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LA DURÉE ET SES APPLICATIONS FINÉCO, vol. 7, N o 1, 1 er semestre 1997 1 LA DURÉE ET SES APPLICATIONS Iraj J. Fooladi (Dalhousie University) et Gordon S. Roberts (York University) 1 Résumé. Les auteurs font le point sur la nature et les applications de la durée. Ils montrent la diversité des applications tant au niveau du placement que dans la ges- tion du risque. Le but est avant tout pédagogique. La démarche s’appuie sur la nature de la durée (une mesure d’élasticité) et sur son potentiel en matière d’immu- nisation des portefeuilles. En plus des notions classiques, les auteurs présentent les nouvelles mesures de durée. Celles-ci n’exigent pas de supposer une structure ho- rizontale à taux unique oscillant et des flux prédéterminés. Elles s’accommodent de la structure entière des taux d’intérêt et de flux aléatoires tributaires de l’incertitude des taux eux-mêmes. Pour les obligations risquées, les auteurs soulignent qu’il y a lieu de modifier le calcul de leur durée du fait que la chronologie et le niveau des flux changent en cas de défaut. Quant à la gestion actifs: passifs, elle fait appel à la durée dite nette, ou différentielle, soit le facteur déterminant l’influence d’un chan- gement de taux sur l’avoir d’une entité. Les auteurs montrent aussi que la durée dif- férentielle peut servir à cerner la structure optimale des passifs d’un état. I. INTRODUCTION L’encours obligataire dépasse largement celui des actions. Or, la durée est la clé pour comprendre la relation rendement-risque des titres et des positions obli- gataires. D’où l’importance de faire le point à son sujet, et cela dans le sillage et en complément de la perspective historique que vient d’offrir Bierwag (1997) dans un document inédit. 1 Iraj Fooladi dirige la Chaire Mackay en finance du School of Business Administration, Dal- housie University, 6152 Coburg Road, N.S., Canada B3H 1Z5 (téléphone: 902-494-1843; fax: 902-494-1107; e-mail: [email protected]). Gordon Roberts occupe le poste (en- dossé par la Banque canadienne impériale de Commerce) de professeur en matière de ser- vices financiers du Schulich School of Business, York University, 4700 Keele, North-York, Ont., Canada, M3J 1P3 (téléphone: 416-736-2100, poste 77953; fax: 416-736-5687; e-mail: [email protected]). M. Fooladi est redevable au Fonds Mackay de Dalhousie pour son appui financier et à Christopher Ling pour son assistance. Les auteurs remercient le CRSH d’Ottawa pour son financement ainsi que la direction de Finéco pour ses suggestions utiles, voire ses ajouts judicieux, notamment l’encadré A et l’annexe.

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Page 1: LA DURÉE ET SES APPLICATIONS - École de gestion · La durée d’une obligation augmente avec l’échéance mais est plus courte que ... montrant comment la mesure peut servir

LA DURÉE ET SES APPLICATIONS

LA DURÉE ET SES APPLICATIONS

Iraj J. Fooladi (Dalhousie University)et

Gordon S. Roberts (York University)1

Résumé. Les auteurs font le point sur la nature et les applications de la durée. Ilsmontrent la diversité des applications tant au niveau du placement que dans la ges-tion du risque. Le but est avant tout pédagogique. La démarche s’appuie sur lanature de la durée (une mesure d’élasticité) et sur son potentiel en matière d’immu-nisation des portefeuilles. En plus des notions classiques, les auteurs présentent lesnouvelles mesures de durée. Celles-ci n’exigent pas de supposer une structure ho-rizontale à taux unique oscillant et des flux prédéterminés. Elles s’accommodent dela structure entière des taux d’intérêt et de flux aléatoires tributaires de l’incertitudedes taux eux-mêmes. Pour les obligations risquées, les auteurs soulignent qu’il y alieu de modifier le calcul de leur durée du fait que la chronologie et le niveau desflux changent en cas de défaut. Quant à la gestion actifs: passifs, elle fait appel à ladurée dite nette, ou différentielle, soit le facteur déterminant l’influence d’un chan-gement de taux sur l’avoir d’une entité. Les auteurs montrent aussi que la durée dif-férentielle peut servir à cerner la structure optimale des passifs d’un état.

I. INTRODUCTION

L’encours obligataire dépasse largement celui des actions. Or, la durée est laclé pour comprendre la relation rendement-risque des titres et des positions obli-gataires. D’où l’importance de faire le point à son sujet, et cela dans le sillage et encomplément de la perspective historique que vient d’offrir Bierwag (1997) dans undocument inédit.

1 Iraj Fooladi dirige la Chaire Mackay en finance du School of Business Administration, Dal-housie University, 6152 Coburg Road, N.S., Canada B3H 1Z5 (téléphone: 902-494-1843;fax: 902-494-1107; e-mail: [email protected]). Gordon Roberts occupe le poste (en-dossé par la Banque canadienne impériale de Commerce) de professeur en matière de ser-vices financiers du Schulich School of Business, York University, 4700 Keele, North-York,Ont., Canada, M3J 1P3 (téléphone: 416-736-2100, poste 77953; fax: 416-736-5687; e-mail:[email protected]). M. Fooladi est redevable au Fonds Mackay de Dalhousie pour sonappui financier et à Christopher Ling pour son assistance. Les auteurs remercient le CRSHd’Ottawa pour son financement ainsi que la direction de Finéco pour ses suggestions utiles,voire ses ajouts judicieux, notamment l’encadré A et l’annexe.

FINÉCO, vol. 7, No 1, 1er semestre 1997 1

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IRAJ J. FOOLADI ET GORDON S. ROBERTS

Rappelons que Macaulay (1938) en proposa le concept et l’application.Hicks (1939), Samuelson (1945) et Redington (1952) en furent les premiersadeptes. Ce n’est que depuis les travaux de Fisher et Weil (1971) sur l’immunisa-tion des portefeuilles face aux taux d’intérêt changeants que l’on recourt de plus enplus à la durée comme outil de gestion.

Ci-dessous, à la section II, nous rappelons d’abord la nature, les propriétés etla mesure de la durée. Puis, à la section III, nous en montrons l’application, oul’intégration, aux stratégies des négociateurs de titres, des portefeuillistes, des ma-nageurs de risque, etc., l’ampleur du recours à la durée au Canada étant fort visible.À la section IV, nous sortons du domaine déterministe pour aborder les difficultésd’application de la durée aux titres à options implicites et donc à flux incertainsparce que tributaires de l’incertitude même du taux d’escompte dans le marché.Nous résumons le tout et concluons à la section V.

II. NATURE, PROPRIÉTÉS ET MESURE DE LA DURÉE

Ayant constaté que les titres de même échéance peuvent avoir des profils derevenus très dissemblables, Macaulay (1938) inventa le concept de durée pour tra-duire avec cohérence leur persistance temporelle relative et il l’appliqua à la gestiondu bilan des compagnies d’assurance. La durée classique, à la Macaulay, traduit letemps effectif d’extinction des titres de dette. Chaque temps de versement, t, se voitpondérer par l’importance, ou le pourcentage, wt, de la dette P, que le versement,ou flux périodique Ft, représente. D’où, selon Macaulay, une durée, D, quis’exprime comme suit:

(1)

où r est le rendement, ou taux promis, du titre, ou encore, le taux d’actualisation deses flux conforme à son cours P.[Pour une mesure efficace des durées, voirl’annexe au présent article, la définition (1) étant lourde à appliquer].

La durée d’une obligation augmente avec l’échéance mais est plus courte quecelle-ci, sauf pour le cas de l’obligation sans coupons où durée et échéance se con-fondent. Le coupon influence aussi la durée: plus son niveau est élevé, plus lafraction remboursée avant l’échéance est grande. Le poids des coupons devientalors plus important, ce qui diminue d’autant celui de la remise finale. La duréereflète donc à la fois l’échéance et la chronologie des coupons.

D wt( )t Ft 1 r+( )t⁄[ ] P⁄{ }tt 1=

n

∑=t 1=

n

∑=

2 FINÉCO, vol. 7, No 1, 1er semestre 1997

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LA DURÉE ET SES APPLICATIONS

Dans les années 60, avant que la volatilité des taux d’intérêt augmente et queles services financiers soient informatisés, les analystes recouraient à des règlesboursières pour évaluer la volatilité. Aujourd’hui, ils utilisent la durée en la calcu-lant sous diverses hypothèses concernant les taux d’intérêt. Or, le calcul de la duréeclassique avec un seul et même taux implique que la structure des taux d’intérêt esthorizontale. Fisher et Weil (1971) ont défini la durée de façon plus générale, soiten fonction d’une courbe de taux plutôt que du seul taux promis r. D’où une duréeD ainsi exprimée:

(2)

où les symboles sont ceux de l’équation (1) sauf pour les taux à 1 an, r1, à 2 ans, r2,etc., auxquels on actualise les versements F1, F2, etc. Les auteurs ont innové enmontrant comment la mesure peut servir à immuniser un portefeuille obligataire.Leur innovation fut déterminante pour bien des stratégies, tant actives que passives,des portefeuillistes des années soixante-dix confrontés à une volatilité accrue destaux d’intérêt.2

Pour l’essentiel, la durée a deux propriétés applicables:

1. Il s’agit d’une mesure d’élasticité, donc de sensibilité du prix (P) d’un actif auchangement du facteur d’escompte (1+r) du marché. Cette propriété, démon-trée par Hicks (1939), peut servir dans les stratégies actives de gestion deportefeuilles obligataires et pour évaluer leur “valeur sous risque”, soit lechamp des pertes plausibles.3 Nous y revenons plus loin.

2. Elle a un pouvoir immunisant. Si l’on garde la durée égale à l’horizon de déten-tion, le rendement promis est assuré (ou “immunisé”).

2 Lire Bierwag (1987a, 1997) pour un rappel à ce sujet.3 NDLD: La valeur sous risque (VSR, ou VaR, Value-at-Risk) d’un titre ou portefeuille cor-

respond à l’étendue de sa perte de valeur, -∆P, envisageable à court terme avec une proba-bilité raisonnable. C’est un concept de gestion du risque très hot sur Wall Street. Parexemple, on peut estimer que la valeur d’un actif peut varier dans une fourchette de ± 600$ en une journée, avec une probabilité de, disons 90 %. Ici la VSR serait de - 600 $, soit lechamp des pertes plausibles allant de 0 à -1,64 écart type de la distribution centrée-réduitepertinente. Plus précisément, une perte dépassant 600 $ n’aurait que 5% de probabilité.

D wt( )t Ft 1 rt+( )t⁄[ ] P⁄{ }tt 1=

n

∑=t 1=

n

∑=

FINÉCO, vol. 7, No 1, 1er semestre 1997 3

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IRAJ J. FOOLADI ET GORDON S. ROBERTS

Durée et volatilité du prix

En analysant l’élasticité de la valeur d’une obligation, par rapport au facteurd’escompte, Hicks retrouva la mesure de durée de Macaulay. Comme cette élasti-cité correspond à du temps, il l’appela “temps moyen” de remboursement et montraque le prix relatif (ou le ratio des prix) de deux suites de flux ayant le même tempsmoyen ne change pas avec le taux d’escompte. Il attira l’attention sur une propriétécapitale de la durée: l’effet sur le prix, ∆P, lié à un petit changement, ∆r, du tauxpromis est proportionnel à la durée du titre. Hopewell et Kaufman (1973), en par-tant de l’expression d’élasticité concernée, soit:

, (3)

ont exprimé ∆P, pour un petit ∆r, comme suit:

. (4)

L’intuition est simple: si un titre a des rentrées plus tardives, et donc unedurée plus longue, alors toute variation du taux d’escompte influera davantage surle prix. Ici on suppose un taux d’intérêt unique, donc une structure horizontale destaux. Par ailleurs, le lien entre durée et volatilité trouve bien des applications.Sachant que les titres à longue durée sont très sensibles aux variations des tauxd’intérêt, le négociateur de titres va vouloir maximiser son gain en prenant positionlongue ou courte sur des titres de longue durée, et pareillement pour le manageurde risque recourant aux produits dérivés sensibles à la durée. Quant au porte-feuilliste obligataire ayant un horizon plus long, il voudra allonger (ou raccourcir)la durée de son portefeuille s’il s’attend à une baisse (ou hausse) des taux.

La valeur sous risque (VSR)

Les stratèges financiers soumettent leur entité à du risque de marché, celuid’une perte résultant d’un mouvement des taux contraire aux attentes. Par exemple,le négociateur en position courte accusera des pertes si les taux baissent; de mêmeen est-il du portefeuilliste qui a allongé la durée avant que ne survienne une haussedes taux. On établit l’exposition au risque de l’entité par une mesure de sa “valeursous risque” (VSR, ou VaR, “Value-at-Risk”) via l’équation (4) et diverses hypo-thèses. Par exemple, si l’entité, ayant une position nette (P) de 50 M $ avec duréede 5 ans, estime que le pire scénario plausible4 fera passer le taux d’intérêt de 10%

4 NDLD: Pour établir le pire scénario plausible, ici une hausse du taux d’intérêt de l’ordrede 0,5%, il faut fixer la probabilité, d’ordinaire mince (disons de 5%) que pire encore sur-vienne. Voir l’exemple au renvoi 3.

D dP P⁄( ) dr 1 r+( )⁄[ ]⁄–= ∆P P⁄( ) ∆r 1 r+( )⁄[ ]⁄–≈

∆P D ∆r 1 r+( )⁄[ ]P ou ∆P D ∆r( )P si ∆r1 r+----------- ∆r→–≈–≈

4 FINÉCO, vol. 7, No 1, 1er semestre 1997

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LA DURÉE ET SES APPLICATIONS

à 10,5% en une journée, alors la VSR, ou la pire perte plausible, se mesureraitgrossièrement alors par l’équation (4), soit:

M $.

Si cette VSR est acceptable selon les normes de l’entité, celle-ci ne fera rien. Dansle cas contraire, elle optera pour une stratégie de protection. Nous touchons ici àl’utilité des mesures de durée en matière de protection. Le lecteur trouvera uneample documentation sur la VSR auprès du courtier J.P. Morgan (1994). Il peutaussi consulter l’ouvrage canadien de Saunders et Thomas (1996), ou encore larevue Risk dont presque chaque numéro contient de courts articles sur les applica-tions de la VSR.

Durée et convexité: une complication

Comme on le voit dans l’encadré A (partie 1), les relations Prix:Taux (P:r) etln(P):ln(1+r) sont convexes, la pente négative décroissante de cette dernière égalantla durée, au signe près. Dès lors, l’effet d’une hausse (baisse) du taux, ∆r, établiavec l’équation (4) constitue une surestimation (sous-estimation), l’erreur augmen-tant avec l’importance du ∆r. Or, l’on observe fréquemment des macrovariationssubites, ou chocs importants, dans la suite des taux, ce qui rend inadéquates les esti-mations à partir du facteur de durée, selon l’équation (4). Selon les données del’encadré A, l’on trouve que l’erreur d’estimation est insignifiante si ∆r = 0,001%alors qu’elle s’avère de 6,05% si le taux subit un choc de ∆r = + 0,5%5. On y voitaussi que le facteur de durée baisse à mesure que le taux r augmente, car alors lesflux hâtifs gagnent en importance sur les flux tardifs, ceux-ci pesant moins dansl’équation de valeur.

Notons que la droite tangente à la relation ln(P):ln(1+r) ayant, au signe près,une pente égale à la durée [D = -d ln(P)/d ln(1+r)] au point (P:r) donnerait de par-faites estimations de ∆P si la durée était constante (Dr = D). La convexité dans lecontexte donné a cependant des effets heureux: si ∆r < 0, le titre gagne plus envaleur que ne le prédit l’équation (4); si ∆r > 0, il perd moins de valeur que prévu.

5 NDLD: Comme l’indique bien l’encadré A, l’actualisation à 4% des 28 coupons de 3 000 $et de la valeur terminale de 100 000 $ donne P = 83 336,9368 $; à 4,001%, P = 83 322,1967$, d’où ∆P = -14,7401 $ si ∆r = 0,001%. Selon l’équation (4), on trouve ∆P ~ -D[∆r/(1+r)]P= -18,40 (0,00001/1,04) 83336,9368 = -14,7442 $, soit une erreur de surestimation insigni-fiante. Toutefois, si r passe de 4,0% à 4,5% (∆r = 0,5%), alors ∆P = 76 385,69 - 83 336,94= -6 951,25 $, mais selon l’équation (4) on a : ∆P ~ -18,40 (0,005/1,04) 83 336,94 =-7372,11, soit une surestimation de la baisse égale à -420,86 $. La vraie baisse est moindred’autant, ce qui donne l’effet positif de la convexité (ici de 6,05%). La prédiction de l’effetde convexité à partir d’une estimation du coefficient de convexité est illustrée dans la partie2 de l’encadré A.

VSR ∆P D ∆r 1 r+( )⁄[ ]P 5 0 005, 1 10,⁄( )50–=–≈ ≈ 1 14,–=

FINÉCO, vol. 7, No 1, 1er semestre 1997 5

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IRAJ J. FOOLADI ET GORDON S. ROBERTS

ENCADRÉ A(NB: L’encadré A est pour l’essentiel un ajout de l’éditeur avec l’agrément des auteurs).

La durée et les relations (1) et (2)(1) Prix: Taux (P:r)(2) ln P: ln (1+r)

Illustration pour l’obligation standard promettant 28 (= n) versements semestrielsd’intérêts de 3 000 $ (= F), un taux semestriel effectif de r%, une valeur nominalede 100 000 $ (= V) remise à l’échéance, une valeur courante de:

P = (F/r) [1 - (1+r)-28] + V (1+r)-28

et une durée mesurable diversement, soit:

où w = Poids de V dans P = V(1+r)-n/P, (1-w) étant le poids des intérêts.

Notes:(1) On voit ci-dessus que les relations (1) et (2), soit P:r et ln P: ln (1+r), sont convexes.(2) Au point [P = 83 336,94: r = 4%], w = 100 000 (1,04)-28/83 336,94 = 0,4002 et la durée

égale D = (0,4002) 28+(0,5998) [1,04/0,04) -28/(1,0428 -1)] = 18,40. On peut vérifierqu’elle est bien égale à -[Pente de la relation ln P: ln(1+r)] au point concerné car, pour unemicrovariation allant de 4% à 4,001%, on a:-∆ln P/∆ln(1+r) = - [11,330470 - 11,330647]/[0,03923033 - 0,03922071] = 18,40 = D.

(3) L’annexe au présent article donne des formules efficaces pour calculer les durées desactifs sous toutes sortes d’hypothèses. Notez-y bien les équations générales (e) et (f).

r%

P$

ln P ln (1+r)%

DSemestres

1 148 632,89 11,909 0,995 21,06

2 121 281,27 11,706 1,980 20,22

4,000 83 336,94 11,330647 3,922071 18,397042

4,001 83 322,20 11,330470 3,923033 18,396096

4,500 76 385,69 11,243551 4,401689 17,920715

6 59 781,51 10,998 5,827 16,47

D Fluxt 1 r+( ) t– P⁄

t•

t t1=

tn

∑ w( )n 1 w–( ) 1 r+r

----------- n

1 r+( )n 1–----------------------------– d Pln

d 1 r+( )ln-------------------------–=+= =

dP P⁄dr 1 r+( )⁄-------------------------- = ∆– P P⁄

∆ 1 r+( ) 1 r+( )⁄----------------------------------------- = ∆– ln P

∆ 1 r+( )ln-------------------------- Pente de la

relation P: 1 r+( )lnln–=–=

Partie 1

83337

P

ln P0 4 r%

0 %

11,33

Relation (1

Relation (2)

ln (1+r)

Pente = -18,40= - D

ln (1,04)= 3,92%

6 FINÉCO, vol. 7, No 1, 1er semestre 1997

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LA DURÉE ET SES APPLICATIONS

ENCADRÉ A (Suite)

Illustration de l’immunisation d’un portefeuille

Hypothèse: Le portefeuille est constitué du titre obligataire étudié à la partie1. (SVP référer à celle-ci pour les données et calculs de base).

a) Le cas où le ∆r est petit (Microvariation)

Si le taux passe de 4% à 4,001% (∆r = +0,001%), et si la condition d’immunisationest respectée (Horizon de détention = Durée D = 18,40), alors les flux encaissés avant18,40 semestres seront réinvestis à 4,001% plutôt qu’à 4%, ce qui ajoutera, en fin de déten-tion, un revenu de:

En revanche, les flux postérieurs à l’horizon vaudront moins car ils seront actualisés à4,001% plutôt qu’à 4%, ce qui causera une perte en capital, ∆Cap, de:

.

D’où ∆Rev + ∆Cap = 7,47 - 7,47 = 0 $. L’immunisation est parfaite.b) Le cas où le ∆r n’est pas minime (Macrovariation ou choc: ∆r = 0,5%)

Si r passe à 4,5%, alors en substituant 0,045 à 0,04001 dans les deux calculs ci-haut,on a: ∆Rev = 3 843,55 et ∆Cap = -3 645,69. D’où: ∆Rev + ∆Cap = 197,86$. Ici l’effet deréinvestissement dépasse (d’environ 5%) l’effet de capital. L’égalité des effets tient pourles ∆r minimes. Avec un ∆r-choc, la durée change sensiblement et l’effet (positif) de con-vexité joue. Dans notre exemple, à r = 4% et r’ = 4,001%, on a: les durées D = 18,397042et D’ = 18,396096; le prix P = 83 337 $; une élasticité de la durée de niveau K = -(∂D/D)/[∂r/(1+r)] = -∂lnD/∂ln(1+r) = -ln (D’/D)/ln[(1+r’)/(1+r)] = 5,35; une convexité de niveauC = (1/P) (∂2P/∂r2) = (1+r)-2 D(D+K+1) = 420,91; et les prévisions suivantes advenant lechoc ∆r = 0,5%: (1) Durée à 4,5% = D+∆D = D + [ /(1+r)] ∆r = 18,397 - 0,473 =17,924 vs. 17,920 la vraie valeur; (2) avec expansion de Taylor, si ∆r = 0,5%, on a:

Prix

P + Effet de durée + Effet

de convexité = 83 337 - 7371 + 438 = 76 404 $, soit une très bonne prédiction du vrai P àr = 4,5%: 76 386$. Voir post-scriptum à l’annexe pour les liens entre K, D et C; lire aussiReilly et Brown (1997, chap. 16).

∆Rev 3000 1 04001,( )18 40, (1,04001)0 40,–0 04001,

---------------------------------------------------------------------------------- (1,04)18 40, (1,04)0 40,–0 04,

---------------------------------------------------------------– 7 47,+==

3000 1 04001,( )0 40, (1,04001) 9 60,––0 04001,

---------------------------------------------------------------------------------- (1,04)0 40, (1,04) 9 60,––0 04,

---------------------------------------------------------------–100 000

1 04001,( )9 6,----------------------------------- 100 000

1 04,( )9 6,--------------------------– 7 47,–=+

K D•–

P ∆P P ∂P ∂r⁄( )∆r 0 5 ∂2P ∂r2⁄( ) ∆r( )2 P 1 r+P

----------- ∂P ∂r

-------- P1 r+-----------

∆r+=,+ +=+=

12--- 1

P--- ∂2P

∂r2------------

P ∆r( )2 P D 1 r+( )⁄[ ]P∆r– 0 5 C P ∆χ( )• 2=,+=+

Partie 2

FINÉCO, vol. 7, No 1, 1er semestre 1997 7

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IRAJ J. FOOLADI ET GORDON S. ROBERTS

Tous les titres à flux prédéterminés sans options profitent de cette convexité ditepositive. Les titres à options sont traités plus loin.

Durée des perpétuités et billets à taux flottant

Avec un taux r dans le marché, la perpétuité à flux fixe C vaut P = C/r et sadurée égale D = (1+r)/r (voir l’annexe). Quant au billet envisagé ici, il est à longterme et son taux flotte d’ordinaire, à une prime près, en fonction d’un taux indi-ciaire à court terme (ex.: le taux sur les Bons plus x%, ou le taux LIBOR plus y%).Comme son taux change constamment, et pareillement pour son flux d’intérêts, sonprix P est insensible au taux d’intérêt (dP/dr = 0) et sa durée égale zéro selon l’équa-tion (3). (Il suffit de réaliser que Pt = Ct/rt = (P)(rt)/rt = P.). En pratique, le taux étantfixé tous les n mois plutôt qu’au quotidien, la durée de tels billets est de n mois,comme celle des bons du Trésor échéant dans n mois.

III. APPLICATIONS BIEN CONNUES: PROBLÈMES ET EFFI-CACITÉ

Durée et immunisation

L’immunisation tient à la propriété voulant qu’en gardant la durée du porte-feuille égale à l’horizon choisi, c’est-à-dire à la période restante de détention vou-lue, on s’assure du rendement attendu, pas plus, pas moins. Parce qu’elle n’exigepas qu’on prédise les taux futurs, l’immunisation est une stratégie passive, néan-moins fort utile en période de volatilité des taux.6

Après les premiers travaux de Macaulay (1938), Samuelson (1945) et Red-ington (1952) fondés sur l’hypothèse plus ou moins implicite d’une structurehorizontale des taux d’intérêt, Fisher et Weil (1971) ont souligné l’irréalisme d’unetelle structure. Ils lui ont substitué une courbe de taux continus évoluant aléatoire-ment par variations additives. Ils ont prouvé qu’un portefeuille d’obligations estimmunisé contre ces variations pour peu que sa durée demeure égale à sa périoderestante de détention.7

Bierwag (1987a, chap. 4) explique bien l’intuition derrière l’immunisation.Pour une période prédéterminée, le rendement qu’on obtiendra du portefeuille vadifférer du rendement attendu au départ à cause des variations du taux d’intérêt.Celles-ci vont faire en sorte que, sauf hasard, leurs effets contraires sur les deux

6 La discussion sur l’immunisation présuppose des titres sûrs (infaillibles) afin d’isoler l’effetlié au mouvement des taux d’intérêt des effets des autres risques.

7 Lire Bierwag (1997) pour bien retracer l’évolution de la recherche en immunisation.[NDLD: L’intérêt pour le lien Durée-Immunisation n’existe pas seulement en Amérique.En France, par exemple, l’intérêt est évident si l’on en juge par plusieurs articles s’y rap-portant, dont celui de Minguet (1997), dans l’Encyclopédie des marchés financiers.]

8 FINÉCO, vol. 7, No 1, 1er semestre 1997

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composantes du rendement réalisé [les intérêts accumulés au fil du réinvestis-sement des coupons et le gain (ou la perte) en capital final] ne vont pas s’annuler.L’effet dominant dépendra de la relation entre la durée du portefeuille et la périodede détention. Si la durée surpasse la période de détention, le gain (la perte) en ca-pital domine l’effet de réinvestissement. Alors, le rendement réalisé tombera sous(dépassera) le rendement attendu au départ si les taux d’intérêt montent (baissent).

Si la durée est moindre que la période de détention, l’effet de réinvestisse-ment dominera l’autre. Dans ce cas, le rendement réalisé tombera sous (dépassera)le taux promis si les taux d’intérêt baissent (montent). Si la durée égale constam-ment la période restante de détention, le portefeuille devient immunisé car les deuxeffets concernés s’annulent. Le rendement réalisé coïncidera alors avec le rende-ment promis.

On voit le jeu des effets concernés dans l’illustration de l’encadré A (partie2) où la détention est appariée à l’horizon de placement. Avec, par exemple, unehausse du taux d’intérêt (∆r), le premier effet produit des rentrées de réinvestisse-ment accrues parce que les coupons sont réinvestis à des taux plus élevés que prévu.Le deuxième effet est une perte en capital puisque l’obligation vaudra moins queprévu en fin de placement du fait du taux d’escompte plus élevé appliqué à ses fluxrestants. Les deux effets s’opposent. Ils s’égalent, ou presque, pour peu que la duréeD égale l’horizon de détention H et que la variation ∆r ne change pas trop D. Si ∆rest plus que minime, et change D sensiblement, alors, il faut rétablir l’égalité D =H en modifiant la composition du portefeuille. (Bien entendu, les effets sont en senscontraire s’il y a baisse du taux d’intérêt et s’annulent, ou presque, si D = H). Letableau 1 donne les conditions et résultats pour divers portefeuilles immunisés oupas. L’immunisation exige que la durée du portefeuille soit constamment appariéeà l’horizon de détention, son résultat net étant une valeur inchangée en fin dedétention.8

En comparant le portefeuille immunisé (Horizon = Durée) à celui ayant unhorizon de détention égale à l’échéance (Horizon > Durée), l’on voit que ce dernierne connaîtra pas de gain ou de perte en capital s’il subit une variation de tauxd’intérêt, car à l’échéance la valeur à encaisser est fixe. Comme le risque de réin-vestissement ne peut alors être compensé, le résultat net est incertain. Pourimmuniser le portefeuille, on peut ajouter une obligation valant P2, en proportion

8 Bierwag et Kaufman (1977) soutiennent que, pour le portefeuille à durée appariée, les deuxeffets liés au taux d’intérêt fluctuant s’annulent, sauf si le processus stochastique auquelobéirait le taux est incompatible avec les conditions d’équilibre, en lequel cas l’effet positifdominera l’effet négatif.

FINÉCO, vol. 7, No 1, 1er semestre 1997 9

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w2, avec durée D2 supérieure à l’horizon de placement telle que la durée pondéréedu portefeuille élargi p égale l’horizon de détention (la condition d’immunisation),comme dans l’équation (5) qui suit:

Dp = w1 D1 + w2 D2 (5)

où le poids du portefeuille initial valant P1 égale w1 = P1/(P1 + P2) et le poids del’ajout (1 - w1) = w2 = P2/(P1 + P2)

Quant aux obligations sans coupons ayant forcément une durée égale àl’échéance (le cas 2 du tableau 1), nonobstant les variations des taux d’intérêt, elleséchappent, d’une part, à l’effet, ou risque, de réinvestissement parce que justementsans coupons, et, d’autre part, à l’effet sur le capital dès que la détention prévue seconfond à l’échéance. Voilà donc une deuxième façon d’obtenir un portefeuilleimmunisé.

TABLEAU 1L’effet du mouvement des taux d’intérêt

sur les portefeuilles immunisés ou pas

NB: Horizon = Période restante de détention. Source partielle: Fooladi et Roberts (1989).

Avec Bierwag et Khang (1979), l’on voit d’après ce qui précède que l’immu-nisation est une stratégie maxmin: on maximise le rendement minimal obtenable

Cas Portefeuilleobligataire

Évolution du taux

Effet du réin-vestissement

Gain ou perte en capital

Résultat Portefeuille immunisé?

1Standard

avec Horizon = Durée

Monte

Baisse

Augmenté

Diminué

Perte

Gain

0

0Oui

2

Sans coupons avec

Horizon = Échéance =

Durée

Monte

Baisse

Inchangé

Inchangé

0

0

0

0Oui

3

Standard avec Horizon =

Échéance > Durée

Monte

Baisse

Augmenté

Diminué

0

0

Positif

NégatifNon

4Standard

avecHorizon <

Durée

Monte

Baisse

Augmenté

Diminué

Perte

Gain

Négatif

PositifNon

10 FINÉCO, vol. 7, No 1, 1er semestre 1997

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d’un portefeuille. Prisman (1986) va plus loin: pour qu’une stratégie de durée ma-ximise (ou situe au plus haut) la borne inférieure de la valeur terminale du porte-feuille, certaines conditions doivent s’appliquer aux obligations.

L’immunisation conditionnelle

Puisque les portefeuillistes recourent à la durée dans leur gestion purementpassive ou active, la mesure s’utilise aussi en gestion “mixte” selon laquelle oncherche à dépasser le rendement assuré par l’immunisation pour l’horizon convenu,tout en tentant de limiter la perte possible liée aux variations imprévues du tauxd’intérêt. Dans cette immunisation dite conditionnelle, on fixe un rendement mini-mal acceptable en bas du taux que promet l’immunisation ordinaire et on s’activeà dépasser le taux promis. La gestion active ne s’arrête que si, par erreur de prévi-sion, la valeur du portefeuille tombe au point de rendement minimal acceptable. Là,on passe à la stratégie passive d’immunisation.9

Processus stochastique et difficulté d’immunisation

Dans l’équation (1) de la durée selon Macaulay, le taux promis usuel10 sertd’unique taux ponctuel d’actualisation pour tous les flux obligataires concernés.Implicitement donc, le calcul de Macaulay présuppose un processus qui génère unestructure horizontale de taux à oscillations aléatoires verticales. Un processus dif-férent donnerait des durées différentes (Bierwag, 1977; Bierwag, Kaufman etToevs, 1982a). Dès lors que le vrai processus diffère du processus postulé, lamesure de durée obtenue mésestime la sensibilité du portefeuille (ou son risque)face aux taux d’intérêt changeants. Alors, l’immunisation n’est pas obtenue car lavraie durée va différer de l’horizon de placement. C’est la complication, ou le ris-que, lié au processus stochastique, soit un sujet que Bierwag, Kaufman et Toevs(1983a), parmi tant d’autres, ont déjà étudié. Il s’avère donc que, en dépit de lanature passive de l’immunisation, il conviendrait néanmoins de prédire l’évolutiondes taux.

Pour minimiser le risque de processus, Fong et Vasicek (1983, 1984) ont pro-posé la mesure de risque dite du M-carré.11 Ils estiment, d’une part, qu’un porte-feuille à durée appariée et à M-carré minimal a un risque de processus minimal et,

9 Lire Bierwag (1987a) et Leibowitz et Weinberger (1981, 1982, 1983) pour plus de connais-sances sur l’immunisation conditionnelle.

10 NDLD: Par taux promis usuel, entendre le taux qu’une obligation va rapporter si détenue àéchéance et si ses coupons sont réinvestis au même taux. Cela revient au taux d’actualisa-tion qui donne une valeur actualisée (nette du cours de l’obligation) de zéro.

11 M2 = Σ(t - H)2 wt où H = Horizon de placement et les wt sont selon l’équation (1).

FINÉCO, vol. 7, No 1, 1er semestre 1997 11

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d’autre part, qu’un portefeuille “concentré” (c’est-à-dire dont les durées des obli-gations le composant se concentrent autour de la durée-cible) minimise le M-carréet donc le risque de processus.12 Quant à Bierwag, Fooladi et Roberts (1993), ilsont montré qu’en minimisant le M-carré, on minimise le risque pour un processusdonné, pas pour les autres. Pour ce qui est du portefeuille à durée appariée et mixd’échéances contraint ayant servi aux recherches de Bierwag, Kaufman et Latta(1987) et de Fooladi et Roberts (1992), ils estiment qu’il s’écarte moins du tauxpromis que le portefeuille à M-carré minimal13. Plus tôt, Prisman et Shores (1988)avaient montré que le M-carré ne mesure pas bien le risque pour certains processusstochastiques.

En s’appuyant sur Cox, Ingersoll et Ross (1979) qui ont lié durée et immuni-sation en régime continu d’équilibre général sous menace d’arbitrage, la critiquepeut être faite que les modèles classiques de durée en temps discret à la Macaulaysont moins applicables que les modèles continus. En fait, la question est irrésolueet les deux types de modèles ne se déclassent pas mutuellement.

Une autre critique du même genre, celle d’Ingersoll, Skelton et Weil (1978),veut que le processus stochastique postulé derrière les modèles de durée à facteurunique soit inconciliable avec un équilibre puisqu’une source d’arbitrage rentablesubsiste: la convexité du rendement de détention14 par rapport aux variations dutaux d’intérêt r. La valeur totale, tout comme le rendement de détention, seraientdonc fonction convexe des variations de taux avec valeur minimale au point dedépart (où r = ro; voir figure 1). Avec des chocs importants dans les taux d’intérêtet des obligations à gros coupons, l’arbitrage sans risque devient possible pourl’investisseur qui placerait le produit de ventes à découvert d’obligations sans cou-pons (à rendement ro) dans d’autres portefeuilles obligataires.

Toutefois, même si l’argument qui précède tenait, il n’enlève rien à la vali-dité des stratégies d’immunisation. Bierwag, Kaufman et Toevs (1982a) ont pro-posé un processus stochastique additif compatible avec un équilibre général et pourlequel le rendement de détention n'est pas une fonction strictement convexe des

12 NDLD: Rappelons que “à durée appariée” signifie “à durée estimative égale à la périoderestante de détention”. Également, que portefeuille “concentré” s’exprime, en américain,par “bullet portfolio”.

13 NDLD: Par “portefeuille à durée appariée et mix d’échéances contraint” entendre un porte-feuille à immunisation apparente classique dont la durée égale l’horizon de détention et dontl’une des obligations a cet horizon comme échéance. Son appellation anglaise est floue: thematurity-constrained duration matched portfolio.

14 NDLD: Par rendement de détention, entendre le rendement réalisable pour une période dedétention donnée. En anglais: holding period return.

12 FINÉCO, vol. 7, No 1, 1er semestre 1997

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variations de taux d’intérêt. De plus, Bierwag (1987b) a montré qu’il n’existe pasune correspondance une-à-une entre une mesure de durée donnée et son processussous-jacent. Les durées issues de divers processus de déséquilibre (avancés parFisher-Weil, Khang, Bierwag, etc.) sont dérivables à partir de processus d’équili-bre, comme Bierwag et Roberts (1990) l’ont illustré pour trois cas.

Par ailleurs, l’argument d’arbitrage, par définition sans risque, n’emporte pasl’adhésion des praticiens. Ils connaissent les difficultés liées aux positions courtesimportantes en obligations. Ils s’inquiètent des déplacements non parallèles de lacourbe des taux d’intérêt qui compromettent l’immunisation fondée sur la durée àla Macaulay.

FIGURE 1Valeur d’un fonds immunisé et taux d’intérêt

Au total, les derniers modèles de durée s’accommodent de courbes de taux etde leurs déplacements non parallèles15, voire de déplacements en direction opposéepour les courbes partielles du court et du long terme, via des modèles multifacto-riels dont la problématique a été cernée par Bierwag (1987a, 1997).

L’efficacité des stratégies de durée

Quelle est l’efficacité des stratégies fondées sur la durée classique à laMacaulay? D’abord, Bierwag et Roberts (1990) ont vérifié la validité de l’implica-tion de base voulant que les portefeuilles à durée supérieure soient plus sensiblesau mouvement des taux, ou plus volatils dans leur prix. Pour chacun d’un ensemble

15 Les exemples sont puisables in Bierwag, Kaufman et Toevs (1983b), Bierwag, Kaufman etLatta (1987), Bierwag, Fooladi et Roberts (1993).

Composantes

ro

Tauxd’intérêtr

Taux initial

ValeurtotaleMinimum

FINÉCO, vol. 7, No 1, 1er semestre 1997 13

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canadien de portefeuilles obligataires d’État ayant une durée constante particulière,ils ont établi la suite de leurs rendements mensuels réalisés sur la période 1963-1986 pour trouver, comme prédit, qu’à durée supérieure correspondait volatilitésupérieure, quelque 80% de la volatilité s’expliquant par la durée à la Macaulay.

Ensuite, Fooladi et Roberts (1992) ont évalué l’efficacité de l’immunisationpour la même période: 1) en partant des prix observés pour les obligations d’État;2) en fixant la détention au départ à 5 ans; 3) en rééquilibrant les portefeuilles obli-gataires tous les 6 mois pour que leur durée égale la période de détention restante;et 4) en comparant leur performance au rendement de référence inhérent à la déten-tion d’une obligation d’État ayant au départ 5 ans d’échéance, celle-ci diminuanten parallèle avec la période restante de détention des obligations à valeur protégée.Leur test révèle que, à cause du risque de processus, la meilleure stratégie n’a pasle rendement exact attendu de l’immunisation au départ, mais celui qui en est, engénéral, le plus près, en plus ou en moins. Ils ont donc pu établir que l’immunisa-tion classique était efficace du fait qu’il permettait des rendements protégéssupérieurs aux rendements des portefeuilles non ainsi protégés et que le recours àla durée de Macaulay comme moyen de cerner le risque et d’immuniser les porte-feuilles obligataires était bien fondé. Leurs résultats s’accorderaient d’ailleurs àdivers résultats connus pour des obligations du Trésor américain (Bierwag, Kauf-man, Schweitzer et Toevs, 1981; Bierwag, Kaufman et Toevs, 1982b).

Toutefois, les résultats d’Ingersoll (1983) sont dissonants et mettent en doutel’efficacité de l’immunisation via durée. Selon Bierwag (1987a) cependant, ilsseraient douteux eux-mêmes de par la méthode problématique utilisée par Ingersollpour estimer la structure des taux. Une critique plus citée, celle de Gultekin etRogalski (1984), veut que le pourcentage de variation du prix établi avec le facteurunique de durée D, soit , ne reflète pas mieux le vrairendement obligataire que les modèles concurrents, multifactoriels ou autres.Cependant, leur preuve est rejetée par Bierwag, Kaufman, Latta et Roberts (1987)et Bierwag (1987a) sur le plan tant théorique qu’empirique: le changement serait une mesure erronée du rendement mensuel réalisé et les conditions de testsvalides n’ont pas été réunies.

Au total, la conclusion s’impose que les stratégies à base de durée classique,ou de variantes plus raffinées, offrent un bon niveau d’immunisation, donc une pro-tection relativement efficace contre les effets du mouvement des taux d’intérêt.

∆P P D–= ∆r 1 r+( )⁄[ ]⁄

∆P P⁄

14 FINÉCO, vol. 7, No 1, 1er semestre 1997

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Durée et contrats à termes (CAT)

Pour protéger une position dans le marché, on peut se servir de CAT selondes ratios dictés par les durées concernées. Par exemple, on peut acheter pour Vaben acceptations bancaires (de durée Dab) et vendre pour Vcat en CAT (de duréeDcat) rédigés sur ces acceptations, pour obtenir un portefeuille protégé, p, dont ladurée égale:

(6)

où Vcat = h C, la valeur d’un CAT étant C, et le ratio dit de protection étant h et tel,selon Bierwag (1987a), qu’il donne une protection intégrale s’il égale, dans le casprésent:

. (7)

Rappelons, ou précisons, que:

Vab =Valeur de la position longue en acceptations bancaires = Fonction deleur taux courant sur le marché = V (rab)

C= Prix unitaire du CAT = Fonction de son taux courant = C(rcat)

a= drcat/drab = Dérivée qu’il est raisonnable de supposer égale à 1 si lesacceptations et les CAT ont même échéance.

L’équation (6) montre bien qu’on peut recourir aux CAT pour modifier ladurée d’un portefeuille.

Le risque de défaut

Nous avons supposé jusqu’ici que les obligations détenues étaient sûres, sansdéfaut possible. En pratique, il y a beaucoup d’émetteurs faillibles dont nous déte-nons les obligations parce qu’elles rapportent plus. Il ne convient plus de pondérerces obligations selon les durées classiques pour obtenir l’immunisation. Il faut queleur taux promis soit ajusté en fonction de la probabilité de défaut.

Bierwag et Kaufman (1988) arguent, à leur sujet, que l’on doit considérer etle processus d’évolution des taux d’intérêt, et le processus derrière le défaut possi-ble. Cette possibilité change les flux concernés et leur chronologie.

Dp Dab Vcat Vab⁄( )Dcat+=

h1 rcat+1 rab+-----------------

DabDcat----------

VabC

-------- 1

a---

–=

FINÉCO, vol. 7, No 1, 1er semestre 1997 15

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Voyons un cas. Soit une firme ayant déjà émis des obligations à 8% échéanten juillet 03. Si le taux du marché est de 6% en juillet 97, leur durée est d’environ5 années.16 Supposons qu’on s’attende à un défaut de paiement en juillet 99 et à unrèglement de 0,40 $ par dollar, soit R99 = 4 * 0,4 + 100 * 0,4 = 41,60 $. Dans untel cas, l’obligation aurait une durée inférieure à 2 années. Mais bien d’autres règle-ments sont possibles. Par exemple: rééchelonner la dette au-delà d’une période deréorganisation, disons de 2 ans, en convenant de repousser beaucoup plus loin lacorrection pour les arrérages et la remise du capital, ce qui donnerait une duréeamplement supérieure à 5 années.

L’exemple montre que l’immunisation d’une position longue en obligationsfaillibles (susceptibles de défaut) ne se réalise pas au taux promis. Est-il alors pos-sible qu’un taux moindre (ajusté) soit compatible avec l’immunisation via unmodèle de durée unifactoriel? Fooladi, Roberts et Skinner (1997) répondent oui,même s’ils reconnaissent que le modèle classique ne convient pas aux obligationsfaillibles. Postulant l’aversion au risque, ils obtiennent une expression générale dedurée unifactorielle englobant la probabilité de défaut, les paiements attendus etleur chrono-logie. Leur mesure de durée, prétendent-ils, dans certaines circon-stances, serait une mesure d’immunisation. Ils en concluent que l’immunisationnécessite, en pratique, l’ajustement des durées pour défaut possible des obligations.

La recherche est jeune à ce sujet. Son objectif est d’obtenir une mesure dedurée toujours plus accommodante en présence de tous les processus stochastiquespertinents.17 Au-delà des obligations faillibles, les applications s’étendent auxportefeuilles de prêts risqués, aux valeurs sous risque liées aux actifs rarementnégociés, etc.

Macroprotection via la durée différentielle (la Diff)

Ici, nous appliquons la durée au niveau macro. Comment y recourir pour con-trôler l’exposition d’une entité “corporative” ou financière au mouvement des tauxd’intérêt? La macroprotection concerne son bilan entier et traite chaque côté com-

16 NDLD: En juillet 97, chaque 100 $ d’obligation (= V) coûte environ Vo = 4/0,03 [1 -

(1,03)-12 ] + V(1,03)-12 = 109,95 $, le coupon semestriel étant de 4 $, le taux du marché de(6%/2 =) 3% par semestre et l’échéance de 12 semestres. Comme la durée d’un tel titre

égale où w = Poids de la remise finale

. D’où D = 0,638(12) + 0,362 (6,15) = 9,88

semestres = 4,94 années. Voir l’annexe au présent article pour toute preuve utile.17 Mentionnons que Chance (1990) nous propose de cerner la durée des obligations des so-

ciétés via un modèle d’option.

D w( )n 1 w–( ) 1 r+r

----------- n

1 r+( )n 1–----------------------------–+==

V 1 r+( )n⁄[ ] Vo⁄ 100 1 03,( )12⁄[ ] 109,95 = 0,638⁄==

16 FINÉCO, vol. 7, No 1, 1er semestre 1997

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me variable. Sans une approche macro, il nous faut prendre le côté passif commedonné et la gestion actif:passif n’est pas envisageable.

La macroprotection a aussi ses stratégies passives (de routine) et actives. Lastratégie passive vise à l’immunisation complète. La stratégie active (dite sélective)accepte une certaine exposition contre un rendement attendu plus élevé.

La durée nette, ou différentielle (la Diff), caractérisant l’exposition d’uneentité, correspond à l’écart entre la durée de son actif et la durée pondérée de sonpassif (soit, en américain, le Duration gap ou DGap). Si la Diff est nulle, l’actif etle passif ont des durées appariées de sorte que l’avoir de l’entité est immunisé con-tre les variations de taux. Voyons le cas simple à taux unique18 d’actualisation, r,d’une entité possédant un actif (A), financé par dette ou passif (P) et fonds propres,ou avoir (F).

Par définition:

A = P + F ou F = A - P (8)

Dérivant de part et d’autre par rapport à r:

(9)

et multipliant partout par (1 + r)/A, l’on a:

; comme la durée égale

, et que (1/A) = , l’on peut écrire:

; d’où une durée nette, ou différen-

tielle (Diff), égale à la durée pondérée de l’avoir, s’exprimant et se mesurantcomme suit:

18 En pratique, aux fins d’immunisation, ce taux unique est la moyenne des taux de l’actif, rA,et du passif, rP.

dF dr⁄ dA dr⁄ dP dr⁄–=

dF A⁄dr 1 r+( )⁄-------------------------- dA A⁄

dr 1 r+( )⁄-------------------------- dP A⁄

dr 1 r+( )⁄--------------------------–=

D d Valeur ) Valeur⁄( )dr 1 r+( )⁄

---------------------------------------------------–= FA--- 1

F---

PA--- 1

P---

=

FA---

– dF F⁄dr 1 r+( )⁄-------------------------- dA A⁄

dr 1 r+( )⁄--------------------------– P

A--- dP P⁄

dr 1 r+( )⁄--------------------------+=

Diff F A⁄( )DF Fonds propresActif

--------------------------------------- Durée liée

aux fonds propres ==

FINÉCO, vol. 7, No 1, 1er semestre 1997 17

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(10)

La Diff se mesure donc selon l’équation (10). Elle traduit l’exposition de l’avoir aumouvement des taux d’intérêt. Si la Diff égale 0, alors l’exposition est nulle.

Comme Diff = , on peut

donc exprimer la sensibilité de F à une variation du taux r en fonction de la Diffcomme suit:

(11)

L’équation (11) montre comment une variation du taux r influe sur la valeur F desfonds propres de l’entité.19 On y voit que la Diff est le facteur d’influence toutcomme la durée est le facteur de l’équation (4) s’appliquant aux obligations. Et siDiff = 0, alors la valeur F sera insensible au mouvement des taux d’intérêt, doncévoluera comme des billets à taux flottant ayant une durée nulle. Si la Diff est po-sitive, l’entité croît en valeur si les taux d’intérêt baissent tout comme la valeurd’une position longue en obligations Si la Diff est négative, elle croît en valeur siles taux montent, l’analogie existant avec la valeur d’une position courte en obliga-tions. Le tableau 2 résume l’évolution de l’avoir de l’entité sous différentes hypo-thèses.20

Tout comme c’est le cas pour l’équation (4) et les obligations, l’équation (11)a des implications pratiques pour la gestion tant passive (liée à l’immunisation)qu’active (à base de prédictions de taux). Par exemple, si les manageurs croient queles taux sont imprévisibles, ils vont vouloir immuniser l’avoir F de l’entité en fixant

19 On s’intéresse au changement de valeur , ∆F, parce que la maximisation de F (l’avoir desactionnaires) est l’objectif classique des manageurs. Le ratio de capital F/A peut être un ob-jectif pour des institutions financières où le ratio minimal règlementaire de 8% doit êtreconstamment respecté. En pratique, les institutions ciblent une valeur F maximale en plusd’autres variables. Lire à ce sujet Kaufman (1984) et Bierwag et Kaufman (1996).

20 Rappelons le concept du déficit sensible (ou “funding gap” en américain) qui se mesure parDS = Actifs sensibles au taux d’intérêt - Passifs correspondants. Il relie la variation de tauxau bénéfice net comptable. Il ne tient pas compte de la réévaluation des actifs à long termelors des variations de taux. Il diffère donc de la durée différentielle (Diff) - qui relie la va-riation de taux à la valeur marchande de l’avoir - et se trouve modifié avec la réévaluationconcernée. Il est tel qu’à un DS positif correspond une Diff négative.

DA= PA---DP – Durée de

l'actif Passif

Actif----------------

Durée du passif

–=

F A⁄( ) dF F⁄dr 1 r+( )⁄-------------------------- ≈ F A⁄( ) ∆F F⁄

∆r 1 r+( )⁄--------------------------––

∆F D– iff * ∆r1 r+( )

----------------*A≈

18 FINÉCO, vol. 7, No 1, 1er semestre 1997

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à zéro la durée différentielle (Diff = 0). S’ils croient, par contre, que les taux vontchuter, ils vont se montrer plus audacieux et élargir leur portefeuille de prêts longsfinancés par les dépôts courts, ce qui accroîtra la Diff [voir équation (10)]. Les tauxbaissant, la valeur des prêts longs va plus augmenter que celle des dépôts courts, cequi accroîtra l’avoir F.

TABLEAU 2L’effet de valeur d’une variation du taux d’intérêt

selon la durée différentielle (Diff) de l’entité*

* - La durée différentielle s’applique ici au bilan d’une institution financière. Elle se mesure par Diff= (F/A)DF = DA - (P/A)DP = (Durée de l’actif) - (Durée pondérée du passif).

- Source d’inspiration du tableau: Koch (1995, chap. 17).

La durée nette, ou différentielle, est également une mesure bien utile aux ana-lystes et investisseurs du domaine financier. Par exemple, en 1993, la Banque deNouvelle-Écosse (BNE) choisit une durée nette carrément positive dans l’attented’une baisse importante des taux. Les analystes bancaires, qui s’attendaient àpareille baisse, recommandèrent l’achat des actions BNE... dont la valeur montaavant même que les taux baissent. Plusieurs chercheurs universitaires, dont Flan-nery et James (1984), ont eu des résultats qui indiquent que le cours des actions desinstitutions financières évolue en conformité avec leur niveau de durée nette.

L’ajustement de la Diff en pratique

Afin d’ajuster la Diff, les manageurs déplacent des dollars et changent ainsiles poids des actifs et passifs. Cela prend du temps et occasionne des frais directset indirects. Par exemple, une entité, qui a une Diff positive et s’expose donc auxméfaits d’une hausse des taux, peut vouloir ramener sa Diff à zéro si elle croit fer-mement à cette hausse. Elle pourra alors réduire la durée des actifs: 1) en titrisant

Diff ∆ Taux ∆ Valeurde l’actif A

∆ Valeurdu passif P

∆ Valeurde l’avoir F

> 0 Hausse Baisse > Baisse Baisse

> 0 Baisse Hausse > Hausse Hausse

< 0 Hausse Baisse < Baisse Hausse

< 0 Baisse Hausse < Hausse Baisse

0 Hausse Baisse = Baisse 0

0 Baisse Hausse = Hausse 0

→ →

→ →

→ →

→ →

→ →

→ →

FINÉCO, vol. 7, No 1, 1er semestre 1997 19

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et vendant des prêts longs; et 2) en incitant les clients à emprunter à taux flottantsplutôt qu’à taux fixes. Les deux activités impliquent des frais de transaction directs.La titrisation nécessite l’emballage des actifs, l’obtention d’une cote obligataire etle sacrifice d’une marge à cause de la liquidité restreinte du marché concerné. Detels coûts vont baisser avec la titrisation croissante. Pour l’instant, ils sont signifi-catifs. Quant à l’incitation vers des emprunts à taux flottants, elle n’opère qu’encédant un peu sur la marge bénéficiaire en intérêts. À tout cela s’ajoutent des fraisde marketing, de rodage de personnel, etc.

Du côté des passifs, l’entité voudra accroître la durée en rendant plusattrayants les certificats de dépôt à termes plus longs. Ou encore, elle peut émettredes débentures, etc. De telles initiatives augmentent le coût en intérêts. Par ailleurs,les ajustements de durée prennent du temps et sont coûteux indirectement. Si lesdéposants ou emprunteurs prévoient aussi la hausse des taux, ils vont résister auxincitations de l’institution car les prêts à taux flottants, les hypothèques ouvertes etles certificats à long terme sont peu attrayants en période de hausse (effective ouattendue) des taux. Les coûts directs augmenteront donc, sans compter la possibilitéde coûts indirects dérivant du manque de dépôts ou d’emprunts conséquent à unéloignement de clientèle.

Pour réduire le temps d’ajustement et les coûts, les institutions ajustent laDiff via des prises de position hors-bilan en produits dérivés: des contrats à terme(CAT) ou options sur taux d’intérêt, des swaps d’intérêts, etc.21

Macroprotection et CAT sur taux d’intérêt

La macroprotection via opérations hors bilan sur produits dérivés permet àl’entité d’éviter de difficiles repondérations de bilan. Elle comporte ses dangerstoutefois. On a vu la maison Nesbitt Burns se faire poursuivre par la Caisse popu-laire ukrainienne de Fort William (Ontario) pour conseils dangereux de gestionhors bilan ayant entraîné sa faillite. À leur tour, le courtier Nesbitt blâme la Sociétéd’assurance des dépôts de l’Ontario pour diverses raisons (lire Hawlett et Waldie,1996).

Bierwag (1997) montre que la durée différentielle (Diff) globale de l’entitéest la somme des Diff partielles des activités de marché reflétées au bilan ou pour-suivies hors-bilan. D’où, si les manageurs veulent une Diff globale de zéro, ils

21 NDLD: Par exemple, la banque CIBC, dans son rapport annuel 1996 (p. 89), indique que,aux fins de sa gestion actif:passif, elle recourt surtout aux swaps d’intérêts. Elle recourt àbien d’autres produits (contrats à terme sur obligations, contrats de garantie de taux, optionssur taux d’intérêt, etc.) mais c’est surtout en tant que négociatrice.

20 FINÉCO, vol. 7, No 1, 1er semestre 1997

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LA DURÉE ET SES APPLICATIONS

devraient se positionner hors bilan pour neutraliser le risque sur bilan. Pour établirle ratio de protection avec des CAT dans un tel contexte, on réexprime l’équation(7) en fonction d’une position longue dans l’actif (A) global de l’entité plutôt qu’enacceptations bancaires (ab), soit:

(12)

où: rcat = Taux courant promis sur l’actif sous-jacent aux CAT; rA = Taux courantpromis sur l’actif A; Diff = Durée différentielle courante du bilan; Dcat = Durée desCAT concernés; VA = Valeur de la position longue en A = Fonction de rA; C = Prixcourant d’un CAT; et a = Dérivée de rcat par rapport à rA 1 si les échéances deA et des CAT sont égales.

Dans l’équation (12), la position longue est liée aux actifs du bilan. Elle mon-tre qu’une entité à Diff positive vendra des CAT pour ramener la Diff à zéro. Eneffet, avec une Diff positive, la valeur de ses actions baisse si les taux d’intérêtmontent. En vendant des CAT, l’entité génère des flux hors bilan qui compensentexactement la baisse de valeur des actions sur bilan, l’avoir net global restantinchangé.

Autres applications de la durée différentielle (la Diff)

Les assureurs-vie, les caisses de retraite, voire certaines firmes non finan-cières et quelques États, gèrent leurs bilans en tenant compte de la Diff. Lesassureurs-vie furent les pionniers de l’appariement des durées. Leurs réserves, quiconstituent leur passif principal, représentent la valeur actualisée estimative desobligations futures liées aux polices. Pour l’essentiel, leurs placements sont en obli-gations et hypothèques classiques ayant des durées plus courtes que celles de leurspassifs. D’où des Diff foncièrement négatives. Durant les années 80, bien desassureurs-vie investirent grandement dans l’immobilier, un domaine offrant d’ordi-naire une protection contre la hausse des taux d’intérêt. Vinrent la récession et lekrach immobilier qui menèrent à l’insolvabilité de plusieurs d’entre eux: LesCoopérants, Confederation Life, etc. Aujourd’hui, les assureurs bien gérés recou-rent à la macroprotection hors bilan via produits dérivés.

Les régimes des caisses de retraite sont à prestations prédéterminées ou àcotisations prédéterminées. Prenons la première catégorie. La caisse affiche alors,comme les assureurs-vie, un bilan à Diff foncièrement négative. En effet, vu quel’employé typique est peut-être à 20 ans de sa retraite dont il profitera durant envi-ron deux décennies, la durée des engagements, ou passifs, de la caisse est d’ordi-

h1 rcat+1 rA+

----------------- * DiffDcat----------*

VAC------

1a---

–=

FINÉCO, vol. 7, No 1, 1er semestre 1997 21

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naire beaucoup plus longue que celle de son portefeuille de titres. D’où une Diffnégative.

Par ailleurs, plusieurs caisses canadiennes offrent une certaine indexation desprestations. Si les caisses peuvent immuniser la fraction voulue de leurs engage-ments via micro ou macroprotection, elles peuvent aussi ajouter une protectionanti-inflation par un choix de titres appropriés, ou encore, en achetant des titresd’État à rendement réel constant (une nouveauté au Canada). De tels titres offrentl’indexation tant du principal que de l’intérêt, donc une durée par rapport à l’infla-tion de zéro.

La Diff peut servir aussi à protéger l’avoir des firmes non financières et desétats. Par exemple, la Nouvelle-Zélande a innové en s’appuyant sur le concept dedurée pour restructurer ses passifs.22 Vers 1990, elle fut le premier état à établir sonbilan selon les principes comptables reconnus. Elle prit conseil auprès d’universi-taires pour pratiquer la macroprotection. Son programme de privatisation lui ayantpermis de diminuer sa dette, elle restructura sa dette restante en fonction des exi-gences de la macroprotection sur bilan voulue (donc sans initiatives hors bilan avecproduits dérivés ou autres).

La macroprotection sur bilan étatique exige, en pratique, d’obtenir des duréesestimatives pour des actifs réels tels des parcs, des routes et des participations dansles “firmes” d’état (écoles, hôpitaux, etc.). Que l’actif soit réel (un réseau routier)plutôt que financier (un titre), le calcul de sa durée nécessite en théorie d’établir lasuite de ses flux futurs équivalents (en principe, les bénéfices sociaux “dollarisés”qu’on en tire en espèces, s’il y a péage, en services, en développement économi-que, etc.), sa vie utile assimilable à l’échéance (n) d’un titre et un taux d’actualisa-tion pertinent (r). La “dollarisation” des flux étant difficile, on peut se contenter enpratique d’une hypothèse raisonnable quant au taux de croissance du bénéficesocial généré par l’actif. La Nouvelle-Zélande a pu soutenir que ses actifs réelsavaient des durées, de l’ordre de 8 années ou plus. Même si de telles durées d’actifssont bien estimatives23, elles dépassaient largement les durées des dettes, ou pas-sifs, du pays (inférieures à 4 ans). La Nouvelle-Zélande résolut donc d’allonger ladurée de ses passifs.

22 Ici nous puisons in Falloon (1993) et dans notre expérience-conseil.23 NDLD: Le lecteur trouvera toute preuve nécessaire en annexe au présent article. La durée

d’un flux croissant à c% sur n années généré par un actif commandant un taux de r%, égale:D = (1+h)/h-n/[(1+h)n -1] où 1+h = (1+c)/(1+r) et h = (r - c)/(1+c). Ainsi, si on attribue àune route une vie utile de 25 à 40 ans (=n) et une croissance dans ses bénéfices sociaux de-2% à +2% (=c), alors, si le taux d’actualisation se situe entre 6% et 10% (=r), on aura unchamp de durées allant de 7,7 à 15,6 années avec une moyenne d’environ 10 années.

22 FINÉCO, vol. 7, No 1, 1er semestre 1997

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LA DURÉE ET SES APPLICATIONS

IV. L’APPLICATION AUX TITRES À OPTIONS

Nous venons de traiter d’appariement classique des durées où les flux liésaux actifs et passifs sont supposés connus et indépendants des taux d’intérêt. Lesmodèles classiques (dits déterministes) ne sauraient convenir pleinement à laproblématique “stochastique” que pose la réalité de flux aléatoires qui dépendentde taux eux-mêmes aléatoires: c’est le cas, notamment, des obligations et des prêtshypothécaires à options, des swaps d’intérêts, etc. Pour établir la durée de tels titres,ou leur sensibilité au taux d’intérêt, les praticiens avertis recourent parfois à destechniques de simulation. La technique de la Diff ajustée pour options est décritepar Bierwag (1997).

L’alternative émergente se fonde sur la modélisation stochastique voulantque le taux d’intérêt r évolue aléatoirement, selon la mathématique d’un processusde diffusion où la microvariation de r pour une micropériode dt est donnée par unedérive correspondante plus un aléa, soit:

(13)

Selon les hypothèses pour a et b, on obtient des courbes de taux et des équationspermettant l’évaluation des titres. Dans le modèle le plus simple, la vitesse dedérive b(r,t) égale la moyenne µ de la distribution des taux et la mesure de disper-sion a(r,t) égale l’écart type σ, celui-ci étant multiplié par dz (issu d’un processusaléatoire classique dit de Weiner) pour obtenir la composante aléatoire du mouve-ment. Ce modèle veut que le prix obligataire P obéisse à l’équation différentiellesuivante:

0,5 σ2 (d2P/dr2) + µ (dP/dr) + (dP/dt) - rP = 0 (14)

Sa solution nous donne le prix P.

De son côté, en supposant b(r,t) = k (θ - r) et a (r,t) = σ, Vasicek (1977) choisitde décrire l’évolution de r par le processus suivant, qui est dit hors préférences, ouneutre face au risque:

dr = k ((θ - r) dt + σ dz (15)

où la vitesse de dérive est proportionnelle à l’écart entre r et son taux d’équilibre àlong terme θ. Ici r a une distribution normale et peut donc être négatif. Cette entorse

dr b r t( , )dt a r t( , )dz+=

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à la réalité s’efface dans le modèle de Cox, Ingersoll et Ross (1985) où

. D’où le processus neutre postulé:

. (16)

Les modèles du genre ci-dessus ont le taux r comme unique source d’incer-titude et ne conviennent pas toujours à la structure des taux du moment.24 D’oùl’adoption de modèles satisfaisant cette structure. Ainsi, Ho et Lee (1986) ont pro-posé un modèle de taux d’intérêt binomial, sans arbitrage possible, et tel qu’ilconvient automatiquement à la structure de départ. Tout comme l’on peut calculerla volatilité implicite qui donne une parfaite cohérence entre le prix d’une option àla Black-Scholes (BS) et le prix de l’action sous-jacente, Ho et Lee partent de lastructure des taux qu’on observe pour générer les variations stochastiques sub-séquentes dénuées d’arbitrage possible. Les praticiens favorisent ce modèle parcequ’il: 1) se conforme aux données observées; 2) n’exige qu’une simple distributionbinomiale; et 3) donne des évaluations neutres, ou hors préférences. Pour raffinerle modèle de Ho et Lee, qui est à variance fixe, Black, Derman et Toy (1990) ontproposé un modèle avec hétérovariance. Si celui-ci résout quelques problèmesthéoriques liés au modèle de Ho et Lee, il n’offre pas de solutions analytiques duprix obligataire. Heath, Jarrow et Morton (1990, 1992) ont offert de telles solutionsvia un modèle plus complexe qui exploite la convergence du prix de l’obligationvers son nominal à l’échéance. De leur côté, afin de priser avec cohérence les titresà options qui dépendent des taux d’intérêt tout en respectant les données observées,Hull et White (1990) ont extensionné les modèles de Vacicek (1977) et de Cox,Ingersoll et Ross (1985).

Ces modèles ont une lacune: ils ne donnent pas tous des mesures cernablesde durée aux fins d’immunisation. Bierwag (1996) propose d’y remédier en déri-vant la durée comme un paramètre du processus stochastique de Ho et Lee. De telsmodèles et mesures bonifiés augmentent sensiblement le potentiel d’applicationdes techniques de durée en gestion du risque. Toutefois, nous sommes loin encoredes mesures adéquates de durée fondées sur une modélisation raffinée de l’évolu-tion des taux d’intérêt.

Jusqu’ici, l’inaptitude à modéliser les flux qui dépendent des taux d’intérêt acoûté cher aux intermédiaires financiers, en particulier à la banque Harris, cette fi-liale américaine de la Banque de Montréal. De nombreux intermédiaires vendirent

24 Pour une bonne discussion de la modélisation des structures de taux à l’équilibre sous me-nace d’arbitrage, lire Hull (1997).

r 0 b,≥ k θ r–( ) et a r t,( ) σ r==

dr k θ r–( )dt σ r dz+=

24 FINÉCO, vol. 7, No 1, 1er semestre 1997

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LA DURÉE ET SES APPLICATIONS

à leurs clients des titres adossés à leurs prêts hypothécaires à options. En apparence,de tels titres ont des durées courtes, et sont donc peu risqués, si l’on oublie lesoptions sous-jacentes. Les taux ayant monté, les emprunteurs hypothécaires ralen-tirent leurs prépaiements et optèrent pour le long terme, le tout révélant une duréeréelle beaucoup plus grande pour les titres adossés. Ceux-ci, en vertu de leur con-vexité négative, se déprécièrent bien au-delà des attentes des détenteurs-clients, cequi força ni plus ni moins diverses émettrices, telles les banques Harris et Mellon,à compenser, à grand coût, les pertes des clients.

V. RÉSUMÉ ET CONCLUSION

Nous avons d’abord défini la durée, puis rappelé sa dérivation et deux de sespropriétés classiques: 1) l’élasticité du prix d’un titre à flux prédéterminés face àune microvariation de son taux promis est proportionnelle à la durée; et 2) la duréepeut servir comme outil de protection. Le lien durée-élasti-cité a d’importantesapplications en gestion du risque. Entre autres, le manageur, selon qu’il juge oppor-tun de prédire ou pas les taux d’intérêt, va ajuster la durée du portefeuille enfonction du risque souhaité.

La convexité de la relation prix-taux fait en sorte que la durée n’explique passuffisamment la variation totale du prix lorsque le taux subit un choc substantiel.Cette convexité s’avère positive pour les titres à flux prédéterminés sans options dufait que la variation de prix sera plus favorable (gain plus fort ou perte moindre) queprédite par la durée.

L’immunisation à base de durée répond au besoin du manageur qui veuts’assurer du rendement initial promis sur son portefeuille. L’immunisation est unestratégie passive vu qu’elle n’exige pas de prédire les taux d’intérêt. Elle convienten période de taux volatils ou imprévisibles aux yeux du manageur. L’immunisa-tion parfaite résulte d’un appariement constant de la durée à la période restante dedétention, car alors les deux effets (de réinvestissement et de capital) d’une varia-tion du taux d’intérêt sur la valeur finale du portefeuille s’annulent.

Pour les obligations faillibles, le niveau et la chronologie des flux changenten cas de défaut. Par rapport aux titres sûrs, leur durée en est changée en plus ou enmoins selon le scénario envisagé. Le portefeuilliste aura souci de corriger lesdurées en conséquence.

Nous avons aussi traité de macroprotection basée sur la durée nette, ou dif-férentielle, du bilan et rappelé comment calculer, interpréter et appliquer cettedurée. Vu la difficulté de remanier le bilan pour obtenir la durée voulue, nous avons

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indiqué comment on peut l’obtenir par des opérations hors bilan avec des instru-ments dérivés (des contrats à terme en particulier). La gestion du risque hors bilanexige de choisir le meilleur type de contrat eu égard à la liquidité, l’horizon de pro-tection et le risque de base.

La durée nette (ou différentielle) est un outil de gestion des sociétés d’assur-ance-vie et des caisses de retraite. Elle peut expliquer les tendances observablesdans leurs bilans. Avec des mesures innovatrices de durée des actifs réels, la mac-roprotection s’appliquerait aux sociétés non financières, voire aux états (laNouvelle-Zélande étant une pionnière).

Finalement, la convexité mesure comment la durée change sous l’effet d’unchoc du marché, c’est-à-dire d’une macrovariation du taux d’intérêt. Aux fins demacroprotection, il importe que la convexité des actifs ne soit pas inférieure à celledes dettes. La titrisation des prêts hypothécaires a donné des titres adossés dont lesoptions sous-jacentes (prépaiements possibles, choix de termes, etc.) leur confèrentune convexité négative et donc un surcroît de pertes possibles pour leurs détenteursen cas de hausse des taux d’intérêt.

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LA DURÉE ET SES APPLICATIONS

ANNEXELe calcul de la durée

NB: L’annexe a été ajoutée par l’éditeur de Finéco au bénéfice des lecteurs peu rompus au calcul desdurées. Il s’agit du calcul de la durée classique à taux constant et à flux prédéterminés.

D’une part, la durée classique, D, d’un actif (financier ou autre) qui com-mande un taux de r% correspond à la somme des temps pondérés de ses flux à venir(Ft, t = t1,...,tn), le poids, pt, de chaque temps étant selon l’apport du flux concernéà la valeur courante, P, de l’actif, d’où:

où . (a)

En quelque sorte, D mesure le “point temporel de gravité” de l’actif, ou sa périodede récupération (ou d’extinction) effective, aux conditions du moment, la démon-stration pouvant être faite qu’un flux unique à t = D, de niveau P(1+r)D, réunit lespropriétés de l’ensemble des flux concernés.

D’autre part, la durée25 mesure en même temps, au signe près, au niveaumicro, l’élasticité, ou la sensibilité, de P à une variation du facteur d’escompte,(1+r), d’où cette expression équivalente à (a):

. (b)

On peut, en toutes circonstances, appliquer la définition (a) pour obtenir la duréeclassique d’un actif26. Il est, en général, plus commode d’appliquer une formulesimplifiée dérivable des expressions (a) ou (b) en misant sur l’additivité des durées

25 NDLD: À noter que les praticiens trouvent parfois utile de prendre une mesure modifiée dela durée classique en divisant D par (1+r). Ils appellent ça la durée modifiée, soit:

. Nous nous restreignons ici aux ex-pressions commodes pour mesurer la durée classique, le passage à Dmod allant de soi.

26 NDLD: L’application de (a) en vue d’établir la durée d’un actif est lourde lorsqu’il y a plu-sieurs versements. On peut prouver que dans les cas les plus simples, l’expression (a) cachedes suites géométriques qui se simplifient et débouchent, par exemple, sur l’expression (d)du présent annexe lorsqu’il s’agit d’établir la durée d’un actif à n flux uniformes. Voir Cha-rest et al. (1990, chap. 4, p. 91-96). Par ailleurs, si l’on dispose d’une équation simple pourétablir P, on peut appliquer l’équation (b) comme suit pour obtenir la durée:

. Dans l’exemple de l’encadré A, à r = 4%et r’ = 4,001%, on a P = 83 336,94 et P’ = 83 322,20, de sorte que la durée égale bien:-ln (P’/P)/ln[(1+r’)/(1+r)] = 18,40 semestres.

D pt t⋅t t1=

tn

∑= pt Ft 1 r+( )t⁄[ ] P⁄=

Dmod D 1 r+( ) ⁄ ∂P P⁄( ) ∂r ∂P ∂r⁄( )–=⁄ P⁄==

D ∂ Pln∂ 1 r+( )ln------------------------- ∂P P⁄

∂ 1 r+( ) 1 r+( )⁄----------------------------------------– ∂P P⁄

∂r 1 r+( )⁄--------------------------–≡=–=

D ∂ P ∂ 1 r+( ) P' P⁄( )ln–=ln⁄ 1 r'+( ) 1 r+( )⁄[ ]ln⁄ln–=

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en ce sens que la durée d’un actif générant un ensemble donné de flux peut êtreobtenue via l’addition (ou la soustraction) des durées pondérées d’autres ensembleséquivalents. Par exemple, l’ensemble de n flux uniformes standards de niveauF[valant couramment P = (F/r) [1 - (1+r)-n] vaut la perpétuité correspondante (va-lant P’ = F/r) diminuée de la perpétuité différée [va-lant P’’ = (F/r) (1 + r)-n] dontle premier F se trouve à n+1. Ainsi, l’on peut écrire que: P = P’ - P’’ = (F/r) - (F/r)(1 + r)-n = (F/r) [1 - (1 +r)-n], de sorte que la durée voulue (pour l’ensemble valantP) sera égale à:

= (c)

Or, selon (b), on a:

,

soit la durée d’une perpétuité standard. Vu que la 2e perpétuité est différée de n

périodes, alors D’’ égale forcément , d’où, selon (c):

,

ce qui donne: , (d)

soit l’expression de la durée d’un ensemble de n flux uniformes standards.

Pour peu que l’actif génère des flux à profil régulier, on peut prouver, enprocédant comme ci-dessus, ou via la manipulation des suites géométriquesinhérentes à la définition (a), que la durée s’obtient par une seule et même équation,quels que soient le profil (croissant, uniforme ou décroissant) des flux périodiqueset le moment d’établir la durée (au début, ou en un point quelconque, d’une pé-riode). Plus précisément, l’expression (e) qui suit établit la durée d’un actif com-portant n flux périodiques à profil donné, plus un flux terminal, ainsi qu’uneéchéance qui n’est pas nécessairement un entier, soit:

D P'P----

D'( ) P''P----- D''( )=–= Soustraction des durées

pondérées concernées

D' ∂P' P'⁄∂r 1 r+( )⁄-------------------------- ∂P'

∂r--------* 1 r+( )

P'------------------ ∂ F r⁄( ) 1 r+( )

∂r F r⁄( )-----------------------------------– Fr 2– 1 r+( )–

Fr 1–--------------------------------

– 1 r+

r-----------===–=–=

D' n 1 r+r

----------- n+=+

D F r⁄( )F r⁄( ) 1 1 r+( ) n––[ ]

------------------------------------------------------------ 1 r+r

----------- - F r⁄( ) 1 r+( ) n–

F r⁄( ) 1 1 r+( ) n––[ ]-------------------------------------------------- 1 r+

r----------- n+

=

D … 1 r+r

----------- n1 r+( )n -1

-------------------------–==

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LA DURÉE ET SES APPLICATIONS

(e)

où les symboles paramétriques se comprennent aisément à partir du graphiqueexemplaire ci-dessous.

Exemples d’application

a) Un prêt a une valeur courante de Vo = 943 000. Il reste 12,20 années avant

l’échéance. Il comporte donc 13 annuités restantes avec = 74 439,96 et une

croissance du taux c = 7%, de même qu’un flux terminal de V = 140 000. Letaux courant effectif du marché sur ce prêt est de r = 8,24%. Quelle est la duréecourante (= D) du prêt?

NB: Ici n = 13; n-p = 12,20; v = 0,20; V0 = 943 000; h = (0,0824 - 0,07)/1,07= 0,01158878 = 1,158878%; V = 140 000.

D’où w = [140 000/(1,0824)12,20]/943 000 = 0,0565; 1-w = 0,9435 et, selon (e):

b) Mais si tout était pareil dans l’exemple a, y compris Vo et V, sauf pour les fluxqui seraient uniformes (de niveau F = 107 057,93), alors c = 0, h = r et les autresparamètres seraient inchangés, d’où:

-0,80 t1 = 0,20 1,20 12,20 = tnn-p

-p 0 v 1+v (n-1)+v. . .. . .. . .

: n = Nombre de flux périodiques: v = Fraction à courir de la période en cours: p = Fraction courue correspondante: p + v = 1 période: r = Taux d’escompte courant des flux

: c = Taux de croissance des flux: 1+h = Facteur d’escompte net = (1+r)/(1+c): h = Taux hors croissance, ou taux net,: = [(1+r)/(1+c)]-1 = (r-c)/(1+c)

: w = Poids de V dans Vo

= [V/(1+r)n-p]/Vo: 1-w = Poids des flux périodiques

Durée = D = w n p–( ) 1 w–( ) 1 vh+h

--------------- n 1 h+( )n 1–

---------------------------–+

Ft1

D 0 0565 12 20,( ) 0 9435 1 0 20 0 011588785,( ),+0 011588785,

------------------------------------------------------------ 130 161587892,( )

------------------------------------- 6 39 ans,=,+,=

Vo

Ft1 nFt = 1Ft (1+c)n-1

r% par période

c < r V

Ft 2 ...

FINÉCO, vol. 7, No 1, 1er semestre 1997 29

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.

c) Et si l’on modifiait l’exemple b en prenant un entier comme échéance, disons13? Alors Vo = (107 057,93/0,0824) [1- (1,0824)-13] + 140 000 (1,0824)-13 =885 118,63; w = 140 000 (1,0824)-13/Vo = 0,0565; v = 1; p = 0; n = 13;

d’où .

d) Et si V = 0 dans l’exemple c? Alors w = 0, r = 0,0824, n = 13 et:

.

e) Et s’il s’agissait d’une perpétuité croissante au taux c? Alors où

h = (r-c)/(1+c) et v = la fraction de période à courir jusqu’au prochain flux, ce

qui se simplifie à si v = 1.

f) Et s’il s’agissait d’une perpétuité uniforme? Alors h=r et si v <

1 et si v = 1.

Post-scriptum 1: La durée d’actifs générant des flux continus

En régime continu: 1) si un actif génère un flux perpétuel croissant au taux cet de niveau initial Fo; et 2) si le taux d’escompte (ou d’actualisation) continu est r,

alors h (= r-c) mesure le taux d’escompte net et l’actif vaut

tandis que sa durée égale par définition . Si l’on considère

D w n p–( ) 1 w–( ) 1 vr+r

-------------- n1 r+( )n-1

------------------------– 5 51 ans,=+=

D w n( ) 1 w–( ) 1 r+r

----------- - n 1 r+( )n-1

------------------------ 6 31 ans,=+=

D 1 r+r

----------- - n1 r+( )n-1

------------------------ 5 91 ans,==

D 1 vh+h

---------------=

D 1 h+h

------------=

D 1 vr+r

--------------=

D 1 r+r

-----------=

Foe ht– dt Fo h⁄=o∞∫

Foe ht– tdt⋅

Foh 1–-------------------------- h 1–=

o∞∫

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LA DURÉE ET SES APPLICATIONS

un actif ayant un flux tronqué au temps n, et valant forcément Foh-1[1 - e-hn], alorssa durée sera égale à: [Durée pondérée de la perpétuité] - [Durée pondérée de la per-pétuité correspondante différée de n unités de temps] ce qui donnera à l’actif unedurée de:

D’où:

Si l’actif génère un flux tronqué à n en plus d’une valeur terminale V ayant le poidsw = [Ve-rn/Vo où Vo = Foh-1[1 - e-hn] + Ve-rn], alors sa durée devient égale à:

(f)

où les symboles sont tels que déjà définis. L’équation (f) est la plus générale etcommode qui soit pour établir les durées d’actifs générant des flux continus. Ellecorrespond à l’équation (e) qui s’applique aux flux périodiques.

Post-scriptum 2: La durée D, son élasticité K et la convexité C

On sait que . L’élasticité de D,

par définition, égale

où , de sorte que, par substitution et

manipulation, on a:

DFoh 1–

Foh 1– 1 e hn––[ ]------------------------------------------- h 1–[ ]

Foh 1– e hn–

Foh 1– 1 e hn––[ ]-------------------------------------------– h 1– n+[ ]=

D … h 1– n/[e– hn 1 ]–==

D w n( ) 1 w–( )[h 1– - n/(ehn - 1) ]+=

D ∂P P⁄∂P 1 r+( )⁄---------------------------– ∂P

∂r------– 1 r+( )P 1–= =

K ∂– Dln ∂ 1 r+( )ln⁄ ∂D D⁄( ) ∂r 1 r+( )⁄[ ]⁄–= =

1 r+( ) D⁄[ ] ∂D( ) ∂r⁄( ) 1 r+( ) D⁄[ ] ∂ ∂r----- ∂P

∂r------ 1 r+( )P 1–=–=

1 r+D

----------- ∂2P

∂r2--------- 1 r+( ) P 1–•[ ] ∂P

∂r------ ∂

∂r----- 1 r+( )P 1–[ ]•+

=

∂∂r----- 1 r+( )P 1–[ ] P 1– 1 r+( )P 2– ∂P

∂r--------–=

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.

Or, ; d’où les relations unissant K, C et D sui-

vantes: , ou encore:

. (g)

Comme D et K s’obtiennent d’ordinaire aisément (voir l’exemple chiffré del’encadré A), l’estimation du coefficient de convexité C selon l’équation (g) estbeaucoup plus facile que selon l’équation (lourde) usuelle trouvée dans les manuelsdes praticiens, CFA ou autres, soit:

. (Lire Reilly et Brown, 1997, chap. 16.)

K 1D---- 1 r+( )2 1

P--- ∂

2P ∂r2

----------- 1 r+P

----------- ∂P

∂r-------- 1 r+( )∂P

P∂r-----------------------–+•

2

=

C 1P--- ∂

2P ∂r2

----------- et 1 r+P

----------- ∂P

∂r-------- = - D=

K 1 r+( )2 D⁄[ ]C 1 D––=

C D D K 1+ +( ) 1 r+( )⁄ 2=

C P 1– ∂2P

∂r2------------ P 1– 1 r+( ) 2–

Fluxt( ) t2 t+( )

1 r+( )t--------------------------------------

t 1=

t n=

∑==

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LONG SUMMARY

Duration Analysis and Its Applications

Iraj J. Fooladi (Dalhousie University)and

Gordon S. Roberts (York University)

Duration is the key to understanding returns on fixed income securities. Theconcept is also central to measuring risk exposures to fixed income positions andto asset/liability management for financial institutions. The concept of durationwas first developed by Macaulay (1938) as a better measure of a bond’s “longness”than its term to maturity. Although economists and actuaries used it occasionally,this concept remained dormant until the early 1970s when Fisher and Weil (1971)and Hopewell and Kaufman (1973) showed how duration could be used to designa bond portfolio that is immunized against interest rate risk. An excellent (yet to bepublished) historical perspective is available from Bierwag (1997).

This paper presents duration and its development placing particular empha-sis on various applications. Our goal is to bring together in one place a wealth ofpractical examples of duration applications spanning investments, risk manage-ment and financial institutions management. This survey is designed to assist inteaching duration to audiences in business schools and executive developmentprograms.

Mathematically, duration represents a weighted average of the time horizonsat which the cash flows from a fixed income security are received. Each time hori-zon’s weight is the percentage of the total present value of the bond (bond price)paid at that time. These weights add to unity. The Appendix shows how to derivevarious alternative, closed-form, solutions. Equation (e) gives duration estimatesfor assets with increasing, uniform or decreasing periodic income at any point intime, including in-between cash flow dates. It is the most general of all. Equation(f) does the same for assets with continuous income. Convexity equation (g) is noveland easy to use.

Duration has two key properties. First, price elasticity of a fixed incomesecurity in response to small changes in its yield is proportional to duration. Bondportfolio managers exploit this property as they adjust portfolio duration inresponse to their forecasts for interest rates and bond price movement. It is alsocentral to measuring risk exposure (value at risk) in fixed income positions. The

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LA DURÉE ET SES APPLICATIONS

duration formula gives accurate estimates of exposure for small shifts in interestrates. When rates shift more dramatically, risk managers must adjust for convexity.

Second, duration can serve as a hedging tool. To achieve immunization, theportfolio manager maintains duration equal to the amount of time remaining in aplanning horizon. As Table 1 and the calculations in Box A show, with durationmatching, the risk of capital loss (due to higher rates) exactly offsets the risk oflesser accumulation of reinvested coupons (due to lower rates). The result is thatthe proceeds from liquidating the immunized portfolio on the horizon date arehedged and cannot fall below what would be achieved if rates were to remainunchanged. Because it requires no view of future interest rates, immunization is apassive strategy particularly appropriate when interest rates are volatile.

The current generation of duration models is consistent with the no-arbitragecondition. These models also incorporate the term structure of interest rates so thatit is no longer the case that duration must assume a flat term structure that isrestricted to parallel shifts. The extensions notwithstanding, there is a considerablebody of research in the U.S. and Canada showing that basic Macaulay duration(using yield to maturity as the discount rate) performs very well both in explainingprice volatility and constructing hedges againsts interest-rate risk for portfolios ofdefault-free, government bonds.

For bonds with credit risk, the timing and amount of cash flows change ifdefault occurs. The paper explains why default will either lengthen or shortenduration depending on the scenario followed. Either way, analysts must adjustduration when constructing a portfolio of bonds that are not default free.

The concept of duration gap modifies duration to apply to problems of asset/liability management for financial institutions. Duration gaps can also be appliedto determining an optimal liability structure for a government. The paper presentsan example of such an application in New Zealand.

Finally, the discussion turns to interest-rate models and comes back to con-vexity to demonstrate how it measures the change in duration in response to interestrate shocks. In macrohedging, it is important to ensure that asset convexity is atleast as large as convexity of liabilities. Embedded options allowing borrowers toprepay or to extend maturity can produce negative convexity in mortgage-backedsecurities. Unwary investors who ignored this effect have experienced significantlosses.

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