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Importance des noms et prénoms traduisant des origines italiennes ou polonaises de ces victimes d’un accident minier

Statues d’un forgeron et d’un mineur symbolisant les activités

ouvrières de la ville de Montceau-les –Mines

Effigie de Marianne, symbole de la République, de la nation

républicaine

Montceau-les-Mines : monument érigé (en 1905) en l’honneur des victimes de la mine et portant diverses inscriptions ultérieures comme celle qui est photographiée ici, datant de 1956

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Montceau-les-Mines : monument érigé (en 1905) en l’honneur des victimes de la mine et portant diverses inscriptions ultérieures comme celle qui est photographiée ici, datant de 1956

Des immigrés ou descendants d’immigrés en nombre

important dans cet accident minier…

… et qui constituent une composante importante du

monde ouvrier dans la société française à l’âge industriel

Ouvriers qui eux-mêmes apparaissent ici comme les supports ou les piliers de la

nation républicaine…

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Montceau-les-Mines : monument érigé (en 1905) en l’honneur des victimes de la mine et portant diverses inscriptions ultérieures comme celle qui est photographiée ici, datant de 1956

En quoi l’immigration a été fondamentale dans l’affirmation d’une société française industrielle et urbaine au 20e siècle?

Peut-on parler d’une véritable reconnaissance de ce rôle clé dans la France républicaine du 20e siècle?

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Evolutions du nombre d’étrangers en France et de leurs nationalités. Source:  Noiriel G. : Atlas de l’immigration en France, Autrement, 2006

Trois grandes phases de hausse du nombre d’étrangers en France apparaissent, suivies

d’une stagnation ou d’une réduction. Mais ces moments

de stagnation du nombre d’étrangers ne signifient pas

forcément un arrêt de l’immigration , même si les

autorités cherchent à la limiter, en particulier depuis le

milieu des années 1970. En effet est étrangère une personne vivant en France de nationalité non

française. Est immigrée une personne née étrangère à l’étranger, vivant en

France, et pouvant avoir acquis la nationalité française. Dès lors lorsque

certains étrangers acquièrent la nationalité française et que certains

immigrés arrivent en France, l’immigration se poursuit tandis que le

nombre d’étrangers peut stagner

Les deux premières phases d’immigration sont

caractérisées par l’arrivée d’Européens,

essentiellement de pays limitrophes pour la

première, de pays plus éloignés pour la seconde. La troisième phase voit apparaitre de nouvelles origines (Maghreb en

particulier) .Depuis les années 1980 les origines non européennes

sont dominantes.

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Les Italiens d’Homécourt (Lorraine) Commandant Reynaud, « la colonie italienne d’Homécourt ». Le musée social : Mémoires et documents, n° 6, 1910, cité dans Saly P. (dir.) : Industrialisation et sociétés en Europe occidentale (1880-1970), textes et documents, Paris, A. Colin, 1998« Une petite rivière, l’Orne, dont la vallée profondément encaissée sépare les côtes de Moselle de la Woëvre, passe à 21 kilomètres à peine au Nord Ouest de Metz. On trouve sur son cours trois villages, Joeuf, Homécourt, et Auboué, dont le sous-sol, très riche en minerais de fer, est exploité par les aciéries de la marine, les usines de Wendel, et diverses sociétés industrielles.17000 ouvriers se sont installés le long de la route qui sépare Auboué de Joeuf. Les paysans lorrains, dédaignant le rude labeur de l’usine, ont laissé prendre aux étrangers les places qu’on eût volontiers réservées aux enfants du pays. Dès la création du nouveau centre industriel, un groupe d’Italiens attirés par les salaires élevés, s’est implanté dans la région. 5000 Italiens, terrassiers, mineurs et manœuvres, forment à côté des paysans lorrains et des ouvriers allemands et français, une colonie distincte qui prétend garder sa langue, ses mœurs et ses usages.Toutes les parties de l’Italie, depuis la Sicile et la Calabre jusqu’au Piémont, ont envoyé des représentants qui se groupent par dialectes dans les mêmes maisons. La bande étroite de terrain comprise entre la route de Joeuf, Auboué, et la nouvelle frontière franco-allemande et surtout les pentes abruptes qui descendent du village annexé de Montois, se sont garnies de cabanes en bois appelées cantines qui, groupées en quartiers, servent d’habitation à une population très dense et exceptionnellement turbulente […].Les 5000 Italiens, venus pour un temps limité, n’amènent à part de très rares exceptions, ni femmes ni enfants. La plupart sont célibataires et comptent s’établir plus tard en Italie quand, par les économies quotidiennes, ils auront amassé un petit capital. […]On ne mendie pas à Homécourt. Nous venons de constater que les Italiens, sobres, travailleurs, sont en outre d’une probité indiscutable, mais nos éloges s’arrêtent là. Aucune autorité administrative ou municipale n’est admise par ces braves gens qui ne sont pas révoltés mais sont peut-être indépendants à l’excès. Tous ont des papiers en règle… qu’ils se repassent avec facilité […]La mafia existe à Homécourt : elle remplace pour les habitants des cantines les autorités administratives françaises qui n’exercent que mollement leur contrôle. La mafia est une société de secours mutuel : elle procure des papiers aux latitanti venus de loin, empêche la découverte des crimes et délits, soigne les blessés, fournit aux meurtriers des alibis et des faux témoins, enfin par la terreur adroitement répandue dans la région, habitue les habitants français à ne jamais traverser l’agglomération italienne […] »

Les Italiens d’Homécourt (Lorraine) Commandant Reynaud, « la colonie italienne d’Homécourt ». Le musée social : Mémoires et documents, n° 6, 1910, cité dans Saly P. (dir.) : Industrialisation et sociétés en Europe occidentale (1880-1970), textes et documents, Paris, A. Colin, 1998« Une petite rivière, l’Orne, dont la vallée profondément encaissée sépare les côtes de Moselle de la Woëvre, passe à 21 kilomètres à peine au Nord Ouest de Metz. On trouve sur son cours trois villages, Joeuf, Homécourt, et Auboué, dont le sous-sol, très riche en minerais de fer, est exploité par les aciéries de la marine, les usines de Wendel, et diverses sociétés industrielles.17000 ouvriers se sont installés le long de la route qui sépare Auboué de Joeuf. Les paysans lorrains, dédaignant le rude labeur de l’usine, ont laissé prendre aux étrangers les places qu’on eût volontiers réservées aux enfants du pays. Dès la création du nouveau centre industriel, un groupe d’Italiens attirés par les salaires élevés, s’est implanté dans la région. 5000 Italiens, terrassiers, mineurs et manœuvres, forment à côté des paysans lorrains et des ouvriers allemands et français, une colonie distincte qui prétend garder sa langue, ses mœurs et ses usages.Toutes les parties de l’Italie, depuis la Sicile et la Calabre jusqu’au Piémont, ont envoyé des représentants qui se groupent par dialectes dans les mêmes maisons. La bande étroite de terrain comprise entre la route de Joeuf, Auboué, et la nouvelle frontière franco-allemande et surtout les pentes abruptes qui descendent du village annexé de Montois, se sont garnies de cabanes en bois appelées cantines qui, groupées en quartiers, servent d’habitation à une population très dense et exceptionnellement turbulente […].Les 5000 Italiens, venus pour un temps limité, n’amènent à part de très rares exceptions, ni femmes ni enfants. La plupart sont célibataires et comptent s’établir plus tard en Italie quand, par les économies quotidiennes, ils auront amassé un petit capital. […]On ne mendie pas à Homécourt. Nous venons de constater que les Italiens, sobres, travailleurs, sont en outre d’une probité indiscutable, mais nos éloges s’arrêtent là. Aucune autorité administrative ou municipale n’est admise par ces braves gens qui ne sont pas révoltés mais sont peut-être indépendants à l’excès. Tous ont des papiers en règle… qu’ils se repassent avec facilité […]La mafia existe à Homécourt : elle remplace pour les habitants des cantines les autorités administratives françaises qui n’exercent que mollement leur contrôle. La mafia est une société de secours mutuel : elle procure des papiers aux latitanti venus de loin, empêche la découverte des crimes et délits, soigne les blessés, fournit aux meurtriers des alibis et des faux témoins, enfin par la terreur adroitement répandue dans la région, habitue les habitants français à ne jamais traverser l’agglomération italienne […] »

Immigration étant liée à l’industrialisation du pays. Et en France

immigration ayant permis l’essor industriel alors même que les paysans restaient très attachés à leurs (petites)

propriétés et que le déclin de la part d’agriculteurs dans la population active

fut lent jusqu’en 1945

Trois vagues d’immigration correspondant à des phases de

croissance économique (développement industriel du 19e siècle, phase de reconstruction

des années 1920, croissance des Trente Glorieuses…). Cependant existe dès l’entre deux guerres une immigration pour raisons politiques (fuite des régimes

stalinien, fasciste, franquiste…)

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Les Italiens d’Homécourt (Lorraine) Commandant Reynaud, « la colonie italienne d’Homécourt ». Le musée social : Mémoires et documents, n° 6, 1910, cité dans Saly P. (dir.) : Industrialisation et sociétés en Europe occidentale (1880-1970), textes et documents, Paris, A. Colin, 1998« Une petite rivière, l’Orne, dont la vallée profondément encaissée sépare les côtes de Moselle de la Woëvre, passe à 21 kilomètres à peine au Nord Ouest de Metz. On trouve sur son cours trois villages, Joeuf, Homécourt, et Auboué, dont le sous-sol, très riche en minerais de fer, est exploité par les aciéries de la marine, les usines de Wendel, et diverses sociétés industrielles.17000 ouvriers se sont installés le long de la route qui sépare Auboué de Joeuf. Les paysans lorrains, dédaignant le rude labeur de l’usine, ont laissé prendre aux étrangers les places qu’on eût volontiers réservées aux enfants du pays. Dès la création du nouveau centre industriel, un groupe d’Italiens attirés par les salaires élevés, s’est implanté dans la région. 5000 Italiens, terrassiers, mineurs et manœuvres, forment à côté des paysans lorrains et des ouvriers allemands et français, une colonie distincte qui prétend garder sa langue, ses mœurs et ses usages.Toutes les parties de l’Italie, depuis la Sicile et la Calabre jusqu’au Piémont, ont envoyé des représentants qui se groupent par dialectes dans les mêmes maisons. La bande étroite de terrain comprise entre la route de Joeuf, Auboué, et la nouvelle frontière franco-allemande et surtout les pentes abruptes qui descendent du village annexé de Montois, se sont garnies de cabanes en bois appelées cantines qui, groupées en quartiers, servent d’habitation à une population très dense et exceptionnellement turbulente […].Les 5000 Italiens, venus pour un temps limité, n’amènent à part de très rares exceptions, ni femmes ni enfants. La plupart sont célibataires et comptent s’établir plus tard en Italie quand, par les économies quotidiennes, ils auront amassé un petit capital. […]On ne mendie pas à Homécourt. Nous venons de constater que les Italiens, sobres, travailleurs, sont en outre d’une probité indiscutable, mais nos éloges s’arrêtent là. Aucune autorité administrative ou municipale n’est admise par ces braves gens qui ne sont pas révoltés mais sont peut-être indépendants à l’excès. Tous ont des papiers en règle… qu’ils se repassent avec facilité […]La mafia existe à Homécourt : elle remplace pour les habitants des cantines les autorités administratives françaises qui n’exercent que mollement leur contrôle. La mafia est une société de secours mutuel : elle procure des papiers aux latitanti venus de loin, empêche la découverte des crimes et délits, soigne les blessés, fournit aux meurtriers des alibis et des faux témoins, enfin par la terreur adroitement répandue dans la région, habitue les habitants français à ne jamais traverser l’agglomération italienne […] »

Les Italiens d’Homécourt (Lorraine) Commandant Reynaud, « la colonie italienne d’Homécourt ». Le musée social : Mémoires et documents, n° 6, 1910, cité dans Saly P. (dir.) : Industrialisation et sociétés en Europe occidentale (1880-1970), textes et documents, Paris, A. Colin, 1998« Une petite rivière, l’Orne, dont la vallée profondément encaissée sépare les côtes de Moselle de la Woëvre, passe à 21 kilomètres à peine au Nord Ouest de Metz. On trouve sur son cours trois villages, Joeuf, Homécourt, et Auboué, dont le sous-sol, très riche en minerais de fer, est exploité par les aciéries de la marine, les usines de Wendel, et diverses sociétés industrielles.17000 ouvriers se sont installés le long de la route qui sépare Auboué de Joeuf. Les paysans lorrains, dédaignant le rude labeur de l’usine, ont laissé prendre aux étrangers les places qu’on eût volontiers réservées aux enfants du pays. Dès la création du nouveau centre industriel, un groupe d’Italiens attirés par les salaires élevés, s’est implanté dans la région. 5000 Italiens, terrassiers, mineurs et manœuvres, forment à côté des paysans lorrains et des ouvriers allemands et français, une colonie distincte qui prétend garder sa langue, ses mœurs et ses usages.Toutes les parties de l’Italie, depuis la Sicile et la Calabre jusqu’au Piémont, ont envoyé des représentants qui se groupent par dialectes dans les mêmes maisons. La bande étroite de terrain comprise entre la route de Joeuf, Auboué, et la nouvelle frontière franco-allemande et surtout les pentes abruptes qui descendent du village annexé de Montois, se sont garnies de cabanes en bois appelées cantines qui, groupées en quartiers, servent d’habitation à une population très dense et exceptionnellement turbulente […].Les 5000 Italiens, venus pour un temps limité, n’amènent à part de très rares exceptions, ni femmes ni enfants. La plupart sont célibataires et comptent s’établir plus tard en Italie quand, par les économies quotidiennes, ils auront amassé un petit capital. […]On ne mendie pas à Homécourt. Nous venons de constater que les Italiens, sobres, travailleurs, sont en outre d’une probité indiscutable, mais nos éloges s’arrêtent là. Aucune autorité administrative ou municipale n’est admise par ces braves gens qui ne sont pas révoltés mais sont peut-être indépendants à l’excès. Tous ont des papiers en règle… qu’ils se repassent avec facilité […]La mafia existe à Homécourt : elle remplace pour les habitants des cantines les autorités administratives françaises qui n’exercent que mollement leur contrôle. La mafia est une société de secours mutuel : elle procure des papiers aux latitanti venus de loin, empêche la découverte des crimes et délits, soigne les blessés, fournit aux meurtriers des alibis et des faux témoins, enfin par la terreur adroitement répandue dans la région, habitue les habitants français à ne jamais traverser l’agglomération italienne […] »

Processus d’immigration toujours amorcé par l’arrivée

d’hommes célibataires ou sans leurs épouses.

Immigration n’étant pas vue comme définitive au départ. L’objectif est d’apporter un revenu supplémentaire dans le pays d’origine. Cependant

retour s’avérant parfois difficile du fait de la durée de

la coupure, des difficultés d’installation économique

dans ce pays…Dès lors immigration devenant définitive.

Avec une immigration définitive, enjeu de l’installation de la famille des homme ayant initialement immigré. Depuis les années 1977-78 mesures de « regroupement familial » afin de permettre cette installation. Mesures se

justifiant par « le droit de mener une vie familiale normale » pour « les étrangers régulièrement installés » (arrêté du Conseil d’Etat du 8-12-78).

Droits des immigrés reconnus en vertu du Préambule de la Constitution du 04 Octobre 1958 mais aussi de la Charte Européenne des Droits de l’Homme

signée par la France…

Avec une immigration définitive, enjeu de l’installation de la famille des homme ayant initialement immigré. Depuis les années 1977-78 mesures de « regroupement familial » afin de permettre cette installation. Mesures se

justifiant par « le droit de mener une vie familiale normale » pour « les étrangers régulièrement installés » (arrêté du Conseil d’Etat du 8-12-78). Ce

droit est reconnu en vertu du Préambule de la Constitution du 04 Octobre 1958 mais aussi de la Charte Européenne des Droits de l’Homme signée par la

France… A ce titre enjeux de l’immigration dépassant le strict cadre national.

Aujourd’hui cependant nouveaux « modèles

d’immigration » en France avec l’arrivée de migrants –parfois clandestins du fait d’une certaine fermeture des frontières- en simple

transit en France, leur objectif étant de rejoindre

d’autres pays comme le Royaume-Uni…

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Les Italiens d’Homécourt (Lorraine) Commandant Reynaud, « la colonie italienne d’Homécourt ». Le musée social : Mémoires et documents, n° 6, 1910, cité dans Saly P. (dir.) : Industrialisation et sociétés en Europe occidentale (1880-1970), textes et documents, Paris, A. Colin, 1998« Une petite rivière, l’Orne, dont la vallée profondément encaissée sépare les côtes de Moselle de la Woëvre, passe à 21 kilomètres à peine au Nord Ouest de Metz. On trouve sur son cours trois villages, Joeuf, Homécourt, et Auboué, dont le sous-sol, très riche en minerais de fer, est exploité par les aciéries de la marine, les usines de Wendel, et diverses sociétés industrielles.17000 ouvriers se sont installés le long de la route qui sépare Auboué de Joeuf. Les paysans lorrains, dédaignant le rude labeur de l’usine, ont laissé prendre aux étrangers les places qu’on eût volontiers réservées aux enfants du pays. Dès la création du nouveau centre industriel, un groupe d’Italiens attirés par les salaires élevés, s’est implanté dans la région. 5000 Italiens, terrassiers, mineurs et manœuvres, forment à côté des paysans lorrains et des ouvriers allemands et français, une colonie distincte qui prétend garder sa langue, ses mœurs et ses usages.Toutes les parties de l’Italie, depuis la Sicile et la Calabre jusqu’au Piémont, ont envoyé des représentants qui se groupent par dialectes dans les mêmes maisons. La bande étroite de terrain comprise entre la route de Joeuf, Auboué, et la nouvelle frontière franco-allemande et surtout les pentes abruptes qui descendent du village annexé de Montois, se sont garnies de cabanes en bois appelées cantines qui, groupées en quartiers, servent d’habitation à une population très dense et exceptionnellement turbulente […].Les 5000 Italiens, venus pour un temps limité, n’amènent à part de très rares exceptions, ni femmes ni enfants. La plupart sont célibataires et comptent s’établir plus tard en Italie quand, par les économies quotidiennes, ils auront amassé un petit capital. […]On ne mendie pas à Homécourt. Nous venons de constater que les Italiens, sobres, travailleurs, sont en outre d’une probité indiscutable, mais nos éloges s’arrêtent là. Aucune autorité administrative ou municipale n’est admise par ces braves gens qui ne sont pas révoltés mais sont peut-être indépendants à l’excès. Tous ont des papiers en règle… qu’ils se repassent avec facilité […]La mafia existe à Homécourt : elle remplace pour les habitants des cantines les autorités administratives françaises qui n’exercent que mollement leur contrôle. La mafia est une société de secours mutuel : elle procure des papiers aux latitanti venus de loin, empêche la découverte des crimes et délits, soigne les blessés, fournit aux meurtriers des alibis et des faux témoins, enfin par la terreur adroitement répandue dans la région, habitue les habitants français à ne jamais traverser l’agglomération italienne […] »

Les Italiens d’Homécourt (Lorraine) Commandant Reynaud, « la colonie italienne d’Homécourt ». Le musée social : Mémoires et documents, n° 6, 1910, cité dans Saly P. (dir.) : Industrialisation et sociétés en Europe occidentale (1880-1970), textes et documents, Paris, A. Colin, 1998« Une petite rivière, l’Orne, dont la vallée profondément encaissée sépare les côtes de Moselle de la Woëvre, passe à 21 kilomètres à peine au Nord Ouest de Metz. On trouve sur son cours trois villages, Joeuf, Homécourt, et Auboué, dont le sous-sol, très riche en minerais de fer, est exploité par les aciéries de la marine, les usines de Wendel, et diverses sociétés industrielles.17000 ouvriers se sont installés le long de la route qui sépare Auboué de Joeuf. Les paysans lorrains, dédaignant le rude labeur de l’usine, ont laissé prendre aux étrangers les places qu’on eût volontiers réservées aux enfants du pays. Dès la création du nouveau centre industriel, un groupe d’Italiens attirés par les salaires élevés, s’est implanté dans la région. 5000 Italiens, terrassiers, mineurs et manœuvres, forment à côté des paysans lorrains et des ouvriers allemands et français, une colonie distincte qui prétend garder sa langue, ses mœurs et ses usages.Toutes les parties de l’Italie, depuis la Sicile et la Calabre jusqu’au Piémont, ont envoyé des représentants qui se groupent par dialectes dans les mêmes maisons. La bande étroite de terrain comprise entre la route de Joeuf, Auboué, et la nouvelle frontière franco-allemande et surtout les pentes abruptes qui descendent du village annexé de Montois, se sont garnies de cabanes en bois appelées cantines qui, groupées en quartiers, servent d’habitation à une population très dense et exceptionnellement turbulente […].Les 5000 Italiens, venus pour un temps limité, n’amènent à part de très rares exceptions, ni femmes ni enfants. La plupart sont célibataires et comptent s’établir plus tard en Italie quand, par les économies quotidiennes, ils auront amassé un petit capital. […]On ne mendie pas à Homécourt. Nous venons de constater que les Italiens, sobres, travailleurs, sont en outre d’une probité indiscutable, mais nos éloges s’arrêtent là. Aucune autorité administrative ou municipale n’est admise par ces braves gens qui ne sont pas révoltés mais sont peut-être indépendants à l’excès. Tous ont des papiers en règle… qu’ils se repassent avec facilité […]La mafia existe à Homécourt : elle remplace pour les habitants des cantines les autorités administratives françaises qui n’exercent que mollement leur contrôle. La mafia est une société de secours mutuel : elle procure des papiers aux latitanti venus de loin, empêche la découverte des crimes et délits, soigne les blessés, fournit aux meurtriers des alibis et des faux témoins, enfin par la terreur adroitement répandue dans la région, habitue les habitants français à ne jamais traverser l’agglomération italienne […] »

Conditions de vie des

immigrés italiens du

début du 20e siècle semblant difficiles, tout

particulièrement dans le

domaine de l’habitat.

Nanterre: le bidonville des pâquerettes et en arrière plan la cité des Canibous en construction (entre 1959 et 1961). Source: site de la cité nationale de l’histoire de l’immigration. http://www.histoire-immigration.fr

Avec l’importante immigration de l’après guerre, développement de bidonvilles dans les

périphéries des grandes villes

françaises. Construction des

grands ensembles en partie liée à la volonté de réduire ces poches d’habitat précaires.

Immigrés constituant dès le début de ces

cités une part importante de leur

population. De ce fait, spécificité des lieux de

vie des immigrés

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Les Italiens d’Homécourt (Lorraine) Commandant Reynaud, « la colonie italienne d’Homécourt ». Le musée social : Mémoires et documents, n° 6, 1910, cité dans Saly P. (dir.) : Industrialisation et sociétés en Europe occidentale (1880-1970), textes et documents, Paris, A. Colin, 1998« Une petite rivière, l’Orne, dont la vallée profondément encaissée sépare les côtes de Moselle de la Woëvre, passe à 21 kilomètres à peine au Nord Ouest de Metz. On trouve sur son cours trois villages, Joeuf, Homécourt, et Auboué, dont le sous-sol, très riche en minerais de fer, est exploité par les aciéries de la marine, les usines de Wendel, et diverses sociétés industrielles.17000 ouvriers se sont installés le long de la route qui sépare Auboué de Joeuf. Les paysans lorrains, dédaignant le rude labeur de l’usine, ont laissé prendre aux étrangers les places qu’on eût volontiers réservées aux enfants du pays. Dès la création du nouveau centre industriel, un groupe d’Italiens attirés par les salaires élevés, s’est implanté dans la région. 5000 Italiens, terrassiers, mineurs et manœuvres, forment à côté des paysans lorrains et des ouvriers allemands et français, une colonie distincte qui prétend garder sa langue, ses mœurs et ses usages.Toutes les parties de l’Italie, depuis la Sicile et la Calabre jusqu’au Piémont, ont envoyé des représentants qui se groupent par dialectes dans les mêmes maisons. La bande étroite de terrain comprise entre la route de Joeuf, Auboué, et la nouvelle frontière franco-allemande et surtout les pentes abruptes qui descendent du village annexé de Montois, se sont garnies de cabanes en bois appelées cantines qui, groupées en quartiers, servent d’habitation à une population très dense et exceptionnellement turbulente […].Les 5000 Italiens, venus pour un temps limité, n’amènent à part de très rares exceptions, ni femmes ni enfants. La plupart sont célibataires et comptent s’établir plus tard en Italie quand, par les économies quotidiennes, ils auront amassé un petit capital. […]On ne mendie pas à Homécourt. Nous venons de constater que les Italiens, sobres, travailleurs, sont en outre d’une probité indiscutable, mais nos éloges s’arrêtent là. Aucune autorité administrative ou municipale n’est admise par ces braves gens qui ne sont pas révoltés mais sont peut-être indépendants à l’excès. Tous ont des papiers en règle… qu’ils se repassent avec facilité […]La mafia existe à Homécourt : elle remplace pour les habitants des cantines les autorités administratives françaises qui n’exercent que mollement leur contrôle. La mafia est une société de secours mutuel : elle procure des papiers aux latitanti venus de loin, empêche la découverte des crimes et délits, soigne les blessés, fournit aux meurtriers des alibis et des faux témoins, enfin par la terreur adroitement répandue dans la région, habitue les habitants français à ne jamais traverser l’agglomération italienne […] »

Difficulté de communication avec le reste de la population du fait de barrières

linguistiques

Image des immigrés

comme celle d’un groupe

fermé sur lui-même et image

ici assez négative de ces immigrés, qui seraient selon

l’auteur du texte à la fois

fraudeurs, criminels et

terrorisant le reste de la population.

Vision de l’immigré qui traduit une certaine hostilité de l’observateur à leur endroit lequel semble tout au

long du texte regretter leur présence en Lorraine

Constantes difficultés d’intégration des immigrés,

acceptant des travaux que les Français n’accepteraient pas ce

qui entraine des tensions… Groupe d’immigrés semblant fermé sur lui-même mais vu

l’hostilité existant à leur endroit cette fermeture est

autant, sinon plus, liée à l’accueil très médiocre leur

étant réservé qu’à leur volonté propre.

Page 10: Importance des noms et prénoms traduisant des origines italiennes ou polonaises de ces victimes dun accident minier Statues dun forgeron et dun mineur

Les descendants d’immigrés et leurs racines. Extrait de la conclusion de l’ouvrage de l’historien Pierre Milza: Voyage en Ritalie, Plon, 1993

Pierre Milza est un historien français à l’œuvre abondante dont le père était un immigré italien. Son voyage en Ritalie est un ouvrage consacré à l’histoire et à la mémoire de l’immigration italienne et la conclusion de ce livre est très personnelle Chacun de nous est sorti du creuset, porteur d’une part de francité et d’italianité qui varie à l’infini et dont le mélange peut produire à peu près tout et son contraire. Pour ma part, après avoir été tricolorisé jusqu’au bout des ongles par ma famille maternelle, puis par l’école de la République et les scouts de France, je suis parti en quête d’une autre identité, celle du père trop tôt disparu, celle d’un pays dont l’exotisme (tout relatif) satisfaisait ma soif adolescente de distinction.J’ai ainsi nourri une différence fabriquée, faite d’emprunts à ce qu’il pouvait y avoir de valorisant dans l’histoire et dans la culture de mes deux patries, de mes deux familles, et gommant le reste, sans être tout à fait dupe de l’entreprise. En quête de racines distinctes de celles des femmes qui m’ont élevé, et à qui je dois d’être ce que je suis, j’ai au moins appris une chose de ce long voyage : c’est que je n’avais pas, que je ne pouvais pas avoir d’enracinement unique et définitif. Des fidélités sans doute, des racines, si l’on veut, mais que je porte avec moi quand je change d’horizon, comme ces peuples de nomades qui se déplacent avec les images de leurs dieux dans leurs bagages.Mais peut-être est-ce cela qui fait notre spécificité de fils de migrants, d’une partie d’entre eux du moins : le sentiment d’être à la fois parfaitement intégrés dans la société qui a accueilli nos pères, d’y être devenus transparents, et en même temps d’être quelque part d’éternels nomades. Cela peut produire des moments d’émotion intense, comme celui que j’ai vécu en visitant Ellis Island en décembre 1991. Mais le reste du temps, cela peut aussi aider à se sentir libre et solidaire du reste du monde. »

Les descendants d’immigrés et leurs racines. Extrait de la conclusion de l’ouvrage de l’historien Pierre Milza: Voyage en Ritalie, Plon, 1993

Pierre Milza est un historien français à l’œuvre abondante dont le père était un immigré italien. Son voyage en Ritalie est un ouvrage consacré à l’histoire et à la mémoire de l’immigration italienne et la conclusion de ce livre est très personnelle Chacun de nous est sorti du creuset, porteur d’une part de francité et d’italianité qui varie à l’infini et dont le mélange peut produire à peu près tout et son contraire. Pour ma part, après avoir été tricolorisé jusqu’au bout des ongles par ma famille maternelle, puis par l’école de la République et les scouts de France, je suis parti en quête d’une autre identité, celle du père trop tôt disparu, celle d’un pays dont l’exotisme (tout relatif) satisfaisait ma soif adolescente de distinction.J’ai ainsi nourri une différence fabriquée, faite d’emprunts à ce qu’il pouvait y avoir de valorisant dans l’histoire et dans la culture de mes deux patries, de mes deux familles, et gommant le reste, sans être tout à fait dupe de l’entreprise. En quête de racines distinctes de celles des femmes qui m’ont élevé, et à qui je dois d’être ce que je suis, j’ai au moins appris une chose de ce long voyage : c’est que je n’avais pas, que je ne pouvais pas avoir d’enracinement unique et définitif. Des fidélités sans doute, des racines, si l’on veut, mais que je porte avec moi quand je change d’horizon, comme ces peuples de nomades qui se déplacent avec les images de leurs dieux dans leurs bagages.Mais peut-être est-ce cela qui fait notre spécificité de fils de migrants, d’une partie d’entre eux du moins : le sentiment d’être à la fois parfaitement intégrés dans la société qui a accueilli nos pères, d’y être devenus transparents, et en même temps d’être quelque part d’éternels nomades. Cela peut produire des moments d’émotion intense, comme celui que j’ai vécu en visitant Ellis Island en décembre 1991. Mais le reste du temps, cela peut aussi aider à se sentir libre et solidaire du reste du monde. »

Si la situation d’un immigré peut sembler difficile, celle de ses descendants peut paraitre plus enviable, à l’image ici de celle de P.

Milza qui est un universitaire de renom. Dans cette intégration ou, plus justement ici, assimilation, importance de l’école, du « mariage-mixte » (père italien/ mère française)… Il est également possible d’évoquer le rôle de l’accession à la nationalité française selon le « droit du sol » à

partir de la loi de 1889 principe réaffirmé par la loi de 1998. L’expression de « creuset » français utilisée ici renvoie à cette

intégration de populations d’origines diverses sur plusieurs générations.

Pour autant si la France a su intégrer (ou assimiler) les enfants d’immigrés au cours du 20e siècle c’est aussi grâce aux

perspectives de promotion sociale offertes par une économie en

croissance assez vigoureuse, en particulier durant les Trente Glorieuses.

La croissance ralentie actuelle est à l’inverse source de plus de difficultés d’intégration. Dès lors, il y a moins un

problème d’immigration que de marché du travail peu intégrateur dans la France du début du 21e siècle…

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Les descendants d’immigrés et leurs racines. Extrait de la conclusion de l’ouvrage de l’historien Pierre Milza: Voyage en Ritalie, Plon, 1993

Pierre Milza est un historien français à l’œuvre abondante dont le père était un immigré italien. Son voyage en Ritalie est un ouvrage consacré à l’histoire et à la mémoire de l’immigration italienne et la conclusion de ce livre est très personnelle Chacun de nous est sorti du creuset, porteur d’une part de francité et d’italianité qui varie à l’infini et dont le mélange peut produire à peu près tout et son contraire. Pour ma part, après avoir été tricolorisé jusqu’au bout des ongles par ma famille maternelle, puis par l’école de la République et les scouts de France, je suis parti en quête d’une autre identité, celle du père trop tôt disparu, celle d’un pays dont l’exotisme (tout relatif) satisfaisait ma soif adolescente de distinction.J’ai ainsi nourri une différence fabriquée, faite d’emprunts à ce qu’il pouvait y avoir de valorisant dans l’histoire et dans la culture de mes deux patries, de mes deux familles, et gommant le reste, sans être tout à fait dupe de l’entreprise. En quête de racines distinctes de celles des femmes qui m’ont élevé, et à qui je dois d’être ce que je suis, j’ai au moins appris une chose de ce long voyage : c’est que je n’avais pas, que je ne pouvais pas avoir d’enracinement unique et définitif. Des fidélités sans doute, des racines, si l’on veut, mais que je porte avec moi quand je change d’horizon, comme ces peuples de nomades qui se déplacent avec les images de leurs dieux dans leurs bagages.Mais peut-être est-ce cela qui fait notre spécificité de fils de migrants, d’une partie d’entre eux du moins : le sentiment d’être à la fois parfaitement intégrés dans la société qui a accueilli nos pères, d’y être devenus transparents, et en même temps d’être quelque part d’éternels nomades. Cela peut produire des moments d’émotion intense, comme celui que j’ai vécu en visitant Ellis Island en décembre 1991. Mais le reste du temps, cela peut aussi aider à se sentir libre et solidaire du reste du monde. »

Les descendants d’immigrés et leurs racines. Extrait de la conclusion de l’ouvrage de l’historien Pierre Milza: Voyage en Ritalie, Plon, 1993

Pierre Milza est un historien français à l’œuvre abondante dont le père était un immigré italien. Son voyage en Ritalie est un ouvrage consacré à l’histoire et à la mémoire de l’immigration italienne et la conclusion de ce livre est très personnelle Chacun de nous est sorti du creuset, porteur d’une part de francité et d’italianité qui varie à l’infini et dont le mélange peut produire à peu près tout et son contraire. Pour ma part, après avoir été tricolorisé jusqu’au bout des ongles par ma famille maternelle, puis par l’école de la République et les scouts de France, je suis parti en quête d’une autre identité, celle du père trop tôt disparu, celle d’un pays dont l’exotisme (tout relatif) satisfaisait ma soif adolescente de distinction.J’ai ainsi nourri une différence fabriquée, faite d’emprunts à ce qu’il pouvait y avoir de valorisant dans l’histoire et dans la culture de mes deux patries, de mes deux familles, et gommant le reste, sans être tout à fait dupe de l’entreprise. En quête de racines distinctes de celles des femmes qui m’ont élevé, et à qui je dois d’être ce que je suis, j’ai au moins appris une chose de ce long voyage : c’est que je n’avais pas, que je ne pouvais pas avoir d’enracinement unique et définitif. Des fidélités sans doute, des racines, si l’on veut, mais que je porte avec moi quand je change d’horizon, comme ces peuples de nomades qui se déplacent avec les images de leurs dieux dans leurs bagages.Mais peut-être est-ce cela qui fait notre spécificité de fils de migrants, d’une partie d’entre eux du moins : le sentiment d’être à la fois parfaitement intégrés dans la société qui a accueilli nos pères, d’y être devenus transparents, et en même temps d’être quelque part d’éternels nomades. Cela peut produire des moments d’émotion intense, comme celui que j’ai vécu en visitant Ellis Island en décembre 1991. Mais le reste du temps, cela peut aussi aider à se sentir libre et solidaire du reste du monde. »

Pour autant, rapport original à la nation

française. Celle-ci n’est pas vue comme une

appartenance exclusive. Même si la volonté d’affirmer des

racines étrangères procède autant d’un souci de distinction, d’affirmation de soi, que d’un contact réel et intime avec le pays d’origine d’une partie

de la famille, cette volonté puise sa

légitimité dans une histoire familiale en

apparence distincte de celle de nombreux autres Français.

Ce que décrit ici Milza avec le recul de

l’universitaire est une réalité présente chez de nombreux enfants

d’immigrés…

Et l’itinéraire de P. Milza n’est pas une exception

puisqu’en France aujourd’hui, entre le quart et le tiers des Français ont

au moins l’un de leurs grands parents qui est un immigré… Ce qui en dit

long sur le potentiel sentiment éprouvé par de nombreux Français d’être « d’éternels nomades »…