kyste biliaire

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Kystes biliaires Biliary cysts T. Abita (Chef de clinique) *, F. Lachachi (Praticien hospitalier), F. Maisonnette (Praticien hospitalier), S. Durand-Fontanier (Maître de conférence universitaire, praticien hospitalier), D. Valleix (Professeur des Universités, praticien hospitalier, chef du département d’anatomie), B. Descottes (Professeur des Universités, praticien hospitalier, chef de service de chirurgie viscérale et transplantations) Service de chirurgie viscérale et transplantations, CHU Dupuytren, 2, avenue Martin-Luther-King, 87042 Limoges cedex, France MOTS CLÉS Kyste biliaire ; Diagnostic des kystes ; Traitement des kystes KEYWORDS Biliary cysts; Cyst diagnosis; Cyst treatment Résumé Les kystes biliaires sont les formations hépatiques les plus fréquentes. Lésions congénitales bénignes, elles sont uniques ou multiples, avec une nette prédominance féminine. Asymptomatiques dans plus de la moitié des cas, leur découverte est souvent fortuite lors d’explorations abdominales, soit par l’imagerie (échographie, tomodensito- métrie, imagerie par résonance magnétique), soit par la chirurgie (laparoscopie ou laparotomie). Elles peuvent cependant évoluer vers des complications diverses : poussée congestive, hémorragie intrakystique, rupture, infection, compression des structures avoisinantes intra- ou extrahépatiques. Leur traitement ne se justifie qu’en cas de complications ou de douleur. Si la résection laparoscopique du dôme saillant passe pour le traitement le plus appliqué depuis une douzaine d’années, le taux de récidive est assez important. À côté de cette méthode, il en existe d’autres, chirurgicales (kystectomie, résection hépatique, transplantation hépatique) ou non (drainage radiologique percu- tané, injection intrakystique de substances sclérosantes). Avec des avantages, des inconvénients, et des résultats divers, toutes ces méthodes doivent être bien discutées en fonction des situations. © 2005 Elsevier SAS. Tous droits réservés. Abstract Biliary cysts are frequent hepatic manifestations. They are benign, single or multiple congenital lesions, with a female predominance. In more than half the cases, they remain asymptomatic; fortuitously detected during abdominal investigations, they are observable either by imaging (ultrasonography, CT scanning, MRI), either by surgery (laparoscopy or laparotomy). However, they may evolve and induce various complica- tions: congestive attacks, intracystic hemorrhage, ruptures, infection, compression of the surrounding intra- or extrahepatic tissues. Treatment is indicated only in case of complication or pain. Although laparoscopic resection of the dome is the most frequently used treatment for about twelve years, the recurrence rate remains high. Besides, other * Auteur correspondant. Adresse e-mail : [email protected] (T. Abita). EMC-Hépato-Gastroentérologie 2 (2005) 339–347 www.elsevier.com/locate/emchg 1769-6763/$ - see front matter © 2005 Elsevier SAS. Tous droits réservés. doi: 10.1016/j.emchg.2005.08.002

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kyste bilaire

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  • Kystes biliaires

    Biliary cystsT. Abita (Chef de clinique) *, F. Lachachi (Praticien hospitalier),F. Maisonnette (Praticien hospitalier), S. Durand-Fontanier (Matrede confrence universitaire, praticien hospitalier), D. Valleix(Professeur des Universits, praticien hospitalier, chef du dpartementdanatomie), B. Descottes (Professeur des Universits, praticienhospitalier, chef de service de chirurgie viscrale et transplantations)Service de chirurgie viscrale et transplantations, CHU Dupuytren, 2, avenue Martin-Luther-King,87042 Limoges cedex, France

    MOTS CLSKyste biliaire ;Diagnostic des kystes ;Traitement des kystes

    KEYWORDSBiliary cysts;Cyst diagnosis;Cyst treatment

    Rsum Les kystes biliaires sont les formations hpatiques les plus frquentes. Lsionscongnitales bnignes, elles sont uniques ou multiples, avec une nette prdominancefminine. Asymptomatiques dans plus de la moiti des cas, leur dcouverte est souventfortuite lors dexplorations abdominales, soit par limagerie (chographie, tomodensito-mtrie, imagerie par rsonance magntique), soit par la chirurgie (laparoscopie oulaparotomie). Elles peuvent cependant voluer vers des complications diverses : poussecongestive, hmorragie intrakystique, rupture, infection, compression des structuresavoisinantes intra- ou extrahpatiques. Leur traitement ne se justifie quen cas decomplications ou de douleur. Si la rsection laparoscopique du dme saillant passe pour letraitement le plus appliqu depuis une douzaine dannes, le taux de rcidive est assezimportant. ct de cette mthode, il en existe dautres, chirurgicales (kystectomie,rsection hpatique, transplantation hpatique) ou non (drainage radiologique percu-tan, injection intrakystique de substances sclrosantes). Avec des avantages, desinconvnients, et des rsultats divers, toutes ces mthodes doivent tre bien discutes enfonction des situations. 2005 Elsevier SAS. Tous droits rservs.

    Abstract Biliary cysts are frequent hepatic manifestations. They are benign, single ormultiple congenital lesions, with a female predominance. In more than half the cases,they remain asymptomatic; fortuitously detected during abdominal investigations, theyare observable either by imaging (ultrasonography, CT scanning, MRI), either by surgery(laparoscopy or laparotomy). However, they may evolve and induce various complica-tions: congestive attacks, intracystic hemorrhage, ruptures, infection, compression ofthe surrounding intra- or extrahepatic tissues. Treatment is indicated only in case ofcomplication or pain. Although laparoscopic resection of the dome is the most frequentlyused treatment for about twelve years, the recurrence rate remains high. Besides, other

    * Auteur correspondant.Adresse e-mail : [email protected] (T. Abita).

    EMC-Hpato-Gastroentrologie 2 (2005) 339347

    www.elsevier.com/locate/emchg

    1769-6763/$ - see front matter 2005 Elsevier SAS. Tous droits rservs.doi: 10.1016/j.emchg.2005.08.002

  • therapeutic means exist, such as surgery (cystectomy, hepatic resection, hepatic trans-plantation) or non-surgical treatments (percutaneous radiological drainage, intracysticinjection of sclerotic substances). All these methods have to be carefully discussed beforeselection, owing to various associated advantages, disadvantages and results. 2005 Elsevier SAS. Tous droits rservs.

    Introduction

    Les kystes biliaires dsignent des formations intra-hpatiques contenu liquidien de type sreux,circonscrites par un pithlium identique celuides canaux biliaires avec lesquels elles ne prsen-tent aucune communication.1 Le terme de kystebiliaire est donc assez impropre. Celui de kystehpatique simple de la littrature anglo-saxonneparat plus adapt. Dautres appellations lui sontconnues : kyste non parasitaire du foie, kyste hpa-tique bnin, kyste hpatique congnital, kyste uni-loculaire du foie, et kyste solitaire du foie. Endehors de complications, ses caractristiques mor-phologiques rendent son diagnostic ais en cho-graphie et la tomodensitomtrie. Compliqus, ilsprtent facilement le change avec des lsions para-sitaires (kyste hydatique), ou malignes (cystadno-carcinome) dont les indications thrapeutiquessont diffrentes. En effet si lvacuation suffit autraitement dun kyste biliaire symptomatique oucompliqu, la perforation dun kyste hydatique ex-pose un choc anaphylactique, tandis quune r-section hpatique simpose pour les kystes nopla-siques.2,3 Aussi, une dmarche diagnostiquerigoureuse est-elle utile ; elle doit dboucher sur lemeilleur traitement pour vacuer les kystes biliai-res et prvenir les rcidives.

    pidmiologie

    Frquence

    Pendant longtemps, les kystes biliaires taientconsidrs comme une affection rare : en 1971,seuls 350 cas mondiaux taient rapports.4 Celatient au fait que les premiers travaux concernaientles kystes compliqus. Depuis, la frquence deskystes biliaires asymptomatiques a t mieux ap-prcie. Lincidence chographique varie selon lessries de 0,1 % 3 %.57 Des chiffres plus levs ontt rapports par Huang et Caremani qui trouventrespectivement 3,6 % et 4,5 %.8,9 Dans les sriesautopsiques, la frquence est infrieure 2 %.10

    Premire formation hpatique, il reprsente pourAmmori et al., 36,7 % des formations kystiqueshpatiques.11

    Sexe

    Une nette prdominance fminine est note avecun sex-ratio allant jusqu 1/9.4,12 Deux sries fontcependant tat dune prdominance masculine :une rapporte par Ptri13 et une autre srie in-diennne.14

    Age de dcouverte

    Bien que des cas pdiatriques aient t rappor-ts,15 lge de dcouverte est assez tardif, tmoi-gnant dune volution lente de cette pathologiecongnitale : exceptionnel avant 10 ans, sa fr-quence augmente avec lge ; elle devient assezimportante ds 40 ans, et atteint son pic entre 50 et60 ans.1,410

    Cystogense

    Il sagit dune malformation congnitale qui sedvelopperait partir de microhamartomes biliai-res. Ces derniers taient dcrits par von Meyenburgen 1918 comme un nombre limit de canaliculesbiliaires entours par du tissu fibreux (do le nomde complexe de Von Mayenburg ou fibroad-nome).16 Pour Chauveau et al., ces reliquats em-bryonnaires initialement connects larbre bi-liaire devraient subir une involution complte.17

    Dconnects de larbre biliaire alors quils crois-sent, ils aboutissent aux kystes biliaires. Ramos admontr la possibilit dapparition des micro-hamartomes aprs la naissance.18

    Des causes gntiques sont connues : dans lapolykystose hpatique isole, Reynolds et al. ontmis en vidence le gne causal PCLD (polycysticliver disease) situ sur le bras court du chromosome9;19 dans la polykystose hpatornale qui se trans-met sur un mode autosomal dominant pntrancecomplte, trois gnes sont mis en cause : le PKD1situ sur le chromosome 16 est en cause dans 85 %des cas, le PKD2 situ sur le chromosome 4 (10 % descas), et le PKD3 responsable des formes familia-les.20 Ces gnes codent pour les polycystines-1 et 2,glycoprotines transmembranaires ubiquitairesavec localisation biliaire prfrentielle. Leur actionconjointe maintient linteraction normale cellule-

    340 T. Abita et al.

  • cellule et cellule-matrice extra-cellulaire. Leurmutation entrane hyperplasie cellulaire, hypers-crtion fluide, et remodelage de la matrice extra-cellulaire de lpithlium des hamartomes hpati-ques.

    Anatomie pathologique

    Aspects macroscopiques

    La forme est en gnral sphrique ou ovode. Lenombre est trs variable : les kystes solitaires sontles moins frquents ; la prsence dau moins 3 l-sions dfinit la polykystose hpatique ; au-del de15 lsions, il sagit dune polykystose hpatiquemassive ; en association avec les kystes rnaux, ilsagit dune polykystose hpatornale. La taillegalement trs variable, va de quelques millim-tres une vingtaine de centimtres de diam-tre.510 La paroi est fine et translucide, le contenuclair eau de roche , ou citrin et sans cloisons.

    Aspects microscopiques

    Lpithlium du kyste prsente une forte homony-mie avec lpithlium biliaire des points de vue duphnotype, de lactivit prolifrative, et de la ma-trice extracellulaire.21,22 Il prsente une coucheunique de cellules pithliales cubodes ou en co-lonne, monomorphes, dpourvues datypie ; lestroma absent dans les petits kystes, se rduit unefine couche de tissu conjonctif autour des kystes degrande taille.

    Aspects biochimiques

    Le liquide intrakystique a une composition hydro-lectrolytique proche de celle du srum. Lactivitde la gamma-glutamyl-transfrase est cependantsuprieure au taux plasmatique, la concentrationde glucose est faible, et le composant IgA scr-toire est prsent.23 En outre, le taux dactivitactylcholinestrasique (ACE) est presque nul tan-dis que celui du CA 19-9 est assez significatif.24 Lascrtion kystique est hormonodpendante : la s-crtine augmente le volume du liquide sans enmodifier la composition, tout comme pour lpith-lium biliaire.25

    Diagnostic

    Diagnostic positif

    Les circonstances de dcouverte sont variables. Leskystes biliaires sont en gnral asymptomatiques.

    Leur dcouverte est le plus souvent fortuite aucours dexamen dimagerie abdominale (chogra-phie, tomodensitomtrie, imagerie par rsonancemagntique). Certains symptmes sans rapportavec une complication peuvent tre rvlateurs : lapesanteur, la voussure, et la masse situes danslpigastre ou lhypocondre droit sont dues auxkystes de grande taille. Dautres symptmes sonten rapport avec une complication : la douleur abdo-minale survient pour des diamtres kystiques deplus de 8 cm en gnral ;26 elle traduit une poussecongestive dun kyste sous-capsulaire (avec misesous tension subite de la capsule de Glisson) ou uneinfection, ou encore une hmorragie intrakystique.Lictre traduit une compression des voies biliairesintra- ou extrahpatiques. Lhypertension portaleest en rapport avec une compression de la veineporte ou des veines hpatiques. Des vomissementsbiliaires dus une compression duodnale sontpossibles. Une constipation peut survenir par com-pression colique.Au total la clinique est trs pauvre et le diagnos-

    tic positif repose surtout sur limagerie.La radiographie dabdomen sans prparation

    sans grand intrt peut montrer une surrlvationdune coupole diaphragmatique. Lchographie estun examen suffisant pour affirmer un kyste biliairenon compliqu : elle montre une lsion sphriqueou ovalaire, bords nets, avec absence de struc-ture interne, saccompagnant dun renforcementpostrieur des chos (Fig. 1). Ces quatre critresassocis des signes ngatifs comme labsence decloison et de vgtation endokystique, et labsencede calcification paritale sont pathognomoniquesdu kyste biliaire. En tomodensitomtrie, ils sontbien limits, arrondis, hypodenses, avant et aprsinjection intraveineuse de produit de contraste(Fig. 2). En imagerie par rsonance magntique, ilsagit dune lsion arrondie homogne, hypo-intense en pondration T1 et fortement hyper-

    Figure 1 Kyste biliaire en chographie.

    341Kystes biliaires

  • intense en pondration T2 (Fig. 3,4). Si limagerieest trs vocatrice, la biologie na aucun intrtdans le diagnostic positif dun kyste biliaire noncompliqu.

    Complications

    Pousse congestive

    Elle peut tre provoque par toute augmentationdu taux plasmatique de scrtine ou sans cause

    apparente. Elle se traduit par une douleur abdomi-nale associe volontiers une masse abdominale.Dans la plupart des sries, la douleur ne survientque pour des kystes de 8 cm de diamtre au moins.Si le kyste tait connu, une nouvelle chographiemontre une augmentation de son volume.

    Rupture27

    Elle peut tre traumatique ou spontane. Elle com-plique lvolution dune pousse congestive oudune hmorragie intrakystique et est responsabledune irritation pritonale. Si le kyste tait connu,une nouvelle chographie montre sa disparitionassocie un panchement liquidien intraprito-nal.

    Hmorragie intrakystique

    Elle est secondaire une rupture dun vaisseau dela paroi kystique sous forte pression lors de lacroissance du kyste et survient dans 2 9 % descas.28 Elle se traduit par une douleur brutale danslpigastre ou dans un hypocondre, volontiers asso-cie un choc hypovolmique dans les formesmassives et une chute du taux dhmoglobine. Enchographie, le contenu est htrogne et mobile.En imagerie par rsonance magntique, un fortsignal en pondration T1 atteste lorigine hmati-que. Des saignements dges diffrents peuventdonner des sdimentations aboutissant des ni-veaux liquide-liquide.29

    Infection bactrienne

    Elle survient dans environ 1 % des cas, le plussouvent par voie hmatogne.30 Un tableau dabcshpatique pyognes avec fivre, frissons, douleurvive de lhypocondre droit ou de lpigastre, hy-perleucocytose, augmentation de la protine-C-ractive, et prsence lchographie dun contenuhtrogne avec un paississement parital estvocateur. Une ponction choguide permet deconfirmer le diagnostic. Lorsque le kyste biliaire estsolitaire et inconnu, il est difficile de savoir silsagit dun abcs primitif du foie ou dun kysteinfect. Cependant, il est frquent que le pus soitmonomicrobien dans le kyste infect alors que lab-cs primitif est en gnral polymicrobien. Si letraitement se limite une ponction associe uneantibiothrapie, le doute persiste. Mais si une r-section du dme est ralise, son analyse histologi-que permet de retrouver lpithlium biliaire.

    Figure 2 Kyste biliaire au scanner.

    Figure 3 Polykystose hpathique en IRM (T1).

    Figure 4 Polykystose hpathique en IRM (T2).

    342 T. Abita et al.

  • Compressions des structureset organes avoisinants

    Elles peuvent tre intraparenchymateuses ou ex-traparenchymateuses. Un kyste volumineux peutrefouler le parenchyme hpatique avoisinant. lintrieur de ce parenchyme, la compression peutintresser les voies biliaires (donnant une choles-tase intrahpathique : ictre cutanomuqueux ;augmentation de la bilirubine directe et desgamma-glutamyl-transfrases ; dilatation des voiesbiliaires intrahpatiques.), les veines portes (don-nant une hypertension portale et une thromboseportale voire une atrophie du foie correspondantavec hypertrophie compensatrice controlatrale),les veines hpatiques (responsable dune syndromede Budd-Chiari), et les artres hpatiques. lext-rieur du parenchyme hpatique, la compressionpeut tre due au kyste ou lhpatomgalie qui enrsulte. Cette compression peut intresser les l-ments du pdicule hpatique : le choldoque aveccholestase clinique et biologique, et dilatation desvoies biliaires intra- et extrahpatiques respectantle choldoque intrapancratique ; la veine porteavec hypertension portale et thrombose portale ;lartre hpatique avec hypovascularition paren-chymateuse et thrombose artrielle. Les compres-sions digestives sont responsables de syndrome oc-clusif et intressent le duodnum et le clontransverse. Une compression diaphragmatique estpossible avec dyspne.

    Fistulisation

    Elle a t dcrite dans les voies biliaires (pouvantressembler alors un hamartome), et dans le clonet le duodnum, sources dinfection kystique.31

    Dgnrescence maligne

    Elle est rarissime puisquil ny a pas de bile exer-ant une agression chimique sur lpithlium kysti-que. Cependant, il est rapport des cas de carci-nome cholangiocellulaire partir de lpithliumkystique dont les caractres macroscopiques, mi-croscopiques, et pronostiques diffrents du cysta-dnocarcinome, en font une entit nosologique part entire.32 Douleurs abdominales, ictre, as-cite, altration de ltat gnral, peuvent trervlateurs. Lchographie et la tomodensitom-trie montrent des signes de malignit au sein dunkyste : htrognit, aspect irrgulier, et calcifi-cation. lhistologie, la transition entre lpith-lium kystique et la lsion maligne se fait progressi-

    vement. Le pronostic en est mauvais, la survie nedpassant pas 6 mois en gnral aprs sa dcou-verte.

    Diagnostic diffrentiel

    Le kyste biliaire non compliqu peut prter confu-sion avec des lsions kystiques comme un cysta-dnome, unemtastase kystique, et un kyste hyda-tique. Les caractres distinctifs avec uncystadnome et un kyste hydatique sont rsumsdans les Tableaux 1 et 2. Avec le kyste hydatique dutype 1 de Gharbi, la distinction est parfois impossi-ble.33 Aussi une srologie hydatique systmatiquedevant toute suspicion de kyste biliaire sembleraisonnable.

    Attention

    Mtastases kystiquesLa prsence de kystes hpatiques uniques ou

    multiples associs un cancer primitif doitfaire voquer la possibilit de mtastases kysti-ques. Chez un patient dont un bilan prcdentnavait pas mis en vidence de kyste hpatique,la dcouverte dimages kystiques doit faire re-chercher une origine noplasique ventuelle.

    Tableau 1 Diffrences entre kyste biliaire et kyste hydati-que.

    Kyste biliaire Kyste hydatiqueAntcdents Sans

    particularitsVoyage en milieutropicalHydatidose connue

    Membranes Une capsule 2 membranes +prikyste

    Calcifications Absentes FrquentesCloisons Absentes FrquentesVsicules-filles Absentes FrquentesCommunication avecles voies biliaires

    Absente Possible

    Srologie hydatique Ngative Positive

    Tableau 2 Diffrences entre kyste biliaire et cystadnomedu foie.

    Kyste biliaire CystadnomeNombre Unique ou

    multipleUnique

    Cloisons Absentes PrsentesFormations papillaires Absentes FrquentesContenu Sreux MucineuxDgnrescencemaligne

    Exceptionnelle Plus frquente

    343Kystes biliaires

  • Un kyste revtement cili devrait aussi trelimin : il rsulte dun bourgeonnement prcoce delintestin primitif antrieur et prsente un pith-lium de revtement pseudostratifi et cili, fait decellules cylindriques ou cubiques diffrentes de cel-les des canaux biliaires et se rapprochant de cellesdes bronches. En chographie, il apparat souventhypochogne uniloculaire, bien limit, toujourssous-capsulaire, et le plus souvent dans le segmentIV. La confusion avec les lsions pseudokystiques estpossible en cas de kystes multiples et de polykysto-ses hpatiques : le syndrome de Caroli est unemalformation congnitale ralisant des dilatationsmultifocales diffuses ou localises des voies biliairesintrahpatiques segmentaires ; les hamartomes bi-liaires ou complexes de von Meyenburg se compo-sent dun canal biliaire au sein dun stroma fibreuxen gnral hyalinis. En chographie, le syndromede Caroli ralise une dilatation des voies biliaires,avec protrusion nodulaire endoluminale, la forma-tion en pont autour de la lumire dilate et ledveloppement des voies biliaires de part et dautredes branches portales. La tomodensitomtrie re-trouve, outre une communication avec les voiesbiliaires, des branches portales de petite taille en-toures des voies biliaires dilates (dot sign ).34 Leshamartomes sont hypochognes et hyperchog-nes en chographie, hypodenses en tomodensito-mtrie, hypo-intenses en pondration T1, et forte-ment hyper-intense en pondration T2.Lhmorragie intrakystique aboutit un contenu

    htrogne facile confondre avec un cystadno-carcinome.35 Labcdation du kyste biliaire et lab-cs primitif pyognes prsentent les mmes ta-bleaux clinique et radiologique.

    Traitement

    Le traitement vise soulager le patient ; traiter ouviter les complications volutives ; prvenir larcidive.

    Moyens et mthodes

    Labstention thrapeutique reprsente lattitudela plus frquente.

    Les traitements mdicaux sont reprsents parles antalgiques et les antibiotiques.

    Mthodes radiologiquesElles consistent en une ponction-aspiration ou drai-nage percutan du kyste sous reprage chographi-que ou scannographique, avec ou sans injection deproduits sclrosants. La sclrothrapie a pour but ladestruction de lpithlium du kyste, ce qui abolitla scrtion et vite la rexpansion. Les produitsutiliss sont lthanol 95-99, la doxycycline, etla minocycline. Une concentration intrakystiquedau moins 20 % du produit serait ncessaire.36 Uneinfection kystique et toute communication aveclarbre biliaire devront tre limines au pralable.

    Mthodes chirurgicalesLa voie dabord peut tre la laparotomie ou lalaparoscopie. Cette dernire est la plus utilisechaque fois que cest possible car mini-invasive,elle rduit le stress immunitaire, avec rcuprationrapide postopratoire, diminution de la duredhospitalisation, et reprise rapide des activits. Lachirurgie consiste en une rsection du dmesaillant, une kystectomie, une hpatectomie, voireune transplantation hpatique. La rsection dudme saillant est trs pratique en laparoscopiedepuis sa premire description en 1991.37 Elleconsiste vacuer le contenu du kyste, et lefenestrer (Fig. 5,6). La kystectomie a lambition dersquer tout le kyste en bloc. Labsence dun plande clivage prikystique contraint rsquer en foiesain. Les hpatectomies sont mineures ou majeuresselon la taille et le sige du kyste. La transplanta-tion hpatique ou la transplantation hpatornalesont des solutions radicales en cas de polykystosecomplique.

    Indications thrapeutiques

    Les indications des kystes biliaires sont rsumespar la Figure 7. En outre, tout doute entre un

    Mise au point

    La srologie dans le kyste hydatique du foierepose sur la technique Elisa (enzyme linkedimmunosorbent assay), ventuellement com-plte par le western blot. Elle na de valeurque si elle est positive. En effet sa sensibilitvarie de 80 100% et sa spcificit de 88 96%.En cas de doute, limagerie doit primer sur labiologie.

    Point important

    Classification chographique des kysteshydatiques du foie selon GharbiType 1 : kyste anchogne contenant parfois

    un discret sdiment, de paroi presque toujoursplus paisse quun kyste simpleType 2 : kyste contenant une membrane flot-

    tante qui correspond au dcollement de lendo-kysteType 3 : kyste avec multiples vsicules-fillesType 4 : masse htrogne avec une large

    matrice centrale, pseudotumoraleType 5 : forme totalement calcifie

    344 T. Abita et al.

  • cystadnocarcinome et un kyste parasitaire doitorienter vers une kystectomie ou une hpatecto-mie.38 En effet leffraction paritale de ces deuxtypes de formations entranerait une dissminationintrapritonale, double dun risque de choc ana-

    phylactique pour le kyste hydatique. Tout traite-ment des polykystoses hpatiques doit saccompa-gner dun dpistage familial et dun conseilgntique.

    Rsultats

    La ponction-aspiration seule saccompagne dunsoulagement rapide mais la rcidive est tout aussirapide et quasiment de 100 %. Les rsultats de lasclrothrapie allant de 95 100 % dans la prven-tion des rcidives semblent encourager certainsauteurs en faire le traitement de choix des kystesbiliaires.3941 Cependant, de fortes douleurs abdo-minales surtout aprs usage dalcool ont t rap-portes. La rsection du dme saillant est efficacesur la rgression des symptmes. Selon Descottes etal., la rcidive dpend du sige : toute situationtendant recouvrir le toit du kyste est un facteurfavorisant ; il en est ainsi des kystes de la rgionpostrolatrale du foie.42 Si la kystectomie et leshpatectomies rpondent mieux aux objectifs th-rapeutiques, elles peuvent paratre excessives pourcertains cas et comportent une morbidit assezimportante : hmorragie, biliorragie, infections. Latransplantation hpatique comporte les plus gran-des morbidit et mortalit.

    Conclusion

    Le diagnostic dun kyste biliaire suppose llimina-tion dun kyste hydatique et dun cystadnocarci-

    Figure 7 Arbre dcisionnel. Indications thrapeutiques des kystes biliaires.

    Figure 5 Kyste biliaire : vue macroscopique.

    Figure 6 Kyste biliaire ouvert en clioscopie.

    345Kystes biliaires

  • nome. Lchographie est lexamen de choix pour lediagnostic. La bnignit des kystes biliaires impli-que une abstention thrapeutique en dehors decomplications ; la complication indique un traite-ment essentiellement symptomatique, les thra-peutiques plus agressives tant rserves auxatteintes vitales (insuffisance hpatocellulaire).Mais le doute diagnostique est un argument enfaveur dune exrse totale du kyste.

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    347Kystes biliaires

    Kystes biliairesIntroductionpidmiologieFrquenceSexeAge de dcouverte

    CystogenseAnatomie pathologiqueAspects macroscopiquesAspects microscopiquesAspects biochimiques

    DiagnosticDiagnostic positif

    ComplicationsPousse congestiveHmorragie intrakystiqueInfection bactrienneCompressions des structures et organes avoisinantsFistulisationDgnrescence maligneDiagnostic diffrentiel

    AttentionTraitementMoyens et mthodesMthodes radiologiquesMthodes chirurgicales

    Indications thrapeutiquesMise au point

    Point important

    RsultatsConclusionRfrencesPour en savoir plus