isolants biosourcÉs de bonnes performances … · sensibilité au feu et à l’humidité impose...

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Si les données techniques et environnementales ne sont pas encore clairement affichées pour tous les isolants biosourcés, certains montrent de bonnes performances thermiques, un bilan carbone qui semble favorable et des domaines d’emploi relativement larges. Leur sensibilité au feu et à l’humidité impose plus que jamais de respecter les préconisations des fabricants et des Avis Techniques en vigueur. TEXTE : PASCAL POGGI PHOTOS : CAVAC, CTBA, DR, GUTEX, ISOCELL Photo DR ISOLANTS BIOSOURCÉS DE BONNES PERFORMANCES THERMIQUES ISOLANTS BIOSOURCÉS DE BONNES PERFORMANCES THERMIQUES 65 NOVEMBRE / DÉCEMBRE 2012 N° 135 QUALITÉ CONSTRUCTION PRESCRIPTION

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Page 1: ISOLANTS BIOSOURCÉS DE BONNES PERFORMANCES … · sensibilité au feu et à l’humidité impose plus que jamais de respecter les préconisations des fabricants et des Avis Techniques

Si les données techniques et environnementales ne sont pasencore clairement affichées pour tous les isolants biosourcés,

certains montrent de bonnes performances thermiques, un bilan carbone quisemble favorable et des domaines d’emploi relativement larges. Leursensibilité au feu et à l’humidité impose plus que jamais de respecter lespréconisations des fabricants et des Avis Techniques en vigueur.

TEXTE : PASCAL POGGIPHOTOS : CAVAC, CTBA,DR, GUTEX, ISOCELL

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ISOLANTS BIOSOURCÉS

DE BONNESPERFORMANCESTHERMIQUES

ISOLANTS BIOSOURCÉS

DE BONNESPERFORMANCESTHERMIQUES

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Un labelpour lesbâtiments«biosourcés»Le décret n° 2012-518 du19 avril 2012 crée le « labelbâtiment biosourcé »et introduit dans le Codede la constructionet de l’habitation (CCH) la possibilité pour unbâtiment de se voiroctroyer un label montrantle recours à des matériauxrenouvelables et naturels.Entré en applicationau lendemain de sapublication, il cite parmiles matériaux biosourcés« le bois et ses dérivés, le

chanvre, la paille, la plume

ou la laine de mouton »,indiquant qu’ils« présentent deux atouts

principaux sur le plan de

l’environnement : d’une part,

la matière dont ils sont issus

est renouvelable, d’autre

part, ils peuvent contribuer à

la réduction des émissions

de gaz à effet de serre et au

stockage temporaire de

carbone ». Le texte évoqueun « seuil minimal » dematériaux biosourcés pourpouvoir prétendre au labelet renvoie à un arrêté duministère chargé de laconstruction pour définirconcrètement son contenuet son mode d’attribution.Mi-octobre 2012, cet arrêtén’est pas encore paru.

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Les isolants biosourcés les plus fréquentssont les produits issus de la transforma-tion du bois, sous forme de laine ou defibres, la ouate de cellulose issue de latransformation du papier, la laine de

chanvre et de lin, seules ou mélangées ensemble,la laine de coton ou de mouton, le liège, la plumede canard, le textile recyclé ou encore la paille.Plus rarement, on rencontre le miscanthus (diteherbe à éléphant), une graminée d’origine asiatiquede plus en plus cultivée dans les pays du nord del’Europe pour produire du bioéthanol, mais aussiemployée comme isolant thermique ou ajoutée aubéton de manière similaire au chanvre. Encoreplus rarement, l’herbe ou les roseaux, traités d’unemanière tout à fait spécifique, peuvent faire officed’isolant thermique.Si les premières productions de laine de boisremontent aux années soixante, les fibres de boissont apparues dans les années soixante-dix et leslaines de chanvre datent de 1998. L’offre industrielledes autres matières biosourcées date égalementdes dernières années du XXe siècle ou du tout dé-but du XXIe siècle.

Quelle empreinteenvironnementale ?Les isolants biosourcés bénéficient d’une imagepositive liée à leur origine biologique, donc renou-velable et «verte» par définition dans l’esprit d’ungrand nombre de prescripteurs. Mais aucun des iso-lants dits biosourcés n’est utilisé «pur». L’isolant

en laine de chanvre, par exemple, est composé defibres de chanvre (60 à 70 %) et de fibres thermo-fusibles (30 à 40 %), en général du polyester ou dupolypropylène, destinées à lier les fibres de chanvre.La ouate de cellulose, elle, est produite à partir depapiers récupérés, broyés grossièrement, auxquelssont ajoutés des additifs pour la rendre ignifugéeet imputrescible. Une seconde broyeuse fixe ensuiteles additifs et donne au produit son aspect de fibresfloconnées. La base Inies (base de données desFiches de déclarations environnementales et sani-taires FDES), disponible sur le site www.inies.fr,affiche 278 fiches dans la rubrique isolation, dontseulement 11 relatives aux isolants biosourcés,donnant la composition des isolants:• 1 fiche pour la laine de chanvre en panneaux

rigides ou souples (Florapan Plus 100 mm) ;• 8 fiches sur la laine et fibre de bois (pour

4 familles de produits : Fibra XTherm, Fibraroc,Fibrastyrene et Fibrastyroc) ;

• 1 fiche pour la laine de chanvre en rouleau (Biofib’ duo isolant chanvre/lin) ;

• 1 fiche pour la ouate de cellulose en vrac (UniverCell Confort).

C’est trop peu pour permettre une analyse et uneconclusion globales sur l’empreinte environne-mentale des matières et adjuvants utilisés dans cesisolants pour réduire ou supprimer leur sensibilitéaux insectes, aux rongeurs, à l’humidité, etc. Parailleurs, la partie « santé » de ces FDES est le plus souvent vide ou en cours de développement.Lorsqu’elle est partiellement remplie, il est rare

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de trouver des informations concernant d’éven-tuelles émissions de COV ou d’autres composants.Seul Cavac Biomatériaux indique que son produitBiofib' duo isolant chanvre/lin n’émet aucun élémentallergène dans l’air intérieur, car le liant utilisé estdu polyester. La FDES d’UniverCell Confort (Soprema)indique, pour sa part, que la mise en œuvre del’isolant (qui contient un biocide pour résister audéveloppement des moisissures) requiert un pare-vapeur continu (étanche à la vapeur d’eau) côtéchaud, ce qui évite la diffusion de poussières et defibres dans l’intérieur du bâtiment. La FDES souligne que le seul danger éventuel est lié à l’ex-position des travailleurs lors de la mise en œuvredu produit : une très petite quantité de fibres et depoussière est générée et peut être respirée. LaFDES conclut à une toxicité pulmonaire minimale. Une autre approche de l’impact environnementalconsiste à envisager le bilan carbone des isolantsou le contenu en énergie grise. Le bilan carbonen’est pas communément disponible en France,mais la base de données autrichienne «Baubook»(www.baubook.info, en allemand seulement), crééeen 2008, fournit de nombreuses données, sans ex-pliciter exactement la méthode employée pour les

établir. Si tous les isolants biosourcés ne sont pasanalysés, ces données indiquent notamment quel’analyse du cycle de vie de 1 m2 d’isolation d’uneépaisseur correspondant à une résistance ther-mique R de 5 m2.K/W présente un bilan carbonelargement positif pour le liège expansé, les bottesde paille densifiée, les panneaux de fibres de boisdenses et la ouate de cellulose. Ce bilan oscilleautour de zéro pour la laine de bois, de chanvre,de mouton et de coton recyclé, tandis qu’il s’avèrenégatif pour les isolants traditionnels. En termes d’énergie grise (énergie dépensée pourla fabrication et le transport), on trouve diversdocuments donnant des valeurs sans justificationsou sources claires. Nous avons retenu un documentémanant du site Internet du «réseau des Espacesinfo énergie de la région des Pays de la Loire»,partenaire de l’Ademe, qui affiche ses sources. Les valeurs données sont les suivantes: 3,6 MJ/kgpour la ouate de cellulose, 12,7 pour le liège ex-pansé, 16,5 pour la laine de mouton, 20 pour lesfibres de bois, 41 pour la laine de verre, 59 pour leverre expansé (foamglass) et 105 pour le PSE (1).Concernant la production sur le sol français desisolants biosourcés, qui compte dans le ���

(1) www.info-energie-paysdelaloire.fr/docs/1-ENVELOPPE/4-Elements-de-construction/graue_energie_f.pdf

“Une autre approche de l’impact environnementalconsiste à envisager le bilan carbone des isolants oule contenu en énergie grise”

La ouate de celluloseest dérivée de papiers recyclés,broyés et complétés par desadjuvants anti-fongiques etignifugeants. Elle s’emploieen insufflation à sec ou enprojection humide.

La laine de mouton estdisponible en rouleau pourune isolation intérieure des paroisou des toitures.

La fibre de bois, obtenue parbroyage de déchets de l’industriedu bois, est l’ingrédient de basedes laines de bois et des panneauxisolants en fibres de bois.

En maison individuelle, lalaine de bois dense Steico-Roofsupporte un panneau de fibres debois, puis le support de toiture.La laine de bois est considéréecomme un puits de carbone.

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La tendance générale de la RT 2012est d’accroître la résistance thermiquedes parois. Pour y parvenir, lesconcepteurs peuvent choisir desisolants avec une conductivitéthermique � particulièrement basse,augmenter les épaisseurs d’isolant oubien encore les deux à la fois.

Le graphique ci-dessus indique, pourune résistance thermique de 8 m2.K/W– correspondant à ce que la RT 2012 exigeen toiture –, les épaisseurs d’isolantnécessaires pour différentes matières:laine de verre, laine de roche,polyuréthane, polystyrène expansé,polystyrène extrudé, isolants biosourcés

certifiés par l’Acermi et autres isolantsbiosourcés non certifiés. Pour cesderniers, nous avons retenu les valeursdéclarées par leurs fabricants, et pourchaque famille d’isolant, nous retenonsla valeur de � la plus faible. Un seulisolant, le polyuréthane (� = 0,022)permet d’atteindre R = 8 avec moins de20 cm d’épaisseur. Cinq matières – PSE,laine de verre, XPS, laine de roche et uncomposé à base de 70 % de plumes decanard – se situent en dessous de 30 cmpour R = 8. Huit isolants biosourcés seplacent légèrement au-dessus de 30 cmd’épaisseur (entre 30,04 et 32 cm) pouratteindre R = 8. La laine de bois, en raisonde son � de 0,080, requiert 64 cmd’épaisseur. En synthèse, pour atteindreR = 8 et si l’on exclut la laine de bois, il y a 144 mm de différence entre lepolyuréthane, le plus performant desmatériaux du point de vue thermiquecertifié par l’Acermi et communémentdisponible sur le marché français, et lecombiné laine de lin + laine de chanvre oule liège expansé, les deux matériauxbiosourcés au � le plus élevé (0,040). ■

ISOLANTS BIOSOURCÉS

QUELLE PERFORMANCETHERMIQUE?

bilan environnemental sur le chapitre du trans-port, il existe une filière structurée pour laproduction de ouate de cellulose et de produits dé-rivés du bois. Le chanvre, le lin et la ouate de textilerecyclée, fortement liée au développement del’économie sociale et solidaire, sont en voie destructuration, alors que la paille et la laine de mou-ton émergent à peine. Enfin, avec le dépôt de bilandu fabricant français d’isolant en plumes de canard(Naptural Isoplume) fin 2011, il semble que touteoffre de ce type soit devenue indisponible sur lemarché français. Notons cependant que plus de80 % des certificats Acermi et des Avis Techniquesportant sur des isolants biosourcés concernentdes produits fabriqués en Allemagne, en Autricheou en Suisse.Comme tout autre matériau ou procédé, les iso-lants biosourcés doivent aussi être envisagés sousl’angle de leur performance thermique (voir gra-phique ci-dessus) et acoustique, de leur sensibilitéau vieillissement (altérabilité et putrescibilité), au

tassement, aux insectes et rongeurs, au feu et àl’humidité, et enfin, en fonction de leurs domainesd’emploi (voir encadré ci-contre).

Comportementface à la vapeur d’eauLa capacité d’absorption de l’eau peut-être à lafois une vertu en tant que régulateur d’humidité,notamment pour le confort d’été, et un inconvénientdans la mesure où l’humidité favorise le dévelop-pement de moisissures et de bactéries. De ce fait,il faut absolument éviter toute condensation ausein des matériaux, particulièrement en hiver carl’air intérieur plus chaud et plus humide, tente demigrer à travers les parois pour s’équilibrer avecl’air extérieur, plus sec et plus froid. Les flux de va-peur d’eau sont d’autant plus importants que ladifférence de pression de vapeur d’eau entre inté-rieur et extérieur est grande, et que les matériauxconstitutifs des parois sont peu résistants à la mi-gration de vapeur d’eau. La résistance à ���

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Les isolants biosourcés sontdisponibles sous différentes formes :en rouleau pour les laines de chanvre,de lin, de mouton, de bois, de coton, detextiles recyclés, ainsi que pour lesplumes de canards ; en panneauxrigides pour les panneaux de fibres debois et certains panneaux de chanvredense ; en ouate à souffler ou à projeter

pour la cellulose, les textiles et lecoton. Les rouleaux de laine de chanvrese posent comme les rouleaux de lainede verre ou de laine de roche, aussibien en ITI qu’en ITE, les autresrouleaux se posant plutôt en ITI. Lespanneaux de fibres de bois se posentaussi bien en ITE qu’en ITI pour lesmurs extérieurs et les toitures, à

l’exception des toitures-terrasses. Ilexiste même des panneaux de fibres debois destinés à l’isolation extérieuredes toitures et faisant office de supportde couverture. On trouve également desisolants de chape flottante pourplanchers chauffants bassetempérature en panneaux de fibres debois ou de liège expansé. ■

DOMAINES D’EMPLOIDES ISOLANTS

Laine de chanvrePlume de canardLaine de boisLaine de moutonFibres de boisLaine de LinOuate de celluloseLaine de cotonTextiles recyclés

Photo Gutex

ComblesITI

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PlafondsITI

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Mursextérieurs

en ITI

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Mursextérieurs

en ITE

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Cloisonsintérieures

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TerrasseITE

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Plancherbas et

intermédiaire(ITI au-dessus)

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Fondationsen ITE

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Tableau établi en compilant les prescriptions de Saint-Gobain Isover, Rockwool, Knauf, Pavatex, Isocell, Isofloc, Pittsburg Corning France et JackonInsulation GmbH.

Application/

Type d’isolant

Laine de verreLaine de rochePSEXPSPolyuréthaneVerre cellulaire

Isol

ants

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Autr

es is

olan

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Les panneaux de bois s’emploient aussi bien en ITI qu’en ITE sur des murs extérieurs, en réhabilitation comme en neuf. S’il s’agit d’uneparoi maçonnée ou en panneaux de bois structurel, les panneaux de fibres de bois se posent directement contre le gros œuvre, à l’aide decolle, de vis ou de chevilles.

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Isolantsbiosourcéset AvisTechniquesLes Avis Techniques relatifsaux isolants biosourcéstraitent avant tout de laouate de cellulose souffléeen combles perdus(� = 0,044 W/m.K), souffléeen coffres verticaux pourparois extérieures(� = 0,044), en caissonshorizontaux constituant leplancher de combles perdus(� = 0,044) et appliquée enmurs par projection humide(� = 0,040 à 0,049).La société suisse Isoflocdétient plus d’une quinzained’ATec pour ses fibres decellulose en projectionhumide sur les murs ou ensoufflage en vrac dans lescombles. Néanmoins, ils’agit souvent d’extensionsd’ATec de mêmes produitsdistribués sous différentesmarques commerciales,ce qui explique lamultiplication des ATec:Isofloc Comble vendu parIsofloc est ainsi le mêmeproduit que Cell La Viecomble distribué par PaulKatz. Hors la ouate decellulose, un petit nombred’ATec concernent d’autresmatériaux: laine de cotonsoufflée en combles(ATec n° 20/10-215),fibres textiles recyclées(ATec n° 20/10-206), blocsde paille compressée pourle remplissage de mursextérieurs en isolationrépartie (ATec n° 20/10-204), plumes de canard enisolation de toiture (ATecn° 20/09-168 et 20/09-169)et laine de chanvre associéeau bois pour l’isolation soustoiture (ATec n° 20/10-177).

Biofib’ duo, composé de lainede chanvre et de laine de lin, estdisponible en rouleaux. Leproduit fait l’objet d’un ATecpour application en murs et d’unautre pour application en toiture

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la migration de la vapeur d’eau du matériau est no-tée Sd et exprimée en m. Un matériau est considérécomme ouvert à la migration de vapeur d’eau si savaleur Sd � 3 m (on parle alors de «frein vapeur»);au-delà de Sd = 5, il s’agit de pare-vapeur étancheà la migration de vapeur. La plupart des isolantsbiosourcés comportent une capacité d’absorptiond’eau très importante (on dit qu’ils sont hygros-copiques) et font donc l’objet, lors de leur fabrication,de traitements spécifiques pour les rendre lesplus imputrescibles possibles, mais aussi anti-fongiques. Après traitement, les isolants biosourcésles plus imputrescibles sont, par ordre décroissant:laine de textiles, fibres de bois, laine de bois, ouatede cellulose, lin, chanvre, miscanthus, paille desorgho, de colza, paille d’orge et de blé. Notons que les panneaux de liège extrudé sont un casà part, puisque naturellement inaltérables etimputrescibles.La capacité d’absorption (ou hydroscopie) des iso-lants biosourcés se traduit par la notion de «dépha-sage», c’est-à-dire la faculté de réguler l’humiditéambiante en stockant la vapeur d’eau pour larestituer plus tard, atténuant ainsi les effets d’am-biances trop sèches ou trop humides. Attention ce-pendant, ce phénomène ne vaut que pour l’isolationthermique par l’intérieur et seulement si aucunécran pare-vapeur n’est placé entre l’ambiance etl’isolant. Or les écrans pare-vapeur ne sont pasnécessairement des membranes, certaines pein-tures ou enduits peuvent jouer le rôle d’efficacespare-vapeur… Cette faculté de déphasage qui se

compte en heures – 12 heures pour certains pan-neaux de fibres de bois Pavatex, par exemple –implique un calcul thermique et hygrométriqueplus sophistiqué pour éviter le risque de conden-sation à l’intérieur de la paroi isolante. La plupartdes logiciels de simulation thermique sont ca-pables d’évaluer le risque de condensation dans lesparois en fonction de leur valeur Sd et des condi-tions climatiques locales.

Résistance au feuLes isolants naturels brûlent assez bien, mêmeaprès un traitement ignifugeant qui ne les rendpas incombustibles. D’une manière générale, lamise en œuvre de ces isolants doit éviter leurcontact avec une source chaude ou des étincelles,quelle que soit leur origine. Tous les Avis Tech-niques (ATec) soulignent que les canalisationsélectriques en contact direct ou à proximitéimmédiate des isolants doivent être des conduitsnon-propagateurs de flamme, ce qui interdit l’emploi des conduits ICT et ICD oranges. Tous lesappareils et ouvrages électriques doivent êtreprotégés (capots, etc.), installés et utilisés (sanssurcharge) dans les Règles de l’art, de manière àéviter tout court-circuit avec création d’un arc élec-trique apparent. Les distances entre les conduitsde fumées – fixées par le NF DTU 24.1 en fonctiondes températures des conduits et du type deconduit – et l’isolant doivent être respectées. Dans le cas des ERP (Établissements recevant dupublic), la majorité des ATec renvoient vers le Guide

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Photo GutexPhoto Cavac

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d’emploi des isolants combustibles dans les ERP (2). L’Agence qualité construction (AQC) a publié unealerte en juillet 2012, car une douzaine de sinistresde départ de feu concernant la ouate de celluloseont été déclarés entre 2009 et 2012. Dans la plupart des cas, l’incendie a démarré par un échauf-fement de spot ou de connectique qui a provoquéle feu dans la ouate. Dans tous les cas, les spotsn’étaient pas équipés de capot de protection, ouceux-ci avaient bougé. Pour les gaines électriques,celles utilisées auraient dû être «non propagateurde flamme », ce qui a priori n’était pas le cas.D’autres cas concernaient un départ d’incendie dûau non-respect de l’écart du feu avec le tubage dela cheminée. D’autres encore provenaient de l’uti-lisation par un charpentier d’une scie circulairedont les poussières chaudes au contact de la ouateont provoqué un point d’ignition. Comme l’indiquel’AQC, « ces cas ne mettent pas en cause direc-tement la qualité du produit, mais peut-être plus uneméconnaissance de ce produit et de son risqued’inflammabilité. La problématique est qu’aprèséchauffement de la ouate, le feu peut couver plusieursheures avant de s’embraser rapidement. […] Ce typede sinistre est d’autant plus grave qu’il y a mise en

cause de la sécurité des personnes.» Le respect desconsignes de pose données par les ATec et les fa-bricants est essentiel pour prévenir le risqued’incendie.Indépendamment de leur mise en œuvre, l’amé-lioration de la tenue au feu de ces isolants estobtenue par l’un des trois moyens suivants, prisisolément ou associés: l’ajout de composants spé-cifiques ignifugeants, l’encapsulage dans unematrice naturellement résistante (chaux, ciment,béton, panneau OSB, etc.) et l’augmentation de lacompacité. Par ordre croissant de résistance au feu,on trouve les pailles de blé et d’orge, les pailles desorgho et de colza, le miscanthus, le lin, le chanvre,les textiles, la ouate de cellulose, les laines de boiset les fibres de bois. Toujours dans son alerte dejuillet, l’AQC a soulevé la question des nouveaux ad-ditifs utilisés dans la ouate de cellulose. En effet,les sels de bore, employés jusque-là comme igni-fugeant et biocide, sont interdits depuis août 2011pour risque sanitaire en tant qu’agent fongiquedans les isolants (Directive Biocide). Le GroupeSpécialisé concerné par les ATec sur la ouate decellulose a donc limité la durée de vie de ces ATecet demandé aux titulaires de proposer

“L’AQC a publié une alerte en juillet2012, car unedouzaine de sinistres de départ de feu concernant laouate de cellulose ont été déclarés entre2009 et2012”

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(2) Téléchargeable surwww.sitesecurite.com/ERP/AM08Guide.htm

Les panneaux de fibres de bois sont suffisamment rigidespour être utilisés en isolant desur-toiture faisant office desupport de couverture. Ils sontcomplétés par une membranepare-vapeur pour garantir unebonne étanchéité à l’eau.

La ouate de cellulose estsoufflée en combles perdus, maisaussi en murs en guise d’isolationrépartie, notamment dans le casdes constructions à ossature bois.

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PRESCRIPTION

“D’une manièregénérale, lescaractéristiquesthermiques, de résistance aufeu, d’émissivitéthermique,d’acoustiqueet d’aptitudeà l’emploipeuvent êtrecertifiées”

(3) www.acermi.com

une nouvelle solution. La plupart ont proposé deuxnouveaux additifs, un fongicide et un ignifugeant.L’alerte de l’AQC mentionne que les évaluationsmenées «montrent que les performances techniquesdu produit [N.D.L.R.: la ouate de cellulose]ne semblentpas impactées par cette nouvelle formulation. Enrevanche, il est difficile d’évaluer l’efficacité de cesadditifs dans le temps et les conséquences de ceschangements».

Isolants biosourcéset certificationEn France, l’Acermi est le certificateur des isolantsthermiques pour le bâtiment. Il s’agit d’un orga-nisme notifié, accrédité par le Cofrac et comportantdeux laboratoires notifiés, le CSTB et le LNE. D’une manière générale, les caractéristiques ther-miques, de résistance au feu, d’émissivité thermique(pour les produits comportant une face réfléchis-sante), d’acoustique et d’aptitude à l’emploi(transfert de vapeur d’eau, stabilité mécanique, etc.)peuvent être certifiées. Notons que les grandeurscertifiées pour chaque produit dépendent de la de-mande soumise par son fabricant, ce qui expliquequ’elles soient différentes d’un produit à l’autre, ausein d’unemême famille d’isolant. Tous les certi-ficats sont téléchargeables depuis le site del’Acermi (3). À fin octobre 2012, l’Acermi avait cer-tifié 52 isolants biosourcés:

• 26 produits en fibres de bois (6 fabricants : Buitex, Gutex, Homatherm, Pavatex, Steico etUnger-Diffutherm). Les données certifiées sontla conductivité thermique � (variant de 0,049 à0,038 W/(m.K)), la résistance thermique R pourune ou plusieurs épaisseurs d’isolant qui varientde 30 à 120 mm selon la demande du fabricant,la réaction au feu, puis diverses caractéristiquesselon les fabricants : tolérance d’épaisseur,absorption d’eau à court terme par immersionpartielle, transmission de vapeur d’eau, résistanceau passage de l’air et résistance à la traction per-pendiculairement aux faces;

• 18 panneaux rigides en laine de bois, la plupartcomplétés par une deuxième couche de laine debois composite, plus pour certains une couchede polystyrène expansé et/ou de laine de roche.Tous fabriqués par Knauf, ces produits sont cer-tifiés pour leurs caractéristiques thermiques et deréaction au feu. Étant donné le caractère compo-site de la plupart, l’Acermi ne fournit pas le plussouvent de valeur � pour les panneaux en tantque tels, mais plutôt une série de résistancesthermiques R pour différentes épaisseurs. Cepen-dant, lorsque le panneau est composé uniquementde laine de bois, le � certifié est de 0,080 W/m.K;

• 2 produits en liège expansé (2 fabricants: ALMSarl-Aliecor et Armorim Isolamentos SA). Lesdonnées certifiées sont la conductivité thermique

En maison passive, l’emploide laine de bois ou de laine dechanvre implique des épaisseursde l’ordre de 40 cm dans les mursextérieurs et de 50 cm au moinsen toiture. La laine de chanvre se pose de manière identiqueà la laine de verre ou de roche enITI : sur les murs extérieurs, sousles toitures en rampants, etc.Son utilisation en ITE estégalement possible avec despanneaux plus denses.

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Du point de vue de sa performancethermique, un isolant se caractérise par:• sa conductivité thermique

(� en W/m.K): plus � est faible, plus la performance thermiqueest importante;

• sa résistance thermique (R en m2.K/W)égale à e/�, e étant l’épaisseur dumatériau en mm. Plus R est grand, plusla performance est importante.

L’arrêté du 26 octobre 2010, textefondateur de la RT 2012 «relatif auxcaractéristiques thermiques et auxexigences de performance énergétiquedes bâtiments nouveaux et des partiesnouvelles de bâtiments», traite les isolantsbiosourcés d’une manière particulière. Son

annexe IX fournit des valeurs de � pardéfaut (en fonction de la masse volumiquesèche du produit). Attention, l’arrêté du26 décembre 2010 est venu rectifier lesvaleurs indiquées dans l’arrêté d’origine,qui étaient indûment favorables:• liège: 0,010 à 0,049 W/m.K;• panneaux de fibres de bois: 0,20 à

0,07 W/m.K;• panneaux de laine de bois: 0,10 à

0,08 W/m.K;• ouate de cellulose: 0,049 W/m.K;• fibres de chanvre ou de lin: 0,056 à

0,048 W/m.K;• paille comprimée: 0,080 à 0,052 W/m.K,

et 0,065 ou 0,060 W/m.K pour toutes lesautres fibres végétales;

• laine de mouton: 0,046 W/m.K, et 0,065 à0,050 W/m.K pour les isolants à based’autres fibres animales.

Avec cette rectification, les valeursforfaitaires pour les isolants biosourcéssont relativement favorables, maisévidemment inférieures en performance àcelles obtenues par une certificationAcermi. Dans le calcul RT 2012, on retientla valeur certifiée si la performance duproduit est certifiée. Si la performance estsimplement attestée par un laboratoiretiers, on prendra cette valeur pénalisée de10 %. Et si la valeur n’est attestée paraucune donnée, on retiendra la valeur pardéfaut. ■

ISOLANTS BIOSOURCÉSET RÉGLEMENTATIONTHERMIQUE 2012

73N O V E M B R E / D É C E M B R E 2 0 1 2 • N ° 1 3 5 • Q U A L I T É C O N S T R U C T I O N

(� de 0,040), une série de résistances thermiquesR pour des épaisseurs allant de 25 à 250 mm, laréaction au feu, et toujours diverses grandeursselon la demande: contrainte en compression,tolérance d’épaisseur, de longueur et de largeur,résistance à la traction perpendiculaires aux faces.Le profil d’usage «Isole» (compression, stabilitédimensionnelle, comportement à l’eau, cohésionet perméance à la vapeur d’eau) est égalementcertifié pour 3 intervalles d’épaisseurs (25 à60 mm, 65 à 120 mm et 130 à 200 mm);

• 3 produits de ouate de cellulose en vrac (3 fabri-cants : Univercell, Excel Industries et IsocellFrance). Les données certifiées sont la conduc-tivité thermique � (0,038 pour une densité de 25à 35 kg/m3 ou 0,042 pour 30 à 38 kg/m3), la ré-sistance thermique, la classe de tassement, laréaction au feu;

• 3 « matériaux d’origine animale ou végétale »(2 fabricants: Cavac et Buitex). Curieusement, lacomposition de ces produits n’est pas indiquéedans les certificats Acermi. La documentationdes fabricants nous apprend donc que le pre-mier est un composé de chanvre et de cotoncommercialisé en rouleaux (Isonat Végétal deBuitex), le deuxième un composé de 30 % de fibres de chanvre, 60 % de fibres de bois et 10 %de fibres de polyester (Isonat Plus 55 Flex deBuitex), et le troisième un mélange de chanvre

et lin (Biofib’ duo de Cavac). Les grandeurscertifiées sont la classe de tassement, la conduc-tivité thermique � (0,038 à 0,040) et une sériede résistances thermiques R pour différentesépaisseurs.

Par ailleurs, il existe des labels volontaires euro-péens, tel que «Nature Plus for better living». Il s’agit d’une association internationale d’origineallemande, qui certifie des «matériaux d’isolationissus de matières premières renouvelables»: lin,chanvre, copeaux de bois, fibres de bois, seigle,laine de mouton, liège, cellulose. Les certificatsconcernent exclusivement la composition du pro-duit, et aucunement les performances (acoustique,thermique, résistance au feu…). Au total, le site re-cèle 49 certificats d’isolants, dont 44 pour les seulspanneaux en fibres de bois (4). Comme on le voit, les données techniques, enparticulier le coefficient �, ne sont pas toujoursdisponibles, vérifiées par tierces parties ou certi-fiées. Ce qui obère l’emploi de ces isolants enconstruction neuve et en réhabilitation lourde, toutes deux soumises à une réglementation ther-mique avec des outils de calcul valorisant lacertification des données (voir encadré ci-dessus).Quelques interrogations demeurent égalementconcernant la durabilité dans le temps de certainsproduits (les laines en vrac) ou de certaines appli-cations (projection humide). ■

(4) Une partie du site estdisponible en français:www.natureplus.org/nc/fr/produits/produits.