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1 INTRODUCTION AU SYSTÈME ÉCONOMIQUE EN ISLAM Au nom de Dieu, le Bienfaiteur, Miséricordieux 1. Préambule 1.1 Importance des idées dans une nation Les idées représentent, dans toute nation, la plus grande richesse que celle-ci puisse avoir lorsqu’elle cherche à se développer et à progresser ; elles constituent également le plus grand héritage que puissent laisser les nations précédentes à condition que ces dernières aient été attachées à la pensée éclairée. Les idées dépassent de loin les richesses matérielles, les découvertes scientifiques, les inventions techniques et autres réalisations. En effet, l’acquisition même de ces richesses dépend des idées, et il en va de même de leur conservation. Ainsi, s’il arrive que les richesses matérielles d’une nation soient détruites, il est possible de les reconstituer rapidement tant que cette nation préservera sa richesse intellectuelle. Par contre si jamais la richesse intellectuelle d’une nation venait à disparaître, la nation ne conservant que ses richesses matérielles, celles-ci ne tarderont pas à diminuer et disparaître à leur tour, et la nation sera inévitablement réduite à la pauvreté. La plupart des valeurs scientifiques que la nation avait découvertes peuvent être retrouvées, à condition qu’elle ait conservé les idées qui y avaient conduit. Tandis que si elle perd la méthode productive de pensée, elle régressera rapidement et perdra ses découvertes et ses inventions. Par conséquent, il est nécessaire de se préoccuper tout d’abord des idées. Partant de ces idées, en relation avec la méthode productive de pensée, la richesse matérielle sera obtenue, les découvertes scientifiques et les inventions industrielles seront réalisées. Nous entendons ici par idées, l’existence, chez une nation, d’un processus intellectuel qui a pour objet les événements importants de la vie de cette nation, de sorte que la majorité de ses membres s’en sert lorsqu’elle considère ces événements et y portent un jugement. Cela signifie qu’ils ont des idées qu’ils s’astreignent à appliquer dans la vie et qui, à force d’être utilisées et réutilisées avec succés, créent chez eux une méthode productive de pensée. La pensée la plus importante est l’idée globale expliquant l’homme, la vie, l’univers et les relations qui existent entre ces éléments avec ce qui les précède et ce qui les suit. 1.2 Situation actuelle de la Nation Islamique La nation islamique (Oumma) actuelle manque d’idées. Elle est donc dépourvue de méthode productive de pensée. En effet, la génération actuelle n’a reçu, de la génération précédente, aucune pensée islamique, ni n’en a produit par elle même. Aussi, est-il naturel de voir cette Nation dans un état de pauvreté bien qu’elle dispose d’importantes ressources matérielles dans ses régions. Il est également naturel qu’elle perde les découvertes scientifiques et les inventions industrielles, bien qu’elle étudie la théorie de ces découvertes et inventions et les vit. Il en est ainsi car, il est impossible à la nation islamique de tirer profit de ces ressources de façon productive sans posséder une

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INTRODUCTION AU SYSTÈME ÉCONOMIQUE EN ISLAM

Au nom de Dieu, le Bienfaiteur, Miséricordieux

1. Préambule

1.1 Importance des idées dans une nation Les idées représentent, dans toute nation, la plus grande richesse que celle-ci puisse avoir lorsqu’elle cherche à se développer et à progresser ; elles constituent également le plus grand héritage que puissent laisser les nations précédentes à condition que ces dernières aient été attachées à la pensée éclairée.

Les idées dépassent de loin les richesses matérielles, les découvertes scientifiques, les inventions techniques et autres réalisations. En effet, l’acquisition même de ces richesses dépend des idées, et il en va de même de leur conservation.

Ainsi, s’il arrive que les richesses matérielles d’une nation soient détruites, il est possible de les reconstituer rapidement tant que cette nation préservera sa richesse intellectuelle. Par contre si jamais la richesse intellectuelle d’une nation venait à disparaître, la nation ne conservant que ses richesses matérielles, celles-ci ne tarderont pas à diminuer et disparaître à leur tour, et la nation sera inévitablement réduite à la pauvreté. La plupart des valeurs scientifiques que la nation avait découvertes peuvent être retrouvées, à condition qu’elle ait conservé les idées qui y avaient conduit. Tandis que si elle perd la méthode productive de pensée, elle régressera rapidement et perdra ses découvertes et ses inventions. Par conséquent, il est nécessaire de se préoccuper tout d’abord des idées. Partant de ces idées, en relation avec la méthode productive de pensée, la richesse matérielle sera obtenue, les découvertes scientifiques et les inventions industrielles seront réalisées.

Nous entendons ici par idées, l’existence, chez une nation, d’un processus intellectuel qui a pour objet les événements importants de la vie de cette nation, de sorte que la majorité de ses membres s’en sert lorsqu’elle considère ces événements et y portent un jugement. Cela signifie qu’ils ont des idées qu’ils s’astreignent à appliquer dans la vie et qui, à force d’être utilisées et réutilisées avec succés, créent chez eux une méthode productive de pensée. La pensée la plus importante est l’idée globale expliquant l’homme, la vie, l’univers et les relations qui existent entre ces éléments avec ce qui les précède et ce qui les suit.

1.2 Situation actuelle de la Nation Islamique La nation islamique (Oumma) actuelle manque d’idées. Elle est donc dépourvue de méthode productive de pensée. En effet, la génération actuelle n’a reçu, de la génération précédente, aucune pensée islamique, ni n’en a produit par elle même. Aussi, est-il naturel de voir cette Nation dans un état de pauvreté bien qu’elle dispose d’importantes ressources matérielles dans ses régions. Il est également naturel qu’elle perde les découvertes scientifiques et les inventions industrielles, bien qu’elle étudie la théorie de ces découvertes et inventions et les vit. Il en est ainsi car, il est impossible à la nation islamique de tirer profit de ces ressources de façon productive sans posséder une

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méthode productive de pensée, c’est-à-dire sans posséder des idées bien déterminées qu’elle s’emploie à mettre en pratique dans la vie. Par conséquent, il est indispensable aux musulmans, d’établir pour eux-mêmes des idées et une méthode productive de pensée. La nation musulmane pourra alors par la suite évoluer suivant ces idées pour acquérir les richesses matérielles, faire des découvertes scientifiques et des inventions industrielles. Tant que les musulmans ne procéderont pas de cette manière, ils ne progresseront pas d’un pouce. Ils continueront plutôt à tourner dans un cercle vicieux, consumant leur réserve d’énergie physique et intellectuelle dans une course sans fin, pour ne se retrouver au bout du compte qu’à leur point de départ.

La présente génération de musulmans n’a pas adopté les idées qu’elle porte, qui sont contraires à celles qu’elles devraient avoir et appliquer, au moyen d’une pensée objective ; c’est-à-dire qu’elle n’a pas adopté ces idées suite à un examen rationnel minutieux des systèmes d’idées en conflit qui lui aurait permis de choisir le système juste. Au contraire, cette génération est tout simplement dépourvue de tout système d’idées quel qu’il soit et de toute méthode productive de pensée quelle qu’en soit la nature. Elle se trouve dans cette situation parce qu’elle a hérité la pensée islamique comme si c’était une philosophie fictive, au même titre que celle de Platon et d’Aristote pour les Grecs d’aujourd’hui, et hérité l’Islam en tant que culte et rites, exactement comme le font les chrétiens pour leur religion. Elle vénère en même temps les idées capitalistes à la simple vue de leurs résultats et accepte volontairement d’appliquer le système capitaliste. Cependant, cela ne résulte nullement d’une compréhension de la réalité de ces idées, ni de la façon dont les solutions capitalistes découlent de la vision du monde adopté par les capitalistes. Cette génération est donc intellectuellement dépourvue de la pensée capitaliste, bien qu’elle aborde les problèmes de la vie suivant la méthode capitaliste. Elle est également devenue vide de la pensée islamique sur le plan pratique, bien qu’elle s’en réclame et l’étudie.

L’attrait de cette génération pour les idées capitalistes dépasse de loin la simple tentative de concilier l’Islam aux lois et solutions capitalistes. En effet, elle en est parvenue à ressentir l’incapacité de l’Islam à résoudre les nouveaux problèmes de la vie, et à éprouver la nécessité de prendre les solutions capitalistes telles qu’elles, sans même éprouver le besoin de les réconcilier à l’Islam. La Oumma en est parvenu à ne plus voir de mal, ni de péché, à laisser tomber la Loi islamique (charia) et à adopter d’autres lois à sa place afin de progresser dans le même sens que le monde dit civilisé, et rattraper le convoi des Nations capitalistes ou les Nations socialistes qui évoluent vers le communisme, les considérant comme des peuples élevés. Quant au reste qui adhère à l’Islam, ils ont également le même penchant pour les idées capitalisme mais ils espèrent pouvoir les concilier ou tout au moins les apaiser par l’Islam. Cependant, ceux qui essaient de concilier l’Islam avec d’autres idées n’ont aucune influence sur le cours de la vie ni sur la société, c’est-à-dire sur les rapports qui existent réellement entre les gens.

Par conséquent, les pensées et les règles juridiques islamiques pour résoudre les affaires et les problèmes de la vie entrent en conflit avec des esprits vides de pensées islamiques et dépourvus de méthode productive de pensée. Elle se heurte également à l’attirance générale des musulmans vers le capitalisme ou le socialisme, tout comme elle entre en contradiction avec la réalité de la vie, gouvernée par le système capitaliste. Ainsi, à moins que l’idée soit suffisamment forte pour secouer les coeurs et les esprits, elle ne pourra pas mobiliser l’attention des musulmans. Elle doit, en effet, amener des esprits engourdis et superficiels à penser profondément, et éliminer les idées déviées et les goûts malsains, afin d’établir la véritable inclination vers les nobles idées de l’Islam et la Loi islamique.

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1.3 Méthode de changement Pour parvenir à un changement, il est indispensable que celui qui appel à l’Islam (Da`i), expose clairement les bases sur lesquelles sont fondées les lois et solutions capitalistes, démontre leur fausseté et les démolisse intellectuellement. Il doit s’intéresser aux divers nouveaux problèmes de la vie et y apporter des solutions islamiques. Il démontrera ainsi la capacité de l’Islam en tant que lois devant être appliquées, parce qu’elles sont les seules agrées par Dieu car, déduites du Coran et de la Sunna (traditions prophétiques) ou des preuves que ces deux sources ont indiquées. Ces lois ne doivent pas être suivies parce qu’elles seraient convenables ou non pour une époque donnée, c’est-à-dire qu’elles doivent être adoptées par conviction idéologique et non pas par intérêt. Aussi, chaque loi doit être accompagnée de la source révélée d’où elle est déduite, ou de l’explication de la cause révélée (`illa) qui lui est associée ou qui la représente dans le texte légal.

Il importe de rappeler que les idées liées au système de gouverner et celles concernant l’économie sont celles dont les musulmans étaient le plus fascinés et pour lesquelles ils ont connu les plus grands déboires dans leur vie. Ce sont les idées les plus grandioses qui ont reçu la grande attention des musulmans, et que l’Occident essaie d’instituer et contrôler pratiquement et veille avec persistance à leur application. Si la Oumma islamique est gouvernée par la démocratie au niveau de la forme, pour préserver les intérêts et les systèmes du colonisateur occidental, elle est gouvernée dans la pratique par le système économique capitaliste dans tous les aspects de la vie. Or, ce sont les idées de l’Islam sur l’économie qui sont les plus fortes, celles qui avaient la plus grande influence sur le monde musulman, capables de réaliser un revirement total de sa situation. Elles sont également les idées qui seront le plus combattues par le colonisateur, et les dirigeants actuels qui ont pris la relève des agents coloniaux, ces fascinés de l’Occident parmi lesquels les despotes et les défaitistes.

Dès lors, il est indispensable de présenter une image claire du système capitaliste, en classifiant les idées de base sur lesquelles sont fondées les politiques économiques en Occident, pour que ceux qui suivent le système économique occidental puissent toucher du doigt la corruption de ce système et sa contradiction avec l’Islam. Nous examinerons ensuite les idées de l’Islam qui traitent des problèmes économiques et les présentent comme un mode de vie spécifique qui s’oppose à la vie capitaliste aussi bien dans ses principes que dans ses détails.

2. Présentation du système économique capitaliste

2.1 Principes de base du système économique capitaliste Si nous passons en revue le système économique dans l’idéologie capitaliste, nous trouvons que l’économie est la branche des connaissances qui étudie les besoins de l’homme et les moyens de les satisfaire. Elle s’intéresse uniquement au côté matériel de la vie humaine ; et elle est établie sur trois principes :

1. La question de la rareté relative des biens et des services par rapport aux besoins. C’est-à-dire, l’insuffisance des biens et des services pour satisfaire les besoins toujours croissants de l’homme. Ceci représente le problème économique de la société selon eux.

2. La valeur du produit, qui est la base de la plupart des recherches et des études économiques.

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3. Le prix, et le rôle qu’il joue dans la production, la consommation et la distribution. C’est la pierre angulaire du système capitaliste

2.2 Rareté relative des biens et des services Comme nous le verrons, le problème de la rareté relative des biens et des services se pose parce que les biens et les services sont considérés comme étant les seuls moyens permettant de satisfaire les besoins de l’homme.

2.3 Biens et services comme moyens de satisfaction des besoins Les capitalistes estiment que l’homme a des besoins qui demandent tous à être satisfaits, il faut donc des moyens pour répondre à ces besoins. Ces besoins, considèrent-ils, sont purement matériels, car ils sont soit sensibles et tangibles, tels que le besoin de se nourrir ou de s’habiller, soit sensibles mais non tangibles, tels que les services d’un médecin ou d’un enseignant. Quant aux besoins d’ordre moral et spirituel, tels que la glorification du Créateur ou l’adoration, ils ne sont pas reconnus économiquement, ils sont donc ignorés et ne sont pas pris en compte dans les recherches économiques.

Les moyens de satisfaction des besoins sont appelés biens et services. Les biens sont les moyens de satisfaction des besoins sensibles et tangibles, et les services, ceux des besoins sensibles mais intangibles. Ce qui procure la satisfaction dans les biens et les services, selon eux, c’est le ‘’profit’’ qu’ils renferment. Ce profit est un attribut qui rend la chose convenable pour satisfaire un besoin. Le besoin étant le désir sur le plan économique, alors que ce qui est économiquement profitable, c’est toute chose qui est désirée, qu’elle soit essentielle ou non, et même si certaines personnes l’estiment profitable et d’autres la considèrent nuisible. Elle sera considérée profitable tant qu’il y aura quelqu’un qui la désire. Ceci conduit les capitalistes à considérer les choses profitables du point de vue économique même si l’opinion publique les juge d’aucune utilité ou nuisibles. Ainsi, le vin et le hachisch sont des choses profitables aux yeux des économistes étant donné que certaines personnes en veulent.

De même, les économistes considèrent les moyens de satisfaction, c’est-à-dire les biens et les services, uniquement comme satisfaisant un besoin, et ne prennent aucun autre critère en compte. Autrement dit, ils considèrent les besoins et les moyens de satisfaction tels qu’ils sont et non pas tels qu’ils devaient être. Ils regardent donc le profit simplement en tant que satisfaisant un besoin, sans plus. Ils attribuent une valeur économique au vin parce qu’il répond à la demande d’une clientèle, et considèrent que le producteur de vin fournit un service en ce sens que ce service, comporte une valeur économique puisqu’il satisfait au besoin de certaines personnes.

Telle est, chez les capitalistes, la nature des besoins et des moyens de leur satisfaction.

2.4 Problème économique de la société Il ressort de ce que précède que l’économiste capitaliste ne se préoccupe pas de ce que la société devrait être, il ne s’intéresse qu’au produit économique dans sa capacité à satisfaire un besoin. Pour cette raison, ce qui importe aux économistes c’est de fournir des biens et des services, autrement dit mettre à la disposition de la société des moyens pour satisfaire les besoins de l’homme, sans aucune autre considération. Ainsi, l’optimisation des moyens de satisfaction des besoins constitue le principal objet de leur étude. Les biens et les services qui sont les moyens de satisfaction des besoins, étant

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limités selon eux, ils ne sont pas suffisants pour couvrir les besoins de l’homme car ces besoins, estiment-ils, sont illimités. Par conséquent, on distingue un certain nombre de besoins qui sont des besoins fondamentaux que l’homme doit nécessairement satisfaire et des besoins qui augmentent avec le développement de l’urbanisation. Tous ces besoins, sans cesse croissants, demandent à être satisfaits complètement. Ce qui est irréalisable quel que soit le niveau d’augmentation des biens et des services. D’où la base du problème économique qui est l’excès des besoins et l’insuffisance des moyens de leur satisfaction. Autrement dit, c’est l’insuffisance des biens et services pour satisfaire complètement tous les besoins de l’homme. Dès lors, la société est confrontée au problème économique qui se traduit par la rareté relative des biens et des services.

2.5 Solution du problème économique La conséquence inévitable de cette situation est que certains besoins ne pourront être que partiellement satisfaits ou pas satisfaits du tout. Il devient donc indispensable pour la société d’établir des règles qui vont décider quels besoins seront satisfaits et quels autres ne le seront pas. En d’autres termes, il s’agit de déterminer la manière de distribuer les ressources limitées parmi les besoins illimités. Pour les capitalistes, le problème se situe donc au niveau des besoins et des ressources, et non pas au niveau de l’individu. C’est-à-dire que ce qui les préoccupe c’est d’optimiser les ressources pour satisfaire le plus grand nombre de besoins et non pas satisfaire les besoins de chaque individu pris isolément. Le problème, vu sous cet angle, implique que les règles à établir soient de nature à garantir le plus haut niveau de production possible pour maximiser les ressources. Il s’agit donc de fournir des biens et des services pour répondre aux besoins de la société en général et non à ceux de chaque individu en particulier. Il s’en suit que le problème de la distribution des ressources est intimement lié à celui de leur production, et l’objectif des études économiques est de travailler pour augmenter la consommation globale des biens et des services par la société. De ce fait, l’étude des éléments ayant une influence sur le volume de la production national occupe une place de choix par rapport à l’ensemble des thèmes économiques, car la recherche de l’augmentation de cette production est l’un des plus importants sujets de recherche pour résoudre le problème économique qui est, rappelons-le, la rareté des biens et des services relativement aux besoins. Il en est ainsi parce que selon eux la seule voie pour résoudre le problème de la pauvreté et de la privation passe par l’augmentation de la production, et il en va de même du problème économique.

2.6 Valeur du produit La valeur d’un produit se définit par son degré d’importance, soit par rapport à un individu donné, soit par rapport à une autre chose. Dans le premier cas, elle est appelée valeur de profit et dans le second, ‘’valeur d’échange’’.

2.6.1 Valeur de profit La valeur de profit ou valeur d’usage de chaque unité d’une chose est évaluée par son utilité marginale, c’est-à-dire par le profit attribuée à l’unité qui satisfait le plus petit besoin. Les économistes capitalistes appellent cela la théorie de l’utilité finale ou marginale. Cela signifie que le profit ne se définit pas du point de vue du producteur, en l’évaluant par son coût de production, car, procéder ainsi reviendrait à considérer l’offre sans la demande. Le profit ne doit pas non plus se définir du point de vue du consommateur en prenant en compte le profit qui existe réellement dans le

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produit, et le niveau de besoin qu’en éprouve le consommateur tout en ayant à l’idée le facteur de la rareté relative, car, ce serait considérer la demande sans l’offre. Il est alors indispensable de considérer en même temps l’offre et la demande pour déterminer le profit à la limite de la satisfaction du besoin. De cette façon, la valeur du pain, par exemple, sera estimée à la fin de la faim et non à son début, et au moment de son abondance sur le marché et non de sa pénurie.

2.6.2 Valeur d’échange La valeur d’échange est le mérite contenu dans une chose qui la rend désirable pour l’échange. Elle se mesure par rapport à une autre chose. Ainsi, la valeur d’échange du blé par rapport au maïs est estimée par la quantité de maïs qui doit être livrée contre une unité de blé. Les capitalistes se réfèrent à la valeur de profit en utilisant uniquement le terme profit, et se réfèrent à la valeur d’échange, simplement par le mot valeur.

L’échange est conditionné par l’existence d’une compensation sous la forme d’un bien ou d’un service qui lui soit proche ou équivalent en terme de valeur. Dès lors, il était indispensable aux économistes capitalistes d’étudier la valeur, car, elle est la base sur laquelle s’effectue l’échange, en ce sens qu’elle est le facteur mesurable. Elle représente à ce titre l’échelle par laquelle les produits économiques sont évalués. De plus, c’est elle qui permet de distinguer une activité productive, d’une activité qui ne l’est pas. La production est considérée par les capitalistes comme une création de valeur ou tout au moins son augmentation, et elle s’effectue nécessairement par le travail. Par conséquent, pour distinguer le travail productif du travail improductif, et pouvoir classifier les activités selon leur degré de productivité, il fallait évaluer avec précision les différents biens et services. Cette évaluation correspond aux valeurs sociales attribuées aux divers produits économiques. Il s’agit, en d’autres termes, d’une estimation globale de l’effort de travail accompli ou du service rendu. Une telle évaluation est devenue indispensable car la production pour l’autoconsommation a été remplacée dans les sociétés modernes par la production pour l’échange. Aujourd’hui chacun échange la totalité ou la plus grande partie de sa production, contre d’autres produits. Or, pour que l’échange se fasse, il faut qu’il existe une compensation. Il est donc indispensable de déterminer la valeur d’un bien, non seulement pour sa production mais aussi sa consommation et, partant, pour la satisfaction des besoins de l’homme.

2.7 Le prix De nos jours, la valeur d’échange a été restreinte à une seule de ses valeurs qui l’emporte sur les autres. En effet, elle ne s’évalue plus par rapport à chacun des divers autres produits, mais uniquement par rapport à un bien particulier qui est la monnaie. C’est la valeur d’échange d’une chose par rapport à la monnaie qui est appelée le prix. La différence entre la valeur d’échange et le prix est que la première peut se définir par rapport à tout autre bien alors que le prix est relatif à la monnaie uniquement. Il en résulte que les prix de tous les produits peuvent monter ou descendre tous ensemble, alors qu’il est impossible que les valeurs d’échange des produits, les uns par rapport aux autres, puissent augmenter ou baisser tous ensemble. De même, le prix d’un bien peut varier sans que sa valeur d’échange varie. Ainsi, le prix est une des valeurs d’un produit : sa valeur d’échange par rapport à la monnaie uniquement. A ce titre, il est naturel que la monnaie soit l’instrument permettant de juger si une chose est utile ou non et de mesurer son degré d’utilité. Partant, un bien ou un service donné sera jugé productif et utile si la société lui attribue un prix. Quant à son degré d’utilité, il est déterminé par le prix auquel la communauté des consommateurs est prête à l’acquérir.

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Cela est valable quel que soit le type de produit, que le bien soit agricole ou industriel, et que le service soit une prestation d’une société commerciale, de transport, d’un médecin ou d’un ingénieur.

2.7.1 Rôle joué par le prix dans la production, la consommation et la distribution Le prix est l’outil qui décide quels producteurs entreront dans la course à la production, et quels autres seront maintenus à l’écart, de la même manière qu’il décide quels consommateurs auront le loisir de satisfaire leurs besoins et quels autres resteront insatisfaits. Le coût de production d’un bien est le premier facteur qui gouverne son offre sur le marché tandis que l’utilité qu'il renferme est le premier facteur qui gouverne sa demande, et les deux facteurs sont mesurés par le prix. Par conséquent l’étude de l’offre et de la demande constitue deux sujets de recherche essentiels dans l’économie capitaliste. Dans l’expression ‘’l’offre et de la demande’’, il s’agit de l’offre du marché et de la demande du marché. Tout comme la demande ne peut être définie sans mentionner le prix, l’offre ne peut être évaluée sans le prix. La demande varie de façon contraire à la variation du prix. En effet, la demande diminue lorsque le prix augmente, et elle augmente lorsque le prix baisse. L’offre, au contraire, s’accroît avec l’augmentation du prix, et diminue avec sa baisse. Le prix joue donc un rôle capital aussi bien dans la production que dans la consommation.

Pour les capitalistes, le système de prix est la méthode idéale pour distribuer les biens et les services parmi les membres de la société. Il en est ainsi car, ils considèrent que les profits sont le résultat des efforts que déploie l’homme et, tant que la récompense n’est pas équivalente au travail, le niveau de production chutera inévitablement. Pour cette raison, la méthode idéale pour la distribution des biens et des services parmi les gens est celle qui garantie le niveau de production le plus élevé possible. Cette méthode, c’est le système de prix qui est aussi appelée mécanisme de prix car, selon eux, il réalise automatiquement l’équilibre. Il consiste à laisser aux consommateurs la liberté de décider eux-mêmes de la répartition des ressources de la société aux différents secteurs d’activité, en demandant certains produits et se détournant de certains autres. De cette façon, ils dépenseront leur revenu en achetant ce dont ils ont besoin ou qu’ils désirent comme bon leur semble. Ainsi, le consommateur qui déteste le vin s’abstiendra de l’acheter et dépensera son revenu dans d’autres choses. Si le nombre de ceux qui détestent le vin s’accroît, ou que tout le monde vient à ne plus en vouloir, alors la production du vin ne sera plus profitable du fait de la chute de sa demande, et s’arrêtera naturellement. Il en va de même des autres produits. Les consommateurs décident donc eux même de la qualité et de la quantité de la production, grâce à la liberté qui leur est donnée d’acheter ou de s’abstenir. C’est le prix qui joue le rôle d’interface pour la distribution des biens et services, en les rendant accessibles ou non aux consommateurs, rentables ou non aux producteurs.

Le mécanisme de prix est le stimulant de la production, le régulateur de la distribution, il est le moyen de communication entre le producteur et le consommateur, c’est-à-dire que c’est lui qui assure l’équilibre entre la production et la consommation.

2.7.2 Le prix, stimulant de la production Les économistes capitalistes considèrent que le prix est le principal facteur qui pousse l’homme à entreprendre tout effort de production ou tout sacrifice car, par tout effort qu’il déploie, l’homme recherche une contrepartie matérielle. Ils excluent la possibilité que l’homme puisse produire un quelconque effort dans un but moral ou spirituel. Même s’ils reconnaissent la motivation morale, ils

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l’attribuent à un mobile matériel, et estiment que l’homme vise essentiellement, par ses efforts, à satisfaire ses besoins et assouvir ses désirs. Cette satisfaction passe par la consommation des biens qu’il produit lui-même, ou l’obtention d’une récompense monétaire lui permettant d’acquérir les biens et les services produits par d’autres. Puisque l’homme se base sur l’échange de ses efforts contre ceux des autres pour satisfaire la plupart de ses besoins, si ce n’est pas tous, alors il se concentre plus sur l’obtention de la récompense monétaire de ses efforts que sur la production directe des biens et services dont il a besoin. C’est donc l’obtention de la contrepartie monétaire (le prix), qui pousse l’homme à produire. Par conséquent, le prix stimule les producteurs à fournir des efforts et, à ce titre, il est le stimulant de la production.

2.7.3 Le prix, régulateur de la distribution L’homme cherche à satisfaire complètement l’ensemble de ses besoins. C’est pour cette raison qu’il s’efforce à acquérir les biens et les services qui sont les moyens de satisfaction de ces besoins. Si on laissait à chaque homme la possibilité de se servir librement pour satisfaire ses besoins, il n’arrêterait pas de consommer ou prendre possession des biens et des services dont il a envie. Mais, puisque tous les individus poursuivent le même objectif, il est indispensable de s’arrêter dans la satisfaction de ses besoins, là où s’arrête sa capacité à échanger ses efforts contre ceux des autres, c’est-à-dire à la limite de la contrepartie monétaire de ses efforts, autrement dit à la limite du prix. Par conséquent, le prix est la contrainte qui agit naturellement et pousse l’homme à arrêter la possession et la consommation à une limite proportionnelle à ses ressources. C’est l’existence du prix qui amène l’homme à réfléchir, comparer et définir des priorités parmi ses concurrents besoins qui demandent tous à être satisfaits pour en retenir ceux qu’il estime indispensables et délaisser ceux qui le sont moins. Le prix oblige ainsi l’individu à se contenter d’une satisfaction partielle de certains de ses besoins. C’est donc le prix qui guide la répartition des nombreux besoins qui sollicitent l’individu. De même, le prix régule la distribution des profits limités parmi la multitude de consommateurs qui les recherchent. La disparité des revenus fait que chacun consomme dans la limite de ce que lui permettent ses revenus. Il en résulte que certains biens deviennent réservés à la catégorie de ceux qui en ont les moyens, et la consommation de certains autres biens de bas prix devient commune à l’ensemble des gens aux revenus les plus modestes. L’élévation du prix de certains produits et la baisse de celui de certains autres, ajouté à l’abondance ou l’insuffisance des ressources suivant les individus font que le prix est bien un régulateur de la distribution des profits parmi les consommateurs.

2.7.4 Le prix, source d’équilibre entre production et consommation Le prix est le moyen de communication entre le producteur et le consommateur, car le producteur qui répond aux besoins des consommateurs est récompensé à travers les profits qu’il va réaliser. Le producteur dont les produits sont mal accueillis par les consommateurs finira à coup sûr par des pertes. Le moyen dont dispose le producteur pour connaître le désir des consommateurs est le prix. En effet si la demande des consommateurs augmente pour un produit donné, son prix va augmenter sur le marché et sa production augmentera en réponse au désir des consommateurs. A l’inverse, si les consommateurs se détournent d’un certain produit, son prix baissera sur le marché et sa production diminuera en conséquence. Ainsi, les ressources affectées à la production augmentent lorsque le prix s’élève et diminuent lorsqu’il baisse. C’est donc, bel et bien le prix qui réalise

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l’équilibre entre la production et la consommation et il constitue en même temps un outil de communication entre le producteur et le consommateur. Tout cela se produit automatiquement. Par conséquent, le prix est la base sur laquelle s’appuie l’économie aux yeux des capitalistes, et il est, selon eux, la pierre angulaire de l’économie.

Ceci est un résumé du système économique dans l’idéologie capitaliste que les intéressés appellent ‘’l’économie politique’’. Il ressort clairement de son étude et analyse approfondie présentée ci-dessous, la fausseté du système économique capitaliste à plus d’un titre.

3. Critique de l’économie capitaliste Les capitalistes considèrent que l’économie est le domaine des connaissances qui étudie les besoins de l’homme et les moyens de les satisfaire, et font de la production des biens et des services qui sont les moyens de satisfaction des besoins, et de la distribution des ces biens et services parmi les hommes un même sujet de recherche. Cela signifie qu’il mélange les besoins et les moyens de les satisfaire en un seul et même problème et en font une recherche unique. Ils ne font aucune distinction entre les deux, au contraire, ils les entremêlent de façon inextricable. Ainsi le problème de la distribution des biens et des services est inclus dans celui de leur production. A partir de là, ils regardent l’économie d’un point de vue qui inclue ressources économiques et la méthode de leur possession, sans séparation entre eux et sans les différencier. Autrement dit, ils traitent la science économique et le système économique ensemble comme un seul sujet, sans faire de distinction. Or, il existe une grande différence entre le système économique et la science économique. En effet, le système économique est celui qui traite le problème de la distribution de la richesse, de sa possession, de la manière d’en disposer et d’autres questions semblables. Dans son développement, le système économique suit une vision du monde bien déterminée, ou idéologie particulière. Par conséquent, le système économique en Islam diffère de celui du capitalisme tout comme de celui du socialisme/communisme car chacune suit le point de vue de l’idéologie qui lui a donné naissance. Il diffère de la science économique qui étudie la production, et recherche les moyens d’améliorer la production et ses outils. Elle est universelle, commune à toutes les nations et n’est associée à aucune idéologie particulière tout comme les autres sciences. Ainsi, par exemple, la définition de la notion de propriété dans le système capitaliste diffère de celle du socialisme/communisme aussi bien que de celle de l’Islam. Par contre l’amélioration de la production qui est l’étude d’une réalité, il s’agit d’un problème scientifique, il est le même pour tout le monde, quelles que soient les différences idéologiques.

Le mélange entre les besoins et les moyens de leur satisfaction dans les études, c’est-à-dire entre les ressources économiques et leur distribution pour en faire un seul et même sujet de recherche, est une erreur qui induit le mélange et la confusion dans les recherches économiques menée par les capitalistes. Par conséquent la base même de la construction de l’économie capitaliste est fausse.

Le fait de considérer que les besoins qui nécessitent une satisfaction sont uniquement d’ordre matériel est également une erreur et contredit la réalité. En effet, il existe des besoins d’ordre moral

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ou spirituel, et ils demandent tous à être satisfaits comme les besoins matériels, et nécessitent tous pour cela des biens et des services.

Quant au fait de considérer que les besoins et les profits tels qu’ils sont, et non telle que la société devrait être, cette vision des choses montre que l’économiste capitaliste regarde l’homme comme un être purement matériel dépourvu de tout penchant spirituel, de toute éthique et de tout idéal moral. Il ne se préoccupe pas de ce que la société devrait être en terme d’élévation morale en faisant des vertus la base des relations, ni de ce qui devrait la guider en terme d’élévation spirituelle en faisant de la relation avec Dieu la ligne directrice des toutes les relations au sein de la société, dans le seul but de mériter l’agrément de Dieu. Il ne se soucie nullement de tout cela. Ce qui le préoccupe, c’est uniquement la pure matière pour satisfaire des besoins purement matériels. Ainsi s’il ne triche pas dans la vente, c’est pour que son commerce marche, mais s’il peut mieux réussir en trichant alors il tricherait sans état d’âme. De même, ce n’est pas en réponse à l’ordre de Dieu de donner l’aumône qu’il nourrit les pauvres, mais simplement pour qu’ils ne volent pas de sa marchandise ou pour la publicité. Si leur famine pouvait l’enrichir, alors il choisirait volontiers de les affamer. Ainsi, l’économiste considère les profits uniquement comme source de satisfaction de besoins matériels. Une telle personne qui regarde l’homme à travers cette vision basée sur le profit matériel, et qui établit la vie économique sur elle, est des plus dangereuses qui puissent exister dans la société.

En ce qui concerne les richesses et les efforts qu’ils appellent les biens et les services, il faut noter que les gens s’efforcent à les acquérir pour en tirer profit et les échanges qui en résultent établissent automatiquement des relations entre les gens et définissent la société. Aussi est-il indispensable de prendre en compte ce que va être la société aussi bien globalement que dans les détails, lorsqu’on étudie les ressources et les besoins. Le fait de se préoccuper de la matière économique en termes de satisfaction de besoins sans se soucier de ce que devrait être la société, est une séparation entre les produits économiques et les relations qui en découleront dans la société. Cela est contraire à la nature des choses. Pour cette raison, il est erroné de considérer une chose comme étant bénéfique simplement parce qu’il existe des individus qui en veulent, qu’elle soit par sa nature bénéfique ou néfaste pour eux, ou qu’elle ait une influence sur les relations entre les gens ou non, et qu’elle soit licite dans la croyance de la société ou illicite. Il faut plutôt ne qualifier les choses de bénéfiques que si elles sont réellement bénéfiques compte tenu de ce que la société devrait être. Ainsi, il est faux de considérer le haschich, l’opium et les produits semblables comme bénéfiques et leur attribuer une valeur économique, simplement parce que des individus les désirent. Il est donc absolument nécessaire, de prendre en compte la répercussion qu’aura un produit sur les relations au sein de la société, lorsqu’on étudie son l’utilité, c’est-à-dire lorsqu’on veut déterminer si oui ou non le produit a une valeur économique. En d’autres termes, il est indispensable de considérer une chose en fonction de ce que la société devrait être et non pas restreindre l’analyse juste à la chose telle qu’elle est, en fermant les yeux sur ses conséquences sociales.

En incluant le problème de la satisfaction des besoins dans celui des moyens de leur satisfaction, et en regardant ces moyens uniquement comme répondant à des besoins, les économistes se sont concentrés sur la production des richesses plus que sur leur distribution pour satisfaire effectivement les besoins. Le problème de la distribution est devenu secondaire. Le système économique capitaliste vise un seul objectif : augmenter la richesse globale du pays. Il travaille pour atteindre le plus haut niveau de production possible. Pour les capitalistes l’acquisition du niveau de bien être le plus élevé des individus passe par l’augmentation du revenu national en élevant la production du pays, et en donnant aux individus la possibilité de prélever de la richesse au travers de la liberté qu’ils ont de travailler pour produire et posséder la richesse. Le rôle de l’économie n’est donc pas celui de

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satisfaire les besoins des individus et de faciliter la satisfaction des besoins de chaque membre de la société mais essentiellement celui d’augmenter les moyens de satisfaction des besoins individuels. Il s’agit, en d’autres termes de chercher à satisfaire les besoins de la communauté prise globalement en élevant le niveau de production et en augmentant le revenu national du pays. La disponibilité de ce revenu national est sensée entraîner automatiquement sa distribution parmi les individus, grâce à la liberté de propriété et la liberté de travail. Il est donc laissé aux membres de la société d’obtenir ce qu’ils peuvent de la richesse du pays, chacun selon ce qu’il détient comme facteurs de production, que tous soient satisfaits ou seulement une partie d’entre eux.

Nous venons de voir l’économie politique, autrement dit l’économie capitaliste. Elle est manifestement fausse, et loin d’être conforme à la nature des choses. Elle ne conduit pas à l’amélioration du niveau de vie de tous les individus, et ne satisfait pas les besoins vitaux de chaque individu. L’erreur dans cette conception des choses est que les besoins qui demandent à être satisfaits sont des besoins individuels, ce sont des besoins humains. Il s’agit des besoins de Jean, de Marie, de Hassan et non pas ceux d’un groupe d’individus, de pays ou de peuples. Celui qui s’efforce à satisfaire ses besoins c’est l’individu, que la satisfaction puisse s’obtenir directement à l’échelle individuelle, comme le besoin de manger, ou qu’elle soit liée à l’ensemble de la communauté, comme la défense de la nation. Pour cela, le problème économique devrait être en réalité basé sur la distribution des moyens de satisfaction des besoins à l’individu, autrement dit, sur la distribution des richesses et des profits à chaque membre de la nation, et non pas sur les besoins qu’éprouve l’ensemble de la nation sans tenir compte des besoins de chaque individu pris isolément. En d’autres termes, le vrai problème c’est la pauvreté qui atteint l’individu et non pas la pauvreté qui atteint la nation. Ainsi, la préoccupation du système économique doit être uniquement celle de satisfaire les besoins vitaux de chaque individu et non pas d’entreprendre des recherches sur la production de la matière économique.

Dès lors, l’étude des facteurs qui influencent le volume de la production nationale n’est pas un sujet de recherche pertinent pour la satisfaction complète de l’ensemble des besoins essentiels de chaque individu pris isolément. Mais le véritable sujet de recherche dans ce sens consiste à étudier les besoins essentiels l’homme en tant qu'être humain, étudier la distribution de la richesse à chaque membre de la société de manière à garantir la satisfaction de tous ses besoins essentiels. C’est ce sujet là qu’il faudrait traiter avant toute chose. En effet, résoudre le problème de la pauvreté du pays ne résout pas le problème de chaque individu. Par contre, le fait de combattre la pauvreté des individus et de distribuer la richesse du pays parmi eux, les encourage à travailler pour augmenter le revenu national. Quant à l’étude des facteurs qui influencent la taille de la production et l’accroissement du revenu national, c’est dans le cadre de la science économique qu’elle devrait être entreprise, c’est-à-dire dans le cadre de la recherche sur la matière économique et son augmentation, mais pas dans l’étude de la satisfaction des besoins humains qui est l’objet du système économique.

Nous rappelons que selon les capitalistes la base du problème économique qui se pose à la société est la rareté relative des biens et des services par rapport aux besoins. Ils affirment que compte tenu des besoins sans cesse croissants des individus, les ressources sont insuffisantes pour satisfaire complètement les besoins de l’homme. D’où le problème économique. C’est une erreur et ne concorde pas avec la réalité. En effet, les besoins qui nécessitent absolument d’être satisfaits sont uniquement les besoins vitaux de l’individu en tant qu'être humain, et non les besoins secondaires ou de luxe, bien que l’homme s’efforce à satisfaire même ses besoins de luxe. Les besoins vitaux sont

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limités et les ressources et les efforts qu’ils appellent les biens et les services existants dans le monde sont certainement suffisants pour satisfaire les besoins vitaux de l’homme ; il est possible de satisfaire complètement tous les besoins vitaux de l’humanité. Il n’existe donc pas de problème au niveau des besoins essentiels qui mérite d’en faire le problème économique posé à la société. Le problème économique c’est plutôt de distribuer les ressources existantes à chaque individu pour satisfaire totalement l’ensemble de ses besoins vitaux, et de l’aider à satisfaire ses besoins de luxe.

Les besoins croissants

En ce qui concerne les besoins qui se renouvellent et augmentent sans cesse, il ne s’agit pas des besoins vitaux, car les besoins essentiels de l’homme en tant qu'être humain n’augmentent pas, c’est uniquement les besoins secondaires qui peuvent s’accroître et se renouveler. L’accroissement des besoins dû au progrès de la vie urbaine relève uniquement des besoins secondaires. Bien que l’homme travaille pour les satisfaire, leur insatisfaction ne constitue pas un problème. Ce qui pose un problème c’est la non-satisfaction des besoins vitaux. De plus, la question de l’augmentation des besoins secondaires concerne une communauté vivant dans un pays donné et non chaque individu de ce pays. Cette question est résolue par l’impulsion naturelle qu’a l’homme à rechercher à satisfaire ses besoins. Avec l’accroissement des besoins secondaires, cette impulsion le pousse à travailler d’avantage pour subvenir aux nouveaux besoins en exploitant les ressources de son pays, en initiant une activité professionnelle dans un autre pays, en rejoignant un nouveau pays par l’extension des activités ou la fusion avec des entreprises locales. Cette question est bien différente du problème de la satisfaction complète des besoins vitaux de chaque membre de la société. En effet, le problème de la distribution de la richesse à chacun des individus de la société pour satisfaire totalement ses besoins vitaux et l’aider à répondre à ses besoins secondaires, est un problème qui relève de la vision du monde et, il est donc propre à une Nation donnée, ou une idéologie déterminée. Par contre, la question de l’accroissement du revenu national par l’augmentation de la production concerne la situation réelle du pays, du point de vue de connaissances pratiques permettant d’accroître la richesse, que ce soit par l’exploitation des ressources du pays, par l’émigration, l’extension ou la fusion. Ce problème d’accroissement des richesses relève directement de la réalité et concerne chaque être humain. Il s’agit d’un problème général qui n’est pas lié à une vision du monde particulière, ni à une nation spécifique, ni à une idéologie déterminée.

Les principes économiques qui doivent être appliqués sont ceux qui garantissent la distribution de la richesse intérieure et extérieure du pays à tous les individus de la Nation, de manière à garantir la satisfaction complète de l’ensemble de leurs besoins essentiels, et de permettre ensuite à chacun d’entre eux de réaliser ses besoins secondaires. Quant à l’élévation du niveau de la production, c’est un problème qui nécessite des recherches scientifiques et le fait de le traiter dans le cadre du système économique ne résout pas le problème économique de base, à savoir, la satisfaction complète de l’ensemble des besoins vitaux de chaque citoyen, individuellement. En effet, l’augmentation de la production conduit à l’élévation du niveau de richesse du pays, mais elle ne conduit pas à la satisfaction totale de tous les besoins essentiels de chaque individu. Il se peut qu’un pays soit riche de part sa production comme l’Irak et l’Arabie Saoudite par exemple, mais que l’ensemble des besoins vitaux de la majorité de ses citoyens ne soient pas complètement satisfait. Ce qui montre bien que l’accroissement de la production ne résout pas le problème économique de base qui pourtant doit absolument être résolu avant toute chose. Nous rappelons qu’il s’agit de satisfaire tout d’abord complètement l’ensemble des besoins de base de tous les individus, individuellement, et de les aider ensuite à satisfaire leurs besoins secondaires. Il ressort de ce qui précède que la pauvreté et la privation à combattre, c’est la non-satisfaction des besoins vitaux de l’homme en tant qu'homme,

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et non celle des besoins qui se renouvellent avec le degré d’urbanisation. Ce qui est recherché c’est résoudre le problème de pauvreté et de privation de chaque individu de la société, individuellement et non pas celui de la pauvreté et de la privation qui affectent le pays. Le problème de la pauvreté et de la privation ainsi compris ne se résout pas par l’augmentation de la production, mais plutôt par le mode de distribution de la richesse à l’ensemble des individus individuellement, de sorte que chacun puisse satisfaire complètement tous ses besoins fondamentaux et être aidé pour faire face à ses besoins secondaires.

Le système économique capitaliste considère la valeur comme chose relative et non réelle, elle est donc fictive selon eux. Ainsi la valeur d’un mètre d’étoffe en laine est sa valeur marginale en période de disponibilité sur le marché. Elle est aussi la quantité de biens et de services pouvant être obtenue en échange de cette étoffe. Cette valeur devient le prix si le bien reçu en échange est de la monnaie. Ces deux valeurs sont distinctes selon eux, et portent deux noms différents. La première étant appelée profit ou utilité, et la seconde valeur d’échange. Cette conception de la valeur incluant une distinction est inexacte car, la valeur de tout bien est la quantité de profit qu’il contient en prenant en compte le critère de la rareté. Ainsi, l’évaluation exacte de tout bien consiste à considérer l’utilité qu’il présente en tenant compte de sa rareté, que ce soit par rapport à une personne ou à un autre bien et, que ce bien soit possédé par l’homme initialement, comme la chasse, ou obtenu par échange. Par conséquent la valeur est un signifiant correspondant à un signifié bien définit, ayant une réalité spécifique et non un terme désignant une chose fictive pouvant être appliqué à un signifié sous certaines hypothèses et ne pas l’être sous d’autres. La valeur est donc une chose réelle et non relative. Il s’en suit que la conception de la valeur que se font les économistes capitalistes est fausse dès sa base.

Ce qui est appelé ‘’valeur marginale’’ est en fait une estimation conçue pour concentrer la production sur les conditions les plus défavorables de distribution des produits. Ainsi l’estimation de la valeur des produits est basée sur la limite la plus basse de telle sorte que la production se fasse dans des conditions garantissant la distribution. L’utilité marginale n’est pas réellement une valeur du produit, ni même son prix car, la valeur d’un produit s’estime par la quantité de profit qu’il renferme au moment de l’évaluation en prenant en compte l’élément de sa rareté à ce moment. Cette valeur du produit ne diminuera pas si son prix baisse par la suite, il n’augmentera pas non plus avec une hausse du prix car, elle est considérée au moment de l’évaluation. La théorie de l’utilité marginale est donc une théorie pour le prix mais pas pour la valeur. Or, il y a une différence entre le prix et la valeur, même chez les capitalistes. Ce qui détermine l’estimation du prix c’est l’abondance de la demande accompagnée d’une insuffisance de l’offre ou l’abondance de l’offre accompagnée d’une demande insuffisante. C’est une question liée à l’augmentation de la production et non à sa distribution. Alors que ce qui intervient dans la définition de la valeur d’un bien c’est la quantité de profit qu’il renferme en tenant compte de sa rareté sans que celle-ci soit une composante de l’évaluation.

Il découle de ce qui précède que l’étude de la valeur chez les capitalistes est fausse dès sa base, et toute recherche qui s’appuie sur elle est également fausse, le concept de base étant lui-même faux. Cependant, si la valeur d’un bien ou d’un service était estimée par son utilité ou l’effort investi alors elle serait une estimation correcte pouvant rester stable sur le court terme. Si, par contre, l’estimation de la valeur se base sur le prix, alors elle sera fictive et susceptible de changer à tout moment en fonction du marché. Dès lors, elle perd sa qualité de valeur, et le terme valeur devient impropre

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pour la désigner. Il ne s’agira plus que d’un moyen permettant de gagner de l’argent en fonction du marché et non selon ce que renferme le bien comme utilité.

Les économistes capitalistes affirment que le profit est le résultat des efforts consentis par l’homme. Aussi, si la récompense n’est pas égale au travail, alors le niveau de production chutera sans aucun doute. Ce qui les amène à considérer que la méthode idéale pour distribuer la richesse est celle qui garantie la possibilité d’atteindre le plus haut niveau de production. Eh bien, nous allons montrer que tout cela est complètement faux. En effet, la réalité tangible est que la source première de l’utilité dans tout bien est la richesse que Dieu a crée dans l’univers. Ce sont les dépenses consenties pour améliorer ou initier l’utilité de cette richesse, ajoutées au travail qui la mette sous une forme procurant une utilité donnée. Par conséquent, considérer le profit comme étant le résultat des seuls efforts est une erreur, car cela est contraire à la réalité. C’est une méconnaissance de l’importance de la matière première et des autres dépenses ayant permis d’augmenter le profit. Ces dépenses pourraient être une compensation de la matière première mais pas de l’effort. Donc, le profit peut être le résultat de l’effort, le résultat de l’existence d’une matière première, ou des deux à la fois, mais il n’est pas le résultat du seul effort humain.

Quant à la chute du niveau de la production, il ne résulte pas uniquement de l’inégalité entre la récompense et le travail, elle peut résulter de cela, mais elle peut aussi résulter d’une baisse générale de la richesse du pays, tout comme elle peut être la conséquence d’une guerre ou d’autres crises. Par exemple le déclin de la production qui s’est produit en France et en Angleterre après la deuxième Guerre mondiale n’a pas été dû à une inégalité entre la récompense et le travail, mais de la rupture de leur influence sur leurs riches colonies et de leur implication dans la guerre. De même, la chute de la production des États Unis durant la deuxième Guerre mondiale n’a pas eu pour cause l’inégalité entre la récompense et le travail, mais à son intervention dans la guerre contre l’Allemagne. La crise de la production dans le monde musulman aujourd’hui n’est pas due à une différence qui existerait entre la récompense et le travail mais résulte de la crise intellectuelle dans laquelle patauge la nation islamique dans sa totalité. Cela montre bien que l’inégalité entre la récompense et le travail n’est pas la seule cause de la chute de la production. Il est donc incorrect de partir de là pour déduire que la méthode idéale est celle qui garantie l’élévation du niveau de production. De plus, atteindre le niveau de production le plus élevé n’a aucun rapport avec le problème de la distribution des richesses à tous les individus.

Les capitalistes affirment par ailleurs que le prix est le moteur de la production car ce qui pousse l’homme à fournir tout effort c’est la contrepartie matérielle qu’il escompte. Cette affirmation est inexacte et contraire à la réalité. En effet, il existe de nombreux cas où l’homme dépense ses forces pour un idéal tel que la quête de la gloire, ou spirituel comme l’espoir de gagner des récompenses divines ou encore éthique comme l’honnêteté. Les besoins de l’homme peuvent donc effectivement être matériels sous forme de profit matériel, mais ils peuvent aussi être spirituels ou moraux. Par conséquent il est erroné de restreindre les besoins aux seuls besoins matériels. Il peut arriver que l’homme dépense plus généreusement son argent ou son effort pour la satisfaction de ses besoins spirituels ou moraux qu’il ne le ferait pour ses besoins matériels. D’où, le prix n’est pas l’unique facteur qui pousse à la production ; ce peut être le prix mais ce peut aussi être autre chose. En effet, n’a-t-ont jamais vu un tailleur de pierre passer des mois à travailler laborieusement pour la construction d’une mosquée, ou une usine consacrer plusieurs jours de production au profit des

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pauvres, ou encore une nation travailler pour mettre en place une infrastructure pour défendre son territoire. Alors toutes ces sortes de production sont-elles motivées par le prix? De plus, la contrepartie matérielle elle-même ne se limite pas au prix puisqu’elle peut être un autre bien ou service. Donc faire du prix le seul moteur de la production est absolument inexact.

Un des points les plus étranges du système capitaliste est le fait qu’il considère le prix comme l’unique critère de la distribution des richesses parmi les membres de la société. Ils disent que le prix est le facteur qui contraint l’homme à s’arrêter de posséder et de consommer à une limite proportionnelle à ses revenus, restreignant la consommation de chaque individu à ce que permettent ses revenus. En conséquence, par la hausse du prix de certains produits et la baisse d’autres et par la disponibilité de l’argent chez certains et sa non-disponibilité chez d’autres, le prix régule la distribution de la richesse parmi les consommateurs. Il en résulte que la part de chaque individu dans la richesse du pays n’est pas selon ses besoins vitaux mais égale à sa contribution dans la production des biens et des services, c’est-à-dire qu’elle est égale à ce qu’il possède comme terre ou capital, ou encore à l’effort qu’il aura déployé au travail.

Par cette règle, qui consiste à faire du prix le régulateur de la production, le système économique capitaliste a clairement décidé que l’homme ne mérite la vie que s’il est capable de contribuer à la production des biens et des services. Quant à celui qui est incapable de participer à la production parce qu’il est né faible, ou qu’il a été victime d’un handicap quelconque, alors il ne mérite pas la vie car, il ne mérite pas de prélever à la richesse du pays ce dont il lui faut pour satisfaire ses besoins vitaux. De même, toute personne ayant plus de possessions par un moyen ou un autre, parce qu’elle est née physiquement plus forte, ou intellectuellement plus apte aura droit de consommer plus qu’elle n’en a besoin et de dominer les autres. Celui dont l’attrait pour le matériel est plus forte possédera plus que les autres, tandis que celui dont le penchant spirituel est plus prononcé et dont l’attachement à des valeurs morales est plus fort aura moins que les autres du fait de son respect de contraintes morales ou spirituelles durant la quête de la richesse.

Cela écarte les valeurs spirituelles et éthiques de la vie et la rend purement matérielle. La vie devient basée sur un combat matérialiste dont le but est de gagner les moyens permettant de satisfaire les besoins matériels. C’est ce qui se passe réellement dans les pays qui adoptent le système capitaliste et ceux qui l’appliquent. Il est apparu dans les pays qui ont adopté le capitalisme comme système économique, la domination des monopoles capitalistes, les producteurs imposant leurs lois aux consommateurs. Un petit groupe de personnes comme les propriétaires des sociétés d’exploitation de pétrole, de fabrication automobile et des industries lourdes, en sont venus à régner littéralement sur la masse de consommateurs leurs imposants des prix déterminés pour les biens. Ce qui a conduit à certaines tentatives de colmatage du système. Ainsi, ils ont donné à l’État le droit d’intervenir pour fixer le prix dans certaines circonstances afin de préserver l’économie nationale, protéger les consommateurs, réduire la consommation de certains produits et, ce faisant, limiter l’autorité des monopoles.

Raccommodages

Ils ont par ailleurs inclus dans l’organisation de la production, des projets publics dirigés par l’État. Cependant, toutes ces raccommodages, déjà en contradiction avec la base même du système capitaliste - qui est la liberté de propriété -, ne sont appliquées que dans des circonstances très limitées. De plus, de nombreux capitalistes, tels que les partisans des courants individualistes récusent cet interventionnisme de l’État et le rejettent. Ces derniers estiment que le mécanisme du prix suffit à

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lui seul pour réaliser l’harmonie entre les intérêts des producteurs et ceux des consommateurs sans aucun besoin d’une quelconque intervention de l’État.

Comme nous l’avons dit les raccommodages préconisées par les interventionnistes ne s’appliquent que dans des circonstances et conditions bien déterminées, mais même dans le cas de leur application, la distribution de la richesse ne satisfait pas les besoins de tous les membres de société individuellement et de manière complète.

La mauvaise distribution des biens et des services qui résulte du concept de la liberté de propriété et du concept qui fait du prix le seul outil de distribution de la richesse, prédomine dans toute société qui applique le système économique capitaliste. En ce qui concerne l’Amérique, où, à un moment donné, chaque citoyen avait pu prélever de la richesse nationale de quoi satisfaire complètement ses besoins vitaux et une partie de ses besoins secondaires, cela a été dû à l’abondance des richesses dans le pays. Mais, cela n’était nullement le résultat de l’égalité de la part de chacun avec sa contribution dans la production des biens et des services. Par ailleurs, le fait de considérer le prix comme l’unique régulateur de la distribution a conduit les monopoles capitalistes à sortir de leur pays pour conquérir de nouveaux marchés pour acquérir la matière première et écouler leurs produits. Tout ce dont souffre le monde en terme de colonisation, de zones d’influences et d’invasion économique n’est que le résultat de ces monopoles et de celui de l’utilisation du prix comme outil de distribution des ressources. Ainsi toutes les ressources de la terre vont être rassemblées sur cette base pour être mises entre les mains des monopoles capitalistes. Tout cela est dû aux règles et principes erronés sur lesquels a été construit le système économique capitaliste.

4. Le système économique socialiste (et communiste)

4.1 Particularités du système économique socialiste Le système économique socialiste dont le communiste est l’opposé du système économique capitaliste. La plupart des idées socialistes sont apparues au dix-neuvième siècle. Les socialistes ont combattu vigoureusement les idées des courants libéraux, et donc le système économique capitaliste. La puissante apparition du socialisme est due à la flagrante injustice du capitalisme dont la société a souffert ainsi qu’aux nombreuses erreurs et inadéquations de ce système. Si l’on examine les écoles de pensées socialistes, il ressort qu’elles partagent trois thèmes qui les distinguent des autres écoles de pensée économiques:

1. La réalisation d’une certaine forme d’égalité

2. Abolition complète ou partielle de la propriété privée

3. Organisation de la production des biens et services par l’intermédiaire de l’ensemble de la population.

Cependant, malgré leur entente sur ces points, ils diffèrent fondamentalement les uns des autres sur plusieurs autres points dont nous rappelons les plus importants dans ce qui suit.

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4.2 Divergences entre les courants socialistes

4.2.1 Forme finale de l’égalité Les écoles de pensée socialistes diffèrent sur la forme finale de l’égalité qu’ils visent à réaliser. Un premier groupe préconise l’égalité arithmétique, ce qui signifie égalité dans tout bien profitable, ainsi à chacun est donné ce qui est donné à l’autre.

Un autre groupe suggère la forme communiste de l’égalité qui consiste à prendre en compte l’habilité de chacun lors de la distribution du travail, et à considérer les besoins de chacun au moment de la distribution de la production. Selon eux l’égalité est réalisée lorsque le principe suivant est respecté : chacun est demandé suivant ses forces ou son habileté dans le travail qu’il effectue, à chacun est donné suivant ses besoins. Ce principe se résume en : ‘’De chacun selon ses capacités, à chacun selon ses besoins’’.

Un troisième groupe adopte l’égalité en termes de moyens de production puisque les ressources ne sont pas suffisantes pour satisfaire les besoins de tous les individus. Ainsi, la base de la distribution est : ‘’De chacun selon ses capacités, à chacun selon son travail’’. Ils estiment que l’égalité est réalisée lorsque tout le monde dispose de moyens de production similaires.

4.2.2 Part de propriété privée à abolir Les écoles de pensée socialistes diffèrent dans la quantité de ce qu’il faut abolir comme propriété privée.

Un groupe adopte l’abolition complète de la propriété privée, c’est le communisme.

Un autre préconise l’abolition de la propriété privée relative aux ressources productives appelées capital, tels que la terre, les usines, les chemins de fer, les mines, etc. Ils empêchent donc la possession de tout bien utilisé pour la production. Ainsi, l’on ne peut pas posséder une maison à louer, une usine ou une terre. Mais l’on peut garder la propriété individuelle des biens consommables. Il est donc permis aux gens de posséder tout ce qu’ils consomment. Ainsi ils ne peuvent posséder une maison que pour y habiter, et posséder ce que la terre ou les usines produisent. Ceci est le capitalisme socialiste.

Un troisième groupe ne réclame pas l’abolition de la propriété privée à l’exception de ce qui relève des terres agricoles. C’est le socialisme agricole.

Un quatrième groupe estime que chaque cas où l’intérêt public exige le passage de la propriété privée à la propriété publique, doit être étudié. Ils appellent à la restriction du nombre de propriétaires privés dans plusieurs domaines, en instituant des lois concernant la limite maximale de l’intérêt, les limites de locations, des salaires minimums et en attribuant aux travailleurs des parts dans le capital. Ceci est appelé socialisme d’État.

4.2.3 Moyens d’atteindre leurs objectifs Les écoles de pensée socialistes diffèrent également en terme des moyens qu’ils adoptent pour atteindre leurs objectifs. Le socialisme révolutionnaire compte sur la libération de la force ouvrière par ce qu’il appelle action directe, c’est-à-dire par l’effort des ouvriers eux-mêmes, comme les

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grèves illimitées, la destruction des machines et la propagation des idées de grèves générales parmi les ouvriers. Par l’empressement à réaliser ces grèves illimitées jusqu’au moment où ils seront capables d’appliquer leurs exigences, les processus économiques sont paralysés et le système économique en place est démoli. Les socialistes marxistes quant à eux, croient à la loi naturelle de l’évolution dans la société, et sont confiants qu’elle est suffisante à elle seule pour détruire le système en place et le remplacer par un nouveau système qui sera établi sur le socialisme. Quant aux partisans du socialisme d’État, le moyen d’appliquer leurs idées est la voie législative. Ainsi, en mettant en place des lois canons, ils garantissent la préservation de l’intérêt public et l’amélioration des conditions de la force ouvrière. De plus, en prélevant des taxes, en particulier sur le capital et l’héritage, il y aura une réduction de la disparité entre les propriétés.

4.2.4 Structures administratives Les courants de pensée socialistes se distinguent par la structure nécessaire pour administrer les projets dans le système socialiste. Par exemple, les capitalistes socialistes veulent attribuer l’organisation de la production et la distribution au gouvernement (l’État). Tandis que les syndicats veulent assigner la gestion à un groupe organisé d’ouvrier dirigé par leurs chefs.

4.3 Conception de la valeur Les plus célèbres et les plus influentes des théories socialistes sont celles de l’allemand Karl Marx. Ses théories ont dominé le monde socialiste. C’est sur elles que le parti communiste et l’Union Soviétique étaient établis. Elles ont encore une grande influence aujourd’hui.

Une des théories les plus connues de Karl Marx est la théorie de la ‘’valeur’’ qu’il a pris des penseurs capitalistes, et sur laquelle il a attaqué le capitalisme. Adam Smith, qui est considéré comme le fondateur de l’école libérale en Angleterre et celui qui a posé les bases de l’économie politique, c’est-à-dire le système économique capitaliste, a définit la valeur en disant : ‘’ la valeur de tout bien dépend de la quantité d’effort dépensé dans sa production’’.

Ainsi, la valeur d’un bien dont la production nécessite 2 heures aura une valeur double de bien dont la production ne demande qu’une heure. Ricardo est venu par la suite convoiter dans sa théorie du travail lorsqu’il a défini la valeur en disant : ‘’Ce qui détermine la valeur d’un bien n’est pas seulement la quantité de travail investie directement dans sa production, mais aussi le travail réalisé dans le passé pour la production des outils et les machines utilisées dans le processus de la production’’. Cela signifie que Ricardo croit que la valeur d’un produit dépend des dépenses consenties dans sa production. Il traduit ces dépenses par un élément qui est le travail.

Après cela, Karl Marx prendra la théorie de Ricardo concernant la conception de la valeur dans le système économique capitaliste comme une arme pour attaquer le concept de la propriété privée et le système économique capitaliste tout entier. Il affirme que la seule source de valeur d’un bien est le travail effectué pour sa production, et les propriétaires paient l’énergie des travailleurs à un prix qui ne dépasse pas la limite juste nécessaire pour les maintenir en vie et leur permettre de continuer à travailler. Le financier exploite donc leur énergie en produisant des biens dont la valeur dépasse de loin celle qui leur est payée. Karl Marx appelle la différence entre la valeur que produit l’ouvrier et celle qui lui est réellement payée la ‘’plus-value’’. Il a donc considéré que cette plus-value représente ce que les propriétaires et les employeurs usurpent des droits des travailleurs sous forme de revenus, de profits et d’intérêt dont naturellement il ne reconnaît pas la légalité.

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Karl Marx a estimé que les écoles socialistes qui ont existé avant lui devaient leur succès à l’amour de la justice et la volonté de défendre l’oppressé qui sont innés chez l’homme. Ces écoles adoptaient de nouvelles méthodes qu’elles considéraient applicables à la société, puis les présentaient aux gouvernants, aux propriétaires et aux intellectuels pour les inciter à mettre ces méthodes en application. Karl Marx, lui, n’a pas construit son école de pensée sur cette procédure, ni adopté leurs méthodes. Il l’a établi sur une idée philosophique connue sous le nom de ‘’matérialisme historique’’, également désigné par la ‘’théorie dialectique’’. Selon lui, l’instauration d’un nouveau système dans la société se fera par l’effet des seules lois économiques conformément à la loi de l’évolution qui existe dans la société. Tout cela sans l’intervention de qui que ce soit pour légiférer ou réformer. Le socialisme de Karl Marx a été appelé ‘’socialisme scientifique’’, pour le distinguer des autres méthodes socialistes qui l’ont précédé et qui ont été désigné sous le nom de ‘’socialisme idéaliste’’. La théorie socialiste de Karl Marx se résume comme suit :

Le système qui anime la société à chaque époque est le résultat de la situation économique. Les changements qui affectent ce système sont tous dus à une seule raison qui est la lutte des classes pour améliorer leur situation matérielle. L’histoire nous montre que cette lutte finit toujours par le même résultat qui est la victoire de la classe la plus nombreuse et dont la plus pauvre sur la classe la plus riche et la plus petite en nombre. Il appelle cela la loi de l’évolution sociale. Elle s’applique aussi bien à l’avenir qu’au passé. Dans le passé cette lutte des classes existait entre les hommes libres et les esclaves, ensuite entre les nobles et les hommes du commun, puis entre les nobles et les paysans, de même entre les maîtres de jurande et les compagnons. La lutte finit toujours par la victoire de la classe opprimée, majoritaire, sur la classe oppressive, minoritaire. Après sa victoire la classe opprimée se transforme en une classe oppressive et conservatrice.

Depuis la révolution française, la lutte existe entre la bourgeoisie et la classe des travailleurs. La première classe est devenue la maîtresse des projets économiques, la propriétaire du capital et conservatrice. En face d’elle se dresse la classe des travailleurs qui ne possède rien du capital mais qui est numériquement plus grande. Il y a donc un conflit d’intérêt entre ces deux classes, et il est dû à des raisons économiques.

Le système de production aujourd’hui ne marche plus avec le système de propriété. La production n’est plus individuelle, c’est-à-dire réalisée par une seule personne comme c’était le cas dans le passé ; mais elle est devenue collective, c’est-à-dire partagée entre plusieurs individus. Cependant, la propriété n’a pas changé en conséquence. Ainsi, la propriété individuelle a perduré et elle est encore la base du système en cours dans la société actuelle. En conséquence, la classe ouvrière qui participe à la production n’est pas associée à la propriété du capital et se retrouve à la merci des capitalistes (les propriétaires du capital) qui, de surcroît, ne participent pas en personne à la production. Alors qu’ils exploitent les ouvriers en ne les payant qu’un salaire de survie et les ouvriers sont contraints d’accepter ce salaire puisque leur unique source de revenu est leur travail. La différence entre la valeur du produit et le salaire ouvrier - que Marx appelle ‘’plus-value’’- constitue le profit que monopolise le capitaliste alors que la justice veut qu’il la partage avec les travailleurs.

Par conséquent, le conflit continuera entre les deux classes jusqu’à ce que le système de propriété soit conforme au système de production, c’est-à-dire lorsque la propriété devient socialiste ou collective. Ce combat finira par la victoire de la classe ouvrière conformément à la loi de l’évolution de la société, puisque c’est la classe opprimée et numériquement la plus importante.

Quant à la manière dont la classe ouvrière vaincra et les causes de sa victoire, la loi de l’évolution de la société en donne l’explication. L’ordre social en place porte en lui les racines du groupe à venir et

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disparaîtra par l’effet des lois économiques auxquelles il obéit. Il est arrivé un moment où la classe moyenne a eu la victoire sur la classe des nobles et a joué un rôle important dans l’économie puisqu’elle était alors propriétaire du capital. Cependant, aujourd’hui, son rôle est terminé et le moment est arrivé pour elle de céder la place à la classe ouvrière. Ce qui le contraint à cela c’est la loi de la ‘’concentration’’ et le jeu de la libre compétition. Par l’effet de la ‘’loi de la concentration’’, le nombre de capitalistes diminue, et le nombre d’individus de la classe ouvrière augmente. Par l’effet de la ‘’libre compétition’’, la production dépasse toute limite, et la quantité produite dépasse ce que les consommateurs, membres de la classe ouvrière peuvent acheter avec leur faible salaire. Cela conduit à des crises entraînant certains à perdre leur capital et rejoindre ainsi dans la classe ouvrière. Avec l’évolution du processus, les crises s’intensifient, leur fréquence augmente et, le nombre de capitalistes diminue progressivement. Alors il ne sera plus loin le moment où une crise beaucoup plus importante que toutes les précédentes surviendra. Elle sera d’une telle ampleur qu’elle détruira les piliers du système économique capitaliste, et le socialisme s’établira sur les ruines du capitalisme. Marx voit dans l’avènement du socialisme l’étape ultime de l’évolution historique, car il détruit la propriété privée, et par conséquent il n’existera plus de raisons pour provoquer des conflits entre les classes sociales puisqu’il n’y aura plus de différence entre elles.

La loi de la concentration à laquelle Marx fait référence fait partie du système économique capitaliste. En résumé, il y a une migration du capital de certains projets vers d’autres, de sorte que certains augmentent tandis que d’autres diminuent. Tout cela constitue des signes annonciateurs d’une concentration dans la production. Si vous comptez le nombre de projets dans un secteur de production industrielle, les usines de chocolat par exemple, vous trouverez que le nombre de projet diminue graduellement avec le temps, alors que la moyenne de la force de travail mise en oeuvre par projet augmente. Ce qui prouve qu’il y a eu concentration dans ce secteur de production, puisque les unités de production de grande taille remplacent progressivement les petites. Ainsi, si le nombre d’usines était de dix par exemple, il ne sera plus que de quatre ou cinq grandes usines et les autres auront disparu.

Quant à la libre compétition évoquée par Marx, cela exprime le principe de la liberté du travail, ce qui signifie que chaque individu a le droit de produire ce qu’il veut comme il veut.

Pour ce qui est des crises économiques mentionnées dans ses propos, elles s’appliquent à toute perturbation brusque affectant la balance économique. La crise spécifique comprend toutes sortes de crises qui s’abattent sur un secteur particulier, du fait du déséquilibre entre la production et la consommation. Cela se produit soit à cause d’une surproduction, soit à cause d’une surconsommation ou d’une sous-consommation.

La crise générale périodique, apparaît sous la forme d’une violente agitation qui secoue les piliers du système économique tout entier. Elle devient alors le point de séparation entre la période de plein essor économique et celle de la dépression. Chacune de ces deux périodes dure entre trois et cinq ans. Les crises générales périodiques ont des caractéristiques particulières qui les distinguent des autres.

4.4 Caractéristiques des crises La plupart des caractéristiques se retrouvent dans les trois qualités suivantes :

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Premièrement, la généralisation, de sorte que dans un pays, la crise atteigne tous les aspects de la prospérité économique ou au moins la plupart. Elle apparaît d’abord dans un pays et s’y généralise, puis elle contamine d’autres pays, ceux qui ont réalisé un certain progrès économique et qui sont liés par des relations permanentes.

La deuxième qualité est la périodicité, dans ce sens qu’elle apparaît après un certain laps de temps de façon périodique. La durée entre deux crises est comprise entre sept et onze ans. Cette durée n’est pas fixe, mais elle reste périodique.

La troisième qualité est l’excès de production, de telle sorte que les propriétaires de grandes unités de production aient une grande difficulté à écouler leurs produits. Ainsi, la production surpasse la consommation pour la plupart des produits, et, la crise s’installe.

Karl Marx considèrent que la crise conduit à la perte des capitaux de beaucoup de propriétaires qui gagnent alors les rangs des travailleurs. Ce qui entraîne la diminution du nombre de capitalistes et l’augmentation de celui des travailleurs, préparant ainsi la société à une crise générale qui détruira l’ancien système.

5. Critique de l’économie socialisme

5.1 De la question de l’égalité Il ressort de ce bref résumé du socialisme, et du communisme qui est une de ses formes, que les écoles socialistes, dont le communisme, travaillent pour l’égalité réelle entre les individus. Cette égalité s’exprime, selon les tendances, soit en termes de profits, soit en termes de moyens de production, soit de façon absolue. Chacune de ces types d’égalité n’est que purement imaginaire car impossible à réaliser dans la réalité. Il s’agit là donc d’une impossibilité pratique. Il en ainsi car l’égalité envisagée est elle-même irréelle, et donc impossible à mettre en pratique. L’irréalité de cette égalité s’explique par le fait que les êtres humains, par leur nature innée diffèrent aussi bien sur le plan physique que mental. De même ils diffèrent en termes de satisfaction de leurs besoins. D’où l’impossibilité de réaliser une égalité entre eux. En effet, même si on leur distribue, par force, la même quantité de biens et de services, ils ne pourront pas en tirer profit de façon égale. Par ailleurs, il est impossible de faire l’égalité entre les gens en termes de quantité de biens, nécessaire pour satisfaire leurs besoins. Un homme de grande corpulence a habituellement besoin de manger plus qu’une personne petite. Les besoins secondaires aussi varient largement suivant les individus. Aussi l’égalité entre les gens n’est-elle qu’une philosophie, purement théorique et imaginaire. De plus, l’égalité entre les gens elle-même, alors qu’ils n’ont pas les mêmes capacités, est loin de la justice que les socialistes prétendre essayer de réaliser. Les différences entre les êtres humains en termes de propriété, de moyens de production sont une réalité inévitable et, cela est tout à fait normal et naturel. Toute tentative de réaliser l’égalité est vouée à l’échec car elle s’oppose aux différences naturelles qui existent entre les gens.

5.2 De l’abolition de la propriété Quant à l’abolition de la propriété privée, elle est contraire à la nature humaine, car le besoin de posséder est inné en l’homme, c’est une des manifestations de son instinct de survie qui existe en lui

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de façon définitive. Ce besoin de posséder fait partie de la nature humaine, c’est une partie intégrante de son être qui ne saurait lui être dissocié. Il est impossible de l’abolir car c’est instinctif. En effet, tout ce qui est instinctif en l’homme ne peut lui être enlevé tant qu’il est vivant. Toute tentative d’abolition de propriété privée est une tentative de suppression d’un instinct naturel et ne mènera qu’à la désolation et au trouble. Par conséquent, ce qu’il convient de faire c’est organiser les instincts pour l’intérêt de la société, plutôt que d’essayer de les éliminer. S’agissant de l’abolition partielle de la propriété, cela peut recouvrir différentes significations qui méritent d’être précisées. • Si l’on entend par là, la restriction de la possession par un plafond, alors ce serait une limitation en

termes de quantité, ce qui est faux car cela reviendrait à limiter l’activité humaine, freiner ses efforts et réduire sa production. En empêchant à l’homme de posséder au delà d’un certain niveau, il sera effectivement arrêté à cette limite, son activité sera suspendue, et la société sera privée du bénéfice de l’activité qu’il aurait pu mener. Les sociétés qui ont appliqué cette restriction de la propriété sont inévitablement marquées par un manque de motivation à travailler et à être productif. Cependant, si la propriété est limitée à certains produits mais sans limitation de la quantité possédée, alors c’est acceptable car cela ne met pas d’obstacle à l’activité de l’homme. Cette approche organise la propriété des biens parmi les individus, et permet ainsi d’encourager à fournir des efforts et accroître l’activité.

• Si l’abolition partielle signifie empêcher l’individu de posséder certains biens, tandis que d’autres biens peuvent être possédés sans aucune limite sur la quantité, là aussi il faut examiner le cas. Si l’utilité que recèle le bien ne peut être tirée par un seul individu qu’en privant le public d’en bénéficier, alors il est tout à fait normal d’empêcher sa possession par un seul individu. Il s’agit dans ce cas de biens dont le profit est par nature commun aux gens, tels que les routes, les jardins publics, les fleuves, les mers et autres biens analogues. La restriction est imposée par la nature même du bien. Pour cette raison, il n’y a aucun mal à interdire la propriété exclusive par un individu de certains biens qui sont d’utilité publique, au cas où cette propriété individuelle empêcherait les autres d’en profiter.

• Si la nature du bien ne requiert pas une restriction à sa possession, dans ce cas il faut également examiner plusieurs éventualités avant de décider un droit de propriété sans limites. Si le bien est directement lié à un bien dont la propriété individuelle est interdite, comme les biens dont la source ne peut être possédée de façon privée, tels que l’eau et les immenses ressources minérales, alors il n’y a pas de mal à en interdire la propriété privée. Ce qui lie ces deux types de biens c’est leur origine commune. Si les biens qui ne sont pas communs par nature ne présentent pas un tel lien, alors il ne devrait pas y avoir une restriction à leur possession. Le faire limiterait injustement la propriété sans aucune raison. Cela est semblable à la limitation de propriété par la quantité et conduit aux mêmes résultats, c’est-à-dire : restriction de l’activité humaine, frein de ses efforts, réduction de la production et arrêt de travail, une fois arrivé au seuil imposé.

L’abolition partielle de la possession dont il est question dans le socialisme est une limitation par la quantité plutôt que par la manière. Elle empêche la possession de certains biens qui par leur nature et celle de leur origine devraient être possédés de façon individuelle. Le socialisme limite la propriété soit par la quantité, comme la restriction de la possession des terres dans certaines régions, soit par certaines caractéristiques comme l’interdiction de propriété des biens qui sont des moyens de production. Beaucoup de ces biens, par leur nature, pouvaient être possédés par des individus. L’interdiction de la possession de ces biens est une restriction de l’activité humaine, que ces biens soient spécifiés, comme l’interdiction du droit d’héritage, la possession des mines, des chemins de

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fer, ou d’usines ; ou qu’il soit laissé à l’État le soin d’empêcher la possession d’un bien chaque fois que l’intérêt public l’exige. Tout cela constitue une limitation à l’activité des individus tant que ces biens sont empêchés d’être possédé, alors que de par leur nature ils peuvent être possédés par des individus.

5.3 De l’organisation de la production En ce qui concerne l’organisation de la production et la distribution par des moyens publics, cela n’est pas satisfaisant puisqu’elle provoque inquiétude et perturbation parmi les gens, et crée rancoeur et haine parmi eux, les uns envers les autres. Il en résultat donc de l’anarchie et non de l’organisation. De plus une organisation ne vient pas naturellement par le cours des choses en laissant les travailleurs subir l’injustice des propriétaires. En effet, il se peut que ces derniers soient assez habiles pour payer les travailleurs de quoi satisfaire tous leurs besoins essentiels - comme c’est le cas aux États-Unis par exemple - de sorte que ceux-ci ne se rendent pas compte de l’injustice commis par les propriétaires en spoliant le fruit de leurs efforts. Par conséquent, l’évolution sensée réguler la production et la distribution ne se produira pas d’elle même, et elle ne s’est pas produite dans l’exemple cité. Pour cette raison, il est indispensable que cette régulation soit mise en place par des lois et des solutions appropriées, fondées sur une base sûre et définitive qui s’applique bien à la réalité des problèmes. Or, pour organiser la production et la distribution, le socialisme recours soit à la création des tensions et des troubles parmi les travailleurs, soit à la loi de l’évolution de la société, soit enfin à une législation établie par l’homme, et donc circonstancielle et non fondée sur une base sûre et définitive. Par conséquent, cette organisation est fausse dès sa base. Ceci est une preuve de la fausseté du socialisme en général. Quant à la fausseté du socialisme de Karl Marx en particulier, elle apparaît sous trois aspects.

5.4 De la théorie marxiste Premièrement : Son opinion sur la valeur est erronée et contraire à la réalité. En effet, considérer que la seule source de valeur d’un bien est le travail est en contradiction flagrante avec la réalité puisque le travail n’est qu’une source de la valeur et non pas la seule source. Il y a bien d’autres facteurs autres que le travail qui entre dans la constitution de la valeur d’un produit. Il y a par exemple la matière première sur laquelle se fait le travail, il y a aussi le désir exprimé pour l’utilité que comporte le produit. Dans certains cas la matière première présente plus d’intérêt que le travail effectué pour les acquérir, comme dans la chasse par exemple. Sans gibier, l’action de chasser ne saurait créer de la valeur. Par ailleurs, un produit peut ne pas avoir de la demande sur le marché local et être interdit à l’exportation comme le vin chez les musulmans. Ainsi, considérer le travail comme la seule source de valeur est incorrect, et ne correspond pas à la réalité du produit en tant que tel. Deuxièmement : Karl Marx affirme que le système social qui existe à une époque donnée est le résultat de la situation économique, et que les divers changements qui affectent ce système sont tous dus à une seule raison qui est la lutte des classes pour améliorer leurs conditions matérielles. Eh bien, cette affirmation est une erreur. Elle est en contradiction avec la réalité et basée sur une supposition théorique douteuse. La preuve de sa fausseté et de sa contradiction avec la réalité apparaît clairement aussi bien à travers les événements historiques que les faits vécus. En effet, chacun peut constater que le passage de la Russie soviétique au socialisme n’a été ni le résultat d’une évolution matérielle, ni celui d’une lutte entre les classes qui aurait remplacé un système par un autre. Mais il

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s’agit d’un groupe qui est arrivé au pouvoir par une révolution sanglante et qui s’est mis à appliquer ses idées sur le peuple, changeant ainsi le système. C’est le même scénario qui s’est déroulé en Chine. L’application du socialisme à l’Allemagne de l’Est à l’exclusion de l’Ouest, et à L’Europe de l’Est et pas à l’Europe de l’Ouest, n’a pas été non plus le résultat d’une lutte des classes. Cela a été plutôt le fait de l’occupation de ces pays par un État socialiste qui a appliqué son système sur eux, exactement comme cela s’est passé avec le système capitaliste, avec le système de l’Islam et, comme cela se passe avec tout système. Les pays pour lesquels la loi de l’évolution prévoit un changement par l’effet de la lutte des classes sont l’Allemagne, l’Angleterre et les États-Unis, qui sont des pays capitalistes et où les propriétaires et les travailleurs sont les plus nombreux ; et non pas la Russie tsariste ou la Chine qui sont deux pays beaucoup plus agricoles qu'industriels, et où les classes capitalistes et ouvrières sont plutôt réduites, comparées aux pays occidentaux. Et malgré la présence de ces deux classes antagonistes en Europe occidentale et en Amérique, il ne s’est pas produit un passage au socialisme dans ces régions, et elles continuent d’appliquer le système capitaliste. La présence des classes capitalistes et ouvrières n’a eu aucune influence sur le système en cours. Cela suffit largement pour réfuter cette théorie de l’évolution dès sa base. La troisième erreur de la théorie de Karl Marx apparaît dans son opinion à propos de l’évolution de la société, affirmant que le système économique est fatalement destiné à l’extinction par l’effet des lois économiques auxquelles il est soumis. Il ajoute que la classe moyenne, victorieuse de la classe des nobles - précédemment détentrice des capitaux -, cédera inévitablement sa place à la classe ouvrière et cela par le seul effet de la loi de concentration. L’erreur dans cette opinion vient du fait que Marx l’a fondée sur sa théorie concernant la concentration de la production selon laquelle le nombre des travailleurs augmenterait sans cesse et celui des propriétaires diminuerait sans cesse est fausse. Elle est fausse parce qu’il y a une limite que la concentration de la production ne peut pas dépasser. En effet, arrivée à une certaine limite la concentration s’arrête, et par conséquent, il ne se produit jamais l’évolution qu’a imaginée Marx. De plus, la concentration n’intervient pas du tout dans l’un des plus importants secteurs d’activité qui est l’agriculture. Alors comment la loi de l’évolution peut-elle s’appliquer sur la société ? Par ailleurs, Karl Marx croit que la concentration de la production sera suivie par celle des ressources, qui entraînera la réduction du nombre d’investisseurs, détenteurs des capitaux, et l’augmentation de celui des travailleurs démunis. Or, cela est faux car la concentration de la production peut entraîner une augmentation de propriétaires de capitaux, et il peut même en résulter la transformation de la classe ouvrière en capitaliste. Les sociétés par actions, forme la plus courante pour les grands projets, comptent souvent parmi les actionnaires plusieurs de leurs propres salariés. Ces travailleurs sont donc, en même temps, détenteurs de capitaux, ce qui réfute la théorie de la concentration. De plus, dans les usines, beaucoup d’employés ont des salaires élevés tels que les ingénieurs, les chimistes, les gestionnaires. Ils sont ainsi capables d’épargner une bonne partie de leurs revenues et devenir eux-mêmes des investisseurs sans avoir à créer de nouvelles entreprises. Par conséquent, ce que Karl Marx répand comme théorie à propos de l’évolution de la classe ouvrière ne s’applique à eux. Ceci n’est qu’un bref examen des principes sur lesquels sont établis respectivement les systèmes économiques capitaliste et socialiste, y compris communiste. Cet examen rapide fait ressortir une petite partie de ce que ces systèmes recèlent comme erreurs, idées fausses et conceptions perverses.

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6. La conception islamique de l’économie

6.1 Divergences du capitalisme et du socialisme par rapport à l’Islam La comparaison de ces deux systèmes avec l’Islam montre qu’ils diffèrent fondamentalement dans la méthode utilisée pour résoudre les problèmes et qu’ils sont en totale contradiction avec l’Islam. La première différence fondamentale entre ces deux idéologies et l’Islam réside dans la méthode que l’Islam utilise pour résoudre les problèmes. Cette méthode est exactement la même pour tous les problèmes qui se posent à l’homme, qu’ils soient économiques ou non. Elle consiste à étudier la réalité du problème, le comprendre, et ensuite en déduire la solution des textes de la législation islamique après avoir bien étudié ces textes et s’être assuré que cette solution correspond bien au problème traité. Cela diffère de la façon dont le capitalisme et le socialisme traite les problèmes économiques. Dans le capitalisme, la solution est déduite de la réalité même du problème après l’avoir étudié. Et dans le socialisme, les solutions sont tirées des suppositions théoriques que l’on imagine exister dans le problème. Les solutions sont donc établies conformément à ces suppositions et non pas à la réalité du problème. Les deux méthodes, capitaliste et socialiste sont différentes de la méthode islamique. Par conséquent, il n’est pas permis à un musulman de les utiliser, ni d’adopter les solutions obtenues par ces méthodes. Quant à la contradiction totale des systèmes économiques capitaliste, d’une part, et socialiste y compris communiste, d’autre part, avec l’Islam, c’est que l’Islam adopte ses solutions en tant que lois islamiques, c’est-à-dire tirées de la révélation puisque ce sont uniquement les textes révélés qui servent de preuves dans la déduction de ces lois. Alors que les solutions capitalistes et socialistes ne s’appuient nullement sur la révélation. Ce sont donc, au contraire, des lois du kufr et, par conséquent, illégales aux yeux de l’Islam. Juger et gouverner par ces lois, signifie juger par autre chose que ce Dieu a révélé, et il n’est pas permis à un musulman de les adopter, de quelque manière que ce soit. Leur adoption est un péché exhibé (Fisq) si celui qui les adopte n’y ajoute pas foi, mais s’il est convaincu qu’elles sont des lois justes, et que les lois islamiques sont inadaptées au monde moderne, ou incapables de résoudre les problèmes modernes, alors cela devient une mécréance. Que Dieu nous en préserve.

6.2 Différence entre science économique et système économique Tout d’abord, il importe de rappeler que le mot économie est dérivé d’un vieux terme du grec ancien, qui signifie ‘’la gestion des affaires de la maison’’, de sorte que ses membres actifs puissent participer à la production des biens et la réalisation des services. De même, tous ses membres bénéficient de ce qu’ils possèdent. Au fil du temps, les gens ont étendu le sens du mot ‘’maison’’, jusqu’à ce qu’il désigne l’ensemble de personnes gouvernées par un même État. Ce qui est recherché par le mot économie, ce n’est pas son sens linguistique qui est l’épargne ou la propriété. Il s’agit plutôt de son sens conventionnel, c’est-à-dire, l’administration des biens, soit par son accroissement, soit par la garantie de sa production qui est étudiée dans la science économique, ou la manière de le distribuer traité par le système économique.

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Bien que science économique et système économique traitent tous les deux de l’économie, leurs significations respectives diffèrent nettement. Le système économique n’est pas affecté par l’augmentation ou la diminution des ressources. Leurs fluctuations ne l’influencent nullement. Par conséquent, c’est une grave erreur de considérer l’économie comme un seul sujet, et de le traiter comme un seul problème, car cela conduit soit à une mauvaise identification du problème économique à résoudre, soit à une erreur dans la compréhension de facteurs de croissance, c’est-à-dire les facteurs de création des richesses. Gérer les ressources de la nation en termes de leur accroissement est une chose, mais assurer la bonne distribution des ressources gérées au bénéfice de la nation en est une autre. Il est donc indispensable de distinguer entre l’étude de la production des richesses et celle de leur distribution. La première est liée aux moyens tandis que la deuxième concerne la pensée. Pour cette raison, les recherches menées dans le cadre du système économique devraient tenir compte du fait qu’il s’agit d’une pensée intimement liée à la conception de la vie, et qu’il existe une influence réciproque entre les deux. Au contraire, l’étude de la science économique est purement scientifique, et n’a aucun lien avec la conception de la vie. La recherche la plus importante des deux, c’est le système économique, car le problème économique auquel la société est confrontée tourne autour des besoins de l’homme, des moyens de leur satisfaction et de la possibilité de bénéficier de ces moyens. Les ressources étant naturellement disponibles dans l’univers, leur production pour satisfaire les besoins ne pose pas un problème essentiel. Au contraire, les besoins eux-mêmes poussent les être humains à produire les moyens de leur satisfaction. Le vrai problème qui existe dans les relations entre les gens, autrement dit dans la société, résulte de la permission ou de l’interdiction des gens de bénéficier des ressources existantes. En d’autres termes, ce problème se rapporte à la question de la possession des biens. C’est lui qui constitue le problème économique de la société et c’est donc lui qui nécessite une solution. Il ressort de ce qui précède que le problème économique découle de la question de la possession des profits, et non pas de celle de la production des moyens qui procurent ces profits.

6.3 Les bases du système économique Le ‘’profit’’ dans une chose représente la convenance de cette chose à satisfaire. Le profit comprend deux éléments. Le premier élément, c’est le niveau de désir ressenti par une personne pour un bien particulier. Le second est le mérite contenu dans le bien, et sa convenance à satisfaire le besoin d’un être humain en général, et non pas le besoin d’un individu particulier. Ce profit résulte soit de l’effort de l’homme, soit du bien lui-même, soit des deux en même temps. L’effort de l’homme comprend l’effort intellectuel et l’effort physique qu’il dépense pour produire un bien ou lui conférer une utilité. Le mot bien inclut tout ce qui est possédé pour en tirer profit, que ce soit par la vente, la location ou l’empreint, pour consommation, comme la pomme par exemple, pour l’usage, telle la voiture, ou simplement pour l’utilisation, comme la location d’une maison ou de machines. Le bien comprend également la monnaie, comme l’or et l’argent ; les produits courants comme les vêtements et les aliments, ainsi que les biens immeubles, tels que les maisons et les usines ; bref, tout ce qui peut être possédé. Puisque c’est le bien qui satisfait les besoins de l’homme, et que l’effort de l’homme n’est qu’un moyen pour obtenir le bien ou son profit, alors nous pouvons affirmer que c’est le bien qui constitue la base du profit. Quant à l’effort humain, c’est un des moyens permettant d’obtenir le bien. De ce fait, l’homme, de par sa propre nature, s’efforce à obtenir et posséder ce bien. Partant de là, nous pouvons déduire que l’effort humain et le bien sont les deux outils utilisés pour satisfaire les besoins

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de l’homme. Ils constituent la richesse que l’homme cherche à posséder. Par conséquent, la richesse c’est la somme du bien et de l’effort. La possession des biens par les individus se fait soit par l’intermédiaire d’autres individus, comme dans le cas de la donation, soit directement, comme la possession d’une matière première. La possession peut concerner :

1. le bien lui même pour la consommation ou l’usage, comme la possession d’une pomme ou d’une maison pour son propre usage ;

2. son profit uniquement, à l’instar de la location d’une maison ; 3. le profit résultant de l’effort humain, tel que le plan réalisé par l’architecte.

La possession, dans tous ses aspects, se fait soit avec une contrepartie, comme dans la vente, la location ou le travail salarié, soit sans contrepartie tel que la donation, les cadeaux, l’héritage ou l’emprunt. Le problème économique est bien celui de la possession de la richesse et non pas sa production. Ce problème résulte de la conception de la possession, autrement dit de la propriété, d’une mauvaise gestion de la propriété entraînant une médiocre distribution des richesses au sein de la société. Il n’est dû à rien d’autre que cela. Aussi, la solution à ce problème constitue-t-elle la base du système économique. Cette base se compose donc de trois principes:

1. La propriété ; 2. La gestion de la propriété ; 3. La distribution de la richesse.

6.4 Vision de l’Islam sur l’économie La vision de l'Islam concernant les ressources diffère de sa vision concernant la manière d'en bénéficier. En d'autres termes, pour l'Islam, les moyens qui procurent le profit sont une chose, et la possession même de ce profit en est une autre. Comme nous l'avons déjà montré, ce sont l'effort humain et le bien qui constituent les ressources, et qui représentent aussi les moyens de procurer le profit. Dans la vision de l'Islam, la question de leur disponibilité dans l'univers et de leur production est différente de celle d'en tirer profit, et de celle des modalités de posséder ce profit. En effet, l'Islam intervient clairement dans la manière de bénéficier d'une richesse. Ainsi, il interdit de tirer profit de certains biens tels que l'alcool et la bête morte, tout comme il interdit de bénéficier de certaines activités humaines telles que la danse et la prostitution. De même il a interdit de vendre tout ce qui est illicite à consommer, et a interdit de louer pour des activés illicites. Ceci en ce qui concerne le profit des biens et de l'effort humain. Quant aux modalités de la possession de ce profit, l'Islam a établi de nombreuses lois, comme les lois qui réglementent la chasse, l'occupation du sol, celles qui régissent la location, la manufacture, l'héritage, les donations ou encore les testaments. S'agissant des ressources elles-mêmes et de leur production, l'Islam encourage la production en encourageant la recherche des biens d'une manière générale, mais il n'intervient pas dans la manière d'accroître les richesses ni dans la quantité. Au contraire, il a laissé à l'homme la liberté de le faire comme il entend. Quant aux ressources, elles existent naturellement sur notre planète. Dieu les a créées et soumises à l'homme. En effet, Dieu dit dans le Coran: " C'est Lui qui a crée, pour vous, tout ce qui est sur la terre " et il dit: " Dieu qui vous a assujetti la mer afin que les vaisseaux y voguent, par Son ordre, et que vous alliez en quête de sa grâce ". " Et Il vous a assujetti tout ce qui dans les cieux et sur la terre, le tout venant de Lui ".

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" Que l'homme considère donc sa nourriture [pour se rendre que] c'est Nous qui versons l'eau abondante, puis fendons la terre par fissures, et y faisons pousser grains, vignobles et légumes, oliviers et palmiers, jardins touffus, fruits et herbages, pour votre jouissance vous et vos bestiaux ". " Et Nous lui (David) apprîmes la fabrication des cottes de mailles afin qu'elles vous protègent contre vos violences mutuelles (la guerre) ". " Et Nous avons fait descendre le fer, dans lequel il y a une force redoutable, aussi bien que des utilités pour les hommes ". Dieu a explicité dans ces versets qu'Il a crée les biens et l’énergie de l’homme et n'a donné aucune autre précision à leur propos, ce qui veut dire qu'il n'intervient pas dans les quantités, ni dans l'activité humaine, si ce n'est qu'Il a indiqué qu'Il a crée tous les biens pour qu'ils profitent aux hommes. De même Dieu n'intervient pas dans la production de la richesse, et il n’existe aucun texte légal indiquant une telle intervention. Au contraire, on trouve des textes qui confirment bien que la législation a laissé tout la latitude à l'homme en ce qui concerne l'accroissement des richesses et le perfectionnement de l'effort humain. Il a été rapporté dans ce sens que le Prophète (SAAWS) a dit au sujet de la pollinisation des palmiers ''Vous savez mieux les affaires de votre vie'' et il a également été rapporté que le Prophète (SAAWS) a envoyé deux musulmans au Yémen, qui n'avait pas encore adhéré à l'Islam, pour apprendre la fabrication des armes. Ce qui prouve bien que la Loi islamique laisse aux hommes le soin de s'occuper de la production et cela selon leur propre expérience et connaissance. Il ressort clairement de ce qui précède que l'Islam se préoccupe du système économique et non pas de la science économique. Il oriente son enseignement sur la manière de tirer profit des richesses et la méthode d'entrer en possession de cette richesse mais ne s'étend absolument pas sur la question de la production de ces richesses, ni sur les moyens permettant d'obtenir les richesses.

6.5 La politique économique en Islam Le but de la politique économique est d'atteindre des objectifs à travers des lois traitant de la gestion des affaires humaines. La politique économique vise à garantir la satisfaction de tous besoins vitaux de tout individu complètement, et lui permettre de satisfaire l'ensemble de ses besoins selon ses capacités, sachant qu'il vit dans une société déterminée, ayant un mode de vie spécifique. L'Islam s'intéresse à chaque individu individuellement, et non pas à l'ensemble des personnes vivant dans un pays de façon globale. Il considère l'individu comme un être humain avant tout, un être qui a besoin de satisfaire complètement ses besoins vitaux. Ensuite il regarde entant qu’un individu particulier ayant des besoins secondaires spécifiques et lui facilite les moyens de les satisfaire suivant ses propres capacités. Cela en tenant compte de sa qualité de membre d’une société, et donc lié à ses semblables par des rapports bien définis, qui donne à la société une orientation définie conformément à un modèle spécifique. Ainsi, la politique économique en Islam ne vise pas seulement à élever le niveau de vie dans le pays, sans se demander si chaque membre de la société, pris individuellement, en bénéficie ou non. Elle ne consiste pas non plus à rendre disponible le luxe, en permettant aux individus d’y accéder ou non selon leurs capacités, sans se préoccuper du droit à la subsistance de chaque individu pris isolément. Elle consiste plutôt à résoudre les problèmes vitaux de chaque individu en tant qu'être humain vivant selon des rapports particuliers, et à lui permettre d’élever lui-même son niveau de vie et assurer son

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propre bien être suivant un mode de vie spécifique. La politique économique en Islam diffère donc de toute autre politique. En même temps qu’il établit des lois économiques à l’homme, l’Islam définit les lois concernant l’individu. De même, pendant que l’Islam s’efforce à garantir le droit à la vie et favoriser le bien être de chacun, il tient compte des particularités de la société qu’il gère et de son mode de vie spécifique. Cela montre clairement que l’Islam se préoccupe toujours de ce que la société devrait être dans sa réflexion sur les problèmes économiques. Il fait d’ailleurs de sa conception de ce que la société devrait être la base de son regard sur la vie et le bien être. Pour cette raison, nous pouvons constater que la Loi islamique contient des dispositions visant à garantir la satisfaction complète des besoins essentiels de tous les citoyens de l’État islamique, en particulier ceux touchant à l’alimentation, l’habillement et le logement. En effet, l’Islam rend le travail obligatoire à tout homme actif, pour qu’il puisse se procurer lui-même de quoi satisfaire ses besoins de bases ainsi qu’aux personnes qui sont légalement à sa charge. L’Islam impose au parent et à l’héritier le devoir de prise en charge celui d’entre eux qui n’est pas capable de subvenir à ses besoins, et, à défaut, au Trésor de l’État (Beit-al-Mal). Au delà de la satisfaction des besoins irréductibles de tout être humain, c’est-à-dire, se nourrir, s’habiller et se loger, l’Islam encourage tout individu à profiter des bonnes choses (licites), et à essayer de bénéficier des merveilles de cette vie selon ses capacités. Il interdit à l’État d’effectuer des prélèvements sur les ressources des citoyens au moyen d’impôts ou de taxes, si ce n’est de façon sélective sur la partie au dessus de ce qui est nécessaire à la satisfaction des besoins réels de l’individu compte tenu de son train de vie habituel, même s’il s’agissait de besoins secondaires ou de luxe. De cette façon, l’Islam garantie le droit à la vie à chaque membre de la société, pris individuellement, et lui facilite le bien être dans la vie. Dans le même temps, l’Islam a situé les moyens de recherche de biens de l’individu pour subvenir à ses besoins dans des limites bien définies en tenant compte des rapports qui devraient exister au sein de la société. Ainsi, l’Islam interdit à tout musulman la production et la consommation d’alcool, et ne le considère pas comme un produit ayant une valeur économique. Il a aussi interdit de tirer profit de l’intérêt ou de réaliser toute transaction comportant l’intérêt, et cela à tout citoyen de l’Etat islamique, qu’il soit musulman ou non. L’intérêt n’est pas considéré non plus comme un produit économique. L’Islam fait donc de la réalité que doit avoir la société dans son usage d’un bien, un élément fondamental lorsqu’il juge de la valeur économique de ce bien. Il apparaît que l’Islam ne sépare pas l’individu de sa qualité d’être humain, ni ne sépare sa qualité d’homme de sa spécificité individuelle. Il ne sépare pas ce que la société devrait être de sa stratégie visant à garantir de la satisfaction des besoins de bases de chaque individu et de lui permettre satisfaire ses besoins secondaires. Au contraire, il fait de la satisfaction des besoins et de sa conception de ce que la société devrait être, deux questions indispensables et inséparables, faisant de ce que la société doit être la base de la satisfaction des besoins. Pour satisfaire l’ensemble des besoins de base, il faut nécessairement que les gens disposent des ressources économiques, et cela n’est possible que si les gens investissent un effort pour se les procurer. Aussi, l’Islam incite à rechercher le gain, la provision et à travailler dans la vie. Il a rendu obligatoire le travail pour gagner sa vie. Dieu, le Très Haut dit: « Parcourez donc ses grandes étendues[de la terre] et mangez de Ses bienfaits ». Cependant cela ne signifie nullement que l’Islam intervient dans la production de la richesse et indique la manière d’accroître la richesse, ou qu’il en fixe les quantités, car il ne se rapporte pas du tout à ce type de questions. Il se borne à encourager le travail et la quête des biens. En effet; beaucoup de hadiths ont été rapportés à ce sujet. Selon un hadith, un jour, le Prophète (SAAWS)

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serrant la main de Sa’d bin Mu’adh (Que Dieu soit satisfait de lui !) remarqua que ses mains étaient irritées. Il lui en demanda la cause, et Sa’d dit alors: ’’ Je creuse avec une pioche pour subvenir aux besoins de ma famille’’. Le Prophète (SAAWS) embrassa alors la main et lui dit:’’(Voici) deux mains que Dieu aime ’’; et il ajouta : ’’ L’un de vous ne mange aucune nourriture meilleure que celle provenant de son propre travail ’’. Il a été rapporté également que Omar passa à côté d’un groupe de personnes entrain de lire le Coran et il a vit qu’ils étaient assis, la tête baissée. Il demanda alors qui étaient ces gens là. On lui répondit que c’étaient des gens qui comptaient sur Dieu. ’’Non, dit-il, ce sont plutôt des parasites qui vivent sur le dos des gens’’. Puis il ajouta : ‘’ Voulez-vous que je vous informe à propos de ceux qui comptent sur Dieu ? ’’. On lui répondit oui, et il dit alors: ‘’ Ce sont ceux qui cultivent la terre, y jettent des semences, puis s’en remettent à leur Seigneur, le Tout-Puissant ’’. Ainsi, l’Islam encourage l’homme à rechercher son pain, et à travailler pour gagner les biens. De même, il l’incite à tirer profit de ces biens et à consommer les bonnes choses que Dieu a créées pour lui. Voici, à ce propos, le sens approché de quelques Paroles du Très haut : « Qui donc a interdit les merveilles que Dieu a produites pour Ses serviteurs, ainsi que les bonnes nourritures ? » « Que ceux qui gardent avec avarice ce que Dieu leur donne par Sa grâce, ne comptent point cela comme bon pour eux. Au contraire, c’est mauvais pour eux: au Jour de la Résurrection, on leur attachera autour du cou ce qu’ils ont gardé avec avarice » ; « Mangez des délices que Nous vous avons attribués » ; « Croyants! Dépensez des meilleures choses que vous avez gagnées et de ce que Nous avons fait sortir de la terre, pour vous » ; « Croyants! n’interdisez pas les bonnes choses que Dieu vous a permis » ; « Et mangez de ce que Dieu vous a attribué de licite et bon ». Ces versets et leurs semblables prouvent clairement que la Loi islamique traitant de l’économie vise l’acquisition des biens et leur consommation. L’Islam impose à l’individu le devoir de rechercher les biens nécessaires à la satisfaction de ses besoins et l’exhorte à consommer ce qu’il possède. Cela a pour but d’assurer le progrès économique du pays, de satisfaire tous les besoins fondamentaux de l’individu et lui permettre de satisfaire ses besoins secondaires. Pour favoriser l’acquisition des biens, l’Islam n’a pas compliqué les lois qui réglementent la propriété. Au contraire, ces lois sont des plus simples. L’Islam a défini les causes permettant d’accéder à la propriété et a défini les différents types de contrats par lesquels peut s’effectuer l’échange de propriété et a laissé à l’homme le soin de choisir le moyen par lequel il désire acquérir les biens. L’Islam n’intervient nullement dans la manière de produire les richesses. Quant à la définition des manières d’acquérir un bien et des contrats, il s’agit de grandes lignes comprenant les principes et les lois islamiques. Ces grandes lignes incluent de nombreux thèmes et servent de référence pour déduire d’autres lois. Ainsi l’Islam a légiféré le travail et en a exposé clairement les lois mais il a laissé à l’individu le choix d’être menuisier, médecin, agriculteur, commerçant ou autre. Ces grandes lignes déclinables se traduisent par exemple par le cas des cadeaux et donations liés par des caractéristiques communes et traités identiquement par La Loi. Ils sont tous deux considérés comme des causes légales d’appropriation. Nous pouvons constater aussi que les détails de la rémunération du commissionnaire sont déterminés en référence aux règles générales du salariat. Le fait, pour le législateur, d’avoir exposé les causes de la propriété et les contrats sous formes de grandes lignes,

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les rend globales et applicables à toutes les nouvelles situations, sans que ces lois elles mêmes aient à être modifiées du fait de nouvelles transactions. En effet, les gens ne sont pas autorisés à entreprendre des transactions en dehors de celles qui sont définies par la Loi islamique. Ainsi, elle s’applique à toute transaction, ancienne ou nouvelle, sans aucune exception. De cette façon, le musulman avance rapidement dans sa recherche des biens sans qu’aucun obstacle juridique vienne lui entraver le chemin. De plus, dans cette recherche du gain, il tient ferment à ce que ce qu’il gagne soit licite. La tâche ainsi facilité, il est possible à tout un chacun de gagner de quoi satisfaire ses besoins essentiels. L’Islam ne se contente pas d’encourager l’individu à gagner des ressources ou à arrêter sa consommation à hauteur de ses revenus, mais il met le Trésor public (Beit-al-Mal) au service de l’ensemble des citoyens. En effet, l’État a le devoir de prendre en charge les personnes invalides et garantir la satisfaction des besoins vitaux de l’ensemble de la nation qui est également l’une de ses obligations car cela fait partie du droit des citoyens (musulmans ou non-musulmans). Le Prophète (SAAWS) a dit: ‘’L’Imam (chef de l’État) a la charge de la nation et il en est responsable’’. Pour que l’État puisse assumer les devoirs qui lui sont conférés, la Loi islamique lui a attribué une propriété spécifique : la propriété étatique. Elle lui a autorisé de collecter certains fonds tels que la djizia1, ou le kharaj (impôt sur les terres conquises). Les fonds rassemblés dans le cadre de la zakat sont placés dans le Trésor public et distribués par l’État uniquement aux huit catégories de personnes mentionnées par le Coran. L’État a également le droit de prélever, en cas de nécessité, pour des projets urgents et d’intérêt public : refaire des routes, construire des hôpitaux, secourir les nécessiteux, et autres opérations analogues. La gestion de la propriété publique est réservée à l’État. La Loi interdit aux personnes privées de posséder des biens publics, car la responsabilité générale incombe à l’autorité en charge de la nation et aucun individu n’a la compétence de prendre cette responsabilité si ce n’est par délégation expresse de l’autorité. Les propriétés publiques telles que l’eau, le pétrole, le fer, le cuivre, et les biens analogues doivent être exploitées pour réaliser le progrès économique de la nation, car ce sont des biens qui appartiennent à la nation et l’État ne fait qu’en assurer la gestion. Si l’État assume ses responsabilités de gestion des biens du peuple et de la redistribution des richesses, et si chaque individu s’efforce à acquérir ce qu’il lui est possible de gagner par lui même pour ses propres besoins et ceux des personnes à sa charge, eh bien, il y aura suffisamment de ressources pour assurer à chacun la pleine satisfaction de ses besoins fondamentaux et lui permettre de satisfaire le mieux possible ses besoins secondaires. Toutefois, il importe de souligner que la recherche du progrès économique par l’incitation des individus à s’efforcer pour acquérir les biens, et la gestion de la propriété publique par l’État qui a le devoir d’en assurer la redistribution ont pour seul objectif, l’utilisation des biens comme moyens de satisfaction des besoins. Il ne s’agit en aucun de rechercher les biens pour les biens eux-mêmes, ni pour s’en enorgueillir et encore moins pour les utiliser dans la désobéissance au Créateur, ou pour l’arrogance et l’oppression. Le Messager de Dieu (SAWS) dit : ‘’ Quiconque recherche les biens de cette vie de manière légitime (halal) et décente, rencontrera Dieu le Très haut, avec un visage semblable à la pleine lune, tandis que celui qui la recherche avec orgueil et excès, rencontrera Dieu alors que Celui-ci est mécontent de lui’ ’’. Il dit encore: ‘’ De tes biens, ne t’appartiens que ce que tu as mangé et donc consumé, vêtu et donc épuisé, ou donné et donc préservé [pour la vie future] ’’. Et Dieu dit: « Et ne gaspillez pas car Il [Dieu] n’aime point les gaspilleurs ». Considérer les biens comme un moyen de

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satisfaire les besoins et non une source d’orgueil n’est pas le seul but recherché par l’Islam, il exige que l’ensemble de l’économie fonctionne conformément aux ordres de Dieu. L’Islam ordonne au musulman de rechercher la vie future par les biens qu’il gagne, sans oublier, cependant, sa part ici bas. Le Très haut dit à ce propos: « Et recherche la vie future à travers ce que Dieu t’a gratifié et n’oublie pas ta part en cette vie, sois bienfaisant [envers les gens] comme Dieu l’a été envers toi, et ne cherche pas la corruption sur terre car, Dieu n’aime point les corrupteurs ». Ainsi, c’est la philosophie islamique de l’économie qui dirige l’ensemble des activités économiques par les ordres et les interdits de Dieu comme l’implique la conscience de la relation avec Dieu. Autrement dit, l’idée sur laquelle est établie la gestion des affaires des musulmans est celle de diriger l’économie en totale conformité avec les exigences de la Loi islamique en tant mode de vie complet. De même, les activités économiques de l’ensemble des citoyens de l’État sont réglementées par la Loi islamique en tant que législation. Ainsi, leur est permis tout ce que permet l’Islam, et ils doivent s’arrêter aux limites fixées par l’Islam. Citons ces quelques Paroles du Très haut: « Ce que le Messager vous donne, prenez-le, et ce qu’il vous interdit, abstenez-vous en »; « Gens! Une exhortation vous est venue, de votre Seigneur, une guérison pour ce qui est dans les poitrines, une direction et une miséricorde pour les croyants »; « Que ceux, donc, qui s’opposent à Son commandement prennent garde qu’une dure épreuve ne les atteigne, ou que ne les atteigne un châtiment douloureux ». « Et juge parmi eux d’après ce que Dieu a révélé ». L’Islam garantit l’observation de ses lois par les musulmans et les gens en général. Les musulmans veillent au respect de ces lois par la crainte de Dieu, et l’État les applique à l’ensemble des citoyens en tant que législation. Dieu dit: « Croyants! Craignez Dieu et renoncez au reliquat de l’intérêt, si vous êtes [réellement] croyants »; « Croyants! Quand vous contractez une dette à échéance déterminée, écrivez-la ; qu’un scribe l’écrive, entre vous, en toute justice; un scribe n’a pas à refuser d’écrire selon ce que Dieu lui a enseigné ; qu’il écrive donc, et que dicte le débiteur: qu’il craigne dieu, son Seigneur, et se garde d’en rien diminuer. Si le débiteur est faible, ou incapable de dicter lui-même, que son représentant dicte alors en toute justice. Faites-en témoigner par deux témoins d’entre vos hommes; et à défaut de deux hommes, alors que ce soient un homme et deux femmes d’entre ceux que vous agréez comme témoins, en sorte que si l’une d’elles s’égare l’autre puisse lui rappeler. Et que les témoins ne refusent pas quand ils sont appelés. Ne vous lassez pas d’écrire la dette, ainsi que son terme, qu’elle soit petite ou grande : c’est plus équitable auprès de Dieu, plus droit pour le témoignage, et plus susceptible d’écarter les doutes. Sauf s’il s’agit d’une marchandise que vous négociez entre vous : dans ce cas, il n’y a pas de péché à ne pas l’écrire. ». L’Islam a ainsi clairement exposé la manière de mettre ses lois en pratique et a bien délimité le cadre de leur application. La base de la politique économique en Islam est la satisfaction complète des besoins de chacun en tant qu'être humain vivant dans une société particulière, et sur la recherche de la richesse pour que les moyens de satisfaction des besoins soient abondants. De façon plus générale, l’économie en Islam est basée sur une seule idée : diriger toutes les actions humaines par les commandements de Dieu et assurer leur mise en pratique, par la crainte de Dieu de la part de l’individu, et leur application par l’État à travers son orientation politique et sa législation.

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SAAWS : Abréviation de ''Salla Allah Alayhi Wa Sallam'', qui signifie: ''Que Dieu le bénisse et le salue'' 1 tribut perçu des citoyens non musulmans, majeurs et capables de payer, à l’exclusion des femmes et enfants