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HUGUE Fabien STM-6000 Activité de synthèse II L’évolution du complexe glaciaire du Massif du Mont Blanc Professeur responsable : PAGÉ Pierre

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HUGUE Fabien

STM-6000 Activité de synthèse II

L’évolution du complexe glaciaire du Massif du

Mont Blanc

Professeur responsable : PAGÉ Pierre

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HUGUE Fabien L’évolution du complexe glaciaire du Massif du Mont Blanc

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Sommaire

I. PRESENTATION.............................................................................................................................................. 2

II. INTRODUCTION............................................................................................................................................ 2

III. CARACTERISTIQUES DE LA VALLEE DE CHAMONIX.................................................................... 2

A. CONTEXTE GEOGRAPHIQUE ............................................................................................................................. 2 B. CONTEXTE GEOLOGIQUE ................................................................................................................................. 4 C. CHAMONIX ET SON HISTOIRE…....................................................................................................................... 5 D. DESCRIPTION GLACIOLOGIQUE DU TYPE DE GLACIERS. ................................................................................... 6

IV. INTERPRETATION DE LA CARTE.......................................................................................................... 8

A. VUE GENERALE SUR L’EVOLUTION DES GLACIERS ........................................................................................... 8 B. GLACIER DES BOSSONS ................................................................................................................................... 9 C. GLACIER DES PELERINS ................................................................................................................................. 11 D. GLACIER DE BLAITIERE................................................................................................................................. 12 E. GLACIER DE NANTILLON ............................................................................................................................... 13 F. MER DE GLACE .............................................................................................................................................. 14 G. GLACIER DE CHARPOUA................................................................................................................................ 16 H. GLACIER DU NANT BLANC ............................................................................................................................ 16 I. GLACIER DE LA PENDANT ............................................................................................................................... 17

V. CORRELATION AVEC LA CLIMATOLOGIE ....................................................................................... 18

A. LES RELATIONS ENTRE CLIMAT ET EVOLUTION DES GLACIERS ....................................................................... 18 B. LE BILAN DE MASSE...................................................................................................................................... 21 C. SOLUTION CONTRE LA FONTE ........................................................................................................................ 22

VI. CONCLUSION ............................................................................................................................................. 22

VII. REMERCIEMENTS................................................................................................................................... 23

VIII. ANNEXES .................................................................................................................................................. 24

A. ANNEXE 1 ..................................................................................................................................................... 24 B. ANNEXE 2...................................................................................................................................................... 25

IX. SOURCES ..................................................................................................................................................... 26

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I. Présentation

Le cours d’activité de synthèse II, STM-6000, a été pour moi une opportunité de mener à bien un projet, car il m’a permis de pouvoir effectuer une étude sur l’évolution du système glaciaire du massif du Mont Blanc dans les Alpes Françaises depuis 1848 jusqu’à aujourd’hui. Ce sujet est pour moi l’une de mes principales préoccupations, car ayant habité dans les Alpes durant toute mon enfance et étant fasciné par ces géants de Glace, je suis alarmé par la perte de ces derniers dans un futur proche. Années après années nous pouvons voir l’impact du réchauffement climatique naturel et la part anthropique à ce réchauffement par la fonte de ces glaciers. C’est ainsi que j’ai pu réaliser une étude cartographique du massif du Mont Blanc à partir d’une carte réalisée par James David FORBES, un physicien et explorateur écossais du 19ème siècle ayant fait des travaux remarquables sur la conduction thermique et sur l’écoulement glaciaire. Mon étude consistait principalement à comparer l’état actuel des glaciers avec ceux de la carte de J. FORBES en prenant des années intermédiaires où les données m’étaient accessibles, comme en 1975 et 2002 où j’avais des cartes topographiques de l’Institut Géographique National (IGN) de cette zone, ou encore en 1924 grâce au livre de Roger TISSOT « Au Mont-Blanc », qui est un ouvrage classique sur le massif du Mont Blanc avec de très belles photos de l’époque. Enfin, cette étude cartographique m’a simplement permis d’estimer l’évolution à grande échelle des glaciers sur ces 159 dernières années, et ne tient pas en compte les crues glaciaires que l’on a pu constater sur des cycles de 5 à 10 ans. Ce dossier sera donc une description de la carte réalisée à l’aide de différents outils et de l’historique de la vallée de Chamonix, tout en corrélant les évènements avec la climatologie actuelle.

II. Introduction

L’étude de l’évolution du système glaciaire du massif du Mont Blanc dans les Alpes françaises est depuis longtemps une source d’information sûre pour expliquer le réchauffement planétaire que nous vivons aujourd’hui. La vallée de Chamonix en est un lieu privilégié. Cette vallée regorge de nombreux glaciers la surplombant, et faisant d’elle un « laboratoire scientifique naturel » sans précédant. Dans un premier temps, nous allons voir les caractéristiques d’une telle vallée pour mieux comprendre le contexte glaciologique. Dans une deuxième partie, nous aborderons une interprétation de la carte de l’évolution des glaciers, pour terminer avec la corrélation de la carte avec la climatologie actuelle.

III. Caractéristiques de la vallée de Chamonix

A. Contexte géographique Le massif du Mont Blanc est situé dans les Alpes du Nord à la frontière entre la

France, l’Italie et la Suisse. La vallée de Chamonix est donc un point stratégique en ce qui concerne les échanges entre la France et ses pays limitrophes. Un tunnel Routier de 11,7 km à été construit à l’aplomb de l’aiguille du Midi pour faciliter les échanges entre la ville de Chamonix en France et celle de Courmayeur en vallée d’Aoste en Italie. Les travaux débutèrent en 1946 par des campagnes de forages côté Italien et finirent en juillet 1965. Depuis, une affluence trop importante de poids-lourds reliant

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les grandes villes de France à Turin ou Milan en Italie suscite de grandes manifestations dans la vallée de Chamonix, celle-ci voulant limiter ces allées et venues incessantes et dangereuses pour ses habitants.

Carte des reliefs de la France

Source : http://membres.lycos.fr/coll3/troisieme/france/relief.html

Chamonix est située dans le département de la Haute-Savoie dans la région

Rhône-Alpes, au Sud du Lac Léman (plus gros lac naturel d’Europe occidentale avec une superficie de 582,4 km²) et à l’Est de la ville d’Annecy. Actuellement on compte environ 10000 Habitants contre 2300 en 1861.

Carte satellite de la Haute Savoie, France

Source : Google Earth

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Outre le point de vue stratégique, la ville de Chamonix est un haut lieu touristique et économique. Avec ces 4808,45 mètres d’altitude, le Mont Blanc est le plus haut sommet des Alpes et de l’Europe occidentale. On le surnomme ainsi le « toit de l’Europe ». Connu mondialement de l’alpinisme et des sports de montagne, le massif du Mont Blanc fait vivre cette région touristique. La compagnie des Guides de Haute Montagne de Chamonix existe depuis 1921 et permet aux Chamoniards et aux Chamoniardes de vivre en plus de l’élevage et de l’agriculture.

B. Contexte géologique Chamonix est situé en fond de vallée entre les massifs du Mont Blanc et des

Aiguilles Rouges. Cette cicatrice séparant ces deux massifs abrupts est le vestige d’un ancien hémigraben datant du Jurassique. La vallée ainsi formée par l’extension de cette zone a, par la suite été comblée par des matériaux meubles comme les Alluvions de l’Arve et de ces affluents et par les tills successifs des glaciers durant les périodes glaciaires du Tertiaire et du Quaternaire.

Vallée de Chamonix vue depuis le Prarion Source : site internet de la Géologie Alpine,

http://www.geol-alp.com/h_mt_blanc/_lieux/mt_blanc_lieux/chamonix.html

La faille de Chamonix (f.c) représentée en jaune délimite la partie Ouest de

l’hémigraben. La limite rouge de la surface de la pénéplaine anté-Triasique (spa) est le contact entre le socle cristallin des Gneiss clairs du bloc du Mont Blanc et de la couverture du fond de vallée qui a été comblée. La faille de l’Angle (F.A) représentée en noir sépare le Granite du Mont Blanc des orthogneiss clairs qui forment les épaulements glaciaires dominants de la vallée.

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Versant Nord-Ouest du Massif du mont blanc vu d’avion

Source : site internet de la Géologie Alpine,

http://www.geol-alp.com/h_mt_blanc/_lieux/mt_blanc_lieux/chamonix.html

Légende : - m.AR : Bloc du Massif des Aiguilles Rouges. - f.c : faille de Chamonix. - spa : surface de la pénéplaine anté-Triasique. - f.A : faille de l’Angle. - f.CB : faille du col du Bonhomme (prolongement de la faille de l’Angle). On remarquera que l’allongement structural NE-SW de la vallée de Chamonix et

des massifs la bordant sont parallèles à l’allongement des Alpes. C. Chamonix et son histoire… Chamonix entre dans l'histoire en 1091 quand le comte Aymon Ier de Genevois

fait dotation de la vallée à l'abbaye bénédictine de Saint-Michel de la Cluse, en Piémont. Au XVIIIe siècle, Chamouny (ancien nom de Chamonix) n'est qu'une petite bourgade rurale. Ses habitants vivent alors, tant bien que mal, de l'élevage et de cultures de seigle et d'avoine. En 1741, deux anglais, William Windham et Richard Pocock, racontent dans des gazettes littéraires leur visite de la vallée et leur "expédition" vers un gigantesque glacier qu'ils baptisèrent « la Mer de Glace ». La curiosité suscitée par leur récit amène assez vite les premiers touristes qui se lancent alors dans ce qui deviendra l'alpinisme. En 1760, le riche aristocrate genevois Horace-Bénédict de Saussure, promet une forte récompense au premier qui atteindra le sommet du mont Blanc. Le 8 août 1786, deux Chamoniards, Jacques Balmat et le docteur Michel Paccard y parviennent. A partir des années 1770, les touristes sont plus en plus nombreux et permettent ainsi un développement économique de la région. En 1783, on estime à 1500 le nombre de visiteurs pour la saison d'été. Le premier hôtel de luxe est construit dès 1816 (hôtel de l'Union). Beaucoup d'autres suivront. En 1821, à la suite d'un accident mortel sur la voie qui mène au mont Blanc, la Compagnie des guides de Chamonix est créée, accompagnant les amateurs de

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haute montagne vers les plus hauts sommets. En 1860, la Savoie devient française. Pour permettre la visite de Napoléon III, une route carrossable est construite entre Chamonix, Sallanches et Genève. En 1890, le professeur Joseph Vallot installe son observatoire à 300 mètres du sommet du mont Blanc. En juillet 1901 arrive le chemin de fer qui désenclave la vallée en hiver. Les années qui suivront verront naître un nouveau Chamonix, vivant désormais au rythme de deux saisons touristiques : l'été et l'hiver. Chamonix devient alors l'une des premières stations de sports d'hiver en France. En 1908, un train à crémaillère voit le jour, permettant aux touristes d’aller admirer la Mer de Glace et la Montagne des Drus. En 1924, Chamonix accueille les premiers jeux Olympiques d’hiver. Près de 15 000 personnes assistent aux épreuves et dès lors, Chamonix devient une station touristique très prisée. Chamonix possède l'un des téléphériques les plus hauts du monde, qui relie la ville à l'aiguille du Midi à 3842 mètres d’altitude. Le premier tronçon du téléphérique fut achevé en 1924 puis le second tronçon en 1955. Depuis la vallée de Chamonix connaît une affluence touristique de plus en plus importante, et ceci permet de développer l’économie de la région.

D. Description glaciologique du type de glaciers. Les glaciers du massif du Mont Blanc sont essentiellement des glaciers de type

tempéré en vallée, et froid au dessus de 4000 mètres d’altitude. Ils se déplacent par leur propre poids le long des pentes montagneuses, façonnant ainsi le paysage Alpin.

Les glaciers tempérés subissent une fonte assez importante pendant l'été en dessous de 3500 mètres d’altitude, ce qui a pour conséquence de ramener leur température à la température de fusion de la glace, (0°C en surface à la pression atmosphérique, -1°C environ à 3000 mètres de profondeur). Seuls la neige et le névé de surface sont à des températures négatives pendant l'hiver. Aux températures estivales plus élevées que subissent ces glaciers sont associées des températures hivernales moins froides, qui permettent de plus fortes précipitations, équilibrant ainsi (plus ou moins selon les années) la perte de masse par fonte.

Les glaciers froids, eux, sont moins nombreux et ont une température négative. La déformation de ceux-ci est alors faible et longue. Ils sont bien ancrés à la roche et se déplacent très lentement.

La neige qui s’accumule en amont, vers les sommets va être transformée en glace

par un processus long d’une dizaine d’années appelé Diagénèse. La glace qui s'écoule dans la vallée va progressivement pénétrer dans des zones climatiquement moins froides, où elle subira une fonte de plus en plus intense pendant les périodes estivales, jusqu'à sa disparition complète au front du glacier. Les glaciers sont donc constitués de 2 zones :

- la zone d'accumulation se trouve dans les altitudes les plus hautes (au dessus de 3500 mètres d’altitude en moyenne l’été dans le massif du Mont Blanc). L'accumulation de neige annuelle y est plus importante que la fonte estivale. L’apport en neige se fait principalement par les précipitations, mais on observe aussi un apport par des chutes d’avalanches.

- la zone d'ablation, d'altitude moindre (inférieure à 3500 mètres d’altitude l’été) est caractérisée dans les Alpes par une fonte de surface. La fonte estivale y fait disparaître non seulement les chutes de neige de l'hiver, mais entame également la glace qui provient du trop plein de la zone d'accumulation.

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La limite entre ces 2 zones est la ligne d'équilibre : c'est l'altitude où l'ablation

annuelle équilibre exactement l'accumulation annuelle. Selon les conditions climatiques rencontrées au cours de l'année, la ligne d'équilibre sera observée à plus ou moins haute altitude sur le glacier. Or avec le réchauffement climatique, la ligne d’équilibre remonte en altitude. Dans le massif du Mont Blanc, elle se situe actuellement à 3500 mètres d’altitude en moyenne l’été et vers 2700 mètres l’hiver. Si l'accumulation est plus importante que l'ablation, le glacier va croître. En revanche, si c'est l'ablation qui domine, le glacier va décroître. L'histoire des glaciers Alpins est une succession de crue et de décrues, d'apparitions et de disparitions, à des échelles de temps qui peuvent aller de l'échelle de la vie humaine aux ères géologiques.

Coupe transversale le long d’un glacier de vallée

Source : site internet du Laboratoire de Glaciologie et Géophysique de l’Environnement

Dans le Massif du Mont Blanc, il est possible de distinguer cinq familles de

glaciers : - Les glaciers de vallée, ou glaciers alpins sont des glaciers qui se développent

dans une vallée en forme de « U » en montagne. C'est le cas de nombreux glaciers des Alpes, d'où le nom de "glacier alpin" qui est utilisé pour caractériser ce type de glacier dans d’autres massifs montagneux.

- Les glaciers de piémont sont caractérisés par une langue glaciaire en forme de lobe. On retrouve ce type de glacier lorsque la glace s'écoule dans une vallée qui s'ouvre ensuite sur une plaine, ou une vallée plus large.

- Les glaciers noirs comportent une langue glaciaire recouverte d'une couche morainique suffisamment importante pour cacher la glace. Le glacier de la Brenva sur le versant italien du Mont Blanc en est un exemple des plus concrets.

- Les glaciers rocheux ont une langue de débris meubles (limons, cailloux et rochers), provenant d'un glacier recouvert ou d'un glacier enterré, où aucune glace n'est apparente (l'épaisseur de la couche de débris dépassant 5 mètres). On peut observer des signes d'écoulement à la surface pouvant être du présent ou passé. La vitesse d'écoulement peut être de plusieurs mètres par an ; elle diminue au fur et à

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mesure que la glace présente en profondeur disparaît et que les parties fines sont emportées par l'eau de la fonte des neiges.

- Les glaciers suspendus sont des glaciers dont la partie inférieure se termine par une chute de séracs : le front est une falaise de glace en pleine paroi d'où se détachent des séracs. En général, ils se situent au dessus des glaciers de vallée et alimentent ceux-ci lors de la chute des séracs.

IV. Interprétation de la carte

Le travail que j’ai réalisé sur la carte originelle de James FORBES, a été de tracer les fronts des glaciers à des dates intermédiaires entre 1848 et aujourd’hui. J’ai ainsi pu tracer trois dates dont j’ai trouvé des informations concrètes :

- L’information sur l’état des glaciers en 1924 m’a été présentée dans l’ouvrage de R. TISSOT, « Au Mont Blanc », bien que la carte soit assez schématique. De nombreuses photos de l’époque illustrent cet ouvrage classique sur la région du Mont Blanc.

- J’ai pu tracer avec bonne appréciation les positions des glaciers en 1975 et en 2002, d’après les cartes de l’Institut Géographique National (IGN) que je conserve précieusement.

J’ai ainsi réalisé les traces par la superposition d’acétates que j’ai redimensionnés à la même échelle que la carte de FORBES. Il faudra donc tenir en compte les erreurs d’échelle, et la fiabilité de la Cartes réalisée en 1848. La superposition ne fut pas évidente pour certaines parties de la carte, c’est pourquoi l’approche restera uniquement subjective. En revanche, l’évolution représentée entre 1975 et 2002 est quasi-parfaite, car les échelles et la source des données étant les mêmes, j’ai ainsi pu superposer exactement les acétates entre elles, en prenant des points de références.

Par la suite j’ai mesuré sur la carte les distances des retraits à différentes dates en les reportant sur l’échelle de la carte (7,2 cm correspondent à 1 mile anglais). J’ai ensuite fait une conversion pour avoir les distances dans le système international, sachant que 1 mile est égal à 1,609 km. Ces distances comportent alors des erreurs non négligeables que l’on tiendra en compte lors de l’interprétation.

Une chose qui est très remarquable pour l’époque, est qu’il nous est possible de calculer la vitesse de certains glaciers sur la carte réalisée par J. FORBES. En effet, Ce dernier à pu mentionner sur sa carte la perte en amont et la retrouvaille plus en aval, des années plus tard, de matériel d’alpinisme tel que des piolets, et sacs à dos, ou encore, plus dramatique, la découverte du Docteur Hamel et de ses guides au pied du glacier des Bossons en 1863, 43 ans après leur disparition au niveau des Rochers Rouges sous le Mont Blanc.

Nous verrons ainsi l’évolution des glaciers par interprétation de la carte, en commençant par évoquer l’évolution générale du Massif du Mont Blanc.

A. vue générale sur l’évolution des glaciers Depuis 1848, les glaciers des Alpes ne cessent de reculer. En revanche, il nous a

été possible de remarquer la ré-avancée de certains glaciers comme les glaciers du Nant Blanc ou de Charpoua dans la vallée de la Mer de Glace. Avec le réchauffement climatique global, la ligne d’équilibre marquant la limite entre les zones d’ablation et d’accumulation des neiges est fortement remontée dans la vallée pour atteindre environ 3500 mètres d’altitude actuellement l’été. Ceci a eu un impact direct sur la

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fonte des glaces. Le temps de réponse des glaciers au réchauffement climatique est d’environ une dizaine d’années, tout dépendant de la capacité du Glacier à « encaisser » le coup (superficie de Glace, Altitude, couverture rocheuse, apport en neige…). Mon étude a été portée sur les glaciers principaux surplombant la vallée de Chamonix et de la Mer de Glace (en partant du Sud-ouest jusqu’au Nord-est) : Le glacier des Bossons, le glacier des Pèlerins, le glacier de Blaitière, le glacier de Nantillon, la Mer de Glace, le glacier de Charpoua, le glacier du Nant Blanc et le glacier de la Pendant. Ces glaciers sont des glaciers tempérés de moyenne à haute altitude, excepté le glacier des Bossons qui lui reste un glacier froid.

Vue générale de la vallée de Chamonix et du massif du Mont Blanc depuis le restaurant panoramique du Brévent Source : tiré du site internet de la station panoramique de Chamonet (mai 2007)

B. Glacier des Bossons Le glacier des Bossons descend en ligne directe du sommet du Mont-Blanc

(4808,45 m) le plus haut sommet alpin, par une cascade de glace en paliers jusqu'à l'altitude de 1350 mètres actuellement (la plus basse des Alpes pour la langue terminale d'un glacier). La dénivelée de 3450 mètres est la plus grande du monde, pour un glacier descendant d'un seul tenant du haut du sommet jusqu'à sa base. Sa superficie est d’environ 9,8 km2. Ce glacier est un intermédiaire entre les glaciers de vallées et les glaciers suspendus, de par la forte pente du versant par lequel il découle. Une autre caractéristique du glacier réside dans son extraordinaire blancheur. Cette particularité tient au fait que la glace restante parvenant dans la langue terminale après des années d'ablation au cours de la descente du glacier, s'est formée entre 3500 et 4808 mètres d'altitude. Cela signifie que cette glace est de type froid. D'autre part cette glace ne met qu'une soixantaine d'années après sa formation pour arriver au bas de la langue terminale. Elle est donc relativement jeune, conservant encore dans sa structure des masses d'air emprisonnées et sans débris.

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Représentation des glaciers des Bossons à gauche et de Taconnaz à droite en 1840

Source : site internet de Maison des Sciences de l’Homme-Alpes

L’aire d’accumulation de la neige s'étend d'Est en Ouest depuis le col du Midi,

jusqu'au dôme du Goûter (4304 m) en passant par les prestigieux sommets du Tacul (4248 m) du Mont Maudit (4345 m) et du Mont-Blanc (4808,45 m). Toutes ces surfaces d'accumulation convergent pour former le glacier des Bossons, soit par des émissaires continus, soit par de grandes chutes de séracs impressionnantes.

La vitesse du glacier a déjà pu être calculée à l’époque par des catastrophes telles que la disparition du Dr Hamel et de ses Guides en 1820, retrouvés au bas du glacier en 1863, donnant ainsi une vitesse annuelle de 170 à 200 mètres. Plus tard, deux crashs aériens surviennent, le 3 Novembre 1950 avec le Malabar Princess et le 24 Janvier 1966 avec le Kangchenjunga, les avions, tout deux faisant partie de la flotte Indienne s`écrasèrent quelques mètres sous le Mont Blanc. Des débris des catastrophes s’accumulent encore aujourd’hui au pied du glacier.

L’évolution globale du glacier est à la décrue. Or de fortes variations surviennent directement après des changements bruts du climat. Le temps de réponse du glacier des Bossons aux changements climatiques est rapide puisque le glacier s’écoule relativement vite et descend bas dans la vallée, c'est-à-dire que 5 à 10 ans après un période plus froide ou une période avec de fortes chutes de neiges, le glacier va gonfler et descendra alors plus bas dans la vallée de Chamonix. Les photos suivantes nous montrent bien l’évolution entre les années 1900 et 1928, suite au refroidissement climatique datant des années 1920 :

Évolution du glacier des Bossons d’après les photographies de 1900 à gauche et 1928 à droite Source : site internet du Mont Blanc, http://www.montblanc.to/france.html

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On constate comme cela, à partir de témoignages et de photographies ces « allées et venues » incessantes du glacier des Bossons dans la vallée comme un accordéon.

Photographie de 1920 du glacier des Bossons, d’après VALLOT.

Source : site internet de Robert VIVIANT, Glaciologue, http://virtedit.free.fr/article4.html

En ce qui concerne la carte, les années représentées (1848, 1924, 1975 et 2002)

montrent le recul global. Entre 1848 et 1924, le retrait serait approximativement de 270 mètres, mais il est à noter qu’entre ces dates le glacier se trouvait plus haut dans la vallée. Il y a donc eu une crue glaciaire vers 1920 qui aurait fait descendre le glacier dans la vallée. Entre 1924 et 1975 le glacier des Bossons connaît un retrait plus que spectaculaire avec une remontée de 600 mètres. Ce recul ne s’arrête pas ici, puisqu’entre les années 1975 et 2002 on observe une fonte de 330 mètres. Donc au total le glacier des Bossons aurait reculé de 1200 mètres en 159 ans, soit près de 7,5 mètres de fonte annuelle. La chute de séracs actuelle à son front accentue le phénomène. Mais le glacier des Bossons reste encore aujourd’hui imposant et unique de par sa surface crevassée.

C. Glacier des Pèlerins Le Glacier des Pèlerins est un glacier noir de versant, presque entièrement

recouvert par les avalanches de pierres qui proviennent des arrêtes abruptes en amont et de l’Aiguille du Midi. La glace est néanmoins visible sur les cassures, ou pentes fortes du glacier, où il prend naissance. Les débris qu’il transporte le protègent du rayonnement solaire, permettant à ce glacier de persister, même si il ne prend pas source à haute Altitude (environ 2700 mètres d’altitude).

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Glacier des Pèlerins recouvert en partie par le Till. Source : site internet de Luc MOREAU, Glaciologue,

http://glaciers.climat.free.fr/Anatomie/Anatomie_des_glaciers.html

Le Glacier de Pèlerins a subit un retrait assez constant entre 1848 et 1975 jusqu’à

780 mètres en moyenne. Il s’est alors séparé pour former un deuxième maillon plus au Sud-ouest, accroché à l’Aiguille du Midi. Or auparavant il n’était pas recouvert de roches, ce qui le laissait vulnérable à la fonte. Au fur et à mesure de son retrait, il s’est « empierré », le protégeant, et depuis environ 40 ans les variations sont minimes et le glacier reste constant. On a remarqué une ré-avancée du Glacier d’une cinquantaine de mètres entre 1975 et 2002. Or aujourd’hui il est très difficile de déterminer où se trouve le front du Glacier car celui-ci étant recouvert entièrement dans sa partie terminale, les structures et les mouvements du terrain peuvent nous porter a confusion.

La totalité du Glacier se trouve sous la ligne d’équilibre des glaces, et les apports de neiges se font principalement par les avalanches dévalant des crêtes plus en amont, ce qui permet au glacier de persister encore.

D. Glacier de Blaitière Le glacier de Blaitière est un glacier de versant semi-suspendu prenant source à

environ 2800 mètres d’altitude sous l’aiguille de Blaitière (3522 mètres). C’est un site très connu des amateurs de ski d’alpinisme en hiver de par la présence du couloir Spencer. Le glacier comporte des zones très raides avec la chute de séracs, et le front du glacier finit par être recouvert de débris rocheux provenant de l’érosion cryoclastique des aiguilles plus haut. Il se situe sous la ligne d’équilibre, mais encore une fois, la moraine supra-glaciaire lui permet de résister au réchauffement. L’apport en neige se fait par les précipitations dans le cirque en amont et est souvent alimenté par des descentes d’avalanches.

En ce qui concerne son évolution depuis ces 159 dernières années, le glacier à connu un retrait de 650 mètres environ depuis 1848 et de 330 mètres depuis 1924. On notera que le glacier s’est divisé pour donner un autre petit glacier suspendu vers le Nord-est. Depuis ces 30 à 40 dernières années, l’évolution est stagnante et le front du glacier reste à la même position. Ceci est dû en partie au recouvrement du front du glacier par des débris.

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Vue en Parapente du glacier de Blaitière

Source : site internet d’une compagnie de parapentistes,

http://siou.free.fr/Detailled/Pages/Parapente/pg-photos.html

E. Glacier de Nantillon Le glacier de Nantillon est un glacier suspendu de versant, et comme le précédent

sa partie terminale est recouverte de débris de roches. Il prend source à environ 3200 mètres d’altitude, sous les aiguilles des Grands Charmoz (3445 m) et de Blaitière (3522 m), pour finir sous son Till à environ 2340 mètres d’altitude actuellement.

Partie terminale du glacier de Nantillon et l’aiguille de Blaitière (3522 m)

Source : page perso du site internet de la Montagne.

La totalité du glacier se trouve actuellement sous la ligne d’équilibre, c’est

pourquoi il a connu un fort retrait entre 1848 et les années 1970 en même temps que la remontée de la ligne dans la vallée. On note un retrait de 220 mètres entre 1848 et 1924, pour ensuite reculer de 560 mètres entre 1924 et aujourd’hui. Soit au total environ 780 mètres de retrait ont été remarqués durant ces 159 dernières années. Depuis les années 1970, le glacier reste à même altitude, celui-ci étant recouvert dans sa partie terminale.

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F. Mer de Glace La Mer de Glace, ou autrefois appelée « Glacière des Bois » est le plus grand

glacier des Alpes Françaises. Sa superficie est de 40 km2 pour une longueur de 12 km environ à l’heure actuelle entre le col du Midi (3532 m) et les Rochers des Mottets (1500 m). Le col du Midi et le Glacier du Géant sont la zone d’accumulation des neiges, où il tombe en moyenne 7 à 8 mètres de neige par an à cette altitude. A la fin de l’été il restera environ 5 m de névé qui se transformera ensuite en glace par le processus de diagénèse. La ligne d’équilibre est située a environ 2700 m d’altitude au niveau des Séracs du Géant en période hivernale. Au même niveau, à la cassure de pente, la vitesse de l’écoulement du Glacier a été mesurée à environ 2,5 mètres par jour, soit à presque 930 mètres par an. Plus bas, sur le replat de la « Salle à Manger » sa vitesse se stabilise à environ 350 mètres par an et la hauteur de glace y est de 260 mètres pour atteindre un maximum de 430 mètres au niveau du Tacul. Puis l’épaisseur de glace va diminuer en allant vers l’aval, avec environ 180 mètres de glace au niveau du Montenvers, pour finir aux Rochers des Mottets où le glacier sera recouvert de sa moraine. Or années après années, la surface du glacier diminue pouvant aller jusqu’à 4 à 5 mètres de hauteur en moins par an au niveau du Montenvers.

Langue terminale de la Mer de Glace au niveau des Rochers des Mottets, avec son lac proglaciaire. Source : F.HUGUE le 05 mai 2005.

La Mer de Glace est un glacier de vallée typique, où il nous est possible

d’observer le phénomène des Bandes de Forbes, ou encore Ogives glaciaires, c'est-à-dire que l’on voit sur sa surface une succession de bandes sombres et de bandes claires, marquant les changements de saison. En effet, ces bandes prennent naissance au niveau des Séracs du Géant où la chute des séracs en été donne la bande sombre, qui, grâce à la vitesse importante de la glace à cet endroit permet de franchir la zone en une année.

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Ogives de la Mer de Glace Source : Wikipédia, Régis Descamps

Langue terminale de la Mer de Glace, et ses lacs proglaciaires Source : Wikipédia

En ce qui concerne l’évolution de la Mer de Glace, elle a connu un retrait

spectaculaire d’environ 1640 mètres depuis 1848 avec des ré-avancées comme vers les années 1920 qui furent des réponses tardives des périodes plus froides d’une dizaine d’années auparavant. Entre 1848 et 1924, il y a environ 450 mètres de retrait effectif contre 1120 mètres entre 1924 et 1975. Le recul a donc été plus important vers la fin du siècle dernier. Entre 1975 et 2002, le glacier a perdu 67 mètres de sa longueur, laissant apparaître deux lacs proglaciaires de nos jours. Mais les dernières années qui ont été les plus chaudes, comme la canicule ressentie en 2003 n’ont laissé leurs traces que partiellement, et ce ne sera qu’en 2015 environ que l’on pourra constater l’ampleur de ces dégâts.

Les photos suivantes montrent bien que le réchauffement climatique a un impact direct avec la fonte des glaces. La Mer de Glace a subi une grande perte en volume de glace depuis 1916.

Évolution de la Mer de Glace entre 1916 et 2001 au niveau du Montenvers. Source : site internet de Greenpeace,

http://www.greenpeace.org/france/photosvideos/photos/merdeglace-1916-2001

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G. Glacier de Charpoua Le Glacier de Charpoua (ou Charpua à l’époque) est un glacier suspendu de

versant qui prend source à 3300 mètres d’altitude, sous la fameuse aiguille Verte (4122 m). Ce glacier est séparé en deux lobes par le rognon de la Charpoua à mi-chemin. Il se termine actuellement à 2450 mètre d’altitude sous des débris rocheux.

Glacier de Charpoua et l’aiguille Verte (4122 m) en arrière plan

Source : site internet de Nicolas Gibelin

Il a connu de grandes variations durant ces 159 dernières années. Actuellement

on retrouve le lobe principal plus bas qu’en 1848 de 190 mètres, soit à une altitude d’environ 2550 mètres à l’époque pour le front du glacier qui n’était certainement pas recouvert d’une moraine. Cependant, les photos datant de 1924 et la carte schématique indiquent que le glacier se rendait jusqu’à la Mer de Glace s’y jetant ainsi. Il y a donc eu une ré-avancée de 740 mètres du lobe principal et d’environ 560 mètres pour le deuxième lobe. Depuis 1924, le glacier a fondu, mais reste encore plus imposant qu’en 1848. Il est possible de voir un petit glacier accroché à la paroi au Sud du lobe secondaire qui est un vestige de la ré-avancée des années 1924. La variation depuis 1975 est très minime (environ une vingtaine de mètres en moins pour le lobe principal) quoiqu’il est difficile de la quantifier puisque le glacier a été recouvert partiellement par des débris rocheux dans sa partie terminale.

H. Glacier du Nant Blanc Le glacier du Nant Blanc est un glacier suspendu, s’écoulant sur les parois

vertigineuses de l’aiguille Verte (4122 m) et des Drus (3754). Il prend source vers 3600 mètres d’altitude et s’écoule actuellement jusqu’à 2200 mètres d’altitude. Ce glacier de versant est très ressemblant au glacier de Charpoua, car il est de même séparé en deux lobes par le rognon des Drus.

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Panorama sous l’aiguille des drus en 2004 Source : site internet du randonneur,

http://www.randonneur.net/pages/photos/fonds_chamonix_mont_blanc_01.php

Etant sur le même versant que le glacier de Charpoua, le Nant Blanc a subi de

fortes variations de volume et de longueur au cours du temps. On le retrouve actuellement environ 250 mètres plus haut qu’en 1848 pour le lobe principal et à environ une cinquantaine de mètres plus haut pour le lobe secondaire. Or lors de la crue des années 1920, le Nant Blanc connut une période où il se situait 100 à 200 mètres plus bas sur le versant qu’en 1848, ne laissant qu’apparaître un lobe principal, et plus volumineux. Celui-ci était suspendu dans son cirque juste au dessus de la Mer de Glace, l’alimentant par des chutes de séracs lors des poussées journalières. Lors de son retrait depuis 1924, le glacier laissa réapparaître ses deux lobes, dont la configuration actuelle nous permet de dire que ces lobes sont distincts l’un de l’autre, le principal ayant gardé le nom du Nant Blanc et le secondaire s’appelant le Glacier des Drus. La fonte depuis 1975 est de l’ordre d’une cinquantaine de mètres pour le Nant Blanc et d’environ 20 mètres pour le glacier des Drus. La partie terminale est quelque peu recouverte par des débris rocheux.

I. Glacier de la Pendant Le Glacier de la Pendant est un glacier semi-suspendu de versant, où sa pente et

relativement plus faible que les deux glaciers précédents. Sa partie terminale s’étalant sur tout le versant de la montagne de Lognan est recouverte d’une moraine importante laissant penser qu’il s’agit d’un glacier noir. Trois lobes principaux peuvent se distinguer, avec le lobe le plus à l’Est étant actuellement nommé le Glacier de Lognan. Or les pentes plus fortes en amont, juste au pied de l’aiguille des Grands Montets permettent de voir la présence de la glace.

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Glacier de la Pendant et aiguille des Grands Montets (3295 m)

Source : tiré du site internet http://helico11.free.fr/html/christophe.htm

Les fluctuations du glacier furent moins importantes que les glaciers précédents,

mais il faut toutefois noter une ré-avancée importante allant jusqu’à 600 mètres pour le glacier de Lognan entre 1848 et 1924. Par la suite entre 1924 et 1975 on note un retrait moyen pour la totalité du glacier d’environ 120 mètres. Depuis le glacier étant entièrement recouvert de débris dans sa partie terminale, les fluctuations sont moindres et le glacier reste protégé du rayonnement solaire. Un autre glacier rattaché au glacier de la Pendant prend source sur la face Sud de l’aiguille des Grands Montets : le glacier des Grands Montets. Il a connu un retrait d 300 mètres environ depuis 1848 avec une légère avancée d’une cinquantaine de mètres lors de la crue glaciaire des années 1920.

V. Corrélation avec la climatologie

A. les relations entre climat et évolution des glaciers Le thème sur le réchauffement climatique a toujours suscité des confrontations

entre les scientifiques. Une chose est alors certaine, c’est que depuis le début de l’Holocène il y a 10 000 ans nous sommes entrés dans une période interglaciaire. Depuis la déglaciation de la dernière période glaciaire du Wisconsinien, le climat s’améliore globalement, avec des cycles plus courts à l’échelle du siècle. L’étude des anneaux de croissance des coraux et des carottes glaciaires et sédimentaires ont permis aux scientifiques de suivre cette évolution depuis plus de 1000 ans :

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Évolution probable de la température sur 1000 ans

Source : site internet de J.M JANCOVICI, http://www.manicore.com/documentation/serre/commence.html

Mais c’est qu’à partir des derniers siècles seulement que ce réchauffement serait

constatable, notamment avec l’amplification due à l’activité humaine ; mais ceci jusqu’à quel point ? Et pourquoi tant de confrontations ? Le réchauffement de la planète serait-il néfaste pour « l’homme » ?!

Écarts des températures depuis 1855

Source : site internet de l’académie de Clermont Ferrand :

http://www3.ac-clermont.fr/pedago/svt/pagex.php?rubrique=7&num=458

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L’environnement, lui ne cesse d’évoluer pour compenser ce réchauffement

climatique, créant un « équilibre » à l’échelle de l’écosystème. L’évolution des glaciers des Alpes serait ainsi un indicateur fiable pour expliquer les changements climatiques. Après une période d’avancée générale des glaciers pendant le Petit Age Glaciaire (16ème et milieu 19ème siècle) avec deux pointes en 1820 et 1850, la tendance est au recul général, avec la décrue entre 1850 et 1950, quelques petites crues glaciaires apparaissent lors des décennies 1875-85 et 1910-20. Depuis le milieu des années 1950 semble s’amorcer une nouvelle crue plus importante et longue que les précédentes. Elle n’est pas directement liée à un refroidissement mais à une modification du « régime nivométrique ». Les précipitations neigeuses se sont déplacées de la fin de l’automne vers le printemps : c’est une « océanisation » du climat remarquée il y a 20 ans auparavant qui en serait la cause principale. Les conséquences ont été considérables : sur les glaciers, l’accumulation l’a emporté sur l’ablation, le volume glaciaire s’est accru, le front des glaciers a progressé. Depuis quelques années, le bilan de masse glaciaire est devenu fortement déficitaire, en raison d’hivers trop secs (1988,1989) ou d’étés singulièrement chauds (décennie 1990-2000; 2003…).

Les graphiques suivant montrent que l’évolution du glacier des Bossons et de la Mer de Glace depuis les années 1870 est en quelque sorte le « reflet inverse » de l’évolution des températures, avec une différence d’une dizaine d’années de retard en moyenne pour les glaciers. Ce retard correspondant au temps de réponse des glaciers suite aux variations de températures et aux conditions d’enneigement :

Evolution des glaciers (bossons et Mer de Glace) depuis les années 1870 à partir d’un point de référence Source : tiré du site internet de Robert VIVIANT, Glaciologue : http://virtedit.free.fr/article3.html

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L’évolution glaciaire serait donc fortement liée aux conditions climatiques faisant

varier le rythme et l’intensité des précipitations neigeuses de haute altitude durant l’année entière. Le réchauffement global est la cause indirecte de cette évolution, quoiqu’il modifie les régimes glaciaires en faisant remonter la ligne d’équilibre dans la vallée, à plus haute altitude.

B. Le Bilan de Masse L'évolution du climat en haute montagne est souvent évaluée à partir des

fluctuations des fronts des glaciers. Néanmoins, ces fluctuations ne peuvent pas être interprétées directement en termes climatiques car d’une part, elles sont dépendantes des processus d'écoulement propres à chaque glacier, d'autre part, les fronts réagissent aux conditions climatiques de plusieurs années ou décennies antérieures, avec des retards qui varient d'un glacier à l'autre. En revanche, les variations de volume annuelles des glaciers reflètent directement le climat.

Le bilan de masse glaciaire traduit le gain ou la perte en glace/neige d’un glacier, c’est-à-dire son métabolisme. Les précipitations qui tombent sous forme solide contribuent à augmenter ce bilan de masse, la fonte de la glace ou de la neige diminue le bilan de masse. Afin d’être comparable en tout point d’un glacier et à n’importe quelle période de l’année, le bilan de masse est exprimé en hauteur d’équivalent eau (h.e.e), c’est-à-dire que toutes les variations de hauteur mesurées sur le glacier sont corrigées par la masse volumique de la matière considérée, qui peut être très variable : ρneige fraîche = 50 à 150 kg.m-3, ρnévé = 500 kg.m-3, ρglace = 917 kg.m-3. Ces variations de hauteurs sont mesurées, soit directement d'une année sur l'autre à l'aide de carottages et de balises implantées dans la glace, ou encore par comparaison de cartes topographiques détaillées. Le graphique suivant nous montre un exemple de bilan de masse du glacier de Sorel au cours des dernières années :

Bilan de masse du Glacier de Sorel

Source : Tiré de la thèse de Martin GERBAUX, LGGE

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C. Solution contre la fonte La station suisse de sports d'hiver d'Andermatt recouvre depuis 2005 le glacier de

Gurschen d'une bâche de 2 500 m2 pour la période estivale. Epaisse de 3,8 millimètres, la bâche en matériaux synthétiques blanc a pour but de stopper les rayons ultra-violets du soleil. De plus son albédo étant très fort, la surface couverte réfléchira l’énergie solaire, et gardera au frais le glacier tout l’été, pour réduire sa fonte et préserver une partie des pistes de ski. La société de remontées mécaniques Andermatt Gotthard Sportbahnen est à l'origine de l'opération. Cette expérience sera suivie de près par les scientifiques qui espèrent trouver des solutions contre la fonte de certains glaciers, dont l’activité humaine en dépend (stations de ski, hydroélectricité, réservoir en eau potable...).

Mise en place de la bâche de protection

Source : site internet du World Wide Fund for Nature

VI. Conclusion

L’évolution des glaciers est une science très complexe dont plusieurs facteurs en sont la cause. Le réchauffement climatique intervient indirectement sur la fonte des glaciers Alpins à l’échelle du siècle, puisqu’il fait varier le régime des précipitations au cours du temps. Mais la fonte des glaciers Alpins que l’on observe qualitativement par le recul des fronts de glace ou quantitativement par un bilan de masse négatif au cours des années, est étroitement liée à l’augmentation de la température des derniers siècles. Les glaciers du massif du Mont Blanc ont connu des périodes de crues glaciaires sur des dizaines d’années, mais dans leur globalité, depuis 1848 une nette évolution vers la décrue est à noter. Cette évolution pourrait avoir des conséquences dramatiques dans un futur proche, puisque certaines régions sont dépendantes de ces glaciers, comme la vallée de Chamonix qui se développe essentiellement par le tourisme saisonnier. De plus les glaciers procurent à la ville une réserve en eau potable importante, et ont permis le développement de l’hydroélectricité. Quel avenir pour nos glaciers ?

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VII. Remerciements

Ce fut avec grand plaisir que j’ai réalisé cette activité de synthèse. Cette étude m’a permis d’élargir mes connaissances sur les glaciers du massif du Mont Blanc et de mettre en application mon savoir sur leur évolution. C’est pourquoi je trouve qu’il est important de remercier Mr Pagé Pierre pour m‘avoir permis de mener a bien ce projet. Je n’oublierais pas l’aide apportée pas Mr Bédard Pierre pour la recherche d’images satellites, Mlle Jehanne España, Mr Valentin Clément, Mlle Royer Alexandra, et bien évidement ma famille, pour m’avoir apporté des informations et pour leur soutien.

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VIII. Annexes

A. Annexe 1

Carte du massif du Mont Blanc par J. FORBES en 1848.

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B. Annexe 2

Carte schématique du Massif du Mont Blanc, tiré du livre « Au Mont Blanc » de 1924

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IX. Sources

Livres : • TISSOT Roger, Au Mont Blanc. Éditions J. Rey, collection des beaux pays.

Grenoble, 1924, 142p, 160 photos et une carte. • Alpes Magazine, Chamonix, Mont Blanc, Mer de Glace. n° 94 juillet-août 2005 • MICHEL François, Roches et paysages. Reflets de l’histoire de la Terre. Éditions

BRGM, collection Belin pour la science. 2005. • PAGÉ Pierre, Les grandes glaciations. Éditions Guérin. 2ème édition, Université

du Québec à Montréal, 1999. • FOUCAULT A. et RAOULT J.F., Dictionnaire de géologie. Éditions Dunod,

collection Masson Sciences. 5ème édition, Paris, 2001. Sites internet : • Site internet du Laboratoire de Glaciologie et Géophysique de

l’Environnement : www-lgge.ujf-grenoble.fr - http://www-lgge.ujf-grenoble.fr/ServiceObs/images/HouilleB2001.pdf

-http://www-lgge.ujf-grenoble.fr/axes/glaciers/AlbumPhoto/home.shtml#MerDeGlaceLR90 - http://www-lgge.ujf-grenoble.fr/~annel/Documentaire/DefGlacier/DefHome.html

• Site internet de Luc MOREAU, Glaciologue : http://glaciers.climat.free.fr/Anatomie/Anatomie_des_glaciers.html

• Site internet sur les actualités en Montagne : http://www.actumontagne.com/3-questions-a-luc-moreau-glaciologue-article_0034.html

• Site internet de Robert VIVIAN, Glaciologue : http://virtedit.free.fr/article4.html • Site internet sur les modèles numériques de terrain :

http://www.cybergeo.presse.fr/teldschu/dedieu/dedieu.htm • Site internet de Géoportail, outil pour photos satellites en France :

http://www.geoportail.fr/index.php?event=&url_insert= • Site internet de l’école Nationale Supérieure de Lyon :

http://www.ens-lyon.fr/Planet-Terre/Infosciences/Climats/Historique/Glaciation/Histoireglaciation.htm

• Site internet de VINCENT Christian, glaciologue au LGGE : http://astro.versoud.free.fr/plum/effets/impactsglaciersalpins.pdf

• Site internet de l’Institut Géographique National IGN : http://www.ign.fr/rubrique.asp?rbr_id=1&lng_id=FR

• Site internet de Jean-Marc JANCOVICI, le Réchauffement planétaire : http://www.manicore.com/documentation/serre/commence.html

• Site internet de Météo France : http://www.meteofrance.com/FR/actus/dossier/article.jsp?docid=11700

• Site internet de l’académie de Clermont Ferrand : http://www3.ac-clermont.fr/pedago/svt/pagex.php?rubrique=7&num=458

• site internet de la Géologie Alpine : http://www.geol-alp.com/h_mt_blanc/_lieux/mt_blanc_lieux/chamonix.html

• site internet du glacier des bossons : http://www.montblanc.to/france.html