et Joffrey OZIMEK

PÔLE ELOQUENCE

Le Pôle a pour principal événement la Petite Conférence à laquelle tous les élèves avocats peuvent assister et surtout participer. 5 séances du premier tour ont déjà eu lieu et d'autres séances sont encore à venir. Les sujets sont variés, par exemple : Satan a-t-il eu une enfance heureuse ? Le temps s'arrête-il pendant la nuit ?

Les séances se déroulent en salle des référés, au Palais de Justice, suivi d'un apéritif pendant lequel il est possible d'échanger avec les Secrétaires de la Conférence.

D'autres événements se réaliseront également autour de la plaidoirie, élément majeur de notre future profession et de la Conférence du stage. Il s’agit notamment de la Joute des Associations ou du Concours du Mémorial de Caen.

Référents : François-Xavier BEAUVISAGE, Kadiatou TAPILY, Thomas YTURBE, Stéphanie MANGUELE

PÔLE SOLIDARITÉ

Le Pôle a pour objectif d’organiser et de participer à des évènements placés sous le signe de la solidarité. Ce fut le cas par exemple avec la Course des héros, les fonds récoltés ont été reversés à l’association « Barreau de Paris solidarité ». Il s’agira également d’organiser des rencontres et des conférences, par exemple avec des associations bénévoles d'avocats comme « Avocats sans frontières » ou « Droit d'urgence » afin d'inciter les élèves avocats à s’engager et donner de leur temps.

Référents : Anne Sophie ALZRAA et Serena PACELLI

AEA PARIS - LE BAROMAÎTRE | 39

TRIBUNE LIBRE

« Ce soir nous sommes en famille, montrez-nous qui vous êtes, parlez-nous des projets qui vous animent, livrez-vous, soyez francs, directs, synthétiques, pas de chichis ! ». Dès l’introduction, la Présidente de l’Association des Elèves Avocats (AEA), Clémence Amara Bettati, chargée d’orchestrer le débat donne le ton de la soirée. Il sera dynamique, impertinent, parfois abrupt.

Ce 8 Juin 2015, s’est tenu à l’EFB un grand débat entre les candidats au Bâtonnat de Paris organisé par l’AEA. Alors que pour certains l’élection au Bâtonnat est synonyme de grande kermesse, de nombreuses luttes de pouvoir et d’influence s’y jouent.

Cette année, pas moins de neuf candidats ont livré bataille pour le prestigieux fauteuil de Bâtonnier de Paris, lors d’une campagne très riche et souvent féroce. Débordements et polémiques ont ainsi jalonné le parcours des candidats.

Le Barreau de Paris compte 28 000 avocats et pourtant malgré l’un des plus haut taux de participation à cette élection, qui a eu lieu les 23 et 25 Juin derniers, seuls 44% d’entre eux se sont exprimés.

Autorité morale, garant de la discipline, de la déontologie, représentant de la profession, le Bâtonnier de Paris demeure une figure emblématique et un personnage incontournable de l’institution judiciaire.

Alors que la campagne battait son plein, les cinq binômes et deux des candidats individuels ont répondu présents à l’invitation de l’AEA. Il s’agissait pour l’association, en dépit du fait que les élèves avocats ne votent pas, de participer à la vie du Barreau et surtout de les sensibiliser aux enjeux de la profession qu’ils s’apprêtent à embrasser.

En guise de prolégomènes, les candidats ont été invités à se présenter. Une série de trois questions leur a été posée. Puis,

différents sujets ont été abordés et à chaque fois seuls deux ou trois des candidats se sont exprimés. En conclusion, ils ont été interrogés sur une question spécifique. Le débat ayant duré deux heures, il s’agit ici de relever les questions et réponses les plus pertinentes.

Quel est votre projet pour l’EFB ?

Nathalie Attias/Nicolas Lerègle:

NL: Notre projet est simple, il est de permettre aux futurs avocats que vous êtes d’être présents sur de nouveaux métiers. L’Ecole ne doit pas vous apprendre le droit, mais à devenir des chefs d’entreprise, et à maîtriser parfaitement les règles professionnelles. Elle doit permettre aux futurs avocats que vous êtes de développer leur activité et notamment à travers les nouveaux métiers de l’avocat.

Benoît Chabert/Philip Cohen:

PC: Il convient de reprendre la maîtrise de l’examen d’entrée, il faut exiger plus de qualité et cela doit être envisagé avec les IEJ. Nous proposons éventuellement un examen d’entrée en juillet, pour éviter les inégalités de préparation. Un examen national, permettrait d’éviter les problèmes d’hétérogénéité. Nous ne voulons plus subir le flux financier des IEJ.

L’Ecole doit être conçue comme une école de la pratique professionnelle avec trois piliers : - déontologie et unité de la profession - techniques procédurales - former à l’esprit d’entreprise, former les futurs professionnels que vous êtes.

Isabelle Dor:

Le problème réside dans le niveau. Mon maître mot est donc la sélection : à l’entrée et à l’Ecole elle-même par le biais d’un contrôle continu. L’expression écrite et l’expression

RETOUR SUR... LE GRAND DÉBAT DES CANDIDATS

AU BÂTONNAT DE PARIS

40 | AEA PARIS - LE BAROMAÎTRE

TRIBUNE LIBREorale seront les principaux critères. La durée de la scolarité doit également être réduite.

David Gordon-Krief/Hubert Flichy:

HF: L’EFB doit être une école de formation à un métier et uniquement cela, il n’est pas question de reprendre ce qui a déjà été vu à la faculté. Il faut assurer vos compétences pour le métier auquel vous vous destinez. Vous devez apprendre à créer.

DGK : L’EFB doit être connue et reconnue partout. Il faut que les élèves avocats aient envie de venir ici pour apprendre. Il faut donc que les cours changent, qu’ils soient professionnalisant. Il faut parler de solidarité et de pro bono. Il faut que les avocats qui sortent de cette Ecole soient des acteurs de notre société, et de bons professionnels. Enfin, nous avons un souhait : que les jeunes soient plus entendus, et pour cela il faut par exemple changer la répartition des voix au conseil d’administration. Il faut écouter les jeunes.

Laurent Martinet/Marie-Alix Canu-Bernard:

MACB : Nous sommes d’accord, il faut que vous soyez heureux de venir ici chaque matin. Il faut de la pratique, de la pratique et encore de la pratique, avec des mises en situation dans des ateliers. Il conviendra de revoir les périodes de stages, ils devront être différés dans l’année pour avoir plus de chance de trouver des collaborations.

LM: L’EFB doit être une école reconnue, avec un postulat : pas de redondance avec l’université. Elle doit être une école d’application pratique. Nous avons pensé cette école avec entre autres fils directeurs la possibilité pour les élèves avocats de partir à l’étranger. Cette Ecole, c’est aussi l’école de la République, vous devez pouvoir y trouver les réponses aux défis de demain, et notamment avec l’international. Les futurs confrères que vous êtes doivent pouvoir faire des stages à l’étranger. Nous faisons en sorte de mettre en place de nombreux partenariats, des bourses, des prêts. L’Ecole doit vous forger, vous accompagner, pour répondre aux défis de demain.

Patrice Rembeauville Nicolle:

Il faut refondre tout le système. L’Ecole doit être une école d’application réelle. Je fais mon mea culpa concernant le partage en trois fois six mois. C’est trop long. Il faut une pratique concrète des dossiers, le plus tôt possible, avec de vrais dossiers, tout de suite. Mieux que les foisonnements, il faut travailler déjà sur de vrais dossiers et sous le contrôle d’un vrai patron. Les conférences c’est bien joli, mais en sortant de l’Ecole vous devez savoir gérer un dossier.

Frédéric Sicard/Dominique Attias:

FS : Nous avons trois axes d’engagements :

- Structurer : il faut des cours écrits, avec l’aide des élèves avocats. Nous devons reprendre la question des objectifs

pédagogiques, nous voulons que chaque enseignant ait un objectif pédagogique précis. Les cours écrits doivent provenir de l’Ecole et pas achetés ailleurs. Il faudra répartir différemment les stages.

- Partager : oui à l’international, il n’est pas question de démonter ce qui a été mis en place, mais il faut s’intéresser à l’Europe. De même, au niveau national, nous devons échanger avec les autres écoles en France.

- Rassembler : c’est à vous de discuter avec nous, de partager ce que doivent être vos droits. Vous êtes de futurs confrères, il est temps de vous rendre une véritable place. Tout cela devra se faire avec le CNB.

Puisque nous savons que vous êtes opposés au numérus clausus, sans en parler, que proposez-vous et que dites-vous à un élève avocat qui entre dans la profession et ne trouve pas de collaboration ?

Frédéric Sicard/Dominique Attias:

FS: La question n’est pas pour ou contre. Ce n’est pas possible au regard du droit. Mais la croissance ne permet pas de placer 3000 jeunes, seulement 2500. Depuis six ans, il existe un projet d’examen national, ce qui permettrait d’avoir plus d’égalité, et une régulation du flux. Le problème est que ce projet est dans un carton, il doit en sortir.

Laurent Martinet/Marie-Alix Canu-Bernard:

LM: L’instauration d’un numerus clausus n’est pas possible en l’état du droit, donc pas la peine de phosphorer là-dessus. Il faut un examen national, unique, plus sélectif, plus homogène. C’est le CNB qui peut le décider.

Benoît Chabert/Philip Cohen:

BC: Que dire à un jeune qui entre à l’Ecole ? Tu vas choisir une profession magique mais difficile. Alors qu’est ce qui est possible ? Ouvrons-nous et faisons en sorte que les jeunes se disent que la profession est en marche. Créons, essayons de faire en sorte que l’examen soit un peu plus sélectif. Mais cela ne doit pas être un numerus clausus, nous y sommes opposés. Il faut reprendre en main l’examen d’entrée, c’est aux avocats de décider qui doit entrer dans la profession et non pas aux professeurs de droit.

Isabelle Dor :

Pas de numerus clausus. Un seul mot : sélection. L’accès doit être plus restreint, cela doit être fondé sur l’expression écrite et l’expression orale. Il faut du talent, avoir un certain niveau, savoir s’exprimer clairement. Donc sélection, sélection et encore sélection.

AEA PARIS - LE BAROMAÎTRE | 41

TRIBUNE LIBREDavid Gordon-Krief/Hubert Flichy:

DGK: Il ne faut pas se voiler la face, cette question repose sur une réalité. Alors que fait-on ? On met une barrière ou on développe ? Nous sommes dans un monde de droit, il y a de la demande de droit partout. Seuls les avocats doivent être au cœur du lien de droit entre les citoyens, les entreprises, et la justice. Il y a des marchés pour tout le monde. Alors le rôle du bâtonnier est de faire en sorte que vous soyez bien formés.

Nathalie Attias/Nicolas Lerègle :

NA: Nous sommes une profession libérale, indépendante, aussi le numerus clausus est une aberration. En revanche, il est un fait que vous êtes trop nombreux, il faut donc impérativement être plus sélectif à l’entrée. Et mettre en place plus d’homogénéité dans l’examen, en créant un examen national et en transférant la responsabilité de l’organisation de l’examen au Barreau de Paris.

Patrice Rembeauville Nicolle :

Le numerus clausus, tout le monde est contre. Il y a déjà une sélection, on peut la durcir encore, mais le problème est à l’Ecole : c’est la compétence. Il faut aussi une sélection à l’intérieur sinon cela ne fonctionnera pas.

Etes-vous pour ou contre l’interdiction du port de signes religieux à l’EFB ?

Laurent Martinet/Marie-Alix Canu-Bernard:

LM: Il n’y a pas à être pour ou contre : il y a des textes de loi qu’il faut respecter. Or, aujourd’hui ces textes permettent de porter ces signes religieux au sein de l’Ecole. On peut se battre contre des choses, mais à l’Ecole nous respectons la loi. De plus, le CNB a confirmé formellement qu’il n’était pas possible de mettre en place un règlement qui interdirait le port de signes distinctifs.

MACB: Je trouve cela plutôt bien de ne pas pouvoir porter de signes distinctifs à l’Ecole, dans la mesure où lorsque l’on plaide nous n’en portons pas.

Nathalie Attias/Nicolas Lerègle:

NL: Nous sommes contre le port de signes religieux. Nous portons une robe en tant qu’avocat, sans signes distinctifs. Nous essayons de donner la même apparence à tous les avocats au moment ou ils plaident pour défendre les intérêts de leurs clients. Cela doit s’apprendre dès l’Ecole.

David Gordon Krief/Hubert Flichy:

DGK: Pas de port de signes ostensibles, c’est notre opinion. Nous avons un immense respect des cultes. Mais à l’Ecole, il nous semble que nous ne devons pas porter de signes distinctifs. Bien sur, il faut être fier de ses croyances, mais nous ne les portons pas.

Benoît Chabert/Philip Cohen:

PC: Il est difficile de dire que l’on va, dans une Ecole de droit, mettre en place des règles qui vont à l’encontre de la loi. Une fois que cela est dit, il faut mener une réflexion. La solution ne passe pas par de grandes déclarations, mais par le dialogue, l’écoute, et pas la stigmatisation, dans tous les sens d’ailleurs.

De ce point de vue, l’incident qui a eu lieu à l’EFB doit nous amener à réfléchir sur le mode de résolution de ces problèmes. Cela passera par le dialogue et l’écoute.

Frédéric Sicard/Dominique Attias:

DA: Cette question me fatigue. Je suis allée à l’Université Paris VIII, il y avait des filles voilées, d’autres qui portaient des croix. Il y en a marre des costumes, des interdictions. En ce qui me concerne, évidement, lorsque vous plaiderez il n’y aura pas de signes distinctifs, mais en attendant, j’en ai marre de toutes ces interdictions, ces postures. Je suis pour que chacun vive en fonction de ce qu’il estime devoir être.

Patrice Rembeauville Nicolle:

Je suis contre les signes distinctifs. Ce qui s’est passé ici a mal tourné car c’est devenu un problème politique et identitaire. Tout le monde s’est mal conduit, surtout ceux qui ont eu un comportement incroyable avec un enseignant qui est, sur le sujet, insoupçonnable de quoi que ce soit. Certes, il y a la loi, mais dans cette Ecole on doit pouvoir faire un règlement et après on verra si on nous attaque.

Concernant les atteintes à la confidentialité des échanges entre clients et avocats et entre avocats, prônez-vous une ligne dure et inflexible ou une politique de compromis ?

Benoît Chabert/Philipe Cohen :

BC: Lorsqu’il y a une atteinte aux règles déontologiques, il y a la possibilité d’ouvrir des poursuites disciplinaires. Il ne s’agit pas d’être dans le compromis, mais dans l’innovation. Il ne faut pas avoir une logique passéiste, et dire puisque la loi existe, nous n’allons pas la modifier, mais être dynamique. Nous ne sommes pas des prestataires de services comme les autres.

Laurent Martinet/ Marie-Alix Canu-Bernard:

LM: Il n’y a même pas de débat, c’est l’ADN de notre profession, c’est ce qui nous distingue. Si ces principes sont battus en brèche, nous n’existons plus. On abîme l’image de la profession, il faut donc être extrêmement vigilant, intransigeant. Mais il faut également être prospectif, aujourd’hui on communique différemment. Il faut s’interroger sur comment réguler ces échanges, il faut une vision prospective.

42 | AEA PARIS - LE BAROMAÎTRE

TRIBUNE LIBREPour ou contre un bâtonnier de France ? Comment envisagez-vous les rapports entre le barreau de Paris et les autres barreaux ?

Frédéric Sicard/Dominique Attias:

FS: A terme, oui, il va nous falloir une représentation unique, et cela par une élection. Mais pour l’instant, il faut travailler dans l’unité, au niveau national et Européen. Il faut que tous les barreaux travaillent ensemble. Il est question de travail et de synthèse. Unité de la profession, il faut que les conflits avec la province cessent.

David Gordon Krief/Hubert Flichy:

HF: Je souhaite qu’il y ait un jour un « Président des avocats de France » et que l’on cesse cette division qui existe entre Paris et la province. Pourquoi cette appellation un peu pompeuse ? Parce qu’il faut une personne pour représenter toute la profession. Il faut apprendre à travailler ensemble, que la profession soit plus forte et que donc l’organisation du CNB sache évoluer.

Il y a 70% de femmes à l’EFB, la profession compte 52% de femmes et 48% d’hommes, seulement 32% des femmes sont associés et 20% en cabinet de droit des affaires. Que proposez-vous concrètement pour que cela cesse ? Faut-il des quotas, les femmes manquent elles d’ambition, ou les hommes sont-ils le problème ?

Nathalie Attias/Nicolas Lerègle:

NA: Je suis candidate au bâtonnat, je suis une femme, mais je ne fais pas de ma condition de femme un combat. Nous avons le droit d’être avocat, associé. Ce métier offre aux femmes de nombreuses possibilités. Je ne crois pas dans tout ce qui est parité, pour moi la parité c’est juste une question de chiffre. Nous avons des droits, c’est à nous de prendre le pouvoir. Il faut arrêter d’envisager la femme sous l’angle de sa féminité et de sa maternité, nous avons les mêmes compétences que les hommes, il faut juste les montrer. La femme a le droit d’avoir de l’ambition ou de ne pas en avoir, elle a le droit de rester à la maison, elle peut avoir envie de privilégier sa vie de famille.

Laurent Martinet/ Maire-Alix Canu-Bernard :

MACB: C’est une véritable difficulté. Souvent tout arrive ensemble: il y a un moment ou la vie personnelle et la vie professionnelle évoluent en même temps. Or parfois, il y a une incompatibilité, il faut donc une aide. Dans les grandes structures, en général, la parité est plus respectée, c’est plus difficile dans les petites structures. Il faut donner envie aux femmes et aux hommes d’entreprendre, il y a de nombreuses choses à faire.

Que comptez-vous faire pour lutter contre l’exploitation abusive des stagiaires par certains cabinets ?

Laurent Martinet/Marie-Alix Canu-Bernard :

LM: Il faut d’abord que les stagiaires concernés par ce type de pratiques fassent remonter l’information sans inquiétude, car souvent l’institution n’en a pas connaissance. L’Ordre et l’Ecole doivent également jouer leur rôle. Un exemple révélateur : premier semestre 2015, le Défenseur des droits a été saisi de 90 dossiers en matière de discrimination concernant des avocats. Cela met en exergue que l’Ordre ne remplit pas parfaitement son rôle, il faut informer et sensibiliser les confères et les futurs confères que vous êtes sur le fait que ce ne sont pas des situations normales.

Benoît Chabert/Philip Cohen:

BC: Il faut être clair : lorsque cela arrive c’est une faute déontologique de la part du patron, il faut donc que l’Ordre ait le courage d’ouvrir une procédure disciplinaire. Les stagiaires doivent être aidés et soutenus, par exemple à travers des fonds de soutien.

PC: Il faut d’abord que l’AEA, aussi, joue son rôle dans le signalement, l’information doit absolument remonter. L’exploitation abusive des stagiaires c’est versus ceux qui disent qu’ils ne font pas assez, il faut donc travailler des deux côtés.

Les candidats se sont ainsi soumis à un exercice difficile en répondant aux questions de leurs futurs confrères. Ils ont indiscutablement joué le jeu et se sont prêtés à l’exercice avec enthousiasme. Nous espérons qu’un débat entre les candidats au Bâtonnat à l’EFB organisé par l’AEA pourra s’inscrire dans le temps comme un passage obligé, une tradition !

Nous félicitons les futurs Bâtonnier et Vice Bâtonnier : Frédéric Sicard et Dominique Attias, qui ont remporté le scrutin. Bravo également aux autres candidats et à toutes les équipes de campagne.

L’AEA SOUHAITE REMERCIER :

Frédéric Sicard, Dominique Attias, David Gordon-Krief, Hubert Flichy, Laurent Martinet, Marie-Alix Canu-Bernard, Benoît Chabert, Philip Cohen, Nathalie Attias, Nicolas Lerègle, Partice Rembauville-Nicolle, Isabelle Dor, ainsi que leurs équipes de campagne.

Monsieur le Directeur Jean-Louis Scaringella, Anne Illouz, Sébastien Potier, et Xavier Lacaze.

Tous ceux qui nous ont soutenus dans notre démarche !

Toute son équipe (avec une mention spéciale pour Clémence Amara Bettati, Elie Weiss, Samir Zarouali, Grégoire Silhol, Pierre-Louis Vignancour et Joris Leclercq).

AEA PARIS - LE BAROMAÎTRE | 43

TRIBUNE LIBRE

1 - LA LOI DU 10 JUILLET 2014 RÉFORMANT LE STATUT DES STAGIAIRES S'APPLIQUE-T-ELLE AUX ÉLÈVES-AVOCATS ?

Selon le code de l'éducation, les articles L. 124-1 à L. 124-20, créés par la loi du 10 juillet 20141, s'appliquent à tous les stages en milieu professionnel. Cela étant, suite à la crainte du Barreau de Paris d'une réduction considérable du nombre de stages disponibles au sein des cabinets d'avocats en raison d'une disposition du projet de loi qui entendait limiter le nombre de stagiaires pouvant être accueillis au sein d'un organisme à moins de 10% de son effectif salarié, le Ministre du Travail, François Rebsamen, avait déclaré que les élèves avocats étaient exclus des dispositions prévues aux articles L. 124-1 à L. 124-20 du code de l'éducation2.

En pratique, cependant, les conventions de stage pré-rédigées par l'EFB incluent les dispositions protectrices des articles susvisés.

2 - LA GRATIFICATION D'UN STAGE EN CABINET D'AVOCATS EST-ELLE OBLIGATOIRE ?

L'Accord professionnel du 19 janvier 2007 relatif aux stagiaires des cabinets d'avocats prévoit une gratification minimale pour les élèves avocats effectuant un stage d'une durée inférieure ou supérieure à trois mois dans le cadre de leur formation3. En revanche, le stage « découverte » de 6 semaines se déroulant sur la première période de formation de l'élève avocat est exclu de cette gratification minimale4.

Quant aux autres stagiaires, la gratification minimale prévue par l'accord professionnel n'est obligatoire que pour les stages d'une durée supérieure à trois mois5. En deçà, la gratification minimale telle que prévue par le code de l'éducation s'applique.

3 - LA GRATIFICATION D'UN STAGE EN ENTREPRISE/ASSOCIATION/JURIDICTION EST-ELLE OBLIGATOIRE ?

Selon le code de l'éducation, une gratification est obligatoire lorsque le stage est d'une durée supérieure à deux mois, consécutifs ou non, au cours de l'année d'enseignement.

La durée de deux mois est calculée par rapport au temps de présence du stagiaire ; exprimée en heures, elle correspond à 308 heures de présence (44 jours x 7 heures par jour).

Dès lors, la gratification ne sera obligatoire qu'à partir de la 309ème heure de présence. En deçà, la gratification est donc facultative6.

Les jours de congés et d'autorisations d'absence en cas de grossesse, paternité ou d'adoption sont assimilés à du temps de présence pour le calcul de la durée du stage.

4 - QUELLE EST LA GRATIFICATION MINIMALE ?

Concernant les stages en cabinets d'avocats des élèves avocats, la gratification est encadrée par les articles 2 et 3 de l'Accord professionnel du 19 janvier 2007 relatif aux stagiaires des cabinets d'avocats comme suit :

Cabinets employant de 1 à 2 salariés lorsque le stage est d'une durée inférieure ou égale à trois mois7.

Quant aux stages en entreprise, juridiction, association ou dans la fonction publique, c'est le code de l'éducation qui prévoit le montant de la gratification minimale8.

Pour les conventions de stage conclues entre le 1er décembre 2014 et le 31 août 2015, la rémunération horaire est fixée à 13,75%, du plafond horaire de la Sécurité sociale, soit 3,30 euros. Pour les conventions de stage conclues à partir du 1er septembre 2015, la rémunération horaire passera à 15% du plafond horaire de la Sécurité sociale, soit 3,60 euros. Depuis le 1er décembre 2014, le calcul du montant de la gratification mensuelle du stagiaire s'effectue en fonction des heures

LES STAGES EN10 QUESTIONS

44 | AEA PARIS - LE BAROMAÎTRE

TRIBUNE LIBREréellement effectuées (et non plus sur la base de 151,67 heures). A noter que les conventions collectives applicables en entreprise peuvent prévoir des gratifications plus élevées.

5 - AI-JE DROIT À DES CONGÉS ?

Seuls sont de droit les congés en cas de grossesse, de paternité ou d'adoption pour lesquels le stagiaire bénéficie de congés et d'autorisations d'absence d'une durée équivalente à celles prévues pour les salariés.

Lorsque le stage est d'une durée supérieure à 2 mois, la convention de stage doit seulement prévoir la possibilité de congés et d'autorisations d'absence ; leur octroi sera décidé par votre maître de stage9. Lorsque ces congés sont pris, le maintien de la gratification n'est pas obligatoire car celle-ci est calculée sur le nombre d'heures de présence effective du stagiaire. Rien n'exclut que vous puissiez bénéficier de congés plus avantageux, par exemple, par application d'une convention collective plus favorable. Notez également que les juridictions administratives – et non judiciaires – accordent à leurs stagiaires des jours de congés gratifiés similaires aux congés payés des salariés !

6 - PUIS-JE BÉNÉFICIER DU RESTAURANT D'ENTREPRISE OU DES TITRES-RESTAURANT ?

Selon le code de l'éducation, le stagiaire bénéficie de titres-restaurant ou de l'accès au restaurant d'entreprise dans les mêmes conditions que les salariés de l'entreprise d'accueil, moyennant notamment une participation financière 10.

7 - L'ORGANISME D'ACCUEIL DOIT-IL PRENDRE EN CHARGE MES FRAIS DE TRANSPORT ?

Selon le code de l'éducation, le stagiaire bénéficie de la prise en charge des frais de transport prévue à l'article L. 3261-2 du code du travail11.

8 - QUELLE PEUT ÊTRE LA DURÉE MAXIMALE AU SEIN D'UN MÊME ORGANISME D'ACCUEIL ?

La durée du ou des stages effectués par un même stagiaire dans un même organisme d'accueil ne peut excéder 6 mois par année d'enseignement, soit 924 heures sur l'année12.

9 - MA GRATIFICATION FAIT-ELLE L'OBJET DE PRÉLÈVEMENTS DE COTISATIONS SOCIALES ?

Oui, mais vous ne versez des cotisations et contributions salariales que sur la partie de la

gratification qui dépasse 13,75% du plafond horaire de la Sécurité Sociale multiplié par le nombre d'heures de présence.

Vous payez, alors, la part salariale des cotisations de sécurité sociale (maladie, maternité, invalidité, décès, retraite de base) ainsi que la CSG et CRDS. Ces cotisations sont versées au régime général de Sécurité Sociale. Vous n'êtes pas redevable des cotisations salariales de retraite complémentaire (Arrco) et d'assurance chômage. Vous n'acquérez donc aucun droit à ce titre.

Ex 1 : Vous avez travaillé 154 heures au mois de juillet 2015. Votre gratification s'élève à 1.500 euros par mois en raison d'une convention collective plus favorable. 154 heures x 3,30 euros (i.e, 13,75 % du plafond horaire de la Sécurité Sociale) = 508,20 euros. Ce n'est que la partie de votre gratification qui dépasse 508, 20 euros qui sera soumise à cotisations.

Ex 2 : Vous avez travaillé 154 heures au mois de juillet 2015. Vous percevez la gratification minimale. 154 x 3,30 euros = 508,20 euros. Votre gratification est égale à la gratification minimale : Vous êtes exonéré(e) des cotisations et contributions sociales.

10 - EST-CE QUE J'ACQUIERS DES DROITS À LA RETRAITE ?

La part de votre gratification qui est soumise aux cotisations sociales (cf supra) est prise en compte pour le calcul de vos droits à la retraite. Or, pour valider un trimestre de retraite, il faut avoir gagné l'équivalent de 150 heures payées au SMIC, soit 1 441,50 euros.

Si vos périodes de stage n'ont pas été suffisamment rémunérées pour vous ouvrir des droits à la retraite, vous avez désormais la possibilité de racheter ces périodes de stages13. Les stages doivent avoir fait l'objet d'une convention tripartite, pour une durée supérieure à deux mois, consécutifs ou non, avoir donné lieu à gratification et avoir débuté à compter du 15 mars 2015.

Pour rappel, les droits à la retraite sont le résultat de la totalisation des trimestres validés dans chacun des régimes de base d'assurance vieillesse auxquels un avocat a été affilié au cours de sa carrière professionnelle. Amanda DIAS

Elève avocat

1 Loi n° 2014-788 du 10 juillet 2014 tendant au développement, à l'encadrement des stages et à l'amélioration du statut des stagiaires.

2 Courrier du Ministère du Travail, de l'emploi, de la formation professionnelle et du dialogue social au Bâtonnier de Paris datant du 04 septembre 2014.

3 Art 2 et 3 de l'Accord professionnel du 19 janvier 2007 relatif aux stagiaires des cabinets d'avocats.

4 Art. 1 de l'Avenant du 21 décembre 2007 à l'Accord professionnel du 19 janvier 2007 relatif aux stagiaires des cabinets d'avocats.

5 Art 4 de l'Accord professionnel du 19 janvier 2007 relatif aux stagiaires des cabinets d'avocats.

6 Art. D. 124-6 et D. 124-8 du code de l'éducation.

7 Art. 3 de l'Accord professionnel du 19 janvier 2007 relatif aux stagiaires des cabinets d'avocats remonte ce seuil à au moins un salarié.

8 Art. L. 124-6 et D. 124-8 du code de l'éducation.

9 Art. L. 124-13 du code de l'éducation.

10 Ibidem.

11 Art. L. 124-13 et D. 124-7 du code de l'éducation.

12 Art. L. 124-5 du code de l'éducation.

13 Loi n°2014-40 du 20 janvier 2014 garantissant l'avenir et la justice du système de retraites et décret d'application n°2015-284 du 11 mars 2015 précisant les modalités et conditions de validation des stages en entreprise par le régime général d'assurance vieillesse.

AEA PARIS - LE BAROMAÎTRE | 45

TRIBUNE LIBRE

Le 9 juin dernier, le Premier Ministre, Manuel Valls, a présenté les mesures en faveur de l'emploi dans les TPE (très

petites entreprises) et PME (petites et moyennes entreprises)1.

Souvent qualifiées de « Small Business Act à la française » en référence à une loi votée par le Congrès américain en juillet 1953, ces mesures en partagent l'enjeu : favoriser l’emploi dans les TPE (moins de dix salariés) et PME (moins de 250 salariés).

Pour remplir l'objectif fixé, 18 propositions sont présentées.

Curieusement, elles ont été incorporées dans deux textes législatifs: la loi pour la croissance et l'emploi, dite loi « Macron » et le projet de loi sur le dialogue social, dite loi « Rebsamen ». Les mesures présentées par M. Valls ont eu pour effet de court-circuiter l'application du code du travail qui prévoit une concertation préalable des partenaires sociaux sur tout projet de réforme en droit du travail.

CDD, indemnités de licenciement, seuils d'effectifs: Que retenir de ces mesures?

UN SECOND RENOUVELLEMENT DE CDD

La nouveauté concerne la possibilité de renouvellement du contrat à durée déterminée qui, pour rappel, ne peut être conclu que dans des cas précisément définis par la loi (art. L. 1242-2 du code du travail).

En principe, la durée maximale d'un CDD est de 18 mois. Dans certains cas spécifiques, cette durée peut être portée à 24 mois ; c’est le cas, par exemple, en cas d’exécution du contrat à l’étranger (C. trav. Art. L.1242-8).

En l'état actuel du droit, le CDD est renouvelable une fois pour une durée déterminée. La durée du renouvellement, ajoutée à la durée du contrat initial, ne peut excéder la durée maximale prévue à l'article L. 1242-8 du code du travail2.

Désormais, il serait possible de renouveler deux fois un CDD, sans toutefois dépasser la durée maximale de 18 mois.

Du côté des syndicats patronaux, cette nouvelle est vue comme une « mesure positive » par le MEDEF et comme une « réelle avancée » pour la CGPME. Du côté des syndicats de salariés, la CGT annonce que cette mesure « fragilise

TOUT POUR L'EMPLOI : VOUS AVEZ DIT TOUT ?

1 Tout pour l’Emploi dans les TPE et PME : dossier de presse : http://www.gouvernement.fr/partage/4431-tout-pour-l-em-ploi-dans-les-pme-et-les-tpe

2 C. trav., Art. L.1243-13.

46 | AEA PARIS - LE BAROMAÎTRE

TRIBUNE LIBRE

davantage les salariés » et génère une plus grande précarité pour ces derniers.

VERS UN PLAFONNEMENT DES INDEMNITÉS DE LICENCIEMENT

Lorsque le licenciement d'un salarié est dépourvu de cause réelle et sérieuse, ce dernier peut prétendre à une indemnité encadrée par la loi en fonction de la taille de l'entreprise et de l'ancienneté du salarié. Les montants sont les suivants :

Désormais, les indemnités seraient plafonnées, comme suit :

Cette réforme est défavorable au salarié ayant plus de deux ans d'ancienneté dans une entreprise d'au moins 20 salariés ; avec la réforme, son indemnisation serait plafonnée à six mois de salaire alors qu'en l'état actuel du droit, le salarié peut prétendre à plus de six mois de salaire à titre indemnitaire.

Toutes les indemnités accordées par le juge prud’homal à l’occasion d’un licenciement sans cause réelle et sérieuse sont concernées, sauf les atteintes graves au droit du travail (discrimination, harcèlement, égalité professionnelle, accident du travail et maladie professionnelle3, inaptitude, salarié protégé et exercice du droit de grève). En réparation d’un vice de forme lors de la procédure de licenciement, le salarié pourra obtenir un mois de salaire à titre indemnitaire.

Le plafonnement des indemnités salariales existe déjà à l’étranger. En Irlande, le maximum de l’indemnisation est fixé à deux ans de salaire alors qu’il est de quarante-deux mois en Espagne. L'Italie tient compte de la taille de l’entreprise et l’ancienneté du salarié, entre six, dix et quatorze mois pour plus de 20 ans de service. Le régime proposé par le gouvernement français s’approche du système italien, gouverné par Matteo Renzi.

La difficulté principale pour la mise en place de ce plafonnement est le risque constitutionnel auquel le Gouvernement devra faire face. En effet, la France est engagée par la Convention 158 de l’Organisation Internationale du Travail qui prévoit en son article 10 un principe de réparation intégrale du préjudice par une indemnité adéquate ou une réparation appropriée. Le Gouvernement va devoir concilier le plafonnement du droit à réparation devant la juridiction prud’homale avec le principe de réparation intégrale du préjudice.

UNE SIMPLIFICATION ET UNE RÉDUCTION DES EFFETS DE SEUIL

Dernière proposition majeure, qui n’est pas nouvelle cependant : une simplification et une réduction des effets de seuil. Point d’orgue du projet de loi Rebsamen, il s’agit de clarifier les différents seuils imposés en matière de droit du travail. Il est prévu de relever tous les seuils de 9 et 10 salariés à 11 salariés, notamment pour le versement de la cotisation transport ou encore la contribution à la formation professionnelle.

Enfin, l'effet des franchissements de seuils fiscaux jusqu'à 50 salariés, qui déclenchent des prélèvements fiscaux et sociaux supplémentaires, sera gelé pendant trois ans. Sont concernés les seuils d’effectifs franchis jusqu'à fin 2018 et leurs effets pendant les trois années suivant leur franchissement. La mesure ne concerne pas les seuils relatifs à la mise en place des IRP qui ont déjà fait l'objet d'un ajustement dans le cadre du projet de loi sur le dialogue social. Reste à savoir si l’ensemble de ces mesures parviendra à relancer une dynamique de croissance par la création d’emploi. Le pari est lancé et espérons que la multiplication des propositions en tous sens ne va pas créer de confusions dans l’esprit du législateur en lançant une énième loi dont l’efficacité restera (encore) à démontrer.

Par une décision du 5 août 2015 (Décision n° 2015-715 DC du 05 août 2015), le Conseil Constitutionnel a censuré cette mesure pour méconnaissance du principe d'égalité devant la loi. Ainsi, les Sages ont jugé que si le législateur pouvait plafonner l'indemnité due au salarié licencié sans cause réelle et sérieuse, il devait retenir des critères présentant un lien avec le préjudice subi par le salarié. Si le critère de l'ancienneté dans l'entreprise est ainsi en adéquation avec l'objet de la loi, tel n'était pas le cas du critère des effectifs de l'entreprise.

Grégoire Silhol et Pierre-Louis Vignancour Elèves avocats

3 L'exclusion des indemnités liées aux accidents du travail et maladie professionnelle est conforme au principe de réparation intégrale à l’encontre des victimes d’accident du travail ou maladie professionnelle résultant d’une faute inexcusable de leur employeur, principe affirmé par le Conseil Constitutionnel (Cons. Const. 18 juin 2010, n°2010-8 QPC).

AEA PARIS - LE BAROMAÎTRE | 47

TRIBUNE LIBRE

Mis en place en octobre 2014, ce projet solidaire, qui a pour but de délivrer gracieusement des diagnostics juridiques aux particuliers, connait

un succès croissant au fil des mois.

QUELS BILANS ?

S'ils n'étaient que quatre à être reçus en décembre 2014, c'est une soixantaine de personnes qui ont pu bénéficier de l'expertise des élèves avocats de l'EFB depuis le 1er semestre 2015.

Ce développement fulgurant a conduit les organisateurs de la Clinique juridique à ouvrir une autre boxe pour permettre de recevoir les « patients » dans des conditions respectant les règles de confidentialité.

Les personnes reçues sont extrêmement satisfaites de l'accueil qui leur est réservé ; en moyenne, la première consultation dure 30 minutes, et le rendu de diagnostic 15 minutes. Le patient bénéficie d'un diagnostic personnalisé, l'élève avocat ayant dû effectuer des recherches avant de rendre son diagnostic, lequel doit également être validé par un avocat du Barreau de Paris.

C'est cette prise en charge personnalisée qui contribue au succès de la Clinique juridique ; à l'inverse des autres points d'accès du droit, le temps accordé aux personnes est beaucoup plus long.

Encore faut-il que les justiciables disposent de ce temps ; lorsque les questions posées sont urgentes, les membres de la Clinique juridique sont contraints d'orienter ces personnes vers des structures spécialisées ou vers des avocats.

Les questions qu'on dû traiter les élèves avocats sont très variées, parfois même, ne relevant pas de leur spécialité initiale. Cela les contraint à effectuer un travail plus approfondi.

Il s'agit d'une expérience très riche en enseignements pour les élèves avocats, à divers titres. Pour la plupart, c'est la première fois qu'ils ont la possibilité de mettre

LA CLINIQUE JURIDIQUE : L'HEURE DES COMPTES

48 | AEA PARIS - LE BAROMAÎTRE

TRIBUNE LIBRE

en pratique leurs connaissances juridiques face à une personne. Ils doivent faire preuve de professionnalisme, et savoir poser les bonnes questions pour cerner le problème juridique. Enfin, le temps consacré au patient est volontairement limité à 30 minutes pour leur permettre d'apprendre à gérer leur temps.

QUELLES PERSPECTIVES ?

La Clinique juridique tend à devenir une véritable structure d'accès au droit.

Les plages d'horaires d'accueil du public devraient être prolongées pour permettre de faire face à la demande croissante de rendez-vous.

En effet, les permanences de la Clinique sont ouvertes chaque mardi de 12h à 15h, ce qui ne permet pas d'accueillir les personnes qui travaillent et qui n'ont pas le temps de se déplacer dans les locaux de l'EFB. Une deuxième plage horaire qui accueillerait le public en fin d'après-midi, à partir de 17h, est envisagée.

Actuellement, les élèves avocats sont choisis sur la base du volontariat ; néanmoins, le développement de la Clinique pourrait amener l'EFB à créer un module qui deviendrait obligatoire dans le cadre de la formation, et qui viendrait remplacer les journées de permanence dans les autres structures du droit.

A l'instar des cliniques juridiques américaines, présentes dans chaque faculté de droit, la Clinique juridique de l'EFB est l'une des pionnières en France.

D'autres structures de ce type devraient incessamment sous peu voir le jour dans les universités françaises ou encore dans les centres de formation des Barreaux français.

La Clinique juridique 2015

Contact : [email protected]

AEA PARIS - LE BAROMAÎTRE | 49

TRIBUNE LIBRE

« Moi, élève avocat, j’atteste de la sincérité des coups de gueule ci-dessous. Main droite sur le vade-mecum, je jure solennellement que c’est toute la vérité, rien que la vérité et cela pour le meilleur et pour le pire ».

T'EN AS MARRE QUAND...

Tu cherches en vain une place à la cafétéria ou en espace détente à midi. Lassé(e), tu finis par t'asseoir par terre dans un coin.

L'irritante symphonie des badges débute à moins le quart. Pile.

Tu avais choisi Bobigny ou Créteil pour échapper à Issy et tu n'y passes que 15 heures dans le semestre.

Tu apprends que les TD de déontologie sont à travailler en groupe…de six…

Tu n'avais pas choisi Bobigny ou Créteil et on t'y a envoyé(e) quand même.

Tu as trouvé une alternance mais l'administration t'a affecté(e) à une série R, M ou U.

Tu n'as toujours pas trouvé ton PPI au 15 juin. Ni ton stage final.

Tu lis pour la 30ème fois : "Malgré la qualité de votre candidature, nous sommes au regret...".

Tu as atteint le seuil de 12 absences autorisées et il te reste encore trois mois de cours.

Ton correcteur de foisonnement pénal refuse de corriger tes conclusions et te demande de les refaire parce que le modèle du vade-mecum ne lui plaît pas.

CONFESSIONS ENTRE ÉLÈVES AVOCATS

50 | AEA PARIS - LE BAROMAÎTRE

TRIBUNE LIBRE

Tu trouves la force au fond de toi pour aller à Issy-les-Moulineaux pour un cours à 9h, et l'intervenant ne se pointe pas.

Tu as droit deux fois par semaine aux contrôleurs de la RATP à la gare d'Issy-Val-de-Seine, et après, il faut encore que tu badges en cours.

Tu es devenu totalement parano, et tu vérifies 20 fois que tu as ta carte d'étudiant avant de sortir de chez toi.

Tu arrives le matin à l’EFB et tu n’as aucune idée de l’intitulé du cours auquel tu assistes.

Tu es en alternance, matin cours et après-midi stage, mais les intervenants insistent pour préciser qu'il faut assister à des audiences, et donc les tribunaux sont ouverts le samedi…aussi.

Des rattrapages de cours sont insérés, ni vus, ni connus, dans ton emploi du temps, pour dans trois semaines…le samedi matin…

Tu planifies déjà tes prochaines vacances, pour tenir le coup, à savoir août 2016.

BON À SAVOIR :

Des tables de ping-pong et un panier de basket sont accessibles au sein du square Louis Blériot, situé à deux pas de l'EFB !

Vous disposez de 50 impressions gratuites depuis la bibliothèque ou les salles informatiques situées au 3ème étage. Au-delà, votre compte devra être crédité.

Il y a des espaces détentes à tous les étages, avec canapé, distributeurs et fontaine à eau.

Vous trouvez les cours "inutiles" ou "nuls"? Évaluez vos intervenants pour alerter l'EFB! Il suffit d'ouvrir votre planning sur votre espace élève et cliquer sur la vignette rouge "E" qui figure sur chaque plage dédiée à un cours. La fenêtre d'évaluation s'affichera.

Les absences peuvent être excusées selon les modalités décrites dans votre espace élève, sous la rubrique « Absences ». Un formulaire est à compléter et envoyer à la DSI si l’absence ou le retard est dû à une difficulté technique ou un oubli ([email protected]). Les autres cas sont à justifier auprès de Steve Légère ([email protected]).

N’hésitez pas à faire part de vos difficultés, remarques ou suggestions à Madame Sylvie Guetté, Responsable Qualité, à l’adresse : responsablequalité[email protected]. Pour des questions liées à la scolarité ou les stages, vous trouverez vos interlocuteurs sur le site de l’EFB.

Mais surtout ce qui est bon à savoir et qu’il ne faut pas oublier, c’est que l’EFB c’est 6 mois de cours, 6 mois de PPI et 6 mois de stage final. C’est donc un an et demi dans une vie, vous ne serez élève avocat qu’une fois dans votre vie, vous n’arpenterez les couloirs de l’EFB comme si c’était votre territoire que six mois au maximum avant que n’arrive une nouvelle promotion, alors… profitez, vivez le moment et ne regrettez rien.

HOROSCOPEBÉLIER

On pourrait répondre à l’une de vos candidatures (stage final).

TAUREAU

L’amour est au deuxième étage (cafétéria).

GEMEAUX

N’oubliez pas de badger en sortant.

CANCER

N’oubliez pas de badger en entrant.

LION

N’oubliez pas de badger.

VIERGE

Attention aux fortes chaleurs.

BALANCE

Votre maître de stage est cruel pour votre bien.

SCORPION

Vous n’auriez pas dû accepter de faire du secrétariat lors de votre entretien.

SAGITTAIRE

Essayez de faire du sport (Parc Suzanne Lenglen ?).

CAPRICORNE

Vous prenez les foisonnements trop à cœur.

VERSEAU

Arrêtez de lire les horoscopes.

POISSON

Ne péchez pas par excès.

AEA PARIS - LE BAROMAÎTRE | 51

LE BAROMAÎTRE1, rue Berryer

92130 Issy-les-Moulineaux

DIRECTEURS DE PUBLICA-TION

Florent Gassies et Margaux Guérin..

COMITÉ DE RÉDACTION

Rédactrices en chef Lisa Varela- Stéphanie

Manguele - Camille Quinton - Amanda Dias.

Equipe rédactionnelle

Florent Gassies, Margaux Guerin, Mûre Maestrati,

Maêva Lagoute, Joséphine

de Beaucorps, Camille Quinton, Julia Azria, Lisa

Varela, Malcolm Mouldaia-Mauger, Clémence Amara-

Bettati, Amanda Dias, Grégoire Silhol, Pierre-Louis

Vignancour, Amanda Dubarry.

FABRICATION

Infographiste Alice Elia

Maquette Boris Lassauge

Crédits photographiques Amanda Dias

Impression Le Baromaître est imprimé

par

BNP Paribas 16 boulevard des italiens, 75 009 ParisLe Baromaître

est édité par AEA PARIS

Siège social : 1, rue Berryer, 92130 Issy-les-Moulineaux

-----------------

`Toutes reproduction, re-présentation, traduction ou adaptation qu'elles soient

intégrales ou partielles, quels qu'en soient le procé-dé, le support ou le média,

de tout ou partie de ce magazine sont strictement

interdites, sans l'accord exprès de leurs auteurs.

Les opinions exprimées dans ce magazine

n'engagent que leurs auteurs respectifs et ne

reflètent en aucun cas le point de vue de l'associa-tion des élèves avocats ou de l'École de formation du

Barreau.

Dépôt légal à parution.© AEA - 2015 - Tous droits

réservés.

Retrouvez toute l'actu du Baromaître sur Google+ et Facebook ! Contact : [email protected] Retrouvez-nous sur youtube : Le Baromaitre

twitter.com/AEA_EFB

gplus.to/baromaitre

www.facebook.com/Lebaromaitre