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La reine Élisabeth II détient légalement le pouvoir exécutif au Royaume-Uni. Autrement dit, c’est la reine qui est est à la tête du gouvernement de ce pays. Cela fait de la reine le chef de l’État du Royaume-Uni. Son Premier ministre, actuellement Monsieur David Cameron, n’est qu’un chef de gouvernement.
Cette position de chef de l’exécutif et donc de chef d’État ne lui a pas été concédée par une loi. Elle a toujours appartenu à la reine et ses ancêtres qui
ont régné sur les trônes du Royaume-Uni, de Grande-Bretagne et d’Angleterre, tant en vertu des anciennes coutumes que de la common law anglaises, et ceci au moins depuis le règne de Guillaume le Conquérant sur
l’Angleterre commencé en 1066.
Élisabeth II, chef du pouvoir exécutif, et donc chef de l’État du Royaume-Uni,
depuis 1952.
On voit ici Élisabeth II peu après son couronnement.
Son fils, Charles, Prince de Galles, est l’héritier du trône.
Charles sera donc normalement le prochain roi du Royaume-Uni et
du Canada à la mort de sa mère, la reine Élisabeth. Il deviendra le roi
Charles III.
Si l’on voulait modifier cet ordre de succession, il faudrait une loi
adoptée par le Parlement de Westminster. Et rappelons que pour adopter une loi, il faut la sanction de la reine ou du roi.
Conseil privé de la reine
(ou du roi)
Les rois et reines d’Angleterre, de Grande-Bretagne et du Royaume-Uni ont exercé le
pouvoir exécutif avec l’aide de leurs ministres, qu’on appelait aussi autrefois des
conseillers.
Ces ministres (ou conseillers) ont été réunis au sein d’un organisme appelé le Conseil
privé. Ce Conseil, créé vers 1540 par Thomas Cromwell, secrétaire du roi Henri VIII, existe
toujours en droit, bien que la réalité du pouvoir lui ait échappé (nous verrons cela
bientôt).
Conseil privé de la reine
Comme chef du pouvoir exécutif, Élisabeth II jouit toujours du pouvoir légal de nommer les membres du Conseil privé.
Toutefois, comme pour ses autres pouvoirs, elle exerce celui-ci en
suivant normalement les recommandations de son Premier ministre (nous verrons également
plus loin comment le Premier ministre est lui-même choisi).
Évolution du Conseil privé : apparition du Cabinet
Le Conseil privé a donc été créé vers 1540. Son fonctionnement a cependant suivi une mutation au cours du siècle suivant.
Parce que les rois et reines répugnaient à congédier les membres du Conseil privé, de peur de s’en faire des ennemis, leur nombre a
augmenté sans cesse, au point où il est devenu difficile de gouverner en réunissant tout le Conseil.
Les conseillers de la Couronne étaient simplement devenus trop nombreux.
Évolution du Conseil privé : apparition du Cabinet
Pour cette raison, mais aussi parce qu’ils doutaient de la fidélité de plusieurs membres du Conseil privé, les rois qui ont régné de 1660 à 1702, Charles II, Jacques II et Guillaume III, bien que décidés à ne pas abolir le Conseil privé, ont choisi de gouverner le pays en ne consultant qu’un petit nombre de ses membres. Ils ont confié à ces derniers des fonctions administratives précises, des dossiers à gérer, autrement dit des ministères, alors que les autres conseillers
n’avaient plus aucune responsabilité administrative et n’étaient plus réellement consultés par le monarque.
Ce cercle de conseillers actifs, détenteurs de portes-feuilles ministériels, a été appelé le Cabinet.
Le Cabinet
Si on doit le définir, il faut donc dire du Cabinet qu’il est un simple comité informel composé d’un certain nombre de
membres du Conseil privé. Le Cabinet n’a pas d’existence légale. Aucune loi n’en fait mention.
L’importance du Cabinet, depuis 1700, vient de ce qu’il réunit les membres actifs du Conseil privé, ceux à qui la reine (ou le roi) a confié des responsabilités précises dans la gestion de son
gouvernement (comme la gestion d’un ministère).
Le Cabinet
Aujourd’hui, non seulement les conseillers privés qui ne sont pas membres du Cabinet ont-ils été écartés de l’exercice réel du
pouvoir, mais même le monarque anglais ne participe plus aux réunions de travail de ses ministres.
Seul le Cabinet exerce donc la réalité du pouvoir exécutif, bien qu’il le fasse toujours au nom de la reine Élisabeth II qui en est
la détentrice légale.
Depuis 1700, la reine (ou le roi) ne réunit donc plus l’ensemble des membres du Conseil privé que pour des rencontres de nature protocolaire (c.-à-d.
cérémoniale). On voit ici une telle rencontre en présence de la jeune reine Victoria (règne 1837-1901).
La reine en conseil
On employait autrefois l’expression la reine en conseil ou le roi en conseil pour désigner le monarque, lorsqu’il siégeait au milieu de son Conseil privé et
dirigeait vraiment son gouvernement.
Aujourd’hui, on sait que seuls quelques membres du Conseil privé, ceux à qui la reine Élisabeth II a confié un poste de ministre, exercent la direction réelle du gouvernement au sein du nouvel organisme informel appelé le Cabinet.
Néanmoins, on emploie toujours l’expression la reine en conseil dans les lois du Parlement pour désigner la reine, lorsque celle-ci exerce ses pouvoirs à la
suggestion des membres du Cabinet (voir l’article 13 de la L.C. de 1867 en ce qui concerne le Canada).
Nominations aux postes de ministre du gouvernement
Encore ici, pour des motifs politiques et non pas juridiques, la reine Élisabeth II exerce son
pouvoir de nommer des personnes à des postes de ministre sur la seule recommandation du
Premier ministre.
Nous verrons plus loin comment le Premier ministre est lui-même choisi.
Comme le Cabinet (l’organisme qui réunit tous les ministres en fonction) est un comité du
Conseil privé, cela signifie que le reine, avant de nommer un nouveau ministre, doit d’abord le nommer à titre de membre du Conseil privé.
SUR LE CONSEIL PRIVÉ ET LE CABINET, lire le livre d’Introduction au droit canadien, aux
pages 169 à 172.
Nomination aux postes de ministre du gouvernement
Bien qu’il soit de tradition qu’un ministre soit également un membre de la Chambre des communes, ou tout au moins un
membre de la Chambre des lords, la reine, toujours à la suggestion du Premier ministre, possède le pouvoir de nommer n’importe
quelle personne à un poste de ministre (pourvu que cette personne ait d’abord été nommée par elle au Conseil privé).
En effet, la fonction de député ou de lord du Parlement et celle de ministre sont deux emplois distincts, bien qu’une même personne
remplisse souvent les deux emplois en même temps.
Nomination aux postes de ministre du gouvernement
Lorsqu’une personne siège au parlement, c’est toujours à titre de législateur (député des communes ou lord du parlement), et
lorsqu’elle est invitée à siéger à la table du Cabinet, c’est toujours à titre de membre du Conseil privé et ministre du gouvernement.
Dans un cas cette personne travaille à titre comme membre du pouvoir législatif et dans l’autre comme membre du pouvoir
exécutif. Elle tire deux salaires puisqu’elle exerce deux emplois distincts.
On voit sur cette photo l’ancien Premier ministre travailliste, Monsieur Gordon Brown, ainsi que plusieurs autres ministres, lors d’une réunion du Cabinet anglais.
Autre réunion d’une ancienne formation du Cabinet anglais où l’on voit la presque totalité des ministres en poste.
Secret du Cabinet
Le Cabinet, ce comité du Conseil privé qui réunit les ministres actuels du gouvernement, tient ses rencontres en privé. Il existe donc un secret du cabinet
que tous les ministres sont tenus d’observer. Violer cette règle pourrait provoquer le congédiement du ministre fautif.
Secret du Cabinet (raisons)
Première raison
Tout d’abord, les ministres doivent pouvoir discuter entre eux librement de toute question avant d’arriver à une décision, que tous soutiendront par la
suite publiquement, solidaires les uns des autres.
En effet, le Cabinet agit publiquement comme une entité indivisible, autrement dit comme un tout. Nous parlons alors d’un principe de solidarité
ministérielle (principle of Cabinet solidarity). Il s’agit d’une convention constitutionnelle ou convention de la constitution (règle politique et non
juridique, rappelons-le).
Secret du Cabinet (raisons)
Seconde raison
Ensuite, les ministres doivent pouvoir prendre des décisions qui resteront secrètes, au moins pendant un certain temps, afin de protéger les intérêts
légitimes de l’État.
Par exemple, on ne discute pas de la négociation des termes d’un traité international en public, pas plus qu’une décision de déclarer une guerre, ou de la stratégie à adopter pour négocier une convention collective de travail avec
les employés de l’État.
Pouvoirs du cabinet
Légalement, le rôle du Cabinet est de conseiller la reine sur la direction de son gouvernement. En pratique, comme la reine suit presque toujours les avis de
ses ministres, le Cabinet gouverne à sa place.
Le Cabinet exerce deux types de pouvoirs : des pouvoirs qui lui appartiennent en propre et des pouvoirs qu’il exerce en pratique à la place de la reine.
Voyons ces pouvoirs plus en détail (regarder les tableaux du livre d’Introduction au droit canadien, pages 175 et 176).
Pouvoirs du cabinet :
pouvoirs qui lui appartient en propre
Le Cabinet exerce en propre les pouvoirs qui ont été délégués collectivement ou à ses membres individuellement par une loi du
Parlement.
Il s’agit des pouvoirs réglementaires ou administratifs portant sur l’application des lois du Parlement.
Lire les Lettres patentes servant à la nomination du gouverneur général.
SUR LES POUVOIRS RÉGLEMENTAIRES, lire le livre d’Introduction au droit canadien, pages 160, 161, 167 et 168)
Pouvoirs du cabinet :
pouvoirs qu’il exerce à la place de la reine
Et le Cabinet fait des recommandations à la reine, pratiquement toujours suivies, sur la manière dont celle-ci doit exercer les prérogatives de la
Couronne.
Ces prérogatives de la Couronne sont les pouvoirs ou droits qui ont toujours appartenus en propre au monarque anglais depuis les temps les plus anciens, comme ceux de signer des traités, de déclarer la guerre, de
conduire les armées, de nommer des juges, de nommer des ambassadeurs, etc.).
Continuons sur ce sujet.
Pouvoirs du Cabinet (prérogatives de la Couronne)
Les monarques anglais ont donc de tous temps exercé un grand nombre de prérogatives ou pouvoirs ou droits.
Dans la mesure où le Parlement ne les a pas abrogés en adoptant une loi, ces
prérogatives ou pouvoirs appartiennent toujours à la reine.
Voici quelques prérogatives ou pouvoirs de la Couronne liés à l’exercice du pouvoir exécutif et judiciaire, qui sont exercés par la reine à la suggestion de
ses ministres du Cabinet :
1. La reine dirige le gouvernement ; 2. La reine est le chef des armées ; 3. La reine déclare la guerre et signe la paix ; 4. La reine signe les traités internationaux ; 5. La reine nomme et congédie les ambassadeurs anglais et reçoit les
ambassadeurs étrangers ; 6. La reine nomme les juges des cours royales de justice ; 7. La reine peut accorder un pardon aux criminels ; 8. La reine jouit également d’immunités dont son gouvernement
bénéficie, comme celle de ne pas payer de taxes ou d’impôts.