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Grande Loge Régulière de Belgique La Franc- Maçonnerie Traditionnelle et Régulière Consultez également notre site Internet : http://www.glrb.org Siège: rue Royale 265 / 1030 Bruxelles

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Grande Loge Régulière de Belgique

La Franc- Maçonnerie

Traditionnelle et Régulière

Consultez également notre site Internet : http://www.glrb.org

Siège: rue Royale 265 / 1030 Bruxelles

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AVANT-PROPOS

Le présent ouvrage s’adresse aux hommes «probes, libres et de bonnes mœurs, de réputation parfaite, gens d’honneur, loyaux et discrets» qui sont à la recherche d’une voie spirituelle que le monde moderne ne semble pas à même de leur offrir.

Il a pour but de les éclairer sur ce qu’est la Franc-Maçonnerie traditionnelle et régulière telle qu’elle existe à travers le monde et telle qu’elle est pratiquée en Belgique. Elle est porteuse d’un message fraternel qui, depuis des siècles, trouve un écho dans le cœur de millions d’hommes.

Mais bien d’autres ont, sans le savoir, de profondes affinités avec elle. Tous ceux qui, fut-ce obscurément, aspirent à une existence plus éclairée par l’esprit et à une quête personnelle, dégagée du poids des systèmes, ouverte sur autrui et sur le monde. Tous ceux aussi qui éprouvent le sentiment que leur recherche personnelle serait moins aléatoire si elle pouvait s’insérer dans une communauté fraternelle, dans un Ordre porteur d’un message initiatique.

Cet ouvrage voudrait montrer aux hommes de bonne volonté, en écartant des idées fausses, ce qu’est la Franc-Maçonnerie Régulière Traditionnelle.

En effet, la Franc-Maçonnerie en général apparaît pour beaucoup comme une société secrète vouée largement à la lutte contre l’influence des églises, et tout particulièrement de l’Eglise catholique romaine, une association inspiratrice de la libre pensée et d’un incessant combat anticlérical et antireligieux. Ou encore elle est considérée comme un redoutable groupe de pression, dont l’influence omniprésente dans le domaine politique et les rouages de l’Etat s’exercerait constamment dans le but de procurer aux Francs-Maçons de précieux appuis.

Image grossière, mais fort répandue, qui sans doute a eu pour effet d’attirer vers certaines formes dérivées de la Franc-Maçonnerie des

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opportunistes de tout genre, amateurs infantiles de secrets redoutables et obsédés de l’anticléricalisme.

Disons nettement, au risque de décevoir, que la Maçonnerie étant spirituelle et initiatique, ne propose aucune philosophie, aucune recette psychologique, aucun système, aucune option religieuse; elle ne dévoile aucun secret magique ou mystique, elle ne détient aucune clé mystérieuse de l’homme et du monde. Sa mission traditionnelle est de transmettre aux hommes qualifiés pour la recevoir, une influence spirituelle qui éveillera en eux un élan profond, une virtualité propre, encore informulée.

Elle offre ainsi une méthode de travail, une perspective de recherche personnelle accessible à tout homme capable de liberté d’esprit, d’engagement spirituel, de fraternité vivante. Celui qui souhaite donner à son existence une autre dimension le peut, dans un Ordre qui, dans ses pratiques rituelles à fonction symbolique, se veut à l’écart du monde profane et entend en ignorer les agitations et les idéologies.

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LA FRANC-MAÇONNERIE DANS LE MONDE

Dans tous les pays où le pouvoir politique protège, permet ou tolère leurs activités, les Francs-Maçons sont groupés en Loges, sous l’autorité d’un Maître de Loge ou «Vénérable Maître» élu pour une durée limitée. Les Loges sont groupées en Grandes Loges, généralement nationales.

Contrairement à une idée fausse assez largement répandue, il n’existe pas d’organisation centrale qui aurait autorité sur l’ensemble de la Franc-Maçonnerie dans le monde. Les structures de l’Ordre maçonnique étant nationales, il existe dans chaque pays une seule «Grande Loge», qui a sous son obédience exclusive toutes les loges de son territoire. Dans certains pays, comme les Etats-Unis par exemple, il existe une Grande Loge par Etat.

Les Grandes Loges, qui sont un peu plus d’une centaine, sont indépendantes, autonomes et souveraines. Chacune d’entre elles présente un caractère original, avec des particularités d’usages qui reflètent dans une certaine mesure la mentalité ambiante et les traditions locales. Mais toutes sont reliées entre elles par un consensus quant aux principes et à aux usages qui constituent l’indispensable base de la régularité maçonnique. Ces critères communs sont connus sous le nom anglais de «Landmarks», c’est-à-dire les bornes à ne pas dépasser sous peine de sortir du domaine de l’Ordre.

Les relations entre Grandes Loges s’établissent par des «re-connaissances» mutuelles. Ces rapports bilatéraux assurent efficacement la cohésion de l’Institution dans le monde, tout en affirmant la responsabilité de chacune de ses composantes.

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Même la Grande Loge Unie d’Angleterre, qui est la plus ancienne et la plus importante, avec ses quelque 600.000 membres, n’a pas d’autre action directe sur le plan international que celle d’accorder, refuser ou retirer sa «reconnaissance ». Mais le soin scrupuleux qu’elle met à respecter et à faire respecter les principes qu’elle a été la première à codifier, donne à ses décisions en ce domaine un poids et un prestige particuliers.

La Grande Loge Unie d’Angleterre reconnaît la Grande Loge Régulière de Belgique comme seule autorité maçonnique sur le territoire national. Notre obédience est également reconnue par la quasi totalité des Grandes Loges régulières réparties dans le monde.

Effectifs La Franc-Maçonnerie régulière comprend à peu près 5 millions . de membres. L’effectif total des obédiences irrégulières, dont les plus importantes sont le Grand Orient et la Grande Loge de France, -le Grand Orient et la Grande Loge de Belgique se situe entre 1 et 1,25 % de ce chiffre.

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APERÇU HISTORIQUE

I. Les origines

Il est malaisé de traiter avec précision de ces origines. En effet des habitudes séculaires de discrétion et de transmission strictement orale font que la masse disponible de documents sûrs est mince. D’autre part un attachement fondamental à la Tradition a mené au foisonnement des légendes et à l’élaboration d’une histoire largement mythique. C’est ainsi que certains textes, par exemple, font d’Adam le premier Maçon et identifient l’histoire de l’institution à celle de l’univers même, en adoptant la chronologie biblique, qui place la Création à 4.000 ans avant l’ère chrétienne. Cet état d’esprit a mené beaucoup de ceux qui se sont intéressés au problème à discerner malaisément entre l’histoire et la légende.

Si les Francs-Maçons entendent légitimement préserver avec soin le caractère symbolique de rituels qui font un large appel à mythes et légendes, l’histoire même de l’institution doit être démythifiée avec quelque rigueur. Il n’en est pas moins vrai que certaines filiations revendiquées par la Franc-Maçonnerie, même si elles sont historiquement douteuses, conservent une signification spirituelle et psychologique féconde. C’est qu’elles traduisent une volonté de se rattacher à une tradition qui est au cœur du patrimoine humain.

En réalité, si la préhistoire de l’Ordre est trop brumeuse pour les exigences de la critique historique, cette discipline peut être appliquée avec fruit aux événements des trois derniers siècles.

Il est indéniable que la Franc-Maçonnerie moderne se rattache aux corporations de maçons et tailleurs de pierre du Moyen-Âge, bâtisseurs des édifices religieux et civils de l’Occident. On sait en particulier des constructeurs de cathédrales gothiques qu’ils étaient groupés en loges. On les a appelé depuis «maçons opératifs». Ils se réclamaient de Saint-Jean.

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C’est dans les îles britanniques que doivent être retracés l’origine et le développement de l’Ordre Maçonnique, et c’est précisément à Londres que la Franc-Maçonnerie moderne ou «spéculative» émergea vers la fin du XVIIe siècle et s’établit au grand jour dans le premier quart du XVIIIe.

L’expression «free mason», traduite par «maçon libre» ou « franc-maçon», apparaît dès 1376, mais nous ignorons le sens exact qu’elle revêtait alors. Pour certains, le mot désigne un artisan exonéré des taxes et obligations féodales, par un privilège comparable à celui des «francs métiers» dans la France de la même époque. Pour d’autres, le «free mason» serait le «free stone mason», le maçon apte à travailler la pierre franche, de qualité supérieure et dont on faisait les parties les plus ouvragées de l’édifice, par opposition au «rough stone mason», ou maçon de pierre grossière, généralement utilisée pour le gros œuvre.

Ces maçons opératifs du Moyen-Âge britannique étaient, comme leurs homologues du continent, des ouvriers itinérants, voyageant d’un chantier à l’autre. Cette mobilité les distinguait des artisans sédentaires des villes et communes nouvelles et empêcha peut-être que leurs organisations professionnelles atteignissent le développement des Gildes urbaines.

Sur le chantier, les maçons se réunissaient dans la Loge, à la fois atelier et lieu de séjour, dont la première mention connue remonte à 1277. Ils y travaillaient sous la direction d’un maître d’œuvre, ou «Maître de la Loge». L’apprentissage était long et difficile. Il fallait jusqu’à sept ans pour que l’apprenti soit inscrit dans le registre de la Loge, autant pour qu’il devienne «fellow of the Craft», c’est-à-dire homme de métier accompli et maître de son art. Libre aussi de son sort. Car ayant alors reçu communication de certains «secrets» (essentiellement une légende relative au Temple de Salomon) il pouvait chercher du travail à travers le pays.

En Angleterre, les Loges possédaient un exemplaire manuscrit des règles du métier, les «Old Charges» ou «Anciens Devoirs»,

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qui étaient lus solennellement à certaines occasions. Ces «Anciens Devoirs» débutent par une invocation à la Trinité, se poursuivent par l’histoire légendaire de la Franc-Maçonnerie et se terminent par l’énumération de règles morales et professionnelles constituant une véritable éthique du métier. L’histoire légendaire décrit l’origine et le développement de l’architecture depuis les temps antédiluviens, avec une mention toute particulière pour le Temple de Salomon.

Deux cérémonies, la communication du «Mason’s Word» en Ecosse et la lecture des «Old Charges» en Angleterre, sont les seuls indices précis d’une activité rituelle dans les Loges de l’époque et seraient de ce fait la première ébauche des rituels d’aujourd’hui. De l’existence de cet embryon de message spirituel, il est légitime de déduire que dans ces groupes fermés d’hommes liés par la pratique quotidienne de leur métier, et par des secrets partagés, s’est développé rapidement le sentiment propre à toute société initiatique, celui d’une affection fraternelle liée au double devoir de s’améliorer (matériellement, techniquement et spirituellement) et d’aider ses compagnons à s’améliorer également. Rien d’autre en effet ne saurait expliquer la mutation qui allait s’opérer plus tard avec le phénomène de 1’« acceptation».

Aux XVIIe et XVIIIe siècles, la pratique du métier se modifia radicalement. La disparition des chantiers traditionnels (cathédrales, abbayes, châteaux, etc.) et le développement urbain contribuèrent à fixer les ouvriers dans les villes. Cette sédentarisation suscita l’apparition de véritables Gildes, puissantes et bien organisées, qui bientôt furent appelées à participer à la gestion communale. Ce fut le cas en particulier des maçons de Londres. Le rôle des vieilles loges opératives, dépassées par l’évolution sociale et économique, s’atténua rapidement. Dépouillées d’une grande partie de leur autorité sur l’exercice du métier, elles auraient été vouées à l’extinction si n’étaient venus s’y affilier des étrangers au métier, souvent cultivés, bourgeois aisés ou aristocrates. Ces francs-maçons «acceptés» sont connus dès la première moitié du XVIIe siècle. Leur nombre ne fit que croître jusqu’aux premières années du siècle

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suivant. Si nous n’avons aucun témoignage précis sur les motifs qui attiraient ces hommes dans des organisations ouvrières sur le déclin, nous pouvons penser qu’ils étaient mus par une conviction, ou du moins un espoir, celui de trouver dans les Loges, non quelque dextérité artisanale dont ils n’auraient eu que faire, mais un enrichissement de nature spirituelle. C’est la seule explication possible de ce phénomène qui a façonné le visage de la Franc-Maçonnerie moderne. Dans le courant du XVIIIe siècle, les Loges, naguère structures occasionnelles consacrées au contrôle du métier, aux secours mutuels et à la formation professionnelle, devinrent une fraternité visant à propager une spiritualité et une éthique diffuses, voilées par des symboles et illustrées par des légendes. Les outils du maçon, la pierre même qu’il travaillait, devinrent le support symbolique d’une réflexion métaphysique et morale.

Il s’agit d’une véritable révolution, d’une rupture quasi radicale avec le passé dont les conséquences furent immenses. Ces hommes nouveaux, les maçons acceptés, insufflèrent dans le cadre d’une institution venue des âges, les préoccupations morales, religieuses et philosophiques de leur temps.

De cette heureuse rencontre naquit la Franc-Maçonnerie moderne, qui vint officiellement au jour le 17 juin 1717, lorsque quatre loges de Londres se réunirent pour fonder «la Très Respectable Fraternité des Maçons Acceptés», appelée rapidement Grande Loge de Londres et de Westminster, puis Grande Loge d’Angleterre. Ses Constitutions furent publiées en 1723, sous la signature du Dr James Anderson, pasteur presbytérien. Elles sont surtout une compilation des «Old Charges» opératives. Mais, et il s’agit là d’une innovation par rapport à ces vieux documents dont nous avons vu le caractère purement chrétien, ces Constitutions affirment clairement le principe de tolérance religieuse, dans le respect de toutes les confessions.

La Franc-Maçonnerie connut dès lors un développement rapide en Grande-Bretagne, en Europe et en Amérique. Le XVIIIe siècle vit l’élaboration définitive des coutumes et des rituels aujourd’hui

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en vigueur dans les pays de langue anglaise, sans que soient modifiés en rien les principes fondamentaux de 1723 : croyance en Dieu, fraternité des hommes dans le respect des opinions et des convictions de chacun, respect des autorités civiles légitimes, refus de l’admission des femmes dans l’Ordre, abstention de toute intervention dans les domaines politique et religieux.

Sans doute faut-il insister sur l’importance historique de ce dernier principe, car c’est de sa mise en doute, puis de son abandon dans certains pays, qu’est née la franc-maçonnerie irrégulière, déviation radicale de l’institution originelle.

Les Francs-Maçons du début du XVIIIe siècle étaient très conscients du fait que leurs membres, réunis par une aspiration commune et une affection réciproque, se trouvaient divisés, ou au moins divergents, sur le double plan des idées religieuses et politiques. Religieuses d’abord: les Loges anglaises de 1723 comptaient des anglicans, des catholiques, des non-conformistes et aussi des déistes sans attaches confessionnelles, et elles étaient virtuellement ouvertes, de par leurs principes, aux autres groupes religieux qui allaient plus tard leur fournir des adhérents: israélites d’abord, puis musulmans, hindous, etc. Politiques ensuite, puisql1e les options conservatrices et libérales prenaient corps et que les prédominances successives des catholiques et des protestants avaient présenté, elles aussi, un problème politique.

Il avait dès l’abord été considéré comme vital, pour que les Frères puissent se réunir en paix au nom de tout ce qu’ils avaient en commun, que tout ce qui pouvait par ailleurs les diviser dans la cité fût tenu résolument en dehors des Loges.

C’est la stricte application au cours des siècles de ce principe pratique qui a assuré le développement harmonieux et paisible de la Franc-Maçonnerie dans le monde. Quelques exceptions, en pays «latins», ont confirmé par l’absurde l’excellence de la règle.

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II. La Franc-Maçonnerie sur le continent

Introduite à Paris dès 1726, la Franc-Maçonnerie se répandit dans tout le royaume, puis en Europe, et en particulier dans nos régions, alors Pays-Bas autrichiens.

Une première Grande Loge fut établie en France en 1738. Le Grand Orient de France se constitua en 1773 sous la présidence du duc de Chartres, futur Philippe-Egalité, et co-exista avec la Grande Loge jusqu’à la Révolution. Dès cette époque se dessina une certaine tendance de la Franc-Maçonnerie «latine» vers la discussion de sujets philosophiques et moraux, voire politiques. L’amour du verbe et le goût de la polémique firent que dans les Loges françaises on cultiva souvent le discours au détriment de la démarche initiatique.

Ces Loges furent d’abord le lieu d’une vie conviviale consacrée aux divertissements honnêtes de l’amitié, de l’éloquence et de la table. Elles jouèrent ainsi un rôle modeste dans la propagation des «Lumières », sans en être, il s’en faut de beaucoup, un agent important. Il est faux de voir dans leur action supposée la source ou une des sources de la Révolution française. Cette légende, née au XI Xe siècle dans l’imagination d’un auteur anti-maçonnique virulent, l’abbé Barruel, fut curieusement reprise plus tard par des membres du Grand Orient de France gagnés définitivement par la passion politique.

En réalité, par sa composition sociale, touchant les trois ordres de la société, la Franc-Maçonnerie n’aurait pu combattre la hiérarchie sociale traditionnelle sans provoquer sa propre désagrégation, et elle n’y a pas songé. De nombreux documents démontrent la neutralité de la Franc-Maçonnerie dans les événements révolutionnaires, et s’il y eut des maçons parmi les pourvoyeurs de la guillotine, il y en eut plus encore parmi ses victimes. Ces événements faillirent d’ailleurs, en France, être fatals à l’institution. En 1792 toutes les Loges étaient fermées et il a fallu la réaction thermidorienne pour que ce ne fût pas définitif.

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La période impériale marqua un tournant capital dans l’évolution de l’Ordre en France. Sous l’Empire en effet, il devint l’instrument docile du pouvoir. Les nobles et les ecclésiastiques de l’ancien Régime se virent remplacés par les fonctionnaires impériaux, les officiers de la Grande Armée, les notables de l’industrie et du commerce. Le Grand Orient de France, pouvoir régulateur et centralisé, devint un instrument de l’ordre politique.

La chute de l’Empire entraîna la disparition de cette symbiose et le déclin brutal d’une institution par trop liée au régime déchu. Mais cet éloignement du pouvoir fit naître parmi certains le désir de retrouver l’influence perdue et les conduisit à intervenir de façon de plus en plus manifeste dans la vie politique en tant que maçons. Cette évolution sonnait le glas de la Franc-Maçonnerie traditionnelle en France et annonçait l’apparition d’une institution transformée visant à propager dans le monde une doctrine de progrès social basée sur la fraternité humaine, le refus des croyances anciennes et la suprématie de la Raison. C’est ce qu’un auteur maçonnique, Jean Baylot, a appelé la «Voie Substituée».

Cette évolution fut largement aggravée par le conflit avec l’Eglise catholique. Celle-ci avait déjà condamné, dès 1738, une société qui recevait sans distinction des hommes de toutes confessions et faisait de la tolérance religieuse le premier de ses principes. Cette première condamnation n’avait guère eu de suites. Par contre ses réitérations multiples et virulentes, au cours du XIXe siècle, chassèrent des Loges la plupart des catholiques, qui s’y trouvaient en nombre. Elles devinrent un refuge pour ceux pour qui le combat contre l’Eglise finit par apparaître comme le devoir de tout homme épris de liberté.

Ces deux facteurs, nostalgie du pouvoir et refus de la suprématie romaine, furent déterminants et donnèrent à la maçonnerie continentale irrégulière le visage qu’on lui connaît encore. Sur le plan intérieur, la radicalisation des attitudes dans la seconde moitié du XIXe siècle conduisit à des réformes profondes de l’institution: suppression de l’interdiction des discussions politiques et religieuses en Loge, suppression de l’affirmation déiste et de toutes référence à

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Dieu dans les rituels, ouverture de la Franc-Maçonnerie aux femmes par la création d’une obédience mixte, le «Droit Humain» ...

Dans les pays latins le conflit entre catholiques et partisans de la laïcité eut pour conséquence, d’une part, l’adhésion de nombreux Francs-Maçons aux partis de centre gauche de ces pays - ils y exercèrent parfois une influence notable - d’autre part, la politisation des obédiences maçonniques. Les maçons de ces obédiences furent amenés à prendre position sur les problèmes du moment (éducation, laïcité, congrégations religieuses, influence du Vatican, etc.) et certains militèrent plus ou moins ouvertement en faveur de causes défendues par les partis opposés aux catholiques.

Aussi y eut-il une certaine osmose entre obédiences maçonniques et partis politiques (républicains et libéraux italiens, libéraux belges et surtout radicaux français). Depuis 1945, l’évolution politique, le rôle accru des syndicats, des partis de gauche et d’extrême gauche. ont bouleversé la situation antérieure. Le parti radical français a perdu presque toute son influence, le parti libéral belge a considérablement évolué. Mais les affinités politico maçonniques du passé ont laissé des traces dans la maçonnerie irrégulière.

En France par exemple le Grand Orient a gardé beaucoup d’intérêt pour la vie publique: témoins ses con vents consacrés le plus souvent à des questions politiques, sociales et économiques, dont les Loges ont préalablement été invitées à débattre. Il se croit parfois tenu de prendre position sur des problèmes généraux de société. De son côté, le Grand Orient de Belgique connaît parmi ses membres une survivance tenace d’un anti-catholicisme profondément enraciné, conditionnant souvent une aversion instinctive pour toute mention de la divinité.

III. Renaissance de la Franc-Maçonnerie traditionnelle

Cette évolution de la Franc-Maçonnerie française et belge au cours des XIXe et XXe siècles eut des conséquences dramatiques au sein de l’Ordre. En effet, la plupart des Grandes Loges étrangères

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rompirent toutes les relations avec ce qu’elles considéraient comme une insupportable dissidence. Refusant quant à elles toute ingérence politique, exigeant de leurs membres une croyance en Dieu et restant attachées aux anciennes coutumes héritées des Loges originelles, elles ne pouvaient que condamner cette déviation. Elles le firent sans équivoque dès la fin du XIXe siècle et n’ont jamais eu depuis de raisons de modifier leur position.

Ce schisme rejetait les maçonneries française et belge dans un isolement qu’elles acceptaient au bénéfice de leurs options idéo-logiques et politiques. Certains cependant ressentirent toujours douloureusement cet isolement, comprenant bien qu’il signifiait l’abandon de valeurs essentielles. Une réaction se dessina dès la fin du siècle dernier et prit progressivement quelque ampleur.

Quelques-uns voulurent faire revivre le contenu spirituel et le message initiatique du rituel maçonnique. Isolés, très minoritaires, leur action fut mal comprise et souvent mal reçue. A vrai dire ces tentatives, certes méritoires, mais trop souvent marquées par leur époque, n’étaient guère satisfaisantes. Certains comme Oswald Wirth voulurent expliquer rituels et symboles maçonniques par un recours à l’occultisme et à la spiritualité incertaine qui fleurissait en ce XIXe siècle finissant dans des arrière-boutiques littéraires. D’autres, comme Goblet d’Alviella en Belgique, tentèrent de replacer la maçonnerie dans la vaste fresque des religions humaines et de montrer qu’elle les contenait en les dépassant. Malheureusement les limites des connaissances de l’époque et surtout une interprétation toute extérieure du phénomène religieux conduisirent à des résultats parfois décevants.

Même imparfaite, cette volonté de redressement devait conduire à l’apparition de Loges refusant toute immixtion politique, et à la résurgence des vieilles règles maçonniques d’amour du prochain basé sur la croyance en Dieu, principe créateur.

En France, ce mouvement mena à l’établissement en 1913 de la «Grande Loge Indépendante et Régulière pour la France et les

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Colonies» par deux Loges, «Le Centre des Amis », de Paris et «L‘Anglaise» de Bordeaux. Cette obédience, devenue plus tard la «Grande Loge Nationale Française», compte actuellement plus de deux cents Loges. Reconnue universellement, elle connaît un succès croissant.

En Belgique, le réveil de la maçonnerie traditionnelle se fit en deux étapes. Malgré plusieurs tentatives faites entre les deux guerres et après 1945, le Grand Orient de Belgique ne put jamais renoncer à la tentation de l’extériorisation ni, en opposition avec les Landmarks de la Maçonnerie universelle, à accueillir des néophytes faisant profession d’athéisme.

Prenant acte de cette impuissance, cinq Loges créèrent en 1959 la «Grande Loge de Belgique », qui voulait renouer avec l’universalité. Elle adopta une Constitution qui satisfaisait, dans sa déclaration liminaire, aux principes de la régularité maçonnique. Sur la base de ces documents, la nouvelle Grande Loge fut reconnue par la quasi-unanimité des Grandes Loges du monde. Tout semblait donc parfait. Malheureusement il s’avéra au bout de quelques années que la Constitution était encore insuffisamment explicite, car bientôt se manifestèrent des manquements aux règles qui purent paraître d’abord bénins, mais qui prirent au cours des années un caractère plus aigu. Ces règles furent même mises en question par des dirigeants de l’obédience, certains d’entre eux vidant les principes de base de tout contenu réel. Désireux à la fois de conserver une caution internationale et de renouer des relations avec les irréguliers, et en particulier les Loges du Grand Orient de Belgique, des membres en nombre grandissant ne purent conserver une attitude nette sur les points fondamentaux que constituent l’affirmation de l’existence de l’Etre Suprême et l’abstention de relations maçonniques avec des obédiences non reconnues.

La conséquence de l’équivoque ainsi créée fut que la Grande Loge de Belgique perdit au printemps de 1979 la reconnaissance de plusieurs Grandes Loges et qu’il devint évident qu’elle allait inévitablement perdre la quasi totalité des autres.

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Une partie des maçons de la Grande Loge de Belgique entendirent réagir contre cet état de choses et, dès le 15 juin 1979, neuf Loges créèrent la Grande Loge Régulière de Belgique.

LA GRANDE LOGE REGULIERE DE BELGIQUE

La Constitution de l’obédience affirme avec une précision scrupuleuse les principes universels de régularité auxquels la Grande Loge Régulière entend se conformer.

Cette Constitution déclare entre autres:

1. La Franc-Maçonnerie affirme l’existence de Dieu, Etre Suprême qu’elle désigne sous le nom de Grand Architecte de l’Univers. Elle requiert de tous ses adeptes qu’ils admettent cette affirmation. Cette exigence est absolue et ne peut faire l’objet d’aucun compromis ni d’aucune restriction.

La Franc-Maçonnerie ne définit pas l’Etre Suprême et laisse à chacun la liberté absolue de le concevoir.

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3. Tout travail maçonnique se fait à la Gloire du Grand Architecte de l’Univers et en présence des trois grandes Lumières de la Franc-Maçonnerie: la Volume de la Loi Sacrée sous l’Equerre et le Compas, sur lesquels sont prêtés tous les serments et les obligations.

Ceci dit clairement et nettement quel est, en vertu même de son adhésion aux idéaux maçonniques traditionnels, le caractère de la Grande Loge Régulière.

Elle s’affirme pour l’essentiel comme initiatique, spiritualiste et dégagée des controverses du monde extérieur. Ceci implique, à l’exemple des grandes obédiences du monde, la référence expresse à la divinité, la recherche initiatique dans la voie de la spiritualité, l’interdiction de toute controverse politique ou religieuse en Loge, l’abstention de toute participation à des travaux maçonniques auxquels assisteraient des membres d’obédiences non reconnues par la Grande Loge Régulière, parce que n’adhérant pas à l’intégralité des principes de base.

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Attitude rigoureuse sans doute, mais qui est absolument indis-pensable pour rester dans la voie de l’authenticité traditionnelle.

En fonction même du caractère initiatique primordial de leurs activités, les maçons de la Grande Loge Régulière ne peuvent admettre à leurs travaux en, visiteurs, des maçons n’acceptant pas les «Landmarks» de la Franc- Maçonnerie régulière. Ces visiteurs ne sauraient en effet participer à ces travaux et en même temps s’en démarquer en contestant ses principes. Réciproquement, les membres de la Grande Loge Régulière s’interdisent de participer à des réunions de maçons non reconnus. C’est simplement la conséquence de l’importance attachée à l’Art Royal: une «Tenue» maçonnique n’est pas une réunion quelconque entre amis et connaissances; c’est un acte initiatique. Tout est simple si l’on ne perd jamais de vue la frontière entre l’univers de la Loge au travail et le monde extérieur. Chaque maçon a des amis précieux et des intimes qui ne sont pas maçons, et de même il a de l’affection et de l’estime pour bien des maçons non réguliers. Mais ces relations aussi étroites soient-elles trouvent leur cadre, leur expression et leur accomplissement ailleurs et en d’autres moments.

La tradition maçonnique n’admet à l’initiation que des hommes. Il n’y a là aucune misogynie, mais le strict respect d’anciens usages qui reflètent une vieille expérience initiatique, bien antérieure à la Franc-Maçonnerie, et qui tient compte des tensions et des problèmes psychologiques propres à des sociétés qui seraient à la fois mixtes et fermées. Il existe d’ailleurs des organisations maçonniques ouvertes aux femmes, et parfois exclusivement à elles. Elle sont dignes de considération, comme le sont d’autres obédiences irrégulières.

En 2008, la Grande Loge Régulière de Belgique compte quarante-sept Loges dans 10 provinces, dont dix dans la région bruxelloise.

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LA FRANC-MAÇONNERIE REGULIERE

VRAIS ET FAUX SECRETS

L’une des idées les plus courantes qu’on se fait de la Franc-Maçonnerie - et ce sans distinctions d’obédiences - c’est qu’il s’agit d’une société secrète. On attache à ce terme des significations diverses. La plus répandue est celle d’une organisation mystérieuse et occulte visant à exercer une influence secrète sur les événements politiques, l’ordre social, le pouvoir. C’est ainsi que l’on attribue à tort aux Francs-Maçons du XVIIIe siècle la paternité de la Révolution Française, et que l’on explique par une action cachée de la Maçonnerie nombre d’événements déplorables. Elle joue dans l’imaginaire de certains le rôle assigné par d’autres aux juifs et aux jésuites: conception mythique propre surtout à l’Europe continentale et qui a valu aux Francs-Maçons beaucoup d’ennemis et parfois de sanglantes persécutions. Autre acception populaire du secret maçonnique : les Loges seraient des nids d’intrigue; trafics d’influence, combines politiques de bas étage, affairisme. Elles seraient aussi des foyers d’immoralité et de subversion par leur enseignement secret et leur idéologie.

La vérité est plus simple et plus prosaïque, n’en déplaise aux esprits attirés par les explications les plus romanesques et les plus inquiétantes. La Franc-Maçonnerie traditionnelle et régulière n’a d’autre secret qu’un secret initiatique. Expressément, les consti-tutions maçonniques traditionnelles obligent les Maçons à une parfaite loyauté à l’égard de leur pays et de ses autorités légitimes. Du reste, la Franc-Maçonnerie régulière s’interdit tout engagement dans les problèmes et les conflits du siècle, toute prise de position sur quelque problème «profane» que ce soit. Elle est donc bien loin de songer à intervenir dans les luttes politiques, de manœuvrer pour renverser l’ordre social ou moral, encore moins de porter au pouvoir des hommes qui serviraient ses desseins. La Maçonnerie régulière se soucie uniquement de jouer de son mieux son rôle de société

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initiatique. Elle agit par son rituel, son symbolisme, sa spiritualité, sur les initiés qui sont incités à suivre la voie d’un progrès spirituel et moral proposé par l’initiation elle-même.

Aucun «secret» n’est révélé aux initiés, ni plan occulte de transformation de l’univers, ni enseignement théologique, ni clé mystique de l’homme et du monde. Ne détenant aucun secret de ce genre, la Franc-Maçonnerie serait bien incapable de le communiquer à ses membres. Pourtant elle a bien son Secret: celui de l’expérience maçonnique même. Encore est-il incommunicable, parce qu’il est inexprimable. Aucun livre, aucun récit, aucun rituel, aucun témoignage ne peut le livrer. Et ce parce que le message initiatique est reçu et vécu différemment par chacun et qu’il n’est susceptible d’aucune interprétation univoque, commune à tous.

Un texte de 1750 dit excellemment:

_ Le secret de la maçonnerie est inviolable par sa propre nature, puisque le maçon qui le sait ne le sait que pour l’avoir deviné. Il ne l’a appris de personne. Il l’a découvert à force d’aller en Loge, d’observer, de raisonner, de déduire. Lorsqu’il y est parvenu, il se garde bien de faire part de sa découverte à qui que ce soit, fut-ce son meilleur ami maçon puisqu’il n’a pas eu le talent de le pénétrer, il n’aura pas non plus celui d’en tirer parti en l’apprenant oralement. Ce secret sera donc toujours un secret.»

Chaque maçon vit le secret maçonnique dans le clair-obscur de sa conscience. Le voudrait-il qu’il ne pourrait le révéler, pas plus qu’il ne pourrait révéler son être profond, le mystère de sa personne, parce que les mots lui feraient défaut. Enfin la vie maçonnique est aussi un climat: la fraternité maçonnique crée un monde, un univers moral et affectif, incommunicable lui aussi. C’est ce que disait à sa manière, au XVIIIe siècle encore, une chanson:

« Pour le public un Franc-Maçon

Sera toujours un vrai problème

Qu’il ne pourra résoudre à fond

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Qu’en devenant Maçon lui-même.»

Pour être complet, il faut encore dire que la Franc-Maçonnerie, si elle n’est pas une société secrète, est bien une société fermée, exactement comme bien d’autres groupes humains qui se ferment à tous les non-membres. C’est aussi une société discrète: l’un des devoirs maçonniques est la discrétion sur ce qui se fait et se dit en Loge. Pourquoi? Pour cacher quelque complot? Non. Mais tout homme digne s’abstient d’étaler devant la foule des indifférents et des curieux ses pensées les plus intimes.

De plus, mais ceci tient essentiellement au contexte social de certains pays dont la Belgique, nombre de Francs-Maçons préfèrent que leur appartenance demeure ignorée. Dans un pays où les campagnes anti-maçonniques, les préjugés haineux à l’égard des Francs-Maçons ont déjà fait tant de victimes innocentes, il demeure nécessaire aux yeux de certains de ne pas faire état de leur appartenance.

UN ORDRE INITIATIQUE

La Franc-Maçonnerie est un ordre initiatique. Le terme «initiation» renvoie à une pratique universelle et plusieurs fois millénaire qui a fait l’objet de multiples analyses dont l’évocation est impossible ici. Il est cependant indispensable, sous peine de passer sous silence l’un des objectifs majeurs de la Franc-Maçonnerie, de tenter de rendre compte des buts de l’initiation telle qu’elle la pratique. Initier a évidemment plusieurs significations, d’ailleurs complémentaires. C’est avant tout «mettre en chemin », conduire à un nouveau départ. Initium novae vitae, «le commencement d’une vie nouvelle». On a vu que l’initiation maçonnique ne consiste pas, à proprement parler, en la communication d’un savoir. Elle vise bien davantage à appeler au travail sur soi-même l’homme qui est reçu dans l’Ordre. Le rite initiatique maçonnique, comme ceux de multiples cultures tradition-nelles dont il est une variante, vise, selon l’expression bien connue, à faire «mourir à lui-même» l’initié pour l’amener à une vie nouvelle.

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Le candidat est ainsi incité par le rite lui-même à se délivrer d’entraves psychologiques, idéologiques ou autres. Ainsi se dessine pour lui l’espoir d’une réalisation spirituelle.

Démarche spiritualiste évidemment que celle qui se propose ainsi, par les moyens de rites et de symboles, d’éveiller en chacun les forces qui y sont latentes. Initier, c’est donc dans ce sens proposer à un homme une aventure spirituelle, c’est l’engager à découvrir et à mettre en œuvre ses propres virtualités par un long travail intime dont le rite maçonnique sera le révélateur. On comprendra que l’initié a un long chemin à parcourir: aucun Maçon ne pense que le rite initiatique, malgré sa richesse symbolique et psychique, transforme d’un coup et comme par magie un être humain en lui donnant sur l’heure des vertus et des pouvoirs nouveaux. L’initiation se poursuit durant toute une vie, rituel et symbolisme continuant à inspirer chaque initié tant qu’il garde en lui le désir de se dépasser. Tout rituel unit la communauté qui le pratique, mais surtout il favorise en chacun un élan affectif tel qu’il mette en œuvre, avec la force de l’émotion, les ressorts de l’inconscient.

D’autre part le symbolisme joue un rôle capital dans le processus initiatique: avec ses multiples aspects (symbolisme de la construction issu de la tradition des maçons opératifs, symbolisme de la délivrance, de la quête du Sacré, du progrès éthique), il ne constitue pas un enseignement proprement dit mais une incitation à la méditation et à l’interprétation personnelles des symboles. Toutefois il n’est ni arbitraire, ni chaotique. Son lent déchiffrement conduit le Maçon à une approche de l’homme et du monde qui est comme l’image de sa condition. La marche vers la Lumière, la construction du Temple: autant de formules indéfinissables mais qui interpellent et orientent dans la même voie, et auxquelles chaque Maçon s’efforce de donner dans le secret de sa méditation, la signification la plus riche et la plus proche de son être profond. Qu’il suffise d’observer que le symbolisme maçonnique convie chacun à l’effort de construire en lui-même l’homme, non de le nier, d’aller vers la Lumière, non vers le néant, et d’œuvrer toujours à la fois en créateur

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et en artisan probe et persévérant. Ce symbolisme dit simplement -et c’est là son option spirituelle- que la Lumière EST et qu’il n’est pas de plus haute démarche pour l’homme que d’aller vers elle sur le chemin de l’initiation.

C’est dire que la Maçonnerie initiatique, visant aussi haut, ne saurait se proposer aucun objectif culturel, politique ou social. L’Ordre initiatique se place sur un tout autre terrain et montre le chemin d’une tout autre action.

Sans doute, pour beaucoup de nos contemporains que l’esprit du temps, les exigences de la vie professionnelle, poussent à privilégier précision, exactitude, rendement, une telle action peut paraître surannée, inutile, voire incompréhensible. Mais, et nombre de Maçons peuvent en témoigner qui ne sont ni des rêveurs, ni des mystiques, ni des naïfs, la Maçonnerie spiritualiste et initiatique leur apporte plus qu’ils n’auraient oser l’imaginer. Loin de les couper de la réalité, elle leur a permis de mieux y faire face, en hommes plus lucides, plus libres d’esprit, plus conscients de leur condition et de leurs virtualités.

La fidélité aux principes de la Franc-Maçonnerie régulière implique la reconnaissance de Dieu, Etre Suprême que la Franc-Maçonnerie appelle traditionnellement le «Grand Architecte de l’Univers». Les Grandes Loges régulières sont dans la logique de leurs objectifs initiatiques lorsqu’elles requièrent de leurs membres, avec la croyance en l’Etre Suprême, une option spirituelle dans un sens qui n’est ni défini, ni explicité: chacun se fait du Grand Architecte de l’Univers, c’est-à-dire de Dieu, une conception qui peut être purement personnelle ou même s’identifier à celle d’une religion.

Cette notion fondamentale de la Franc-Maçonnerie ne peut convenir à ceux qui se réclament du matérialisme et refusent toute approche du sacré, confondu le plus souvent dans leur esprit avec le dogmatisme, la théologie, les sectes et les églises. Mais si l’on se veut matérialiste et que l’on se fait de l’homme et de son rôle dans l’univers une conception inspirée de cette attitude mentale, il va de

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soi que l’on aurait tort de s’engager dans la maçonnerie traditionnelle, au centre de laquelle se place l’initiation conçue comme réalisation spirituelle. Il est évident aussi qu’une maçonnerie authentique ne peut avoir aucun dessein antireligieux. Elle garantit au contraire à ses membres la totale liberté de l’esprit en s’interdisant de définir Dieu et en laissant à chacun le devoir et le soin d’interpréter, de définir ou de ne pas définir ce qu’est pour lui le Grand Architecte de l’Univers. Ceci est de la plus élémentaire sagesse, puisque les vocables Dieu, Etre Suprême, Grand Architecte de l’Univers peuvent recouvrir les idées et les images les plus diverses sur la nature de la divinité: conceptions individuelles, parfois purement intuitives et rebelles à toute formulation, parfois au contraire axées sur une foi précise, engagée et vécue.

Ainsi peuvent œuvrer au sein de la Franc-Maçonnerie régulière tous les hommes de bonne volonté, pourvu qu’ils aient une conviction spirituelle, quelle qu’elle .soit. Certains peuvent regretter que la Franc-Maçonnerie traditionnelle détourne ainsi d’elle nombre d’hommes respectables, de bonne foi, et qui se réclament d’un idéal digne de respect. En fait, ces hommes ont choisi un autre mode de pensée, auquel correspond un autre genre de maçonnerie qui répond mieux à leurs idées, une maçonnerie attentive aux problèmes du monde extérieur et ne résistant pas toujours à la tentation de s’y engager, une maçonnerie aussi qui accueille indifféremment spiritualistes et matérialistes. Attitude compréhensible et en soi respectable, mais qui n’est pas celle de la Franc-Maçonnerie proprement dite. Car le mot «Maçonnerie» en est venu à désigner des organismes dont les objectifs diffèrent considérablement.

La Franc-Maçonnerie authentique n’est ni une religion, ni un substitut à la religion; elle n’a ni credo, ni révélation propre, ni dogmes, ni chefs spirituels. Elle ne propose pas non plus une mystique. D’autre part, elle n’entend nullement se substituer aux religions, ni aux églises. Son idéal serait que chacun de ses membres, grâce à son initiation, vive plus intensément, soit sa religion, soit sa recherche spirituelle personnelle.

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UNE SOCIETE APOLITIQUE

Nous l’avons vu, les obédiences maçonniques régulières s’interdisent toute action et toute prise de position dans les conflits, les controverses et les luttes politiques, confessionnelles ou autres du monde. Marquant leur volonté de se consacrer intégralement à leur tâche initiatique, elles refusent aussi de se prononcer sur des causes, des revendications, des protestations, si respectables soient-elles. Le danger de toute intervention de la Franc-Maçonnerie dans les affrontements du monde «profane» est multiple: les Maçons peuvent professer des opinions fort différentes sur les problèmes de la société dans laquelle ils vivent, et par conséquent ils ne pourraient admettre que leur Grande Loge prenne position sur ces problèmes en leur nom ou en celui d’une majorité d’entre eux. En se tenant à l’écart des conflits du siècle et en évitant ainsi des controverses au sein même des Loges, la Franc-Maçonnerie régulière se rend bien compte que toute déviation de cette ligne de conduite l’entraînerait très loin. Aurait-elle pris position une seule fois, fût-ce en faveur d’une cause éminemment respectable, qu’elle aurait créé un précédent et aurait été amenée ultérieurement à se poser sans cesse la question de savoir s’il lui faudrait à nouveau faire entendre sa voix, en quels termes et dans quelle perspective.

S’abstenant d’intervenir là où elle n’a que faire, la Franc-Maçonnerie traditionnelle se refuse à se joindre aux groupes d’actions, de pression, d’information de quelque nature qu’ils soient, aux partis politiques ou aux associations professionnelles ou confessionnelles dans leurs interventions dans la vie de la société.

La Franc-Maçonnerie n’attend rien du pouvoir, sinon la protection accordée à tous les citoyens dans un régime de liberté: droit de réunion et liberté de conscience qui sont des conditions de base de l’existence de toute organisation maçonnique.

Mais si la Franc-Maçonnerie régulière est apolitique, il va de soi que, hors de la Loge, elle n’exige rien de ses membres à cet égard: chacun d’eux peut s’engager dans toute action publique de son choix.

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A deux conditions: celle de demeurer dans la légalité (le terrorisme, par exemple, est incompatible avec l’éthique maçonnique), celle aussi de ne jamais agir en faisant état de sa qualité de Franc-Maçon. On exige donc de lui qu’il fasse lui-même, à tous moments, un net départ entre ses activités maçonniques et ses activités publiques. En Loge, il est un Franc-Maçon, rien de plus, rien de moins. Dans son parti, son syndicat professionnel, etc., il n’a pas à faire état de sa qualité maçonnique, ni à plus forte raison d’en tirer avantage. Du reste le rituel. le climat, l’esprit d’une Loge traditionnelle ne lui laissera aucun doute sur la coupure infranchissable qui doit séparer monde profane et monde maçonnique. Cela ne signifie pas, naturel-lement, que son action profane ne sera pas influencée dans une certaine mesure par sa formation maçonnique.

FRATERNITE ET TOLERANCE

La Franc-Maçonnerie sous toutes ses formes se réfère constamment à la fraternité. Ce terme est, comme on le sait, employé dans les contextes les plus divers et il convient d’en préciser l’acception.

Pour les Francs-Maçons réguliers, le terme «fraternité» implique d’abord que tous les hommes sont frères et qu’à ce titre, ils ont droit à notre respect et à notre aide. Mais la fraternité ainsi conçue ne se distingue pas d’autres notions générales (fraternité chrétienne, fraternité des armes, fraternité universelle de la Révolution Française). Pour les Maçons en général, la fraternité désigne aussi et surtout le lien privilégié qui unit les Maçons. Mais pour la Maçonnerie régulière, cette fraternité maçonnique est essentiellement de source initiatique: elle n’a pas son fondement dans une communauté d’opinions ou d’intérêts, encore moins dans quelque convention sociale qui ferait que les membres du groupe s’efforceraient de se conduire mieux avec leurs «frères» qu’avec ceux qui ne font pas partie de la société maçonnique. La fraternité trouve sa source dans le fait que chacun par l’initiation s’engage dans une voie commune de recherche et de progrès spirituel. Chacun ainsi

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se trouve uni aux autres Maçons par l’expérience partagée d’un symbolisme vécu et éprouvé, par le désir de tous de former une communauté initiatique. Par des voies souvent très différentes, ces Maçons vont vers la Lumière, c’est leur souci commun. Que sur cette base naissent et se développent des amitiés

personnelles très fortes, que les Maçons s’accordent à faire régner entre eux un climat de respect et d’affection réciproques, c’est évident. Mais la fraternité maçonnique est issue de l’initiation, elle en est une conséquence, elle n’est pas le simple résultat d’un désir commun de relations amicales.

Que peut signifier alors la tolérance? Ici aussi, la source est dans l’initiation: l’initié sait qu’au delà des idéologies, des opinions, des divergences de vues sur nombre de sujets, ses Frères cherchent comme lui, et comme lui se sont engagés sur le chemin de la Lumière. Ils ont appris à respecter sous des aspects bien divers la personne de leur Frère. Si les idées de celui-ci ne les satisfont pas, sa personne ne leur est pas moins chère. Il ne s’agit plus de cette tolérance suspecte qui ne trouve souvent sa source que dans l’acceptation sans joie de ce qu’on renonce à empêcher ou à combattre, mais d’une attitude positive, fondée sur le respect et la compréhension et qui découle simplement de la fraternité initiatique.

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COMMENT DEVIENT-ON FRANC- MAÇON

Dans la plupart des cas, les candidats sont présentés par des Maçons qui les connaissent déjà et estiment non seulement que leur appartenance à la Franc-Maçonnerie leur serait bénéfique, mais aussi qu’ils pourraient servir l’œuvre maçonnique par leurs qualités de cœur et d’esprit. D’autres hommes font spontanément acte de candidature, après avoir lu ou entendu des informations sur l’Ordre. Ils peuvent ne pas connaître de Maçons, ou ne sont pas sûrs d’en connaître, et ils s’adressent alors soit à une Loge dont ils connaissent l’adresse, soit à la Grande Loge elle-même.

Quand des «profanes» ont fait acte de candidature, la Loge saisie de leur demande prend contact avec eux et, selon les modalités prévues par son règlement, entame une procédure destinée à statuer sur leur requête.

Une fois initié, à quelles charges et obligations est-on astreint?

L’appartenance à une Loge implique quelques sacrifices financiers. Une cotisation est exigée. Elle est destinée à faire face aux dépenses matérielles occasionnées par la pratique de la Maçonnerie : locaux, charges diverses, frais en rapport avec l’organisation des séances. Cette cotisation est relativement modeste et varie selon les Loges. De plus la pratique maçonnique entraîne d’autres frais, comme la participation aux repas pris en commun. Mais l’appartenance à l’Ordre n’est nullement un privilège réservé aux riches et quiconque jouit d’une modeste aisance peut sans léser sa famille devenir Franc-Maçon.

Par contre, il est demandé aux membres des efforts plus importants à d’autres égards. La Franc-Maçonnerie n’est pas une société ordinaire, elle exige une participation active. Pour vivre pleinement la vie de la Loge, il faut être assidu aux réunions et séminaires qu’elle organise, il faut accepter des fonctions parfois absorbantes, il faut contribuer par son travail à la vie de l’Atelier.

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Certes, ces exigences ne peuvent nuire à la vie professionnelle et familiale, mais la Maçonnerie demande qu’on lui consacre du temps. En général de quinze à vingt «tenues» par an, à quoi s’ajoutent selon les Loges quelques séances particulières {séminaires, préparation des cérémonies, etc.>. Chacun sait bien que ceux qui n’ont pas le temps sont ceux qui ne veulent pas le prendre, et l’expérience de la vie courante montre abondamment que ce sont les hommes les plus occupés qui trouvent toujours le temps indispensable à ce qui les tient à cœur.

Qu’arrive-t-il si un initié désire quitter la Franc-Maçonnerie?

Tout simplement qu’ayant annoncé sa décision, il est dès lors considéré comme démissionnaire et rayé simplement de la liste des membres. Rien à voir avec la légende qui veut qu’il soit impossible de quitter la Maçonnerie sans encourir quelque ténébreuse vengeance ... Quelle société serait d’ailleurs assez absurde pour vouloir retenir en son sein des hommes qui y demeureraient contre leur gré?

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LE TRAVAIL MAÇONNIQUE

Les Maçons sont groupés dans des Loges où ils se transmettent graduellement l’enseignement initiatique au cours de réunions rituelles.

Cet enseignement opère par une méthode essentiellement symbolique dont les thèmes proviennent soit de certains passages bibliques, notamment de ceux qui ont trait à la construction du Temple de Salomon, soit de certains thèmes légendaires. Il fait appel à l’éventail des facultés d’intelligence, de raison, d’imagination, de cœur et d’intuition. Il n’a rien d’un enseignement dogmatique. Les réunions ont généralement lieu le soir, deux ou trois fois par mois, sauf pendant l’été. Outre l’enseignement initiatique, la Franc-Maçonnerie développe chez ses adeptes un sentiment de chaude fraternité, tous les membres se retrouvant sous le signe de la plus parfaite égalité quelle que soit leur situation sociale. C’est ainsi que la cérémonie d’affiliation du Roi d’Angleterre Georges VI dans la Loge écossaise de Balmoral fut présidée par le facteur du village, Vénérable de la Loge. La Franc-Maçonnerie ne reconnaît que les différences qui tiennent aux mérites personnels. Elle met en contact des hommes venus des horizons les plus divers.

En tant que Francs-Maçons, les membres de l’Ordre sont des bâtisseurs. Par la participation aux rituels, par la méditation, par le travail intérieur, ils construisent un Temple spirituel, ils se bâtissent eux-mêmes, plus éclairés, plus fraternels, plus soucieux du permanent que de l’éphémère, plus attentifs à l’essentiel qu’au contingent.

Les réunions rituelles sont souvent suivies d’un repas simple pris en commun. L’un des traits caractéristiques de la vie maçonnique est le contraste entre le rigueur et le recueillement des tenues, et l’atmosphère d’amitié, de détente et de gaieté qui règne après celles-ci.

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UNE MAÇONNERIE POUR LE TEMPS PRESENT

On est tenté sans doute de se demander quels peuvent être de nos

jours le rôle et l’avenir d’une institution qui d’une part se veut apolitique et, dans ses travaux, coupée du monde «profane », et d’autre part se réfère sans cesse à une Tradition apparemment imprécise, issue de temps révolus.

Si la Maçonnerie régulière ne se propose pas d’action dans le monde extérieur, les maçons, eux, y sont présents et il est normal et heureux que les ressources psychiques, morales et spirituelles acquises par la voie initiatique aient une répercussion sur l’ensemble de leur vie. Une véritable formation maçonnique change inévitablement l’optique et les perspectives de l’initié, elle l’amène à assumer davantage ses responsabilités, le renforce, le conforte, le rend plus lucide et plus fraternel.

L’homme d’aujourd’hui, dans la crise de l’esprit et les difficultés matérielles que doit affronter l’Occident, ressent indéniablement un malaise et une privation. La société dans laquelle il vit le prépare mal à agir et à réagir; le spectacle d’un déclin marqué par la mise en question de toutes les institutions et de toutes les valeurs, le désarroi de certains, l’expansion de fléaux sociaux qui se conjuguent pour mettre en péril, et l’édifice social, et la volonté de le transformer, conduisent la plupart à une morne résignation.

Dans ce monde en crise, la Franc-Maçonnerie, faisant appel à la personne, à l’individu authentique, et visant à réveiller en lui les forces de l’espoir et de la foi, a certes son rôle à jouer. Elle a plus que jamais sa raison d’être dans ces temps de solitude et d’uniformisation, en maintenant des communautés vivantes d’hommes unis par un effort commun et une confiance réciproque. Enfin, alors que tant de vénérables institutions s’interrogent et s’inquiètent, la Maçonnerie authentique peut éclairer et vivifier les hommes nombreux, pensons-nous, qui veulent croire encore que

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notre espèce a un destin cosmique et une œuvre à accomplir sur les chemins de l’Esprit.

Une telle action n’est ni nostalgique, ni passéiste. Elle répond au contraire à l’interrogation de l’homme d’aujourd’hui et de toujours en lui ouvrant un message vivant d’espoir et de fraternité, et la possibilité de mettre en œuvre ses ressources secrètes de foi, de courage et d’amour. Sans dogmatisme, sans préjugés, en dehors de toute idéologie, la Franc-Maçonnerie initiatique fait fond sur l’homme, sur son destin et sur sa quête du Sacré.

Retour à la Tradition? Assurément. Mais à la Tradition pensée et vécue comme perpétuel présent et donc comme avenir, à la Tradition dont le rôle est d’enraciner, d’inspirer, de mobiliser l’homme d’aujourd’hui à l’aube de temps difficiles et peut-être redoutables.

C’est pourquoi la Franc-Maçonnerie a confiance en ses destinées. Elle se sait ouverte, précisément par la clarté et l’ampleur de ses objectifs, à bien des hommes de bonne volonté. Ceux-ci doivent savoir que cette institution a été largement trahie par l’image qu’on a pu donner d’elle. En réalité elle est garante, par ses principes même, de leur liberté et de leur indépendance.

Un dernier mot: l’idéal maçonnique demeure, comme tous les idéaux, un objectif lointain. Une image souvent évoquée l’exprime bien, celle d’un Temple toujours inachevé. Les Francs-Maçons ont conscience d’être des hommes comme les autres, avec leurs faiblesses et leurs lacunes. Mais ce qu’ils ont trouvé dans la Loge est, aussi, ce qui les pousse irrésistiblement à se dépasser et s’approfondir. A travers tous les tâtonnements inséparables de la démarche humaine, les Francs-maçons de la Grande Loge Régulière de Belgique se veulent, et se savent, engagés sur le chemin de la Lumière. C’est leur vocation et leur espérance.

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DOCUMENTS

1 CONSTITUTION de la Grande Loge Régulière de Belgique

La GRANDE LOGE REGULIERE DE BELGIQUE adopte les principes et les règles traditionnelles suivantes:

1. La Franc-Maçonnerie affirme l’existence de Dieu, Etre Suprême qu’elle désigne sous le nom de Grand Architecte de l’Univers. Elle requiert de tous ses adeptes qu’ils admettent cette affirmation. Cette exigence est absolue et ne peut faire l’objet d’aucun compromis, ni d’aucune restriction. La Franc-Maçonnerie ne définit pas l’Etre Suprême et laisse à chacun la liberté de le concevoir.

2. La Franc-Maçonnerie est une association initiatique qui, par son enseignement symbolique, élève l’homme spirituellement et moralement et contribue ainsi au perfectionnement de l’humanité par la pratique d’un idéal de paix, d’amour et de fraternité. .

3. Tout travail maçonnique se fait « A La Gloire du Grand Architecte de l’Univers» et en présence des trois Grandes Lumières de la Franc-Maçonnerie: le Volume de la Loi Sacrée sous l’Equerre et le Compas, sur lesquels sont prêtés tous les serments et obligations.

4. L’initiation ne peut être conférée qu’à des hommes, âgés de vingt-et-un an au moins, reconnus comme étant probes, libres et de bonnes mœurs, de réputation parfaite, gens d’honneur, loyaux et discrets.

5. Les Francs-Maçons, s’interdisant de soutenir des actions

susceptibles de troubler la paix et l’ordre de la société, se sou-mettent aux lois du pays où ils ont la faculté de se réunir et servent loyalement leur patrie. Ils ne peuvent faire état de leur qualité de Franc-Maçon lorsqu’ils interviennent de quelque manière que ce soit dans les affaires publiques.

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6. Affirmant la liberté de conscience, la Franc-Maçonnerie requiert de tous ses adeptes le respect des opinions d’autrui. C’est pourquoi aucune discussion sur des questions politiques ou reli-gieuses n’est permise en Loge.

7. Les Francs-Maçons forment des groupements dépositaires de la

filiation initiatique qui portent le nom de Loges. Ces Loges, sous réserve des pouvoirs de la Grande Loge dont elles relèvent, sont autonomes et sont liées seulement par les principes ici énoncés.

8. La GRANDE LOGE REGULIERE DE BELGIQUE est une

organisation indépendante exerçant une autorité souveraine sur les Loges de son obédience. Elle ne reconnaît dans sa juridiction aucune autorité supérieure ou égale à la sienne sur les trois degrés symboliques (Apprenti, Compagnon et Maître).

9. La Grande Loge Régulière de Belgique n’entretient de relations

d’amitié qu’avec des obédiences qui professent les principes et les règles énoncées dans la présente Constitution. Elle se refuse à participer à des réunions nationales ou internationales qui admettraient des représentants ou des membres d’obédiences non reconnues par elle. Elle interdit à ses membres de participer à des travaux maçonniques dans de telles obédiences. Elle interdit également aux Loges d’admettre à leurs travaux les membres de ces obédiences. Elle peut sanctionner par la suspension ou l’expulsion les manquements à ses règles et principes.

10. La Grande Loge Régulière de Belgique respecte les anciens

Landmarks, usages et coutumes de la Franc-Maçonnerie.

La présente Constitution est intangible. Tout Règlement ou acte qui lui serait contraire sera nul de plein droit.

II

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2. BUTS ET RELATIONS DE LA FRANC-MAÇONNERIE

Le texte 1 AIMS AND RELATIONSHIP OF THE CRAFTI a été établi en 1949 par les Grandes Loges d’Angleterre, d’Irlande et d’Ecosse.

La Grande Loge Régulière de Belgique a déclaré son adhésion à la lettre et

à /’ es prit de ce document. La traduction qui suit est celle du texte publié

par la Grande Loge Unie d’Angleterre.

En août 1938, les Grandes Loges d’Angleterre, Irlande et Ecosse approuvèrent et publièrent chacune une déclaration identique, sauf pour le nom de la Grande Loge concernée. Cette déclaration, intitulée «Aims and Relationship of the Craft», était la suivante:

1. A plusieurs reprises la Grande Loge d’Angleterre a estimé désirable d’affirmer de façon précise les buts de la Franc-Maçonnerie telle qu’elle a été constamment pratiquée sous sa juridiction depuis le début de son existence en tant que corps organisé en 1717, et aussi de définir les principes gouvernant ses relations avec les autres Grandes Loges qui se trouvent en accord fraternel avec elle.

2. A la lueur d’observations reçues, et de déclarations récentes qui ont pu dénaturer ou obscurcir les buts véritables de la Franc-Maçonnerie, il paraît nécessaire de préciser à nouveau certains principes fondamentaux de l’Ordre.

3. La première condition d’admission dans, et d’appartenance à l’Ordre, est une croyance en l’Etre Suprême. Ceci est essentiel et n’admet aucun compromis.

4. La Bible, dénommée par les Francs-Maçons le Volume de la Loi Sacrée, est toujours ouverte dans les Loges. Tout candidat est requis de prendre son Obligation sur ce Livre ou sur le Volume qui est tenu par sa confession pour donner un caractère sacré à tout serment prêté sur lui.

5. Tout homme qui entre en Franc-Maçonnerie se voit dès le début interdire de soutenir tout acte qui puisse tendre à compromettre la paix et le bon ordre de la société; il doit se conformer à la loi de

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tout pays dans lequel il réside ou qui peut lui accorder protection, et il ne doit jamais faiblir dans son allégeance au Souverain de son pays natal.

6. Cependant que la Franc-Maçonnerie enseigne à chacun de ses membres le devoir de loyauté et de civisme, elle réserve à l’individu le droit d’avoir ses propres opinions quant aux affaires publiques. Mais il ne lui est pas permis, ni en Loge, ni dans quel-que circonstance que ce soit en faisant état de sa qualité de Franc-Maçon, de commenter ou d’avancer ses vues sur des questions théologiques ou politiques.

7. La Grande Loge a toujours et constamment refusé d’exprimer une opinion quelconque sur des questions de politique étrangère ou intérieure, se posant aussi bien dans le pays qu’à l’étranger, et elle ne permettra pas que son nom soit associé à une action quel-conque, aussi humanitaire qu’elle puisse paraître, qui compro-mette son inaltérable décision de rester en dehors de toute ques-tion affectant les relations entre gouvernements ou entre partis politiques, ou concernant des théories politiques antagonistes.

8. La Grande Loge est consciente du fait qu’il existe des Orga-nisations qui se disent Maçonniques et qui n’adhèrent pas à ces principes. Aussi longtemps que cela sera, la Grande Loge refusera absolument d’entretenir quelque relation que ce soit avec de telles organisations, ou de les considérer comme Maçonniques.

9. La Grande Loge est un corps souverain et indépendant pratiquant la Franc-Maçonnerie dans les trois Degrés exclusivement, et ce dans les limites définies dans sa Constitution comme «Pure Ancienne Maçonnerie». Elle ne reconnaît ni n’admet l’existence d’aucune autorité Maçonnique supérieure, quelle que soit la dénomination que se donne celle-ci.

10.A plus d’une occasion, la Grande Loge a refusé, et elle continuera de refuser, de participer à des Conférences avec de soi-disant Associations Internationales prétendant représenter la Franc-Maçonnerie, et qui admettent parmi leurs constituants des Corps n’adhérant pas strictement aux principes sur lesquels se fonde la Grande Loge. La Grande Loge n’admet pas cette prétention, et

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son point de vue ne saurait être représenté par une quelconque Association de ce genre.

11. Nul secret ne dissimule aucun des principes de base de la

Franc-Maçonnerie, dont plusieurs ont été exposés plus haut. La Grande Loge envisagera toujours la reconnaissance de celles des Grandes Loges qui professent et pratiquent, et peuvent montrer qu’elles ont constamment professé et pratiqué, ces principes immuablement établis, mais elle ne se laissera en aucun cas entraîner dans des discussions visant à une quelconque inter-prétation nouvelle de ces principes. Ils doivent être acceptés et pratiqués sincèrement et intégralement par ceux qui désirent être reconnus comme Francs-Maçons par la Grande Loge.

Il a été demandé à la Grande Loge d’Angleterre si elle s’en tenait toujours à cette déclaration, et en particulier en ce qui concerne le paragraphe 7. La Grande Loge d’Angleterre a répondu qu’elle s’en tenait à chaque mot de la déclaration et a depuis consulté sur leur opinion les Grandes Loges d’Irlande et d’Ecosse. Une conférence a réuni les trois Grandes Loges et toutes ont réaffirmé sans hésitation les termes de la déclaration de 1938; rien dans les circonstances présentes n’a été trouvé qui puisse motiver un retour sur cette attitude.

Si la Franc-Maçonnerie devait dévier de cette voie en exprimant une opinion sur des questions politiques ou théologiques, non seulement on ferait appel à elle dans l’avenir pour approuver ou dénoncer tout mouvement qui pourrait se produire, mais elle répandrait la semence de la discorde parmi ses membres.

Les trois Grandes Loges sont convaincues que c’est seulement par leur adhésion rigide à cette attitude que la Franc-Maçonnerie a survécu aux doctrines perpétuellement mouvantes du monde extérieur, et elles se voient obligées de déclarer solennellement leur complète désapprobation de toute action qui tendrait à permettre la moindre déviation des principes de base de la Franc-

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Maçonnerie. Leur ferme opinion est que si l’une d’elle se prêtait à une telle déviation, elle ne pourrait plus prétendre être fidèle aux Anciens Landmarks de l’Ordre et se condamnerait finalement à la désintégration.

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TABLE DES MATIERES

1. Avant-Propos 2

2. La Franc- Maçonnerie dans le monde 4

3. Aperçu historique 6

4. La Grande Loge Régulière de Belgique 16

5. La Franc-Maçonnerie régulière 18

Vrais et faux secrets

Un ordre initiatique

Une affirmation traditionnelle: Dieu, Grand Architecte de l’Univers

Une société apolitique

Fraternité et tolérance

6. Comment devient-on Franc-Maçon 27 7. Le travail maçonnique 29 8. Une Maçonnerie pour le temps présent 30 9. Documents 32

- Constitution de la Grande Loge Régulière de Belgique

- «Buts et Relations de la Franc-Maçonnerie»

2006