la crÉation de valeur pour...
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Mémoire de maîtrise
LA CRÉATION DE VALEUR POUR
L’ACTIONNAIRE
Sous la tutelle de Monsieur Parienté
Beauvillain de Monpezat Louis
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SOMMAIRE
INTRODUCTION……………..…………………………………………………………….5
1 : Les ratios et autres indicateurs de la Création de Valeur (mesure de la CV)……………...9
1.1 Historique………………………………………………………………………….9
La signification de la création de valeur pour l’actionnaire par le MEDAF…12
1.2 Les grands models de la création de valeur……………………………………...13
1.2.1 La création de valeur pour l’actionnaire par la performance boursière..13
1.2.1.1 Le ratio Q de James Tobin………………………………........14
1.2.1.2 Le Bénéfice Par Action (BPA)……………………………….14
1.2.1.3 La Total Shareholder Return (TSR)………………………….16
1.2.1.4 Le Market To Book (MTB)…………………………………...17
1.2.1.5 Le Market Value Added (MVA®)…………………………....18
1.2.2 La création de valeur pour l’actionnaire par la performance interne de
l’entreprise……………………..…………………………………………21
1.2.2.1 La Valeur Actualisée Nette (VAN)………………….……….22
1.2.2.2 Ratio Return on Equity (ROE)……………………………….24
1.2.2.3 Return On Investment (ROI).………………………………...25
1.2.2.4 Earning Before Interest and Taxes, Depreciation and
Amortization (EBITDA)……………………………………………..26
1.2.2.5 Cash-flow Return On Investment (CFROI)…………………..27
1.2.2.6 Le modèle de Stewart: Economic Value Added (EVA®)…...30
1.3 Conclusions………………………………………………………………………33
2 : Management par la création de valeur……………………………………………………35
2.1 Leviers stratégiques………………………………………………………………35
2.1.1 L’avantage concurrentiel……………………………………………….36
2.1.2 Les opérations de croissance interne…………………………………...38
2.1.2.1 Baisser le coût du capital……………………………………..38
2.1.2.2 Augmenter l’endettement…………………………………….39
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2.1.2.3 Croissance…………………………………………………….40
2.1.2.4 Cession d’activités non rentables…………………………….41
2.1.2.5 Améliorer le rendement des capitaux investis………………..42
2.1.3 Les opérations de croissance externe…………………………………..43
2.1.3.1 Fusions-acquisitions……...…………………………………..44
2.1.3.2 Acquisitions d’actions………………………………………..44
2.1.3.3 Acquisitions d’actifs….………………………………………44
2.1.3.4 Les gains espérés……………………………………………..45
2.1.3.4.1 Les synergies de coûts……………………………...45
2.1.3.4.2 Synergies de revenus……………………………….45
2.1.3.4.3 Réductions d’impôts………………………………..46
2.1.3.5 Réactions du marché. ………………………………………...47
2.2 Leviers financiers………………………………………………………………...48
2.2.1 Gestion des prix des risques financiers………………………………...49
2.2.1.1 Risques liés aux coûts de faillite……………………………..49
2.2.1.2 Risques liés aux choix d’investissements…………………….50
2.2.2 La politique de redistribution du bénéfice net. ………………………...51
2.2.2.1 Le versement de dividendes………………………………….51
2.2.2.2 Le rachat d’actions…………………………………………...53
2.3 Les leviers du gouvernement d’entreprise……………………………………….55
2.3.1 Le rôle des dirigeants dans la création de valeur……………………....56
2.3.2 Leviers d’alignement des intérêts des actionnaires et des dirigeants…..57
2.3.2.1 Les incitations financières…………………………………....58
2.3.2.2 Les mécanismes de contrôle………………………………….60
2.3.2.2.1 La concentration du capital…………………………60
2.3.2.2.2 Le conseil d’administration………………………...60
2.3.2.2.3 La politique d’endettement…………………………61
2.3.2.2.4 Le contrôle externe du marché financier…………...61
3 : Conséquences du pilotage par la valeur…………………………………………………..63
3.1 Introduction………………………………………………………………………63
3.2 La pensée alter mondialiste : la destruction de la démocratie……………………64
3.2.1 Idée de base…………………………………………………………….64
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3.2.2 La création de valeur : une utopie, une croyance irréalisable………….64
3.2.3 La spoliation des ouvriers……………………………………………...65
3.3 La philosophie libérale : Le nouveau paradigme………………………………...66
3.3.1 La création de valeur : la panacée……………………………………...67
3.3.2 Les conséquences sur le cours de l’action……………………………...69
3.3.2.1 Les leviers stratégiques……………………………………….69
3.3.2.1.1 Les opérations de croissance interne……………….70
3.3.2.1.2 Les opérations de croissance externe……………….71
3.3.2.2 Les leviers financiers…………………………………………72
3.4 Limites et dérives de la création de valeur pour l’actionnaire…………………...74
3.4.1 Les limites de la création de valeur…………………………………….75
3.4.1.1 Limites de l’évaluation de la création de valeur……………...75
3.4.1.2 Limites des indicateurs de création de valeur………………...76
3.4.2 Les limites du management par la valeur………………………………76
3.4.3 Les dérives constatées dû aux politiques de création de valeur………..77
3.4.3.1 Les différentes dérives………………………………………..78
3.4.3.2 Le cas ENRON……………………………………………….78
3.5 Vers une régulation…ou vers un nouveau modèle?..............................................80
3.5.1 Les différentes lois de régulation………………………………………80
3.5.1.1 La loi NRE……………………………………………………80
3.5.1.2 La loi LSO……………………………………………………81
3.5.1.3 La loi SF……………………………………………………...82
3.5.1.4 Le rapport Bouton…………………………………………….83
3.5.2 Un modèle de responsabilité sociale : le modèle skateholder………….84
3.6 Conclusion……………………………………………………………………….86
CONCLUSION..……………………………………………………………………………88
BIBLIOGRAPHIE………………………………………………………………………….91
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INTRODUCTION
Les trente dernières années ont été marquées par l’émergence d’un concept : la gouvernance
d’entreprise, ce terme relativement nouveau peut prêter à confusion au vu de la multiplicité
des définitions qui lui sont associées. Aujourd’hui, il est au centre de toutes les
préoccupations sur les évolutions du capitalisme contemporain. Les controverses les plus
vives opposent les partisans d’une firme « d’ayants droits » (stakeholder value) aux
promoteurs de la « valeur actionnariale » (shareholder value), la décennie précédente a
consacrée la victoire de la valeur actionnariale comme conception dominante de la firme.
Jusqu’à la fin des années 1970, on parlait du capitalisme américain comme d’un « capitalisme
managérial » avec une influence des dirigeants plus forte que celle des actionnaires du fait de
la dispersion de la propriété, l’ouvrage de Berle et Means (the modern corporation) mettant
en avant, déjà à l’époque, les antagonismes entre les propriétaires de la firme et ses dirigeants.
La transformation radicale de l’économie avec la libéralisation financière va se caractériser
par un accroissement brutal des montants engagés sur les marchés financiers et de leurs
liquidités. Ce phénomène va aboutir à une augmentation du contrôle des entreprises par le
marché boursier.
Des auteurs comme Jensen avec sa « théorie de l’agence » ont explicité la nature du mandat
accordé aux dirigeants par les actionnaires et ont avancé des moyens qui permettent de
motiver les managers (stock-options, bonus) et de contrôler le bien-fondé de leurs décisions.
Une fois la réunion de conditions de marché favorables et de fondements théoriques solides
acquis l’approche patrimoniale va évoluer vers une plus grande prise en compte des intérêts
des actionnaires, acteurs principaux du marché financier.
Ce « renouveau actionnarial » va se traduire par le démantèlement des grands conglomérats,
le modèle se rapprochant d’une politique axée sur les licenciements et la redistribution des
profits. Ce phénomène de contrôle par les actionnaires va être amplifié par l’émergence de
puissants groupes d’investisseurs institutionnels n’hésitant plus à utiliser tous les moyens à
leur disposition. Depuis cette époque la convergence des économies vers le seul modèle de
capitalisme patrimonial qu’on a constaté à réduit la place de la vision partenariale de la firme
d’origine européenne.
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Une fois la montée en puissance des actionnaires effective, la création de valeur actionnariale
s’est imposée comme le moteur de toutes les stratégies de l’entreprise dans le but d’assurer la
croissance de la capitalisation boursière, c'est-à-dire la valeur boursière de l’ensemble des
actions de la firme.
Pour ce faire, la notion de « maximisation du profit » a été délaissée pour laisser place à la
«maximisation de la valeur», celle-ci permettant la prise en compte du risque encouru par
l’actionnaire et la différence de valeur entre des flux de trésorerie d’horizons différents.
Sous les hypothèses de forme forte de l’efficience, de rationalité et de symétrie de
l’information, la valeur de l’entreprise est égale à la valeur actuelle de l’ensemble des
dividendes que les actionnaires recevront dans le futur. La maximisation de la valeur
fondamentale de la firme pour les actionnaires correspond à la maximisation de la valeur des
actions de l’entreprise.
L’accent mis sur la valeur actionnariale se situe dans le même lignage que des travaux
antérieurs d’universitaires comme A.Rappaport avec Creating Shareholder Value en 1989 ou
de cabinets de conseil comme Mc Kinsey avec l’ouvrage de Tom Copeland et de ses associés :
Valuation paru en 1990 ou le concept d’EVA® (Economic Value Added) introduit par le
cabinet Stern et Stewart.
Ce qui importe dans cette théorie c’est de considérer que le capital a un coût et qu’il n’y a
création de valeur que lorsque le rendement des capitaux investis est supérieur à ce coût.
L’actionnaire ne fait que revendiquer son droit à une rémunération de son capital au moins
égale au taux d’un placement sans risque en ajoutant une prime pour le risque qu’il accepte de
prendre. Seules peuvent prétendre à une croissance de long terme les entreprises qui créent de
la valeur.
Pour parvenir à cet objectif les entreprises doivent mettre en place un système de gestion par
la valeur permettant de fixer des objectifs quantifiables en termes de croissance, rentabilité et
gestion des risques.
Rappaport1 souligne que dans une perspective de valeur actionnariale, la croissance ne doit
pas être un objectif, mais la conséquence de décisions visant à maximiser la valeur des fonds
propres. De ce fait, si une entreprise se lance dans n’importe quel projet pour grossir, la
croissance se fera aux dépens des actionnaires.
1 A.Rappaport, Creating Shareholder Value, New York, Free press, 1986.
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L’approche de la valeur actionnariale concerne la relation entre l’emploi des ressources en
capital par une entreprise donnée, la répartition de ces ressources au sein de l’entreprise, et la
possibilité qu’ont ces ressources de « porter leurs fruits ».
La mise en œuvre réussie d’une stratégie de gestion par la valeur impose d’intégrer la vision
des actionnaires dans la gestion de l’entreprise et de communiquer aux marchés financiers les
détails de l’application de cette approche.
La valeur actionnariale ne peut plus être considérée comme un phénomène transitoire mais
bien comme une transformation majeure des économies capitalistes. Dans ce mémoire nous
allons nous attacher à répondre à la question sur l’effet positif d’une stratégie basée sur la
valeur actionnariale sur les performances des entreprises, nous verrons ainsi qu’en plus des
difficultés d’application de la méthode, les résultats paraissent contrastés.
Nous définirons dans un premier chapitre le concept de la valeur actionnariale et ses
fondements théoriques, puis passerons en revue les grands modèles de la création de valeur,
nous insisterons tout particulièrement sur la différenciation entre les indicateurs de nature
boursière et ceux mesurant la performance interne de l’entreprise. Ce chapitre nous permettra
de mettre en évidence la difficulté d’une mesure parfaite de la création de valeur malgré le
nombre d’indicateurs à disposition et les problèmes de différences d’horizons temporels qui
existent entre eux.
Le deuxième chapitre nous aidera à percevoir la valeur actionnariale au travers de sa mise en
œuvre au sein de l’entreprise. Dans un premier temps nous insisterons sur la nécessité de
préserver l’avantage concurrentiel de la firme avec la maximisation de la valeur. Pour ce faire
nous nous appuierons sur les recommandations en terme de leviers stratégiques portant à la
fois sur une croissance interne et/ou une croissance externe. Nous tenterons de dégager les
avantages et inconvénients de ces types de pratiques sur la performance de l’entreprise. Enfin,
du fait de leurs importance actuelle, nous analyserons les différents leviers dont disposent les
actionnaires pour résoudre les conflits d’agence résultant de la différenciation
structure/propriété.
Après avoir défini les bases de la valeur actionnariale, les moyens de sa mesure et les
différentes stratégie à mettre en place tant du côté des dirigeants que des actionnaires, nous
finirons par nous pencher sur les conséquences de ce phénomène en particulier en intégrant
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les critiques portant sur ses conséquences sociales et en nous penchant sur les résultats
effectifs sur le cours de l’action produit par son application. Nous en retireront des
enseignements sur les limites du management par la valeur pour finir sur les différentes
tentatives pour réguler le système et la présentation du modèle alternatif : le modèle
partenarial.
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1 LES RATIOS ET AUTRES INDICATEURS DE LA
CRÉATION DE VALEUR.
1.1 Historique.
Le terme de valeur peut être un jugement sur la qualité d’un bien. On peut l’appréhender de 2
manières différentes :
D’un point de vue subjectif en mettant l’accent sur l’évaluation de la valeur par
l’utilité et la rareté.
D’un point de vue objectif en se centrant plus sur le coût.
Mais quand les investisseurs ou les gestionnaires parlent de valeur, ils entendent valeur
actionnariale.
On définit la VA comme « la valeur économique d’une entreprise après déduction de ses
dettes ». Ainsi, la valeur actionnariale d’une entreprise correspond à la valeur des cash-flows
futurs de l’entreprise actualisés au coût moyen pondéré du capital, moins la valeur de ses
dettes.
La définition la plus généralement admise considère que l’entreprise crée de la valeur lorsque
la rentabilité des capitaux est supérieure à leurs coûts. Pour qu’un investisseur décide de
prendre des parts dans la société il doit tenir compte du coût d’opportunité dû au capital
retenu dans cette transaction plutôt que dans une autre.
On peut faire remonter les premiers travaux sur la valeur actionnariale aux années 1950 et
1960. Le développement du concept va fortement emprunter à la théorie financière néo-
classique.
A l’origine de ce mouvement on retiendra le concept de capital valeur de Fisher (1930) à
savoir « la valeur de tout bien de capital est égale à la somme des valeurs actualisées des
revenus monétaires que la détention et la mise en œuvre de ce bien de capital permettent de
réaliser». Les travaux de Modigliani et Miller (1961-1966) vont permettre de décomposer ces
revenus en trois éléments :
La rente perpétuelle dégagée par les actifs existants au moment de l’évaluation,
Les économies futures d’impôts générées par l’endettement grâce à la déductibilité des
charges financières dans le résultat imposable,
Les revenus futurs dégagés par de nouveaux investissements.
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Leurs travaux ont aussi permis de dégager le fait que la valeur d’une entreprise est
indépendante de sa politique de dividendes.
Néanmoins le concept de valeur actionnariale ne prendra vraiment forme qu’après les
découvertes de Sharpe (1964) et Lintner (1965) sur le modèle d’évaluation des actifs
financiers (MEDAF).
Cette percée va permettre d’affirmer que les rendements perçus et escomptés par les
investisseurs sont liés au risque induit par la possession d’actifs financiers spécifiques. Ce
principe accueilli par le doute est devenu une des bases de la théorie financière à savoir que
l’augmentation du risque doit être liée à une augmentation du rendement.
Le MEDAF se trouve au centre de la valeur actionnariale, l’idée qu’il existe un facteur
d’actualisation à risque pondéré qui permet d’évaluer aujourd’hui la valeur des événements,
des profits et des cash-flows de demain. On le trouve par observation des marchés financiers
et il définit le coût d’opportunité d’un investisseur sur le marché.
Les idées du MEDAF se sont diffusées rapidement dans le secteur privé mais il a fallu
attendre la publication d’un ouvrage d’Alfred Rappaport (1986) pour connaître un réel
engouement pour la valeur actionnariale. Ce livre va mettre en évidence le lien qui unit
l’avantage concurrentiel à la création de valeur d’après les travaux de M.E Porter (1986) sur
l’avantage concurrentiel.
L’accent est mis sur l’importance des choix stratégiques de l’entreprise sur la création de
valeur mais également sur le fait que des leviers de la création de valeur (croissance du chiffre
d’affaires, marge opérationnelle, coût du capital, …) peuvent être activés afin d’optimiser la
gestion de l’entreprise. Grâce à cet ouvrage Rappaport va poser les bases d’une gestion par la
valeur.
Le problème de l’application pratique à l’entreprise va être résolu avec la publication en 1990
de Valuation de Tom Copeland et McKinsey qui va montrer que l’utilisation de la valeur
actionnariale en entreprise est réalisable mais aussi souhaitable : « en tentant de maximiser la
valeur de leur propre part, les actionnaires maximisent la valeur de tous les autres » (p.62).
En disant cela, les auteurs affirment que la création de valeur est bénéfique pour l’entreprise
mais aussi pour tous ses partenaires.
A l’issue de cette évolution la valeur actionnariale s’est imposée comme le modèle dominant
même si plusieurs de ses fondements font l’objet de discussions.
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Tout d’abord les tenants de l’idée de la valeur actionnariale ont émis des doutes sur la notion
de profit qui est une base de la théorie néo-classique, la théorie financière appliquée ici retient
l’idée que la richesse des actionnaires s’entend comme la capitalisation boursière de
l’entreprise. Les hypothèses retenues par la théorie financière (indispensables à sa cohérence)
paraissent aussi sujettes à la discussion.
Les hypothèses principales sont au nombre de trois :
L’efficience
Cette hypothèse de marché efficace (Efficient Market Hypoythesis – EMH) postule que les
prix observés sur le marché des actions sont des estimateurs sans biais de la vraie valeur
économique des sociétés émettrices. Dans le cas de la valeur actionnariale on va jusqu’à
parler de « forme forte » de l’hypothèse d’efficience des marchés. Pour Fama (1970) la
valeur de l’entreprise correspond à la maximisation de la valeur de ses actions.
La rationalité
Cette hypothèse met en avant le rôle de la théorie néo-classique dans la théorie de la valeur
actionnariale. La rationalité signifie que l’individu choisit selon un ordre de préférence avec
une information parfaite et sans coûts. Dans le cas d’une entreprise celle-ci va maximiser son
profit sous la contrainte de sa capacité technologique.
La symétrie de l’information
Ici on postule que le marché financier est aussi bien informé sur la valeur d’une entreprise et
sur son potentiel que les dirigeants eux-mêmes.
C’est à partir de ces trois hypothèses qu’on peut affirmer que « la valeur est égale à la valeur
actuelle des dividendes que les actionnaires recevront dans le futur. »2
A partir de toutes ces hypothèses, une autre notion importante va être mise à jour : les
méthodes comptables traditionnelles sont insuffisantes pour déterminer la valeur réelle d’un
titre il faut recourir à d’autres outils de la théorie financière.
Pour mesurer la valeur les investisseurs avaient besoin d’un modèle fiable pour établir les
corrélations entre la valeur et le cours de l’action d’une entreprise.
Le cours du titre sera donc évalué par la valeur actuelle des cash-flows d’une société. On va
actualiser le cash-flow attendu à un taux au moins égal à celui du capital pour évaluer le profit
net dégagé se répercutant sur le bénéfice et la valeur des actions. Le cash-flow désigné ici est
2 J.Caby, G.Hirigoyen, La création de valeur dans l’entreprise, Economica
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le « cash-flow libre » de MC. Jensen (1990) c'est-à-dire le cash-flow en excès après
distribution des fonds pour les projets retenus. Ce « cash-flow libre » doit être reversé aux
actionnaires. Ce principe attribue aux marchés financiers un comportement se basant sur une
perspective de long terme. Cette notion tient compte à la fois de la croissance, du rendement
et du risque. C’est grâce à cette nouvelle vague de modèles d’évaluation (avec aussi les
méthodes : par les fonds propres, par les dividendes perçus ou par l’EVA®/MVA®) que la
valeur actionnariale a pu être applicable.
La signification de la création de valeur pour l’actionnaire par le MEDAF.
L’objectif de la création de valeur pour l’actionnaire implique de dégager un profit (net des
charges financières) qui soit supérieur au coût de l’apport en fonds propres : l’actionnaire
pourra profiter d’un gain dès lors que les bénéfices qu’il empoche sont supérieurs au coût du
capital qu’il a apporté à la firme. Ce coût est considéré comme un coût d’opportunité. Il s’agit
du rendement exigé ex ante par les actionnaires, en deçà duquel leurs anticipations se
dégradent. Ce dernier que l’on note re, nous est donné par l’équation fondamentale du
MEDAF (Sharpe, [1964]) :
))(( rrErr Me
Avec β le risque non-diversifiable de l’entreprise, E (rM) l’espérance de rendement obtenu sur
le marché des capitaux à risque, et r le taux de rendement de l’actif sans risque. Le rendement
exigé par les actionnaires est donc égal au rendement de l’actif sans risque, auquel vient
s’ajouter une prime de risque. Celle-ci a deux composantes : le prix du risque agrégé, à savoir
la différence entre le rendement espéré du portefeuille de marche et le rendement de l’actif
sans risque, et la sensibilité à ce risque du titre considéré, mesuré par βe. Ce dernier est par
définition égal a :
2
),cov(
Mr
Mi rr
Avec cov (ri, rm) la covariance entre le taux de rendement de l’actif de la firme i et le taux de
rendement du portefeuille de marché, et 2
Mr la variance du portefeuille de marché.
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Si le bêta est égal à l’unité, cela signifie que le rendement du portefeuille de marché et celui
de l’actif i varient dans la même proportion ; par conséquent, le rendement exigé par
l’actionnaire sur l’actif i est le même que celui exigé sur le portefeuille de marche.
1.2 Les grands models de la création de valeur.
L’approche de la rentabilité économique et financière conduit directement a la notion de
création de valeur, simplement parce que la création de valeur est possible si le rendement des
capitaux investis est supérieur au coût des capitaux de l’entreprise, ou plus précisément au
coût de sa dette et de ses fonds propres (cf. ci-dessus).
Néanmoins, il existe deux types d’indicateurs de création de valeur opposés, l’un en relation
directe avec la mesure de ses performances boursières de l’entreprise, l’autre en relation
directe avec la mesure de ses performances internes.
1.2.1 La création de valeur pour l’actionnaire par la performance
boursière.
Les tenants du concept de la création de valeur affirment qu’il existe une « bonne »
corrélation entre les indicateurs et l’évolution à terme des cours de bourse ; meilleur qu’avec
le bénéfice par action (BPA) ou le célèbre Price Earning Ratio (PER).
En d’autres termes, les sociétés qui sont soucieuses de l’intérêt de leurs actionnaires et qui ont
fait leurs preuves dans le passé continueront à avoir de bonnes performances. Affirmation
contestée compte tenu de l’évolution rapide des technologies et de l’efficiences des marchés.
Conseil prudent considèrent qu’un management obsédé par la valorisation de l’action ne
prendra que de « bonnes » décisions (d’investissement ou de financement) pour l’actionnaire.
Aux Etats-Unis, certain analyste ont observé que le simple fait pour les dirigeants de se
réclamer de la création de valeur faisait grimper le cours de bourse sous le jeu des
anticipations !
En premier lieu nous pourrons regarder l’indicateur de la performance boursière de
l’entreprise qu’est le ratio Q de James Tobin mais aussi le Bénéfice Par Action (BPA) puis
nous introduirons le Total Shareware Return (TSR) ainsi que le Marker To Book (MTB) sans
oublier le Marquet Value Added (MVA®) dérivé de l’Economic Value Added (EVA®).
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1.2.1.1 Le ratio Q de James Tobin.
La problématique rencontrée par les investisseurs repose sur une thématique assez simple : les
actifs économiques de la société sont évalués en valeur historique ou en valeur comptable, et
non pas en fonction de la valeur de marché. La différence entre ces deux valeurs est en réalité
la « création de valeur ». Soit
actifsdesntremplacemedevaleurouhistoriquevaleuroucomtablenetteValeur
actifsdesmarchédeValeurQ
___________
____
Le ratio Q est un indicateur permanent de l’évaluation que les investisseurs font de
l’entreprise, de ses dirigeants et de leurs choix et perspectives stratégiques. Lorsque Q est
supérieur à 1, l’entreprise crée de la valeur ; elle en détruit s’il est inférieur à 1.
Limites :
Les critiques les plus importantes portées au ratio Q de Tobin sont qu’il ne tient pas compte
des actifs immatériels dans l’évaluation du coût de remplacement des actifs et surtout à la
difficulté de mesurer ces coûts. Dans de nombreuses études cette dernière difficulté est
surmontée en considérant que la valeur comptable des actifs inscrits au bilan représente une
mesure acceptable. De même il est fréquent que la valeur « de marché » des dettes bancaires
soit estimée par la valeur bilancielle. L’importance actuelle des actifs immatériels conduit
cependant à supposer que les performances estimées à partir du Q Tobin sont
vraisemblablement surévaluées.
1.2.1.2 Le Bénéfice Par Action.
Le Bénéfice par action (BPA) reste encore l’outil auquel se référent beaucoup de financiers
d’entreprise pour l’évaluation d’une entreprise cotée. De surcroît son calcul est nécessaire à la
formule du PER (Price Earnings Ratio) qui se pose lui aussi comme une référence
incontournable des marchés.
De façon simple, il mesure le bénéfice après impôts dégagé pour chaque action ordinaire.
On le calcule comme le bénéfice net avant pertes ou gains extraordinaires moins les
dividendes versés aux détenteurs d’actions privilégiées, divisé par le nombre d’actions
ordinaires en circulation à la fin du plus récent exercice fiscal.
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ordinairesactionsdNombre
esprivilégiéactionssurDividendesnetBénéficeBPA
_'_
____
Le BPA est surtout utile pour comparer le niveau d’une action par rapport à des titres d’un
même secteur d’activité voire pour des titres appartenant au mêmes indice.
Il traduit l’enrichissement de l’actionnaire sur un exercice, c’est le montant théorique pour
chacune des actions que détient l’actionnaire.
Le niveau du BPA reflète aussi la façon dont les investisseurs anticipent l’évolution future des
bénéfices de l’entreprise par :
L’évolution du résultat net
Le changement possible du nombre d’actions (augmentation du capital, rachat
d’actions, fusion acquisition, cessions d’activités, etc.…)
C’est l’évolution possible du nombre d’actions qui pose un problème de calcul, les opérations
financières ayant un impact sur le BPA :
Impact dilutif : on procède à une augmentation du capital (nombre d’actions en
augmentation avec un résultat net identique. Alors le BPA va baisser.
Impact relutif : cas du rachat d’actions par la société (nombre d’actions diminue avec
un résultat net identique). Le BPA va augmenter.
Ces facteurs contribuent à compliquer le calcul du BPA qui sans eux est très simple. Dans la
même orientation on se trouve face à un problème avec l’existence de titres non ordinaires,
(actions privilégiées convertibles, options et bons de souscription) si l’on en tient pas compte
le calcul du BPA sera inexact.
L’évolution du BPA :
La modification du BPA présente des conséquences pour une firme, un BPA négatif
s’interprétant comme une perte par action. Du fait de l’importance faite à cet indicateur, une
variation inattendue entraîne souvent de fortes variations de cours dans un sens comme dans
l’autre.
La variation du BPA permet aussi de former une hypothèse sur la pertinence de l’évaluation
d’une entreprise. Les niveaux les plus faibles de BPA indiquent un risque plus élevé, on peut
donc formuler le souhait d’un rendement supérieur. Inversement, des BPA très élevés peuvent
être déduis des forts taux de croissance de court terme, l’expérience ayant montré qu’on ne
pourra les tenir sur du moyen et long terme, ces actions sont donc trop chères par rapport à
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leur valeur réelle. On peut donc anticiper une réaction du marché qui va venir corriger ces
écarts.
On jugera d’une possible sous ou surévaluation par rapport à un échantillon d’un même
secteur d’activités.
Malgré sa popularité on ne peut utiliser seulement le BPA comme outil de mesure de la
création de valeur.
Limites :
D’après Quiry, le Fur (2000), l’utilisation du bénéfice par action est fondée sur trois méprises :
« Croire que le BPA prend en compte le coût des capitaux propres et donc le risque ».
« Croire que les données comptables ont une influence sur la valeur d’une entreprise.
Ce n’est pas en changeant de méthode comptable qu’on peut modifier la valeur d’une
entreprise même si on fait varier le cours de l’action ».
« Croire que toute décision financière qui tend à faire croître le bénéfice par action fait
croître la valeur. »
Il faudra respecter certaines conditions pour pouvoir définir le BPA comme un indicateur de
création de valeur.
1.2.1.3 La Total Shareholder Return (TSR).
La TSR ou rentabilité totale pour l’actionnaire représente ex post la rentabilité de
l’investissement hors inflation et, ex ante, le taux de rentabilité espéré par l’actionnaire. La
création de valeur « actionnariale » dépend dans le modèle du TSR de l’évolution des cours et
de la valeur capitalisée des dividendes. Selon les utilisateurs, cette approche tient compte de
l’imposition des plus-values et des dividendes, dans ce cas, il s’agit du TSR net, dans le cas
contraire, du TSR brut.
0
101 )(
P
DPPTSR
Ou 1
0
11
P
DPTSR
Ou 1P = Le prix de l’action en fin d’année
0P = Le cours de souscription de l’action, la différence avec 1P donnant la plus-value
1D = Le dividende versé majoré de l’avoir fiscal.
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On peut donc réécrire cette équation de façon à montrer que le prix actuel de l’action intègre
la richesse anticipée par l’actionnaire
)1(
110
TSR
PDP
Le prix actuel 0P est le prix que tout investisseur acceptera de payer pour acquérir des titres
de l’entreprise. Il est égal à la valeur actualisée des liquidités attendues à un taux qui
correspond au rendement anticipé de l’investissement. Pour simplifier, on raisonne souvent
sur l’infini, le modèle se réduit alors à :
13
3
2
210
)1()1(.........
)1()1()1( tt
t
TSR
D
TSR
D
TSR
D
TSR
D
TSR
DP
Limite :
Le TSR effectif est couramment publié pour des durées de un, cinq et dix ans pour les
entreprises américaines. Des entreprises françaises donnent leur TSR dans leur rapport annuel.
On notera cependant que très peu d'entreprises publient leur coût d'opportunité des fonds
propres si bien que l'évaluation précise de la performance reste difficile. Il faut dire que cette
estimation reste un sujet très délicat et il n'est pas rare que les analystes financiers divergent
assez fortement sur le taux à retenir. Cela constitue à l'évidence un sérieux handicap pour la
mise en oeuvre d'indicateurs de type TSR et justifie la pratique du « benchmarking » entre
pairs d'un même secteur d'activité3.
1.2.1.4 Le Market To Book (MTB).
Le ratio Market To Book (MTB) rapproche la capitalisation des actions et les capitaux propres
de l’entreprise. Il met en œuvre la moyenne actuelle de la capitalisation des titres de capital et
des titres de créances. La formulation qui détermine la création de valeur est la suivante :
3 Cite « Les échos » http://www.lesechos.fr/formations/strategie/articles/article_4_10.htm
- 18 -
propresCapitaux
actionsdestionCapitalisaBookToMarket
_
____
Si le rapport est supérieur à 1, les anticipations des actionnaires sont optimistes quant à la
capacité de la firme à créer de la valeur. A l’inverse, lorsque la situation nette est supérieur à
la valeur de marché, le ratio MTB est inférieur à 1, autrement dit les actionnaires anticipent
une destruction de valeur.
Limites :
Le ratio MTB ne mesure pas dans l’absolue la valeur créée (plutôt le potentiel de création de
valeur) mais représente des indices relatifs à la création de valeur.
De plus le ratio MTB ainsi que le Q Tobin font appel à une norme identique. C'est-à-dire
qu’un ratio montrant une création de valeur (valeur supérieur à 1) laisse supposer que la
rentabilité anticipée est supérieure à la rentabilité requise à l’équilibre par les différents
apporteurs de capitaux, évaluée par le CMPC (Coût Moyen Pondéré du Capital)4.
1.2.1.5 Le Market Value Added (MVA®).
Comme l’EVA®, le concept de MVA® a été introduit par le cabinet Stern Stewart, il
constitue un complément à l’EVA® dans le sens où il permet de le relier au marché en
considérant les EVA® des périodes futures. Selon Stern et Stewart (1982) il s’agit de mesurer
« l’utilisation que l’entreprise a faite du capital qui lui a été apporté ou confié par ses
actionnaires »
Il sert notamment à l’évaluation des sociétés il est un des critères (avec l’EVA®) du
classement du journal L’Expansion sur les sociétés les plus créatrices de valeur.
Si l’EVA® a pour objectif de mesurer le profit économique sur une seule période, on peut
obtenir le profit économique (anticipé et actualisé) sur l’ensemble des périodes à venir en
actualisant la chronique des EVA® futures au coût du capital. Cette valeur est appelée
« Market Value Added » ou MVA®. Elle s’exprime en valeur monétaire.
La valeur ajoutée de marché (MVA®) d’une firme s’analyse comme l’écart entre la
valeur de marché de la firme et son capital :
4 Article de Gérard Charreaux « Le point sur la mesure des performances des entreprises » parut dans Revue
Banque & Marchés du 05/1998 n°34 pages 46-51
- 19 -
économiqueactifldecomptabletMon
économiqueactifldemarchédeValeurMVA
_'___tan
_'____
Si l’hypothèse d’efficience des marchés est vérifiée alors on peut analyser la différence
comme la valeur des quasi-rentes acquises par la firme en situation de concurrence
monopolistique.
La MVA® permet donc de mesurer la création/destruction de valeur d’un investissement en
fonction d’un niveau de ressource donné : le capital investi.
Ici, la création de valeur est approximée par la différence entre capitalisation boursière et
montant comptable des capitaux propres.
Le rapport établi entre l’augmentation de la valeur et les capitaux investis dans cet objectif
expliquent la supériorité de cette méthode sur une évaluation par le cours boursier.
L’analyse de l’évolution de la MVA® permet de savoir si la gestion de l’entreprise crée ou
détruit de la valeur sur le long terme. Elle concerne tous les apporteurs de capitaux et pas
seulement les actionnaires.5
Si la MVA® est positive, le marché anticipe une rentabilité supérieure au coût du
capital. La MVA® reflète ici les perspectives futures de la firme
Si la MVA® est négative, le marché estime que la firme générera des rentabilités plus
faibles que son coût du capital.
Relation avec l’EVA® :
Au-delà d’une filiation commune (cabinet Stern-Stewart), l’EVA® et la MVA®
présentent une réelle congruence.
La MVA® étant la valeur marchande moins le capital investi on peut la définir comme
la VAN des investissements actuels et futurs de l’entreprise. Elle représente une mesure de
performance externe par le marché (l’EVA® est une mesure de performance interne).
L’EVA® représente le potentiel, sur une période donnée, du capital investi à créer de la
valeur.
La MVA® peut être calculée comme la valeur actuelle des flux futurs d’EVA®.
On peut donc l’écrire aussi sous la forme :
5 Octave Jokung-Nguéna, Introduction au management par la valeur, Dunod
- 20 -
n
tt
t
CMPC
EVAMVA
1
0)1(
(Hoarau et Teller 2001) « Une entreprise peut bénéficier d’une MVA® positive et réaliser
pour la dernière période étudiée une EVA® négative. Mais si l’EVA® reste négative sur
plusieurs années, la MVA® se réduira progressivement."
On peut assister à des différences de « signe » entre EVA® et MVA®, l’une peut être positive
et l’autre négative.
Dans ce cas de figure (et en cas d’anticipations rationnelles), si la MVA® est négative et
l’EVA® positive, le cours de l’action devrait progresser.
A l’inverse en cas d’EVA® négative et d’une MVA® positive, une baisse du cours est
probable, les investisseurs se rendant compte qu’ils ont trop anticipé sur la capacité à créer de
la valeur de l’entreprise.
Limites:
Basé sur l’hypothèse d’efficience des marchés, la MVA® souffre de la mise en cause de son
fondement. En effet, si elle n’est pas vérifiée, la MVA® va reposer sur des valeurs boursières
risquant d’être volatiles et donc de fausser le calcul.
On peut citer les mêmes problèmes que ceux de l’EVA® pour les retraitements et ajustements
du bilan, trop nombreux et complexes ils fragilisent l’application de la méthode.
Le caractère « boursier » de cet indicateur pose aussi problème :
Même si l’entreprise a réussi à tirer de son actif économique une rentabilité supérieure au coût
du capital, il peut y avoir destruction de valeur en cas d’anticipations de profits futurs revus à
la baisse par les marchés. L’inverse peut se produire en cas d’euphorie boursière avec un
faible rapport entre les performances et la MVA®.
Sur un horizon de long terme on peut penser que les valeurs s’équilibreront mais il n’en reste
pas moins qu’à court terme on peut assister à de gros écarts.
L’AMF en vient même à prôner dans un de ses rapports6 une séparation claire entre
indicateurs « économiques » et « boursiers » pour mieux communiquer sur les résultats.
6 http://www.amf-france.org/documents/general/3872_1.pdf.
- 21 -
Même si son apport au niveau conceptuel est modeste, que son efficacité pratique reste
matière à débat ; La combinaison EVA®/MVA® s’est affirmée comme la plus universelle et
se trouve présente dans la plupart des classements d’entreprises sur la création de valeur.
Elle a bénéficié d’une évolution du rapport de force au sein de l’entreprise en faveur de
l’actionnaire et a banalisé la « création de valeur » comme une satisfaction des intérêts des
actionnaires.
L’indicateur suscitant le plus large consensus est la VAN, l’avantage de l’EVA®/MVA® est
de le reprendre à son compte à l’échelle de toute l’entreprise et plus seulement d’un
investissement. En outre elle insiste plus sur la notion de rentabilité financière et sa
maximisation.
Nous avons pu constater durant l’énumération des différentes méthodes de calcul de la
création de valeur par la performance boursière que ceux-ci ne sont en aucun cas suffisants
pour pouvoir décider d’investir ou non. Car si il est vrai que ces ratios permettent de savoir si
du point de vue du marché l’entreprise est viable ou non, il en est différent quant a la qualité,
l’efficacité de la direction de l’entreprise. C’est pourquoi il existe d’autres modes de calcul de
la création de valeur qui sont orientés vers les manageurs de l’entreprise et leur performance.
1.2.2 La création de valeur pour l’actionnaire par la performance
interne de l’entreprise
L’objectif assigné aux dirigeants a toujours été de maximiser la valeur des capitaux investis
par les actionnaires. Cet objectif qui semblait hier « théorique » et tout juste bon à dériver
quelques règles de choix d’investissement et de financement est aujourd’hui en passe de
devenir une réalité managériale dans les entreprises françaises. D’où les différentes
propositions pour associer les dirigeants, voir le personnel, aux performances financières de
l’entreprise que ce soit par les stocks options, ou d’autre formules de participation.
Cette performance ce mesure à l’aide de divers indicateur ; les principaux d’entre eux sont :
_ La Valeur Actualisé Nette (VAN)
_ Le Ratio Return on Equity (ROE), Return On Investment (ROI),
Return on Assets (ROA), Return on Capital Employed (ROCE)
_ Le Earning Before Interest and Taxes (EBIT)
_ Le Cash-flow On Investis ment (CFROI)
- 22 -
Ces indicateurs sont rapprochés des capitaux investis ou engagés et permettent l’analyse de la
création de valeur. Par ailleurs, l’indicateur le plus utilisé est l’Economie Value Added
(EVA®) qui contribue a une bonne analyse de la performance économique par le biais du
coût moyen pondéré.
1.2.2.1 La valeur actualisée nette (VAN).
La VAN est l’indicateur le plus représentatif de cette catégorie des indicateurs économiques.
La VAN représente l’écart entre la valeur actuelle et la valeur à laquelle le titre où l’actif peut
être acquis7. Dans le cas d’un investissement, la VAN représente la différence entre les flux
de trésorerie actualisés au taux de rentabilité exigé par le marché (compte tenu du risque) et le
montant initial de l’investissement. De fait elle indique donc l’enrichissement de l’entreprise
provenant de la concrétisation de l’investissement. Donc :
Ir
CFVAN
n
tt
t
1 )1(
Ou CF = flux de trésorerie actualisé
I = Montant de l’investissement initial, il est négatif car il représente un investissement.
Deux cas se présentent :
La VAN est positive, dans ce cas l’anticipation de cash-flows futurs est plus
importante que son montant initial (Valeur de marché s’il s’agit d’un titre financier).
On décide de sélectionner cet investissement pour avoir une plus-value. On peut dire
qu’une VAN positive crée de la valeur en dégageant une rente pour l’actionnaire8 .
La VAN est négative, sa valeur actuelle est inférieure à sa valeur de marché, il faut
vendre le titre car sa valeur de marché va diminuer.
Pourquoi la valeur de marché diminue t’elle ?
On se place dans la théorie des marchés efficients à l’équilibre :lors d’un déséquilibre entre la
valeur actuelle et la valeur de marché, les marchés efficients vont rétablir l’équilibre entre
valeur actuelle et valeur de marché , la VAN deviendra donc nulle.
7 Pascal Quiry Yann le Fur, Finance d’entreprise, Dalloz
8 Gérard Charreaux, http://perso.orange.fr/gerard.charreaux/perso/articles/Echanges0998.pdf
- 23 -
La force de la VAN est sa capacité à intégrer toutes formes de projets de l’entreprise
susceptible de générer un flux de trésorerie.
On peut interpréter la VAN de 3 façons différentes9 :
Elle représente le montant de la valeur crée par l’investissement
C’est aussi le montant supplémentaire maximal que l’investisseur est prêt à payer pour
réaliser cet investissement.
Enfin c’est l’écart entre la valeur actuelle et la valeur du marché.
Attributs :
La VAN est calculée à partir des flux de liquidité futurs. Ils sont générés par un projet
et peuvent être répartis de plusieurs manières (versement de dividendes, nouveaux
investissements,….).Elle représente les mouvements de trésorerie.
La VAN prend en compte l’ensemble des flux de liquidités d’un projet alors que
d’autres approches ignorent les flux au-delà d’un certain temps.
La VAN actualise correctement les flux de liquidités en prenant en compte l’effet du
temps sur la valeur de l’argent.
Limites :
On le voit dans la formule, l’exactitude de la VAN repose en grande partie sur le choix du
taux d’actualisation, malgré toutes les précautions possibles il est prévisible qu’il y ait des
erreurs tellement il est difficile à estimer.
Dans la réalité le calcul de la valeur actuelle (s’étendant sur plusieurs périodes) est
remarquablement long et complexe, c’est pourquoi on a fréquemment recours à des
simplifications (hypothèse de perpétuité, annuité,…) qui même si elles permettent de pouvoir
appliquer la méthode la biaisent quelque peu et peuvent parfois induire en erreur.
La seule prise en compte de la VAN ne permet de comparer des projets que si
l’investissement initial est identique, le chef d’entreprise choisissant la mise de fonds la plus
faible pour une même VAN.
9 Pascal Quiry Yann le Fur, Finance d’entreprise, Dalloz
- 24 -
1.2.2.2 Ratio Return on Equity (ROE).
Le retour sur fond propre ROE mesure l’efficacité avec laquelle l’entreprise utilise le
capital mis à sa disposition ; en définitive, il représente la rentabilité du capital.
propresCapitaux
comptablenetBénéficeROE
_
__
On n’emploie le ROE que dans le cadre de comparaisons dans un même secteur compte tenu
de sa sensibilité à l’activité et au secteur de l’entreprise concernée. Généralement on
considère que les entreprises doivent atteindre puis dépasser un ROE de 15%. C’est
principalement par la réalisation de cet objectif que les firmes peuvent attirer des investisseurs
potentiels.
Limites :
Pour Stewart10
Il peut être l’objet de manipulations comptables. Les firmes cherchant à
réduire les capitaux propres pour augmenter le ROE. Il se pose également le problème
des charges comme les frais de recherche et développement traités en tant que
« charges de période » (amputant ainsi le résultat net) alors qu’ils contribuent à la
croissance future de l’entreprise.
Le ROE ne rend pas compte de la situation financière de l’entreprise. Le ROE est
sensible aux changements entre niveau des fonds propres et dettes. Si on vise à réduire
le capital engagé on peut avoir recours à l’endettement ce qui présente un risque
conjoncturel et un risque financier pour les actionnaires. Les dirigeants seulement
guidés par un objectif de taux à 15% risquent d’écarter les projets qui demanderaient
une augmentation des fonds propres. On pourrait donc entrer dans un spiral récessive
du fait d’un manque d’investissement et de la priorité accorder à la réduction des coûts
(« downsizing »).
Alors que le vrai levier de la création de valeur reste une rentabilité économique élevée sur le
long terme, le ROE se présente comme un outil de performance de court terme sans notion du
risque encouru. Cet indicateur (pourtant fréquemment employé) ne peut à lui seul fournir une
indication pour les actionnaires sur la création ou destruction de valeur par l’entreprise11
.
10
Stewart, G.Bennet 1990. The quest for value: the EVA® management guide. Harper Business, 1990 11
Isabel Elsje Liebenberg (2004), op cit
- 25 -
1.2.2.3 Return On Investment (ROI).
Le retour sur investissement (ROI) permet d’estimer la rentabilité d un projet au regard de
l’investissement nécessaire a sa réalisation. Les indicateurs habituellement utilisés sont soit le
taux de rendement interne, soit la valeur actualisée nette (VAN). Pour calculer le ROI, le
bénéfice d’un investissement est divisé par le coût de l’investissement. Le résultat est exprimé
sous forme de pourcentage ou de ratio.
mentinvestisseldeCoût
mentinvestisseldecoûtmentinvestisseldeGainROI
'__
)'__'__(
Si l’investissement visé n’a pas un ROI positif ou si d’autres projets en ont un plus élevé alors
il ne doit pas être entrepris.
Le ROI est devenu très populaire grâce à son adaptabilité et à sa simplicité. Son adaptabilité
vient du fait que le ROI peut mesurer plusieurs facteurs : l’efficacité de gestion, une mesure
de bénéfices ou d’économies. Il peut aussi être utilisé pour mesurer l’efficacité de l’entreprise
à atteindre ses objectifs. Il permet aussi d’apprécier la contribution d’un projet pour
l’ensemble de la stratégie.
Limites :
Néanmoins le ROI souffre de son adaptabilité compte tenu que le calcul du ROI peut
facilement être manipulé pour convenir aux intérêts des manageurs. L’utilisation du ROI
nécessite de savoir quelles données ont été utilisées. Le ROI pousse les manageurs à ne
sélectionner que des projets qui soient rentables rapidement pour plaire aux investisseurs
intéressés par des plus values rapides et importantes. Ainsi les projets qui permettraient
d’accroître l’avantage concurrentiel dans le futur sont délaissés car ils ne génèrent pas
suffisamment de cash au présent. C’est à cause de son penchant pour le court terme qu’il a été
délaissé.
- 26 -
1.2.2.4 Earning Before Interest and Taxe, Depreciation and Amortization (EBITDA)
Le bénéfice avant intérêt et impôts (EBITDA) rapproche de la totalité des intérêts mesure la
capacité financière d’une entreprise à assurer le service de sa dette. L’EBITDA correspond au
bénéfice généré indépendamment de la structure financière et fiscale de l’entreprise.
Techniquement, si le coefficient est élevé, la capacité à faire face aux charges financières est
bonne.
EBITDA
entamortissemdDépenses
ondépréciatideDépenses
loitationdRésultatEBIT
loitationdDépenses
nettesVentes
'_
__
)exp'_(
exp'_
_
L EBITDA mesure les modalités de formation du résultat lié à l’exploitation et à
l’investissement de l’entreprise, il permet le calcul de la rentabilité économique. La différence
entre l’EBE (Excedent Brut Exploitation) et l’EBITDA réside dans la prise en compte du
processus d’investissement sans exclure les charges calculées (dotation aux amortissements et
provisions d’exploitation). L’analyse de l’EBITDA passe par la répartition de ce résultat entre
les charges financières, l’impôt sur les sociétés, les dividendes et le résultat mis en réserves.
Cet agrégat est simple d’utilisation et s’adapte aux spécificités sectorielles. Il est censé refléter
la véritable capacité bénéficiaire d’une activité, indépendamment des politiques
d’investissement, de la fiscalité et des structures d’endettement.
Limites :
Il n’existe aucune définition normative du terme, ainsi d’une société ou d’un
exercice à l’autre, l’EBITDA ne se calcule pas toujours de la même manière et par
conséquent, il n’est pas systématiquement comparable.
Une analyse réduite au seul EBITDA peut masquer totalement l’obsolescence d’un
outil industriel ou une insuffisance des dépenses d’équipement, éléments de nature
à remettre en cause la rentabilité ultérieure de l’entreprise.
- 27 -
1.2.2.5 Cash-flow Return On Investment (CFROI)
Le CFROI (Cash-Flow Return On Investment), littéralement le retour sur investissement
développe par Copeland, Koller et Murrin (1990) pour le cabinet McKinsey, peut être
présenté comme une évolution du ROI. « Le CFROI correspond dans sa version originale à la
moyenne des taux de rentabilité interne des investissements de l’entreprise », en effet il est
basé sur le cash-flow, et on l’utilise généralement en le comparant au coût réel du capital pour
avoir une indication sur la qualité de l’investissement. C’est un taux de rendement de tous les
investissements réalisés par une entreprise. Ces capitaux engagés dégagerons des flux de
trésorerie d’exploitation (Operating Cash-Flow OCF ou Cash-Flow d’Exploitation CFE).
BFREDAPERECFE )1(
Avec RE le résultat d’exploitation, le taux d’impôt sur les sociétés donc )1( RE le
résultat d’exploitation après impôt (ou en anglais NOPAT Net Operating Profit After Taxes),
DAPE les amortissements et provisions d’exploitation et BFRE le besoin en fond de
roulement d’exploitation.
En fait les CFROI peuvent être définis comme le rapport entre la valeur des CFE actualisées
au coût moyen pondéré du capital (CMPC, qui représente la moyenne des coûts des capitaux
engagés : capitaux propres et dettes financières nettes pour l’exploitation de l’entreprise), et le
montant des actifs économiques bruts (AEB) engagés dans le projet soit
AEB
CMPCCFE
CFROI
n
t
t
t
1
)1(
La comparaison du CFROI au CMPC permet d’estimer la création ou la destruction de valeur.
La multiplication de l’écart par les capitaux engagés fournit une estimation directe de la rente
économique (re)
AEBCMPCCFOIre )(
Si le CFROI est supérieur alors l’entreprise a crée de la valeur, le contraire signifie qu’elle en
a détruit.
- 28 -
Le CFROI dans son utilisation permet de dépasser le cadre étroit de l’évaluation de l’action
qui était celui du ratio Q, on peut même aller plus loin en pensant que le concept du retour
financier sur l’investissement a permis d’approfondir l’idée du ratio Q.
Là où un ratio Q permet de savoir si la Bourse évalue les actifs d’une entreprise à une somme
supérieure à leurs valeurs réelles pour évaluer la création de valeur actionnariale, le CFROI va
plus loin en fournissant une évaluation de l’entreprise comme si elle constituait un
grand « projet » dont le montant au début d’une période donnée est le total des capitaux
engagés.
Les CFROI peuvent évaluer le taux de rendement de tous les investissements y compris ceux
financés par la dette. Ils peuvent donc être employés pour évaluer une entreprise dans son
ensemble plutôt que du simple point de vue de l’actionnaire.
Il faut considérer que la valeur ne provient pas seulement des actifs actuels mais aussi des
investissements futurs. Le cabinet Holt, un des leaders de la CFROI, propose un taux de
baisse appelé « fondu » symbolisant la baisse du rendement de l’investissement jusqu’au coût
du capital moyen. Ce taux est évalué empiriquement par une observation antérieure du
marché.
On peut aller chercher du côté de la théorie des marchés à l’équilibre la justification de cette
difficulté à crée durablement de la valeur. Cette interprétation de la notion de valeur résiduelle
amène à considérer que la valeur de la firme dépend à la fois du CFROI sur les actifs en place
et de la vitesse avec laquelle le CFROI diminue jusqu’au CMPC. En outre, elle permet de
mettre en évidence l’avantage compétitif d’une entreprise sur une certaine période et de se
protéger contre l’idée que les rendements actuels d’un investissement ne varieront jamais.
La prise en compte de la durée de vie des capitaux employés a largement contribué au succès
de cet indicateur.
Les recommandations de sociétés comme le Boston Consulting Group quand à l’application
de cette méthode indiquent de coupler le CFROI au taux de croissance ainsi qu’à des
prévisions portant sur les évolutions de ces indicateurs. On comparera alors ces résultats avec
les valeurs moyennes représentant la concurrence ou plus généralement de l’ensemble de
l’économie.
Cette approche permet de tenir compte de l’environnement concurrentiel et du cycle de vie.
L’application de la méthode permet de dégager des recommandations de gestion .Pour
augmenter la valeur de la firme on peut :
Augmenter le CFROI des actifs pour un investissement brut donnée
- 29 -
Réduire la vitesse avec laquelle le CFROI diminue vers le coût du capital et la raideur
de la pente de la courbe de descente.
Limites :
Malgré le succès qu’elle rencontre, l’approche CFROI présente tout de même quelques limites.
On l’a vu auparavant et à l’instar de l’EVA®, le calcul du CFROI fait appel à des
retraitements comptables nombreux qui sont indispensables à l’efficacité de la méthode.
L’application rigide de la règle peut poser problème : une entreprise ancienne même si elle est
pérenne peut être pénalisée par l’ancienneté des ses actifs avec un coût associé trop élevé.
On peut également objecter que le résultat du calcul donne un pourcentage et la relation avec
la valeur de la firme paraît moins intuitive qu’avec l’EVA®.
Une critique plus grave encore montre que les dirigeants peuvent faire augmenter le CFROI
tout en baissant la valeur de l’entreprise. On peut distinguer plusieurs dysfonctionnements :
Réduire l’investissement brut : la valeur dégagée étant le produit des capitaux engagés
(CE) et du CFROI, il devient possible d’accroître le CFROI mais de finir avec une
faible création de valeur.
Sacrifier la croissance future : Le CFROI se concentre sur les actifs existants sans
intégrer la croissance future. Si les dirigeants décident d’augmenter le CFROI aux
dépens de la croissance future, on aura une réduction de la valeur.
La gestion du risque : Bien que le CFROI soit comparé au coût réel du capital pour
savoir si la firme crée ou non de la valeur, il n’en reste pas moins que l’évaluation de
la firme se base sur les cash-flows futurs . Même si la firme augmente l’écart entre le
CFROI et le coût du capital, elle peut détruire de la valeur si le fait d’avoir un coût du
capital supérieur au présent excède un CFROI plus important.
On ne peut donc pas se fier aveuglément à une augmentation du CFROI pour en conclure que
la firme à créer de la valeur, il faut prendre en compte le coût d’une croissance faible, d’un
risque plus fort.
Malgré tout le CFROI est devenu le deuxième indicateur de référence (après l’EVA®).
- 30 -
1.2.2.6 Le model de Stewart: Economic Value Added (EVA®).
La méthode EVA® a acquis une position dominante sur le marché des indicateurs de valeur,
elle est de loin la méthode la plus utilisée, même si sa mise en œuvre reste délicate. Elle a été
proposée par le cabinet Stern Stewart et la réussite de grands groupes l’ayant adoptée (Coca-
Cola par exemple) lui a offert une renommée grandissante.
L’EVA® est un concept issu de la théorie économique puisqu’elle trouve sa source dans la
notion de « profit économique » qu’avait mis en avant Alfred Marshall12
en 1890.
Pour Stewart la création de valeur par la valeur ajoute ou EVA® est le résultat opérationnel
de l’entreprise après impôt diminue de la rémunération du capital investi. Soit
engagécapitalduCôutimpôtsaprèséconomiqueRésultatEVA ______
En fait l’entreprise crée de la valeur pour ces actionnaires lorsque la rentabilité de ses
capitaux permanents est supérieur au coût du capital qu’elle supporte (le coût des dettes + le
coût des fonds propres donné par le Medaf) autrement dit elle crée de la valeur si elle dégage
au travers de son exploitation une rentabilité supérieur au coût de ses ressources financières.
L’EVA® est obtenue à partir de la différence entre le taux de rentabilité des capitaux investis
(RCI) et le coût moyen pondéré du capital (CMPC) :
CICMPCRCIEVA )( Avec CI les capitaux investis
Dans son calcul, l’EVA® dépend énormément du cadre comptable nord-américain donc des
ajustements s’imposent pour rendre le modèle compatible. C’est pourquoi nous voyons
apparaître dans certaine formule le NOPAT Net Operating After Taxes qui correspond à un
résultat opérationnel ajuste après impôt (cf. ci-dessus)
CEWACCNOPATEVA
Ou WACC = Weighted Average Cost of Capital
CE = Capital Employed
12
A. Marshall, principle of economics, vol1, Mac Millan ET Co, New York, 1890.
- 31 -
Si l’EVA® est positive alors on en déduit une création de valeur durant l’exercice,
inversement il y’aura destruction de richesses si l’EVA® est négative .A ce moment les
actionnaires sont moins rémunérés qu’ils ne devraient l’être par rapport à d’autres projets
d’investissement plus rentables.
Cette approche nécessite beaucoup de données, les bilans et comptes de résultat doivent subir
des ajustements pour corriger les distorsions. Stewart (1991) propose pas moins de 164
ajustements ! Il serait inutile de tous les décrire ici, en sachant que la pertinence de ces
retraitements varie en fonction de la nature de l’activité de l’entreprise. Dans les classements
qu'effectue Stern Stewart pour le compte d'un certain nombre de magazines dans différents
pays, dont L'Expansion en France, seulement un nombre très réduit de retraitements sont mis
en oeuvre.
L’expérience montre que la majorité des entreprises utilisant l’EVA® se borne à quelques
retraitements choisis parmi les plus significatifs.
L’EVA® ne peut simplement être considérée que comme un outil de mesure comme nous
l’avons fait précédemment. En effet d’après la doctrine des 4m (Stern) il constitue en plus
d’un outil de Mesure un outil de : Management de l’entreprise, de Motivation de son
personnel et surtout de changement de Mentalité au sein de l’entreprise.
L’EVA® permet de modéliser toutes les décisions dans un langage identique : on évalue une
action sur la valeur qu’elle crée/détruit.
De façon générale elle permet un système complet de gestion, d’un intéressement aux
bénéfices pour guider la politique de l’entreprise.
Le système d’intéressement par l’EVA® se base sur l’attribution de primes calculées sous
forme d’un pourcentage fixe de l’EVA®. Avec cette méthode on peut évaluer pour chaque
fonction de l’entreprise le degré d’efficacité des actions entreprises en comparant le résultat
avec le coût des capitaux engagés.
Ainsi les performances sont relativisées par les ressources mises à disposition.
Cette approche permet d’enrayer le comportement de dirigeants qui, en l’absence d’une
rémunération basé sur la valeur, peuvent choisir des investissements peu rentables sans avoir
à en payer le prix. On peut donc estimer qu’elle permet de réduire les coûts d’agence.
Stern (1995) insiste sur le fait qu’un management par EVA® doit s’accompagner d’un
système d’intéressement et de participation financière.
La notoriété grandissante de l’EVA® explique un second avantage : les entreprises disposent
avec l’EVA® d’un moyen efficace de faire connaître leurs objectifs et actions sur les
marchés. En effet un nombre de plus en plus important de professionnels de la bourse
- 32 -
(Oppenheimer Capital, Cal-PERS,…) se fient à l’EVA® dans leurs décisions
d’investissements. La mise en place d’un système d’intéressement avec l’EVA® ou juste
l’annonce de l’utilisation de l’EVA® peut contribuer à faire augmenter le cours d’une action.
Cette approche permet en outre de réunir les objectifs des différents acteurs de l’entreprise : la
capacité à générer des liquidités, à évaluer la performance pour l’entreprise et les attentes des
actionnaires. Elle constitue une théorie du partage de la valeur ajoutée, en « donnant » sa
« juste part » à l’actionnaire.13
L’EVA®, même s’il reste soumis à des choix comptables peut pâtir de manipulations des
données par les dirigeants, néanmoins la somme d’ajustements et retraitements nécessaires au
calcul diminue la portée des choix discrétionnaires.
Limites :
Le problème majeur de l’EVA® réside dans la difficulté de l’évaluation du capital investi à
cause des distorsions fiscales et comptables et En particulier, l’imprécision des méthodes
habituelles d’estimation du coût des capitaux propres.
L’EVA® amène aussi à des questions quand à ses fondements théoriques : les hypothèses qui
sous-tendent la méthode sont l’efficience des marchés financiers et la mesurabilité du coût du
capital par le MEDAF sont contestées. En particulier l’efficience des marchés sur le plan
informationnel n’a pu être prouvée.
Une autre « faille » peut être décelée : la création de valeur générée durant une période ne
correspond pas à l’EVA® de la même. Un investissement entrepris durant l’année 0
(augmentant donc la valeur de l’entreprise) n’affectera pas l’EVA®, de surcroît une fois les
fonds levés avec les premiers coûts à supporter l’EVA® devient en général négatifs ! Il faudra
attendre que l’investissement devienne effectivement productif pour que l’EVA® redevienne
positive.
Pour (Johnson et Soenen, 2003), cette différence d’horizon temporel peut inciter les dirigeants
à privilégier le présent en diminuant le capital investi ou en choisissant des investissements
uniquement rapidement productifs au détriment de la croissance.
L’EVA® peut donc amener à détruire de la valeur.
Quand à l’efficacité de l’EVA® dans la politique d’incitation, on a remarqué que l’ampleur
des changements à mettre en œuvre ont dissuadé bon nombre d’entreprises à s’y risquer. Pire,
13
F. Lordon http://web.upmf-grenoble.fr/lepii/regulation/Annee_regulation/AR4-2000-04LORDON.pdf.
- 33 -
pour les entreprises l’ayant déjà mis en place comme AT-T en 1992 l’ont abandonné du fait
du caractère inextricable des calculs à produire.
De façon similaire l’expérience montre que le concept d’EVA® ne descend pas tous les
niveaux hiérarchiques mais reste confiné à la direction.
Enfin la recherche d’augmentation de l’EVA® peut amener les dirigeants à baisser le capital
humain de l’entreprise pour réduire les coûts salariaux. C’est une mesure de cour terme qui
risque d’hypothéquer la croissance à plus long terme (Albouy, 1999).
1.3 Conclusions.
Malgré ses travers et ses approximations, la création de valeur est devenue aujourd’hui un
impératif pour les grandes entreprises françaises. Ces dernières semblent redécouvrir que la
condition essentielle à la création de valeur soit que les fonds propres investis soient
supérieurs au coût moyen pondéré des capitaux utilisés.
Tout au long de ce chapitre nous vous avons présenté différents modèles qui permettent
d’estimer la création de valeur. Au-delà de leur présentation nous voulions aussi attirer votre
attention sur leur limite et la difficulté, dangerosité de leur interprétation.
Les deux principaux problèmes pour ces modèles résident dans l’horizon inter temporel et les
difficultés de mesure.
L’EVA® est le système le plus utilisé et pourtant son calcul est contestable. En plus des
complexes retraitements comptables qu’elle suppose, il faut aussi connaître le coût du capital,
mesure difficile et soumise à fluctuations. L’imprécision de l’évaluation du coût d’opportunité
des fonds propres n’est pas non plus une mince affaire, et en définitive l’EVA® peut
fortement varier pour un même résultat opérationnel. L’étude qu’a produite Parienté (1997)
montre que la mesure économique de la création de valeur peut fortement varier selon la
méthode choisie. Les méthodes comptables ne sont pas en reste car elles se basent sur des
logiques comptables souvent divergentes d’un pays à l’autre. Enfin les mesures boursières
malgré leur simplicité de calcul restent soumises à la volatilité des marchés et perdent ainsi en
pertinence. Or mis les approximations de mesure, le principal défaut de ces modes de calcules
se trouve dans leur horizons temporelle, toute les études données par les différents cabinets de
consultant sont basées sur l’année, or les actionnaires investissent majoritairement à long
terme et la difficulté est de trouver les informations pour construire des anticipations de long
terme. L’analyse des perspectives future de croissance et de ses marchés reste indispensable
- 34 -
comme celle de son équilibre financier à terme. Ces critères sont en contradiction avec
l’approche de Rappaport (1986) de « l’horizon de prévisibilité de la croissance » qui affirme
que pour préserver son avantage concurrentiel la firme doit investir dans le développement
des compétences et de l’outil industriel. Les mesures boursières souffrent de leur horizon
temporel étant donné qu’elles ne sont efficaces que sur un moyen terme. On le voit une
utilisation aveugle des différents indicateurs incite souvent à une politique de « downsizing »
préjudiciable à l’entreprise. Cette conclusion est somme toute réjouissante car elle nous
rappelle qu’en matière d’action l’essentiel se trouve dans le futur et non dans la publication
d’un indicateur plus ou moins sophistiqué sur la gestion passée.
Les modèles d’évaluation de la création de valeur les plus connus sont les modèles TSR
(Total Shareholder Return), Market-To-Book (MTB), Market Value Added (MVA®), Cash-
Flow Return On Investememt (CFROI) et EVA® (Economic Value Added). S’ils comportent
des différences, ils partagent néanmoins un corpus d’hypothèses : la variation de l’entreprise
sur son marché, sur le long terme, demeure soumise à l’existence de la perspective futures
favorables, c'est-à-dire au renouvellement de l’avantage concurrentiel ;l’intensité de la valeur
créée naît de la différence entre la rémunération offerte aux bailleurs de fonds et le coût
d’opportunité des capitaux qu’ils ont investis, ce coût étant le plus fréquemment établi à partir
du CMPC (Coût Moyen Pondéré du Capital). Malgré les rapprochements possibles, des
questions se trouvent posées lorsqu’il s’agit de mesurer la performance des dirigeants de
l’entreprise. Les dirigeants de l’entreprise doivent prendre conscience que leur mission est de
gérer par et pour la valeur. L’entreprise doit donc concentrer l’orientation de sa stratégie sur la
création de valeur, qui doit intégrer pleinement tous les enjeux stratégiques.
- 35 -
2 LE MANAGEMENT PAR LA CRÉATION DE
VALEUR.
La vision « managériale » du capitalisme a laissée place à une autre approche de la
gouvernance d’entreprise : la maximisation de la valeur pour l’actionnaire, cette forme de
capitalisme « patrimonial » trouve ses origines dans la prise de pouvoir des actionnaires et
ainsi à la prise en compte de leurs intérêts prioritairement à ceux de tous les autres. La clé de
voûte de cette approche est la capacité de l’entreprise à créer de la valeur.
Pour cela elle doit être capable de dégager un taux de rentabilité de ses investissements
supérieur au taux de rentabilité exigé en tenant compte du risque. La récompense pour
l’entreprise ayant suivi ce précepte est une progression du cours de son action. Ce discours
n’a rien de novateur, l’objectif des dirigeants a toujours été de maximiser la valeur de
l’entreprise et indirectement la valeur des capitaux investis par l’actionnaire.
Maintenant c’est le critère de création de valeur qui est retenu dans les décisions
d’investissement pour contribuer à une croissance rentable.
Les dirigeants jouent un rôle d’intermédiaire entre la gestion des activités industrielles et la
satisfaction du marché financier, c’est à eux d’influer sur la politique de l’entreprise pour
amener à de la création de valeur.
L’évaluation de l’entreprise par le prisme de la valeur actionnariale permet de dégager
plusieurs leviers stratégiques à l’origine de la création de valeur.
On peut les diviser en 3 parties :
- Les leviers stratégiques
- Les leviers financiers
- Les leviers du gouvernement d’entreprise
2.1 Leviers stratégiques
La création de valeur s’appuie sur un objectif de niveau de profit économique, il conviendra
donc de mettre en place des stratégies contribuant à l’augmenter. Il faut commencer par une
analyse concurrentielle de l’entreprise et identifier chaque facteur pouvant être mobilisé pour
l’objectif que l’entreprise s’est fixée.
- 36 -
2.1.1 L’avantage concurrentiel
L’objectif stratégique majeur de toute entreprise est d’acquérir de façon durable des
avantages concurrentiels sur son secteur.
On doit les travaux sur l’avantage concurrentiel à M.E.Porter (1980) qui définit celle-ci
comme : « la valeur qu’une firme peut créer pour ses clients en sus des coûts supportés pour
la créer. » Elle va dépendre de deux choses :
- le nombre et la nature des sources d’avantage exploitables
- la taille et la durée de celles-ci
En préalable à la formulation d’une stratégie, l’entreprise devra évaluer l’attrait du secteur et
la position concurrentielle de l’entreprise dans celui-ci.
La capacité d’une firme à créer de la valeur et à avoir un avantage concurrentiel sur les autres
dépend de son positionnement. On dit qu’elle a un avantage concurrentiel à partir du moment
où son taux de profit économique supérieur à la moyenne de ceux du secteur. Le lien entre
l’avantage concurrentiel est clair : l’entreprise n’aura d’avantages concurrentiels qu’à partir
du moment où elle crée plus de valeur que ses concurrentes. Une étude de la variation de la
profitabilité (Anita McGahan et Michael Porter) montre qu’elle dépend à 32% de l’avantage
concurrentiel des firmes.
Porter va fournir un modèle dit « des cinq forces » pour synthétiser les facteurs qui affectent
la performance d’une entreprise, on y trouve :
- Le pouvoir de négociation des clients,
- La menace des nouveaux entrants sur le marché,
- Le pouvoir de négociation des fournisseurs,
- Les produits de substitution,
- La concurrence intra sectorielle.
Ces cinq forces représentent l’environnement concurrentiel de la firme ce qui conditionne la
création de valeur. Pour lier la création de valeur et l’analyse concurrentiel nous pouvons nous
servir du schéma proposé par A.Rappaport (1987) pour modéliser ce lien :
- 37 -
La valeur actionnariale s’appuie sur le schéma de création de valeur de A.Rappaport et postule
que la transformation de la création de valeur pour le client en création de valeur actionnariale
grâce à la mobilisation de compétences collectives de la firme par des processus efficients (Black
et al, 1997).
D’après la théorie des marchés en équilibre, il est très difficile de conserver une rente
économique sur du long terme en raison de la convergence des taux de rentabilités, des
progrès technologiques et de la déréglementation. A.Rappaport (1986) avait émis l’idée d’un
horizon de croissance qui correspondait à la durée de l’avantage concurrentiel de la firme.
Les dirigeants doivent donc chercher à acquérir un nouvel avantage concurrentiel au-delà de cet
horizon.
On a vu qu’il existe un lien fort entre l’avantage concurrentiel et la création de valeur, en effet
on ne peut maintenir son avantage concurrentiel qu’en créant plus de valeur économique que
les concurrents n’en sont capables. La création de valeur dépendra de la pertinence du
positionnement sur le marché et des conditions de coûts et de bénéfices dont dispose
l’entreprise. Le schéma proposé par Rappaport permet de dégager les principaux leviers
disponibles pour l’amélioration de la création de valeur. Nous allons maintenant les passer en
revue.
Attrait du secteur :
- 5 forces de Porter
Position concurrentielle :
- segmentation
- caractéristique du segment
- position sur le segment
Identification de l’avantage
concurrentiel :
- domination globale par les coûts
- différenciation
Leviers de création de valeur :
- taux de croissance CA
- marge opérationnelle
- investissement en BFR
- investissement en immobilisations
- coût du capital
CREATION (DESTRUCTION)
DE VALEUR
- 38 -
2.1.2 Les opérations de croissance interne
2.1.2.1 Baisser le coût du capital.
Le coût du capital est la moyenne des exigences de rentabilité des investisseurs. Il comprend à
la fois le coût des fonds propres pour l’actionnaire et le coût de la dette pour le créancier.
On peut affirmer que le coût du capital est une fonction décroissante du taux d’endettement.
Ici on ne prend en compte que son côté financier mais la baisse du coût du capital peut
également s’obtenir grâce à des leviers opérationnels diminuant la volatilité des flux de
trésorerie et conduisant à une montée de l’endettement.
On ne peut parler du coût du capital sans le lier à la notion de risque, en effet diminuer le coût
du capital revient à faire baisser le risque.
On distingue plusieurs types de risques sur lesquels ont peut travailler14
:
Le risque lié à la taille et à la diversité : en substance plus l’entreprise est diversifiée
plus le risque de l’entreprise sera bas ainsi que le coût du capital. Cela tient à la
capacité de la firme à faire face aux chocs et à réduire sa dépendance à leurs égards.
Le risque lié à la volatilité des revenus, il s’agira d’abaisser leurs variabilités par
rapport à la moyenne du secteur pour faire baisser le coût du capital. Des opérations
comme la sous-traitance d’activités ou leurs externalisations sont à privilégier.
Le risque stratégique découlant du couple rendement/croissance : toute augmentation
du rendement passe forcément par une augmentation du risque en raison de
l’incertitude sur la concrétisation des profits attendus. Ainsi une entreprise avec une
forte croissance sera plus risquée qu’une autre moins rentable.
Le coût du capital est extrêmement sensible aux variations du ratio d’endettement, ce que
nous allons voir maintenant.
14
F.Bogliolo, La création de valeur
- 39 -
2.1.2.2 Augmenter l’endettement.
Une fois mise en place la politique d’investissement, une question se pose : comment
minimiser le coût du capital ?
On a vu plus haut que le coût du capital se constitue du coût des fonds propres et du coût de la
dette, or le second est moins élevé que le premier donc on peut en déduire qu’une
augmentation du coût des fonds propres va réduire le coût du capital. Néanmoins une montée
de l’endettement provoque une hausse du risque et de l’exigence de rentabilité des
actionnaires.
La première proposition de Modigliani-Miller stipule qu’en présence d’un impôt sur les
bénéfices, la valeur de la firme augmente avec le taux d’endettement. On le déduit du fait que
l’économie d’impôt due aux frais financiers est maximale quand le niveau d’endettement est
le plus haut. Cette augmentation de la valeur de la firme bénéficie surtout aux actionnaires, et
donc la valeur du patrimoine des actionnaires augmente avec le taux d’endettement.
L’augmentation de l’endettement présente aussi un avantage dans le cadre des opérations à
base d’effets de leviers car le coût des fonds propres est supérieur à celui de la dette.
L’endettement présente aussi l’avantage de discipliner les dirigeants car en présence de dette
ils seront obligés d’affecter les cash-flows disponibles au remboursement de celle-ci. Ainsi ils
seront moins en mesure d’investir dans des projets contraires à l’intérêt des actionnaires.
En plus l’annonce d’une montée de la dette est bien perçue par les marchés qui y voient une
marque de confiance de l’entreprise sur ses capacités à rembourser. D’autant plus qu’en cas
d’échec les dirigeants risquent d’en payer le prix.
Il existe une hiérarchie pour les sources de financement : si l’entreprise a besoin de capital
elle privilégiera d’abord le financement interne (l’auto financement). En cas de besoin
supplémentaire elle se tournera d’abord vers l’endettement puis vers l’émission de titres
hybrides et en désespoir de cause, elle recourra à ses actionnaires. Une augmentation du
capital par les actionnaires constitue un signal très négatif et contribue souvent à la baisse du
cours du titre. Si on se base sur le coût moyen du capital alors la structure optimale de
financement est celle avec un endettement maximal. Quand on entend maximal c’est au sens
où un niveau d’endettement trop important épuiserait les capacités de l’entreprise à y avoir
recours, elle devrait donc se tourner vers ses actionnaires ce qui lui serait préjudiciable.
C’est pourquoi les entreprises les plus performantes sont celles qui sont les moins endettées et
ce quel que soit le secteur.
- 40 -
Le choix d’un niveau d’endettement optimal est dépendant des caractéristiques de la firme.
On doit tenir compte que la fréquence avec laquelle on pourrait avoir des situations
nécessitant un recours à des financements externes. Il y a aussi la nécessité de percevoir la
nature des actifs de l’entreprise, les risques de faillite qu’elle encourt, la réaction du marché
suite à la modification de la structure financière.
2.1.2.3. La croissance.
La croissance est un des fondements de la création de valeur, on l’envisage à travers une
évaluation des investissements sur leurs implications dans la croissance.
Le cadre de la valeur actionnariale nous permet de dégager le fondement de la sélection d’un
projet par l’entreprise : il doit générer un rendement supérieur au coût des capitaux utilisés.
On les qualifiera d’investissements rentables, ce sont eux que l’entreprise doit mettre en
œuvre pour consolider sa position concurrentielle.
On a vu dans la partie sur les indicateurs de la création de valeur un grand nombre
d’approches pour la sélection de l’investissement. Malgré cette abondance, l’entreprise doit
toujours se référer à la règle classique : n’investir que dans les projets à VAN positive.
L’investissement est un des plus gros indicateurs de la croissance et les opportunités de
croissance rentable sont un levier de création de valeur.
Il faut toutefois que l’entreprise fixe son coût du capital au bon niveau, en effet en le fixant
trop haut des projets pouvant être rentables seront écartés et la croissance à long terme sera
compromise. Il faut aussi évaluer les coûts et risques que va supporter l’entreprise si elle
n’investit pas dans ces actifs pour prendre la bonne décision.
En règle générale tout investissement qui génère du profit économique doit être accepté si on
tient compte du fait que seule la croissance rentable crée de la valeur.
Les types d’investissement les plus cités comme créateurs de valeur sont ceux portant sur
l’innovation (T.Copeland, T.Koller, 1994), les investissements sur immobilisations et les
investissements stratégiques dans une optique de long terme (J.R.Woodbridge, 1988)
La croissance n’est pas forcément homogène dans le sens où une croissance interne basse peut
être masquée par des opérations de croissance externe. La croissance n’est créatrice de
richesses que si elle permet de dégager une rente de la différence entre résultat opérationnel et
coûts des capitaux.
- 41 -
2.1.2.4 Cession d’activités non rentables.
La pression des marchés financiers, la faible performance des groupes multi activités ont
conduit à une évolution radicale de la stratégie d’entreprise : le repli sur l’activité de base. Il
peut prendre la forme de deux phénomènes :
- Le recentrage
- L’externalisation
Le recentrage :
Le phénomène de recentrage consiste pour l’entreprise à s’interroger sur la nature de son
activité de base (cœur de métier) pour s’y consacrer à l’exclusion de toutes les autres qu’elle
avait pu développer. Il est apparu dans les années 80.
Cette interprétation découle directement de la théorie de la valeur ationnariale dans le sens où
le rôle de l’entreprise est de dégager la plus grande valeur actionnariale possible. Si
l’entreprise est en position dominante sur son secteur alors c’est elle qui capte la rente
économique.
L’entreprise n’a pas à soucier du financement car dans le cadre de la valeur actionnariale, la
valeur est indépendante de la structure financière.
Il existe plusieurs théories qui lui donnent un fondement théorique :
- La théorie d’agence : traditionnellement les dirigeants préfèrent les stratégies de
diversification. Dans un premier temps l’accroissement de la taille du groupe donne un
plus grand prestige et une extension de la sphère d’influence. Une diversification des
activités permet aussi aux dirigeants de masquer des mauvais résultats sur une filiale
en compensant avec les bénéfices d’une autre. Donc le recentrage ramène les intérêts
des actionnaires au premier plan et limite les diversifications sous performantes.
- La théorie financière : elle stipule que la diversification des risques dépend des
investisseurs et non des dirigeants.
- La théorie institutionnaliste : celle-ci recadre les choix de l’entreprise dans un contexte
d’influences externes. Ainsi la décision de recentrage ou de diversification peut
dépendre des lois en vigueur.
- 42 -
L’externalisation :
Ici l’entreprise va céder à une autre entreprise, plus performante qu’elle dans ce secteur,
une activité qui avant ça était interne à l’entreprise. Quand l’entreprise revient à son
métier de base elle externalise chaque activité où elle est sous performante.
Les fondements théoriques sont les mêmes que pour le recentrage mais on y ajoute :
- La théorie des coûts de transactions : Il peut être plus économique de déléguer une
activité plutôt que de s’en charger, la gestion de la transaction est moins coûteuse.
La fusion acquisition permet elle aussi la cession des activités en dehors du cœur de
métier. Une fois la fusion effectuée, il est fréquent de procéder à la suppression des
doubles emplois, par contre elle permet d’obtenir une plus grande dimension dans le
métier de base.
Cette politique de recentrage permet d’augmenter la réactivité e l’entreprise par rapport à la
volatilité de la demande, d’allouer les ressources de l’investissement vers les actifs les plus
rentables et enfin de pouvoir élever le niveau de qualité exigés des sous-traitants.
2.1.2.5 Améliorer le rendement des capitaux investis.
On l’a vu plus haut, l’augmentation de la rentabilité des capitaux s’explique à la fois par une
politique de sélection rigoureuse des investissements selon le critère de la valeur actionnariale.
On peut aussi citer d’autres leviers comme l’externalisation des activités les plus
demandeuses de capital, l’allongement de la durée d’emploi des actifs et la réduction du cycle
d’exploitation.
Les politiques traditionnelles inspirées des pratiques comptables mettaient l’accent sur
l’augmentation des ventes ou la réduction des coûts. Avec la création de valeur on dégage
d’autres instruments comme une meilleure utilisation des immobilisations et la diminution du
BFR. On peut augmenter l’intensité capitalistique en augmentant les ventes sans réaliser
d’investissements supplémentaires. Symétriquement, il suffit d’investir moins de capitaux en
réussissant à maintenir le chiffre d’affaire ; c’est ainsi qu’on peut diminuer le BFR. Les
capitaux utilisés dans le calcul du BFR ne contribuent pas à la production au même titre que
des immobilisations mais il faut tout de même améliorer leur intensité capitalistique pour
pouvoir bénéficier d’une meilleure capacité de production.
- 43 -
L’économie sur les capitaux engagés est d’autant plus forte quand le BFR est faible.
Ainsi la façon la plus efficace d’améliorer le rendement des capitaux est de créer encore plus
de valeur.
On peut aussi considérer qu’une répartition inefficace du capital entraîne une surcapitalisation
dans un secteur qui est sous optimale pour la création de valeur. Pour y remédier l’entreprise
doit analyser s’il n’est pas plus rentable de reverser le capital aux actionnaires ou encore de ré
orienter ce capital vers des activités plus rentables.
Les opérations de croissance portent notamment sur la réduction du coût du capital avec un
recours plus important à l’endettement et un accroissement de la rentabilité des capitaux
engagés, ainsi l’entreprise essaiera de tendre vers sa structure optimale de capital. Mais pour
assurer la croissance, l’entreprise doit parvenir à sélectionner les meilleurs projets disponibles
avec comme critère principal la supériorité de la rentabilité des capitaux investis par rapport à
leurs coûts. Enfin un changement radical doit s’opérer sur la mentalité des dirigeants avec la
cession des actifs les moins rentables. Pour des raisons diverses les dirigeants ont toujours
privilégiés les opérations contribuant à augmenter la taille de leur entreprise par le biais de
prise de participations ou de fusions. Ce sont les motivations et les résultats de ces opérations
de croissance externe que l’on va discuter maintenant.
2.1.3 Les opérations de croissance externe.
Si on part du point de vue des actionnaires de l’entreprise acquéreuse, les opérations de
croissance « externe » doivent répondre à un objectif de rentabilité ou de « création de
valeur ». Cela implique que lorsque l’on mène une acquisition, il faut se demander si la prime
d’acquisition que l’entreprise paye est rentabilisée par les synergies escomptées de la
réalisation de l’acquisition programmée.
La valeur actionnariale qu’on pourra dégager dépend de deux éléments :
- La présence effective de synergies
- La répartition du gain éventuel entre les actionnaires.
On peut dégager trois façons d’acquérir une autre entreprise : la fusion, l’acquisition d’actifs
et l’acquisition d’actions.
- 44 -
2.1.3.1 Fusions-acquisitions.
Peu d’activités de l’entreprise sont aussi médiatisés que les opérations de fusion acquisitions,
le volume de ces opérations a franchi la barre des 3.000 milliards de dollars en 2006 et malgré
un léger tassement le phénomène semble durable. On peut définir la fusion acquisition comme
la prise de contrôle d’une entreprise par une autre, les actionnaires de la société acquise se
retrouvent actionnaires de la société acquéreuse.
L’intérêt de la fusion découle de l’espérance de synergies, par ce terme on recouvre toutes les
situations où deux entreprises valent plus réunies que quand elles sont séparées. Une
entreprise ne devrait en acquérir une autre que si la VAN de cette opération est positive pour
les actionnaires
2.1.3.2 Acquisitions d’actions.
La fusion acquisition n’est pas la seule façon de procéder à une prise de contrôle, on peut
aussi racheter directement des actions ordinaires de l’entreprise. L’acquisition d’actions peut
consister en un paiement en espèces ou par échange d’actions ou d’autres titres financiers.
Après soumission de l’offre à l’équipe dirigeante de la firme visée, l’offre est présentée aux
actionnaires de la société cible. Il peut s’agir soit d’une OPA soit d’une OPE.
L’acquisition est souvent inamicale ou « hostile », les dirigeants en place vont résister à ce
changement et donc entraîner une hausse du coût de l’opération. Une minorité d’actionnaires
refusant fréquemment l’opération seule la fusion permet une prise de contrôle totale.
2.1.3.3 Acquisitions d’actifs.
Probablement la méthode la plus marginale, elle consiste à prendre le contrôle d’une cible en
acquérant l’ensemble de ses actifs. Elle implique un vote des actionnaires et permet d’éviter
les problèmes liés aux actionnaires minoritaires de la cible. Cette méthode est la plus coûteuse
des trois.
- 45 -
2.1.3.4. Les gains espérés.
Toutes ces méthodes visent à améliorer la position concurrentielle de l’entreprise en
exploitant des synergies grâce à un regroupement d’entreprises sans quoi elles n’auraient pas
pu être obtenues.
On associe plusieurs types de synergies aux fusions-acquisitions :
2.1.3.4.1 Les synergies de coûts.
On part ici du principe que la fusion acquisition permet de réduire les coûts de production
grâce aux :
-Economies d’échelle : Quand le coût moyen de production diminue en même temps que le
niveau de production augmente, il existe une économie d’échelle. Il faut que l’entreprise
croisse jusqu’à sa taille optimale pour en bénéficier et la fusion acquisition est un moyen
rapide d’y parvenir. Elles peuvent venir de la mise en commun de facteurs de production ou
d’un réseau. C’est le principal motif aux fusions-acquisitions horizontales.
-Economie de l’intégration verticale : Elle permet de réduire les coûts grâce à une meilleure
coordination entre l’amont et l’aval et une meilleure coordination d’activités opérationnelles
très corrélées. Les transferts technologiques sont aussi une source de synergies.
-Elimination de l’inefficacité des dirigeants : Si on change la direction d’une entreprise, sa
valeur peut augmentée si elles étaient mal gérées. Les gains réalisés proviennent du
différentiel d’efficacité. Les fusions-acquisitions peuvent donc constituer un moyen de
contrôle des dirigeants.
2.1.3.4.2 Synergies de revenus.
La motivation à l’origine d’une fusion acquisition pour une entreprise est de générer
davantage de chiffre d’affaire en combinant les deux activités qu’elle n’en faisait toute seule.
Elle peut résulter de deux choses :
- 46 -
-l’augmentation du pouvoir de marché : Les entreprises peuvent chercher à atteindre une taille
supérieure pour bénéficier d’économies d’échelle. Mais la concentration d’un secteur permet
aussi de conférer un pouvoir de marché accru et donc de pouvoir augmenter prix et profits. De
façon mécanique, si l’entreprise intègre verticalement un fournisseur elle restreint
l’approvisionnement des autres.
-La création de nouveaux avantages concurrentiels : Les acquisitions peuvent apporter des
avantages stratégiques afin d’exploiter de nouvelles opportunités dans un secteur.
2.1.3.4.3. Réductions d’impôts.
L’impôt payé globalement sera diminué par le regroupement de deux entreprises : l’une
bénéficiaire et l’autre déficitaire. L’entreprise ainsi formé disposera de plus de facilités sur sa
capacité d’endettement et l’utilisation de ses liquidités.
En plus des traditionnelles économies d’échelles et de gammes on trouve aussi une
augmentation de l’efficience par la diversification des risques dans le cadre d’un
rapprochement conglomérat.
Si les motivations à l’origine des fusions-acquisitions paraissent pertinentes, elles ne suffisent
pas à expliquer cet accroissement spectaculaire, mais d’autres facteurs peuvent
apparaître comme la volonté des dirigeants et des réactions de défense
Les divergences d’intérêts entre dirigeants et actionnaires :
Il existe une « relation d’agence » (Jensen, 1976) entre les actionnaires et les dirigeants. Ces
derniers peuvent avoir d’autres intérêts que la maximisation de la valeur actionnariale. La
notoriété des dirigeants tendant à augmenter avec la taille de l’entreprise, les dirigeants
risquent d’être plus animés par une volonté de puissance que d’optimisation (Williamson,
1967). On peut penser que nombre de fusions-acquisitions sont lancées pour se prémunir
contre les risques d’en être la cible à son tour. En effet la course à la taille critique, en
augmentant la dimension de l’entreprise lui permet de préserver son indépendance.
Si on pense que les acquisitions créent de la valeur actionnariale on va voir que ce n’est pas
souvent le cas. On peut l’expliquer par le fait que des personnes oublient les fondements
- 47 -
rationnels de cette opération et s’en servent pour se justifier alors qu’ils sont influencés par
des considérations non rationnelles qui détruisent la valeur actionnariale.
2.1.3.5. Réactions du marché.
Une étude de Mc Kinsey dans les années 8015
concluait que seulement 37% des acquéreurs
américains avait eu un rendement actionnarial total supérieur à leurs pairs. La plupart des
études menées indiquent des performances anormales soit négatives soit faiblement positive.
D’autres études montrent qu’entre 66% et 80% des fusions-acquisitions ne créent pas de
valeur (Le Figaro du 30 novembre 1999). Néanmoins des études comme celle de la Mercer
Management Consulting révèle que la plupart des entreprises ayant réalisés ces transactions
ont crée plus de valeur que leurs pairs.
Il paraît prématuré de se faire une idée définitive sur le sujet car le phénomène est encore
récent en Europe et les résultats dont on dispose à l’heure actuelle sont d’un horizon trop
proche. Les différences de caractéristiques des marchés et de structure des firmes d’un pays à
l’autre ne permettent pas non plus de faire des comparaisons.
Enfin les études semblent trop divergentes quand à leurs résultats pour amener un avis
définitif.
L’arbitrage à opérer entre la mise en place de croissance externe ou de croissance interne est
malaisé pour le dirigeant au vu des divergences qu’on a pu constater dans les résultats
produits pour l’impact des fusions-acquisitions ou des recentrages. Les résultats se
contredisent et on ne peut tirer d’enseignements universels. A contrario Les stratégies de
baisse du coût de capital, d’augmentation de sa rentabilité et de recours à l’endettement
permettent un consensus plus large sur leurs rôles positifs. Néanmoins les stratégies
présentées restent d’une nature opérationnelle et ne tiennent que faiblement compte des
mécanismes de marché. Pour combler cette lacune, nous allons introduire les différents leviers
financiers à appliquer comme la politique de redistribution du bénéfice net par les dividendes
ou le rachat d’actions puis nous verrons l’intérêt d’une politique de gestion des risques.
15
Copeland, Koller and Murrin, Valuation, 1994, p146
- 48 -
2.2 Leviers financiers.
Les exigences du marché s’expriment majoritairement à travers le coût du capital
Le coût du capital peut être considéré comme le coût moyen des capitaux que les actionnaires
ont confiés à une firme. Il se constitue de deux éléments :
- Le coût des fonds propres, c'est-à-dire l’espérance de rentabilité minimum exigée par
les actionnaires et qui augmente avec le risque qui affecte les fonds propres.
- Le coût de la dette, qui tient compte du niveau des taux d’intérêts et de la marge que
les actionnaires exigent pour prêter à l’entreprise.
Chaque entreprise peut voir une structure du capital en fonction de son arbitrage entre
l’endettement et le financement par fonds propres.
Formellement, le coût du capital s’écrit :
La valeur de la firme va augmenter si, toutes choses égales par ailleurs, on baisse le coût du
capital. Le coût des fonds propres est l’expression du « facteur d’actualisation à risque
pondéré » introduit par le Modèle d’évaluation des actifs financiers (Médaf), il représente un
coût d’opportunité. Le Médaf possède une formule importante qui est :
Ri = Rs + βRm
Où : Ri exprime le rendement d’un titre individuel, Rm la prime de marché et β le risque
attaché à l’investissement dans ce titre.
Grâce à cette formule on va pouvoir calculer le coût des fonds propres. La prime de risque β
indique que seul le risque systématique est pris en compte et ne sanctionne pas le risque
spécifique supporté par l’entreprise. Pour créer un levier financier, l’entreprise doit tenir
compte du coût des fonds propres mais aussi de celui lié à l’emprunt. Les fonds propres ont
un coût de gestion et un rendement pour les actionnaires, ce qui est aussi valable pour
l’emprunt. Ainsi l’objectif des leviers financiers sera de faire diminuer le risque d’exploitation
pouvant mener à une faillite, de diminuer l’endettement pour réduire le risque financier mais
aussi de mener une politique redistributive en faveur des actionnaires.
- 49 -
2.2.1 Gestion des prix des risques financiers.
Dans n’importe quel secteur d’activité, les entreprises sont confrontées à une hausse des
risques encourus et la manière dont les entreprises les traitent influe sur leur valeur de marché
et leur capacité à investir. La gestion des risques est devenu un enjeu important de la valeur
actionnariale. C’est justement l’arbitrage entre la prise de risques et la rentabilité qui en
découle qu’on peut agir sur la création de valeur sur un horizon de long terme.
Ainsi une stratégie d’immunisation aux risques permet de créer de la richesse pour
l’actionnaire à condition que les bénéfices qu’on en retire soient supérieurs aux coûts
engendrés.
On peut citer quatre raisons principales à la gestion des risques
- Les coûts de faillite et ceux issus de difficultés financières risque de réduire les
capitaux disponibles au moment où il faudra les prendre en compte.
- Les entreprises veulent réduire la volatilité du cash-flow et les variations de la valeur
de leurs investissements. Cela permet d’améliorer la stabilité financière.
- Enfin la volatilité des revenus résultant de la prise de risques peut poser un problème
d’ordre fiscal en cas de différences d’imposition entre pertes et bénéfices. Cette
couverture va donc augmenter le résultat net.
- Elle peut permettre de réduire le risque de sous-investissement qui peut naître soit par
l’opportunisme d’un actionnaire soit du manque de sources d’autofinancement.
Pour toutes ces raisons, le dirigeant va rester prudent à l’égard du risque pour maximiser la
valeur actionnariale.
2.2.1.1. Risques liés aux coûts de faillite.
La principale préoccupation de la gestion des risques est de prévenir l’entreprise contre le
coût d’une faillite. La crainte d’une faillite peut pousser les dirigeants à privilégier
l’autofinancement et l’augmentation de capital plutôt que l’endettement qui augmente le
risque de défaillance. Les dirigeants peuvent aussi privilégier les investissements sans risque
et écarter ceux qui présentent un risque de dépôt de bilan même s’ils ont une VAN positive.
- 50 -
Toutes ces décisions sont sous optimales dans le cadre de la création de valeur actionnariale.
Pour rassurer les investisseurs les entreprises doivent mettre en place des systèmes de garde
fous contre ces comportements. Néanmoins cette gestion des risques devrait échoir aux
investisseurs qui la traiteront de meilleure façon que l’entreprise ; et cela sans que la valeur
des actions ne soit affectée (Modigliani et Miller (1958)). C’est la diversification de leurs
portefeuilles qui permet de le penser. De plus Les dirigeants et actionnaires n’encourent pas le
même risque. Les actionnaires ne sont pas soumis au risque spécifique des projets (qu’ils
diversifient par leurs portefeuilles) mais au risque systématique. Les dirigeants par contre
aimeraient rechercher la « diversification industrielle » même si elle est sous optimale pour
l’actionnaire et qu’elle augmente le risque de faillite.
2.2.1.2 Risques liés aux choix d’investissements.
Les entreprises font leurs choix parmi les investissements selon le critère de la VAN et en
tenant compte du risque attendu. Seulement on a pu constater que le niveau d’exposition au
risque pouvait être dépendants de la structure de propriété de l’entreprise et de la relation
mandant/mandataire à la base de la théorie de l’agence. Normalement toutes les parties auront
intérêt à choisir les projets avec une VAN positive mais les actionnaires seraient tentés de
choisir des projets à hauts risques en comptant sur une hausse qui leur reviendrait. Ce
comportement risque de freiner la croissance car l’entreprise aura un coût de l’endettement
plus élevé.
Ce sont les relations d’agence dans l’entreprise qui vont être déterminantes dans le choix du
profil de risque, les actionnaires et les dirigeants n’acceptant pas le même niveau, cela révèle
une insuffisance dans la maximisation de la valeur actionnariale.
La réduction des coûts de sous investissement passera donc par la limitation du financement
par endettement et par la réduction des conflits d’intérêts
Pour se prémunir des risques l’entreprise dispose de nombreux moyens comme les emprunts
dans la devise du client, la délocalisation des unités productives mais des instruments de
marché financier comme les contrats à terme, swaps, options et autres. Toutefois ces outils ne
sont pas interchangeables ils présentent des niveaux de risque différents , il faudra donc
arbitrer entre la rentabilité liée à leur utilisation et les coûts qu’ils engendrent.
Si l’entreprise arrive à se protéger au mieux des risques alors le bénéfice net augmentera et les
capitaux seront répartis aux actionnaires.
- 51 -
2.2.2 La politique de redistribution du bénéfice net.
2.2.2.1 Le versement de dividendes.
Le dividende est la portion des bénéfices d’une entreprise aux actionnaires. Ce faisant
l’entreprise renonce à investir cette somme dans des opérations de croissance. Cette politique
de redistribution du bénéfice n’est pas neutre sur les capitaux de l’entreprise ou sur ses
possibilités de croissance. Pour justifier ce recours aux dividendes il faut considérer leurs
influences sur le prix de l’action, en effet on considère souvent que la politique de dividendes
d’une entreprise est le facteur qui influence le plus le prix des actions.
Pour expliquer ce fait nous allons passer en revue plusieurs théories :
- Dividendes et marchés en équilibre
L’hypothèse d’équilibre des marchés a donné naissance par l’intermédiaire de Modigliani-
Miller (1961) à la théorie de la neutralité de la politique de dividendes sur le cours de l’action.
On postule ici que la valeur de l’entreprise est indépendante des flux de trésorerie reversés,
seul compte la politique d’investissement. Qu’une entreprise distribue plus ou moins de
bénéfice le patrimoine des actionnaires ne changera pas, le dividende n’est qu’un flux
d’ajustement. La distribution de dividendes ne suffit pas à créer de la valeur sur le long terme.
La neutralité de la politique de dividendes n’a pas suscité de consensus et les partisans de la
non neutralité ont émis une nouvelle conception : la théorie de la signalisation
- Dividendes et théories du signal
Les premiers travaux réalisés par H.Leland et D.Pyle (1976) laissent apparaître une
corrélation entre la valeur de l’entreprise et la part de capital du dirigeant. Dans le cas où le
dirigeant réalise un investissement, le marché va estimer le flux de trésorerie par la part du
capital détenu par le dirigeant, qu’il interprète comme un signal. On part du principe que les
dirigeants ont accès à une meilleure information que les investisseurs sur les retombées des
investissements. Les dividendes constituent donc un bon moyen pour le dirigeant de montrer
au marché la valeur réelle de la firme et d’agir sur le prix des actions. Une entreprise rentable
se signale par l’émission d’importants dividendes alors qu’une autre moins rentable ne pourra
- 52 -
mettre en place la même politique. Les dividendes sont bien un signal de la qualité de
l’entreprise en direction des marchés.
- Dividendes et mandats
On se base ici sur la théorie de l’agence pour expliquer l’intérêt d’une politique de
redistribution.
La théorie de l’agence montre que la politique de dividendes peut être un moyen de réduire
les conflits d’agence entre dirigeants et actionnaires. Si le cash flow disponible est affecté au
versement de dividendes, l’entreprise ne pourra pas l’affecter à la réalisation de projets sous
efficaces. En plus avec des dividendes élevés on rend la capacité d’auto financement
insuffisante et le recours à des financements externes deviendrait indispensable. Avec le
versement de forts dividendes, l’entreprise est soumise à la discipline du marché financier.
L’influence de la structure de l’actionnariat est elle aussi importante d’après la théorie des
droits de propriété. Les études de Morck et al, 1988 et de Mitton, 2000 montrent qu’une
meilleure combinaison entre les attentes des détenteurs de titres financiers et leur
rémunération permet une augmentation de la valeur de l’entreprise.
D’après les théories énoncé ci-dessus le dividende se définit à la fois comme un signal émis
par l’entreprise à destination du marché, un moyen de contrôle des dirigeants et une incitation
à l’efficacité par le recours à l’endettement. Le versement du dividende obéit toutefois à
quelques règles pour qu’il puisse être réellement efficace :
Il faut que l’entreprise ait épuisé les projets d’investissement susceptibles de créer de
la valeur avant de avant recourir à la distribution de ses résultas.
L’entreprise est incitée à la stabilité du taux de croissance du dividende par action car
le non versement de dividendes prévus a des conséquences très graves pour le prix de
l’action et l’entreprise devra faire face à une hausse du coût de son financement.
Toutefois si l’entreprise fixe le taux de distribution (rapport entre dividendes et bénéfice net)
ce sont les actionnaires qui déterminent le rendement qu’il souhaite en fonction de leurs
évaluations de l’entreprise.
- 53 -
2.2.2.2 Le rachat d’actions.
Encore à un stade de prémisses en France, la politique de rachat d’actions est florissante aux
Etats-Unis et il ne fait guère de doutes que la France va suivre cette tendance portée par des
exigences toujours plus fortes des investisseurs. D’après l’AMF les programmes de rachat
d’actions ont connu un grand succès jusqu’en 2000 avec 414 visas délivrés cette année mais
on constate ensuite une érosion du phénomène jusqu’en 2003 avec 356 visas.
La France a longtemps eu une fiscalité désincitative pour les programmes de rachat d’actions
mais depuis le texte de loi du 2 juillet 1998 visant à optimiser l’allocation des flux d’épargne
cet obstacle a en partie été levé.
Le rachat d’actions naît de la décision d’une entreprise de réduire le nombre de ses actions en
circulation en les rachetant. Une opération de rachat d’actions peut être considérée comme
une distribution de trésorerie, dans ce cas on la classe dans la politique de redistribution de
l’entreprise au même titre que des dividendes pour les actionnaires. Elle peut aussi être rangée
dans la catégorie de distribution d’actifs de l’avis des fiscalistes.
Concrètement ces opérations peuvent se faire par la réduction du nominal de toutes les actions,
par une offre publique aux actionnaires ou par une offre publique de rachat d’actions (OPRA).
Ici on se limite aux opérations visant à la réduction de capital.
Si on peut analyser le rachat d’actions comme une distribution de liquidités aux actionnaires
au même titre que les dividendes, il existe des différences. L’imposition pour les plus-values
liées aux rachats d’action est plus légère que celle des dividendes est le marché l’interprète
comme une décision exceptionnelle contrairement aux versements de dividendes qui se
reproduisent plusieurs fois dans l’année. Le rachat d’actions est donc un instrument de gestion
des fonds propres.
On peut néanmoins se demander pourquoi les entreprises préfèrent utiliser le cash-flow
disponible (Jensen, 1979) dans de la redistribution plutôt que de l’investir dans des
investissements rentables.
Analyse des motivations
Il existe plusieurs facteurs qui incitent les dirigeants aux rachats d’actions, les principales
sont :
En premier lieu, le concept de valeur actionnariale indique qu’il n y a création de
valeur que si la rentabilité d’un investissement est supérieure aux coûts des capitaux
- 54 -
engagés. Mais dans le cas où on ne peut trouver des investissements répondant à ce
critère alors on va rendre les fonds aux actionnaires plutôt que détruire de la valeur. Ce
signal est souvent bien interprété par les actionnaires qui y voient une implication de
l’entreprise à satisfaire leurs exigences.
Si l’entreprise pense que son cours n’est pas correctement estimé elle peut avoirs
recours au rachat d’actions pour envoyer ce signal aux marchés qui le prennent pour
un indicateur de bonne santé puisque l’entreprise dispose de meilleures informations.
La différence d’imposition entre le versement de dividendes et le rachat d’actions, le
rachat d’actions est la politique de redistribution la moins coûteuse des deux.
Pour une entreprise bien implantée sur son secteur, il est nécessaire de substituer les
fonds propres qui sont une ressource coûteuse par l’endettement même si on constate
dans ce cas là une augmentation du risque et donc une augmentation du coût des fonds
propres.
L’entreprise peut arbitrer entre le rachat d’actions et le versement de dividendes car les
dividendes peuvent faire baisser le cours de l’action tandis que le rachat d’actions s’il
diminue le résultat net, du fait de la montée de l’endettement, le répartit sur un plus
faible nombre d’actions donc le Bénéfice par Action augmente. On parle d’ « effet
relutif » du rachat d’actions.
Les motivations à l’origine de cette décision laissent apparaître une forte volonté de « plaire »
aux actionnaires en leur montrant que l’entreprise est attentive à leurs attentes, le rachat
d’actions permet ainsi de réduire les coûts d’agence entre l’actionnaire et le dirigeant.
Réactions du marché
Malgré des fondements théoriques solides on dispose de résultats contrastés sur les marchés
financiers. Les marchés ne vont accorder une prime aux entreprises qui annoncent un
programme de rachat d’actions que sous certaines conditions :
-Si le marché estime que l’entreprise aurait pu sélectionner des projets rentables avant
d’utiliser son cash flow dans un programme de rachat d’actions alors il va sanctionner le titre.
Dans le cas contraire, avec une entreprise sur un marché mature et sans possibilités
d’investissements suffisamment rentables, une prime sera accordée.
- 55 -
- Les marchés récompensent aussi les entreprises qu’ils estiment tendre vers un endettement
optimal. Le marché arbitre dans ce cas entre l’augmentation du risque financier et l’économie
sur le coût des fonds propres due à l’endettement.
Si rien ne nous permet d’affirmer que le rachat d’actions a un impact positif sur la valeur de
l’action, il ne fait aucun doute qu’il est un mécanisme « relutif » permettant d’augmenter
mécaniquement le Bénéfice par action.
Même si tous les investisseurs ne réagissent pas de même manière à une annonce de rachat
d’actions, les prédictions de la théorie de l’agence semblent être confirmées. Les réactions des
investisseurs dépendent des conflits d’intérêts possibles entre actionnaires et dirigeants.
On considère que le rachat d’actions est un des moyens d’accroissement de la valeur
actionnariale dans la mesure où elle permet d’atteindre une structure optimale du capital et de
pouvoir la faire varier selon la conjoncture.
Parmi tous les leviers de la création de valeur, les plus influents sur la capacité de l’entreprise
à créer de la valeur sont les leviers liés à la gouvernance d’entreprise.
2.3 Les leviers du gouvernement d’entreprise.
La gouvernance d’entreprise regroupe l’ensemble des mécanismes de contrôle et de gestion
de l’entreprise. Une autre vision possible serait de la considérer comme l’ensemble des
relations entre l’actionnaire et le dirigeant. Mais trop restrictive celle-ci a été complétée par
Fama et Jensen qui y voit l’ensemble des relations avec les « stakeholders ».
Une analyse de la structure de pouvoir au sein de la firme laisse apparaître une démarcation
entre le pouvoir de contrôle entre les mains des actionnaires et le pouvoir de gestion des
dirigeants.
La théorie financière classique indique que l’objectif des dirigeants et de maximiser la valeur
pour les actionnaires. Dans la pratique la poursuite d’intérêts communs s’est révélée être un
leurre et les actionnaires ont dû mettre en place des structures de contrôle et d’incitation pour
faire converger leurs intérêts et ceux des dirigeants.
Les nombreux rapports et autres règles de bonne conduite qui ont été publiées depuis (en
France rapports Viénot (I et II)), ont contribué à la reconnaissance mondiale d’un
gouvernement d’entreprise axé sur les intérêts des actionnaires.
- 56 -
Le rôle dévolu au gouvernement d’entreprise va donc être l’alignement des comportements
des dirigeants sur la maximisation de la richesse des actionnaires.
2.3.1 Le rôle des dirigeants dans la création de valeur.
Si on considère la firme comme un « nœud de contrats » avec des agents aux intérêts
divergents, la théorie de l’agence issue des travaux de Ross (1973) puis de Jensen et Meckling
(1976) fournit un cadre explicatif. On considère les actionnaires en tant que « principal » et
les dirigeants comme des « agents ». Même s’ils sont rationnels les dirigeants vont chercher à
maximiser leurs fonctions d’utilité, ainsi ils génèrent une augmentation des coûts d’agence.
Ce comportement va influer sur la détermination des dirigeants à servir le intérêts des
actionnaires et inciter à opter pour des décisions sous optimales comme :
- La recherche de croissance : les dirigeants cherchent souvent à réaliser des opérations
de croissance externe comme les fusions-acquisitions par souci de prestige mais aussi
car leurs rémunérations dépendent de la taille de leur société ou encore pour se rendre
indispensable dans l’entreprise.
- La diversification : Les dirigeants et les actionnaires ne subissent pas le même risque
lié à l’activité de l’entreprise. Les actionnaires diversifient leurs portefeuilles et
atténuent ainsi le risque diversifiable tandis que les dirigeants le subissent entièrement.
Pour cette raison, le dirigeant risque de vouloir diversifier son activité pour se
prémunir contre le risque. Cette inclinaison va à l’encontre des intérêts des
actionnaires qui réclament fréquemment un retour au « cœur de métier » de
l’entreprise pour maximiser le flux de liquidités.
- La position des dirigeants : A la différence des actionnaires dirigeants sont présents
physiquement dans l’entreprise. Ils sont donc plus enclin en prendre en ligne de
compte les exigences de leurs salariés que celles des actionnaires.
- L’enracinement des dirigeants : basiquement il s’agit pour le dirigeant soit de se
rendre indispensable soit de rendre son remplacement coûteux pour l’entreprise
- 57 -
(Shleifer et Vishny, 1989). Il peut exister des situations où le dirigeant va investir dans
des projets dont la création de valeur est dépendante de sa présence et où en cas
contraire les actionnaires perdraient la rente qui en découle. La volonté de garder sa
place peut conduire le dirigeant à mettre en place des stratégies défensives contre les
prises de participation, on peut citer les « pilules empoisonnées ou l’investissement
délibéré dans des projets affectant la valeur de l’entreprise. Toutes ces stratégies sont
contraires à l’exigence de maximisation de la valeur actionnariale. Une exception
toutefois l’augmentation de la part du dirigeant dans le capital. Les travaux de Jensen
et Meckling (1976) établissent une corrélation entre la part du capital détenue par les
dirigeants et la valeur de l’entreprise. Tout n’est pas négatif car le maintien d’un
dirigeant dans une optique de long terme permet de le dégager de la pression du
marché et de le faire se focalise sur la croissance de long terme, seule source de
création de valeur durable.
- Différences d’horizon : Les dirigeants ont un mandat pour diriger l’entreprise qui est
limité dans le temps, leur réputation dépendant de leurs résultats, une augmentation de
la valeur après leur mandat ne bénéficiera qu’à leurs successeurs et ne sert pas leurs
intérêts. Ils vont privilégier des investissements avec de bonnes performances à court
terme, l’utilisation de méthodes comme l’EVA® peut amplifier le phénomène.
Tout le problème lié à la place du dirigeant dans la création de valeur est qu’il détient un rôle
clé dans l’augmentation de celle-ci. Les problèmes d’asymétrie d’information et d’aléa moral
provenant de la difficulté d’évaluer le dirigeant les incitent à négliger l’intérêt des actionnaires
dans le seul but de maximiser leurs fonctions d’utilité. Ces comportements affectent la
richesse des actionnaires mais représentent potentiellement un danger à moyen terme pour la
survie de l’entreprise.
Il devient donc nécessaire pour les actionnaires d’inciter les dirigeants à s’aligner sur leurs
intérêts.
2.3.2 Leviers d’alignement des intérêts des actionnaires et des dirigeants.
Pour les actionnaires il est vital de concevoir un système pour contrôler l’activité des
dirigeants. Il sera composé :
- D’un système d’incitation liant la rémunération du dirigeant à sa performance
- 58 -
- De mesures de contrôle
2.3.2.1 Les incitations financières.
Il apparaît dans la littérature économique traditionnelle qu’une augmentation de la
productivité puisse être provoquée par une augmentation du salaire total. Le problème qui se
pose dans le cadre de la valeur actionnariale est de lier la rémunération du dirigeant à sa
propension à maximiser la valeur actionnariale.
Parmi de nombreuses mesures les meilleures restent l’introduction de plans d’actionnariat et
d’émission de stocks-options.
Ces dernières années on a ainsi pu constater une nette augmentation de la part du capital
détenu par les dirigeants. Les fondements théoriques sont fournis par Jensen et Meckling
(1976) qui lient les droits de propriété à la performance des dirigeants. Les marchés réagissent
favorablement aux annonces de plans de stock-options et autres mesures d’accroissement de
rémunération lié à la part de capital. Les dirigeants vont voir leur proportion de rémunération
variable et de long terme augmenter par rapport à leurs bases fixes. Il existe une autre
conséquence intéressante à cette mesure : une vision de long terme.
Les dirigeants espère une valorisation de leurs salaires par l’augmentation du cours de
l’action, dans la plupart des cas il existe une durée d’indisponibilité avant de pouvoir exercer
ses droits, ainsi les dirigeants seront tenus de rester dans l’entreprise pour bénéficier de plus-
values. Seulement pour rester il faudra qu’il fasse preuve d’un réel intérêt à maximiser le
patrimoine des actionnaires.
Il existe tout de même une limite, dans la pratique le salaire ne peut pas descendre en dessous
d’un certain niveau, les contrats qui définissent cette formule ont souvent des clauses limitant
les pertes liés à un effondrement du cours du titre.
En résumé le dirigeant pourra faire de grosses plus-values en cas d’une large contribution à la
création de valeur ; à contrario s’il n’est pas efficace pour l’objectif qu’on lui a fixé il ne
risquera pas de grosses pertes sur sa rémunération.
L’application de ces plans se fait souvent en faveur des dirigeants, cela s’explique car les
décisions des dirigeants ont un effet sur l’ensemble du personnel de l’entreprise. La
productivité des salariés dépend donc de la productivité des dirigeants dont l’importance
augmente avec la taille de l’entreprise. La motivation des cadres non dirigeants est
- 59 -
dépendante aussi du niveau de revenu des personnes avec un plus fort coefficient hiérarchique
alors que celle des dirigeants n’est dépendante que de sa rémunération.
Le succès qu’ont rencontré ces plans d’incitations s’explique par leurs capacités à motiver et à
fidéliser les dirigeants.
Il existe une grave critique à l’encontre de la formule d’intéressement à la performance de
l’entreprise : elle peut entraîner une aversion au risque. On explique cette situation par le fait
que le dirigeant aura « tous ses œufs dans le même panier » à savoir dans la performance de
l’entreprise.
La réaction la plus fréquente pour les dirigeants est de tenter de conserver leurs positions au
niveau actuel, pour cela ils seront tentés de ne choisir que les décisions d’investissements les
moins risqués pour ne pas être mis en danger. Cette propension au sous investissement est un
facteur important pour expliquer une amputation de la croissance de long terme et donc de la
valeur actionnariale. A l’opposé on trouve des individus qui cherchent à n’investir que dans
les activités les plus risquées pour augmenter le rendement et donc la valeur des titres qu’ils
détiennent. Ce type de comportement est moins fréquent que le précédent mais tout aussi
dangereux pour l’actionnaire.
Ces problèmes remettent en cause l’aptitude des incitations financières à faire se rapprocher
l’intérêt du dirigeant et ceux des actionnaires. Etant donné le caractère aléatoire des gains
espérés il devient très difficile d’avoir une idée précise à un instant donné du montant de la
rémunération totale du dirigeant. Cette relative opacité du système peut conduire à des
problèmes de perception par les autres acteurs de l’entreprise. Dans le cadre d’une entreprise
rentable, la rémunération par stock-options du dirigeant et les fortes plus values qu’elle
suggère risque d’induire une différence d’équité par rapport aux autres acteurs de la firme qui
peut provoquer des désincitations à la performance. La valeur globale de l’entreprise étant
conditionnée par la qualité de son capital humain, il pourrait apparaître une solution non
optimale pour la maximisation de la valeur actionnariale.
Le marché a tendance à réagir favorablement à l’annonce de mise en place de rémunérations
incitatives.
Des études empiriques ont été menées pour établir l’efficacité de la politique de rémunération
des dirigeants, leurs conclusions convergent vers l’existence d’une corrélation positive entre
rémunération et productivité. Des auteurs comme Jensen et Murphy (1990) mettent en doute
l’existence de ce lien en arguant du fait que la faible variation du salaire qu’on constate est
- 60 -
trop faible pour être source d’incitations. D’autres encore pensent que la part de la
rémunération fixe est encore trop importante par rapport à ce qu’elle devrait être.
2.3.2.2 Les mécanismes de contrôle.
Pour s’assurer de la poursuite de leurs objectifs, les actionnaires disposent non seulement de
mécanismes d’incitations mais aussi de moyens coercitifs.
2.3.2.2.1 La concentration du capital.
Un capital avec une forte concentration risque de jouer un rôle plus actif dans le
gouvernement d’entreprise qu’un capital faiblement concentré.
On l’analyse par le désintérêt des petits actionnaires au fonctionnement de l’entreprise dont il
détient les parts. A l’inverse les gros actionnaires ont tout intérêt à défendre leurs intérêts car
les gains qu’ils en retirent sont bien plus élevés que le coût de leur activisme.
Pour un actionnaire détenant une large part du capital de l’entreprise le contrôle qu’il obtient
sur les dirigeants est tempéré par une moindre liquidité de son portefeuille et un coût en
relation avec la plus faible diversification de son portefeuille.
La plupart des études révèlent un effet positif d’une forte concentration du capital dans le
gouvernement d’entreprise.
De toutes les catégories d’investisseurs, ce sont les investisseurs institutionnels qui sont les
plus actifs et détiennent les parts les plus élevées de capital, ce qui constitue le critère de
l’efficacité du contrôle sur les dirigeants. En outre ils sont moins suspects de collusion ou de
conflits d’intérêts avec les dirigeants ils ne sont qu’actionnaires de la firme et ne font pas
d’affaires avec elle. C’est cette catégorie qui a le plus recours à son droit de vote.
La géographie du capital ne joue un rôle dans le gouvernement d’entreprise que si elle permet
aux actionnaires d’en tirer partie.
2.3.2.2.2 Le conseil d’administration.
Il constitue le principal moyen de contrôle des dirigeants dans l’intérêt des actionnaires. Il
permet de résoudre les problèmes d’agence et à vocation à évaluer et ratifier les décisions
d’investissement à long terme.
- 61 -
Sa composition dépend surtout de la structure de propriété du capital mais les décisions du
conseil d’administration peuvent aussi influencés la structure du capital (adoption de mesures
de croissance externe par exemple).
La composition du conseil joue un rôle dans la qualité de son contrôle. On recommande
d’introduire des indépendants, théoriquement plus susceptibles de protéger les intérêts des
actionnaires et qui en tire l’essentiel de leurs réputations. Dans la pratique, on s’est rendu
compte que l’efficacité de l’introduction de membres indépendants au dépend
d’administrateurs internes n’était pas flagrante. Le cumul des fonctions de présidence du
conseil et de la direction est à proscrire, même si elle permet une meilleure information, des
responsabilités plus visibles et moins de conflits que la structure encourageant la dissociation
des deux activités.
Le nombre d’administrateurs est également à prendre en compte car plus leur nombre est
élevé, plus les compétences réunies seront nombreuses. Par contre l’implication de chacun des
administrateurs est une fonction décroissante du nombre total.
2.3.2.2.3 La politique d’endettement.
Cette forme de contrôle est tirée des travaux sur la théorie positive de l’agence de Jensen et
Meckling (1976). C’est dans le prolongement de ces travaux qu’en 1986 est publiée un article
qui donne naissance à la théorie du « free cash flow ».
Ici, les pertes de valeur qui surgissent du fait des conflits d’intérêts entre actionnaires et
dirigeants peuvent être éliminées en obligeant les dirigeants à redistribuer le cash-flow aux
investisseurs.
Jensen part du principe que l’endettement permet d’éviter les pertes de valeur par le moyen
disciplinaire qu’elle induit, les créanciers pouvant mettre en règlement judiciaire une
entreprise incapable d’honorer ses dettes.
Cette théorie est surtout valable dans le cas d’entreprises matures avec de faibles opportunités
d’investissement.
2.3.2.2.4 Le contrôle externe du marché financier.
Si le marché est suffisamment liquide et transparent, le cours d’un titre reflète les
performances de l’entreprise.
- 62 -
Si les actionnaires ne sont pas satisfaits de la façon dont leurs intérêts sont pris en compte ils
vendront le titre pour sanctionner la performance de l’entreprise. En plus de la perte de
rémunération liée aux mesures d’intéressement sur le cours du titre, la vente sera interprétée
par le marché comme un signal négatif quand aux capacités de l’entreprise et sa capacité de
financement par les marchés s’en trouvera réduite. Le contrôle du marché s’exerce dans une
opération spectaculaire : l’offre publique avec le risque de départ pour les dirigeants. Les
offres publiques visent en majorité des entreprises mal gérées et dont le titre présente un fort
potentiel de plus value si on impose une meilleure gouvernance.
La simple menace de concrétisation d’une offre publique permet de revenir à une meilleure
gestion.
Ces opérations, lourdes en coût de capital sont de moins en moins fréquentes du fait d’une
réglementation plus stricte envers les concentrations d’entreprises mais aussi de stratégies
défensives les rendant encore plus coûteuses et risquées.
Les dirigeants subissent également la pression des autres firmes concurrentes dont les
performances risquent d’induire une perte de la compétitivité de l’entreprise et donc un coût
d’opportunité plus important pour les actionnaires qui retirent une rentabilité de leurs capitaux
moins élevée qu’elle ne pourrait l’être.
Les leviers de la gouvernance d’entreprise que nous avons développé attestent que malgré les
divergences d’intérêts et les décisions opportunistes, les actionnaires disposent de moyens
solides pour contraindre les dirigeants à agir conformément à leurs intérêts. La procédure
incitative quand à la rémunération se complète avec des dispositifs disciplinaires dont le plus
visible est le conseil d’administration. L’objectif de créer de la valeur contraint donc les choix
industriels du dirigeant. Il est à souligner que plus l’entreprise est dans un modèle de
capitalisme « anglo-saxon » avec d’importants marchés financiers et de puissants groupes
d’investisseurs institutionnels et plus les actionnaires disposent de leviers différents pour
peser sur le gouvernement d’entreprise.
Si la communication financière des entreprises se basent largement sur les modalités
d’application de la création de valeur, il faut bien reconnaître que les motivations à leurs
applications n’ont que rarement été corroborées empiriquement. A partir de là il faut se poser
la question de la perfection du système. Certains n’ont pas hésité à le réfuter en bloc, d’autres
ont fait intervenir de nouvelles théories dans le débat. Nous allons à présent nous pencher sur
les enseignements du marché et sur l’évolution de la doctrine de la valeur actionnariale.
- 63 -
3 CONSÉQUENCES DU PILOTAGE PAR LA VALEUR.
3.1 Introduction.
Les entreprises doivent aujourd’hui faire face à un environnement de plus en plus
concurrentiel, cela se vérifie notamment sur les marchés de biens de consommation où la
compétition a gagné en complexité et se joue désormais sur la scène mondiale. Maintenant
une entreprise qui souhaite assurer sa rentabilité durablement ne peut se contenter de se laisser
porter par la conjoncture, il ne suffit plus d’être présent « au bon endroit, au bon moment ».
En effet, si le chiffre d’affaire augmente alors la société est rentable et le cours de l’action
monte … on peut donc se laisser abuser et penser que ceci est le résultat direct d’une bonne
stratégie. Or la rentabilité est un élément extrêmement fragile résultant d’un ensemble de
conditions particulières et l’entreprise pourrait apprendre après coup que sa rentabilité était
peut-être due à de la chance.
Ainsi une entreprise ne peut plus s’en remettre à la conjoncture, elle doit créer de la valeur
pour ses actionnaires, c'est-à-dire qu’elles doivent enregistrer une rentabilité, à tout instant,
supérieure au coût d’opportunité du capital. Dans cette optique, la création de valeur est
devenue la finalité des entreprises. Pour cela, elles jouent sur plusieurs leviers de croissance :
-les leviers de croissance internes que sont la baisse du coût du capital, l’augmentation de
l’endettement , la croissance, la cession d’activités et l’amélioration du rendement des
capitaux ;
-les leviers de croissance externes : les acquisitions d’actifs, les fusions-acquisitions et les
acquisitions d’actions.
Ces deux leviers sont dits stratégiques. A cela s’ajoute la gouvernance d’entreprise, c'est-à-
dire la création de valeur managériale (contrat incitatif) et les leviers financiers que sont le
rachat d’actions et la gestion des prix des risques financiers. Tous ces outils ont été détaillés
dans la 2ème
partie de ce mémoire, et la première nous présente tous les ratios et indicateurs de
cette création de valeur pour l’actionnaire : la VAN, le ROI, l’EBIT, l’EVA®, la MVA®, le
TSR et le CFROI.
Donc face à la pression de la communauté financière (banques, agences de notation, analystes
financiers, etc. …) la création de valeur est devenue un thème incontournable et les années 90
ont vu naître un nouvelle approche de la performance des entreprises appréciée sur sa capacité
à créer de la valeur pour l’actionnaire. Après avoir brièvement rappelé les différents
- 64 -
mécanismes de création de valeur et les différents indicateurs de mesure de cette création,
nous allons maintenant nous pencher sur les conséquences de cette « révolution » et voir
qu’elle ne fait pas l’unanimité et qu’elle n’est pas non plus parfaite …
Nous allons donc dans un premier temps présenter l’opinion des courants extrémistes aussi
bien alter mondialiste qu’ultralibéraliste, puis en s’appuyant sur les constats de la réalité,
montrer les limites de la créations de valeur et enfin se pencher sur les solutions proposées
pour faire de « la création de valeur pour l’actionnaire » la panacée a une rentabilité durable
des entreprises.
3.2 La pensée alter mondialiste : la destruction de la
démocratie.
Nous allons ici présenter les principaux points de vues des courants marxiste, communiste,
anarchiste et alter mondialiste. Courants de pensées extrémistes qui recueillent de nombreux
suffrages à travers le monde mais aussi en France, où comme nous l’avons vu aux dernières
élections présidentielles, ces idées recueillent environ 10% des suffrages.
3.2.1 Idée de base.
Elle repose sur la pensée de Marx formulée au XIX Siècle. En effet, dans cette pensée la
« création de valeur pour l’actionnaire » ne représente que la valeur captée par les entreprises
à caractère financier sur les reste de l’économie, et cette « captation » prenant 2 formes : une
première correspondant à une modification des conditions de l’emploi de la force de travail et
une seconde forme, cachée derrière le mot « création » qui ne serait qu’une modification de
la répartition de la valeur ajoutée.
Ces idées avaient déjà été présentées par Karl Marx : la première relevant des mécanismes de
l’augmentation absolue et relative de la plus-value prélevée sur les salariés. La seconde
découle de la liberté totale de circulation des capitaux.
3.2.2 La création de valeur : une utopie, une croyance irréalisable.
Dans ces courants de pensée, la création de valeur ne serait qu’une « suite de balivernes »,
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une « utopie irréaliste et irréalisable » comme le dit le professeur Harribey de l’université de
Bordeaux IV. Selon Mr Harribey la fécondité du capital serait le mythe fondateur de
l’idéologie de valeur pour l’actionnaire : le capital serait censé se valoriser sans intervention
des facteurs travail, il aurait la faculté de s’auto engendrer par l’intermédiaire des marchés
financiers … et ainsi tout le monde pourrait s’enrichir à la bourse à un rythme supérieur à
celui de la croissance de la production. Mr Harribey (co-président d’ATTAC et grande figure
des mouvements alternatif et alter mondialiste en France) qualifie donc la théorie de la
création de valeur comme étant utopiste et surtout irréaliste, car il est impossible de se passer
du travail. Et la conséquence de ces théories serait une économie où les entreprises, cotées en
bourse, tendraient à sous –traiter leurs opérations de production, à prélever par la spoliation et
l’exploitation l’ensemble de la valeur ajoutée des ouvriers. (« Travailleurs, travailleuses … on
vous exploite, on vous spolie !» Arlette Laguiller).
3.2.3 La spoliation des ouvriers.
Comme nous l’avons dit, la création de valeur pour l’actionnaire correspond à une
modification des conditions d’emploi de la force de travail dans le but d’accroître la
production et la productivité avec des effectifs réduits, de façon à ce que cette augmentation
vienne gonfler les profits. Dans une telle logique financière, l’abondance de main d’œuvre
qualifiée joue en faveur des pays à bas coûts salariaux et ont pour conséquence des transferts
de production (encore appelés délocalisation) et donc l’effondrement du niveau d’emploi
(chômage) dans nos sociétés riches. Ceci aurait pour conséquence une insécurité sociale et
économique. En effet les entreprises ont recours aux délocalisations, cessions d’activité,
réduction de personnel au mépris de la vie de milliers de travailleurs et de leurs familles dans
le seul but d’accroître leurs bénéfices pour faire monter le cours de leur action en bourse. Qui
plus est tous les scenarii d’enrichissement des actionnaires à court terme seraient privilégiés
quitte à « couler » l’entreprise et cela sans se soucier des conséquences pour les ouvriers :
endettement massif, réduction de la recherche, etc.… Les gouvernements d’entreprise ne
choisiront plus que des activités générant au moins un retour sur capitaux investis de l’ordre
de 15% au détriment d’autres opportunités à 6,7 ou 8% pourtant moins risqués. Ce qui
s’apparente à une destruction d’activités rentables et donc une destruction de richesses et
d’emplois. Tout ceux-ci aboutissant à une idée folle capitaliste d’entreprise sans usine, sans
atelier de fabrication ! Toutes les entreprises externaliseraient leurs activités de production de
- 66 -
façon à ne conserver que des activités financières, de recherches et de conceptions. D’où la
concentration dans certaines régions du monde (les pays riches) du travail très qualifié par
apport au travail ouvrier dans le reste du monde. On assiste donc à une polarisation de
l’appropriation des richesses produites par les ouvriers. Les actionnaires par le biais de leurs
entreprises captent ainsi la valeur produite par les ouvriers dont ils se débarrassent ensuite en
délocalisant au plus offrant … Tel est le sens de la revendication permanente du patronat
d’améliorer la flexibilité du travail et la déréglementation dont l’objectif avoué est la
pressurisation, l’exploitation des ouvriers ainsi que la modification de la répartition de la
fraction de valeur ajoutée créée par les ouvriers allant au profit au détriment de ceux-ci et en
faveur des actionnaires ! Pour conclure, on peut dire que la mise en place des politiques de
création de valeur pour l’actionnaire amène à un renforcement de l’exploitation des
travailleurs à des mouvements de délocalisation à un transfert des risques des actionnaires sur
les ouvriers. Cette logique de création de valeur tend vers un rêve de capital sans travail, rêve
qui fascine certaines couches de population dans les pays riches… Rêve où la rémunération
proviendrait des dividendes des actions. Ce rêve est légitimé par les discours politiques
officiels qui masquent la captation de valeur derrière le mot « création de valeur ». La création
de valeur pour l’actionnaire est le reflet d’une économie capitaliste en pleine perversion
auquel il faut s’attaquer faute de quoi un nouveau totalitarisme nous tendra les bras !
Après avoir exposé le courant alter mondialiste, nous allons maintenant nous pencher
sur l’antithèse.
3.3 La philosophie libérale : Le nouveau paradigme.
Nous allons maintenant exposer le point de vue d’une certaine partie des économistes actuels,
point de vue comme nous allons le voir qui est l’antithèse de la précédente partie.
La notion de création de valeur pour l’actionnaire ou shareholder value added (SVA) a été
développée dans les années 1980 par Rappaport mais trouve ses origines dans les études
réalisées par Modigliani et Miller au début des années 1960…
Depuis la création de valeur est devenue incontournable et connaît un grand succès…elle
serait même devenu la raison d’être des entreprises. Nous allons voir pourquoi en exposant
ces grands principes et ses grandes lignes, puis nous allons voir quelles sont les conséquences
de la mise en place des différents outils de création de valeur (étudiés dans la partie 2) sur le
- 67 -
cours de l’action des entreprises dont les dirigeants pratiquent le pilotage par et pour la
création de valeur pour l actionnaire.
3.3.1 La création de valeur : la panacée.
La « création de valeur pour les actionnaires » est un indicateur de performance pertinent. Elle
favorise la transparence entre les marchés financiers et la gestion interne des entreprises.
Du point de vue de l'actionnaire, les entreprises sont des investissements en capacité de
production qui dégagent ou non une rentabilité supérieure au coût d'opportunité du capital.
Cette définition, aussi simple soit-elle, ne fait pas l'unanimité. Il suffit d'écouter le langage «
politiquement correct » pour se rendre compte que la croissance en termes de chiffre
d'affaires, de bénéfice et de bénéfice par action constitue le principal repère auquel se réfèrent
nombre de directions générales pour séduire leur actionnariat.
Une telle situation a pu perdurer tant que les marchés financiers n'exigeaient pas une certaine
rentabilité. Mais force est de constater que le contexte a radicalement changés. Les
actionnaires sont désormais beaucoup plus exigeants en termes d'objectifs de rentabilité et
plus actifs en termes d'analyses stratégiques…Dans ces conditions, stratégie financière et
gestion opérationnelle doivent se confondre pour que l'entreprise d'aujourd'hui trouve les
capitaux nécessaires à sa richesse de demain. Afin de favoriser cette osmose, il convient de
définir des indicateurs de performance qui mesurent et concilient ambitions actionnariales et «
managériales ». La théorie de la « création de valeur pour les actionnaires » (SVA : «
shareholder value added ») propose cette vision intégrée et interdépendante des
préoccupations financières et opérationnelles.
Convaincus de sa nécessaire déclinaison comme mode de management, la création de valeur
est le point nodal de l'amélioration globale des performances. Ainsi, créer de la valeur peut se
conjuguer selon deux modes principaux : accroître la productivité, d'une part, rechercher une
croissance durable, d'autre part.
Les indicateurs de performance traditionnellement communiqués aux marchés financiers sont
reconnus insuffisants par nombre de spécialistes pour appréhender la valeur desdites
entreprises. La notion de bénéfice par action a certes pour atout sa simplicité de calcul, mais
en économie le plus court chemin n'est pas forcément la ligne droite. Dans une même
perspective, l'économétrie participe depuis une décennie environ à une critique identique des
outils traditionnels d'analyse de l'entreprise. Ces argumentaires font en outre écho au à
- 68 -
l'ouvrage du professeur de finance américain Alfred Rappaport (« Creating Shareholder Value
», 1986). Celui-ci affirme en effet que les indicateurs comptables et autres ratios traditionnels
n'offrent qu'un tableau de bord volumétrique, peu propice aux extrapolations qualitatives en
termes de stratégie à suivre. Ces indicateurs traditionnels sont ainsi frappés d'obsolescence, ne
répondant pleinement ni aux besoins des marchés financiers ni à ceux du management.
La notion de « création de valeur pour les actionnaires » vise à calculer la création de valeur
dégagée par l'entreprise pour l'actionnaire. Cette valeur se mesure comme la différence entre
le résultat d'exploitation après impôts et le coût de financement de l'actif net. Elle rapproche
ainsi le cash-flow du coût du capital investi pour le générer et valorise le différentiel dégagé,
lequel traduit précisément la vraie richesse créée pour les actionnaires.
En d'autres termes, si l'indicateur SVA est positif, il représente la création de valeur dégagée
par l'entreprise après le paiement de son dû auprès de tous ses créanciers, banquiers et
actionnaires. Dans le cas contraire, l'entreprise enregistre une baisse de valeur pour ses
actionnaires.
Cet instrument de mesure, qui n'est en rien révolutionnaire, procède pour l'essentiel de
théories économiques validées empiriquement. Ainsi, Alfred Rappaport a eu en la matière
une influence déterminante au début des années 90, en démontrant par l'observation des titres
cotés le lien organique fort existant entre cette création de valeur et l'appréciation boursière
Dans ce cadre, la création de valeur a fait de nombreux émules dans le milieu des consultants
comme instrument de mesure de la création de valeur (Arthur Andersen utilise la
terminologie SVA).
La SVA, à la confluence des choix financiers et opérationnels, devient l'indicateur de
performance de référence pour un rapprochement entre les intérêts des actionnaires et ceux
des gestionnaires. La SVA représente en outre un outil de pilotage performant. A l'instar de la
méthode des cash-flows actualisés, elle permet un raisonnement stratégique sur les emplois
alternatifs du capital. En calculant la somme actualisée des SVA prévisionnelles, on obtient la
valeur marchande (« market value added », ou MVA®), laquelle permet d'arbitrer notamment
entre plusieurs possibilités d'investissement.
Le management jouit en l'espèce du privilège nouveau de pouvoir guider son entreprise tout
en gardant la maîtrise des marchés financiers. Mais, pour être pleinement efficace comme
outil de management, la SVA doit pouvoir se décliner depuis les décisions stratégiques
concernant l'évolution du groupe jusqu'à la simple décision d'allocation de ressources. Elle
assure ainsi une homogénéisation de la mesure de performance du management intermédiaire,
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qu'elle permet de rétribuer le cas échéant en fonction de sa contribution à la création globale
de valeur.
Alors que la puissance des marchés de capitaux s'impose à l'attention, la gestion par la valeur
permet de transformer cette contrainte financière en opportunité de développement.
La recherche de création de valeur, dictée par des actionnaires de plus en plus exigeants,
conduit donc à une nouvelle formulation des stratégies classiques de croissance des
entreprises : seuls les activités, les clients ou les modes de distribution dont la rentabilité
excède le coût du capital seront dans l'absolu jugés pertinents.
Enfin, deux autres éléments jouent substantiellement sur la création de valeur pour les
actionnaires : d'une part, la motivation du personnel, certains consultants parlent de valeur
pour le personnel, notion qui dépasse une simple rémunération variable en fonction de la SVA
créée ; d'autre part, une politique financière performante visant sans cesse l'optimisation des
capitaux investis.
Ainsi la SVA fait office de garde-fou majeur contre l'évolution économique et financière du
monde contemporain. Elle contraint l'entreprise à justifier ses choix devant ses créanciers et
favorise la transparence entre les marchés financiers et la gestion interne des entreprises. Dans
ces conditions, la gestion de la valeur permet de diffuser la pression actionnariale en
focalisant l'ensemble des acteurs sur les leviers de création de valeur dûment identifiés.
Nous allons maintenant voir les conséquences du pilotage par la valeur sur le cours des
actions.
3.3.2 Les conséquences sur le cours de l’action.
Nous avons vu dans la seconde partie qu’il existait plusieurs leviers à l’origine de la création
de valeur, nous allons donc voir comment ils influent sur le cours de l’action dans le but de
créer de la valeur pour l’actionnaire.
3.3.2.1 Les leviers stratégiques.
Comme nous l’avons déjà dit, il est très difficile de conserver une rente économique sur du
long terme en raison de la convergence des taux de rentabilités, des progrès technologiques et
de la déréglementation. Pour permettre la création de valeur A.Rappaport (1986) avait émis
- 70 -
l’idée d’un horizon de croissance qui correspondait à la durée de l’avantage concurrentiel de
la firme.
Les dirigeants doivent donc chercher à acquérir un nouvel avantage concurrentiel au-delà de cet
horizon. Pour cela ils utilisent différentes méthodes.
3.3.2.1.1. Les opérations de croissance interne.
La faible performance des groupes multi activités ont conduit à une évolution radicale de la
stratégie d’entreprise : le repli sur l’activité de base et privilégier tout investissement qui
génère du profit économique…En effet tout investissements créant de la valeur doit être
accepté si on tient compte du fait que seule la croissance rentable crée de la valeur. Les plus
cités comme créateurs de valeur sont ceux portant sur l’innovation, les investissements sur
immobilisations et les investissements stratégiques dans une optique de long terme…Nous
allons voir quelles sont les conséquences de l’activation de certaines pratiques.
L’effet de levier de l'endettement : l'entreprise s'endette et peut porter la rentabilité comptable
de ses capitaux propres à un niveau supérieur à la rentabilité de son actif économique à
condition que celle-ci reste supérieure au coût net de l'endettement. Cette déconnexion est
d'autant plus forte que le niveau d'endettement est important. Pour une entreprise de risque
moyen, une rentabilité des capitaux propres de 15% nécessite probablement des dettes de
l'ordre de grandeur de 150% des capitaux propres, mais toutes les entreprises sont loin d'avoir
la récurrence de ses cash-flows ! Plus fondamentalement, obtenir ce taux de 15% en jouant
sur l'effet de levier de la dette revient à augmenter très significativement le risque pour
l'investisseur et pour l'entreprise.
Créativité comptable : la technique du pooling dont les jours sont comptés en Europe, les
dépréciations massives d'actifs qui ont le même effet et auxquels des entreprises ont
actuellement massivement recours, font disparaître des pans entiers de capitaux propres, et
permettent d'atteindre plus facilement l'objectif d'un taux de rentabilité comptable de 15%.
L’impact des recommandations et notations des analystes financiers sur les cours de bourse :
le travail des analystes semble apporter une vraie valeur ajoutée aux investisseurs puisque les
valeurs les plus recommandées à l’achat sur performent significativement le marché (de 4%
par an de 1986 à 1999) et les valeurs les plus recommandées à la vente sous performent
significativement le marché (de 9% par an sur la même période). La notation d'une entreprise
a donc un impact direct sur la valorisation des titres de créance de cette entreprise, dans la
mesure où cette notation informe sur le risque de défaut de paiement sur ces titres. Toutefois,
- 71 -
dans la mesure où les agences de notation n'ont pas pour seule fonction d'agréger
l'information disponible sur le marché, mais de créer au travers de leur analyse une
information non disponible préalablement, leurs diverses annonces a aussi un impact sur le
cours de bourse des entreprises qui en sont l'objet. Et donc toutes les opérations de croissance
interne ont pour but de créer de la valeur pour les actionnaires mais aussi d’ obtenir un bon
rating car comme nous allons le voir c’est plus qu’important dans l’optique de créer de la
valeur pour les actionnaires grâce à la croissance externe…
3.3.2.1.2. Les opérations de croissance externe
Il est des événements dans la vie d’une entreprise qui altèrent profondément sa structure
financière et se traduisent ainsi par des transferts, plus ou moins importants, entre actionnaires
et obligataires. On pense notamment à une opération de scission, un programme de rachat
d’actions, ou encore une opération de fusion acquisition. La multiplication de ces opérations
au cours des dernières années pose donc la question des transferts de richesse entre les
actionnaires et les obligataires… Nous allons voir l’évolution de la situation des actionnaires
avant et après l’annonce de ce genre d’opération.
Dans les opérations de scission, on constate que les actionnaires réalisent un gain de 3,6%, et
la valeur de la firme augmente de 1,6%. Ces résultats suggèrent que les opérations de scission
se traduisent par un transfert de richesse des obligataires vers les actionnaires, et que ce
transfert ne suffit pas à expliquer l’ensemble du gain réalisé par les actionnaires. Ainsi sans
surprise, les pertes sont plus sévères pour les entreprises fortement endettées et « non-
investment » grade.
L’impact des programmes de rachat d’actions sur la situation des obligataires : intuitivement,
on s’attend à une détérioration de la position des obligataires, en effet les rachats d’actions se
traduisent par une distribution de cash aux actionnaires, et partant une augmentation de
l'endettement net alors que les cash-flows disponibles restent constants. Toutes choses égales
par ailleurs, le risque de défaut est donc accru, le transfert de richesse des obligataires vers les
actionnaires semble donc patent.
La réalité est plus complexe : en pratique, un effet de signal peut venir contrarier voire
annuler l’effet de transfert de richesse. Suivant que la réduction de capital est perçue
positivement ou négativement par les investisseurs, la situation des porteurs d’obligations se
trouvera détériorée. Les pertes pour les obligataires et les gains pour les actionnaires sont
d’autant plus importants que l’entreprise qui procède à la réduction de capital par rachat
- 72 -
d’actions est « non-investment » grade. Ceci se comprend aisément : si la situation financière
de l'entreprise est bonne, une dégradation pourra ne pas compromettre sa solvabilité. Il en va
tout à fait différemment si sa situation financière est médiocre…
Les fusions-acquisitions : Nous allons voir l’évolution de la situation des obligataires dans
l’entreprise acquéreuse et dans l’entreprise cible. Trois résultats se dégagent : tout d’abord, ils
montrent que les obligataires de l’entreprise cible réalisent un gain systématique, et que les
obligataires de l’entreprise acquéreuse subissent une perte. Ensuite le fait que le gain réalisé
par les obligataires de l’entreprise cible est d’autant plus important que cette dernière a un
mauvais rating et que l’entreprise acquéreuse en a un bon. Ceci est conforme au bon sens car
le rating du nouveau groupe a tendance à s'établir à mi-chemin du niveau de rating des deux
sociétés qui le composent. On a donc à faire à un transfert inter firme et non plus intra firme
comme dans les opérations de scission ou dans les programmes de réduction de capital. C’est
ainsi que la plupart des fusions en cours sont de type horizontal, c’est-à-dire qu’elles
réunissent des entreprises dont les activités sont situées au même stade du processus de
production. Ces accords horizontaux présentent des finalités diverses. Outre la réalisation
d’économies d’échelle (réduction des coûts du fait de l’augmentation des quantités produites),
l’entreprise issue du processus de prise de contrôle possède d’autres motivations :
l’accroissement du pouvoir de marché par l’exclusion volontaire de concurrents réels et/ou
potentiels, le recentrage sur le cœur de métier et les compétences centrales, l’acquisition de
nouvelles technologies, la répartition du risque dans le cadre d’investissements
(particulièrement en matière de recherche et développement) visent à donner à l’entreprise
nouvellement créée un avantage compétitif…et donc la possibilité et les facilitées pour créer
de la valeur.
3.3.2.2 Les leviers financiers.
Nous allons maintenant finir en présentant les principaux leviers financiers de la création de
valeur…
Les dividendes : jusqu’à peu, rares étaient les dirigeants d’entreprises qui se sentaient obligés
de distribuer des dividendes à leurs actionnaires, arguant que les gains en capital à attendre de
leurs investissements, permis par leur trésorerie, étaient plus intéressants. Il est très net que
ceci est en train de changer car la pression des marchés financiers s’est récemment accentuée
en faveur de la distribution de dividendes. L’hypothèse qui est avancée est que les marché
financiers ne sont pas efficients sur ce point et que la prime, ou la décote, accordée par les
- 73 -
marchés financiers aux entreprises payeuses de dividendes, non justifiée, influence de manière
significative la politique de distribution de l’ensemble des dirigeants d’entreprise. Ceux-ci,
ajusteraient leur politique de distribution, afin de faire bénéficier leur entreprise, à court terme,
de la prime de distribution ou de non distribution de dividende. En un mot lorsque les
dividendes sont à la mode comme aujourd’hui, en verser de copieux se traduit souvent, toutes
choses égales par ailleurs, par une meilleure valorisation de l’action. Le montant de trésorerie
qui aurait dû être versé sous forme de dividendes et qui ne l’a pas été, a été affecté à des
rachats d’actions. D’où la constance au cours du temps du taux de distribution pris au sens
large : dividendes et rachats d’actions. L’hypothèse de substitution de l’un par l’autre est donc
bien validée.
Le marché ne s’y trompe d’ailleurs pas, puisque la baisse d’un dividende, habituellement
perçu comme un signal négatif et qui s’accompagne d’une baisse du cours de bourse pour les
entreprises qui ne font pas de rachats d’actions, ne s’accompagne pas d’un tel mouvement
puisque la substitution du rachat d’actions au dividendes réduit le coût du capital des
entreprises.
Toutefois, cet effacement des dividendes au profit du rachat d’actions devrait normalement
s’inverser si les projets de réforme fiscale américaine prévoyant l’exonération d’impôt sur les
revenus des dividendes touchés par les personnes physiques américaines étaient votés en l’état.
L’actionnaire américain devrait alors en effet préférer toucher un dividende exonéré
qu’enregistrer une plus value imposée à 20 %.
La rémunération du risque de faillite de l'émetteur : Celle-ci est bien sûr d'autant plus faible
que l'émetteur a une notation de bonne qualité. Une entreprise notée AA par Standard & Poors
(chaque agence ayant son propre système de rating) paie, 5 points de base (0,05%) à ce titre
contre 41 points de base pour une autre notée BBB. Cette rémunération évolue naturellement
avec l'échéance de l'obligation : la rémunération du risque de faillite coûte 11 points de base à
l'émetteur BBB pour une dette à un an, mais 41 points de base si la dette a 10 ans de maturité.
Ceci est logique puisque la probabilité de faire faillite pendant la durée de vie de l'emprunt
croît avec la durée de cet emprunt.
Le rachat d'actions par l'entreprise : elle entraîne une augmentation du bénéfice par action
(BPA) lorsque l'inverse du PER est supérieur au taux d'intérêt de l'endettement (ou des
placements) après impôt. Dans le cas contraire, il y a dilution du BPA. En effet, l'inverse du
PER correspond au bénéfice net divisé par la valeur des actions, c'est-à-dire au taux de
rentabilité comptable immédiat sur les actions de la société. Si les actions d'une société valent
100 et que celle-ci réalise un bénéfice net de 5, son PER est de 20. L'inverse de 20 est 5 %,
- 74 -
c'est le taux de rentabilité immédiat que l'on obtient en achetant les actions de cette société
puisque pour l'achat d'une action valant 100, le résultat net qui revient à l'actionnaire est de 5.
Si la société rachète ses propres actions pour 100, elle réalise sur ce placement un taux de
rentabilité comptable immédiat de 5 % et si elle peut s'endetter à 3 % après impôt pour ce
faire, on voit qu'elle réalise une marge positive (5% - 3%) et donc un profit comptable, ce qui
explique que dans ce cas de figure il y ait croissance du BPA.
Donc comme nous venons de le voir ces trois types d’action ont pour effet d’augmenter la
rentabilité de l’entreprise et donc créer de la valeur pour l’actionnaire…
Nous venons de voir une partie des conséquences de la mise en place des leviers de la création
de valeur sur le cours de l’action de l’entreprise les mettant en place. Mais comme nous
l’avons dit dans la précédente partie pour qu’il y est une mise en place de ces leviers dans la
gestion de l’entreprise, il faut que les actionnaires arrivent à convaincre leurs dirigeants de
piloter l’entreprise par et pour la création de valeur…En effet comme nous l’avons déjà dit si
les dirigeants et les actionnaires n’ont pas les mêmes intérêts alors ce type de gestion
managériale ne pourra pas être mise place. C’est pourquoi les actionnaires, dans le but de
contraindre leurs managers à leur créer de la valeur, proposent des contrats incitatifs au « top-
executive » et mettent en place des systèmes de contrôle pour s’assurer que les dirigeants ne
s’approprient pas la valeur créer par leur outil de production…
Mais nous allons voir que, malgré, les dispositifs d’incitation et de contrôle, et malgré le
discours d’une grande majorité d’économistes la création de valeur pour l’actionnaire connaît
de nombreuses limites et surtout a entraîner certaines dérives scandaleuses !
3.4 Limites et dérives de la création de valeur pour l
actionnaire.
Nous venons de voir précédemment qu’elles étaient les conséquences des politiques de
création de valeur pour l’actionnaire, tout d’abord pour les alter mondialistes, puis pour les
libéraux. Que cela soit les uns ou les autres, les faits et conséquences soutenus par les deux
camps résultent un peu trop de sentiments exaltés et sont sans doute trop partisans. Il en
résulte donc une vision trop idyllique ou une vision trop catastrophique. Malgré tout, le
concept de création de valeur et les politiques qui en résultent dans l’entreprise ont bels et
bien étaient mises en place dans les entreprises (ou dans une majeure partie).
- 75 -
Bien que nous n’ayons pas encore constaté un effondrement de la démocratie, ni la mise en
place (l’avènement) d’un totalitarisme économique, il ne faut pas penser que la création de
valeur pour l’actionnaire soit le remède universel comme le laisse entendre les mouvements
libéraux. En effet, depuis sa mise en place au début des années 90, on a constaté que la théorie
de la création de valeur avait quelques limites et qu’elle pouvait entraîner des dérives.
3.4.1 Les limites de la création de valeur.
Il convient d’étudier les limites du concept de création de valeur sur plusieurs niveaux, tout
d’abord sur son évaluation, puis sur les indicateurs et enfin au niveau de la gouvernance
d’entreprise.
3.4.1.1 Limites de l’évaluation de la création de valeur.
Elles proviennent du fait que chaque terme de la définition générale de la création de valeur
contient ses propres limites techniques. En effet les capitaux investis prennent en compte de
façon insuffisante les actifs spécifiques de l’entreprise et plus particulièrement son capital
humain (éléments essentiels de la concurrence stratégique entre les entreprises) ainsi que les
informations sur les probabilités de comportement de la concurrence.
Pour ce qui est du coût de la création du capital il y a plusieurs limites : on sait que ce coût est
une donnée fondamentale pour mesurer la création de valeur mais sa détermination est très
difficile ; L’estimation de cette variable exerce une influence considérable sur la mesure or
elle est sujette à de nombreuses contestations : une sous estimation se traduit par des
investissements pas assez rentables et un gaspillage des ressources financières alors que sa
surestimation privera la firme d’opportunités de croissance. De plus son utilisation
systématique amène les entreprises à étalonner leurs performances internes sur des indicateurs
externes volatiles dont l’horizon temporel est plus court que celui des activités économiques.
Il en est de même pour le calcul de la rentabilité, car le rendement des capitaux employés se
calcule à partir de l’excédent net d’exploitation et donc des éléments financiers et
exceptionnels ne sont pas pris en compte ce qui limite une fois de plus l’évaluation de la
création de valeur.
- 76 -
3.4.1.2 Limites des indicateurs de création de valeur.
La principale limite apportée à ces indicateurs de mesure de création de valeur au sein des
entreprises que sont l’EVA®, la MVA® et le TSR est qu’ils sont de nature boursière et donc
fortement influencés par la conjoncture des marchés boursiers et en conséquence ils
n’indiqueraient pas la création intrinsèque de valeur ! Pour ce qui est de la MVA® la création
de valeur boursière est très souvent appréciée par la différence entre la capitalisation boursière
et le montant comptable des capitaux propres (ceci par manque d’informations).Du côté de
l’EVA®, les retraitements à opérer que ce soit sur les capitaux investis ou sur le résultat
restent complexes et soumis à un côté arbitraire qui est très rarement explicité … ce qui rend
la comparaison d’EVA® entre entreprise difficile pour des opérateurs extérieurs. Quant au
TSR il se calcule comme le taux de rentabilité de l’actionnaire qui a acheté l’action en début
de période, a touché des dividendes qu’on suppose réinvestis dans l’achat de nouvelles actions
et qui valorisent son portefeuille en fin d’exercice sur la base des cours de l’action … mais en
fait le TSR est un taux de rendement actuariel dont le calcul doit s’effectuer sur le moyen long
terme (5 à 10 ans) afin de lisser l’impact des variations boursières erratiques. Et enfin la
principale faiblesse des indicateurs est qu’ils peuvent faire apparaître une destruction de
valeur alors que l’entreprise a dégagé une rentabilité supérieure au coût du capital ….
3.4.1 Les limites du management par la valeur.
Une des premières limites et sans doute la plus évidente peut être l’imposition par les
actionnaires aux dirigeants d’une performance irréalisables (on parle souvent d’un ROE de
15% en accord avec le MEDAF) C’est pourquoi le management par la valeur connaît des
limites dans le monde bancaire car le montant des capitaux investis est déterminé par la
réglementation prudentielle. De même dans les start-up où les flux de revenus prévisionnels
sont trop incertains pour être utilisables. La seconde limite vient du fait que l’imposition de
création de valeur par les actionnaires aux dirigeants explique un déplacement du partage de
la valeur ajoutée au profit des actionnaires et une baisse du risque qu’ils supportent. Il y a un
transfert du risque de l’actionnaire vers ses salariés … et donc la contrainte de rentabilité des
managers pensent les amener à réduire les coûts salariaux puis l’emploi pour diminuer le
risque supporté par l’actionnaire. Une troisième limite au concept de management par la
valeur serait une vision court-termiste de la création de valeur, dans les décisions de gestion
- 77 -
de l’entreprise. En effet on observe très souvent une focalisation sur le court terme au travers
des décisions prises par l’entreprise : en terme d’investissement, de système de rémunération
et au travers de la conception de l’entreprise in fine. Les politiques stratégiques s’avèrent être
donc trop souvent malthusiennes : baisse des coûts, au détriment de l’augmentation du chiffre
d’affaires, de l’innovation (synonyme de création de valeur à long terme) est très dangereuse.
D’ailleurs toutes les études montrent que les « vieilles entreprises « ont toujours valorisé
ensemble le capital humain et le capital financier. Donc la priorité donnée à l’augmentation du
rendement des capitaux investis conduit certaines entreprises à se concentrer uniquement sur
des activités rentables à court terme… De cette vision court terme une autre limite est
engendrée. Elle peut amener l’entreprise à ignorer l’intérêt social de l’entreprise (au sens
collectivité humaine). En effet les dirigeants n’ont pas des devoirs que vis-à-vis de leurs
actionnaires (les shareholders) ils en ont aussi envers leurs clients, leurs fournisseurs, leurs
salariés etc … c'est-à-dire envers l’ensemble des parties concernées par leurs décisions. Ceci
résulte du fait que ces acteurs encourent des risques du fait de leurs liens avec l’entreprise
(exemple des sous- traitants d’AIRBUS avec la crise actuelle.) car la création de valeur ne
résulte pas que du capital financier. Elle dépend notamment du capital humain et des actifs
spécifiques investis dans l’entreprise par ses différents partenaires. Donc, dans cette approche
l’objectif de création de valeur demeure mais il ne s’agit plus de valeur actionnariale mais
plutôt de valeur partenariale et de son partage … Enfin une des dernières limites des
politiques de création de valeur pour l’actionnaire vient d’un problème abordé dans la 1ère
partie de ce mémoire, à savoir des divergences d’intérêts entre actionnaires et dirigeants. En
tout et pour cause les actionnaires attendent récupérer la valeur créée à leur demande par les
dirigeants, à qui ils ont confié cette mission moyennant des salaires incitatifs, des golden
parachute et autre rémunération variable assise sur les exploits à réaliser. Mais il peut très vite
y avoir divergence d’intérêts antre les deux parties et il en résulte souvent une perte de valeur.
3.4.3 Les dérives constatées dû aux politiques de création de valeur.
Ces dernières années, et aujourd’hui même, les marchés financiers et la création de valeur se
retrouvent sur le banc des accusés. En effet, les politiques de création de valeur seules raisons
d’être d’une majeure partie des entreprises ont abouti à certaines dérives voir même à
certains scandales ! Nous allons donc présenter les principales dérives recensées puis les
illustrer avec un cas qui fait aujourd’hui école : l’affaire ENRON !
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3.4.3.1 Les différentes dérives.
Celles qui font le plus parler, qui font la une des magazines et des journaux spécialisés ou plus
et qui revient continuellement au cœur du débat (même présidentiel) touchent à la
rémunération des dirigeants, au tant décrier « golden parachute »et aux stock-options (on se
souvient des scandales Messier, Zacharias et actuellement Forgeard). Mais bien que souvent
extrêmement élevées, ces rémunérations sont validées par les conseils d’administration et
donc décidées par les employeurs des dirigeants … la limite de la mise en place d’un système
de salaire incitatif peut surtout avoir des effets pervers car il peut y avoir manipulation des
cours boursiers par les dirigeants dans le but d’exercer leur stock options à bon compte. Une
autre dérive découlant de ce système de rémunération est due à l’asymétrie d’informations
ente les actionnaires et les dirigeants et dans ce cadre là il a été constaté des actions
d’enrichissement personnel des dirigeants au détriment des actionnaires. Les dérives issues de
la mise en place d’une politique de création de valeur pour l‘actionnaire incombent quasiment
systématiquement à l’exécutive board d’une entreprise, car ceux sont eux qui détiennent les
« clefs » de l’entreprise et qui mettent en place cette stratégie. Et dans le but « vital » de
remplir leur contrat on afin de s’enrichir il est constaté des méthodes comptables discutables,
des falsifications comptables, des rémunérations excessives etc. … De plus le problème de la
manipulation des indicateurs de création de valeur se pose de plus en plus souvent. En effet
dans une entreprise les questions du levier de l’endettement et du coût du capital sont traitées
au niveau de la direction et relèvent de la stratégie financière et donc la rémunération, des
dirigeants est liée à ces indicateurs. Des conflits d’intérêts et des risques de manipulation
apparaissent. Ces manipulations peuvent concerner deux éléments du taux de rentabilité :
augmentation apparente du résultat ou baisse fictive des capitaux utilisés . La
déconsolidation des comptes d’actifs d’exploitation, la titrisation des créances, le
financement par des structures non consolidées sont des pratiques abondamment constatées !
Nous pouvons illustrer tous ces éléments par l’affaire qui a sous doute fait le plus grand bruit
ces derniers années… et nous allons voir qu’elle n’implique pas qu’exclusivement les
dirigeants ….
3.4.3.2 Le cas ENRON.
ENRON était une société américaine positionnée sur le secteur de l’énergie et spécialisée
dans le courtage. Tout d’abord entreprise régionale, puis au fil des ans nationale et
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multinationale au chiffre d’affaires de plus 100 milliard de dollars … considérée comme une
« success story » à la COCA COLA la fait se classer au 7ème
rang des entreprises américaines
en 2001 et au delà de son classement, son modèle économique et sa maîtrise des marchés à
terme et des produits dérivés en font un modèle.
En octobre 2001 un profit warning est émis (quelques semaines après les attentats à New
York qui ont arrêtés l’économie américaine 3 jours) c’est un avertissement sur les résultats car
en forte baisse par rapport aux estimations. De là les évènements se précipitent : chute
vertigineuse du cours de l’action à Wall Street, méfiance des investisseurs, baisse des
notations, soupçons de manipulations de comptes et pour finir la mise en faillite.
Depuis les différentes enquêtes ont révélé les principales causes de ce sinistre estimé à
100Milliards de dollars. Tout d’abord les chiffres d’affaires étaient gonflés car ils prenaient en
compte les contrats en cours de négociation ou espérés (et non les seules commissions
acquises ou encaissées comme il est d’usage chez les courtiers !), de plus l’entreprise avait
crée plusieurs milliers d’entreprises, contrôlées par la société elle-même ou des dirigeants
dans le but : une opacité,d empêcher une vision globale du groupe,de faire circuler des
éléments d actifs pour créer des plus values fictives, de consolider les dettes en les transferts
et de délocaliser les profits pour éviter de payer des impôts !!!! En conséquence les actifs
étaient sur-evalués (voir fictifs) et le passif était dissimulé…
Après avoir vu une belle illustration, des dérives de la gouvernance d entreprise, on peut se
demander si d’autres personnes n’auraient pas joué un rôle dans tout ça… ?Car comme on le
sait les entreprises cotées reçoivent une notation et sont auditées par des organismes
indépendants ! L’enquête a fait apparaître que les experts du cabinet d’audit, mondialement
reconnu, Andersen avaient couvert les manipulations comptables et y avaient même participe
en aidant les dirigeants à les monter !! Même si l enquête n arrive pas clairement à le prouver,
elle met quand même en cause les analystes financiers et les agences de notation pour leur
aveuglement mais surtout en raison des forts doutes de conflits d intérêt existants….
Comme nous l avons donc vu, la nouvelle façon de manager, en suivant le concept de la
création de valeur pour l actionnaire connaît donc quelques limites et surtout quelques dérives
scandaleuses. En outre on peut dire que l’approche par la création de valeur apparaît être
inadaptable dans les entreprises non cotées en bourse, car la détermination du coût du capital
y est très difficile.
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La relation d agence qui lie les actionnaires aux dirigeants peut expliquer un certains nombres
d’échecs d’opération, car certains dirigeants adopteront une attitude, une vision à CT, ainsi
que bon nombre de conflits d intérêt…
La théorie de la création de valeur pour l actionnaire est aussi limitée par le fait que son
évaluation et ses indicateurs ne sont pas parfaits…ainsi des opérations de désinvestissement,
par exemple, apparaîtront comme créatrice de valeur pour les indicateurs, mais a LT ces
opérations s’ avèrent être catastrophiques ! De plus ces indicateurs peuvent permettre un
certains nombres de dérives très graves, comme l’ont montre ces derniers temps les nombreux
scandales financier mettant en cause aussi bien les dirigeants que les autorités de régulation.
On voit donc que la création de valeur pour l actionnaire connaît de nombreuses limites,
qu’on ne peut l appliquer a toutes les entreprises, quelle est très difficile a mettre en
œuvre…et qu il en découle maintes et moult dérives.
Malgré tout, le credo de la création de valeur pour l actionnaire reste le must de la
gouvernance d entreprise, il en résulte donc qu il va falloir quand même la réguler, la
réglementer un peu plus…
3.5 Vers une régulation du modèle…ou vers un nouveau
modèle?
Comme nous l avons donc établi dans les précédentes parties de cette section force est de
constater que la création de valeur pour l actionnaire est aujourd’hui le fil conducteur du
pilotage des entreprises…mais que cette politique, cette ligne de conduite entraîne et a
entraînée de nombreuses dérives.
Donc de scandales en scandales il est évident que les autorités des pays riches sont
intervenues, pour éviter tous ces déboires, en légiférant.
Nous allons donc voir quelques lois qui furent adoptées récemment, et leur rôle, puis dans une
seconde partie le nouveau modèle qui en découle…et qui pour ses défenseurs seraient la
solution optimale aux problèmes de la création de valeur pour l actionnaire.
3.5.1 Les différentes lois de régulation.
3.5.1.1 La loi NRE.
L'article de la loi NRE concerne le reporting des entreprises cotées. En France, le concept de
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responsabilité sociale et environnementale est conforté depuis 2002, par la loi relative aux
nouvelles régulations économiques qui prévoit dans son article 116 que le rapport annuel des
entreprises cotées en Bourse contienne des « informations sur la manière dont l'entreprise
prend en compte les conséquences sociales et environnementales de ses activités ». Ne sont
concernées que les entreprises cotées sur un marché réglementé. Faisant appel public à
l'épargne, elles doivent faire preuve de transparence dans l'utilisation des fonds. Dans cet
esprit de bonne gouvernance, les dispositions de la Loi NRE permettent de mettre exergue la
responsabilité des entreprises vis à vis des actionnaires en premier lieu, qui disposent, en plus
des données économiques et financières du rapport de gestion annuel, d'informations sociales
et environnementales tant quantitatives que qualitatives.
3.5.1.2 La loi LSO.
Adoptée en juillet 2002 par le Congrès américain, la Loi Sarbanes-Oxley (appelée aussi
SARBOX ou SOX ou LSO pour les français) oblige les entreprises à répondre de certaines
prérogatives administratives dont l'analyse de leurs procédures financières et la publication de
leurs résultats dans les plus brefs délais.
L'objectif est clair : il s'agit de restaurer la confiance des investisseurs et de renforcer la
gouvernance d'entreprise, largement entamée par les nombreux scandales financiers de 2001
et 2002.
Parmi les nombreuses exigences imposées par le Congrès, la LSO vise : à garantir une
présentation adéquate des rapports financiers, à fournir des processus d'alerte, à exiger la
certification personnelle des rapports financiers par le CEO (PDG) et le CFO (Directeur
Financier) et également à renforcer les contrôles liés au processus de reporting financier.
Concernant ce dernier point, la section 404 revêt la plus grande importance en matière
d'identité et d'accès.
En effet, cette section invite la commission américaine des opérations en bourse (SEC) à
développer et publier des règles, exigeant des entreprises concernées qu'elles intègrent dans le
dossier annuel déposé auprès de la SEC un rapport distinct comportant la certification de la
Direction quant à l'efficacité du contrôle interne exercé sur le reporting financier en plus du
rapport financier annuel
La LSO s'applique aux sociétés, banques, organismes d'épargne et aux entreprises non
américaines qui déposent des dossiers auprès de la SEC sous la section 13(a) ou 15(d) de la
loi SEA (Securities Exchange Act) de 1934. Toutes les entreprises cotées sont donc
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concernées, quelle que soit l'industrie verticale à laquelle elles appartiennent.
Toutes les sociétés cotées, dont la capitalisation boursière est supérieure à 75 millions de
dollars et dont l'exercice se termine le ou après le 15 juin 2004 seront contraintes de déposer
auprès de la SEC un rapport rédigé par la Direction portant sur le contrôle interne exercé sur
le reporting financier en même temps que leur rapport financier annuel.
3.5.1.3 La loi SF.
Comme le Sarbanes-Oxley Act, la Loi de Sécurité Financière vise à limiter les catastrophes
financières résultant d'incuries ou d'actions de camouflages délictueux, comme Enron ou
Parmalat. Elle emploie 3 moyens :
- accroître la responsabilité des dirigeants,
- renforcer le contrôle interne,
- réduire les conflits d'intérêt.
La LSF a été adoptée en juillet 2003 et porte sur les exercices ouverts depuis janvier 2003.
Des dispositions doivent donc être prises pour la publication des résultats de ce printemps
2004.
L'obligation d'un contrôle interne fiable et de la publication de rapports sincères entraîne la
nécessité pour l'entreprise : de contrôler plus efficacement chaque processus de l'entreprise, de
remonter plus d'informations résultant de ces contrôles jusqu'à la direction générale, de mettre
en oeuvre des outils permettant la mise en forme et l'interprétation des données, de s'assurer
que ces résultats sont en lignes avec les directives de gestion. Les dispositifs mis en place
devront, non seulement rassembler les infos de gestion classiques (comptabilité, trésorerie,
paye...), mais aussi aller puiser dans les systèmes opérationnels (ERP, CRM...). Ils devront
également probablement organiser et déléguer un certain nombre de pouvoirs.
Les solutions mises en place, dans une démarche analogue à l'introduction des IAS, sont déjà
disponibles : bases d'informations et connecteurs (PGI, ETL, middleware...), content
management et workflow, tableaux de bord et décisionnels financiers.
L’économie de marché fondée sur la libre confrontation de l'offre et de la demande et, sur le
plan international, sur la liberté des échanges a démontré sa supériorité par rapport à tout autre
mode d’organisation économique. Elle doit avoir pour corollaire des mécanismes de
régulation efficaces.
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3.5.1.4 Le rapport Bouton.
Il n’y a pas de système libéral sans confiance dans les règles de droit et en leur bonne
application. Les évènements récents et la révélation de pratiques comptables critiquables qui
ont affecté des entreprises de taille mondiale sont à l’origine d’une crise de confiance. Le
MEDEF et l’AFEP (Association Française des Entreprises Privées) ont demandé en avril
2002 à Daniel Bouton, président de la Société Générale, d’examiner le fonctionnement des
organes de direction des entreprises cotées et la qualité de l’information financière.
Ce n’est pas la première fois que le MEDEF se penche, en association avec l’AFEP, sur les
problèmes de gouvernement d’entreprise. En juillet 1999 a ainsi été publié un rapport mis au
point par un groupe de présidents de sociétés cotées, le rapport Viénot 2, faisant suite au
rapport Viénot 1, publié en juillet 1995 sous le titre"Le Conseil d'administration des sociétés
cotées". Dans les deux cas, il s'agissait d'une initiative des entreprises elles-mêmes, soucieuses
de préciser certains principes de bon fonctionnement et de transparence propres à améliorer
leur gestion et leur image auprès du public et des investisseurs.
Les conclusions s’articulent en trois parties : la première (et la plus importante) réunit des
suggestions destinées à améliorer encore les pratiques du gouvernement d’entreprise, la
seconde porte sur l’indépendance des commissaires aux comptes et la troisième concerne
l’information financière et les normes comptables.
Comme vous pouvez l’imaginer nous venons de présenter que quelques lois parmi une
multitude, mais ceux sont sans doutes les plus importantes…comme nous venons de le voir
elles permettent une transparence plus nette des entreprises vis-à-vis du marché et cela à la
suite des nombreux scandales financiers des dernières années.
D’ailleurs on constate qu’après chaque nouveau scandale généralement une nouvelle loi est
adoptée ou proposée (exemple en 2001 en France avec la proposition de loi sur les
licenciements abusifs suite à l’affaire Michelin…refusée à l’assemblée nationale).
Mais comme on peut le voir, les politiques légifèrent, les entrepreneurs créer des chartes de
bonne conduite…mais les scandales continuent à éclater !
En effet la régulation et la réglementation pour l’instant n’ont fait que limiter les dérives liées
à la création de valeur pour l’actionnaire mais elles n’arrivent pas à les éradiquer…On peut
dans ce contexte là, espérer qu’enfin des propositions de loi ne seront pas automatiquement
rejetées car venant de l’opposition, mais aussi espérer que peut être le marché arrive à se
réguler enfin tout seul… ou qu’un nouveau modèle soit proposé !
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3.5.2 Un modèle de responsabilité sociale : le modèle skateholder.
La gouvernance d’entreprise, dans le but de créer de la valeur, renvoie au renforcement des
normes de contrôle des dirigeants des entreprises par leurs actionnaires, celui-ci étant rendu
indispensable suite aux grands scandales financiers (Enron par exemple) mis sur le compte de
l’opportunisme des dirigeants et l’absence de contrôle exercé par les actionnaires. Dans cette
optique, la gouvernance d’entreprise vise donc à promouvoir une culture de la transparence et
un nouvel équilibre des pouvoirs entre dirigeants et actionnaires selon une logique de contre-
pouvoirs. Mais, la notion de gouvernance pose également la question de l’organisation
politique de l’entreprise, en l’occurrence la question du partage du pouvoir économique et la
question sociale dans l’entreprise.
Cette perspective traduit un mode d’agencement de pouvoirs susceptible d’assurer la
coopération entre l’ensemble des parties prenantes de l’entreprise (actionnaires, dirigeants,
salariés). Il faut ajouter que cette acception s’est encore davantage étendue, avec le glissement
de la notion de gouvernance d’entreprise vers celle de bonne gouvernance de l’entreprise, ce
dernier concept renvoyant à l’impératif pour l’entreprise de rendre des comptes non seulement
à ses actionnaires et à ses employés, mais également à la société civile en général.
En effet, la responsabilité sociale de l’entreprise (RSE) qui contribue à la diffusion d’une
culture de transparence, rejoignant en cela les principes de la gouvernance, donne un contenu
élargi à la gouvernance de l’entreprise, en étendant les préoccupations de l’entreprise aux
conséquences sociales, éthiques et écologiques de son activité productive.
Désormais donc, l’entreprise est interpellée sur un ensemble de risques économiques, sociaux,
financiers, éthiques, politiques et environnementaux que son activité implique. En clair, dans
le nouveau modèle stakeholder, trois niveaux sont à distinguer en fonction de la nature des
parties prenantes présentes dans l’environnement interne et externe de l’entreprise. Il s’agit
d’un premier niveau qui regroupe les actionnaires, d’un second qui renvoie aux salariés et
aux autres partenaires externes : créanciers, fournisseurs, clients, etc.… Et le troisième,
comprend les parties susceptibles d’être affectées par les activités de l’entreprise, car il s’agit
pour l’essentiel des relations qui lient l’entreprise à la société civile (dimension éthique et
environnementale…) Le modèle stakeholder et la question sociale dans
l’entreprise permettent d’éclairer la problématique de la place du salarié comme acteur de la
gouvernance.
Cette prise en compte du salarié comme partie prenante spécifique ne peut être assurée par
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des mécanismes améliorés de participation financière et de participation à la gestion (entendu
sous l’angle d’un dialogue social s’ouvrant peu à peu aux questions liées à la stratégie de
l’entreprise) ; le modèle stakeholder permet de mettre en lumière les parties prenantes qui
entretiennent des relations contractuelles avec l’entreprise et dont les droits sont reconnus par
la législation civile et commerciale (fournisseurs, clients, créanciers etc.) afin de mieux
comprendre les relations existant entre le système de gouvernance et la création de valeur,
ainsi que le volet de la responsabilité sociale des entreprises (RSE), vue par sa traduction
moderne du modèle stakeholder qui est un véritable engagement de l’entreprise à l’égard de la
société, en vue d’un comportement social et environnemental responsable, où les
séminaristes répondront aux questions liées aux aspects éthiques et à la lutte contre la
corruption, aux conditions de travail et aux problèmes environnementaux, etc.
La comparaison entre ces deux modèles a permis de conclure à la supériorité du modèle
stakeholder en considérant les critères suivants :
le réalisme descriptif du modèle : ce modèle décrit mieux la réalité du fonctionnement
de l'entreprise que le modèle shareholder;
l'éthique : en prenant en compte les intérêts de tous, il présente plus de légitimité car il
répond mieux aux préoccupations d'éthique des différentes parties;
au niveau instrumental : il permet aux firmes d'améliorer leurs performances
économiques. Ce qui est possible dans la mesure où la prise en compte des intérêts de
tous réduit les conflits et suscite l'adhésion, donc incite les stakehokders à l'effort.
Notons que ces deux modèles peuvent exister même dans des firmes entreprenantes, dans le
cas où le propriétaire – dirigeant - associe, par exemple, les salariés à la prise de décisions
importantes, ayant des conséquences sur leur situation. Par exemple, en consultant les
représentants des salariés, en organisant des groupes de discussion sur l'organisation du travail,
etc. Cependant, le modèle semble encore plus adapté aux entreprises dans lesquelles il existe
une déconnexion entre la part de capital détenu et le nombre de votes dans les organes
dirigeants. Autrement dit, dans les entreprises où existe à la fois une séparation des fonctions
de propriété et de contrôle et une séparation entre propriété et appropriation de la valeur.
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3.6 Conclusion.
Aujourd’hui les investisseurs attendent plus qu’une simple stratégie de croissance comme par
le passé, mais une véritable stratégie de la valeur afin de tirer le meilleur de la firme dans
laquelle ils ont investi…Cette révolution peut être imputée à la mondialisation, la
marchéisation et a la dé-règlementation des marches et de l économie, mais aussi aux
nouvelles attentes des investisseurs ! En effet, la création et l intervention massive des fonds
de placement (généralement anglo-saxon) jugée sur le rendement annuel de leurs opérations a
change la donne…
Les actionnaires sont devenus maintenant beaucoup plus exigeant en terme d’objectif de
rentabilité. La création de valeur pour l actionnaire (concept de shareholder value) est
désormais l’objectif assigné aux dirigeants d’entreprise. L idée fondamentale à l’origine du
concept de création de valeur pour l’actionnaire est de dire qu‘une entreprise crée de la valeur
pour ses actionnaires des lors que la rentabilité des capitaux investis est à tout moment
supérieure au coût d’opportunité du capital. Ainsi l’approche par la création de valeur pour
l’actionnaire est le cœur des nouveaux models d’analyse de l’entreprise. Elle fait de
l’actionnaire l’arbitre des choix stratégiques de l’entreprise car ceux-ci doivent être tournés
vers la maximisation de la création de valeur, et il contraint donc l’entreprise, par le biais de
ses dirigeants, à respecter ces promesses de création de valeur. Le lien entre actionnaires et
gouvernance d’entreprise est donc très étroit car les actionnaires incitent les managers à une
gestion de l’entreprise qui veille à la création de valeur actionnariale.
Ainsi la philosophie de création de valeur pour l actionnaire contraint les dirigeants a créer
toujours plus de valeur, car le marché anticipe les résultats des entreprises : si les objectifs
sont remplis alors le cours en bourse de l’action ne bougera pas (car il aura déjà intégré les
effets de la création de valeur), mais si les exigences des actionnaires sont remplis alors, les
actionnaires prendront comme base la nouvelle valeur de l’entreprise et donc, au fil des ans,
les exigences deviendront de plus en plus élevées et donc de plus en plus dures à être
réalisées… et le managers seront peut être « prêts à tout » pour les réaliser.
Dans cette optique la, on a vu apparaître les limites de cette philosophie, du fait de la nature
des indicateurs et de la difficile évaluation de la création de valeur pour l actionnaire… Mais
surtout, suite à un certain nombre de scandales financiers ayant mis en cause les dirigeants
d’entreprises mais aussi les autorités des marchés financiers ainsi que les organismes de
régulation indépendants (cabinets d’audit, agences e notation…). Il est aussi apparut avec
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l’essor des politiques de création de valeur pour l actionnaire, un courant de pensé alter
mondialiste qui sous entend qu’à cause des objectifs assignés aux dirigeants d’entreprises, par
les actionnaires, ceux ci pour assurer le rendement espéré, ont eu recours au délocalisation
massives, cessions d’activités, licenciements abusifs et à la spoliation de la valeur ajoutée
créées par les ouvriers… dans le but d’enrichir les actionnaires et eux même par la même
occasion.
Face à ces dérives et autres conséquences extrêmement fâcheuses pour les ouvriers, petits
actionnaires, sous traitants (les skateholders…) la nécessité de légiférer s’est avérée et s’avère
nécessaire. En effet la mise en place de cette politique est due, certes à la mondialisation et à
la marchéisation de l’économie, mais surtout à la déréglementation des marchés financiers…
il en résulte donc une re-réglementation et il est fort à parier que l’efficacité du système (de la
création de valeurs pour l’actionnaire) à LT dépendra de l’efficacité du système de régulation
mis en place.
Pour ce qui est des faits en réalité peu d entreprises ont un réel pilotage par la valeur, deux
attitudes sont généralement observées : une minimaliste et une autre maximaliste…La
première ne fait que mettre en place des indicateurs de création et communiquer dessus ; la
seconde déploie autour des indicateurs des systèmes de procédures beaucoup trop rigides. Ces
deux conceptions ne répondant pas convenablement au défi de la création de valeur pour l
actionnaire !!!
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CONCLUSION
La création de valeur, a de tout temps était la raison d’être des entreprises, car leur but est
bien évidement de dégager des profits (hormis les entreprises publiques… quoi que !) pour
assurer leur viabilité. La création de valeur est réductible à une définition assez simple : il faut
que les actifs en place et les projets d’investissement génèrent sur CT, MT et LT une
rentabilité supérieure aux coûts des capitaux de l’entreprise.
Avec l’avènement de la mondialisation, de la globalisation, de la financiarisation et
marchéisation de l’économie et de la réduction du nombre de monopoles d’Etats dans de
nombreux pays, les attentes des marchés financiers ont changé. En effet, depuis les années 80
et l’apparition des investisseurs institutionnels, fonds de pension et l’augmentation
considérable des petits actionnaires, le but final de bons nombres d’entreprises a changé… et
donc la gestion des entreprises aussi. Aujourd’hui la majeure partie (voir la totalité) des
entreprises côtées, appartiennent à plusieurs actionnaires, car ceux-ci attendent de tirer le
meilleur de l’entreprise dans laquelle ils ont investi (ce qui est assez logique). C’est pourquoi
le concept de création de valeur connaît un renouveau depuis les années 90 sous le nom de
« création de valeur pour l’actionnaire ».
En effet, sous leurs impulsions, la création de valeur pour l’actionnaire est devenue le cœur de
modèles d’organisations des entreprises et donc qui dit nouveau modèle, dit nouvelle
organisation, nouvelles stratégies, nouvelles gouvernances, nouvelles politiques et nouveaux
indicateurs économiques. Dans un premier temps, il est évident que les actionnaires
(propriétaires de l’entreprise) ont du contraindre les dirigeants à respecter leurs objectifs…
dans le cadre de la théorie de l’agence, le mécanisme le plus efficace est apparu être pour les
actionnaires le salaire incitatif. L’idée est qu’en intéressant les dirigeants à l’évolution du
cours de la bourse (stock option) ou à l’évolution d’un indicateur supposé influer sur le cours
de la bourse, les dirigeants mettront tout en œuvre pour maximiser la création de valeur.
Dans ce cadre là les dirigeants vont donc mettre en place un pilotage par la valeur de
l’entreprise et de nouveaux indicateurs économiques vont donc apparaître !
Traditionnellement la création de valeur était mesurée par le ROE, mais aujourd’hui bons
nombres d’indicateurs apparus depuis longtemps dans la littérature économique, font « la une
de l’actualité ». Par exemple, le TSR mesure la rentabilité obtenue par l’actionnaire entre
l’achat et la vente d’une action et de la prise de dividende (l’Oréal, Disney ….l’utilisent),
mais certaines entreprises en utilisent d’autres comme par exemples l’EVA® mesurant la
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valeur de la différence entre le résultat d’exploitation net et le coût de financement de l’actif
net ; la MVA® qui est la somme des « free cash-flow » actualisés, et encore la VEC, la SVA
etc…Ces indicateurs matérialisent le fait qu’il y a ou non création de valeur pour l’actionnaire,
et donc sanctionnent le cours de l’action en bourse. Car, comme nous l’avons dit, la
rémunération de la gouvernance de l’entreprise est intéressée sur le cours de l’action, par
l’intermédiaire des stocks-options ou par l’intermédiaire des indicateurs… C’est pourquoi le
dirigeant va utiliser tous les moyens possibles pour augmenter la création de valeur. Pour cela,
les dirigeants peuvent jouer sur différents points, qui sont des leviers de création de valeur
actionnariale.
En effet, la recherche de création de valeur imposée par les actionnaires conduit à de
nouvelles stratégies par les dirigeants : seul les activités, les clients, les investissements ayant
une forte rentabilité sont sélectionnés ! La cession d’actifs non stratégiques et le recentrage
sur le cœur du métier sont dus à cette logique, car l’entreprise doit se concentrer sur ses
points forts pour maximiser la création de valeur. De plus le dirigeant doit tenir compte de la
nature de ses actifs, avoir une politique financière alignée sur la situation opérationnelle de
l’entreprise. En outre il doit émettre des signaux positifs vers le marché avec par exemple le
versement de dividende, ou encore le rachat d’action. Toutes les mises en places, actions,
sont sanctionnées par une note attribuée par les agences de rating influençant le cours de
l’action. Comme nous l’avons vu les dirigeants ont en leur possession des leviers stratégiques,
financiers permettant, en jouant sur la croissance interne et externe, de créer de la valeur pour
les actionnaires…
Le problème est que, justement, dans cette optique là, on a observé que certains indicateurs ou
l’évaluation même de la création de valeur comportaient certaines limites.
En effet on a vu que pour mesurer la création de valeur, le manager utilise des indicateurs
comme l’EVA®, la VAN, le BPA, la MVA®, le TSR…Or on sait aussi que dans la plupart de
ces calculs intervient le coût du capital…et que celui-ci est très difficile à calculer mais qu’en
plus il n’est pas précis et que les dirigeants de l’entreprise peuvent donc l’évaluer plus ou
moins comme ils veulent en fonction de leurs objectifs et surtout afin de ne pas subir un
down-grade et donc une chute de la valeur du titre en bourse. Qui plus est ces indicateurs
reflètent, en règle générale, la création de valeur à CT, et donc souvent les dirigeants mettent
en place (ou se focalisent sur) des stratégies de forte rentabilité à CT…alors que pour être
véritablement efficace la création de valeur pour l’actionnaire (et la création de valeur tout
court) doit reposer sur une stratégie et une gestion sur le LT. Qui plus est, les licenciements
abusifs, les délocalisations massives, des endettements faramineux…dans le but d’augmenter
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frénétiquement la rentabilité de l’entreprise sont devenues monnaie courante, ainsi que les
dérives scandaleuses de la part de certains dirigeants : trucage de compte, délit d’initié,
détournement de valeur…mais aussi de la part des organismes de contrôle « indépendants »
de notation et d’audit !!!
Pour limiter de telles dérives, les autorités légifèrent constamment dans le but de réguler un
jeu plus les… Dans cette optique on a vu le rôle des lois NRE, NF, SO qui en sont
l’illustration parfaite. Ces lois ont surtout pour but de restaurer la confiance des actionnaires,
des marchés et d’éviter que les dirigeants puissent s’enrichir aux dépens des actionnaires. De
plus on constate enfin que les conseils d’administration essaient de plus en plus de baisser les
salaires des dirigeants et que les « golden parachutes » sont de plus en plus décriés…
Notamment après le scandale Forgeard (PDG d’Airbus) et on peut donc s’attendre, comme
après chaque scandale, à un nouveau texte de loi, relatif à ces abus.
Malgré tout, le concept de création de valeur pour l’actionnaire, reste le principal mode de
gestion des entreprises… mais ce n’est pas pour autant que le monde économique est sourd
aux plaintes et aveugle aux dérives ! On constate de plus en plus une certaine forme de
responsabilité sociale des entreprises, que les entreprises, tout en ayant en « tête » leur objectif
de création de valeur pour leurs actionnaires, font de plus en plus attention à respecter leurs
salariés, leurs actionnaires, leurs sous-traitants et maintenant même l’écologie... L’entreprise
est donc devenue plus attentive aux préoccupations du monde extérieur, c’est le nouveau
modèle dit des Skateholder.
Ainsi, dans les années 80 avec la mondialisation, le concept de création de valeur par
l’actionnaire reste pour l’instant la notion phare dans la stratégie des entreprises. Mais en plus
d’arriver avec son lot de nouvelles techniques de management et d’indicateurs économiques,
il s’accompagne aussi de défaillances et d’abus… Dans le soucis de les réguler, et grâce à la
prise de conscience générale, un nouveau modèle fait son apparition : le modèle Skateholder.
Sera-t-il le remède miracle ? L’avenir nous le dira !
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« La discipline de la valeur », l’art de la finance
« Les attraits de l’EVA en tant qu’indicateur de performance », l’art de la finance
« Quels leviers pour la création de valeur », l’art d’entreprendre
« Une nouvelle conception de la valeur », l’art de l’entreprise globale
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« Intégrer la création de valeur dans les processus opérationnels »
Site internet du centre de recherche Europeen en finance et gestion :
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« La création de valeur en parler ou pas ? » H. Bouquin (Octobre 2001)