journal pointe du cap corse n°2

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Numéro 2 • Hiver 2002-2003 • Gratuit Dossier La patelle géante Les tours littorales 1. La Giraglia L’actualité à la Pointe !

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Page 1: Journal Pointe du Cap Corse n°2

Numéro 2 • Hiver 2002-2003 • Gratu i t

DossierLa patelle géante

Les tours

littorales

1. La Giraglia

L’ a c t u a l i t é à l a P o i n t e !

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Réponse au jeu-concours n°1• Jeannine Graziani (Tomino)• Pierre Laffilé (Centuri)• Roger Bour (Paris)

ont… gagné le livre “CapCorse”. En effet les chutes duNiagara aux Etats-Unis, lapointe du Cap Corse et l’îled’Hokkaido au Japon ont encommun d’être situées sur la même latitude :43° de latitude nord.

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Hiver 2002-2003

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Hiver 2002-2003

Edito

www.pointeducapcorse.orgTéléchargez le magazine

Le Journal de la Pointe du Cap Corse est publié par l’associationFinocchiarola pour la gestion des espaces naturels de la Pointe du CapCorse. Mairie, 20247 Rogliano. Direction de la publication : Michel Delaugerre (AGENC)Edition et mise en page : Karibu Editions (J. Nicoli, O. Nicoli, A. Baconnier)Maquette : C. Steffan.Impression : Imprimerie Bastiaise. ISSN en cours. Périodicité : Semestriel. Crédit photo : AGENC : 4, 8, 9, 10, 11, 13 et 4e de couverture ; La Corse,images et cartographie (Ed. Alain Piazzola) : 7 ; J.M. Culioli (OEL) : 13 ;sauf mentions spéciales. Nous remercions tout spécialement pour leur contribution à ce numéro :Antoine-Marie Graziani, Jean-Michel Culioli, l'Office de l'Environnementde la Corse et le Parc national de Port-Cros.

Synthèse d’unesaison écoulée Parce qu’il représente un endroit unique, beauet sauvage,Parce qu’il véhicule une formidable image deliberté et d’évasion en phase constante avec lemilieu naturel,Parce qu’il a la capacité de rassembler uneétonnante diversité de faune et de flore dans lemême espace, le site de Capandula méritait bienune incursion dans le Journal n°2. Résumer en quelques lignes serait même uneoffense pour le lieu ; cette fameuse Pointe duCap battue par tous les vents, ce fameux doigttranchant Méditerranée et Tyrrhénienne mérite-rait un éternel journal de bord. Juin prometteur, juillet peu fréquenté, août trèsperturbé, septembre alterné. Des saisonniers qui commençaient leur tâche le15 juin. Connaissance du milieu, explications,informations, comptages et nettoyages, tellesétaient leurs missions. Plusieurs interventions : médicales pour desévacuations, mentales pour des réconciliations,verbales pour de la répression. Métier éclec-tique que celui de “Guardia Parco” où l’on doittout le temps s’adapter. Fréquentation en baisse,chiffres à l’appui. L’euro, les RTT, le mauvaistemps, les algues… qui détient la vérité ? Barcaggio, toujours adoré, a la plage la plus fré-quentée (et la plus grande aussi).Tamarone c’est sur la durée avec le sentier desdouaniers. Le Moulin et sa perspective vers l’autre côté. Recrudescence cette année de promeneurs nonidentifiés, essayant, en toute illégalité, lesvacances en liberté. Problème permanent

d’un pays se vendant médiatiquement,d’une pointe sauvage qui incite au camping… sauvage. Affluence juste au cœur d’août, nedurant que quelques jours (du 15 au 22).Orages (mais pas désespoir) quivoyaient des touristes hébétés se retrou-ver bien rincés. Septembre arrivant “enfin”, des saison-niers rendus à leurs facultés, le sentierretrouve ses abonnés, et sur le parkingplus que des “2B”. Ca y est, c’est “déjà” terminé. LaPointe a retrouvé sa ligne de flottaison, en attendant une nouvelle saison.Irrémédiablement pointé vers le nord, justeéquilibre entre mer et montagne, inaliénable-ment protégé, Cap Corse merci d’exister.

Alain CAMOIN

Conservateur de l’association Finocchiarola-Pointe du Cap Corse

Couverture :Dessin de N. Müller-SbriglioParc national de Port-Cros

Corse-Matin, 21 août 2002

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Hiver 2002-2003

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Hiver 2002-2003

Ornithologie

Carnet de naissances Le bilan de la saison estivale est très positifpour le goéland d’Audouin (cet oiseau sym-

bole de la Pointe du Cap a fait l’objet d’un dossiercomplet dans notre n°1). 28 jeunes à l’envol ont, en2002, rassuré tous ceux qui suivent l’oiseau rare. Cesgoélands se reproduisent habituellement sur les îlesFinocchiarola, sur la Giraglia et sur Capense. Ils ont,cette saison, jeté leur dévolu sur Capense abandon-nant totalement les autres sites. L’îlot a en effetaccueilli tous les couples reproducteurs. Ce compor-tement erratique n’est pas nouveau, mais les orni-thologues n’en connaissent pas avec certitude lesraisons. Le puffin cendré, un autre oiseau rare, maisencore plus discret (il vit en pleine mer et ne vientsur la Giraglia que pour se reproduire), a lui aussi vula naissance d’une vingtaine de jeunes à l’envol.Enfin le balbuzard, le fameux aigle pêcheur, a réussi sareproduction à la Pointe du Cap,avec un jeune à l’envol.

brefà la pointe de l’actualité

en

Goéland d’Audouin

brefà la pointe de l’actualité

enMédias

La Pointe du Cap vue par les médiasLa Pointe du Cap a fait l’objet d’une bonne couverture médiatique : presse , radio (RCFM,

France Inter) et télévision (TF1, France 3). La beauté deses paysages et ses attraits touristiques autant que lagestion exemplaire de ses espaces naturels y étaientévoqués.

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Carte postale

La petite nouvelle vient de sortir Notre carte postale du sentier des douaniers adéjà été diffusée à 60 000 exemplaires ! (Offices

de Tourisme de Macinaggio,Bastia,Saint-Florent,socio-professionnels…). Cette année, une nouvelle carte voitle jour : un format plus allongé, des photographies etplus de place pour la correspondance. Comme d’habi-tude, sa diffusion est absolument gratuite.

D’avril à novembre

Ils nous ont aidé... merci à eux !Sébastien, Alexandra, Benoît et Vanessa, recrutéscomme saisonniers, étaient présents chaque

jour à Barcaggio, à Tamarone, au Moulin Mattei et auPlan de l’Ilot. Leur travail : surveillance, entretien etinformation des visiteurs.Quatre mois durant, Ségolène a noté les faits et gestesdes goélands d’Audouin et a participé au suivi de lacolonie de puffins cendrés de la Giraglia.Dans le cadre d’un BTS au lycée agricole de Sartène,Arnaud a étudié les pratiques agro-pastorales et la pro-tection des espaces.Konstantina et Wolfgang, étudiants-architectes, ontcartographié et relevé (en juin) les fours à chaux.Caroleet Tatiana leur ont succédé pour faire l’inventaire desmoulins à vent.Sophie, Marie-Laure, Pierre et Paul élèves-ingénieurs(ISARA, Lyon) ont rencontré en juin puis en septembrede nombreux acteurs de la Pointe du Cap pour recueillirleurs avis et leurs impressions sur la protection des sites.En octobre, Jean-Jacques (BTS Annecy) a dressé la listedes propriétaires des parcelles traversées par la futureboucle du sentier du Moulin Mattei au sentier douanier.Une partie des saisonniers était logée à la “Canava di uMezziornu” (Maison des Oiseaux de l’association desAmis du Parc) de Barcaggio. Merci à tous. Merci àl’Office de l’Environnement, au Conseil Général et à laDIREN pour leur aide. Merci à la population du Cappour l’accueil qui leur a été réservé.

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1. La Corse, votre hebdo,édition spéciale, été 2002

2. Journal de la Corse,8-14 novembre 2002

3. Corse matin, 28 août 2002

Elèves-ingénieursde l’ISARA-LYON

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La petite dernière

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Hiver 2002-2003

L’heure des comptesLe seigneur cap corsin Don Cristofaro Tagliacarne a dépensé 9 311 lires pour la construction de la tour de la Giraglia. Par une assignation des agents du Trésor (6 février 1585), il demande le remboursement de cette somme – qu’il obtient.C’est le prélèvement d’un droit d’ancrage qui doit permettre de financer la construction de l’édifice.

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Bâtir sur un îlotL’édification d’une tour sur une île pose de nombreuxproblèmes logistiques, susceptibles de retarder laconstruction. La correspondance entre le gouverneurCattaneo de Marini (le successeur deStefano Passano) et Don CristofaroTagliacarne, en témoigne. Ce dernier, dansune lettre du 29 juillet 1584, dresse auGénois un état des difficultés liées autransport de la nourriture et du matérielentre Bastia et la Giraglia. Il demanded’ailleurs des délais supplémentaires pourachever l’édification de la tour. Antoine-Marie Graziani rapporte que l’architecteDomenico Pelo, qui doit achever l’édifice,s’est rendu sur le chantier à la mêmepériode.Bon gré, mal gré, les travaux avancent. Le 16 novembre 1584, la deuxième voûte dela tour est achevée. L’édifice est mêmepresque terminé le 10 décembre 1584.Mais, le problème d’approvisionnementen nourriture et en matériel subsiste,menaçant l’achèvement final. Le gouverneurCattaneao de Marini ne semble guère s’en soucier et sepréoccupe davantage du personnel de la tour : iladresse au Sénat de Gênes une lettre désignantBartolomeo de Sarzana comme futur chef de l’édifice.Fin décembre 1584, le surintendant Don CristofaroTagliacarne envoie enfin à Cattaneo de Marini l’avis defin des travaux.

Ce dessin de la tour a été réalisé,avant même sa construction, par

l’architecte Domenico Pelo.Il ressemble de façon étonnante

à l’édifice actuel.

Naissance des tours littorales /1

La tour de la GiragliaA la demande du Conservatoire du Littoral, l’historien Antoine-Marie Graziani a réalisé une étude encore inédite sur la construction de plusieurs tours littorales dont celles deFinocchiarola, Santa-Maria, Agnellu et Giraglia. Cet article,le premier d’une série, retrace l’histoire de leur édification.

Antoine-Marie Graziani précise d’emblée que la docu-mentation relative à la tour de la Giraglia est très dis-persée. Cependant, les dessins de l’architecteDomenico Pelo, la correspondance du gouverneurgénois, Cattaneo de Marini, et du surintendant à laconstruction, Don Cristofaro Tagliacarne, permettentde retracer l’histoire de la construction de la tour.

Décider et construireLa Giraglia apparaît, dès 1573, dans la liste des tours àconstruire sur le littoral corse. Mais c’est presque dixans plus tard, en 1582, que le seigneur Don CristofaroTagliacarne et le gouverneur Stefano Passano déci-dent l’édification d’une tour sur l’îlot. Au XVIe siècle, lamajorité des chantiers de construction du Cap corseest dirigée par un seigneur. D’autre part, toute déci-sion de construction doit être validée par un accordentre les seigneurs cap corsins et les représentants dela population. L’Office de construction des tours formalise le 16 avril 1583 l’accord passé pour la construction de la tour de la Giraglia ; elle doit êtreachevée en juillet 1584.

Le personnel de la tourAu XVIe siècle, le personneld’une tour littorale se composed’un chef et de trois défenseurs.Parmi les trois soldats, on doitcompter au moins un bombar-dier. A la Giraglia, un hommeest en plus chargé du ravitaille-ment et du transport (enbarque) des gardes de l’édifice.Jusqu’à la fin du XVIIe siècle,le personnel de la tour est capcorsin ou bastiais puis exclusi-vement du Cap corse. Certainssont même chefs de père en fils,à l’instar de Domenico deUrbanis (chef entre 1720 et1730) et de son fils qui lui succède entre 1730 et 1732.

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Dossier patelle géantewww.pointeducapcorse.org

Patelle géanteou patelle ferrugineuse

ou patelle foncée,Patella ferruginea

C’est la plus grande des patelles de notre littoral. Elleatteint 5, 5 à 7,5 cm de diamètre (10 cm maximum). Sa

coquille épaisse et solide comporte 30 à 50 grossescôtes saillantes. Cette patelle est fixée uniquement auniveau de la mer, sur les rochers exposés aux vagues.C’est une espèce qualifiée de coriace, au pied très dur.

Elle est protégée en France depuis 1992 et ne doitdonc, en aucun cas, être ramassée.

Maccinaghju : A Patella. Centuri : l’Ochje di prete.

Bastia : A Lappera grande. Calvi : A Labbera maio-U Prete.

Aiacciu : A Patella sumirina. Bunifaziu : A Patilla muntagnata.

Patelle moussueou patelle rude, Patella ulyssiponensis

Elle est petite, à coquille mince et aplatie marquée de grossescôtes plates et blanchâtres. Cette espèce vit au même niveauque Patella ferruginea, mais peut descendre plus bas sousl’eau. Elle est moins abondante que Patella rustica. Elle estgénéralement couverte par un feuillage d’algues photophiles(qui aiment la lumière). Attention, on peut trouver des patellesgéantes couvertes d’algues. Dans la crainte d’une confusionentre les deux espèces, ne prélevez pas l’animal. Patella ulyssipo-nensis est ramassée en hiver par les pêcheurs à pied.

Maccinaghju : A Labbara murzosa. Centuri : A Lappara murzosa. Bastia : A Lappera murzosa.

Calvi : A Lappara murzosa. Aiacciu : A Patella murzosa. Bunifaziu : A Patilla erbusa.

Patelle pointueou patelle ponctuée, Patella rustica

C’est une petite patelle (moins de 4 cm de diamètre), à coquilleépaisse, brunâtre, finement striée et conique. Cette espèce est trèsrésistante, capable de monter assez haut par rapport au niveau dela mer.Elle vit en populations nombreuses (des centaines au mètrecarré). Cette patelle est appréciée au printemps pour ses qualités

gastronomiques.

Maccinaghju : A Labbara pinzuta. Centuri : A Ghjighjanzula di marina.

Bastia : A Lappera cuputella. Calvi : A Labbera culumbrina- A Labbara liscia.

Aiacciu : A Patella gaotta. Bunifaziu : A Patilla culumbina.

Patelle plateou patelle bleue, Patella caerulea

Cette grosse espèce atteint parfois 6 cm de diamètre.Sa coquille est mince et aplatie. On la trouve dans les flaquesd’eau de mer. La patelle plate peut se développer en abon-dance jusqu’à quelques mètres de profondeur. Les pêcheurspensent que c’est la moins comestible des trois espèces nonprotégées.

Maccinaghju : A Labbara scudellina. Centuri : A Ghjighjanzula.

Bastia : A Lappera negra-Lappera murzosa. Calvi : A Labbara chjappata.

Aiacciu : A Patella liscia. Bunifaziu : A Patilla ciatella.

P R O T É G É E

Voici les quatre espèces de patelles de Corse*. La patelle géante est protégée : la récolte de cette espèce gravement menacée est strictement interdite.

Les quatre patelles de Corse

*D’après les descriptions du professeur Laborel et du recueil des savoirs populaires sur les fruits de mer de Roger Miniconi (éditions Albiana).

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Peau de chagrinLa taille moyenne de la patellegéante a diminué sur les îlesLavezzi entre le XIVe et le XVIIe siècle. Cette réduction et la raréfaction de l’animal à cette époque est imputable àune intense collecte effectuéepar les pirates et les corsairesprésents dans les criques del’île Lavezzi. Depuis, l’aire de répartition de la patellegéante n’a cessé de diminuer.Au XIXe siècle, elle était présente sur le littoral françaiscontinental, et abondante enCorse. Au début du XXe siècle,elle se raréfie sur le rivagefrançais continental. En 1932,l’espèce est déjà limitée auxcôtes algériennes, marocaines,espagnoles et corses.

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De la Giraglia à Pertusato

La patelle géanteLa patelle géante est menacée de disparition à brève échéanceen Méditerranée. Mais ce mollusque est bien présent sur lescôtes rocheuses de notre île. Jean-Michel Culioli s’attache à l’étudier et à le faire connaître pour mieux le protéger.

Bien dans sa coquilleOn ne connaît pas grand-chose sur la croissancede la coquille qui protège l’animal. On supposeque celle des jeunes individus grandit rapide-ment. Cette augmentation de la taille répondsans doute à deux rythmes distincts. Le premiercorrespond à la croissance biologique normale.Le second est lié aux changements de domicile.A chaque “déménagement” , l’animal secrète lesmatériaux nécessaires à l’ajustement de sacoquille à un emplacement nouveau. Le plusgrand exemplaire de patelle connu mesurait 11 cm dediamètre.Quant à l’espérance de vie des patelles, elle est estiméede 10 à 12 ans environ.

La radula de PatellaSous la coquille de la patelle, la tête est nettement indi-vidualisée avec une bouche ventrale près de laquelle setrouvent deux tentacules sensoriels. Cette bouche estdotée d’une radula, un organe permettant à l’animal debrouter les algues des rochers.Le pied de la patelle adhère au substrat comme uneventouse. Il lui permet aussi de se déplacer, mais Patellaferruginea est très peu mobile. Deux types de mouve-ments sont observables. Le premier est lié à la respira-tion de l’animal. Le second est constitué par les dépla-cements proprement dits, limités à quelques mètres deson domicile.

Une espèce hermaphrodite

On pense que sa période de reproduction s’étend de septembre à décembre.Les œufs, lâchés dans l’eau,sonttrop gros pour se disperser en mer. Par conséquent, lareproduction reste très localisée. On manque de don-nées en ce qui concerne le cycle de la larve. Mais on saitque les patelles sont hermaphrodites protandres : lespetits individus sont d’abord mâles puis deviennent

En Méditerranée, il y a 2 026 espècesde mollusques dont 1 850 élaborentdes coquilles pour se protéger.Beaucoup ont une adaptation origi-nale à certaines formes de vie, de la terre ferme aux eaux douces jusqu’aux milieux marins.

Vous avez dit Patellaferruginea ?Comme tous les coquillages, lapatelle géante est un mollusque. Elleappartient à la classe des gastéro-podes. Ces derniers ont très peu évo-

lué dans le temps et les patelles font partie des moinsmobiles d’entre eux.

Un mollusque dans le ventLa patelle géante vit dans la zone intertidale, cet espaceque la mer couvre et découvre sans cesse. Elle partageson habitat avec trois autres espèces de patelle : lapatelle pointue, la patelle moussue et la patelle plate.Aux îles Lavezzi, le suivi réalisé depuis 1992 a montréque les secteurs orientés aux fortes houles d’ouest sontles plus densément peuplés. Dans le Cap Corse, leszones les plus battues par la mer sont aussi les plusfavorables.

La patelle géante risque de rejoindre rapidement la trop longue liste des

espèces disparues.

Jean-Michel Culioli est responsable

scientifique de la réserve

naturelle des Bouches de

Bonifacio, Service Parc

marin international,

Office de l’Environnement

de la Corse

Les rochers exposés aux vaguessont le domaine de prédilection

de la patelle géante.

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RepaspréhistoriquesLa patelle géante était présente à l’est de Gibraltar et dans les Alpes maritimes il y a 3 millions d’années. Descoquilles ont été découvertesdans des restes de repas d’humains, datés entre 70 000 et 35 000 ans avant J-C. On retrouve la patelle géante dans lesfouilles du pré-néolithique (9 000-7 000 avant J-C) dusite de l’Araguina à Bonifacio.En France continentale,en Sardaigne, en Sicile et en Espagne, des restes de coquille ont également été mis au jour dans des gisements du paléolithique et du néolithique.Elle figurait aussi au menudes romains qui occupaientle site de Barcaghju.

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pecté et toutes les patelles géantes sontcomptabilisées et mesurées avec un pied àcoulisse. Tous les résultats sont ensuite inté-grés dans des bases de données.En 1997,Vanina Lentali, étudiante en DESS del’Université de Corse, a étudié la côte entreCenturi et Macinaghju. D’avril à juillet, elle aprospecté (avec palmes, masque et tuba)12 020 mètres de côtes rocheuses et mesuré1267 patelles ! Les résultats de cette coura-geuse étudiante indiquent que les patellesgéantes peuvent être abondantes locale-ment (principalement dans les endroits battus par lesvagues et difficiles d’accès) ; que les animaux de grandetaille (âgés) sont rares mais que la population comptede nombreux jeunes, ce qui est encourageant pour sonavenir. La Pointe du Cap se révèle donc une zone impor-tante pour la conservation de l’espèce dans l’île.

Protéger et conserver

Dans toutes les zones connues où vit la patelle géante,y compris dans les espaces protégés depuis plus de 20 ans (Lavezzi et Scandola), elle s’est cantonnée dansles endroits les plus inaccessibles. A partir des années1990, les gestionnaires de ces espaces ont mis en placedes actions de conservation pour la protection de l’es-pèce. Les activités touristiques ont été mieux enca-drées, informées et surveillées. Le résultat des suivismenés aux Lavezzi montre une spectaculaire augmen-tation des populations : 4,7 fois plus de patelles en 2000qu’en 1992 et un effectif actuel supérieur à 7 000 spéci-mens de plus de 2 cm de diamètre.Les Corses ont un niveau de responsabilité mondialeenvers la patelle géante. Il est aujourd’hui essentiel d’in-former les touristes et la population locale, comme defaire respecter la réglementation interdisant de mutileret de prélever Patella ferruginea.

Jean-Michel Culioli

femelles. Les jeunes se fixent souvent sur la coquille desgrands individus.

La patelle en voie de disparitionL’aire de distribution originelle de Patella ferruginea estla Méditerranée occidentale. Mais elle a disparu denombreuses parties de cette zone.Actuellement, la patelle géante est encore présente surles côtes corses, dans quelques localités de Sardaigne,sur les îles toscanes, algériennes et marocaines.L’espèce semble relictuelle en Espagne, probable auxBaléares. Enfin, des individus subsistent dans les îlesd’Hyères à Port-Cros.En Corse, on peut trouver la patelle géante sur les côtesrocheuses du Cap aux Bouches de Bonifacio ainsi quesur toute la façade occidentale. Les plus belles popula-tions se trouvent aux îles Lavezzi et à Scandola.

Les prédateurs en causeOutre les crabes et les goélands, le prédateur le plusredoutable est sans doute le coquillage Thais haemas-toma. Son pied puissant lui permet de décoller lespetites patelles lorsqu’elle elles sont en déplacement.Les individus de plus grande taille n’ont pratiquementpas de prédateurs naturels… hormis l’homme.La raréfaction de la patelle géante est en effet surtoutdue à la cueillette.Elle a toujours été recherchée pour sachair et pour la fabrication de souvenirs décoratifs.Protégée en France depuis 1992, elle est inscrite à l’an-nexe IV de la directive européenne “Habitat”. Lesespèces appartenant à cette liste sont considéréescomme nécessitant une protection stricte.

Etudier pour mieux protéger

Des études ont été menées afin de mieux connaître sarépartition sur notre île ainsi que les densités des zonesles plus favorables. Les côtes ont été quadrillées en sec-teurs d’étude longs de 10 à 20 m. Chaque rocher est ins-

Le thaïs est un prédateur naturel de la patelle géante.

Géante, la patelle !

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européen ! Mis à part quelques spécia-listes intéressés par ce joli cas d’école,peu de gens s’y retrouvent.D’autant plus que le rôle des orga-nismes chargés de faire respecter lesréglementations ou de gérer les espacesn’est pas toujours clair. Et les lois succes-sives de décentralisation n’arrangentrien. Qui fait quoi ? Le Préfet, l’Office del’Environnement, la Diren, la DDE,l’Inspection des sites, l’Architecte desBâtiments de France, le Conservatoiredu littoral, les communes, le ConseilGénéral, l’AGENC…

Pour tenter d’y voir plus clairL’Association Finocchiarola Pointedu Cap Corse a pour mission généralede gérer les espaces naturels de laPointe. Elle est un interlocuteur privilé-gié des différentes institutions qui yinterviennent. L’Association considèreaussi qu’elle doit expliquer aux habi-tants l’intérêt et le fonctionnement de ces protections, d’en démêlerl’imbroglio juridique. Parce que leconcours des Cap-corsins de la Pointe est indispensablepour la réussite d’un projetde territoire.

Avec l’espoir de clarifier les choses, unesérie d’articles présentera successive-ment chacune des protections, ainsi quele rôle des institutions. N’hésitez pas ànous écrire pour nous poser des ques-tions : nos articles n’en seront que plusadaptés et utiles.

Michel Delaugerre

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Elles s’empilent, on ne les comprend pas,elles rassurent ou elles horripilent…

Les protectionsLa qualité des paysages de la Pointe du Cap Corse,le caractère remarquable de son patrimoine écologique etculturel sont aujourd’hui reconnus. C’est pour les préserverque, depuis une trentaine d’années, des protections ont été mises en place.

Elles sont variées,diverses,nombreuses.Trop ? Cette situation a au moins unavantage, celui de pouvoir moduler,adapter les mesures en fonction dessites. Ainsi, une Réserve naturelle, trèsprotectrice, est utile pour les fragilesîlots Finocchiarola. Mais pour recon-naître le caractère patrimonial de la cha-

pelle Santa Maria, l’inscription commeMonument Historique est plus adaptée.L’inconvénient de cet empilement estde former un arsenal juridique très com-plexe, difficilement compréhensible.

La Pointe du Cap les collectionne !Que l’on en juge : Site classé, Site inscrit,Réserve naturelle, Réserve de biotope,zone de préemption, Conservatoire dulittoral, acquisitions du Département,Monument Historique classé ou inscrit,ZICO, ZNIEFF, Sanctuaire marin des céta-cés, Loi littoral, Zone de protection spé-ciale, Site d’importance communau-taire, Natura 2000. On retrouve à laPointe du Cap la quasi totalité des pro-tections existant en droits français et

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Photo mystère

D’où a été prise cette photo ?

Quel est l’objet au premier plan ?

Les trois premières bonnes réponses à parvenir à l’Associationgagneront le livre photographique “Cap Corse - Capandula”

de Marcel Fortini.Envoyez une carte postale avec vos noms et adresses à :

“Association Finocchiarola - Pointe du Cap CorseMairie, 20247 Rogliano”.

Publié par

Association Finocchiarolapour la gestion des espaces naturelsde la Pointe du Cap Corse