la stratégie d'internationalisation du groupe accor

85
La stratégie d’internationalisation du groupe ACCOR : le choix des BRIC IEP de Toulouse Mémoire de recherche présenté par Mlle Florence Ory Directeur de Mémoire : Mr Alexandre Minda Maître de conférence de sciences Economiques Institut d’Etudes Politiques de Toulouse Année 2011

Upload: dinhhanh

Post on 05-Jan-2017

216 views

Category:

Documents


2 download

TRANSCRIPT

Page 1: La stratégie d'internationalisation du groupe ACCOR

La stratégie d’internationalisation du groupe ACCOR :

le choix des BRIC

IEP de Toulouse

Mémoire de recherche présenté par Mlle Florence Ory

Directeur de Mémoire : Mr Alexandre Minda Maître de conférence de sciences Economiques Institut d’Etudes Politiques de Toulouse

Année 2011

Page 2: La stratégie d'internationalisation du groupe ACCOR
Page 3: La stratégie d'internationalisation du groupe ACCOR

La stratégie d’internationalisation du groupe ACCOR :

le choix des BRIC

IEP de Toulouse

Mémoire de recherche présenté par Mlle Florence Ory

Directeur de Mémoire : Mr Alexandre Minda Maître de conférence de sciences Economiques Institut d’Etudes Politiques de Toulouse

Année 2011

Page 4: La stratégie d'internationalisation du groupe ACCOR

Remerciements

Je remercie tout particulièrement Mr Alexandre Minda pour sa disponibilité dans

l’encadrement de ce mémoire et plus généralement pour son implication dans le parcours

Affaires Internationales et Stratégies d’Entreprise à l’Institut d’Etudes Politiques de Toulouse.

Page 5: La stratégie d'internationalisation du groupe ACCOR

Avertissement

L’IEP de Toulouse n’entend donner aucune approbation, ni improbation dans les mémoires

de recherche. Ces opinions doivent être considérées comme propres à leur auteur.

Page 6: La stratégie d'internationalisation du groupe ACCOR

Abréviations AMF Autorité des Marchés Financiers BRIC Brésil Russie Inde Chine IDE Investissement direct à l’étranger IHG Intercontinental Hotel Group OCDE Organisation de coopération et de

développement économique OMC Organisation Mondiale du Commerce OMT Organisation mondiale du tourisme PED Pays en développement PME Petites et Moyennes Entreprises françaises PIB Produit Intérieur Brut PME Petites et Moyennes entreprises

Page 7: La stratégie d'internationalisation du groupe ACCOR

Sommaire Introduction …………………………………………………………………………………………………….1 Première partie : La construction d’une stratégie internationale intégrant les BRIC…….8 Chapitre 1 : Un marché hôtelier international dominé par les BRIC……………………………...…9 Section 1 : Les BRIC : une zone de fortes opportunités..........................................................................9 Section 2 : La refonte des objectifs de ACCOR : d’un marché privilégié à la conquête des BRIC……………………………………………………………………………………………………………..16 Chapitre 2 : La mise en œuvre d’une stratégie de multinationalisation............................................21 Section 1 : ACCOR ou la difficile internationalisation d’une entreprise de service…………….21 Section 2 : Une application du modèle OLI à l’internationalisation de l’industrie hôtelière….25 Deuxième partie : Les enjeux de la détermination d’une modalité d’entrée dans les BRIC .....................................................................................................................................................................28 Chapitre 1 : L’identification des différentes stratégies d’entrée possibles pour le groupe ACCOR…………………………………………………………………………………………………………28 Section 1 : Les modalités d’entrée propres à l’industrie hôtelière internationale………………..28 Section 2 : L’identification des facteurs déterminant les modes d’entrée d’ACCOR dans les BRIC……………………………………………………………………………………………………………..32 Chapitre 2 : Les points forts de la stratégie de ACCOR dans les BRIC…………………………...37 Section 1 : Le choix d’une stratégie de partenariat…………………………………………………….37 Section 2 : L’importance de la stratégie de hub and spoke…………………………………………...40 Section 3 : L’Asset right : un mode de détention unique des hôtels...................................................41 Troisième partie : La construction d’un modèle de développement made in ACCOR…..44 Chapitre 1 : Stratégie de l’immatériel et avantages compétitifs……………………………………..44 Section 1 : Une culture d’entreprise au service de l’internationalisation………………………….45 Section 2 : Une combinaison d’actifs immatériels pertinente………………………………………..48 Chapitre 2 : Une nécessaire adaptation aux spécificités des BRIC………………………………....52 Section 1 : Un enjeu majeur : la gestion de l’interculturel……………………………………………52 Section 2 : Standardisation ou adaptation à la diversité………………………………………………56 Conclusion……………………………………………………………………………………………………..60 Annexes................................................................................................................................................................62 Bibliographie………………………………………………………………………………………………….72 Table des matières…………………………………………………………………………………………...76

Page 8: La stratégie d'internationalisation du groupe ACCOR

- - 1

Introduction

L’année 2010 confirme la stratégie de développement dans les pays émergents menée par le

groupe ACCOR. En effet, l’inauguration du premier hôtel Sofitel en octobre 2010 en Arabie

Saoudite, l’ouverture programmée à échéance 2013 de quarante établissements en Chine, le

relancement de la dynamique d’ouverture au Vietnam avec la construction de cinq hôtels

Pullman illustrent l’importance des économies émergentes. ACCOR n’est pourtant pas le seul

hôtelier à considérer les économies émergentes comme des relais de croissance. Dans le

même temps, Intercontinental Hotels Group (IHG) conclue un partenariat avec le groupe

Amrapali afin de conquérir des parts de marché en Inde où il s’apprête à lancer la marque

Holiday Inn Express. Hilton renforce sa position en Russie avec l’ouverture de trois nouveaux

hôtels et en Inde où il s’apprête à implanter la marque Waldorf Astoria. Peu à peu les

stratégies des groupes hôteliers internationaux se recentrent sur ces nouveaux pays Brésil

Russie Inde Chine communément désignés par le terme BRIC et qui présentent de fortes

opportunités de croissance. La tenue de la huitième conférence internationale hôtelière du 20

au 22 Octobre 2010 ayant pour thème « global emerging markets : Asia Pacific, Middle East,

North Africa, Latin America » souligne l’attrait croissant des hôteliers pour ces nouveaux

acteurs de la scène internationale.

Le groupe ACCOR, multinationale française leader dans son secteur en Europe et n°5

mondial en 20111, constitue un objet d’étude complexe permettant de mieux envisager et

comprendre le processus d’internationalisation de l’industrie hôtelière dans les pays

émergents. Son fort degré d’internationalisation ainsi que sa tradition d’ouverture

internationale le singularisent des principaux acteurs encore concentrés sur leurs marchés

domestiques et cherchant à développer leurs activités sur des marchés frontaliers présentant

des caractéristiques communes avec le marché d’origine. D’autre part, ce groupe occupant

une place de challenger défiant les chaînes hôtelières Nord Américaine prédominantes

mondialement, l’analyse de sa stratégie présente un réel intérêt.

1 MKG Hospitality « 16ème classement hôtelier mondial des groupes hôteliers et de leurs enseignes » 2011

Page 9: La stratégie d'internationalisation du groupe ACCOR

2

ACCOR se définit tout d’abord comme une chaîne hôtelière intégrée au sens de F. Vellas2.

Les chaînes hôtelières intégrées ont ainsi pour but de développer et de commercialiser des

produits hôteliers cohérents et homogènes en exerçant un contrôle direct ou indirect sur les

hôtels portant son enseigne. Cette entreprise française est issue de la fusion, en 1983, entre

Novotel SIEH3 créée par Paul Dubrule et Gérard Pélisson en 1967, et la société Jacques Borel

International (JBI)4. Le groupe ACCOR, aujourd’hui dirigé par Denis Hennequin, possède

4229 hôtels ainsi que 507306 chambres dans plus de 90 pays5. Il réalise, au 31 décembre

2010, un chiffre d’affaires total de 5948M€6. En 2010, le groupe ACCOR est devenu un pure

player hôtelier s’étant séparé de son activité de service depuis l’Assemblée du 29 juin 2010.

Le développement de ACCOR est le fruit de ses orientations stratégiques. Il met en œuvre

une diversification géographique et sectorielle par le biais de la création ou du rachat de

sociétés. De plus ce groupe se développe autour de la mise en place sophistiquée de différents

modes de financement et d’exploitation tout en restant un groupe très intégré comparé aux

grandes chaînes américaines. Aujourd’hui, ce groupe a adopté une stratégie

d’internationalisation centrée sur la conquête des BRIC. Cette multinationale présente une

excellente illustration d’une tendance commune à l’ensemble de l’industrie hôtelière

internationale.

Comprendre la stratégie internationale du groupe ACCOR, c’est tout d’abord développer une

connaissance de l’industrie hôtelière dans son ensemble et de ses problématiques actuelles.

Par conséquent, il convient de préciser la notion d’industrie hôtelière internationale au centre

de notre étude. Cette dernière est une composante majeure de l’industrie des services et

constitue plus spécifiquement un sous – secteur de l’industrie touristique internationale. La

notion d’industrie hôtelière est particulièrement ambigüe et ce pour diverses raisons.

Premièrement, la définition même du terme « hôtel » pose problème. Nous retiendrons par

conséquent la définition proposée par l’Organisation Mondiale du Commerce7. Ainsi, cette

organisation définit un hôtel comme « un établissement collectif touristique » incluant :

hôtel, appartement-hôtel, motel, club résidentiel, et des établissements similaires proposant

2 F. Vellas “Economie et politique du tourisme international” 2007 Paris Economica. Cet auteur distingue également les chaînes volontaires qui ont principalement pour but de regrouper les hôteliers indépendants pour faire face à la concurrence des chaînes intégrées et pour promouvoir la demande de la clientèle étrangère et nationale en la fidélisant. 3 Société d'Investissement et d'Exploitation Hôteliers 4 Document annexe : historique du groupe ACCOR 5 Rapport annuel d’activité 2010 du groupe ACCOR 6 Document annexe : présentation du groupe 7 Organisation mondiale du commerce ou OMC

Page 10: La stratégie d'internationalisation du groupe ACCOR

3

des services hôteliers au-delà du simple nettoyage de chambre. D’autre part, l’industrie

hôtelière est composée de plusieurs éléments souvent difficiles à analyser. Trois types de

compagnies hôtelières peuvent alors être identifiées : les franchiseurs, celles dont l’activité

principale est le management, les compagnies impliquées dans la construction – le

développement- la propriété d’hôtels. Le secteur hôtelier, composé à l’origine d’une

multiplicité de PME familiales et indépendantes, s’est professionnalisé et structuré autour de

grandes chaînes hôtelières internationales définies comme « one that owns or has

involvement in at least two hotel properties operating in at least two countries »8. Nous

pouvons dater ce bouleversement majeur de 1990 bien qu’il débuta quelques années plus tôt

avec le développement du marché de l’automobile et l’augmentation des voyages de longues

distances. Certains hôtels indépendants ont tenté de résister à la concurrence des chaînes

hôtelières en exploitant un marché de niche : le luxe. Les chaînes hôtelières nord Américaines

ont dominé la scène mondiale mais sont concurrencées depuis les années 1980 par des

groupes hôteliers Européens ou Asiatiques comme ACCOR, Forte, Le Meridien.

L’internationalisation de l’industrie hôtelière n’est pourtant pas récente et s’est déroulée sur

deux périodes. Tout d’abord, le développement au cours des années 1950 – 1970 de la

circulation aérienne et routière, l’apparition de nouvelles destinations touristiques et

l’expansion du tourisme en général, eurent pour conséquence une internationalisation

progressive du secteur hôtelier. Les chaînes hôtelières américaines furent d’ailleurs les

premières à rechercher l’internationalisation. Dans un second temps, nous avons pu observer

l’augmentation du nombre de groupes hôteliers internationaux et de leurs capacités d’accueil

sur les marchés étrangers. Au début des années 1980, les marchés domestiques relativement

restreints n’offrirent pas assez de débouchés. La forte concentration de l’offre hôtelière dans

certaines régions du monde comme les Etats-Unis ou la Méditerranée a poussé les groupes

hôteliers à trouver de nouvelles destinations afin de s’élargir .C’est pourquoi la fin du

vingtième siècle et le début du vingt et unième ont été marqués par des changements dans la

distribution spatiale de l’offre hôtelière et d’une augmentation des capacités de logements

dans les anciens pays socialistes ( communistes), l’Asie, l’Afrique et le Pacifique.

Aujourd’hui, l’augmentation croissante du degré de compétition internationale, l’accélération

de l’innovation technologique, la multiplication des accords de libre échange, l’existence de

marchés financiers internationaux ont contribué au développement des firmes hôtelières à

8 Colin Johnson« Locational strategies of international hotel corporations in eastern central Europe » Fribourg 2002

Page 11: La stratégie d'internationalisation du groupe ACCOR

4

l’international. La globalisation offre de nouvelles opportunités donnant accès à de nouveaux

marchés géographiques.

Les BRIC s’imposent aujourd’hui comme des acteurs majeurs de l’économie mondiale sur

lesquels il est impossible de faire l’impasse. Le secteur d’activité du tourisme international est

fortement dominé par ces économies émergentes et ce en tant que nouvelles destinations et

nouvelles clientèles. Peu à peu, les stratégies des groupes hôteliers internationaux se

recentrent sur ces nouveaux pays présentant de fortes opportunités de croissance. Le groupe

ACCOR ne déroge pas à la règle. Etudier l’internationalisation de ce dernier dans cet

ensemble de pays nous permettra de réconcilier autour d’une même analyse la complexité de

deux thèmes : les pays émergents et la stratégie d’entreprise. De nombreux groupes hôteliers

ont cherché à engager un développement de leur activité à l’international mais peu sont

parvenus à atteindre un tel résultat. Le groupe ACCOR, caractérisé par une tradition

d’ouverture internationale et un fort degré d’internationalisation, fait ici figure de pionnier.

Par conséquent, il s’agira d’identifier et définir la stratégie d’internationalisation du groupe

ACCOR dans les BRIC. Nous mettrons en exergue les spécificités du groupe ACCOR dans la

conduite de sa stratégie par rapport aux autres groupes hôteliers internationaux. Nous nous

demanderons : quels sont les enjeux stratégiques de la montée en puissance des BRIC pour

ACCOR ? Notre travail s’articulera autour de trois axes principaux de recherche. Nous

chercherons à définir les avantages compétitifs mis en avant par le groupe lors de son

internationalisation ainsi que les raisons déterminant le mode d’entrée du groupe dans les

BRIC. Nous nous poserons également la question des opportunités et défis que peuvent

représenter les BRIC pour la stratégie de ce groupe hôtelier.

La recherche sur l’internationalisation de l’industrie hôtelière n’en est pourtant qu’à ses

prémices. La réalisation d’une revue de la littérature existante sur le sujet nous a permis

d’identifier l’existence d’un intérêt académique réel pour la recherche sur le thème de

l’internationalisation de l’industrie hôtelière et d’un débat majeur sur l’internationalisation des

firmes de service. Alors que les services et le tourisme représentent une part importante de

l’activité économique des pays développés, l’internationalisation de l’industrie hôtelière reste

un sujet relativement peu investi. Les activités de service n’ont pas encore atteint un stade de

multinationalisation aussi intense que les activités manufacturières. La recherche sur le

développement international de ces activités se situe encore à un stade préliminaire dans

lequel les conceptions diffèrent sans bénéficier de validation empirique. Bien que les écrits

Page 12: La stratégie d'internationalisation du groupe ACCOR

5

fondateurs de l’analyse stratégique considèrent la diversification internationale comme une

stratégie de croissance ayant un impact majeur sur les performances des firmes, la preuve de

l’existence d’une relation entre diversification et performance fait toujours débat. De plus, peu

d’études ont été réalisées permettant l’application d’un modèle ou paradigme à l’industrie

hôtelière internationale. Contractor et al (2003) affirment qu’il n’y a eu que peu de recherches

sur la croissance et l’internationalisation des firmes appartenant au secteur des services : les

travaux de Dunning - MacQueen (1982) et Kundu (1994) sont deux exceptions. Les

recherches concernant l’internationalisation des compagnies hôtelières se sont principalement

concentrées sur le choix d’un mode d’entrée stratégique oubliant bien d’autres aspects

essentiels. De nouvelles perspectives de recherches se sont développées ces dernières années

qui reflètent les développements contemporains des chaînes hôtelières. Nous pouvons citer les

travaux de Altinay et Altinay ainsi que les recherches menées par Dev et al sur l’importance

de certains facteurs tels que la capacité de la firme à transférer son expertise au marché local,

la capacité du partenaire local potentiel à absorber le savoir-faire transmis, le sérieux de

l’investissement des partenaires sur le marché local, l’accès au capital dans le choix d’une

modalité d’entrée sur des marchés internationaux.

Entreprendre ce mémoire de recherche a nécessité une réelle investigation afin de restituer le

plus fidèlement possible les enjeux stratégiques de cet hôtelier. Si des contacts avec des

cadres du groupe ACCOR ou des cabinets de consulting spécialisés sur les questions de

l’internationalisation de l’industrie hôtelière ont été activement recherchés, toutefois ces

derniers n’ont pas abouti sur la réalisation concrète d’un entretien. En revanche,

l’établissement d’un contact par e-mail avec Mme Marie-Claude Bizet, déléguée générale de

la fondation d’entreprise ACCOR, m’a permis d’avancer dans mes recherches et d’obtenir

des informations globales quant à l’action et la présence de la fondation ACCOR dans les

pays émergents. Par conséquent, les sources d’informations indirectes ont été privilégiées.

L’information disponible pour le public est largement disponible et détaillée ce qui permet la

compréhension de la stratégie du groupe. La standardisation au niveau international des

normes comptables et des règles de publication donne aujourd’hui aux chercheurs une source

d’informations fiables et constantes. L’étude des rapports annuels et des documents de

référence sur la période 2000 - 2010 a mis en lumière les enjeux stratégiques de la montée en

puissance des BRIC pour le groupe ACCOR et a permis de donner une vue beaucoup plus

empirique aux travaux de recherches. Ce travail a également permis d’étayer mon analyse de

Page 13: La stratégie d'internationalisation du groupe ACCOR

6

faits précis permettant ainsi une meilleure compréhension, je l’espère, du lecteur. Le rapport

annuel d’activité9 est un document établi chaque année à l'attention des actionnaires d'une

entreprise à l'occasion de leur Assemblée Générale. Le document de référence quant à lui

contient une information détaillée sur l’activité, les perspectives de la société et est soumis au

contrôle de l’autorité des marchés financiers (AMF). Sa publication est optionnelle. De

même, l’analyse des diverses communications de l’entreprise au travers de communiqués de

presse, brochures institutionnelles, livre d’entreprise10 a permis une compréhension des

enjeux stratégiques de l’entreprise. Le choix de la période 2000 – 2010 pour la réalisation de

cette étude s’explique par la nécessité d’une période d’observation de longue durée

permettant de noter les modifications de la stratégie. L’année 2000 marque d’ailleurs

l’apparition dans les rapports d’activité annuels du groupe ACCOR du début de la réflexion

sur les pays émergents. Enfin, la réalisation de graphiques et de tableaux ont permis de

croiser et regrouper les données collectées afin de présenter un ensemble plus dynamique et

facile à interpréter. D’autre part, ces graphiques et tableaux ont permis l’application des

principaux modèles théoriques d’analyse stratégique au secteur hôtelier international et plus

spécifiquement au groupe ACCOR. Si ce mémoire a pour objet la stratégie du groupe

ACCOR, toutefois nous nous efforcerons de faire des liens avec d’autres groupes hôteliers

afin de dégager des éléments de comparaison

Les entreprises cherchent à assurer leur pérennité et à maintenir un avantage concurrentiel à

travers plusieurs stratégies qui s’adaptent au contexte économique dans lequel elles opèrent.

Ces entreprises ont rarement recours à une seule et même stratégie. Selon Jean Baptiste

Treboul, les entreprises de tourisme « utilisent une palette stratégique en fonction de leurs

objectifs et des contraintes du marché »11. L’internationalisation constitue aujourd’hui une

stratégie rationnelle utilisée par les groupes hôteliers en réaction à l’environnement compétitif

dans lequel ils évoluent. Le groupe ACCOR a atteint un degré important de diversification

géographique et à ce titre l’étude de sa stratégie d’internationalisation nous apparaît

pertinente. Premièrement, nous essaierons de déterminer quelles sont les motivations et

intentions stratégiques à l’origine du développement international de ACCOR dans les BRIC. 9 Seules les sociétés cotées comme ACCOR sont tenues, en France, de publier ce document dans les quatre mois qui suivent la clôture d'un exercice.

10 On peut ainsi citer des livres édités par l’entreprise elle-même : ACCOR, L’aventure du possible 1967-2007 2007, Paris, Cherche Midi 11 Tréboul ( J.B), Les stratégies des entreprises de tourisme, 1998, Paris, Presses Universitaires de France

Page 14: La stratégie d'internationalisation du groupe ACCOR

7

Dans un second temps, nous identifierons les enjeux sous-tendant le choix d’un mode d’entrée

de l’entreprise sur ces nouveaux marchés. Nous appuierons notre recherche sur des modèles

théoriques spécialement applicables à l’industrie hôtelière internationale et nous ferons

apparaître les points forts permettant à ACCOR une approche de ces marchés. Enfin, il s’agira

de comprendre dans quelle mesure le groupe ACCOR a su élaborer son propre modèle de

développement caractérisé par un engagement durable sur ces marchés lui assurant pérennité.

Page 15: La stratégie d'internationalisation du groupe ACCOR

8

Partie 1 : La construction d’une stratégie internationale intégrant

les BRIC Les BRIC constituent aujourd’hui un formidable relais de croissance pour les groupes

hôteliers évoluant sur un marché marqué par un fort degré de globalisation et d’intensité

concurrentielle. Le groupe ACCOR a donc engagé une stratégie d’internationalisation lui

permettant de profiter du potentiel offert par ces nouveaux marchés. En effet, « plus que la

diversification, l’internationalisation est une option stratégique attractive pour les entreprises

touristiques. » 12L’internationalisation correspond à l’action de s’internationaliser c'est-à-dire

de généraliser l’action de l’entreprise à l’ensemble ou à une partie des nations. Ce terme reste

toutefois confus et de nombreuses définitions existent. L’internationalisation, réel processus

stratégique est l’une des voies principales de développement de l’entreprise et un fait majeur

de la dynamique de l’économie mondiale13. Elle correspond à une révolution irréversible du

comportement des différents acteurs face à la survie économique et sociale. Il conviendra par

conséquent dans cette partie de déterminer les motivations stratégiques de

l’internationalisation d’ACCOR. Dans quelle mesure la construction d’une stratégie

internationale englobant les BRIC s’est-elle avérée nécessaire ? Quelles sont les diverses

opportunités offertes par les BRIC ?

12 Callot Philippe « De l’internationalisation des entreprises de l’hôtellerie et de la restauration » Espaces 144 Mars – Avril 1997 13 Lemaire ( Jean-Paul), Petit (Gérard), Stratégie d’internationalisation : Développement international de

l’entreprise , 2003, Paris, Dunod

Page 16: La stratégie d'internationalisation du groupe ACCOR

9

Chapitre 1 : Un marché hôtelier international dominé par les BRIC Les BRIC s’imposent aujourd’hui comme des acteurs majeurs de l’économie mondiale sur

lesquels il est impossible de faire l’impasse. Le secteur d’activité du tourisme international est

fortement dominé par ces économies émergentes et ce en tant que nouvelles destinations mais

aussi nouvelles clientèles. Le marché hôtelier quant à lui s’est internationalisé voire globalisé

en raison de l’accélération de l’innovation technologique, de la multiplication des accords de

libre échange, de l’existence de marchés financiers internationaux…

Section 1- Les BRIC : une zone de fortes opportunités Il conviendra dans cette section de définir précisément le concept des BRIC afin de délimiter

au mieux notre objet d’étude. En effet, plusieurs économistes dont le premier fût Jim O’Neil

ainsi que de nombreuses agences de notation ont proposé différentes définitions contribuant

ainsi au remaniement de ce concept. Bien que proposant des définitions différentes, tous ces

travaux soulignent l’attractivité économique de ces pays ainsi que leurs forts potentiels de

croissance. En nous appuyant sur ces différents travaux, nous considèrerons comme faisant

parti des BRIC les pays suivants : Brésil-Russie-Inde-Chine, reprenant ainsi l’ensemble de

pays donné par Jim O’Neil. Nous nous demanderons : en quoi cet ensemble de pays se révèle-

t-il attractif pour l’industrie hôtelière internationale ?

A- La définition originelle des BRIC proposée par Jim O’Neil Constatant le formidable potentiel de développement de quatre grands pays émergents, le

Brésil, la Russie, l’Inde et la Chine, Jim O’Neil économiste de la banque Goldman Sachs créa

l’acronyme BRIC dans une étude publiée en 2003 sous le titre « Dreaming with BRICs : the

path to 2050 ». A l’époque Goldman Sachs prévoyait que le PIB autrement dit la richesse

produite par ces BRIC doublerait en 2042 celle des sept pays les plus avancés et formant le

G7. Ainsi Jim O’Neil14 soutient : « La Chine a le potentiel pour dépasser les Etats-Unis (…).

L’Inde a la capacité de rivaliser avec les Etats-Unis et bien que ce ne soit pas tout à fait le cas

pour le Brésil et la Russie, l’économie de ces deux pays pourrait être 10 fois plus importante

que celle de n’importe lequel des acteurs du G7(…). » Ces prédictions furent réalisées sur la

14 Jim O Neil « Les BRIC nouvelles grandes puissances dans le futur ? » revue internationale et stratégique 2008/4 (n°72)

Page 17: La stratégie d'internationalisation du groupe ACCOR

10

base de deux variables : la taille des populations actives et leur productivité. Les BRICs

symbolisent depuis le début du 21ème siècle l’émergence ainsi que le bouleversement de la

géographie récente dominée par l’Occident. Si Jim O’Neil a identifié cet ensemble de pays il

n’a toutefois pas proposé de définition précise de cette entité.

La répartition des investissements directs à l’étranger est révélatrice de l’attractivité des pays

émergents plus spécifiquement des BRIC à l’échelle mondiale. Les IDE définis comme « un

investissement qui implique une relation à long terme, reflétant ainsi un intérêt durable d’une

entité résidente d’un pays d’origine ( l’investisseur direct) sur une entité résidente

(l’entreprise investie) d’un autre pays »15 sont donc des indicateurs fiables nous permettant de

mesurer l’attractivité de ce groupe de pays. L’élément le plus marquant ces deux dernières

décennies est la part de plus en plus importante prise par les IDE à destination des pays en

développement (PED) et émergents. Les changements dans la structure des IDE et

l’augmentation du poids des IDE dans les pays émergents ou en voie de développement sont

perceptibles et mis en lumière dans le rapport 2009 de l’United Nations conference on trade

and development16. Les Etats Unis demeurent la principale zone d’accueil d’investissements

directs à l’étranger suivi par la France, la Chine, le Royaume Uni et la Russie. L’entrée de la

Russie et le retour de la Chine dans le classement des cinq premiers pays destinataires d’IDE

symbolisent le changement de structure17.

B- Les BRIC : un ensemble hétérogène

Les BRIC constituent aujourd’hui un ensemble hétérogène qu’il convient de mieux définir.

Tout d’abord, plusieurs critères interviennent dans la définition de cet ensemble de pays et

plusieurs économistes ou agences de notations proposent leurs propres définitions de ce

concept à géométrie variable. Les organismes financiers et les fournisseurs d’accès comme

MSCI (Morgan Stanley Capital), Standard&Poor ‘s, Moody’s et Fitch, définissent les marchés

émergents sur la base des critères suivants : capitalisation boursière, PIB par habitant,

environnement macro – économique, taille du marché et des entreprises, degré de liquidité de

l’économie, niveau de corruption. Aujourd’hui, la thèse défendue est que l’ouverture des

marchés, la stabilité macro – économique, la « bonne gouvernance », l’éducation, les

investissements directs à l’étranger, la création d’entreprises sont des facteurs clés dans le

15 Mucchielli ( Jean Louis), Multinationales et Mondialisation , 1998, Paris, Editions du Seuil 16 Document 4 en annexe « Les changements dans la structure des IDE réalisé par Mlle Florence Ory sur la base des travaux de l’UNCTAD. 17 UNCTAD« World Investment Report 2009 »

Page 18: La stratégie d'internationalisation du groupe ACCOR

11

processus d’émergence. Au cours de ces dernières années, les BRIC ont considérablement

ouvert leurs économies et resserrés leurs liens avec les réseaux d’échanges mondiaux. Ils se

sont intégrés aux marchés mondiaux de consommation intermédiaire, de biens finaux et de

services comme l’illustre l’augmentation de leur poids relatif dans les échanges mondiaux.

Ce groupe de pays apparaît également comme un ensemble hétérogène. Chacun de ces pays

est caractérisé par l’importance des défis qu’il doit relever. A titre d’exemple, le Brésil est un

pays dont l’économie est basée sur l’agriculture, premier producteur de carburant écologique.

Au contraire, l’Inde s’est spécialisée dans la production de biens manufacturés remplaçant en

cela la Chine passée au stade supérieur des services dans le monde. De plus, ce concept a

souvent été remis en cause. De nombreuses critiques ont été formulées concernant

l’appartenance du Brésil et de la Russie à ce groupe de pays. Par exemple, la mauvaise

gouvernance des entreprises et le retour des tensions de la guerre froide sont deux raisons

souvent avancées pour disqualifier la Russie. Le Brésil se voit également reproché

l’interruption de l’endiguement de l’inflation ou encore la faiblesse de son commerce

extérieur. Jim O’Neil18 souligne les faiblesses de l’économie Brésilienne et identifie trois

grands domaines comme ayant besoins de fortes améliorations. « Par rapport aux autres

BRIC, le degré d’ouverture au commerce international du Brésil est relativement faible et

davantage d’IDE et de stimulation des échanges commerciaux sont nécessaires. En outre alors

que de récentes découvertes d’un nouveau gisement pétrolier représentent un boom

économique, la croissance su pays est trop dépendante des matières premières(…). Enfin, et

peut être plus important encore, le rôle du gouvernement doit diminuer. » . Enfin, nous

pouvons remarquer que le développement de nouveaux pays à pousser certains économistes à

former de nouveaux acronymes et ainsi à élargir le groupe des BRIC. Par exemple,

l’acronyme BRICM prend en considération le développement du Mexique, ou encore

BRICET intègre la Turquie et l’Europe de l’Est au précédent groupe

Nous comprendrons, pour les besoins de notre recherche, l’acronyme BRIC au sens strict du

terme : Brésil, Russie, Inde et Chine. Notre travail portera sur cet ensemble de pays bien que

certaines critiques aient été formulées et d’autres pays émergents se soient imposés ces

dernières années.

18 Jim O’Neil « Les BRIC nouvelles grandes puissances dans le futur ? »

Page 19: La stratégie d'internationalisation du groupe ACCOR

12

C- Les BRIC : zone à fort potentiel pour l’industrie hôtelière internationale.

Les principaux groupes hôteliers mondiaux concentrent désormais leurs développements sur

les zones émergentes. En quoi les économies émergentes constituent-elles de réels relais de

croissance pour l’industrie hôtelière internationale ? Tout d’abord, ces nouveaux marchés

s’imposent en tant que nouvelles destinations du tourisme international et nous observons un

réel changement dans la structure des flux touristiques. D’après le baromètre du tourisme

mondial publié par l’Organisation mondiale du tourisme (OMT), les arrivées de touristes

internationaux auraient augmenté de 7% au cours du premier semestre 2010. Cette croissance

est fortement tirée par les régions de l’Asie Pacifique ( + 10%) et de l’Afrique ( +7%). La

reprise a été plus lente en Europe ( +3%) et en dans les Amériques ( +3%). Le tableau ci-

dessous fait ainsi apparaître un changement majeur dans la structure des flux touristiques sur

la décennie 2000-2010. En effet, l’Europe et les Amériques voient leurs arrivées de touristes

internationaux diminuer contrairement aux régions d’Asie Pacifique, d’Afrique et du Moyen

Orient.

Titre : Arrivées de touristes internationaux par sous régions

Année (en millions) Part (en %)

2000 2005 2008 2000 2005 2008

Monde 639 808 922 100 100 100

Europe 388,2 443,9 488,5 57,5 54,9 53

Asie et

Pacifique

111,4 158,2 184,1 18,2 18,5 20

Amériques 128,2 133,1 147,1 18,6 18,5 16

Afrique 28,2 38,7 46,9 5,4 4,5 5,1

Moyen

orient

25,2 38,4 55,1 3,7 4,8 6,0

Source : Organisation mondiale du tourisme ; d’après les données de l’OMT Octobre 2006 et 2009. ( unités :

millions et %)

Page 20: La stratégie d'internationalisation du groupe ACCOR

13

D’autre part, l’émergence des classes moyennes laissant la place à une nouvelle clientèle ainsi

que la structure du marché hôtelier sur ces marchés en font des zones à fort potentiel pour

l’industrie hôtelière internationale. Initialement concentrés sur leurs marchés domestiques, les

groupes hôteliers ont cherché à conquérir ces nouvelles régions. La Chine apparaît ainsi

comme un véritable terrain de lutte d’influence. Selon la société Xerfi19, le fort potentiel de

croissance observé dans les BRIC est directement lié à l’existence de deux variables : la

croissance du tourisme international dans ces régions et la faible part de marché détenue par

l’hôtellerie de chaîne sur ces marchés.

Les leaders hôteliers de l’année 201020 ont ainsi cherché à intensifier leur présence dans les

BRIC. IHG possède un réseau d’une centaine d’hôtels en Chine dans les régions côtières et

prévoit de renforcer sa présence sur ce marché en se développant dans les terres. Ce groupe

s’implante également en Inde avec la création de 31 nouvelles propriétés d’une capacité

totale de 7600 chambres et en Russie où le plus grand hôtel Holiday Inn devrait voir le jour

en 2014.21 La chaîne hôtelière Wyndham Hotel Group, actuellement numéro 2 mondial22,

triple son réseau hôtelier et lance la marque « Wyndham Hotel and resorts » en Chine23. En

outre, le rôle économique des BRIC se traduit par des parcs hôteliers de plus en plus étoffés.

La Chine abrite ainsi le deuxième parc hôtelier mondial, la Russie et le Brésil enregistrent un

grand nombre d’ouvertures annuelles que ce soit sur le segment du haut de gamme ou

économique. Le graphique ci-dessous illustre l’accroissement de la capacité hôtelière au

niveau mondial et souligne l’importance des pays émergents dans la croissance de l’offre

hôtelière globale.

19 Xerfi “World hotel groups” 20 Document annexe classement 2010 des groupes hôteliers mondiaux – MKG hospitality 21 Site corporate IHG 22 MKG hospitality, « 16ème classement hôtelier mondial des groupes hôteliers et de leurs enseignes », Communiqué de presse le 18 juin 2010 23 Site corporate Wyndham Hotel Group

Page 21: La stratégie d'internationalisation du groupe ACCOR

14

Titre : offre hôtelière globale par continent

Source : base de données MKG hospitality Mai 2010

L’identification des caractéristiques propres à chaque marché hôtelier sur l’ensemble de pays

BRIC Brésil Russie Inde Chine permettra de déterminer le potentiel possible pour le

développement des chaînes hôtelières dans ces régions. Le Brésil est le troisième pays par sa

taille et sa population en Amérique et s’impose comme la onzième économie mondiale.

L’expansion de l’économie brésilienne réussit au tourisme d’affaires et le potentiel de

développement est important pour l’hôtellerie. La Chine, quant à elle, devrait s’imposer

comme la première destination touristique mondiale à l’horizon 202024. De plus, ce marché

est dominé par des hôteliers indépendants et l’économie chinoise est en plein essor combinant

forte croissance économique et entrée à l’OMC. Depuis son entrée dans l’OMC en 2001, la

Chine poursuit des politiques favorables aux IDE. Les jeux Olympiques de Pékin en 2008

ainsi que l’exposition universelle en 2010 ont contribué à l’expansion rapide du parc hôtelier

Chinois. D’ici à 2020, l’OMT prévoie que la Chine deviendra la première destination

touristique comptant 130 millions d’arrivées. Le développement rapide du marché touristique

chinois a permis le développement de l’industrie hôtelière. En effet, l’industrie hôtelière

24 Prévisions OMT 2010

Page 22: La stratégie d'internationalisation du groupe ACCOR

15

chinoise est passée de 137 hôtels comprenant 15539 chambres en 1978 ( Pine et Philips 2005)

à 5200 hôtels ayant une capacité totale de 700000 chambres ( CNTA 2008). L’organisation

mondiale du tourisme estime que la Russie pourrait faire partie des 10 pays les plus visités au

monde à l’horizon 2020 et accueillir jusqu’à 40 millions de touristes par an, sous réserve d’un

développement approprié des infrastructures. L’effondrement de la Russie Soviétique en 1991

a marqué le début d’un processus de changement dans le système de propriété de l’industrie

hôtelière. Avec l’effondrement de la Russie Soviétique, nous sommes passés d’un marché

hôtelier complètement cloisonné et géré détenu par l’état à un marché laissant la place à de

grandes opportunités pour l’industrie hôtelière internationale. Aujourd’hui, la demande en

logement hôtelier reste cependant supérieure à l’offre disponible et le réseau trois étoiles sous

développé. Le marché hôtelier en Inde est caractérisé par un fort décalage entre l’offre et la

demande. En effet, la forte augmentation du nombre de voyageurs touristiques et d’affaires

constitue un réel défi pour les autorités indiennes car la demande des chambres d’hôtels de

qualité surpasse l’offre. Selon le ministère du tourisme indien environ 700000 chambres sont

nécessaires dans les prochaines trois années pour faire face à la demande. Les conséquences

de ce manque de capacité sont directement visibles : le taux d’occupation dans les principales

chaînes d’hôtels atteint environ 80%25. Les grandes chaînes hôtelières s’établissent

principalement par le biais d’accords de partenariat, permettant d’être présents sur le marché

indien. Par exemple, Hyatt Regency avec AHL, ou Sheraton ITC avec ITCH. De plus en plus

de chaînes d’hôtels internationales, telles que Best Western, Comfort Inns, Holiday Inn,

choisissent de s’implanter en Inde par le biais de franchises. Le groupe ACCOR est présent en

Inde par l’intermédiaire de deux joint ventures : avec interglobe pour le développement du

réseau Ibis et avec le groupe EMAAR properties pour le développement d’hôtels formule 1.

Cependant, il convient de nuancer ce fort attrait de l’industrie hôtelière internationale pour les

BRIC. En effet, le marché hôtelier reste fortement concentré avec 80% de l’offre mondiale en

chambre située dans les vingts pays les plus riches26. Les Etats-Unis constituent ainsi le

marché le plus large détenant à lui seul 25% de la capacité hôtelière mondiale. De plus, la

stratégie des principaux groupes hôteliers internationaux reste centrée sur les marchés

domestiques.27

25 Ubifrance “Note de synthèse: le marché du tourisme en Inde” 2010 26 Xerfi world hotel group market analysis – corporate strategies july 2010 27 Document annexe : les leaders hôteliers mondiaux restent centrés sur leurs marchés domestiques

Page 23: La stratégie d'internationalisation du groupe ACCOR

16

Section 2 : La refonte des objectifs de ACCOR : d’un marché privilégié à

la conquête des BRIC

Si comme on l’a vu précédemment les BRIC présentent de nombreuses opportunités pour les

groupes hôteliers, toutefois tous les groupes hôteliers ne se sont pas lancés dans cette

aventure. ACCOR se distingue de ses concurrents par son fort degré d’internationalisation et

sa capacité à cibler ces nouvelles régions économiques émergentes. Bien qu’encore concentré

sur son marché domestique id est l’Europe, cette multinationale française a cherché à intégrer

les BRIC à sa stratégie d’entreprise. Cette section posera la question de l’intégration des

BRIC à la stratégie d’internationalisation du groupe. Dans quelle mesure pouvons-nous

affirmer que les BRIC sont devenus un axe de développement stratégique pour le groupe ?

Comment l’intégration des BRIC à la stratégie d’internationalisation a-t-elle été réalisée ?

A- Un développement en cercles concentriques

Les stratégies d’internationalisation des firmes se réalisent en général de façon concentrique

c'est-à-dire par tâches géographiques et par diffusion progressive d’activités en dehors du

territoire national. Au début du processus d’internationalisation, les unités implantées à

l’étranger restent très concentrées autour du territoire national, puis le processus se diffuse au-

delà des pays de proximité pour prendre une ampleur plus internationale. Ainsi,

l’internationalisation du groupe ACCOR s’est d’abord réalisée en Europe et cette zone

constitue encore aujourd’hui un marché privilégié. L’extension géographique s’est longtemps

limitée à l’Europe pour des raisons de proximité, de contrôle des marchés, du fait de la quasi-

absence de concurrence et d’une clientèle ciblée proche de la clientèle française. Virginie Luc

souligne le caractère naturel et presque évident de ce développement sur les marchés

européen : « Dès 1969 avec l’ouverture du troisième Novotel, Gérard Pélisson et Paul

Dubrule songent à se développer au-delà des frontières françaises. Tout naturellement les

Page 24: La stratégie d'internationalisation du groupe ACCOR

17

deux hommes se tournent vers l’Europe »28. Le groupe entreprend ainsi une première

diversification géographique dès 1972 avec l’apparition de quelques hôtels en Belgique et en

Suisse. La période 1976 – 1979 voit la confirmation de cette stratégie d’internationalisation

avec le début des activités en Afrique, au Moyen Orient et en Amérique du Sud. L’Afrique

francophone en raison des liens commerciaux entretenus avec la France fût de même parti de

la première étape de l’internationalisation du groupe (mis en évidence par le rapport DAFSA

« ACCOR »).

D’autre part, l’étude des rapports annuels et de l’histoire du groupe ACCOR a mis en

évidence l’ouverture d’esprit internationale des fondateurs ainsi qu’une évolution de la

stratégie du groupe au fur et mesure des internationalisations. Si à ses débuts

l’internationalisation relevait plus du bricolage, aujourd’hui elle est considérée comme un

pilier faisant parti des objectifs stratégique. Les débuts de l’internationalisation du groupe sont

ainsi relatés dans la « bible de l’entreprise »29: « Sans vraiment de stratégie et avec les moyens

du bord, ils partent forts de leur audace, explorer et déchiffrer de nouveaux territoires (…)

faute de moyens ce sont essentiellement des copains d’école bénévoles qui font office de

développeurs au gré de leurs réseaux de connaissances ». De même, Paul Dubrule dans

l’ouvrage de Virginie Luc revient sur cette première phase de l’internationalisation du

groupe : « Nos premiers pas internationaux étaient plus proches du bricolage que de la

stratégie bien mûrie. Nos partenaires le plus souvent des amis travaillaient gratuitement.

Chacun s’improvisait entrepreneur armé seulement de son enthousiasme. Nous effectuions

nos choix au fil des hasards sans aucune étude rationnelle ni programme établi. Enfin nous ne

disposions pas d’une connaissance suffisante des pays d’accueil. Nous aurions du prendre

conseil auprès de partenaires autochtones et mieux nous imprégner de chaque culture. »30

Le groupe ACCOR s’est ainsi progressivement construit en dehors du territoire national

jusqu’à devenir leader européen et cinquième groupe hôtelier mondial. Aujourd’hui, cette

multinationale est présente dans plus de 90 pays et sur l’ensemble des cinq continents.

28 Luc Virginie, Impossible n’est pas français : l’histoire inconnue d’ACCOR, leader mondial de l’hôtellerie, 1998, Paris, A.Michel 29 p 31 « ACCOR l’aventure du possible 1967 – 2007 » Cherche Midi 30 Impossible n’est pas français L’histoire inconnue d’ACCOR, leader mondial de l’hôtellerie. Virginie Luc Albin Michel

Page 25: La stratégie d'internationalisation du groupe ACCOR

18

B- La formulation d’une nouvelle vision stratégique

Le groupe ACCOR a cherché à prendre en compte dans sa stratégie d’internationalisation

l’émergence des BRIC. Si l’Europe a de tout temps constitué le marché privilégié de ce

groupe, toutefois les BRIC sont aujourd’hui les vrais relais de la croissance. Ces derniers

apparaissent dans les objectifs stratégiques fixés et clairement énoncés par le groupe31.

L’étude des rapports annuels du groupe sur la période 2000 – 2010 montre comment les BRIC

sont passés de territoires quasi – inconnus à la promesse d’un véritable Eldorado. Le rapport

annuel d’activité 2000 du groupe fait apparaître la priorité donnée au marché européen. Ainsi

le groupe réalise 90% de ses investissements en Europe et dans les grandes métropoles32. De

même, son activité se concentre à plus de 50%33 en France et en Europe id est sur son marché

d’origine. En 2003, une nouvelle orientation stratégique est choisie et pour la première fois, il

est fait référence claire à l’opportunité que peuvent représenter les BRIC dans le rapport

annuel d’activité du groupe : « Le tourisme mondial devrait connaître d’ici à 2020 la plus

forte hausse de son histoire avec l’émergence de marchés tels que la Chine, l’Inde ou la

Russie. Ces nouveaux marchés constituent pour ACCOR un potentiel de développement

considérable »34. La projection stratégique du groupe pour l’échéance 2015 implique des

changements significatifs et définit les BRIC comme priorité stratégique. Trois objectifs ont

été fixés pour 2015 par la direction du groupe35: conforter la place de premier opérateur

hôtelier mondial, renforcer la position de leader de la franchise en Europe, accélérer le rythme

de développement dans les pays émergents afin de devenir l’un des trois leaders mondiaux de

l’hôtellerie. L’analyse de la présence de ACCOR dans le monde et des projet d’ouverture à

l’échéance 2015 confirme la priorité donnée par ce groupe aux BRIC.36

31 On retrouve cet objectif sur le site corporate du groupe, le rapport annuel d’activité et les documents servant de support à la communication du groupe (communiqués de presse, brochure institutionnelle…) 32 Rapport annuel d’activité du groupe année 2000 33 Rapport annuel d’activité du groupe année 2000 34 Message des co-présidents Mr Dubrule et Mr Pelisson rapport annuel d’activité du groupe 2003 35 Rapport annuel d’activité ACCOR 2010 36 Document Annexe « Panorama de la présence d’ACCOR dans les BRIC »

Page 26: La stratégie d'internationalisation du groupe ACCOR

19

C- L’analyse SWOT appliquée au groupe ACCOR

L’analyse SWOT ou strengths-weaknesses-opportunities-threats, outil d’analyse stratégique,

combine l’étude des forces et faiblesses d’une organisation avec celle des opportunités et

menaces de son environnement afin d’aider à la définition d’une stratégie de développement.

L’objectif de l’analyse est de prendre en compte à la fois des facteurs internes et externes, en

maximisant les potentiels des forces et des opportunités en minimisant les effets des faiblesses

et menaces. Cette analyse appliquée au groupe ACCOR identifie les BRIC comme de

nouvelles opportunités permettant de mieux tirer profit des ressources.

Titre : Analyse SWOT du groupe ACCOR

Strenghths

- Leader européen de l’hôtellerie classé

dans le top 10 Mondial

- Une présence sur tous les continents

- Des Modes de gestion variés dans le

domaine de l’hôtellerie

- Un fort positionnement sur le

segment économique

Weaknesses

- Une activité cyclique et dépendante

de la conjoncture économique et

sociale.

Opportunities

- Un fort potentiel de développement

de l’hôtellerie dans les pays

émergents et plus spécifiquement : le

Brésil, l’Inde, la Chine

- Le redémarrage du tourisme des

affaires

- Le dynamisme de l’hôtellerie

économique

- Une stratégie de pure player de

l’hôtellerie.

Threats

- Une concentration du secteur avec la

montée en puissance des grands

groupes hôteliers

- Une forte tension géopolitique dans

certaines régions du monde

Source : réalisée par Mlle Florence Ory sur la base des rapports d’activités du groupe, de l’étude Xerfi 2009

« world hotel groups », étude DAFSA

Page 27: La stratégie d'internationalisation du groupe ACCOR

20

Cette importance accordée aux pays émergents est également confirmée par les propos tenus

par Mr Denis Hennequin, directeur général du groupe, dans le rapport annuel d’activité

2010 : « Nous densifierons notre réseau à l’international en nous concentrant sur les pays

émergents à très forte croissance. Je pense à la Chine, à l’Inde, ou encore au Brésil, où la

demande liée à l’émergence d’une puissante classe moyenne est très dynamique. »

Page 28: La stratégie d'internationalisation du groupe ACCOR

21

Chapitre 2 : La mise en œuvre d’une stratégie de multinationalisation

On l’a vu, les BRIC constituent de nouveaux relais de croissance pour la multinationale

ACCOR. Cette dernière recherche à travers la mise en place de cette stratégie de

multinationalisation à profiter de nouvelles opportunités, de meilleures conditions d’offre et

de demande. Notre ambition sera par conséquent de fournir des fondations théoriques

nécessaires à la compréhension de l’internationalisation du groupe hôtelier ACCOR. Dans

quelle mesure les modèles théoriques économiques nous permettent – ils d’appréhender

l’internationalisation des chaînes hôtelières ? Cette partie présentera ainsi une évaluation

critique de littérature économique sur l’internationalisation des firmes.

Section 1 : ACCOR ou la difficile internationalisation d’une entreprise de

service

A- L’hôtellerie : un développement international complexe

L’activité hôtelière du groupe ACCOR est comprise par l’analyse économique comme une

activité de service par conséquent difficilement internationalisable en raison de ses

caractéristiques intrinsèques. En effet, les activités de service n’ont pas encore atteint un stade

de multinationalisation aussi intense que les activités manufacturières. La recherche sur le

développement international de ces activités se situe encore à un stade préliminaire. Les

services peuvent être ainsi définis comme « une activité qui procure une valeur d’usage sans

se traduire par la création d’un nouveau bien matériel »37.Quatre caractéristiques permettent

de définir un service : l’intangibilité, l’hétérogénéité, la périssabilité, la simultanéïté de la

production et de la consommation. Lovelock (note) va plus loin et identifie huit

caractéristiques propres au service qu’il est important de prendre en compte affirme –t-il avant

d’évaluer le potentiel de globalisation :

- une plus grande participation du consommateur dans le processus de production

- la participation des personnes au produit final

- de plus grandes difficultés à maintenir le contrôle de qualité

- de plus grandes difficultés pour le consommateur à évaluer le produit final

- l’importance du facteur temps

- la structure et la nature de la chaîne de distribution

37 J.Brémond A.Gélédan « Dictionnaire des sciences économiques et sociales » 2002, Paris, Editions Belin

Page 29: La stratégie d'internationalisation du groupe ACCOR

22

- l’absence d’inventaires

Les réflexions sur l’internationalisation des services ont commencé dans les années 1970 par

mettre en avant les spécificités des services et en particulier l’interaction client/ fournisseur et

la simultanéité production/ consommation. Ces travaux concluaient par conséquent à un

caractère largement local des activités de services. Aujourd’hui, la réflexion sur

l’internationalisation des services a évolué et les services représentent une part importante du

commerce international.

B- Quels sont les avantages recherchés lors de l’internationalisation ? Pour quelles raisons les multinationales de l’industrie hôtelière internationale cherchent-elles

activement à internationaliser leurs activités ? Plusieurs auteurs ont cherché à répondre à cette

question voyant dans l’internationalisation une source de performance pour l’entreprise mais

pas seulement.

Premièrement, bien que certains auteurs aient affirmé l’existence d’un lien entre

internationalisation et performance d’une firme, ceci n’est pas si évident. Près d’une centaine

de travaux ont été consacrés à l’étude de la relation entre internationalisation et performance

sans pour autant parvenir à un résultat unique. La relation internationalisation-performance

fait toujours débat. Face à cette situation, Contractor, Kundu et Hsu proposent, dans « A three

stage theory of international expansion : the link between multinationality and performance in

the service sector” publié dans la revue journal of International Business, une thèse selon

laquelle l’impact de l’internationalisation sur la performance est de nature curvilinéaire. Cet

impact est ainsi négatif aux faibles degrés d’internationalisation, positif aux degrés

d’internationalisation modérés et négatifs aux forts degrés.

D’autres avantages provenant de l’adoption d’une stratégie de diversification ont également

été identifiés tels que :

- Suivre les consommateurs : les multinationales se développent sur des marchés

internationaux afin de proposer à leurs clientèles leurs services et de développer leur

fidélisation

- Obtention d’une exposition sur les marchés :

- Exploitation des ressources

- Une protection économique : en se développant sur les marchés internationaux les

firmes hôtelières cherchent à se protéger des risques. Ainsi, les profits générés sur un

Page 30: La stratégie d'internationalisation du groupe ACCOR

23

marché particulier peuvent servir à se prémunir contre les pertes générées sur un autre

marché

- Recherche d’une maximisation du profit.

Cependant, nous devons rappeler que le lien entre internationalisation d’activités de service et

performance a souvent été contesté en raison de la plus grande sensibilité des activités de

service aux différences culturelles. De plus, les activités de service sont parfois plus

réglementées. Enfin, la production et la consommation se réalisant en même temps, cela

impose une plus forte présence locale.

C- L’internationalisation des firmes : apports théoriques

La compréhension de la stratégie de développement international nécessite une approche

pluridisciplinaire associant les apports de différents champs. Quels sont les modèles

théoriques existant permettant d’appréhender la notion d’internationalisation ? Les théories du

commerce international s’inscrivant dans la lignée des théories de l’avantage absolu d’Adam

Smith et de l’avantage relatif de Ricardo peuvent être mobilisées. Elles soulignent

l’importance des avantages respectifs dont disposent les différents espaces économiques. Les

nouvelles théories du commerce international remettant en cause la spécialisation

internationale et l’immobilité des facteurs expliquent également la décision

d’internationalisation. Néanmoins, dans le cadre de cette étude, nous nous appuierons plus

particulièrement sur les nouvelles théories de la multinationalisation. La théorie économique

et des organisations a fourni plusieurs modèles explicatifs de l’internationalisation des

entreprises. Ceux – ci ont permis notamment de mieux identifier les principaux facteurs qui

conduisent les entreprises à s’engager dans une stratégie de développement international.

Parmi ces modèles beaucoup expliquent le processus d’internationalisation par le biais de

facteurs internes à l’entreprise. C’est le cas tout d’abord de la théorie des avantages

spécifiques ou monopolistiques de Hymer. Ce dernier énonce le paradoxe suivant : comment

une firme qui s’implante à l’étranger et subit de ce fait des coûts de délocalisation de sa

production peut rester compétitive face aux entreprises locales qui produisent sur leur propre

marché et ont une meilleure connaissance de l’environnement ? Pour Hymer, une firme

s’implante à l’étranger pour exploiter des avantages spécifiques de différents ordres :

technologiques, ressources en capitaux, économie d’échelle. De même, la théorie éclectique

ou le paradigme OLI raisonne à partir de facteurs propres à l’entreprise afin d’en expliquer

son internationalisation. Ce modèle propose une explication des choix de déploiement

international des firmes. Ce choix est ainsi fonction de la présence ou non des avantages

Page 31: La stratégie d'internationalisation du groupe ACCOR

24

spécifiques de la firme (ownership), avantages spécifiques des pays ( localisation), avantages

de l’internalisation ( internalisation). Le modèle d’Uppsala ou également

l’internationalisation par étapes ( modèle développé par Johanson et Vahlne) explique

l’internationalisation de la firme à partir de deux concepts. Premièrement, ce modèle repose

sur la distance psychologique prenant en compte l’ensemble des différences culturelles et

linguistiques qui influent la prise de décision dans les transactions internationales. Enfin, le

processus d’apprentissage explique que l’expérience des marchés étrangers s’acquiert

progressivement selon un processus séquentiel. Cependant, d’autres approches se sont

développées récemment et justifient l’internationalisation des entreprises par les relations

qu’elles entretiennent les unes avec les autres. Ainsi, les contraintes du marché se trouvent au

cœur de l’internationalisation de l’entreprise. Selon la théorie de la réaction oligopolistique,

énoncée par Knickerbolker, lorsque dans un secteur présentant une structure oligopolistique,

une entreprise dîtes leader de l’oligopole s’implante à l’étranger dans le but de modifier à son

avantage la structure du marché, par réaction les autres entreprises du secteur imitent le leader

en investissant elles aussi à l’étranger. Par ailleurs un autre modèle explique

l’internationalisation par l’existence d’externalités positives. Ces externalités apparaissent dès

lors qu’une zone géographique donnée acceuille suffisamment d’entreprises du même secteur

pour que des économies d’échelles externes apparaissent.

Enfin, nous pouvons observer que certaines études spécifiques à l’internationalisation des

services ont été menées et bien que n’ayant pas donné lieu à l’établissement de modèles

économiques, elles sont susceptibles de nous fournir de précieux indicateurs. En effet, l’étude

sur les services menée en 1993 pour le compte des Nations Unies a analysé les facteurs

considérés comme important par les firmes multinationales lors d’opérations internationales.

(note). Neuf facteurs furent identifiés : la taille du marché, la distance culturelle, la politique

du gouvernement du pays d’accueil, le degré de concentration, la réaction oligopolistique, les

avantages spécifiques, la présence de l’entreprise sur le marché, the tradability of service

industry, la taille de l’entreprise et sa croissance.

Page 32: La stratégie d'internationalisation du groupe ACCOR

25

Section 2 : Une application du modèle OLI à l’internationalisation de l’industrie hôtelière Les travaux de Dunning et McQueen38 ont permis de théoriser et expliquer la démarche

d’internationalisation des grands groupes hôteliers mondiaux. En effet, La théorie éclectique

constitue un modèle de référence pour expliquer les raisons de l’internationalisation des

firmes multinationales. Les travaux de John H Dunning et Mattew Mcqueen démontre la

pertinence de l’utilisation du modèle OLI dans la définition de l’internationalisation de

l’industrie hôtelière. En nous appuyant sur ces travaux, nous dégagerons les avantages

compétitifs majeurs dont disposent les groupes hôteliers lors de leur expansion géographique.

Comment les chaînes hôtelières perçoivent elles leurs avantages compétitifs face à leurs

concurrents mondiaux et aux hôteliers locaux « indigenous hotel operators » ? Le paradigme

OLI, modèle théorique majeur concernant l’internationalisation des firmes, fût créé pour

appréhender les enjeux du secteur industriel. Appliqué par la suite à plusieurs secteurs, il

constitue le socle de l’étude de Dunning et MacQueen sur l’industrie hôtelière internationale

conduite pour l’UNCTC39en 1970. Selon ce modèle, trois conditions sont nécessaires à la

réalisation de l’internationalisation de la firme : l’avantage spécifique ou Ownership, la

localisation ou Localisation, et l’internalisation Internalization. Le choix de l'investissement

direct à l'étranger sera effectué lorsque la firme réunira simultanément les trois types

d'avantages

A- L’avantage spécifique : L’avantage spécifique se définit par la possession d’actifs par l’entreprise susceptibles d’être

exploités de manière rentable à une échelle relativement large40. Colin Johnson41 identifie

différents avantages spécifiques naturels ou structurels dont dispose les compagnies hôtelières

internationales comme la capacité de prévoir quels sont les produits ou services dont ont

besoins les visiteurs, où et comment peuvent-ils être fournis ( géographiquement et en terme

de segmentation de marché), comment le service peut – il être fourni de la façon la plus

efficace. Concernant les avantages structurels, certains groupes hôteliers peuvent tirer profit

de la taille de la compagnie et de sa capacité à obtenir des économies d’échelle. L’expérience

internationale peut également se révéler être un atout. En effet, la connaissance des marchés

38 John H Dunning, Mattew Mcqueen “ The Eclectic theory of international production : A case study of the international Hotel industry” Managerial and decision Economics, Vol 2, N°4 39 The United Nations Centrer on Transnational Corporations 40 Onofre Martorrel Cunnil 41 Colin Johnson « Locational strategies of international hotel corporations in eastern central Europe”2002

Page 33: La stratégie d'internationalisation du groupe ACCOR

26

internationaux et des cultures différentes confère un avantage décisif dans la compétition face

aux entreprises n’opérant que sur un seul marché. La détention d’avantages comportementaux

a été rendu nécessaire par la restructuration de l’industrie hôtelière provoquée par la

globalisation des marchés. La mise en place d’un système global de distribution et d’un

système de réservation informatisé se sont avérés être d’une importance capitale. Rapidement,

les groupes hôteliers internationaux ont acquis des avantages compétitifs face aux hôteliers

indépendants identifiés par Dunning et MacQueen42 comme :

- une plus grande expertise dans le domaine du marketing, notamment dans le

management de la marque et la connaissance des besoins des consommateurs

- une expertise plus poussée dans le domaine des ressources humaines et de la finance

- des capacités technologiques. Par exemple, la mise en place d’un système de

réservation centralisé

- Des économies d’échelle

- des opportunités concernant la création d’un réseau de propriétés.

D’autre part, ces auteurs rappellent l’importance des investissement en terme d’éducation

dans ces pays. En effet, l’éducation permet aux multinationales du secteur hôtelier de

maintenir la qualité facteur essentiel de l’image de marque.

B- Localisation :

Les avantages liés à la localisation peuvent être définis comme les facteurs rendant la

localisation attractive pour les compagnies hôtelières internationales. Il existe différentes

catégories de localisations :

- la localisation majeure ou ville majeure (« gateway cities »). Kleinwort Benson Securities a

dénombré au total 13 « gateway cities » dans le monde dont 10 aux Etats-Unis. Les trois

mégalopoles Paris, Londres, et Tokyo sont également élevées au rang de villes majeures.

- la ville primaire est caractérisée par une activité industrielle et commerciale

- la ville secondaire est caractérisée par une demande signifiante en terme d’hôtellerie

- la catégorie « ville tertiaire » regroupe villages et campagnes

De plus, d’autres facteurs peuvent se révéler attrayants pour les groupes hôteliers mondiaux.

Ils sont similaires à ceux identifiés par des firmes se développant sur d’autres secteurs de

l’activité économique et souhaitant investir sur des marchés étrangers. J.H Dunnning and M.

Mcqueen nous donnent un aperçu de ces facteurs regroupés en plusieurs catégories :

42 John h. Dunning Matthew Mcqueen “The Eclectic Theory of International Production : A case study of the International Hotel Industry” Managerial and Decision Economics Vol 2 n°4

Page 34: La stratégie d'internationalisation du groupe ACCOR

27

- la taille, la croissance et le niveau de développement du marché touristique dans le pays

d’accueil

- les infrastructures du pays

- la politique du gouvernement du pays d’accueil dans le domaine des investissements directs

à l’étranger

- le nombre et la spécificité des attractions touristiques

- la stabilité économique et politique du pays d’accueil

- la distance culturelle et psychologique entre le pays originaire et le pays d’accueil

C- Internalisation :

Elle permet d’éviter les coûts associés aux transactions entre sociétés indépendantes, coûts

liés à la passation des contrats et à la garantie de la qualité. Deux tendances majeures

concernant le choix du mode d’entrée des compagnies internationales hôtelières à

l’étranger existent: la fusion et acquisition ou le choix de modèles à faible intensité

capitalistique ou non equity models . Le tableau ci-dessous permet de récapituler les

caractéristiques de modèle OLI appliqué à l’internationalisation de l’industrie hôtelière et d’en

donner une vision plus concrète.

Titre : Application de la théorie OLI aux principal es variables déterminant l’extension et la structuration à l’étranger d’un échantillon de 17 grandes chaînes hôtelières

Avantage spécifique

(ownership) Avantage à la localisation

(location) Avantage à l’internalisation

(internalisation) Connaissance des goûts et

des clients de la zone d’origine

Image de marque de la

société mère

Maîtrise des investissements en matière de formation

Accès à un référencement

dans un système de réservation

Taille et taux de croissance du pays d’accueil

Potentiel touristique

Qualité et importance de l’infrastructure hôtelière

locale

Stabilité économique sociale et politique

Contrôle qualité

Capacité de coordination de la société mère

Mise à profit de l’expérience

internationale

Minimisation des coûts de transaction

source : « Stratégies d’internationalisation : développement international de l’entreprise « Jean – Paul Lemaire avec la collaboration de Gérard Petit p 100

Page 35: La stratégie d'internationalisation du groupe ACCOR

28

Partie 2 : Les enjeux de la détermination d’une modalité d’entrée

dans les BRIC L’ouverture des économies émergentes et la création de zones de libre-échange ont permis

l’émergence de nouvelles opportunités de marché et influencé la globalisation des marchés.

Lorsque les firmes cherchent à profiter de ces opportunités et à entrer sur les marchés

étrangers, elles font appel à divers processus. L’entreprise connaissant les avantages et

inconvénients de ces diverses stratégies doit décider d’un mode d’entrée. Cette partie a pour

objectif la compréhension de la stratégie de développement de ce groupe français dans les

BRIC. Nous identifierons ainsi les difficultés et les bonnes pratiques mises en œuvre par

ACCOR. Nous nous appuierons ainsi sur des savoirs théoriques et pratiques. Existe-t-il un

mode d’entrée spécifique mis en place par l’entreprise ACCOR dans les BRIC lui permettant

de profiter du potentiel de ces régions ? A quels critères répond le choix de ce mode

d’entrée ?

Chapitre 1 : L’identification des différentes stratégies d’entrée possibles pour le groupe ACCOR

L’entrée sur les BRIC ne s’improvise pas mais au contraire constitue un élément central de la

stratégie du groupe ACCOR et plus largement des firmes multinationales. Comment les

firmes négocient-elles impératifs stratégiques et modes d’implantation ? Il s’agira de

comprendre comment le groupe ACCOR a réussi à entrer sur ces nouveaux marchés pourtant

caractérisés par leur fort degré de complexité. Cette partie apportera des éléments de réflexion

relatifs au choix de la stratégie d’implantation tout en examinant les spécificités liées à son

contexte.

Section 1 : Les modalités d’entrée propres à l’industrie hôtelière internationale

Une large palette de modalités s’offre aux chaînes hôtelières souhaitant entrer dans les BRIC.

Néanmoins, il est important d’élire une modalité d’entrée permettant adaptation à la

complexité de ces marchés. Les alliances stratégiques apparaissent comme le mode d’entrée le

plus adéquat et le plus fréquemment utilisé.

Page 36: La stratégie d'internationalisation du groupe ACCOR

29

A- Quels enjeux ? Lorsque les firmes hôtelières cherchent à profiter des opportunités et à entrer sur les marchés

étrangers, elles font appel à différents modes d’entrée. Le choix de cette modalité d’entrée sur

un marché étranger comporte de nombreux enjeux et fait intervenir un arbitrage entre

ressources, engagement, volonté de contrôle de l’organisation43. Nous pouvons dégager quatre

enjeux liés au mode d’approche à l’étranger :

- Le niveau d’engagement à consentir en fonction des ressources de l’entreprise

(financières, techniques, humaines…)

- Le niveau de contrôle exigé par les dirigeants ainsi que celui des risques supportés

dans les différents contextes abordés. Nous pouvons remarquer que le niveau de

contrôle est corrélé au niveau d’engagement dans la mesure où les dirigeants acceptent

difficilement de consentir des investissements sans bénéficier d’un niveau de contrôle,

d’influence correspondant

- Le développement des complémentarités ou la réduction des antagonismes

susceptibles d’être générés entre les structures délocalisées et le siège

- Prendre en compte l’importance des choix effectués et leurs implications futures

C’est en fonction de ces paramètres et de ces enjeux que l’entreprise choisit un mode d’entrée

spécifique.

B- Les Avantages et inconvénients

Plusieurs solutions s’offrent ainsi aux firmes hôtelières désireuses de pénétrer un nouveau

marché. Néanmoins, nous pouvons noter dès à présent que l’industrie hôtelière internationale

a démontré dès sa création une nette préférence pour les modes d’expansion non capitalistique

qui lui permettent de transférer son expertise plus facilement mais également d’exercer un

contrôle assez conséquent et de maîtriser le risque. Faouzi Bensebaa44 identifie trois modes

d’entrée pertinents pour les groupes hôteliers sur les marchés internationaux. Il décrit ainsi les

avantages et inconvénients propres à chacune de ces stratégies. Le premier mode d’entrée à

savoir l’exportation fournit peu de contrôle sur le pays hôte et ne peut être considéré comme

une option viable en matière de services. L’investissement direct, quant à lui, permet aux

firmes d’exercer un contrôle local total, une appropriation des profits et débouche sur des taux

43 Gerry Johnson, Kevan Scholes, Richard Whittington, Stratégique , 2008, Paris, Pearson Education France 44 « Alliances et processus de croissance internationale des firmes : le cas de l’hôtellerie » Xième Conférence de l’association Internationale de Management stratégique 13-14-15 juin 2001

Page 37: La stratégie d'internationalisation du groupe ACCOR

30

de pérennité significatifs. Cependant, ce mode d’entrée se révèle coûteux notamment quand la

firme reproduit une entité complète et entraîne des risques politiques et financiers. La

constitution d’alliances, troisième mode d’entrée identifié par Bensebaa, vise à rapprocher des

firmes parfois concurrentes dotées d’actifs et de ressources complémentaires. Cet auteur note

que l’on a assisté cette dernière décennie à la multiplication des alliances stratégiques dans le

secteur de l’hôtellerie internationale et a un regain d’intérêt pour la littérature économique sur

ce sujet. Les acteurs de ce secteur se sont ainsi écartés des logiques d’affrontement pour

découvrir le pouvoir de la collaboration. Pour, Onoffre Martorell45 ces alliances dans le

secteur hôtelier permettent de répondre aux goûts du consommateur, autorisent un groupe à

conquérir de nouveaux segments de marché ou de nouveaux marchés géographiques,

ermettent une meilleure visibilité des marques sur le marché. Le tableau ci-dessous permet de

récapituler les différents modes d’entrées des firmes sur les marchés étrangers mettant en

lumière les différents avantages et inconvénients de ces stratégies.

45 Onofre Martorell Cunill The growth strategies of hotel chains: best business practices by leading companies New York, London, The Haworth Hospitality Press,2006

Page 38: La stratégie d'internationalisation du groupe ACCOR

31

Titre : Avantages/ Inconvénients des différents modes d’entrée appliqués à l’industrie hôtelière internationale

Définitions Avantages Inconvénients

Exportation Action de vendre à l’étranger une partie de la production de biens ou de services d’un ensemble

économique.

-Pas besoin d’une présence locale

-Très peu viable pour l’internationalisation

d’un service

Alliances Ce sont « des associations entre plusieurs entreprises

indépendantes qui choisissent de mener à bien un projet ou une activité spécifique en

coordonnant les compétences, moyens et

ressources nécessaires » 46

-Réduction des risques -Economie d’échelle due à la mutualisation

des ressources et compétences -Coopération technologique

-Possibilité d’évincer d’autres concurrents -Réduction des coûts

d’entrée sur des nouveaux marchés

-Difficulté pour identifier le meilleur partenaire -Risque de difficultés relationnelles avec le

partenaire choisi -Risque de perte

d’avantage concurrentiel par transfert de

technologie sauvage

Investissements directs

C’est « un capital investit dans la propriété d’actifs réels pour implanter une

filiale à l’étranger ou pour prendre le contrôle d’une

firme étrangère existante. »47

-Fort contrôle des ressources et compétences

-Facilite l’intégration et la coordination des

activités internationales

-Les acquisitions permettent une

implantation rapide

-Mode d’entrée coûteux -L’engagement financier génère un risque élevé -Limite la capacité à

intégrer et à coordonner les activités

internationales.

Source : document réalisé par Mlle Florence ORY à partir de Jonhson et al. Stratégique et Faouzi Bensebaa

Alliances et processus de croissance internationale des firmes : le cas de l’hôtellerie

46 Bernard Garette, Pierre Dussauge « Les stratégies d’alliance » Les Editions d’organisation 1995 47 Wladimir Andreff « Les Multinationales globales »)

Page 39: La stratégie d'internationalisation du groupe ACCOR

32

Section 2 : L’identification des facteurs déterminant les modes d’entrée d’ACCOR dans les BRIC

On l’a vu, le choix d’un mode d’implantation est crucial pour le groupe car en découle sa

pérennité et prospérité sur les marchés. Les groupes hôteliers désireux de s’implanter dans des

marchés émergents peuvent choisir parmi une large gamme de modalités d’entrée incluant

investissements directs, alliances stratégiques etc… Néanmoins, nous observerons à travers

cette section que plusieurs facteurs tels que le risque perçu, les spécificités culturelles, les

objectifs de la firme multinationale…influencent le choix du mode d’entrée de la firme sur

ces marchés. Nous identifierons les facteurs déterminant le choix du mode d’implantation de

la firme ACCOR dans les BRIC et nous évaluerons l’influence du contexte sur le choix du

mode d’implantation. Dans quelle mesure les spécificités de ces économies émergentes

influencent-elles le choix du mode d’entrée du groupe hôtelier étudié ?

A. Quels modèles économiques ? Le choix d’une modalité d’entrée sur de nouveaux marchés a été étudié et théorisé par

plusieurs courants de pensée en économie. Ces écoles ont ainsi identifié certains facteurs

comme responsable de la mise en place d’un mode d’entrée spécifique. Si l’école de pensée

traditionnelle considère que les variables du pays hôte suffisent à expliquer le mode d’entrée

choisi par la firme sur le marché étranger, d’autres mettent l’accent sur les caractéristiques

intrinsèques de la firme et ses objectifs stratégiques. Quels sont les facteurs déterminant le

choix d’une modalité d’entrée ? Le choix final de la stratégie d’implantation s’effectue en

fonction de trois déterminants identifiés par Ishen Ketata48 comme : les objectifs de la firme

multinationale, le risque perçu et les spécificités culturelles. L’influence du contexte est

inhérente au processus décisionnel et ne peut être reléguée au second plan de l’analyse. La

décision d’implantation est premièrement guidée par quatre grandes catégories d’objectifs

propres à la firme : l’expansion, la rentabilité, l’opportunité49 , le contrôle. De plus, la gestion

des risques joue un rôle déterminant dans le choix de la stratégie d’implantation. Deux types

de risque sont ainsi identifiés par Ishen Ketata :

- Les risques liés à l’environnement général de la firme : la complexité du marché, les

facteurs de risque traditionnels, le risque de change

48 Ishen Ketata « L’influence du contexte sur le choix de la stratégie d’implantation » Revue française de gestion 2006 n°166 49 Elle est définie par Ishen Ketata comme « l’utilisation des occasions plus profitables dans les pays étrangers, l’accès aux méthodes et aux connaissances étrangères)

Page 40: La stratégie d'internationalisation du groupe ACCOR

33

- Les risques liés au secteur d’activité : ces derniers reflètent les variables spécifiques au

secteur comme la concentration industrielle, les goûts du consommateur, la demande

du marché

Enfin, l’originalité de la pensée de cet auteur réside dans l’identification d’une troisième

catégorie de facteurs id est les spécificités contextuelles influençant le choix d’un mode

d’entrée sur ces nouveaux marchés. Plusieurs études empiriques ont également démontré

l’importance de la variable contextuelle dans le choix d’une stratégie d’implantation sur un

nouveau marché. En effet, l’étude menée par Price Water House Cooper et l’ARFA50 montre

que le mode d’implantation d’une entreprise reste fortement lié au contexte réglementaire et

au niveau de développement d’un pays. Ainsi, l’Inde et la Russie ont développé un tissu

industriel bien avant l’arrivée des grands groupes occidentaux fournissant des cibles

d’acquisition avec des positions bien établies sur leurs marchés. La Chine se caractérise quant

à elle par un développement économique plus récent associé à des contraintes réglementaires

souvent complexes favorisant l’implantation au travers de partenariats.

Nous nous appuierons sur le modèle syncrétique développé par Contractor et Kundu51 afin de

comprendre les raisons du choix d’un mode d’entrée spécifique sur un marché étranger.

Empruntant à diverses écoles de pensée, ce modèle démontre que le choix d’un mode d’entrée

dépend des caractéristiques intrinsèques à la firme ainsi que des variables du pays d’accueil et

a été appliqué spécifiquement à l’explication des stratégies d’entrée de l’industrie hôtelière

internationale. Ces auteurs affirment : « The choice of entry mode is shown to be determined

by both country or environmental variables, as well as firm variables.”52 Le modèle

syncrétique présenté par Contractor et Kundu nous permet d’affirmer que les variables du

pays d’accueil influencent le choix du mode d’entrée au même titre que la stratégie et les

caractéristiques intrinsèques de la firme. Le schéma, disponible en annexe de ce mémoire,

donne une représentation du modèle d’analyse élaboré par ces deux économistes. Deux

critiques peuvent néanmoins être adressées à ce modèle. En effet, cette analyse omet la

variable clé que constitue la taille du marché et ne suffit pas à expliquer la totalité des

stratégies lorsqu’il s’agit d’entrer dans un pays étranger.

50 Price Waterhouse Coopers et ARFA “Acquisitions et partenariats dans les BRIC” résultats présentés lors du 5ème printemps de l’ARFA 10 juin 2010 51 Farok J Contractor Sumit S Kundu “Modal Choice in a world of Alliances: Analyzing Organizational forms in the International Hotel Sector” Journal of International Business Studies vol 29 n°2 1998 52 Farok J Contractor Sumit S Kundu “Modal Choice in a world of Alliances: Analyzing Organizational forms in the International Hotel Sector” Journal of International Business Studies vol 29 n°2 1998

Page 41: La stratégie d'internationalisation du groupe ACCOR

34

L’influence du contexte et des facteurs pays peuvent particulièrement être appréciés dans le

cas de la Russie où les groupes hôteliers internationaux ont souvent recours à un type

d’alliance spécifique afin de pénétrer le marché. En effet, Païvi Karhunen53 explique la

nécessité pour ces firmes, sur le marché russe, de recourir au consultancy contract ou contrat

de conseil qu’il définit comme « the contract that allows the property owner (usually the city

administration) to keep the control over the daily management of the hotel. The property

owner nominates the hotel management and hires foreigners to act as consultants. »

B - Des difficultés propres aux BRIC

L’internationalisation dans les BRIC n’est pas sans risques. Les avancées technologiques,

l’amélioration des infrastructures, les changements politiques dans les pays émergents ont

certes réduit les barrières à l’entrée de ces pays et diminué la perception du risque.

Cependant, certains risques liés à la nature même de ces pays demeurent. La firme

multinationale doit ainsi porter une attention toute particulière à la variable contextuelle et

pays dans son choix de mode d’entrée. Nous pouvons ainsi nous référer au principal résultat

de l’étude menée par le cabinet de conseil KPMG sur les stratégies de l’industrie hôtelière

internationale sur les marchés émergents afin de donner plus de relief à nos propos :

«Successful companies will be those who are able to anticipate specific risks endemic to

developing countries »54. Par conséquent, nous nous demanderons : quelles sont les difficultés

rencontrées par cette multinationale dans sa stratégie d’implantation dans les BRIC et quelles

peuvent être les solutions mises en œuvre pour y pallier ?

Tout d’abord, il est important de souligner que l’internationalisation des firmes accroît le

risque pays en multipliant les contextes institutionnels auxquels elles sont confrontées et en

diminuant leur capacité à apprécier correctement l’ensemble des évolutions possibles et les

risques associés pour leurs opérations. Le risque pays peut être définit comme « le surplus

d’incertitude qui affecte les opérations de l’entreprise du fait d’une connaissance imparfaite

des contextes institutionnels et de leurs évolutions »55. La première composante du risque

pays est le risque politique qui recouvre la probabilité d’occurrence d’une modification

substantielle et non anticipée du cadre institutionnel du pays : changement de régime

politique, décision d’expropriation par exemple. Le risque réglementaire est une autre

53 Païvi Karhunen « Entry mode choice in transition economies : operations of international hotel companies in Russia » Helsinski school of Economics Business and Administration 54 Hospitality strategies in emerging markets – lessons learned » by Kapila K Anand , National industry director Hospitality KPMG LLP 55 « Entreprises multinationales : stratégie, restructuration, gouvernance » Olivier Meier – Guillaume Schier

Page 42: La stratégie d'internationalisation du groupe ACCOR

35

composante qui tient compte des possibilités de modifications importantes du cadre juridique

ou d’une manière spécifique de toutes les règles de droit qui encadrent le fonctionnement de

l’entreprise. Le risque économique doit également être pris en compte. Il existe également des

composantes plus subjectives du risque pays telles que les risques relatifs à une mauvaise

interprétation des règles non écrites ou les risques de sous estimation des différences

culturelles. L’excellente santé financière des pays émergents ne doit pas faire oublier les

lacunes récurrentes du cadre des affaires qui entretiennent le risque de crédit sur les

entreprises

Il convient, par conséquent, de déterminer les risques spécifiques aux pays émergents. Les

investissements réalisés sur de nombreux marchés émergents, par des compagnies pour la

majorité occidentales, posent un certain nombre de problèmes. L’étude menée par l’ARFA et

Price Waterhouse Cooper montre que le point de difficulté le plus fréquemment rencontré par

les firmes multinationales françaises dont ACCOR lors d’une transaction dans les BRIC est

la réalisation de la procédure de due diligence. Cette dernière vise à faire un état des lieux

rapide et certifié d'une société (aspects comptables, stratégiques, économiques, juridiques et

fiscaux...) avant éventuellement une opération de financement ou d'acquisition. Les deux

principales causes de difficulté citées, dans cette même étude, par les répondants comme

impactant l’exécution d’une transaction dans les BRIC sont la mauvaise qualité de

l’information et le manque de transparence dans les flux économiques de la cible. Le rôle des

autorités locales, en Chine notamment, et le poids des procédures administratives sont

également considérées comme barrières à l’implantation des entreprises dans les BRIC. Le

tableau ci-dessous répertorie l’ensemble des difficultés rencontrées par les groupes français

souhaitant s’implanter dans les BRIC.

Page 43: La stratégie d'internationalisation du groupe ACCOR

36

Titre : Quelles sont en général les causes des difficultés rencontrées dans l’exécution d’une transaction dans les BRIC ?

Source : « Acquisitions et partenariats dans les BRIC » Résultats de l’enquête réalisée conjointement par PWC et ARFA 10 juin 2010.

Nous pouvons ainsi nous demander : quelles peuvent être les solutions mises en œuvre par les

groupes hôteliers souhaitant s’implanter sur ces nouveaux marchés pour faire face à ces

difficultés ? KPMG recommande aux groupes hôteliers des mesures qui de prime abord

peuvent sembler évidentes comme la vérification de l’identité avec laquelle on souhaite

établir un partenariat. Afin de réaliser une bonne procédure de due diligence, certaines

entreprises disposant déjà d’une première implantation s’organisent en s’appuyant sur leurs

cadres locaux qui ont pour mission de gérer les relations avec les autorités afin de faciliter les

processus de décision. La réalisation de transactions dans les BRIC requiert plus de ressources

externes afin de mieux appréhender les différences culturelles, de mieux traiter les

informations de moindre qualité que dans les pays occidentaux et d’élaborer un business plan

commun.

Page 44: La stratégie d'internationalisation du groupe ACCOR

37

Chapitre 2 : Les points forts de la stratégie de ACCOR dans les BRIC

Le groupe ACCOR se distingue de ses concurrents par la mise en place d’une stratégie

particulière d’entrée sur ces nouveaux marchés. Quelles sont les caractéristiques de la

stratégie d’entrée de ACCOR dans les BRIC ? Quels sont les moyens mis en œuvre par cette

multinationale pour pénétrer ces nouveaux marchés ? Evoluant entre partenariat et asset right,

les modalités d’entrée de ACCOR dans les BRIC lui permettent d’obtenir certains avantages

compétitifs ainsi qu’une présence durable dans ces pays.

Section 1 : Le choix d’une stratégie de partenariat.

Nous l’avons vu, les alliances permettent notamment d’accélérer l’entrée sur un ou plusieurs

marchés. Elles constituent aujourd’hui le mode de croissance du groupe ACCOR dans ces

régions émergentes. Utilisées pour se développer dans les régions émergentes mais également

sur le marché national, elles permettent l’obtention rapide d’avantages compétitifs. Pourtant

utilisées de longue date par les firmes souhaitant se développer ou simplement maintenir leur

position sur un marché, les alliances dans le cas de ACCOR prennent une dimension nouvelle.

Les alliances ne touchent plus seulement des activités, des produits, des marchés

périphériques mais au contraire se retrouvent au cœur de la stratégie de ce groupe. Le terme

« alliance stratégique » sera ici compris dans son acception la plus large recouvrant les

différentes formes d’alliances existantes56. Nous adopterons la définition de ce terme donnée

par Bernard Garette et Pierre Dussauge57 et présentée dans le chapitre précédent.

A- Un modèle de développement original

C’est la politique de partenariats menée et revendiquée depuis 1998 qui constitue

l’originalité du modèle de développement de ACCOR. Le groupe a toujours privilégié des

accords de partenariats qu’il s’agisse de s’implanter dans un pays, de renforcer sa notoriété et

de fidéliser sa clientèle. Ces coopérations portent sur les domaines d’activité où existent des

potentiels de synergies ou qui s’adressent à la même clientèle caractérisée par sa mobilité :

les transports, les activités de loisirs, l’information ou les services liés aux déplacements. La

stratégie de partenariat menée par ACCOR repose sur quatre piliers : la recherche d’effets de

levier financier, la création de valeur pour le client, l’optimisation industrielle dans le cadre

56 Document annexe : les différentes formes d’alliances stratégiques – schéma Louis Hébert 57 Bernard Garette Pierre Dussauge « Les stratégies d’alliance » Les Editions d’organisation 1995

Page 45: La stratégie d'internationalisation du groupe ACCOR

38

d’innovations produit, le développement durable. Cependant, la mise en œuvre de

partenariats est particulièrement pertinente lorsqu’il s’agit pour le groupe de se développer

sur des marchés étrangers. Nous pouvons ainsi observer la mise en place de partenariats avec

des hôteliers locaux afin de pénétrer plus facilement. En effet, cette forme de partenariat

produit un effet de levier favorable pour le développement du réseau. De même, il est plus

fiable de s’appuyer sur un acteur local qui connaît bien le pays d’implantation, la législation

applicable et les caractéristiques du marché concerné. Ainsi, en 2010, la signature d’un

partenariat avec Walter Torre, l’un des plus importants investisseurs immobiliers brésilens, a

permis au groupe ACCOR d’accélérer le développement des réseaux Ibis et Formule 1 au

Brésil. Le contrat porte sur le développement d’un réseau de 20 hôtels formule 1 et Ibis

représentant près de 5000 chambres et un investissement d’environ 200 Millions d’euros58.

Ce partenariat stratégique devrait déboucher sur la création d’une joint venture constituée à

hauteur de 80% par Walter Torre et 20% par ACCOR. Cette opération est le premier

partenariat de long terme de grande envergure avec un investisseur immobilier local au

Brésil. Il permet à Accor de s’associer de façon pérenne à un acteur majeur de l’immobilier

au Brésil et de poursuivre le déploiement de sa politique innovatrice de gestion d’actifs : se

concentrer sur l’exploitation hôtelière en investissant principalement dans l’hôtellerie

économique dans les pays émergents. C’est la même stratégie qui est utilisée quelques

années auparavant sur le marché chinois. ACCOR crée une joint venture en 2001 avec le

groupe local Zenith hotels international, entreprise basée à Hong Kong possédant un réseau

de 8 hôtels situés dans les villes clés59. Cette stratégie d’alliances est poussée à son extrême

par ACCOR puisque les marques hôtelières du groupe développent elles-mêmes des

partenariats ciblés afin d’affiner leur positionnement marketing. Les attentes des clients

diffèrent selon les marques et les marchés, c’est pourquoi certaines d’entre elles développent

leur propre réseau de partenaires. Ainsi, il a été conclu en 2011 un partenariat entre la

marque Pullman du groupe ACCOR et Nespresso, pionnier et leader mondial du café

positionné haut de gamme60. Ce partenariat s’inscrit en parfaite concordance avec l’esprit

d’innovation et la qualité des services de Pullman.

58 Site corporate accor www.accor.com 59 Site corporate accor www.accor.com 60 Rapport d’activité de ACCOR 2010

Page 46: La stratégie d'internationalisation du groupe ACCOR

39

B- Une typologie des alliances nouées par ACCOR En nous appuyant sur la typologie des alliances stratégiques du secteur hôtelier réalisée par

Onoffre Martorell Cunill61, nous présenterons dans cette subdivision les catégories d’alliances

auxquelles le groupe ACCOR peut avoir recours.

Premièrement, le groupe ACCOR mobilise des alliances de type One night stand. Cette

catégorie regroupe des partenariats de courte durée ou encore opportunistes. Ces accords

concernent souvent des activités de publicité ou de promotion de l’industrie hôtelière. Il s’agit

de chercher la satisfaction via un ensemble d’attentes clairement définies sans que l’on note

un engagement dans la relation. Par exemple, les hôtels du groupe ACCOR entreprennent des

promotions limitées avec d’autres firmes incluant de la publicité croisée et des coupons

communs. La deuxième catégorie affairs utilisée par le groupe ACCOR dans son

développement sur les marchés internationaux se constitue de relations caractérisées par un

certain degré de partage. Les partenaires s’auto-protègent et la durée des alliances est limitée.

C’est le cas par exemple pour les partenariats noués entre ACCOR et d’autres domaines

d’activités présentant toutefois des synergies avec l’activité d’hôtellerie de ce groupe tels que

le transport aérien, la téléphonie et internet, la restauration. Par exemple, le groupe ACCOR a

instauré un partenariat avec Air France62 visant à accroître la fidélisation de la clientèle. Ainsi,

on note la présence des marques Sofitel, MGallery, Novotel, SuiteNovotel et Mercure dans le

programme de fidélité Air France KLM. Il est également intéressant de remarquer que ces

groupes multiplient les opportunités de ventes croisées notamment sur Internet via un accès

direct au moteur de réservation. Enfin, il existe une troisième catégorie d’alliance I do. Elles

permettent des relations de long terme et anticipent clairement la continuité. Le niveau de

partage est élevé et ces relations offrent une opportunité considérable pour la synergie. On

peut ainsi citer l’alliance stratégique ou joint venture nouée au Royaume-Uni entre les firmes

ACCOR, Hilton International, Forte Hotel Group visant à développer des systèmes Internet

innovants pour la réservation hôtelière et la fourniture aux entreprises de solutions intégrées

pour leurs besoins de voyage.

Parmi ces alliances, la joint venture est la forme la plus utilisée par l’industrie hôtelière

internationale afin de pénétrer de nouveaux marchés. Une joint venture se définit comme « un

groupement par lequel au moins deux entreprises s’associent dans le but de réaliser un projet

61 Onofre Martorell Cunill The growth strategies of hotel chains: best business practices by leading companies New York, London, The Haworth Hospitality Press,2006 62 Site corporate ACCOR www.accor.com

Page 47: La stratégie d'internationalisation du groupe ACCOR

40

particulier tout en mettant leurs connaissances, leurs technologies ou leurs ressources en

commun et en partageant risques et bénéfices »63.

Cependant, il est important de rappeler que les alliances stratégiques se caractérisent par un

fort taux d’échec et les synergies initialement anticipées ne sont pas si évidentes. Il existe

plusieurs inconvénients liés à la constitution d’alliances tels que : le risque de difficulté

relationnelle avec le partenaire, le risque de perte d’avantage concurrentiel par transfert

technologie, la limite de la capacité à intégrer et à coordonner les activités internationales.

Section 2 : L’importance de la stratégie de hub and spoke

La stratégie de hub and spoke est adoptée par ACCOR pour son développement dans les

pays émergents. Utilisée principalement dans le secteur des transports aériens ou terrestres,

cette stratégie a su être réinventée par l’industrie hôtelière internationale afin de conquérir les

pays émergents. Littéralement noyau et rayon, le « hub and spoke » permet de passer d’un

réseau maillé à une organisation radiale où le centre aspire les traffics pour les déplacer vers

de nouvelles destinations. Cela permet également de multiplier les destinations

géographiques et d’ajouter à leur flexibilité. Colin Johnson64 voit dans le hub and spoke un

outil de développement au service de l’industrie hôtelière internationale : « Typically, an up

market ( four or five stars) property will be developed in a gateway city. After this hub has

been established, the spokes will be filled out by mid-market and budget properties in

secondary and tertiary locations”. Onoffre Martorell Cunning insiste lui aussi sur

l’importance de cette stratégie qu’il explicite en ces termes: “gateway cities act as the central

axis while smaller , secondary destinations could be considered to represent the spokes.

Traditionnally, hotels positioned in gateway cities belong to hotel groups that use their top

range brand names to achieve a strong brand image”.

ACCOR n’est pas le seul groupe à cette méthode pour conquérir les marchés émergents. Par

exemple, le groupe Six Continents hotels se positionne dans les principales villes en Asie

grâce à sa marque reconnue Holyday Inn et utilise la marque Express uniquement dans les

villes de second rang.

63 Gerry Johnson, Kevan Scholes, Richard Whittington, Stratégique , 2008, Paris, Pearson Education France 64 Colin Jonhson « Locational strategies of international hotel corporations in Eastern Central Europe »

Page 48: La stratégie d'internationalisation du groupe ACCOR

41

Section 3 : L’asset right : un mode de détention unique des hôtels

A- Concept original ou Asset light ? Le groupe ACCOR a créé en 2005 son propre mode de détention des hôtels : l’asset right65.

Ce dernier, unique dans le secteur hôtelier, se caractérise par un mode de détention mixte des

hôtels. En effet, le groupe ACCOR est à la fois un propriétaire, un gestionnaire et un

franchiseur. L’Asset right est ainsi défini par le groupe lui-même : « cette stratégie vise à

définir pour chaque hôtel le bon mode de détention en fonction de son segment de marché, de

sa localisation, de sa rentabilité. A la clé : des solutions immobilières adaptées et la

contractualisation d’accords de partenariats adaptés. »66. Ce modèle consiste à adapter les

modes de détention des hôtels en fonction du segment de marché et du pays d’implantation.

La stratégie de Accor consiste à choisir un mode d’exploitation des hôtels en fonction de

quatre paramètres : leur positionnement, la taille et le type de pays, les sites (grandes ou

petites villes), la rentabilité des capitaux engagés, la volatilité des résultats. Le choix du mode

de détention de l’hôtel est alors déterminé par le segment de marché, la localisation de l’hôtel.

Il existe plusieurs modes de détention et exploitation des hôtels :

- Le contrat de gestion management : le groupe hôtelier gère pour le compte d’un

propriétaire un établissement sous enseigne ACCOR qui bénéficie des systèmes de

réservation, du savoir-faire hôtelier du groupe moyennant le paiement d’une

redevance.

- La franchise : l’hôtel est exploité par un propriétaire indépendant qui utilise l’une des

marques de ACCOR ainsi que ses systèmes de réservation et de distribution

moyennant le paiement d’une redevance et la mise en conformité avec les normes de

la marque

- La location variable : ACCOR loue l’immeuble à un investisseur et lui paie un loyer

variable

- La propriété : ACCOR est propriétaire des terrains et des murs.

La mise en place de ce modèle d’asset right permet ainsi au groupe d’arbitrer entre ces

nombreux modes d’exploitation et de choisir le plus adapté à la situation, au marché.

Cependant, cet outil tel que défini par ACCOR évolue de plus en plus vers l’asset light et

rejoint en cela une tendance lourde de l’industrie hôtelière internationale. En effet, G.

Panayotis, directeur du cabinet MKG marketing spécialisé sur le secteur de l’hôtellerie,

65 Rapport annuel d’activité ACCOR 2005 66 Rapport annuel d’activité ACCOR 2005

Page 49: La stratégie d'internationalisation du groupe ACCOR

42

déclare : « La stratégie Asset light se généralise sur les marchés matures et s’impose comme

une règle sur les marchés émergents. Elle fonctionne parfaitement avec les plans de

développement des grands groupes dans des pays comme la Chine et l’Inde »67. Georgiana

Surda68 définit l’asset light comme : « a business model focusing on minimizing in-house

resources and maximizing usage of outsourcing opportunities”. Cette stratégie a été poussée à

son extrême par les groupes hôteliers Marriott et Intercontinental. « Marriott, a big American

hotel group, started to sell its property in the late 1970s and today owns only six of the 3,400

hotels that bear its brands. InterContinental, a British-based firm that is another big believer in

being asset-light, owns only 15 hotels, manages 628 and has its brands woven into the towels

of a further 3,800 franchised operations”69. En conséquence, ACCOR possède aujourd’hui

beaucoup plus d’hôtels que la plupart de ses concurrents.

B- L’asset right au service de l’expansion

L’ asset right modèle unique dans l’industrie hôtelière internationale est source de nombreux

avantages : souplesse, capacité d’adaptation, gestion des risques etc… L’entrée sur les

marchés émergents a ainsi été facilitée par cette méthode garante d’un mode d’exploitation

parfaitement adapté aux caractéristiques du pays. Ce modèle a pour principale conséquence

l’adoption d’un mode de détention des hôtels différencié selon les marchés. Ainsi, nous

pouvons noter que dans les pays matures, le groupe tend à privilégier des modes de gestion

peu capitalistiques par le biais de contrats de gestion dans le haut de gamme ou de contrats de

gestion-franchise dans le milieu de gamme. Au contraire, dans les pays émergents, le groupe

favorise les contrats de gestion pour les segments haut de gamme et selon les pays des

partenariats avec des groupes locaux. Le livre d’entreprise « L’aventure du possible 1967-

2007 »70 fait l’éloge de ce concept dont il précise les grandes lignes : « La souplesse est la

règle d’or et les situations sont donc contrastée selon les continents. En Afrique, au Moyen-

Orient et en Asie, le management prédomine alors que les filiales sont majoritaires en

hôtellerie économique et en particulier en Amérique du nord. En Europe, la situation reste

plus équilibrée même si la filiale demeure un mode de gestion courant. » L’asset right dépasse

le simple modèle de développement et est érigé en véritable axe stratégique du groupe. Les

objectifs stratégiques du groupe pour l’année 2015 figurant dans le rapport d’activité annuel

67 communiqué de presse MKG hospitality 7 juin 2011 68 Georgiana Surda « The internationalization process and the Asset Light Approach » Romanian Economic and Business review vol 6 n°1 69 « Asset Light or Asset right? » The economist 11 Novembre 2010 70 ACCOR « L’aventure du possible 1967-2007 » Albin Michel 2007

Page 50: La stratégie d'internationalisation du groupe ACCOR

43

2010 prévoient une montée en puissance de l’asset light. En effet, alors que ce dernier

représentait 64% des modes de gestion du parc hôtelier de ACCOR aujourd’hui, il devrait en

2015 passer à 80%. Le graphique ci-dessous illustre la répartition des modes de gestion du

parc hôtelier ACCOR en fonction des zones géographiques pour l’année 2011.

Titre : parc hôtelier par type d’exploitation et par zone géographique au 31 décembre

2010

Source : document de référence ACCOR 2010

C’est cette stratégie qui a été employée par le groupe afin d’entrer sur le marché brésilien.

« La forte implantation de l’hôtellerie ACCOR aujourd’hui au Brésil s’est faîte grâce à une

politique d’investissements et de partenariats prudente et ciblée. L’objectif est de maximiser

la rentabilité en minimisant les risques. Pour ce faire les modes d’exploitation des hôtels sont

adaptés à chaque enseigne et à chaque situation géographique : en l’occurrence au Brésil où

les risques financiers sont importants et la rentabilité plus aléatoire, les contrats de gestion et

la location sont privilégiés. »71

71 « L’adaptation de la stratégie internationale de ACCOR aux spécificités du Brésil » Université d’Automne 2003 enseignants de sciences économique et sociale et entreprises Lycée Louis Le Grand Paris

Page 51: La stratégie d'internationalisation du groupe ACCOR

44

Partie 3 : La construction d’un modèle de développement dans les

BRIC made in ACCOR

Ce n’est pas l’environnement qui conditionne le succès d’une firme sur un marché étranger

mais sa capacité stratégique. Cette dernière résulte des ressources tangibles ou intangibles et

compétences, définies comme des activités au travers desquelles l’entreprise déploie ses

ressources nécessaires, mobilisées par l’entreprise pour sa survie, sa prospérité72. Il s’agira

par conséquent de déterminer les facteurs permettant une réelle compétitivité des chaînes

hôtelières internationales mais plus particulièrement de ACCOR sur ces marchés. Quels sont

les éléments mobilisés par ACCOR lui permettant l’obtention d’avantages comparatifs sur les

hôteliers indépendants locaux et sur ses concurrents mondiaux dans ces régions ?

Chapitre 1 : Stratégie de l’immatériel et avantages compétitifs Quels sont les avantages dont dispose le groupe ACCOR dans les BRIC ? Au-delà de la

simple mobilisation des avantages compétitifs, c’est la mise en place d’une réelle stratégie de

l’immatériel qui a assuré au groupe ACCOR une présence durable dans les BRIC. Le groupe

ACCOR a ainsi créé une combinaison performante d’actifs immatériels au service d’une

stratégie internationale de développement. Cet hôtelier s’appuie également sur la création

d’une forte culture d’entreprise afin d’assurer son internationalisation et sa cohésion. Capital

humain, capital de marque, culture d’entreprise sont les principaux atouts dont disposent ce

groupe dans cette conquête. Néanmoins, nous ne nous livrerons pas ici à une simple

description des procédés mis en œuvre par ce groupe mais à une réelle analyse explorant le

discours des dirigeants, décryptant le contenu des supports de communication…

72 Gerry Johnson, Kevan Scholes, Richard Whittington, Stratégique , 2008, Paris, Pearson Education France

Page 52: La stratégie d'internationalisation du groupe ACCOR

45

Section 1 : Une culture d’entreprise au service de l’internationalisation

La culture d’entreprise ou culture organisationnelle est définie par Thévenet73 comme « une

manière spécifique de l’entreprise de répondre aux problèmes ». Elle caractérise l’entreprise

et la distingue des autres dans son apparence et la façon de réagir aux situations courantes.

Cette forte culture d’entreprise entretenue par les dirigeants et véhiculée au travers de livres,

sites Internet, brochures institutionnelles, assure cohésion et développement international.

Nous pourrons observer au travers de cette section une dialectique intéressante entre culture

d’entreprise ACCOR et internationalisation de ce groupe. La forte culture d’entreprise créée

par les dirigeants du groupe a pour objectif la valorisation du développement international

dans un secteur d’activité fortement assujetti à la rotation (turn-over) de la main d’œuvre.

Cependant, l’internationalisation poussée du groupe ayant pour principaux résultats la

dispersion des collaborateurs ainsi que la création d’équipes multiculturelles peut se révéler

un obstacle pour la création d’une communauté d’entreprise nécessaire à l’expansion.

A- Une définition de la culture ACCOR

Les firmes multinationales ont ainsi compris que pour perdurer, il leur faut maintenir une

forte identité. « De toute évidence ce que recherche le management via la culture c’est à

réguler les façons de faire et de penser »74 . Il conviendra par conséquent de définir la culture

organisationnelle du groupe. Eric Godelier75 affirme que la plupart des définitions de la

culture en sciences sociales insiste sur quatre caractéristiques. Tout d’abord, la culture résulte

d’un processus collectif d’accumulation au cours de l’histoire et articule en système à la fois

des objets matériels (techniques, pratiques), des éléments idéels (valeurs). Les éléments

matériels et symboliques comme les logos ou marques dans la culture des communautés sont

par conséquent d’une importance cruciale. Les valeurs, principes ont également des fonctions

normatives sur les façons de penser, de se comporter. Enfin, la culture, élément collectif,

s’inscrit dans l’inconscient des membres d’un groupe. Cette dernière reprend quatre valeurs

fortes que sont : l’innovation, l’esprit de conquête, la performance, la confiance76. Il est donné

une définition de la culture d’entreprise spécifique au groupe dans l’ouvrage « ACCOR,

73 « La culture d’entreprise » Maurice Thévenet Que sais-je ? PUF 6ème édition 2010 74 Eric Godelier « La culture d’entreprise : source de pérennité ou d’inertie ? » Revue française de gestion n°192 2009 75 Eric Godelier « La culture d’entreprise : source de pérennité ou d’inertie ? » Revue française de gestion n°192 2009 76 www.accor.com

Page 53: La stratégie d'internationalisation du groupe ACCOR

46

l’aventure du possible » : « Aller à contre courant, rejeter les préjugés, se méfier des

consensus, sortir des sentiers battus… Autant d’expressions qui résument parfaitement la

culture ACCOR de l’origine du projet jusqu’à son développement ». La culture des membres

d’une entreprise résulte d’un ensemble d’apprentissages individuels et collectifs en grande

partie inconscients. Elle se révèle notamment dans un ensemble de routines, pratiques

comportementales et intellectuelles influencées par les caractéristiques sectorielles ou modes

de gouvernance. Dans le cas précis de ACCOR, cette dernière se reflète à travers la formation

« d’un esprit ACCOR » ou « esprit sourire » clairement revendiqué ainsi que d’une

communauté appartenant à l’entreprise « les accordiens ». « Accordien » est le nom de la tribu

des collaborateurs de Accor, qui se dénomment ainsi entre eux héritiers des Novotéliens et des

Boréliens. Nous pouvons retrouver à plusieurs reprises l’emploi de ce terme dans le livre

publié par ACCOR « ACCOR l’aventure du possible ».

B- Les outils de diffusion

Nous nous demanderons par conséquent : comment cette multinationale est-elle parvenue à

créer cette communauté (Accordien) ou état d’esprit (esprit sourire) propre à l’entreprise face

à l’obstacle considérable que constitue la dispersion des employés résultant de

l’internationalisation poussée de l’entreprise? Quels ont été les vecteurs de diffusion de cette

culture d’entreprise ? Plusieurs outils sont utilisés par cette multinationale pour la diffusion de

ce socle de valeurs communes : site Internet, brochure, école, rédaction de livres, modules de

formations…. Aucun moyen n’est épargné. Pour les besoins de cette étude, nous nous

intéresserons plus particulièrement au rôle joué par le livre « ACCOR, l’aventure du possible

40 ans d’histoire ». Puis, dans un second temps, nous examinerons la fonction de l’académie

ACCOR dans la transmission des valeurs et la création d’un sentiment d’appartenance à

l’entreprise chez les collaborateurs.

Premièrement, l’ouvrage « ACCOR, l’aventure du possible 40 ans d’histoire » démontre

l’attention portée par ce groupe à la constitution d’une mémoire collective, élément majeur de

la culture organisationnelle. A l’occasion de ses 40 ans d’existence, ce groupe a publié un

ouvrage relatant son histoire de 1947 à nos jours. Le livre fourmille d’anecdotes qui servent

à retracer les moments forts et mettent en valeur les acteurs principaux du groupe notamment

les fondateurs et les chargés de développement. Cet ouvrage réalisé par les dirigeants du

groupe revient sur la success story française de ACCOR et insiste sur l’exceptionnalité et

l’unicité de cette expérience. L’objectif de ce livre est bien entendu de renforcer le sentiment

Page 54: La stratégie d'internationalisation du groupe ACCOR

47

d’appartenance au groupe et de créer un support auquel tous les collaborateurs peuvent se

référer. L’enjeu est de toucher un nombre maximal de collaborateurs. Ce livre étant

particulièrement facile d’accès puisque téléchargeable gratuitement sur le site d’entreprise du

groupe, il est consultable par un large public. Il ne propose aucune analyse des facteurs de

réussite du groupe et passe sous silence certaines périodes difficiles traversées par le groupe.

Au contraire, le livre érige en véritables héros managériaux les fondateurs Gérard Pélisson et

Paul Dubrule. De même l’analyse des termes et de la rhétorique employés nous permet

d’affirmer que l’objectif est seulement la création d’un socle commun d’adhésion.

De plus, l’analyse du rôle joué par l’Académie ACCOR dans la transmission des valeurs

fondatrices de la culture du groupe se révèle particulièrement intéressante. Il est intéressant

de noter que la création de l’académie en 1986 fût la première initiative de ce type en France.

Aujourd’hui, cette école est présente sur tous les continents démontrant par là son engagement

au service de la cohésion du groupe. L’académie ACCOR joue dans les BRIC un rôle majeur

dans la formation du personnel mais surtout dans la diffusion des valeurs du groupe à ces

nouveaux collaborateurs marqués par une culture différente. Ainsi, Firmin Antonio, directeur

général Brésil du groupe ACCOR affirme : « L’Académie est notre cathédrale. L’une de ses

principales missions est de faire vivre le projet d’entreprise, mais aussi et surtout de former

les hommes et les femmes du Groupe, au Brésil et dans l’ensemble de l’Amérique Latine »77.

Laurence Caron, directrice de l’académie ACCOR va également dans ce sens lorsqu’elle

affirme : « il est essentiel d'être doté de valeurs qui nourrissent notre culture d'entreprise.

L’esprit Accor est présent dans toutes nos formations et c'est ainsi que l’on reconnaît nos

collaborateurs grâce au sens du service »78.

C- Un rôle clé : la cohésion et l’internationalisation

Un des facteurs du développement rapide de ACCOR et de ses succès à l’international réside

dans la diffusion d’une culture d’entreprise forte permettant la cohésion, l’établissement de

valeurs communes. En effet, la transmission des valeurs et l’adhésion à la culture

organisationnelle est un enjeu considérable pour le groupe en raison de la dispersion à travers

le monde des milliers de collaborateurs. Lorsqu’elle crée cette forte culture, la direction du

groupe a pour objectif principal l’adhésion des employés à un socle commun de valeurs

dépassant les frontières. Le rapport annuel ACCOR 2010 fait ainsi état de la nécessité de

77 « L’adaptation de la stratégie internationale de ACCOR aux spécificités du Brésil » « Les entreprises dans la mondialisation » Université d’automne 2003 Enseignants de sciences économiques et sociales 23-24 Octobre 2003 78 www.lesechos.com

Page 55: La stratégie d'internationalisation du groupe ACCOR

48

maintenir cette forte culture : « (les valeurs du groupe sont) les fils rouges de tous les actes

quotidiens des équipes et de leurs relations avec toutes les parties prenantes de l’entreprise.

Dans toutes les marques, tous les métiers et tous les pays. C’est une nécessité alors que le

développement se poursuit ». Le deuxième objectif de la création de cette culture d’entreprise

est de servir l’internationalisation du groupe, de créer cette volonté d’international chez les

employés. Le champ lexical du voyage est ainsi très développé dans les supports de

communication élaborés par ACCOR. Nous retrouvons, très régulièrement, des termes tels

que « pionnier », « conquête », « territoires »… qui illustrent cette envie d’engagement à

l’international du groupe. Les dirigeants et fondateurs du groupe, Mr Pélisson et Mr Dubrule

sont décrits comme des aventuriers. Le passage ci-dessous extrait de l’ouvrage « ACCOR

l’aventure du possible », où l’esprit pionnier des dirigeants est exalté, confirme ces propos :

« Nous ne sommes pourtant qu’en 1969 et déjà, ces derniers (Paul Dubrule et Gérard

Pélisson) sont persuadés que novotel a tout pour devenir une future grande chaîne

européenne. Sans vraiment de stratégie, ils partent, forts de leur audace, explorer et déchiffrer

de nouveaux territoires. »

Section 2- Une combinaison d’actifs immatériels pertinente La mobilisation ainsi que la mise en place d’une stratégie relative au capital immatériel a

permis à ce groupe d’obtenir un avantage décisif sur ses concurrents internationaux et ses

concurrents locaux. Dans quelle mesure le capital immatériel constitue-t-il un point clé de la

stratégie du groupe ?

A- Un facteur de réussite

Le capital immatériel se définit par la réunion des trois catégories de capitaux suivantes. Tout

d’abord, le capital humain se définit comme l’ensemble des capacités productives qu’un

individu acquiert par l’accumulation des connaissances générales ou spécifiques, de savoir

faire. Cette notion exprime l’idée que c’est un stock immatériel imputé à une personne

pouvant être accumulé. Puis, le capital structurel externe considéré comme la capacité de

générer de la valeur par une dynamique relationnelle avec les parties prenantes soutenue par

le capital client. Enfin, le capital structurel interne entre dans la composition du capital

immatériel.

Nous pouvons retrouver les quatre piliers du capital immatériel dans la stratégie du groupe.

La fidélité de la clientèle, premier pilier, est obtenue via la mise en place d’un programme de

Page 56: La stratégie d'internationalisation du groupe ACCOR

49

fidélisation nommé AJ Club79. La valorisation du capital humain ou la formation de

collaborateurs qualifiés s’effectue par le biais de l’Académie ACCOR. La force de la marque

et la qualité du service sont deux points essentiels sur lesquels le groupe se concentre tout

particulièrement. Les actifs immatériels sont les racines de la pérennité des acteurs du secteur

hôtelier et les leviers de sa croissance durable. Comme le soulignent les experts du secteur

chez Deloitte, cabinet de conseil, même si ne pas se positionner sur certains actifs immatériels

n'est pas discriminant positivement aujourd'hui, ce sera un facteur discriminant défavorable

sur le long terme. Les actifs immatériels sont reconnus par la plupart des hôteliers de façon

intuitive mais font l’objet pour le groupe ACCOR d’une réelle stratégie au service du

développement international de la firme. L’utilisation des actifs immatériels comme levier

stratégique est d’ailleurs reconnue par les professionnels du secteur hôtelier qui considèrent

le capital immatériel comme la part prépondérante de leur valeur sur le long terme. Cette

stratégie de l’immatériel peut constituer un avantage concurrentiel discriminant susceptible de

contribuer aux gains de parts de marché. Ce capital immatériel peut surtout être au mis au

service d’enjeux stratégiques spécifiques comme le développement international en utilisant

des leviers tels que le capital de marque et le capital humain.

B- Les marques et le capital humain : deux actifs reconnus et valorisés

Deux actifs immatériels majeurs ont été identifiés et particulièrement valorisés par ce groupe

lors de son développement sur des marchés internationaux : la marque et le capital humain. La

marque de produit comme de service reste un ensemble de perceptions rationnelles et

émotionnelles inscrites dans l’esprit du consommateur qui remplit un ensemble de fonctions

essentielles à la consommation et lui confère de la valeur pour le consommateur comme pour

l’entreprise80. Cependant, Marie-Ange Andrieux81 souligne que dans le secteur hôtelier, le

poids relatif de la marque par rapport aux autres actifs immatériels varie selon les segments de

marché : la marque est prépondérante sur le segment économique, elle reste importante dans

le moyen de gamme mais doit souvent être associée au savoir-faire du franchiseur du réseau.

Pour le luxe, le capital humain devient un facteur essentiel de valorisation d'une stratégie

d'offre sur mesure de très haut niveau qualitatif. « Le capital humain est unanimement

identifié par les investisseurs comme un déterminant de la valeur du secteur, quel que soit le

79 www.accor.com 80 Christèle Camélis « L’influence de l’expérience sur l’image de la marque de services » Vie et Sciences Economiques 2009 n°182 81 Tribune Sciences Po de l'Immatériel, sous la direction de Marie-Ange Andrieux le 13 Juillet 2010

Page 57: La stratégie d'internationalisation du groupe ACCOR

50

segment de marché considéré. Il représente d'ailleurs 50% en moyenne de la structure des

coûts d'un hôtel »82. Nous nous demanderons par conséquent comment le groupe ACCOR

utilise-t-il les actifs immatériels que constituent le capital humain et la marque pour se

développer à l’international ?

Tout d’abord, ce groupe crée une réelle stratégie de marque lui permettant de répondre à la

diversité des marchés ainsi que d’obtenir un avantage concurrentiel non négligeable. Elles ont

également pour objectifs de stimuler la prise de conscience du consommateur, d’encourager

l’achat, et la fidélité au produit. Onofre Martorell Cunill83 distingue dans son analyse trois

raisons expliquant l’importance des marques pour l’industrie hôtelière internationale :

- La constitution d’un large portefeuille de marques permet à l’entreprise d’adopter une

stratégie de diversification du risque

- La prolifération des marques dans le secteur hôtelier sert les besoins des groupes

hôteliers. Les marques permettent le maintien de la croissance de l’entreprise sur un

marché déjà saturé

- Créer une marque est moins coûteux que d’investir dans la rénovation d’un hôtel

Les marques ont joué un rôle majeur dans la stratégie d’expansion internationale des groupes

hôteliers car elles ont permis l’accès à un puissant service marketing, un système de

réservation efficace (TARS pour ACCOR), un fort réseau de vente, une augmentation du

pouvoir d’achat. Un portefeuille de marques complet lui permet de cibler les marchés

émergents. En effet, ACCOR est le seul acteur présent sur tous les segments de marché : du

luxe avec des marques telles que Pullman au très économiques avec Ibis par exemple. Le

tableau ci-dessous nous donne un aperçu du large portefeuille de marques détenu par

ACCOR.

82 Tribune Sciences Po de l'Immatériel, sous la direction de Marie-Ange Andrieux le 13 Juillet 2010 83 Onofre Martorell Cunill The growth strategies of hotel chains: best business practices by leading companies New York, London, The Haworth Hospitality Press,2006

Page 58: La stratégie d'internationalisation du groupe ACCOR

51

Titre : Le portefeuille de marques du groupe ACCOR

Source : rapport d’activité du groupe ACCOR 2010 Cette présence sur tous les segments de marché permet ainsi au groupe de répondre à la

diversité des marchés régionaux. « ACCOR dispose donc d’un formidable atout pour asseoir

la puissance et l’attractivité de ses marques et ainsi conquérir de nouveaux marchés et

clients. »84 Le groupe accélère ainsi son développement dans les BRIC via une offre

économique avec Ibis, Etap Hotel et un ancrage affirmé sur le segment du luxe avec Sofitel.

De plus, la valorisation du capital humain est une autre clé de la stratégie de l’immatériel de

ACCOR. Un personnel compétent et fidèle est un actif stratégique que peu de groupes ont

réussi à acquérir dans un secteur de fort turnover, alors qu'un risque de manque de jeunes

actifs a été identifié dans les prochaines années. Le groupe ACCOR investit réellement pour

attirer les employés et les former. La Hilton University et l’Académie ACCOR sont à ce titre

deux exemples concrets de l’importance accordée par les multinationales au capital humain.

84 Rapport d’activité annuel 2010 ACCOR

Page 59: La stratégie d'internationalisation du groupe ACCOR

52

Chapitre 2 : Une nécessaire adaptation aux spécificités des BRIC

Nous l’avons vu, le groupe ACCOR est maître d’une importante stratégie destinée à maintenir

sa présence et son engagement durable dans les BRIC. Cette multinationale compte ainsi sur

la mise en place d’une stratégie d’implantation, la mobilisation de ses avantages compétitifs

pour assurer son développement dans ces régions. Néanmoins, les BRIC présentent de

nombreuses spécificités et posent différents problèmes nécessitant capacité de réaction et

d’adaptation pour les firmes y faisant face. L’étude menée par Price waterhouse Cooper et

l’ARFA 85 fait état des nombreux problèmes posés par les BRIC : « Les difficultés

d’intégration dans les BRIC sont supérieures à celles rencontrées dans les pays occidentaux

mais de manière globale, le retour sur investissement est conforme voire supérieur aux

attentes. » En effet, la phase d’intégration est particulièrement difficile dans ces nouveaux

marchés du fait de leur complexité et du peu d’expérience des multinationales françaises dans

le domaine. L’étude révèle que les entreprises souhaitant s’engager durablement sur ces

marchés doivent relever trois défis : la compréhension réciproque des différences culturelles,

la préservation de la clientèle, le maintien des personnes clés.

Nous nous demanderons dans cette partie : quels sont les principaux enjeux pour le groupe

ACCOR lors de son développement dans les BRIC ? Dans quelle mesure ce groupe peut-il

s’adapter aux spécificités contextuelles ?

Section 1 : Un enjeu majeur : la gestion de l’interculturel Face à l’internationalisation croissante du groupe, un nouveau défi s’impose : quelles sont les

stratégies et les solutions de management adaptées pour un environnement multiculturel et des

équipes composées de cultures différentes ? La problématique des ressources humaines est un

enjeu majeur pour la multinationale engagée dans des pays émergents et sur une activité

particulièrement intensive en main d’œuvre. Nous nous demanderons donc dans cette partie :

quelles sont les politiques et pratiques de gestion des ressources humaines mises en place par

ACCOR et contribuant à l’avantage concurrentiel du groupe ? Dans quelle mesure ACCOR a-

t-il pu adapter sa gestion des ressources humaines pour relever les défis rencontrés sur ces

marchés émergents ?

85 « Acquisitions et partenariats dans les BRIC » résultats présentés lors du 5ème printemps de l’ARFA

Page 60: La stratégie d'internationalisation du groupe ACCOR

53

A- Le problème multiculturel ?

Le Groupe, présent dans plus de 90 pays, bénéficie d’une diversité humaine naturelle due à la

diversité de l’implantation de ses hôtels. La diversité culturelle constitue par conséquent une

caractéristique importante, une composante intrinsèque de cette entreprise. Cette diversité

doit-elle être considérée comme un avantage ou un obstacle pour le groupe ? Les écrits sur le

management des différences culturelles ont longtemps considéré le facteur culturel comme un

problème et non comme un avantage. La diversité culturelle est souvent considérée dans la

littérature académique comme une source de dysfonctionnements au sein d’une organisation

pouvant nuire à sa performance. Les travaux de Shenkar et Zeira , Bivens et Lowell montrent

que les groupes multiculturels sont plus exposés aux conflits, Jenh et al avec Riordan et Shore

expliquent que dans ces types d’équipes, il ya moins de coopération que de cohésion. Les

équipes multiculturelles parce qu’elles sont composées d’individus issus de cultures

différentes auront plus de mal à court terme à gérer les conflits et à atteindre une productivité

optimale dans l’entreprise. Ce n’est que très récemment avec les travaux de Sylvie Chevrier

que la diversité culturelle a pu être considérée comme un avantage pour l’entreprise à

condition d’être bien géré. Le groupe ACCOR a choisi de revendiquer cette diversité

culturelle qui lui est propre et de développer un mode de management qui lui permet de tirer

profit de ce qui aurait pu constituer un obstacle majeur à son développement.

B- L’adoption d’un management interculturel Le premier défi de la gestion internationale des ressources humaines rencontré par le groupe

sur ces marchés émergents est de gérer la complexité interculturelle. L’émergence des équipes

multiculturelles dans les organisations change l’environnement du travail traditionnel et

impose de nouveaux défis aux dirigeants et aux managers des entreprises. Elle induit une

intensification de la diversité dans les équipes provenant d’ethnie, de nationalité, de genre,

d’âge, d’éducation, de religion ou de capacités techniques et fonctionnelles différents. Ces

changements demandent de nouveaux modes de management d’équipes. Si le personnel doit

apprendre à travailler et à s’intégrer dans des équipes formées de plusieurs cultures, les

managers, de leur côté, doivent apprendre à gérer l’aspect multiculturel de l’entreprise et à

coordonner le travail entre les personnes de cultures diverses. En effet, du fait de la politique

d’internationalisation menée par le groupe, ce dernier rencontre des difficultés propres à la

Page 61: La stratégie d'internationalisation du groupe ACCOR

54

mise en place d’équipes multiculturelles. Le témoignage de Tristan Beau de Loménie

directeur du Novotel Suvarnabhuni Airport concernant son expérience en Thaïlande nous

donne une vision des problématiques auxquelles le groupe est confronté dans son

développement à l’international86 : « En 2000, la création du Novotel Peace Beijing à Pékin

fût l’un des plus beaux défis de ma carrière. Je devais convertir un établissement régi depuis

40 ans par le modèle communiste en hôtel moderne. Des cadres aux équipes de ménage nous

avons absorbé tout le personnel et leur avons inculqué des notions dont ils n’avaient jamais

entendu parler : la qualité, le rendement, le profit. Heureusement, nous avons pu travailler

main dans la main avec le gouvernement chinois ».

L’entreprise a mis en place un management interculturel afin de s’adapter aux mieux aux

spécificités de ces marchés émergents. Pierre Dupriez87 considère le management

interculturel « comme une forme de management capable de reconnaître l’existence de

cultures différentes, d’intégrer les valeurs sur lesquelles reposent ces cultures dans l’exercice

des différentes fonctions d’entreprise et de combiner la prise en compte des spécificités

culturelles avec les impératifs stratégiques globaux ». Ainsi la notion de management

interculturel, comme le souligne S.Chevrier88 s’articule autour de trois concepts : la diversité

des cultures, l’interaction id est la rencontre des cultures, le contexte organisationnel. Intégrer

la diversité culturelle est un défi majeur pour le groupe ACCOR présent dans plus de quatre-

vingts dix pays. En effet, ignorer la diversité culturelle peut conduire à des erreurs de gestion :

de l’échec des fusions-acquisitions par méconnaissances des différences culturelles jusqu’à la

perte d’une clientèle traditionnelle qui n’a pas accepté la présentation standardisée d’un

produit pourtant échangé.

C- Des outils de management de l’interculturalité spécifique

Il conviendra d’identifier les différents outils mis en place par le groupe afin de gérer cette

interculturalité et de faire de la diversité non pas un obstacle au développement mais bien au

contraire une source de richesse, un avantage concurrentiel. Quels sont les moyens de gestion

de la diversité propres au groupe ACCOR ? Le groupe utilise une large palette d’outils allant

de la création d’une forte culture d’entreprise à la mise en place d’outils opérationnels de

communication interne (journal interne, intranet..) Nous choisirons pour les besoins de notre

étude d’analyser deux des outils principaux de gestion de la diversité culturelle du groupe: la

86 ACCOR « ACCOR l’aventure du possible » Cherche Midi 1967-2007 87 Pierre Dupriez « La globalisation, du modèle économique au modèle culturel » Pensée plurielle 2001 n°3 88 Sylvie Chevrier « Le Management interculturel » Presses Universitaires Françaises

Page 62: La stratégie d'internationalisation du groupe ACCOR

55

charte internationale de la diversité et les modules de formations particuliers dispensés par

l’Académie ACCOR.

Tout d’abord, la signature de la charte internationale de la diversité en 2004 par le groupe

ainsi que l’élaboration de sa propre charte attestent de l’intérêt porté par cette entreprise à la

notion de diversité et permettent par la même un management efficace. ACCOR est une des

premières entreprises françaises à signer cette charte. Les entreprises signataires de cette

charte reconnaissent l’existence de discriminations et s’engagent à y remédier par des actions

concrètes. Elle vise à encourager les entreprises à agir de manière concrète contre les

discriminations en reflétant au travers de leurs effectifs les différences visibles et invisibles de

la société89. En s’engageant à signer et respecter la charte internationale de la diversité, le

groupe ACCOR reconnaît également que la diversité constitue un atout majeur en terme de

cohésion des équipes, d’attrait et de fidélisation des clients, de capacité d’adaptation au

changement et d’innovation. Depuis diverses actions ont été engagés par le groupe afin de

respecter les objectifs fixés par cette charte. Par exemple, afin de garantir l’implication au

plus haut niveau de l’entreprise, les sujets de diversité et de non discrimination ont été mis à

l’ordre du jour de nombreuses réunions que ce soit au sein des instances dirigeantes ou dans le

dialogue avec les partenaires sociaux. D’autres actions auprès des salariés sont en cours de

développement en terme de formation principalement : un atelier dédié à la prévention des

discriminations et aux enjeux de la diversité destiné au réseau ressources humaines, une

formation spécifique à la non discrimination et à la diversité dans le recrutement est

également envisagée pour l'ensemble des recruteurs du Groupe… En 2010, le groupe va plus

loin et décide de rédiger sa propre charte de la diversité signée ensuite par Denis Hennequin,

président directeur général du groupe. En signant sa propre charte, cette entreprise prend sept

engagements90 parmi lesquels certains ont directement trait au management interculturel.

Nous pouvons noter ainsi parmi ces objectifs :

- donner à chacun sa chance de réussir en prenant en compte ses compétences

- lutter contre toute forme de discrimination liée à l’origine ethnique, sociale ou

culturelle, au sexe, à l’âge, aux caractéristiques physiques, au handicap, aux

convictions religieuses, aux langues, à la situation familiale, aux activités syndicales, à

l’orientation sexuelle… ;

- élaborer un diagnostic diversité dans chaque pays où le Groupe est présent

- proposer à chaque manager une formation sur le thème de la diversité

89 www.charte-diversite.com 90 Document de référence ACCOR 2010

Page 63: La stratégie d'internationalisation du groupe ACCOR

56

Par ailleurs, l’académie ACCOR , fondée en 1985, est le ciment de la culture du groupe.

ACCOR est le premier groupe français à créer une école d’entreprise et a développé un réseau

de 17 académies dans le monde. L’académie ACCOR est ainsi décrite dans le rapport annuel

2010 comme « le ciment de la culture d’entreprise, lieu d’apprentissage et d’échange de

bonnes pratiques ». Cette académie par la création de modules de formation spécifiques à la

problématique de la diversité culturelle constitue un rouage important du management de la

diversité du groupe ACCOR. Des sessions de e-learning sont ainsi spécialement dédiés aux

cadres de l’entreprise confronté à l’interculturalité91. Ces modules ont un caractère obligatoire

et permettent une sensibilisation de tous les salariés à cette question.

Section 2 : Standardisation ou adaptation à la diversité ?

Nous nous demanderons dans cette section : dans quelle mesure ACCOR a –t-il réussi à

s’intégrer dans ces nouveaux marchés caractérisés par leur complexité ? Quels ont été les

efforts consentis par ce groupe hôtelier pour s’intégrer ? Le principal problème auquel sont

souvent confrontées les entreprises souhaitant conquérir de nouveaux marchés est résumé par

le dilemme global – local. Ce dernier désigne l’arbitrage entre la standardisation

internationale des offres ou leur adaptation aux spécificités locales92. Lors de la phase

d’intégration sur les nouveaux marchés, le groupe a du repenser son offre ainsi que son mode

de management afin de présenter un ensemble cohérent lui permettant d’engager une présence

durable dans ces régions. Entre complète standardisation et totale adaptation, cette

multinationale a su arbitrer et trouver un équilibre parfois difficile. Le choix d’une troisième

voie dans ces pays a permis au groupe de profiter des opportunités dans ces nouvelles régions.

A- Repenser l’offre de service

En se développant dans les BRIC, cette multinationale a du repenser son offre de service pour

l’adapter. En effet, le Brésil, la Russie, l’Inde et la Chine présentent des différences

considérables avec les marchés historiques du groupe ACCOR que sont la France et les pays

européens. Le modèle CAGE93 développé par Ghemawat permet d’identifier les différences

existantes entre les marchés. Cet auteur a récemment proposé un cadre d’analyse synthétique

permettant l’analyse ainsi que la distinction de quatre formes de distances susceptibles

d’influencer le développement international des entreprises : culturelle, administrative,

91 Rapport annuel d’activité du groupe ACCOR 2010 92 Définition du dilemme global/local donné par Johnson et al « Stratégique » 93 CAGE : Cultural, Administrative, Geographic, Economic

Page 64: La stratégie d'internationalisation du groupe ACCOR

57

géographique, économique. Il est cependant difficile d’apprécier ces différences culturelles.

En effet, comme le montre l’enquête réalisée par Price Waterhouse Cooper et l’ARFA, la

compréhension des différences culturelles est le principal défi d’intégration post-acquisition.

Ce modèle a pour principal enseignement que les différences existantes entre des marchés

éloignés en terme géographique obligent à adapter les produits aux attentes locales. Ainsi,

l’internationalisation place tôt ou tard les entreprises devant la nécessité de repenser leur offre

de services soit pour l’adapter au marché local, soit pour lui permettre d’éviter cette nécessité

ou pour croître sur d’autres marchés apparemment plus prometteurs. En se développant à

l’international, les firmes de services sont rapidement confrontées à plusieurs grandes

options :

- adapter leurs prestations pour les rendre assimilables et acceptables dans un contexte

différent du contexte national habituel

- standardiser leurs prestations pour créer des économies d’échelle ou du moins endiguer la

croissance des coûts de l’expansion internationale

- rester sur une proposition de service spécialisée sur le métier d’origine

- saisir les opportunités qui apparaissent sur les marchés internationaux et se diversifier en

proposant de nouveaux services.

Si la standardisation du service est souvent décrite comme une voie privilégiée pour se

développer à l’échelle internationale, ce n’est cependant pas la voie choisie par ACCOR.

Le groupe ACCOR adopte une stratégie à mi-chemin entre l’adaptation et la standardisation

complète afin de tenir compte au mieux des spécificités des BRIC. « Le concept Novotel doit

il dans chaque pays s’adapter non seulement aux normes imposées comme celles de la

sécurité mais encore aux particularités culturelles ? Finalement les deux patrons s’entendent

sur une troisième voie. Tout en admettant quelques modifications selon les pays comme la

construction su traditionnel bar à bières dans les Novotels anglais ils s’efforceront de

convaincre les populations de l’agrément et de l’efficacité de leur propre concept. »94

Du fait que certaines zones géographiques exigent des adaptations significatives des services,

les stratégies peuvent parfois se traduire par de véritables diversifications. C’est le cas par

exemple au Brésil avec la création par le groupe ACCOR de la chaîne hôtelière Parthénon

face aux échecs rencontrés sur ce marché par le concept Novotel. L’entrée de l’activité

hôtelière du groupe ACCOR au Brésil a conduit à la création d’un nouveau concept hôtelier :

94 « Impossible n’est pas français L’histoire inconnue d’ACCOR, leader mondial de l’hôtellerie » Virginie Luc Albin Michel

Page 65: La stratégie d'internationalisation du groupe ACCOR

58

les résidences hôtelières Parthénon au début des années 1980. La combinaison de la crise

financière et immobilière au Brésil à cette époque offrait une opportunité pour le groupe.

L’idée était de faire de l’hôtellerie dans un immeuble d’habitation, ce qui permettait d’élargir

l’éventail des investisseurs aux particuliers. Alors qu’en Europe, les résidences hôtelières

fonctionnent pour des longs séjours, il est possible au Brésil, de louer un appartement pour la

nuit. Le groupe s’est ainsi lancé dans une complète restructuration de son offre afin de

s’adapter aux conditions locales et de pouvoir bénéficier des opportunités offertes par le

marché. ACCOR a également cherché à adapter ses hôtels aux coutumes locales : adaptation

de l’architecture des hôtels, des menus proposés à la clientèle (coexistence de plats locaux et

internationaux). Pour autant, le groupe n’est pas engagé dans une voie d’adaptation totale de

son offre et des éléments communs à l’ensemble des hôtels détenus par le groupe demeurent.

Par exemple, on retrouvera dans les hôtels du groupe en Asie, le logo du groupe et de la

marque signes de leur appartenance à l’entité, une qualité du service égale à celle offerte en

Europe.

B- Repenser le management international

L’internationalisation croissante du groupe pose également le problème de l’adaptation du

modèle organisationnel de l’entreprise. En effet, les entreprises performantes ont su créer des

procédures organisationnelles compatibles avec la diversité de leur environnement. Dans

quelle mesure le modèle organisationnel adopté par ACCOR lui permet-il de répondre

efficacement aux problématiques liées à l’internationalisation du groupe ? L’adoption d’une

structure organisationnelle géocentrique par ce groupe lui permet de répondre au mieux aux

nouveaux enjeux suscités par son internationalisation.

Tout d’abord, nous reviendrons sur la définition de la structure organisationnelle géocentrique

afin de montrer en quoi cette structure permet de surmonter le plus efficacement les obstacles

liés à la multinationalisation des firmes. Perlmutter a cherché à analyser les relations qui lient

le siège des firmes multinationales à leurs filiales étrangères. L’objectif était d’identifier le

comportement de la direction envers ses filiales en particulier sur les questions d’adaptabilité

et d’intégration. Il crée donc le modèle EPRG qui distingue quatre configurations

organisationnelles selon le type de relations entre filiales et siège : ethnocentrisme,

polycentrisme, régiocentrisme, géocentrisme. Le modèle géocentrique dans lequel la firme est

« orientée vers le marché mondial et le traite comme un tout »95 a été adopté par le groupe

95 (« Multinationales et Mondialisation » Jean-Louis Muchielli Editions du seuil Mai 1998

Page 66: La stratégie d'internationalisation du groupe ACCOR

59

ACCOR ainsi que la majorité des entreprises du CAC40. Ce modèle correspond à la volonté

d’intégrer plusieurs régions du monde dans un système global de prise de décision. I Huault96

distingue les différentes caractéristiques de ce modèle : une grande interdépendance régionale,

un fort pouvoir du siège régional et une collaboration entre les filiales en matière de prise de

décision, la détermination d’indicateurs régionaux pour l’évaluation des performances, la

faible importance de la communication entre les filiales et le siège social, les cadres régionaux

promus aux postes clés régionaux. La démarche géocentrique propose de coordonner et

intégrer les filiales situées dans les différentes région du monde dans un système global de

décision. La diffusion de cette culture organisationnelle globale respecte les spécificités

locales. Dans cette logique les standards d’évaluation sont à la fois locaux et globaux. La

mobilité géographique du personnel apparaît comme un levier de développement des

organisations. Les acteurs en mobilité internationale sont sélectionnés en fonction de leurs

compétences et peuvent provenir d’un pays tiers. Selon Marie Laure Grillat97, ce modèle

assure des niveaux de coordination et d’intégration suffisants tout en préservant une forme

d’adaptabilité et d’autonomie locale. Ce nouveau modèle contribue à l’internationalisation des

équipes, aux brassages culturels et à la reconnaissance des cadres locaux. Dans ce type

d'organisation, la nationalité n'est plus un critère déterminant en matière de recrutement et

d'affectation des cadres aux postes de direction. Les responsabilités sont accordées au regard

de l'expérience et de la compétence, sans prise en compte de l'origine culturelle des

postulants. L'expatriation, dans cette perspective, ne se l'ait plus en sens unique, de la maison

mère vers les filiales, mais aussi entre filiales, et des filiales vers la maison mère le cas

échéant. Aujourd’hui les directeurs de ACCOR hospitality en Asie et notamment en Chine et

Corée du Sud sont majoritairement des locaux98.

96 « Le management international » 1998 97 « La gestion des Ressources humaines dans les firmes multinationales françaises : les défis liés à la conquête du marché mondial » Revue Française de Gestion n°212 2011 98 Brochure institutionnelle ACCOR 2010

Page 67: La stratégie d'internationalisation du groupe ACCOR

60

Conclusion

Le Brésil, la Russie, l’Inde et la Chine communément désignés par l’appellation BRIC forgée

par Jim O’Neil représentent à l’heure actuelle de formidables opportunités de croissance pour

l’ensemble des multinationales. Conjuguant forts taux de croissance, développement

économique, émergence d’une classe moyenne, ils attirent les IDE. C’est dans ce contexte et

percevant les potentialités de croissance liées à ces nouveaux acteurs que les principaux

groupes hôteliers internationaux se sont lancés à l’assaut des BRIC. Les BRIC apparaissent

d’autant plus incontournables dans le secteur de l’hôtellerie internationale que cette dernière

se caractérise aujourd’hui par une saturation et un certain épuisement des marchés

domestiques. A titre d’exemple, les projets en cours en Chine des groupes Intercontinental

hotels ou encore Marriott témoignent de l’attrait pour ces émergents.

Notre ambition à travers cette étude était la compréhension de la stratégie du groupe hôtelier

français ACCOR dans cet ensemble de pays. Par son fort degré d’internationalisation ainsi

que ses choix stratégiques, cette multinationale a su se différencier de ses concurrents

mondiaux et s’ assurer la cinquième place au classement mondial dans un univers pourtant

dominé par des groupes américains. Nous avons ainsi identifié les principaux enjeux

stratégiques liés à la montée en puissance des BRIC pour cette multinationale. Dans quelle

mesure le groupe ACCOR a-t-il su créer un modèle de développement spécifique lui

permettant de tirer profit de ces zones de fortes opportunités ? En nous appuyant

principalement sur l’analyse des rapports annuels d’activités du groupe et des documents de

référence sur la période 2000-2010, nous avons déterminé les enjeux d’une telle stratégie

d’internationalisation. Cette étude a également nécessité un effort important de recherches

puisque l’obtention d’entretiens avec des cadres dirigeants ou chargés de développement fût

particulièrement difficile. Les modèles d’analyse empruntés à la stratégie d’entreprise et aux

sciences économiques ont permis une meilleure compréhension des enjeux, problématiques.

Par ailleurs, la complexité de ce sujet nous a incité à recourir à une analyse pluridisciplinaire.

Nous nous sommes par conséquent appuyés sur des notions issues du management

interculturel, de l’économie du développement, du marketing international… Ce mémoire

donne un aperçu de l’état de la recherche dans le secteur particulier de l’hôtellerie

internationale et nous laisse entrevoir l’immensité des pistes non encore explorées. Très tôt

l’entreprise ACCOR a compris l’importance de ces émergents et a mis en place une réelle

Page 68: La stratégie d'internationalisation du groupe ACCOR

61

stratégie d’internationalisation. Le modèle mis en place par ce groupe dans les BRIC est le

fruit d’une réflexion stratégique poussée permettant de surmonter les défis. Autrefois oubliés,

les BRIC font aujourd’hui figure d’axe privilégié de développement du groupe. Choix d’une

modalité d’entrée, adaptation des produits… ce groupe a su développer une stratégie qui lui

est propre. Cette étude a permis d’évaluer le cheminement stratégique et de comprendre les

problématiques d’un groupe recherchant l’internationalisation. De plus, les BRIC sont

désormais des acteurs incontournables dans le monde actuel marqué par la mondialisation. En

effet, ils représentent un formidable potentiel de croissance pour les multinationales

souhaitant poursuivre leur développement ou maintenir leur rythme de croissance. Par

conséquent, étudier la stratégie de ACCOR dans cet ensemble de pays nous a conduit à

préciser la notion de BRIC assez ambigüe et à en proposer une définition.

Enfin, souhaitant entreprendre une carrière professionnelle tournée vers l’international ou

spécialisée dans le conseil en entreprise, la réalisation d’un mémoire de fin d’études mêlant

stratégie d’entreprise et international me tenait particulièrement à cœur. Cette étude m’a

permis de saisir la complexité des démarches d’internationalisation des multinationales au

sein d’un secteur spécifique : l’hôtellerie.

Page 69: La stratégie d'internationalisation du groupe ACCOR

62

Annexes

• Document 1 : Présentation du groupe ACCOR

• Document 2 : L’historique de ACCOR – Les dates clés de l’internationalisation du

groupe

• Document 3 : Analyse PESTEL du secteur hôtelier international

• Document 3 : Les changements dans la structure des IDE

• Document 4 : Le classement des groupes hôteliers mondiaux

• Document 4 : Les leaders hôteliers mondiaux restent centrés sur leurs marchés

domestiques

• Document 5 : Panorama de la présence du groupe ACCOR dans les BRIC

• Document 5 : Le Modèle syncrétique de Contractor et Kundu

Page 70: La stratégie d'internationalisation du groupe ACCOR

63

• Présentation du groupe ACCOR Chiffres au 31 décembre 2010 - document élaboré par Mlle Florence Ory d’après le rapport annuel 2010 d’activité du groupe ACCOR ACCOR est le premier opérateur hôtelier mondial leader en Europe et présent dans 90 pays avec 4229 hôtels.

Chiffre d’affaires 5948M euros Marge brute d’exploitation 30,5%

Résultat d’exploitation 446M euros Nombre de Collaborateurs 145000

Nombre d’hôtels 4229 Nombre de chambres 507306

Parc hôtelier par zones géographiques en % du nombre de chambres

Source : document de référence 2010 ACCOR

Page 71: La stratégie d'internationalisation du groupe ACCOR

64

L’historique de ACCOR : les dates clés de l’internationalisation du groupe Novotel SIEH

1967 : création de la chaîne d’hôtels Novotel avec le premier Novotel à Lille l’aéroport et

création de la SIEH société d’investissement et d’exploitation hôtellière par Paul Dubrule et

Gérard Pélisson

1972 – 1975 : Début de la diversification géographique et sectorielle. Novotel ouvre dès 1972

en Belgique et en Suisse. Le groupe se développe tout d’abord sur des marchés limitrophes.

1976 – 1979 : Confirmation de la stratégie d’internationalisation : début des activités du

groupe en Afrique, au Moyen Orient et en Amérique du Sud. En 1976, on note le lancement

de l’activité au Brésil. Sur cette période, le groupe ouvre un réseau de 50 hôtels sur le

continent africain.

1980 : Début du développement en Asie et plus particulièrement en Chine. En 1984, le

premier Novotel est implanté en Chine.

Jacques Borel International

1957-1970 : création de la chaîne de restaurants. Dès 1971 commence l’internationalisation de

cette entreprise (Espagne-Allemagne-Italie)

ACCOR

1983 : Année de création du groupe ACCOR après une offre publique d’échange réussie par

Novotel sur Jacques Borel International

1990 : Achat de la chaîne Motel 6 aux Etats-Unis

1993 : Création de Asia Pacific Corp suite à la fusion des activités de ACCOR avec Quality

Pacific Corp

Page 72: La stratégie d'internationalisation du groupe ACCOR

65

1997 : Nouvelle structure de direction. Paul Dubrule et Gérard Pélisson deviennent co-

présidents du conseil de surveillance et JM Espalioux est nommé président du directoire

1998 : Développement de la politique de partenariats. Mise en place de partenariats avec Air

France, SNCF, Danone…

2005 : Mise en place de la politique d’Asset right (nouvelle politique de gestion des actifs

immobiliers et hôteliers)

2006 : Changement du mode de gouvernance : adoption du régime de la société anonyme en

conseil d’administration à la place de la société anonyme à directoire et conseil de

surveillance

2009 : Gilles Pélisson directeur général est nommé président du conseil d’Admnistration.

2010 : Les activités hôtellerie et services sont scindées en deux entités juridiquement

distinctes. Entamé en 2009, ce processus s’achève par l’entrée en bourse du pôle services

rebaptisé Edenred. Denis Hennequin est nommé directeur général.

Page 73: La stratégie d'internationalisation du groupe ACCOR

66

• Analyse PESTEL du marché hôtelier international

L’analyse PESTEL Politique – Economique – Sociale – Technologique – Ecologique – Légal

du marché hôtelier international sert à établir le diagnostic externe de l’entreprise. Cette

analyse identifie les facteurs ayant une influence directe sur l’organisation. Ce modèle fait

apparaître des perspectives favorables pour les acteurs du secteur hôtelier international. Le

schéma ci-dessous constitue un exemple de l’analyse PESTEL appliquée au marché hôtelier

international.

Source : Xerfi « World Hotel groups » 2010

Page 74: La stratégie d'internationalisation du groupe ACCOR

67

• Les changements dans la structure des IDE

Document réalisé par Mlle Florence Ory à partir du rapport de l’UNCTAD (United Nation

Conference on Trade and Development) sur les investissements directs à l’étranger en 2009.

The FDI landscape has shifted in favour of developing and transition economies ( percentage share of inward FDI received by developed, developing and transition

economies)

Average 1999 – 2001 Percentage share of inwards IDE 1999 - 2001 Developing

Economies Developed economies

South East Europe and CIS

Percentage share of inwards FDI

21 78 1

DevelopingEconomies

Developedeconomies

South EastEurope andCIS

Average 2007 – 2009 Percentage share of inwards IDE Developing

economies Developed economies

South East Europe and CIS

Percentage share of inwards of FDI

31 63 6

Developingeconomies

Developedeconomies

South EastEurope andCIS

Page 75: La stratégie d'internationalisation du groupe ACCOR

68

• Classement mondial des groupes hôteliers 2011 réalisé par MKG Hospitality

Le classement publié par MKG hospitality, chaque année, sert de référence dans le secteur

hôtelier. MKG hospitality dispose de la plus grande base de données hôtelière au monde hors

USA. Il est le leader du conseil en Europe dans le secteur de l’hôtellerie

Page 76: La stratégie d'internationalisation du groupe ACCOR

69

• Panorama de la présence de ACCOR dans les BRIC

Document réalisé par Mlle Florence Ory d’après le document de référence 2010 et le site corporate www.accor.com En raison de l’accélération de leur croissance économique et de leur potentiel touristique, les

pays émergents sont devenus des cibles privilégiées pour ACCOR. L’Asie est

particulièrement au cœur de la stratégie de développement du groupe.

Etat des lieux de la présence de ACCOR dans les BRIC La Chine : 86 hôtels soit 21940 chambres : 21 Sofitel – 6 Pullman – 1 MGallery, 8 Novotel,

10 Mercure, 38 Ibis, 2 hôtels sans marque

L’Inde : 6 hôtels soit 3 Novotel, 1 Mercure, 2 Ibis

Le Brésil : 143 hôtels soit 22483 chambres dont 4 Sofitel, 1 MGallery, 12 Novotel, 67

Mercure, 48 Ibis, 10 hôtels formule 1

La Russie : 7 hôtels soit 1528 chambres dont 3 Novotel et 4 Ibis

Source : document de référence 2010

Page 77: La stratégie d'internationalisation du groupe ACCOR

70

• Les leaders hôteliers toujours concentrés sur leurs marchés domestiques

Source Xerfi rapport World hotel groups Alberto Balboni

Page 78: La stratégie d'internationalisation du groupe ACCOR

71

Firm strategy and control

factors : economy of

scale, control quality, training,

Firm structural factors : size, international experience, extent of foreign business

Country specific

variables: risk, cultural

distance, level of

development,

Modal choice for each property

• Le modèle syncrétique de Contractor et Kundu Adapté par Mlle Florence Ory

Page 79: La stratégie d'internationalisation du groupe ACCOR

72

Bibliographie Ouvrages

- Gerry Johnson, Kevan Scholes, Richard Whittington, Stratégique , 2008, Paris, Pearson Education France

- Jean-Louis Amedon, Jean-Marie Cardebat, Les nouveaux défis de

l’internationalisation : quel développement international pour les entreprises après la crise ?,2010, Bruxelles, De Boeck

- Tréboul ( J.B), Les stratégies des entreprises de tourisme, 1998, Paris, Presses

Universitaires de France

- Mucchielli ( Jean Louis), Multinationales et Mondialisation , 1998, Paris, Editions du Seuil

- Lemaire ( Jean-Paul), Petit (Gérard), Stratégie d’internationalisation : Développement

international de l’entreprise , 2003, Paris, Dunod

- Farok J Contractor, Lorange P, Cooperative strategies in International business : joint ventures and technology partnerships between firms, 2002, Amsterdam, Boston, Pergamon

- Meier ( Olivier), Schier ( Guillaume), Entreprises Multinationales: stratégie –

restructuration – gouvernance, 2005, Paris, Dunod

- Garette ( Bernard), Dussauge (Pierre), « Les stratégies d’alliance », Les Editions d’organisation, 1995

- Onofre Martorell Cunill The growth strategies of hotel chains: best business practices

by leading companies New York, London, The Haworth Hospitality Press,2006

- Frank M Go and Ray Pine, Globalization strategy in the hotel industry, 1995, London, New-York, Routledge

- Luc Virginie, Impossible n’est pas français : l’histoire inconnue d’ACCOR, leader

mondial de l’hôtellerie, 1998, Paris, A.Michel

- Maurice Thévenet, La culture d’entreprise, 2010, Paris, Presses Universitaires Françaises

- Sylvie Chevrier, Le Management interculturel, 2010, Paris, Presses Universitaires

Françaises

- ACCOR, L’aventure du possible 1967-2007 2007, Paris, Cherche Midi

- Colin Johnson« Locational strategies of international hotel corporations in eastern central Europe » 2002

Page 80: La stratégie d'internationalisation du groupe ACCOR

73

- François Vellas “Economie et politique du tourisme international”, 2007, Paris,

Economica Travaux académiques - John H Dunning, Sumit K Kundu, « The internationalization of the hotel industry –

some new findings from a field study », Management international review, 1995 - Vukasin Susic « The Development and Territorial allocation of hotel chains in the

world », Economics and organization vol 6, n°3, 2009 - Gevork Papiryan, « Note on the global hotel industry”, Richard ivey school of

Business The university of Western Ontario, 2008 - Pierre Dupriez « La globalisation, du modèle économique au modèle culturel »

Pensée plurielle 2001 n°3 - Callot Philippe « De l’internationalisation des entreprises de l’hôtellerie et de la

restauration » Espaces n°144 Mars – Avril 1997 - Sam C Okoroufo, Anthony Koh, Xuemei Jin, “Hotels in China: a comparison of

indigenous and subsidiaries strategies”, Journal of Management research, vol2, n°1, 2010

- John H Dunning, Mattew Mcqueen “ The Eclectic theory of international production :

A case study of the international Hotel industry” Managerial and decision Economics, Vol 2, N°4

- Farok J Contractor, Sumit K Kundu “Modal choice in a world of alliances: Analyzing

organizational forms in the international hotel sector”, Journal of international business studies vol 29 n°2,1998

- Jim O’Neil “ Les BRIC nouvelles grandes puissances dans le future?” Revue

internationale et stratégique, n°72, 2008 - Zhang Zhenjia « Impact de la globalisation sur l’environnement d’opération interne de

l’hotellerie » Canadian Social science,vol 1, n°3, 2005 - Louis Hébert, « Stratégies Internationales et développement d’un leadership

mondial »Gestion vol 27, n°1, 2002 - Giorgiana Surda “The internationalization process and the Asset light Approach”

Romanian Economic and Business review vol 6, n°1.

Page 81: La stratégie d'internationalisation du groupe ACCOR

74

- Marie-Laure Grillat “La gestion des Ressources humaines dans les firmes multinationales françaises: les défis liés à la conquête du marché mondial » Revue française de gestion, n°212, 2011

- Ishen Ketata « L’influence du contexte sur le choix de la stratégie d’implantation »

Revue française de gestion 2006 n°166 Etudes - Direction du tourisme DSPES Bureau de la stratégie Hélène Denizet, « Panorama du

secteur hôtelier », Aout 2005 - MKG hospitality, « 15ème classement hôtelier mondial des groupes hôteliers et de

leurs enseignes », Communiqué de presse le 18 juin 2009 - DAFSA “ ACCOR” 1990

- Alberto Balboni “World Hotel Groups: Market analysis – corporate strategies – 2015

outlook” Xerfi 2010 - Price Waterhouse Coopers et ARFA , « Acquisitions et Partenariats dans les BRIC »,

5ème printemps de l’ARFA 10 juin 2010 - UNCTAD « World Investment report 2009 »

Conférences - Enseignants de sciences économique et sociale et entreprises Lycée Louis Le Grand

Paris « L’adaptation de la stratégie internationale de ACCOR aux spécificités du Brésil » Université d’Automne 2003

- Léo Pierre Yves et Philippe Jean « Services aux entreprises , stratégies d’offre

internationale : adaptation ou standardisation ? » GREFI Université Paul Cézanne, Aix Marseille 3 XVI International RESER Conference Lisbon septembre 28 – 30 2006

- Ray Pine, Hanquin Ziu Zhang, Pingshu Pi « Conceptualization of hotel Chain

development in China : stimulation , evaluation and formation” Fourth international conference Tourism in South East Asia & Indo China: Development, Marketing and sustainability

- Bensebaa Faouzi, « Alliances et processus de croissance internationale des firmes : le

cas de l’hôtellerie », Xème conférence de l’association de Management stratégique 13-14-15 Juin 2001

Page 82: La stratégie d'internationalisation du groupe ACCOR

75

Articles de presse généraliste - « Asset Light or Asset Right ? »The Economist 11 novembre 2010

- Marmet Jérôme « Les grands hôteliers partent à la conquête du monde » Le journal

des finances 26-04-2008 - www.lesechos.com

- www.hotel.online.com

- www.lemonde.fr

Documents d’entreprise Les Documents de référence du groupe ACCOR sur la période 2000-2010 Les Rapports Annuels du groupe ACCOR sur la période 2000-2010 La brochure institutionnelle du groupe ACCOR 2010 Les communiqués de presse du groupe ACCOR 2009 – 2010 ACCOR, L’aventure du possible 1967-2007 2007, Paris, Cherche Midi Sitographie : http://veilletourisme.ca/ www.charte-diversite.com http://www.mkg-hospitality.com http://www.unwto.org/index.php www.htrends.com Le site corporate ACCOR www.accor.com Le site corporate IHG www.intercontinental.com Le site corporate Hilton www.hilton.com Le site corporate Choice www.choicehotels.com Le site corporate Marriott international www.marriott.fr Le site corporate Wyndham hotel group www.wyndham.com Le site corporate Best Western www.bestwestern.com Le site corporate Starwoods hotel and resorts www.starwoodhotels.com Le site corporate Carlson hospitality www.carlsonwagonlitsvoyages.com Le site corporate Hyatt www.hyatt.com

Page 83: La stratégie d'internationalisation du groupe ACCOR

76

Table des matières Introduction ……………………………………………………………………………....................................1 Première Partie : La construction d’une stratégie internationale intégrant les BRIC…....8 Chapitre 1 : Un marché international dominé par les BRIC…………………………………………..9 Section 1 : Les BRIC : une zone de fortes opportunités……………………………………………….9

A- La définition originelle des BRIC proposée par Jim O’Neil……………………………………………..9 B- Les BRIC : un ensemble hétérogène…………………………………………………………………….10 C- Les BRIC : zone à fort potentiel pour l’industrie hôtelière internationale……………………………...12

Section 2 : La refonte des objectifs de ACCOR : d’un marché privilégié à la conquête des BRIC……………………………………………………………………………………………………………..16

A- Un développement en cercles concentriques……………………………………………………………16 B- La formulation d’une nouvelle vision stratégique………………………………………………………18 C- L’analyse SWOT appliquée au groupe ACCOR………………………………………………………..19

Chapitre 2 : La mise en œuvre d’une stratégie de multinationalisation……………………………21 Section 1 : ACCOR ou la difficile internationalisation d’une entreprise de service…………….21

A- L’hôtellerie : un développement international complexe……………………………………………….21 B- Quels sont les avantages recherchés par l’internationalisation ?..............................................................22 C- L’internationalisation des firmes : apports théoriques………………………………………………......23

Section 2 : Une application du modèle OLI à l’internationalisation de l’industrie hôtelière….25 A- L’avantage spécifique…………………………………………………………………………………...25 B- La localisation…………………………………………………………………………………………...26 C- L’internalisation…………………………………………………………………………………………27

Deuxième partie : Les enjeux de la détermination d’une modalité d’entrée dans les BRIC…………………………………………………………………………………………………………….28 Chapitre 1 : L’identification des différentes stratégies d’entrée possibles pour le groupe ACCOR………………………………………………………………………………………………………....28 Section 1 : Les modalités d’entrée propres à l’industrie hôtelière internationale………………..28

A- Quels enjeux ?...........................................................................................................................................29 B- Avantages et Inconvénients……………………………………………………………………………..29

Section 2 : L’identification des facteurs déterminant les modes d’entrée d’ACCOR dans les BRIC……………………………………………………………………………………………………………..32

A- Quels modèles économiques ?..................................................................................................................32 B- Des difficultés propres aux BRIC……………………………………………………………………….34

Chapitre 2 : Les points forts de la stratégie de ACCOR dans les BRIC…………………………...37 Section 1 : Le choix d’une stratégie de partenariat…………………………………………………….37

A- Un modèle de développement original………………………………………………………………….37 B- Une typologie des alliances nouées par ACCOR……………………………………………………….39

Section 2 : L’importance de la stratégie de hub and spoke…………………………………………..40 Section 3 : L’Asset right : un mode de détention unique des hôtels………………………………..41

A- Concept original ou Asset Light ?............................................................................................................41 B- L’asset right au service de l’expansion………………………………………………………………….42

Page 84: La stratégie d'internationalisation du groupe ACCOR

77

Troisième partie : La construction d’un modèle de développement made in ACCOR…..44 Chapitre 1 : Stratégie de l’immatériel et avantages compétitifs……………………………………..44 Section 1 : Une culture d’entreprise au service de l’internationalisation…………………….........45

A- Une définition de la culture ACCOR……………………………………………………………………45 B- Les outils de diffusion…………………………………………………………………………………...46 C- Un rôle clé : la cohésion et l’internationalisation……………………………………………………….47

Section 2 : Une combinaison d’actifs immatériels pertinente………………………………………..48 A- Un facteur de réussite……………………………………………………………………………………48 B- Les marques et le capital humain : deux actifs reconnus et valorisés…………………………………...49

Chapitre 2 : Une nécessaire adaptation aux spécificités des BRIC…………………………………52 Section 1 : Un enjeu majeur : la gestion de l’interculturel……………………………………………52

A- Le problème multiculturel ?......................................................................................................................53 B- L’adoption d’un management interculturel……………………………………………………………..53 C- Des outils de management de l’interculturalité spécifiques…………………………………………….54

Section 2 : Standardisation ou adaptation à la diversité………………………………………………56 A- Repenser l’offre de services……………………………………………………………………………..56 B- Repenser le management international………………………………………………………………….58

Conclusion……………………………………………………………………………………………………..60 Annexes…………………………………………………………………………………………………………62 Bibliographie………………………………………………………………………………………………….72

Page 85: La stratégie d'internationalisation du groupe ACCOR

78

Résumé du mémoire

Notre ambition à travers cette étude était la compréhension de la stratégie de ACCOR,

premier groupe hôtelier français et européen ainsi que cinquième groupe mondial, au Brésil –

Inde – Russie – Chine. Cet ensemble de pays communément regroupé sous l’acronyme BRIC

présente de réelles perspectives de croissance pour les groupes hôteliers mondiaux

particulièrement dans un contexte de saturation des marchés domestiques. Néanmoins, les

BRIC, loin d’être facile d’accès, nécessitent efforts d’adaptation et forte implication des

entreprises. En nous appuyant sur l’analyse des rapports annuels d’activité de ACCOR sur la

période 2000 – 2010 et l’application de modèles théoriques à cette multinationale hôtelière,

nous avons identifié les enjeux d’une telle stratégie d’internationalisation. Les spécifités de ce

groupe, id est son fort degré d’internationalisation et sa nationalité française dans un univers

dominé par les groupes américains, en ont fait un sujet d’étude complexe. Il résulte de notre

recherche que le groupe ACCOR a su créer une stratégie lui assurant un développement

international et une pénétration de ces nouveaux marchés BRIC. Par la détermination d’une

modalité d’entrée adaptée aux contraintes de ces eldorados et la construction d’un réel modèle

de développement impliquant la mobilisation de ses avantages compétitifs, cette

multinationale a su tirer profit de ces zones d’opportunités.

Mots clés : Multinationale – Stratégie d’entreprise – ACCOR – BRIC – hôtellerie internationale