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L’INDUSTRIE D U L U X E DANS LES PAYS DU GOLFE : L’HEURE DE LA DIGITALISATION ? LIVRE BLANC 2017

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L ’ I N D U S T R I E D U L U X ED A N S L E S P A Y S D U G O L F E :L’HEURE DE LA DIGITALISATION ?

LIVRE BLANC 2017

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I N D E X

INTRODUCTION

PARTIE 1 : UN NOUVEAU CONSOMMATEUR ................................................................ 6Des Millenials pas comme les autres .......................................................................... 6Une population connectée ......................................................................................... 8Le commerce électronique prêt au décollage ........................................................ 9Un contexte optimal .................................................................................................. 11

PARTIE 2 : LE LUXE NUMÉRIQUE EN RAPIDE MUTATION DANS LE GOLFE..................... 12Les réseaux sociaux, nouvel espace exclusif ? ........................................................ 12Le règne des influenceurs .......................................................................................... 15Le regard rivé sur la vidéo digitale ........................................................................... 17

PARTIE 3 : DIGITAL ET LUXE DANS LE CCG, OU LA REDÉFINITION D’UNE INDUSTRIE ........ 20L’avènement du commerce en ligne de luxe ....................................................... 20La priorité omnicanal ................................................................................................. 22Numérique, innovation et entreprenariat ................................................................ 25

CONCLUSION : UN MONDE NOUVEAU ..................................................................... 28

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I N T R O D U C T I O N

U N E H I S T O I R E D E C O N S O M M A T E U R SL’industrie du luxe a connu de longues années de prospérité dans les pays membres du Conseil de Coopération du Golfe (CCG), enregistrant une croissance de 6 % à 8 % en moyenne (à taux de change constant) 1. Elle traverse actuellement une phase de transition majeure, caractérisée par un taux de croissance régional moyen en régression, tombé à seulement 1 % à 2 % en 2015 1 et estimé à -3 % au Moyen-Orient en 2016 2. En parallèle, ce secteur va bientôt devoir s’ajuster à un nouvel environnement, appelé à se restructurer en profondeur suite aux remaniements fiscaux et règlementaires initiés par certains gouvernements de la région. Le groupe Chalhoub a analysé en détail cette mutation dans « La Nouvelle Norme », son Livre blanc publié en 2016, mais il estime que les acteurs du luxe dans le Golfe ont un défi supplémentaire à relever.

Partout sur la planète, l’irruption des nouvelles technologies digitales bouleverse le monde des affaires et la façon dont il opère ; de la façon d’établir une stratégie marketing aux techniques de mesure du retour sur investissement (ROI), tous les aspects du métier et toutes les catégories d’entreprises, quels que soient leurs domaines d’activité, sont affectés. Qui plus est, ces innovations induisent un glissement dans les habitudes de consommation du public, voire des (r)évolutions sociétales que les marques doivent parvenir à suivre et appréhender. Pour affronter dès maintenant cette vague de changements rapides, continus et radicaux, et assurer sa pertinence future, le secteur du luxe va devoir se réinventer sur le mode digital et aborder le consommateur moderne avec un nouveau langage.

Cette disruption est perceptible partout, mais elle prend un caractère parti-culièrement urgent dans les pays du Golfe, où le groupe Chalhoub a perçu un véritable élan numérique mais dont les forces sous-jacentes diffèrent notablement de celles prévalant en Occident. C’est pourquoi le groupe a choisi de consacrer son cinquième Livre blanc au rapport entre luxe et digital dans la région, ses défis et ses promesses.

Le e-commerce était à la traîne dans le Golfe en 2015, ne représentant que 2,6 % du volume total des ventes au détail contre 7 % au niveau global 3, alors que les

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ventes en ligne de produits haut de gamme étaient estimées à seulement 200 - 230 millions de dollars, soit 2,5 % des ventes totales dans cette catégorie 4. Pourtant, les perspectives sont prometteuses dans une région où, d’ici quatre ans, la part du commerce électronique dans le secteur du luxe devrait atteindre une valeur totale de 1,5 milliard de dollars 5, aiguillonnée par l’approche avant-gardiste des dirigeants politiques, une population jeune, des consommateurs toujours plus sensibles au prix et des acteurs digitaux extrêmement ambitieux. Dans le CCG, la clientèle aisée d’aujourd’hui, férue de nouvelles technologies, est intensément connectée : en 2015, le taux de pénétration d’Internet a atteint 84 % (contre 49.5 % en moyenne dans le monde) 6 et celui des smartphones 126 % (contre 71 % dans certains pays développés) 7. Plus important encore, le digital altère la relation entre les marques et les individus, plaçant désormais les consommateurs, tous les consommateurs, au cœur de toute interaction.

En fonction de leur capacité à embrasser rapidement cette nouvelle réalité connectée et un environnement parfaitement intégré, les acteurs du luxe dans les pays du Golfe seront à même ou non de façonner leur avenir et de proposer l’expérience unique à laquelle leur clientèle aspire. Parvenir à résoudre le paradoxe que présente cette rencontre entre l’univers du luxe, par essence exclusif et privilégié, et celui du digital, foncièrement ouvert et accessible, constitue sans doute l’un des défis les plus délicats qu’ils ont à relever. Toutefois, c’est en se focalisant sur l’omnicanal – qui offre au consommateur une expérience sur-mesure et fluide, quels que soient la marque, le format, le lieu et les terminaux choisis – et sur une approche du parcours client à la fois informative, distrayante et aspirationnelle, que leur succès se construira.

En s’appuyant sur 60 ans d’expérience au Moyen-Orient, sur des points de vue d’experts et sur de nombreuses études de marché, réalisées en propre et par des tiers, le Livre blanc 2017 du groupe Chalhoub tente donc d’identifier les obstacles et les opportunités que l’industrie de la région est appelée à rencontrer en ces temps de révolution numérique. Car seule une meilleure compréhension des complexités actuelles lui permettra de frayer son chemin dans l’univers du luxe de demain.

Internet transforme de façon déterminante le consommateur haut de gamme dans le Golfe. Ce consommateur se tient au fait de toute l’actualité du luxe, des marques aux prix, en passant par les nouvelles tendances et produits. Il peut d’ailleurs à peu près tout trouver en ligne. Désormais, il est au centre de tout. Confrontés à un niveau de volatilité et d’exigence inédit, nous ne devons plus pousser les clients, mais au contraire leur laisser l’initiative. L’industrie régionale du luxe n’a d’autre choix que de subtilement réaffirmer sa présence, tout en faisant preuve, presque en temps réel, d’une honnêteté et d’une transparence absolues. Le client arabe moderne attend aussi que nous lui offrions des services de vente en ligne, ainsi que le confort de l’omnicanal ; afin qu’il reste fidèle à nos marques et fasse ses achats en ligne en toute confiance, notre rôle consiste à répondre à ses attentes. Nous avons donc tous beaucoup à faire, que ce soit

en adaptant nos sites Internet afin de les rendre plus attrayants et accessibles, ou en impliquant en profondeur nos équipes dans l’omnicanal par le biais de formations. Les plateformes digitales et les points de vente physiques doivent dorénavant se compléter, tout en protégeant l’ADN de nos marques. Cet apprentissage est graduel mais d’une manière ou d’une autre, nous allons tous dans cette direction. Anthony ChAlhoub, co-PDG Du GrouPe chalhoub

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U N N O U V E A U C O N S O M M A T E U RLes années fastes où, dans les pays du Golfe, la demande des produits haut de gamme était forte et le marché semblait réceptif, sont bel et bien révolues. La clientèle aisée de la région se passionne toujours pour l’univers du luxe, mais elle se transforme et adopte des comportements inédits : elle s’informe sur les produits, choisit une marque plutôt qu’une autre, dépense et vit sa relation avec elle de manière différente. Cette métamorphose reflète l’évolution démographique et la digitalisation rapide du CCG, deux phénomènes qui, au-delà de leur impact sur la consommation, induisent aussi un profond changement dans les mentalités. Il revient aux acteurs du luxe dans la région d’appréhender et de comprendre ces nouveaux consommateurs.

D e s M i l l e n i a l s P a s c o M M e l e s a u t r e sLes pays du Golfe sont à un tournant. Les moins de 30 ans de la Génération Y, ou Millenials (nés entre 1975 et 2000), et la Génération Z (née dans les années 2000), forment désormais plus de la moitié de leur population 8. Pour les gouvernements de la région, cette montée de la jeunesse aux conséquences sociales majeures, peut aussi bien représenter un atout que devenir un handicap, comme l’a mentionné le Forum Economique Mondial en mai 2015. Ce constat vaut aussi pour les marques : à eux deux, ces groupes démographiques constituaient 52 % de la population en Arabie saoudite, 51 % à Oman, 49 % à Bahreïn, 47 % au Koweït, 47 % au Qatar et 40 % aux Emirats Arabes Unis (EAU) en 2016 9, représentant ainsi une portion de plus en plus importante et active des consommateurs du Golfe. Cette nouvelle catégorie de clients est très différente de ses aînés.

Les Millenials dans le monde arabe sont à la pointe des nouvelles technologies. Quant aux jeunes de la Génération Z, ils sont nés avec le numérique. Autrement dit, ces

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deux groupes d’individus ne voient pas le digital comme un simple outil ou une source d’information, mais comme un mode de vie. Dans les pays émergents, les jeunes n’interagissent avec les marques que via le digital; les innovations technologiques y ont été adoptées largement et immédiatement, alors que dans les économies developpées, ce processus a été plus graduel. Les applications mobiles, sites Internet et réseaux sociaux sont non seulement leurs premiers points de contact, mais aussi les plus importants.

En sus de cet engouement pour le numérique, un niveau d’éducation élevé, ainsi qu’une propension à voyager expliquent le degré élevé d’assurance, de sophistication et d’expression de ces nouvelles générations. Forts de leur connaissance des tendances internationales, des prix et des marques, ces jeunes consommateurs n’hésitent pas à exprimer, rapidement, leur opinion. Peu attachés aux marques, soucieux de leurs valeurs et avides d’expériences, ils aspirent à trouver un sens et de la substance à leurs choix. Et tout comme les autres jeunes ailleurs dans le monde, ils veulent changer les choses. C’est pourquoi le regard qu’ils portent aujourd’hui sur les marques s’attarde moins sur la qualité, le statut ou le patrimoine, et davantage sur de nouveaux critères comme, par exemple, la responsabilité sociale 10.

De même, ces jeunes bien informés et aux avis tranchés, ont aussi des préférences marquées en termes de communication et de shopping : ils veulent être avertis en temps réel, de préférence par message ou par courriel pour plus de mobilité ; ils dépensent de façon structurée et rationnelle, et tiennent à rester en total contrôle des informations concernant leurs comptes et l’utilisation de leurs cartes ; plus important encore, ils apprécient les offres et services personnalisés et exigent de pouvoir utiliser tous leurs terminaux sans interruption ou baisse de qualité 11.

En dépit de leur âge, les jeunes du Golfe disposent de revenus élevés et vivent dans des pays comptant parmi les plus riches à l’échelle globale (le Qatar arrivait sixième sur la liste en 2016 avec un produit intérieur brut (PIB) par habitant de 60 733 $ 12) ; les Emiratis et les Saoudiens en particulier, dépensent plus que leurs pairs ailleurs dans le monde 13, et devraient toucher un revenu annuel moyen de respectivement 40 000 $ et 18 000 $ d’ici 2019 14. Ainsi, munis de moyens financiers conséquents, ces nouvelles générations peuvent se permettre d’être exigeantes.

En d’autres termes, les jeunes Arabes du Golfe ont aujourd’hui de l’influence, des moyens et des opinions. Ce sont de véritables vecteurs de changement.

Les Millenials dans la région ont des comportements, des aspirations et des relations aux marques divers et variés. Ils ne sont pas tous identiques. Les plus âgés sont davantage réceptifs aux tactiques traditionnelles des marques ; les plus jeunes, en revanche, mélangent et associent monde réel et monde virtuel, Occident et Orient, d’une façon à la fois naturelle et intégrée. Relativement insouciants dans leur manière de dépenser, ils voient le monde comme un terrain de jeu à la fois physique et digital, ‘phygital’, sans cadre prédéterminé. Les marques de luxe historiques continuent de vouloir se positionner comme seules références, ou presque, pour tout ce qui a trait aux tendances. Aussi ont-elles du mal à s’adapter à cette nouvelle génération, qui domine désormais la conversation autour de la mode, crée ses propres tendances, et préfère être suivie plutôt que de suivre. Que ce soit en ligne ou hors-ligne, l’individualité et la quête d’expériences passent avant tout, ne permettant plus aux marques de luxe de dicter des règles qu’elles ne peuvent plus faire appliquer. houdA tohme, havas luxhub

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une PoPulation connectéeLes jeunes générations sont sans doute les plus influencées par la révolution digitale, mais les autres n’en restent pas moins impactées ; toutes les tranches d’âge rejoignent activement l’univers digital. Mais en termes d’usage, le Golfe se différencie des autres marchés : son taux de pénétration d’Internet moyen de 84 % (culminant à 97,40 % au Qatar) se situe bien au-dessus de la moyenne mondiale de 49,5 % 15.

Dans le Golfe, le digital se caractérise aussi par une prédominance des réseaux sociaux, intimement liée à un pic d’utilisation du téléphone portable. Bien que la popularité de chaque plateforme varie d’un pays à l’autre, ce sont ces plateformes que les internautes arabes utilisent le plus et sur lesquelles ils passent le plus de temps : en janvier 2016, le Qatar arrivait troisième avec 75 %, et les EAU cinquièmes avec 68 %, dans le classement mondial des pays aux taux de pénétration des réseaux sociaux les plus élevés 16 ; les Emiratis et les Saoudiens passent respectivement 3,27h et 3,26h par jour en moyenne sur ces réseaux, contre une moyenne globale de 2,25h 17. Cette passion pour le social illustre l’envie de contact des internautes, dans une région où les relations interpersonnelles souffrent parfois de contraintes (distances, restrictions culturelles, etc.) : ainsi, plus de la moitié des usagers en Afrique du Nord et au Moyen-Orient (région MENA) utilisent ces réseaux pour chatter, alors que chercher des informations, visionner des vidéos,

l e s r é s e a u x s o c i a u x l e s P l u s u t i l i s é s D a n s l e c c G e n 2 0 1 5EAU Arabie saoudite Qatar Koweït Bahreïn

Source: Arab Social Media Report 2015, TNS

90% 82% 56% 51% 50% 81% 80% 42% 35% 55% 75% 84% 43% 41% 43% 81% 85% 51% 47% 44%80% 91% 43% 53% 40%

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écouter de la musique et partager des photos restent des activités secondaires 18. L’importance de WhatsApp dans le monde arabe illustre bien ce phénomène : 47 % des internautes émiratis et 27 % des internautes saoudiens déclarent préférer cette application de « chat » aux autres plateformes sociales (contre 46 % pour Facebook aux EAU et 25 % en Arabie saoudite). Ces chiffres prennent le contrepied de la tendance prévalant en Occident, où Facebook ne rencontre aucune concurrence : 47 % en France (contre 7 % pour WhatsApp), 47 % au Royaume Uni (contre 24 % pour WhatsApp) et 41 % aux Etats-Unis (où WhatsApp est à peine utilisé) 19.

Ce désir d’être constamment connecté à ses proches, en dépit du temps et des distances, explique aussi l’augmentation massive de l’usage du téléphone portable, ainsi que la démocratisation du smartphone, l’appareil idéal pour accéder aux réseaux sociaux selon 83 % des utilisateurs arabes 20. Aussi, il n’est pas rare de posséder deux téléphones portables dans cette région où, en 2015, le taux de pénétration des smartphones a bondi à 157,44 % en Arabie saoudite, 156,13 % au Koweït et 144,20 % aux EAU 21. Cette croissance n’est pas près de ralentir, alimentée par l’engouement des nouvelles générations pour les appareils dits « intelligents ».

Ce succès ne signifie pas pour autant que le digital ne rencontre aucune résistance dans les pays du Golfe. L’écosystème numérique de la région est encore très immature, complexe et désorganisé. C’est pourquoi le grand public redoute de possibles addictions au digital, une fragmentation des familles, une pression sur les cadres sociaux traditionnels et un accès facilité à des messages ou des images incompatibles avec les valeurs locales. Par ailleurs, le manque de sites Internet de qualité en Arabe a longtemps nourri ces réticences. En 2014, seulement 3 % du contenu en ligne était en Arabe, pourtant la huitième langue la plus parlée au monde 22. Néanmoins, grâce aux jeunes internautes et aux influenceurs sociaux de la région, ainsi qu’à diverses initiatives publiques et privées, telles que le Dubai’s Arab Digital Content Forum et les Google’s Arabic Web Days, de plus en plus de contenus mis en ligne sont désormais en Arabe. Aujourd’hui, 99 % des internautes en Arabie saoudite et aux EAU, ainsi que 94 % au Qatar, se connectent au net en Arabe, tandis que l’usage de l’Anglais décline régulièrement depuis 2013 23.

[2016] marque une rupture avec l’époque des entreprises ‘.com’. En tant qu’éditeurs, nous ne demandons plus à nos lectrices de s’adapter à nous, c’est à nous de nous adapter à elles. La portée ne se caractérise plus seulement au niveau des sites Internet, mais aussi des réseaux sociaux et des différents points de contact digitaux. La performance ne se définit plus seulement par le nombre de pages vues, mais aussi par le niveau d’engagement. Les contenus natifs ne sont plus seulement produits pour les sites, mais aussi pour tous les réseaux sociaux et pour la stratégie de marque. C’est pourquoi les annonceurs font appel à nous non seulement pour nos compétences en termes de production, mais aussi pour notre portée multiplateforme. hAleh niA, FonDatrice et réDactrice-en-cheF De savoir Flair et styly.coM

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le coMMerce électronique Prêt au DécollaGeEn théorie, un tel degré de connectivité, en particulier mobile, devrait favoriser l’épanouissement du commerce électronique. Pourtant, celui-ci n’a fait qu’une entrée timide dans les pays du Golfe. Alors que le marché global de la vente au détail en ligne pesait en 2015 plus de deux mille milliards de dollars, soit 3,11 % du PIB mondial 24, ce marché était estimé cette même année dans le CCG à 5,3 milliards de dollars, contribuant seulement pour 0,4 % au PIB régional 25. Cet état de fait

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s’explique simplement : les nombreux obstacles qui freinent le développement de l’écosystème du commerce électronique, encore en voie de construction dans le Golfe, commencent juste à être résolus.

Les consommateurs arabes sont encore peu au fait des différentes options de vente en ligne actuellement disponibles dans la région (par exemple, en 2016, seulement la moitié des internautes émiratis avaient entendu parler des plate-formes de e-commerce locales 26) et beaucoup s’inquiètent des risques liés à la sécurité, n’accordant qu’un accueil mitigé aux technologies de sécurisation 3D. Ces consommateurs se méfient aussi des paiements en ligne : les économies du Golfe sont largement tributaires des transactions en espèces, avec 67 % des paiements en Arabie saoudite et 58 % de ceux aux EAU faits en espèces 27. De plus, les niveaux d’utilisation des cartes de paiement varient drastiquement selon les pays, passant de 97 % au Koweït à environ 45 % en Arabie saoudite et au Qatar 28. En conséquence, les paiements en espèces à la livraison comptent pour approxi-mativement 60 % des commandes numériques dans la région 29, présentant un sérieux problème aux commerçants en ligne : comment tenir compte des préférences de leur clientèle tout en gérant les pertes liées aux articles renvoyés à la livraison, les risques de vol pendant le transport, et la lenteur de ce cycle de paiement. Les compagnies locales sont aussi confrontées à la rude concurrence des acteurs internationaux. Jusqu’à récemment, ces entreprises étaient peu nombreuses à disposer d’un réseau d’entrepôts suffisamment conséquent pour offrir aux consom-mateurs la variété de produits et la livraison en 24 heures qu’ils attendent ; en revanche, les détaillants internationaux bénéficient du peu de règlementation et des droits de douanes relativement bas dans la région. Dans le Golfe, les acheteurs en ligne sont prêts à payer des frais de livraison plus élevés pour accéder au vaste choix de produits et à la qualité de service offerts par les distributeurs internationaux, raison pour laquelle en 2016, ces groupes sans aucune présence physique en Arabie saoudite accaparaient presque un tiers des ventes en ligne du pays 30.

Ceci étant, les perspectives d’avenir sont plus que rassurantes, elles sont alléchantes. Au départ attirés par les prix européens (profitant de la dévaluation de l’Euro et donc moins élevés que dans le Golfe, aligné sur le dollar), les consommateurs arabes s’intéressent de plus en plus au commerce électronique en raison de son

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le e-c o M M e r c e e n v o i e D e c r o i s s a n c e r a P i D e D a n s l e ccGEAU Koweït

% du total en 2015 % du total en 2020 TCAC (2015 - 2020)

Source: AT Kearney 2016. Note: L’estimation ne prend pas en compte les secteurs du voyage et du tourisme, l’évènementiel, les abonnements divers (aux chaînes câblées par exemple), le business to business, la vente en gros et les transactions industrielles.

Taille du marché (en milliards de dollars) 2015 : 5,3 2020 :19,8 TCAC : 30 %

Arabie saoudite BahreïnQatar Oman

44% 38% 26% 8% 6% 25%33% 42% 36% 3% 2% 21%11% 10% 27% 1% 2% 40%

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confort et de son accessibilité. A cela viennent s’ajouter l’assouplissement des restrictions gouvernementales sur les échanges commerciaux dans la région, le professionnalisme accru des prestataires de services logistiques, la propension des jeunes adultes à acheter en ligne, l’usage répandu de réseaux sociaux offrant de plus en plus souvent la possibilité de cliquer sur un bouton « Acheter maintenant », et des taux de pénétration du mobile crevant tous les plafonds.

Bien conscients de ce potentiel, les Ebay, Groupon, Yoox Net-a-Porter Group, Deliveroo et autres Farfetch ont rejoint les acteurs locaux comme Souq, Wadi, Talabat, Namshi et MarkaVIP. Et en effet, le secteur prend de la vitesse : en mars, Amazon.com Inc a annoncé son acquisition du site de vente en ligne Souq (basé à Dubaï et affichant 23 millions de visites par mois) à un prix gardé secret ; Paypal a prévu l’établissement de sa première branche au Moyen-Orient pour novembre 2016, et la compagnie de téléphonie mobile Etisalat s’est alliée à MasterCard pour offrir une gamme de produits numériques, dont un porte-monnaie en ligne. Entre-temps, en 2015, le volume de requêtes sur les sites d’achats en ligne régionaux a augmenté de 49,94 % en Arabie saoudite et de 76,54 % aux EAU en un an 31. Le marché du commerce électronique dans le Golfe devrait connaître un taux de croissance annuel composé (TCAC) de 30 % entre 2015 et 2020, date à laquelle il devrait atteindre 19,8 milliards de dollars 32.

un contexte oPtiMalLes pays du Golfe offrent donc une remarquable combinaison de facteurs économiques, sociaux et politiques, aptes à stimuler la croissance du commerce électronique dans la région, tout en encourageant la profonde métamorphose entamée par les sociétés arabes. Les marques peuvent bénéficier de cette dynamique unique.

La population du Golfe est jeune, connectée et avide de socialisation ; elle est aussi férue de technologie et adopte précocement toute innovation 33. Par ailleurs, de plus en plus d’acheteurs arabes sont désormais attentifs à la façon dont ils dépensent, et apprécient les prix généralement plus bas offerts sur le net : même si ce pourcentage est encore inférieur à la moyenne mondiale de 60 %, 49 % des consommateurs au Moyen-Orient choisissent un site de vente en ligne en fonction des prix qui y sont proposés 34. Enfin, les dirigeants politiques de la région ont une vision avant-gardiste, que ce soit au niveau de mesures prises sur le plan régulatoire, comme la loi 2016 de Dubaï sur le libre accès aux données (Dubai’s Open Data Law), les projets de « smart cities » (comme Masdar City aux EAU ou Lusail City au Qatar…), les initiatives de gouvernance intelligente (via les applications mobiles pour les services publics par exemple), ou le recours aux nouveaux outils de communication en vue d’une meilleure relation avec le grand public.

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L E L U X E N U M É R I Q U E E N R A P I D E M U T A T I O N D A N S L E G O L F E

La notion de luxe repose sur des principes clairs : exclusivité, singularité et accès limité. Fondamentalement lié aux concepts de tradition et d’héritage, le luxe se caractérise par une expérience en magasin mémorable et un accent mis sur la satisfaction de la clientèle, sensible au plaisir de toucher et de sentir un produit avant de l’acheter. Le digital, en revanche, est interactif, gratuit et ouvert à tous ; intrinsèquement lié à l’innovation, il est en permanente évolution et connaît des bouleversements constants. Les rapports humains, y compris entre vendeur et acheteur, y sont désincarnés et intangibles. Le mariage de ces deux mondes est un paradoxe que les marques haut de gamme doivent aujourd’hui tenter de résoudre. Certains acteurs internationaux s’y attèlent en élaborant avec soin des stratégies digitales suffisamment séduisantes pour persuader un public désormais imprévisible.

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Cependant, la plupart des marques de luxe dans le CCG hésitent à adopter une approche à la fois exhaustive, localisée et détaillée, préférant se focaliser sur ce qui leur semble être la stratégie la plus sûre : une communication centrée sur les réseaux sociaux et les influenceurs. Ces compagnies ont du mal à trouver leurs marques dans un environnement en mutation perpétuelle, certes dominé aujourd’hui par les influenceurs, Facebook et Instagram, mais appelé à se transformer de façon imprévisible dans un futur proche, ainsi que cela se produit partout ailleurs, tout le temps.

l e s r é s e a u x s o c i a u x , n o u v e l e s P a c e e x c l u s i F ?Où que ce soit dans le monde, les spécialistes du luxe ne se sont intéressés que tardivement aux réseaux sociaux, qu’ils trouvaient trop de masse pour leur public cible et trop incontrôlables pour eux. Néanmoins, réalisant qu’ils s’excluaient eux-mêmes d’une tendance incontournable, beaucoup ont fini par suivre leur clientèle, qui utilise

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ces plateformes comme principale source d’information : en 2015, la moitié des achats de produits de luxe globalement a été en effet influencée par ce que les internautes ont vu, lu ou entendu en ligne, les acheteurs fortunés se servant des réseaux digitaux pour trouver et partager des informations sur les produits et les tendances 35.

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Les plateformes sociales ne sont pas toutes les mêmes. Pinterest, par exemple, s’est vite positionné comme l’espace où trouver les produits les plus courus, les nouveautés incontournables et de nombreux tutoriaux, ce qui convient parfaitement aux produits de beauté. Néanmoins, dans le CCG, 90 % des consommateurs de luxe âgés de 18 à 26 ans, 68 % des 27 à 34 ans, et 61 % des plus de 35 ans, estiment qu’Instagram est le media digital idéal pour promouvoir des articles de luxe, grâce à son ambiance branchée, ses visuels soignés, sa profonde portée et l’efficacité de son format vidéo 38. En février 2017, Instagram comptait 63 millions d’utilisateurs dans la région MENA. 70 % d’entre eux suivaient une marque et 75 % indiquaient qu’ils interagissent avec elle après avoir lu une publication 39. De son côté, Instagram met en place de nombreuses initiatives pour améliorer la visibilité des marques et encourager la vente en ligne : inspirée de Snapchat, la fonctionnalité Stories a été lancée en août 2016. Elle permet aux utilisateurs de publier des photos et des vidéos qui apparaîtront en haut du fil d’information puis disparaîtront après 24 heures ; cette option permet aux marketeurs de communiquer avec les utilisateurs sans surcharger leur page. De plus, Stories permet aux marques de sélectionner exactement les utilisateurs, followers ou non, avec lesquels elles souhaitent partager leur message. Suite au succès immédiat de Stories, Instagram a continué de lancer des nouveautés encourageant la vente en ligne, comme le marqueur « A garder pour plus tard », utilisable aussi pour les publicités, la vidéo en direct, et le lien « Acheter maintenant » qui redirige l’utilisateur vers le site Internet du détaillant où le produit peut être acheté.

i n s t a G r a M , l a P r é F é r e n c e D e l u x e

Les réseaux sociaux sont avant tout un état d’esprit. Alors qu’ils présentaient déjà un potentiel majeur il y a trois ans, les marques de beauté n’avaient qu’une faible présence digitale. Wojooh a donc pris l’initiative de se focaliser sur ces réseaux, en lançant son programme digital de fidélisation, son système de gestion de la relation clients (CRM) et une plateforme de vente en ligne. Les résultats sont extrêmement positifs, que soit au niveau de l’engagement ou de la performance. L’étape suivante consiste à démontrer que le digital peut stimuler la fréquentation de nos magasins, et que la vente en ligne peut contribuer à la croissance de notre activité. Les différents tests que nous avons effectués nous ont permis d’augmenter notablement les taux de conversions des ventes. Le digital est un ensemble ; il doit avoir plusieurs objectifs et être abordé de façon transversale. Pour réussir, il faut tester et innover en permanence, tout en maintenant une pertinence locale. FrederiCA tribuiAni, Directrice MarketinG De Wojooh

De la même manière, les réseaux sociaux sont la source d’information privilégiée par les consommateurs du Golfe : les jeunes se servent de Facebook, YouTube, Twitter ou Instagram pour s’informer proactivement et trouver des recommandations faites par leurs pairs. Les jeunes Saoudiens, en particulier, consacrent deux fois plus de temps que les jeunes Emiratis à ce type d’activités 36. C’est sur ces réseaux que 42 % des consommateurs du Golfe âgés de 18 à 26 ans découvrent le luxe pour la première fois, contre 17 % des plus de 35 ans, qui se réfèrent encore au bouche-à-oreille (28 %) et à la presse magazine (29 %) 37. Les marketeurs peuvent donc se servir des plateformes sociales pour tirer profit de la curiosité notoire des jeunes, ainsi que de leur désir permanent de ne jamais passer à côté de quoi que ce soit.

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De plus, grâce au caractère visuel et interactif des réseaux sociaux, les marques de luxe ont une multitude d’options pour impliquer le public efficacement. Après tout, elles excellent naturellement à la création de contenus tout simplement beaux. Que ce soit via une conversation en ligne régulière ou en proposant sur le net des exclusivités inattendues, ces marques peuvent se servir des plateformes sociales pour engager un dialogue avec leurs followers et offrir un degré de crédibilité supplémentaire à leur marketing, contrebalançant au passage le déclin de la publicité traditionnelle.

Cela ne signifie pas pour autant que ces réseaux ne présentent aucun inconvénient. En premier lieu, ils gomment les différences de statut ou de positionnement de leurs intervenants, conduisant toutes les marques à se comporter de la même manière ; une publication de Michael Kors, par exemple, ne sera guère différente d’une de Louis Vuitton. Quant aux marques de même standing, elles se concurrencent à seulement quelques clics près. Ainsi, plus la communication se fragmente et plus la capacité d’attention du consommateur moderne se réduit, les marques ayant du mal à se distinguer, en particulier aux yeux de jeunes consommateurs ne connaissant que ce genre de contenu tout aussi pertinent. Elles doivent donc redoubler d’efforts pour sortir du lot et multiplier le nombre et la richesse de leurs publications. Enfin, les marketeurs, déjà contraints d’être en permanence attentifs, agiles et prêts à s’adapter, doivent aussi apprendre à identifier les réseaux prioritaires, alors que de nouveaux outils sociaux sont constamment lancés.

Toute stratégie authentiquement sociale requiert donc un engagement conséquent et à long terme, imposant aussi aux acteurs du luxe de relâcher le contrôle qu’ils exercent sur leur image et sur leur communication ; c’est là un obstacle difficile à surmonter, en particulier pour les marques internationales qui tentent de protéger leurs standards et leurs directives à l’échelle globale. Les marques régionales jouissent sans doute de plus de flexibilité et peuvent ajuster leurs messages en fonction de leur audience spécifique, si elles acceptent de lâcher un peu prise.

Pour développer nos stratégies sociales, dont les objectifs sont de croître et engager notre communauté, amplifier notre notoriété et approfondir notre compréhension de nos consommatrices, nous nous basons sur le profil de notre cliente type, la femme âgée de 20 à 50 ans et vivant aux EAU. Cela nous permet de créer et de toujours améliorer nos contenus. Notre stratégie pour 2017 consiste à investir dans du contenu destiné à recruter et à impliquer de nouveaux followers, mettant l’accent sur la qualité plutôt que sur la quantité. Toutes nos publications sociales doivent être alignées sur nos valeurs – légèreté, tendance, sophistication et émerveillement – et nos plateformes sociales doivent toujours être en phase avec notre plan marketing, également en synergie avec nos activités en magasin. Communiquer via les réseaux sociaux peut s’avérer très efficace, avec une longue portée à un moindre coût, mais plusieurs canaux doivent être utilisés afin que le consommateur voie la marque sur différents supports. mirAl yousseF, Directrice Générale De level kiDs

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D i F F é r e n t e s c a t é G o r i e s D ’ i n F l u e n c e u r s

Il y a plusieurs types d’influenceurs en ligne. Certains sont des poids lourds des réseaux sociaux et jouissent d’une portée et d’une influence majeures. D’autres, plus modestes, se distinguent par la qualité de leurs followers plutôt que par leur nombre. Pour une marque, il pourrait sembler contre-intuitif de s’intéresser à cette communauté de niche ; elle s’avère pourtant plus efficace, le ratio de commentaires et de « J’aime » de leurs publications Instagram étant meilleur que celui des méga-célébrités 42.

Huda Kattan18,4 millions

Joelle Mardinian5,7 millions

Lojain Omran5,1 millions

Noha Nabil4,4 millions

Ola AlFares3,3 millions

Aseel Omran3,2 millions

Quelques méga-bloggeurs du CCG

Source: Instagram, mars 2017. Note: En nombre d’abonnés Instagram. Cette liste n’est pas exhaustive.

l e r è G n e D e s i n F l u e n c e u r sLe marketing axé sur les influenceurs en ligne est l’une des tendances les plus fortes sur les réseaux sociaux. Dans les pays du Golfe, les célébrités locales mettent même en place des pratiques d’entreprise, comme les grilles tarifaires ; des agences de marketing spécialisées, telles que Ghaliah et Hot Ice Communications, apparaissent ici et là. Dans le même esprit, le site Loolia.com a été lancé en 2015 pour offrir aux bloggeurs des services de production vidéo, de construction d’audience, ainsi que de gestion et de monétisation de leur contenu. En moins de deux ans, la chaîne YouTube du site Loolia TV, présentant les vidéos de dizaines d’influenceurs, a attiré quelques 730 000 abonnés. Se définissant comme un réseau, Loolia propose aussi aux internautes des rendez-vous vidéo avec les influenceurs, qui peuvent alors leur donner des conseils personnalisés.

Au Moyen-Orient, les influenceuses sont très puissantes. Leurs fans, qui passent beaucoup plus de temps sur leur portable qu’à regarder la télévision ou à lire des magazines, ont l’impression de les connaître, car elles les suivent quotidiennement sur Snapchat ou Instagram. Lorsqu’elles aiment une influenceuse et respectent ses opinions, ces fans veulent s’habiller et acheter comme elle. Elles lui font confiance. C’est pourquoi je ne pourrai jamais promouvoir un produit que je n’achèterai pas moi-même ; je me dois d’être extrêmement honnête car je porte une énorme responsabilité. Les influenceuses donnent une touche de réalité aux marques, mais celles-ci doivent faire un travail de recherche sérieux avant de choisir l’influenceuse avec qui travailler, afin de s’assurer qu’elle touche bien l’audience qui leur convienne. Elles doivent aussi lui faire confiance et la laisser créer son contenu à sa manière. Changer le style d’une publication ne fera que montrer que c’est truqué. deemA AlAsAdi, inFluenceuse

Les consommateurs du Golfe portent effectivement aux bloggeurs et autres célébrités du net un intérêt soutenu : en 2016, 61 % des individus âgés de 18 à 26 ans et 56 % des 27 à 34 ans suivaient au moins un influenceur 40, tandis que 71 % des résidents aux EAU âgés de 18 à 40 ans se disaient prêts à suivre les conseils donnés par ces personnalités avant de faire un achat 41, plutôt que de prendre l’avis de leur famille

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Née de parents irakiens et formée au maquillage professionnel à Hollywood, Huda Kattan s’est installée à Dubaï en 2009 et a lancé son blog, Huda Beauty, en 2010. En moins d’un an, Huda Beauty affichait plus d’un million de visites par mois, un succès essentiellement dû à ses tutoriaux faciles à suivre et à son style non-conformiste, parfois aventureux et toujours distrayant. Huda a rejoint Instagram en 2012 et est rapidement devenue l’une des spécialistes de la beauté en ligne les plus influentes au Moyen-Orient et au-delà. En 2016, le réseau de communication spécialisé dans le luxe SERMO l’a placée en tête de son classement des meilleurs influenceurs beauté dans le monde. Sa chaîne YouTube compte aujourd’hui plus de 1,7 million d’abonnés et sa marque de produits cosmétiques, lancée en 2013 avec l’aide de ses sœurs Mona et Alya, l’a rendue mondialement célèbre. Ses produits sont vendus en exclusivité chez Sephora aux Etats-Unis depuis 2015, et chez Harrods au Royaume-Uni depuis 2016.

l a r é u s s i t e D e h u D a k a t t a n

Les collaborations entre influenceurs et entreprises peuvent prendre diverses formes, de la simple publication en ligne à la représentation lors d’évènements, en passant par les séances photo. L’influenceur peut s’impliquer dans des concours promotionnels ou dans la critique de produits ; il peut encore devenir ambassadeur de la marque. Les gens s’intéressent à son mode de vie et à son opinion sur un sujet donné ; raison pour laquelle collaborer avec lui ne présente un intérêt pour une marque que si celle-ci s’intègre naturellement dans son style. C’est aussi pourquoi un problème peut se poser lorsque les marques considèrent l’influenceur comme une ‘pause pub’. Le marketing par influenceurs interposés diffère de la publicité. Pour une marque, il consiste à construire une relation avec les consommateurs par le biais d’un ami commun. Il va de soi qu’un engagement à court terme ou une association ponctuelle n’atteint pas cet objectif. FAdi sibAii, FonDateur et Directeur General De hot ice coMMunications

ou amis. Il n’est donc pas étonnant que pour certaines marques, les influenceurs ne soient plus un simple appoint à leur stratégie marketing, mais en fassent désormais partie intégrante.

En travaillant avec les bloggeurs, vloggeurs, youtubeurs et autres célébrités digitales (toute une communauté de passionnés générant des quantités massives de contenu), les marques espèrent développer leur notoriété et engager leur public de manière discrète et authentique. Elles ont l’embarras du choix : en 2016, la base de données de Cision Point dénombrait quelque 200 influenceurs spécialisés dans la mode et la beauté, rien qu’aux EAU.

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le reGarD rivé sur la viDéo DiGitaleLes vidéos en ligne sont extrêmement populaires dans le CCG : l’Arabie saoudite, où 41 % des femmes saoudiennes regardent quotidiennement ce genre de vidéos 43, affiche le plus haut ratio du monde en temps passé par habitant sur YouTube. Les femmes saoudiennes et émiriennes de moins de 25 ans regardent plus souvent des vidéos en ligne qu’elles ne consultent leurs courriels, en particulier les chaînes de beauté et de mode dont le temps de visionnage a augmenté de 50 % en 2015 44.

Hessa AlAwad

Njoud AlShammari

Batala

Al-Juhara Sajer

Aujourd’hui, YouTube est la plateforme dominante dans la région MENA : en Arabie saoudite, YouTube a une pénétration de 91 % sur téléphone mobile et de 61 % sur ordinateur de bureau, affichant le temps de visionnage par habitant le plus haut du monde. Grâce à ses puissantes technologies de ciblage d’audience, ses formats publicitaires engageants et interactifs, son système d’enchères automatisées et ses capacités de mesure avancées, YouTube permet aux annonceurs d’atteindre leurs objectifs marketing plus efficacement. Les marques peuvent désormais cibler un passionné de mode, quelqu’un à la recherche d’un sac de luxe par exemple, l’impliquer par le biais de formats vidéo interactifs, lui permettre d’acheter le produit qu’il voit en cliquant simplement sur la vidéo, et mesurer l’impact de leur campagne sur leurs ventes selon leurs propres indicateurs. ACile sleimAn, Directrice D’inDustrie - Détail, coMMerce en liGne et services DiGitaux chez GooGle

Les célébrités du net savent particulièrement bien créer un contenu vidéo au goût d’une audience déjà très encline à les regarder. Ainsi, les vidéos produites par les youtubeuses saoudiennes les plus populaires, comme Njoud AlShammari (900 000 abonnés pour plus de 53 millions de vues), Hessa AlAwad (470 000 abonnés pour presque 61 millions de vues) et Al-Juhara Sajer (425 000 abonnés pour 48 millions de vues), ont un taux d’engagement cinq fois supérieur à celui d’une vidéo classique 45. Les youtubers arabes ont un tel succès qu’en octobre 2016, YouTube a lancé Batala, une chaîne dédiée aux meilleures créatrices d’Afrique du Nord et du Moyen-Orient.

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Les amateurs de luxe arabes s’intéressent aux évènements internationaux comme les défilés, diffusés par les marques sur leurs réseaux sociaux globaux. Ils recherchent aussi un contenu qui les concerne plus directement et qui corresponde à leur mode de vie, axé sur le CCG et présentant des hommes et des femmes qui leur ressemblent. C’est pourquoi des éditeurs comme OLN Network – qui a récemment lancé la première société de production de la région qui crée du contenu digital de qualité cinéma – s’attèlent à produire et à diffuser ce type de contenu haut de gamme, et peuvent garantir un nombre de vues important grâce à leur large portée régionale. C’est aussi la raison pour laquelle s’associer à des influenceurs locaux reconnus est si efficace et mène à une réelle augmentation du nombre des transactions. Les marques ne devraient pas concevoir ce genre de contenu local simplement parce qu’il le faut, mais parce qu’au final, il conduira à une hausse des ventes. ZoyA sAkr, réDactrice-en-cheF Générale chez oln netWork

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l e s M i l l e n i a l s D u Gcc D é c o u v r e n t l e l u x e s u r l e s r é s e a u x s o c i a u x

18 - 26

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35+

Source: Sondage par Havas LuxHub, avril 2016

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Réseaux sociaux Bouche-à-oreille Influenceurs Presse magazine Magasins Autres

Les vidéos de marques ont aussi un rôle essentiel à jouer au sein d’une stratégie digitale axée sur une expérience et un récit authentiques. Que ce soit des tutoriaux, un accès exclusif aux coulisses, des making-of, des entretiens avec les célébrités les représentant… elles ont mille et une options pour produire un contenu amusant / informant / inspirant les utilisateurs. Par exemple, la campagne vidéo réalisée par Cartier pour Ramadan en juin 2016, consistait en une animation en trois parties, racontant le voyage de la fameuse Panthère à travers le désert arabe. En célébrant avec sa clientèle une fête importante, la marque signifiait sa proximité avec son marché tout en racontant sa propre histoire, sur un mode auquel le public local était sensible.

Le spectre des possibilités continue de s’enrichir grâce aux nouvelles fonctionnalités proposées par les réseaux sociaux comme la vidéo en direct : Facebook et Instagram offrent cette option depuis peu, alors que Periscope permet aux utilisateurs de diffuser en direct sur Twitter. Ces innovations répondent aux attentes des utilisateurs, prêts à sacrifier la qualité de l’image pour plus d’authenticité. En parallèle, les vidéos dont le contenu peut être directement acheté font leur apparition : l’utilisateur n’a qu’à cliquer sur un article apparaissant dans la vidéo, que ce soit un vêtement, un bijou ou un meuble, pour l’acheter instantanément.

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Le changement dans la nature de la relation entre une marque et ses consommateurs s’étend à tous les aspects de la communication d’entreprise, en commençant par une stratégie éditoriale efficace, qu’elle comprenne publicité en ligne, contenu de marque, blogs, publications sociales, livres blancs ou infographies. Plus encore que d’autres industries, le luxe doit offrir un contenu qui divertit, informe et inspire.

En effet, promouvoir le luxe ne consiste pas à vendre un produit, mais à attirer les individus dans l’univers de la marque. Celle-ci pourra élaborer un contenu approprié qui facilitera l’adhésion des consommateurs. Le site de LVMH Nowness.com, par exemple, se définit comme « une source d’information quotidienne pour les curieux de culture », jouant sur un sentiment d’exclusivité et de fantaisie : le site est accessible sans abonnement, mais les utilisateurs préenregistrés peuvent personnaliser leur expérience en « aimant » les vidéos, photos et articles. Ce type d’implication de l’utilisateur, tout comme les publications postées par les utilisateurs eux-mêmes, démontrent fidélité, engagement et passion, et sont aussi gratifiants pour le consommateur que pour la marque.

Toutefois, l’impact du contenu éditorial dépend aussi de la manière et du contexte dans lequel il est partagé. En premier lieu, les internautes d’aujourd’hui reçoivent trop des messages ; de plus, ces messages ne les concernent souvent pas ; enfin, ils arrivent rarement au bon moment. En réaction, ces utilisateurs développent des mécanismes de défense. Le marketing contextuel permet donc, au contraire, d’envoyer le bon message, au bon destinataire, au bon moment. Il aide les marketeurs à mieux connaître les profils des personnes auxquelles ils s’adressent (leurs besoins, leur style de vie, leurs motivations) et à identifier les moments exacts où elles seront le plus à même de s’intéresser à leurs messages. Par exemple, Gucci Style est un « magazine magasin » permettant aux lecteurs de faire des achats où qu’ils soient, et s’adressant aux clients du luxe, souvent très occupés, voyageant beaucoup et faisant donc passer le temps entre deux avions sur leur téléphone portable.

M a r k e t i n G D e c o n t e n u e t M a r k e t i n G c o n t e x t u e l

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les PlateForMes sociales De réFérence Pour ProMouvoir le luxe Dans le ccG

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Source: Sondage par Havas LuxHub, avril 2016

Instagram Facebook Twitter YouTube Linkedin Autres

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D I G I T A L E T L U X E D A N S L E C C G , O U L A R E D É F I N I T I O N D ’ U N E I N D U S T R I E

Les nouvelles technologies, dont l’importance ne cesse de croître, transforment chacune des étapes du parcours client, dans un monde au futur non pas seulement digital, mais tout à la fois digital et physique, autrement dit « phygital ». De nouveaux modèles font leur apparition, tentant de répondre à deux questionnements qui se combinent en un troisième : comment employer les technologies digitales pour améliorer l’expérience luxe en magasin ? Comment transposer sur le net cette expérience physique, afin d’encourager le commerce en ligne ? Enfin, comment assembler tous ces éléments en une expérience parfaitement intégrée ? Certains acteurs internationaux mènent désormais cette marche complexe vers l’omnicanal, alors que dans la région, les marques haut de gamme réalisent qu’il leur faut urgemment s’intéresser à l’e-commerce. Mais de manière générale, l’industrie du luxe dans le CCG n’arrive pas encore à définir une approche digitale synchronisant tous les aspects du métier, en ligne et hors-ligne.

l ’ a v è n e M e n t D u c o M M e r c e e n l i G n e D e l u x e Alors que le marché mondial des articles personnels de luxe vendus en ligne atteignait 17,73 millions de dollars en 2015 46, cette activité n’a généré que 200 - 230 millions de dollars dans le CCG, ne représentant que 2,5 % du total des ventes régionales pour cette catégorie de produits 47. Pourtant, tout indique que le commerce en ligne de produits haut de gamme a un avenir prometteur dans le Golfe, où il devrait atteindre une valeur totale de 1,5 milliard de dollars d’ici quatre ans 48.

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Au cours des cinq dernières années, des marques régionales comme Wojooh, Level Shoes, Sauce, et internationales telles que Harvey Nichols, L’Occitane, Sephora, Burberry, Lacoste, Macy’s et Bloomingdale’s, ont activement développé leurs activités de e-commerce. Par exemple, Symphony, une boutique conceptuelle et multimarques spécialisée dans la mode de luxe, a lancé son premier espace de vente digital en 2014. Elle livre à l’international, proposant des collections exclusives et une expérience interactive par le biais de son magazine en ligne Notes BySymphony. BySymphony.com soutient le point de vente physique en donnant de nombreuses informations aux clients. En retour, le site bénéficie de la confiance et de l’apriori positif que le magasin, bien établi, a déjà pu développer. Les spécialistes de la démarque en ligne Yoox et The Outnet ont prévu de créer des sites locaux en 2018, tandis que Net-a-Porter et Mr Porter se lanceront dans la région en 2019.

Cependant, le signal le plus fort a été donné récemment par l’entrée dans l’arène digitale des géants régionaux de la vente de luxe au détail : en novembre 2016, Mohamed Alabbar, de Symphony Investment, a dévoilé une joint-venture avec le distributeur digital Yoox Net-a-Porter Group. Le mois suivant, AlTayer Insignia (dont le portefeuille comprend les grands magasins Bloomingdale’s et Harvey Nichols) a lancé Ounass.com, son premier espace de vente en ligne de luxe, couvrant les EAU, l’Arabie saoudite et le Qatar. Le site bilingue offre un service de livraison gratuite en moins de deux heures aux clients résidant à Dubaï, et le jour-même ailleurs aux EAU. Enfin, le lancement courant 2017 de noon.com par Alabbar, devrait donner un élan supplémentaire au commerce digital, et à l’industrie du luxe en général. Ce portail de vente numérique, estimé à 139 millions de dollars, disposera de sa propre infrastructure sur le terrain et assurera une livraison le jour-même, un service après-vente bilingue et de multiples options de paiement. En trouvant eux-mêmes des solutions aux problèmes qui ralentissent la croissance du commerce en ligne dans le CCG, parfois au prix d’investissements conséquents, ces méga-groupes de luxe démontrent leur engagement, et signalent aux autres acteurs du secteur qu’il est temps d’agir.

P A R T I E I I I

Le taux de pénétration du e-commerce dans le CCG est négligeable, à seulement 1,3 % du total des ventes au détail, contre 15 - 18 % dans des pays comme les Etats-Unis, la Chine ou le Royaume-Uni, et ce pour des raisons multiples : le manque de confiance dans les paiements en ligne, le recours marqué au paiement en espèces à la livraison, une géographie difficile et un système postal sous-développé qui nuit aussi à la qualité du service. Néanmoins, nous sommes convaincus que la région est mûre pour la révolution du commerce en ligne : ses taux de pénétration d’Internet et d’utilisation de smartphones comptent parmi les plus hauts globalement, la population est jeune (presque la moitié a moins de 24 ans) et friande de technologie, le revenu moyen par habitant est élevé, et la demande pour des services de vente en ligne est forte. Ailleurs dans le monde, des géants du commerce digital sont apparus, comme Alibaba en Chine, mais dans le Golfe, aucun acteur de confiance n’est encore capable de répondre à toutes les attentes des consommateurs à ce niveau. Le lancement de noon.com, et la concurrence accrue qui en résultera, devrait conduire à une croissance du secteur de la vente au détail en général, créer de nouveaux emplois, et aider les commerçants locaux à avoir plus de portée. Nous souhaitons transformer l’expérience du consommateur de bout en bout. C’est pourquoi gérer tous les rouages importants en interne devrait permettre à noon de personnaliser cette expérience à chacun des points de contact. Avec noon.com, nous comptons offrir l’expérience de shopping en ligne la plus centrée sur le consommateur qui soit. Globalement, les consommateurs ont largement bénéficié du commerce en ligne, et nous voulons apporter ces mêmes avantages à la clientèle du CCG, dont nous souhaitons gagner la confiance. Nous comptons devenir les champions de l’innovation digitale dans la région. mohAmed AlAbbAr

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l a P r i o r i t é o M n i c a n a l Cette croissance tant attendue du commerce en ligne doit-elle inéluctablement se faire au détriment des ventes dans les magasins physiques ? Les détaillants du monde entier redoutaient que le « showrooming », pratique consistant à chercher des informations dans le monde physique et à acheter en ligne, souvent à un prix plus bas, ne rogne sur les profits des magasins. Il s’avère pourtant que les pratiques vont dans les deux sens : de nombreux clients apprécient aussi le « webrooming », qui consiste à faire des recherches en ligne avant d’acheter en magasin. Ce nouvel équilibre s’explique surtout par l’investissement de certaines marques de luxe dans le commerce « de mise-en-scène » : le magasin physique devient un espace offrant une expérience d’achat améliorée grâce aux technologies numériques de pointe. Ayant écouté leur clientèle et compris qu’elle aspirait à de telles expériences, ces marques ont réalisé que le parcours client luxe, autrefois clair et précis (sensibilisation, puis évaluation, achat et enfin loyauté), n’est aujourd’hui plus aussi linéaire. Il s’avère donc inadapté désormais. Adopter un regard centré sur le consommateur, identifier tous ses points de contact et offrir un contenu éditorial ainsi qu’une expérience de marque, sont autant de priorités à prendre en compte afin de toucher un public dorénavant aux commandes. L’omnicanal permet ce type d’approche totalement intégrée, homogénéisant en douceur toutes les interactions, sans faire de différence entre le canal ou l’appareil utilisé : de l’ordinateur au smartphone à la tablette au magasin, quels que soient le lieu et l’heure.

Ce modèle nécessite d’harmoniser les deux univers afin que l’expérience d’achat soit parfaitement fluide. Les consommateurs préfèrent globalement les magasins pour explorer (toucher et tester les produits) et pour le service (qui y est meilleur et où les produits peuvent être rendus plus facilement) ; mais ils préfèrent acheter en ligne, où le

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Source: « State of Payments », 2016

Souq.com Amazon.com Namshi Jumia Marka VIP

74% 40% 21% 20% 14%

Les marques n’ont jamais eu à leur disposition autant d’informations sur les consommateurs. Grâce aux données collectées en ligne, elles peuvent connaître en détail leurs comportements et leurs habitudes d’achat sur la manière de voyager, de manger et de dormir. Ces données, fournies par leurs propres plateformes ou achetées à des tiers, leur permettent de cibler très précisément leur clientèle idéale, améliorant ainsi leur retour sur investissement (ROI). Dans un avenir très proche, elles serviront aussi au développement d’intelligences artificielles (IA). Certaines marques utilisent déjà des agents numériques (bots) capables d’apprendre de leurs interactions avec les consommateurs.

D e l ’ i M P o r t a n c e D e s D o n n é e s

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Les consommateurs du Golfe utilisent leur téléphone portable (plutôt que leur tablette ou leur ordinateur) à chaque étape de leur parcours d’achat, pour surfer et faire des recherches en ligne, sur les prix en particulier, avant d’acheter. Aussi n’est-il pas étonnant que le marketing mobile soit une priorité pour les marques de luxe. Ces dernières doivent cependant comprendre que la dimension mobile du téléphone portable influence déjà toute l’expérience digitale, de leurs publicités (les formats doivent être interactifs et conçus pour de petits écrans), à l’optimisation de leurs sites Internet, et même au design des écrans en magasin. Etre optimisé pour le mobile implique aussi de mettre l’accent sur un contenu interactif et partageable entre tous les canaux, en ligne et hors-ligne, de la réalité augmentée aux filtres Snapchat personnalisés, en passant par de simples hashtags dans les points de vente. Toutefois, les smartphones ne se limitent plus à simplement fournir des informations, et disposent aujourd’hui de fonctionnalités plus actives, comme assistant digital ou instrument d’achat, encourageant le commerce mobile. Dans le Golfe, les requêtes d’achat par portable ont bondi de 91,71 % en Arabie saoudite et de 196 % aux EAU en 2015 51. Les ventes sur mobiles sont passées de 61 % en 2014 à 70 % au Moyen-Orient cette même année, 46 % des consommateurs de la région estimant qu’ils feront leurs achats via leur portable essentiellement dans un futur proche 52. C’est précisément cette perspective qui a conduit The Luxury Closet à lancer en décembre 2016 sa première application mobile, suite à un sondage indiquant que 70 % des consommateurs de la région achètent via leur smartphone.

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geste d’achat est simple et pratique 49. Les marques ne peuvent pas (encore) effacer les barrières matérielles et proposer à leurs clients de tester des produits sur Internet par exemple, mais un site ou une application mobile peut offrir une expérience digitale proche de celle qu’un client vivra dans le monde physique, en donnant un accès facile à toutes sortes d’informations, comme les détails d’un produit, les heures d’ouverture et les adresses des magasins, ou encore les politiques de retour. A l’inverse, offrir dans le magasin le confort du shopping en ligne, un service de guidage par téléphone mobile via géolocalisation, ou la possibilité de commander en ligne et de se faire livrer chez soi des produits indisponibles, contribue à transformer l’expérience d’achat en la rendant plus facile, interactive et efficace.

En empruntant à chacun des deux mondes ce qu’ils ont de meilleur, les marques de luxe ont une occasion en or d’offrir à leur clientèle une expérience personnalisée. Les technologies permettant d’identifier ou de localiser un client dans un magasin, sur un site Internet ou sur une application mobile, sont autant d’outils à leur disposition. Mais la différence peut aussi se faire avec le service. Les consommateurs d’aujourd’hui utilisent plusieurs canaux simultanément en faisant leurs achats. En particulier, ils comparent les prix sur leur portable. C’est pourquoi une force de vente formée à offrir la même qualité de service quel que soit l’environnement, permettra d’assurer l’homogénéité de l’expérience, en magasin et en ligne. Cette nouvelle qualité de service a d’ailleurs un impact important sur les résultats : les clients dépensent en moyenne quatre fois plus lorsqu’en magasin, ils interagissent à la fois avec le personnel et le site de la marque 50. De la même manière, les marques de luxe peuvent transposer en ligne le service haut de gamme qu’elles proposent en magasin, en offrant sur leurs sites Internet des fonctionnalités telles qu’un moteur de recherche de produits, un service de « chat », des calculatrices de taille, des recommandations personnalisées, etc.

Certes, le nombre de canaux à prendre en compte peut paraître écrasant. Mais un avantage pour les marques réside dans le fait que les consommateurs laissent derrière

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Le secteur de la beauté offre un terrain fertile aux marques de luxe souhaitant innover dans leur communication avec les consommateurs, en particulier dans une région comme le CCG où la demande pour cette catégorie est très forte. Les marques de beauté innovent constamment, tandis que leur clientèle est particulièrement ouverte à l’expérimentation. De plus, les internautes passionnés de beauté sont particulièrement actifs en ligne, au point de faire d’Internet leur première source d’information et d’achat de produits cosmétiques, surpassant de loin les medias traditionnels que sont la télévision, la radio ou encore la presse 53. C’est sur les réseaux sociaux que des tendances comme le contouring, le highlighting et le strobing sont nées. 55 % des acheteuses de produits de beauté recherchent activement des informations en ligne, et 30 % achètent leurs produits en fonction des bénéfices présentés sur les sites Internet des détaillants 54. En écoutant attentivement ce que leurs clientes disent en ligne, les marques peuvent leur offrir exactement ce dont elles ont besoin, que ce soit des informations sur un nouveau produit (origine, utilisation, sensation) ou des campagnes sur-mesure présentant de nouvelles idées et collections, des tendances ou les couleurs de la saison.

De nombreuses marques de luxe ont développé des stratégies marketing authentiques, qui touchent profondément les consommatrices et résonnent auprès des jeunes, renforçant ainsi leur statut iconique et leur pertinence. Chanel, par exemple, a réitéré son message fondateur autour de l’élégance émancipée et a séduit un jeune public en mettant en scène le mannequin/actrice LilyRose Melody Depp embrassant un flacon de N°5 L’Eau. De même, YSL Beauté poursuit sa mission historique de soutien aux jeunes artistes rebelles, en diffusant une vidéo de Zoe Kravitz expliquant combien se maquiller avant de monter sur scène l’aide à surmonter son trac. Au Moyen-Orient, Lancôme a lancé en mars 2016 un magazine beauté en ligne dont la rubrique « Beautiful Moments » présentait cinq jeunes femmes arabes influentes, dont l’entrepreneuse Mthayel AlAli, âgée de 24 ans, et la célébrité des réseaux sociaux Shahnaz AlJumaily, âgée de 19 ans.

e x P é r i M e n t e r a v e c l a b e a u t é

Lancée en septembre 2015, la stratégie digitale de L’Occitane pour le CCG se concentre sur l’omnicanal. Digital et e-commerce ont été intégrés en 2015 - 2016 au sein des équipes et du marketing ; les opérations et la gestion de la relation clients suivront en 2017. L’accent est aussi mis sur le mobile. Tous les aspects du métier, du marketing au contenu et à l’expérience utilisateur, ont été optimisés pour mobile. 85 % des commandes de produits L’Occitane dans la région ont été passées via téléphone portable, contre 40 % à 50 % dans d’autres marchés plus matures. Depuis, les ventes en magasin de la marque ont augmenté de 20 % en moyenne dans la région et son commerce en ligne bénéficie d’une croissance à trois chiffres sur l’année 2016, son site saoudien étant le plus performant à l’international. Ses ventes via mobile et son taux de conversion dans ce pays ont augmenté respectivement de 85 % et 211 % .

C’est en créant des campagnes régionales couvrant les EAU et l’Arabie saoudite, comme le « Vendredi blanc », que L’Occitane a enregistré ses plus fortes ventes quotidiennes dans ces deux marchés. Ces campagnes y ont conduit à une augmentation des visites, des conversions et des ventes en ligne. Profitant du haut degré de connectivité de la région, ainsi que de son langage commun, elles ont un fort ROI et sont au cœur de la stratégie omnicanal de L’Occitane, qui prévoit de lancer en 2017 sa première campagne couvrant simultanément tous les pays de la région.

l ’ o c c i t a n e : é t u D e D e c a s 5 5

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eux de nombreuses traces digitales. Les nouvelles technologies présentent l’immense intérêt de donner aux marketeurs accès à une multitude de données qui, une fois rassemblées et analysées, peuvent offrir une meilleure compréhension des habitudes, attentes et opinions de leur clientèle. Ce type de renseignements contribuera à fournir un meilleur service.

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n u M é r i q u e , i n n o v a t i o n e t e n t r e P r e n a r i a tLe digital a pris la planète d’assaut, contraignant les entreprises à revoir la façon dont elles mènent leurs affaires. Mais il encourage aussi l’industrie du luxe à envisager de nouvelles opportunités, ne serait-ce que pour ne pas se laisser distancer par les jeunes entrepreneurs, dont les modèles disruptifs bouleversent et redéfinissent son univers.

En effet, dans le Golfe comme ailleurs, de nombreuses startups s’intéressent à la vente au détail haut de gamme, certains avec un succès notable : par exemple, le service de taxi à la demande Careem a été créé en 2012. Il est désormais le principal concurrent de Uber dans la région, avec plus de quatre millions d’abonnés en octobre 2016 comptant un bon nombre d’utilisateurs fortunés, attirés par ses options VIP. C’est à ce type de clientèle que Careem doit son succès initial : en effet, ce sont les cadres aux emplois du temps chargés qui ont les premiers adopté Careem, appréciant son service personnalisé, pratique, rapide et flexible.

The Luxury Closet est une autre réussite : ce site a été lancé à Dubaï en 2011 avec un capital d’environ 40 000 $ 56 par Kunal Kapoor, Directeur des ventes de la boutique Louis Vuitton au Mall of the Emirates jusqu’en avril 2010 ; il comptait quelque 150 000 utilisateurs mensuels en janvier 2016. Il permet à ses membres d’acheter et de vendre à des prix accessibles des articles de luxe neufs ou d’occasion, offrant un large éventail de marques. Avec 80 % des articles présentés fournis par des particuliers, et le reste par des professionnels, l’entreprise dit avoir une croissance mensuelle à deux chiffres aux EAU. The Luxury Closet gère en direct ses entrepôts et toutes ses procédures de vérification. En décembre 2016, le site a procédé à une nouvelle levée de fonds lui permettant désormais d’envisager son expansion en Arabie saoudite, au Koweït, au Qatar, à Bahreïn et en Inde.

So Chic a été fondé en 2014 par Alex Bouvy et Emma Di Rito sur le même principe, mais avec une approche différente : So Chic organise des évènements ponctuels au cours desquels ses clientes des EAU peuvent acheter des habits « pré-aimés », appartenant à des amoureuses de la mode dont les armoires ont été personnellement visitées par les deux fondatrices. Celles-ci proposent aussi des articles qu’elles ont choisis un par un en Europe. Le duo a par ailleurs ouvert une boutique, ainsi qu’un site de vente en ligne qui assure une livraison gratuite pour tout achat de plus de 270 $, et une politique de retour de 48 heures. En vendant des produits soigneusement sélectionnés, dans un état

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L’industrie du luxe dans la région hésite à s’engager dans le commerce en ligne en raison du manque de solutions logistiques fiables, du taux de pénétration très bas des cartes de crédit et de la crainte de ne pas parvenir à recréer en ligne une image suffisamment luxueuse. Cela signifie simplement que d’une part, la transformation digitale de notre région dans son ensemble n’avance que très lentement, et d’autre part, que les acteurs du luxe ne sont pas encore disposés à innover. Tout ceci laisse à penser que l’état des lieux dans notre région est inacceptable et je ne peux qu’espérer que nous allons nous réveiller avant que nos voisins ne le fassent. ChristiAn eid, vice-PresiDent MarketinG & coMMunications chez careeM

impeccable et à un prix abordable au cours d’évènements agréables et tendance, les deux femmes ont créé une nouvelle niche et répondu à l’envie de leurs clientes d’appartenir à une communauté exclusive et choyée.

Quant au site multimarques de listes de cadeaux MyList, lancé en 2012, sa fondatrice Julie Leblan a parfaitement saisi les attentes des amateurs de commerce en ligne : diversité (de marques et de produits), contenu et services personnalisés (conseiller individuel et gestionnaire de remerciements gratuits), sensibilité au prix (enregistrement et livraison gratuits, aucun frais additionnel), flexibilité (option de cadeau de groupe, parfaite fluidité en ligne et hors-ligne), inspiration (recommandations de produits, entretiens, articles, etc. présentés sur le site et les réseaux sociaux).

Dans un autre registre, le détaillant en ligne Boutiqaat.com, lancé au Koweït en 2015, a su tirer profit de l’engouement général pour les influenceurs, présentant non seulement une large gamme de produits cosmétiques, mais aussi de nombreuses célébrités du net qui proposent chacune leur sélection d’articles, achetables directement sur le site dans leurs propres « boutiques ».

De nouvelles initiatives voient le jour quotidiennement, explorant toujours plus d’options, nouvelles ou jusque-là négligées : The Modist, par exemple, a été mis en ligne à Dubaï en mars 2017. Proposant 75 marques contemporaines, la fondatrice et directrice Ghizlan Guenez s’adresse à un segment qui, selon elle, n’a pas encore reçu l’attention qu’il mérite : les femmes passionnées de mode mais préférant un style respectueux de leurs valeurs religieuses.

The Luxury Closet

MyList

So Chic

Boutiqaat.com

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s e P t M é t a P h o r e s P o u r c o n s t r u i r e l ’ a v e n i r

La capacité des entreprises à traverser cette difficile phase de transition et à se préparer correctement pour l’avenir dépend largement de leur degré de maîtrise du digital. La société de conseil Duval Union Consulting, qui accompagne le groupe Chalhoub dans sa transformation numérique, explique en sept métaphores comment l’environnement moderne est en train de se restructurer, ce que cela signifie pour les marques, et qui fait quoi dans le CCG aujourd’hui.

Souq.com, Vaniday.ae, Huda Beauty, Boutiqaat

La façon dont le public, sous l’influence de nouveaux in-tervenants, forge ses opi-nions, évolue. Les sites de v e n t e d e s e c o n d e m a i n ou ceux construits autour de recommandations des utilisateurs, ainsi que les nou-veaux experts du net tels que les influenceurs, offrent au-jourd’hui aux consommateurs de nouvelles sources de ré-férence, d’information et de découverte.

GlamBox, HolidayMe, Collectionair

Les espaces de consommation changent. Tout ce qui était autrefois physique peut dé-sormais exister au plan digital. Le numérique et le hors-ligne doivent se confondre pour garantir la satisfaction im-médiate et l’autonomie de l’utilisateur. Pour les marques, cela implique d’améliorer l’expérience d’achat en adoptant de nouvelles ma-nières de travailler, en étant conscient de l’importance du contexte, et en embrassant l’omnicanal.

Class Dive, Bayzat, Compareit4me

La nouvelle relation des marques au monde exige qu’el les soient désormais transparentes, responsables, disponibles, authentiques et réactives. De plus en plus, les consom-mateurs demandent des comptes aux entreprises sur leurs méthodes de produc-tion et leurs conditions de travail. Ces entreprises doivent être humanisées et à l’écoute d’une communauté qui a des choses à leur dire.

Designer-24, Boxit, NowMoney

De nombreuses startups se focalisent à trouver la solu-tion à un problème à la fois, contribuant pas à pas au progrès de l’industrie de la vente au détail. Leur spé-cialisation dans un domaine précis, ainsi que leur agilité, leur permettent d’être plus performantes que d’autres organisations mieux établies mais moins souples. En con- séquence, le commerce au détail se fragmente, ce qui change à la fois les produits, les services et le marché lui-même.

Pixelbug, BitOasis

Nous ne sommes qu’au début de la révolution numérique. L’intelligence artificielle aide déjà les consommateurs à choisir leurs produits, alors que « Big Data » permettra aux marques d’envoyer des cam-pagnes hautement localiséeset personnalisées à leurclientèle cible. Les assistants virtuels donneront aux utilisa-teurs le contrôle d’appareils intelligents dans leurs maisons. Les réseaux neuronaux et l’apprentissage automatique simplifieront l’inventaire et la gestion des stocks des détaillants. Les magasins en réalité augmentée et virtuelle feront leur apparition. Les drones changeront la livraison.

The Luxury Closet, So Chic, Careem, Shedd, Visage.ae, Nabbesh, The List

Les consommateurs s’unissent, la production participative gagne du terrain et l’économie du partage se développe. Pour réussir, toute initiative doit à coup sûr avoir unedimension communautaire etcol laborat ive. Selon que l’entreprise l’acceptera ou la rejettera, cette évolution aura des retombées positives ou négatives.

Noon.com, Ounass.com, BySymphony.com

La place des entreprises dans le cyc le commerc ia l es t remise en question. Dans ce nouvel environnement, où les points de contact sont plus fragmentés et où pratique-ment tout peut se vendre en ligne, chaque acteur peut dépasser, ou être dépassé. Les nouveaux venus n’hésitent pas à se mesurer aux établis-sements bien implantés qui n’ont pas pris la mesure, ou n’ont pas réagi à la nouvelle donne du marché.

LA GRENOUILLE DANS LA CASSEROLE D’EAU CHAUDELE PARTICIPANTLE GARDIEN

LE VOYAGEUR LA SERRE L’EMBALLAGE LE CYBORG

MARCHÉ ET CONCURRENCE

CANAUX ET RELATIONS CLIENTS PRODUITS ET MODÈLES D’ENTREPRISE

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Alors que les frontières entre le digital et le physique s’effacent rapidement, les technologies modernes donnent le pouvoir à un nouveau genre de consommateurs, emmené par ces insaisissables Millenials. Les nouvelles générations (Y et Z) contrôleront bientôt une large part du marché des produits personnels de luxe dans le Golfe, qui devrait atteindre 1,5 milliard de dollars d’ici 2020 57. L’environnement du commerce de détail est en cours de transformation, s’axant sur le consommateur, et rien que le consommateur.

U N M O N D E N O U V E A U

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Plus qu’un changement industriel, c’est une métamorphose sociétale, particu-lièrement dans le CCG où une population fortunée, branchée, jeune et ambitieuse mène la révolution digitale et mobile. Le consommateur arabe moderne et connecté change sa place dans la société, ses valeurs et ses priorités. Il n’aspire pas à obtenir un statut et ne s’attache pas aux marques, il veut des expériences, de la substance et être libre. Conscient de la valeur des choses, il sait faire la différence entre le coût et les avantages de posséder un produit, et ceux de simplement l’utiliser ; il privilégie désormais l’usage à la possession. La forte croissance de l’économie du partage sur la scène du luxe illustre cet état d’esprit. Le succès d’initiatives comme Onefinestay (un Airbnb de luxe) ou Victor (une application mobile offrant un service de jets privés sur le modèle de Uber) en est la parfaite illustration.

Tenir compte de ce nouveau paradigme devrait figurer en tête des priorités pour les marques du CCG. Tout comme trouver une réponse au paradoxe digital, comment s’engager en ligne sans compromettre les fondamentaux de l’industrie du luxe, embrasser pleinement l’importance de l’omnicanal, sans oublier l’imminence de la vague du commerce en ligne. Via une stratégie sociale exhaustive, des

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collaborations avec les influenceurs et un marketing contextuel et de contenu, les acteurs du luxe pourront offrir à leur clientèle l’expérience parfaitement intégrée qu’elle recherche. Cet état des lieux est valide dans le CCG, mais aussi au-delà : l’Egypte, le Liban, l’Iran et l’Inde présentent chacun un potentiel fascinant.

Car l’heure tourne et d’autres changements se profilent à l’horizon. Certaines marques haut de gamme utilisent déjà des outils de réalité virtuelle et augmentée, alors que l’impression en 3D, bien qu’à ses débuts, offrira son propre lot de défis (des risques de contrefaçon à la remise en cause des services de livraison). Plus encore que les accessoires connectés déjà disponibles comme les montres intelligentes, le déploiement des technologies biométriques et de l’Internet des objets changera radicalement la donne. Les nouveaux produits intelligents, tels que les voitures, appareils audio, luminaires et autres technologies domestiques bientôt disponibles à la vente, constitueront aussi de nouveaux médias par lesquels communiquer. De plus, ils introduiront une nouvelle dimension de services et d’expériences invisibles dans le quotidien des consommateurs, qu’ils accompagneront en tout lieu et à toute heure. Enfin, ils fourniront aux marques une quantité inégalée de données, ce qui permettra aux marketeurs de développer des stratégies réellement individualisées.

Il est désormais clair que le futur peut aller bien au-delà de nos rêves les plus fous et personne ne peut prédire à quoi il ressemblera. Aujourd’hui plus que jamais, la seule constante est le changement, ce qui est aussi effrayant qu’excitant. Pourtant, le CCG offre le cadre idéal pour une telle aventure : jeune, dynamique et connecté. Son industrie du luxe devrait enfin réaliser qu’elle a en main tous les éléments pour mener la charge, si elle le décide.

La scène du luxe digital dans le CCG n’en est encore qu’à ses balbutiements, alors que le consommateur de luxe arabe change extrêmement vite ; il est affirmé, connecté socialement et beaucoup moins loyal aux marques, auxquelles il préfère l’expérience et la découverte. Nous devons nous adresser à lui d’une manière tout à fait nouvelle, en l’impliquant plutôt qu’en nous imposant. C’est pourquoi notre stratégie consiste à mieux connaître notre public plutôt que de l’inonder de messages publicitaires, afin d’engager un réel dialogue, à la fois dans le monde matériel et dans la sphère digitale – car l’avenir du luxe ne sera pas l’un ou l’autre : l’expérience du consommateur doit reposer sur une connexion intégrée entre le numérique et le physique. Devenir véritablement omnicanal signifie que nous ne devons plus nous concentrer sur la manière d’offrir nos produits et nos services, mais désormais nous focaliser sur le consommateur. Nous ne sommes qu’au

début de cette disruption digitale du commerce de luxe. Demain, il y aura moins de magasins phares, qui offriront aux consommateurs une meilleure expérience, unique et mémorable ; des magasins communautaires proposeront à la fois un contact personnel et une connexion digitale, qui donnera au client accès à un vaste choix et lui permettra de naviguer des plateformes de vente en ligne et mobiles, solides et adaptées. C’est une transformation majeure pour l’industrie de la vente au détail, qui devra se restructurer. Ceux qui comptent perdurer doivent se préparer, et se préparer dès maintenant, ou prendre le risque d’être délaissés. PAtriCk ChAlhoub, co-ceo Du GrouPe chalhoub

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1. Worldwide Luxury Markets Monitor (Suivi mondial des marchés du luxe) automne 2015, Bain & Company - Fondazione Altagamma2. Worldwide Luxury Market Monitor 15th Edition (Suivi mondial du marché du luxe, 15eme edition) 2016, Bain & Company3. « Middle East Retail Snapshot » (Aperçu de la vente au détail au Moyen Orient) juin 2015, PWC4. Groupe Chalhoub, 20165. Groupe Chalhoub, 20166. Internet World Stats, 2016 7. « GCC Mobile Markets » (Les marchés mobiles du CCG) 2015, Techpolis8. Nations Unies, 20169. Nations Unies, 201610. Arab Youth Survey (Sondage de la jeunesse arabe) 2016, Asda’a Burson-Marsteller11. « Understanding the Millennial Mindset – and What It Means for Payments in the GCC » (Comprendre l’état d’esprit des Millenials – et ce que cela signifie pour les paiements dans le CCG) 2016, Visa Performance Solutions CEMEA12. Fond Monétaire International, octobre 201613. « Understanding the Millennial Mindset – and What It Means for Payments in the GCC » (Comprendre l’état d’esprit des Millenials – et ce que cela signifie pour les paiements dans le CCG) 2016, Visa Performance Solutions CEMEA14. « MENA Average Gross Income by Age Group 2014 -2019 » (Revenu moyen par tranches d’âge en Afrique du Nord et au Moyen-Orient 2014-2019), Euromonitor International15. Internet World Stats, 201616. « Digital in 2016 » (Le digital en 2016), We Are Social17. Global Web Index KSA, Q2 2016 and Global Web Index UAE, Q2 2016 (Indice Internet mondial sur l’Arabie saoudite, 2eme trimestre 2016, et Indice Internet mondial sur les EAU, 2eme trimestre 2016), We Are Social18. Arab Social Media Report (Rapport sur les réseaux sociaux dans le monde arabe) 2015, TNS19. Global Web Index Q4 2016 (Indice Internet mondial, 4eme trimestre 2016), We Are Social20. Arab Social Media Report (Rapport sur les réseaux sociaux dans le monde arabe) 2015, TNS

21. « GCC Mobile Markets » (Les marchés mobiles du CCG) 2015, Techpolis22. « Arabic Content Ranks Eighth on the Internet » (Le contenu arabe classé 8eme sur Internet) 2014, Al Arabiya23. « Media Use in the Middle East » (Consommation des media au Moyen-Orient) 2016, université Northwestern du Qatar24. Global B2C E-commerce Report (Rapport sur le commerce en ligne mondial) 2016, E-commerce Foundation25. « Getting in on the GCC E-Commerce Game » (Se préparer à entrer dans l’arène du commerce en ligne au CCG) 2016, AT Kearney 26. « Getting in on the GCC E-Commerce Game » (Se préparer à entrer dans l’arène du commerce en ligne au CCG) 2016, AT Kearney 27. « Getting in on the GCC E-Commerce Game » (Se préparer à entrer dans l’arène du commerce en ligne au CCG) 2016, AT Kearney 28. State of Payments (Etat des paiements) 2016, Payfort29. « Getting in on the GCC E-Commerce Game » (Se préparer à entrer dans l’arène du commerce en ligne au CCG) 2016, AT Kearney 30. « Unlocking the E-commerce Opportunity in the Kingdom of Saudi Arabia » (Déverrouiller le potentiel du commerce en ligne en Arabie saoudite) 2016, Boston Consulting Group31. Rapport d’analyse des tendances du commerce en ligne 1er trimestre 2015, Google 32. « Getting in on the GCC E-Commerce Game » (Se préparer à entrer dans l’arène du commerce en ligne au CCG) 2016, AT Kearney 33. « Preparing for the Digital Era: The State of Digitalization in GCC Businesses » (Se préparer à l’ère digitale : état des lieux de la digitalisation des industries dans le CCG) 2016, Strategy &34. « Total Retail 2016, They Say They Want a Revolution » (Vue complète sur la vente au détail en 2016, Ils disent qu’ils veulent une révolution), PWC35. « The Opportunity in Online Luxury Fashion » (Les opportunités dans la mode de luxe en ligne) 2015, McKinsey36. « Understanding the Millennial Mindset – and What It Means for Payments in the GCC » (Comprendre l’état

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d’esprit des Millenials – et ce que cela signifie pour les paiements dans le CCG) 2016, Visa Performance Solutions CEMEA37. Sondage par Havas LuxHub, avril 201638. Sondage par Havas LuxHub, avril 201639. « Ten Percent of Instagram Users in MENA Region » (10 % des utilisateurs d’Instagram sont dans la région Afrique du Nord et Moyen-Orient), février 2017, Arabian Business40. Sondage par Havas LuxHub, avril 201641. Social Media Influencers Study (Etude sur les influenceurs des réseaux sociaux) 2016, BPG Cohn & Wolfe 42. « Instagram Marketing: Does Influencer Size Matter? » (Le marketing sur Instagram : la taille d’un influenceur compte-t-elle ?) 2016, Markerly43. Connected Consumer Survey (Sondage sur le consommateur connecté) 2015, Analysys Mason44. Baromètre de la consommation 2016, Google 45. Tubular Labs, 201646. Luxury Goods Worldwide Market Study (Etude de marché globale sur les produits de luxe) automne-hiver 2016, Bain & Company47. Groupe Chalhoub, 201648. Groupe Chalhoub, 201649. AT Kearney, 201650. Retail Industry Report (Rapport sur le secteur de la vente au détail) 2016, InMoment 51. Rapport d’analyse des tendances du commerce en ligne 1er trimestre 2015, Google52. « Total Retail 2016, They Say They Want a Revolution » (Vue complète sur la vente au détail en 2016, Ils disent qu’ils veulent une révolution), PWC53. Makeup In-Depth Consumer Report (Rapport approfondi sur les consommateurs de cosmétiques) 2016, NPD Group54. Intelligence Report : Data & Targeting (Rapport d’information : données et ciblage) 2016, L255. L’Occitane, 201656. « The Luxury Closet Is Dressed To Impress With US$1 Million Raise From Wamda Capital » (The Luxury Closet est prêt à impressionner avec un financement d’un million de dollars par Wamda Capital) février 2016, Entrepreneur Middle East57. Groupe Chalhoub, 2016

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Vous pourrez trouver plus d’informations sur le site www.chalhoubgroup.com

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