la maintenance - État de la connaissance et etude exploratoire

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La Maintenance - État de la Connaissance et Etude Exploratoire

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  • tudes et recherches

    RAPPORT R-578

    Laurent GiraudDaoud Ait-Kadi

    lise LedouxJoseph-Jean PaquesSbastien Tanchoux

    La maintenancetat de la connaissance et tude exploratoire

    Scurit des outils, des machines et des procds industriels

  • Solidement implant au Qubec depuis l980, lInstitut de recherche Robert-Sauv en santet en scurit du travail (IRSST) est un organisme de recherche scientifique reconnu internationalement pour la qualit de ses travaux.

    MissionContribuer, par la recherche, la prvention des accidents du travail et des maladies professionnelles ainsi qu la radaptation des travailleurs qui en sont victimes.

    Offrir les services de laboratoires et lexpertise ncessaires laction du rseau public de prvention en sant et en scurit du travail.

    Assurer la diffusion des connaissances, jouer un rle de rfrence scientifique et dexpert.

    Dot dun conseil dadministration paritaire o sigent en nombre gal des reprsentants des employeurset des travailleurs, lIRSST est financ par la Commission de la sant et de la scurit du travail.

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    IRSST - Direction des communications505, boul. De Maisonneuve OuestMontral (Qubec)H3A 3C2Tlphone : 514 288-1551Tlcopieur : 514 [email protected] de recherche Robert-Sauven sant et en scurit du travail,septembre 2008

    NOS RECHERCHEStravaillent pour vous !

  • Laurent Giraud1, Daoud Ait-Kadi2, lise Ledoux1,Joseph-Jean Paques3 et Sbastien Tanchoux2

    1Service de la recherche, IRSST2Dpartement de gnie mcanique, Universit Laval

    3IRSST

    www.irsst.qc.caCliquez recherche

    Cette publication est disponible en version PDFsur le site Web de lIRSST.

    Cette tude a t finance par lIRSST. Les conclusions et recommandations sont celles des auteurs.

    Avis de non-responsabilitLIRSST ne donne aucune garantie relative lexactitude, la fiabilit ou le caractre exhaustif de linformation contenue dans ce document. En aucun cas lIRSST ne saurait tre tenu responsable pour tout dommage corporel, moral ou matriel rsultant de lutilisation de cette information.

    Notez que les contenus des documents sont protgs par les lgislations canadiennes applicables en matire de proprit intellectuelle.

    tudes et recherches

    RAPPORT R-578

    La maintenancetat de la connaissance et tude exploratoire

    Scurit des outils, des machines et des procds industriels

  • Les rsultats des travaux de recherche publis dans ce document ont fait lobjet dune valuation par des pairs.

    CONFORMMENT AUX POLITIQUES DE LIRSST

  • IRSST - La maintenance tat de la connaissance et tude exploratoire

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    SOMMAIRE

    Cet tat de connaissance et tude prliminaire porte sur les liens entre la maintenance et la sant-scurit au travail. Elle vise faire le point sur les liens entre la fonction maintenance dans les entreprises et la scurit au travail. Une recension des crits jusquen 2005, appuye par une analyse des accidents graves et mortels survenus au Qubec entre les annes 1990 et 2001 et des visites en entreprises ont servis de base ltude. Lanalyse des rsultats nous indique que les liens thoriques et analytiques entre maintenance et SST sont faibles. Les crits de maintenance nabordent que peu la dimension SST et vice-versa. Par ailleurs, peu dtudes portent sur la sant et la scurit du personnel de maintenance, bien que certaines soient forts intressantes. Lanalyse des accidents graves et mortels survenus au Qubec au cours de la priode tudie nous indique que lefficacit du cadenassage, qui est lune des mthodes de base, nest pas optimale. Dautre part, la recension des crits nous indique que les espaces clos sont une source trs importante de dcs dans les interventions de maintenance. Cette tude prliminaire introduit aussi dans sa dernire partie une programmation de recherche moyen terme sur la maintenance, programmation qui est en lien aussi avec celle sur le cadenassage, afin de rduire le nombre daccidents chez le personnel de maintenance.

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    REMERCIEMENTS

    Cet tat de connaissance et tude exploratoire sur la maintenance naurait pu voir le jour sans lapport prcieux et gnreux dun grand nombre de personnes et dentreprises qui nous ont aids, supports, conseills, orients ou ouvert leurs portes afin de nous permettre deffectuer cette analyse. Nous citerons dans le dsordre, Amlie Matton, stagiaire, qui la premire a travaill sur le recueil des rapports daccidents et a effectu les premires analyses de donnes; Sbastien Tanchoux, ex-tudiant la matrise en gnie mcanique, qui a effectu sa recherche sur un sujet particulier de ce rapport : le cadenassage; la CSST et son centre de documentation qui nous ont permis de disposer des rapports plus rapidement que prvu; le Bureau du coroner Qubec qui nous a ouvert ses portes pour recueillir quelques rapports non traits par la CSST; toutes les entreprises visites spcifiquement pour cette tude ou lors dautres tudes, visites qui sont toujours riches en enseignements et sources de rflexion plus long terme, et finalement les collgues de lIRSST, toutes quipes confondues Scurit-ergonomie, Organisation du travail et Scurit-ingnierie, qui nous ont supports tout au long de la rdaction.

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    TABLE DES MATIRES

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    1. INTRODUCTION .....................................................................................................................1

    2. PROBLMATIQUE..................................................................................................................3

    3. MTHODOLOGIE DE TRAVAIL...........................................................................................7

    4. RSULTATS.............................................................................................................................9 4.1 Recension dcrits..........................................................................................................9

    4.1.1 Des chiffres vocateurs et inquitants......................................................................9 4.1.2 La maintenance et la SST ......................................................................................11 4.1.3 La maintenance ......................................................................................................13 4.1.4 Cadre gnral des interventions de maintenance ...................................................14

    4.1.4.1 Nature de lintervention .................................................................14 4.1.4.2 Les niveaux de maintenance ..........................................................14

    4.2 Analyse des accidents graves et mortels au Qubec....................................................16

    5. LES TUDES DE CAS...........................................................................................................23 5.1 Le cadenassage ou consignation ..................................................................................23

    5.1.1 Les grandes tapes du cadenassage........................................................................23 5.1.2 Le rglement au Qubec sur le cadenassage..........................................................24 5.1.3 Les liens entre le cadenassage et la scurit ..........................................................25 5.1.4 Les alternatives possibles au cadenassage .............................................................29

    5.2 La conception des machines et la maintenabilit.........................................................29 5.2.1 Les objectifs de la maintenabilit ..........................................................................30 5.2.2 Liens entre maintenabilit et scurit ....................................................................31

    5.3 Les espaces clos ...........................................................................................................33 5.4 Prise en compte des exigences de maintenance lors de la conception des machines

    Le cas des convoyeurs courroie ................................................................................35

    6. PROPOSITIONS DE RECHERCHE ......................................................................................37 6.1 Analyse des liens entre la maintenance et la SST........................................................37

    6.1.1 Problmatique 37 6.1.2 Objectifs et rsultats...............................................................................................38

    6.2 Protection du personnel lors des interventions de maintenance de courte dure.........39 6.2.1 Objectifs et rsultats...............................................................................................39

    6.3 Intgration des exigences de maintenance lors de la conception des machines ..........39 6.3.1 Objectifs et rsultats...............................................................................................40

    7. CONCLUSION........................................................................................................................41

    8. RFRENCES ........................................................................................................................43

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    LISTE DES FIGURES

    Figure 1 : Activits des travailleurs blesss mortellement par des machines et des quipements

    fixes en Australie de 1989 1992..........................................................................................10 Figure 2 : Nombre daccidents mortels selon le secteur dactivit 1990-2001..............................18 Figure 3 : Activit de maintenance lors de laccident....................................................................20 Figure 4 : Nature de laccident lors de lintervention de maintenance. .........................................20 Figure 5 : Exprience et anciennet lors de laccident. .................................................................21 Figure 6 : Titre demploi du travailleur accident. ........................................................................22 Figure 7 : Dmarche de gestion du risque. ....................................................................................28

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    LISTE DES TABLEAUX

    Tableau 1 : Dfinition des niveaux de maintenance. .....................................................................15 Tableau 2 : Rpartition des dcs, des rapports denqute disponibles et des rapports relatifs

    une activit de maintenance au Qubec entre 1990 et 2001. .................................................17 Tableau 3 : Comparaison du nombre daccidents mortels par rapport la population active par

    secteur conomique et par rapport aux indicateurs de SST. ..................................................19 Tableau 4 : Les trois grandes tapes du cadenassage. ...................................................................24 Tableau 5 : Liens entre les objectifs de maintenabilit et les critres de maintenabilit. ..............32 Tableau 6 : Raisons de lentre dans les espaces clos. ..................................................................34

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    1. INTRODUCTION

    Les activits de maintenance sont une ralit dans lensemble des entreprises de tous les secteurs conomiques (industries primaires et secondaires, agriculture, prestation de service, etc.) au mme titre que les activits de production. Lobjectif premier de la production est de produire le plus possible et le plus longtemps possible alors que lobjectif de la maintenance est de garantir la disponibilit maximale de loutil de production, ce qui ncessite obligatoirement son arrt pendant un temps donn pour y intervenir. Il est raisonnable de penser quune grande partie des actions en sant et scurit du travail a t oriente, avec succs, en direction du personnel de production compte tenu du nombre de travailleurs impliqus et des risques encourus. Cependant, peu de travaux ont t ddis la protection du personnel de maintenance lors de leurs interventions, hormis le cadenassage. Peu dauteurs en sant et scurit du travail et en maintenance font le lien entre maintenance et sant et scurit au travail, mme si intuitivement il semble logique que ce mtier soit plus risqu que celui des oprateurs de machine. En effet, loprateur de la machine reste la majorit du temps en dehors des zones dangereuses de la machine alors que lintervenant de maintenance doit souvent rentrer dans les zones dangereuses pour y effectuer ses interventions. Les rsultats de cette tude exploratoire, dont une analyse des accidents graves et mortels survenus au Qubec entre 1990 et 2001, montrent que la scurit des intervenants de maintenance nest pas totalement assure actuellement. La scurit des interventions de maintenance est fortement lie trois facteurs. Premirement, elle dpend du matriel (les machines) qui doit tre entretenu et de la configuration de lespace qui entoure le matriel. La conception des machines est donc une tape importante de cette problmatique. La disposition des machines lest tout autant car laccessibilit, tant du personnel que des pices de rechange, y est troitement lie. Deuximement, le personnel de maintenance est aussi un des facteurs. Ce personnel doit tre adquatement form, doit connatre suffisamment la machine en cause et doit tre bien outill. Finalement, il ne faut pas ngliger lorganisation de lentreprise. Des interventions de maintenance prventive ou de maintenance prdictive (donc planifies) sont rarement ralises avec une pression temporelle forte alors que les interventions de maintenance correctives (non planifies par dfinition) ont de fortes chances de ltre, surtout si la machine en cause est vitale pour la production. Ce rapport fait le point sur une activit exploratoire qui avait pour objectifs de dterminer sil existait des liens entre les activits de maintenance et la sant scurit au travail, de faire le portrait rapide de la maintenance, de recenser les crits relatifs la maintenance et la SST et de fournir des pistes de solution par le biais dune programmation thmatique de recherche. Nous allons en premier dtailler la mthodologie qui a t suivie, puis nous donnerons dans lordre les rsultats de la recension des crits et les rsultats de notre analyse des accidents graves et mortels survenus au Qubec. Nous dtaillerons ensuite plus spcifiquement quatre points : le cadenassage, la conception des machines, les espaces clos ainsi que les convoyeurs courroie. Les deux premiers points seront tudis car ce sont des pistes de prvention des accidents, pistes connues depuis fort longtemps, mais qui semblent peu ou mal appliques la vue du nombre daccidents avec des machines. Les

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    deux derniers points sont quant eux des exemples trs instructifs dinterventions dangereuses ou de machines universellement utilises dans les entreprises. Le cadenassage est depuis longtemps utilis pour protger les intervenants de maintenance en contrlant les diffrentes sources dnergie prsentes sur le lieu de travail des intervenants de maintenance [ED 754]. De plus, ce moyen de protection est le principal moyen cit par le Rglement sur la sant et la scurit du travail au Qubec (RSST, article 185) [RSST] : Avant d'entreprendre tout travail de maintenance, de rparation ou de dblocage dans la zone dangereuse d'une machine, les mesures de scurit suivantes doivent tre prises, sous rserve des dispositions de l'article 186 : 1 la mise en position d'arrt du dispositif de commande de la machine; 2 l'arrt complet de la machine; 3 le cadenassage, par chaque personne expose au danger, de toutes les sources d'nergie de la machine, de manire viter toute mise en marche accidentelle de la machine pendant la dure des travaux. La conception des machines, quant elle, a un impact majeur sur les interventions de maintenance qui seront effectues par la suite [Christensen 1999, ISO 12100-1:2003]. Ne pas tenir compte des besoins et exigences des futures interventions de maintenance lors de la conception engendrera tt ou tard des situations dangereuses qui auraient pu tre vites lors de la conception, et ce, moindre cot. Il est par exemple admis dans la norme ISO 12400-1 que si un phnomne dangereux est prsent sur une machine et quaucun moyen de prvention nest appliqu, ce phnomne dangereux entranera tt ou tard un dommage. De mme, il est clairement explicit que les mesures de prvention prises au stade de la conception sont prfrables celles mises en uvre par lutilisateur (ISO 12100-1 :2003, chapitre 5.1.2). Le cas des espaces clos, espaces qui ne sont pas conus pour recevoir des personnes, compte tenu de leur gomtrie, de la temprature, de leur ventilation ou de la concentration importante de gaz, et dans lesquels les intervenants de maintenance vont rentrer occasionnellement pour y effectuer des interventions va ensuite tre dtaill. Et nous allons nous apercevoir que les dcs sont nombreux dans ces espaces clos [NIOSH 1994]. Pour protger les travailleurs qui doivent y rentrer, de nombreuses procdures ou permis dentre sont utiliss. Nous y retrouvons l un cas trs semblable au cadenassage. Puis les convoyeurs courroie seront mis de lavant titre dexemple, car ces machines sont universellement utilises dans les industries et entreprises et elles viennent dtre le sujet de recherches lIRSST [Giraud 2004, Mass 2004]. Enfin, les propositions de programmation thmatique sur la maintenance seront dtailles, propositions qui permettront de combler certaines lacunes identifies au cours de la recherche ou qui permettront de gnrer de nouvelles solutions des problmes identifis. Une conclusion parachvera le tout.

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    2. PROBLMATIQUE

    Les activits de maintenance sont une ralit dans toutes les entreprises de tous les secteurs conomiques (industries primaires et secondaires, agriculture, prestation de service), au mme titre que les activits de production. Ces deux activits ont toutes deux pour objet les machines, mme si leur finalit daction sur ces dernires sont trs diffrentes, voire opposes dans certains cas. Lobjectif premier de lactivit de production est de produire le plus possible, le plus longtemps possible tout en respectant les objectifs de qualit, alors que lobjectif de la maintenance est de garantir la disponibilit maximale de loutil de production. Cet objectif ncessite obligatoirement larrt de la production pendant un temps donn. Les interventions de maintenance sont la croise de plusieurs chemins. Elles sont fonction du matriel qui doit tre entretenu et de la configuration de lespace qui les entoure. La conception des machines est donc une tape importante pour que, subsquemment, les interventions puissent se raliser en toute scurit. La disposition des machines lest tout autant, car laccessibilit, tant du personnel que des pices de rechange, en est trs fortement tributaire. Dautre part, elles sont fonction galement du personnel de maintenance qui va les effectuer. Ce dernier doit tre adquatement form, connatre suffisamment la machine en cause et tre outill adquatement. Enfin, elles dpendent galement de lorganisation du travail. Des interventions de maintenance prventive ou de maintenance prdictive sont rarement ralises avec une pression temporelle forte car elles sont planifies, alors que les interventions de maintenance correctives ont de fortes chances de ltre, surtout si les pannes ou dysfonctionnements nont pas t prvus dans les plans de production ou que lquipement en cause est un maillon incontournable pour la production. La maintenance est dfinie comme tant lensemble de toutes les actions techniques, administratives et de management durant le cycle de vie dun bien, destines le maintenir ou le rtablir dans un tat dans lequel il peut accomplir la fonction requise [EN 13306]. Les oprations de dpannage, graissage, rparation, damlioration ainsi que les visites constituent des tches de maintenance qui permettent de conserver le potentiel du matriel pour assurer la continuit et la qualit de la production. Cette fonction maintenance est une fonction transversale de lentreprise, au mme titre que les fonctions qualit, scurit, ressources humaines, etc. [Francastel 2005]. Selon Francastel [Francastel 2005], les interventions de maintenance peuvent tre classes en trois grandes catgories que sont la maintenance corrective, la maintenance prventive et la maintenance amliorative. Les oprations de maintenance les plus frquentes sont les oprations de maintenance corrective, donc effectues aprs dfaillance, ou des oprations de maintenance prventive, dans lintention de rduire la probabilit de dfaillance dun bien ou la dgradation dun service rendu. Actuellement, la pratique majoritaire dans lindustrie est la maintenance corrective. Cependant, elle tend diminuer au fil des ans [Boucly 1998]. Elle consiste utiliser lquipement jusqu la dfaillance imprvue, qui peut tre brutale (rupture, explosion, etc.), ce qui entrane une planification trs difficile des actions correctives et un travail souvent dans lurgence. Parler de maintenance corrective signifie que lon entretient lquipement seulement aprs la panne. Ce choix de politique de maintenance peut tre dict par le type de matriel utilis ou par une

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    dcision de la direction. Pour cela, il faut que lentreprise ou le procd de fabrication puisse tolrer les pannes (qui sont souvent de nature alatoire) et les incertitudes lies la remise en ltat des machines. Ce type de maintenance va aussi entraner plus de contraintes temporelles pour les intervenants qui ne peuvent anticiper les tches raliser. Inversement, la maintenance prventive consiste en des rvisions ou des interventions plus ou moins priodiques sur lquipement, dans le but de rduire la probabilit de dfaillance. Ces actions sont donc dfinies et prpares lavance, ce qui nest pas possible dans le cas du correctif. De fait, ce type de maintenance permet de rduire le nombre de pannes et est plus adapt aux procds de fabrication qui ne tolrent pas les arrts ou qui ont besoin dune disponibilit maximale. Choisir une politique de maintenance base sur la maintenance prventive ne dispense pas de faire de la maintenance corrective, car des dfaillances surviendront toujours, mais moins souvent quavec une politique de maintenance corrective. La maintenance prventive peut ensuite se scinder en plusieurs catgories : la maintenance systmatique ou la maintenance conditionnelle selon les critres qui sont retenus pour planifier les interventions de maintenance. Enfin, la maintenance amliorative consiste modifier lquipement afin quil rponde aux exigences demandes en termes de fiabilit et de disponibilit. Pour cela, il peut tre ncessaire de modifier des pices, de rajouter des composants ou au contraire den retirer. Cette maintenance amliorative ne peut tre faite que sur des machines dont lhistorique est connu et sur lesquelles les donnes sont disponibles. Elle ncessite des ressources et des moyens importants de la part de lentreprise, mais les rsultats et les retombes des amliorations peuvent grandement contribuer rduire les interventions de maintenance et augmenter la productivit de lentreprise. Le personnel de maintenance reprsente en gnral 4 8 % de la main-duvre totale, mais cette proportion peut monter, dans le cas de certaines industries fortement automatises (sidrurgie, cimenteries, industrie ptrolire), prs de 40 % de leffectif total [Boucly 1987]. Malgr la faible importance de leffectif, il nen demeure pas moins que les activits de maintenance sont identifies comme critiques et que leurs consquences peuvent tre prjudiciables pour la scurit de tous les oprateurs tant de maintenance que de production [CSST 2000]. Au Qubec, la main-duvre dans les industries (PME et grandes entreprises) compte 380 000 personnes, ce qui peut se traduire par environ 22 800 personnes affectes la maintenance (6 % de la main-duvre), sans compter les entreprises de service, de transport et dentreposage (162 800 personnes). Au Qubec, le nombre de personnes affectes la maintenance peut donc tre estim rapidement environ 29 000, ce qui est loin dtre ngligeable. Il nexiste pas de connaissances particulires sur les accidents lis lactivit de maintenance, mais de nombreuses sources bibliographiques estiment que ces accidents sont graves et il nest pas rare quils puissent conduire au dcs du travailleur (cf. exemples tirs du fil de presse de la CSST). LIRSST et lINRS (France) ont estim dans des rapports de recherche antrieurs que les actions de maintenance sont tout aussi dangereuses que les actions de production [Collinge 1999].

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    Auparavant, seuls les employs qui faisaient partie du service de maintenance pouvaient effectuer des interventions de maintenance. Avec lapparition de la maintenance productive totale (ou TPM en anglais), la totalit du personnel de lentreprise peut participer la dmarche de maintenance productive [Boucly 1998]. Par ailleurs, la recherche de diminution des cots de maintenance peut aussi entraner lapparition dinterventions de maintenance sous-traites avec une externalisation du risque vers les sous-traitants [Hry 2002], car le bilan de la sous-traitance sur le plan social peut tre souvent ngatif tout en entranant sur le plan technique un affaiblissement des comptences du personnel et de la scurit [Seillan 2000]. Par ailleurs, la fonction maintenance continue voluer et se transformer. Aprs tre passes de la maintenance corrective la maintenance prventive puis la maintenance conditionnelle, les entreprises avancent continuellement et vont maintenant vers une prise en compte des impratifs de maintenance lors du choix des quipements nouveaux et de leur conception : cest le concept de cot global du cycle de vie (ou LCC, Life Cycle Cost en anglais).

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    3. MTHODOLOGIE DE TRAVAIL

    Lapproche utilise dans cette recherche exploratoire est une approche convergente multisources de donnes. Pour cela, nous avons crois les rsultats tirs dune recension dcrits avec une analyse des accidents graves et mortels survenus au Qubec entre les annes 1990 et 2001 et ltude de quelques cas spcifiques relis aux espaces clos et aux convoyeurs courroie. La premire partie consiste en une recension partielle des crits jusquen 2005. Cette phase a permis didentifier, de recueillir et danalyser la bibliographie concernant la maintenance relie la sant et la scurit du travail et englobe spcifiquement les points suivants : lien entre maintenance et exploitation; valuation de la maintenance; maintenabilit; stratgies de maintenance (corrective, prventive, prdictive, TPM); modles dorganisation de la maintenance (interne, sous-traitance, conjointe). En seconde partie, une analyse de tous les accidents graves et mortels survenus entre 1990 et 2001 qui ont donn lieu un rapport daccident de la part de la CSST a t ralise. Dans le rapport daccident dpersonnalis, nous avons accs aux circonstances de laccident, au titre demploi de laccident ainsi que dans certains cas son exprience et son anciennet dans lentreprise. Ces donnes ont permis de slectionner les rapports denqute lis une activit de maintenance, telle qunumre dans la norme EN 13306 [EN 13306] au chapitre Activits de maintenance . Dans certains cas, des oprateurs de production ont effectu des interventions de maintenance qui ont t prises en compte, mais toutes les activits normales lies la production ont t exclues de ltude. Finalement, pour pouvoir affirmer quun accident est li une intervention de maintenance, il faut que laccident ait lieu lors de lintervention ou quune des causes principales de laccident soit en lien avec une intervention de maintenance ralise prcdemment (mauvais diagnostic, mauvaise rparation, erreur lors de lintervention, etc.). Lors de l'tude, 574 rapports denqute taient disponibles pour les 1 275 accidents du travail mortels enregistrs dans la base de donnes de la CSST. Pour slectionner les rapports lis des interventions de maintenance, il a t ncessaire de lire les rsums des rapports. Dans certains cas, la lecture du rsum ne permettait pas de conclure et le rapport devait tre lu pour slectionner ou non le rapport. Les rapports slectionns (157 rapports pour 163 dcs et 12 blesss) ont ensuite t codifis selon une slection de critres classs en six catgories :

    Catgorie A 25 variables : informations sur lactivit de maintenance (prventive, corrective, localisation, date, heure, co-activit, etc.);

    Catgorie C 13 variables : informations socio-conomiques (CAEQ, sous-traitance, employeur, etc.);

    Catgorie O 52 variables : informations sur lentreprise (environnement physique de travail, procdures, cadenassage, machine, protection des machines, organisation du travail, etc.);

    Catgorie S 5 variables : informations sur laccident et ses effets sur la personne (agent causal, sige de la lsion, dommage, etc.);

    Catgorie T 18 variables : informations sur le travailleur (nombre de personnes, ge, sexe, anciennet, titre demploi, etc.);

  • 8 La maintenance tat de la connaissance et tude exploratoire

    - IRSST

    Catgorie Z 2 variables : informations sur les recommandations de la CSST

    lentreprise (si existantes). La mthodologie utilise pour traiter les tudes de cas consistait en une revue de la littrature classique ainsi qu lutilisation des donnes et de lexpertise disponibles lIRSST.

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    4. RSULTATS

    4.1 Recension dcrits

    Des crits de diffrentes natures ont t recenss. Certains contenaient des donnes relatives aux accidents en gnral, dautres taient plus cibls sur les accidents survenus lors dinterventions de maintenance et enfin, les derniers taient plus centrs sur la maintenance au sens thorique du terme. 4.1.1 Des chiffres vocateurs et inquitants

    Une entreprise compte sur la disponibilit de son personnel et de ses quipements de travail pour atteindre ses objectifs de production. Pour cela, la maintenance doit veiller la disponibilit de loutil de production au moindre cot en assurant la scurit des personnes, des biens et de lenvironnement. Pour remplir cette fonction, le personnel de maintenance est amen effectuer de nombreuses interventions telles que la localisation des composants dfectueux, le diagnostic, le dpannage et la rparation des quipements ou encore la rvision des matriels et leur surveillance. Ces diffrentes oprations, qui ne sont pas toujours rptitives, soulvent gnralement des problmes de scurit autant pour les intervenants que pour les installations ou pour le reste du personnel de lentreprise. Elles sont considres comme des situations risque [ED 1521] et par consquent doivent faire lobjet dune attention particulire pour les matriser. Il existe quelques tudes qui regroupent des chiffres et des statistiques daccidents lors dintervention de maintenance [Main 2002, AFIM 2004]. La majorit de ces tudes ne porte que sur des analyses conscutives des accidents et non sur des valuations prventives pour la scurit des travailleurs. Nanmoins, toutes ces tudes rvlent des liens importants entre la maintenance et les accidents du travail. Une enqute mene par lARIA (Analyse Recherche et Information sur les Accidents) base sur une classification des circonstances des accidents en 2000 en France, indique que les travaux de maintenance et de dmantlement, qui reprsentent pourtant une faible partie du temps consacr aux quipements, constituent des priodes o le risque daccident est sensiblement accru [ARIA 2000]. Cette enqute indique quentre 1992 et 2000, 6 % des accidents tudis sont relis une activit de maintenance. Une analyse qualitative conduite par lAgence europenne pour la scurit et la sant au travail sur 116 accidents mortels ou trs graves en France en 1997 soulve le mme point de vue en associant 20 % des accidents sur machines des activits de maintenance [Agence 1998]. Les donnes de 1998 accentuent cette tendance avec une reprsentation lgrement suprieure 20 % pour la maintenance [Agence 1998]. LAssociation Franaise des Ingnieurs et responsables de Maintenance (AFIM) prcise dans son guide national de la maintenance 2004 [AFIM 2004] que les accidents relis aux oprations de maintenance sont plus svres et que les intervenants de maintenance sont plus exposs par rapport dautres mtiers. Dailleurs, il est not quen France les mtiers de la maintenance

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    - IRSST

    prsentent une occurrence de maladies professionnelles de 8 10 fois plus leve que la moyenne et une dure dincapacit temporaire lie aux accidents de 53 jours, soit 12 jours de plus que la moyenne nationale. Un rapport franais dinformation sur le bilan et les consquences de la contamination par lamiante [Driot 2005] indique que trois catgories de travailleurs sont particulirement concernes : les travailleurs de seconde uvre dans le btiment, le personnel de maintenance et dentretien des immeubles et le personnel charg du confinement et du retrait de lamiante. Une tude australienne, publie en 2002, portant sur les activits des travailleurs blesss mortellement par des machines et des quipements fixes entre 1989 et 1992, confirme la contribution importante de lactivit de maintenance dans les accidents du travail [NOHSC 2000]. Ainsi, 48 cas sur les 221 tudis (21,7 %) concernent lactivit de maintenance, plaant ainsi cette dernire activit en premire position devant les activits dinstallation, de dchargement et de transport (Figure 1).

    Activit du travailleur lors de l'accident

    22%

    9%

    8%7%5%5%

    5%

    4%

    4%

    3%

    28%

    MaintenanceInstallationDchargementTransportConstructionChargementTransport dobjetTravaux denfouissementDmantlementFabricationAutres

    Figure 1 : Activits des travailleurs blesss mortellement par des machines et des quipements fixes en Australie de

    1989 1992.

    Dautres tudes, spcifiques certains secteurs ou domaines dactivits, mettent galement en avant les accidents du travail lors dinterventions de maintenance. Ainsi, une tude mene en 1992 par Underwood du UK Health Safety Executive (HSE) sur 2 100 accidents dans lindustrie chimique, entre 1982 et 1985, rapporte que 30 % des incidents retenus sont lis aux activits de maintenance [Underwood 1992]. Une tude conduite par Hale et collaborateurs (Hale et al., 1998), telle que cite par [Grusenmeyer 2000] sur 294 accidents survenus dans lindustrie chimique, montre galement que 30 40 % dentre eux sont relis aux activits de maintenance. En 1989, Paques et collaborateurs [Paques 1989] reconnaissaient que prs dun quart des accidents dans les scieries du Qubec se produisaient au moment des interventions de travailleurs sur des machines des fins dentretien, de rparation ou de dblocage. Parfois, la relation entre la maintenance et la scurit des travailleurs est trs forte. Cest le cas des accidents qui surviennent lors de travaux en espaces clos o le personnel de maintenance est alors confront des risques extrmes. Ltude conduite par The National Institute for

  • IRSST - La maintenance tat de la connaissance et tude exploratoire

    11

    Occupational Safety and Health (NIOSH) sur 109 accidents mortels en espaces clos, entre 1983 et 1993, est accablante cet gard [NIOSH 1994]. La maintenance est lorigine de 40,4 % des entres dans ces espaces confins ayant conduit laccident. En considrant lactivit dinspection, qui ntait pas retenue dans cette tude comme une activit de maintenance, la maintenance atteint 50,5 % des raisons dentre. Ces quelques chiffres montrent la forte problmatique qui lie la maintenance et la scurit. Cependant, il y a peu dtudes semblables aux prcdentes qui traitent globalement du problme et qui sont disponibles pour le Qubec. De plus, lutilisation du terme maintenance (ou entretien) couvre un domaine vaste, aux frontires floues, qui ne fait pas ressortir les particularits propres cette activit. Peu dtudes dtaillent les circonstances des accidents ou font ressortir les multiples dimensions en jeu. En effet, gnralement peu de prcision est apporte lorsquil sagit de savoir si laccident est survenu lors dune intervention de maintenance ou suite un dfaut de maintenance (suite une mauvaise rparation ou suite un dpannage dfectueux de la machine). Cela peut conduire, dans certains cas, une mauvaise valuation des accidents, car un pourcentage non ngligeable des accidents est alors affect aux phases de production normale bien quil soit li la maintenance ([Hale 1998], tel que cit par [Grusenmeyer 2000]). 4.1.2 La maintenance et la SST

    Lensemble des tudes prcdentes rvle la ncessit de mener une analyse des liens entre les activits de maintenance et la sant et la scurit au travail pour mieux en comprendre les spcificits et les problmatiques associes. Ceci est dautant plus important que jusqu ce jour, la majorit des efforts pour rduire les accidents dans les lieux de travail a t concentre sur les agents de production [Retour 1990], bien quil est souvent constat que les travailleurs en maintenance sont disproportionnellement exposs un plus grand nombre daccidents. Quelques tudes ont t menes en France sur les liens entre la maintenance et la SST [Brangier 1997, Grusenmeyer 1998, Grusenmeyer 2000, Grusenmeyer 2000b]. La premire concerne spcifiquement les interventions de maintenance sous-traites et limpact de la sous-traitance sur la sant et la scurit des travailleurs [Brangier 1997]. Les points les plus importants rapports dans cette srie de documents concernent les responsables de maintenance qui connaissent moins les machines quauparavant et les cahiers des charges des interventions qui sont moins dtaills et souvent sous-estims en temps et en matriel. Par ailleurs, les sous-traitants sont souvent slectionns en priorit sur le cot de la prestation. Dans ce cas, la scurit de la prestation peut en ptir sauf si le donneur un objectif de qualit totale . Les problmes rapports concernent aussi la transmission des informations aux intervenants et la ralisation de tches non documentes. Enfin, les machines deviennent de plus en plus sophistiques, avec des risques peu identifis, ce qui ncessite un cadenassage complet de la machine avant intervention. Les trois dernires concernent les interactions maintenance exploitation qui sont un facteur important de scurit ou dinscurit [Grusenmeyer 2000, Grusenmeyer 1998, Grusenmeyer 2000b]. Dans le cas dinterventions de maintenance lors dun arrt programm dune chaufferie nuclaire [Grusenmeyer 1998], les principaux rsultats issus de ltude sont que le cheminement de linformation est dficient, car toutes les informations ne sont pas transmises entre les diffrents intervenants, des gains et des pertes dinformation se produisent entre chaque tape ou

  • 12 La maintenance tat de la connaissance et tude exploratoire

    - IRSST

    intervenants, et linformation est distribue entre les diffrents intervenants et non partage. Dans le cas dinterventions de maintenance corrective dans une fonderie daluminium, le principal rsultat est que la frontire entre la production et la maintenance est floue [Grusenmeyer 2000]. De ce fait, des interventions diverses de maintenance peuvent tre ralises entirement ou partiellement par la production, de concert ou non avec la maintenance, sans faire systmatiquement lobjet dune demande dintervention. Pour sa part, Janicik, dans le chapitre du livre Safety Through Design [Christensen 1999] dcrit les liens entre la conception, la maintenabilit, la fiabilit et la scurit. Il dcrit aussi comment rduire les risques lis aux interventions de maintenance surtout lors de la conception. Mais les solutions sont trs gnriques et trs larges : rduire la part de la maintenance corrective, prendre en compte les exigences de maintenance lors de la conception, rduire la quantit dnergie ncessaire au procd, substituer les produits dangereux (dans lindustrie chimique), utilisation de lAMDEC et des arbres des fautes, etc. Janicik identifie aussi les tendances du futur concernant la maintenance, telles que laugmentation de lautomatisation des machines et lutilisation plus frquente de la maintenance base sur la fiabilit (ou RCM en anglais). Des liens partiels ont dj t identifis entre les interventions de maintenance prventive et la scurit [Batson 1999, Ray 2000]. Lanalyse dun audit de maintenance compar aux donnes de sant et scurit de 25 entreprises a montr une corrlation ngative entre le score de la fonction maintenance et deux indicateurs de SST. Mais la taille de lchantillon nest pas suffisante pour gnraliser les rsultats. Pour ce qui est des rfrences plus gnrales sur la maintenance, la rfrence [ISDF 1999] est trs pertinente. Cette rfrence dtaille la maintenabilit, qui est laptitude la maintenance, et indique que cette caractristique est aussi importante que la fiabilit, la scurit et le soutien logistique pour caractriser un bien dquipement et la mission qui lui est confie. Cest une des seules rfrences orientes vers la maintenance qui fait un lien clair avec la scurit du personnel. Francastel [Francastel 2003] est aussi intressant, car il cite bien la scurit dans les fonctions lmentaires de la maintenance et traite aussi des risques des interventions de maintenance. Cependant, cette citation est succincte et se limite mentionner que De toutes les activits industrielles, la maintenance est la plus expose aux accidents du travail en citant les rsultats de lenqute scurit de la fonction maintenance de lAFIM [AFIM 2004]. ct de cette citation, de nombreuses parties traitent de la scurit lors des interventions de maintenance (les responsabilits devant les risques, les procdures de scurit, la matrise de la sret de fonctionnement, etc.). Les deux sources prcdentes sont bien en avance sur dautres qui occultent compltement les liens entre la maintenance et la SST [Levitt 1997, Terrell 1995, Manuele 1993]. Enfin, pour ce qui est de la sous-traitance, la rfrence [Francastel 2005] est instructive. Le chapitre 2.6.1. explique le recours la sous-traitance en maintenance et les diffrents objectifs de la sous-traitance des interventions de maintenance sont de quatre natures :

  • IRSST - La maintenance tat de la connaissance et tude exploratoire

    13

    Objectifs conomiques (obtention des mmes rsultats de maintenance un cot

    infrieur); Objectifs de flexibilit (ajustement des dpenses de maintenance lutilisation du

    matriel et du chiffre daffaires); Objectifs de garantie (obtention dune garantie sur le travail effectu); Objectifs stratgiques et sociaux (rduction volontaire deffectif, limitation de lexpertise,

    sous-traitance des travaux dgradants ou insalubres , limitation des revendications sociales).

    Seuls les trois premiers objectifs sont dtaills dans le document. Le quatrime, qui semble aussi trs intressant est totalement lud, ce qui reflte bien ltat desprit actuel qui consiste ne pas parler de ce qui peut tre prjudiciable ou socialement critiquable (par exemple la sous-traitance des travaux dgradants ). Enfin, la rfrence [Seillan 2000] permet aussi de complter les liens entre la sous-traitance et la scurit sous plusieurs aspects. 4.1.3 La maintenance

    Dautres rfrences occultent compltement les liens entre la maintenance et la SST [Levitt 1997, Terrell 1995, Manuele 1993]. En effet, dans ces trois sources qui sont des livres de rfrence sur la maintenance [Levitt 1997] ou la sant et scurit au travail [Terrell 1995, Manuele 1993], mme si elles traitent toutes de la scurit, aucune ne fait de lien marqu entre le mtier de maintenance et la scurit au travail. Levitt [Levitt 1997] rsume la scurit deux pages et la SST occupe moins de 1 % du livre. Il insiste sur le ct pnal en disant qu une bonne maintenance peut diminuer les risques et montrer que lon est une compagnie srieuse qui contrle au mieux les vnements (traduction de lauteur). Il mentionne aussi que la maintenance est la ressource principale pour rduire les risques, car son personnel est en premire ligne pour identifier les risques, rparer les problmes potentiels qui peuvent affecter les autres travailleurs et tre les avocats dune meilleure scurit. Mais cette vision est purement thorique. Pour sa part, Terrell parle de la SST mais peu de la maintenance [Terrell 1995]. Il indique seulement que la maintenance prventive peut limiter les dfaillances qui pourraient tre dangereuses et permet de maintenir les lments de scurit en place et en fonction. Il mentionne tout de mme que les protecteurs ne protgent pas le personnel de maintenance et que leur bon fonctionnement dpend de la maintenance. Cependant, Terrell ne cite que la maintenance prventive dans le but de stabiliser le niveau de danger des machines et lefficacit des protections. Mais certains quipements ne doivent pas tre entretenus par de la maintenance prventive (cas des quipements lectroniques), car leur taux de dfaillance est constant et ce type de maintenance est inefficace. De plus, Terrell ne parle jamais de fiabilit des machines ou des moyens de protection et il ne prend jamais en compte la protection des intervenants de maintenance. Quant lui, Manuele traite des pratiques et des principes fondamentaux de la scurit au travail [Manuele 1993]. Il cite deux reprises la maintenance : une fois en indiquant que lintgration de la scurit lors de la conception permet de rduire les sources de danger lors de la production

  • 14 La maintenance tat de la connaissance et tude exploratoire

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    ou lors de la maintenance des machines, et une seconde fois o il mentionne que la maintenance prventive a des impacts importants sur la prvention et le contrle des sources de danger. 4.1.4 Cadre gnral des interventions de maintenance

    Comme cela a t mentionn rapidement auparavant, les diffrentes interventions de maintenance ne se situent pas toutes un mme niveau de complexit, durgence, de planification. Elles peuvent donc tre classifies selon plusieurs critres. 4.1.4.1 Nature de lintervention

    Les interventions peuvent tre de nature corrective ou prventive [EN 13306]. Dans le premier cas, lintervention ne peut tre planifie car ce type dintervention est effectu suite la dfaillance ou la dgradation de la fonction de la machine. Dans le second cas, lintervention aura t planifie et le matriel aura t prpar car ces interventions ont pour objet de rduire la probabilit de dfaillance ou de dgradation de la machine. Les interventions correctives peuvent tre provisoires (action de dpannage) afin de remettre la machine le plus rapidement possible en fonction temporairement. Ce sont alors des interventions palliatives. Elles peuvent aussi tre dfinitives en rtablissant directement la machine dans son tat originel ou dans un tat amlior qui supprime la dfaillance. Ce sont alors des interventions curatives. Dans les deux cas, ces interventions de maintenance sont souvent ralises avec des contraintes temporelles fortes. Par exemple, les machines dabattage des arbres en fort sont sujettes rgulirement des dfaillances de la tte dabattage (dbarquement de la chane de coupe, casse de la chane, gauchissement de la plaque guide, etc.). Ces dfaillances doivent alors tre corriges rapidement car les exploitants de ces machines sont pays selon le volume de bois coup. Cette situation entrane une contrainte temporelle forte pour les oprateurs de ces machines lors des rparations sur le terrain, contraintes temporelles conjugues des contraintes denvironnement (nature du sol, branchage, mto, temprature, neige, etc.). Les interventions prventives ont pour objectif de rduire la probabilit de dfaillance de la machine. Elles doivent donc tre planifies mais peuvent rpondre trois logiques :

    La maintenance systmatique qui est effectue selon un chancier tabli partir dun nombre prdtermin dunits dusage (temps, produits, rotation, poids);

    La maintenance conditionnelle qui est dclenche par le franchissement dun seuil prdtermin et significatif de ltat de dgradation de la machine;

    La maintenance prvisionnelle qui est dclenche par lanalyse de lvolution de ltat de dgradation de la machine.

    Ces interventions sont donc souvent ralises avec des contraintes temporelles moins fortes, car elles peuvent tre planifies et prpares plus ou moins longue chance. 4.1.4.2 Les niveaux de maintenance

    Les interventions de maintenance qui ont t dcrites peuvent tre classifies en plusieurs niveaux de complexit croissante. Cette classification permet de prvoir lavance le niveau de

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    complexit, le niveau de formation requis pour les intervenants ainsi que les familles de moyens mettre en uvre. Le tableau ci-aprs (Tableau 1) permet de faire la synthse entre plusieurs classifications possibles [ISDF 1999, FD X 60-000, Hng 2002].

    Tableau 1 : Dfinition des niveaux de maintenance.

    Niveaux Actions Moyens logistiques Personnel

    Premier

    Rglages, contrles et inspections simples Oprations lmentaires de maintenance prventive (niveaux, tests de voyants) Remplacements de consommables et accessoires

    Petit outillage Consommables

    Utilisateur du bien Intervenant de maintenance

    Deuxime

    Maintenance prventive systmatique (remplacement de filtres, vidanges, lubrification, graissage) Rparations par changes standard simples

    quipements de soutien dutilisation simple Pices de rechange portables

    Utilisateur du bien ou intervenant de maintenance qualifi pour lintervention

    Troisime

    Maintenance corrective, diagnostic, dpannage, rparation (remplacement dun capteur, dun injecteur, dune rsistance) Maintenance prventive complexe (contrle de lisolement lectrique, rglage des jeux, contrle et rvision de pompe)

    quipements de soutien complexes : outillage, moyens de contrle et dessais Pices de rechange

    Technicien de maintenance qualifi

    Quatrime

    Travaux importants de maintenance corrective ou prventive (contrle dalignement du moteur et de la transmission) Amliorations importantes (dculassage dun moteur)

    Gros outillage Moyens importants de contrle et/ou dessai Pices de rechange et sous-ensembles

    Technicien ou quipe spcialise

    Cinquime Rnovation Reconstruction Gros travaux damlioration

    Moyens logistiques importants et/ou spcifiques

    Constructeur du matriel ou socit spcialise

    Chaque augmentation de niveau entrane gnralement une augmentation de la complexit de la tche, de sa dure, de la planification de lintervention, des comptences requises et de la documentation requise. Il est logique de penser que cette augmentation de niveau va aussi tre suivie dune augmentation du risque associ lintervention due laugmentation des sources dnergie isoler, laugmentation des moyens logistiques, laugmentation du dmontage de la machine ainsi qu laugmentation de la taille des pices dmontes. Cependant, la conception de la machine peut limiter ou accentuer laugmentation du risque. Pour contrer ces risques, il est alors possible de cadenasser la machine lors de lintervention. Par ailleurs, les deux premiers niveaux ne sont pas exclusivement rservs aux intervenants de maintenance comme le mentionne le tableau 1. En effet, les oprateurs de production sont appels effectuer ces travaux afin denrichir leur tche et de les impliquer dans la maintenance des machines [Hohmann 2005].

  • 16 La maintenance tat de la connaissance et tude exploratoire

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    4.2 Analyse des accidents graves et mortels au Qubec

    Pour le Qubec, aucune tude antrieure ne prsente une vision globale de cette problmatique, notamment sur le nombre daccidents du travail ou de maladies professionnelles touchant le domaine de la maintenance. Il nest donc pas possible dvaluer ou destimer directement le nombre daccidents du travail reli cette activit. Afin dappuyer les donnes recueillies et les diffrentes tudes effectues dans dautres pays et pour obtenir une estimation gnrale de limpact de la maintenance sur les risques pour les travailleurs au Qubec, une tude a t effectue sur les accidents du travail mortels au Qubec entre 1990 et 2001, soit sur une priode de 12 ans. Ltude a t ralise partir des donnes disponibles la Commission de la sant et de la scurit du travail (CSST) pour les annes concernes. Entre 1990 et 2001, selon les rapports annuels de la CSST (Tableau 2), les accidents du travail ont entran 1 275 dcs. Pour ces mmes annes, 574 rapports denqutes taient disponibles la CSST sur le site du centre de documentation de la Commission 1. Ces rapports couvrent donc prs de la moiti des accidents du travail mortels qui se sont produits entre 1990 et 2001 au Qubec. Suite la lecture et lanalyse de ces rapports laide dune grille, 157 dentre eux (soit 27 %) ont t retenus comme tant relatifs une activit de maintenance : amliorer la machine, diagnostiquer, essayer, dpanner, localiser une panne, inspecter, modifier, reconstruire, rparer, rviser, surveiller le fonctionnement. Ces accidents retenus ont entran au total la mort de 163 travailleurs et caus des blessures 12 autres travailleurs (travaillant avec ou auprs du travailleur dcd). Cet ensemble reprsente prs de 13 % des dcs relis un accident du travail et enregistrs par la CSST entre 1990 et 2001 (163 / 1 275). la lumire de ces rsultats, il est concevable de penser que les activits de maintenance reprsentent au Qubec une proportion significative des accidents mortels puisque 27 % des rapports analyss sont relatifs une intervention de maintenance. Cette situation confirme les chiffres publis par dautres tudes au Qubec et dans dautres pays [Agence 1998, ARIA 2000, Grusenmeyer 2000, Mutawe 2002, NIOSH 1994, NOHSC 2000, Paques 1989, AFIM 2004, Underwood 1992, Windau 1998]. Il est toutefois important de souligner que ce chiffre ne reflte pas tout fait la ralit, car plus de la moiti des rapports denqutes, pour les annes 1990 2001, ntait pas disponible ou publie au moment de ltude.

    1 Depuis, plusieurs rapports relatifs ces annes ont t ajouts.

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    Tableau 2 : Rpartition des dcs, des rapports denqute disponibles et des rapports relatifs une activit de

    maintenance au Qubec entre 1990 et 2001.

    Anne Dcs suite un accident

    Rapports disponibles

    Rapports relatifs une activit de maintenance

    1990 147 58 17 1991 112 38 6 1992 84 39 10 1993 108 46 13 1994 98 53 24 1995 115 59 14 1996 72 43 13 1997 109 50 11 1998 134 56 17 1999 95 44 7 2000 107 43 18 2001 94 45 7 Total 1 275 574 157

    * Un accident entrane quelquesfois plusieurs dcs (163 dcs pour 157 accidents) Ltude des rapports [Tanchoux 2004] a permis dextraire pour chaque accident un rsum des circonstances et des facteurs communs plusieurs accidents. Les facteurs retenus sont :

    Anne doccurrence de laccident; Classification des activits conomiques du Qubec (CAEQ); Rsum de laccident; Activit du ou des travailleurs impliqus au moment de laccident; Consquences de laccident (nombre de morts et de blesss); Nature de laccident; Exprience dans la fonction exerce; Anciennet dans lentreprise; Titre demploi du travailleur; Mention du cadenassage.

    Compte tenu du faible taux de rapports disponibles, lanne doccurrence de laccident ne peut permettre de tirer des conclusions fiables. Pour ce qui est du secteur dactivit conomique (CAEQ), les rsultats montrent que les secteurs de l industrie du papier et des produits du papier (CAEQ 27**) , de l industrie du bois (25**) et des constructeurs, promoteurs et investisseurs gnraux (40**) reprsentent une grande partie des accidents tudis avec respectivement 10,8 %, 8,9 % et 7 % du total des accidents (Figure 2). Les secteurs de l agriculture (01**) , des industries des aliments (10**) , des transports (45**) et les autres services publics (49**) suivent de prs les trois premiers secteurs. Au total, 20 % des secteurs (soit 7 secteurs en rouge dans la Figure 2) sont responsables de prs de 50 % des accidents mortels de maintenance. Seul le secteur des mines (06**), qui est un des trois secteurs dactivit conomique risque pour le Qubec (tous

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    accidents confondus) avec celui de la construction et celui des forts, ne se situe pas dans les secteurs les plus risque pour les accidents de maintenance.

    Accidents mortels selon le secteur

    0 2 4 6 8 10 12 14 16 18

    Industrie du papier et des produits en papier (27**)

    Industrie du bois (25**)

    Constructeurs, promoteurs et entrepreneurs gnraux (40**)

    Agriculture (01**)

    Industries des aliments (10**)

    Autres services publics (49**)

    Transports (45**)

    Entrepreneurs spcialiss (42**)

    Exploitation forestire (0411)

    Industries de la fabrication des produits mtalliques (30**)

    Industries de premire transformation des mtaux (29**)

    Mines (06**)

    Figure 2 : Nombre daccidents mortels selon le secteur dactivit 1990-2001.

    Si lon compare ces chiffres aux populations actives selon les secteurs conomiques (Tableau 3), il appert que les secteurs qui engendrent le plus de dcs dintervenants de maintenance par rapport la population active (toutes personnes confondues) sont les industries du papier et des produits en papier (27**), lexploitation forestire (0411), les mines (06**) et lindustrie du bois (25**). Deux de ces secteurs se retrouvent dans les secteurs avec un trs fort taux de prvalence, lindustrie du bois (25**) et lexploitation forestire (0411). Ceci semblerait dire quil est risqu de travailler dans ces secteurs, que lon soit oprateur de production ou intervenant de maintenance. Pour ce qui est du secteur de lindustrie du papier et des produits en papier (27**), le taux de prvalence du secteur (qui reprsente le nombre de travailleurs absents chaque jour pour 1 000 travailleurs) est trs proche du taux moyen pour lensemble de la main-duvre du Qubec. Mais comment expliquer le nombre lev de dcs dintervenants de maintenance? Est-ce que le travail de maintenance est un travail extrmement risqu compte tenu de la nature des machines, de leur complexit et de leurs commandes? Est-ce influenc par le ratio personnel de maintenance / personnel de production ? Ou bien y a t-il une autre cause non connue ?

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    Tableau 3 : Comparaison du nombre daccidents mortels par rapport la population active par secteur conomique

    et par rapport aux indicateurs de SST.

    CAEQ Accidents mortels 1990-2001

    Population active (a)

    Accident / 1 000 travailleurs

    Taux dincidence ETC (b)

    Dure moyenne (jour) (b)

    Taux prvalence ETC (b)

    27** - Industrie du papier et des produits en papier

    17 26 350 0,65 7,9% 39,1 8,5

    25** - Industrie du bois 14 34 367 0,41 16,9% 41,2 19,1 40** - Constructeurs, promoteurs et entrepreneurs gnraux

    11 32 135 0,34 7,4% 102,2 20,7

    01** - Agriculture 10 48 006 0,21 2,4% 69,8 4,5 10** - Industries des aliments 9 49 474 0,18 13,2% 39,4 14,3 49** - Autres services publics 8 31 704 0,25 4,6% 46,9 6 45** - Transports 8 124 930 0,06 5% 65 8,9 42** - Entrepreneurs spcialiss

    7 67 409 0,10 6,6% 100,2 20,7

    0411 - Exploitation forestire 7 14 797 0,47 7,9% 107,2 23,3 30** - Industries de la fabrication des produits mtalliques

    5 26 995 0,19 21,2% 37,2 21,6

    29** - Industries de premire transformation des mtaux

    5 21343 0,23 11,5% 33,2 10,4

    06** - Mines 5 11 441 0,44 7,4% 82 16,6 Total de la main-duvre du Qubec

    / 2 972 888 / 4,8% 55,9 7,4

    (a) Sources : Statistique Canada - Recensement de la population de 1996, tableau personnalis. Statistique Canada - Enqute sur l'emploi, la rmunration et les heures de travail (EERH), compilation spciale rvise en mars 2004, donnes de 1995 1997. Traitement : IRSST, date de production des tableaux ou graphiques : 31 aot 2005.

    (b) Sources : Statistique Canada - Recensement de la population de 1996, tableau personnalis. Statistique Canada - Enqute sur l'emploi, la rmunration et les heures de travail (EERH), compilation spciale rvise en mars 2004, donnes de 1995 1997. DUGUAY, P., HBERT, F. et MASSICOTTE, P. (2003). Les indicateurs de lsions indemnises en sant et en scurit du travail au Qubec : analyse par professions en 1995-1997, rapport de recherche, Montral, IRSST, tableau 2.2. Traitement : IRSST, date de production 1er septembre 2005.

    Les informations disponibles dans les rapports nous ont permis de dterminer la tche effectue par le travailleur au moment de laccident. Lanalyse de ces tches effectues au moment de laccident [Tanchoux 2004] montre que les activits de rparation et de dpannage constituent une trs forte proportion des accidents relevs avec 45,9 % (Figure 3). Linspection et le contrle, le nettoyage et le dblocage des quipements arrivent ensuite avec respectivement 14,6 %, 14,6 % et 14,1 %. Enfin, les activits de diagnostic/localisation, graissage, rcupration et supervision narrivent qu la fin avec un total de 11 % des accidents. Les accidents tudis ne concernent gnralement quun travailleur. quelques rares occasions, deux travailleurs ou plus sont accidents. En effet, les 157 accidents tudis ont affect 175 personnes : 163 personnes sont dcdes et 12 personnes ont t blesses. Pour ce qui est de la nature de laccident, une forte proportion des travailleurs (34 %) se retrouvent coincs entre un objet fixe et un objet en mouvement lors des activits de maintenance

  • 20 La maintenance tat de la connaissance et tude exploratoire

    - IRSST

    tudies (Figure 4). Cette proportion grimpe 42 % si lon associe les crasements qui sont aussi conscutifs un dplacement (vertical) dune partie de la machine. Llectrocution (16 %), le fait dtre frapp par un objet en mouvement (13 %) et lexposition des flammes ou une explosion (10 %) sont aussi bien reprsents. Ceci laisse penser que certaines formes dnergie taient encore prsentes dans les machines lorsque les interventions de maintenance ont t effectues, car le dplacement de pices de la machine ncessite obligatoirement de lnergie, quelle que soit sa forme (lectrique, mcanique, hydraulique, rsiduelle, potentielle, etc.).

    Activit du travailleur lors de l'accident

    45%

    15%15%

    14%6%

    3%

    1%

    1%

    Rparation / Dpannage

    Inspection / Contrle

    Nettoyage

    Dblocage

    Diagnostic / Localisation

    Graissage

    Rcupration

    Supervision

    Figure 3 : Activit de maintenance lors de laccident.

    Nature de l'accident

    34%

    16%13%10%

    8%

    8%4% 7%

    Pris entre un objet fixe et unobjet en mouvementElectrocution

    Frapp par un objet enmouvementExplosion / Brlure

    Chute

    Ecras par un objet

    Noyade

    Autres Figure 4 : Nature de laccident lors de lintervention de maintenance.

    Ltude des chiffres sur lexprience et lanciennet des travailleurs impliqus dans les accidents de maintenance est un des points forts et troublants de cette analyse. En effet, plus de 44 % des travailleurs impliqus avaient moins de 5 ans dexprience dans la fonction ou dans lactivit effectue au moment de laccident et presque tous avaient aussi moins de 5 ans danciennet dans lentreprise (Figure 5). Aprs 10 ans dexprience ou danciennet, ce facteur ne semble plus constituer une cause fortement relie laccident.

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    01020304050607080

    Nombre

    - 5 ans 10-15ans

    20-25ans

    + 30 ans

    Exprience et anciennet lors de l'accident

    ExprienceAnciennet

    Figure 5 : Exprience et anciennet lors de laccident.

    Ne disposant pas des effectifs en fonction de lexprience et de lanciennet, il nest pas possible de dire si ce facteur influence les accidents une fois pass le cap des 5 annes. Par contre, si le travailleur a moins de 5 annes dexprience ou danciennet, il est clair que ce facteur est significatif. Il convient toutefois de noter quun nombre non ngligeable de rapports ne fournissait pas ces informations (15,2 % des rapports pour lexprience et 20,8 % des rapports pour lanciennet). Il serait intressant danalyser plus en profondeur ces donnes en essayant de disposer du maximum de rapports denqute et en disposant de toutes les informations relatives lanciennet et lexprience. De plus, il serait opportun de dtailler plus finement la classe de 5 annes ou moins dexprience et danciennet et de faire le lien entre anciennet et exprience. Ces donnes nous permettent aussi de confirmer que lexprience et lanciennet des intervenants de maintenance jouent un rle dans les causes daccident tout comme pour les oprateurs de production. Trois catgories ont t cres pour analyser les donnes relatives au titre demploi du travailleur accident :

    Le terme personnel de maintenance regroupe tous les travailleurs dont la mission principale est deffectuer des interventions relatives de la maintenance (mcanicien, lectricien, tuyauteur, plombier);

    Le terme oprateur rassemble tous les travailleurs dont la mission principale est deffectuer des travaux autres que de la maintenance (oprateur de production, chauffeur, agriculteur);

    Le terme superviseur est constitu par les travailleurs affects des tches responsabilit ou des tches de supervision (chef dquipe, superviseur, ingnieur, directeur).

    Ces donnes montrent que la moiti des accidents relatifs des actions de maintenance (51 %) implique des travailleurs (personnel de maintenance) affects des activits de maintenance (Figure 6). Cependant, prs dun tiers (35,5 %) des travailleurs impliqus dans des accidents de maintenance ntait pas principalement affect des tches de maintenance (oprateurs).

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    Finalement, pour ce qui est du cadenassage, seulement un peu plus de 20 % des rapports faisait mention du cadenassage. Compte tenu de limportance du cadenassage dans la scurit des intervenants de maintenance et compte tenu de son poids lgislatif au Qubec, il est tonnant que ce moyen de mise en scurit soit aussi peu mentionn dans des rapports daccidents relatifs des interventions de maintenance. En effet, seuls 19 % des accidents ne mettent pas en cause une forme quelconque dnergie dans la machine (8 % de chute, 4 % de noyade et 7 % de non class ailleurs). Dans tous les autres cas, soit 81 %, laccident est d une prsence dnergie dans la machine lors de lintervention : pris entre un objet fixe et un objet en mouvement, lectrocution, frapp par un objet en mouvement, explosion/brlure, cras par un objet. Or, en analysant les rapports, il est apparu que le cadenassage aurait pu tre appliqu dans prs de 50 % des cas et aurait pu, en thorie, viter laccident. Enfin, la machine tait en marche pour 23 % des accidents et elle tait larrt pour 43 %.

    Titre d'emploi du travailleur accident

    51%36%

    12% 1%

    McanicienOprateurSuperviseurNon indiqu

    Figure 6 : Titre demploi du travailleur accident.

    Cette premire tude des rapports daccidents graves ou mortels survenus au Qubec entre 1990 et 2001 rvle que la maintenance constitue une part non ngligeable des accidents du travail mortels au Qubec. Ces rsultats sont cohrents avec les autres tudes internationales disponibles. Elle rvle aussi que si le personnel de maintenance est fortement expos, dautres catgories de personnel, plus centres sur lopration des machines, le sont aussi. Les deux points forts de cette analyse sont que prs de la moiti des intervenants de maintenance accidents avait moins de cinq annes dexprience ou danciennet dans leur fonction et que la mention du cadenassage nest faite que rarement, alors que ce moyen de protection est le seul qui soit cit dans la lgislation au Qubec [RSST, article 185]. Ce dernier point indique donc que la matrise des sources dnergie lors de la conduite dinterventions de maintenance nest pas satisfaisante. Cest ce que nous allons dtailler dans le chapitre suivant.

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    5. LES TUDES DE CAS

    5.1 Le cadenassage ou consignation

    Le moyen le plus cit dans la littrature pour mettre les intervenants de maintenance en scurit est le cadenassage (terme utilis au Qubec) ou consignation (terme utilis en France). Ce moyen est dcrit en dtail dans la norme ISO 14118 :2000 [ISO 14118:2000] et dans les guides de lINRS sur les moyens de prvention contre les risques mcaniques ou sur la consignation et dconsignation [ED 754, Lupin 2006], mais nest dcrit que trs sommairement dans le RSST [RSST]. Toutefois, il existe plusieurs documents explicatifs publis au Qubec [ASPME 1998, ASSIFQ 2001, Daoust 2003]. Le terme cadenassage est souvent utilis pour dcrire des moyens de protection mis en place temporairement sur des quipements ou sur des machines. Lutilisation frquente de ce terme et le caractre imag de ce mot prsentent une ambigut dinterprtation de cet outil de prvention. La dfinition qui semble la plus juste aujourdhui pour le cadenassage est : un ensemble de dispositions qui permettent de mettre et de maintenir en scurit un quipement de faon ce quun changement dtat soit impossible sans laction volontaire de tous les intervenants [Lupin]. Une telle description est gnrale car lensemble des mesures et des consignes de cadenassage reste spcifique chaque entreprise ou chaque machine et peut prendre de nombreuses formes. Mais le texte qui semble tre le plus explicite sur les besoins du cadenassage est lintroduction de la norme ISO 14118 :2000, intitule Scurit des machines Prvention de la mise en marche intempestive , qui indique : Maintenir une machine larrt pendant que des personnes se trouvent dans des zones dangereuses est lune des conditions les plus importantes de lutilisation en scurit dune machine et, pour cette raison, lun des objectifs prioritaires du concepteur et de lutilisateur de la machine . 5.1.1 Les grandes tapes du cadenassage

    Les grandes tapes du cadenassage dpendent en partie des besoins formuls par lentreprise, des objectifs atteindre notamment sur le plan de la scurit et des contraintes qui sappliquent. Ceci explique la difficult de disposer dun modle de procdure standard pour le cadenassage [ED 754]. Pour tre efficace et scuritaire, une procdure de cadenassage doit donc tre adapte lquipement, aux interventions effectuer et aux contraintes rencontres [Poulin 1999]. Cependant, il est possible de dgager trois grandes tapes (Tableau 4) [Construction 1995] :

    Une phase prliminaire durant laquelle un inventaire des quipements et des sources dnergie est effectu afin dlaborer des stratgies de cadenassage compte tenu des spcificits et des contraintes rencontres. Cette phase comprend galement une identification et une codification des diffrents lments inventoris prcdemment et ncessitant dtre cadenasss. Les fiches de cadenassage (qui intgrent aussi le dcadenassage) doivent tre labores la fin de cette phase prliminaire;

  • 24 La maintenance tat de la connaissance et tude exploratoire

    - IRSST

    Une phase de cadenassage o lquipement est arrt, spar de ses sources dnergie et

    cadenass. On procdera galement une libration des nergies rsiduelles ou accumules sur lquipement et une tape de vrification de la bonne mise en scurit de la machine;

    Une phase de dcadenassage, aprs intervention, avec lenlvement des diffrents dispositifs de protection appliqus prcdemment, la remise en place des diffrents lments qui ont t retirs, activs ou dplacs tels que des protecteurs, des boutons darrt ou des pices et la ractivation de lquipement. Cette phase de dcadenassage peut tre relativement simple si lintervention a t courte mais peut devenir trs complexe si la machine a t modifie substantiellement.

    En outre, le cadenassage doit tre excut par des personnes formes [ED 754] et une phase formelle de remise de lquipement la production doit clore le tout.

    Tableau 4 : Les trois grandes tapes du cadenassage.

    tape Actions

    Prliminaire Inventaire des quipements et des sources dnergie Identification Codification laboration des fiches de cadenassage

    Cadenassage

    Arrt de lquipement Sparation des sources dnergie Condamnation (ou cadenassage) Libration des nergies accumules Vrification de la mise en scurit

    Dcadenassage

    Remontage de lquipement Enlvement des dispositifs de cadenassage Ralimentation de la machine Vrification du bon fonctionnement Remise de lquipement la production

    5.1.2 Le rglement au Qubec sur le cadenassage

    Au Qubec, le Rglement sur la sant et la scurit du travail [RSST] traite du cadenassage dans deux de ces articles. Larticle 185 du RSST indique qu avant dentreprendre tout travail de maintenance, de rparation ou de dblocage dans la zone dangereuse dune machine, les mesures de scurit suivantes doivent tre prises, sous rserve des dispositions de larticle 186 :

    1. la mise en position darrt du dispositif de commande de la machine; 2. larrt complet de la machine; 3. le cadenassage, par chaque personne expose au danger, de toutes les sources dnergie

    de la machine, de manire viter toute mise en marche accidentelle de la machine pendant la dure des travaux. .

    De fait, le cadenassage est reconnu comme tant le premier moyen pour scuriser une machine sur laquelle une intervention humaine va tre effectue.

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    Larticle 186 de ce mme rglement [RSST] indique que : Lorsquun travailleur doit accder la zone dangereuse dune machine des fins de rglage, de dblocage, de maintenance, dapprentissage ou de rparation, incluant la dtection danomalies de fonctionnement, et que, pour ce faire, il doit dplacer ou retirer un protecteur, ou neutraliser un dispositif de protection, la machine ne doit pouvoir tre mise en marche quau moyen dun mode de commande manuel et ce conformment une procdure scuritaire spcifiquement prvue pour permettre un tel accs. Ce mode de commande manuel ou cette procdure doit prsenter les caractristiques suivantes :

    1. il rend inoprant, selon le cas, tout autre mode de commande ou toute autre procdure; 2. il ne permet le fonctionnement des lments dangereux de la machine que par

    lintermdiaire dun dispositif de commande ncessitant une action continue ou un dispositif de commande bimanuelle;

    3. il ne permet le fonctionnement de ces lments dangereux que dans des conditions de scurit accrue, par exemple, vitesse rduite, effort rduit, pas pas ou par coups. .

    Ces deux articles ne donnent aucun renseignement sur les grandes tapes du cadenassage, mais seulement des dtails sur les interventions qui ncessitent son utilisation. De plus, ces deux articles ne mentionnent pas du tout que le personnel qui va intervenir doit tre form. Enfin, le rglement ne prvoit aucune alternative au cadenassage pour les travaux de maintenance, de rparation ou de dblocage dans la zone dangereuse dune machine. Or, il convient de noter une diffrence entre le RSST et la norme ISO 14118 [ISO 14118:2000] dans la phase de cadenassage proprement dite, car la norme identifie quatre actions au lieu dune seule dans le RSST :

    1. sparation de la machine de toute source dnergie; 2. si ncessaire (et donc non obligatoire), condamnation de tous les appareils de sparation

    en position de sparation; 3. dissipation ou rtention de toute lnergie accumule susceptible dtre lorigine dun

    phnomne dangereux; 4. vrification que les mesures prises ont produit leffet dsir.

    De fait, la condamnation des appareils de sparation en position de sparation par un cadenas nest pas requise dans tous les cas selon la norme ISO 14118. Or, le terme utilis au Qubec pour la consignation est cadenassage , terme qui fait directement rfrence au cadenas qui est pos pour valider la sparation des sources dnergie. Il rsulte quau Qubec la trs grande majorit des intervenants pensent que le cadenassage est rsum par la pose dun ou de plusieurs cadenas, et qu fortiori il est impossible de faire du cadenassage sans poser de cadenas. 5.1.3 Les liens entre le cadenassage et la scurit

    Les liens entre le cadenassage et la scurit lors des interventions de maintenance sont nombreux. Malgr la progression de lutilisation du cadenassage dans les entreprises, des accidents relis la libration des nergies prsentes continuent de se produire. Par exemple, cela fait plus de 10 ans que des normes sur le contrle des nergies ont t mises en place aux tats-Unis et cela fait plus de 10 ans que le cadenassage figure au sommet des normes les plus cites par lOSHA pour les industriels [Nakoneczny 1999].

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    - IRSST

    Entre 2001 et 2002, le contrle des risques lis aux nergies et au cadenassage figurait en seconde position parmi les normes les plus cites par lOSHA pour le secteur manufacturier [Tanchoux 2004]. Entre 1997 et 1998, le cadenassage se classait dj en 4e position des normes cites par lOSHA pour tous les Standard Industrial Classification . Ce manque important a dailleurs t soulign par une importante association regroupant plusieurs industriels qui indiquait que prs de 20 % des entreprises aux tats-Unis napportaient pas suffisamment de protection leurs travailleurs afin de prvenir les blessures et les accidents mortels [Oppriecht 1995]. Ces problmes touchent galement le Qubec. En 1989, lIRSST [Paques 1989] mentionnait que lapplication du cadenassage tait loin dtre systmatique dans certains secteurs industriels. En 1995, Prventex indiquait que, selon les statistiques de la CSST, plus de 25 000 travailleurs subissaient chaque anne un accident li une machine et prs du tiers de ces accidents se produisaient alors que lquipement devait tre hors service [Prventex 1995, La Mothe 1994]. Le mme organisme prcisait dailleurs que trs peu dtablissements du secteur du textile et de la bonneterie appliquaient une vritable mthode de cadenassage. Plus rcemment, la lecture2 de 12 rapports daccidents graves et souvent mortels, rapports produits par la CSST, montre lampleur du problme de lapplication des procdures de cadenassage. En effet, ils mettent en vidence les lacunes souvent importantes sur lapplication, le contrle, mais aussi sur lexistence mme dune procdure de cadenassage au sein de lentreprise :

    9 juillet 2004, Accident grave d'un travailleur de Grande-Entre Aquaculture., Une gestion de la sant et de la scurit dficiente, une mthode de cadenassage inexistante et l'accs une zone dangereuse en cours d'opration sont l'origine de cet accident.

    15 juin 2004, Dcs d'un travailleur chez Modugno-Hortibec inc. Montral, quune zone dangereuse et un mauvais contrle de la mthode de cadenassage sont l'origine de l'accident.

    20 avril 2004, Dcs d'un travailleur chez Techo-Bloc inc. Longueuil., la CSST a ordonn l'employeur : d'instaurer une procdure de cadenassage de la machine et de former les travailleurs et les contrematres cet effet.

    28 janvier 2004, Accident mortel survenu l'entreprise Maax Canada inc. de Montral., la CSST a demand l'employeur de mettre en place des mesures correctives concernant les risques d'lectrocution, notamment : d'implanter une procdure de cadenassage.

    2 dcembre 2003, Un travailleur de Produits Multifoam International tu par un robot industriel., Une procdure de cadenassage inapplique

    17 juin 2003, Accident mortel d'un mcanicien-soudeur chez Domco Tarkett inc., la procdure de cadenassage tait incomplte, peu connue et peu applique.

    23 janvier 2003, Dcs d'un travailleur d'une ferme laitire du Centre-du-Qubec., L'accs une zone dangereuse et l'absence de mesures de cadenassage empchant la mise en marche accidentelle de la machine sont l'origine de cet accident.

    2 Sur le site de la CSST : www.csst.qc.ca.

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    3 dcembre 2002, Accident mortel chez Pro-Systmes APX inc. de Granby., Afin de

    prvenir d'autres accidentsl'employeur devait aussi produire une procdure crite de cadenassage pour l'entretien et la rparation de la machinerie et assurer la formation des travailleurs concerns.

    17 octobre 2002, Un travailleur stagiaire meurt lectrocut chez Circuits imprims de la Capitale., qu'il n'existait pas de systme de cadenassage pour scuriser les lieux lors de travaux.

    19 juin 2002, Accident mortel d'un travailleur de l'entreprise Produits Alba de Dolbeau-Mistassini., met notamment en cause une dficience au niveau de la conception et de la procdure de cadenassage de l'quipement concern.

    18 juin 2002, Accident mortel chez les Produits forestiers Domtar Ste-Marie., Les mesures de surveillance relatives aux procdures de cadenassage sont dficientes.

    30 mai 2002, Accident mortel d'un travailleur l'usine Les Granules Cubex., Afin de prvenir un autre accident et avant d'autoriser la poursuite des travaux, la CSST a exig de l'employeur les mesures correctives suivantes : mise en place d'une procdure de cadenassage.

    Outre le manque de connaissance pour lapplication du cadenassage ou le manque de volont de la part de lentreprise, dautres raisons coexistent pour expliquer les nombreux accidents relis au cadenassage. Cest par exemple le cas de lautomatisation. Auparavant, les machines et les systmes de commande taient simples : lorsque la machine tait en marche, certains lments mobiles taient en mouvement et lorsque la machine tait larrt, tous ses lments mobiles taient au repos. Lautomatisation des machines fait disparatre cette nette distinction entre machine en marche (et donc en mouvement) et machine larrt (et donc au repos). De plus, lutilisation de plusieurs machines en srie formant une chane de production automatise a aussi contribu rendre plus floue la notion de machine en marche et de machine larrt . Il est donc facile de penser que la machine est larrt alors quelle se trouve seulement en attente et que laction dun capteur, dun senseur, dun interrupteur de position ou dun contacteur (cellule photolectrique, balance) va dclencher une squence qui peut tre non prvisible pour la personne qui intervient sur la machine (procdure automatique de remise zro de la machine, autocalibration, mise en position dattente, recul). De plus, cette action ne va peut-tre pas se faire dans la zone de travail du travailleur et ce dernier ne sera possiblement mme pas conscient du changement dtat de la machine. ce sujet, en 2004, la CSST [CSST 2004] a mis un communiqu de presse dans lequel elle indique que laccs des zones dangereuses de machines (prsentant par exemple des zones de coincement), lesquelles taient commandes par des automates programmables a t la cause de nombreux accidents mortels au cours des six dernires annes. Enfin, le cadenassage ne semble pas tre la mthode la plus efficace pour rduire les risques. En effet, si lon utilise le graphe de gestion du risque (Figure 7) qui est illustr dans le guide sur la scurit des machines [Paques 2002], le cadenassage est la combinaison de plusieurs moyens de rduction du risque qui sont situs aprs la prvention intrinsque, aprs la rduction du risque et aprs lutilisation de protecteurs :

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    - IRSST

    mthode de travail (procdures, dsignation dun responsable); formation et information (formation des intervenants, information des autres personnes

    qui seront autour de la machine); outils de protection collectifs (cadenas de groupe, moyens disolement, de

    sectionnement); outils de protection individuelle (cadenas personnel).

    De fait, il est difficile de conclure que le cadenassage est la mthode la plus scuritaire ou la plus efficace pour mettre en scurit le personnel lors dintervention dans les zones dangereuses dune machine, bien quelle soit souvent mise de lavant. Dun point de vue thorique, elle semble tre la plus efficace, mais dun point de vue pratique ou rel, elle semble peu utilise et semble tre sensible aux erreurs humaines ou techniques.

    Figure 7 : Dmarche de gestion du risque.

  • IRSST - La maintenance tat de la connaissance et tude exploratoire

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    5.1.4 Les alternatives possibles au cadenassage

    Quelques voies commencent se faire entendre pour offrir des alternatives au cadenassage, compte tenu des rsultats mitigs de son application. Par exemple, la norme CSA Z460-05 [CSA Z 460-05] intitule Control of hazardous energy Lockout and other methods consacre une partie aux mthodes alternatives de contrle de lnergie. Ces mthodes peuvent tre utilises lorsque les tches runissent la plupart des critres suivants :

    Sont de courte dure; Sont mineures ; Sont frquentes durant le quart de travail ou la journe de travail; Sont gnralement ralises par des oprateurs ou des quivalents-oprateurs; Reprsentent des activits cycliques prdtermines; Interrompent peu les oprations de production; Sont prsentes mme si la machine fonctionne bien; Requirent du personnel spcifiquement form.

    Une liste de tches possibles (liste non exhaustive) est mme cite. Elle comprend la lubrification, les changements doutils, les nettoyages mineurs, le dblocage, le diagnostic de panne, les ajustements, linspection et les mises en production. Les mthodes alternatives proposes qui doivent tre accompagnes dune stratgie de communication et de formation, sont :

    Llimination du danger la source lors de la conception; Lutilisation de protecteurs ou dispositifs de protection tels quun systme individuel de

    contrle, la fiabilit des systmes de commande, un scanner de surface, un protecteur, une commande maintenue, un faisceau ou une barrire optique, un tapis sensible, un interrupteur ouverture force, un dispositif darrt durgence ou un systme transfert de cls;

    Lutilisation davertissements tels quun surveillant, un systme davertissement automatique, une barrire, des affiches ou signalisation;

    Lutilisation de procdures ou de bonnes pratiques de travail telles que tenue de travail adquate, clairage adquat, prparation du travail, formation et quipement de protection individuel.

    Mais la hirarchie entre le cadenassage et les mthodes alternatives nest pas claire et les critres qui permettent de choisir entre le cadenassage et les mthodes alternatives sont un peu nbuleux. Nanmoins, cest un premier pas en avant pour offrir officiellement des alternatives au cadenassage. 5.2 La conception des machines et la maintenabilit

    La maintenabilit est laptitude la maintenance. La maintenabilit peut donc tre dfinie comme tant :

    La maintenabilit est la mesure de laptitude dun dispositif tre maintenu ou remis dans des conditions spcifies lorsque la maintenance de celui-ci est ralise par des

  • 30 La maintenance tat de la connaissance et tude exploratoire

    - IRSST

    intervenants ayant les niveaux spcifis de comptence, utilisant les procdures et les ressources prescrites, tous les niveaux prescrits de maintenance et de rparation (MIL-STD-721C, cit dans [ISDF 1999]);

    Dans des conditions donnes dutilisation, aptitude dun bien tre maintenu ou rtabli dans un tat o il peut accomplir une fonction requise, lorsque la maintenance est accomplie dans des conditions donnes, en utilisant des procdures et des moyens prescrits [EN 13306].

    La maintenabilit dune machine ou dun bien peut se dcomposer en deux parties, la maintenabilit intrinsque et la maintenabilit extrinsque. La mainte