jean philippe rameau

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Jean-Philippe Rameau Vous lisez un « article de qualité ». Jean-Philippe Rameau Jean-Philippe Rameau Portrait attribué à Joseph Aved (1702-1766) Musée des beaux-arts de Dijon. Œuvres principales Traité de l'harmonie réduite à ses principes naturels (1722) Pièces de clavecin avec une méthode pour la méca- nique des doigts (1724) Nouvelles Suites de Pièces de Clavecin (1728) Hippolyte et Aricie (1733) Les Indes galantes (1735) Castor et Pollux (1737) Pièces de clavecin en concerts (1741) Jean-Philippe Rameau, né le 25 septembre 1683 à Dijon et mort le 12 septembre 1764 à Paris (paroisse Saint-Eustache), est un compositeur français et théoricien de la musique. L'œuvre lyrique de Rameau forme la plus grande par- tie de sa contribution musicale et marque l'apogée du classicisme français [note 1] , dont les canons s’opposèrent avec force à ceux de la musique italienne jusque tard au cours du XVIII e siècle. Dans ce domaine, la création la plus célèbre du compositeur est l'opéra-ballet Les Indes galantes (1735). Cette partie de sa production est restée oubliée pendant près de deux siècles, mais bénéficie au- jourd'hui d'un mouvement de redécouverte. Ses œuvres pour clavecin, en revanche, ont toujours été présentes au répertoire : Le Tambourin, L'Entretien des Muses, Le Rap- pel des Oiseaux, La Poule, entre autres pièces connues, furent jouées au XIX e siècle (au piano) à l'égal de celles de Bach, Couperin ou Scarlatti. Rameau est généralement considéré comme l'un des plus grands musiciens français [1] , [2] et comme le premier théo- ricien de l'harmonie classique : ses traités d'harmonie, malgré certaines imperfections, font toujours figure de référence. 1 Biographie De manière générale, la vie de Rameau est mal connue, en particulier la première moitié, c'est-à-dire les quarante années qui précèdent son installation définitive à Paris vers 1722 [3] . L'homme est secret et même sa femme ne sait rien de ses années obscures [4] , d'où la rareté des élé- ments biographiques dont on dispose. 1.1 Naissance et enfance à Dijon Jean Rameau a débuté dans la carrière d'organiste à l'église Saint-Étienne de Dijon. Septième enfant d'une famille qui en compte onze (il a cinq sœurs et cinq frères), l'enfant est baptisé le 25 septembre 1683, jour même de sa naissance, dans la collégiale Saint-Étienne de Dijon [5] . Sa mère, Claudine de Martinécourt, fille de notaire, est issue de la petite noblesse. Son père, Jean Rameau, est organiste à l'église Saint-Étienne de Dijon, et de 1690 à 1709 à l'église pa- roissiale Notre-Dame de Dijon [6] , il semble être le pre- mier musicien de la famille [7] mais son grand-père An- toine Rameau, marguillier de la paroisse Saint-Médard, était peut-être souffleur de l'orgue au titre de sa charge [8] . Formé à la musique par son père, Jean-Philippe sait ses notes avant même de savoir lire [9] (le fait n'est pas in- habituel à cette époque et se retrouve chez beaucoup de musiciens de père en fils, cf. Couperin, Bach, Mozart). Élève au collège jésuite des Godrans, il n'y reste pas long- temps : intelligent et vif, rien ne l'intéresse en dehors de la musique [10] . Ces études générales bâclées et vite inter- rompues se ressentent par la suite dans une expression écrite déficiente [9] . Son père voudrait qu'il devienne ma- gistrat : lui-même décide d'être musicien. Son plus jeune 1

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Page 1: Jean Philippe Rameau

Jean-Philippe Rameau

Vous lisez un « article de qualité ».Jean-Philippe Rameau

Jean-Philippe RameauPortrait attribué à Joseph Aved (1702-1766)Musée des beaux-arts de Dijon.Œuvres principales

• Traité de l'harmonie réduite à ses principes naturels(1722)

• Pièces de clavecin avec une méthode pour la méca-nique des doigts (1724)

• Nouvelles Suites de Pièces de Clavecin (1728)

• Hippolyte et Aricie (1733)

• Les Indes galantes (1735)

• Castor et Pollux (1737)

• Pièces de clavecin en concerts (1741)

Jean-Philippe Rameau, né le 25 septembre 1683 àDijon et mort le 12 septembre 1764 à Paris (paroisseSaint-Eustache), est un compositeur français et théoriciende la musique.L'œuvre lyrique de Rameau forme la plus grande par-tie de sa contribution musicale et marque l'apogée duclassicisme français[note 1], dont les canons s’opposèrentavec force à ceux de la musique italienne jusque tard aucours du XVIIIe siècle. Dans ce domaine, la création laplus célèbre du compositeur est l'opéra-ballet Les Indesgalantes (1735). Cette partie de sa production est restéeoubliée pendant près de deux siècles, mais bénéficie au-jourd'hui d'un mouvement de redécouverte. Ses œuvrespour clavecin, en revanche, ont toujours été présentes aurépertoire : Le Tambourin, L'Entretien des Muses, Le Rap-pel des Oiseaux, La Poule, entre autres pièces connues,furent jouées au XIXe siècle (au piano) à l'égal de cellesde Bach, Couperin ou Scarlatti.Rameau est généralement considéré comme l'un des plusgrands musiciens français[1],[2] et comme le premier théo-ricien de l'harmonie classique : ses traités d'harmonie,malgré certaines imperfections, font toujours figure deréférence.

1 Biographie

De manière générale, la vie de Rameau est mal connue,en particulier la première moitié, c'est-à-dire les quaranteannées qui précèdent son installation définitive à Parisvers 1722[3]. L'homme est secret et même sa femme nesait rien de ses années obscures[4], d'où la rareté des élé-ments biographiques dont on dispose.

1.1 Naissance et enfance à Dijon

Jean Rameau a débuté dans la carrière d'organiste à l'égliseSaint-Étienne de Dijon.

Septième enfant d'une famille qui en compte onze (ila cinq sœurs et cinq frères), l'enfant est baptisé le 25septembre 1683, jour même de sa naissance, dans lacollégiale Saint-Étienne de Dijon[5]. Sa mère, Claudinede Martinécourt, fille de notaire, est issue de la petitenoblesse. Son père, Jean Rameau, est organiste à l'égliseSaint-Étienne de Dijon, et de 1690 à 1709 à l'église pa-roissiale Notre-Dame de Dijon[6], il semble être le pre-mier musicien de la famille[7] mais son grand-père An-toine Rameau, marguillier de la paroisse Saint-Médard,était peut-être souffleur de l'orgue au titre de sa charge[8].Formé à la musique par son père, Jean-Philippe sait sesnotes avant même de savoir lire[9] (le fait n'est pas in-habituel à cette époque et se retrouve chez beaucoup demusiciens de père en fils, cf. Couperin, Bach, Mozart).Élève au collège jésuite des Godrans, il n'y reste pas long-temps : intelligent et vif, rien ne l'intéresse en dehors dela musique[10]. Ces études générales bâclées et vite inter-rompues se ressentent par la suite dans une expressionécrite déficiente[9]. Son père voudrait qu'il devienne ma-gistrat : lui-même décide d'être musicien. Son plus jeune

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2 1 BIOGRAPHIE

frère, Claude Rameau, précocement doué pour la mu-sique finit par exercer lui aussi cette profession.

1.2 Jeunesse errante

Rameau fut organiste de la cathédrale de Clermont-Ferrand du-rant plusieurs années.

À dix-huit ans, son père l'envoie faire le Grand Tour enItalie pour y parfaire son éducation musicale : il ne va pasplus loin que Milan et encore ne connaît-on rien de cecourt séjour[11] : quelques mois plus tard, il est de retouren France. Il avoue d'ailleurs plus tard regretter de n'avoirpas séjourné plus longtemps en Italie, où « il aurait puperfectionner son goût »[3].Jusqu’à l'âge de quarante ans, sa vie est faite de démé-nagements incessants et assez mal connus : après sonretour en France, il aurait fait partie d'une troupe demusiciens ambulants, comme violoniste, jouant sur lesroutes du Languedoc et de Provence et aurait séjourné àMontpellier. Dans cette ville, un certain Lacroix l'auraitinstruit de la basse chiffrée et de l'accompagnement[12].On ne connaît rien de ce Lacroix, sauf quelques élémentsrévélés en 1730 par le Mercure de France dans lequel onlit[13] :

« Je connais celui qui dit vous l'avoir en-seigné vers votre trentième année. Vous savezqu'il habite rue Planche-Mibray à côté d'unelingère. »

et Rameau de répondre :

« Je me suis toujours fait unplaisir de publier dans l'occasionque M. Lacroix, de Montpellier,dont vous avez marqué la demeure,

m'avait donné une connaissancedistincte de la règle de l'octave àl'âge de vingt ans. »

En janvier 1702, on le trouve organiste intérimaire à lacathédrale d'Avignon (dans l'attente du nouveau titulaire,Jean Gilles)[14]. Le 30 juin 1702, il signe un contrat[15]

de six ans pour le poste d'organiste à la cathédrale deClermont-Ferrand[16].

1.3 Premier séjour à Paris

Le premier livre de clavecin manifeste l'influence de Louis Mar-chand.

Le contrat ne va pas à son terme, puisque Rameau est àParis en 1706 comme le prouve la page de titre de sonpremier livre de clavecin, le désignant comme « orga-niste des jésuites de la rue Saint-Jacques et des Pères dela Merci »[17]. Selon toute vraisemblance, à cette époque,il fréquente Louis Marchand, ayant loué un appartementprès de la chapelle des Cordeliers dont ce dernier est or-ganiste titulaire[18]. D'ailleurs Marchand était précédem-ment - en 1703 - organiste des jésuites de la rue Saint-Jacques et Rameau y est donc son successeur. Enfin, leLivre de pièces de clavecin, premier ouvrage de Rameau,témoigne de l'influence de son aîné[19]. En septembre1706, il postule à la fonction d'organiste de l'église Sainte-Marie-Madeleine-en-la-Cité laissée vacante par Françoisd'Agincourt qui est appelé à la cathédrale de Rouen[20].Choisi par le jury, il refuse finalement le poste qui est

Page 3: Jean Philippe Rameau

1.5 Installation définitive à Paris 3

attribué à Louis-Antoine Dornel[21]. Il est vraisemblable-ment encore à Paris en juillet 1708[réf. souhaitée]. Il est no-table que, après avoir exercé les fonctions d'organiste pen-dant la plus grande partie de sa carrière, il ne laisse aucunepièce pour cet instrument[22].

1.4 Retour en Province

En 1709, Rameau retourne à Dijon pour y prendre, le27 mars, la succession de son père, à l'orgue de l'égliseparoissiale Notre-Dame. Là aussi, le contrat est de sixans mais ne va pas à son terme. En juillet 1713, Ra-meau est à Lyon, comme organiste de l'église des Jaco-bins. Il fait un court séjour à Dijon lors de la mort deson père en décembre 1714 y assiste au mariage de sonfrère Claude[note 2] en janvier 1715 et retourne à Lyon.Il retourne à Clermont-Ferrand dès le mois d'avril, mu-ni d'un nouveau contrat à la cathédrale[23], pour une du-rée de vingt-neuf ans. Il y reste en fait huit ans, pen-dant lesquelles sont probablement composés ses motetset ses premières cantates ainsi que rassemblées les idéesqui donnent lieu à la publication en 1722 de son Traité del'harmonie réduite à ses principes naturels[24]. Le frontis-pice de l'ouvrage le désigne comme « organiste de la ca-thédrale de Clermont ». Ce traité fondamental, qui poseRameau comme musicien savant, il y réfléchit en fait de-puis sa jeunesse. Il suscite de nombreux échos dans lesmilieux scientifiques et musicaux, en France et au-delàdes frontières[25].

1.5 Installation définitive à Paris

Théâtre de la Foire Saint-Germain.

Rameau est de retour à Paris, cette fois de manière défi-nitive, à partir de 1722 ou au plus tard début 1723, dansdes conditions restées obscures. On ne sait pas où il ha-bite alors : il publie en 1724 son second livre de pièces declavecin qui ne porte pas l'adresse du compositeur.Ce qui est certain, c'est que son activité musicale setourne vers la Foire et qu'il va collaborer avec Alexis Pi-ron, poète dijonnais établi depuis quelque temps à Pa-ris qui écrit des comédies ou opéras comiques pour lesfoires de Saint-Germain (de février au dimanche des Ra-

Théâtre de la Foire Saint-Laurent.

meaux) et Saint-Laurent (de fin juillet à l'Assomption).Il écrit ainsi de la musique, dont il ne reste presque rien,pour l'Endriague (1723), l'Enlèvement d'Arlequin (1726),la Robe de dissension (1726). Lorsqu'il devient un com-positeur établi et célèbre, Rameau compose encore de lamusique pour ces spectacles populaires : les Courses deTempé (1734), les Jardins de l'Hymen (1744) et le Procu-reur dupé sans le savoir (vers 1758)[26]. C'est pour la Co-médie Italienne qu'il écrit une pièce qui devient célèbre,Les Sauvages, à l'occasion de l'exhibition d'authentiques« sauvages » Indiens d'Amérique du Nord (écrite pour leclavecin et publiée dans son troisième livre en 1728, cettedanse rythmée sera ensuite reprise dans le dernier acte desIndes galantes, dont l'action se déroule dans une forêt deLouisiane). C'est d'ailleurs à la foire qu'il rencontre LouisFuzelier qui en devient le librettiste.Le 25 février 1726, il épouse en l'église Saint-Germainl'Auxerrois[27] la jeune Marie-Louise Mangot qui a dix-neuf ans (lui-même en a quarante-deux). L'épouse estd'une famille de musiciens lyonnais ; elle est une bonnemusicienne et chanteuse, participe à l'interprétation decertaines œuvres de son mari. Ils auront ensemble deuxfils et deux filles. Malgré la différence d'âge et le carac-tère difficile du musicien, il semble que le ménage ait me-né une vie heureuse[28]. Son premier fils, Claude-Françoisest baptisé le 8 août 1727 en cette même église Saint-Germain l'Auxerrois[27]. Le parrain est son frère, ClaudeRameau, avec qui il conserve tout au long de sa vie de trèsbonnes relations.Pendant ces premières années parisiennes, Rameau pour-suit ses recherches et ses activités d'éditeur avec la publi-cation du Nouveau système de musique théorique (1726),qui vient compléter le traité de 1722. Alors que celui-ciétait le fruit de réflexions cartésiennes et mathématiques,le nouveau livre fait une place importante aux considé-rations de nature physique, Rameau ayant pris connais-sance des travaux du savant acousticien Joseph Sauveurqui étayent et confirment sur le plan expérimental sespropres considérations théoriques antérieures.Pendant cette même période, il compose sa dernière

Page 4: Jean Philippe Rameau

4 1 BIOGRAPHIE

Le mariage du compositeur avec Marie-Louise Mangot (1726)et le baptême de leurs enfants furent célébrés en l'église Saint-Germain l'Auxerrois de Paris.

cantate : Le Berger fidèle (1727 ou 1728), publie sontroisième et dernier livre de clavecin (1728), concourtsans succès au poste d'organiste de l'église Saint-Paul -église aujourd'hui disparue et qu'il ne faut pas confondreavec l'église Saint-Paul-Saint-Louis. C'est Louis-ClaudeDaquin qui lui est préféré par le jury dont fait partie, entreautres, Jean-François Dandrieu. Il songe enfin à se faireun nom au théâtre lyrique en recherchant un librettistesusceptible de collaborer avec lui.Antoine Houdar de La Motte aurait pu être ce librettiste.Poète établi, il connaît le succès depuis de nombreusesannées dans sa collaboration avec André Campra, AndréCardinal Destouches, Marin Marais. Rameau lui adresse,le 25 octobre 1727, une lettre restée célèbre par laquelle iltente de lui faire valoir ses qualités de compositeur propreà traduire fidèlement dans sa musique ce que le libret-tiste exprime dans son texte[29]. Houdar de la Motte nerépond pas, semble-t-il, à l'offre. Cependant il conservecette lettre que l'on retrouve dans ses papiers après samort et qui sera publiée dans le Mercure de France aprèsla mort de Rameau[30]. Mais il considère probablementque Rameau (alors âgé de quarante-quatre ans), s’il aune réputation de savant théoricien, n'a encore produitaucune composition musicale d'envergure : un quéman-deur parmi d'autres, ou un savant qui ne saurait qu'êtreennuyeux ? Comment deviner que ce théoricien abstrait,

Houdar de la Motte.

peu sociable, sec et cassant, sans emploi stable, déjà âgé,qui n'a presque rien composé à une époque où l'on com-pose jeune, vite et beaucoup, va devenir quelques annéesplus tard le musicien officiel du royaume, le « dieu de ladanse », la gloire incontestée de la musique française ?Au cours de la décennie 1729-1739, Rameau, au côtéd'Alexis Piron et Louis Fuzelier, fait partie des convivesde la Société du Caveau.

1.6 Au service de La Pouplinière

C'est selon toute vraisemblance par l'entremise de Pironque Rameau entre en relation avec le fermier généralAlexandre Le Riche de La Pouplinière, l'un des hommesles plus riches[31],[note 3] de France, amateur d'art qui en-tretient autour de lui un cénacle d'artistes dont il fera bien-tôt partie. Les circonstances de la rencontre entre Rameauet son mécène ne sont pas connues, même si l'on supposeque celle-ci doit avoir lieu avant l'exil de La Pouplinièreen Provence à la suite d'une aventure galante, exil qui doitdurer de 1727 à 1731. Piron est dijonnais comme Ra-meau qui lui a fourni la musique de quelques pièces pourla Foire ; il a travaillé en tant que secrétaire de Pierre Du-rey d'Harnoncourt, alors receveur des finances à Dijon.Or ce dernier est ami intime et compagnon de plaisirs deLa Pouplinière : il lui a présenté Piron et celui-ci lui parlesans doute de Rameau que sa musique et surtout ses trai-tés commencent à sortir de l'anonymat[32].Cette rencontre détermine la vie de Rameau pour plusde vingt ans et va lui permettre d'entrer en contact avecplusieurs de ses futurs librettistes, y compris Voltaire ain-si que sa future « bête-noire » en la personne de Jean-

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1.7 Enfin le succès : Hippolyte et Aricie 5

Le poète dijonnais Alexis Piron (1689-1773) collabora avec Ra-meau pour plusieurs opéras-comiques et introduisit le musicienauprès du fermier général La Pouplinière qui devint son mécène.

Portrait gravé en 1773 par Noël Le Mire d'après un dessin deNicolas-Bernard Lépicié.

Jacques Rousseau[note 4]. En ce qui concerne Voltaire, il ade prime abord une opinion assez négative de Rameau,qu'il juge pédant, méticuleux à l'extrême et, pour toutdire, ennuyeux. Cependant, il ne tarde pas à être subjuguépar sa musique et, pour saluer son double talent de savantthéoricien et de compositeur de haut vol, lui invente lesurnom d'« Euclide-Orphée »[33].On suppose que, dès 1731, Rameau dirige l'orchestre pri-vé, de très grande qualité, financé par La Pouplinière.Il conserve ce poste (où lui succéderont Stamitz puisGossec) pendant 22 ans[34]. Il est également professeurde clavecin de Thérèse Des Hayes, la maîtresse de LaPouplinière à partir de 1737 et qui finit par l'épouseren 1740. Madame de La Pouplinière est d'une familled'artistes, liée par sa mère au richissime banquier SamuelBernard[note 5],[34], bonne musicienne elle-même, et d'ungoût plus sûr que son mari. Elle se révèle comme l'une desmeilleures alliées de Rameau avant sa séparation d'avecson mari, en 1748 - l'un comme l'autre étant fort volages.En 1732, les Rameau ont un deuxième enfant, Marie-

Louise, qui est baptisée le 15 novembre.

L'orgue de l'église Saint-Eustache - (reconstruit après l'époque deRameau).

Rameau anime en musique les fêtes données par La Pou-plinière dans ses hôtels particuliers, d'abord rue Neuvedes Petits-Champs, puis à partir de 1739, en l'hôtel Ville-do rue de Richelieu ; mais aussi celles organisées par cer-tains des amis du fermier-général, par exemple en 1733pour le mariage de la fille du financier Samuel Bernard,Bonne Félicité, avec Mathieu-François Molé : il tient àcette occasion l'orgue de l'église Saint-Eustache, les cla-viers lui ayant été prêtés par son titulaire[note 6],[35] et re-çoit 1 200 livres du riche banquier pour sa prestation.1733 : Rameau a cinquante ans. Théoricien rendu célèbrepar ses traités sur l'harmonie[note 7], c'est aussi un musi-cien de talent apprécié à l'orgue, au clavecin, au violon,à la direction d'orchestre. Cependant, son œuvre de com-positeur se limite à quelques motets et cantates et à troisrecueils de pièces de clavecin dont les deux derniers sontremarqués pour leur aspect novateur. À cette époque, sescontemporains sensiblement du même âge, Vivaldi - decinq ans son aîné, qui mourra en 1741, Telemann, Bach,Haendel, ont déjà composé l'essentiel d'une œuvre trèsimportante. Rameau présente un cas très particulier dansl'histoire de la musique baroque : ce « compositeur débu-tant » quinquagénaire possède un métier accompli qui nes’est pas encore manifesté sur son terrain de prédilection,la scène lyrique, où il éclipse bientôt tous ses contempo-rains.

1.7 Enfin le succès : Hippolyte et Aricie

Article détaillé : Hippolyte et Aricie.L'abbé Simon-Joseph Pellegrin (religieux suspendu a di-vinis par l'archevêque de Paris pour s’être trop investidans le monde du théâtre) fréquente la maison de la Pou-plinière. Il y fait la connaissance de Rameau alors qu'ila déjà écrit, depuis 1714, plusieurs livrets d'opéras oud'opéras-ballets. Il va lui fournir celui d'une tragédie enmusique, Hippolyte et Aricie, qui installe d'emblée le com-positeur au firmament de la scène lyrique en France. Sur

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6 1 BIOGRAPHIE

Le compositeur André Campra (1660-1744), héritier de l'art deLully, estimait beaucoup Rameau et accueillit très favorablementsa tragédie Hippolyte et Aricie.

ce livret, dont l'action s’inspire librement de la Phèdre deJean Racine et au-delà, des tragédies de Sénèque (Phèdre)et Euripide (Hippolyte porte-couronne), Rameau met enœuvre les réflexions de presque toute une vie quant aurendu par la musique de toutes les situations théâtrales,des passions et des sentiments humains, comme il a ten-té de le faire valoir, en vain, à Houdar de la Motte. Biensûr, Hippolyte et Aricie sacrifie aussi aux exigences par-ticulières de la tragédie en musique qui donne une placeimportante aux chœurs, danses et aux effets de machi-nerie. Paradoxalement, la pièce associe une musique trèssavante et moderne à une forme de spectacle lyrique qui aconnu ses grandes heures à la fin du siècle précédent maisque l'on considère alors comme surannée.La pièce est montée en privé chez La Pouplinière dès leprintemps 1733. Après les répétitions à l'Académie royalede musique à partir de juillet, la première représentation alieu le 1er octobre. La pièce déconcerte tout d'abord maisfinalement fait un triomphe. Conforme à la tradition deLully quant à la structure (un prologue et cinq actes), elledépasse musicalement tout ce qui s’était fait auparavantdans ce domaine. Le vieux compositeur André Campra,qui assiste à la représentation estime d’ailleurs qu’il y a« assez de musique dans cet opéra pour en faire dix »,ajoutant que « cet homme (Rameau) les éclipserait tous ».Rameau doit pourtant retravailler la version initiale, carles chanteurs ne parviennent pas à interpréter correcte-ment certains de ses airs, et notamment le « second triodes Parques » dont l’audace rythmique et harmonique estinouïe pour l'époque. La pièce, donc, ne laisse personneindifférent : Rameau est en même temps encensé par ceux

que ravissent la beauté, la science et l'originalité de sa mu-sique et critiqué par les nostalgiques du style de Lully, quiproclament que l'on dévoie la véritable musique françaiseau profit d'un italianisme de mauvais aloi. L'oppositiondes deux camps est d'autant plus étonnante que, toute savie, Rameau professe à l'égard de Lully un respect incon-ditionnel qui ne laisse d'ailleurs pas de surprendre[note 8].Avec 32 représentations en 1733, cette œuvre installe dé-finitivement Rameau à la première place de la musiquefrançaise ; elle sera reprise trois fois à l'Académie royaledu vivant du compositeur.

1.8 Première carrière lyrique (1733-1739)

Pendant sept ans, de 1733 à 1739, Rameau donne toute lamesure de son génie et semble vouloir rattraper le tempsperdu en composant ses œuvres les plus emblématiques :trois tragédies lyriques (après Hippolyte et Aricie, Castor etPollux en 1737 puis Dardanus en 1739) et deux opéras-ballets (Les Indes galantes en 1735 et Les Fêtes d'Hébéen 1739). Ce qui ne l'empêche pas de poursuivre ses tra-vaux théoriques : en 1737, son traité sur la Générationharmonique reprend et développe les précédents trai-tés. L'exposé, destiné aux membres de l'Académie dessciences, débute par l'énoncé de douze propositions et ladescription de sept expériences par lesquelles il entenddémontrer que sa théorie est fondée en droit car prove-nant de la nature, thème cher aux intellectuels du siècledes Lumières.

D'abord sceptique, Voltaire devint un admirateur de Rameauqu'il baptisa l'« Euclide-Orphée ». Leur projet commun, l'opéraSamson, ne fut jamais achevé.

Portrait de Voltaire en 1718Atelier de Nicolas de Largillière (1656-1746)

Paris, Musée Carnavalet.

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1.9 Sept ans de silence 7

Dès 1733, Rameau et Voltaire envisagent de collaborersur un opéra sacré intitulé Samson : l'abbé Pellegrin aconnu son plus grand succès en 1732 avec un Jephté misen musique par Montéclair[note 9], ouvrant ainsi ce qui pa-raît une voie nouvelle. Voltaire peine à composer son li-vret : la veine religieuse n'est pas vraiment la sienne ; lescontretemps surviennent avec son exil de 1734 ; Rameaului-même, enthousiaste au début, se lasse d'attendre etne semble plus très motivé ; pourtant des répétitions par-tielles ont lieu. Cependant, le mélange des genres, entre lerécit biblique et l'opéra qui appelle les intrigues galantes,n’est pas du goût de tous, en particulier des autorités re-ligieuses. En 1736, la censure interdit l'ouvrage, qui nesera jamais terminé ni, bien sûr, représenté. Le livret n'apas été perdu mais édité par Voltaire quelques années plustard ; la musique de Rameau est vraisemblablement réuti-lisée dans d'autres œuvres, sans qu'on sache l'identifier.Qu'importe puisque 1735 voit la naissance d'un nouveauchef-d'œuvre, l'opéra-ballet Les Indes galantes, probable-ment l'œuvre scénique la plus connue, également le som-met du genre, en un prologue et quatre entrées, sur unlivret de Louis Fuzelier. Le coup d'essai de Rameau dansle domaine de la tragédie en musique a été un coup demaître : il en est de même dans celui, plus léger, del'opéra-ballet mis au point par André Campra en 1697avec le Carnaval de Venise et l'Europe galante. La simili-tude des titres ne laisse place à aucune surprise : Rameauexploite la même veine à succès mais recherche un peuplus d'exotisme dans des Indes très approximatives qui setrouvent en fait en Turquie, en Perse, au Pérou ou chez lesIndiens d'Amérique du Nord. L'intrigue ténue de ces pe-tits drames sert surtout à introduire un « grand spectacle »où les costumes somptueux, les décors, les machineries,et surtout la danse tiennent un rôle essentiel. Les Indes ga-lantes symbolisent l'époque insouciante, raffinée, vouéeaux plaisirs et à la galanterie de Louis XV et de sa cour.L'œuvre est créée à l'Académie royale de musique le 23août 1735 et connaît un succès croissant. Elle comprendun prologue et deux entrées. À la troisième représenta-tion, l'entrée des Fleurs est ajoutée, puis vite remaniée à lasuite des critiques concernant le livret - dont l'intrigue estparticulièrement tirée par les cheveux ; la quatrième en-trée Les Sauvages est finalement ajoutée le 10 mars 1736 :Rameau y réutilise la danse des Indiens d'Amérique qu'ila composée plusieurs années auparavant puis transcrite enpièce de clavecin dans son troisième livre. Les Indes ga-lantes sont reprises, en totalité ou partiellement, de nom-breuses fois du vivant du compositeur.Maintenant célèbre, il peut ouvrir, à son domicile, uneclasse de composition.Le 24 octobre 1737 est créée la deuxième tragédie ly-rique, Castor et Pollux sur un livret de Gentil-Bernard,lui aussi rencontré chez La Pouplinière. De l'avis général,le livret narrant les aventures des divins jumeaux amou-reux de la même femme est un des meilleurs qu'ait trai-tés le compositeur (même si le talent de Gentil-Bernardne mérite pas l'appréciation dithyrambique de Voltaire

à son égard[36]). L'œuvre bénéficie d'une musique admi-rable quoique moins audacieuse que celle d'Hippolyte etAricie - Rameau n'écrit d'ailleurs plus jamais d'airs com-parables, en hardiesse, au second trio des Parques ou aumonumental air de Thésée « Puissant maître des flots ».Mais l'œuvre se termine par un extraordinaire divertisse-ment, la Fête de l'Univers, après que les héros sont instal-lés au séjour des Immortels.Coup sur coup en 1739, c'est la création des Fêtes d'Hébé(second opéra-ballet) sur un livret de Montdorge, le 25mai et de Dardanus (troisième tragédie lyrique) sur un li-vret de Charles-Antoine Leclerc de La Bruère, le 19 no-vembre. Si la musique de Rameau est toujours plus somp-tueuse, les livrets se font de plus en plus indigents : ilsdoivent être rapidement remaniés afin d'en cacher les dé-fauts les plus criants.Les Fêtes d'Hébé connaissent un succès immédiat maisl'abbé Pellegrin est appelé pour améliorer le livret (par-ticulièrement la deuxième entrée) après quelques repré-sentations. La troisième entrée (la Danse) est particuliè-rement appréciée avec son caractère pastoral envoûtant -Rameau y réutilise, en l'orchestrant, le fameux Tambou-rin du second livre de clavecin qui contraste avec une desplus admirables musettes qu'il ait composées, tour à tourjouée, chantée et en chœur.Quant à Dardanus, peut-être musicalement la plus richedes œuvres de Rameau, la pièce est initialement mal reçuepar le public, du fait de l'invraisemblance du livret et dela naïveté de certaines scènes : modifié après quelques re-présentations, l'opéra est quasiment réécrit, dans ses troisderniers actes, pour une reprise en 1744 : il s’agit presqued'une œuvre différente.

1.9 Sept ans de silence

Après ces quelques années où il produit chef-d'œuvreaprès chef-d'œuvre, Rameau disparaît mystérieusementpour six ans de la scène lyrique et même presque de lascène musicale, à part une nouvelle version de Dardanusen 1744.On ne connaît pas la raison de ce soudain silence (peut-être un désaccord avec les autorités de l'Académie Royalede Musique)[37] ; probablement Rameau se consacre-t-ilà sa fonction de chef d'orchestre de La Pouplinière. Sansdoute a-t-il déjà abandonné toute fonction d'organiste(certainement au plus tard en 1738 pour l'église Sainte-Croix de la Bretonnerie). Aucun écrit théorique non plus ;seules restent de ces quelques années les Pièces de cla-vecin en concerts, unique production de Rameau dans ledomaine de la musique de chambre, issues probablementdes concerts organisés chez le fermier-général.Son troisième enfant, Alexandre, naît en 1740. Son par-rain est La Pouplinière mais l'enfant meurt avant 1745. Ladernière fille, Marie-Alexandrine naît en 1744. À partirde cette même année, Rameau et sa famille ont un appar-

Page 8: Jean Philippe Rameau

8 1 BIOGRAPHIE

tement dans le palais du fermier général rue de Riche-lieu ; ils en disposent pendant douze ans, en conservantprobablement leur appartement de la rue saint-Honoré.Ils passent aussi tous les étés au château de Passy achetépar La Pouplinière ; Rameau y tient l'orgue.Jean-Jacques Rousseau, arrivé à Paris en 1741, est in-troduit chez La Pouplinière par une cousine de Madamede La Pouplinière en 1744 ou 1745. Bien qu'admirateurde Rameau, il est reçu sans sympathie et avec un cer-tain mépris par celui-ci et il se met aussi à dos la maî-tresse de maison, meilleur soutien du compositeur. Rous-seau est très fier de son invention d'un système chif-fré destiné à noter la musique, beaucoup plus simpleselon lui que le système traditionnel de la portée. Ra-meau ne tarde pas à le réfuter, pour des raisons pra-tiques que l'inventeur est obligé d'admettre. Ayant assis-té chez le fermier-général à la représentation d'un opéra,Les Muses galantes, dont Rousseau se présente commel'auteur, Rameau l'accuse de plagiat, ayant décelé entredifférentes parties de l'œuvre des inégalités de qualitémusicale. L'animosité née entre les deux hommes de cepremier contact ne fit que croître dans les années qui sui-virent.

1.10 Seconde carrière lyrique

Rameau réapparaît sur la scène lyrique en 1745 et va,cette année-là, quasiment la monopoliser avec cinq nou-velles œuvres. La Princesse de Navarre, comédie-balletdont le livret est dû à Voltaire, est représentée à Versaillesle 23 février à l'occasion du mariage du Dauphin. Platée,comédie lyrique d'un style inédit, est créée à Versailles le31 mars ; dans le registre comique, c'est le chef-d'œuvrede Rameau qui a même acheté les droits du livret pourpouvoir au mieux l'adapter à ses besoins.Les Fêtes de Polymnie, opéra-ballet, est créé à Paris le 12octobre. Le Temple de la Gloire, opéra-ballet dont le livretest à nouveau de Voltaire, est représenté à Versailles le 27novembre. Enfin, Les Fêtes de Ramire, acte de ballet, estreprésenté à Versailles le 22 décembre.Rameau devient le musicien officiel de la cour : il estnommé Compositeur du Cabinet du Roi au mois de mai,et reçoit une pension de 2 000 livres.Les Fêtes de Ramire est une œuvre de pur divertissementqui doit réutiliser la musique de La Princesse de Navarresur un livret minimal écrit par Voltaire. Rameau étant oc-cupé au Temple de la Gloire, Jean-Jacques Rousseau estchargé de l'adaptation musicale mais ne parvient pas àterminer le travail à temps ; Rameau, passablement éner-vé, se voit donc obligé de le faire lui-même au prix del'humiliation de Rousseau ; ce nouvel incident dégrade unpeu plus des relations déjà très aigries.Après le « feu d'artifice » de 1745, le rythme de produc-tion du compositeur va ensuite se ralentir, mais Rameauva produire pour la scène, de façon plus ou moins régu-

lière, jusqu’à la fin de sa vie, et sans abandonner ses re-cherches théoriques ni, bientôt, ses activités polémiqueset pamphlétaires : ainsi, il compose en 1747 Les Fêtes del'Hymen et de l'Amour et, cette même année, sa dernièreœuvre pour le clavecin, une pièce isolée, La Dauphine ;en 1748, la pastorale Zaïs, l'acte de ballet Pygmalion,l'opéra-ballet Les Surprises de l'Amour ; en 1749, la pas-torale Naïs, et la tragédie lyrique Zoroastre où il innove ensupprimant le prologue qui est remplacé par une simpleouverture ; enfin en 1751, l'acte de ballet La Guirlande etla pastorale Acanthe et Céphise.

D'abord séduit par la théorie de Rameau, d'Alembert finira parprendre ses distances et en contester certains aspects

Portrait peint en 1753 par Maurice Quentin de la Tour, muséedu Louvre.

C'est probablement pendant cette période qu'il entre encontact avec d'Alembert, intéressé par l'approche scien-tifique du musicien de son art. Il encourage Rameauà présenter le résultat de ses travaux à l'Académie desSciences : en 1750, peut-être aidé de Diderot, il publie sontraité intitulé Démonstration du principe de l'harmonie,que l'on considère comme le mieux écrit de tous ses ou-vrages théoriques. D'Alembert fait l'éloge de Rameau, ré-digera en 1752 les Éléments de musique théorique et pra-tique selon les principes de M. Rameau et retouche ensa faveur des articles de l'Encyclopédie écrits par Rous-seau. Mais leurs voies divergent quelques années plus tardlorsque le philosophe-mathématicien prend consciencedes errements de la pensée de Rameau concernant lerapport entre sciences pures et sciences expérimentales.Pour l'heure, Rameau cherche aussi l'approbation de sestravaux par les plus grands mathématiciens, ce qui se-

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1.11 La querelle des Bouffons 9

ra l'occasion d'échanges de lettres avec Jean Bernoulli etLeonhard Euler.En 1748, La Pouplinière et son épouse se séparent[note 10] :Rameau perd chez son mécène la plus fidèle alliée. Ilapproche des soixante-dix ans : son activité prodigieusequi laisse peu de place à la concurrence en agace plusd'un[38],[39] et joue certainement un rôle dans les attaquesqu'il subit pendant la fameuse Querelle des Bouffons.Mais l'âge ne l'a rendu ni plus souple, ni moins attachéà ses idées…Pour comprendre la survenance de la Querelle des Bouf-fons, il faut se souvenir que vers 1750, la France est, mu-sicalement parlant, très isolée du reste de l'Europe quiest acquis depuis longtemps à la suprématie de la mu-sique italienne. En Allemagne, en Autriche, en Angle-terre, aux Pays-Bas, dans la péninsule ibérique, la mu-sique italienne a balayé ou tout au moins s’est assimi-lée les traditions locales. Seule la France fait encore fi-gure de bastion résistant à cette hégémonie. Le symbolede cette résistance est la tragédie en musique de Lully –à présent symbolisée par le vieux Rameau – cependantque l'attrait de la musique italienne se fait sentir depuislongtemps[note 11] dans la pratique de la musique instru-mentale. L'antagonisme né entre Rameau et Rousseau –inimitié personnelle doublée de conceptions tout à fait op-posées en matière musicale[note 12] – personnalise aussi cetaffrontement qui donnera lieu à un véritable déchaîne-ment verbal, épistolaire voire physique entre le « Coin duRoi » (les tenants de la tradition française) et le « Coinde la Reine » (ceux de la musique italienne).

1.11 La querelle des Bouffons

Article détaillé : Querelle des Bouffons.Dès le début de l'année 1752, Friedrich Melchior

Grimm, journaliste et critique allemand installé à Paris,avait éreinté le style français dans sa Lettre sur Omphale àla suite de la reprise de cette tragédie lyrique composée audébut du siècle par André Cardinal Destouches, procla-mant la supériorité de la musique dramatique italienne.Rameau n'était pas visé par ce pamphlet, Grimm ayantd'ailleurs à cette époque une haute opinion de Rameau entant que musicien[40].Le 1er août 1752, une troupe itinérante italienne s’installeà l'Académie royale de musique pour y donner des repré-sentations d'intermezzos et d'opéras bouffes. Ils débutentavec la représentation de La serva padrona (la ServanteMaîtresse) de Pergolèse. La même œuvre avait déjà étédonnée à Paris en 1746, sans attirer quelque attention.Cette fois, c'est un scandale qui éclate : l'intrusion dansle temple de la musique française de ces « bouffons »divise l'intelligentsia musicale parisienne en deux clans.Entre partisans de la tragédie lyrique, royale représen-tante du style français, et sympathisants de l'opéra-bouffe,truculent défenseur de la musique italienne, naît une vé-ritable querelle pamphlétaire qui animera les cercles mu-

Rameau…

… et son ennemi J.J. Rousseau.Portrait au pastel (1753) par Maurice Quentin de la Tour, MuséeAntoine Lécuyer à Saint-Quentin

sicaux, littéraires, philosophiques de la capitale françaisejusqu'en 1754.En fait, la Querelle des Bouffons, déclenchée sous un

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10 1 BIOGRAPHIE

prétexte musical est, bien au-delà, la confrontation dedeux idéaux esthétiques, culturels et, finalement, poli-tiques définitivement incompatibles : le classicisme, as-socié à l'image du pouvoir absolu de Louis XIV, oppo-sé à l'esprit des Lumières. La musique si raffinée (si sa-vante, donc produit d'une culture contestée) de Rameause trouve mise « dans le même sac » que les pièces théâ-trales qui lui servent de moule et d'argument, avec leurattirail de mythologie, de merveilleux, de machines aux-quels les philosophes veulent opposer la simplicité, le na-turel, la spontanéité de l'opéra-bouffe italien que caracté-rise une musique donnant la primauté à la mélodie[41].Précisément, tout ce qu'a écrit Rameau depuis trente ansdéfinit l'harmonie comme le principe, la nature même dela musique ; comment imaginer la réconciliation du sa-vant musicien, sûr de ses idées, orgueilleux, têtu et que-relleur avec un Rousseau qu'il méprise depuis le début etqui se permet de contredire ses théories ? Sa vindicte vaaussi à l'Encyclopédie puisque c'est Rousseau que Dide-rot a chargé de rédiger les articles sur la musique.

L’Allemand Grimm n'a pas de mots trop durs pour la musiquefrançaise.Gravure de John Swaine d'après Carmontelle (1769).

Le coin de la reine regroupe les Encyclopédistes,avec Rousseau, Grimm, Diderot, d'Holbach, plus tardd'Alembert ; les critiques se focalisent sur Rameau, prin-cipal représentant du coin du roi. On échange un nombreconsidérable de libelles, d'articles (plus de soixante), lesplus virulents venant de Grimm (Le petit prophète deBoehmischbroda) et de Rousseau (Lettre sur la musiquefrançaise où il dénie même au français la possibilité d'êtremis en musique) et Rameau n'est pas de reste (Obser-

Diderot participe à la polémique avec ses collègues del'Encyclopédie.Portrait peint en 1767 par Louis-Michel van Loo, Musée duLouvre.

vation sur notre instinct pour la musique), qui continue-ra à lancer ses traits bien après que la Querelle se seraapaisée : Les erreurs sur la musique dans l'Encyclopédie(1755), Suite des erreurs (1756), Réponse à MM. les édi-teurs de l'Encyclopédie (1757). Survient même un duelentre Ballot de Sauvot, librettiste et admirateur du com-positeur, et le castrat italien Caffarelli, qui est blessé[42].La Querelle finit par s’éteindre, un édit de mai 1754 ayantd'ailleurs chassé les Bouffons Italiens hors de France[43] ;mais la tragédie lyrique et les formes apparentées ont reçude tels coups que leur temps est révolu.Seul Rameau, qui gardera jusqu’à la fin tout son prestigede compositeur officiel de la cour, osera encore écrire du-rablement dans ce style désormais dépassé. Et sa veine nese tarit pas : en 1753, il compose la pastorale héroïqueDaphnis et Églé, une nouvelle tragédie lyrique (Linus),la pastorale Lysis et Délie – ces deux dernières compo-sitions ne sont pas représentées et leur musique est per-due – ainsi que l'acte de ballet Les Sybarites. En 1754sont encore composés deux actes de ballet : La Naissanced'Osiris (pour célébrer la naissance du futur Louis XVI)et Anacréon, ainsi qu'une nouvelle version de Castor etPollux.

1.12 Dernières années

En 1753, La Pouplinière prend comme maîtresse une mu-sicienne intrigante, Jeanne-Thérèse Goermans, fille dufacteur de clavecins Jacques Goermans. Celle qui se fait

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11

Écu de Jean-Philippe Rameau « d'azur à une colombe d'argenttenant dans son bec un rameau d'olivier d'or. Cet écu timbréd'un casque de profil orné de ses lambrequins d'or, d'azur etd'argent »[44]

appeler Madame de Saint-Aubin est mariée à un profi-teur qui la pousse dans les bras du riche financier. Ellefait le vide autour d'elle, cependant que La Pouplinièreengage Johann Stamitz : c'est la rupture avec Rameau quid'ailleurs n'a plus besoin du soutien financier de son an-cien ami et protecteur[45].Rameau poursuit ses activités de théoricien et de compo-siteur jusqu’à sa mort. Il vit avec sa femme et ses deuxenfants dans son grand appartement de la rue des Bons-Enfants d'où il part, chaque jour, perdu dans ses pensées,faire sa promenade solitaire dans les jardins tout prochesdu Palais-Royal ou des Tuileries. Il y rencontre parfois lejeune Chabanon[46] qui écrit plus tard son éloge funèbreet qui y recueille quelques-unes de ses rares confidencesdésabusées :« De jour en jour j'acquiers du goût, mais je n'ai plusde génie… »[47] et encore « L'imagination est uséedans ma vieille tête, et on n'est pas sage quand onveut travailler à cet âge aux arts qui sont entièrementd'imagination…[47]. »Ses pièces continuent à être représentées, parfois par dé-férence envers le vieux compositeur : en 1756, une se-conde version de Zoroastre ; en 1757, Anacréon, nouvelleentrée ajoutée aux Surprises de l'Amour et en 1760, LesPaladins, comédie-ballet dans un style renouvelé, cepen-dant qu'il continue à régler ses comptes, par écrit, avecl'Encyclopédie et les philosophes.Le 11 mai 1761, il est reçu à l'Académie de Dijon, sa villenatale ; cet honneur lui est particulièrement sensible[48].Ses derniers écrits, notamment L'Origine des sciences sontmarqués par son obsession à faire de l'harmonie la ré-férence de toute science, propre à étayer l'opinion deGrimm qui en vient à parler de « radotage » de « vieux

L'église Saint-Eustache à Paris où est inhumé Rameau.

bonhomme »[49],[note 13].Pourtant, Rameau – qui est anobli au printemps 1764[47]

- garde toute sa tête et compose, à plus de quatre-vingtsans, sa dernière tragédie en musique, Les Boréades, œuvred'une grande nouveauté, mais d'une nouveauté qui n'estplus dans la direction que prend alors la musique. Les ré-pétitions commencent au début de l'été 1764 mais la piècene sera pas représentée : Rameau meurt d'une « fièvreputride » le 12 septembre 1764. Les Boréades attendrontplus de deux siècles leur création triomphale à Aix-en-Provence en 1982.Le grand musicien est inhumé dès le lendemain, 13 sep-tembre 1764, en l'église Saint-Eustache à Paris[50] où setrouve une plaque commémorative[note 14]. Plusieurs céré-monies d'hommage ont lieu, dans les jours qui suivent, àParis, Orléans, Marseille, Dijon, Rouen. Des éloges fu-nèbres seront publiés par le Mercure de France, et écritspar Chabanon et Maret. Sa musique de scène continue,comme celle de Lully, d'être exécutée jusqu’à la fin del'Ancien Régime, puis disparaît du répertoire pendantplus d'un siècle.

2 Personnalité

De même que sa biographie est imprécise et parcellaire,la vie personnelle et familiale de Rameau est d'une opa-cité presque complète : chez ce musicien et théoriciende génie, tout disparaît derrière l'œuvre musicale et théo-rique. Encore la musique de Rameau, parfois si gracieuseet entraînante, est-elle en parfaite opposition avec l'aspectextérieur de l'homme et avec ce que l'on sait de son carac-tère, décrit de façon caricaturale et peut-être outrée parDiderot dans Le Neveu de Rameau. Toute sa vie il ne s’estintéressé qu'à la musique, avec passion et, parfois, em-portement, voire agressivité ; celle-ci occupait toutes sespensées ; Philippe Beaussant parle même de monomanie.Piron explique que « Toute son âme et son esprit étaientdans son clavecin ; quand il l'avait fermé, il n'y avait pluspersonne au logis »[51].

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12 2 PERSONNALITÉ

Buste par J.-J. CaffieriMusée des beaux-arts de Dijon

Portrait par Carmontelle (1760)Chantilly, Musée Condé

Au physique, Rameau était grand et très maigre[52] : lescroquis qu'on en a, notamment un de Carmontelle qui lemontre devant son clavecin, nous dépeignent une sorted'échalas aux jambes interminables. Il avait « une grosse

voix ». Son élocution était difficile, à l'instar de son ex-pression écrite qui n'a jamais été fluide.L'homme était à la fois secret, solitaire, bougon, imbu delui-même (plus fier d'ailleurs en tant que théoricien quemusicien[note 15]) et cassant avec ses contradicteurs, s’em-portant facilement. On peine à l'imaginer évoluant au mi-lieu des beaux esprits – dont Voltaire, avec lequel il avaitune certaine ressemblance physique – qui fréquentaient lademeure de la Pouplinière : sa musique était sa meilleureambassadrice à défaut de qualités plus mondaines.Ses « ennemis » – comprendre : ceux qui ne partageaientpas ses idées en matière de musique ou de théorie acous-tique – amplifiaient ses défauts, par exemple sa supposéeavarice. En fait, il semble que son souci de l'économie soitla conséquence d'une longue carrière obscure, aux reve-nus minimes et incertains, plus qu'un trait de caractèrecar il savait être généreux : on sait qu'il a aidé son neveuJean-François venu à Paris, son jeune collègue dijonnaisClaude Balbastre également « monté » à Paris, bien dotésa fille Marie-Louise en 1750 lorsqu'elle entra en religionchez les Visitandines, payé de façon très ponctuelle unepension à une de ses sœurs devenue infirme[53]. L'aisancefinancière lui était venue sur le tard, avec le succès de sesœuvres lyriques et l'attribution d'une pension par le roi(quelques mois avant sa mort, il fut même anobli et faitchevalier dans l'Ordre de Saint-Michel). Mais il n'en avaitpas pour autant changé de train de vie, conservant ses vê-tements élimés, son unique paire de chaussures, son mo-bilier vétuste ; à sa mort, dans l'appartement de dix piècesqu'il occupait rue des Bons-Enfants avec son épouse etson fils, il n'avait à sa disposition qu'un clavecin à un seulclavier, en mauvais état[note 16] ; mais on trouva dans sesaffaires un sac contenant 1691 louis d'or[54].Un trait de caractère que l'on retrouve d'ailleurs chezd'autres membres de sa famille est une certaine insta-bilité : il s’est fixé à Paris vers l'âge de quarante ansaprès une phase d'errance et avoir tenu de nombreuxpostes dans des villes variées : Avignon, peut-être Mont-pellier, Clermont-Ferrand, Paris, Dijon, Lyon, à nouveauClermont-Ferrand puis Paris. Même dans la capitale, ila souvent changé de domicile, tour à tour rue des Petits-Champs (1726), rue des Deux-Boules (1727), rue de Ri-chelieu (1731), rue du Chantre (1732), rue des Bons-Enfants (1733), rue Saint-Thomas du Louvre (1744),rue Saint-Honoré (1745), rue de Richelieu chez la Pou-plinière (1746), enfin à nouveau rue des Bons-Enfants(1752)[55]. La cause de ces déménagements successifsn'est pas connue.On ne peut achever cette esquisse biographique sans citerune caractéristique importante de la personnalité de Jean-Philippe Rameau, et qui s’est exprimée tout le long desa carrière par sa prédilection pour les sujets comiques :l'esprit, indispensable lorsqu'on se targuait d'œuvrer à laCour de Versailles. Ainsi, le jour-même de sa mort, sevoyant administrer l'extrême-onction, il n'aurait rien trou-vé de plus grave à dire au prêtre que de le prier de ne point

Page 13: Jean Philippe Rameau

4.1 Motets 13

chanter si faux[56]…

3 Famille et entourage

Avec son épouse Marie-Louise Mangot, Rameau a quatreenfants :

• Claude-François, né le 3 août 1727 rue des Deux-Boules à Paris et baptisé le même jour en l'égliseSaint-Germain-l'Auxerrois : son parrain est ClaudeRameau, organiste à Dijon, représenté par JacquesMangot, et sa marraine est Françoise de Lozier,femme de Jacques Mangot[27]. Son père lui achèteune charge de valet de chambre du roi ; il se marieen 1772 et a un fils en 1773.

• Marie-Louise, née en 1732, qui entre en religionchez les Visitandines à Montargis en 1751 (le pèrela dote généreusement mais n'assiste pas à la céré-monie).

• Alexandre, né en 1740 et mort avant 1745.

• Marie-Alexandrine, née en 1744 (Rameau est alorsâgé de 61 ans). Elle se marie en 1764, deux moisaprès la mort de son père, avec François de Gaultier,d'où descendance[52].

Après la mort de Rameau, son épouse quittel'appartement de la rue des Bons-Enfants à Paris etva vivre à Andrésy chez son gendre ; elle y meurt en1785.Les prénoms des deux derniers enfants sont un hommageau fermier-général Alexandre de la Pouplinière, mécènede Rameau grâce auquel celui-ci a pu commencer sa car-rière de compositeur lyrique.Jean-Philippe a un jeune frère, Claude également musi-cien (beaucoup moins célèbre). Ce dernier a deux fils, mu-siciens comme lui mais à l'existence de « ratés » : LazareRameau et Jean-François Rameau (c'est ce dernier quiinspire à Diderot la matière de son livre Le Neveu de Ra-meau).

4 Œuvre musicale

Article détaillé : Liste des œuvres musicales de Rameau.

Rameau a composé dans tous les genres de son époque.Néanmoins, tous ne sont pas à égalité dans sa production.On peut notamment remarquer qu'il s’est consacré à lamusique lyrique (dans ses différentes facettes) de manièrequasiment exclusive durant les trente dernières années desa carrière, en dehors de ses travaux théoriques.La production musicale comprend donc :

• 7 cantates,

• 4 motets à grand chœur,

• 3 livres de pièces de clavecin (plus quelques piècesisolés, ainsi que des transcriptions),

• 1 livre de 5 suites pour trio avec clavecin,

• 4 airs à boire et 7 canons,

• et surtout un ensemble très important d'une trentained'ouvrages pour la scène.

Il s’avère que nous avons perdu la musique d'un certainnombre d'ouvrages de Rameau. Notamment, rien ne sub-siste des musiques qu'il a composé pour la foire de Saint-Germain.Comme la plupart de ses contemporains, il réutilise sou-vent certains airs particulièrement réussis ou appréciés,mais jamais sans les adapter de façon méticuleuse : cene sont pas de simples transcriptions. Ces transferts sontnombreux : on retrouve dans les Fêtes d'Hébé trois pièces(l'Entretien des Muses, Musette et Tambourin) tirées dulivre de clavecin de 1724 et un air tiré de la cantate LeBerger fidèle ; ou encore un autre Tambourin passe suc-cessivement de Castor et Pollux aux Pièces en concertpuis à la seconde version de Dardanus ; d'autres exemplesabondent[57]. Par ailleurs, on ne signale pas d'emprunts àd'autres musiciens, tout au plus d'influences au début desa carrière.Le célèbre Hymne à la nuit (remis à l'honneur par le filmLes Choristes) n'est pas, sous cette forme, de Rameau. Ils’agit d'une adaptation pour chœurs réalisée par JosephNoyon et E. Sciortino d'un chœur de prêtresses présentdans l'Acte I (scène 3) d’Hippolyte et Aricie dans la pre-mière version de 1733[note 17].Sylvie Bouissou, grande spécialiste de Rameau, a assuréen octobre 2014 qu'il était l'auteur du célèbre canon connudepuis deux siècles sous le nom de Frère Jacques[58].

4.1 Motets

Article détaillé : Motets de Jean-Philippe Rameau.

Rameau a été pendant plus de quarante ans organisteprofessionnel au service d'institutions religieuses, parois-siales ou conventuelles : pour autant sa production de mu-sique sacrée est des plus réduites - sans parler de l'œuvred'orgue, inexistante[note 18].À l'évidence, ce n'était pas son terrain de prédilection,tout au plus un gagne-pain appréciable. Les rares compo-sitions religieuses de ce musicien de génie sont cependantremarquables et se comparent favorablement à celles desspécialistes du genre.Les œuvres qui peuvent lui être attribuées avec certitudeou presque sont au nombre de quatre :

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14 4 ŒUVRE MUSICALE

• Deus noster refugium, Ps. 45 (vers 1713-1715)[59] ;

• Quam dilecta, Ps. 83 (vers 1713-1715)[60] ;

• In convertendo, Ps. 125 (sans doute avant 1720)[60] ;

• Laboravi, Ps. 68 (dans son Traité de l'harmonie,1722).

D'autres motets sont d'attribution douteuse : Diligam te(Ps. 17) et Inclina Domine (Ps. 85).

4.2 Cantates

Au tout début du XVIIIe siècle, apparaît un genre nou-veau, qui remporte un grand succès : la cantate française,forme profane qui procède de la cantate italienne. Elleest créée vers 1700 par le poète Jean-Baptiste Rousseau,en liaison avec des compositeurs comme Jean-BaptisteMorin et Nicolas Bernier[61], proches du duc d'OrléansPhilippe II (futur régent de France). Il est à noter quecette forme littéraire et musicale est sans lien avec la can-tate germanique (souvent liée à la religion luthérienne,comme celles de Jean-Sébastien Bach). Le célèbre CaféLaurent joua un rôle important dans l'élaboration de cenouveau genre. Ce qu'on désigna sous le nom de « can-tate françoise » est aussitôt adopté par plusieurs musiciensde renom, tels Montéclair, Campra, Clérambault, et biend'autres.Les cantates sont pour Rameau le premier contact avec lamusique lyrique, nécessitant des moyens réduits et doncaccessibles à un musicien encore inconnu. Les musico-logues doivent s’en tenir à des hypothèses concernant lesdates et circonstances de composition. Les librettistes res-tent inconnus.Les cantates attribuées avec certitude à Rameau qui noussont parvenues sont au nombre de sept (les dates sont desestimations) :

• L'Enlèvement d'Orithie (entre 1715 et 1720)[62] ;

• Thétis (même période)[62] ;

• L’Impatience (même période)[62] ;

• Les Amants trahis (1721 ou avant)[63] ;

• Orphée (même période)[63] ;

• Le Berger fidèle (1728).

• Cantate pour le jour de la saint-Louis

Le thème commun à ces cantates est l'amour et les diverssentiments qu'il suscite.Le premier biographe de Rameau, Hugues Maret, évoqueencore deux cantates qui auraient été composées àClermont-Ferrand et aujourd'hui perdues : Médée etL'Absence.

4.3 Musique instrumentale

4.3.1 Musique pour clavecin

Article détaillé : Premier livre de pièces de clavecin(Rameau).Article détaillé : Deuxième livre de pièces de clavecin(Rameau).Article détaillé : Troisième livre de pièces de clavecin(Rameau).

Rameau est, avec François Couperin, l'un des deux chefsde file de l'École française de clavecin au XVIIIe siècle.Les deux musiciens se démarquent nettement de la pre-mière génération de clavecinistes, qui ont coulé leurscompositions dans le moule relativement figé de la suiteclassique. Celle-ci atteint son apogée pendant la décen-nie 1700-1710 avec les parutions successives des recueilsde Louis Marchand, Gaspard Le Roux, Louis-NicolasClérambault, Jean-François Dandrieu, Élisabeth Jacquet,Charles Dieupart, Nicolas Siret.Mais les deux hommes ont un style très différent et en au-cun cas, Rameau ne peut être considéré comme l'héritierde son aîné. Ils semblent s’ignorer (Couperin est un desmusiciens officiels de la Cour alors que Rameau n'est en-core qu'un inconnu : la gloire lui viendra l'année mêmede la mort de Couperin). D'ailleurs Rameau publie sonpremier livre dès 1706 alors que François Couperin, quia quinze ans de plus, attend 1713 pour faire éditer sespremiers ordres. Les pièces de Rameau semblent moinspensées pour le clavecin que celles de Couperin ; elles ac-cordent moins d'importance à l'ornementation et se satis-font beaucoup mieux d'une interprétation au piano. Euégard au volume respectif de leurs contributions, la mu-sique de Rameau présente peut-être des aspects plus va-riés : elle comprend des pièces dans la pure tradition dela suite française, des pièces imitatives (Le Rappel desOiseaux, la Poule) et de caractère (Les tendres Plaintes,L'entretien des Muses), des morceaux de pure virtuosité(Les Tourbillons, Les trois Mains), des pièces où se dé-couvrent les recherches du théoricien et du novateur enmatière d'interprétation (L'Enharmonique, Les Cyclopes),dont l'influence sur Daquin, Royer, Duphly est manifeste.Les pièces sont groupées par tonalité.Les trois recueils de Rameau paraissent respectivementen 1706, 1724 et 1728. Après cette date, il ne composeplus pour le clavecin seul qu'une pièce isolée : La Dau-phine (1747). Une autre pièce, Les petits marteaux, lui estattribuée de façon douteuse.Il a également transcrit pour le clavecin un certain nombrede pièces tirées des Indes galantes et surtout cinq piècesissues des Pièces de clavecin en concerts.

Page 15: Jean Philippe Rameau

4.4 Ouvrages lyriques et pour la scène 15

4.3.2 Musique de chambre

Pendant sa semi-retraite des années 1740 à 1744, il écritles Pièces de clavecin en concerts (1741). Il s’agit del'unique recueil de musique de chambre que Rameau aitlaissé à la postérité. Reprenant une formule pratiquéeavec succès par Mondonville quelques années aupara-vant, les pièces en concert se démarquent des sonates àtrois en ce que le clavecin ne se contente pas d'assurer labasse continue en accompagnement des instruments mé-lodiques (violon, flûte, viole) mais « concerte » à égalitéavec eux.Rameau assure d'ailleurs qu'interprétées au clavecin seul,ces pièces sont tout aussi satisfaisantes ; cette dernière af-firmation n'est pas très convaincante, puisqu'il prend laprécaution, malgré tout, d'en transcrire cinq : celles où lesparties des instruments manquants feraient le plus défaut.Il en existe une transcription pour sextuor à cordes(Concerts en sextuor) dont il n'est probablement pasl'auteur[64].

4.4 Ouvrages lyriques et pour la scène

À compter de 1733, Rameau se consacre de manièrepresque exclusive à la musique lyrique : ce qui précède n'adonc constitué qu’une longue préparation ; fort de prin-cipes théoriques et esthétiques dont plus rien ne pourral'écarter, il se consacre au spectacle complet que consti-tue le théâtre lyrique à la française. Sur le plan stricte-ment musical, celui-ci est plus riche et varié que l'opéraitalien contemporain, notamment par la place donnée auxchœurs et aux danses, mais aussi par la continuité mu-sicale qui naît des rapports respectifs du récitatif et desairs. Autre différence essentielle : quand l'opéra italienfait la plus large place aux sopranos féminins et aux cas-trats, l'opéra français ignore cette mode.Dans l'opéra italien contemporain de Rameau (l'opera se-ria), la partie vocale comprend pour l'essentiel des partieschantées dans lesquelles la musique (la mélodie) est reine(arias da capo, duos, trios etc..) et des parties parlées oupresque (le recitativo secco). C'est pendant celles-ci quel'action progresse - si tant est qu'elle intéresse le specta-teur, en attente du prochain aria ; au contraire le texte del'aria s’efface presque entièrement derrière une musiquequi vise surtout à mettre en relief la virtuosité du chan-teur.Rien de tel dans la tradition française : depuis Lully, letexte doit rester compréhensible ce qui limite certainsprocédés comme les vocalises, que l'on réserve à cer-tains mots privilégiés, tels « gloire », « victoire » - ence sens, et tout au moins dans son esprit, l'art lyrique deLully à Rameau est plus proche de l'idéal de Monteverdi,la musique doit en principe servir le texte - un paradoxequand on compare la science de la musique de Rameau etl'indigence de ses livrets. Un équilibre subtil s’opère entreles parties plus ou moins musicales, récitatif mélodique

d'une part, airs souvent plus proches de l'arioso d'autrepart, ariettes virtuose enfin d'allure plus italienne. Cettemusicalité continue préfigure donc également le dramewagnérien plus que l'opéra « réformé » de Gluck qui ap-paraîtra dans la fin du siècle.On peut distinguer dans la partition lyrique à la françaisecinq composantes essentielles :

1. pièces de musique « pure » (ouvertures, ritournelles,pièces conclusives…). Contrairement à l'ouverturelullyste, si stéréotypée, l'ouverture de Rameau estd'une extraordinaire variété ; même lorsqu'il utilise,dans ses premières compositions, le schéma clas-sique « à la française », le symphoniste-né, maître del'orchestration compose à chaque fois une pièce nou-velle et unique[note 19]. Quelques pièces retiennentparticulièrement l'attention, telles l'ouverture deZaïs dépeignant le débrouillement du chaos originel,celle de Pygmalion suggérant les coups de marteaudu sculpteur sur son burin, ou les imposantes cha-connes conclusives des Indes galantes ou de Darda-nus ;

2. airs de danse : les intermèdes dansés, obligatoiresmême dans le cadre de la tragédie, permettent àRameau de donner libre cours à son sens inimi-table du rythme, de la mélodie et de la choré-graphie, reconnu par tous ses contemporains demême que par les danseurs[note 20]. C'est par di-zaines que ce musicien « savant », toujours pré-occupé de son prochain traité, enchaîne paradoxa-lement gavottes, menuets, loures, rigaudons, passe-pieds, tambourins, musettes... Selon son biographeCuthbert Girdlestone[65] : « L'énorme supériorité detout ce qui touche à la chorégraphie chez Rameau n'apas encore été assez soulignée. », opinion partagéepar l'érudit allemand H.W. von Walthershausen[65],s’exprimant ainsi en 1922 au sujet des danses de Zo-roastre : « Rameau fut le plus grand compositeur deballets de tous les temps. Le génie de son œuvre re-pose d'une part sur sa parfaite imprégnation artis-tique par les types de danses populaires, d'autre partsur la permanence de la confrontation vivante avecles contraintes de la réalisation chorégraphique quilui évite toute distanciation entre l'expression corpo-relle et l'esprit de la musique pure. »

3. chœurs : le padre Martini, érudit musicographe etcorrespondant de Rameau affirmait que « les Fran-çais sont excellents dans les chœurs », pensant évi-demment à ce dernier. Grand maître de l'harmonie,Rameau s’entend à composer des chœurs somp-tueux, qu'ils soient monodiques, polyphoniques, en-trecoupés d'interventions solistes ou instrumentaleset quels que soient les sentiments ou les passionsdont il leur confie l'expression.

4. airs : plus rares que dans l'opéra italien, Rameauen offre pourtant maints exemples remarquables et

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16 5 ŒUVRE THÉORIQUE

toujours d'une originalité marquée. Certains forcentl'admiration comme les airs de Télaïre « Tristesapprêts » (Castor et Pollux), d'Iphise « Ô jour af-freux », de Dardanus « Lieux funestes », les invo-cations de Huascar dans Les Indes galantes, l'ariettefinale de Pygmalion « L'amour qui règne », etc.

5. récitatifs enfin, beaucoup plus proches de l'ariosoque du recitativo secco, auxquels le compositeurapporte autant de soin qu'au reste pour respecterscrupuleusement la prosodie française et mettre enœuvre sa science harmonique afin de rendre les ef-fets de la passion et des sentiments.

Pendant la première partie de sa carrière lyrique (1733-1739) Rameau écrit ses grands chefs-d'œuvre destinés àl'Académie royale de musique : trois tragédies en musiqueet deux opéras-ballets qui composent encore aujourd'huile fonds de son répertoire. Après l'interruption de 1740 à1744, il devient musicien officiel de la cour et composeessentiellement dans le registre des pièces de divertisse-ment faisant une part prépondérante à la danse, à la sen-sualité, à un caractère pastoral idéalisé avant de revenir, àla fin de sa vie, aux grandes compositions théâtrales dansun style renouvelé (Les Paladins, Les Boréades).

4.4.1 Librettistes

Collé, d'abord librettiste puis détracteur.

Contrairement à Lully qui collabora étroitement avecPhilippe Quinault pour la plupart de ses œuvres lyriques,

Rameau n'a que très rarement travaillé avec le même li-brettiste. Il était très exigeant, de mauvais caractère et neput entretenir de longues collaborations avec ses diffé-rents librettistes, à l'exception de Louis de Cahusac[66].Nombreux sont les spécialistes de Rameau qui regrettentque la collaboration avec Houdar de la Motte n'ait puavoir lieu ou que le projet de Samson en collaborationavec Voltaire n'ait pas abouti, car Rameau n'a pu travaillerqu'avec des écrivains de second ordre. Il fit la connais-sance de la plupart d'entre eux chez la Pouplinière, à laSociété du Caveau ou chez le comte de Livry, tous lieuxoù se tenaient de joyeuses réunions de beaux esprits.Aucun d'entre eux n'a pu produire de texte qui soit à lahauteur de sa musique ; les intrigues sont souvent alam-biquées et d'une naïveté et/ou d'une invraisemblance dé-concertantes - mais c'était la loi du genre et probablementaussi ce qui fait une partie de son charme, la versifica-tion n'était pas des meilleures, et Rameau a dû, plus d'unefois, faire modifier les livrets et réécrire la musique aprèsles premières représentations pour corriger les défauts lesplus critiqués : ce qui nous vaut les deux versions de Cas-tor et Pollux (1737 et 1754) et surtout, de Dardanus (1739et 1744). À titre de curiosité, il faut noter celui de Platéedont Rameau a acheté les droits à Jacques Autreau afin depouvoir le faire adapter à sa guise[67],[note 21].

4.5 Ouvrages pour la foire

Rameau a également composé la musique de plusieursspectacles comiques, sur des textes de Piron, pour lesfoires de Saint-Germain ou de Saint-Laurent (à Paris),dont toute la musique est perdue :

• Le Procureur dupé sans le savoir

• L'Endriague (1723)

• L'Enrôlement d'Arlequin (1726)

• Le Faux Lord ou La Robe de dissension (1726)

• La Rose ou Les Fêtes de l’Hymen (1726)

On considère que ce type de représentations foraines està l'origine de l'opéra comique.

5 Œuvre théorique

Article détaillé : Liste des œuvres théoriques et des écritsde Rameau.

5.1 Théories sur l'harmonie

Malgré les succès rencontrés en tant que compositeur, Ra-meau attribuait plus d'importance encore à ses travaux

Page 17: Jean Philippe Rameau

5.1 Théories sur l'harmonie 17

théoriques : Chabanon ne rapporte-t-il pas, en 1764, dansson Éloge de M. Rameau : « On lui a entendu dire qu'il re-grettait le temps qu'il avait donné à la composition, puis-qu'il était perdu pour la recherche des principes de sonArt ».La théorie musicale élaborée par Rameau l'a en effetpréoccupé tout au long de sa carrière, on pourrait direde sa vie[note 22] : les idées exposées dans son Traitéde l'harmonie réduite à ses principes naturels publié en1722 alors qu'il est encore organiste de la cathédrale deClermont-Ferrand, qui l'a posé en plus grand théoriciende son époque sont déjà en cours de maturation bien desannées avant son départ de cette ville.Bien sûr, les anciens, depuis les Grecs et en passant pardes musiciens ou des savants tels que Zarlino, Descartes,Mersenne, Kircher, Huyghens qu'il ne manque pas de ci-ter, avaient fait le lien entre les proportions mathéma-tiques et les sons engendrés par les cordes vibrantes oules tuyaux sonores. Mais les conclusions qu'ils en avaienttirées restaient, quant à l'application à la musique, élé-mentaires et n'avaient abouti qu'à des notions et à un foi-sonnement de règles entachées d'empirisme.Esprit systématique, Rameau, à la suite de Descartes dontil a lu le Discours de la méthode et le Compendium musi-cae, veut se libérer du principe d'autorité et s’il ne peuts’affranchir de présupposés, il est animé par la volonté defaire de la musique, non seulement un art, ce qu'elle étaitdéjà, mais une science déductive à l'image des mathéma-tiques. N’affirme-t-il pas :

« Conduit dès ma plus tendre jeunesse, parun instinct mathématique dans l’étude d’un Artpour lequel je me trouvais destiné, et qui m’atoute ma vie uniquement occupé, j’en ai vouluconnaître le vrai principe, comme seul capablede me guider avec certitude, sans égard pourles habitudes ni les règles reçues. »

— Démonstration du principe de l’harmonie, page 110Lorsqu'il reconnaît en 1730 avoir appris de M. Lacroix,de Montpellier, la règle de l'octave à l'âge de vingt ans, ils’empresse d'ajouter « il y a loin de là à la Basse fonda-mentale, dont nul ne peut se vanter de m'avoir donné lamoindre notion[68]. »Sa première approche (développée dans le traité de 1722)est donc purement mathématique ; il part du principe que« la corde est à la corde ce que le son est au son »[note 23]

- c'est-à-dire que, de la même façon qu'une corde don-née contient deux fois une corde de demi-longueur, demême le son grave produit par la première « contient »deux fois le son plus aigu produit par la seconde. Onsent le présupposé inconscient d'une telle idée (que si-gnifie précisément le verbe « contenir » ?), cependant lesconclusions qu'il en tire vont le confirmer dans cette voie,d'autant plus que, avant 1726, il prend connaissance destravaux de Joseph Sauveur sur les sons harmoniques qui

viennent les corroborer de façon providentielle. En ef-fet, cet auteur démontre que lorsqu'une corde vibrante ouun tuyau sonore - un « corps sonore » - émet un son, ilémet aussi, quoique de façon beaucoup plus faible, sestroisième et cinquième harmoniques[note 24], que les mu-siciens appellent douzième et dix-septième degrés diato-niques. À supposer que la finesse de l'ouïe ne permettepas de les identifier distinctement, un dispositif physiquetrès simple permet de visualiser l'effet - détail importantpour Sauveur qui était sourd. C'est l'irruption de la phy-sique dans le domaine que se partageaient auparavant lesmathématiques et les musiciens.Armé de ce fait d'expérience et du principe de l'identitédes octaves (« qui ne sont que des répliques ») Rameau entire la conclusion du caractère « naturel » de l’accord par-fait majeur puis, par une analogie qui paraît d'évidencebien que physiquement infondée, celui de l'accord par-fait mineur. De cette découverte naîtront les concepts debasse fondamentale, de consonances et de dissonances,de renversement des accords ainsi que leur nomenclatureraisonnée, de modulation qui fondent l'harmonie tonaleclassique. Après seulement viennent les questions pra-tiques touchant le tempérament, les règles de la compo-sition, la mélodie, les principes d'accompagnement. Toutceci apparaît essentiel à Rameau car, auparavant procédéde musicien, l'harmonie devient principe naturel : c'estla quintessence de la musique ; dès l'émission d'un son,l'harmonie est présente ; la mélodie, au contraire, ne naîtqu'après, et les intervalles successifs devront se confor-mer à l'harmonie initiée et dictée par la basse fondamen-tale (la « boussole de l'oreille »)[note 25]. L'aspect psycho-physiologique n'est pas, en effet et tant s’en faut, absentde la théorie de Rameau : il est particulièrement déve-loppé dans les Observations sur notre instinct pour la mu-sique et sur son principe, opuscule qu'il publie en 1754 enréponse indirecte à la Lettre sur la musique française deRousseau. Le caractère naturel de l'harmonie, matérialisépar la basse fondamentale, est tel qu'il marque de façoninconsciente notre instinct pour la musique :

« ... pour peu qu'on ait d'expérience, ontrouve de soi-même la basse fondamentale detous les repos d'un chant, selon l'explicationdonnée dans notre Nouveau Système (...) ; cequi prouve encore bien l'empire du principedans tous ses produits, puisqu'en ce cas-ci lamarche de ces produits rappelle à l'oreille celledu principe qui l'a déterminée et suggérée parconséquent au compositeur. »

« Cette dernière expérience où le seul ins-tinct agit, de même que dans les précédentes,prouve bien que la mélodie n'a d'autre prin-cipe que l'harmonie rendue par le corps so-nore : principe dont l'oreille est tellement pré-occupée, sans qu'on y pense, qu'elle suffitseule pour nous faire trouver sur le champ lefond d'harmonie dont cette mélodie dépend.

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18 5 ŒUVRE THÉORIQUE

(...) aussi trouve-t'on quantité de musiciens ca-pables d'accompagner d'oreille un chant qu'ilsentendent pour la première fois. »

« Ce guide de l'oreille n'est autre, en effet,que l'harmonie d'un premier corps sonore, dontelle n'est pas plutôt frappée, qu'elle pressenttout ce qui peut suivre cette harmonie, et y ra-mener ; et ce tout consiste simplement dans laquinte pour les moins expérimentés, et dans latierce encore lorsque l'expérience a fait de plusgrands progrès. »

Rameau tient plus qu'à toute autre chose, à sa théorie : ilmultiplie les traités, entretient pendant plus de trente ansde nombreuses polémiques à ce sujet : avec Montéclairvers 1729, avec le père Castel - d'abord ami avec le-quel il finit par se brouiller vers 1736, avec Jean-JacquesRousseau, et les Encyclopédistes, avec d'Alembert enfin,d'abord l'un de ses fidèles partisans, et il recherche dansses contacts épistolaires la reconnaissance de ses travauxpar les mathématiciens les plus illustres (Bernoulli, Eu-ler) et les musiciens les plus érudits, notamment le padreMartini. Aucun passage ne résume peut-être mieux toutce que tire Rameau de la résonance du corps sonore, queces lignes enthousiastes extraites de la Démonstration duprincipe de l'harmonie :

« Que de principes émanés d'un seul ! Faut-il vous les rappeler, Messieurs ? De la seule ré-sonance du corps sonore, vous venez de voirnaître l'harmonie, la basse fondamentale, lemode, ses rapports dans ses adjoints, l'ordreou le genre diatonique dont se forment lesmoindres degrés naturels de la voix, le genremajeur, et le mineur, presque toute la mélo-die, le double-emploi, source féconde d'unedes plus belles variétés, les repos, ou cadences,la liaison qui, seule, peut mettre sur les voiesd'une infinité de rapports et de successions,même la nécessité d'un tempérament, (…) sansparler du mode mineur, ni de la dissonance tou-jours émanés du même principe, non plus quedu produit de la proportion quintuple (…) »

« D'un autre côté, avec l'harmonie naissentles proportions, et avec la mélodie, les progres-sions, de sorte que ces premiers principes ma-thématiques, trouvent eux-mêmes ici leur prin-cipe physique dans la nature. »

« Ainsi, cet ordre constant, qu'on n'avaitreconnu tel qu'en conséquence d'une infinitéd'opérations et de combinaisons, précède icitoute combinaison, et toute opération humaine,et se présente, dès la première résonance du

corps sonore, tel que la nature l'exige : ain-si, ce qui n'était qu'indication devient prin-cipe, et l'organe, sans le secours de l'esprit,éprouve ici ce que l'esprit avait découvert sansl'entremise de l'organe ; et ce doit être, à monavis, une découverte agréable aux savants, quise conduisent par des lumières métaphysiques,qu'un phénomène où la nature justifie et fondepleinement des principes abstraits. »

5.2 Traités et autre écrits

Traité de l'harmonie.

Les ouvrages dans lesquels Rameau expose sa théorie dela musique sont essentiellement au nombre de quatre :

• Traité de l'harmonie réduite à ses principes naturels,Paris (1722)

• Nouveau système de musique théorique, Paris (1726)

• Génération harmonique, Paris (1737)

• Démonstration du principe de l'harmonie, Paris(1750)

mais sa participation aux réflexions de nature scientifique,esthétique ou philosophique de son temps l'a conduit àrédiger beaucoup d'autres écrits sous la forme d'ouvrages,lettres, pamphlets etc. dont on peut citer :

• Dissertation sur les différentes méthodesd'accompagnement, Paris (1732)

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• Observations sur notre instinct pour la musique et surson principe, Paris (1754)

• Erreurs sur la musique dans l'Encyclopédie, Paris(1755)

• Code de musique pratique, Paris (1760)

6 L'art de Rameau

Le Poète inspiré, pris à tort pour un portrait de Rameau[69]

La musique de Rameau se caractérise par la science ex-ceptionnelle de ce compositeur qui se veut avant toutthéoricien de son art. Elle ne s’adresse pourtant pas seule-ment à l'intelligence et Rameau a su mettre en œuvre idéa-lement son dessein quand il affirme « Je cherche à cacherl'art par l'art même ».Le paradoxe de cette musique, c'est qu'elle est nouvelle,dans la mise en œuvre de procédés auparavant inexis-tants, mais qu'elle se concrétise dans des formes suran-nées ; Rameau paraît révolutionnaire aux Lullystes dérou-tés par l'harmonie complexe qu'elle déploie, et réaction-naire aux philosophes qui n'évaluent que son contenantet ne peuvent ou ne veulent l'écouter. L'incompréhensionqu'il subit de la part de ses contemporains l'empêched'ailleurs de renouveler certaines hardiesses telles que lesecond trio des Parques d'Hippolyte et Aricie, qu'il doit re-tirer après les premières représentations car les chanteursne parviennent pas à l'interpréter correctement. Ainsi, leplus grand harmoniste de son époque est méconnu alorsmême que l'harmonie - l'aspect « vertical » de la musique- prend définitivement le pas sur le contrepoint, qui re-présente son aspect « horizontal ».

On ne peut que rapprocher les destins de Rameau et deBach, les deux géants de la science musicale du XVIIIe

siècle, que celle-ci isole de tous leurs collègues, quandtout le reste les sépare. À ce titre, l'année 1722 qui voit pa-raître simultanément le Traité de l'Harmonie et le premiercycle du Clavier bien Tempéré est très symbolique. Lesmusiciens français de la fin du XIXe siècle ne s’y trom-pèrent pas, en pleine hégémonie musicale germanique,lorsqu'ils virent en Rameau le seul musicien français deforce à être comparé à Bach, ce qui permit la redécou-verte progressive de son œuvre.

7 Postérité, de l'oubli au renouveau

7.1 De sa mort à la Révolution

Les œuvres de Rameau sont représentées presque jusqu’àla fin de l'Ancien Régime. Toutes n'ont pas été éditées,mais de nombreux manuscrits, autographes ou non, sontrassemblés par Jacques Joseph Marie Decroix dont leshéritiers feront don à la Bibliothèque nationale du fondsexceptionnel ainsi rassemblé.La Querelle des Bouffons reste célèbre, avec les attaquessubies par Rameau du fait des partisans de l'opéra-bouffeitalien. On sait moins, en revanche, que certains musi-ciens étrangers formés à la tradition italienne voient enla musique de Rameau, vers la fin de sa vie, un modèlepossible pour la réforme de l'opera seria. C'est ainsi queTommaso Traetta compose deux opéras qui en sont di-rectement inspirés, Ippolito ed Aricia (1759) et I Tinta-ridi (d'après Castor et Pollux, 1760) après avoir fait tra-duire leurs livrets[70]. Traetta a été conseillé par le comteFrancesco Algarotti, un des plus ardents partisans d'uneréforme de l'opera seria selon le modèle français ; il au-ra une influence très importante sur celui auquel on at-tribue généralement le titre de réformateur de l'opéra,Christoph Willibald Gluck. Trois opéras italiens « réfor-més » de ce dernier (Orfeo ed Euridice, Alceste et Parideed Elena) prouvent qu’il connaît l’œuvre de Rameau ; parexemple, l’Orfeo et la première version de Castor et Pol-lux, datant de 1737, commencent tous deux par la scènedes funérailles d’un des principaux personnages, qui doitrevenir à la vie dans la suite de l’action[71]. Plusieurs desréformes revendiquées dans la préface d’Alceste sont déjàpratiquées par Rameau : il utilise le récitatif accompa-gné ; l’ouverture de ses dernières compositions est reliéeà l’action qui va suivre[72]. Aussi, lorsque Gluck arrive en1774 à Paris où il va composer six opéras français, onpeut considérer qu’il continue la tradition de Rameau.

7.1.1 Oubli des révolutionnaires

Pourtant, si la popularité de Gluck se prolonge après laRévolution française, ce n'est pas le cas pour Rameau. Àla fin du XVIIIe siècle, ses œuvres disparaissent du réper-

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20 7 POSTÉRITÉ, DE L'OUBLI AU RENOUVEAU

toire pour de très nombreuses années[73]. Sous la Révolu-tion, il n'est plus compris[74].

7.2 Dix-neuvième siècle

Statue de Jean-Philippe Rameau inaugurée en 1880 à Dijon, surla place qui porte aujourd'hui son nom.

Pendant la plus grande partie du XIXe siècle, la musiquede Rameau reste oubliée et ignorée, même si son nomconserve tout son prestige : une rue de Paris lui est dédiéedès 1806.

Statue de Rameau à l'Opéra de Paris.

On ne joue plus la musique de Rameau, ou peut-êtrequelques fragments, quelques pièces de clavecin (au pianole plus souvent). Le musicien n'est pourtant pas oublié :il est choisi pour que sa statue soit l'une des quatre qui

ornent le grand vestibule de l'Opéra de Paris conçu en1861 par Charles Garnier ; en 1880, Dijon lui rend éga-lement hommage par l'inauguration d'une statue.

7.2.1 Berlioz

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Hector Berlioz étudie Castor et Pollux ; il y admire en par-ticulier l’air de Télaïre « Tristes apprêts », mais « là oùl’auditeur moderne identifie facilement les points com-muns avec la musique de Rameau, lui-même a une netteconscience du fossé qui les sépare »[75].

7.2.2 Redécouverte après 1871

De façon inattendue, c’est la défaite française lors de laguerre de 1870 qui permet à la musique de Rameau deresurgir du passé : l’humiliation ressentie à cette occasionamène certains musiciens à rechercher dans le patrimoinenational des compositeurs français de taille à se mesu-rer aux compositeurs germaniques dont l’hégémonie estalors complète en Europe : Rameau est considéré commede même force que son contemporain Johann SebastianBach et l’on se met à réétudier son œuvre dont on retrouveles sources rassemblées par Decroix.

7.2.3 Édition monumentale de Saint-Saëns, Bordeset d'Indy

C'est à partir des années 1890 que le mouvement s’ac-célère un peu, avec la fondation de la Schola Cantorumdestinée à promouvoir la musique française puis, en 1895,Charles Bordes, Vincent d'Indy et Camille Saint-Saënsentreprennent l'édition des œuvres complètes, projet quin'ira pas à sa fin mais aboutit en 1918 à l'édition de 18volumes.

7.3 Vingtième siècle

C'est au tout début du XXe siècle que l'on assiste, pour lapremière fois, à la reprise en concert d'œuvres complètes :en juin 1903, La Guirlande, œuvre charmante et sans tropde prétention, est interprétée à la Schola Cantorum. L'undes auditeurs est Claude Debussy qui est enthousiasméet s’écrie : « Vive Rameau, à bas Gluck ». L'Opéra deParis suit en 1908 avec Hippolyte et Aricie : c'est un semi-échec ; l'œuvre n'attirant qu'un public restreint, ne connaîtque quelques représentations. Castor et Pollux – qui n'y aplus été représenté depuis 1784 – est choisi en 1918 pourla réouverture de l'Opéra après la guerre, mais l'intérêt dupublic pour la musique de Rameau s’accroît lentement.

Page 21: Jean Philippe Rameau

21

7.3.1 Renouveau baroque

Ce mouvement de redécouverte ne s’accélère vraimentqu'à partir des années 1950 (1952 : reprise des Indesgalantes à l'Opéra, 1956 : Platée au Festival d'Aix-en-Provence, 1957 : Les Indes galantes sont choisies pour laréouverture de l'opéra royal à Versailles). Jean Malignon,dans son livre rédigé à la fin des années 1950, témoignede ce que personne, à cette époque, ne connaît Rameaupour en avoir entendu les compositions essentielles.Depuis lors, l'œuvre de Rameau bénéficie à plein du re-tour en faveur de la musique ancienne. La majeure par-tie de son œuvre lyrique, jadis réputée injouable (commenombre d'opéras de son époque), dispose à présent d’unediscographie de qualité par les ensembles baroques lesplus prestigieux. Toutes ses grandes œuvres ont été re-prises, et jouissent toujours d’un grand succès, notam-ment Les Indes galantes. Enfin, la première (sic) repré-sentation de sa dernière tragédie lyrique, Les Boréades, amême eu lieu en 1982 au festival d'Aix-en-Provence (lesrépétitions avaient été interrompues par la mort du com-positeur en 1764).

8 Œuvres inspirées par Rameau

• Paul Dukas, en 1903, compose ses Variations, inter-lude et finale sur un thème de Rameau pour le pia-niste Édouard Risler.

9 Citations

9.1 De Rameau

• « Je cherche à cacher l'art par l'art même »[76]

• « La vraie musique est le langage du cœur »[77]

• « C'est à l'âme que la musique doit parler »[78]

9.2 À propos de Rameau

• « Il était réellement dans l'enthousiasme en compo-sant » Hugues Maret[79]

• « Sa fille et sa femme n'ont qu'à mourir quand ellesvoudront ; pourvu que les cloches de la paroisse,qu'on sonnera pour elles, continuent de résonner ladouzième et la dix-septième[note 26],[note 27], tout serabien. » Diderot dans Le Neveu de Rameau

• « Ça, dites-moi ; je ne prendrai pas votre oncle pourexemple ; c'est un homme dur ; c'est un brutal ; il estsans humanité ; il est avare. Il est mauvais père, mau-vais époux ; mauvais oncle... » Diderot dans Le Ne-veu de Rameau

• « Le besoin de comprendre – si rare chez les artistes– est inné chez Rameau. N'est-ce pas pour y satis-faire qu'il écrivait un Traité de l'harmonie, où il pré-tend restaurer les droits de la raison et veut faire ré-gner dans la musique l'ordre et la clarté de la géomé-trie… il ne doute pas un instant de la vérité du vieuxdogme des Pythagoriciens… la musique entière doitêtre réduite à une combinaison de nombres ; elle estl'arithmétique du son, comme l'optique est la géo-métrie de la lumière. On voit qu'il en reproduit lestermes, mais il y trace le chemin par lequel passeratoute l'harmonie moderne ; et lui-même ». ClaudeDebussy

10 Annexes

10.1 Bibliographie

10.1.1 Ouvrages généraux

• Antoine Goléa, La musique, de la nuit des tempsaux aurores nouvelles, Paris, Alphonse Leduc et Cie, 1977, 954 p. (ISBN 2-85689-001-6)

• Paul Pittion, La musique et son histoire : tome I —des origines à Beethoven, Paris, Éditions Ouvrières, 1960

10.1.2 Sur Rameau

• Michel Paul Guy de Chabanon, Éloge de M. Ra-meau, Paris, 1764 (lire en ligne)

• Hugues Maret, Éloge historique de M. Rameau, Pa-ris, 1766 (lire en ligne)

• Louis Laloy, Rameau, Paris, Alcan Félix, coll. « Lesmusiciens célèbres », 1908, 125 p. (lire en ligne)

• Paul-Marie Masson, L'Opéra de Rameau, Paris,Henri Laurens, 1930

• Jean Malignon, Rameau, Paris, Seuil, 1960, 192 p.(ISBN 2-02-000238-8)

• (en) Cuthbert Girdlestone, Jean-Philippe Rameau,sa vie, son œuvre, Londres, Dover Publications, 1969 (ISBN 0-486-26200-6), traduit en français en1983 ((ISBN 2-220-02439-3))

• Philippe Beaussant, Rameau de A à Z, Paris, Fayard, 1983 (ISBN 2-213-01277-6)

• Catherine Kintzler, Jean-Philippe Rameau, Splen-deur et naufrage de l'esthétique du plaisir à l'âge clas-sique, Paris, Minerve, 1988 (ISBN 2-86931-030-7)

Page 22: Jean Philippe Rameau

22 11 NOTES ET RÉFÉRENCES

• Sylvie Bouissou et Denis Herlin, Jean-Philippe Ra-meau : Catalogue thématique des œuvres musicales,t. 1, Musique instrumentale. Musique vocale reli-gieuse et profane, Paris, CNRS Édition et Éditionsde la BnF, coll. « Sciences de la musique - Série Ré-férences », 2007 (ISBN 978-2-271-06432-5)

• Christophe Rousset, Jean-Philippe Rameau, ActesSud, coll. « Classica », 2007, 140 p. (ISBN 978-2-742-77076-2)

• Jean-Paul Dous, Rameau : Un musicien philosopheau siècle des Lumières, L'Harmattan, coll. « CNL(format Kindle) », 2011, 228 p. (ISBN 978-2-29654-321-8)

• Sylvie Bouissou, Jean-Philippe Rameau, Fayard,coll. « CNL (format Kindle) », 2014, 1024 p.

10.1.3 Autour de Rameau

• Norbert Dufourcq, Le clavecin, Paris, PUF, coll.« Que sais-je ? », 1981, 3e éd. (1re éd. 1949), 127 p.

• Jean-François Paillard, La musique française clas-sique, Paris, Gallimard, coll. « Que sais-je ? », 1964

• André Charrak, Raison et perception, fonderl'harmonie au XVIIIe siècle, Vrin, 2001.

• Christian Wasselin et Pierre-René Serna, CahierBerlioz, no 77, Paris, L'Herne, 2003, 396 p. (ISBN2-85197-090-9)

John Eliot Gardiner, « Rameau, Berlioz,Debussy : une filiation ? » : Réflexionsd’un musicien francophile, p. 274-279

10.1.4 Ouvrages cités

• Hector Berlioz, Mémoires, Paris, Flammarion, coll.« Harmoniques », 1991 (ISBN 978-2-700-02102-8),présentés par Pierre Citron

• Claude Debussy, Monsieur Croche, antidilettante,Paris, Gallimard, coll. « L'Imaginaire », 1987 (ar-ticles rassemblés de 1901 à 1917), 362 p. (ISBN 2-07-071107-2)

• Bénédicte Palaux-Simonnet, Paul Dukas, Genève,Papillon, coll. « Mélophiles », 2001

11 Notes et références

11.1 Notes[1] Les musicographes français se sont longtemps opposés à

l'utilisation du mot « baroque » pour qualifier la musiquede Lully et de Rameau : voir à ce sujet le livre de Philippe

Beaussant Vous avez dit “Baroque” ? : musique du passé,pratique d'aujourd'hui, La Calade, Actes Sud, 1988, 161p., (ISBN 978-2-86869-233-7).

[2] La jeune épouse aurait aussi été courtisée, auparavant parJean-Philippe

[3] Ph. Beaussant ajoute : « C'est bon, pour un mécène des’appeler Le Riche et de l'être ! »

[4] Dans les Confessions, livre VII, J.-J. Rousseau évoque lacomposition de son opéra Les Muses Galantes : « ... danstrois semaines j'eus fait, à la place du Tasse, un autre acte,dont le sujet était Hésiode inspiré par une muse. Je trou-vai le secret de faire passer dans cet acte une partie del'histoire de mes talents, et de la jalousie dont Rameauvoulait bien les honorer. »

[5] Par sa mère Mimi Dancourt, elle est la petite-fille deFlorent Carton Dancourt.

[6] Girdlestone parle d'un Forqueray, organiste à ne pasconfondre avec les deux célèbres violistes du même nom etd'ailleurs apparentés, cependant que Beaussant le signaleen erreur et indique Pierre-Claude Foucquet.

[7] La première mention de Rameau dans un dictionnaire setrouve dans le « Musicalisches Lexicon oder MusicalischeBibliothek » de Johann Gottfried Walther édité à Leip-zig en 1732. En 1727 Tobias Westbladh, de l'Universitéd'Uppsal, avait déjà publié une thèse s’intéressant pour lapremière fois aux travaux théoriques de Rameau

[8] Il consacre dans ses traités théoriques une analyse trèsfouillée au célèbre monologue d'Armide (« Enfin, il est enma puissance »), qu'il considère comme un des plus purschefs-d'œuvre de la déclamation lyrique à la française.

[9] La tradition (Mercure de France, 1761) veut que ce soit enentendant Jephté que Rameau décida de se lancer à l'assautde l'Académie : « C'est elle qui, de l'aveu du célèbre M.Rameau, a été la cause occasionnelle dont il a enrichi notrethéâtre lyrique. Ce grand homme entendit Jephté ; le ca-ractère noble et distingué de cet ouvrage le frappa… Ilconçut dès ce moment que notre musique dramatique étaitsusceptible d'une nouvelle force et de nouvelles beautés. Ilforma le projet d'en composer, il osa être créateur. Il n'enconvient pas moins que Jephté procura Hippolyte et Ari-cie ».

[10] Celle-ci trompait son mari avec le duc de Richelieu, ayantfait aménager un passage secret entre sa chambre et unappartement voisin loué par le duc

[11] Voir François Couperin avec ses « Goûts réunis » et« l'Apothéose de Corelli » de 1724 ou encore, le suc-cès des « Quatre Saisons » de Vivaldi jouées en 1728 auConcert Spirituel

[12] Pour Rousseau, c'est la mélodie qui guide la musique etpour Rameau c'est l'harmonie : deux positions irrémédia-blement inconciliables !

[13] Rameau finit par « vouloir trouver dans les proportionsmusicales toute la géométrie, dans les modes majeur etmineur les deux sexes des animaux, enfin la Trinité dansla triple résonance du corps sonore » (D'Alembert, Ré-flexions sur la théorie de la musique)

Page 23: Jean Philippe Rameau

11.2 Références 23

[14] Une plaque commémorative posée en 1883 à l'occasion dubicentenaire de sa naissance et son buste sont situés dansla troisième chapelle du collatéral droit dédiée à Cécile deRome (patronne des musiciens)

[15] « On lui a entendu dire qu'il regrettait le temps qu'il avaitdonné à la composition, puisqu'il était perdu pour la re-cherche des principes de son Art » rapporté par Chabanondans son Éloge de M. Rameau (1764)

[16] Comparer à l'inventaire après décès de François Couperin(un grand clavecin, trois épinettes, un cabinet d'orgue) oude Louis Marchand (trois clavecins et sept épinettes)

[17] Hippolyte et Aricie, Éditions A. Durand et Fils, 1908, p.22 (Rendons un éternel hommage...). Voir aussi http://www.youtube.com/watch?v=8iOz5T-1wHE à la 43e mi-nute

[18] Cela n'a cependant rien d'étonnant : les organistes impro-visaient et beaucoup d'entre eux n'ont rien publié, ou peude choses[réf. souhaitée]

[19] Le fait est relevé par Chabanon dans son Éloge de M. Ra-meau (1764), qui écrit : « Parcourez toutes les ouverturesde M. Rameau ; l'y trouverez-vous semblable à qui que cesoit ? De l'une à l'autre il ne se ressemble pas lui-même. »

[20] Selon le maître de ballet Gardel, « Rameau a deviné ce queles danseurs ignoraient eux-mêmes ; aussi le regardons-nous avec justice comme notre premier maïtre. »(Gird-lestone page 563)

[21] C'est Le Valois d'Orville qui réalisa ce travail.

[22] Il indique en effet, à la fin de la Génération harmonique :« J'ai senti, par exemple, dès l'âge de 7 ou 8 ans, que letriton devait être sauvé de la sixte. »

[23] C'est la formulation même de Descartes dans son Com-pendium musicae : « Sonus se habet ad sonum, ut nervusad nervum. »

[24] et, en fait, beaucoup d'autres, peu ou pas audibles indivi-duellement, qui composent le timbre du son

[25] cf. Nouveau système de musique théorique (préface) : « Jefais voir pour lors que la mélodie et l'harmonie nous sontnaturelles ; que la mélodie naît de l'harmonie. »

[26] c'est-à -dire les troisième et cinquième harmoniques

[27] « Ces mêmes consonances se distinguent encore dans lestimbales, dans le son le plus grave d'une trompette, dansles cloches, et caetera pourvu qu'on donne pour lors touteson attention aux ondulations qui forment une espèce demurmure dans l'air, immédiatement après le son domi-nant de l'instrument propre à cet effet, sans s’occuper pourlors de ce son dominant, ni sans y être distrait par aucunbruit étranger ; mais en imaginant en soi-même la quinteou la tierce majeure de ce son dominant, pour disposerl'oreille à sentir ces consonances dans leurs unissons oudans leurs octaves, dont l'air retentira ; ce qui est plus fa-cile à distinguer dans les cloches, parce que le son en estplus éclatant, supposé d'ailleurs qu'il soit net et distincte-ment déterminé. Au reste, si l'on n'y entend d'abord que laquinte ou la tierce majeure, il n'y aura qu'à imaginer en-suite la consonance qu'on n'aura pas entendue, bientôt elle

viendra frapper le tympan de l'oreille, et bientôt après cesdeux consonances le frapperont également ensemble. »,Nouveau système de musique théorique (chap. 1)

11.2 Références

[1] « Le plus grand génie musical que la France ait produit »,selon Camille Saint-Saëns (Jean-François Paillard 1964,p. 38)

[2] « Il est sans conteste un des plus grands génies musicauxde la civilisation occidentale », selon Paul-Marie Masson(Jean-François Paillard 1964, p. 44)

[3] Michel de Chabanon 1764, p. 7

[4] Philippe Beaussant 1983, p. 21

[5] Date de naissance indiquée par Chabanon dans son Élogede M. Rameau (1764)

[6] Site officiel de l'église Notre-Dame de Dijon

[7] Philippe Beaussant 1983, p. 285

[8] Philippe Beaussant, Rameau de A à Z, Fayard, 1983, p.283

[9] Philippe Beaussant 1983, p. 13

[10] Philippe Beaussant 1983, p. 22

[11] Cuthbert Girdlestone 1969, p. 3

[12] Rousset 2007, p. 15

[13] Louis Laloy 1908, p. 18

[14] Philippe Beaussant 1983, p. 14

[15] Ch. Marandet, « Orgues, organistes en Auvergne », Bulle-tin historique de l'Auvergne, 85, 1971, p. 82. Le contrat estconservé aux Archives départementales du Puy-de-Dôme(SG suppl. 742 f° 160 et 171).

[16] Rousset 2007, p. 16

[17] Louis Laloy 1908, p. 16

[18] Cuthbert Girdlestone 1969, p. 4

[19] Dufourcq, 1981, p. 87.

[20] Dictionnaire de la musique : sous la direction de Marc Vi-gnal, Larousse, 2011, 1516 p. (ISBN 978-2-0358-6059-0), p. 14

[21] Marc Honegger, Dictionnaire de la musique : Tome 2,Les Hommes et leurs œuvres. L-Z, Bordas, 1979, 1232p. (ISBN 978-2-04010-721-5), p. 285

[22] Bouissou 2014, ch. II

[23] Annie Regond-Bohat, « Clermont à l'époque de Ra-meau », Rameau en Auvergne, Recueil d'études établi etprésenté par Jean-Louis Jam, Clermont-Ferrand, 1986, p.9-18.

Page 24: Jean Philippe Rameau

24 11 NOTES ET RÉFÉRENCES

[24] René Suaudeau, Introduction à l'harmonie de Rameau,Clermont-Ferrand, École Nationale de Musique, 1960, 45p.

[25] Haendel l'aurait approuvé et Bach, contesté

[26] Philippe Beaussant 1983, p. 151-153

[27] Auguste Jal, Dictionnaire critique de biographie etd'histoire, Paris, Henri Plon, 1872, p. 1036.

[28] Cuthbert Girdlestone 1969, p. 8

[29] Hugues Maret 1766, p. 62

[30] Philippe Beaussant 1983, p. 179

[31] Philippe Beaussant 1983, p. 16

[32] Cuthbert Girdlestone 1969, p. 11

[33] Philippe Beaussant 1983, p. 137

[34] Cuthbert Girdlestone 1969, p. 475

[35] Cuthbert Girdlestone 1969, p. 476 et 601

[36] Cuthbert Girdlestone 1969, p. 197

[37] Philippe Beaussant 1983, p. 18

[38] En 1749 d'Argenson fait interdire que plus de deux de sesopéras puissent être représentés la même année

[39] Cuthbert Girdlestone 1969, p. 483

[40] Philippe Beaussant 1983, p. 165

[41] Philippe Beaussant 1983, p. 66-72

[42] Philippe Beaussant 1983, p. 53

[43] Jean Malignon 1960, p. 13

[44] Louis Laloy 1908, p. 76

[45] Cuthbert Girdlestone 1969, p. 480

[46] Philippe Beaussant 1983, p. 90

[47] Philippe Beaussant 1983, p. 19

[48] Hugues Maret 1766, p. 46

[49] Philippe Beaussant 1983, p. 166

[50] Extrait du registre paroissial de l'église Saint-Eustache àParis (1764) : Du jeudi 13 septembre 1764, Jean-PhilippeRameau, âgé de quatre-vingt-six ans, compositeur de lamusique du cabinet du Roy et pensionnaire de Sa Majes-té et de l'Académie Royale de musique, décédé hier ausoir, rue des Bons enfants, a été inhumé dans notre église,en présence de Claude-François Rameau, écuyer, valet dechambre du Roy, son fils, et de Edme-Charles Le Françoisde Villeneuve, pensionnaire du Roy. Signé : Rameau ; LeFrançois Villeneuve. Les registres paroissiaux et d'état ci-vil à Paris ont été détruits par les incendies de la Communede Paris (1871) mais l'acte a été recopié par l'archivisteAuguste Jal dans son Dictionnaire critique de biographie etd'histoire, Paris, Henri Plon, 1872, p. 1036.

[51] Jean Malignon 1960, p. 16

[52] Cuthbert Girdlestone 1969, p. 513

[53] Cuthbert Girdlestone 1969, p. 507

[54] Cuthbert Girdlestone 1969, p. 508

[55] Cuthbert Girdlestone 1969, p. 593-594

[56] Peter Noelke, Jean-Philippe Rameau, livret réalisé pour leDVD de Platée par l'Opéra de Paris sous la direction MarcMinkowski.

[57] Philippe Beaussant 1983, p. 340-343

[58] http://ici.radio-canada.ca/nouvelles/arts_et_spectacles/2014/10/10/008-frere-jacques-auteur.shtml

[59] Philippe Beaussant 1983, p. 367

[60] Philippe Beaussant 1983, p. 368

[61] Philippe Beaussant 1983, p. 80

[62] Dates proposées par Philippe Beaussant 1983, p. 82

[63] Cuthbert Girdlestone 1969, p. 64-65

[64] Philippe Beaussant 1983, p. 98

[65] Cuthbert Girdlestone 1969, p. 563

[66] Collé : « Il brusquait les auteurs à un point qu'un galanthomme ne pouvait soutenir de travailler une seconde foisavec lui ; il n'y a que le Cahusac qui ait tenu ; il en avaitfait une espèce de valet de chambre parolier » cité par Ph.Beaussant

[67] Philippe Beaussant 1983, p. 50

[68] Louis Laloy 1908, p. 20

[69] « Notice no 01370006419 », base Joconde, ministère fran-çais de la Culture

[70] Viking p. 1110-11

[71] Cuthbert Girdlestone 1969, p. 201-202

[72] Cuthbert Girdlestone 1969, p. 554

[73] New Grove Dictionary p. 277

[74] Marie-Madeleine Sève, « L'oubli de Rameau, sanctionde l'esprit révolutionnaire ? », in Rameau en Auvergne,Recueil d'études établi et présenté par Jean-Louis Jam,Clermont-Ferrand, 1986, p. 143-163.

[75] Hugh Macdonald The Master Musicians : Berlioz (1982),p. 184.

[76] Lettre de Rameau à Houdar de la Motte

[77] Code de musique pratique chapitre VII article 14

[78] Code de musique pratique chapitre XIV

[79] Hugues Maret 1766, p. 72

Page 25: Jean Philippe Rameau

11.4 Liens externes 25

11.3 Articles connexes

• Musique baroque

• Musique de clavecin

• École française de clavecin

• Harmonie tonale

• Tragédie lyrique

• Pastorale héroïque

• Opéra-ballet

• Acte de ballet

• Interprètes à la scène (chant, danse) :

• Sophie Arnould• Marie-Anne de Camargo• Marie Fel• Marie Sallé• Pierre de Jélyotte

11.4 Liens externes

• Notices d'autorité : Fichier d'autorité internationalvirtuel • International Standard Name Identifier •Bibliothèque nationale de France • Système univer-sitaire de documentation • Bibliothèque du Congrès• Gemeinsame Normdatei • Institut central pour leregistre unique • Bibliothèque nationale de la Diète• Bibliothèque nationale d'Espagne • WorldCat

• (fr et en) Site officiel de l'année Rameau 2014

• (fr) Site consacré à Rameau avec notamment uneliste commentée d'ouvrages théoriques qu'il a rédi-gés

• (fr) Article de Muse Baroque sur les significationsdes tonalités d'après Rameau

• (fr) Extraits d’archives sonores d’œuvres de Jean-Philippe Rameau, sur ContemporaryMusicOnline(portail de la musique contemporaine).

• (en) Ses œuvres scéniques et leurs représentationssur le site CÉSAR

• (en) Ce site comprend sous format html le texte ori-ginal de nombreux écrits théoriques de Rameau etde ses contemporains (Sauveur, d'Alembert, Rous-seau, etc.)

• Plusieurs écrits de Rameau sont disponiblessur www.bnf.fr, notamment : (fr) « Traité del'harmonie », précédé de Rameau, l'harmonie et lesméprises de la tradition

11.4.1 Partitions

• Partitions libres de Jean-Philippe Rameau surl'International Music Score Library Project

• (en) Mutopia Project, Partitions gratuites et codessource

• Portail de l’opéra

• Portail du baroque

• Portail de la musique classique

• Portail du clavecin

• Portail du royaume de France

Page 26: Jean Philippe Rameau

26 12 SOURCES, CONTRIBUTEURS ET LICENCES DU TEXTE ET DE L’IMAGE

12 Sources, contributeurs et licences du texte et de l’image

12.1 Texte• Jean-Philippe Rameau Source : https://fr.wikipedia.org/wiki/Jean-Philippe_Rameau?oldid=120791331 Contributeurs : Shaihulud, Di-

dup, Phido, Orthogaffe, Céréales Killer, Kelson, Gérard, HasharBot, Roudoule, Koyuki, P-e, Symac, Ratigan, Frinck, Spooky, Nguyenld,Mu, Marc Mongenet, MedBot, Ssire, Luna04, Sam Hocevar, Enzino, Iznogood, Phe-bot, Leonard Vertighel, Bibi Saint-Pol, Yves1953, Roo-sevelt, Woww, Escaladix, Oxag, Yopohari, Pixeltoo, Baronnet, Petrusbarbygere, Leag, Bob08, Piku, Tatave, Ludo Thécaire, Sherbrooke,Christophe.moustier, Diderobot, DocteurCosmos, Lorill, MisterMatt Bot, Elg, Angeldream, RobotE, Taguelmoust, Romanc19s, Probot,SCh, Kilom691, Frédéric-FR, Yelkrokoyade, Tcapelle, Raoul75, RobotQuistnix, Cæruleum, YurikBot, Eskimbot, Liszt, Thierry Caro,Solbot, MMBot, Litlok, Huster, Moez, Pierre Driout, Loveless, H2O, FEW, Albedo, Armel ALNAURT, Polmars, Pautard, Frank Renda,Fagairolles 34, Hautbois, Cédric Boissière, Brozouf, Démocrite, Sylenius, Malost, Perky, Pld, Mini.fb, Fabienkhan, 307sw136, Camster,Liquid-aim-bot, GaMip, Gemini1980, Alexandre9996, Keanur, Mikani, Kokin, Hadrianus, Dardanus, Whiskykoka, NicoV, Acer11, Thi-js !bot, Eugène, Massimo Macconi, TaraO, Darev, A2, Kyle the bot, Lafud, Rémih, Deep silence, Le Pied-bot, JAnDbot, Fm790, LeFit, HR,.anacondabot, Xibot, Damien-34, Sebleouf, Philippenusbaumer, Dfeldmann, CommonsDelinker, Wiolshit, Barockmusik, Mazeppa, M-le-mot-dit, LeGéantVert, Salebot, Zorrobot, Sperreau, SalomonCeb, DodekBot~frwiki, Gerakibot, Isaac Sanolnacov, AlnoktaBOT, Priper,TXiKiBoT, VolkovBot, Céphide, Mandariine, Fluti, Ptbotgourou, Gz260, BotMultichill, Vincent Lostanlen, SieBot, Louperibot, Shakki,ZX81-bot, William Jexpire, MystBot, Giry, JLM, Infierno, STBot~frwiki, Alecs.bot, Dosage, Vlaam, Glützenbaum, KelBot, DumZiBoT,DeepBot, SniperMaské, Phildij, Spiessens, Pierre Guillard, Viking59, Cymbella, Superjuju10, M0tty, StefBot, Alexbot, Basilou, Eric-92,Mayayu, Colindla, HerculeBot, WikiCleanerBot, ZetudBot, Linedwell, Micthev, Luckas-bot, GrouchoBot, EmDee, ArthurBot, ChristianMuir, RibotBOT, LeMiklos, D'ohBot, Roucoulou, Thorvaldsson, Constantinople, Lomita, Orlodrim, RedBot, Fmaintenant, Toto Azéro,Salsero35, Rehtse, Dg.de, Scribere, Franz53sda, A.Schneider83, DJBX, Jules78120, Jules Buech, Laubrière, Haliimyn, 0x010C, Mor-phypnos, LoveBot, OrlodrimBot, SoGe, Yves.chabert, FDo64, Titlutin, ClaudiaChauchat, Dachary Laurent, Sonphan37, Flopinot2012,Bigsissou, OrikriBot, Rome2, Pontryaguine, Vikin, Mathieudu68, Addbot, Apollinaire93, Alexich, Akadians, Jaqeli, Xavierdelavilledepa-ris, ScoopBot, HunsuBot, MKoala, Do not follow, Jeepevade, Antoniex, Nathoune, Mfr92, KasparBot et Anonyme : 156

12.2 Images• Fichier:André-Campra.jpg Source : https://upload.wikimedia.org/wikipedia/commons/7/78/Andr%C3%A9-Campra.jpg Li-

cence : Public domain Contributeurs : <a data-x-rel='nofollow' class='external text' href='http://gallica.bnf.fr/ark:/12148/btv1b7720365h/'>Bibliothèque nationale de France</a> Artiste d’origine : André Bouys

• Fichier:Auxerrois_Fassade.JPG Source : https://upload.wikimedia.org/wikipedia/commons/1/15/Auxerrois_Fassade.JPG Licence :CC-BY-SA-3.0 Contributeurs : ? Artiste d’origine : ?

• Fichier:Blason_JP_Rameau_avec_orn_ext.svg Source : https://upload.wikimedia.org/wikipedia/commons/a/a9/Blason_JP_Rameau_avec_orn_ext.svg Licence : CC BY-SA 3.0 Contributeurs : Travail personnel Artiste d’origine : SanglierT

• Fichier:Carmontelle_-_Melchior_Grimm.jpg Source : https://upload.wikimedia.org/wikipedia/commons/1/1a/Carmontelle_-_Melchior_Grimm.jpg Licence : Public domain Contributeurs : http://eu.art.com/asp/sp-asp/_/pd-$-$12067047/sp--A/Baron_Friedrich_Melchior_Grimm.htm# Artiste d’origine : Line engraving by John Swaine (1775-1860) after a painting by Carmontelle (1717–1806)

• Fichier:Cathedrale_vue_de_montjuzet_detail.jpg Source : https://upload.wikimedia.org/wikipedia/commons/4/41/Cathedrale_vue_de_montjuzet_detail.jpg Licence : CC BY-SA 2.0 fr Contributeurs : ? Artiste d’origine : ?

• Fichier:Charles_Collé.jpg Source : https://upload.wikimedia.org/wikipedia/commons/f/f6/Charles_Coll%C3%A9.jpg Licence : Publicdomain Contributeurs : Inconnu Artiste d’origine : Anonyme

• Fichier:Circle_question_mark.png Source : https://upload.wikimedia.org/wikipedia/commons/b/b4/Circle_question_mark.png Li-cence : Public domain Contributeurs : Travail personnel Artiste d’origine : Benoit Rochon

• Fichier:Clavecin_flamand.png Source : https://upload.wikimedia.org/wikipedia/commons/c/c5/Clavecin_flamand.png Licence : CC-BY-SA-3.0 Contributeurs : Travail personnel Artiste d’origine : Ratigan (instrument et photo)

• Fichier:CoA_France_moderne.svg Source : https://upload.wikimedia.org/wikipedia/commons/5/5d/CoA_France_moderne.svg Li-cence : CC BY-SA 3.0 Contributeurs : Travail personnel, Ce fichier est dérivé de : CoA France (1515-1578).svgArtiste d’origine : Katepanomegas

• Fichier:Dijon_-_Saint-Etienne_1.jpg Source : https://upload.wikimedia.org/wikipedia/commons/4/45/Dijon_-_Saint-Etienne_1.jpgLicence : CC BY-SA 2.5 Contributeurs : Travail personnel Artiste d’origine : Christophe.Finot

• Fichier:Eglise_di_Saint_Eustache_organo.JPG Source : https://upload.wikimedia.org/wikipedia/commons/0/0c/Eglise_di_Saint_Eustache_organo.JPG Licence : CC BY 2.5 Contributeurs : Travail personnel Artiste d’origine : Sailko

• Fichier:Fairytale_bookmark_gold.png Source : https://upload.wikimedia.org/wikipedia/commons/c/c7/Fairytale_bookmark_gold.pngLicence : LGPL Contributeurs : File:Fairytale bookmark gold.png (LGPL) Artiste d’origine : Caihua

• Fichier:Foire_saint-germain.jpg Source : https://upload.wikimedia.org/wikipedia/commons/d/db/Foire_saint-germain.jpg Licence :Public domain Contributeurs : http://cesar.org.uk/cesar2/imgs/images.php?fct=edit&image_UOID=351568Artiste d’origine : Unidentified artist

• Fichier:Foire_saint-laurent.jpg Source : https://upload.wikimedia.org/wikipedia/commons/6/6a/Foire_saint-laurent.jpg Licence : Pu-blic domain Contributeurs :

• Harris-Warrick, Rebecca (1992). “Paris. 3. 1725–89”, vol. 3, p. 860 in Sadie, Stanley, editor. The New Grove Dictionary of Opera (4volumes). London : Macmillan. ISBN 9781561592289. Artiste d’origine : Inconnu

• Fichier:Gran_teatro_la_fenice.jpg Source : https://upload.wikimedia.org/wikipedia/commons/b/b9/Gran_teatro_la_fenice.jpg Li-cence : CC BY-SA 3.0 Contributeurs : Image:Venice - Sign of the Fenice’s Theatre.jpg by Nino Barbieri under licence CC-BY-SA.Artiste d’origine : Sémhur

Page 27: Jean Philippe Rameau

12.3 Licence du contenu 27

• Fichier:Gtk-dialog-info.svg Source : https://upload.wikimedia.org/wikipedia/commons/b/b4/Gtk-dialog-info.svg Licence : LGPLContributeurs : http://ftp.gnome.org/pub/GNOME/sources/gnome-themes-extras/0.9/gnome-themes-extras-0.9.0.tar.gz Artiste d’origine :David Vignoni

• Fichier:Houdar_de_La_Motte.jpg Source : https://upload.wikimedia.org/wikipedia/commons/a/ae/Houdar_de_La_Motte.jpg Licence :Public domain Contributeurs : ? Artiste d’origine : ?

• Fichier:Inconnu_d'après_Augustin_de_Saint-Aubin,_Jean-Philippe_Rameau,_détail_(Museo_internazionale_e_biblioteca_della_musica_di_Bologna).jpg Source : https://upload.wikimedia.org/wikipedia/commons/f/f1/Inconnu_d%27apr%C3%A8s_Augustin_de_Saint-Aubin%2C_Jean-Philippe_Rameau%2C_d%C3%A9tail_%28Museo_internazionale_e_biblioteca_della_musica_di_Bologna%29.jpg Licence : Public domain Contributeurs : [1] Artiste d’origine : D'après Augustin de Saint-Aubin

• Fichier:Jean-Bernard_Restout,_Le_Poète_inspiré_(MBA_Dijon).jpg Source : https://upload.wikimedia.org/wikipedia/commons/d/d5/Jean-Bernard_Restout%2C_Le_Po%C3%A8te_inspir%C3%A9_%28MBA_Dijon%29.jpg Licence : Public domain Contributeurs :http://www.memo.fr/Dossier.asp?ID=399 Artiste d’origine : Jean-Bernard Restout

• Fichier:Jean-Jacques_Rousseau_(painted_portrait).jpg Source : https://upload.wikimedia.org/wikipedia/commons/b/b7/Jean-Jacques_Rousseau_%28painted_portrait%29.jpg Licence : Public domain Contributeurs : Inconnu Artiste d’origine : Quentinde La Tour

• Fichier:Jean-Philippe_Rameau_-_Gavotte_and_Variations_(6).ogg Source : https://upload.wikimedia.org/wikipedia/commons/9/9d/Jean-Philippe_Rameau_-_Gavotte_and_Variations_%286%29.ogg Licence : CC BY-SA 2.0 Contributeurs : The Al Goldstein collectionin the Pandora Music repository at ibiblio.org. Artiste d’origine : Jean-Philippe Rameau (composer), Martha Goldstein (musician)

• Fichier:Jean-Philippe_Rameau_by_Jacques_Aved.jpg Source : https://upload.wikimedia.org/wikipedia/commons/e/ed/Jean-Philippe_Rameau_by_Jacques_Aved.jpg Licence : CC BY-SA 4.0 Contributeurs : Yelkrokoyade Artiste d’origine : Attribué àJoseph Aved

• Fichier:Jean-Philippe_Rameau_by_Jean-Jacques_Caffieri_-_20080203-03.jpg Source : https://upload.wikimedia.org/wikipedia/commons/8/88/Jean-Philippe_Rameau_by_Jean-Jacques_Caffieri_-_20080203-03.jpg Licence : CC BY-SA 2.0 fr Contributeurs : Tra-vail personnel : Rama Artiste d’origine : Jean-Jacques Caffieri

• Fichier:Jean_d'Alembert.jpeg Source : https://upload.wikimedia.org/wikipedia/commons/e/e3/Jean_d%27Alembert.jpeg Licence : Pu-blic domain Contributeurs : [1] Artiste d’origine : Quentin de La Tour

• Fichier:Louis-Michel_van_Loo_001.jpg Source : https://upload.wikimedia.org/wikipedia/commons/a/ad/Louis-Michel_van_Loo_001.jpg Licence : Public domain Contributeurs : Inconnu Artiste d’origine : Louis-Michel van Loo

• Fichier:Louis_Marchand.jpg Source : https://upload.wikimedia.org/wikipedia/commons/4/4a/Louis_Marchand.jpg Licence : Public do-main Contributeurs : http://gallica.bnf.fr/ark:/12148/btv1b84222302/f1.highres Artiste d’origine : Engraving by Ch. Dupuis, after the ori-ginal portrait by Robert

• Fichier:MTLogo2.png Source : https://upload.wikimedia.org/wikipedia/commons/1/16/MTLogo2.png Licence : Public domain Contri-buteurs : Transferred from en.wikipedia Artiste d’origine : Original uploader was Omtay38 at en.wikipedia

• Fichier:Piron,_Alexis.jpg Source : https://upload.wikimedia.org/wikipedia/commons/b/b7/Piron%2C_Alexis.jpg Licence : Public do-main Contributeurs : Transféré de fr.wikipedia à Commons. Artiste d’origine : Original téléversé par Justelipse sur Wikipedia français

• Fichier:Rameau_Carmontelle.JPG Source : https://upload.wikimedia.org/wikipedia/commons/f/fb/Rameau_Carmontelle.JPG Li-cence : Public domain Contributeurs : [1] ; photographer René Gabriel Ojéda Artiste d’origine : Carmontelle

• Fichier:Rameau_Opéra_de_Paris.JPG Source : https://upload.wikimedia.org/wikipedia/commons/f/f9/Rameau_Op%C3%A9ra_de_Paris.JPG Licence : CC BY-SA 3.0 Contributeurs : Travail personnel Artiste d’origine : Gérard Janot

• Fichier:Rameau_Traite_de_l’harmonie.jpg Source : https://upload.wikimedia.org/wikipedia/commons/8/82/Rameau_Traite_de_l%E2%80%99harmonie.jpg Licence : Public domain Contributeurs : ? Artiste d’origine : ?

• Fichier:Royal_Standard_of_the_King_of_France.svg Source : https://upload.wikimedia.org/wikipedia/commons/9/9a/Royal_Standard_of_the_King_of_France.svg Licence : CC BY-SA 3.0 Contributeurs : Travail personnel ; Based on : File:First Royal Standard ofFrance.jpg and File:Royal Standard of the Kingdom of France.jpg Artiste d’origine : Sodacan

• Fichier:Saint_Eustache_P1150826.jpg Source : https://upload.wikimedia.org/wikipedia/commons/7/7b/Saint_Eustache_P1150826.jpgLicence : CC-BY-SA-3.0 Contributeurs : Aucune source lisible par la machine fournie. « Travail personnel » supposé (étant donné larevendication de droit d’auteur). Artiste d’origine : Pas d’auteur lisible par la machine identifié. David.Monniaux supposé (étant donné larevendication de droit d’auteur).

• Fichier:Statue_de_Jean-Philippe_Rameau_01.JPG Source : https://upload.wikimedia.org/wikipedia/commons/6/6b/Statue_de_Jean-Philippe_Rameau_01.JPG Licence : Public domain Contributeurs : Transféré de fr.wikipedia à Commons. Artiste d’origine : Originaltéléversé par Pixeltoo sur Wikipedia français

• Fichier:Viola_d'amore2.png Source : https://upload.wikimedia.org/wikipedia/commons/b/bd/Viola_d%27amore2.png Licence : Publicdomain Contributeurs : ? Artiste d’origine : ?

• Fichier:Voltaire.jpg Source : https://upload.wikimedia.org/wikipedia/commons/f/f2/Atelier_de_Nicolas_de_Largilli%C3%A8re%2C_portrait_de_Voltaire%2C_d%C3%A9tail_%28mus%C3%A9e_Carnavalet%29_-002.jpg Licence : Public domain Contributeurs : Œuvresdérivées de ce fichier : Voltaire-2008-11-24.jpg http://www.deism.com/images/Voltaire.jpg (old image : From en wikipedia) Artiste d’ori-gine : Atelier de Nicolas de Largillierre

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