journal racailles n°67 (automne 2013)

20
67 Prix libre Automne 2013 L'actu dessinée de Djedje RETraitres A la rue bric LE JEU A LA CON You can be heroes Le courier du lecteur Les billets d'humeur Les coquinages culturels & la cul'turelutte Les rumeurs et autres racailleries... Le journal qui s'en Bas (les) Rhin... CES PARASITES QUI RUINENT LA FRANCE ! PéDéGés, TRADERS, RENTIERS, HOMMES D'AFFAIRES, EXILES FISCAUX...

Upload: journal-racailles

Post on 25-Mar-2016

217 views

Category:

Documents


4 download

DESCRIPTION

 

TRANSCRIPT

N°67Prixlibre

Automne2013

L'actu dessinée de Djedje-

RE­Traitres - A la ruebric - LE JEU A LA CON - L' actu locale -Youcan be heroes- Le courier du lecteur - Les billets

d'humeur - Les coquinages culturels & lacul'ture­lutte - La BD de VI�CE - Lesrumeurs et autres racailleries...

Lejournalquis'en

Bas(les)R

hin...

C E S P A R A S I T E S Q U I R U I N E N T L A F R A N C E !

P é D é G é s , T R A D E R S , R E N T I E R S ,H O M M E S D ' A F F A I R E S , E X I L E S F I S C A U X . . .

Salut à toi le Racaillou qui découvreles premières lignes de ce nouveau numéro deRacailles.

Et ouais Racailles est toujours vivant! Plus que jamais, nous sommes là pour cetterentrée sociale, pour dénoncer, critiquer, railler,grèver, manifester, déranger, subvertir, semarrer... mais aussi pour proposer, imaginer,rêver, créer... parce que résister, c'est créer !

Alors y'a quelques années, nous, ona créé un journal ! Et on essaie de le faire vivretant bien que mal pour disséminer nos mots,pour continuer de désintégrer nos maux ! On atoujours la rage dans les viscères, et on a besoinde s'exprimer, c'est pour ça qu'on a tiré ce papierde mauvaise facture qui graisse les doigts. Onespère qu'il s'imprimera autrement en vous, quenos idées seront partagées reprises etdéclamées. On est aussi là pour déconner,surtout pour déconner ! On s'amuse à fairenotre canard, à l'écrire et à le diffuser ! Parceque l'humour est le meilleur remède contrel'austérité, parce que la blague nous fait réaliserl'absurdité, et puisqu'ici-bas il faut bien s'marrer! Bien entendu, on est “open”, ouverts à toutesles rencontres, aussi hospitaliers et accueillantsqu'une veuve de guerre nymphomane ! Parceque cette aventure se vit à plusieurs, cesmoments de lutte se partagent, et qu'on vousattend avec impatience pour agrandir notrerédaction. Puis plus on est de fous, moins onparaît fou. Et y a tellement de boulot, qu'on estun peu débordé. Tenez, de 2012 à 2013, les 500plus riches fortunes de France se sont accruesde 25%. Vous vous rendez compte, c'est ça lechangement promis par Hollande. On pourraitaussi parler de la contre-réforme fiscale qu'onnous fait petit à petit passer, sous le tapis, avectoujours autant de cadeaux pour les riches et lesentreprises, parfois pire que ce que faisait ladroite ! Le profit va toujours à quelques unspendant que nous subissons les politiquesd'austérité. «Vive la crise ! ».

D'ailleurs, à l'heure ou nous vouslivrons ce journal, vous êtes certainement entrain de manifester contre l'allongement de ladurée de cotisation pour les retraites, pour lespov'gens comme nous qui allons devoirtravailler plus longtemps, pour coûter moinscher aux employeurs, à l’État, pour rester“compétitif”, parc'que la vie c'est la compétition,c'est la jungle, chacun pour sa pomme !Travailler plus longtemps ? Alors qu'il y a demoins en moins de travail, de plus en plus dechômeurs. Continuons à marcher sur la tête,faire profil bas et laissons les lions de la financenous dévorer, nous et notre environnement,résignons-nous, c'est plus simple de fermer lesyeux, de dire qu'on y peut rien et qu'on estimpuissant. C'est facile de penser à sa tronche ettaper sur celle du voisin. C'est facile de nes'intéresser qu'au futile, aux majorités de merdesdes journaux avec leurs faits divers ou lesdiscours puants des éditorialistes. C'est facile dese dire qu'on ne changera rien, de moquer ceuxqui tentent de proposer d'autres choses. Et lepire, c'est que c'est facile de se tourner vers ceux

qui vous disent uniquement ce que vous voulezentendre.

Donc on peut se résigner. Ou bienrésistons ! Profitons de cette amorce demouvement social qui se dessine pour toutbalayer, tout renverser, tout changer, parce qu'il ya un paquet de trucs qui déconnent, nous vousoffrons un brefaperçu dans ce journal de ce qu'ilserait possible de faire. Alors bonne lecture et...devenezRacailles !

Nicolas Demeuré&Alain D'la MamellePour nous contacter : [email protected] web : www.racailles.info

Vous pouvez également flasherdirectementceQRCode :

La rédaction.

Édi to L'actu dessinée

3Rumeurset autresRacailleries...

• Malades de droite : le Sarkothon arécolté 3 fois plus que le Sidaction. Moralité : quitte àavoir le Sida, mieux vaut être de droite !

• Yann Anus Bertrand : "Pourl'environnementHollande ne fait pas le quart de ce qu'afaitSarkozy". Le quart de RIEN ça fait combien ???

• Politic­média : après Bachelot, Bougrab,Cohn-Bendit, Mitterrand, d'autres politiques vontdevenir chroniqueurs médias : Boutin sur RCF et KTO,Morano aux Grosses Têtes, DSK au Journal du Hard,Dati sur FashionTV,...

• Green :Cécile Duflot dit être "en guerre contre lacrise du logement". L'UMP regrette que le Parlementn'ait pas été consulté sur un vote.

• Pas green : Scandale à l'inauguration de laMaison duVélo : Rudy l'Orphelin est arrivé en voiture !

• Sextoys : le Chili vient d'interdire la Pine Hochetaccusée de donner trop de décharges électriques.

• Socialisme :Hollande abandonne l'idée d'uneguerre contre la finance. Ce ne sont pourtant pas lespreuves de ravages quimanquent.

• Municipales : Duron veut rassembler lagauche. Ah ah ahah ahahah aaaahh !!!

• Cinéma : énorme succès pour "Valls contreBachir". La suite "Valse avec Bachar" devrait suivre...

• Egypte : le pays s'enfonce toujours un peu plusdans le chaos. Après les Frères Musulmans le pouvoirdevrait être confié aux frères Bogdanov qui affirmentdescendre des Pharaons.

• Royal Baby : le petit-fils de Diana est sorti dutunnel, lui !

• Inondation : après Caen, c'est au tour deMarie-Jeanne Gobert d'être reconnue catastrophenaturelle.

• Énergie : GDF-Suez lance sa gamme BacharDolce Vita pour fournir sans coupure les mauvaispayeurs.

• Affaire Snowden : "c'est pas desrévélations de PD" aurait déclaréVladimir Poutine.

de Djedje

4 RE­Traitres

C'est reparti pour un tour. On avaitpourtant l'impression qu'on venait de ranger lesbanderoles et la rage contre le passage en forcesarkozien il y a 3 ans. Et PA ! Revoilà uneréforme des retraites... Le « problème » n'était-ilpourtantpas censéavoirétéréglépar la réformede1993 ?De2003 ?De2007?De2010alors ?

Lors de la Conférence sociale du 20 juin,Hollande a annoncé que l’allongement de la duréede cotisation sera « lamesure la plus juste » face à «cette chance formidable qu’est l’allongement del’espérance de la vie ». Les réformes des vingtdernières années ont déjà réduit les droits à pensionsde plus de 30 % et fortement aggravé les inégalités.Mais là rien n'est plus pareil : c'est une réformesocialiste...

Letravailc'estPASlasantéOn vit plus vieux, il faut donc travailler

plus longtemps voilà ce qu'ils veulent encore nousfaire croire. Pourtant pas besoin d'être énarque pourcomprendre qu’augmenter la durée de cotisation,c’est en réalité programmer la baisse des pensions :baisse immédiate pour tous ceux qui passentdirectement du chômage, ou de l’inactivité, à laretraite sans pouvoir atteindre cette durée ; baisse àvenir pour nous les djeuns entrés tard dans la vieprofessionnelle après des études longues et souventduchômage.

Alors certes, l’espérance de vie augmentemais l’espérance de vie en bonne santé, elle,diminue depuis plusieurs années à cause de lasouffrance au travail, de nouvelles pathologies, deproblèmes d'accès aux soins, etc. Les plus duresannées au travail sont entre 60 et 65 ans. Lesmeilleures années de la retraite sont entre 60 et 65ans. A vous d'en tirer les conclusions ! Il a bon dosl’allongement de la durée de vie tout de même.Finalement le progrès social c'est pas mal pour lespatrons, à très longue durée. Il a peut-être fallu lâcherles congés payés et tout le bordel, mais aujourd'huion va enfin pouvoir garder les gens au boulot jusqu'àce qu'ils crèvent.

L’austéritésansfinMais le déficit actuel ne doit rien au

vieillissement de la population. Il s’explique par larécession qui se creuse en Europe, détruit des millionsd’emplois et diminue les cotisations sociales induitespar l’emploi. Cette récession provient essentiellementdes politiques de réduction des dépenses publiques etde baisse du« coûtdu travail ».

On peut donc s'attendre à une nouvellebaisse du niveau des pensions, ce qui diminueraencore le niveau de vie des retraités, ce qui aggraverala récession, ce qui entraînera une nouvelle hausse duchômage, ce qui continuera de creuser le fameuxdéficit, ce qui provoquera encore et toujours des« réformes » qu'on doit appeler des destructions dubiencommunsociétal.

Maisqu'est-cequ'onpeut faire ?Et si on refaisait comme avant, et même

encore en mieux ? On pourrait diminuer le temps detravail et donc améliorer le niveau de vie, grâce à unpartage de la richesse produite bien plus équitable. Ouiça paraît facile à dire et totalement idéaliste. C'est ceque les capitalistes répètent sans relâche depuis aumoins 30 ans : il n'y aurait pas d'alternative.

Pour augmenter le volume des cotisationssociales, il faut en finir avec l’austérité, relancerl’emploi en réduisant le temps de travail, sécuriserl’emploi et le revenu, augmenter les minima sociaux,investir en matière sociale et écologique, réaliserl’égalité professionnelle femmes-hommes. Il s’agit làde choix politiques de justice et de solidarité, êtrecapable de dire STOPaudiktat.

Il y a plus de retraités ? Il est normal definancer leurs retraites en augmentant leur part dans larichesse produite. Selon le Conseil d’orientation desretraites, il faudrait, à législation inchangée, un point,

un seul petit point de PIB supplémentaire en 2020pour équilibrer le système de retraite alors que la partdes salaires a chuté d’environ 6 points au cours desdernières décennies en faveur des dividendes, ducapital.

PourunelargemobilisationLa question des retraites pose celle de la

société dans laquelle nous voulons vivre. La retraite à60 ans par répartition n’est pas un fardeau, elle est unetransmission continue et solidaire de la prise en charged’une génération par la suivante. C’est pourquoi elledépend aussi de l’avenir que la société sera capabled’offrir aux jeunes et aux générations futures. Noussavons ce que nous voulons, ce n'est pas juste de lacontestation molle. Alors BATTONS-NOUS pourfoutre enfin leur système par terre !

IgmackSimax

On ne bossera pas plus vieux !(Bien au contraire)

5

Loger "toute la misère du monde" ?!La scandaleuse gestion de l'hébergementd'urgence dans le CalvadosQui

peut encore direque nous sommesà l'abri de lamisère vous etmoi ? A Caen etdans tout leCalvados depuisle mois de mai,l'austérité montreses ravages ets'attaque aux plusexclus, auxindésirables, auxparasites : lespersonnesdisposant d'hé-bergements d'ur-gence. Dès cemilieu d'année,les crédits 2013du départementalloués à cedomaine sont àsec et descentaines depersonnes sontmises à la rue.Décryptage.

« Les enfants ont eu très froid lanuit dernière. Heureusement que l'associationnous a laissé une tente ». C'est vrai qu'ilfaisait encore froid cette nuit de début juin,comme si le printemps s'amusait à laissertraîner l'hiver. Comme s'il fallait que lecalvaire de ces gens soit intégral. Quand nousles rencontrons, cela fait trois semaines que lafamille de Naranbaatar et Chuluun [NDLR :prénoms modifiés] n'a plus de toit. Troissemaines que leurs gamins de 3 et 5 ans nevivent plus en enfance. Trois semaines queces demandeurs d'asile chinois venus deMongolie Intérieure sont - comme desdizaines d'autres - sans hébergement. Ils sontles visages bien réels de l’arithmétiqueaustéritaire.

Les dispositifsd'urgenceLes associations le redoutaient

depuis déjà longtemps. L’État ne veut plusdépenser pour mettre les gens à l’abri, etencore moins lorsqu'il s'agit d'étrangers.Comment fonctionnent les dispositifs

d'urgence ?Français ou étrangers, munis ou non

d'un titre de séjour, les gens souhaitant êtremis à l'abri sont majoritairement orientés parle service de Veille Sociale 11 5. Ils peuventainsi disposer de places dans des structurespérennes (308) ou être logés dans des hôtelsou des studios meublés (jusqu'à 720 places).Les demandeurs d'asile, eux, sont sensésobtenir une place en Centre d'Accueil pourles Demandeurs d'Asile (CADA). Pourassurer ces dispositifs, l’État via la DirectionDépartementale de la Cohésion Sociale(DDCS) dispose de deux lignes de créditsbudgétaires : le programme (ou BOP) 177 «Prévention de l’exclusion et insertion despersonnes vulnérables » pour l'hébergementdes personnes dites de droit commun, et leBOP 303 « Immigration et asile » pourl'hébergement des demandeurs d'asile. Cesenveloppes représentent environ 4 petitsmillions d'euros par an pour le Calvados. Orpour 2013 la première est épuisée depuis finjuin et l'autre devrait l'être d'ici août.

Pourquoi la situation est-elleaujourd'hui critique ? La préfecture aimeindiquer dans ses communications qu'elle

subit ces dernières années des demandesd'hébergement en hausse, notamment pourles demandeurs d'asile. Elle alimente ainsil'idée d'un appel d'air insupportable dans ledépartement lié à un laxisme de sévérité et unexcès d'accueil durant les années précédentes.Et dans les chiffres ? Pour les quatre premiersmois de 2013 l'augmentation serait de 40 %par rapport à 2012, soit près de 200 nuitéesquotidiennes dont 165 demandeurs d'asile.

Certes il y a eu une augmentationdu nombre de demandes, mais elle est loind'expliquer à elle seule la situation budgétairecatastrophique entraînant des drameshumains, et ne constitue nullement unejustification de cette politique de rejet. LePréfet oublie surtout de dire que ses crédits,déjà largement insuffisants chaque annéecompte tenu des besoins et de ce que l'onpeut attendre d'un pays riche comme le nôtre,ont baissé de 8 % pour la ligne 177 et de 27% pour la ligne 303 ! Enfin, n'ayant déjà àl'époque plus d'argent, la Préfecture a payéles deux derniers mois de 2012 sur l'exercice2013.. . >>>

A LA RUE BRIC

"Un toit pour toutes et tous" - banderole des manifestations à Caen (juillet 2013)

A LA RUE BRIC6

Un avis parlementairerédigé au nom de la

Commission des affaires sociales de l'Assembléeportant sur le projet de loi de finance 2013 met enévidence que les dotations budgétaires sont enpermanence sous-évaluées par rapport aux besoinsréels de l'ensemble du territoire (même siglobalement l'écart se serait réduit, passant de 124,3

% de taux d'exécution en2008 – c'est à dire laconsommation de l'enveloppe–à 104,7 % en 2011).

Tous dehors !La situation est donc

simple, l’État fout tout lemonde dehors pour la simpleraison qu'il rencontre trop demisère et qu'il n'y a plus desous ! Pourtant la loi estclaire. Selon le Code del’action sociale et familiale : «toute personne sans abri ensituation de détressemédicale, psychique etsociale a accès, à toutmoment, à un dispositifd’hébergement d’urgence ».Il prévoit en outre unecontinuité de la prise encharge. D'ailleurs plusieursdélibérations du Conseild’État (27/10/2010) faisantlieu de jurisprudence leconfirment, et récemmentune ordonnance du10/02/2012 a même hissé cetaccueil inconditionnel aurang de liberté fondamentale.

Par contre le Préfetsemble prêt à loger lespersonnes [étrangères] à unecondition : qu'elles s'engagentà quitter le territoire ! Voilàtoute la lumière POLITIQUE

de cette mascarade. Il s'agit d'instrumentaliserl'accueil en faisant penser qu'il y a trop d'étrangers,qu'ils sont un poids insupportable et qu'ils ontvocation à repartir. Mettre des gens à la rue avec desbébés de quelques semaines est une arme de plus degestion migratoire et d'exclusion dictée par laxénophobie. Et au-delà des étrangers, toujours enpremière ligne dès qu'il s'agit d'attaquer et restreindre

des droits, ce sont tous les pauvres et les précaires quisont visés afin qu'un jour l’État n'ait plus à assisterces boulets...

Qu'elle est belle votre politique social[ist]eMM. Hollande et Valls ! Qu'elles sont belles lesvaleurs de l'extrême droite répandues jusqu'à ce quecertains appellent encore la gauche dans uneindécence inouïe ! Des gens dorment à la rue, dansdes parcs ou des voitures, d'autres vacillentd'appartements en appartements, chez des amis oudes bénévoles d'associations... Tout cela pour lesépuiser, les déshumaniser et les éliminer.

Une lueur d'espoir semble pourtantpersister. Le 05 juillet dernier le TribunalAdministratif de Caen a enfin donné une réponsefavorable à une famille de demandeurs d'asilechinois dépourvus d'hébergement. Dans son rendude jugement, la justice a ainsi indiqué « [qu']enrefusant pour des seuls motifs budgétaires de fairebénéficier une famille de demandeurs d'asile d'unhébergement, le Préfet du Calvados a porté uneatteinte grave et manifestement illégale à la libertéfondamentale qu'est le droit d'asile ». La famille a puêtre relogée.

Caisses vides – pochespleines.Ne croyez pas que l'argent part en fumée !

Ce modèle où deux tiers des places d'accueil sontgérées au quotidien avec deux bouts de Scotch et ducarton pour ne surtout pas pérenniser un systèmeenrichit des marchands de sommeil. Et pour certains,elle a du bon la misère humaine quand l’État doitpayer des chambres d'hôtel miteuses ou des studiospourris à des prix exorbitants. Ce sont toujours lesmêmes noms qui reviennent à Caen : le Rex, leCharolais, l'Hôtel de la Paix, le Saint Jean,...nombreux sont ceux qui profitent de conventionssignées avec laDDCS.

Mais un exemple est particulièrementparlant : celui de la société LABORIE Erwan, «loueur meublé professionnel » dont le siège est basé

à Hérouville. Un bel exemple depourriture dont le 4x4 Porschecarbure au sang et aux larmes desplus démunis. Depuis une petitedizaine d'années, cette société aconstruit un petit empireimmobilier destiné à être loué au115. D'abord propriétaire d'unimmeuble découpé en studios ruede Branville à Caen, elle a tout desuite compris le bénéfice à tirer, ettrès vite ce sont des dizainesd'appartements – pour la plupartvétustes et bricolés sans trop sesoucier des permis de construire –qui se sont retrouvésconventionnés. Nos estimationsmontrent qu'à une époque ce sontprobablement plus de 150 studioset petits appartements dansl'agglomération (Caen, Hérouville,Fleury, Ouistreham) voire danstout le département, qui semblentavoir été en sa possession, laplupart loués au 115. Dépassée par

>>>

Campement devant le théâtre

Pancarte d'une manifestantepour l'hébergement à Caen

le succès, la société a même sous-loué des chambresde bonnes afin d'y entasser les gens !Exemple d'immeuble double Bd Leroy = unedouzaine de logements

D'abord à 44€ la nuitée pour 1-2personnes, la convention est aujourd'hui à 22€auxquels s'ajoute 1€ par jour et par personne prélevédirectement auprès des hébergés (dispositif renforcédans un projet de loi de Duflot). La société LaborieErwan parvient donc à percevoir près de 1400€lorsque 3 ou 4 personnes sont logées dans unappartement d'environ 25m² aux conditionsd'hygiène très discutables et aux meubles défoncés,sans parler de parties communes souventdangereuses. Un ancien résident originaire despays de l'Est nous confiait ainsi : « Vous avez vul'état de l'immeuble ?! Il n'y a pas de lumière dansles couloirs et on a peur que l'escalier s'effondre. Ala cave c'est pire, on risque l'incendie à chaqueinstant avec de vieux appareils dans la chaufferie. »Dehors on voit des fils électriques qui pendentsous les gouttières. « Et puis chez nous rien netenait : canapé défoncé, armoires pleines de clousdans tous les sens jusqu'à ce qu'elles se cassentfinalement la gueule, mauvaises odeurs et crasse,etc ». Partout où notre regard se porte on constatedes installations merdiques voire dangereuses.Comble du système : pour de tels taudis, lesnuitées sont louées par lots, et l’État paye même siles logements ne sont pas occupés.

Voilà le quotidien de ces vautours, cescharognards qui tentent parfois de présenter leurdémarche comme sociale. Et voilà comment l’Étatfait tout pour maintenir un système bancal etprécaire. On se doute que d'autres propositionsd'urgence seraient à avancer, comme construire ouréhabiliter des foyers, réquisitionner des logementsvacants (estimés à environ 5000 à Caen) et biensûr agir en profondeur contre la misère et laprécarité et cesser la guerre aux migrants, ce qui

coûterait moins cher à long termeet transformerait la société ! Maispour l'instant la volonté politiquen'est présente à aucun niveau.Certains peuvent dormir sur leurs

deux oreilles et dans des draps de soie !

Mobilisation unanimeet réquisition du « 202 ».Pour l'ensemble des personnes mobilisées

sur cette situation à l'appel initial du Collectif14 pourle respect des droits des étrangers, accumuler lesmanifestations ne suffisait plus : il fallait agir de façonrapide et efficace pour mettre à l'abri les plus fragileset marquer un coup politique. Une première action

marquante fut l'installation d'une vingtaine de tentessur le parvis du théâtre municipal de Caen à l'issue dela manifestation du 10 juin. Bien que symbolique,l'action a choqué notre cher Préfet qui dès lelendemain proposait de reloger la plupart des gens.Ce qu'il n'a pas fait une fois le camp démonté augrand damne des militants qui jurèrent de ne plus sefaire avoir par les mensonges du représentant del’État !

Rapidement l'idée de réquisitionner un lieuvacant s'imposa dans le cadre d'une AssembléeGénérale contre toutes les expulsions. C'est ainsiqu'un ancien foyer d'urgence situé au 202 rue deBayeux à Caen – centre d'hébergement et deréinsertion sociale (CHRS) La Source accueillant desfemmes seules ou avec enfant et déménagé depuisl'automne 2012 - fut réquisitionné officiellement le

A LA RUE BRIC 7

Exemple d'immeuble double Bd Leroy= une douzaine de logements

Décoration du PS14 lors de la manifestation du 18.07.13

28 juin (après uneoccupation discrète de96h). D'abord occupé

par des militants, le lieu fut ensuite investi à lasuite d'une manifestation le 1er juillet par desfamilles à la rue. L'immeuble est composé d'unegrande maison aux nombreuses pièces et destudios accessibles par le jardin. L'ancien CHRScomprenait 30 places ; et aujourd'hui, tout lemonde tâche de se trouver tant bien que mal unepetite place ! Depuis l'ouverture du lieu oncomptabilise environ 30 à 40 personnesrésidentes, dont un tiers d'enfants. Une situationloin d'être satisfaisante et durable.

Ce lieu n'est pas uniquement dédié àl'hébergement : il constitue une arme politiquemajeure pour l'ensemble des personnesmobilisées. Il sert à organiser la lutte, tenir desréunions, constitue un point de rencontres fixe, etsymbolise également l'état critique de la situationpar l'occupation illégale. Le propriétaire - lebailleur social Calvados Habitat - a d'ailleurs portéplainte. Une ordonnance d'expulsion datant du 05juillet et un commandement de quitter les lieuxont été notifiée sur la grille du lieu le 17 juillet.Son directeur Christophe Bureau affirme devoirrelouer le lieu à une association de réinsertion dèsseptembre 2013, même si très étonnamment sonConseil d'Administration n'en est pas informé ! Deplus le foyer La Source a quitté les lieux car il étaitquasiment impossible d'effectuer les travaux de miseen conformité vis à vis des normes de sécurité.D'après l'ancien directeur de l'association Itinéraire,gestionnaire du foyer, il aurait fallu tout raser pourensuite reconstruire !Pour l'instant les militants venus d'horizons divers -associations, syndicats, partis, mouvementslibertaires - comptent bien tenir le lieu, de façonautogérée et démocratique. Des AssembléesGénérales (AG) se déroulent tous les mardis etvendredis à 18h30 et les résident-e-s tiennentégalement des réunions pour organiser la viecommune, chose d'emblée délicate compte tenu de laprécarité, la promiscuité et les diversités culturelles.

«Les associationsmilitantes,vousm'emmerdez ! »Le directeur des services de laprotecton de l'enfance du conseilgénéral du Calvados

Le 202 n'est en tout cas pas près demanquer de résidents. Dernier exemple macabre :l'arrivée le 5 juillet d'une femme africaine avec unbébé âgé de seulement... 7 jours ! Mise à la rue laveille par le CHUmalgré l'absence de prise en chargepar les services sociaux, elle n'a pu trouver d'endroitpour passer la nuit et a donc du dormir dehors avec lenourrisson. Impossible de mettre de mots assez fortspour qualifier cette situation. Et ce n'est pas du côtédes services de la protection de l'enfance du ConseilGénéral du Calvados (CG14) qu'il faut espérer uneaide. Appelé pour ce cas précis, le directeur duservice a refusé de prendre en charge cette femme etson enfant en s'appuyant sur des arguments très «

sociaux » : « on ne peut pas accueillir toute la misèredu monde (…) et de toute façon vous, lesassociations militantes, vous m'emmerdez ! ». Sanscommentaire. Après 13 jours de réflexion [sic], leCG14 a finalement pris en charge cette femme et sonbébé qui relevaient de sa responsabilité.

Dans ces conditions on imaginefacilement les difficultés que rencontrent lestravailleurs sociaux et les juristes pour accomplir leurtravail. Comme l'indiquait Patrick Arz, porte-paroledu Collectif 14 pour le respect des droits desétrangers, interrogé dans Racailles Radio en juindernier : « pour eux la situation est aussi infernale.Les travailleurs sociaux sont obligés de faire lecontraire de ce pour quoi ils sont formés, c'est à direqu'au lieu de pouvoir accueillir tout le monde ettrouver des solutions satisfaisantes en dirigeant lepublic vers les structures qui peuvent les recevoir, ilssont obligés de dire aux gens qu'il n'y a pas desolution. (…) J'ai par exemple reçu un mail d'unassistant social me disant qu'il n'en pouvait plus, nesavait plus quoi faire et avait même failli loger unefamille chez lui, ce qui déontologiquement estproblématique. Tout le monde est dans la détresse etcomme ce sont eux qui reçoivent les gens mis à larue et non la DDCS responsable de la situation, ils sefont agresser ».

C'est donc un tableau noir bien que partielque nous dressons là. Et celui-ci est loin d'être un casà part purement local. Partout ce sont les mêmespolitiques, les mêmes arguments, et les mêmesdiscriminations. Partout on crée la misère plutôt quela combattre, partout on abandonne des populations

sur l'autel d'une soi-disant crise. Et partout étrangerset Français tentent de trouver des réponses. Plusieurssquats similaires existent (Toulouse, Dijon, Poitiers,Paris,...), certains expulsés au début de l'été.

Quelques millions qui manquent mettentpartout des centaines de vies en danger etsymbolisent la volonté de la France - et de l'Europe –de restreindre les politiques sociales et fermer le pluspossible les frontières [voir notre article sur Frontex].Que penser en parallèle lorsqu'on apprend parexemple que la France va acheter 16 dronesaméricains pour une facture de 1,14 milliardsd'euros, ou quand on repense au missile M51 à 120millions pièce qui a foiré son vol d'essai et fini à laflotte en mai dernier ?! C'est un peu démago certes.Mais en face, quand on laisse un bébé de six jours àla rue, c'est tout simplement criminel.

Alors organisons-nous, joignez-vous àcette lutte dans laquelle ce sont nos droits à tous ettoutes qui sontmenacés. Ce désengagement de l’Étatsocial est le même que celui qui détruit l'hôpital et lesystème de santé, qui bousille les services publicsd'éducation, de transports, de communications... Pasétonnant de voir désormais le Front National tractersur les marchés caennais quand ses politiques sontappliquées jusque par les socialos et surtout que lacolère gronde. C'est de là que naissent les sentimentsréactionnaires et se répandent les idées d'extrêmedroite de repli sur soi. C'est la Grèce décomposée etAube Dorée enmiroir.

Igmack Away

8 A LA RUE BRIC>>>

Info de dernière minute :Le tribunal d'instance a rendu son délibéré ce 10 septembre.Il ordonne l'expulsion sans délai du 202. A l'heure où nousimprimons cette 2ème édition (12/09) cette expulsion n'a pas encoreeu lieu. Nous vous invitons à suivre l'évolution de la lutte sur notresite www.racailles.info

9LE JEU A LA CON

Battle for Syria** Bachar, serre les fesses on arrive à toute vitesse, ou pas...

Règles du jeu :Vous êtes isolés diplomatiquement

et retardés dans vos projets de frappesdestinées à punirDamas. Aucun problème !Munissez-vous d'un adhésifet fixez la pagecentrale sur un support lisse. Reculez de 3bons mètres. Munissez-vous à présentd'une fléchette (non-fournie avec lejournal...) et tirez. Bravo ! Vous venez defaire une « frappe chirurgicale ». Vous

pouvez renouveler ce geste autant de foisque vous le désirez. Il ne vous reste plusqu’à contempler les jolis trous que vousvenez de faire dans votre journal favori.Bah oui, vous n’aviez pas pensé auxconséquences de votre action, vous êtes uncrétin.

Si vous le désirez, vous pouvezégalement vous glisser dans la peau de

votre dictateur préféré et ainsi gazer toutvotre peuple. Les règles sont les mêmes.Pour plus de réalisme, nous vousconseillons de mettre en marche unemachine à fumée (elle non plus n’est pasfournie…), vous pouvez aussi toutsimplement péter allègremenent surla page.. .

12 ACTU LOCALEQuel été les ami-e-s ! On s'est bien

rendu compte que nous habitions une villesocialo vu le défilé de ministres - voire plus- auquel on a assisté ! On pourrait presquecroire que notre cher Phiphi serait bien vude ses amis gouvernants et solfériniens dansl'éventualité d'un remaniement. . . M'sieur lePrésident himselfen juin ; Michel Sapin quisigne ses beaux Emplois d'Avenir (29 août)au même moment qu'on annonce uneréforme des retraites rognant l'avenir de

beaucoup d'entre nous ; Christiane Taubiraqui fait la ministre des Palais de justicefaçon agent immobilier ((nov 2012 et 1 eraoût) accueillie par l'Assemblée généralecontre toutes les expulsions et aussi par cessaloperies de Manif pour tous) ; l'inconnueGeorge Pau-Langevin (21 août) pour la pré-promo des nouveaux rythmes scolaires. Onen veut encore, histoire de vraiment frapperdedans à la longue. « Chic chic ! DesRomains ! ».

Belle preuve que ce n'est pas parceque l'usine a fermé que le combat estterminé. Les gars et les filles d'Honneywell(Condé sur Noireau) ne lâchent rien etviennent de se prendre une nouvelle claque.Alors que leur site est définitivement fermédepuis juin dernier, ils attendaient en cettefin d'été une décision concernant lareconnaissance du temps d'exposition àl'amiante.Jusqu'ici effectivepour la période1960-1996, ilsespéraient pou-voir l'étendre jus-qu'à la fermeturede l'usine. Maisdouche froide finaoût : le PremierSinistre annonceque la reconnais-sance n'est éten-due que jusqu'à1999. Trois ans de gagnés au lieu de 17 !Pour tous c'est une véritable honte, unfoutage de gueule sans nom. Ils en veulentaussi à Alain Tourré, leur député, toutcontent d'avoir décroché le pompon.

Que signifie cette reconnaissance ?Pour chaque année travaillée en contactavec l'amiante, un travailleur gagne, grâce àcette reconnaissance, un trimestresupplémentaire pour la retraite. Les 500personnes concernées par la mesureespéraient donc enfin voir une petiteéclaircie dans la galère du chômage,certains pensant pouvoir accéder à uneretraite à taux plein.

Or l'extension n'est finalement quede 3 ans car, durant ces années, les mesuresdu taux d'exposition à l'amiante n'ont pasété faites. Pour la période 2000-2013 lessalariés comptent bien continuer de sebattre car, selon eux, l'exposition a toujoursété importante même si elle est inférieure à5 fibres/litre d'air. Selon le Code du Travailet la jurisprudence le niveau de fibre doit

être le plusproche possiblede zéro. Il fautdonc s'attendreà un combatauprès destribunaux carpour eux lesarguments del'Etat netiennent pas etne répondentqu'à une logiquefinancière. . .

Nous continuerons de suivre ce combat etde vous en informer.

Toute l'actu des ex-Honeywell estsur un blog :

http://exhoneywell.blogspot.fr/

Silence !Ça tourne àHérouville.

Rodolphe Thomas, le maired'Hérouville-Saint-Clair a vraiment tousles talents. Premier magistrat de la ville,garagiste au cœur de lion, grand gouroudes festivaliers de Beauregard, batteurdevant l’Éternel (certains l'appelleraient leJohn Bonham normand), et bientôt –tenez vous bien – digne héritier deLelouch ou Truffaut. Car oui, Môssieurl'Maire a décidé d'installer des camérasdans sa chère cité pour y filmer sesadministrés chéris dans une œuvrenovatrice et anthropologique. Du moinsc'est ce que nous pensions.

Trente secondes de réflexion etun ou deux coups de fil aux gauchisteslocaux plus tard, quelle ne fut pas notredéception. Rien de cinématographique là-dedans, nous n'assisterons jamais auxParapluies d'Hérouville ou à La Haine2. Les caméras serviraient uniquement àce qu'ils appellent de la vidéoprotectionautour du Café des Images et de la rue deStrasbourg. Malgré tout nous sommescontents : nous aurions pu craindre descaméras de surveillance, mais que peut-on reprocher à la protection ? D'empiétersur la vie privée ? D'être un instrumentliberticide à dimension répressive ? D'êtreune fausse réponse électoraliste etpoliticarde ? De n'avoir absolumentaucune efficacité dans la « lutte contre ladélinquance » ? Tout ceci on le sait, on l'avu partout, on l'écrivait nous-mêmesencore dans Racailles n°65 avec le cas deLisieux, et pourtant le nombre de camérasne cesse de croître sur le territoire. MêmeRodolphe ne semble pas convaincu par sapropre politique, affirmant dans la pressefécale, euh... locale que « c'est unesolution, pas LA solution ». Bah oui moncouillon, on a bien compris que c'est unesolution que tu sors du chapeau juste pourrassurer tes électeurs face à leur sentimentd'insécurité alors que tu t'étais engagé en2008 à ne pas avoir recours aux caméras.C'est comme ça que tu tentes d'agir - ouplutôt de gesticuler - pourmasquer l'échecde ta politique, les conséquences dumanque de soutien aux associations et à lavie des quartiers les plus « défavorisés »comme on dit. Car si la délinquanceaugmente, c'est toujours parce qu'on alaissé tomber ces individus, qu'on les alaissés dans leur merde, sans avenir, niactivités, ni perspectives. Alors achetezplutôt des caméras pour faire des projetsvidéo dans les MJC, vous verrez peut-êtreun véritable effet.

Les visites du changement

«  Atchoum, atchoum,atchoum !­ A tes souhaits, à tonboulot,à ton cancer »

proverbe condéen

Honeywell : pas d'accord àl'amiante!

Finies les belles épopées dans un mondebranché-filmé-vidéosurveillé où tout le monde estbien à sa place, ne doit pas outrepasser son rôle et saclasse. L'héroïsme est réservé aux pompiers new-Yorkais, à la brigade des moeurs, aux policiers zélés,aux traqueurs de terroristes, aux héros construits parles médias et la société sécuritaire dans laquelle nousvivons.Finis les héros lyriques et idéalistes, tropromanesques, on les enferme dans des bouquinspour sustenter la soif chimérique des ados et desjeunes pas encore avalés par une société matérialisteet prétendument pragmatique.Finis les Che Guevara, LouiseMichel, LucieAubracou Jean Jaurès. Les héros idéalistes, on lespanthéonise, pour mieux les digérer, on en fait despersonnages historiques obsolètes, reliques d'unehistoire bien éloignée de nos préoccupationscontemporaines.

“Les héros idéalistes, on lespanthéonise, pourmieux les digérer...”

Mais putain ! On peut bien tenter d'éradiquerl'héroïsme, vouloir le faire disparaitre, il ressurgiratoujours dans des terreaux propices à son expression,que sont justement les sociétés en crise identitaire,économique, sécuritaire, sociale...

L'héroïsmeéclate toujours de façonspectaculaire, ilesthéroïsme parcequ'ilestd'inspiration ultra-vertueuseface à un monde en déliquescence

morale etsociale.

Le héros possède une pensée subversive,diamétralement opposée à l'ordre établi, qui peutd'ailleurs être partagée par beaucoup de sesconcitoyens. Mais ce qui le distingue de ces derniers,c'est que le héros passe à l'action ! Il met en oeuvreses idéaux à travers les moyens d'agir dont il dispose.Ce qui en fait un héros, c'est d'abord, que la plupartdu temps, ses moyens d'actions sont extrêmementvertueux, ensuite, et surtout, le héros prend desrisques incommensurables forcant respect etadmiration. Car bien souvent, ce qui en fait un héros,c'est qu'il est prêt à sacrifier sa vie, sa carrière, satranquilité, son anonymat, pour son idéal!L'héroïsme est alors un sacrifice. En cela, on peutaisément dire que l'héroïsme est stupide et vain : àquoi bon sacrifier sa vie sur l'autel de l'absurdité denos sociétés ?C'est vrai bon dieu, à ce que nous savons, nousn'avons qu'une vie, alors pourquoi risquer de laperdre ou la gâcher pour une cause farfelue ?L'acte héroïque n'a justement RIE� de farfelu, ilest plein de sens, parce qu'il donne du sens là ou il n'yen a pas (ou plus !). Il dénonce le cynisme, la

barbarie, la tyrannie, l'immoralité en faisant sursauterd'orgueil et d'espoir l'humanité grâce à un chantépique et visionnaire.L'héroïsme sème le virus de l'espérance. C'est unsacrifice émancipateur. Et, s'il s'agit d'un sacrificematériel, c'est exactement le contraire au plan moral :c'est une sauvegarde de l'humanité !L'acte héroïque est forcément vertueux, pardéfinition. L'acte devient héroïque dès lors qu'ildéfend les valeurs communes au plus grand nombre,la notion d'humanisme !

Aujourd'hui, beaucoup d'entre nousont des intentions héroïques, mais nepassentpas à l'action.

Nous sommes régulièrement, dans nos

vies, notre entourage, confrontés à l'injustice. Nousressentons cela, nous en souffrons par empathie.Nous nous sentons impuissants. Incapables d'agir.Car nous connaissons les conséquences néfastes surnotre vie qu'impliquerait une action souvent illégale.Mais l'illégalité n'est pas l'illégitimité !

Par exemple, je discutais avec un membrede ma famille dernièrement. Il est cadre dans unesociété du batiment, il bosse dans les TP. Il participedonc aux réunions de chantiers et se retrouve face àdes patrons de grandes sociétés du BTP. Vous savez,de ces entreprises à croissance trop rapide pour êtrehonnêtes qui obtiennent des chantiers à coups de potsde vin et qui s'enrichissent rapidement tout en faisant

13

Héroïsme ordinaireQu'est-ce que l'héroïsme au 21ème siècle ?

>>>

You can be heroes

14

beaucoup de malfaçons.Bref, il voit ce leaderd'une entreprise très

connue de pose de carrelage arriver avec un 4x4rutilant dernier cri, raybans sur la tronche, barreau dechaise fumant entre les dents. La réunion se passe.Puis surgit inopinément un contrôle du travail et de lasécurité sur les chantiers. Tous les ouvriers se fontcontrôler, certains d'entre eux s'enfuient. Puis se fontvite rattraper par la police. Là, des ouvriers roumainsou polonais, travaillant 12H par jours, parfois de nuitou en week end, repartent, menottés. Ils travaillaienten sous-traitance pour la boite de carrelage, mais dansl'illégalité, non déclarés, sans-papiers ? Le patron deladite boite, présent, est donc rapidement interrogépar les cognes. Celui-ci, avec une incroyablehypocrisie, cynique, rétorque avec calme qu'il ne gèrepas ses sous-traitants, qu'il n'est responsable de rien.Parce que, ceux qui sont repartis avec les menottes,c'est toujours les mêmes, ceux qui triment, quisouffrent, qui sont rejetés par la société, par lestravailleurs français, par les lois. Ce jour là, celui quiaurait du chausser les bracelets, il estreparti, insouciant, affranchi par leslois et la tyrannie économique danslaquelle nous vivons, sans aucunscrupule et qui recommenceracertainement son manège pourd'avantage s'enrichir en exploitantdes travailleurs étrangers.Le membre de ma famille, excédépar une situation injuste, absurde,me dit qu'il n'avait qu'une envie,c'était de lui rentrer dans la tronche,le dénoncer et dévoiler sesméthodes. Mais il n'a pas eul'audace de le faire, certainement parpeur des conséquences que celaimplique pour lui : se faireremarquer, perdre son travail, alleren justice...

Je ne le juge pas, nous nepouvons juger une situation quenous n'avons pas vécue. Il s'agitseulement d'illustrer mon propos,nous sommes souvent à deux doigtsde l'héroïsme, ou de la

désobéissance légitime, mais nous avons peur defranchir la ligne rouge, de déborder le cadre.

Mais n'aurions nous pasénormémentà gagner à se couvrir de vertuetde courage ?

ous sommes nombreux à noussentir impuissant face à l'iniquité etl'injustice du monde, incapables d'agir faceà une machine globale autonome oumême les états n'ont plus le pouvoirsuffisantpour l'infléchir.

Mais nous avons finalement tant d'occasions, dansnotre quotidien, en désobéissant, en faisant acted'héroïsme, de renverser la vapeur à notre échelle. Fides conséquences matérielles et du prix à payer, laconséquence morale n'a pas de prix, nous serons enpaix avec notre conscience et nous laisserons unetrace supplémentaire dans le long cheminement versla justice et l'émancipation.

Dans l'absurdité de nos vies, aufond, de quoi serons-nous le plus fier,lorsque nous ferons le bilan au crépusculede nos vies ?

- Avoir fermé les yeux, et continué notre chemin,banal, comme nous l'indiquent les matrices de lasociété.

- Ou bien avoir réagi, à contre-courant, marquantdurablement de notre empreinte plusieurs destins,voire un destin collectif. Avoir donné un sens à sonexistence, avoir l'immense fierté d'avoir ressenti sonindépendance d'esprit, avoir frémi un instant ausouffle de la liberté, avoir brandi l'étendard de lajustice et avoir propagé l'empathie humaniste !

Chacun fait son choix ! Et ce texte est bien sûr uneinvitation à la désobéissance et à l'héroïsme. Parceque d'actes isolés un peu frénétiques (je n'utiliserai

>>>

You can be heroes

pas l'adjectif“inconscients”, pas du toutapproprié ici !), on peut passer à unemultitude d'actes héroïques éclatant iciet là, revendiquant la même chose, seliant entre eux, en réseau, et établissantprogressivement une forme derésistance active pour reprendre prise,reprendre pied, reprendre le contrôle denos vies !Plus nous serons nombreux et moinsl'acte sera héroïque, certes, mais il serabeaucoup plus simple de désobéir et dese révolter contre l'injustice !

Pour exemple, nous avons connu dansl'actualité ces dernières semaines, deuxformidables cas d'héroïsme ordinaireforçant le respect et l'admiration.

Tout d'abord, EdwardSnowden un informaticien américain,ancien employé de la CIAet de la NSAqui a révélé les détails de plusieursprogrammes de surveillance de masseaméricains et britanniques.En juin et juillet 2013, Snowdenopérant sous le pseudonyme de Verax(qui signifie « celui qui dit la vérité » enlatin) rend publiques par l'intermédiairedes médias des informations classéestop-secret de la NSA concernant lacaptation des métadonnées des appelstéléphoniques aux États-Unis, ainsi queles systèmes d'écoute sur internet desprogrammes de surveillance PRISM etXKeyscore du gouvernementaméricain. Son identité est révéléepubliquement le 9 juin 2013. Il expliquesa décision de renoncer à l'anonymat ences termes :« Je n'ai pas l'intention de me cacher,parce que je sais que je n'ai rien faitdemal».Justifiant ces révélations, il indique que son « seulobjectifest de dire au public ce qui est fait en sonnom etce qui estfaitcontre lui ».À la suite de ses révélations, Edward Snowden estinculpé le 22 juin 2013 par le gouvernementaméricain sous les chefs d’accusation d'espionnage,vol et utilisation illégale de biens gouvernementaux.Quand Snowden quitte les États-Unis en mai 2013,après la perte d'un emploi qui lui assurait unmode devie privilégié, il explique :« Je suis prêt à sacrifier tout cela parce que je nepeux, en mon âme et conscience, laisser legouvernement américain détruire la vie privée, laliberté d'Internet et les libertés essentielles des gensdu monde entier avec ce système énorme desurveillance qu'ilesten train de bâtir secrètement».Snowden choisit donc l'exil plutôt que les procès et laprison. Il choisit de laisser derrière lui sa vie, safamille, son pays... Comme il a choisi de révéler cequ'il savait, de devenir un héros, comprenant lesrisques qu'il encourait, il a agi !

Autre cas, celui de Bradley Edward Manninganalyste militaire de l'armée américaine. Après avoirtransmis àWikiLeaks différents documents militairesclassifiés, il a été condamné le 21 août 2013 à trente-cinq ans de prison : un autre héros ordinaire !

En avril 2010,WikiLeaks donne à voir unevidéo du raid aérien du 12 juillet 2007 àBagdad titrée

Collateral Murder ; le 7 juillet, les autoritésaméricaines désignent Bradley Manning commel'informateur deWikiLeaksArrêté en juin 2010, Manning a d'abord été détenuplus d'un mois dans une prison militaire de CampArifjan, au Koweït, sans aucune charge. Puis il estinculpé de huit chefs d'inculpation criminelle et dequatre violations du règlement militaire. Il est détenusur la base de Quantico, en Virginie depuis le 29juillet 2010. En avril 2011, un groupe d'expertsdétermine qu'il est en état d'être jugé, et le 16décembre 2011, une audience préliminairerecommande de le faire comparaître devant une CourMartiale. Manning est inculpé le 23 février 2012 enCour Martiale et choisit de ne pas contester les chefsd'accusation : il assume ses actes héroïques.

Deux accusations sont portées contre lui : « transfertde données secrètes sur son ordinateur personnel etajout de logiciel non autorisé sur un systèmeinformatique confidentiel », ainsi que «communication, transmission et envoi d'informationstraitant de sécurité nationale à une source nonautorisée ».Bradley Manning est soumis à un isolement carcéralmaximum dans des conditions qui prêtent àcontroverse, tandis que certains rappellent quel'isolement dans lequel Manning se trouve estcomparable à une situation de torture psychologique.Hilary Clinton accepte en mars 2011 la démission

d'un de ses porte-paroles au Départementd'État américain, Philip J. Crowley, suite auxpropos « pleinement revendiqués » par cedernier et qu'un journaliste de la BBC arapportés, dans lesquels le traitement que lePentagone réserve à Bradley Manning estqualifié de « ridicule, improductif, etstupide » (un autre héros ordinairedésobéissant et assumant ses idées avant safonction).

Le 30 juillet 2013, la Cour Martiale deFort George G. Meade dans le Maryland atranché : Bradley Manning, à l’origine desfuites de documents classifiés, est reconnucoupable de vingt des vingt-deux chefsd’accusation qui pesaient contre lui, il estdéclaré coupable de violation de la loi surl’espionnage par le tribunal militaire. Il est, parcontre, déclaré « non coupable » de collusionavec l’ennemi, un chefd’accusation qui auraitpu lui valoir la réclusion criminelle à perpétuitésans possibilité de remise de peine.Aux termes du verdict lu par la juge DeniseLin, il encourt 136 ans de prison après êtrereconnu coupable des charges liées à laviolation de la législation américaine surl’espionnageLe 21 août 2013, il est condamné à 35 ans deréclusion. Il sera incarcéré à la prison militairede Fort Leavenworth.Le soldat Manning a été proposé par soncercle de soutiens comme le prochain prixNobel de la paix. Selon eux, ce choix estlargement justifié car Manning, par sesrévélations, aurait fortementparticipé au retrait des troupesaméricaines en Irak. Sans lui, denombreuses polémiques n'aurait puêtre révélées par exemple sur laPrison d'Abou Ghraib ou encoresur les programmes d’attaques desdrones.Des manifestations de soutien à Bradley

Manning ont eu lieu en Allemagne, en Irlande, auxPays-Bas, au Canada, enAustralie et aux États-Unis(àWashington, à San Diego, à Cambridge/Boston, àOakland...)En France, le 3 février 2013, le premier prix auconcours international de plaidoiries pour les droitsde l'Homme organisé par la Ville de Caen (cheznous!) et le Mémorial de Caen est remporté par unjeune avocat lillois pour sa plaidoirie « BradleyManning : un soldat de la vérité ». (àretrouver sur ce lien : http://www.memorial-caen.fr/images/plaidoiries/avocats/2013/merlen-texte.pdf)

Ces deux jeunes hommes, Snowden et Manning,sont les archétypes de l'héroïsme contemporain. Leurmorale, leur conscience sont passées avant leurintégrité, leur sécurité, leurs carrières, leur vie defamille... Ils sont héros car ils ont renié tout confort devie en faveur d'une grande noblesse d'esprit et undévouement quasi-sacrificiel aux principes qu'ilsincarnent. Ils ont eu, à un moment précis, le couragede franchir la ligne rouge, et, malgré lesconséquences, ils ne semblent pas le regretter...

XX

15You can be heroes

COURRIER DU LECTEUR16

Chers racaillous,

Ah les vacances ! Jouissance totale !Après des mois à supporter le harassant travail dejournaliste d'investigation pour Racailles, la rédacm'accorda enfin des vacances dûment méritées. Vuque je suis de gauche, je voyage forcément àl'arrache. Muni d'un sac à dos rempli de boites deconserves Eco+, je partis sur les routes de France etd'Europe à la recherche d'un camping sympathique(vous avez vu, j'ai beau être anarchiste j'ai quandmême mis une majuscule à France). Seulement çacoûte cher de partir ; je me devais donc de trouver uncamping low cost, si possible proche d'unLidl.

Je fus pris en stop par un charmantconducteur de camion roumain qui m'indiqua danssa langue un endroit cool et bon marché où meposer. Arrivé sur place, quelle ne fut pas ma surprisede trouver un pittoresque camping de prolétaires...Une bonne ambiance familiale s'en dégageait. Lessupposés gérants de l'endroit m'ont très bien accueilliet me laissèrent choisirmon emplacement. En retouril me fallait partager mon repas avec eux (toujoursmon côté gaucho). Mes boîtes de conserves furentd'ailleurs aussitôt récupérées et j'ai senti que laferraille était précieuse pour eux. Sûrement desécolos adeptes du recyclage !

On ne va pas se mentir, l'endroit étaitplutôt sale, rempli d'objets récupérés en guise dedécoration et de jeux pour les enfants. Des couches

usagées et des détritus jonchaient le sol et des chienspissaient partout... Ça me rappelait les squats que jefréquentais dans ma ville donc je me sentisimmédiatement très à l'aise ! Le soir, plusieursanimations étaient proposées : cours de cuisinealternative (je n'avais jamais mangé de hérisson),concert de guitare, atelier de découpe de tôle,concours d'enroulage de câbles en cuivre... C'estautre chose que l'habituel concours Miss Campingpour gros beaufs pédophiles et mini putes à peinepubères ! Question logement, à la place desbungalows en préfabriqué se trouvaient de petitescaravanes à la déco « esprit récup' » devantlesquelles des chiens montaient la garde. Je mesentais en sécurité pour passer la nuit.

Le petit déjeuner me fut apporté au lit !De fringants Gentils Organisateurs vêtus de bleu(tenues traditionnelles ?) ont ouvert ma porte decaravane de manière ancestrale à grands coups depieds et m'ont emmené dans un hôtel un peuspartiate en me demandant mes papiers (unecoutume locale je pense). Tous les touristes ducamping étaient également là. Le ton était donné :con-vi-via-li-té ! Seul inconvénient, le réveil à 6h, unpeu trop matinal à mon goût... Et surtout le fait queles hommes de chambre aient abattu deux des chienssensés me protéger. S'agissait-il d'un sacrifice rituel ?Mon gauchisme ne pouvait accepter cela mais jen'osais rien dire de peur de vexer tout le monde. Apriori la coutume de cette chouette animation hors

du commun voulait que celui qui n'a pas de papiersgagne un voyage en avion. Ils sont tellement sympasdans la région que tout le monde est arrivé ex æquo :voyage pour l'ensemble du camping ! C'est pas auCamping du Val de Baize àArgentan où j'étais l'anpassé qu'ils auraient fait ça.

Je suis désormais dans un autre camp àcoté de Roissy. C'est très fréquenté et riche enrencontres. De plus il est entièrement entouré debarbelés (sûrement pour la sécurité des résidents). Jen'en reviens pas du nombre de personnes qui ontgagné des voyages. Moi j'attends mon vol pour laRoumanie depuis trois semaines mais les locauxsont très sympas, propres et il y amême une douche.Oui, je sais, ça fait un peu bourgeois pour mesvacances de prolo de l'info. Apriori pour le retour onpeut encore profiter d'un voyage : l'Angleterre viaOuistreham ou Calais selon l'envie. Là c'est payant -même un peu cher - mais l'agence de voyage promet"un voyage rustique dans le confort d'une remorquede camion puis dans la sous-cale d'un ferry typique".Je vous enverrai une carte postale !

A bientôt les amis !

J B.

Fin des vacances

Cet été, nous avons reçu cette car te postale d'un cer tain JB.. .

BILLETS D'HUMEUR 17

Que ce soit à la télé ou dans la presseécrite locale, les voilà encensés depuis quelquessemaines : les gardes mobiles normands fiers deleurs exploits dans l'Océan Indien, et plusprécisément à Mayotte, cette poussière d'empire.Quel ravissement en lisant notamment l'article deOuestFrance (04/08/13) «Argentan. Les gendarmesmobiles sont rentrés deMayotte ».

Ah les revoilà nos héros partis à l'aventuredéfendre la veuve et l'orphelin. Défendre la veuve etl'orphelin ? Ils ont plutôt pris cher ces deux-là, mêmesi les journalistes restent - volontairement ou parimbécillité journalistique - évasifs sur l'essence et lanature même des missions de ces braves hussards del'empire. Tout au plus un pudique « maintien del'ordre » vient préciser quelques occupations dansl'île aux parfums... Mais que cache ce « maintien del'ordre » ? Rien d'autre que de la stupidité, de lasauvagerie aux accents barbares.

Ah ça, ces gardes mobiles peuvent bientrouver ça dur de se rendre complices de plus de 26000 reconduites en 2012 pour un peu plus de 200000 habitants. C'est vrai que pour arriver à un telrecord, il faut rafler tout ce qui bouge : hommes,femmes, enfants, nourrissons... tout est bon pour lesexpulsions et on fait du chiffre sans même connaîtrele terrain, sans même se questionner sur le sens dereconduire des frères, des sœurs, des membres d'unemême famille pas nés du bon côté du lagon, entre lafrançaise Mayotte et la comorienneAnjouan. Ils sontpourtant tous habitants d'un même pays, lesComores, selon l'ONU qui n'a de cesse de

condamner la France pour son occupation de sonnouveauDépartement d'Outre-Mer.

Ah ça, il faut être bien brave pour jeter entaule, dans des conditions dignes de Guantánamo,des femmes, des enfants et des bébés ! Il faut êtred'une grande virilité et en avoir là où je pense, hein ?Y'a pas à dire ! Imaginez de dangereux criminelscomoriens qui parlent lamême langue et partagent lamême culture que 95% de la population de Mayotteet venus y rejoindre leur famille. Des terroristes quetous ceux-là ! Et parfois le boulot c'est aussi traquer,gazer, tabasser et incarcérer une population quimanifeste juste pour pouvoir bouffer [�DLR : desmouvements sociaux « contre la vie chère » ont eulieu ces dernières années et ont dû faire face à uneforte pression policière et préfectorale]. Des hérosque ces gardiens de la maréchaussée je vous dis !Mais si nous étions en 1789, je ne suis pas sûr queles livres d'histoire les auraient retenus comme deshéros, les Robocops. Car dans mes souvenirsd'école, ceux qui ont chargé le peuple qui criaitfamine n'ont jamais vraiment été élevés au rang dehéros ! Triste basculement des choses... Mieuxvalait-il crever la dalle sous la royauté que sous laRépublique pour être bien vu par l'Histoire.

Ah ça, qu'ils se rassurent ces empêcheursde manifester en rond, ce n'est pas un simpleénergumène anarchisant irrité par la simple vue d'unképi (et qui par bon sens n'aime pas tout ce qui estbleu et porte une arme au nom d'un je ne sais quelordre à défendre) qui leur dédie ces quelques lignes.Non, c'est un humble témoin qui les a côtoyés sur

ces terres oubliées, qui les a vus à l'œuvre pendantplusieurs années. Un témoin qui a vu cesmilic[h]iens (comme les appelaient les BérurierNoir) n'être rien d'autre que des machines. Même lesanimaux, eux, font parfois preuve de plus decompassion et je respecte trop les animaux pour oserune quelconque comparaison avec ces étrons de laRépublique fiers dans leurs habits de lumière, ceshéritiers de Vichy, de l'OAS ou de la Police dePapon...

Ah ça, ils peuvent être fiers en retrouvantleur petite famille. Papa a bien travaillé, il a brisé descentaines de vies et de familles, jeté à la rue et auxpoubelles des dizaines de gamins dont quelques-unsencore bébés. Des gamins qui, grâce à Papa, ne sontpas prêts de revoir leurs parents ; et tout ça au nomde sa bonne vieille République. Ironique, non ?!A lire ces quelques lignes dans Ouest Rance, il neme vient qu'une envie : celle de déglutir, de vomir,de hurler. Un goût amer ne me quitte plus chaquefois que je repense à ces braves gendarmes etpoliciers. Je les hais, un point c'est tout ! Toutcomme je hais ce qu'ils représentent et ce(ux) qu'ilsprotègent en notre nom. Je ne les laisserai jamaisparler ou agir en mon nom, au nom de cettecommunauté d'imbéciles que l'on appelle lesFrançais. Je ne serai jamais le complice de leursatrocités.

Eh comme le concluait si brillammentBoris VIAN« J'irai cracher sur vos tombes ».

Tibo

Retours glorieux,accueils glaireux

Depuis 10 ans, des industriels de micro-électronique (GIXEL - Groupement des industriesélectroniques) font pression sur les gouvernementspour doter les établissements scolaires d'appareils dereconnaissance dactyloscopique (empreinte digitale)dans les cantines. Cela ne peut pas être pour autrechose qu'améliorer le service, n'est-ce pas ?! Non,évidemment ! Le GIXEL dans son livre bleu de2004 (mais retiré depuis) clamait fièrement « lasécurité est vécue comme une atteinte aux libertésindividuelles. Plusieurs méthodes devront êtredéveloppées pour faire accepter la biométrie. Ellesdevront être accompagnées de convivialité et defonctionnalités attrayantes dès l’école maternelle ».Ficher, contrôler, surveiller n'est sûrement pasl'objectifdes directions d'établissements. Elle y voientprincipalement un moyen de drainer des flux, degérer de façon précise les quantités de nourriture à

préparer et commander. Mais les intendances nepeuvent-elles pas améliorer le service sans le besoinde « biomaîtriser » ? L'erreur étant humaine, seule lamachine serait infaillible ; à tel point que des élèvespeuvent être privés de repas simplement parce qu'ilsn'avaient pas pu réserver la veille ou parce que lamachine ne les reconnaissait pas. Autrement dit onpasse d'un système perfectible où l'erreur est possiblepuisque géré par l'Homme à un système parfait oùaucune erreur ne sera tolérée. Dans une école c'est uncomble ! C'est donc un système lourd, complexe, peufiable et inefficace qu'engendre la machine.D'ailleurs, selon Le Parisien du 06/09/2013, lesélèves du lycée de Luzarches (Val d'Oise) ontboycotté ce système dès la rentrée. Certainsrétorqueront que cela rationalise les coûts puisque lesfamilles en incapacité de payer se verraient refuserl'accès pour leurs enfants. Et puis mpossible de prêter

sa carte à un copain. Cela peut même faireéconomiser des postes de Vie scolaire etd'intendance. Le Ministre du budget ne peut quevalider ! C'est surtout une démonstration de ce quedevient cette école dite du 21è siècle : non pas un lieud'émancipation, mais bien de conditionnement« pour (que) les enfants utilisent cette technologiepour rentrer dans l’école, en sortir, déjeuner à lacantine »... partout ! Il est vrai que le plus importantpour les élèves, c'est d'acquérir de bonnes bases.

NDLR: Trois établissements du Calvadossont désormais équipés, dont le collège Dunois àCaen. Le collège Diderot à Cherbourg sert de baseexpérimentale pour laManche.

HAËF

Un peu de biologie,beaucoup de technologie !La poésie retirée des programmes.

COQUINAGES CUL­TURELS ET CUL'TURE­LUTTE18

On aurait pu vous parler des 20 ans duZénith. Certes. Mais on s'en bat littéralement les...enfin vous voyez ! Sauf s'il s'agit de glorifier lapauvreté culturelle, l'inaccessibilité pécuniaire et unegerbante industrialisation du spectacle. Mais bon,payer 80€ pour voir Michel Sardou, c'est aussi ça laFrance !

Non, il nous semblait un peu plus« Racailles » d'évoquer ces spectacles qu'on peutqualifier d'alternatifs. « Mais de quoi on parle ? » tedemandes-tu. Et bien de concerts, pièces de théâtre,lectures, sessions slam, DJ sets, performancesartistiques (et ainsi de suite) se déroulant dans deslieux inhabituels, non prévus à cet effet, parfois(souvent ?!) en-dehors d'un cadre légal. Cespratiques sont très répandues localement et ce n'estpas une particularité caennaise. Partout en France, lesgens s'organisent afin de pallier une pénurie desalles, le manque de moyens des lieux existants quine s'autorisent pas à prendre des risques, unelégislation parfois contraignante. Et puis quoi demieux que de sortir des sentiers battus, hein ? Carpour ces lieux tout est possible : du bar à la plage, del'appartement à la grotte en passant par des frichesindustrielles ou des espaces publics un peu paumés(clairières, parkings, tunnels, etc) les seuls impératifétant majoritairement d'avoir accès à unbranchement électrique et que les nuisances nesoient pas trop importantes pour les alentours.D'ailleurs ces concerts et autres spectacles dépassentrarementminuit, heure après laquelle la ville s'endortet laisse remarquer chaque son devenu bruit ! Et puiscela préserve la dimension de spectacle àl’événement, à la différence d'une fête. Le lieu estégalement laissé à l'identique par respect et propreté.

De plus en plus d'artistes et de groupescherchent des lieux dans lesquels se produire carmême les bars subissent de plus en plus derestrictions (gentrification des centre-villes, zèle desautorités...). Ils veulent créer, tester et se produiredevant le public ; en gros faire ce qu'ils aiment !

Le bouche à oreille permet également lestournées d'une ville à l'autre grâce à un réseauinformel très riche. S'il faut un exemple (peu de lieuxpouvant être indiqués dans ce papier pour ne pas lesgriller) on regardera évidemment du côté du ElCamino dans le quartier de Vaucelles où Yvonne etRené poursuivent le super boulot de leurprédécesseurMarco. C'est dans ce type de lieu qu'onvoit les liens se faire, les numéros s'échanger et lesgens trinquer dans une super ambiance. Et c'est aussiça quimotive les organisateurs.

Car, dans cette démarche, il n'y a pasqu'une question de lieu mais bien une certainephilosophie de l'underground ou du fait-le toi-même(Do ItYourself).Pour perdurer il ne faut pas faire trop de vagues. Unegrande discrétion est ainsi la règle. Aucun nom(même si certains sont bien connus localement),

parfois des associations, pas d'interviews, pas demédiatisation. Côté communication on trouve desflyers, quelques affiches et le reste se fait par boucheà oreille et surtout sur le net par des réseaux sociauxqui donnent depuis quelques années une nouvelleenvergure aux spectacles : les publics se diversifientet davantage de personnes sont informées. Les lieuxn'y sont pas toujours indiqués, cela fait partie du jeuet du plaisir pour ces soirées qui ont souvent uncaractère de « soirées privées » vachementpubliques ! C'est même un peu rassurant de voir quedes espaces privés s'ouvrent ainsi au public et quecertains espaces publics sont ainsi réappropriés en-dehors de la sphère commerciale et du pognon. Faut-il préciser que les organisateurs, qu'ils soientparticuliers, collectifs ou associations ne cherchentpas à s'enrichir par ces spectacles ?! Ils essaient de

permettre aux artistes de vivre et d'être payés pour laprestation en leur reversant la recette et en défrayantles déplacements, repas, couchage...Une chose est sûre : tout le monde rêve d'ouvrir unjour une salle à Caen dans laquelle cet esprit pourraits'épanouir (rêve d'autant plus fort depuis la fermeturede la salle G. Brassens en 1996). Comme certainsparlent de « Caen, la CULTURE en capitales », àbon entendeur !

Igmack RocéphaleAller plus loin : nous avions évoqué dans Racaillesn°64 La Loupiotte à Louvigny, une baraquerésidentielle où les colocataires organisaient unevéritable saison de spectacles et concerts chez eux. Alire surwww.racailles.info

Spectacles d'ici et ailleursPortépar des passionnés, le bouche à oreille et les réseaux « sociaux », le spectacle alternatifjouit aujourd'hui d'une grande

vitalité. Focus surune scène undergroundbouillonnantemais qui saitresterdiscrète pour [sur]vivre etgarder son âme.

Racailles a besoin de vous ! Venez nous rencontrer etparticiper à l'élaboration du journal. RDVtous les mercredisà partir de 19h au Bar De la Fac (Le BDF, rue du Gaillon,14000Caen. Arrêtde tram Placede laMare).

COQUINAGES CUL­TURELS ET CUL'TURE­LUTTE

Radio Bazarnaomrevient sur lesondes à partir du18 octobre ! Cool !!!Bon bah c'estreparti pour lesquatage de labande FM parRacailles Radio...Oh yeah !!!

19

La Centri n'est plus fugueuse ?!

10 ans de galère et un nouveaucombat pour les intermittentsAprès la catastrophique réforme de 2003

(concernant l'indemnisation du chômage desintermittents via l'UNEDIC) qui avait entraîné unmouvement social de grande ampleur dans tout lemonde du spectacle, une nouvelle négociation va sedérouler cet automne. Il sera donc question d'uneremise à plat complète du régime d'indemnisationdes intermittents du spectacle, aussi bien techniciensqu'artistes (les deux étant concernées par deuxannexes différentes – 8 et 10). Et cette fois encore labataille s'annonce rude vu le climat des derniersmois. Par ex récemment un rapport accablant de laCour des Comptes répand des contre-vérités sur unsoit-disant déficit des annexes 8 et 10, présente lesintermittents comme des privilégiés ruinant lasolidarité interprofessionnelle ; etc). Du côté de laMinistre, aucune déclaration claire et on peucraindre qu'elle laisse le champ libre aux partenairessociaux pour décider du pire. LaCFDT se frotte déjàles mains de pouvoir une fois de plus forniquer avecdélectation dans le lit patronal !

La mobilisation est donc de mise afin dedonner des bases saines à un nouveau système etcasser les contre-vérités, mensonges et idées reçues.Non les intermittents ne sont pas de privilégiés. Nonils ne serviront pas une fois de plus de boucémissaires des ravages du capitalisme et despolitiques d'austérité. Non la culture ne doit pas

répondre coûte que coûte à la rentabilité ! A l'heureoù nous imprimons se tient à Caen une premièreAssemblée Générale et comptons bien apporter tout

notre soutien à cette nouvelle lutte qui s'annonce.

Rappelez-vous. De novembre à janvierderniers, un collectif d'artistes avait réquisitionnél'ancienne école Desnos dans le quartier Folie-Couvrechef afin de dénoncer le manque d'ambitionde la politique culturelle de lamunicipalité et rappelerle Maire P. Duron à ses engagements de campagne.LaCentrifugeuz était née !

Expulsé au bout de deux moisd'occupation, le collectif de la Centrifugeuz –constitué depuis en association - a poursuivi samobilisation et marqué des points, forçant la mise en

place d'une grande concertation entre les artistes, laMairie et l'agglo. Tout le monde a fait des ateliers, desgroupes de travail, des réunions, un comité depilotage... pour aboutir sur du concret. Enfin !

C'est maintenant au tour d'une « phase depréfiguration et d'expérimentation sur site » de semettre en place pour deux ans, vraisemblablementdans l'ancien collège Jacquard (Chemin Vert) avantque la fabrique trouve à terme sa place dansl'ancienne école Marcel Aymé (quartier PierreHeuzé). Le projet semble dans la lignée de la

première expérience de la Centrifugeuz : l'accent estfortement mis sur une très forte proximité avec lesquartier et ses habitants ; la fabrique s'inscritpleinement dans l'économie sociale et solidaire ; lelieu servirait avant tout à de l'expérimentationartistique pluridisciplinaire, sans obligation derésultats et en complémentarité avec les fabriquesexistantes.

La plénière de conclusion devrait acter cesproposition durant cemois de septembre.

Caen,manifestation des intermittents 14.07.03

La BD de VINCE : Le Message