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La Mérine La Maison de la Mérine Mot d’écrit N° 11 Juin - Juillet 2016 TOURISME et TRADITIONS Expressions patoisantes saintongeaises - L’Echo’Musée . « Les Balades de La Mérine » Réalisation : Musée des Bujoliers 6, rue de la Mérine 17770 Saint Césaire - Tél : 05 46 91 98 11 Correspondant : Noël Maixent EM [email protected] La Maison de La Mérine et du Musée de Christian Genet p.1 Dans ce numéro : --- > p.1 Le sommaire et le croquis de Philippe Barbeau. L’Info-Bujour - p.2 La Mérine à Nastasie en bandes dessinées. (début de l’histoire en patois et traduit) - p.3. 4. 5. La balade de La Mérine qui retrouve le Docteur Jean à Rouffiac. - p.6. L’exploit de Denyse Collin - Le poème de Jhustine. - 7. 8. L’histoire des petits ponts (aux ânes) par Jacques Dassié. - p.9 . et suivantes : Les Cahiers saintongeais de Christian Genet. L’info / Bujour. Nous aurons le plaisir et l’avantage de recevoir en septembre prochain Monsieur Jean CHAPELOT. Directeur de recherche au C.N.R.S Pour une conférence sur les poteries et toute la production céramique des Bujoliers durant plus de deux siècles . Au Musée des Bujoliers le 10 septembre. Les croquis et dessins qui illustrent la B.D de « La Mérine à Nastasie » sont de Philippe Barbeau de Haimps. ------------------------------------------------------- Il est envisagé de produire en moyenne deux pages à chaque numéro. L’histoire complète comporte 26 pages. Cela nous amène à déduire que la fin de l’histoire sera connue vers le N° 23 du journal de La Mérine …. Bonne lecture à teurtous ! A suivre : La Mérine professeur de français/saintongeais

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La Mérine

La Maison de la Mérine Mot d’écrit N° 11 – Juin - Juillet 2016

TOURISME et TRADITIONS

Expressions patoisantes saintongeaises - L’Echo’Musée

. « Les Balades de La Mérine » Réalisation : Musée des Bujoliers 6, rue de la Mérine

17770 Saint Césaire - Tél : 05 46 91 98 11 Correspondant : Noël Maixent – EM [email protected]

La Maison de

La Mérine et du Musée

de Christian Genet

p.1

Dans ce numéro :

--- > p.1 Le sommaire et le croquis de Philippe Barbeau. L’Info-Bujour

- p.2 La Mérine à Nastasie en bandes dessinées. (début de l’histoire en patois et traduit)

- p.3. 4. 5. La balade de La Mérine qui retrouve le Docteur Jean à Rouffiac.

- p.6. L’exploit de Denyse Collin - Le poème de Jhustine.

- 7. 8. L’histoire des petits ponts (aux ânes) par Jacques Dassié.

- p.9 . et suivantes : Les Cahiers saintongeais de Christian Genet.

L’info / Bujour. Nous aurons le plaisir et l’avantage de recevoir en septembre prochain Monsieur Jean CHAPELOT. Directeur de recherche au C.N.R.S Pour une conférence sur les poteries et toute la production céramique des Bujoliers durant plus de deux siècles. Au Musée des Bujoliers le 10 septembre.

Les croquis et dessins qui illustrent la B.D de « La Mérine à Nastasie » sont de Philippe Barbeau de Haimps. ------------------------------------------------------- Il est envisagé de produire en moyenne deux pages à chaque numéro. L’histoire complète comporte 26 pages. Cela nous amène à déduire que la fin de l’histoire sera connue vers le N° 23 du journal de La Mérine …. Bonne lecture à teurtous ! A suivre :

La Mérine professeur de français/saintongeais

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La Mérine à Nastasie p.2

1 Nanette Burelle appelle son mari Cadet

.

Cadet !...Cadet !... Reun, point de Cadet ! Cadet !...Cadet !... Rien, pas de Cadet !

2

Nanette : Tout le bétière à panser In viâ qu’ a pas teuté ! Tout le bétail à panser ! un veau qui n’a pas tété !

3

Nanette : Ol’é point le tout de thieu asteur , o faut apprété le déjhuné ! C’est pas le tout de ça maintenant il faut préparer le déjeuner

4

Nanette : Dépeu huit jhor que jh’on tué le goret, jhe mangheon que de la goraille et teurjhou de la goraille. Depuis huit jours qu’on a tué le cochon, on ne mange plus que de la cuisine de cochon et toujours du cochon

5

Nanette : Aneut, m’en vas mette un pot de monjhettes à thieure, o nous dégreissera les dents !

Nan : Aujourd’hui, je vais mettre un pot de mojettes à cuire, ça nous dégraissera les dents.

6 Nanette commence à trier ses mojettes

... Allon bon ! ine piarre ! O’ben un grain de garouille. O vous fait peurtant boun’ effet sous ine dent . ….Allons bon ! une pierre ! ou bien une graine de maïs. Ça vous fait pourtant bon effet sous une dent.

7 Nanette Burelle - Cadet

Nanette : Cadet et moé jh’étions yère cossut quand jhe nous son accoubié tout deux. Cadet et moi on était guère aisés quand on s’est mariés tous les deux.

8

……Auteurment que thieu, Cadet é point in méchant houme. …Autrement que ça, Cadet est point un méchant homme

A suivre !.... > … A seugue !

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La Mérine… professeur de français. ! ! Dans son milieu paysan, elle entend parler le saintongeais plus souvent que la langue française qu’elle parle très couramment selon la situation où elle se trouve. L’idée lui est venue d’apprendre à ses amis à s’exprimer correctement comme tout le monde... La méthode est simple ! il suffit de lire la comédie du Docteur Jean ‘La Mérine à Nastasie’, qu’elle connaît parfaitement. (et pour cause elle en est l’héroïne incontournable). De ce fait le lecteur peut se familiariser avec le langage qui lui convient et apprendre notre subtil patois et inversement, selon le but à atteindre. Une excellente façon de venir en aide à ses concitoyens qui éprouvent des difficultés dans les conversations hors du village. ……(Rappel :.. Mérine = Marraine)

La Balade de La Mérine 3

Nanette Burelle est en émoi. Elle est invitée par son ami Athanase Jean, qui habite à Rouffiac. Ils ont des souvenirs en commun et beaucoup à se raconter. Elle a choisi une belle tenue pour la circonstance et porte une coiffe tenue par une épingle en or sur le devant. Cadet, son mari avait bien voulu l’accompagner à Dompierre pour traverser la Charente sur le bac. Venant de St Césaire, ils doivent passer au village du Breuil (sur la RN.141). Sur les hauts de Dompierre, se dresse un moulin à vent désaffecté de la fin du XVIIIème siècle, muni d’une main courante au sommet. Il servait sous le 1er empire de télégraphe pour transmettre des signaux optiques selon l’invention de Claude Chappe. Le préposé juché sur le moulin faisait avec ses bras prolongés de planchettes de bois, des mouvements perçus par un correspondant visible à distance. (Ainsi serait né… notre Poste et Télégraphe ! !… ?)

La Tour postale du Breuil

Le bac à chaîne à Dompierre

Nanette doit attendre avant d’embarquer que le troupeau venant en sens inverse fasse de la place aux nouveaux occupants. C’était un bac à chaîne que le passeur actionnait en tournant sa manivelle à la main. (Ce qui est toujours le cas de nos jours) La traversée s’effectua sans problème. Mais Nanette était assez peu rassurée malgré tout. Ce qui lui fit penser et dire en elle-même : (1) (Ol’é pas l’moument de chère à la baille, jhe sais point nagher).

Sur l’autre rive son éminent ami, médecin et Maire de Rouffiac l’attend et la reçoit avec un sympathique empressement. Il la fait monter dans son automobile qui lui sert occasionnellement pour des urgences ou quand le temps n’est pas favorable. Normalement il circule à bicyclette ou en calèche. Diplômé de Santé navale de Rochefort il est venu s’installer à Rouffiac où il a effectué toute sa carrière en remplacement du Docteur Brisson. Il deviendra conseiller d’arrondissement de Pons.

5 CV Citroën

Nanette est reçue par Louise, épouse du Docteur Jean. Elle est intimidée et impressionnée

malgré tout et considère cet homme comme son ami, mais quelque part également

son « père spirituel ». Se disant en elle-même : (2) « Ol’é in’houme conséquent ».

.

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En effet, Rouffiac doit beaucoup à son Maire. Entre autres 4 l’aménagement d’une salle d’accueil à la halte du chemin de fer, construite grâce à la recette de la célèbre pièce de théâtre « La Mérine à Nastasie » en patois saintongeais. Nanette se souvient, le 25 mai 1902, c’était la fête et l’effervescence au château de Mauléon, où s’est jouée la première représentation. Tous les rôles (4 hommes – 4 femmes), soit 8 personnages, étaient tenus par des hommes. <<< Gaëtan Savary dans le rôle de La Mérine.

La pièce fut ensuite reprise par de nombreuses troupes. Notamment à Paris (Salle Lancry) et dans toute la région pendant de nombreuses années. C’est au Docteur Jean, homme au caractère généreux, appelé aimablement ‘Médecin des pauvres’, que l’on doit l’installation du premier téléphone qui sonna pour la première fois à Rouffiac. Athanase ouvre la porte de sa belle voiture neuve et invite Nanette à prendre place à l’avant. Louise s’installe sur la banquette arrière. Le véhicule passe devant l’église St Vivien, érigée au XIème siècle. On roule en direction de St Sever. Passant devant le ‘bois de chauffe-cul’ …,ainsi nommé par les autochtones, la Mérine se remémore quelques histoires qui se rapportent à ce nom. Elle se dit en souriant discrètement : (3) «Y deviant pas avoère poure des sarpents ou thieuques bestioles agralantes ». Plus loin au lieu-dit ‘Maison neuve’, des vestiges gallo-romains, ont été découverts. Le Docteur Jean montre à Nanette l’église Saint Sever XVème siècle. A proximité du chemin, s’élève une croix de carrefour : Il s’est dit que les romains superstitieux laissaient des pierres au bord de croisements de route, afin que les Dieux favorisent leurs voyages!. Dans les eaux de la Seugne, on y pêche l’anguille. Le soir à la veillée, les femmes broyaient le chanvre sans le couper, dans une « beurghe » pour en séparer les fibres. Le parcours est plaisant et bien commenté. Nos promeneurs arrivent vers Montils. Là, Nanette apprend que des civilisations anciennes ont vécu à l’époque du Néolitique comme le montre le site du Moulin de vent. Des outils réalisés par la communauté Peu-Richardienne, pierres tendres, objets utilitaires ou ornementaux taillés dans de l’os et des flèches tranchantes ont été mis au jour. On y a trouvé également beaucoup de fragments de poteries sigillées, puis des monnaies de l’époque romaine. Une exposition de toutes ces découvertes est visible au Musée archéologique de Pons. Montils est une commune rurale pourvue d’une large étendue viticole. La laiterie de Montils-Colombiers contribue à son développement économique. Un détour par Auvignac s’impose. Le pont de style roman XII et XIIIèmes siècles est adossé à un ancien moulin.

La croix de chemin

à Auvignac

La commune est remarquable par la présence de nombreux souterrains et une quinzaine de refuges. La matinée a très vite passé et il est midi bien sonné. Athanase propose aux dames de gagner l’auberge du bourg de Montils. Les couverts joliment disposés, on s’installe confortablement. Au menu, les voyageurs dégustent la persillade d’anguilles de la Seugne, spécialité maison arrosée d’un verre de Montils-blanc.

Le pont d’Auvignac sur la Seugne

C’est une belle journée. Nanette découvre et côtoie des gens du monde. Elle est ‘dans ses

petits souliers’. En repartant, un coup d’œil à l’église Saint Sulpice, autrefois fortifiée. Des

modillons sculptés et un sarcophage double en calcaire ont été découverts au début XXème.s

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Après le village de Virlet les touristes approchent de Pérignac. Nanette et Louise échangent

leurs impressions sur le paysage et les premières maisons rencontrées.

(4) « O ya bein lontemps que jh’étis pas v’nue dans thieu l’endret ».

L’importante église Saint Pierre édifiée en 1175, fortifiée durant la guerre de cent ans, se dresse au centre-bourg. Au dessus du portail se développent deux belles arcatures superposées. La galerie inférieure comprend treize compartiments en forme de niches dans lesquelles on peut voir le Christ et ses douze Apôtres. Ces statues ont été décapitées en 1848 lors de la révolution. L’arcature supérieure possède une grande fenêtre romane au centre. Les voussures sont décorées de têtes de chevaux. Au-dessus, un christ en haut relief dans une gloire en amande soutenue par deux anges s’élève vers le ciel. Façade de l’église de Pérignac

Cette galerie remarquable est unique dans l’ouest de la France. La paroisse est liée avec à

celle de Salignac de Pons et l’histoire à celle de Merpins et des Sires de Pons. Chacun repart

avec de beaux souvenirs.

Depuis Pérignac le vignoble cognaçais se fait plus fourni jusqu’au prochain arrêt. Salignac à

l’origine est une enclave de la commune de Merpins. Rattachée à Pérignac en 1793, Salignac

de Pons deviendra Salignac sur Charente en 1952. Dans la commune, plusieurs sites révèlent

d’une occupation Gallo-romaine selon des fouilles effectuées au Port du Lys et au village de

chez Saulnier. Le château de La Garde, style Renaissance domine de vastes étendues de

culture. Il possède un très beau pigeonnier comprenant 2.600 boulins de terre cuite. En

direction de Brives sur Charente le groupe croise le garde-champêtre qui, d’un roulement de

tambour informe les habitants rassemblés autour de lui des dernières décisions de la Mairie.

Brives participe beaucoup au commerce du sel et est témoin d’un important passage de

gabarres qui s’arrêtent au port pour l’embarquement des eaux de vie de cognac vers

Rochefort. Le château Dupuy d’Angeac reconstruit, est devenu en 1640 la propriété de Mr

Jean Brétinaud, baron de Saint Seurin d’Uzet. En face, l’église Saint-Etienne de style néo-

gothique se distingue par son clocher élégant sculpté visible de loin sur la route de Rouffiac.

Le trio traverse le bourg pour se rendre après la voie ferrée sur la rive du fleuve à l’endroit de

l’ancien port. C’est là que notre Mérine a pu faire des signes à Cadet Bitounâ sur l’autre rive

qui attendait sa ‘bourgheoise’ à 18 heures, pour le dernier bac ainsi qu’il était convenu.

Nanette a passé une journée inoubliable. Ravie, elle remercie chaleureusement ses hôtes en

les embrassant et félicitant encore une fois son grand ami pour l’œuvre et les réalisations

accomplies dans cet arrondissement. La traversée se fit sans problème et Nanette heureuse

de sa virée n’a pas tari d’éloges pour raconter à Cadet tout au long du trajet ce qu’elle avait

vécu dans sa journée. Athanase et Louise Jean bien heureux aussi, regagnèrent Rouffiac.

1 : Ce n’est pas le moment de tomber à l’eau, je ne sais pas nager. ! 2 : C’est un homme

conséquent. 3 : Ils ne devaient pas avoir peur des serpents ou autres bestioles peu

accueillantes. 4 : Il y a bien longtemps que je n’étais pas venue dans cet endroit.

5+: C’est pas possible qu’une femme comme ça, se mette à tourner en l’air comme une buse ! (épervier)

Cousine Jheanine

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Denyse Collin, née à Gimeux (16). Habitant au village de Ste Foy commune de Pérignac, elle a été infirmière-major pendant la guerre (14-18). Elle sera surtout une parachutiste remarquée pour sa prouesse hors du commun et présentée par le Petit journal de l’époque. « Lors de la promenade, La Mérine et le Docteur Jean auraient aimé saluer cette célèbre aviatrice Charentaise. Malheureusement elle était absente. ! Ce sera pour une prochaine occasion se dit-on. Mais La Mérine très impressionnée par l’infirmière-parachutiste a cru bon de se confier à Louise » : 5 « Ol’é pas possible qu’ine femme coume thieu s’mette à virouner en l’ar’ coume ine cossarde ». Dossier transmis par Nadine Julliard.

Le parachute a été créé et expérimenté par Denyse elle-même. 6

Le poème de Jhustine Guy Chartier Jh’sé pâ si vous z’avouet r’marqué On dit pu souvent d’main qu’aneut Ol é coume si l’temps nous duret Qu’o passe lé jhor, qu’o passe lé neut Demain, o s’ra t’un jhour meilleur On ara ranghé lé souci Jh’allon t’enfin trouvé l’bounheur Et coumincé t’ine nouvelle vie Déjhâ en étant tou petiot Jhe veulion marché coume lé grand Coume z’eu fére peté nou deu bot Coume z’eu s’en allé de l’avant Amprés, fallet qu’seyon pû grand Peur jhoinde dessus la cheminée Thié pot anvec pien d’chouse dedan Ou reguâdé peur la croisée

Et bin vite jhe veulion otout Allé à l’école coume lé grand Même si o f’let quitté l’ché nous Qui couminçet’à ête vassant Et pendant combe et combe d’an-née Jh’avon couru lé z’examin Et dé qu’un étet décruché O f’let s’ébougé peur l’prochain Et pis trouvé ine belle compagne Peur fére ensembyie un long chemin A la ville ou beun’ la campagne Tout en cheurchant un bon turbin Et n’on rêvet d’un biâ bambin Qui peur veni peurnet trop d’ temps Pis on songhet’à son destin A c’qui f’ret un cot d’venu grand On songhet bintout à la r’tète Qui nous paraisset tel’ment loin Rêvant d’au jhor, ou n’on f’ret fête Qu’on fainiant’ret dan lé ballin

Astheur que jhe z’y sont rendu Jhe continuon de galopé Amprés thieu sacré temps peurdu Qui veut pâ s’laissé rattrappé A Nouël jh’attendon déjha Qu’arrive enfin l’été prochain Peur partir en vouéaghe la-bâ Dan n’un de thié pay lointain Jh’attendon thielle opération Qui f’ra qu’bintout jhe march’ron meu Qu’arrive bin vite la guérison Peur que d’main seille meilleur qu’aneut Et jh’attendon, et jh’attendon Teurjhou enviou d’au lendemain Veurion allé pu vite que l’son Galopant ampré noute destin Ah thieu train o faut nous minfié Qu’arrive trop vite le bout d’au ch’min Et là pu quession d’rethiullé Minme en sarrant bin fort lé frein.

Jhustine

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Les petits ponts de Charente Maritime

Jacques Dassié.

Les ponts ont-ils parfois une histoire très ancienne ? Bien sûr que oui et

nous voudrions vous en conter une, en images, simplement pour le plaisir... _____________________

Il était une fois (oui, les histoires commencent toujours comme cela !), il était une fois, dis-je, vers l'an de grâce mil sept cent et quelques... un métayer Saintongeais qui faisait pousser son froment ou son épeautre sur quelques journaux d'une terre ingrate. Une fois les moissons faites, toutes à la faucille, et les épis rassemblés, on battait les chaumes au fléau, en compagnie de voisins et d'amis. Puis il fallait séparer le grain de la paille, le vanner, ce qui pouvait aller assez vite, pour peu que quelques bonnes brises viennent faciliter la chose. Il ne restait plus qu'à l'ensacher dans ces gros sacs de chanvre. Mais pour avoir la farine, cette précieuse poudre-à-faire-le-pain, encore fallait-il pouvoir moudre...

Des moulins, il y en avait bien, à eau, à vent, ceux du seigneur ou bien des moines, ceux où il fallait

payer redevance...

Justement, sur une colline pas trop éloignée, il y avait un beau moulin à vent, un moulin banal, qui

travaillait vite et bien, sur sa hauteur de la Côterelle, vers Saint-Germain de Lusignan. Il avait été bâti

par un nommé Guillaume Couillan, en 1766. Il y avait même gravé son nom :

"Guillaume Couillan, en 1766"

Le vanneur

NB. Le sentier qui aboutit au pont, traverse un bois et grimpe sur une colline où se trouvent les ruines

du moulin à vent dans lequel j'ai photographié cette inscription.

Oui, voici qui était bel et bon mais... il fallait pouvoir transporter au moins une vingtaine de

boisseaux de grain et deux obstacles se dressaient entre le terroir du bonhomme et la tour aux grandes

ailes : une rivière, le Trèfle. Elle n'était pas très profonde mais avait un bon courant, et juste après, il y

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avait la montée de la colline qui faisait bien vingt toises de haut ! Un charroi tiré à bœufs 8

n'y serait pas passé. Or, il y avait pas mal d'ânes à cette époque...

Un "Pré aux ânes" l'atteste encore. Notre homme se dit qu'avec cinq ou six bourricots bien bâtés, quitte

à faire deux voyages, cela devrait aller...

Au premier essai, grave échec, les ânes prennent peur et refusent d'entrer dans la rivière. Un plus

courageux que les autres (grâce aux coups de bâton ?) s'y essaye, trébuche, perd pied et mouille le

grain ! Toute la population d'alentour était là et les avis fusaient !

Un vieux leur suggéra "de faire un pont, juste pour l'âne" ! Curieusement, il fût écouté...

Oui, l'idée n'était pas bête : ce pont rendrait service à tous et même les femmes pourraient traverser

bien plus facilement...

Il n'y avait ni architecte, ni ingénieur, mais des gens matures, attachés à la glèbe et munis d'un solide bon sens. Pour ne pas entreprendre des travaux trop importants pour leurs moyens, il fallait limiter la largeur au minimum compatible avec la fonction souhaitée. On se mit d'accord sur une largeur de deux pieds et deux pouce (70 cm environ) et d'une longueur des dalles de huit pieds ( 2,5 m environ). Pour aller d'une berge à l'autre, même en période de crue, il fallait une longueur de 13 toises, soit une dizaine de dalles alignées (25 m environ).

Neuillac CM Le Pont de Romas

Les dalles, dressées verticalement constitueraient des piles parfaites. Un seul léger détail, chaque dalle pesait à peu près trois mille cinq cent livres (1700 Kg...). Les hommes, après longues réflexions, s'enquirent de trouver de la pierre. Par chance, une carrière se trouvait non loin de là et après d'âpres négociations et de longs jours d'attente, le lot de pierres assez plates, aux dimensions des dalles, arriva dans le pré, au bord du Trèfle. Paradoxalement, la construction fut relativement aisée et rapide. Le plus long fut l'érection des piles, mais comme on était en été et que les eaux étaient basses, une fois la première pile en place, les autres s'implantèrent assez facilement. Le plan avait été bien fait et les dalles du tablier s'ajustèrent sans la moindre difficulté : juste quelques retouches pour l'encastrement. Et le grand jour arriva ! On prit un âne, on lui mit le bât que l'on chargea de deux gros sacs de grain, de part et d'autre. Puis, tiré par son propriétaire, on le fit monter sur la première dalle. Tout alla bien, jusqu'au milieu du pont où notre quadrupède se raidit sur ses pattes et refusa tout net de continuer. Evènement, commentaires, on tire, on pousse, on amène les bâtons... et messire Aliboron se met à ruer, glisse, tombe dans la rivière, entraînant avec lui tous ceux qui se cramponnaient à lui ! Et le grain est à nouveau mouillé...

Cette fois c'en est trop et l'honneur du village est en jeu ! On rappelle le vieux, oui, celui de tout à l'heure, celui qui proposait de faire un pont pour l'âne. Et on le questionne avec une certaine agressivité en exprimant ouvertement des doutes quant à la consistance de sa cervelle ! Le vieux ne s'émeut pas et leur dit : "Vous ne changerez ni l'âne, ni la façon de le charger, nos pères faisaient déjà comme cela et c'est une manière bien adaptée. L'âne étant ce qu'il est, il est probable qu'il fera encore d'autres écarts. Pour l'empêcher de perdre l'équilibre il faut lui rapprocher le sol afin que sa charge soit retenue dès qu'il penche d'un côté ou de l'autre...".

Pour la profondeur, il faut que, si l'âne se penche un peu, le fond du sac vienne toucher le rebord.

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Interloqués, les gens parlaient d'un ramollissement grave, quand le vieux continua 9 "Armez-vous de vos pics et creusez !". "Creusez au milieu du passage une rigole plate suffisante pour que l'âne trottine sans problème, 10 pouces devraient suffire. Pour la profondeur, il faut que, si l'âne se penche un peu, le fond du sac vienne toucher le rebord de la dalle, l'empêchant ainsi de basculer".

Le Pont de Clion sur Seugne

Le vieux ne s'appelait pas Zarathoustra, mais c'est ainsi qu'il parla... Intrigués, les hommes se mirent à creuser cette fameuse rigole. Après bien des sueurs et des peines, le pont avait enfin cette espèce de canal creusé au centre du tablier. Bien inquiets, les gens du cru rappelèrent le candidat au passage et son âne, on remit le bât, les sacs et timidement le cortège se dirigea vers l'ouvrage d'art...

Maîstre Aliboron s'engagea, trottina, passa le milieu du pont... trébucha, mais ne bascula pas... et

débarqua sans encombre sur l'autre rive, sous les acclamations des badauds... Depuis ce jour, les

petits ânes bâtés traversent sans problèmes. D'autres villageois eurent vent de l'affaire, trouvèrent l'idée

bonne et l'appliquèrent aussitôt chez eux.

Et le vieux, direz-vous ? Assis devant sa chaumière, paupières mi-plissées, mâchonnant un bout de tige

de typha, souriant dans sa barbe, il contemplait l'agitation de certains qui expliquaient avec force gestes

comment leur était venue l'idée merveilleuse...

Le pont de Romas avec le Moulin de la Coterelle au loin sur la colline