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La LDH sur le web 2.0Groupe Facebook : « Ligue des droits de l’Homme »Ce groupe poursuit un objectif d’information sur les enjeux des nouvelles technologies en matière

de vie privée. Il tient également informé ses membres des activités de la LDH.

Suivre la LDH sur Twitter : #liguedroitshommSuivez l’actualité de la LDH sur votre mobile et diffusez la.

Information en temps réel des nouveaux articles miss en lignes sur le site LDHhttp://www.liguedh.be/index.php?format=feed&type=rss

Comité de rédactionEmmanuelle Delplace,David Morelli,Dominique Rozenberg

Ont participé à ce numéroPascale Broché, DominiqueLanghendries, Charlotte Manguette,Véronique Tellier, Joëlle, VanLaethem, Florence Vanwaerts,

Dessin de couverture

La Ligue des droits de l’Homme estmembre de la Fédérationinternationale des Ligues desdroits de l’Homme (FIDH),organisation nongouvernementale ayant statutconsultatif auprès des Nations

Unies de l’Unesco, du Conseil del’Europe et d’observateur auprèsde la Commission africaine desdroits de l’Homme et des Peuples.

Remerciements :La Ligue travaille grâce à l’aidedu Réseau FinancementAlternatif,de Credal et de la Provincedu Brabant wallon.

Afin d’étayer sa réflexion,La Ligue des droits del’Homme utiliseconstamment les CodesLarcier.

www.stripmax.comMax Tilgenkamp

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« documentation »du site www.liguedh.beLes titres de cette page sont actifs : cliquez sur le titre de votre choix pour lire le contenu complet

Communiques de pressePRISM : un Echelon plus loin (5/07) - Annexes psychiatriques: dix ans d'extrême urgence(5/07) - Mendicité: pour un projet de ville avec tou-te-s les citoyen-ne-s (24/06) - Prison deForest : Quand le Parquet ne respecte ni les décisions de justice, ni les arrêtés de police(20/06) - La prison et la police communale de Forest pris en otage par la Ministre de la Justice(20/06) - Les acteurs de défense des droits de l’enfant défavorables à l’adoption de laproposition de loi du 10 février 2012 relative à l’exploitation de la mendicité (06/06) - Lapénalisation de la mendicité : le Comité des droits de l’enfant des Nations Unies remet lespendules à l’heure (19/06) - A l'aide ! juridique - Lettre ouverte à Elio Di Rupo (04/06)

Sons et imagesUne recrudescence des violences policières (podcast La Première) - Directive data Retention :position et enjeux (documents et reportage) - La place des droits de l'Homme dans la politiqueétrangère de la Belgique (analyses) - Réforme de l’aide juridique : un débat possible sur lesmodalités d’application ? (Position, Reportage et reportage photo)

Documents thématiquesLa place des droits de l’Homme dans la politique étrangère de la Belgique

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EDITOIstanbul – 38ème Congrès de la FIDH :178 ligues dans le monde, plus fortes ensembleAl Haq Palestine, Altsean Burma, Bahrein Center for Human Rights, Groupe Lotus RDC, Corporacion Colectivode Abogados Colombia, Human Rights Center Viasna Belarus, Liga voor Mensenrechten, Zimbabwe HumanRights Association... et plus d'une centaine d'autres organisations non gouvernementales membres de laFédération Internationale des Ligues des Droits de l'Homme se sont retrouvées à Istanbul le 23 mai dernier,durant cinq jours, pour leur grand rassemblement qui n'a lieu qu'une fois tous les trois ans. J'ai eu la chance d’yreprésenter notre Ligue.

L'affiche de l'évènement se limite à quatre mots sortant d'un porte-voix, ou plutôt d'un gueulophone tellementon a envie de les crier: « LIBERTÉS, JUSTICE, DIGNITÉ, ÉGALITÉ ». De manière presque prémonitoire, ces quatremots ont pris, depuis quelques semaines, une dimension toute particulière là-bas, sur la place Taksim et dans leparc Gezi, malgré les tentatives de la police d'Erdogan de les étouffer.

Pendant deux jours, tous les militants de ces organisations venus du monde entier ont échangé sur le thème« Transitions politiques et droits humains : expériences et défis ». Tout un programme.

La présidente sortante de la FIDH Souhayr Belhassen annonce le ton du Congrès : « Le droit des femmes et ledroit des migrants dans le monde demeurent essentiels dans notre combat pour l'universalité des droitfondamentaux. » Chez nous, c'est pareil. Elle poursuit : « Le combat de la justice est au cœur des priorités de laFIDH. » Chez nous, c'est pareil. Elle insiste : « En tous lieux, nous battre pour tous les droits. Leur universalité etleur indivisibilité l'exigent. » Chez nous, c'est pareil.

Le Président de la République de Turquie nous fait l’honneur de venir écouter le discours de clôture de laPrésidente sortante de la FIDH. Après les fleurs d'usage, elle lui envoie le pot de fleur à la figure : elle l'exhorteà faire respecter les droits des minorités dans son pays et exige la libération des militants des droits humainsemprisonnés, ainsi que des journalistes et des avocats arrêtés alors qu'ils n’ont fait qu'exercer leur métier... Ilne bronche pas, mais ses oreilles doivent chauffer. Rien que cela valait la tenue du Congrès en Turquie.

Lors de la réunion régionale Europe-occidentale, les priorités se dégagent de manière évidente: l'égalité descitoyens et les droits économiques, sociaux et culturels (DESC). Dans cette Europe en crise profonde, de laGrèce à l'Irlande, ces droits doivent être au cœur de notre action. Comme par hasard, nos gouvernants mettentl'accent sur le sécuritaire. A nous de remettre la sécurité d'existence, les DESC, en haut de l'agenda. Pour notreLigue, j'y ai partagé notre expérience belge avec la réclamations collectives introduites auprès du Comitéeuropéen des droits sociaux concernant les handicapés de grandes dépendance qui manquent de solutionsd'accueil adaptées et la condamnation de la Belgique pour violation de la Charte sociale européenne audétriment des gens du voyage (en 2011).

Notre ancien président Dan Van Raemdonck a été élu à un des cinq postes de secrétaire-général de la FIDH,après avoir été un des quinze vice-présidents apprécié depuis six ans. Pour l'élection à la présidence, la Liguebelge avait décidé de soutenir le candidat colombien Luis Guillermo Perez Casas qui se présentait face aucandidat iranien Karim Lahidji. Celui-ci, après un score de parfaite égalité, l'a emporté en application des statutsqui privilégient le plus âgé. Ce fut un difficile mais bel exercice de démocratie dans une organisation qui doit àcet égard montrer l'exemple. Au nom de la LDH, j'ai chaleureusement félicité le nouveau président de la FIDH.Je l’ai assuré de notre soutien et de notre entière collaboration.

La force de la FIDH, ce sont toutes les ligues qui s'y regroupent pour être plus fortes ensemble. J'ai vraiment étéimpressionné par tous ces militants des droits humains venus du monde entier et qui se battent, souvent aupéril de leur sécurité, de leur liberté ou même de leur vie, pour un monde plus juste. Ales Biliatiski (Biélorussie),Nabeel Rajab (Bahrein) ou encore Muharrem Erbey (Turquie) derrière les barreaux de leur prison, en sont lesmeilleurs exemples. C'est à eux que je pense en rentrant, motivé comme jamais.

Alexis Deswaef, Président de la LDH

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La Ligue des droits de l'Homme est une association indépendante. Elle ne peut survivresans l'apport financier des citoyens qui souhaitent qu'elle continue son combat auquotidien pour la défense des droits fondamentaux en Belgique. Vous pouvez noussoutenir concrètement.

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La Ligue des droits de l’Homme adhère au Code éthique de l’AERF. Vousavez un droit à l’information. Ceci implique que les donateurs,collaborateurs et employés sont informés au moins annuellement del’utilisation des fonds récoltés.

Le rapport d’activité et le bilan financier de la LDH pour l’année 2012sont consultables sur www.liguedh.be

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La ChroniqueDossier Vieillissement

Les enjeux duvieillissement

Par Christine Steinbach

ssurer une pension suffisante pour vivre décemment est un défi pour les générationsfutures de notre Europe vieillissante. C’est dans ce contexte que prend place laréflexion autour de l’allongement des carrières et du financement des retraites. Mais

les pistes suivies par l’Union européenne et par la Belgique soulèvent des questions.

C’est un fait, l’Europe vieillit. Les populations despays membres ont moins d’enfants et viventplus longtemps. Signe des temps : pour lapremière fois en 2010, l’Union européenne aenregistré plus de décès que de naissances. Tauxde fécondité et espérance de vie sont deux

facteurs déterminants en matière dedémographie. Pour stabiliser une population, onestime qu’il faut que chaque femme mette enmoyenne 2,1 enfants au monde. Au sein de l’UE,ce taux est inférieur : 1,9 en 2009 ; 1,7 en 2010

1. En revanche, l’espérance de vie progresse.Dans l’Europe des 15, elle s’élève à 82,5 anspour les femmes et 76,7 pour les hommes. Dansles nouveaux Etats membres, elle estrespectivement de 78,7 et 70,5 ans.Globalement, d’après les prévisions d’Eurostat,elle devrait encore augmenter de 5 années d’icià 2050.

Un problème européenSi l’existence est plus longue, nous le devonsd’abord à la baisse du taux de mortalité à lanaissance et dans la petite enfance, et, depuisquelques décennies, à une meilleure qualité devie. On peut donc s’en réjouir à condition derelever les défis qu’implique cette évolution. Lepremier est certainement de pouvoir assureraux personnes âgées (que nous serons tous unjour) une qualité de vie réelle sur tous les plans.Et notamment, au moment de la retraite, unepension suffisante.

Le financement des pensions dans les années àvenir est un problème qui traverse tous lespays européens. En effet, qui dit populationvieillissante dit aussi moins de travailleurs pourcontribuer à produire la richesse et donc moinsde moyens pour les dépenses publiques.Toutes choses restant égales, d’ici 2050, lapopulation en âge de travailler devraitdiminuer de 27% (soit - 93 millions d’unités)2,tandis que le nombre de personnes âgées deplus de 65 ans augmenterait de 70 % et celuides plus de 80 ans de 170 %. On passerait ainsi

de 4 actifs à seulement 2 actifs pour unpensionné.

Augmenter le taux d’activitéC’est peu dire que le renforcement du tauxd’activité constitue une priorité pour l’Unioneuropéenne, qui envisage trois issues auproblème. La première est d’inciter lesfemmes à participer davantage au marché dutravail. La deuxième est l’immigration“choisie” (en fonction des besoins des secteursd’activités). La troisième piste consiste àallonger les carrières, en parti- culier pour latranche d’âge des 55-65 ans.

En mars 2000, le sommet de Lisbonne fixaitcomme objectif d’atteindre un taux d’emploiglobal de 70% et de 60% pour les femmes. Enmars 2001, le Sommet de Stockholm ajoutaitl’objectif d’un taux d’emploi de 50% pour les55-64 ans. Un an plus tard encore, le sommetde Barcelone prévoyait de reculer de cinq ansl’âge moyen des départs à la retraite.

Pour parvenir à de tels objectifs, l’Unioneuropéenne table - ou plutôt tablait - sur unecroissance économique autour de 3%, supposéefavoriser la création d’emplois. C’était avant2008 et la crise. Aujourd’hui, la croissanceapparaît chose fragile et la crise financière,économique et sociale vient aggraver le défi duvieillissement. Il faut désormais réfléchir àl’avenir des pensions dans une logiqued’assainissement budgétaire et d’austérité.

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La ChroniqueDossier Vieillissement

La Belgique décourage lesprépensionsLa Belgique se trouve confrontée aux mêmesdéfis que l’ensemble de l’Union européenne. Etcomme les autres, elle envisage leprolongement de la durée de travail etquestionne son système de financement despensions. En ce qui concerne l’allongement dela carrière, il n’y a pas de volonté politiquelarge pour dépasser le seuil des 65 ans.L’attention se focalise plutôt sur la tranched’âge des 55-64 ans, dans la foulée del’objectif de Stockholm : « Un de nos grandscombats doit être d’essayer de gagner troisans de maintien au travaildes 55 ans et plus. Tout ceque nous avons discutétourne finalement autour decela ». Ainsi d’exprimaitMichel Daerden, ministredes pensions, lors de lasortie de son Livre vert auprintemps 2010.

Le Pacte des générations de2005 avait déjà concrétisécette volonté en portant uncoup sévère aux possibilitésd’accès à la prépension et enencourageant la poursuite dela carrière après 60 ans.

Dans le même temps, il limitedavantage le travail autorisépour les plus de 65 ans. LaBelgique est d’autant plusincitée à prendre desmesures vis-à-vis des 55-64 ans, qu’elle estmontrée du doigt parce que, pour cettetranche d’âge, le taux d’occupation s’avéraitfaible par rapport à la moyenne européenne.

En 2007, le taux d’emploi pour les 55-64 ansétait de 34,4% en Belgique, alors que lamoyenne était de 44,7% pour l’Europe des 27.

Augmenter le taux d’activité et retarder ledépart à la retraite doit permettre demaintenir un équilibre entre les actifs et nonactifs. Donc entre ceux qui contribuent à laSécu et ceux qui en bénéficient. Mais cela nesuffira pas. Du fait du vieillissement, le coûtdes retraites passerait de 35 à 45 milliards €par an en deux. Comment va-t-on payer les

pensions de demain ? Cette question taraudeles esprits depuis quelques décennies3, et passeulement en Belgique. L’Union européenneencourage les Etats membres à favoriser lessystèmes de pension par capitalisation (2e et3epiliers – voir encadré), en offrant desavantages fiscaux. Notre pays s’est engagédans cette voie.

Une Conférence nationale des pensions a étéinstaurée fin 2008 et a travaillé durant un ansur trois gros chantiers : le premier concernela modernisation de la pension légale. L’idéeétait notamment de comparer les systèmesde différents pays européens. Deuxième

chantier, les pensionscomplémentaires des 2e et3e piliers. Le troisièmechantier dépasse la strictequestion des pensionspour s’intéresser à la placedes personnes âgées dansla société. Il faudracependant attendre pourles conclusions de cetteConférence, les travauxayant été interrompuspour cause de crisepolitique.

Un revenu souventtrop faibleSi la question des pensionsse pose pour l’avenir(assurer le maintien dusystème pour tous), elle sepose aussi à l’heure

actuelle car un grand nombre de pensionnésne bénéficient pas d’un revenu suffisant pourvivre sans angoisse. En théorie, le montant dela pension se situe à 75% du salaire net (60%du brut) ; en pratique, c’est beaucoup pluscomplexe car divers éléments entrent dans lecalcul, dont la rémunération et lesinterruptions de carrière. Pour atteindre lapension maximale, il faut avoir travaillé 45 anset perçu une rémunération brute de 45.000€brut par an (plafond pris en compte). Enréalité, un pensionné sur quatre gagne moinsde 1.000€ par mois. Quant à la GRAPA, lagarantie d’un revenu minimum pour lespersonnes âgées, elle correspond en 2010 à

Pensions :quelques chiffres :• La Belgique compte1.856.217 pensionnés• Le montant moyen de lapension légale équivaut à1.155 €.• Un pensionné sur 4 vit avecmoins de 1.000 €• 35% des plus de 55 ans sontactifs.• 31% des retraités touchentune pension complémentaire(chiffre 2004). Parmi eux,42% d’hommes et seulement15% de femmes.

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900 € par mois pour un isolé et 600 € pour uncohabitant.

La GRAPA bénéficie à pas moins de 86.199personnes actuellement et ce chiffre nereflète pas le nombre total de ceux et cellesqui y auraient droit. En effet, beaucoupignorent qu’ils peuvent la demander.

Travailler plus longtemps, dansquelles conditions?Augmenter le taux d’activités, favoriser lessystèmes de pension par capitalisation, tellessont les recettes privilégiées par l’Unioneuropéenne pour garantirl’avenir des pensions. Cesrecettes posent questionparce qu’elles entrent entension avec d’autresenjeux. Prenonsl’allongement des carrières.Pour le mouvement ouvrier,la longue conquête d’uneréduction progressive dutemps de travail constitueune série de victoires surl’exploitation destravailleurs, visantnotamment à accéder à unemeilleure qualité de vie. Lesdéparts à la prépension enBelgique reflètentl’aspiration d’un grandnombre de personnes.

Paul Palsterman, du serviced’étude de la CSC, rappelleaussi que prépension etconditions de travail sontliées: “Les travailleursécartés prématurément dutravail semblent se situermajoritairement parmi lescatégories les moinsqualifiées”4 et occupent desemplois souvent pénibles etpeu épanouissants. Or lesconditions de travail sedétériorent. Il faut alors sedemander à quelles conditions les 55-64 ans(et au-delà si l’on se réfère à d’autres payseuropéens) seront incités à poursuivre oureprendre un emploi ?

Parallèlement, quels moyens serontdéveloppés pour lutter contre une cultured’entreprise largement répandue qui tend àécarter les travailleurs âgés en leur attribuantune moindre valeur ? (4)

Vers la concurrence à l’emploientre jeunes et âgés?Allonger les carrières pose aussi la question dupartage de l’emploi avec les jeunes. PourMatéo Alaluf (ULB), retarder l’âge réel dudépart à la retraite va de pair avec uneaugmentation du chômage des jeunes. Et il

rappelle que “l’accès àl’activité professionnelledes jeunes Belges est l’unedes plus tardivesd’Europe”5. En se focalisantsur le taux d’activités,l’Union européenne aconcentré sa stratégie surle nombre de personnes àmettre au travail et nonpas sur le nombre Depostes disponibles. Commele note l’économiste HenriHouben: “Cela fait partiede l’inviolable droit desentreprises de définir leursbesoins en emploi commeelles l’entendent”.Pourtant, sans réelle prisesur ce volet de la question,les Etats européens sontcontraints de s’en remettreà l’illusion dogmatiquesuivante : la croissancecontinuera et sera créatriced’emplois en suffisance.Crise mondiale ou pas.

Démocratiser lespensionscomplémentaires ?Nous l’avons vu, l’Etatsoutient et encourage le

développement des systèmes de pensionscomplémentaires en accordant diversavantages fiscaux. Mais ces avantages ontpour effet pervers d’appauvrir le financement

Les 3 piliersde pension

Les cotisations sociales prélevéessur le travail contribuent aupaiement des pensions. Lestravailleurs d’aujourd’hui paientles pensions d’aujourd’hui. C’estle système dit de répartition.Il assure le premier pilier depensions (ou pension légale). Acôté, deux autres systèmes oupiliers sont financés parcapitalisation, c’est-à-dire enépargnant des sommes pours’assurer un complément depension le jour venu. Le 2e pilierest l’assurance-groupe ou pensioncomplémentaire, dont peutbénéficier un travailleur, si sonentreprise cotise pour lui. Dans cecas, on prélève un pourcentagede la rémunération brute pour lamettre en épargne.Le 3e pilier est celui de la pensionextralégale, que chacun peut seconstituer à titre personnelauprès d’une banque ou unecompagnie d’assurances, àcondition d’en avoir les moyens.

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de la pension légale. Ainsi, pour le 2 pilier, desréductions sont accordées sur les cotisationssociales qui contribuent au 1er pilier (voir plushaut). L’épargne-pension (3e pilier) bénéficieaussi d’avantages fiscaux qui ont un coût pourla collectivité.

Il faut aussi constater que le système pèchepar une contradiction notable : lesbénéficiaires d’une pension complémentairene sont pas ceux qui en auraient le plusbesoin. Au contraire, ce sont les bénéficiairesdes pensions légales les plus élevées quitouchent les pensions complémentaires lesplus importantes.

Chez les 20% de bénéficiaires des pensions lesplus élevées, 72% ont Une pensioncomplémentaire. Chez les 20% desbénéficiaires des pensions les plus basses,seuls 2% ont une pension complémentaire.

Sans compter que, pour valoriser le “bas delaine” qui complétera la pension de base, ilfaut faire le jeu de la bourse et de laspéculation, ce qui induit – entre autres - laprise de risque et l’aléatoire. On peut donc

vraiment remettre en question l’idée deprivilégier le système par capitalisation. Enfin,le défi du vieillissement a un impact sur unautre volet de la protection sociale qui estcelui des soins de santé. Paul Palsterman meten garde : “S’il faut ponctionner dans lebudget des soins de santé pour maintenir unniveau de pension, les pensionnés seront lespremiers perdants”6. Vivre plus longtemps,avec un meilleur niveau de qualité, impliquede nouveaux soins, de nouvelles institutions,de nouvelles techniques. Ainsi, on ne peutdélier le débat sur l’avenir des pensions decelui sur le financement de la Sécu. .

Cet article a été précédemment publié dans leDossier « Pensions » de la Revue « Contrastes »(Janvier février 2011) édité par les Equipespopulaires.Dossier complet disponible gratuitement surhttp://www.equipespopulaires.be/spip.php?article1575

Vieillir au travailCe working paper analyse les données recueillies lors de la cinquième enquête européenne sur les conditionsde travail, qui datent de 2010. Il examine les changements des conditions de travail en fonction des différentescatégories d'âge et de profession. Il livre des informations sur la qualité de travail et d'emploi des travailleursâgés qui enrichissent la discussion sur la « soutenabilité » du travail selon l'âge et la profession.

Les auteurs concluent que la large gamme de situations et de défis rencontrés dans différentes professionsrequiert une prudence extrême vis-à-vis des politiques visant à étendre de manière uniforme la durée descarrières des travailleurs âgés. La diversité des situations doit être prise en considération lors de la définitiondes politiques européennes destinées à augmenter les taux d'emploi parmi les travailleurs vieillissants et àétendre l'âge effectif du départ à la retraite.

Par ailleurs, la responsabilité d'améliorer les conditions de travail et d'emploi des travailleurs en fin de carrièreincombe également aux employeurs et nécessite la mise en œuvre de pratiques innovantes en matière deressources humaines.

« Métiers et vieillissement au travail. Une analyse des résultats de la cinquième enquête européenne sur lesconditions de travail » de Patricia Vendramin et Gérard Valenduc (Fondation Travail-Université, Namur,Belgique)

Document téléchargeable gratuitement sur le site www.etui.org

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« Vers un assouplissementdes fins de carrière »

Par Florence Vanwaerts, stagiaire COM

a prolongation de l’espérance de vie et la diminution du nombre de naissance fait duvieillissement un enjeu de société majeur. Alors que ce contexte devrait induire uneréduction du nombre d’actifs sur le marché du travail, l’allongement des carrières

vient changer la donne mais sans que la prise en charge des seniors n’ait été intégrée danscette délicate équation. Nathalie Burnay a présenté, dans le cadre du cycle d’activités « Etvoilà le travail !» de la LDH, son analyse du vieillissement dans le cadre du travail. En voicila synthèse.

Historiquement, les grands conflits sociaux onttrouvé réponse à leur crise en optant pour uneculture de la retraite anticipée. Or, force estde constater que les politiques publiques sedétournent de ce système et préconisentdavantage un prolongement du temps detravail et par conséquent un allongement descotisations. Le retrait des seniors du marchédu travail pose question. Quelle place lesseniors occupent-ils dans l’entreprise? Lagestion des âges est-elle prise enconsidération par les entrepreneurs ?

Nathalie Burnay, docteur en sociologie,professeure au FUNDP et à l’UCL a, encollaboration avec l’Agence régionaled’Analyse des conditions de travail, réalisé uneenquête afin d’analyser les entreprises quiavaient établi des plans spécifiques pour lesseniors.

Une prise en charge illusoireNotre enquête belge aboutit à deuxconclusions fondamentales » expliqueNathalie Burnay. La première, c’est qu’il y aassez peu de prise en considération de laproblématique du vieillissement par lesentreprises. On est plutôt dans un système debricolage. Ce bricolage se fait à partir d’unedouble logique : soit, ils s’insèrent dans des

dispositifs prédéfinis du pouvoir public, c'est-à-dire que l’on profite des dispositifs légauxexistants, pour se préoccuper des seniors. Oualors, ces bricolages relèvent d’une pratiqueorganisationnelle, visant à répondre à unproblème ponctuel dans une entreprise. Leproblème surgit d’un coup dans l’entreprise etsubitement on se met à s’intéresser auxseniors parce qu’il faut résoudre ce problèmeparticulier. Le cas le plus fréquent, c’est ledépart des compétences, le patron se rendcompte que Mr Dupont, qui est le seul à savoirfaire fonctionner la machine, s’en va dans unan. Que va-t-on faire sans monsieur Dupont ?On est sur un constat plutôt défaitiste enBelgique, il y a assez peu de choses qui se fonten la matière.

Pouvoirs publics, patrons,travailleurs : des positionscontradictoiresIl apparaît que de nombreux travailleurssouhaitent partir plus tôt. Or, le contexteactuel en matière de fin de carrière conforteles pouvoirs publics à promouvoirl’allongement du temps de travail et lesentreprises ne semblent pas faire del’encadrement des seniors une priorité. Avecces divergences d’intérêts, il est doncparticulièrement difficile de trouver les

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compromis nécessaires pour satisfaire lesexigences des différents intervenants.Néanmoins, des pistes sont possibles.Mon hypothèse est qu’il faut aller vers unassouplissement des fins de carrière. Larecherche menée par Nathalie Burnay,financée par le Service externe de préventionet de protection au travail, s’appuie sur unequestion centrale: dans quelle mesure unaménagement du temps de travail en fin decarrière peut-il contribuer au maintient destravailleurs âgés sur le marché de l’emploi ?Il faut noter que la question de l’emploi sepose différemment dans les secteursphysiquement lourd (NDLR : chez les ouvrierspar exemple) et dans les secteurs où la chargepsycho-sociale est importante notamment entermes d’investissement symbolique ».

Une question générationnelleL’enquête a donc été menée autour de cesgroupes de travailleurs avec pour variable « letravail à temps plein ». Des entretiens semi-directifs ont été réalisés autour de la question« comptez-vous réduire votre activitéprofessionnelle avant la fin de votrecarrière ?» Les profils de ces travailleurs ontensuite été analysés. Constat : les réponsesvarient selon l’âge et le genre.

Les femmes veulent réduire leur activité plusque les hommes explique Nathalie Burnay. Lesmoins de 45 ans veulent réduire leur activitéplus que les plus de 45 ans. Je pense qu’il nes’agit pas d’une conséquence liée à l’âge maisque l’on est face à une transformationgénérationnelle. C'est-à-dire que les moins de50 ans, quand ils auront 50 ans, ne changerontpas nécessairement d’avis.

Profils de l’emploiLa volonté de réduire son activitéprofessionnelle résulte de multiple raisons quisont soit liées à des questions de santé, soit au

fait que les travailleurs aspirent à unchangement en vue de leur épanouissementpersonnel. Le souhait de rester à temps pleindécoule par contre plutôt d’une nécessitééconomique, d’ordre organisationnel maisaussi, parfois, parce que les genss’épanouissent au travail. Ce qui restesignificatif par rapport au temps plein et quiinflue donc sur le choix de continuer à exercerun temps plein ou non, sont les éléments telsque l’âge, le sexe ou encore le statut, la santé,la famille. Ces éléments s’articulent autour dela notion de temps disponible et del’investissement symbolique au travail (larecherche d’une certaine reconnaissance autravers son emploi).

Le crédit-temps (l’aménagement du temps detravail) constitue quant à lui, un facteurprégnant dans le choix de réduction du tempsde travail qui permet aux travailleurs d’élargirleurs activités extra-professionnelles. Afind’approfondir la compréhension de laproblématique du crédit temps, la recherches’est également tournée vers les travailleursqui avaient déjà réduit leur activitéprofessionnelle. Cinq profils différents ont étédécelés : le fatigué, le saturé, le dévoué,l’hédoniste et l’altruiste. Isabelle Burnay lesdécrit comme suit :

Le premier cas, celui du fatigué, c’est latravailleur qui n’a pas le choix, il est fatiguéparce qu’il a donné de son physique. Pour lui,les problèmes de santé s’accumulent et lescontraintes organisationnelles commencent àpeser sur le corps. On retrouve ici les gens quipartaient anticipativement du marché dutravail. Le profil est ici peu qualifié, plutôtmasculin et l’effort physique est sollicitée. Lecrédit temps, c’est du temps pour reposer lecorps, c’est-à-dire qu’il doit avoir ce temps derécupération pour continuer son activitéprofessionnelle.

Le saturé, c’est celui qui ne se reconnait plusdans les tâches qu’il effectue au quotidien,souvent pour cause de pratiques managérialesqui ont probablement changé. Le travailleurn’arrive plus à donner un sens à son travail. Le

rôle du crédit temps est de concilier lesimpératifs économiques avec une activitéprofessionnelle dans laquelle le travailleur nese reconnait plus.

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Le dévoué, il ne choisit pas son crédit tempspour lui-même, mais sous la contrainteextérieure. Il se consacre entièrement àl’autre : c’est la maladie du conjoint, la priseen charge du parent On est sur un profildavantage féminin où on arrive à concilier uninvestissement professionnel auquel on croittoujours avec des impératifs familiaux forts etdurs.

L’hédoniste, c’est celui qui profite del’existence. Le temps libéré est avant tout dutemps pour soi, pour des activités de loisir oudes formes de sociabilité. Il veut profiter del’existence et se réapproprier le temps. C’est lafigure du temps choisi. On va se trouver dansun profil socio culturel assez élevé. Ce sont desgens qui n’ont pas besoin de leur temps plein,qui peuvent sacrifier un peu d’argent au profitde l’investissement privé

La cinquième figure, c’est celui de l’altruiste : ilva prendre ce crédit temps par choix, maispour les autres. C’est un profil aussi plutôtféminin, de la grand-mère (soulager la fille oula belle fille parce qu’elle travaille à tempsplein). La famille devient lieu d’expression

symbolique. Ce n’est pas de la contraintefamiliale, c’est du choix familial. »Les impératifs d’aménagement du temps detravail varient selon les profils et la situationdes différents travailleurs.

La perspective d’une politiqued’aménagement de fin de carrière de qualitépermet de palier aux contraintes personnellesliées à la santé physique et mentale. Cettepolitique contribue donc à l’épanouissementdu travailleur. Cependant, le vieillissementdemeure une réalité encore trop souvent niéepar les entreprises qui continuent à privilégierl’emploi aux jeunes. Considérés comme pluspolyvalents et plus aptes à s’adapter àl’évolution technologique à laquelle seheurtent les entreprises, ils sont donc préférésà leurs ainés.Au vu du vieillissement accru des travailleursbelges, il serait sans doute pertinent pour lesentreprises de réorienter leurs structures detravail afin de mieux s’adapter aux seniors. .

Vieillir au travailPour aller plus loin sur ce thème :

Dossier « Vieillir au travail » sous la direction de Nathalie Burnay, éd. Lespolitiques sociales.

L’article introductif « Les paradoxes de l’âge au travail » de NathalieBurnay, est disponible gratuitement sur le sitehttp://www.lespolitiquessociales.org/3&4-2008.htm

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Vieillir en bonne santéPar Véronique Tellier,

Coordinatrice de l’Observatoire wallon de la Santé

“Je souhaite que la santé soit enfin considérée non plus comme une bénédiction que l’onespère mais comme un droit de l’homme pour lequel on se bat.”Secrétaire général de l’Organisation des Nations Unies, Kofi Annan

Le nombre de personnes âgées augmentedans notre société en bonne partie pourdeux raisons : d’une part l’espérance devie augmente, d’autre part les enfants du« Baby Boom » arrivent à l’âge de laretraite. Mais cette augmentation del’espérance de vie est assez lente etpourrait se stabiliser plus vite chez lesfemmes avec l’augmentation de leurconsommation de tabac par exemple ou lamasculinisation du quotidien féminin(notamment pour les questions relatives àla santé et la sécurité au travail parexemple). Actuellement en Wallonie, lesfemmes ont une espérance de vie de 2 à10 ans plus élevée que les hommes. Lavariation de cette différence est liée enbonne partie aux inégalités sociales desanté. Elle a toutefois globalementtendance à s’amenuiser ce qui pourraitpeut-être avoir des conséquencespositives sur l’isolement des personnesâgées. Par contre, on observe égalementune augmentation du nombre d’annéesvécues en mauvaise santé et là aussi lesdifférences sont liées aux conditions socio-économiques dans lesquelles vivent et ontvécu les personnes.

Vieillissement : des enjeux desanté

Les difficultés au quotidienLes problèmes de santé des personnesplus âgées ne sont pas seulement desproblèmes médicaux mais des difficultés

de la vie quotidienne : difficultés de sedéplacer, d’entretenir son logement, de senourrir adéquatement

La consommation médicamenteuseLa présence de maladies chroniquesentraine une consommation énorme demédicaments. À côté des coûts que celareprésente pour la société mais encorebien plus sans doute pour les personneselles-mêmes surtout lorsque leurs revenussont bas, il est légitime de se poser laquestion de la place des mesuresalternatives : mesures préventives (parexemple, prévention des faussesdéglutitions par de la logopédie) ou nonmédicamenteuses, limitation du nombrede médicaments différents dont on nemaitrise plus les interactions, nonprescriptions de médicamentsdéconseillés pour les personnes âgées,non prescription de médicamentsreconnus comme peu ou pas efficaces,etc.

Tableau 1 Proportion de la population wallonne de 65ans et plus touchés par différents aspects de santé

Source : ISP,enquête nationale de santé, 2008.

Santé subjective mauvaise 49,8%

Avoir une Maladie chronique ou + 61,2%

Consommer des médicaments prescrits 94,5%

Etre obèse 14,5%

Avoir des limitations fonctionnelles 54,7%

Être limité dans sa mobilité 14,4%

Avoir des difficultés pour mâcher des aliments durs 49,9%

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La santé mentaleSi la consommation de médicamentspsychotropes augmente de manièrecontinue avec l’âge, les données del’enquête nationale de santé en revanchene montrent pas d’augmentation aussifranche de l’anxiété ou du syndromedépressif en fonction de l’âge.

Par contre, la comparaison des donnéesde consommation de ce genre demédicaments par des personnes en bonnesanté physique, en voie de perted’autonomie ou institutionnalisées montreque cette consommation soit plus élevéeen cas de dépendance plus grandevii.

La perte des compétences cognitive estsource d’anxiété et dedépendance. Les chiffresdont nous disposons pourévaluer la proportion de lapopulation qui en estaffectée sont très difficilesà interpréter et souventpartiel : ces personnes pardéfinition ne répondentpas aux enquêtes, lediagnostic est parfois fait àl’arrivée dans un serviceou une institution chez unepersonne stressée par la situation, ce quil’empêche de faire appel à toutes sesressources . Il convient donc de se garderd’un diagnostic trop rapide et faire desévaluations périodiques de la situation enrecherchant les facteurs de stress quipourraient être réduits.

Les inégalités de santéLes inégalités de santé sont desaccélératrices du processus devieillissement. Le tableau 3 montre pourtrois aspects de santé l’impact desinégalités sociales de santé. En effet,parmi les personnes de 65 ans et plus quin’ont pas de diplôme ou ont des revenus

appartenant aux 20% les plus faibles, onvoit presqu’autant voire plus de santésubjective mauvaise, d’arthrose ou dediabète que chez les personnes de 85 anset plus tout niveau de diplôme confondus.Les personnes défavorisées souffrent doncen aussi grande proportion de problèmesde santé divers que des personnes trèsâgées globalement.

Il y a une énorme différence entre despersonnes du même âge aux deuxextrémités de l’échelle sociale mesuréepar les deux proxys du diplôme et desrevenus.Tableau 2 Proportion de personnes de 65 ans et plusrésidant en Wallonie, qui déclarent une mauvaise santésubjective, souffrir d’arthrose ou de diabète enfonction de leur statut socio-économique.

Source : ISP, Enquête nationale de santé, 2008

Les conséquences des problèmesde santé

Fragilité et perte d’autonomieL’accumulation des accidents de vie, del’avancée en âge, de la perte des proches,rendent chaque personne plus vulnérable.Son énergie disponible pour nouer desrelations sociales, se déplacer diminue.

Les repères quant aux soutiens potentielssont plus flous qu’auparavant en raison enautres des modifications du tissusfamilial : coexistence de plus degénérations, recompositions multiples et

% Personnesde 85 anset plus enmoyenneenWallonie

Personnesde 65 anset plussansdiplômeoudiplômedeprimairesenWallonie

Personnes de65 ans et plusavec undiplôme del’enseignementsupérieur enWallonie

Personnesde 65 anset plus deWallonieavec defaiblesrevenus(premierquintile)

Personnesde 65 anset plus deWallonieavec defaiblesrevenus(cinquièmequintile)

Santésubjective

52,2 52,2 32,3 50,2 30,6

Arthrose 46,4 45,6 37,0 47,3 27,5Diabète 12,5 15,5 4,7 11,8 3,2

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pertes de contacts parfois entre proches,jeunes parents de plus en plus âgés,devant s’occuper de petits enfants alorsque le temps serait venu de prendre soindes ascendants.

Risque de réduction de l’accès à des soinsde qualitéEn conséquence du point précédent,lorsque l’autonomie diminue, la capacitéde mobiliser des ressources nouvelles etplurielles se réduit également. Le rôle del’entourage et des professionnels prendtout son sens.

IsolementLe tableau 4 montre que 30% des femmesde 65 ans et + ayant beaucoup delimitations physiques se disentinsatisfaites de leurs contacts sociaux etque 17% des hommes dans le même casont moins d’un contact social par semaine.

Tableau 3 Contacts sociaux des personnes de 65 ans etplus en fonction de leurs limitations physiques.

Source : ISP, Enquête nationale de santé, 2008

Augmentation de la dépendance et« nécessité » de changer de lieu de vieLa question de la dépendance à domicileest difficile à appréhender. Afin deprogrammer les services de santé, ondevrait pouvoir connaitre le nombre depersonnes dépendantes à domicile qui nereçoivent pas l’aide dont ils auraientbesoin.

Agir en amont de la perted’autonomieIntégrer la promotion de la santé commepart intégrante des services de santé et la

considérer dans sa dimension la plus largec'est-à-dire dans sa capacité et sadétermination à agir sur les conditions devies des personnes, de manièrestructurelle et non simplement commeune action seulement destinée à adoptercertains comportements ou à prévenircertaines maladies.D‘aucuns se posent la question de lalégitimité à vouloir influencer tel ou teltype de comportement favorable à lasanté comme l’alimentation équilibrée,l’activité physique, l’absence deconsommation de tabac et le contrôle desa consommation d’alcool ou desubstances psychotropes, médicamentsou drogues (le terme est d’ailleurs lemême en anglais !) Tant que le gradientsocial persiste, il nous semble légitime depromouvoir les comportements favorablesà la santé à condition de prendre encompte les déterminants (souventsocioéconomique pour une bonne part) deces comportements et de chercher àrenforcer les capacités des personnes à

prendre desdécisions.

Faire entreren piste aubénéfice desaînés des

services de première ligne, réservésjusqu’ici aux personnes plus jeunes :services de santé mentale par exemple,santé sexuelle, etc.

Vieillir en bonne santéPrévention, Solidarité, réduction des inégalitésde santé, démédicalisation du vieillissement,implication de tous, semblent les mots clefspour permettre à un maximum de personnesde vieillir en bonne santé. .

La version intégrale de ce texte est disponiblesur le site de la LDH en cliquant sur ce lien :« Vieillir en bonne santé physique, mentale etsociale »

Personnes de 65 ans etplus

Insatisfaction descontacts sociaux

Moins de 1 contact socialpar semaine

Sexe Hommes Femmes Hommes FemmesPas de limitation 4.3 9.9 11.5 7.9Quelques limitations 6.1 14.9 5.4 6.4Beaucoup de limitations 10.1 30.3 17.2 11.6

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Santé, vieillissementet droits humainsL’OMS travaille actuellement sur l’approche en santé basée sur les droits humains. Paul Hunt,professeur de droit néozélandais et rapporteur auprès des nations unies sur les droits del’homme vient de publier en collaboration avec une série d’auteurs et Flavia Bustreo, Sous-Directeur général de l’OMS, en charge de la santé de la famille, de la femme et de l'enfant deune monographie sur l’impact d’une approche basée sur les droits humains sur l’efficacité despolitiques de santé. Cette approche se base sur différents principes que sont entre autres larecherche de l’équité, la participation, la transparence, la recherche de l’accessibilité aux soinspour tous, l’attention au plus démuni ou aux groupes de population « impopulaires1 »

La dimension de l’équité semble majeure dans cette approche : dans toute décision, parexemple la construction d’une nouvelle maison de repos ou de lieux de répit, on peut sedemander si la décision augmente ou réduit les inégalités de santé : par exemple, l’accès à despersonnes sans voiture est-il facile ? Quand on sait que le nombre de visites qu’une personnereçoit en maison de repos est lié à sa satisfaction et son adaptation dans son nouveau lieu devie², une telle préoccupation aura un impact à la fois sur la qualité de vie de la personneinstitutionnalisée et sur la qualité de vie au travail du personnel d’encadrement qui devra faireface à moins de situations de stress.

On voit dans ce dernier exemple que les politiques de santé ne sont pas les seules importantes :c’est le principe dont on parle beaucoup actuellement de « health in all policies (HIAP)» c'est-à-dire que chaque politique, régionale ou locale, prenne en compte l’impact de ses décisions sur lasanté (et sur les inégalités sociales de santé)

Travailler sur le genre : à la fois une question de droit d’accès aux services de santé, auxtraitements optimaux, au temps de récupération mais aussi travailler sur le différentield’espérance de vie (les hommes sont relativement peu ciblés par les actions de promotion de lasanté).

Rechercher l’adaptation culturelle que ce soit dans les aides à domicile (repas par exemple) ouchangements de lieux de vie semble essentiel pour nos populations d’origine immigrée mais ellel’est aussi pour tout un chacun.

De nombreux projets, expériences pilotes ou recherches sont actuellement en cours concernantl’offre de soins, d’accueil de qualité aux personnes âgées1. Ces projets ont en commun demettre en évidence la nécessaire interdisciplinarité, transversalité, la multisectorialité,l’implication de la population dans son ensemble et surtout celles des personnes concernéesdans les décisions.

V.T

1 OMS, 25 questions sur la santé et les droits humains ; http://www.who.int/hhr/activities/Q&AfinalversionFrench.pdf2OWS, Le ressenti des personnes âgées à leur entréeen maison de repos, Wallonie en Santé n°1,http://socialsante.wallonie.be/sites/default/files/rapport_etude_mr_mrs_0.pdf

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Maltraitance: les seniorsdemandent le respect

Dominique Langhendries et Pascale Broché (psychologue),Respect Seniors asbl

Le monde actuel connaît une transformationdémographique importante. En effet, le nombrede personnes âgées de plus de 60 ans passerad’environ 600 millions en 1995 à près de 2milliards en 2050. Cette inversion de la pyramidedes âges est due à un accroissementspectaculaire de la longévité. L’espérance de viemoyenne internationale à la naissance étaiteffectivement de 66 ans en 2002, soit uneprogression de 20 ans depuis 1950. Celle-cidevrait encore augmenter de 10 ans d’ici à 20508.

En 2002, l’Organisation Mondiale de la Santé asouligné l’importance d’avancer dans la luttecontre la maltraitance des personnes âgées, levieillissement de la population n’allantqu’amplifier le phénomène. En 20119, elle apublié des chiffres selon lesquels on estime entre4 et 6% le pourcentage des personnes âgées quiont connu l’une ou l’autre forme de maltraitanceà domicile.En Région wallonne, les personnes âgées de 65ans et plus étaient 570.000 en 2008, soit 16% dela population wallonne (17,4 % en Belgique au 1er janvier 2012). Selon l’Institut National desStatistiques, ce pourcentage sera de 23% en 2030et 25% en 2050.

Quelques statistiquesIl est utile de rappeler ce que traduit le terme «maltraitance », tel que défini à l’article 378 deCode wallon de l’Action sociale et de la Santé : «Tout acte ou omission commis par une personneou un groupe de personnes qui, au sein d’unerelation personnelle ou professionnelle avec unaîné, porte ou pourrait porter atteintephysiquement, moralement ou matériellement àcette personne. »

Les données recueillies par l’asbl Respect Seniors,sur base des quelques 4194 contacts au total quiont été échangés tout au long de l’année 2012,

montrent que les maltraitances psychologiqueset financières représentent presque la moitié desprincipales formes de maltraitances évoquéeslors des appels (28,13% et 21,30%). Lesmaltraitances physiques, souvent relayées par lesmédias, constituent 10,48% des situationsévoquées lors des contacts. Plus de deux tiers(71,07%) des situations de maltraitance dontl’asbl Respect Seniors a connaissance, sontcommises à l’encontre de personnes âgées vivantà domicile et plus d’un quart vis-à-vis despersonnes vivant en institution (27,11%). Il est ànoter que le lieu de résidence n’est pas unindicateur quant à l’«auteur présumé» demaltraitance.

Ainsi ce n’est pas parce que l’aîné réside eninstitution que la maltraitance est commise parun professionnel, de même, ce n’est pas parceque l’aîné réside à domicile que la maltraitanceest commise par un proche. Sur base desdonnées récoltées au cours des appels, il apparaitque dans plus de 60% des situations, c’est unmembre de la famille qui est désigné « auteur »de maltraitance et dans plus de 20%, c’est unprofessionnel.

Il est intéressant de remarquer que dans lamajorité des situations, le premier appelant ainsique l’ «auteur désigné» sont des membres de lafamille. L’équipe psychosociale est attentive à cetaspect et notamment au fait que des personnespeuvent essayer de régler des conflits familiauxvia un organisme extérieur tel que l’Asbl RespectSeniors.

Le quotidien…Le travail avec la personne âgée a ceci despécifique, qu'il confronte l’intervenant avec unepersonne ayant une histoire de vie, ayant déjàfait de nombreux choix. Un citoyen avec des

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idéaux politiques, une carrière, des choixamoureux, vestimentaires… des priorités et desregrets parfois. Les deuils sont régulièrementnombreux, ce qu’on n’a pas fait, qui on aurait puêtre.

Face à un homme ou une femme - qui doit êtreenvisagé dans toute sa singularité, avec sonhistoire de vie, son projet de fin de vie parfoisaussi, ses dépendances - l’intervenant de RespectSeniors se trouve toujours face à une situationcomplexe. Percevoir l’aîné dans sa globalité (sonhistoire, son passé, son devenir) avec le souci d'yinclure son environnement familial et/ouprofessionnel. Cela suppose considération del’altérité dans la relation. Chacun étant porteurde valeurs, croyances, conceptionsphilosophiques différentes.

Le rôle de notre association est sans doute dansun premier temps de donner la parole à cet aînéqui tantôt se plaint et ne fait que cela : il souhaitedéposer un paquet trop lourd, une peine, unesouffrance, un ras le bol. Parfois aussi ilrevendique, il s’offusque, se méprend. Nous nesommes pas là pour le juger, mesurer sa capacité,l’absoudre ou lui donner raison. Notre rôle esttout autre et pourtant essentiel. Nous présumonsqu’il a le choix, qu’il est compétent pour ce faire.

Une place pour les SeniorsDans une société qui court, qui affirme, dissèque,mesure ou protège, nous lui laissons une placequi lui permette de ne pas se retrouver au ban del’humanité. Le respect des seniors est tropsouvent en question. Là est sans doute laprincipale maltraitance.

Quand je choisis pour l’autre ce qu’il doit mangerparce que c’est pour son bien, je nie une libertéindividuelle fondamentale. Quand je prive de lacarte d’identité celui qui risque de la perdre, quesuis-je en train de faire? Il est essentiel, en vued’éviter d’autres formes de maltraitance, deremettre la personne âgée au centre de sesdécisions et de respecter ces dernières. Il estsouhaitable de prendre le temps d’évaluer lasituation dans sa globalité, d’ouvrir le dialogue etde respecter le rythme de la personne. Il estimportant de ne pas juger, d’entendre lasouffrance de chacun et surtout de restaurer undialogue entre les personnes, quand c’estpossible.

ll faut toutefois signaler que ces principes sontadaptés lorsque nous sommes face à unesituation de non-assistance à personne endanger, danger réel, imminent menaçant la vie dela personne âgée. Ces situations extrêmes, et

Les multiples visages de la maltraitance:morceaux choisis« Madame était propriétaire d’une maison dont elle a fait donation à sa petite-fille, moyennant l’usufruit de lamaison. Actuellement elle vit dans le garage qui a été aménagé et n’a plus d’accès au reste de la maison. Madamea été brutalisée par le compagnon de sa petite fille qui a un casier judiciaire. Madame n’a plus de contact avec safamille. Madame refuse catégoriquement de quitter sa maison. La petite fille a contracté un prêt pour faire destravaux dans la maison.

Madame dit « Je veux mourir dans ma maison, je suis chez moi » et ne veut pas que sa petite fille quitte la maison.Elle tient à ce que son arrière-petit-fils soit épargné, celui-ci vient en effet régulièrement la voir, Madame gardedonc un bénéfice secondaire par rapport à lui.Liberté chérie donc qui pousse celle-là à accepter ce que d’aucun penserait inacceptable, hors la loi.Pourtant quand j’évoque son histoire, il me vient toujours son sourire malicieux, quand elle dit : « ils ont pensé quej’allais crever très vite… c’est raté. »

Ou encore ce père qui cohabite avec son fils dans des conditions plutôt précaires, le tout en équilibre fragile. Quisommes-nous et que savons-nous pour affirmer qu’il serait mieux dans une maison de repos que chez lui ? Larencontre des différents intervenants avec la famille, en gardant l’ainé au centre permet de négocier une solutionla plus respectueuse de chacun.

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heureusement assez rares, nécessitent, quant àelles, une réaction urgente qui se traduit par lamise en place de dispositifs de protection.Parfois aussi, il y a doute. La présomption decompétence est interrogée et le risque desubstitution de nos valeurs est massif. Alors,prenons le temps avant de dire que quelqu’un estvulnérable ou incapable… Incapable de quoi aujuste ? Qui le dit ? Le proclame ? Au nom dequoi? Prenons le temps de l’entendre, de la voir,de l’écouter, de la rencontrer.

Un partage, un dialogue, une concertation entreles différents professionnels qui gravitent autourde l’aîné est utile. Le regard du médecincomplète celui du proche, lui-même confronté àcelui de l’aide à domicile… Parce que qui sait ?Qui peut choisir pour l’autre ? Lorsque l’aîné estdépassé est-ce transitoire ou définitif ? Quand «sa sécurité » est compromise, de quoi parle-ton?.

Les personnes âgées aucœur du travail de RespectSeniors asbl

Suite au décret du 3 juillet 2008, Respect Seniors estreconnue comme « l’Agence wallonne de lutte contre lamaltraitance des personnes âgées ». En septembre2011, le décret de juillet 2008 a été intégré au nouveauCode wallon de l’Action sociale et de la Santé.Aujourd’hui, et conformément au Code, Respect Seniorscompte six antennes, une par province, avec deuxantennes dans le Hainaut. Le siège social est situé àNamur avec la direction, la coordination psychosociale,le secrétariat, et la juriste de l’asbl

Les missions de l’agence consistent à assister lespersonnes âgées en matière de maltraitance, Un numérod’appel téléphonique gratuit est mis à leur disposition.L’agence organise également des actions d’informationet de sensibilisation à destination du public et organisedes formations au bénéfice de professions susceptiblesd’être confrontées à des cas de maltraitance.

Respect Seniors intervient auprès des personnes âgéesde 60 ans au moins, et sur le territoire wallon, de languefrançaise. Un principe de travail important est demaintenir la personne âgée au cœur des préoccupationsde Respect Seniors. En effet, l’Agence la positionne aucentre de toute intervention par souci de respect et detransparence. Il est donc primordial de respecter sonrythme, ses souhaits et de l’encourager à effectuer elle-même les démarches afin de la laisser actrice de sasituation.

La priorité est d’écouter et de soutenir la personne quiappelle, de lui permettre d’exprimer ses difficultés, sasouffrance, de prendre du recul par rapport à la situationvécue et ainsi avoir une meilleure compréhension de lasituation. Un autre aspect du travail des membres del’équipe est de donner, à toute personne intéressée, uneinformation sur la problématique de la maltraitance despersonnes âgées. Cette mission est réalisée notamment,par les sensibilisations que Respect Seniors propose.

Des informations sont également diffusées via le siteInternet de Respect Seniors: www.respectseniors.be

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L’habitat kangourou,un habitat part’agéLe vieillissement de la population est l’un des grands défis de notre société. Alorsqu’aujourd’hui, les « 65 ans et plus » constituent déjà 17% de la population, ellesreprésenteront le tiers des habitants du Royaume d’ici 2050. La question du logementn’est, en soi, déjà pas une chose évidente pour la personne âgée : le placement en maisonde repos ou la solution du domicile privé ne répond pas toujours à ses aspirations et sesbesoins. Avec l’accroissement de cette tranche de la population, l’heure est àl’aménagement d’espaces de vie mieux adaptés aux attentes et aux spécificités de nosainés. L’habitat kangourou fait partie des alternatives désormais incontournables.

L’habitat kangourou permet à une personneâgée de vivre chez elle tout en étant assuréed’un voisinage bienveillant et prêt à rendreservice de temps en temps. Concrètement, lapersonne âgée s’installe au rez-de-chausséetandis qu’une famille occupe le reste de lamaison. Les deux habitations ne partagent quel’entrée, l’autonomie est garantie tout enfavorisant une certaine solidarité entre cespersonnes.

Tout droit venu d’Australie, cetype d’habitat est dorénavantbien implanté aux Pays-Bas etdans les régions scandinaves.Il existe depuis un certaintemps en Belgique, maisrencontre encore pas mald’écueils à sa propagation. Eneffet, d’un point de vuejuridique, financier etadministratif, l’aménagementd’un tel lieu de vie n’est paschose facile. Passer par uneassociation qui s’occupe deces détails techniques est lechemin le plus souventemprunté.

Quand l’interculturel se mêle àl’intergénérationnelUne des pionnières à proposer l’alternative del’habitat kangourou est l’asbl Le Foyer, situéeà Molenbeek-Saint-Jean. Cette associationtravaille au départ sur l’intégration des

personnes d’origine étrangère. Tout est partid’un constat : « Dans les années 80, nousavons découvert que dans notre quartiervivaient une large population d’originemaghrébine ainsi qu’une population de belgesâgés. Il y avait de la part des deux populations,une réelle méconnaissance de l’autre »,explique Loredana Marchi, la directrice del’asbl. Afin de permettre à ces deux

populations de se rencontrer etde mieux se connaitre,l’association organise à l’époquedes ateliers. Dans le premier,des femmes âgées donnent descours de crochet aux femmesimmigrées et dans le deuxième,ces dernières vont apporter despetites aides à domicile auxfemmes âgées après avoir suiviune petite formation. « Unevraie rencontre a eu lieu. Il nousest ensuite venu à l’idée demettre en place quelque choseau niveau de l’habitat »,continue Loredana. Une maisondonnée par la fabrique d’égliseest alors rénovée de façon àpermettre à une personne âgée

de vivre au rez-de-chaussée et une famille àl’étage. Le premier projet nait ainsi en 1986.

Saïda est mariée et a cinq enfants. Elle est lapremière à avoir accepté de se lancer dansl’aventure avec sa famille. Elle vit toujours ausein de l’habitat kangourou et c’est Ida, dansla quatre-vingtaine qui vit maintenant au rez-

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de-chaussée. Saïda nous raconte les petitsplus du quotidien : « Au départ, la seule chosedemandée était d’assurer une présence etd’être là au cas où elle avait besoin d’une aideurgente. Mais nous avons chacune notre vie etnotre autonomie. C’est important de lerappeler car il y a parfois des confusions parrapport à ce que cela implique. Maintenant,on fait pas mal de choses ensemble : quand jene suis pas bien, je vais directement voir Idacar elle me remonte le moral et me pousse àfaire plein de choses. De mon coté, quand ellea de grosses courses à faire, je vais luiproposer de les faire car j’ai une voiture. Maisc’est elle aussi qui m’aide quand il y a despapiers que je ne comprends pas bien… Aufinal, les rôles sont inversés, c’est surtout Idaqui prend soin de moi ! (rire)

La maison kangourou de l’asbl Le Foyer a cettedouble spécificité : celle del’intergénérationnalité mais également del’interculturalité. Dans les deux cas,l’ouverture à la réalité de l’autre estindispensable mais contribue à la richessed’un tel projet.

L’habitat kangourou, une possibilitéparmi tant d’autresEn Belgique, les différents types de logementsoù s’entremêlent les générations sontnombreux (voir encart). On peut, entre autres,parler du «logement partagéintergénérationnel ». Celui-ci se distingue del’habitat kangourou par le fait qu’il n’existequ’une unité de logement. La personne âgéevit ici dans une annexe ou une chambre del’habitation et partage des moments de viequotidienne avec les personnes quil’accueillent.Une autre possibilité encore est celle dulogement étudiant chez une personne âgée :un senior met une ou deux pièces de samaison à disposition d’un étudiant qui, suivantle contrat établi, rendra quelques services enéchange d’un loyer peu onéreux. L’asbl1toit2âges, par exemple, fait le lien, depuis2009, entre des étudiants et des seniorsdésireux de vivre cette expérience et s’assure

du respect de la convention signée entre lesdeux parties tout au long de l’année. L’idée aséduit de nombreuses personnes et s’estmaintenant répandue dans de nombreusesgrandes villes telles que Bruxelles, Namur,Louvain-la-Neuve, Mons, Liège et Charleroi.

Ces différents logements proposent un cadrede vie propice à l’échange et la solidarité. Ilpermet à chacun de vivre en totaleautonomie, tout en participant à la viecollective. Malheureusement, certainesdifficultés se posent à la mise sur pied d’un telprojet. Notamment en lien avec le revenu despersonnes âgées : celles-ci risquent, d’unpoint de vue juridique, de passer du statut de« personne isolée » au statut de« cohabitant » et voir leurs revenus deremplacement rabaissés (allocation dechômage, revenu d’intégration, garantie derevenus aux personnes âgées, etc). Un autreproblème est lié à l’adaptation du logementpour que celui-ci soit en mesure d’accueillirplusieurs habitations : un permis d’urbanismeest nécessaire et son obtention ne se fait passans difficultés. On peut, en outre, ajouter lesdifficultés liées à la fiscalité immobilière, aurégime du contrat de bail, à la gestionadministrative du projet, l’entente entre lespersonnes etc.

Faut que ça bouge !Le politique doit ici être capable de faire lesadaptations juridiques et financièresnécessaires au bon développement de telslogements. Cela passe notamment par la miseen place d’un label « logementintergénérationnel », par une adaptation de lanotion de cohabitant et du règlement régionald’urbanisme, mais aussi par le soutien desassociations présentes dans le secteur. Celles-ci en tant qu’instances externes sontprécieuses en cas de conflit et sont présentespour accompagner les personnes désireusesde se lancer dans un mode de vie quelque peudifférent. Sans oublier qu’elles prennent encharge toute une partie administrative et sontgarantes du sérieux du projet auprès desautorités.

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Une résolution en faveur du logement intergénérationnel a étéadoptée à Bruxelles début 2012. Pourtant, pour l’asbl Le Foyer, lasituation n’évolue pas assez vite. Ida, senior au sein de l’habitatkangourou, s’indigne : « Ca bouge tellement lentement à Bruxelles…C’est comme s’il n’y avait pas de vieilles personnes. Nous sommesquand même ici depuis 1986 ! ». Loredana poursuit : « Aucommencement, Le Foyer n’avait pas l’ambition de posséderbeaucoup d’habitats kangourous. Nous voulions juste donnerl’exemple et faire propager ce type d’habitat par les autorités. Maispendant de longues années, personnes n’a bougé. Ce n’est quedernièrement que certaines communes commencent vraiment à s’yintéresser. C’est peut-être aussi dû au fait que les pouvoirsdécisionnels sont trop éparpillés… ».

Repenser les solidaritésIda, Saïda et Loredana sont unanimes : il est impératif pour elles quela société revoie ses priorités. La solidarité, le partage et l’esprit decommunauté sont des valeurs qui, pour elles, ont été troplongtemps mises de côté. Et la place que l’on accorde aux seniorsfait partie des choses à changer. « C’est ça qui dans notre sociétén’est pas juste. On pense que la personne âgée est seulementcapable de recevoir mais ce n’est pas vrai », se défend Ida. Et Saïdade rajouter : « Ça me fait penser à ma fille qui est en stage commeaide soignante pour les personnes âgées. Elle n’avait qu’une envie :y retourner ! Et vous savez pourquoi ? Parce qu’elle veut connaitrela fin d’une belle histoire qu’une femme âgée est en train de luiraconter… .

Les différents typesde logementsintergénérationnels

Les habitats groupés : Ils permettent deposséder un chez sois tout en partageant unespace de vie commun et en tissant certainsliens de solidarité. On retrouve…

L’habitat kangourou : Lacohabitation se fait entre un seniorou un couple de seniors et unménage. Chacun vit en touteautonomie dans une unité delogement distincte.

Le logement partagéintergénérationnel : La différenceavec l’habitat kangourou est qu’ici,il n’y a qu’une unité de logement.Le senior vit alors dans unechambre ou une annexe del’habitation.

Le logement étudiant chez unepersonne âgée : Une ou plusieurspersonnes âgées mettent àdisposition une ou deux pièces deleur habitation pour héberger unétudiant.

Les habitats regroupésIci, le collectif (de manière spatiale ou entermes de projet) est basique voire quasiinexistant. La base du regroupement estsouvent d’ordre économique, parfois mêmenon volontaire.

Les habitats communautairesContrairement à l’habitat regroupé, lecollectif est ici dominant (les espaces privéssont petits face aux espaces collectifs), uneidéologie rassemble le groupe (souventphilosophique ou religieuse). Dans ce typed’habitat, le partage peut aller jusqu’aupartage des revenus ou desactivités professionnelles.

D’après une classification du « CentrePermanent pour la Citoyenneté et laParticipation » et du « Centre d’EtudesPolitiques, Economiques et Sociales »

Vieillesse et handicapLe vieillissement des personnes en situation de handicap devientaujourd'hui une question cruciale. Les progrès de la médecine,l'évolution des modes d'accompagnement ont permis que leurespérance de vie se rapproche de celle de l'ensemble de la population.S'il faut s'en réjouir, leur condition demeure, par bien des aspects,insatisfaisante. Plus : intolérable. Elle résulte de facteurs complexescomme les financements des politiques publiques, l'accès aux soins,l'évolution des dispositifs d'accueil, la formation de leurs soignants etaccompagnateurs.

Au demeurant, nos choix, face au défi de leurvieillissement, sont liés à nos représentations, largementpéjoratives. Comment s'en déprendre pour penserautrement leur devenir ? En quoi l'éthique peut-elleaider à baliser ce chemin ?

« Vieillir handicapé » de Yves Jeanne, Connaissance de la diversité, 2011, 240p

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KAP sur l’intergénérationnelReportage de Joëlle Van Laethem, stagiaire Com

a crèche et l’école pour les enfants, le travail pour les adultes, la maison de repos pourles vieux… Les générations seraient-elles destinées à vivre désormais chacune de leurcôté ? Alors que la société vieillit, nombreux sont ceux qui croient à la revalorisation

des relations intergénérationnelles.

Sur le campus de Louvain-la-Neuve, certainsétudiants ont décidé de sortir de leurs cerclesestudiantins pour s’ouvrir aux autres habitantsde la ville. Au sein du kot-à-projet « KapSeniors » (un kot-à-projet (KAP) est un lieu devie communautaire dans lequel des étudiantschoisit de s’investir de façon bénévole dans unprojet tout au long de l’année), un grouped’étudiants met sur pied, depuis deux ans, desactivités qui visent à favoriser le lien entre lesétudiants et les générations présentes sur lecampus, en particulier avec les seniors. Ils nousparlent ici de leur projet.

Comment favorisez-vous cette rencontreentre générations ?Kap Seniors : Notre projet promeut larencontre entre étudiants et seniors, mais iltouche également les autres générations. Nousorganisons ainsi des activités de deux types.Les premières sont exclusivement tournéesvers les seniors: nous organisons des initiationsà l’informatique et aux nouvelles technologieset nous proposons des petits coups de mainqui ne prennent pas plus d’une demi-heure,comme remplacer une ampoule. Nous nousrendons égalementdeux fois parquadrimestre dansune maison de repospour y faire desanimations. Nous yavons notammentorganisé uneconférence sur lemonde arabe ainsiqu’une autre sur lesétudiants. On a choisi ce dernier thème parceque les habitants et les étudiants ne secomprennent pas toujours. Il y a un assezgrand écart au niveau des modes de vie donc

on essaie de rapprocher ces deuxcommunautés.Les autres activités sont de typeintergénérationnel c’est-à-dire qu’elles ontpour but de réunir les différentes générationsprésentes dans la ville. Ainsi, nous organisonsdes après-midi tournois de carte ainsi que desrepas à notre kot qui rassemblent étudiants,seniors et familles. Mais l’événement phare del’année, c’est la « fête del’intergénérationnel ». Il s’agit d’une journéesur une des places de la ville où ont lieu desconcerts et diverses animations et de nouveau,le but est de mélanger les générations.

Vous proposez des petits coups de main pourles seniors. Ceux-ci ont-ils égalementl’occasion de venir en aide aux étudiants ?KS : Oui, tout à fait. Nous avons d’ailleurs misen place le principe du Skill sharing (partage decompétences) où des seniors viennentapporter leur savoir. La dernière fois, unesenior avait réalisé un cours de couture pourles étudiants. Il existe aussi une plateformeinternet qui permet de mettre en contact lesétudiants et les seniors qui désirent échanger

une compétence particulière.Nous disposons ainsi d’uneliste de seniors qui seproposent pour relire desmémoires, donner des coursde couture ou encore donnerun cours de rattrapage enmath…Les étudiants quant àeux peuvent se proposer pourdes petits coups de mainmanuels, technologiques, etc.

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À votre avis, que peuvent apporter les jeunesà leurs ainés et vice versa ?KS : Les étudiants peuvent évidemmentapporter leurs savoirs au niveau destechnologies. D’ailleurs, l’initiation àl’informatique est une des activités qui marchele mieux. Soit les seniors qui viennent ont unordinateur qu’ils ne savent pas utiliser, soit ilsn’en ont pas encore et ilssouhaitent voir commentça fonctionne avant de selancer… Mais les ainés onteux aussi des choses àtransmettre ! Ils ont tout unvécu que, nous étudiants,nous n’avons pas. Nous,nous arrivons seulementdans la vie active. Leur point de vue et leursconseils sont importants... On le sous-estimeparfois mais il y a des choses qui valent pourtoutes les époques. Et puis de manièregénérale, lorsque deux personnes se

rencontrent il y a toujours un échange, quelquechose que chacun peut apporter, non ?(sourire)

Selon vous ce genre de rapprochementpourrait-être utile pour les défis futurs enmatière de vieillissement de la population ?KS : Oui, je pense qu’il faudra de toute façon

revoir le système tel qu’il estmaintenant, vivre chacun de soncôté n’a plus de sens. Il est tempsd’amorcer une solidarité entre lesgénérations. D’ailleurs on voit que çamarche, notamment dans nosactivités mais pas seulement. Il y anotamment de plus en plus delogements intergénérationnels,

c’est-à-dire des étudiants qui habitent avec desfamilles, des personnes âgées ouhandicapées… .

Plus d’infos sur le projet du Kap Seniors : www.kapseniors.wix.com/kapseniors

« Apprendre à vivre ensemble »Nicole, 71 ans, suit les activités du Kap Seniors depuis le lancement du projet. Elle partage ici son expérience.

Qu’est-ce qui vous pousse à participer aux activités du KAP Seniors?L’intergénérationalité est une idée extraordinaire. C’est une occasion pour les plus âgés de regarder vers l’avant et nonvers l’arrière mais aussi d’être dans une ambiance de partage. Par exemple, les après-midi jeux de cartes sontdivertissants mais c’est surtout l’occasion d’échanger avec les étudiants autour de la table. On s’intéresse les uns auxautres, voilà. Je trouve que il y a vraiment un plus par rapport à un simple club de whist…

Observez-vous des qualités chez les jeunes que les seniors n’ont peut-être pas ?Ils relativisent beaucoup plus les choses, ils sont beaucoup plus spontanés (rire). Chez les plus âgés, il y a toute la viederrière, des carcans qui sont installés, des habitudes. Les jeunes ont beaucoup moins ça, ils sont beaucoup plus ouvertsà tout un tas de choses. À mes yeux, ils ne s’enferment pas, ils vont dans tous les sens, toutes les directions... Celacorrespond tout de même encore bien à ce que je suis aujourd’hui même si je suis plus vieille ! (rire) Mais voilà, j’aimebien les côtoyer.

Et vous, de votre côté, que pouvez-vous apporter aux étudiants ?Outre apporter des savoirs, on peut aussi être des canalisateurs, apporter une mesure dans l’extravagance… Avec nosyeux de plus anciens, on peut aussi apporter une réflexion par rapport à leur vie d’étudiants, dans tous les domaines ! Ycompris évidemment dans le domaine de la détente et de la boisson (rire) ! Vous savez, nous vivons dans la même villemais nous avons des styles de vie assez différents. Nous souhaitons vraiment promouvoir ces rencontresintergénérationnelles. Quand nous, les habitants de la ville, organisons une activité telle qu’une brocante, nous faisonsaussi appel aux étudiants et aux plus jeunes. C’est la même chose dans le comité de quartier et l’association deshabitants : à chaque fois, un représentant étudiant est présent pour donner son avis. Nous ne sommes pas toujoursd’accord sur tout mais c’est nécessaire. Au fond, je pense que cela s’appelle tout simplement apprendre à vivreensemble…

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La (vieille) femme invisibleL’espérance de vie des femmes en Belgique est estimée aujourd’hui à 82 ans. Les hommes vivent,eux, en moyenne jusqu’à 77 ans. Deux constats s’imposent : les femmes vivent plus longtemps queles hommes… et les conséquences de ce constat n’intéresse apparemment personne. Réflexionsubjective d’une jeune fille qui, elle aussi, vieillira un jour.

Durant les années 80, la gérontologie s’est brièvement attardée sur le sort des femmes âgées. De cesétudes proviennent notamment les données qui permettent d’expliquer pourquoi les femmes ontdroit à un séjour plus long sur terre que les hommes. Il a été établi que, mis à part les raisonsbiologiques, les femmes avaient en général un mode de vie plus sain que les hommes, ceci étant dûentre autres au fait que, de par le rôle que la société leur assignait, elles étaient moins stimulées àprendre des risques que ces derniers. En outre, les gérontologues ont confirmé que les femmesavaient et ont encore tendance à épouser des hommes plus âgés qu’elles et se retrouvent donc plusfacilement veuves et esseulées.

Ces constats ayant été dressés, le sujet a été complètement délaissé. En 1995, lors de la 4e

Conférence Mondiale sur les Femmes à Pékin, le thème ne fut même pas mentionné… et n’a toujourspas été ré-exploré depuis. Il n’existe donc que très peu d’enquêtes qui mêlent femmes et vieillesse.« Du point de vue des politiques d’égalité, il n’existe aucune mesure visant en propre les femmesâgées [ce qui entre] en contradiction flagrante avec le changement démographique de ces dernièresannées. »x

Dans les années 70, la féministe Tish Sommers faisait remarquer: « Étrange, n’est-ce pas, commenous perdons notre sexe lorsque nous atteignons l’âge de 65 ans ! […] Nous ne sommes plus desfemmes ou des hommes de tel âge, mais des membres d’une nouvelle catégorie : les personnes âgées.[…] Les statistiques qui nous concernent ne distinguent même plus entre les hommes et les femmes,masquant ainsi […] le fait que les problèmes de vieillesse sont surtout des problèmes de femmes. »xi

Quelle ironie du sort ! Selon Sommers, ces dames, après avoir été incitées à courir derrière lescritères de féminité déterminés par les hommes toute leur vie, ne sont plus, une fois passées la case« Senior », envisagées que comme une « personne âgée », à l’exclusion de toute autre classification…y compris leur statut de femme.

Cependant, on remarque que certaines différences ont tendance à être exacerbées avec le temps etque les stéréotypes liés aux « vieux » ne sont pas les mêmes que ceux attribués aux « vieilles ». Dansl’art figuratif, par exemple, lorsque la femme âgée est représentée (ce qui est rare), l’accent estsouvent mis sur son corps, considéré comme dénué de féminité et d’attrait sexuel, en contraste avecle corps féminin plus jeune.xii Dans les contes pour enfants, la figure de la vieille est souventinquiétante, voire effrayante (la sorcière)xiii alors que, de son côté, l’homme âgé est plutôt perçucomme sage et créatif.xiv

De par le statut qu’on leur a assigné lorsqu’elles étaient jeunes, les femmes âgées d’aujourd’hui,nées dans les années 30/40, ont souvent appris à rester discrètes, dans l’ombre de leur mari. Cecin’excuse cependant pas le silence qui règne autour de leur sort car elles représentent une majoritéde la population âgée. Pourtant elles restent invisibles. On comprend mieux pourquoi les femmescourent après leur jeunesse, parce que lorsque celle-ci s’évapore, à part des rides, des varices et desrhumatismes, elles ne récoltent pas grand-chose. Pas même des statistiques.

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Les migrants âgés ont desprojets d’avenir

’asbl Convivial1 et l’Agence Alter ont organisé il y a quelques mois un colloque intitulé« Migrant(e)s âgé(e)s : bien vieillir et mourir ici ». Où l’on constate que, si peu dechoses ont été anticipées pour ces populations, diverses initiatives locales

bourgeonnent çà et là.

Par Cédric Vallet, Agence Alter

Deux comédiennes dos à dos, liées l’une àl’autre, tentent d’illustrer le grand écart entredes générations de migrants. Les anciens,taiseux, qui sont nés là-bas et vieillissent ici, sesentent encore « invités » en Belgique, pasvraiment chez eux. Les plus jeunes, nés ici,plus vindicatifs, désirent s’affirmer.La première comédienne scande, l’air grave, «moi je suis les racines ». Sa comparse, trèsagitée, lui rétorque, du tac au tac, « les racinesje les ai bouffées en salade ». Rires dans lasalle qui accueille avec bienveillance cettetroupe d’improvisation. Malgré uneprestation un brin convenue et premier degréde la troupe « Sapristi », le théâtre permetd’ouvrir les vannes. Le public, composé detravailleurs spécialisés dansl’accompagnement des étrangers ou despersonnes âgées, alimente l’improvisation etpropose des thèmes qui seront au cœur desdébats de la journée. Une spectatrice,visiblement émue, évoque aux acteurs cetravail souterrain des associations, dont onconnaît peu l’œuvre quotidienne auprès despersonnes âgées migrantes. Inspirée, elle lescompare à des taupes, qui travaillent à l’abrides regards, et qui « aèrent la terre ».L’audience approuve. Il faut faire connaître cetravail, le sortir de l’ombre. Et, au-delà, faireconnaître les problématiques propres auxpersonnes âgées issues de l’immigration.Car tel était bien le thème du colloque «Migrant(e)s âgé(e)s : bien vieillir et mourir ici». Pendant une journée, les participants sesont attelés à décrire les difficultés querencontre ce public mais aussi à échanger despratiques, à recenser des pistes de solution.

Des problématiques propres auxmigrants âgésVieillir et migrer ne sont pas des pathologies.Plusieurs intervenants ont mis en garde contreune problématisation excessive de ces deuxphénomènes. Ce sont bien les conditionssociales du vieillissement ou de l’immigrationqui peuvent poser problème. Il s’agit donc debien identifier ces conditions et de distinguerles enjeux qui concernent toutes lespersonnes âgées de ceux propres auxmigrants, même s’ils sont intimement liés.L’étiquette « migrants âgés » couvre desréalités très différentes. Le migrant italienvenu dans les années soixante pour travailler,traverse la vieillesse par d’autres chemins quele réfugié qui a fui la guerre et dont les enfantssont éparpillés de par le monde. SylvieCarbonelle, socio-anthropologue à l’UniversitéLibre de Bruxelles a synthétisé en quelquesmots les propos de la journée. De ce colloque,elle retient notamment ce clivage entre ceuxqui ont subi l’exil et ceux qui l’ont choisi. Lafaçon de vieillir en Belgique – et de rêver leretour – étant fortement liée à ce distinguo.Pour les réfugiés, on constate un cumul dedifficultés. Enfants aux quatre coins dumonde, traumatismes subis dans le paysd’origine qui accélèrent la vieillesse, quidégradent la condition mentale et physique.Quant à l’impossibilité de rentrer, liée à laperspective de funérailles en Belgique, elle estparfois difficile à accepter. Cet ensemble defacteurs peut générer des troubles, desdépressions. Pour ces réfugiés, peut-être plusencore que pour d’autres migrants âgés, la

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solitude et l’isolement sont des cercles vicieuxdifficiles à rompre.Les personnes âgées qui ont l’opportunité derentrer dans leur pays d’origine sontconfrontées à des vicissitudes différentes.Certes, techniquement, il leur est possible derentrer au pays pour y vieillir. Mais leursenfants sont installés en Belgique et ontparfois construit une famille, ils sont donc«retenus » ici. Nathalie Thomas, du service desanté mentale « Méridien », qui anime desgroupes de parole de personnes âgéesimmigrées, évoque ces anciens qui n’hésitentpas à faire des allers-retours entre la Belgiqueet leur pays d’origine. Cette possibilité permetde mieux négocier sa vieillesse.

« Pas grand-chose de prévu pources populations vieillissantes »Les participants au colloque sont tombésd’accord sur un constat : peu de choses ontété prévues pour ces populations vieillissanteset discrètes. Dans les services aux personnesâgées, qu’il s’agisse de l’aide à domicile, del’hébergement ou des centres de santémentale, on compte bien peu d’initiatives.

La première difficulté que ces « vieux »doivent se coltiner, c’est la langue. Malgré desannées passées en Belgique, la vieillesse asouvent pour effet de leur faire perdre leurlatin, ou plutôt leur français, au profit de lalangue maternelle. La solitude n’en est queplus accrue. Puis il y a le respect des rites, dela nourriture, des relations particulières aucorps, toutes ces petites choses essentiellestrop peu prises en compte.Enfin, ceux qui ont la chance d’avoir unefamille à leurs côtés ne sont pas épargnés parles tiraillements internes. Les générations seconfrontent et l’aïeul se demande commentretrouver cette dignité perdue, cette place de« sage », comment transmettre une mémoire,des valeurs à des petits-enfants qui « tirent »vers la société d’accueil.Les personnes âgées immigrées réinterrogentle rapport de notre société aux personnesâgées en général. « La dépression, la solitude,la difficulté à communiquer, les enfantséparpillés sont des problèmes que l’onretrouve chez les personnes âgées de cheznous mais sous d’autres formes». « Il fautprofiter des atouts de l’immigration pour

imaginer de nouvelles formes de prise encharge de la vieillesse en Belgique », furentdes opinions régulièrement entendues dansles travées de la salle de spectacle de l’abbayede Forest.

Adapter les institutions existantesLa balance entre le général et le particulier,entre l’universel et le culturel était résuméeen fin de journée par Thierry Verhelst,consultant en relations interculturelles quiintroduisit sa réflexion par une citationd’Aragon, «Vieillir c’est aborder une terreétrangère». Il nous rappelait ainsi l’univer-salité de la vieillesse... qui ne doit pas faireoublier les spécificités culturelles. « Si l’on estmigrant, la vieillesse, c’est aborder deux terresétrangères », asséna- t-il, avant d’ajouter, « lesacteurs de l’in- novation sociale sont devantun choix non résolu. Soit on crée desinstitutions spécialisées pour les populationsâgées immigrées soit on adapte lesinstitutions existantes. Le danger étant que sil’on insiste trop sur le culturel, on contribue àla ghettoïsation et si on fait trop dansl’universel, alors on verse dansl’ethnocentrisme.»

Créer de nouveaux services ou adapter lesservices existants, voilà bien une alternative «classique » à laquelle les intervenants ducolloque ont semblé préférer la secondesolution : intégrer du culturel dans lesservices.

Une multiplicité d’initiatives... troppeu connuesPremier acte de la prise en compte de cespersonnes âgées immigrées: l’écoute et lareconnaissance. A Convivial, on a montédepuis belle lurette des groupes de parole demamies et de papis d’Afrique centrale.Sosthène Rukundo se souvient : « Dans nosgroupes, on s’intéresse à ces gens et à leurfaçon de vivre. Nous essayons de ne pas êtreles professeurs.» En toute logique, pour bienmanier la parole, faciliter l’expression etl’autonomie, Convivial propose des coursd’alphabétisation à destination des personnesâgées immigrées. Une embellie dans un cielmorne où l’apprentissage de la langue est

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généralement conditionné à l’insertionsocioprofessionnelle.

Dans les groupes de Convivial, ça n’a pas étésimple, mais on a parlé de tout, sans tabou, dela mort et des funérailles et même desmaisons de repos. Ces dernières ont faitl’objet de visites. De ces groupes, plusieursréflexions sont nées : les aînés belges etétrangers partagent cet idéal de vieillir chezeux.Mais lorsque les enfants travaillent et qu’ilsdeviennent dépendants, il faut s’y faire, c’esten maison de repos qu’ils passeront leursvieux jours. Ils ont donc émis quelquesrecommandations: il faut pouvoir prendre ladécision d’aller en maison de repos avantd’être placé, l’Etat devrait prendre desmesures pour aider à choisir et payer lamaison de repos. Enfin, il serait intéressantd’adapter les structures à la diversitéculturelle et de favoriser l’accueil deplusieurs personnes d’une même culture.L’écoute est l’une des clés qu’agitent lesparticipants au colloque. Nathalie Thomas, duservice de santé mentale Méridien3, quianime des groupes de parole à la MaisonBiloba, insiste sur l’importance du travail dit «communautaire». Elle rassemble dans desgroupes de parole des personnes au vécusimilaire. Les personnes âgées peuvent ypuiser des solutions. Des rituels collectifs sontimaginés, le groupe devient une « famillesymbolique», nous dit Nathalie Thomas.

L’idée étant de travailler en réseau ens’appuyant sur les ressources disponibles ici,en Belgique. Dans ce même ordre d’idée, ondécouvre le projet de service «Sémaphore» àNamur. Il s’agira d’une clinique interculturellequi travaillera avec ceux qui ne peuventretourner. Le travail tournera aussi autour desrites, pour « mourir ici tout en étant soi-même».Des services qui tentent de proposer dessolutions appropriées au public des personnesâgées migrantes, il en existe. Mais ceux-cisont trop peu connus. Pour pallier cette sous-information, Corinne Malchair du Centre dedocumentation et de coordination sociale4,attire notre attention sur l’existence du site«bruxellessocial» qui répertorie toutes lesassociations psycho-médico-sociales.

Certains intervenants veulent construire cessolutions avec les personnes âgées. Cettedémarche de « co-construction » permettraau moins de leur offrir un peu dereconnaissance sociale. Sylvie Carbonellerésumait le propos ainsi : « La question est depouvoir construire un vivre ensemble et unvieillir ensemble.» .

Article publié à l’origine dans Alter echoS n°313 du3 Avril 2011Dossier complet disponible à l’adressehttp://www.alterechos.be/download/dossierList/20110713__ae_Migrants_ages.pdf

Regards sur le vieillir en immigration

Cette brochure, joliment illustrée, aborde la question duvieillissement chez les immigrés.

Téléchargeable gratuitement surhttp://www.questionsante.be/outils/vieillirimmigration.pdf

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Faut-il confier nos vieux àdes machines?

Par Charlotte Manguette, stagiaire COM

ans le film de Jack Schreier, « Robot & Frank », un fils débordé par les événements qui voit lamémoire et l’état de santé de son père se détériorer de jour en jour finit par lui offrir unrobot à tout faire. Une machine qui cuisine, nettoie, surveille le rythme cardiaque et,

surtout, divertit des personnes âgées solitaires : est-ce de la science-fiction où le futur proche ? Etsi on en venait à se servir de la technologie pour soigner nos vieux ?

A l’Innorobo, salon international de robotiqueà Lyon, l’université japonaise d’Osaka aprésenté en mars dernier Telenoïd. Ce robotayant la taille d’un enfant de deux ans et unvisage humain était l’attraction principale dusalon. Il fait des câlins et remplace la présencehumaine de la personne qui le contrôle àdistance par téléphone portable. Conçu à desfins de babysitting, Telenoïd pourraitégalement servir à tenir compagnie auxpersonnes âgées esseulées. Des robots pourprendre soin de nos ainés : l’idée estparticulièrement dérangeante et éthiquementdouteuse. Pourtant, les solutions innovanteset pratiques pour prendre soin de la partgrandissante de personnes âgées dans notresociété se laissent désirer. Que faire de nosainés lorsqu’on s’aperçoit qu’ils n’ont plus lacapacité de prendre soin d’eux-mêmes ?

Famille ou maison de repos ?Bien que les pratiques changent sensiblementselon les cultures, le choix entre lesdifférentes alternatives existantes est souventtrès difficile et reste une source de conflitsdans de nombreuses familles. Une étudefrançaise de l’Institut National d’ÉtudesDémographiques datant de l’an 2000 montreque, de manière générale, les pays du Nord del’Europe (Pays-Bas, Suède, Belgique) placentplus facilement les personnes âgées dans descentres spécialisées. Dans les pays du Sud(Portugal, Espagne Italie), il est moins rare devoir les familles prendre en charge leurs aînés.Héberger et prendre soin d’une personneâgée dans le cocon familial, serait-ce lameilleure solution ? Notre société est-ellesimplement devenue trop individualiste, trop

axée sur le progrès et l’avenir pour prendresoin de ses seniors ?

Il est cependant naïf de croire que cet accueilen famille est la solution idéale. En effet,conserver une vie sociale en dehors de lafamille reste important malgré un âge avancéet une personne âgée a besoin de plus decontacts humains que la présence de sesenfants pour être réellement épanouie. Leseuropéens du Nord auraient-ils donc vu justeen misant davantage sur les maisons deretraite ? Pas si sûr. On ne peut tout d’abordpas nier la résistance des principaux intéressésà l’idée d’être placés. Effrayés par lechangement et par l’idée de quitter leur chezsoi, les seniors redoutent le moment où leursenfants leurs proposeront de les installer dansun centre spécialisé. Par ailleurs, la perceptiondes maisons de repos par les générations plusjeunes est également une barrière au choixd’un lieu ou d’un traitement adapté. En plusd’avoir la sensation d’abandonner leursparents, les enfants ne peuvent souvents’empêcher de voir les centres spécialiséscomme des mouroirs où les personnes âgéessont assommées par l’ennui et lesmédicaments. Engager une aide-soignante àdomicile peut alors offrir une issue, mais lesservices à domicile coûtent chers et nechangent pas le fait que la personne devra sedébrouiller seule pendant la majeure partie desa journée.

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Le facteur humainConfier un senior aux soins d’un robot peut-ildès lors être une solution viable ? Au-delà desquestions éthiques, force est de constater queles robots ont déjà pénétrés les ménages d’ungrand nombre de familles. SelonThe New Scientist, plus d’unmillion de robots domestiquessont déjà employés à travers lemonde et la vente des machines atriplé en seulement un an. Jusqu’àrécemment, elles se limitaient àdes tâches mécaniques etrépétitives comme aspirer ounettoyer une piscine mais lesacquisitions qui ont le plusaugmentées sont celles derobots de divertissement… Et lesavancées technologiqueslaissent à penser que ceux-cideviendront bientôt beaucoupplus intelligents et autonomes. Des étudessont en cours pour développer les capacitésrelationnelles de ces engins, notamment leursfacultés à comprendre et à manifester desémotions… mais aussi celles à faire del’humour.

L’idée de confier son parent ou son aïeul(e)aux soins d’un robot paraît évidemmentinhumaine d’autant plus que les personnesâgées sont en général moins à l’aise avec lesnouvelles technologies que les plus jeunes. On

met d’ailleurs le doigt exactement sur cequ’un robot n’est pas : humain. Jusqu’oùpeut-on et surtout, jusqu’où veut-onléguer nos devoirs aux pincesmétalliques d’une machine ? Quelleplace est-on prêt à laisser à ces enginsdernier cri dans notre entourage ? Robot& Frank offre une réflexion tout endélicatesse sur ce sujet en s’interrogeantsur les liens qui unissent parents etenfants mais aussi sur le remplacement

des devoirs humains par des machineset sur la solitude du vieil âge. Parailleurs, en mettant un vieil hommesouffrant de pertes de mémoire(incarné par l’excellent Frank Langella)

au centre du récit, Jack Schreier nous rappelleque la vieillesse rattrape tout le monde tôt outard et qu’elle mérite d’être mise en lumièreplus souvent. .

Les seniors dans le cyberespaceEntre appropriation et rejetde Séraphin Alava et Nadège Moktar

D’abord réticents, les seniors ont progressivement construit des pratiques nouvelles d’appropriationdes outils. Les seniors souvent appelés les silver surfers ont conquis leurs places dans les réseauxsociaux et les communautés d’apprentissages en participant à l’émergence d’une offre spécifique decontenu pour leur public. Pourtant l’accroissement très important du nombre de seniors connectésne doit pas cacher l’existence d’une fracture numérique car nombre d’entre eux sont des “e-exclus”.

A travers une recherche conduite en 2009-2010 sur les seniors de Midi-Pyrénées, deux chercheursont tenté d’identifier les pratiques virtuelles des seniors retraités. Ils ont ensuite cherché à identifierles raisons de l’appropriation ou du rejet de ces usages en ligne des technologies numériques. Lespratiques virtuelles des plus âgés sont des signes de l’existence d’une raison pratique où les logiquesd’usages virtuels sont à replacer dans l’émergence de nouvelles formes virtuelles de vie chez lespersonnes âgées.

Cette enquête est consultable gratuitement : http://rechercheseducations.revues.org/1096

“Robot & Frank”de Jack Schreier,

Park Pictures, 2013, 89minutes

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Le vieux qui ne voulait pas fêter son anniversaireDans « Le vieux qui nevoulaient pas fêter sonanniversaire », Jonas Jonassonraconte les périples d’uncentenaire se retrouvant encavale avec une somme de 50millions de couronnes volée àun gang de motards.Accompagné d’une bande demarginaux excentriques, d’unberger allemand et d’uneéléphante appelée Sonja, ilentame un voyage à travers laSuède, fuyant d’un côté lapolice, de l’autre, des criminelsqui aimeraient récupérer ce quileur appartient.

Tout commence avec l’évasiond’Allan Karlsson de la maisonde retraite de Malmköping lejour de son centièmeanniversaire. Lassé des règlesstrictes qui encadrent sa viedans l’institution et n’ayantaucune envie de s’infliger lesformalités d’une fêted’anniversaire entre « vieux »,Allan se retrouve encharentaises dans le parterrede fleurs en bas de sa fenêtreavec l’intention d’aller boire uncoup. A partir de là s'engageune cavale loufoque etdésopilante qui le conduira àun voleur retraité et à unvendeur de hot-dogssurdiplômé. Le récit estponctué des souvenirs du vieuxAllan qui, étant né le 2 mai

1905, a vécu en personne laplupart des grandsbouleversements du vingtièmesiècle.

Jonas Jonasson a dédié sonœuvre à son grand-père ets’est inspiré d’un de sesdictons : Ceux qui ne saventraconter que la vérité neméritent pas qu’on les écoute.L’histoire que nous conteJonasson a beau être unefiction (où en tout cas uneréalité fortement retravailléepar son imaginaire et celui deson grand-père), elle véhiculeune image de la vieillessedynamique et espiègle, àl’opposé des clichés quidépeignent nos ainés commedes sages omniscients radotantsans cesse les mêmesanecdotes. En découle unesérie péripéties toutes plusrocambolesques les unes queles autres qui nous emportent,entre autres, à travers larévolution russe, les deuxguerres mondiales et la guerrefroide.

Avant de se faire la malle lecentenaire se fait la réflexionsuivante : Quand la vie joue lesprolongations, il faut biens’autoriser quelques caprices.Son parcours a beau être fictif,il a le mérite de rappelerqu’une personne âgée a assez

de vécu derrière elle pourpouvoir décider, tant qu’elleen est encore capable, decomment elle a envie de vivreses vieux jours. En plus d’êtreun véritable phénomène enSuède (l’ouvrage est en coursde traduction en dix-huitlangues et sera bientôt adaptéau cinéma) ? le livre de l’ancienjournaliste Jonas Jonasson estun récit de plus qui montreavec humour que la vieillessece n’est pas la mort et que ladernière ligne droite de sa viedevrait être croquée à pleindentier !

Eloge de la VieillesseVoici, réunis pour la première fois en un volume, les plus beaux textes des dernièresannées de Hermann Hesse. Son oeuvre d'écrivain accomplie, il se consacre désormais àl'ultime défi de sa longue vie d'écrivain : accepter avec grâce la vieillesse et l'approche dela mort. Souvenirs intimes, esquisses croquées sur le vif, petits poèmes en prose et envers, portraits (tel celui d'une vieille paysanne avec laquelle il aime bavarder),aphorismes, courts traités philosophiques, chaque page de ce recueil est à la fois grave etradieuse : « La vallée s'éveille, frissonnante dans le vent du matin, / Un petit bruit sec, leschâtaignes tombent à terre, / S'ouvrent avec un sourire dur et lumineux. Je ris aussi. »

« Eloge de la vieillesse » de Hermann Hesse, Livre de Poche, Biblio Roman, 2003,158p.

“Le vieux qui ne voulait pasfêter son anniversaire et se

fit la malle” de JonasJonasson, Presse de la

Cité, , 2012, 506 p.

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A l’agendaBalade urbaine + débatDES MURS QUI PARLENTVendredi 16 août

15h30 >17h30: balade à la découverte des graffiti de LLN18h: débatLouvain-la-Neuve

Qu'est-ce qu'un graffiti? Des interventions plastiques d'artistes dans la rue?Une pratique culturelle populaire ancestrale? Une incivilité? Accompagnéd’un artiste graffeur, nous allons apprendre quelques clés pour décrypter lessignatures délibérées, les drôles de personnages et autres lettrages quiornent nos murs. Et ce faisant, tenter de démonter le sentiment d’insécuritéqui découle de leur présence sur les murs.

Départ: gare de Louvain-la-Neuve à 15h30Prix Libre

Débat : « Graffiti : une liberté d’expression ? »

Une création graphique débridée s’affiche en toute liberté à travers la ville. En toute liberté? Voire… Larépression peut s’abattre durement sur leurs auteurs, les graffitis étant perçus comme révélateur d’uneinsécurité rampante. Quelle est dès lors la place de ce moyen d’expression dans l’espace public?A La petite maison du LacRêverie du Promeneur solitaire, 10 - 1348 Louvain-la-Neuve

Organisé en collaboration avec « Chez Zelle » et le CCBW

Des mots au pouvoirFaut-il laisser la parole à tous les partis politiques?

Rencontre/débat autour de la liberté d'expressionThéâtre de PocheLundi 14 octobre 2013 à 20hAvec, entre autres, Thomas Evrard, juristeModération : Benoît Feyt (Télé Bruxelles)

Entrée gratuite - Renseignements 02/649 17 27Enregistrement et diffusion différée par Radio campus 92,1 MHz- la radio de la Communauté de l'ULBUne initiative du Théâtre de Poche, la Ligue des droits de l'Homme et de Radio Campus

Ces activités sont organisées dans le cadre de « 7/24 :30 ! – Paroles Libres ! » -le cycle d’activités de sur la liberté d’expression de la Ligue des droits de l’Homme.Infos, programme complet et documentation : www.liguedh.be/72430

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Notes bibliographiques1 Statistiques Eurostat

2 Quelle politique de migration légale pour l'Union européenne? , Conférence du 26 Novembre 2010 de laPrésidence belge de l’UE co-organisée avec le Comité économique et social et le Réseau Académique Odysseus

3 Quelle politique de migration légale pour l'Union européenne? , Conférence du 26 Novembre 2010 de laPrésidence belge de l’UE co-organisée avec le Comité économique et social et le Réseau Académique Odysseus

4 Alsterman P., Pensions : faut-il relever l’âge de la retraite ?, Démocratie n°10, 15 mai 2010, bimensuel duMOC-CIEP

5 http://www.econosoc.be/?page=portrait&id=33

6 Palsterman P., Pensions : Quel avenir à long terme ?, Démocratie n°3, 1er février 09, bimensuel du MOC-CIEPvii http://www.mc.be/binaries/consommation_antidepresseur_maison_repos_tcm377-113796.pdf et donnéesnon publiées du service d’études de solidaris.be

8 Résolution 1 (adoptée à la 10ème séance plénière, le 12 avril 2002), Déclaration politique et Plan d’actioninternational de Madrid sur le vieillissement, 2002

9 OMS, http://www.who.int/violence_injury_prevention – aide-mémoire n°357

xPasqualina Perrig-Chiello, Frédéric Derbellay et Marilène Vuille, « La vieillesse et féminine – qui s’en soucie ?La recherche en études genre et en gérontologie entre autodéfinition disciplinaire et exigenceinterdisciplinaire » in Nouvelles questions féministes, vol. 23, n°1, Nouvelles questions féministes et ÉditionsAntipodes, Paris, 2004, p. 31-43

xi Louise Dulude, « Vieillesse, monde de femmes » in Santé mentale au Québec, vol. 5, n°2, Revue santémentale au Québec, 1980, p. 33-40

xii Sophie Cassagnes-Brouquet, « Caroline SCHUSTER-CORDONE, Le crépuscule du corps. Images de la vieillesseféminine », CLIO. Histoire, femmes et sociétés [Online], 31 | 2010, Online since 17 June 2010, connection on 24April 2013. URL : http://clio.revues.org/9729

xiii Pasqualina Perrig-Chiello, Frédéric Derbellay et Marilène Vuille, « La vieillesse et féminine – qui s’en soucie ?La recherche en études genre et en gérontologie entre autodéfinition disciplinaire et exigenceinterdisciplinaire » in Nouvelles questions féministes, vol. 23, n°1, Nouvelles questions féministes et ÉditionsAntipodes, Paris, 2004, p. 31-43

xiv Idem.

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