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* Année 1976-1977 . — N° 101 A . N . Samedi 6 Novembre 1976 * JOURNAL OFFICIAL DE LA RÉPUBLIQUE FRANÇAISE DÉBATS PARLEMENTAIRES ASSEMBLÉE NATIONALE CONSTITUTION DU 4 OCTOBRE 1958 50 Législature PREMIERE SESSION ORDINAIRE DE 1976-1977 COMPTE RENDU INTEGRAL — 39 e SEANCE 1" Séance du Vendredi 5 Novembre 1976. SOMMAIRE PRÉSIDENCE DE M. GUY BECK 1 . — Loi de finances pour 1977 (deuxième partie) . — Suite de la discussion d ' un projet de loi (p . 7604). Agriculture, F. O. R. M. A., B . A . P. S . A. (suite). MM. Corrèze, Godefroy, Balmigère, Prêche, Commenay, de Poulpiquet, André Billoux, Xavier Deniau. Balmigère. MM . Méhaignerie, secrétaire d'Etat auprès du ministre de l 'agri- culture ; Xavier Deniau, Pranchère, Bertrand Denis,, rapporteur pour avis de la commission de la production et des échanges. MM . Christian Bonnet, ministre de l ' agriculture ; Antagnac, Frêche. AGRICULTURE ET F . O . R. M. A. Etat B. Titre nI: Amendement n° 238 de M . Pierre Joxe : MM . Laborde, Tis- sandier, rapporteur spécial de la commission des finances, de l'économie générale et du Plan ; le ministre . — Rejet. Adoption du titre III . Titre IV : Amendement n' 233 de la commission de la production et des échanges : MM . Bertrand Denis . rapporteur pour avis ; Tissandier, rapporteur spécial ; Guermeur . — Retrait. Adoption du titre IV. Etat C. Titre V . — Adoption. Titre VI : Amendement n° 237 de M . Voisin : MM. Corrèze, le ministre . — Retrait. Adoption du 'titre VI. Eta.t D. Titre III. — Adoption. Article 69 (p. 7818). Amendement de suppression n° 176 de la commission des finances, de l'économie générale et du Plan : MM. Pranchère, rapporteur spécial de la commission des finances, de l'économie générale et du Plan ; le ministre, Guermeur, Mourot . — Rejet, par scrutin. MM . le ministre, Guermepr,Mourot. Adoption de l' article 69. Après l ' article 69 (p. 7621). Amendement n° 241 de './I . Pierre Joxe : MM. Bernard, Pranchère, rapporteur spécial ; le ministre, Pierre Joxe. — Rejet. B. A . P. S . A. Crédits ouverts à l'article 30. — Adoption. Crédits ouverts à l'article 31 . — Adoption . 170

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  • * Année 1976-1977 . — N° 101 A. N .

    Samedi 6 Novembre 1976 *

    JOURNAL OFFICIALDE LA RÉPUBLIQUE FRANÇAISE

    DÉBATS PARLEMENTAIRES

    ASSEMBLÉE NATIONALE

    CONSTITUTION DU 4 OCTOBRE 195850 Législature

    PREMIERE SESSION ORDINAIRE DE 1976-1977

    COMPTE RENDU INTEGRAL — 39 e SEANCE

    1" Séance du Vendredi 5 Novembre 1976.

    SOMMAIRE

    PRÉSIDENCE DE M. GUY BECK

    1 . — Loi de finances pour 1977 (deuxième partie) . — Suite de ladiscussion d ' un projet de loi (p. 7604).

    Agriculture, F. O. R. M. A., B . A . P. S . A. (suite).MM. Corrèze,

    Godefroy,Balmigère,Prêche,Commenay,de Poulpiquet,André Billoux,Xavier Deniau.Balmigère.

    MM . Méhaignerie, secrétaire d'Etat auprès du ministre de l 'agri-culture ; Xavier Deniau, Pranchère, Bertrand Denis,, rapporteurpour avis de la commission de la production et des échanges.

    MM . Christian Bonnet, ministre de l ' agriculture ; Antagnac,Frêche.

    AGRICULTURE ET F . O . R. M. A.Etat B.

    Titre nI:Amendement n° 238 de M. Pierre Joxe : MM. Laborde, Tis-

    sandier, rapporteur spécial de la commission des finances, del'économie générale et du Plan ; le ministre. — Rejet.

    Adoption du titre III .

    Titre IV :Amendement n' 233 de la commission de la production et des

    échanges : MM . Bertrand Denis . rapporteur pour avis ; Tissandier,rapporteur spécial ; Guermeur . — Retrait.

    Adoption du titre IV.

    Etat C.

    Titre V . — Adoption.

    Titre VI :Amendement n° 237 de M . Voisin : MM. Corrèze, le ministre . —

    Retrait.

    Adoption du 'titre VI.Eta.t D.

    Titre III. — Adoption.Article 69 (p. 7818).

    Amendement de suppression n° 176 de la commission desfinances, de l'économie générale et du Plan : MM. Pranchère,rapporteur spécial de la commission des finances, de l'économiegénérale et du Plan ; le ministre, Guermeur, Mourot . — Rejet,par scrutin.

    MM . le ministre, Guermepr,Mourot.Adoption de l' article 69.

    Après l ' article 69 (p. 7621).

    Amendement n° 241 de './I . Pierre Joxe : MM. Bernard, Pranchère,rapporteur spécial ; le ministre, Pierre Joxe. — Rejet.

    B. A . P. S . A.Crédits ouverts à l'article 30. — Adoption.

    Crédits ouverts à l'article 31 . — Adoption .

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    ASSEMBLEE NATIONALE — l'° SEANCE DU 5 NOVEMBRE 1976.

    Article 67 (P. 7622).

    MM . Pierre Joxe, le ministre.Amendement n° 68 de M. Pranchère : MM . Balmigère, Tissan-

    dier, rapporteur spécial ; le ministre. — Rejet.

    Adoption de l'article 67.

    Article 68 (p. 7823).

    Amendement n° 69 de M . Pranchère : MM . tigout, le ministre.— Rejet.

    Adoption de l 'article 68.Renvoi de la suite de la discussion budgétaire.

    2. — Ordre du jour (p. 7624).Débat préparatoire à L'examen en séance publique des crédits

    budgétaires :

    Compte rendu intégral de la séance du jeudi 4 novembre 1976de la commission de la production et des échanges (p . 7625).

    PRESIDENCE DE M . GUY BECKvice-président.

    La séance est ouverte à neuf heures trente.

    M . le président. La séance est ouverte.

    — 1 —

    LOI DE FINANCES POUR 1977(deuxième partie).

    .Suite de la discussion d'un projet de loi.

    M . le président . L'ordre du jour appelle la suite de la dis-cussion de la deuxième partie du projet de loi de financespour 1977 (n"' 2524, 2525).

    AGRICULTURE, F . O. R. M . A ., B. A . P. S . A. (suite).

    M . le président . Nous continuons l'examen des crédits duministère de l'agriculture, du fonds d'orientation et de régula-risation des marchés agricoles et du budget annexe des pres-tations sociales agricoles.

    Dans la suite de la discussion, la parole est à M . Corrèze.

    M . Roger Corrèze . Monsieur le président, monsieur le mi-nistre de l'agriculture, monsieur le secrétaire d'Etat auprès duministre de l'agriculture, mes chers collègues, le projet debudget qui est soumis à notre discussion ze caractérise, à monsens, par trois orientations principales : la lutte contre l'infla-tion, l'effort en faveur des agriculteurs victimes de la séche-resse, le souci de l'Etat d'apporter un large concours aux pres-tations sociales agricoles.

    Sur le premier point et comme pour les autres budgets, onne peut que constater, dans de nombreux domaines, la recon-duction pure et simple des crédits votés l'an passé.

    Il est évident que nous aurions aimé voir les crédits pro-gresser sensiblement ; mais nous savons bien que, dans ce senscomme dans l'autre, la solidarité nationale doit s'exercer . Nousespérons que, l'année prochaine, le retard pris dans certainsdomaines sera comblé.

    C'est avec plaisir que j'al écouté les propos que vous aveztenus hier, monsieur le ministre . Il est temps, en effet, demettre fin à la campagne d'intoxication visant à discréditer lemonde agricole et à faire des agriculteurs des assistés perma-nents.

    Pour ce qui est du volume de l'aide, qui représente prèsde six milliards de francs, j'aurais, comme beaucou p de mescollègues, souhaité davantage ; mais je sais bien que l'appelà la solidarité a des limites.

    Je tiens toutefois à saluer le courage du Gouvernement.Celui-ci a su adopter un système d'indemnisation qui, certes,n'est pas parfait — comment le serait-il, d'ailleurs? — maisqui laisse aux préfets, assistés d'une commission, le soin depondérer cette aide en fonction des réalités locales.

    Je souligne avec force que les agriculteurs doivent cetteindemnisation à la majorité et non pas à l'opposition qui,comme d'habitude, a refusé de voter les crédits, sous le pré-texte trop commode que ces crédits sont insuffisants.

    M . Maurice Tissandier, rapporteur spécial de la Commissiondes finances, de l'économie générale et du Plan, pour les dépen-ses ordinaires . Bravo !

    M. Roger Corrèze . Il est bien plus facile, c 'est vrai, de pra-tiquer l'art de la démagogie irresponsable!

    A propos de l'indemnisation ; je formulerai deux observationsparticulières . L ' une, que j ' avais déjà présentée l'année dernière,a trait,à l'adaptation . du statut du fermage à certaines parti-cularités régionales ; l 'autre a pour objet le financement destravaux hydrauliques.

    Le statut du fermage se révèle particulièrement inadaptélorsque coexistent, à côté de l'activité agricole pure, d'autresactivités, par exemple la chasse . Tel est le cas dans toute larégion que je représente et que vous connaissez bien, mon-sieur le ministre : la Sologne.

    Tout le problème, dans, les départements du Loir-et-Cher,du Cher et du Loiret, consiste à rendre compatibles la chasseet l'agriculture en milieu rural.

    Le développement de l'activité cynégétique a conduit lespropriétaires à préférer donner à bail le droit de chasse etnon pas le droit d'exploiter la terre.

    Alors même que de nombreux agriculteurs et de nombreuxpropriétaires souhaiteraient parvenir à un accord sur la loca-tion des terres seules, sans que les uns et les autres subissentles contraintes imposées par le statut du fermage, la législa-tion actuelle leur interdit de le faire.

    C ' est ainsi que le fermier ne peut renoncer à son droit dechasse ou à son droit de préemption et que le bailleur se refuseà louer ses terres à un exploitant, de peur de se voir opposerles clauses de durée et de préemption.

    Il n'est pas question pour nous de remettre en cause lesconquêtes obtenues par les agriculteurs en matière de sécuritéde l'exploitation, mais nous estimons qu'il importe d'assouplirle statut du fermage lorsque celui-ci, paradoxalement, se révèlealler à l'encontre des intérêts des exploitants.

    Cette année, cette incompatibilité s'est encore aggravée . Denombreux agriculteurs incapables d'apporter la preuve d'unelocation n'ont pu bénéficier de l'indemnisation ..

    Que pensez-vous, monsieur le ministre, de la suggestion quej'avais faite l'an passé, en la traduisant dans un amendement,de confier à la commission consultative départementale desbaux ruraux le soin-de régler ce problème spécifique ?

    Afin d'éviter que, par ce biais, certains ne soient tentés detourner les dispositions fondamentales du statut national dufermage, il serait souhaitable de prévoir qu'un décret détermineles régions dans lesquelles ces assouplissements conformes auxusages locaux seraient possibles.

    Permettez-moi de vous rappeler que vous avez pris l'engage-ment de faire étudier ce problème par vos services . Vos répon-ses intéresseront, vous vous en doutez, nombre d'agriculteursdont les exploitations sont situées dans les régions concernées,comme les intéresseront aussi, vous le savez, les précisions quevous pourrez fournir sur la situation du dossier de reconnais-sance de la Sologne comme zone défavorisée.

    En ce qui concerne les travaux d'hydraulique, les créditsinscrits au projet de budget pour 1977 ne permettront sansdoute pas de constituer des réserves d'eau suffisantes.

    Plutôt que de différer ces travaux dont la nécessité estcapitale en période de sécheresse mais aussi en temps ordinairepour l'approvisionnement en eau des animaux, pour la luttecontre l'incendie ainsi que pour l'arrosage, ne serait-il pas pos-sible de faire appel à l'armée ? Celle-ci a démontré tout récem-ment, lors de la .mise eh . oeuvre de l'opération e paille e,qu'elle pouvait rendre de grands services à l'agriculture . Lesrégiments du génie disposent des hommes et du matériel. Nepourraient-ils pas être utilisés à la création de réserves d'eau ?Je serais heureuk de connaître votre opinion à ce sujet.

    Hier, vous avez affirmé votre ferme volonté de défendre laproduction bovine et fait entendre que l'enseignement techniqueagricole privé bénéficierait d'une dotation supplémentaire . J 'aipris acte avec satisfaction de ces assurances.

    Le volume des crédits destinés à la couverture des prestationssociales agricoles, qui représente près de 50 p. 100 de l ' ensembledes dépenses du ministère de l'agriculture, démontre aisémentque les agriculteurs sont loin de bénéficier, en tant que produc-teurs, de subventions aussi élevées que certains le laissententendre.

    Ces crédits consacrés aux régimes sociaux agricoles ne sont quela traduction, pour ce sectéur professionnel, de l'effort nationalen faveur des personnes âgées . Les agriculteurs ne sont donc pasles seuls à bénéficier d'un tel soutien.

    Toutefois, monsieur le ministre, même si l'on réfute certainescontre-vérités 'qui courent ici ou là, il reste que le phénomène

  • ASSEMBLEE NATIONALE — 1" SEANCE DU 5 NOVEMBRE 1976

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    conjoncturel de la sécheresse a joué le rôle de révélateur,provoquant une vaste prise de conscience des aléas et, à certainségards. de la fragilité qui peuvent to ficher l'agriculture.

    Je voudrais,

    ce sujet, attirer toute votre attention sur ceproblème de fond.

    Sans parler de la dépendance à laquelle sont soumis lèsagriculteurs face aux conditions atmosphériques . j'observe queles producteurs dans leur ensemble, sauf ceux qui bénéficientdu prix minimum garanti . tel ,. les céréaliers et les betteraviers,ne sont ntaitres ni de leur, coûts de production, ni de leurs prixde ven'c.

    Cette constatation a été faite il y a bien longtemps par lesresponsables de notre politique agricole . C'est pourquoi desmécanismes de régulation des cours, par le biais du F .0 .1( .M .A.et du F' .E .O .G .A . . ont été mis en place.

    Mais .aujourd'hui il faut avoir le courage de le reconnaître, touten sachant très bien quelle est la responsabilité des désordresmonétaires : ces mécanismes ne suffisent pas à assurer unestabilité des revenus agricoles.

    Quand on sait que la e consommation intermédiaire A — ainsiappelée par les spécialistes — c'est-à-dire l'achat d'engrais, decarburants, de semences, d'aliments du bétail, notamment, aquintuplé depuis 1959 en moyenne . et que les prix de ces pro-duits indispensables à l'agriculteur ont subi un accroissementde 23 p. 100 depuis quinze ans, on est frappé de l'urgencequ'il y a de résoudre les problèmes dans ce domaine afin d'éviterune course folle à la subvention pour garantir un prix de ventepermettant de compenser l'accroissement des prix de production.

    Le voyant rouge s'allume devant moi : je conclus, monsieurle président, puisque vous me le demandez si gentiment.

    Monsieur, le ministre, la réflexion devra se faire, bien sûr, enliaison avec nos partenaires européens et avec les institutionscommunautaires.

    Son objet devra être vaste et porter sur tous les aspectsdu problème : la formation des prix de revient, les aides à laproductioa, qu'il est, à mon sens, encore trop tôt pour ralentir ;les modalités de financement, la garantie des revenus agricoles,les circuits de distribution et de commercialisation.

    Il est bien évident que les cas sont extrêmement complexeset qu'il n'y a pas de solution miracle . Mais le sort de l'agricul-turc et des agriculteurs en dépend . Ceux-ci vous font confiance.Ils ont compris le sens courageux de votre démarche et appréciéla manière dont vous défendez à Bruxelles les intérêts de laFrance . Pour toutes ces raisons, vous pouvez compter sur montotal soutien dans le vote de votre budget . (Applaudissementssur les bancs de l'union des démocrates pour la République, desrépublicains indépendants et des réformateurs, des centristes etdes démocrates sociaux.)

    M. le président. La parole est à M . Godefroy.

    M . Pierre Godefroy. Monsieur le président, monsieur leministre, monsieur le secrétaire d'Etat, mes chers collègues, cedébat étant largement ouvert, tous les sujets ont été traités.

    Je limiterai donc mon propos à l'évocation des difficultés desmaisons familiales rurales, dont mes collègues du départementde la Manche, MM. Baudouin et Daillet, vous ont déjà entretenus.

    Il s'agit là d'un problème capital pour le devenir de notreagriculture.

    M . Bertrand Denis. Capital, et trop souvent oublié!

    M. Pierre Godefroy . Les perpectives sont franchement mau-vaises pour ces établissements si l'on considère le projet debudget qui nous est soumis : les crédits de fonctionnement n'aug-mentent que de 7,93 p . 100, tandis que les crédits d'investisse-ment diminuent de 17 .7 p . 100.

    Compte tenu du système d'alternance, l'aide accordée auxmaisons familiales représente, par an et par élève, 1 335,30 francsseulement.

    Quel établissement scolaire pourrait former des hommes pourune somme aussi modique?

    Certaines mesures sont donc indispensables.

    D'abord, un crédit supplémentaire, au titre des dépenses defonctionnement et d'équipement, doit être dégagé au chapitrede l'enseignement agricole privé.

    Ensuite, la répartition de cette « rallonge » doit faire l'objetd'une affectation substantielle à la formation professionnellepar alternance dispensée dans les maisons familiales — arti-cle 40 — et aux équipements — article 50.

    Dans le département de la ,Manche, les maisons familialesassurent la formation agricole de plus de 1 000 élèves et per-.mettent, avec 80 p . 1J0 vies jeunes qui restent dans l'agriculture,de poursuivre le déve :oppement et d'accroitre la vitalité dumilieu agricole.

    L'alternance entre l'école et la ferme est l'espérance de l'agri-culture de demain, car les jeunes qui fréquentent ces établisse-ments ont encore foi dans ce métier si ardu et si contraignant,dans l'élevage notamment, mais si vital pour notre ' essor écono-mique.

    Enfin, le problème du collège agricole mixte de Saint-Hilaire-du-Harcoubt, dont mon collègue et ami M . Bizet vous a déjàentretenus, appelle une solution d'extrême urgence.

    Je vous remercie de votre attention . (Applaudissements sur lesbanc., de l'union des démocrates pou,- la République, des répu-blicains indépendants et des réformateurs, des centristes et desdémocrates sociaux .)

    M. le président . La parole est à M . Balmigère.

    M . Paul Balmigère. Monsieur le ministre, je voudrais unefois encore lancer ici un cri d'alarme.

    Si vous êtes cônscient de la situation à laquelle nous a conduitvotre refus d'entendre les précédents, alors, agissez vite !

    Donnez aux viticulteurs les moyens de vivre de leur travail,ou bien dites-nous clairement que vous avez décidé de tuer lavigne en ruinant le vigneron.

    Chaque jour, la situation des viticulteurs familiaux se dégrade ;au marasme du marché s'ajoutent les conséquences de la haussedes prix et des impôts.

    Ceux qui ont encore cru à vos promesses serrent les poings.Votre office du vin se révèle inefficace, lès accords inter-professionnels ne sont plus que des chiffons de papier ; ni l'unni les autres ne sont capables de redresser la situation.

    Nos vins ne trouvent pas d'acquéreurs ; cette année, jusqu'àprésent, 23 millions d'hectolitres sont sortis des chais méri-dionaux, contre 29 500 000 hectolitres l'année dernière.

    Les importations ont continué de plus belle : 8 160 000 hecto-litres, dont 7 200 000 hectolitres en provenance d'Italie.

    Pour pouvoir verser les acomptes qui constituent le salairedu vigneron, des caves coopératives sont obligées de brader desvins de 11 degrés au prix de vins de 10 degrés . D'autres pro-ducteurs doivent accepter de n'être payés que dans six mois,en supportant les charges de l'inflation.

    Vos statistiques sont sauves . Le revenu des exploitants fami-liaux se dégrade encore. M. Benêt estime à 39 p. 100 la baissede leur pouvoir d'achat. La majorité d'entre eux ont un revenuinférieur au Smic.

    Est-ce cela « vivre au-dessus de ses moyens » ?Or la nouvelle campagne menace d'aggraver encore les choses.

    Vous prétendez majorer le prix du vin de moins de 6,5 p . 100,soit la moitié du taux d'inflation.

    Les disponibilités vont orienter les cours vers la baisse, puisquenous avons 28 millions d'hectolitres de stock, plus 8 millionsd'hectolitres provenant des importations et, sans doute, 75 mil-lions d'hectolitres récoltés, soit un total de plus de 110 millionsd'hectolitres.

    Et vous envisagez déjà d'importer massivement les vinsd'Espagne, après l'entrée de ce pays dans le Marché commun.Il en sera d'ailleurs de mème pour les fruits et légumes.

    « Oui à l'Espagne s, avez-vous dit hier, mais en avouantque les productions méditerranéennes — vins et légumes — nerésisteraient pas à la concurrence.

    Vous rappeliez que le Président de la République a promisde faire modifier au préalable la réglementation européenne.Hélas ! comment y croire puisque, depuis des années, vous avezété incapable de la faire modifier vis-à-vis de l'Italie ?

    Les conditions de vie des exploitants agricoles se dégradentd'autant plus rapidement que, comme les autres travailleurs,ils sont victimes des hausses que vous organisez sur l'essence,strr le fuel, sur les impôts, notamment.

    Nombreux sont ceux d'entre eux qui se trouvent au bord dela faillite . Les jeunes s'en vont. Dans l'Hérault, il ne resteplus que 8 p . 100 de viticulteurs âgés de moins de quarante ans.

    Selon les chiffres de la caisse de crédit agricole du Midi,l'endettement atteint de 6 000 à 7 000 francs par hectare . Etvous commencez déjà à réduire autoritairement les possibilitésd'emprunt.

    Avouez donc que vous serrez le garrot pour pouvoir réaliserles projets élaborés à Bruxelles, depuis le plan Mansholt enpassant par les accords méditerranéens, et repris dans le planBentegeac pour importer à bas prix les produits agricoles, et

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    ASSEMBLEE NATIONALE — 1'° SEANCE DU 5 NOVEMBRE 1976

    en particulier le vin, les fruits, les légumes, sans aucun profitpour les consommateurs mais pour les superprofits des grosimportateurs agro-alimentaires !

    Ces projets conduiront à arracher 400 millions de pieds devigne du Midi, notamment dans la zone comprise entre Narbonne,Béziers et Montpellier.

    C'est pourtant le candidat Giscard d'Estaing qui déclarait àMontpellier : a le Languedoc sans vignes serait un désert ».Car ce serait bien un désert si, comme le préconise M. Ben-tegeac, on plantait du maïs ou du soja, dont le rapport esttrois fois moindre : Combien resterait-il de paysans puisqu'undixième de la main-d'oeuvre actuelle suffirait ?

    Ce qu'il faut, au contraire . c'est prendre immédiatement desmesures qui permettraient le rattrapage du pouvoir d'achat desviticulteurs et des producteurs de fruits et légumes.

    Pour cela, il faut garantir un prix .eritablement rémuné-rateur, payer la qualité à un juste prix, ramener la T. V .A.sur le vin à 7 p . 100, assainir le marché, arrèter les importationsà bas prix, conclure immédiatement les contrats de stockage àcourt et à long terme.

    A cet effet, il est nécessaire de ne pas diminuer le contingentbudgétaire destiné au Crédit agricole, contrairement à ce quevous avez prévu.

    Il faut aussi indemniser• valablement les sinistrés.

    Si vous n'appliquez pas ces mesures d'urgence, vous allezcontraindre les viticulteurs à reprendre la lutte. Comme le5 février et le 29 avril, ils sauront agir aux côtés des travailleurset des autres catégories sociales, pour défendre les intérêts etla vie de toute cette région . Ils le feront dans l'union, aveccalme et détermination, car ils sont assurés du soutien de touteune population qui est décidée à garder ses vignes et qui neveut pas que le Languedoc devienne un désert . (Applaudissementssur les bancs des communistes et des socialistes et radicaux degauche .)

    M. le président . La parole est à M . Frêche.

    M . Georges Frêche. Monsieur le président, monsieur le secré-taire d'Etat . mesdames, messieurs, en accord avec mes collèguesdu groupe du parti socialiste et des radicaux de gauche, jem'en tiendrai à l'agriculture méditerranéenne, c'est-à-dire auxseules questions intéressant le vin et plus particulièrement lesfruits et légumes.

    Déjà, mes collègues et amis Raoul Bayou et Jean Bastideont traité le problème du vin avec grande autorité . Permettez moicependant de confirmer l'exactitude de . leur analyse, surtoutaprès le rideau de fumée qu'a constitué au printemps la créationd'un soi-disant office des vins . S'interdisant de contrôler lesexportations, contrairement à ce que réclamait la propositionsocialiste, cet office n'a pu offrir aux producteurs la garantiedes revenus, ce qui aurait dû être son seul but . Et c'est l'inversequi se produit, avec une baisse de 39 p. 100 des revenusagricoles.

    Le résultat est patent : le revenu viticole ne cesse de sedégrader et les accords interprofessionnels n'y peuvent rien . Lestock à la propriété est plus important que jamais . Et 1976verra une nouvelle baisse de ce revenu alors que l'inflations'accentuera . Que nous propose le rapport Bentegeac? Aucunesolution, sinon l'arrcchage massif des vignes, particulièrementdans la zone de Montpellier.

    Monsieur le secrétaire d'Etat, vous disiez vous-même hier queles fruits et légumes occupent vingt fois plus de travailleurs queles céréales . Que propose-t-on comme solution? La culturedu maïs, du soja, des céréales . C'est-à-dire que dans une zoneoù le chômage dans la population active est de l'ordre de8 p. 100, on va s'acheminer vers 10 p . 100 . Nous verrons arrivermassivement de nouveaux chômeurs, qui iront des campagnesvers les villes, elles-mêmes refuges de chômage au niveaunational.

    Comment reviser la politique viticole ? D'une part, en contrelent le marché et particulièrement les importations ; d'autrepart, en garantissant les prix, afin d'améliorer les revenusdes viticulteurs . Ceux-ci y ont droit comme les autres catégo-ries sociales . Il faut enfin opérer la distillation préventive desmauvais vins et aboutir à un assainissement qualitatif . Celarevient à repenser complètement la mission de l'office du vindans le cadre de la profession.

    Sur un plan plus particulier, je vous signalerai la gravité desinondations récentes dans la vallée du Lez, dans l'Hérault, inon-dations qui ont provoqué d'importants dégâts aussi bien chezles viticulteurs que chez les maraîchers . Il est nécessaire que

    'des mesures urgentes soient prises à cet égard .

    Quant au secteur des fruits et légumes, il connaît une criseextrêmement grave . Sa situation parait encore plus menacéeque celle de la viticulture . La gravité de cette crise a été souli-gnée en juin lors des journées d'études organisées à Mauguio,près de Montpellier, par le groupe d'étude interparlementairedes fruits et légumes et par tous les responsables professionnelsnationaux.

    Les conclusions de juin restent valables aujourd'hui . Lesproducteurs de fruits et légumes vent-ils être sacrifiés, commeles viticulteurs, à un accord global C.E.E.- pays du bassinméditerranéen ? Cette menace couvent agitée se précise. Avecl'arrivée de la Grèce demain, de l'Espagne après-demain.

    Ce matin encore, monsieur le secrétaire d'Etat, je lisais unrapport du directeur de la banque de Grèce. Celui-ci voit dansl'entrée de son pays dans le Marché commun une chance extra-ordinaire pour les fruits et légumes grecs et il prévoit toutun plan en vue d'intensifier la production grecque de fruitset légumes.

    De même pour l'Espagne, malgré les dénégations de M . Chirac,alors Premier ministre, au mois de juillet . Je n'en veux pourpreuve que les déclarations du roi d'Espagne lors de sa récentevisite à Paris.

    La concurrence de pays où les coûts de production sont sanscommune mesure avec les nôtres se fait de plus en plus viveet les mesures d'apaisement annoncées — pas de dérogation ausystème des prix de référence, échanges selon un calendrierprécis — se sont révélées illusoires.

    La situation actuelle et ses développements ultérieurs fontpeser les plus graves menaces sur les producteurs de fruits etlégumes de notre pays, car ceux-ci sont à ternie condamnés àdisparaître.

    Le ministre de l'agriculture en est lui-même si conscient qu'ila reconnu récemment, dans une interview au journal régionalMidi libre, la nécessité de reconsidérer les politiques suivies enmatière de vins et de fruits et légumes . Mais quelles solutionsproposez-vous, monsieur le ministre ? S'agira-t-il des mêmesgaranties que celles que vous aviez offertes il y a quelquesannées aux viticulteurs pour faire, face à la concurrence del'Italie ?

    Vous comprendrez donc notre attitude dubitative.Allez-vous sacrifier définitivement des secteurs entiers de notre

    agriculture en pratiquant une politique qui abandonne toutenotion de préférence communautaire et toute clause de sauve-garde ?

    Où en est la notion de préférence communautaire . ? Quedevient l'affirmation du traité de Rome aux termes de laquellele Marché commun doit assurer aux agriculteurs de la Commu-nauté une augmentation de revenus comparable à celle _desautres secteurs socio-professionnels ?

    C'est l'inverse qui se produit.

    Seuls ont été conservés les principes libéraux . Les socialistesne sont pas des adversaires du Marché commun. Bien aucontraire . Mais ils te peuvent cautionner votre politique quitourne le dos aux t,

    tifs sociaux du Traité de Rome.

    M. André Billoux . Tris bien !

    M. Georges Frêche . Quelques lignes de force s'imposentd'emblée.

    La préférence communautaire doit être strictement respectée ;la politique d'importation doit être strictement définie pourne pas concurrencer l'écoulement des productions nationalesla normalisation obligatoire dans la C. E . E . doit être appliquéerigoureusement à tous les produits en provenance de pays tiers ;il faut étendre la liste des produits soumis à prix de réfé-rence à de nouveaux fruits et légumes après consultatior de laprofession ; il faut adapter le règlement de façon à ce quele système des prix de référence soit efficace au niveau de l'appli-cation ; nous devons enfin adopter une politique dynamiquepour les industries agro-alimentaires de façon à ce "qu'il y aitun véritable marché pour les fruits et légumes destinés à latransformation.

    Cela, pour éviter ce qui s'est produit, récemment encore, dansma circonscription : l'usine Lenzbourg a été obligée de fermer,acculant à la faillite les producteurs qui avaient conclu avec elledes contrats de production de pêche Pavie en particulier.

    Je conclurai en insistant particulièrement sur les problèmesspécifiques de la coopération én matière de fruits et légumes.

    Cette coopération comporte deux aspects essentiels au niveaude la concurrence.

    Tout d'abord la concurrence externe, celle des pays tiers,contre laquelle il est nécessaire de protéger nos productions enétablissant un double bouclier. Le bouclier technique renfor-

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    SEANCE DU 5 NOVEMBRE 1976

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    cera l'avance technique des producteurs français de fruits etlégumes -- nouvelles variétés, variétés mieux adaptées, sélectionsanitaire — grâce à l'augmentation des crédits de recherche.Le conseil régional du Languedoc-Roussillon s'y est employéen ce qui concerne les abricots.

    Le bouclier économique favorisera l'organisation économiquedes producteurs de fruits et légumes en accélérant le processusd'extension des règles des comités économiques et aussi enaccordant des aides à la coopération agricole, qui représentela base de cette organisation économique véritablement liée auxintérêts des producteurs.

    Ensuite et surtout, la concurrence interne . Pour éviter lesdistorsions de concurrence que subissent les entreprises coopé-ratives, il est nécessaire de modifier la législation ou la régle-mentation ; de contrôler sérieusement l'application des règlesexistantes à tous les producteurs et à tous les opérateurs dumarché ; de dégager les compensations financières annuelleset automatiques par rapport aux distorsions qui continueront àsévir.

    Toute l'argumentation sur les charges anormales que subissentles coopératives vous est connue : charges sociales, ventes etachats sans facture, fiscalité et taxe professionnelle, normali-sation, charges d'intérêt général dues au rôle social et d'organi-sation économique supportées par les coopératives.

    Il est particulièrement indispensable qu'une politique agricolecommune nouvelle en matière de fruits et légumes accordeune place essentielle au secteur coopératif.

    Monsieur le ministre, la vigne, les fruits et légumes jouentun rôle essentiel dans la région méditerranéenne, par ailleurssous-industrialisée . Les fruits et légumes jouent aussi un rôleimportant dans l'ensemble de l'industrie française.

    Je sais que vous êtes conscient de la gravité de ce problème,mais, hélas ! les solutions proposées ne répondent pas à cetteprise de conscience.

    Il est indispensable que des réponses soient rapidement appor-tées aux interrogations angoissées des producteurs . Sinon, mon-sieur le ministre, vous ne pourriez manquer de récolter, .là etailleurs, comme le dit dans un livre récemment paru un viticul-teur qui con-sait bien aussi le problème des fruits et légumes,des s vendanges amères s . (Applaudissements sur les bancs dessocial . tes et radicaux de gauche et des communistes .)

    M . le président . La parole est à M . Commenay.

    M . Jean-Marie Commenay . Mesdames, messieurs, mes troisobservations de portée générale porteront sur la politiqueagricole commune, d'abord . sur le revenu des agriculteursensuite, sur les calamités agricoles enfin.

    Concernant la politique agricole commune, j'observe que.non sans mérites, cette politique demeure cependant extrê-mement précaire et qu'elle ne manque pas d'inquiéter les agri-culteurs et singulièrement les jeunes.

    La rude confrontation avec les Etats-Unis, d'une part, l'ajus-tement difficile avec les pays de l'Europe situés sur le littoralméditerranéen et, au-delà même, avec les pays d'Afrique, d'autrepar., constituent d'importants sujets de contradiction, tout autantqui : les contradictions monétaires et concurrentielles à l'intérieurde la Communauté.

    Comment la France et l'Europe s'organiseront-elles pour nepas être tributaires de cette grande nation que sont les Etats-Unis, notamment en ce qui concerne le soja et à un moindredegré le maïs?

    Hier, vous avez, à fort bon droit, monsieur le ministre, misl'accent sur les dangers que présente l'irruption d'Etats médi-terranéens dans le Marché commun . Les viticulteurs et lesarboriculteurs du midi de la France connaissent bien ce péril.Je retiens votre position : oui à l'élargissement, mais dans cer-taines limites.

    De l'avis de beaucoup d'observateurs, la politique agricolecommune ne pourra durer que si la Communauté économiqueeuropéenne, tout en progressant dans une harmonie interne,s'affirme au plan mondial en tant qu'entité autonome, lest-à-dire en tant qu'Europe indépendante et libre. C'est à ce prixpolitique que l'Europe survivra.

    Mais il existe — et nous ne le savons que trop en dépitdes proclamations — des forces centrifuges . Il faudra au Gouver-nement français beaucoup de capacité de persuasion pour amenernos partenaires européens à admettre le rôle fondamental del'agriculture dans l'économie . Vous avez indiqué hier que lesEtats-Unis redécouvraient ce rôle, ainsi que l'U . R. S . S . maisà un degré moindre . Il est bon que l'Europe s'affirme sur cepoint et d 'une façon beaucoup plus nette qu'aujourd'hui .

    S'agissant du revenu des agriculteurs, vous avez relevé, mon-sieur le ministre, deux phénomènes inquiétants : d'une part,la discordance entre l'évolution des coûts des produits industrielsnécessaires à l'agriculture et celle des produits agricoles eux-mêmes et, d'autre part, le déphasage entre les prix agricoles etles prix alimentair es, encore que ceux-ci n'aient progressé qued'une manière semblable à la moyenne générale des prix.

    Dans la mesure où vous entendez — et nous vous le deman-dons — maintenir la ligne tracée par les diverses lois d'orien-tation, c'est-à-dire privilégier autant que faire se peut l'exploi-tation à responsabilité personnelle, il faut demeurer attentifà l'évolution des revenus de l'agriculture de type familial.

    Vous avez souligné hier les mérites de l'exploitation à res-ponsabilité personnelle, dans l'ordre économique . Vous avez misl'accent sur la sécurité des approvisionnements, sur ses qua-lités propres . Mais vous auriez pu parler aussi de sa souplesse,de ses facultés d'adaptation, car ce sont là des qualités quepossède fort peu l'exploitation de type industriel, beaucoupplus fragile dans ce domaine là . Vous avez aussi mis en évidencela valeur de l'exploitation à responsabilité personnelle au plande l'aménagement. Et je retiens l'exactitude de . .stte analyse.

    En conséquence, pour atténuer les disparités qui existententre l'agriculture et les autres secteurs de l'économie, il convien-drait, grâce au système de rémunération, d'aec )rder une rétri-bution normale aux agriculteurs et, en priorité, à ceux quis'engagent personnellement . Il existe, comme vous l'avez indiquéhier, deux types d'agriculture, et il est nécessaire que celledont je viens de parler soit assurée d'un meilleur soutien.

    Concomitamment, il faut agir avec volonté dans le secteurdes industrie agro-alimentaires . Vous connaissez le problème,monsieur le ministre, et vous- savez que dans ce domaine nousmanquons incontestablement de dynamisme . Il semble mêmeque nous vivions sur ce point dans une situation de type colonial.

    J'insiste d'autant plus que je représente une région danslaquelle ce phénomène se . vérifie . Je souhaiterais que vous vouspenchiez sur ce problème des industries agro-alimentaires avecdétermination . Je sais que vous en ètes capable.

    Ma dernière observation aura trait aux calamités agricoles.On en a beaucoup parlé au cours des cinquante dernières années.Et à une date relativement récente, nous avions réussi, ici même,à mettre sur pied un système d'indemnisation sur lequel nousavions beaucoup travaillé . Ce système qui avait ses mérites,semble aujourd'hui frappé d'inefficacité, voire de stérilité.

    La sécheresse qui a frappé cette année des régions qui avaientrarement connu une telle calamité a mis en évidence des sujé-tions que les paysans de la France méridionale subissaientdepuis plusieurs générations.

    Avec les engrais, les carburants, les dépenses d'investisse-ments, l'agriculteur supporte de plus en plus de frais fixes.Il devient un véritable entrepreneur, chacun le reconnaît . Il estdonc juste que cet agriculteur soit protégé contre les aléasclimatiques et indemnisé, le cas échéant, dans des conditionsconvenables et rapides.

    A ce sujet, je me permets d'ouvrir une parenthèse . Les régionsde l'Adour — Landes . Pyrénées-Atlantiques, Gers et Hautes-Pyrénées — n'ont peut-être pas connu une sécheresse aussiimportante que celles de la moitié nord de notre pays, encoreque dans certaines zones la pluviométrie ait été très insuffisanteet que dans d'a n tres l'irrigation n'ait pu se faire normalement, leplus souvent p ur des raisons de coût. Mais depuis quelquessemaines des pluies persistantes, voire des tornades, viennentcompromettre gravement la récolte de maïs . C'est une réalitéque j'ai moi-même constatée en procédant à des sondages danstoute la région.

    Monsieur le ministre, je vous demande d'examiner cettesituation, de faire jouer le système d'indemnisation et d'assurer,le cas échéant, le sauvetage de la récolte . Peut-être faudrait-ildemander l'intervention de l'armée . Ce serait sans doute le seulmoyen de sauver la récolte à la main puisque les machines nepeuvent généralement plus pénétrer dans les champs, ou nesont d'aucune utilité lorsque le maïs a été couché au sol par levent.

    Cette observation de portée régionale me conduit à vousdemander, messieurs les ministres, au-delà même de ce budgetdont les chiffres ne sont guère exaltants, ce que vous comptezfaire à propos de l'indemnisation des calamités . Ne convient-ilpas de définir une politique à long terme?

    Allez-vous nous proposer à bref délai une réforme de la loiancienne — car aujourd'hui elle est bien dépassée — quiaille dans le sens de la solidarité et de l'efficacité ?

    Je profiterai également de cette incidente pour vous demanderce que vous comptez faire, en particulier dans les régionsméridionales et dans le grand Sud-Ouest, dans le domaine de

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    l' hydraulique oit se pose un important problème . [s'agencefinanriére de bassin étudie un plan d'aménagement hydrauliquequi pourrait préserver des calamites les récoltes futures. Qu ' enpensez-vous ?

    Vos réponses, messieurs les ministres, si elles sont favorables,seront de nature à encourager nos agriculteurs et ceux quiaspirent encore à le devenir. Je les écouterai donc avec beaucoupd'attention . (Applaudissements sur les bancs des réformateurs,des centristes et des démocrates secian .r, et sur plusieurs bancsde l'union des démocrates pour la République et des répub!ieainsindépendants .)

    M. le président. La parole est à M . de Poulpiquet.

    M. Gabriel de Poulpiquet . Messieurs les ministres, le tempsm ' étant compté, je vous poserai seulement quelques questionsdestinées à appeler l'attention du Gouvernement sur un certainnombre de points précis.

    Les crédits qui ont été votés l'année dernière pour lesbâtiments d'élevage et qui, en plus de la subvention, permettentle déblocage des prêts n'ont pas encore été répartis.

    En tout cas, si certaines régions en ont bénéficié, d'autresn'ont reçu aucune dotation . Cela est très grave, en particulierpour des régions comme la Bretagne . où les exploitations sonttrès petites et où les agriculteurs ne peuvent vivre que parcequ'ils on t des ateliers de production.

    Si ce système n'est pas possible, il faut en trouver tin autre !Les agriculteurs, quant à eux, doivent pouvoir recevoir desprêts afin de construire les bâtiments nécessaires à l'élevage.Il est d'ailleurs regrettable que le Parlement — qui a peut-êtrede moins en moins de pouvoir, mais qui a encore celui de voterle budget et des crédits — voie ses décisions contrecarrées, pourune raison ou pour une autre, par les fonctionnaires du minis-tère des finances.

    J'appelle votre attention sur la gravité de ces faits et jevous demande que les crédits de l'année dernière soient trèsrapidement mandatés, car aucune raison ne s'y oppose.

    Les S . A. F. E . R. se plaignent de voir le montant de leurscrédits diminuer, mais pourquoi devrait-on leur accorder chaqueannée des dotations nouvelles ? En effet, la législation sur lesS . A . F . E . R . prévoit qu'elles peuvent acheter des terres en vuede restructurer les exploitations et de réglementer le marché.

    Aucun crédit nouveau ne devrait donc leur être accordé si,comme il serait souhaitable, elles rétrocédaient rapidement lesterres achetées au lieu de les louer et si elles ne faisaient pasvaloir leur droit de préemption sur des parcelles de dimensionexcessivement réduites . Cette opération ne présente souvent aucunintérêt pour l'agriculture, mais son seul objet est de faireplaisir à des personnes qui conseillent les S . A . F. E . R.

    De plus, il est. regrettable qu'aucune transaction, dans marégion tout au moins, ne puisse se faire sans une interventionde la S. A . F. E. R . Cela contribue non pas à faire diminuerle prix des terres mais à le faire augmenter, les quelquesexploitations mises en vente par adjudication judiciaire attei-gnant des prix exorbitants.

    Le contrôle des actions des S. A . F . E . R . devrait donc êtreplus strict car il est intolérable que, pour servir quelquespersonnes, ces organismes empêchent les jeunes agriculteursd'acheter des exploitations à l'amiable, en faisant valoir leurdroit de préemption ou même en proposant à l'amiable desprix supérieurs à ceux du marché.

    Quant aux importants cr édits destinés à compenser les effetsde la sécheresse, on aurait pu les répartir avec plus de juge-ment si l'on avait consulté les élus . Il est bien d'avoir consultéles organisations agricoles nais la base a contesté la répar•tition qui a été faite sur avis de leurs dirigeants . Les milliardsqui ont ainsi été distribués auraient pu être utilisés plusefficacement.

    Les crédits (l ' équipement général me paraissent excessive-ment faibles, notamment ceux destinés aux adductions d'eau.La période de sécheresse que nous avons connue cette annéea fait ressortir la nécessité du renforcement des réseauxd'adduction d'eau potable et d'irrigation . On trouve des crédits— sous forme de prêts — pour le drainage. Or cette opérationne s'impose pas actuellement et il serait préférable de donnerla priorité, pendant plusieurs années encore, aux adductionsd'eau et à l irrigation . ( 4pplaudissements sur les bancs de l'unionries démocrates pour la République, des républicains indépendantset des réformateurs, des centristes et des démocrates sociaux.)

    M. le président. La parole est à M. André Billoux.

    M . André Billoux . Monsieur la ministre, lors de la campagneélectorale pour les élections présidentielles de 1974, l'une de

    vos aimables collègues du Gouvernement disait, à propos del'un des candidats de la majorité, qu'on ne a tire pas surles ambulances

    De même, le code du bon usage de la guerre — si tantest qu'il puisse v en avoir un — interdit de bombarder les infir-merie .;. Aussi serait-un tenté d'être à votre égard d'une parfaitegentillesse afin que vous trouviez clans la litanie des propostenus à la tribune le réconfort qui vous ferait certainementoublier les regrets que vous ne pouvez manquer de ressentiren présentant un tel budget.

    Hélas . monsieur le ministre, monsieur le secrétaire d'Etat,malgré votre amabilité, ^otite franchise et votre souci de dia-logue, il faut bien admettre que votre budget est, pour nombrede ses aspects, à l'image d'une politique de facilité et declientèle.

    Il ne s'attaque pas, en effet, au malaise que connaît l'agri-culture, niais vise simplement à en dissimuler les effets.

    Notre agriculture a connu depuis quinze ans une véritablerévolution .- Le volume des récoltes, la somme de marchandisesexportées, les améliorations des structures, ont accrédité l'imaged'une agriculture puissante, compétitive et qui constitue unatout majeur pour le rétablissement de la balance commercialede la France.

    Il est exact que les agriculteurs, par leur traitai], mais aussigrâce au soutien de la collectivité, ont amélioré considéra•blement leurs techniques de production, accru leurs rendements,rapproché, pour des productions où la France était la plus enretard, leur niveau de compétitivité de celui de leurs parte-naires de la Communauté économique européenne.

    Mais cela s'est fait au prix d'un endettement considérable quiapparente l'agriculture à une industrie lourde et d'une dépen-dance sans cesse accrue vis-à-vis des industries ou services situésen aval . Je pense en particulier au stockage et à la trans-formation qui sont aux mains d'intérêts privés.

    En devenant plus puissante et plus productive, l'agriculturefrançaise est devenue plus vulnérable. De ce fait, après l'infla-tion qui s'est emballée depuis 1974 et qui a renchéri les coûtsde production dans des proportions insupportables, les condi-tions climatiques défavorables ne pouvaient que la toucher deplein fouet.

    Mais, dès la deuxième partie de la décennie 1960, lesdifficultés actuelles de l'agriculture française existaient engerme . Une croissance peu économe des moyens de produc-tion devait entrainer le déclin de la rentabilité.

    Ainsi que l'a noté M. Fouchier dans son rapport sur lea collectif s, le taux d'augmentation de la production entre1967 et 1975 est intérieur en volume au pourcentage de haussedes coûts . La même remarque vaut pour les terres dont lesprix ont doublé entre 1970 et 1976.

    Les handicaps de l'agriculture française apparaissent mieuxdu fait de ses difficultés.

    Elle n'a pas encore atteint pour toutes les productions leniveau de compétitivité qui lui permettrait de se mesurer àses principaux concurrents .

    -Malgré la diffusion du progrès technique en élevage, d'impor-

    tants progrès restent à faire en matière de sélection, d'identi-fication et surtout de prophylaxie du cheptel.

    Les pertes ou les insuffisances de rendement pèsent lour-dement sur les éleveurs . La survie des moins productifs d'entreeux implique qu'ils obtiennent un prix aussi proche que possibledes niveaux d'orientation arrêtés à Bruxelles.

    (ai, certains de leurs concurrents, au sein de la Commu-nauté ec .: :.'mique européenne, peuvent s'accomoder de niveauxde prix net'cment inférieurs et n'exigent pas de leurs pouvoirspublics un soutien des prix du marché à un niveau aussiélevé que dans' notre pays où cela est indispensable pour lasurvie du plus grand nombre des exploitations.

    Par ailleurs, la vocation exportatrice de l'agriculture françaiseest beaucoup moins affirmée qu'il n 'y parait. L'ensemble dusolde créditeur de nos échanges agro-alimentaires est inférieuraux seuls excédents de nos exportations de céréales . Le secteurdes viandes est déficitaire malgré l'importance des exportationsde bovins vivants, d'ailleurs quasi exclusivement concentréessur l'Italie dont la situation économique donne beaucoup desoucis aux producteurs.

    C'est un problème dont je vous ai entretenu hier, monsieurle ministre, en commission élargie, lorsque j'ai évoqué les aidesaux bâtiments d'élevage.

    Il est surprenant d'ailleurs que dans un pays dont le potentielde production agricole est aussi développé que celui de la 'France, les échanges de produits transformés soient déficitaires.En fait, si l 'on excepte le secteur des céréales et bien entenducelui des boissons et alcools, les exportations nécessitent un

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    montant substantiel . de restitutions et portent de préférencesur des produits bruts ou peu transformés. Plus grave, ils'agit trop souvent non pas de courants commerciaux stablesmais de la liquidation d'excédents conjoncturels, opérationdans laquelle excellent certains professionne l s habi l es à tirertoutes les ficelles de la réglementation communaux re.

    Autre faiblesse, celle des structures. L'exode rural a été enFrance l'un des plus faibles de la Communauté . Ce fait peutparaître paradoxal si l'on se souvient que la population activeagricole était parmi les plus importantes. Il s'est pourtant traduitpar des tensions sociales difficiles à supporter, ries déracinementset des souffrances, en définitive par un échec social.

    En effet, l'Etat s'est montré incapable de prévoir les activitésde relais qui auraient permis aux agriculteurs quittant la pro .fession — un toutes les trois minutes, 150 000 par an — detrouver sur place ou à proximité de leur résidence des emploisdu secteur secondaire ou du secteur tertiaire.

    Faute d'une politique d'aménagement du territoire digne dece nom et parce que le processus de la modernisation de l'agri-culture a été mal maîtrisé, faisant la part trop belle auxindustriels situés en amont, au détriment des exploitants agri-coles, on se trouve devant une agriculture en crise, dans unmonde rural où les zones purement agricoles sont en voie dedésertification et où les équipements collectifs sont dramati-quement en retard.

    Y a-t-il à court ternie une solution au problème posé parles difficultés actuelles de l'agriculture et la perte de substancedu monde rural ?

    La commission de la production et des échanges, à laquellej'appartiens, a formulé une série de propositions qui s'inscriventdans la . lo g ique de la politique agricole définie au début dela précédente décennie et étendue par la Communauté éco-nomique européenne à l'ensemble du Marché commun à neuf.

    Mais cette politique agricole commune est en grand danger enraison des évolutions aberrantes des conjonctures et desmonnaies de certains des pays membres. Quant aux principesde la politique agricole définis en 1960 et 1902, on n'en retrouveplus guère trace dans votre budget caractérisé par la partprépondérante des dépenses qui démontrent le poids du passéau détriment de celles qui préparent effectivement l'avenir.

    En conclusion, la situation actuelle de l'agriculture impliquede toute évidence des solutions qui s'inspirent d'une autre logiquetout en respectant le cadre du Marché commun . Ces solutionssont celles que nous proposons et qui, loin d'être inspirées parle collectivisme, dont notre président-écrivain voudrait faireun épouvantail, sont dictées par le souci d'arracher les exploi-tations familiales à la double dépendance des industries situéesen amont et en aval et, en leur assurant un revenu décent, deleur permettre de retrouver confiance . (Applaudissements surles bancs des socialistes et radicaux et des communistes .)

    M. le président. La parole est à M . Xavier Deniau.

    M. Xavier Deniau . Monsieur le ministre, je n'ai guère detemps, en cette fin de discussion, pour développer les diffé-rents points sur lesquels je voulais vous interroger . Je vais doncles évoquer très brièvement.

    Tout d'abord, nous avons constaté, au cours de la crise due àla sécheresse que vient de traverser l'agriculture française, lepeu de recours que vous aviez .. .après des autorités européennes.Vous nous avez d'ailleurs écrit que vous aviez été contraint par denombreux messages téléphoniques de ménager la susceptibilitédu commissaire européen à l'agriculture . C'est une manièreaimable et diplomatique d'évoquer les difficultés que vous avezrencontrées.

    Il est donc nécessaire que nous prenions conscience, que lesagriculteurs prennent conscience que face à une situation diffi-cile nous ne pouvons compter que sur la solidarité nationaleet sur notre propre volonté.

    Nous constatons tous les jours, en ce qui concerne le marchédu lait notamment, que des intérêts qui pour nous sontmajeurs — ceux de conserver un cheptel convenable et unapprovisionnement en lait national — se heurtent à des volontésdifférentes sur le plan européen. Nous constatons également àpropos de la Grande-Bretagne que des situations d'ordre pure-ment monétaire peuvent influer de façon extrêmement gravesur la répartition des charges et donc des efforts et, par suite,des prestations européennes dans l'ensemble des pays de laCommunauté.

    Cela n'a que des rapports non pas lointains mais peu spéci-fiques avec la situation de l'agriculture des Neuf. Nous sommessujets à des changements de conjoncture qui peuvent être aussibien monétaires, économiques et liés tant à la politique généralequ'à la politique agricole proprement dite .

    Il serait nécessaire, monsieur le ministre, que l'opinion publiquefrançaise tout entière recouvre une certaine confiance dans lasolidarité europcenne en matière agricole et dans le fonctionne-ment: des mécanismes européens.

    Je voudrais aussi vous interroger sur l'application du pro-gramme européen en matière de plan de développement . Vousavez d'ailleurs plis cet été un décret à ce sujet . L'an dernier,je vous avais exprimé mes inquiétudes en vous indiquant qu'ilme paraissait peu souhaitable de créer dans chaque canton unou deux seigneurs de l'agriculture, privilégiés et pourvus demoyens très importants grâce à des décisions prises à Bruxelles.

    Comment ont été faits les choix, comment ont été désignésles bénéficiaires et quel est le fonctionnement de cette insti-tution ?

    La crise que nous avons traversée a eu le mérite de faireprendre conscience à certains agriculteurs français de la néces-sité de la solidarité nationale et de la nécessité de la fairecomprendre à l'ensemble. de la nation . Vous vous y êtes attaché.Nous aussi, chacun dans nos circonscriptions. Cette crise aégalement fait apparaitre l'extrême fragilité d'un système fondésur une aide aux produits qui, lorsque ceux-ci disparaissent,laisse les hommes démunis.

    Nous devrions engager prochainement une grande réflexionsur les quanta, sur les aides directes à l'installation et à laproduction qui se substitueraient à celles accordées aux produits.Je vous remercie, monsieur le ministre, de m'approuver. Nousne pouvons pas continuer ainsi.

    Je serais heureux que vous puissiez faire le point sur lesproblèmes que je viens d'évoquer car ils intéressent l'ensemblede notre agriculture. (Applaudissements sur plusieurs bancs del'union des démocrates pour la République, des républicainsindépendants et `des réformateurs, des centristes et des démo-crates sociaux .)

    M. le président. La parole est à M. Baimigère pour présenterl'intervention de M. Rage qui, pour des raisons impératives, nepeut être présent.

    M . Paul Balmigère . Je vous remercie, monsieur le président,de me permettre de donner lecture de l'intervention que devaitprésenter mon collègue, M. H.,ge.

    Depuis 1968, le budget de l'enseignement agricole ne cesse dediminuer en francs constants, si l'on excepte l'année 1975. Cesera encore le cas en 1977 . La « priorité aux investissementsintellectuels a que l'on prônait il n'y a pas si longtemps auministère de l'agriculture est donc, une fois de plus, remiséeaux oubliettes sous prétexte de l'austérité et du profit desmonopoles qui s'en nourrissent.

    .

    Les dépenses ordinaires, en effet, sont tout juste maintenuesen francs constants ; en revanche, les dépenses en capital dimi-nuent de 20 p . 100 en francs courants.

    Dans la pratique, que va-t-il en résulter ? En premier lieu, desproblèmes accrus pour l'enseignement agricole, le blocage desinvestissements en général et, pour les familles, des charges pluslourdes.

    Les charges seront plus lourdes pour les familles. En effet,les bourses de l'enseignement agricole vont, cette année encore,perdre une partie de leur pouvoir d'achat . Le rattrapage sur leministère de l'éducation, pour ce qui concerne le cycle court,n'aura pas lieu ; au contraire, l'écart risque de s'accroître enfonction de l'accroissement du nombre des boursiers . Dans ledomaine des transports scolaires, toujours en tenant compte de .I ' accroissement des effectifs transportés, les charges resterontélevées, presque le double de ce qu'elles sont dans le cadre duministère de l'éducation.

    Ces restrictions budgétaires vont également accroître dansdes proportions considérables les difficultés des établissementsd'enseignement agricole . Les créations de postes sont sanscommune mesure avec les besoins, pour ne pas dire inexistantes :aucune création pour l'enseignement technique, 20 pour l'ensei-gnement supérieur . A titre de comparaison, l'administration aestimé ses besoins à 650 postes pour 1977.

    Si l'on se fonde sur les normes de l'éducation net; Inale, c'est2 000 postes qu'il aurait fallu créer . C'est ainsi que le nombred'élèves par classe, plus élevé que dans l'éducation nationale,où la situation n'est déjà pas brillante, va continuer à s'ac-croître.

    Les équipements vont être également durement touchés puisqueles autorisations de programme sont en très nette diminution.Notons également que ces crédits seront inférieurs de plus demoitié aux besoins minima estimés par l'administration.

    Le nombre insuffisant des créations de postes a entraîné, en1976, la fermeture de vingt et un centres de formation profes-sionnelle agricole . Même l'enseignement privé, pourtant favoriséen d'autres temps, est touché .

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    Faut-il s'étonner, dans ces conditions, que, chaque année, sousun prétexte ou sous un autre, vous retardiez la parution d'unecarte scalaire, qui constituerait pourtant un élément indispen-sable pour la planification de l'enseignement agricole ?

    Est-il be . oin é g alement de préciser que nous avons raisonquand nous dénonçons la volonté de ce gouvernement de faire del'enseignement agricole un enseignement au rabais, avec desprogrammes volontairement différenciés de ceux des autresbranches de l'éducation nationale et une orientation toujoursplus poussée vers les cycles courts ? En fait, le Gouvernemententend soumettre cet enseignement aux visées néfastes du patro-nat pour qui il ne s'agit que de former des hommes capablesde produire au moindre coût.

    La politique que nous préconisons se situe aux antipodes detelles orientations . Nous vouions, quant à nous, garantir auxjeunes agriculteurs et aux techniciens une connaissance conformeaux impératifs des techniques modernes, tout en leur donnantles moyens de développer les connaissances indispen e ebles àl'épanouissement de tout individu.

    Pour cela, il faut dégager les moyens nécessaires, c'est-à-direfaire exactement l'inverse de ce que fait le Gouvernement actuel.

    J'aborderai brièvement le problème de la recherche agrono-mique. et notamment de l'I. N . R . A . Ce projet de budget prévoitune augmentation de 24 p . 100 des autorisations de programmepour les moyens de fonctionnement, les dépenses en capitaln'augmentant que de 4 p . 100 seulement.

    Il s'agit, en fait . de rattraper toute une série de budgets catas-trophiques . Or ce budget ne permettra pas, dans l'immédiat, decombler les retards accumulés, faute de crédits dans des domainescomme l'irrigation, les engrais, les pesticides, les protéagineux.

    Cependant, et pour reprendre le débat engagé hier soir parM. Antagnac . député socialiste, les syndicats de l'I . N . R . A. nousont soumis le problème suivant . Sur les 97,4 millions de francsd'augmentation des dotations de fonctionnement, 71,6 millions neconcerneront que des ajustements des salaires du personnelpour 1976, transférés du budget des charges communes . II nes'agit que de la traduction de décisions passées du Gouverne-ment . Il reste 13 .8 millions de francs pour la rémunération des140 emplois créés, et 12 millions de francs pour faire faceà l'actualisation des salaires du personnel. Pourtant, pour cedernier poste, un rapide calcul fondé sur les 6,5 p . 100 d'aug-mentation des prix en 1977 prévus par le plan Barre, dont onconnaît le caractère optimiste, montre que ce sont 22 millionsde francs qui seraient nécessaires.

    Dans ces conditions, on peut se demander si l'on envisagevraiment de créer les 140 postes prévus dans ce projet de budget.Va-t-on vers des licenciements ? Qui cherche-t-on à tromper avecune telle présentation ? Il faut en outre signaler que cela consti-tuerait un précédent grave pour les établissements publics àcaractère administratif, dont le paiement du personnel ne seraitplus assuré d'une année sur l'autre.

    Je souhaite, monsieur le ministre, que vous nous apportieztous les éclaircissements nécessaires à ce sujet . (Applaudisse .nients sur les bancs des communistes et des socialistes et radicauxde gauche .)

    M . le président . La parole est à M . le secrétaire d'Etat auprèsdu ministre de l'agriculture.

    M . Pierre Méhaignerie, secrétaire d'Etat . Monsieur le président,mesdames, messieurs, je vais m'efforcer de répondre aussibrièvement que je le pourrai à trois séries de questions concer-nant les productions et les revenus, les équipements et, pluslargement, la préparation de l'avenir et enfin la politiquesociale.

    A MM. Weisenhorn et Corrèze qui, comme beaucoup d'autresorateurs, ont posé le problème du revenu des agriculteurs et laplace de ceux-ci dans la collectivité, je demanderai : quelle meil-leure réponse donner à ceux qui parlent d'agriculteurs et d'agri-culture assistés ou de secteur soutenu que de leur rappelerles faits ?

    Ces faits, quels sont-ils ?

    En vingt ans, la France est devenue le deuxième exportateurmondial de produits agricoles . Elle e pu assurer — et peu de paysau monde l'ont fait — la sécurité de ses approvisionnements,même au cours d'une année difficile comme celle que nousvenons de connaître, et au cours de laquelle la production ebaissé de plus de 30 p . 100 dans certains secteurs .

    -

    Ajoutons qu'en vingt-cinq ans, comme le rappelait M . Daillet,les dépenses alimentaires qui représentaient, en 1950, 45 p . 100du budget des ménages n'en représentent plus, aujourd'hui, que28 p . 100 . Une évolution en ce sens était certes normale, puisque

    le pouvoir d'achat des Français s'est amélioré, mais son rythmeélevé montre une fois de plus l'importance de l'apport de l'agri-culture française à la collectivité.

    MM. Corrèze, Boudet, Guermeur et Billoux se sont fait l'échodu voeu légitime des agriculteurs, qui préféreraient des prixplus rémunérateurs et moins de subventions.

    Pour apprécier ce problème de l'évolution des prix par rapportaux coûts de production, il faut avoir le courage de se référera l ' évolution des quinze dernières années, car il est difficiled'évaluer le ra pport des coûts et des prix sur une courtepériode.

    Qu'en est-il exactement ?

    Au cours du VI' Plan, les prix agricoles ont augmenté annuelle-ment de 7,8 p . 100 en moyenne, cette progression étant de8 .4 p. 100 pour l'indice des prix, et de 11 p. 100 pour les pro-duits industriels nécessaires aux exploitants agricoles.

    Alors que l'augmentation des prix des produits industrielsavait, pendant douze ans, été inférieure à celle des prix agri-coles, l'année 1974 a marqué une rupture . Cette année-là, eneffet, pour les raisons que vous connaissez, la croissance del'indice des produits industriels nécessaires aux exploitants agri-coles atteignait 24 p . 100, tandis que, dans le même temps, lesprix agricoles n'augmentaient que de 5 p . 100.

    Les difficultés nées de cette situation, qui n'est pas propre àl'agriculture française, n'ont pu être surmontées en France quepar le recours à des aides directes qui ont représenté, en 1974 eten 1975, plus de 5 p. 100 du revenu agricole et qui ont permis,au cours du VI" Plan — ces chiffres ne sont pas contestés — unaccroissement annuel du revenu agricole de 3,5 p . 100, tauxlégèrement inférieur à celui des salaires, mais qui représente toutde même une amélioration du pouvoir d'achat.

    MM. Benoist, Tissandier, Bertrand Denis, Masson, Guermeur,Rigout et Raynal ont traité de l'aide aux bâtiments d ' élevage etde l'endettement de l'agriculture française.

    Cet endettement est légèrement inférieur à celui de l'agricul-ture allemande et pratiquement égal à celui des Pays-Bas et dela Belgique. En fait, il pose le problème du rachat du capitalfoncier ou d ' exploitation à chaque génération.

    Aussi, plus que de l'endettement, je voudrais traiter de l'obli-gation d'épargne importante faite aux agriculteurs, obligationqui donne l' impression, surtout au cours des dix premières années,que le revenu qui reste à la disposition de la famille est résiduelpar rapport au revenu total d'exploitation.

    En tout état de cause, ceux qui suivent avec attention lecompte rendu des discussions de Bruxelle savent que la Franceest le pays de la Communauté qui défend avec le plus de forceune politique tendant à faire en sorte que les prix agricolessuivent' de près l'évolution des coûts de production.

    Personne ne peut nier les résultats que nous avons obtenus àBruxelles en ce qui concerne la fixation des prix agricoles,notamment pour l'élevage.

    M. Rigout a dénoncé les écarts de revenus qu'il juge excessifs.Il ne faut pas oublier, cependant, que la commission des comptesde l'agriculture fait intervenir, dans les résultats finaux, les450 000 exploitations à temps partiel ou de retraite . Lorsqu'onparle de 400 000 ou 450 000 agriculteurs pauvres il s'agit, le plussouvent, d'agriculteurs à temps partiel ou en retraite . Il convientdonc de tenir compte de ces éléments lorsqu'on compare leschiffres français à ceux des autres pays européens.

    M . Bonnet avait déclaré l'année dernière que 'nous étions déci-dés à aller très loin dans le domaine de la lutte contre la bru-cellose. Or M . Rigout a affirmé que les moyens financiers dégagésà cet effet seraient en réduction de 10 p . 100 en 1977 par rap-port à 1976. Cela est inexact. En effet, si l'on tient compte descrédits qui seront inscrits — après la conférence annuelle —dans le projet de loi de finances rectificative qui vous serasoumis dans quelques semaines et de ceux qui figurent déjà dansle collectif voté pour pallier les conséquences de la sécheresse, lescrédits consacrés à la politique d'éradication de la brucelloseseront, en 1977, en progression de 56 p . 100 puisqu'ils attein-dront 297 millions de francs contre 190 millions 1976.

    M. Marcel Rigaut . Je parlais de l ' action sanitaire en général,et pas seulement de la brucellose.

    M . Pierre Méhaignerie, secrétaire d'Etat. Le problème de labrucellose est le plus important, mais, en tout état de cause,• lescrédits consacrés à l'identification et à la sélection seront enlégère progression l'année prochaine, si l'on tient compt , destextes qui seront soumis au Parlement au cours des prochainessemaines.

    MM. Haussherr et Bertrand Denis se sont préoccupés de lacoordination et de l'orientation et des différents fonds : Forma,Onibev et autres offices.

  • ASSEMBLEE NATIONALE -- 1" SEANCE DU 5 NOVEMBRE 1976

    La cohérence des actions et leur bonne insertion dans le cidrecommunautaire sont facilitées par la réflexion et la concertationmenées au sein du conseil supérieur d'orientation des productionsagricoles et de gestion des marchés.

    Il convient d'éviter, là comme ailleurs, la création d'unénorme office central d'intervention qui , en raison de son gigan-tisme et de la rigidité de ses structures, répondrait mal auxproblèmes posés et alourdirait probablement les coûts.

    MM . Weisenhorn et Beucler se sont inquiétés des conséquencesde la sécheresse et des délais de parution des textes destinésà venir en aide aux agriculteurs.

    Je puis leur donner à cet égard tous apaisements : le décretpris en application de la loi de finances pour définir lesprocédures déconcentrées de répartition des aidas directes seraexaminé par le Conseil d'Etat dès mardi prochain.

    Par ailleurs, le décret portant de quatre à sept ans la duréedes prêts calamités octroyés au titre de la sécheresse est paruau Journal officiel du 4 novembre.

    Les observations présentées par les organisations profession-'ladies au sujet du montant de ces prêts nous ont conduitsà envisager des modifications du barème de référence des prêtscalamités, et le ministère de l'agriculture étudie actuellement,en liaison étroite avec la profession, les modalités qui permet-traient d'améliorer la situation des éleveurs demandeurs depréts.

    Cela dit, il n'est pas vrai, monsieur Rigout, que les prêtsne vont qu'aux exploitants les plus importants.

    Depuis quelques mois, les prêts bonifiés sont plafonnés . Ontété privilégiés . au cours des deux dernières années, les prêtsaux jeunes agriculteurs, qui sont plafonnés à 200 000 francs parexploitation . et les prêts d'élevage, qui sont p lafonnés à 250 000francs par éleveur . Leur montant total est passé en cinq ansde 200 millions de francs à 1 600 millions de francs en 1976.

    Pour la production porcine . les prêts sont supprimés au-dessusd'une certaine taille d'exploitation.

    Enfin, au cours des deux dernières années, la croissance desprêts bonifiés a. été de 10,5 p . 100 par an

    Quant aux plans de développement, ils ne constituent nulle-ment une porte fermée pour les producteurs ; c'est au contraireune porte supplémentaire qui s ' ouvre, et cela sans remettre encause les prêts traditionnels, notammènt les prêts d'élevage.

    Je puis assurer à ceux qui ont posé ce problème que, si l'onobserve la situation dans les départements qui ont mis enapplication ces plans de développement, dans l'Ouest, par exem-ple, on constate que ce sont les . agriculteurs possédant dequinze à trente hectares qui bénéficient le plus de ces planset que, dans 80 p . 100 des cas, ceux-ci sont essentiellementdestinés à l'élevage.

    J'ajoute que les agriculteurs qui sont exclus du bénéfice deces plans le sont, clans 80 p . 100 des cas, non en raison dela surface insuffisante cle leur exploitation, mais parce qu'ilsdisposent d'un revenu se situant au-dessus du niveau de réfé-rence fixé par les textes de Bruxelles.

    Je puis vous assurer que nous ne laisserons pas a déraper oces plans de développement . Nous ne voulons pas d'un monstreadministratif. Il faut, en effet, éviter à tout prix d'avoir àattendre dix-huit mois un plan de développement. Nous nevoulons pas davantage d'un monstre d'iniquité : les plans dedéveloppement doivent aider en priorité les agriculteurs qui enont le plus besoin.

    M . Xavier Deniau . L'opinion agricole n'est pas suffisammentinformée des conditions d'attribution!

    76'-1

    M . Pierre Joxe. Mais quand elle est informée, elle comprendsite!

    M . Pierre Méhaignerie, secrétaire d'État . Monsieur Deman,je me suis rendu dans le Massif central et dans la régionAuvergne pour rencontrer l'ensemble des responsables du finan-cement de l'agriculture, et plus particulièrement les dirigeantsdu Crédit agricole . J'ai également l'intention de faire un voyageen Vendée pour constater, dans ce département témoin, lesrésultats obtenus par les plans de développement, instrumentsde justice et d'amélioration des exploitations qui en ont le plusbesoin.

    Contrairement à ce que craint M. Fouqueteau, les actionsde régularisation et de soutien des . marchés auxquelles je viensde faire allusion ne sont nullement exclusives d'un effort demodernisation de l'agriculture.

    La nécessité de cette modernisation a particulièrement retenul'attention de MM. Guermeur . Boucler, Darnis, Richard, Brochard,Maurice , Legendre, Boude ; :, Jacques Blanc, César, Ehm, Cattin-Bazin, Girard, Corrèze et Godefroy .

    Le coup de frein donné en 1977 à certains crédits d'équipementn'a en rien changé, ainsi que l'a fait remarquer M. Guermeur,l'orientation générale . Il ne s'agit pas d'un virage, et je ledémontrerai par quelques exemples.

    Certains orateurs ont déclaré que la faiblesse des créditsd'équipement pouvait conduire à une remise en cause de notrecompétitivité et du développement de nos exportations. Maisla modernisation de l'agriculture s'effectue — et les agriculteursle savent bien — par le biais des prêts bonifiés plus que parcelui des subventions . Or, vous connaissez la croissance desprêts bonifiés dans ce domaine et plus particulièrement enfaveur des secteurs en difficulté.

    La modernisation de l'agriculture s'accomplit donc grâce àla croissance des prêts bonifiés. Mais la politique de l'élevage,notamment par les plans de prophylaxie mis en place, y contribueaussi. La stagnation en francs courants des crédits destinés auxbâtiments d'élevage est largement, compensée par l'octroi debonifications d'intérêts . Je puis vous assurer qu'aujourd'hui,l'aide aux bâtiments d'élevage est plus importante lorsqu'ellepasse par le canal de prêts' bonifiés à 5,5 p . 100 qu'elle nel'était il y a quatre ans, lorsqu'elle passait par le canal deprêts à 5 ou 4,5 p . 100 et de subventions -

    M. Gabriel de Poulpiquet. Les agriculteurs ne les ont pasreçus !

    M . Pierre Méhaignerie, secrétaire d 'Etat . Or je rappelle queles prêts bonifiés pour l'élevage sont passés de 250 à 700 mil-lions.

    M. de Poulpiquet a posé le problème de l'enveloppe de subven-tions pour les bâtiments d'élevage . Ces subventions sont désor-mais réservées aux exploitants des zones de montagne et deszones défavorisées et aux agriculteurs bénéficiaires d'un plande développement . Dans l'Ouest, qui continue à en bénéficier, ilest vrai, monsieur de Poulpiquet, et nous aurons l'occasion d'enre parler, qu'il y a eu un retard dans la transmission de cessubventions et de certains crédits de paiement.

    M. Louis Maisonnat . Pour les zones de montagne aussi !

    M . Pierre Méhaignerie, secrétaire d'Etat . A ce sujet, je puisvous indiquer que soixante-sept millions de crédits de paiementont été débloqués il y a quinze jours et que la grande majorité aété attribuée aux zones de montagne.

    M . Louis Maisonnat. Il y a quinze jours seulement!

    M . Pierre Méhaignerie, secrétaire d'Etat. Pour les adductionsd'eau, la dotation sera la même qu'en 1976, compte tenu descrédits provenant du fends n p tional pour le développement desadductions d'eau.

    Pour l'hydraulique, la diminution des crédits n'est pas de15 p . 100 comme on l'a prétendu, mais de 3,3 p . 100 seulement(lu fait de la suppression de la charge de la C . N . A. R. Nousespérons que la proposition que M. Christian Bonnet a présentéeà Bruxelles sera acceptée et qu'une aide du F. E. O ._ G . A.permettra d'accroître fortement les crédits d'hydraulique.

    Les dotations budgétaires allouées aux S. A. F . E . R . doiventpermettre de compenser, à concurrence de 2 p. 100, les fraisd'intervention de ces organismes et de réaliser certains travauxd'équipement des exploitations . Mais leur activité est beaucoupplus conditionnée par les dotations en prêts bonifiés du créditagricole, qui permettent le financement des achats de terres, quepar cette en'-eloppe budgétaire.

    A M. Bnadon . qui a posé le problème de l'aménagement del'Authion . j'indique que ce programme est traité comme uninvestissement hydraulique de catégorie V et qu'il recevra en1977 une dotation budgétaire spécifique suffisante.

    MM . Guermeur, Maisonnat et Pranchère ont évoqué la questionde l'indemnité spéciale de montagne et l'action engagée enfaveur de la . montagne.

    Cette action, menée depuis deux ans, n'est qu'un dès élémentsde le politique de correction des inégalités et des handicapsrégionaux . L'action essentielle est celle du B. A. P. S . A. qui,je le rappelle, consent en faveur des agriculteurs des zones demontagné un effort important, puisque souvent le rapport coti-sations-prestations sociales y est inférieure à dix.

    En 1977, monsieur Guermeur, l'indemnité spéciale de montagnesera revalorisée de 14 p. 100 en moyenne car obligation nousest faite d'appliquer le barème communautaire.

    M . Guy Guermeur. Très bien !

    M . Pierre Pranchère . Monsieur le secrétairemettez-vous de vous interrompre?

    M . Pierre Méhaignerie, secrétuire d'État . Je vous en prie.

    M . le président. La parole est à M. Pranchère, avec l'autori-sation de M . le secrétaire d'Etat .

    per-d'Etat, me

  • 7612

    ASSEMBLEE NATIONALE — 1'° SEANCE DU 5 NOVEMBRE 1976

    -M. Pierre Pranchère . En ma qualité de rapporteur spécial dela commission des finances j'ai reçu des services du ministre del agriculture, à l'une de mes questions, la réponse suivante :c La définition des zones de montagne et des zones défavoriséeshors 'nuntagne a fait l'objet du décret n" 76-395 du 28 avril1976 . La zone de montagne délimitée par l'arrêté du 28 avril 1976,en application de ce décret, vient s'ajouter à celle délimitée parle décret du 20 février 1974 . Les dispositions du décret n" 74-134du 20 février 1974 sont applicables dans l'ensemble de cettezone.

    Je .pose à nouveau la question qui a été présentée hier àplusieurs reprises, notamment par M. Maisonnat et par moi-même : Prendrez-vous les mesures financières concrètes qu'im-plique cette interprétation ? C'est-à-dire, avez-vous l'assurance quele F . E . O . G. A. remboursera bien les deux années dues, 1975et 1976. pour qu'en 1977 l'indemnité spéciale de montagne soitverrée aux communes qui unt été classées en zone de montagnele 28 avril 1976 ?

    M . Pierre Méhaignerie, secrétaire d'Etat . Monsieur Pranchère,j'allais justement en venir à cette question.

    L'indemnité spéciale de montagne sera versée pour la totalitéde la zone ayant reçu l'accord de la Communauté — y comprispour la partie qui a fait l'objet de l'extension — à la fois autitre de l'année 1976 et au titre de l'année 1977 . contrairementà ce que vous pe osiez.

    M. Pierre Pranchère. Nous en prenons acte.

    M. Emmanuel Hamel . Nous l'avions demandé avant vous !

    M. Pierre Méhaignerie, secrétaire d'Etat . J'en arrive aux autresactions qui préparent l'avenir, et plus particulièrement à celleque nombre d'intervenants ont considéré comme la priorité :l'enseignement.

    Ce sujet a été abordé par MM . les rapporteurs . notammentMM. Rohel, Bertrand Denis, Tissandier et Briane, ainsi quepar MM. Guermeur, Jacques Blanc, Brochard, Raynal, Darnis etGodefroy.

    Nous effectuerons, en faveur de l'enseignement, un doubleeffort.

    D'abord, nous procéderons à un redéploiement, à concurren•de un million de francs, du budget du ministère de l'agric ..ture . Ensuite — et par là nous répondrons aussi aux voeux deMM . les sénateurs Tinant et Boscary-Monsservin — nous dépose -rons. au cours de la deuxième lecture, un amendement tendantà accroître de onze millions de francs les crédits prévus pourl'enseignement agricole p ublic et privé. (Applaudissements surles bancs des réjormateurs, des centristes et des démocrafedsociaux, de l'union des démocrates pour la république et desrépublicains indépendants.)

    Quelques questions particulières maintenant.Monsieur Brochard, dès le début de 1977, des crédits permet-

    tront l'achèvement du centre de Bressuire actuellement enconstruction.

    M . Rohel a abordé le problème des bourses et relevé les dis-parités qui persistent entre les bourses du cycle court del'enseignement général et celles de l'enseignement agricole.Chacun connait l'importance .du taux des bourses pour les agri-culteurs . Le budget de 1977 permettra de ramener l'écart de18 francs à 13 .50 francs.

    Certains orateurs ont envisagé le rattachement de l'enseigne-ment agricole au ministère de l'éducation ou au secrétariat d'Etataux universités . C'est un vieux débat . Pour p t psieurs raisons,nous restons persuadés que l'efficacité et la qualité de l'ensei-gnement agricole sont pour le intimera parfaitement ganranties.par le ministère de l'agriculture . Cet enseignement constituepour nous une priorité essentielle ! (Applaudissements site- lesbancs réformateurs, des centristes et des démocrates se .'aix,de l'union des démocrates pour la république et des républicainsindépendants .)

    MM . Antagnac et Girard ont parlé de l'I . N . R. A . Mais M. leministre a rappelé que, sur trois budgets successifs, 1'I . N . R . A.aura vu sa subvention croître à des taux annuels supérieurs à20 p . 100. Un tel taux de progression n'avait pas été enregistrédepuis 1964 !

    MM . Capdeville . Cattin-Bazin, Guermeur, Girard et Briane ontévoqué les difficultés de l'A. N . D. A . Je puis leur annoncer quepour l'exercice 1976, les dispositions nécessaires ont été prisespour récupérer les taxes non perçues sur les betteraves et pouranticiper la collecte de la campagne 1976. 1977. Le ministère del'économie et des finances fera de son côté le nécessaire pourrécupérer les taxes sur les viandes non perçues en 1976.

    Nous avons, par ailleurs, engagé avec les organisations pro-fessionnelles un effort de réflexion sur l'ensemble des servicesactuellement apportés aux agriculteurs par les différents orga-

    nismes, que ce soit l'A . N . D . A ., les chambres d'agriculture oules organismes économiques, de façon à voir quels moyens sontnécessaires pour donner une plus grande efficacité à ces services.Nous réfléchissons au problème des taxes parafiscales sur lesactivités du secteur tertiaire qui entoure l'agriculture ; il nefaudrait pas, en effet, que l'évolution de certaines taxes provoquechez les agriculteurs des réactions négatives.

    MM. Raynal et Masson ont abordé le problème de la dotationaux jeunes agriculteurs . Dans ce domaine, la France consentun effort financier considérable, qui n'a peut ainsi dire pasd'équivalent en Europe.

    M. Mare Masson . C'est vrai.

    M . Pierre Méhaignerie, secrétaire d'Etat. Effort financier consi-dérable, disais-je . La dotation, en effet, représentait 8 mil-lions de francs en 1973, 24 millions de francs en 1974 et 100 mil-lions de francs en 1976 ; elle sera de 165 millions de francsen 1977. En 1978, ce sont 240 millions de francs qui serontnécessaires.

    Vous souhaitez, monsieur Cattin-Bazin, la revalorisation del'indemnité viagère de départ. Etant donné le nouveau méca-nisme d'attribution de cette indemnité et l'importance primor-diale de cette attribution entre soixante et soixante-cinq ans, leGouvernement a pléféré, pour éviter des distorsions entreagriculteurs, augmenter plus rapidement les avantages de vieil-.leseu accordés à tous à partir de soixante-cinq ans. Je rappelleque le montant minimum servi aux agriculteurs les plus défavo-risés est de 8 500 francs par an et par personne depuis le1'd' juillet 1976, alors qu'il était en 1968 de 2 300 francs.

    Vous avez abordé, monsieur Bertrand Denis, une questionqui revêt un caractère essentiel à nos yeux : le problème dubois et des importations de bois.

    La forêt française compte d'importantes superficies de tailliset de taillis sous futaies et offre ainsi des ressources impor-tantes en bois de trituration. Mais ces ressources sont mal utili-sées, c'est vrai. Nous devons donc développer les industries detransformation, l'industrie de la pàte à pa p ier, puisque bienque disposant de la matière première nous importons le pro-duit fini.

    La consommation annueiie ues usines a crù regulierement aucours des deinières années. Mais l'offre émanant d'une forêthétérogène et morcelée passe, hélas, par des alternances d'excé-dent et de pénurie. Nous sommes actuellement dans une phased'excédent . Il se pose, par ailleurs, un problème de prix, qui nepourront être améliorés que par un effort d'adaptation de laproduction et de la productivité.

    M . Bertrand Denis, rapporteur pour avis . Puis-je me permettrede vous interrompre, monsieur le secrétaire d'Etat ?

    M . Pierre Méhaignerie, secrétaire d'Etat . Volontiers, monsieurBertrand Denis.

    M . le président . La parole est à M . Bertrand Denis, rapporteurpour avis de la commission de la production et des échanges,avec l'autorisation de M . le secrétaire d'Etat.

    M. Bertrand Denis, rapporteur pour avis . Je vous prie dem'excu-er de vous interrompre, monsieur le secrétaire d'Etat, etje vous remercie de me le permettre.

    Je tiens à revenir sur ces bois, feuillus ou résineux, quiseraient utilisables par la papeterie française et qui viendraientse substituer aux produits d'importation , dont nous pourrionsfort bien nous passer, vous le savez.

    Dans les départements qui ont organisé la production — j'enconnais — où il y a une régulation de l'offre faite par les pro-priétaires exploitants oit par les exploitants, non seulement lecontingent garantit l'avenir de la forêt, mais souvent des pro-priétaires ou des exploitants, malgré leurs rappels, attendentpour livrer leurs boss destinés à la trituration, jusqu'à des datesqui dépassent la conservation.

    Le problème est fondamental . Si nous voulons des arbres,comme Colbert en a voulu pour la France, il faut que nous soi-gnions la forêt, que nous enlevions les mauvais bois, les menusbois et que nous puissions les employer.

    Ils ne servent plus au chauffage, mais on peut en faire dupapier . C'est une nécessité. II n'est que de voir la somme dedocuments que reçoit un parlementaire . Nous comptons surM. le ministre et sur vous-même pour poursuivre cet effort defrancisation de la production de papier.

    M. le président . Mes chers collègues, par souci de libéralisme,je vous ai jusqu'ici autorisés à interrompre M. le secrétaired'Etat.

    Mais nous ne pourrons pas continuer dans cette voie . d'autantque vous avez pu, les uns et les autres, intervenir dans la dis-cussion générale .

  • ASSEMBLEE NATIONALE — 1'0 SEANCE DU 5 NOVEMBRE 197E

    7613

    Je vous demande donc de laisser M . le secrétaire d'Etatachever son exposé sans plus l'interrompre.

    M . Pierre Méhaignerie, secrétaire d'Etat . Je terminerai, mon-sieur le président, mesdames, messieurs . par les problèmessociaux, qui ont été le quatrième des sujets les plus souventabordés.

    M. Bizet a très justement rappelé que le ministère de l'agri-culture était aussi le ministère de la santé des agriculteurs.

    MM. Bizet, Pons et Briane ont évoqué l ' exonération des coti-sations d'assurance-maladie en faveur des retraités agricolesinactifs . Sur le fend, je partage leurs préoccu p ations . Toutefois,il reste à opérer une harmonisation délicate entre les différentsrégimes de sécurité sociale.

    En effet . les salariés des régimes spéciaux — au nombredesquels figurent les fonctionnaires de l'Etat — ne sont pasexonérés et les commerçants et artisans ne le sont que souscondition de ressources . Quant aux salari és du régime général,le VIP Plan a recommandé, compte ter de difficultés finan-cières, de soumettre dans certains cas i_ .ottation les retraitésdisposant de ressources importantes . C'est dans l'ensemble dece contexte qu'il convient donc d'examiner l'importante questionposée par les trois rapporteurs.

    Mais qu'ils soient assurés que nous nous emploierons, avecle concours du Parlement, à rechercher la solution la pluséquitable en faveur des agriculteurs âgés, tout en tenantcompte cependant de la forte augmentation des prestationsaccordées aux retraités au cours de ces dernières années, ainsique de la diminution du montant des cotisations versées.

    MM. Po