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La plaisance à l'aune de la réforme du Code disciplinaire et pénal de la marine marchande
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Ministère de l'Écologie, du Développement durable, des
Transports et du Logement
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Direction des Affaires Juridiques
Bureau des affaires juridiques de la mer
La plaisance à l'aune de la réforme du Code
disciplinaire et pénale de la marine
marchande
Présenté par Jérôme HEILIKMAN
Institut d'Études Judiciaires – Université de Paris Ouest Nanterre la Défense
Sous la direction de Jean-Christophe IZARD
Administrateur en chef des affaires maritimes,
Chef du bureau des affaires juridiques de la mer,
à la direction des affaires juridiques
Stage du 17 janvier 2011 au 15 avril 2011
La plaisance à l'aune de la réforme du Code disciplinaire et pénal de la marine marchande
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REMERCIEMENTS
Je souhaite remercier M. Jean-Christophe IZARD, chef de bureau, et M. Serge FOCT, adjoint au
chef de bureau, pour leurs conseils et leurs remarques constructives tout au long de ce mémoire
ainsi que pour l'ensemble de leurs démarches auprès de la Direction des Affaires Maritimes et du
Conseil Supérieur de la Navigation de Plaisance et des Sports Nautiques.
M. Antoine PICHON, Secrétaire Général du CSNPSN pour ses renseignements et ses adresses
utiles.
Mes remerciements s'adressent également à M. Denis CLERIN, adjoint au chef de la mission, M.
David PERRIN-PILLOT, chargé de mission et M. Alain MOUSSA, chef de bureau, pour leurs
explications techniques sur la réforme du Code disciplinaire et pénal de la marine marchande.
Enfin j'adresse toute ma gratitude pour la disponibilité des responsable du centre de ressources
documentaires du ministère.
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SOMMAIRE
INTRODUCTION 4
I – La réorganisation du système juridictionnel maritime : l'affirmation d'une
unité du monde maritime 7
A – Une procédure unique conforme au droit procédural commun et réaffirmant
le périmètre maritime 7
B – Une définition unique de l'infraction maritime 15
II – La réorganisation du système juridictionnel maritime : l'adaptation aux
particularismes de la plaisance 21
A – Une nouvelle organisation du Tribunal maritime pour connaître des
« infractions plaisance » 21
B – Une répression de la délinquance maritime adaptée aux spécificités de la
plaisance 29
CONCLUSION 33
BIBLIOGRAPHIE 35
ANNEXES 38
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INTRODUCTION
La réforme du Code disciplinaire et pénal de la marine marchande est, dans le monde maritime, un
serpent de mer vivace, réforme faite d'hésitations et de palinodies, maintes fois évoquée et
réclamée, mais jamais réellement accomplie.
L'obsolescence générale du Code disciplinaire et pénal de la marine marchande liée notamment aux
évolutions du droit pénal et de l'entrée en vigueur de la Convention Européenne de sauvegarde des
Droits de l'Homme et des Libertés fondamentales, a conduit à une nécessaire réforme.
Le Tribunal maritime commercial, fruit d'une histoire chaotique, est issu des Tribunaux de
l'amirauté de l'Ancien Régime dont le principe de fonctionnement remonte à l'Ordonnance sur la
marine de Colbert de 16811. La conscience professionnelle, le sens de l'obéissance et le respect de
l'autorité exigé des marins étaient une impérieuse nécessité afin de réaliser l'harmonie collective
indispensable à l'expédition maritime. L'évidence d'une telle discipline à bord justifiait la création
d'un droit disciplinaire spécifique.
Un siècle plus tard, les juridictions d'exception n'ayant plus les faveurs du pouvoir révolutionnaire,
les Tribunaux maritimes commerciaux furent supprimés en 1791. Cependant la spécificité maritime
a eu raison de la vague révolutionnaire et une juridiction spécifique fut rétablie en matière maritime
par un décret du 24 mars 1852 qui institua les tribunaux maritimes.
Pour autant, le fonctionnement de ces juridictions ne donna pas entière satisfaction. Il fut combattu
par les libéraux au cours du 19ème siècle qui leur reprochaient leur particularité, leur subordination
au pouvoir, l'inégalité des citoyens devant la justice et, en matière pénale, la rapidité et la sévérité de
la répression.
Ils furent de nouveau supprimés par la loi du 17 décembre 1926 au profit des juridictions du droit
commun.
1 Ordonnance n°1681-08-00 du 31 juillet 1681 de la marine relative à la police des ports, côtes et rivages de la mer,
dite ordonnance de Colbert.
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Le désaccord du monde maritime et les réclamations tendant au rétablissement des tribunaux
maritimes furent entendus. Le décret-loi du 29 juillet 1939 consacra les Tribunaux maritimes
commerciaux tels qu'ils existaient jusqu'à aujourd'hui. Leur principale justification repose sur la
technicité du milieu maritime qui exige des compétences théorique et pratique.
Les neufs Sages de la rue Montpensier ont donné l’impulsion d’une nécessaire réforme du Code
disciplinaire et pénal de la marine marchande par la décision du 2 juillet 2010. Espérons qu’elle
puisse résonner encore longtemps, telle une corne de brume invitant le juriste à anticiper les
dangers.
Cette décision était attendue, voire même prévisible. En effet, la gestation d'une nouvelle
organisation de cette juridiction d'exception a été amorcée par une loi du 24 août 19932 instituant un
magistrat professionnel du siège du Tribunal de Grande Instance dans le ressort duquel le tribunal
maritime est constitué, comme président de séance, en lieu et place d'un administrateur des affaires
maritimes.
De surcroît, la nécessaire réforme de la juridiction fut mise en lumière en 2003 par le monde des
juristes, des Affaires Maritimes et des Gens de Mer qui avaient constitué un groupe de travail ayant
pour mission « d'analyser les évolutions actuelles de fonctionnement des tribunaux maritimes
commerciaux et d'en proposer les évolutions ».
Cette même année le monde juridique, riche de proposition, fut marqué par le rapport dit
« Guinchard » sur la répartition des contentieux intitulé « L'ambition raisonnée d'une justice
apaisée », rapport qui mettait en évidence l'obsolescence générale du Code disciplinaire et pénal de
la marine marchande.
Finalement, la décision du Conseil constitutionnel qui a conduit à l'abrogation de l'article 90 du
Code disciplinaire et pénal du Code de la marine marchande, tout en constituant une consécration
constitutionnel au Tribunal maritime commercial, invite le législateur à penser son adaptation au
regard de l'évolution du droit.
2 Loi n° 93-1013 du 24 août 1993 portant réforme de la procédure pénale.
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Si la réforme du Code disciplinaire et pénal de la marine marchande circonscrit l'ensemble des gens
de mers, notre étude sera volontairement axée sur le domaine de la plaisance. A cet égard, il
conviendra d'étudier la réorganisation du système juridictionnel maritime dictée par une volonté
d'unité du monde maritime entre gens de mer professionnels et plaisanciers (I) tout en prenant soin
de prendre en compte les particularismes de la plaisance (II).
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I – La réorganisation du système juridictionnel maritime : l'affirmation d'une
unité du monde maritime
Par sa décision du 10 juillet 20103, le Conseil constitutionnel a finalement permis une
reconnaissance constitutionnelle du Tribunal maritime commerciale. Dans cette lignée, la réforme
doit permettre d'assurer le fonctionnement et l'adaptation de la juridiction spécialisée à l'évolution
des principes directeurs du droit commun, tout en réaffirmant son périmètre maritime (A). Cette
orientation suppose également une meilleure définition de l'infraction maritime (B).
A – Une procédure unique conforme au droit procédural commun et réaffirmant le
périmètre maritime
Le maintien du Tribunal maritime commercial, dont la structure parait aujourd'hui anachronique, ne
saurait être envisagé qu'à la condition de modifications importantes de ses règles de procédure.
En ce sens, il convient d'appréhender cette nécessaire réorganisation du système pénal maritime, de
la phase d'enquête au déroulement du jugement et des voies de recours effectives.
1 – De l'enquête à l'instruction : une coopération entre l'administration des affaires maritimes et
le Ministère Public
Dans un souci de mise en conformité du nouveau Code pénal maritime avec les principes du droit
commun, le projet d'ordonnance portant réforme des tribunaux maritimes et de la procédure
applicable instaure de nouvelles modalités d'enquête et d'instruction.
Suite à la constatation d'une ou plusieurs infractions, l'article 7 du projet d'ordonnance prévoit que
« le chef du service déconcentré inter-régional ou régional de l'État chargé de la mer, peut
procéder, dès qu'il a connaissance de faits susceptibles de constituer une infraction maritime, à une
enquête nautique (…). Il en informe immédiatement le procureur de la République compétent et lui
adresse le rapport d'enquête dès sa clôture.».
3 Décision n° 2010-10 QPC du 02 juillet 2010
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Il ressort de cette disposition, que l'administration des affaires maritimes peut diligenter une enquête
si trois conditions cumulatives sont respectées. Ces conditions présentent des difficultés
sémantiques et dont la précision est nécessaire pour permettre de circonscrire les limites d'action
des affaires maritimes.
Tout d'abord, l'enquête diligentée par l'administration des affaires maritimes doit nécessairement
émaner de faits susceptibles de constituer une infraction maritime, terme qui sera étudié
ultérieurement.
Ensuite, l'enquête diligentée doit présenter un caractère nautique.
Aux termes de l'article 33-1 de l'actuel Code pénal et disciplinaire de la marine marchande
« l'administrateur des affaires maritimes, saisi par le capitaine ou par l'un des officiers ou agents
énumérés au paragraphe 1er, alinéa 2, de l'article 26, ou agissant d'office, complète, s'il y a lieu,
l'enquête effectuée par le capitaine en exécution de l'article 28, ou procède dès qu'il a connaissance
de l'infraction, à une enquête préliminaire.».
Il en ressort qu'une enquête présente un caractère nautique si elle émane d'un événement mettant en
danger la préservation du navire et de sa cargaison et la sécurité des personnes se trouvant à bord.
Autrement dit, l'enquête sera nautique si elle procède d'un événement commis à bord ou lors d'une
navigation maritime.
Enfin, l'administration des affaires maritimes doit informer immédiatement le procureur de la
République pour lui adresser son rapport d'enquête.
Cette troisième et dernière condition met en place un véritable « partenariat » signe de
complémentarité en lieu et place de tout risque de concurrence4. Autrement dit, cette disposition
tend à proposer une relation entre l'administration des affaires maritimes et le Ministère Public
s'inscrivant dans le cadre et le respect des procédures de droit commun.
4 A ce propos, en 1992, le comité central d'enquête sur le coût et le rendement des services publics avait souligné dans
son rapport sur « La coordination des actions de l'État en mer » les difficultés à sanctionner les infractions
commises en mer en raison de la dispersion des poursuites.
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De surcroît, par l'obligation faite aux affaires maritimes d'informer immédiatement le procureur de
la République et de lui adresser le rapport d'enquête, il est évident que le Parquet conserve
l'initiative et la conduite des enquêtes qui seront nécessairement effectuées conformément aux
règles du Code de procédure pénale.
L'administration des affaires maritimes se trouve auxiliaire du Parquet, subordonnée à son avis
final, lui seul déterminant le sort de l'enquête, tout en conservant ses missions régaliennes dans la
mise en œuvre d'une politique pénale maritime puisqu'elle peut « demander au procureur
territorialement compétent l'accomplissement de tout acte d'enquête qui s'avère nécessaire »
In fine, l'administration des affaires maritimes pourra bénéficier de la logistique, du savoir et du
savoir-faire des Parquets en matière de procédure pénale mais aussi et surtout, ce partenariat permet
d'éviter les risques de contrevenir aux principes posés par la Convention européenne de sauvegarde
des droits de l'homme et des libertés fondamentales.
Aux termes de l'article 36 ter de l'actuel Code disciplinaire et pénal de la marine marchande « les
administrateurs des affaires maritimes et les commissaires rapporteurs sont chargés de l'instruction
des délits ou contraventions relevant de la compétence des tribunaux maritimes commerciaux et
investis à ce titre des pouvoirs conférés aux juges d'instruction par le Code de procédure pénale,
notamment pour la délivrance de mandats de comparution, d'amener, de dépôt et d'arrêt. »
La principale difficulté résidait dans la confusion des phases d'enquête et d'instruction dans les
mains de l'administration des affaires maritimes. Il importe de souligner que pendant la phase
d'instruction, l'administrateur des affaires maritimes avait le pouvoir de mettre en détention
provisoire. Une distorsion est observée avec le droit commun dans la mesure où la loi du 15 juin
20005 a privé le juge d'instruction de ce pouvoir pour le transférer au juge des libertés et de la
détention.
Aujourd'hui, l'exigence de conformité du droit commun semble avoir raison du rôle primordial joué
5 Loi n°2000-516 du 15 juin 2000 renforçant la protection de la présomption d’innocence et les droits des
victimes, J.O n°138 du 16 juin 2000, p. 9038.
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par l'administration des affaires maritimes bien que celui-ci soit justifié par la nature particulière des
affaires et la compétence de ce corps de fonctionnaires.
Pour pallier les difficultés, différentes modalités d'exercice de l'instruction était envisageables.
Par exemple, à l'instar des pôles d'instruction, un système de collégialité hybride de l'instruction est
mise en place avec la présence d'un magistrat professionnel et d'un fonctionnaire des affaires
maritimes.
Cette solution permettrait de prendre en compte les spécificités des affaires maritimes et
conforterait la cohérence de la nécessité d'un tribunal spécialisé pour les infractions maritimes. Pour
autant, la présence des affaires maritimes sur un plan d'égalité avec un juge professionnel durant la
phase d'instruction est critiquable et supposerait l'affectation de personnels qualifiés juridiquement.
C'est pourquoi, une solution plus opérationnelle est la possibilité pour l'administration des affaires
maritimes, non pas de devenir un « juge d'instruction de la mer » mais un adjoint du juge
d'instruction professionnel. Dans cette optique, le rôle du fonctionnaire des affaires maritimes est
consultatif, ce dernier ayant la possibilité d'émettre des avis motivés afin de demander au juge
d'instruction de procéder à des mesures utiles.
En ce sens, l'article 16 alinéa 2 du projet d'ordonnance prévoit que « le chef du service déconcentré
inter-régional de l'État chargé de la mer (…) [peut] assister ou participer aux interrogatoires,
auditions et confrontations dans les conditions fixées par les articles 119 et 120 du Code de
procédure pénale ».
Dès lors, si l'instruction est confiée aux juridictions de droit commun, les affaires maritimes peuvent
intervenir non seulement au cours de l'instruction mais également par le bais de demandes d'avis ou
d'expertises. La procédure est circonscrite par le droit commun, tout en permettant à l'instruction
d'être teintée d'un fort caractère maritime.
Par ailleurs, le rôle important des affaires maritimes durant cette phase d'instruction se trouve
renforcé par l'alinéa 1er de l'article 16 du projet d'ordonnance selon lequel « le chef du service
déconcentré inter-régional de l'État chargé de la mer, peut se faire communiquer une copie de la
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procédure d'instruction et proposer par avis motivé au procureur de la République compétent (…)
de faire appel des ordonnances de la juridiction d'instruction ».
2 - La phase de poursuite et le statut du Ministère Public
La fonction du Ministère Public lors de l'audience, est selon l'article 91 du Code disciplinaire et
pénal de la marine marchande est assurée par « un commissaire rapporteur, appartenant au corps
des officiers de marine, et désigné par le préfet maritime ou par le chef d'arrondissement
maritime ».
L'article 91 ajoute comme condition que ce commissaire rapporteur n'est désigné en qualité de
Parquet que lorsque le Tribunal maritime commercial connaît d'un des délits prévus « aux articles
80 à 85 et 87 » autrement dit les infractions relatives aux abordages, échouements et autres
accidents de navigation.
Il ressort que la fonction de Ministère Public n'est assuré que partiellement, en fonction de la nature
de l'infraction pendante devant le Tribunal. Or l'article 32 du Code de procédure pénal dispose que
le Ministère public « est représenté auprès de chaque juridiction répressive. Il assiste aux débats
des juridictions de jugement ; toutes les décisions sont prononcées en sa présence. Il assure
l'exécution des décisions de justice ». Il est permis d'affirmer que la présence temporaire et non
continue du Ministère Public au sein d'une juridiction répressive n'est pas conforme au droit
commun.
En ce sens, si aux termes de l'article 1er du Code de procédure pénale « l'action publique pour
l'application des peines est mise en mouvement et exercée par les magistrats ou par les
fonctionnaires auxquels elle est confiée par la loi », il paraît opportun eu égard aux exigences de la
Cour Européenne des Droits de l'Homme, que la fonction du Ministère Public soit confiée à un
magistrat professionnel et indépendant. Ce dernier aurait alors toute discrétion pour décider soit de
mettre en œuvre l'action publique, soit de la confier aux affaires maritimes.
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3 – Du jugement aux voies de recours
Le fonctionnement des Tribunaux maritimes, à savoir sa formation de jugement doit également se
conformer aux principes édictés par la Convention Européenne des Droits de l'Homme.
Saisi de la question prioritaire de constitutionnalité n°2010-10, le Conseil constitutionnel a rendu
une décision le 2 juillet 2010 dans laquelle il va déclarer que la composition du Tribunal maritime
commercial est inconstitutionnelle sur le fondement de l'article 16 de la Déclaration des Droits de
l'Homme et du Citoyen :
« Considérant que, parmi les cinq membres du tribunal maritime commercial, deux d'entre eux,
voire trois si le prévenu n'est pas un marin, ont la qualité soit d'officier de la marine nationale soit
de fonctionnaire ou d'agent contractuel de l'État, tous placés en position d'activité de service et,
donc, soumis à l'autorité hiérarchique du Gouvernement ; que, dès lors, même si la disposition
contestée fait obstacle à ce que l'administrateur des affaires maritimes désigné pour faire partie du
tribunal ait participé aux poursuites ou à l'instruction de l'affaire en cause, ni cet article ni aucune
autre disposition législative applicable à cette juridiction n'institue les garanties appropriées
permettant de satisfaire au principe d'indépendance ; que, par suite, sans qu'il soit besoin
d'examiner les autres griefs, ces dispositions doivent être déclarées contraires à la Constitution »
La présence de fonctionnaires au sein de la juridiction d'exception a donc été remise en cause en
raison de leur soumission à un pouvoir hiérarchique faisant naître un doute sur leur impartialité6 et
leur indépendance7.
6 Formule de la Cour Européenne des Droits de l'Homme dans un arrêt du 23 avril 1983, Établissement et autres c/
Autriche et du 22 octobre 1984, Sramek et autres c/ Autriche.
7 Le Conseil constitutionnel a rappelé que le principe d'indépendance est indissociable de l'exercice de fonctions
juridiques (Conseil constitutionnel, 21 février 1992, n°92-305 DC). Ce principe a été étendu par la suite à l'exercice
de fonctions juridictionnelles par des juges non professionnels (Conseil constitutionnel, 20 février 2003, n°2003-466
DC).
Au surplus, dans la foulée de la Cour Européenne des Droits de l'Homme (CEDH, 9 novembre 2006, n°65411/01,
Sacilor Lormines c/ France), l'assemblée plénière de la Cour de cassation (Ass. Plen, 22 décembre 2000, n°99-
11303 et n°99-11615) et le Conseil d'État (CE, 30 janvier 2008, n°274556, Association Orientation et rééducation
des enfants et adolescents de la Gironde) avaient jugé que la présence au sein d'une juridiction d'un fonctionnaire
soumis par définition au pouvoir hiérarchique de son administration portait atteinte à l'indépendance de la
juridiction.
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Désormais, aux termes de l'article 18 du projet d'ordonnance portant réforme des tribunaux
maritimes et de la procédure applicable « Le tribunal maritime est présidé par un magistrat désigné
après avis de l'assemblée générale du tribunal de grande instance auprès duquel il est placé. [Il]
est en outre composé de deux assesseurs désignés par arrêté conjoint du ministre chargé de la
justice et du ministre chargé de la mer ».
Concernant le remaniement de la composition du Tribunal, autrement dit les modalités de
remplacement des juges fonctionnaires qu'ils soient civils ou militaires, celles ci ne présentent pas
de réelles difficultés concernant la marine marchande. La formation professionnelle des gens de
mer, la détention de titre de formation ainsi que l'expérience dans l'exercice des fonctions à bord,
permettront aisément au Président du Tribunal de désigner des assesseurs marins au commerce ou à
la pêche à partir d'une liste qui pourrait être établie après avis auprès des organisations
professionnelles représentatives.
Tout autre est la difficulté concernant la présence d'assesseurs issus du monde de la plaisance. Cette
étude particulière fera l'objet d'un développement ultérieur. Cependant il est d'ores et déjà utile de
mettre en relief que la représentation des plaisanciers est essentielle compte tenu de l'importance du
contentieux lié à la plaisance que connaissent les Tribunaux maritimes commerciaux.
A contrario du monde professionnel, la plupart des plaisanciers ne disposent ni d'une formation
maritime théorique ni de titres de navigation. Pour appréhender les modalités de désignation des
« assesseurs-plaisanciers » il faudra alors dissocier le monde de la plaisance professionnelle de celui
de la plaisance d'agrément, l'un minoritaire et constitué de gens de mer aux formations
professionnelles complètes et aux acquis théoriques solides, l'autre majoritaire et symbole du
tourisme, formé de terriens s'aventurant en mer dont l'assise des connaissances maritimes est parfois
plus fragile.
En tout état de cause, la composition du Tribunal devra présenter toutes les garanties requises pour
évincer tout doute éventuel quant à l'indépendance et l'impartialité des juges.
Concernant le droit à réparation, jusqu'alors le Tribunal maritime commercial ne connaissait pas de
l'action civile qui restait soumise à la compétence des tribunaux de droit commun.
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En disposant que « les infractions (…) sont poursuivies, instruites et jugées conformément aux
règles du Code de procédure pénale », l'article 1er alinéa 3 du projet d'ordonnance donne la
possibilité pour la victime de se constituer partie civile devant le futur Tribunal maritime.
Par ailleurs, l'article 2 du protocole additionnel n°7 de la Convention Européenne des Droits de
l'Homme pose le droit d'un recours effectif devant un second degré de juridiction en énonçant que
« toute personne déclarée coupable d'une infraction pénale par un tribunal a le droit de faire
examiner par une juridiction supérieure la déclaration de culpabilité ou la condamnation.
L'exercice de ce droit, y compris les motifs pour lesquels il peut être exercé, sont régis par la loi ».
Jusqu'à la réforme opérée par le projet d'ordonnance, les Tribunaux maritimes commerciaux étaient
l'unique juridiction répressive dont la seule voie de recours était la possibilité de former un pourvoi
en cassation. Le plus souvent, le prétexte invoqué était la nécessité d'une exécution rapide du
jugement. Pour autant, on peut s'interroger sur la motivation principale qui semble en réalité
traduire le désir pour l'administration des affaires maritimes de garder la haute main sur la justice
maritime aux fins d'écarter tout contrôle des organes judiciaires, à l'exception du contrôle,
inévitable, de droit par la Cour de cassation.
Au regard des principes du droit, il s'avérait donc indispensable de prévoir une procédure d'appel.
Cette voie d'appel est désormais ouverte aux termes de l'article 1er § 3 du projet d'ordonnance « Les
infractions (…) sont poursuivies, instruites et jugées conformément aux règles du code de procédure
pénale ».
Si l'instauration d'une procédure d'appel ne présente pas de difficulté, il en est autrement concernant
l'opportunité d'instituer des chambres spécialisées en appel pour connaître des affaires maritimes.
La mise en place de telles Chambres présenterait un avantage certain dans la cohérence du suivi de
l'affaire et conforterait l'importante de juges spécialisés dans le domaine maritime.
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B – Une définition unique de l'infraction maritime
1 – Les périmètres d'application du Code maritime
Après avoir circonscrit la réorganisation du système juridictionnel maritime, il convient
d'appréhender, au regard de la finalité de la réforme, le champ d'application du futur Code pénal
maritime.
Définir l'infraction maritime suppose au préalable quelques précisions quant au champ d'application
de la réforme tant au niveau des usagers de la mer, qu'à celui des supports en présence.
Le champ d'application du futur Code pénal doit être pensé dans une volonté de renforcer l'unité du
monde maritime quelque soit le statut des gens de mer concernés, professionnels ou plaisanciers. En
ce sens, le Code maritime doit couvrir l'ensemble des personnes présentes à bord d'un navire battant
pavillon français sans qu'il soit nécessaire d'opérer d'autres distinctions que celles liées à leurs
fonctions.
De même, l'unité s'appréhende en délimitant les paramètres d'application du Code maritime relatif
aux supports en présence. Le domaine de la plaisance pourrait soulever quelques difficultés. En
effet, en l'absence de définition unique du navire, sa définition est propice aux tergiversations
doctrinales et, en conséquence, le domaine d'application du Code maritime pourrait s'en trouver
obscurci.
Le Code des transports donne une définition du navire à l'article L 5000-2 :
«Sauf dispositions contraires, sont dénommés navires pour l'application du présent code :
1° Tout engin flottant, construit et équipé pour la navigation maritime de commerce, de pêche ou de
plaisance et affecté à celle-ci ;
2° Les engins flottants construits et équipés pour la navigation maritime, affectés à des services
publics à caractère administratif ou industriel et commercial. »
Le Code maritime devra donc s'appliquer à tout engin flottant, construit et équipé pour la navigation
de plaisance.
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La difficulté concerne les engins dits de petite plaisance et les engins de plage. Ces bâtiments de
mer destinés à une navigation d'agrément sont pour certains destinés à une activité ludique alors que
d'autres sont aptes à une véritable navigation.
Dès lors, pour éviter toute insécurité juridique, il faudra clairement définir des critères objectifs –
immatriculation, critères physiques – critères administratifs - déterminant le seuil à partir duquel un
engin de plaisance ne saurait se voir appliquer le Code maritime.
Toutefois, la question de l'opportunité de soumettre ou d'évincer aux dispositions du Code maritime
certaines catégories d'usagers de la mer reste ouverte. Les usagers naviguent sur un même milieu
hostile aux conséquences dommageables identiques, il serait donc cohérent que toute personne à
bord d'un bâtiment de mer, navire ou engin de navigation, soit justifiable de certaines infractions
définies par le Code maritime.
Finalement, le navire qu'il soit de plaisance ou non doit être support de compétence du futur
Tribunal maritime au nom de l'unité du monde maritime et de l'égalité des marins devant la loi. Au
titre de la personnalisation des peines, et en prenant soin d'éviter tout risque de justice catégorielle,
il reviendrait à l'appréciation souveraine du juge du fond, de moduler la sanction en fonction de
l'usager mis en cause.
2– Le renforcement du caractère maritime des infractions
Comme nous l'évoquions précédemment (Cf. supra), le Conseil constitutionnel, en appelant le
législateur à réformer la composition du Tribunal maritime commercial, a paradoxalement
« constitutionnalisé » cette juridiction spécialisée.
L'objectif principal de la réforme est alors de renforcer la légitimité du Tribunal maritime et
corrélativement de parvenir à une meilleure répression de l'infraction maritime tant au niveau des
infractions commises à bord que celles commises entre les usagers.
Pour ce faire, il convient de clairement délimiter le caractère de l'infraction maritime, celle ci
pouvant se définir comme une infraction qui présente une réelle spécificité nautique par rapport à
celles du droit commun.
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En premier lieu, il apparaît que certaines infractions présentant un caractère maritime sont laissées
à la connaissance des juridictions du droit commun. Il en est ainsi de la destruction volontaire et
dans une intention criminelle d'un navire quelconque (Article 79 CDPMM).
Il serait cohérent et légitime que ces infractions ressortent sans exception de la compétence du futur
Tribunal maritime à l'exception des contraventions, lesquelles dans un souci de célérité et de
proximité de la justice au profit des justiciables, relèveraient des tribunaux de police.
La seconde difficulté a trait aux infractions « mixtes » associant un caractère maritime et des
éléments de droit commun. Par exemple, un abordage avec perte de vie humaine, la mise en danger
délibérée d'autrui lors d'une navigation maritime ou encore un capitaine qui après un abordage
néglige de faire tous les efforts pour sauver l'équipage de l'autre navire.
Bien souvent l'issue de ce recoupement entre droit maritime et droit commun tourne en faveur de ce
dernier au détriment du Tribunal maritime commercial8 bien que l'infraction soit incontestablement
maritime du fait du lieu où elle s'est produite.
A l'heure actuelle il résulte donc, dans ces situations de dualité, un effacement de l'infraction
maritime absorbée par le droit commun. Cette situation est critiquable car fruit d'une incohérence
entre d'une part, la reconnaissance constitutionnelle d'un Tribunal spécifique et, d'autre part, des
infractions qui, malgré leur caractère maritime, seraient pendantes devant un tribunal de droit
commun sans que la juridiction instituée pour en connaître soit en mesure de les juger.
Enfin, doit être mentionné le régime de la récidive qui paraît complexe voire incohérent. Aucune
disposition du Code disciplinaire et pénal de la marine marchande n'établit un régime général de la
récidive. Seules quelques dispositions particulières établissent des éléments partiels et disparates.
En conséquence, il importe de clairement établir les conditions du rapport de nature entre deux
infractions maritimes pour que l'état de récidive soit constitué. Au surplus, il convient de préciser le
délai dans lequel doit être commise la seconde infraction. Enfin, dans cette volonté d'autonomie de
l'infraction maritime, il faut s'interroger sur le point de savoir si la récidive peut exister entre deux
infractions voisines, l'une maritime et l'autre de droit commun.
8 Cass. Crim, 2 juin 1977, n°77.91388 ; Cass. Crim, 30 janvier 1980, n°79.92670 ; Cass. Crim, 6 février 1980,
n°79.92350
La plaisance à l'aune de la réforme du Code disciplinaire et pénal de la marine marchande
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Au regard de ce développement, il apparaît que la détermination du caractère maritime d'une
infraction de façon objective n'est pas aisée. A l'heure actuelle, le projet de réforme énonce une liste
d'infractions limitativement énumérées9 qui circonscrit l'infraction maritime à la fois positivement
en retenant des critères comme la sécurité du navire et négativement en évinçant de son champ
d'application des infractions tributaires de textes spécifiques ou n'apparaissent pas assez
homogènes.
9 A titre d'exemple les infractions prévues dans la loi du 28 mars 1928 sur le régime de pilotage dans les eaux
maritimes et la loi du 5 juillet 1983 sur la sauvegarde de la vie humaine en mer...
La plaisance à l'aune de la réforme du Code disciplinaire et pénal de la marine marchande
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CONCLUSION DE LA PREMIERE PARTIE
Au terme de cette première partie, outre des dispositions essentielles comme l'instauration de l'appel
ou la possibilité de constitution de Partie civile, il convient de mettre en relief les dispositions
principales suivantes, proposées par le projet d'ordonnance portant réforme des Tribunaux
maritimes et de la procédure applicable :
L'affirmation d'une définition unifiée et transversale de la notion d'infraction maritime,
précisant son champ d'application et les conséquences qui en découlent en termes de
procédure et de compétence juridictionnelle. L'enjeu est clairement de prévenir les risques
de conflits de compétence entre le Tribunal maritime et les juridictions de droit commun.
Une réforme procédurale avec l'instauration de règles générales du droit commun pour une
mise en conformité avec les dispositions du Code de procédure pénale et de la Convention
Européenne des Droits de l'Homme.
Une harmonisation des critères de compétence territoriale concernant l'enquête, la poursuite,
et l'instruction des infractions maritimes.
Le renforcement d'une coopération entre l'administration des affaires maritimes et le
Ministère Public dans la mise en œuvre conjointe des poursuites sous la responsabilité de ce
dernier afin d'éviter tout risque de concurrence inopportune dans l'efficacité de la répression.
Une compétence renforcée du Tribunal maritime à toutes les infractions maritimes, à
l'exception des crimes, de certaines infractions connexes et des contraventions des quatre
premières classes dans un soucis de célérité et de proximité de la justice.
L'ensemble de ces dispositions doivent permettre d'aiguiller un objectif de rationalisation et de
modernisation des Tribunaux maritimes.
La plaisance à l'aune de la réforme du Code disciplinaire et pénal de la marine marchande
- 20-
La plaisance à l'aune de la réforme du Code disciplinaire et pénal de la marine marchande
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II – La réorganisation du système juridictionnel maritime : l'adaptation aux
particularismes de la plaisance
A l'issue de la décision du Conseil constitutionnel, la composition provisoire du Tribunal maritime
commercial a été établie en ces termes « Considérant que l'abrogation de l'article 90 du code
disciplinaire et pénal de la marine marchande est applicable à toutes les infractions non jugées
définitivement au jour de la publication de la présente décision ; que, par suite, à compter de cette
date, pour exercer la compétence que leur reconnaît le code disciplinaire et pénal de la marine
marchande, les tribunaux maritimes commerciaux siégeront dans la composition des juridictions
pénales de droit commun »
La réorganisation du futur Tribunal maritime doit nécessairement intégrer, et mettre plus en avant,
l'activité de plaisance génératrice de la plupart des contentieux devant ces juridictions. Pour ce faire,
deux axes de réflexions retiendront notre attention :
D'une part, une refonte de l'organisation des Tribunaux maritimes avec la désignation
d'assesseurs issus du monde de la plaisance ce qui implique de définir les modalités de leur
désignation sur des critères objectifs (A)
D'autre part, une répression des infractions maritimes adaptée aux activités de plaisance (B).
A – Une nouvelle organisation du Tribunal maritime pour connaître des « infractions
plaisance »
La composition des futurs tribunaux maritimes repose, comme pour les tribunaux maritimes
commerciaux, sur le principe de l’échevinage. Sous la présidence d’un magistrat, le tribunal
maritime se compose en outre de deux assesseurs nommés en raison de leurs compétences et de leur
connaissance des réalités de la navigation maritime.
Un débat s'est instauré concernant la place des plaisanciers au sein de la réforme des Tribunaux
maritimes commerciaux.
La plaisance à l'aune de la réforme du Code disciplinaire et pénal de la marine marchande
- 22-
Cette question sous-tend l'idée que les plaisanciers seraient des usagers de la mer avec une
particularité telle qu'ils seraient exclus de cette spécifié maritime. Pourtant ils évoluent sur le même
milieu que les professionnels de la mer, obéissent aux mêmes règles de navigation et affrontent les
mêmes dangers aux conséquences dommageables semblables.
Pour autant, plusieurs raisons justifient que la plaisance ressorte de la compétence des Tribunaux
maritimes commerciaux. La principale raison, déjà évoquée, concerne le principe de l'égalité des
marins devant la loi. Il ne saurait être question de ne pas considérer les plaisanciers comme des
gens de mer et qu'ainsi il ne leur soit pas reconnue la spécificité du milieu dans lequel ils évoluent.
Il paraît ainsi légitime de conférer aux futurs Tribunaux maritimes la possibilité de désigner des
assesseurs plaisanciers. Ce processus d'ouverture permet de renforcer l'association entre la société
civile et les règlements de la justice.
Reste à déterminer les alternatives envisageables dans les modalités de désignation des plaisanciers.
Il reviendra aux directions interrégionales de la mer (DIRM) de recueillir les candidatures
spontanées des plaisanciers. Cela suppose de déterminer des référentiels objectifs relatifs au niveau
exigé dans la connaissance de la réglementation maritime.
Enfin un arrêté interministériel sera rendu entre d'une part, le ministère de la mer et d'autre part le
ministère de la justice afin d'établir une liste d'assesseurs dans laquelle il incombera à chaque
Président des Tribunaux maritimes d'en désigner deux pour l'audience qu'il aura à connaître.
Cette procédure est inscrite dans le projet d'ordonnance portant réforme des tribunaux maritimes et
de la procédure applicable en son article 18 qui dispose que « Le tribunal maritime est présidé par
un magistrat désigné après avis de l'assemblée générale du tribunal de grande instance auprès
duquel il est placé. Le tribunal maritime est en outre composé de deux assesseurs désignés par
arrêté conjoint du ministre chargé de la justice et du ministre chargé de la mer ».
La plaisance à l'aune de la réforme du Code disciplinaire et pénal de la marine marchande
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Des modalités objectives de désignation des assesseurs
Pour les assesseurs, en l'occurrence les plaisanciers dans cette étude, les modalités de désignation
doivent répondre à des critères objectifs dans deux domaines :
Une exigence de compétence en matière de navigation maritime ;
Une exigence de compétence dans le domaine juridique.
Au préalable, rappelons que le projet d'ordonnance ne semble pas prévoir de conditions spécifiques
relatives à l'âge du candidat, seule la majorité étant requise. De même, le fait que le candidat soit
dans la vie active ou en retraite est un critère indifférent.
Des critères de compétences en matière de navigation maritime10
En l'absence de formation obligatoire et harmonisée, les plaisanciers constituent une catégorie
plurielle aux connaissances et à l'expérience disparates. Il convient de distinguer les plaisanciers
professionnels de ceux exerçant l'activité de plaisance à la seule fin d'agrément.
Les plaisanciers professionnels pourraient se répartir en deux catégories principales en fonction de
leur qualification théorique. Les plaisanciers titulaires du Brevet de Patron à la Plaisance Voile
d'une part, et les plaisanciers titulaires d'un brevet d'État d'autre part.
Le Brevet de Patron à la Plaisance Voile permet d’exercer à titre professionnel, les fonctions de
patron à la plaisance voile aux fins, soit de transport de passagers, soit de conduite d’un navire pour
le compte d’un tiers propriétaire, loueur, locataire ou emprunteur de ce navire. Ce diplôme est
délivré par les Directeurs Régionaux des Affaires Maritimes. Les conditions d'accès à ce diplôme,
outre l'aptitude à la navigation certifiée par un médecin des gens de mer et l'exigence de la majorité,
supposent que la personne soit titulaire d’un titre de formation professionnelle maritime ou, à
défaut, justifier d’une expérience minimale de mille milles nautiques en tant que patron à la
plaisance à voile sur un bateau armé en première ou en deuxième catégorie de navigation.
10 Il faut souligner que la Cour de Strasbourg a considéré que le simple fait que des fonctionnaires siègent en raison de
leur expérience particulière ne saurait ainsi rendre sujette à caution l'impartialité du tribunal (CEDH, 1er octobre
1982, Piersack c/ Belgique ; CEDH, 23 avril 1997, Stallinger et Kuso c/ Autriche)
La plaisance à l'aune de la réforme du Code disciplinaire et pénal de la marine marchande
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Ensuite, le brevet d'État délivré par les Directions de la Jeunesse et des Sports (service déconcentré
du Ministère de la Jeunesse et des Sports) donne à son titulaire la qualification minimale exigée
pour animer ou enseigner la voile tant comme travailleur indépendant que comme salarié
d’associations, d’entreprises, de fédérations ou de collectivités territoriales. Les modalités
d'obtention du diplôme sont définies par l’arrêté du 30 novembre 1992 modifié par l'arrêté du 27
juillet 1999 relatif aux contenus et modalités d'obtention du brevet d'État d'éducateur sportif à trois
degrés.
Il apparaît, au regard de ces exigences de formations théorique et pratique, que la catégorie des
plaisanciers professionnels ne soulève pas de difficulté pour apprécier leur compétence en matière
de navigation maritime. Au contraire, et alors qu'ils sont majoritaires, les plaisanciers non
professionnels présentent comme particularité un niveau difficilement mesurable et quantifiable en
l'absence de permis de navigation obligatoire pour les voiliers et du fait de pratiques très disparates.
Le critère principal pourrait être fonction du nombre de milles nautiques parcourus par le candidat
plaisancier. La vérification matérielle de cette exigence serait facilitée pour les usagers affiliés à une
fédération sportive.
En cas d'impossibilité d'établir un tel critère, il serait opportun de mettre en œuvre, sur le modèle de
l'évaluation obligatoire à l'entrée en formation au monitorat fédéral de voile, des évaluations de
niveau pratique et de connaissances théoriques de la réglementation maritime11
. Ces évaluations
seraient modulables en fonction du niveau réel observé lors des épreuves et pourraient, en outre,
s'appuyer sur un éventuel classement compétitif pour les plaisanciers qui serait licencié à la
Fédération Française de Voile.
11 Cette formation pourrait par exemple se décomposer en trois domaines. Tout d'abord un domaine technique avec une
évaluation en terme de coordination des manœuvres, de choix techniques de navigation et d'exploitation ou
d'adaptation aux informations météorologiques. Ensuite, un domaine de sécurité maritime avec une évaluation en
terme d'assistance et de sauvetage, de communication à distance ou encore de maintenance du support de
navigation. Enfin, un domaine de sens marin et de connaissance de l'environnement avec une évaluation en terme de
gestion de la vie à bord et de prévention des conflits, de gestion de l'environnement marin.
La plaisance à l'aune de la réforme du Code disciplinaire et pénal de la marine marchande
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Des critères de compétences en matière juridique
Le critère objectif de désignation suppose également une appréciation des compétences juridiques
des candidats. A ce propos, une approche comparative peut être opérée avec les Tribunaux de
proximité dont la composition comprend également des juges non professionnels12
.
Pour être nommé juge de proximité, les candidats doivent au préalable êtres des personnes âgées
d'au moins 35 ans et justifier d'au moins 4 ans d'expérience professionnelle dans le domaine
juridique.
A l'appui de ces conditions d'admission, la loi organique n°2007-287 du 5 mars 2007 relative au
statut de la magistrature a institué un stage probatoire obligatoire pour les juges de proximités. Ce
stage probatoire se compose d'une formation théorique et d'un stage en juridiction.
Concernant le stage théorique, il s'agit d'une formation de deux semaines organisée par l'École
nationale de la magistrature comprenant des enseignements portant sur la déontologie, les principes
de la procédure, le fonctionnement d'une juridiction ou encore l'apprentissage de la technique de
rédaction des jugements et de la tenue des audiences.
Un stage en juridiction complète cette formation avec un nombre déterminé de présences effectives
en fonction de l'expérience professionnelle du candidat.
A l'instar des juges de proximité, le stage probatoire pourrait constituer une immersion des juges
non professionnels, comme les plaisanciers, dans un environnement juridictionnel. En ce sens, les
candidats devront démontrer leurs capacités, notamment sur le plan juridique, à exercer les
fonctions de juge au sein du Tribunal maritime. De surcroît, cette formation juridique serait une
garantie de sécurité du droit et des procédures dans le respect des libertés individuelles.
A l'issu de ce stage, il reviendrait au Conseil Supérieur de la Magistrature de rendre un avis
conforme s'il considère que le candidat possède l'aptitude pour être juge au sein du Tribunal
maritime.
Des périodes de formations seraient communes aux magistrats professionnels et aux assesseurs pour
12 A ce propos, les juges de proximités bénéficient de garanties statutaires destinées à protéger leur indépendance et le
Conseil constitutionnel en a souligné l'importance dans une décision du 29 août 2002 n°2002-461 DC.
La plaisance à l'aune de la réforme du Code disciplinaire et pénal de la marine marchande
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des raisons de moindre coût budgétaire, d'autant qu'il apparaît une certaine nébulosité en la matière.
En ce sens, les magistrats professionnels et les assesseurs bénéficieraient d'une formation maritime
au sein des Écoles de marines marchandes. Quant aux assesseurs, ils suivraient également une
formation juridique dispensée au sein de l'École Nationale de la Magistrature.
En tout état de cause, ces stages doivent présenter une organisation souple afin de permettre un
cumul avec une activité professionnelle et devront se prolonger, périodiquement, par des périodes
de formations juridiques continues pour les assesseurs issus du monde maritime.
Les modalités de désignation et de protection des assesseurs
Un autre axe de réflexion pourrait se fonder sur un rapprochement avec les modalités de désignation
au sein des Prud'hommes. Ce rapprochement se justifie également par le fait que les conseillers
prud'homaux, à l'instar des assesseurs au sein du Tribunal maritime commercial, ne sont pas des
magistrats professionnels.
Il convient de mettre en évidence que le conseiller prud'homal est considéré comme un magistrat. Il
prête un serment différent de celui des magistrats professionnels avec la jouissance d'un statut
différent. En ce sens, l'exercice des fonctions prud'homales est en principe compatible avec d'autres
fonctions. Une telle compatibilité doit pouvoir s'appliquer aux assesseurs.
Par contre, un système de récusation devrait être mis en place suivant une liste de situations,
incompatibles avec la fonction d'assesseur, limitativement énumérées. Cette procédure de récusation
consisterait à refuser la compétence d'un assesseur et, en pratique à demander son remplacement, du
fait du lien qu'il peut avoir avec l'affaire dans des cas, loin d'être exhaustif, tels que :
l'assesseur aurait un intérêt personnel à la contestation ;
l'assesseur serait affilié à un organisme syndical ou associatif ne constituant pas cet intérêt
personnels ;
Un lien de parenté trop étroit existerait avec une partie au procès ;
La présence de l'assesseur constituerait une violation du principe d'impartialité édicté par
l'article 6-1 de la Convention Européenne de Sauvegarde des Droits de l'Homme et des
La plaisance à l'aune de la réforme du Code disciplinaire et pénal de la marine marchande
- 27-
Libertés fondamentales.
Par ailleurs, le statut des assesseurs au sein du futur Tribunal maritime pourrait être assimilé à ceux
des conseillers prud'homaux à la différence que l'assesseur ne sera pas élu par ses pairs mais nommé
par le Président du Tribunal sur une liste arrêté après consultation interministérielle.
Après sa nomination, il serait opportun que, pour entrer en fonction, l'assesseur au cours d'une
réception publique organisée dans le cadre d'une audience du Tribunal de Grande Instance, à
l'initiative du Ministère Public, prête serment afin de remplir ses obligations déontologiques et ses
fonctions avec dignité, indépendance, probité et humanité ainsi que de garder le secret des
délibérations.
Pour les assesseurs salariés, par référence à l'article L 1442-6 du Code du travail13
, le temps passé
hors du lieu de travail, pendant le temps de travail, pour l'exercice de leurs fonctions, doit être
assimilé,à un temps de travail effectif pour la détermination des droits que l'assesseur tient de son
contrat de travail et des différentes dispositions législatives et règlementaires. L'exercice des
fonctions pendant ce temps de travail ne saurait entrainer pour l'assesseur aucune diminution de
salaire et de toute autre forme de rémunération.
Rappelons que l'employeur est fondé à demander aux intéressés la justification de leurs absence.
Pour ce faire, il serait envisageable que le greffe du Tribunal de Grande Instance adresse à
l'employeur un courrier l'informant de la date d'entrée en fonction dudit assesseur.
De surcroît, l'assesseur doit être protégé contre le licenciement. A ce titre, l'exercice de sa fonction
ne saurait être une cause de rupture du contrat de travail, protection énoncée par l'article L 1442-19
du Code du travail14
.
13 Article L 1442-6 du Code du travail « Le temps passé hors de l'entreprise pendant les heures de travail par les
conseillers prud'hommes du collège salarié pour l'exercice de leurs fonctions est assimilé à un temps de travail
effectif pour la détermination des droits que le salarié tient de son contrat de travail, des dispositions légales et des
stipulations conventionnelles. Les absences de l'entreprise des conseillers prud'hommes du collège salarié, justifiées
par l'exercice de leurs fonctions, n'entraînent aucune diminution de leurs rémunérations et des avantages
correspondants. La demande de remboursement aux employeurs des salaires maintenus aux conseillers
prud'hommes du collège salarié, ainsi que des avantages et des charges sociales y afférents, est adressée au greffe
du conseil de prud'hommes au plus tard dans l'année civile qui suit l'année de l'absence du salarié de l'entreprise. A
défaut, la demande de remboursement est prescrite ».
14 Article L 1442-19 du Code du travail « L'exercice des fonctions de conseiller prud'homme et la participation aux
activités mentionnées aux articles L. 1442-2 et L. 1442-5 ne peuvent être une cause de sanction ou de rupture du
La plaisance à l'aune de la réforme du Code disciplinaire et pénal de la marine marchande
- 28-
Enfin, si l'assesseur possède des droits pour assurer le bon exercice de sa fonction, il lui incombe
également des devoirs. A ce titre, l'assesseur ne doit pas entraver le bon fonctionnement de la justice
par exemple par un manque d'assiduité récurrent aux audiences de jugement. Ces comportements
seraient constitutifs d'une faute pouvant conduire à des avertissements voire à son évincement selon
des modalités qu'il resterait à définir.
contrat de travail. Le licenciement du conseiller prud'homme est soumis à la procédure d'autorisation
administrative prévue par le livre IV de la deuxième partie ».
La plaisance à l'aune de la réforme du Code disciplinaire et pénal de la marine marchande
- 29-
B- Une répression de la délinquance maritime adaptée aux spécificités de la plaisance
L'article premier du projet d'ordonnance portant réforme des tribunaux maritimes et de la procédure
applicable précise la définition de l'infraction maritime :
« Les contraventions maritimes sont les contraventions prévues par :
1 – la présente loi [17 décembre 1926 modifiée portant Code disciplinaire et pénal de la marine
marchande] lorsqu'elles sont commises à bord d'un navire au sens de l'article L. 5000-2 du Code
des transports ;
2 – les règlements pris pour l'application des dispositions de la cinquième partie du Code des
transports ;
3 – Les règlements pris pour l'application des dispositions législatives relatives à l'hygiène à bord,
à la santé et à la sécurité au travail applicables aux gens de mer ;
4 – les articles R. 304-1, R. 304-7 et R. 330-1 du Code des ports maritimes ;
5 – Les articles R. 610-5, R.622-1 et R. 625-2 à R. 625-6 du Code pénal, ou par d'autres règlements
en cas d'atteinte à la sécurité du navire ou de la navigation dans le champ d'application de la
convention internationale pour la sauvegarde de la vie humaine en mer faites à Londres le 1er
novembre 1974 (SOLAS), de la convention sur le règlement international pour prévenir les
abordages en mer faites à Londres le 20 octobre 1972 (COLGREG) ou de la convention
internationale de 1978 amendée sur les normes de formation des gens de mer, de délivrance des
brevets et de veille (STCW),
6 – le décret n°2007-937 du 15 mai 2007 relatif à la sûreté des navires. »
Cet article définit les infractions délictuelles ou contraventionnelles constituant des « infractions
maritimes », c’est à dire appelant, dans le cadre des règles générales du code de procédure pénale,
l’application de certaines règles spécifiques de mise en œuvre de l’action publique et la compétence
exclusive des tribunaux maritimes pour connaître des délits en la matière.
Rappelons que les crimes sont hors du champ d'application des infractions maritimes, en raison de
la prédominance de l’élément criminel sur le caractère maritime de l’infraction.
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Si l'infraction maritime est mieux circonscrite par le projet d'ordonnance, tel n'est pas le cas pour
ses modalités d'application et d'adaptation aux plaisanciers. Il faut mettre en relief deux aspects
essentiels, mais également antagonistes, de la répression en matière de plaisance :
D'une part, pour les infractions flagrantes15
, applicables notamment en matière de
réglementation maritime, l'intervention des autorités maritimes doit être facilitée en vu d'une
sanction rapide. Pour ce faire, il s'agit de développer le principe de forfaitisation des
amendes.
D'autre part, pour les infractions non intentionnelles, mettant en jeu une pluralité de facteurs,
la répression doit avant tout être pédagogique et individualisée avec l'instauration de phase
de conciliations et de peines accessoires ou complémentaires.
La forfaitisation des amendes : un objectif de célérité et de simplification de la répression
La forfaitisation des amendes est une source de simplification et de célérité des procédures
administratives et donc d'économies pour les autorités d'enquête que sont les affaires maritimes.
Un tel processus doit être encadré car il n'est pas souhaitable et ni juridiquement envisageable de
généraliser un principe de forfaitisation à toutes les infractions maritimes.
Il semble que les principaux concernés par cette approche soient les plaisanciers et à ce titre il
apparaît opportun de différencier les peines encourues selon le type d'activité.
Quoi qu'il en soit, le principe de forfaitisation des amendes rejoint la nécessité d'une définition
précise de l'infraction maritime en vu de prévenir des insécurités juridiques source de recours
contentieux, ce qui ferait perdre l'avantage d'une telle procédure.
Le domaine des infractions contraventionnelles pouvant faire l'objet d'une forfaitisation est
limitativement énuméré et ne concerne que les amendes des quatre premières classes. Cette
situation n'est pas satisfaisante dans la mesure où, d'une part, de nombreuses infractions commises
15 Par exemple : non présentation immédiate du permis, obstacle à un contrôle de sécurité ou encore navigation de
planche à voile en zone interdite
La plaisance à l'aune de la réforme du Code disciplinaire et pénal de la marine marchande
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par les plaisanciers sont réprimées en application de l'article 63-1 du Code disciplinaire et pénal de
la marine marchande qui concerne des peines délictuelles et, d'autre part, de nombreuses infractions
sont réprimées par des contraventions de cinquième classe donc hors du champ d'application de la
procédure de forfaitisation.
En conséquence, deux solutions seraient envisageables pour pallier la difficulté :
Soit procéder à un « déclassement » de certaines infractions contraventionnelles de
cinquième classe, voire de nature délictuelles, en contravention de quatrième classe ;
Soit élargir la liste limitative des infractions pouvant faire l'objet d'une forfaitisation, en
l'occurrence, permettre une forfaitisation des amendes de cinquième classe.
L'instauration de peines accessoires et de mesures de conciliation : un objectif pédagogique et
d'individualisation de la sanction
En premier lieu, il convient de s'attacher aux procédures de conciliation. A ce titre, il est opportun
de rappeler le contexte juridique actuel en matière de conciliation et d'opérer un rapprochement
avec la réforme instaurée par le décret n° 2010-1165 du 1er octobre 2010 relatif à la conciliation et
à la procédure orale en matière civile, commerciale et sociale.
Désormais, une conciliation peut être menée par un conciliateur devant le Tribunal d'instance et le
Tribunal de commerce. La demande aux fins de tentative de conciliation est formée par déclaration
faite ou remise au greffe.
En cas d’accord des parties, le conciliateur dresse un constat de l’accord en vu de l’homologation
par le juge. A contrario, en cas d’échec de la conciliation, ce qui a été déclaré et constaté par le
conciliateur ne peut être produit dans la procédure ordinaire sauf si les parties en donnent leur
accord ce qui permet d'encourager la conciliation en évinçant toute crainte de réutilisation des
éléments lors d'un éventuel procès ultérieur.
Il serait intéressant que cette procédure, qui s'inscrit dans le cadre du développement des modes
alternatifs de règlement des conflits, soit applicable devant les Tribunaux maritimes afin de
La plaisance à l'aune de la réforme du Code disciplinaire et pénal de la marine marchande
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privilégier une justice moins coûteuse et plus rapide.
En second lieu, l'adaptation des infractions maritimes aux activités de plaisance pourrait se traduire
par un développement des peines accessoires ou complémentaires sans qu'il soit nécessaire de
requérir l'ouverture d'une procédure de sanctions administratives distincte et spécifique.
A ce titre, il devrait être envisageable d'affecter une peine d'emprisonnement d'un sursis avec mise à
l'épreuve et d'un sursis avec obligation d'effectuer un travail d'intérêt général ou encore l'obligation
de suivre un stage de formation à la réglementation maritime.
De plus, certains infractions devraient se voir appliquer des peines complémentaires de droit
commun ou des peines complémentaires nouvellement crées telles que la suspension d'une activité
maritime ou d'un titre de navigation ou encore l'immobilisation ou la saisie temporaire du support
de navigation.
La plaisance à l'aune de la réforme du Code disciplinaire et pénal de la marine marchande
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CONCLUSION
Suite à l'impulsion donnée par la décision du Conseil constitutionnel du 2 juillet 2010, le projet de
loi de réforme du Code disciplinaire et pénal de la marine marchande doit être appréhendé comme
le renouveau d'une Justice pénale maritime alliant le respect des règles du droit commun aux
spécificités du monde maritime.
Cette réforme est l'occasion de moderniser une législation anachronique, complexe et en
inadéquation avec l'évolution du système judiciaire de droit commun. L'enjeu fondamental consiste
au maintien d'une justice pénale maritime adaptée à une société de gens de mer diversifiée et en
constante évolution.
Telle une sirène, « mi-homme, mi-marin », cette réforme est animée par le souci d'équilibre et de
compromis entre droit commun et droit maritime. Elle s'attache à mettre en lumière la
modernisation du droit pénal maritime et à clarifier une procédure en phase avec les principes
directeurs du droit commun.
De cette assise actuelle et, dans une vision, certes aujourd'hui idéaliste mais sans nulle doute
envisageable dans l'avenir, il est possible d'imaginer la constitution de véritables pôles maritimes
dont l'acteur central serait le Tribunal maritime. Cette juridiction pourrait connaître des infractions
en matière de pêche maritime, de travail maritime ou encore de pollution maritime par adossement
des juridictions du littoral spécialisées.
Ainsi, serait modernisée et renforcée la spécificité maritime en matière pénale, sociale et
environnementale.
Cette unité maritime permettrait de pérenniser une justice spécialisée de qualité comme un îlot de
stabilité dans un océan de droit en perpétuel mouvement.
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BIBLIOGRAPHIE
ARTICLES ET CHRONIQUES
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Politiques d’Aix-Marseille en 2004 sous la direction de C.SCAPEL.
TEXTES ET DOCUMENTS OFFICIELS
Textes règlementaires
Projet d'ordonnance portant réforme des tribunaux maritimes et de la procédure applicable
La plaisance à l'aune de la réforme du Code disciplinaire et pénal de la marine marchande
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Code
Code disciplinaire et pénal de la marine marchandes
Code pénal
Code de procédure pénale
Code des transports
RAPPORTS, COLLOQUES ET DOCUMENTS DIVERS
Bureau des Affaires Juridiques et Contentieuses de la Direction des Affaires Maritimes et des Gens
de mer, Pré-rapport relatif à la réforme des Tribunaux maritimes commerciaux et du Code
disciplinaire et pénal de la marine marchande, avril 2003.
PINSON (G.), Le Conseil Constitutionnel a t-il mis à mort le Tribunal Maritime Commerciale ?,
Magazine de Fortunes de Mer, août 2010.
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commerciaux en 2009