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page 3 Info de la Semaine Du 7 au 13 juin 2013 « C’est normal. J’ai fait toute ma carrière en Angleterre. Je porte les cou- leurs du Royaume Uni. Et puis, en France il y a tout ce qu’il faut en sommelier, » répond Gérard Basset lorsqu’on lui demande pourquoi il est si peu reconnu en France. En 1994, Gérard Basset fonde avec Robin Hutson la chaine des hôtels du vin qui compte aujourd’hui 14 établissements. L’AVENTURE DES HÔTELS DU VIN Sous la bannière de l’Union Jack, le natif de Saint-Etienne ne met pas longtemps à obtenir des résultats. Désigné meilleur sommelier international pour les vins français en 1992, il obtient quatre ans plus tard le titre de meilleur sommelier d’Europe. Entre ces récompenses, Gérard Basset se lance dans le business en créant avec Robin Hutson (son directeur au Chewton Glen Hotel) un nouveau concept d’hôtel où le vin occupe une place prépondérante. Le premier « hôtel du vin » voit ainsi le jour en 1994 à Winchester, toujours dans le Sud de l’Angleterre. La suite, c’est Gérard Basset qui la raconte : « l’hôtel du vin a connu un très joli succès car ce que nous proposions n’existait pas en Angleterre. Notre hôtel était de type trois étoiles avec des chambres très confortables (por- tant toute le nom d’un vin célèbre, NDLR), un bon restaurant et des vins de grande qualité à prix abordables. Le service dans le restaurant était plutôt relax. Nous avons ouvert un marché dans un pays où il y avait soit de petits hôtels-restau- rants, soit des palaces. En plus, nous avons eu la chance de démarrer sur les chapeaux de roues Quelques semaines après l’ouverture de l’hôtel, Winchester a été le cadre d’un énorme procès autour d’un fait divers. Des centaines de journalistes ont débarqué de toute l’Angleterre et du monde anglo-saxon. Nous en avons accueilli plusieurs qui ont adoré le concept et nous ont fait une publicité incroyable. » Ce coup de pouce du destin, Gérard Basset et son associé en profitent. Année après année, ils ouvrent pas moins de cinq autres « hôtel du vin » dans toute l’Angleterre avant de vendre leur entreprise au groupe britannique MWB en 2004. Bien que très impliqué dans cette aventure, Gérard Basset n’oublie cependant pas les concours oenologiques, bien au contraire. Au milieu des années 1990, il se lance dans le « Master of Wine », le plus grand titre de Grande-Bretagne dont le niveau est universitaire puisqu’il faut fournir une thèse. Ce concours est un véritable défi pour Gérard Basset qui a quitté le système scolaire français à 16 ans et dont la pra- tique de l’anglais reste empirique. Qu’importe ! Notre Stéphanois s’y lance. Il améliore sa pratique de l’anglais en prenant des cours et lisant de nombreux livres et journaux. « La lecture du journal « The econo- mist » m’a énormément aidé car les journalistes utilisent un ton simple, direct qui me convenait bien » précise l’intéressé. Après de nombreuses années d’efforts, il devient un des rares non anglo-saxons à décrocher ce titre avec en prime le titre de meilleur dégustateur du concours de 1998. UN TITRE MONDIAL QUI SONNE COMME UNE REVANCHE Reconnu comme l’un des meilleurs sommeliers de Grande- Bretagne et d’Europe, Gérard Basset se concentre alors sur le titre de meilleur sommelier du Monde attribué tous les trois ans, l’un des seuls qu’il n’a pas remporté. Classé deuxième du concours de 1992 organisé à Rio de Janeiro, il est le grand favori pour le titre attribué en 2000 à Montréal. Et pourtant, rien ne se passe comme prévu. « J’étais mal préparé. J’ai pris une raclée, » explique Gérard Basset qui en bon Stéphanois n’a pas lâché le morceau. Tout en passant un diplôme de mas- ter of business administration (MBA) en vin mis en place à Bordeaux, il se représente en 2004 puis en 2007. A chaque fois, le résultat est le même. Il termine à la deuxième place, la pire dans ce concours. Mais notre homme est têtu et repart en 2010 pour le concours organisé à Santiago du Chili. Sa fem- me Nina n’est pas convaincue de ce choix « Juste avant de partir, elle m’a dit : tu ne vas pas continuer jusqu’à être en chaise roulante ? » explique en riant Gérard Basset. Pourtant, cette fois-ci, c’est la bonne. En finale, Gérard Basset s’impo- se face au Suisse Paolo Basso (vainqueur du titre 2013 attri- bué le 29 mars dernier) et au Français David Biraud. Le « God save the Queen » peut retentir. Ce titre mondial sonne comme une belle revanche après toutes ces années et offre à Gérard Basset une importante exposition médiatique dans le monde anglo-saxon. C’est cependant moins le cas en France où son titre ne suscite guère de commentaires. « C’est normal. J’ai fait toute ma carrière en Angleterre. Je porte les couleurs du Royaume Uni. Et puis, en France il y a tout ce qu’il faut en sommelier, » répond l’intéressé qui depuis ce titre mon- dial bénéficie d’une belle reconnaissance en Albion. OFFICIER DE LORDRE DE LEMPIRE BRITANNIQUE En 2011, Gérard Basset a notamment été élevé au rang d’officier dans l’ordre de l’empire britannique. Une distinction exceptionnelle qui lui a été remise par la Princesse Anne au château de Windsor. « C’était un très grand moment pour moi et pour ma famille. En plus, on a même eu droit à deux chansons d’Edith Piaf joués par l’or- chestre, » souligne Gérard Basset. Plus récem- ment, en avril dernier, il a été élu « homme de l’année » par le magazine anglais « The decanter » diffusé dans plus de 90 pays. Un nouveau titre qui a énormément marqué le meilleur sommelier du monde 2010. « Cela a été une énorme surprise pour moi car la nouvelle est arrivée dans une période un peu plus difficile, déclare le Stéphanois avec la franchise qui le caractérise. Et puis, je rejoins au pal- marès de très grands viticulteurs mondiaux comme Marcel Guigal (producteur de Côtes-du Rhône) et bien d’autres. C’est un très bel honneur d’être récompensé par ce magazine présent dans le monde entierDes titres honorifiques qui viennent ponctuer un vie très chargée pour celui qui possède depuis 2007 un hôtel-restau- rant dénommé « TerraVina » dans le Sud de l’Angleterre. « C’est vrai que je voyage beaucoup pour découvrir les nombreuses régions viticoles du monde. N’étant pas en France, j’ai une vision un peu différente des vins du monde qu’ils viennent d’Afrique du Sud, du Canada ou d’Allema- gne. Le monde du vin est en perpétuelle évolution et je dois le suivre, » déclare Gérard Basset dont la passion pour le vin n’en finit plus de se bonifier. Entre les visites et les projets auxquels il participe, notre Stéphanois trouve tout de même le temps de se rendre quelques fois à Saint-Etienne pour y retrouver sa mère qui y est toujours installée. Il suit aussi le parcours de l’AS Saint-Etienne, même s’il n’a pas mis les pieds au stade Geoffroy-Guichard depuis très long- temps.« J’ai vu que les Verts avaient gagné la coupe de la Ligue cette saison. C’est une bonne chose. J’espère qu’ils iront plus haut dans les années à venir, » dit-il avant de conclure « après tout, je dois ma carriè- re à l’AS Saint-Etienne ! » > JÉRÔME TRUCHON

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page 3Info de la Semaine Du 7 au 13 juin 2013

« C’est normal. J’ai faittoute ma carrière enAngleterre. Je porte les cou-leurs du Royaume Uni. Etpuis, en France il y a tout cequ’il faut en sommelier, »répond Gérard Basset lorsqu’onlui demande pourquoi il est si peureconnu en France.

En 1994, Gérard Basset fonde avec RobinHutson la chaine des hôtels du vin quicompte aujourd’hui 14 établissements.

L’AVENTURE DES HÔTELS

DU VINSous la bannière de l’Union Jack, le natif de Saint-Etienne nemet pas longtemps à obtenir des résultats. Désigné meilleursommelier international pour les vins français en 1992, ilobtient quatre ans plus tard le titre de meilleur sommelierd’Europe. Entre ces récompenses, Gérard Basset se lancedans le business en créant avec Robin Hutson (son directeurau Chewton Glen Hotel) un nouveau concept d’hôtel où levin occupe une place prépondérante. Le premier « hôtel duvin » voit ainsi le jour en 1994 à Winchester, toujours dans leSud de l’Angleterre. La suite, c’est Gérard Basset qui laraconte : « l’hôtel du vin a connu un très joli succès car ce quenous proposions n’existait pas en Angleterre. Notre hôtel étaitde type trois étoiles avec des chambres très confortables (por-tant toute le nom d’un vin célèbre, NDLR), un bon restaurantet des vins de grande qualité à prix abordables. Le servicedans le restaurant était plutôt relax. Nous avons ouvert unmarché dans un pays où il y avait soit de petits hôtels-restau-rants, soit des palaces. En plus, nous avons eu la chance dedémarrer sur les chapeaux de roues Quelques semaines aprèsl’ouverture de l’hôtel, Winchester a été le cadre d’un énormeprocès autour d’un fait divers. Des centaines de journalistesont débarqué de toute l’Angleterre et du monde anglo-saxon.Nous en avons accueilli plusieurs qui ont adoré le concept etnous ont fait une publicité incroyable. » Ce coup de pouce dudestin, Gérard Basset et son associé en profitent. Année aprèsannée, ils ouvrent pas moins de cinq autres « hôtel du vin »dans toute l’Angleterre avant de vendre leur entreprise augroupe britannique MWB en 2004.Bien que très impliqué dans cette aventure, Gérard Bassetn’oublie cependant pas les concours oenologiques, bienau contraire. Au milieu des années 1990, il se lancedans le « Master of Wine », le plus grand titre deGrande-Bretagne dont le niveau est universitairepuisqu’il faut fournir une thèse. Ce concours est unvéritable défi pour Gérard Basset qui a quitté lesystème scolaire français à 16 ans et dont la pra-tique de l’anglais reste empirique. Qu’importe !Notre Stéphanois s’y lance. Il améliore sapratique de l’anglais en prenant des courset lisant de nombreux livres et journaux.« La lecture du journal « The econo-mist » m’a énormément aidé car lesjournalistes utilisent un ton simple,direct qui me convenait bien »précise l’intéressé. Après de

nombreuses années d’efforts, il devient un des rares nonanglo-saxons à décrocher ce titre avec en prime le titre demeilleur dégustateur du concours de 1998.

UN TITRE MONDIAL QUI SONNE COMME

UNE REVANCHEReconnu comme l’un des meilleurs sommeliers de Grande-Bretagne et d’Europe, Gérard Basset se concentre alors sur letitre de meilleur sommelier du Monde attribué tous les troisans, l’un des seuls qu’il n’a pas remporté. Classé deuxième duconcours de 1992 organisé à Rio de Janeiro, il est le grandfavori pour le titre attribué en 2000 à Montréal. Et pourtant,rien ne se passe comme prévu. « J’étais mal préparé. J’ai prisune raclée, » explique Gérard Basset qui en bon Stéphanoisn’a pas lâché le morceau. Tout en passant un diplôme de mas-ter of business administration (MBA) en vin mis en place àBordeaux, il se représente en 2004 puis en 2007. A chaquefois, le résultat est le même. Il termine à la deuxième place, lapire dans ce concours. Mais notre homme est têtu et repart en2010 pour le concours organisé à Santiago du Chili. Sa fem-me Nina n’est pas convaincue de ce choix « Juste avant departir, elle m’a dit : tu ne vas pas continuer jusqu’à être enchaise roulante ? » explique en riant Gérard Basset. Pourtant,cette fois-ci, c’est la bonne. En finale, Gérard Basset s’impo-se face au Suisse Paolo Basso (vainqueur du titre 2013 attri-bué le 29 mars dernier) et au Français David Biraud. Le « Godsave the Queen » peut retentir.Ce titre mondial sonne comme une belle revancheaprès toutes ces années et offre à Gérard

Basset une importante exposition médiatique dans le mondeanglo-saxon. C’est cependant moins le cas en France où sontitre ne suscite guère de commentaires. « C’est normal. J’aifait toute ma carrière en Angleterre. Je porte les couleurs du

Royaume Uni. Et puis, en France il y a tout ce qu’il faut ensommelier, » répond l’intéressé qui depuis ce titre mon-

dial bénéficie d’une belle reconnaissance en Albion.

OFFICIER DE L’ORDRE DE

L’EMPIRE BRITANNIQUEEn 2011, Gérard Basset a notamment étéélevé au rang d’officier dans l’ordre del’empire britannique. Une distinctionexceptionnelle qui lui a été remise par laPrincesse Anne au château de Windsor.« C’était un très grand moment pour moi etpour ma famille. En plus, on a même eu droità deux chansons d’Edith Piaf joués par l’or-chestre, » souligne Gérard Basset. Plus récem-ment, en avril dernier, il a été élu« homme de l’année » par le magazine anglais« The decanter » diffusé dans plus de 90 pays.Un nouveau titre qui a énormément marqué lemeilleur sommelier du monde 2010. « Cela a

été une énorme surprise pour moi car la nouvelle est arrivéedans une période un peu plus difficile, déclare le Stéphanoisavec la franchise qui le caractérise. Et puis, je rejoins au pal-marès de très grands viticulteurs mondiaux comme MarcelGuigal (producteur de Côtes-du Rhône) et bien d’autres.C’est un très bel honneur d’être récompensé par ce magazineprésent dans le monde entier.»Des titres honorifiques qui viennent ponctuer un vie trèschargée pour celui qui possède depuis 2007 un hôtel-restau-rant dénommé « TerraVina » dans le Sud de l’Angleterre.« C’est vrai que je voyage beaucoup pour découvrir lesnombreuses régions viticoles du monde. N’étant pas enFrance, j’ai une vision un peu différente des vins du mondequ’ils viennent d’Afrique du Sud, du Canada ou d’Allema-gne. Le monde du vin est en perpétuelle évolution et je doisle suivre, » déclare Gérard Basset dont la passion pour le vinn’en finit plus de se bonifier. Entre les visites et les projetsauxquels il participe, notre Stéphanois trouve tout de mêmele temps de se rendre quelques fois à Saint-Etienne pour yretrouver sa mère qui y est toujours installée. Il suit aussi leparcours de l’AS Saint-Etienne, même s’il n’a pas misles pieds au stade Geoffroy-Guichard depuis très long-temps.« J’ai vu que les Verts avaient gagné la coupe de laLigue cette saison. C’est une bonne chose. J’espère qu’ilsiront plus haut dans les années à venir, » dit-il avant de

conclure « après tout, je dois ma carriè-re à l’AS Saint-Etienne ! »

> JÉRÔME TRUCHON