impact d’une pollinisation assistÉe sur la production

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MARIANNE GUILMETTE IMPACT D’UNE POLLINISATION ASSISTÉE SUR LA PRODUCTION FRUITIÈRE DU SAMBUCUS NIGRA SSP. CANADENSIS (L.) R. BOLLI Mémoire présenté à la Faculté des études supérieures de l’Université Laval dans le cadre du programme de maîtrise en biologie végétale pour l’obtention du grade de maître ès sciences (M.Sc.) DÉPARTEMENT DE PHYTOLOGIE FACULTÉ DES SCIENCES DE L’AGRICULTURE UNIVERSITÉ LAVAL QUÉBEC MAI 2006 © Marianne Guilmette, 2006

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Page 1: IMPACT D’UNE POLLINISATION ASSISTÉE SUR LA PRODUCTION

MARIANNE GUILMETTE IMPACT D’UNE POLLINISATION ASSISTÉE SUR LA PRODUCTION FRUITIÈRE DU SAMBUCUS NIGRA

SSP. CANADENSIS (L.) R. BOLLI

Mémoire présenté à la Faculté des études supérieures de l’Université Laval

dans le cadre du programme de maîtrise en biologie végétale pour l’obtention du grade de maître ès sciences (M.Sc.)

DÉPARTEMENT DE PHYTOLOGIE FACULTÉ DES SCIENCES DE L’AGRICULTURE

UNIVERSITÉ LAVAL QUÉBEC

MAI 2006 © Marianne Guilmette, 2006

Page 2: IMPACT D’UNE POLLINISATION ASSISTÉE SUR LA PRODUCTION

RÉSUMÉ

La domestication du sureau du Canada pour la production de ses petits fruits

stimule, depuis quelques années, l’étude des principaux facteurs de régie de

culture de cet arbuste. Ce mémoire présente une étude de l’impact de la

pollinisation assistée sur la mise à fruit du sureau du Canada (Sambucus nigra

ssp. canadensis (L.) R. Bolli). Des études exploratoires sur la floraison ont d’abord

été réalisées avant d’entreprendre des essais sur les limitations potentielles de la

mise à fruit par la pollinisation. Suite à la caractérisation de la période de floraison

et à la mise au point d’un test de viabilité du pollen, l’influence de la quantité et de

la source du pollen a été étudié à l’aide d’une technique de pollinisation assistée.

Des expériences au champ ainsi qu’en serre ont permis de vérifier l’effet positif

d’un apport supplémentaire de pollen chez des plants indigènes et ont également

démontré des phénomènes d’incompatibilité partielle chez des plants indigènes et

chez certains cultivars.

Page 3: IMPACT D’UNE POLLINISATION ASSISTÉE SUR LA PRODUCTION

iii

REMERCIEMENTS

Je tiens à remercier tout particulièrement Claude Richer de m’avoir permis

d’effectuer deux belles années de recherche dans un environnement de

travail stimulant et très sympathique. Merci également pour l’encadrement de

qualité et la grande disponibilité.

Merci à Jacques-André Rioux pour son soutien et son enthousiasme tout au

long de ce projet.

Un joyeux merci à Denis Charlebois pour son temps, son esprit critique et

ses judicieux commentaires.

Un énorme merci à mes hôtes champêtres, Sylvie Dubuc et Robert

Patenaude qui, en m’accueillant sur leur plantation, m’ont appris

énormément sur la culture du sureau et sur diverses réalités du travail

agricole.

Le plus grand des mercis à tous ceux et celles qui m’ont aidé techniquement

dans mes expérimentations. Merci pour vos pouces, vos bras et vos têtes!

J’ai été enchantée par mon passage au CRDH. J’y ai fait des rencontres

inoubliables et touchantes. Mes apprentissages au cours de ces deux

années sont inqualifiables car il ne s’agit pas seulement de biologie végétale

mais de riches échanges sur le plan humain.

Page 4: IMPACT D’UNE POLLINISATION ASSISTÉE SUR LA PRODUCTION

TABLE DES MATIÈRES

RÉSUMÉ.................................................................................................................. ii REMERCIEMENTS................................................................................................. iii TABLE DES MATIÈRES ......................................................................................... iv LISTE DES TABLEAUX ........................................................................................ viii LISTE DES FIGURES............................................................................................. ix INTRODUCTION GÉNÉRALE ................................................................................ 1 REVUE BIBLIOGRAPHIQUE.................................................................................. 3 ÉTAT DES CONNAISSANCES SUR LA CULTURE DU SUREAU DU CANADA... 3

Description botanique ...................................................................................... 3 Distribution et écologie..................................................................................... 6 Utilisations du sureau....................................................................................... 7 Développement de la culture du sureau du Canada ........................................ 9

MÉCANISMES DE LA POLLINISATION............................................................... 10

Développement floral ..................................................................................... 10 Pollinisation et fécondation ............................................................................ 11 Causes de l’échec à la pollinisation ............................................................... 12 Incompatibilités .............................................................................................. 15

Incompatibilités génétiques ........................................................................ 15 Incompatibilité génétique et pollinisation croisée........................................ 17 État des connaissances sur l’auto-incompatibilité chez le sureau .............. 17 Incompatibilités morphologique, spatiale et temporelle .............................. 18

CULTURE IN VITRO DES GRAINS DE POLLEN................................................. 19 HYPOTHÈSES ET OBJECTIFS DE RECHERCHE.............................................. 21 CHAPITRE 1 DÉVOLOPPEMENT DES CONNAISSANCES SUR LA

FLORAISON ET LA VIABILITÉ DU POLLEN..................................... 22 1.1 INTRODUCTION ........................................................................................... 22 1.2 HYPOTHÈSES ET OBJECTIFS ................................................................... 23 1.3 MATÉRIEL ET MÉTHODES ......................................................................... 23

1.3.1 Matériel végétal et sites expérimentaux ............................................. 23

Page 5: IMPACT D’UNE POLLINISATION ASSISTÉE SUR LA PRODUCTION

v

1.3.2 Caractérisation de la période de floraison .......................................... 26 1.3.2.1 Matériel végétal............................................................................. 26 1.3.2.2 Prise de données .......................................................................... 27

1.3.3 Observations des différences morphologiques des pièces florales .... 27 Matériel végétal et prise de données ............................................ 27

1.3.4 Détermination de la technique de germination des grains de pollen in vitro .................................................................................................... 28

1.3.4.1 Détermination des paramètres de germination des grains de pollen................................................................................................... 28

1.3.4.2 Récolte et conservation des grains de pollen................................ 30 1.3.5 Évaluation du taux de germination des grains de pollen .................... 31

1.3.5.1 Mise en culture des grains de pollen............................................. 31 1.3.5.2 Dénombrement par microscopie ................................................... 31

1.4 RÉSULTATS ET DISCUSSION .................................................................... 32

1.4.1 Caractérisation de la période de floraison .......................................... 32 1.4.2 Observation de la morphologie des pièces florales de plants indigènes

et de cinq cultivars.............................................................................. 39 1.4.3 Détermination de la technique de germination in vitro........................ 41

1.4.3.1 Conditions de germination des grains de pollen ........................... 41 1.4.3.2 Évaluation de la technique de conservation du pollen .................. 46 1.4.3.3 Résumé des essais de germination in vitro des grains de pollen.. 48

CHAPITRE 2 EFFET D’UN APPORT SUPPLÉMENTAIRE DE POLLEN SUR LA

MISE À FRUIT.................................................................................... 49 2.1 INTRODUCTION........................................................................................... 49 2.2 HYPOTHÈSES ET OBJECTIFS ................................................................... 50 2.3 MATÉRIEL ET MÉTHODES ......................................................................... 51

2.3.1 Matériel végétal .................................................................................. 51 2.3.2 Traitements de pollinisation................................................................ 52 2.3.3 Dispositif expérimental ....................................................................... 53 2.3.4 Prise de données ............................................................................... 53 2.3.5 Analyses statistiques.......................................................................... 55

2.4 RÉSULTATS................................................................................................. 55

2.4.1 Étude de la viabilité du pollen au cours de la floraison en champ ...... 55 2.4.2 Effet des traitements de pollinisation assistée sur la mise à fruit........ 57 2.4.3 Effet de la pollinisation assistée sur le volume des fruits.................... 59 2.4.4 Effet du nombre de fleurs d’une inflorescence sur la mise à fruit ....... 60

2.5 DISCUSSION................................................................................................ 63

Page 6: IMPACT D’UNE POLLINISATION ASSISTÉE SUR LA PRODUCTION

vi

CHAPITRE 3 EFFET DE LA POLLINISATION CROISÉE SUR LA MISE À FRUIT........................................................................................................... 68

3.1 INTRODUCTION........................................................................................... 68 3.2 HYPOTHÈSE ET OBJECTIFS...................................................................... 69 3.3 MATÉRIEL ET MÉTHODES ......................................................................... 69

3.3.1 Matériel végétal .................................................................................. 69 3.3.2 Entretien et conditions de croissance du matériel végétal en serre.... 70 3.3.3 Traitements phytosanitaires ............................................................... 71 3.3.4 Méthodologie...................................................................................... 72

3.3.4.1 Comparaison du potentiel germinatif des grains de pollen recueillis dans la plantation de l’Acadie..................................................... 72

3.3.4.2 Traitements de pollinisation et dispositif expérimental .................. 72 3.3.5 Récolte des données et analyses statistiques.................................... 73

3.4 RÉSULTATS................................................................................................. 74

3.4.1 Comparaison du pouvoir germinatif des grains de pollen entre cultivars et plants indigènes ............................................................................. 74

3.4.2 Viabilité du pollen au cours des expériences menées en serre.......... 75 3.4.3 Mise à fruit.......................................................................................... 77

3.5 DISCUSSION................................................................................................ 80 DISCUSSION GÉNÉRALE ................................................................................... 84 CONCLUSION ...................................................................................................... 88 ANNEXE 1 Clé taxonomique du genre Sambucus................................................ 97 ANNEXE 2 Observation sous microscope optique de grains de pollen de

Sambucus nigra ssp. canadensis ....................................................... 98 ANNEXE 3 Courbe du cumul des degrés-jours à la station expérimentale de

l’Acadie............................................................................................... 99 ANNEXE 4 Phénologie du sureau du Canada .................................................... 100 ANNEXE 5 Plan de champ du site de Lacolle..................................................... 101 ANNEXE 6 Dispositif expérimental au site de Beauharnois ................................ 103 ANNEXE 7 Filets recouvrant les rangs sur le site de Lacolle, septembre 2004 .. 104

Page 7: IMPACT D’UNE POLLINISATION ASSISTÉE SUR LA PRODUCTION

vii

ANNEXE 8 Illustrations des étapes d’intervention au champ.............................. 105 ANNEXE 9 Taux de germination des lots de grains de pollen utilisés lors des

pollinisations sur le site de Lacolle, en 2004 ............................................... 106 ANNEXE 10 Dispositif expérimental de l’expérience de pollinisation croisée dans

les serres du CRDH .................................................................................... 107 ANNEXE 11 Dispositif expérimental de l’expérience de pollinisation croisée dans la

serre de l’Acadie ......................................................................................... 108 ANNEXE 12 Perceur du sureau (Achatodes zea) ............................................... 109

Page 8: IMPACT D’UNE POLLINISATION ASSISTÉE SUR LA PRODUCTION

LISTE DES TABLEAUX Tableau 1 : Liste des différents cultivars de Sambucus nigra ssp. canadensis

sélectionnés en Nouvelle-Écosse et dans l’état de New York. ............. 9 Tableau 2 : Description des lots de matériel végétal utilisés pour l’ensemble des

expériences. ....................................................................................... 26 Tableau 3 :Taux de mise à fruit du Sambucus nigra ssp. canadensis suite à quatre

traitements de pollinisation, sur deux parcelles de la Montérégie ...... 57 Tableau 4 :Taux de mise à fruit du Sambucus nigra ssp. canadensis suite aux

traitements T3 et T5, sur deux parcelles de la Montérégie................. 58 Tableau 5 :Volume des fruits du Sambucus nigra ssp. canadensis suite aux

traitements de pollinisation sur la parcelle de Lacolle en 2004........... 59 Tableau 6 : Coefficients de corrélation des relations linéaires entre différentes

variables relatives à la mise à fruit. .................................................... 62 Tableau 7 : Taux de mise à fruit de plants indigènes de Sambucus nigra ssp.

canadensis suite à des pollinisations croisées au cours d’une expérience conduite en serre à l’hiver 2005. ...................................... 78

Tableau 8 : Taux de mise à fruit des cultivars Kent, York et Scotia suite à des

pollinisations croisées menées en serre au printemps 2005. ............. 80

Page 9: IMPACT D’UNE POLLINISATION ASSISTÉE SUR LA PRODUCTION

LISTE DES FIGURES Figure 1 : Sambucus nigra ssp. canadensis. a) Feuilles opposées-pennées b)

Pièces florales c) Pyrènes....................................................................... 4 Figure 2 : Architecture d’un plant de Sambucus nigra ssp. nigra. ........................... 5 Figure 3 : Carte de distribution du sureau du Canada dans la province de Québec

et dans la région des Grands Lacs.......................................................... 7 Figure 4 : Fleurs de Sambucus nigra ssp. nigra. a) Bouton floral b) Anthèse. ..... 11 Figure 5 : La double fécondation. (1) Croissance du tube pollinique. (2) Extrémité

du tube pollinique. (3) Fécondation de l’ovule....................................... 12 Figure 6 : Pourquoi l’échec à la pollinisation?. ...................................................... 14 Figure 7 : Les types de fécondation : autogamie, geitonogamie et xénogamie..... 16 Figure 8 : Illustration du phénomène d’auto-incompatibilité. ................................. 16 Figure 9 : Zone de dénombrement sur l’hémacymètre.......................................... 32 Figure 10 : Évolution de la floraison sur le site de Lacolle en 2004 et 2005.......... 33 Figure 11 : Évolution de la floraison sur le site de Beauharnois en 2004 et 2005..34 Figure 12 : Courbe de floraison normalisée des cultivars Kent, Nova, Scotia,

Victoria et York ainsi que de plants indigènes en 2004. ..................... 36 Figure 13 : Courbe de floraison normalisée des cultivars Kent, Nova, Scotia,

Victoria et York ainsi que de plants indigènes en 2005. ..................... 37 Figure 14 : Déroulement des différentes étapes menant à l’anthèse chez

Sambucus nigra ssp. canadensis.. ..................................................... 39 Figure 15 : Disposition des pièces florales chez Sambucus nigra ssp. canadensis.

(A) Position érigée des étamines chez des plants indigènes. (B) Position divergente des étamines chez les cultivars Kent, Scotia, Victoria et York. .................................................................................. 40

Figure 16 : Taux de germination des grains de pollen de Sambucus nigra ssp.

canadensis en fonction du type de contentant utilisé pour la mise en culture................................................................................................. 41

Page 10: IMPACT D’UNE POLLINISATION ASSISTÉE SUR LA PRODUCTION

x

Figure 17 : Taux de germination des grains de pollen de Sambucus nigra ssp. canadensis incubés dans un milieu avec ou sans agitation. .............. 43

Figure 18 : Taux de germination des grains de pollen de Sambucus nigra ssp.

canadensis incubés en présence ou en absence de lumière. ............ 44 Figure 19 : Taux de germination des grains de pollen de Sambucus nigra ssp.

canadensis incubés dans différents milieux de culture....................... 45 Figure 20 : Taux de germination des grains de pollen de Sambucus nigra ssp.

canadensis après avoir été soumis à diverses méthodes de conservation. ...................................................................................... 47

Figure 21 : Taux de germination des grains de pollen de plants de Sambucus nigra

ssp. canadensis sur deux sites expérimentaux au cours de la période de floraison 2005................................................................................ 56

Figure 22 : Relation entre le pourcentage de mise à fruit et le nombre de boutons

floraux constituant une inflorescence. ................................................ 61 Figure 23 : Relation entre la masse des fruits et le volume des fruits .................. 61 Figure 24 : Relation entre le pourcentage de mise à fruit et le volume des fruits. . 62 Figure 25 : Germination des grains de pollen de différents cultivars de Sambucus

nigra ssp. canadensis et de plants indigènes cultivés au champ à l’été 2004.. ................................................................................................. 74

Figure 26 : Viabilité du pollen des cultivars Kent, York et de plants indigènes

utilisés lors de l'expérience de pollinisation assistée dans les serres du CRDH au cours de l’hiver 2005. ......................................................... 75

Figure 27 : Viabilité du pollen au cours de la floraison des plants indigènes lors de

l'expérience de pollinisation assistée sur les plants indigènes dans les serres du CRDH, à l’hiver 2005.......................................................... 76

Figure 28 : Viabilité du pollen des plants indigènes et de cultivars utilisés comme

pollinisateurs lors de l'expérience de pollinisation assistée sur les cultivars dans la serre de l’Acadie, au printemps 2005. ..................... 77

Page 11: IMPACT D’UNE POLLINISATION ASSISTÉE SUR LA PRODUCTION

INTRODUCTION GÉNÉRALE

Le sureau du Canada (Sambucus nigra ssp. canadensis (L.) R. Bolli), un arbuste

fruitier indigène de l’est de l’Amérique du Nord, est à la fois utilisé pour ses qualités

ornementales, sa capacité à stabiliser les berges et pour son potentiel comme

haies brise-vent. De plus, à petite échelle, l’usage du feuillage pour ses propriétés

médicinales, l’utilisation des fleurs comme ingrédients en confiserie et la

transformation des fruits pour la confection de tartes et de gelées bonifient la

production de cette plante.

Depuis peu, ses petits fruits noirs suscitent un nouvel intérêt. En effet, la

compagnie Colarôme Inc. a mis au point un procédé d’extraction pour la fabrication

d’un colorant alimentaire de grande qualité. Les besoins en fruits de cette

compagnie sont tels que les prélèvements en milieux naturels ne peuvent répondre

à la demande, les plants indigènes étant peu productifs et répartis en nombre très

variable au sein de populations éparses. La mise en place de vergers semble donc

s’imposer afin d’assurer un approvisionnement en fruits suffisant et constant.

Au sein du programme national de développement des systèmes de production

durable, certains chercheurs d’Agriculture et Agroalimentaire Canada (AAC) ont

pour mission de déterminer les principaux facteurs de régie de production des

nouvelles cultures, et le sureau du Canada y occupe une place prioritaire

(Charlebois et Richer, 2005).

Dans le cadre de cette maîtrise en biologie végétale, les travaux visaient à mieux

comprendre l’effet potentiel de la pollinisation sur l’augmentation et la stabilisation

de la production de fruits. La pollinisation est une étape déterminante pour toute

production fruitière. Son étude est complexe et peut inclure des aspects d’ordre

génétique, physiologique ou environnemental.

Le mémoire est présenté en quatre grandes parties. La première, une revue de

littérature générale, fait le point sur des connaissances d’ordre botanique,

Page 12: IMPACT D’UNE POLLINISATION ASSISTÉE SUR LA PRODUCTION

2

écologique et utilitaire sur le sureau du Canada cumulées jusqu’à maintenant et

présente les mécanismes principaux de la pollinisation ainsi que ceux de la

fécondation jusqu’à la mise à fruit. La seconde partie (chapitre 1) qui se veut

exploratoire contribue, grâce à quelques expériences et observations, au

développement des connaissances sur la floraison et la viabilité du pollen chez

S. nigra ssp. canadensis. Ces observations concernent principalement le sureau

indigène et plusieurs cultivars. Les troisième et quatrième parties du mémoire

(chapitres 2 et 3) sont consacrées à l’étude de l’effet d’un apport supplémentaire

de pollen sur la mise à fruit. Une première série d’essais ont été conduits sur des

plants indigènes. Par la suite, une seconde série d’essais se sont concentrés sur

l’effet de la pollinisation croisée à l’aide de plants de divers cultivars.

Chaque chapitre contient une introduction suivie de l’élaboration d’hypothèses et

d’objectifs spécifiques, de la description des méthodologies utilisées, de la

présentation et de la discussion des résultats obtenus. Ces nombreux résultats

sont ensuite revus et intégrés dans une discussion générale. Le mémoire s’achève

avec une brève conclusion.

Page 13: IMPACT D’UNE POLLINISATION ASSISTÉE SUR LA PRODUCTION

REVUE BIBLIOGRAPHIQUE

ÉTAT DES CONNAISSANCES SUR LA CULTURE DU SUREAU DU CANADA

Description botanique Le sureau du Canada, S. nigra sous-espèce canadensis, est un arbuste pouvant

atteindre 2 à 4 mètres de hauteur et jusqu’à 2 mètres de largeur à maturité (Martin

et Mott, 1997). Les feuilles caduques, opposées et composées-pennées, ont de 5

à 11 folioles lancéolés aux marges légèrement dentées (figure 1a). Les tiges, peu

ramifiées et faiblement ligneuses, contiennent une moelle abondante et démarrent

à partir de la base. L’architecture de la plante est illustrée à la figure 2. La plante

est stolonifère et son système racinaire est superficiel (Bolli, 1994).

Les inflorescences mesurent entre 7 et 50 cm de largeur et peuvent contenir

plusieurs centaines de fleurs de couleur blanc-crème, regroupées sous forme de

larges panicules. La floraison de l’ensemble des inflorescences s’étend sur

plusieurs semaines et l’ouverture des fleurs à l’intérieur même d’une panicule est

également légèrement désynchronisée. Ces petites fleurs hermaphrodites de 4 à

5 mm sont très odorantes, sans être nectarifères (Bolli, 1994). Elles sont

protogynes, c’est-à-dire que le stigmate est généralement réceptif avant la période

de déhiscence des anthères. Le stigmate est court et lobé (3-5) et l’ovaire est

syncarpe, trois quarts infère. La placentation est axile et chaque loge contient un

seul ovule. Les cinq étamines sont adnées à la base de l’ovaire et très divergentes

(figure 1b). Les longs filaments portent des anthères de couleur jaune.

Page 14: IMPACT D’UNE POLLINISATION ASSISTÉE SUR LA PRODUCTION

4

Figure 1 : Sambucus nigra ssp. canadensis. a) Feuilles opposées-pennées b)

Pièces florales c) Pyrènes.

Tirée et adaptée de Bolli, 1994

Page 15: IMPACT D’UNE POLLINISATION ASSISTÉE SUR LA PRODUCTION

5

H : hypocotyle B : bourgeons de réitération des tiges P : tige primaire e : tige épigée développée h : tige hypogée supprimée 1-4 : tiges de la 1ère à la 4e année

Figure 2 : Architecture d’un plant de Sambucus nigra ssp. nigra.

Tirée et adaptée de Bolli,1994

Page 16: IMPACT D’UNE POLLINISATION ASSISTÉE SUR LA PRODUCTION

6

Les fruits produits par les plants indigènes, de petites baies d’environ 5 à 6 mm de

diamètre, passent du vert clair au rouge, puis au noir-violacé à maturité. Les

pyrènes, 3 à 5 par baie, mesurent de 2 à 4 mm de long et ont des formes variées

(figure 1c). Les anthocyanes, responsables en partie de la pigmentation des fruits,

sont surtout localisées au niveau de l’exocarpe, la membrane extérieure du fruit.

Les fruits du sureau du Canada sont extrêmement prisés des oiseaux (Bolli, 1994),

lesquels sont attirés par la couleur foncée (Willson et al., 1990). Ces derniers les

consomment puis disséminent les graines dans l’environnement par leurs fèces.

Près de 100 espèces d’oiseaux se nourrissent de ces petits fruits (Atkinson et

Atkinson, 2002).

Le genre Sambucus a récemment été reclassé dans la famille des Adoxaceae

(Dogterom et al., 2000), dans l’ordre des Dipsacales. Dans la littérature, il est

encore fréquent de le retrouver sous la famille des Caprifoliaceae. Il emprunte

également les noms de sureau blanc ou sirop blanc. En anglais, on le retrouve

sous les noms « american elder » et « common elder ». Une clé taxonomique

différenciant les espèces et sous-espèces du genre Sambucus est présentée à

l’annexe 1.

Distribution et écologie

Le genre Sambucus comprend près de 25 espèces distribuées un peu partout

dans le monde, dans les régions tempérées (Small et al., 2004). Le sureau noir,

S. nigra ssp. nigra, est largement cultivé en Europe, dans la région nordique de

l’Afrique et dans la partie ouest de l’Asie. Le sureau du Canada, quant à lui, est

originaire du nord-est de l’Amérique du Nord (figure 3).

En milieu naturel, le S. nigra ssp. canadensis se retrouve dans des espaces variés.

Il préfère cependant les endroits ensoleillés ou ombragés jusqu’à 66 % (Martin et

Mott, 1997). On le retrouve donc, la plupart du temps, sur le bord des ruisseaux ou

à l’orée des bois. Le sureau du Canada occupe une place écologique importante

Page 17: IMPACT D’UNE POLLINISATION ASSISTÉE SUR LA PRODUCTION

7

dans les régions boisées en procurant un abri et une source de nourriture à au

moins 79 espèces sauvages (Martin et Mott, 1997) dont les oiseaux et les

rongeurs qui raffolent de ses petits fruits.

Bien qu’il se retrouve principalement dans des lieux humides et des sols bien

drainés, il peut croître également dans des sols très secs ou très humides. Il

prospère dans des sols fertiles, riches en azote et en phosphore, mais peut

également croître dans le sable, l’argile ou la tourbe. Le pH optimal du sol se situe

entre 5,5 et 6,0 mais la plante peut tolérer un pH allant jusqu’à 7,5 (Atkinson et

Atkinson 2002; Martin et Mott, 1997).

Figure 3 : Carte de distribution du sureau du Canada dans la province de Québec

et dans la région des Grands Lacs. Tirée et adaptée de Small et al., 2004

Utilisations du sureau Dans tous les coins du monde, le sureau a été utilisé à des fins médicinales; il

faisait jadis partie de la pharmacopée familiale de base (Pieroni et al., 2003). Les

utilisations étaient variées puisque chaque partie de la plante était associée à des

propriétés de divers types, diurétique, diaphorétique, purgative, hémostatique et

antidiabétique (Gray et al., 2000). Des références historiques indiquent que des

Page 18: IMPACT D’UNE POLLINISATION ASSISTÉE SUR LA PRODUCTION

8

infusions de feuilles de sureaux étaient également utilisées au 19e siècle pour le

contrôle des insectes nuisibles en agriculture (Smith et Secoy, 1981). Encore

aujourd’hui, les racines, les feuilles et les fleurs sont traitées selon l’usage

traditionnel pour en faire des décoctions, des infusions, des sirops, des lotions et

des cataplasmes (Bolli, 1994; Gonzalez-Hernandez et al., 2004). De plus,

plusieurs matières actives sont connues et exploitées par l’industrie

pharmaceutique (Bagchi et al., 2004; Gray et al., 2000).

En Europe, les feuilles, les tiges et les fruits au stade immature du S. nigra ssp.

nigra sont considérés toxiques et cette toxicité est due à la présence d’un

glycoside cyanuré, la sambunigrine, qui libère du cyanure lorsqu’elle se dégrade.

Chez la sous-espèce nord-américaine canadensis, la teneur en sambunigrine est

beaucoup plus variable, voire inexistante chez plusieurs populations étudiées

(Buhrmester et al., 2000).

Les anthocyanes, une sous-classe des flavonoïdes, sont présentes en grande

quantité dans les fruits du sureau. Ces composés, responsables de la coloration

des fruits, procurent la teinte noirâtre des petites baies. Ces pigments jouent un

rôle attractif auprès des oiseaux. Chez la sous-espèce canadensis, la forme

prédominante retrouvée, une cyanidine 3-monoglycoside, est acylée. Cet état lui

confère une stabilité à la lumière et à la chaleur supérieure aux anthocyanes

retrouvées chez le sureau noir européen (Inami et al., 1996; Nakatani et al., 1995).

Le pigment extrait de ces petits fruits est donc d’une qualité rare, dû à sa stabilité

et à ses propriétés antioxydantes. Ainsi, le sureau du Canada procure à l’industrie

un colorant alimentaire de couleur rouge-orangé naturel et nutraceutique,

puisqu’en santé humaine les effets bénéfiques antioxydants des anthocyanes ne

sont plus à démontrer (Einbond et al., 2004; Espin et al., 2000).

Page 19: IMPACT D’UNE POLLINISATION ASSISTÉE SUR LA PRODUCTION

9

Développement de la culture du sureau du Canada

En Nouvelle-Écosse et dans l’état de New York, aux États-unis, plusieurs cultivars

ont été sélectionnés entre les années 1960 et 1970, pour la qualité de leurs fruits

et les besoins de la transformation locale de ces derniers (tableau 1). Toutefois,

cet intérêt de recherche pour la domestication du sureau n’a pas duré. Quelques

recommandations sur la régie de culture ont cependant été rédigées suite à ces

travaux (Craig, 1970; Way, 1965).

Tableau 1 : Liste des différents cultivars de Sambucus nigra ssp. canadensis sélectionnés en Nouvelle-Écosse et dans l’état de New York.

Cultivars Origine Caractéristiques des cultivars

Adams 1926, NY Plant vigoureux et productif; maturation tardive des fruits.

Johns 1954, NÉ Plant vigoureux et productif, très haut; grosses panicules par rapport aux autres cultivars; bonne valeur ornementale; médiocre en composés solubles.

Kent 1957, NÉ Plant de vigueur moyenne; panicules de taille moyenne; maturation hâtive des fruits.

Nova 1957, NÉ Plant de vigueur et de productivité moyenne; panicules et baies de taille moyenne.

Scotia 1957, NÉ Plant de vigueur et de productivité moyenne; panicules et baies de taille moyenne; fruits ayant une teneur élevée en extraits solubles et en acides.

Victoria 1957, NÉ Plant de vigueur moyenne; panicules et fruits de taille moyenne.

York

1964, NY Plant vigoureux et productif; maturation tardive; panicules et fruits de bonne taille.

NY= développé dans l’état de New York. NÉ= développé en Nouvelle-Écosse. (Tiré de Way, 1965)

Bien que la sélection de plusieurs de ces cultivars se soit faite au Canada, c’est

aux États-Unis que la production à grande échelle des cultivars canadiens a été

réalisée. Les rendements attendus pour une plantation mature se situent autour de

7,5 à 9,5 tonnes/ha selon Way (1965) ou entre 8 à 15 tonnes/ha selon Skirvin et

Otterbacher (1977). La sous-espèce canadensis est moins productive que la sous-

Page 20: IMPACT D’UNE POLLINISATION ASSISTÉE SUR LA PRODUCTION

10

espèce nigra qui peut produire jusqu’à 22 tonnes/ha (Sansdrap, 2000). Il est

difficile de comparer les rendements de ces deux cultures; la sous-espèce

européenne peut atteindre 5 à 6 mètres de hauteur et croît dans un climat différent

(Blanchet, 1996).

Pour les deux sous-espèces, la récolte manuelle consiste à casser la panicule de

fruits à la base au moment où les fruits sont bien mûrs. Ces derniers doivent être

réfrigérés rapidement afin de préserver leur forme et leur valeur nutritive. Bien que

les marchés européens aient davantage développé la production de ces petits

fruits, les mêmes potentiels d’exploitation existent au Canada : substances

additives naturelles, transformation alimentaire des fruits et des fleurs,

pharmacopée et homéopathie.

MÉCANISMES DE LA POLLINISATION

Développement floral Chacune des nombreuses fleurs des inflorescences du sureau a le potentiel de

former un fruit, le développement floral initiant le processus de production fruitière

(Heller et al., 2000). C’est suite à la formation du primordium des pièces florales

que le bouton floral constitué s’épanouit. Simultanément, la maturation des

organes femelles a lieu; l’ovaire est alors réceptif. Cet épanouissement,

accompagné de la déhiscence des anthères, constitue la floraison ou anthèse

(figure 4) (Lord, 2003). À ce stade, la rupture des parois des sacs polliniques,

situés dans l’anthère, libère les grains de pollen (Scott et al., 2004). Dès lors, si un

grain de pollen rencontre le stigmate d’un pistil et s’il y a compatibilité génétique, le

processus de fécondation peut s’initier (Heslop-Harrison, 2000; Nettancourt, 2001).

Page 21: IMPACT D’UNE POLLINISATION ASSISTÉE SUR LA PRODUCTION

11

Figure 4 : Fleurs de Sambucus nigra ssp. nigra. a) Bouton floral b) Anthèse.

Tirée et adaptée de Bolli,1994

Pollinisation et fécondation La pollinisation, se définissant comme le transfert des grains de pollen de l’anthère

au stigmate, est probablement le processus le plus critique dans la série d’étapes

menant à la production fruitière (Way, 1978). C’est seulement suite à une bonne

dispersion des grains de pollen fertiles que les processus de fécondation, de

nouaison et de maturation des fruits auront lieu.

Au moment du transfert du grain de pollen sur le stigmate, celui-ci s’hydrate et

germe en produisant un tube pollinique. Ce dernier croît à travers le style pour

atteindre le sac embryonnaire (figure 5) (Taylor, 1997).

Chez les angiospermes, le grain de pollen contient une cellule végétative, qui

contrôle la croissance du tube pollinique, et une cellule reproductive, qui se divise

en deux cellules spermatiques ou spermatides (McCormick, 2004). Lorsque ces

deux cellules sont libérées dans le sac embryonnaire, le noyau de l’une d’elles

féconde l’oosphère et donne le zygote et le noyau de la seconde fusionne avec les

deux noyaux polaires pour former la cellule-mère de l’albumen (figure 5) (Yadegari

et Drews, 2004). Ce processus se nomme la double fécondation et induit la

transformation de l’ovule en graine. Pendant ce temps, les tissus de l’ovaire se

développent en péricarpe, formant avec la ou les graines le fruit (Weterings et

Russell, 2004).

Page 22: IMPACT D’UNE POLLINISATION ASSISTÉE SUR LA PRODUCTION

12

Figure 5 : La double fécondation. (1) Croissance du tube pollinique. (2) Extrémité

du tube pollinique. (3) Fécondation de l’ovule. Tirée et adaptée de Heller et al., 2000

Causes de l’échec à la pollinisation

Bien avant que le mécanisme de la double fécondation ne s’enclenche, plusieurs

facteurs peuvent entraîner une faible mise à fruit. Les principales hypothèses

émises pour expliquer l’échec de la pollinisation portent sur l’insuffisance du

nombre de grains de pollen, leur source et leur qualité ainsi que la disponibilité des

ressources nécessaires pour convertir chaque fleur pollinisée en fruit (Ayre et

Whelan, 1989; Wilcock et Neiland, 2002). La réussite de la fécondation n’est

possible que grâce à une pollinisation efficace.

Un apport insuffisant de pollen conduit souvent à une pollinisation non

fonctionnelle (Wilcock et Neiland, 2002). Une mauvaise dispersion des grains de

pollen peut être causée par la prédation (certains insectes se nourrissent de grains

de pollen), par la perte du pollen dans l’environnement ou par le fait qu’il reste tout

simplement attaché à l’anthère. D’autres facteurs, indépendants de la plante,

Page 23: IMPACT D’UNE POLLINISATION ASSISTÉE SUR LA PRODUCTION

13

peuvent aussi nuire à la bonne dispersion des grains de pollen. Par exemple, chez

les espèces pollinisées par les insectes, le manque de pollinisateurs dû à la

destruction de leurs habitats ou aux conditions environnementales défavorables

empêche une dispersion adéquate du pollen. Chez les espèces anémophiles

(pollen dispersé par le vent), l’échec de la dispersion est habituellement causé par

une faible densité de la population ou par des conditions climatiques défavorables.

Chez le genre Sambucus, l’importance du vent et des insectes au niveau de la

pollinisation est mal définie. Selon Way (1978), la très petite dimension des grains

de pollen (13-18 µm) leur confère un grand potentiel de dispersion par le vent.

D’ailleurs, dans les analyses de pollen pour les alertes aux allergies se retrouve du

pollen de S. nigra ssp. nigra, ce qui confirmerait son potentiel anémophile (Van

Vliet et al., 2002). Par contre, d’autres références indiquent qu’un si petit grain de

pollen risque peu d’être dispersé par le vent (Whitehead, 1969), mais le serait

davantage par l’entomofaune (Bolli, 1994; Frost, 1979). Plusieurs espèces

d’insectes ont déjà été remarquées sur les inflorescences, spécialement des

diptères et des coléoptères, favorisant ainsi une pollinisation de type

«désordonnée» (traduction libre de « soil and mess »). Ces diverses sources

d’information laissent supposer que chez le genre Sambucus, la pollinisation se fait

à la fois par les insectes et le vent.

Par ailleurs, une pollinisation, si elle est faible, n’est pas une garantie à la

fécondation puisque la germination suivie de la croissance du tube pollinique dans

le style est un phénomène souvent dépendant de la densité en grains de pollen sur

le stigmate (Lord et Russell, 2002).

Certains pollens peuvent également être stériles, diminuant ainsi les chances de

fécondation. La qualité des grains de pollen et leur source seront discutés dans la

section suivante. La figure 6 illustre globalement les phénomènes d’échec à la

pollinisation.

Page 24: IMPACT D’UNE POLLINISATION ASSISTÉE SUR LA PRODUCTION

14

Figure 6 : Pourquoi l’échec à la pollinisation? (1) Échec pré-dispersion dû à la prédation ou au non détachement de l’anthère. (2) Échec à la dispersion dû au manque de pollinisateurs, à la faible densité des populations ou aux conditions climatiques défavorables. (3) Échec causé par la perte de viabilité des grains de pollen compatibles; seuls les grains de pollen hétérospécifiques atteignent le stigmate. (4) Échec dû à la trop faible quantité de grains de pollen atteignant le stigmate. (5) Échec dû à la qualité des grains de pollen. (6) Malgré la présence de grains de pollen compatibles, l’échec peut être causé par la présence de grains de pollen hétérospécifiques.

Tirée et adaptée de Wilcock et Neiland, 2002

Page 25: IMPACT D’UNE POLLINISATION ASSISTÉE SUR LA PRODUCTION

15

Les conditions climatiques ont également un impact majeur sur le développement

du tube pollinique, donc sur la fécondation. Des expériences conduites sur des

pêchers et des cerisiers ont démontré que des températures supérieures à 25 °C

réduisaient le taux de germination des grains de pollen et inhibaient le

développement du sac embryonnaire. À basse température (inférieure à 18 °C),

les tubes polliniques se développent lentement tandis qu’à température élevée ils

croissent rapidement mais n’atteignent pas l’ovaire (Hedhly et al., 2004; Kozai et

al., 2004). Il a également été démontré pour les abricotiers que des températures

élevées durant la pré-floraison induisaient un manque de synchronisation entre

l’anthèse et le développement du pistil, réduisant ainsi la capacité de mise à fruit

(Rodrigo et Herrero, 2002). De plus, la pluie ou un taux élevé d’humidité peuvent

affecter la pollinisation en favorisant les maladies florales ou en bloquant

l’ouverture des anthères.

Incompatibilités On retrouve des phénomènes d’incompatibilité de nature génétique,

morphologique, spatiale et temporelle.

Incompatibilités génétiques

Lorsque les conditions externes sont favorables et que l’apport en grains de pollen

viables est suffisant, la fécondation de l’ovule peut tout de même échouer suite aux

phénomènes d’autogamie ou de geitonogamie, ceux-ci entraînant parfois des

relations d’incompatibilité. La figure 7 illustre ces types de fécondation.

L’autogamie se définit comme la fécondation d’un ovaire par le pollen d’une même

fleur. La geitonogamie signifie la fécondation d’un ovaire par le pollen de fleurs

différentes, mais appartenant à un même individu. Lorsque l’ovule et le pollen

proviennent d’individus différents, la relation est nommée xénogamie. L’auto-

incompatibilité est un phénomène évolutif répandu qui favorise les échanges

génétiques en réduisant les cas d’autogamie (Nettancourt, 2001).

Page 26: IMPACT D’UNE POLLINISATION ASSISTÉE SUR LA PRODUCTION

16

Autogamie GeitonogamieGeitonogamie

XénogamieAutogamie GeitonogamieGeitonogamie

Xénogamie

Figure 7 : Les types de fécondation : autogamie, geitonogamie et

xénogamie.

Tirée et adaptée de Shivanna, 2003

Figure 8 : Illustration du phénomène d’auto-incompatibilité.

Tirée et adaptée de Nettancourt, 2001

Autopollinisation L’autopollen est rejeté

Pollinisation croisée Le pollen exogène est accepté

Page 27: IMPACT D’UNE POLLINISATION ASSISTÉE SUR LA PRODUCTION

17

L’auto-incompatibilité, partielle ou complète, est véhiculée par le gamète mâle ou

le gamète femelle au niveau d’un ou plusieurs gènes de stérilité S et provoque

l’absence de développement du grain de pollen ou l’empêche de féconder l’ovule

(Heller et al., 2000; Sanchez et al., 2004). La figure 8 illustre le résultat

physiologique de l’incompatibilité.

Incompatibilité génétique et pollinisation croisée

Plusieurs variétés fruitières cultivées nécessitent une pollinisation croisée, c’est-à-

dire un transfert de pollen de fleurs d’un cultivar aux fleurs d’un autre car les fleurs

d’un même cultivar sont souvent auto-incompatibles ou partiellement auto-fertiles

(Burd, 1994; Kozma et al., 2003). Pour favoriser la xénogamie et obtenir un taux

acceptable de mise à fruit, l’association de cultivars dans les plantations fruitières

est souvent recommandée. Kozma et al. (2003) rapportent que le sureau noir

(européen) produit un rendement acceptable par autogamie, mais qu’une

augmentation substantielle en quantité et qualité de fruits peut être obtenue avec

la xénogamie. Tel est le cas de plusieurs autres espèces à petits fruits comme le

framboisier, l’aronier, le groseillier. D’autres espèces produisent très peu suite à

l’autopollinisation; c’est notamment le cas du bleuetier qui n’atteint qu’environ 6 %

de mise à fruit par autogamie (Savoie et de Oliveira, 1995). Dans un même ordre

d’idées, certaines recommandations émises par Way (1965) et Craig (1970)

suggèrent l’intégration de différents cultivars de sureau du Canada dans les

plantations pour assurer une pollinisation croisée, sans toutefois supporter ce

concept par une étude scientifique.

État des connaissances sur l’auto-incompatibilité chez le sureau

Plusieurs auteurs avancent que l’incompatibilité chez le S. nigra ssp. canadensis

serait de nature génétique. Chez le S. nigra ssp. nigra cultivé en Europe, des

essais de pollinisation assistée ont démontré une incompatibilité partielle : 52 % de

la mise à fruit était obtenue avec une pollinisation croisée comparativement à 18 %

Page 28: IMPACT D’UNE POLLINISATION ASSISTÉE SUR LA PRODUCTION

18

pour une autopollinisation (Bieniasz et Lech, 2002). D’autres études ont démontré

que le succès de la mise à fruit était atteint autant par autogamie que par

xénogamie ou que l’autogamie ne fonctionnait pas dans tous les cas (Bolli, 1994).

Bref, les résultats ne font pas l’unanimité. Dans la plupart des expériences de

pollinisation assistée, il est mentionné que le succès de la fécondation dépend en

grande partie des conditions climatiques rencontrées au cours de la période

intense de floraison (Stephenson, 1981).

Le sureau possède des grains de pollen trinucléés. Chez les espèces possédant

ce type de pollen, le phénomène d’incompatibilité se situe généralement au niveau

du stigmate. De plus, il présente une viabilité plus courte après sa maturation que

les grains de pollen de type binucléé. Cependant, une étude sur le pollen de la

sous-espèce nigra a démontré une activité métabolique qui ressemble à la fois aux

formes trinucléées et binucléées des grains de pollen (Charzynska et

Lewandowska, 1990). D’ailleurs, la germination des grains de pollen de Sambucus

s’effectue davantage sous des conditions de culture associées aux grains de

pollen binucléés (Muccifora et al., 2003).

Incompatibilités morphologique, spatiale et temporelle Il existe également, dans le règne végétal, d’autres phénomènes qui réduisent

l’autogamie. De fait, les incompatibilités peuvent être de nature morphologique,

spatiale et temporelle.

Par exemple, dans la Flore laurentienne (Marie-Victorin, 1964), il est mentionné

dans la description botanique du S. nigra ssp. canadensis que la morphologie

florale limite l’auto-fécondation, les étamines étant très divergentes. Les larges

inflorescences favorisent néanmoins la geitonogamie. Chez cette sous-espèce, on

peut également retrouver une certaine incompatibilité temporelle puisque le

stigmate est réceptif avant la maturité des anthères (protogynie). De plus, à

l’intérieur même d’une inflorescence, la maturation des fleurs n’est pas tout à fait

synchronisée (Bolli, 1994).

Page 29: IMPACT D’UNE POLLINISATION ASSISTÉE SUR LA PRODUCTION

19

L’ensemble de ces observations indique clairement que la fécondation efficace des

fleurs dépend de plusieurs facteurs et que la pollinisation du sureau est un élément

clé dans la production de fruits.

CULTURE IN VITRO DES GRAINS DE POLLEN Afin de s’assurer de la fertilité des grains de pollen utilisés lors d’expériences de

pollinisation assistée, il est primordial de déterminer les conditions de germination

in vitro du pollen. Chaque espèce requiert un milieu de culture particulier pour la

germination de ses grains de pollen et plusieurs facteurs sont impliqués dans sa

réussite. Selon Shivanna (2003), l’hydratation complète, la source de sucre et la

présence du bore et du calcium dans le milieu sont nécessaires à l’obtention d’une

germination optimale et à la croissance du tube pollinique.

La concentration en sucre assure une pression osmotique dans le milieu et peut

également servir de substrat au métabolisme des grains de pollen. En général, les

grains de pollen binucléés nécessitent une concentration de 10 à 15 % de sucre

comparativement à une concentration égale ou supérieure à 20 % pour les grains

de pollen trinucléés (Shivanna et al., 1991). Ces derniers ont un métabolisme

beaucoup plus élevé dès l’hydratation car leurs mitochondries sont pleinement

formées à ce stade, comparativement aux grains de pollen de type binucléé. Des

expériences de germination in vitro des grains de pollen de S. nigra ssp. nigra

suggèrent une concentration optimale de 15 % de saccharose (Muccifora et al.,

2003).

Le rôle du bore dans le processus est encore mal défini, mais il serait essentiel au

bon fonctionnement de la membrane et au métabolisme des sucres. Donc, le bore

serait impliqué dans la synthèse de la paroi et de la membrane du tube pollinique

(Wang et al., 2003).

Page 30: IMPACT D’UNE POLLINISATION ASSISTÉE SUR LA PRODUCTION

20

Le calcium joue également un rôle essentiel dans l’élongation du tube pollinique en

créant un gradient de concentration vers l’apex. Cet élément est aussi impliqué au

niveau de la perméabilité de la membrane et de la rigidité du tube pollinique

(Taylor, 1997). Il a été observé que la présence d’un grand nombre de grains de

pollen permettait un taux de germination plus élevé dû au relâchement d’une

substance soluble appelée « facteur de croissance pollinique », qui est en fait un

ion calcium (Brewbaker et Kwack, 1963). Parfois, les pollens de certaines espèces

n’ont pas besoin de calcium additionnel car ils en contiennent suffisamment.

Le pH du milieu de culture est plus ou moins critique à la germination et serait

acceptable entre 4 et 9 (Shivanna, 2003). Le pH du milieu généralement utilisé,

celui de Brewbaker et Kwack (1963), est de l’ordre de 5,6. Paoletti et Bellani

(1990) ont observé dans leur étude sur S. nigra ssp. nigra que la germination des

grains de pollen diminuait drastiquement lorsque le pH était inférieur à 5,0.

La durée d’incubation des grains de pollen varie d’une espèce à l’autre, mais les

résultats obtenus par Muccifora et al. (2003) montrent une meilleure germination

après 22 h.

La plupart des grains de pollen germent aussi bien en présence qu’en absence de

lumière. À partir de toutes ces connaissances, il sera possible d’optimiser un milieu

de culture du pollen pour la sous-espèce canadensis.

Page 31: IMPACT D’UNE POLLINISATION ASSISTÉE SUR LA PRODUCTION

HYPOTHÈSES ET OBJECTIFS DE RECHERCHE Les besoins sans cesse croissants de l’industrie des colorants pour l’obtention de

fruits de qualité justifient aujourd’hui des recherches sur la pollinisation, une étape

primordiale de la fructification du sureau du Canada. À l’état sauvage, cette plante

indigène produit des rendements très variables. Puisque le milieu horticole désire

domestiquer et cultiver le sureau, il est impératif d’améliorer notre compréhension

de la biologie de la reproduction du S. nigra ssp. canadensis en étudiant les

limitations de la mise à fruit de cette sous-espèce.

Comme il est fréquent de retrouver chez les espèces fruitières des limitations de la

fructification dues, entre autres, aux aspects quantitatifs et qualitatifs de la

pollinisation, les hypothèses de recherche émises sont :

« Un apport supplémentaire en pollen indigène augmente et stabilise la mise à fruit

chez S. nigra ssp. canadensis; de plus, la source de pollen peut affecter la mise à

fruit des plants indigènes ainsi que des cultivars. »

Fréquemment utilisée pour étudier ces aspects, la technique de pollinisation

assistée permet de vérifier ces hypothèses. Pour ce faire, trois objectifs ont été

fixés :

1. Déterminer les meilleures conditions de pollinisation propres à la culture du

sureau du Canada par l’étude de quelques facteurs morphologiques et

physiologiques de la sous-espèce canadensis;

2. Étudier l’effet d’un apport supplémentaire de pollen sur la mise à fruit;

3. Comparer l’impact de la pollinisation croisée et de l’autopollinisation.

Page 32: IMPACT D’UNE POLLINISATION ASSISTÉE SUR LA PRODUCTION

22

1 CHAPITRE 1 DÉVOLOPPEMENT DES CONNAISSANCES SUR LA FLORAISON ET LA VIABILITÉ DU POLLEN

1.1 INTRODUCTION En Amérique du nord, le sureau a surtout été exploité pour sa valeur écologique. Il

est donc possible de trouver quelques informations relatives à sa croissance.

Cependant, peu d’informations concernant la floraison et la production fruitière de

cette espèce sont disponibles. Afin d’orienter et de planifier des essais de

pollinisation assistée, il est nécessaire d’acquérir une meilleure compréhension de

la phénologie de la plante, et ce, du débourrement du plant à la maturation des

fruits. Une connaissance précise du processus de floraison des plants indigènes

ainsi que des différents cultivars est essentielle afin de synchroniser les

applications de pollen lors des pollinisations.

La description botanique effectuée par Marie-Victorin (1964) mentionne que les

fleurs du sureau du Canada possèdent des étamines très divergentes. Or, ce

phénomène peut potentiellement influencer le type de pollinisation retrouvé chez le

sureau du Canada (Sherry et Lord, 2000). Ces observations invitent donc à porter

une attention particulière au développement des fleurs à l’intérieur des

inflorescences, de l’anthèse à la nouaison.

De plus, les études de pollinisation assistée impliquent inévitablement des études

sur la biologie du pollen. Afin de s’assurer de la viabilité des grains de pollen

utilisés, un test de germination in vitro doit être optimisé spécifiquement pour le S.

nigra ssp. canadensis. La viabilité des grains de pollen de certaines espèces

variant dans le temps, il est important de vérifier ce paramètre tout au long de la

période de floraison. Plusieurs approches peuvent être utilisées pour évaluer la

viabilité des grains de pollen. Bien que les tests au tétrazolium et par réaction

fluorochromatique soient régulièrement utilisés, le test de germination demeure le

Page 33: IMPACT D’UNE POLLINISATION ASSISTÉE SUR LA PRODUCTION

23

moyen le plus fiable pour vérifier la viabilité des grains de pollen (Shivanna et al.,

1991; Stone et al., 1995). Ce test, plus direct et fiable, permet de vérifier la

capacité des grains de pollen à former un tube pollinique (Heller et al., 2000;

Heslop-Harrison et al., 1984).

1.2 HYPOTHÈSES ET OBJECTIFS

Ce premier volet expérimental découle de l’hypothèse générale qui stipule que la

phénologie et la biologie de la reproduction du sureau du Canada sont uniques à

cette sous-espèce tout en démontrant certaines particularités selon les cultivars.

Les observations faites sur des plants cultivés au champ ainsi que les essais de

germination des grains de pollen in vitro sont des étapes essentielles et préalables

aux expériences de pollinisation assistée. La première des étapes étant de

déterminer les conditions de pollinisation propres à la culture du sureau du

Canada, les travaux ont été orientés selon les sous-objectifs suivants :

• Caractériser la période de floraison du sureau du Canada indigène et de cinq

de ses cultivars;

• Observer la morphologie des pièces florales de plants indigènes et de

cultivars;

• Déterminer les conditions de mise en culture des grains de pollen du sureau du

Canada.

1.3 MATÉRIEL ET MÉTHODES

1.3.1 Matériel végétal et sites expérimentaux Pour répondre à ces trois sous-objectifs, de nombreux essais et observations ont

été réalisés sur des lots de végétaux de sources variées, et ce, dans différents

Page 34: IMPACT D’UNE POLLINISATION ASSISTÉE SUR LA PRODUCTION

24

sites ainsi qu’en serre. Tous les lots utilisés dans le cadre de ce travail sont décrits

au tableau 2.

Deux des trois sites expérimentaux, Beauharnois et Lacolle, sont constitués de

jeunes plants indigènes propagés par bouturage à la pépinière Aiglon (Plessisville,

Québec). Ces deux plantations appartiennent à des producteurs qui ont collaboré

aux travaux de recherche. Le troisième site expérimental est situé à l’Acadie. Cette

ferme expérimentale d’AAC possède une plantation mixte de plants indigènes,

provenant également de la pépinière Aiglon, et de plants des cultivars Kent, Nova,

Scotia, Victoria et York, provenant de la pépinière Corn Hill, au Nouveau-

Brunswick.

Ces trois plantations sont situées dans la région de la Montérégie (Québec), à

l’intérieur de la zone climatique canadienne 5a. Les coordonnées sphériques du

site de Lacolle sont 45°03’N, 73°22’O. La plantation comprend 720 plants mis en

terre au printemps 2003 et la régie est de type biologique. Aucun intrant n’a été

appliqué sur cette parcelle. Les entre-rangs sont recouverts de trèfle, semé au

moment de la plantation du sureau. On y retrouve un sol de type loam sablonneux.

La plantation de Beauharnois, située aux coordonnées 45°17’N, 73°50’O, est régie

de façon conventionnelle et comprend 1200 plants mis en terre à l’automne 2002.

Les plants ont reçu une fertilisation en azote et en potassium apportant 152 g de N

(27,5-0-0) et 69 g de K2O (0-0-60) par plant, annuellement. On retrouve sur ce site

un sol également de type loam sablonneux.

La plantation de l’Acadie, située aux coordonnées 45°19’N, 73°21’O, a été réalisée

au printemps 2003, sur un sol de type loam argileux. Elle comprend 40 plants

indigènes et 40 plants de chacun des cultivars, Kent, Nova, Scotia, Victoria et

York.

Des serres, distribuées sur deux sites expérimentaux, ont également permis de

réaliser des essais au cours de l’hiver 2005 et du printemps 2006. Les diverses

sources des plants indigènes et des cultivars sont décrites au tableau 2. Les serres

Page 35: IMPACT D’UNE POLLINISATION ASSISTÉE SUR LA PRODUCTION

25

du CRDH sont de type solaire, vitré et cathédral, de 2,47 m de largeur et de 8,46 m

de longueur. La photopériode sous laquelle les plants ont poussé était de 16

heures et des lampes au sodium haute pression étaient utilisées pour suppléer, au

besoin, à l’ensoleillement naturel. La température, bien qu’ajustée à 18 °C, variait

entre le jour et la nuit. Vingt-cinq plants indigènes, 8 plants du cultivar Kent et 4

plants du cultivar York étaient disposés dans ces serres.

La serre de l’Acadie était de type serre-tunnel en plastique et mesurait 10,5 m de

largeur, 22 m de longueur et 4 m de hauteur. La luminosité et la température n’y

étaient pas contrôlées. Dans cette serre, 15 plants indigènes et 20 plants de

chacun des cultivars Kent, Scotia et York ont été disposés. Des enregistreurs de

données de marque Hobo® (traités à l’aide du logiciel BoxCar® Pro 4.0) ont été

disposés dans les deux types de serre pour recueillir les données de températures.

Les pratiques culturales et sanitaires seront détaillées dans le cadre des

expériences du chapitre 3.

Page 36: IMPACT D’UNE POLLINISATION ASSISTÉE SUR LA PRODUCTION

26

Tableau 2 : Description des lots de matériel végétal utilisés pour l’ensemble des expériences.

Pl. = plants

1.3.2 Caractérisation de la période de floraison

1.3.2.1 Matériel végétal Les observations sur le développement des plants et sur la période de floraison ont

été effectuées en 2004 et 2005 sur les sites expérimentaux de Lacolle, de

Beauharnois et de l’Acadie. Les données ont été recueillies sur l’ensemble des

plants indigènes pour les sites de Lacolle et de Beauharnois ainsi que sur les

cultivars Kent, Nova, Scotia, Victoria et York pour le site de l’Acadie.

Site expérimental Matériel végétal

Source d’approvisionnement Plantation

Plantation de Lacolle Pl. indigènes Pépinière Aiglon Printemps 2003

Plantation de Beauharnois

Pl. indigènes Pépinière Aiglon Automne 2002

Pl. indigènes Pépinière Aiglon Plantation de

l’Acadie

Cultivars : Kent, Nova,

Scotia, Victoria, York

Corn Hill Nursery Printemps 2003

Serre du CRDH Pl. indigènes Pépinière Arbotech 2002

en pot de 20 l

Serre du CRDH Serre de l’Acadie

Pl. indigènes

Serre du CRDH

Serre de l’Acadie

Cultivars : Kent, Nova,

Scotia, Victoria, York

Ferme de l’Acadie 2003 en pot de 6 l

Serre de l’Acadie Cultivars : Kent, Scotia,

York Ferme de Frelishburg 2002 en pot de 10 l

Page 37: IMPACT D’UNE POLLINISATION ASSISTÉE SUR LA PRODUCTION

27

1.3.2.2 Prise de données Le nombre total d’inflorescences et le nombre d’inflorescences ouvertes, c’est-à-

dire possédant 50 % et plus de fleurs ouvertes, étaient dénombrées tous les deux

jours entre la mi-juin et la mi-juillet.

Le nombre de degrés-jours cumulés a été extrait du logiciel CIPRA (Centre

informatique de prévision des ravageurs en agriculture). Ce logiciel permet de

visualiser les prévisions d'attaques d'insectes ou de maladies en fonction du

développement phénologique de certaines cultures (phénologie). Les températures

standard de base, minimale (5 °C) et maximale (40 °C), ont été utilisées comme

zone de croissance.

1.3.3 Observations des différences morphologiques des pièces florales

Matériel végétal et prise de données

Les observations recueillies pour étudier le développement des boutons floraux

jusqu’à l’anthèse ont été réalisées sur des plants indigènes localisés sur le site de

l’Acadie le 12 juillet 2004, soit en fin de floraison.

Les inflorescences fraîchement coupées de dix plants indigènes ont été

photographiées numériquement sur une table préparée à cet effet en laboratoire.

Une inflorescence étant formée d’un grand nombre de fleurs, il était possible, à

une date donnée, d’observer des fleurs à tous les stades de l’ouverture florale.

Dans le même site, une autre série de photos numériques a été effectuée le 14

juillet 2005 pour cibler les détails de la fleur, cette fois, à partir de plants indigènes

et de plants des cultivars Kent, Scotia, Victoria et York. Ces inflorescences ont été

prélevées sur cinq plants par cultivar.

Page 38: IMPACT D’UNE POLLINISATION ASSISTÉE SUR LA PRODUCTION

28

Les données recueillies lors de ces observations de type exploratoire ne se

prêtaient pas aux traitements par analyses statistiques.

1.3.4 Détermination de la technique de germination des grains de pollen in vitro

1.3.4.1 Détermination des paramètres de germination des grains de pollen

Afin de déterminer les conditions optimales d’incubation, quatre volets ont été

explorés :

1. Type de contenant;

2. Effet de l’agitation du milieu de culture;

3. Effet de la lumière;

4. Composition du milieu de culture.

Le milieu développé par Muccifora et al. (2003) pour le sureau noir a été utilisé

pour les trois premiers essais.

Pour le premier volet, deux types de contenant ont été comparés : des plats de

Pétri de 30 mm, scellés de « Parafilm » contenant 2 ml de milieu de culture, et des

microtubes de type Ependorf de 1,5 ml contenant 1 ml de milieu de culture. Les

microtubes étaient agités avec un agitateur vertical de marque Reliable Scientific®

à la vitesse de 30 balancements par minute. Pour les plats de Pétri, l’agitation

horizontale, plus adéquate, a été faite à 90 rpm par un appareil de marque

Labline®. Les grains de pollen ont été ajouté au milieu de culture et ont été

incubés aux conditions ambiantes de lumière et de température (22-24 °C). Deux

échantillons de grains de pollen ont été mis en culture à 16 reprises dans chacun

des types de contenant.

Pour le volet agitation du milieu de culture, une partie des microtubes étaient

agités avec un agitateur vertical, alors que les microtubes non agités étaient

Page 39: IMPACT D’UNE POLLINISATION ASSISTÉE SUR LA PRODUCTION

29

conservés verticalement à proximité, sous les mêmes conditions de luminosité et

de température. Le pollen était ajouté à 1 ml de milieu de culture. Deux

échantillons de grains de pollen par traitement d’agitation ont été mis en culture à 9

reprises.

Pour le volet luminosité, les tubes soumis à l’obscurité étaient enveloppés dans du

papier d’aluminium alors que les autres étaient laissés à la lumière ambiante du

laboratoire durant tout le temps de l’incubation. Dans cet essai, l’incubation se

faisait en microtubes, avec agitation. Vingt et une répétitions de deux échantillons

par traitement ont été réalisées.

Pour le quatrième volet, quatre milieux de culture liquides ont été comparés :

M1. Le milieu Muccifora et al. (2003) (M1) a été retenu puisqu’il avait

été optimisé pour étudier la viabilité des grains de pollen de la

sous-espèce nigra. Ce milieu contient 15 % de saccharose,

100 g/l d’acide borique, 300 mg/l de nitrate de calcium, 200 mg/l

de sulfate de magnésium et 100 mg/l de nitrate de potassium, le

tout étant stabilisé à un pH de 5,6;

M2. Une variante du milieu Muccifora et al. (2003) a été testée pour

vérifier l’effet de la concentration en saccharose (M2). La

concentration de saccharose a été fixée à 30 %, les autres

constituants et leur concentration étant les mêmes que ceux du

milieu M1, et ce, aux mêmes concentrations et pH;

M3. Le troisième milieu de culture a souvent été utilisé comme

référence, soit celui de Brewbaker et Kwack (1963). Ce milieu a

déjà été modifié (M3) puisque Shivanna et Rangaswamy (1992)

mentionnent que certains grains de pollen germent bien dans un

milieu très simple ne contenant aucun sel. Le milieu M3 ne

contenait donc que 15 % de saccharose et 100 mg/l d’acide

borique et son pH était ajusté à 5,6;

Page 40: IMPACT D’UNE POLLINISATION ASSISTÉE SUR LA PRODUCTION

30 M4. Le milieu de Roberts et al. (1983) (M4) a été testé car il contient

un tampon organique (Tris) qui pourrait stabiliser la solution. Les

milieux M1 à M3 ont une durée de vie courte, environ une

semaine, car leur pH peut varier. Le milieu M4 est constitué de

20 % de saccharose, de 100 mg/l d’acide borique, de 400 mg/l

de nitrate de calcium, de 362 mg/l de chlorure de calcium, de 100

mg/l de nitrate de potassium et de 130 mg/l de Tris. Son pH a été

ajusté à 7,8.

L’étude de l’effet des milieux de culture sur le taux de germination des grains de

pollen a été réalisée avec un nombre variable de répétitions selon les milieux.

Pour le milieu M4, la germination des grains de pollen a été comparée aux autres

milieux à 2 reprises seulement. Le milieu M3 a été comparé à 5 reprises, le milieu

M2, à 6 reprises tandis que le milieu M1 a été observé à 7 reprises.

Pour ces quatre volets, les différences entre les techniques d’incubation ont été

analysées par un test « t » de Student, avec un seuil de signification de 0,05. Les

statistiques ont été faites avec le logiciel JMP de SAS Institute, version 5.0.1.

1.3.4.2 Récolte et conservation des grains de pollen

Cinq traitements de récolte et de conservation du pollen ont été comparés. Le

premier traitement (T1) consistait à mettre en culture du pollen frais, prélevé en

secouant plusieurs inflorescences au-dessus d’un contenant de plastique clair de

250 ml. Les trois traitements suivants consistaient à utiliser du pollen provenant

d’inflorescences secouées et conservées sous trois conditions avant la mise en

culture : T2, le pollen était laissé sous les conditions ambiantes de température et

de luminosité pour 24 heures, T3, le pollen était conservé à 4 ˚C dans un

réfrigérateur pendant 3 jours et T4, le pollen était gardé à 4 ˚C dans un

réfrigérateur pendant 5 jours. Pour le dernier traitement (T5), la technique de

récolte était différente. Le pollen provenait d’inflorescences coupées et laissées

dans les mêmes contenants de plastique, aux conditions ambiantes, pour deux

Page 41: IMPACT D’UNE POLLINISATION ASSISTÉE SUR LA PRODUCTION

31

jours. Les essais ont été réalisés en incubant les grains de pollen dans le milieu de

culture M1, dans des microtubes, avec agitation et en présence de lumière.

Aucune analyse statistique n’a été faite pour les traitements de récolte du pollen

compte tenu de l’absence de répétitions. Les résultats sont toutefois comparés par

l’analyse visuelle d’une représentation graphique.

1.3.5 Évaluation du taux de germination des grains de pollen

1.3.5.1 Mise en culture des grains de pollen

Pour tous les tests de germination in vitro effectués, les grains de pollen récoltés

étaient mis en culture dans des conditions aseptiques, bien que sa récolte et son

entreposage n’aient pas été stériles. À l’aide d’une spatule, une quantité

approximative de 1 à 1,5 mg de grains de pollen était ajoutée au milieu de culture.

Ce dernier était agité pour éviter l’agrégation des grains de pollen. La durée de

l’incubation était de 20 heures à 22-23 ˚C et ajustée aux différents paramètres

énumérés dans la section 1.3.4.1.

1.3.5.2 Dénombrement par microscopie

Les grains de pollen ont été observés sur un hémacymètre (SpotliteTM

Hemacymeter Cat. B3175, Hausser Scientific, USA) à l’aide d’un microscope

optique (Leica Microsystems, oculaire 10x et objectif 10x). Le dénombrement se

faisait sur la zone quadrillée de l’hémacymètre où l’on déposait une goutte du

milieu de culture (figure 9). Selon la densité de l’échantillon, un à quatre cadrans

étaient utilisés. Un échantillonnage de 300 grains de pollen a permis d’évaluer, en

pourcentage, la proportion de tubes polliniques développés. Le pourcentage de

germination était déterminé par le ratio de grains de pollen germés sur le nombre

total de grains de pollen dénombrés. Ceux-ci étaient considérés germés lorsque

leur tube pollinique mesurait au moins une fois leur largeur (Shivanna et

Rangaswamy, 1992). L’annexe 2 illustre des grains de pollen de sureau observés

sous microscope optique à divers stades de germination.

Page 42: IMPACT D’UNE POLLINISATION ASSISTÉE SUR LA PRODUCTION

32

Figure 9 : Zone de dénombrement sur l’hémacymètre. La zone encadrée correspond à un cadran.

1.4 RÉSULTATS ET DISCUSSION Dans ce chapitre, les résultats et les discussions ont été présentés simultanément

car il s’agit essentiellement d’observations. Toutefois, certains points

particulièrement intéressants ont été mis en relief.

1.4.1 Caractérisation de la période de floraison Détermination des dates de floraison des plants indigènes sur deux sites expérimentaux de la Montérégie

Deux années d’observations de l’évolution des panicules de plants indigènes ont

permis d’établir que la période de floraison du sureau du Canada se déroule à date

fixe et non pas en fonction du cumul des degrés-jours. En effet, comme l’illustre la

figure 10a, le sommet de la floraison à la plantation de Lacolle était atteint à des

dates similaires en 2004 et 2005, soit le 7 juillet et le 5 juillet respectivement tandis

que le nombre de degrés-jours cumulés était de 415 degrés-jours en 2004 et de

830 degrés en 2005 (figure 10b). Ce constat démontre qu’en 2005

l’épanouissement des inflorescences s’est déroulé après une accumulation de

chaleur plus importante qu’en 2004.

Page 43: IMPACT D’UNE POLLINISATION ASSISTÉE SUR LA PRODUCTION

33

La figure 10a indique également que la période de floraison était davantage

synchronisée en 2004 qu’en 2005. En effet, 62 % des inflorescences étaient

ouvertes au même moment en 2004 comparativement à 37 % en 2005. En

détaillant la période de floraison, il a été observé qu’en 2004 le début de

l’épanouissement des fleurs avait lieu le 25 juin, soit 13 jours avant d'atteindre la

pleine floraison. Par extrapolation de la courbe de 2005, on remarque que le

sommet de la floraison a été atteint autour de 9 jours suivant le début de

l’ouverture des inflorescences. À ce site, la floraison des plants indigènes s’est

déroulée sur près de trois semaines.

05

10152025303540455055606570

25 ju

in

27 ju

in

29 ju

in

1 ju

illet

3 ju

illet

5 ju

illet

7 ju

illet

9 ju

illet

11 ju

illet

13 ju

illet

15 ju

illet

Date

250

300

350

400

450

500

550

600

650

700

750

800

850

900

950

Degrés-jours

Figure 10 : Évolution de la floraison sur le site de Lacolle en 2004 et 2005. A) Ratio

d’inflorescences ouvertes par rapport au nombre d’inflorescences totales en fonction de la date. B) Ratio d’inflorescences ouvertes par rapport au nombre d’inflorescences totales en fonction du cumul des degrés-jours.

A B 2004

2005

Rat

io d

’inflo

resc

ence

s ou

vert

es (%

)

Page 44: IMPACT D’UNE POLLINISATION ASSISTÉE SUR LA PRODUCTION

34

Au site de Beauharnois, la floraison avait atteint son sommet le 30 juin en 2004 et

le 28 juin en 2005. Comme l’illustre la figure 11a, 51 et 46 % des inflorescences

étaient ouvertes à la pleine floraison pour les années 2004 et 2005

respectivement. La courbe de floraison sur cette plantation est davantage fidèle à

la date qu’au cumul thermique, comme remarqué au site de Lacolle. En effet, la

pleine floraison correspond à 335 degrés-jours en 2004 comparativement à 717

degrés-jours en 2005.

0

5

10

15

20

25

30

35

40

45

50

55

22 ju

in

24 ju

in

26 ju

in

28 ju

in

30 ju

in

2 ju

illet

4 ju

illet

6 ju

illet

8 ju

illet

10 ju

illet

12 ju

illet

14 ju

illet

Date

0

5

0

5

0

5

0

5

0

5

0

5

200

250

300

350

400

450

500

550

600

650

700

750

800

850

900

950

1000

Degrés-jours

2004

2005

Figure 11 : Évolution de la floraison sur le site de Beauharnois en 2004 et 2005. A)

Ratio d’inflorescences ouvertes par rapport au nombre d’inflorescences totales en fonction de la date. B) Ratio d’inflorescences ouvertes par rapport au nombre d’inflorescences totales en fonction du cumul des degrés-jours.

On constate donc, sur ces deux sites, que la floraison de cette espèce répond

davantage à la photopériode qu’au cumul thermique. Ce type de réponse

s’observe sur plusieurs espèces herbacées (Levy et Dean, 1998) et certaines

espèces ligneuses à floraison estivale. Par contre, la floraison hâtive de

A B

Rat

io d

’inflo

resc

ence

s ou

vert

es (%

)

Page 45: IMPACT D’UNE POLLINISATION ASSISTÉE SUR LA PRODUCTION

35

nombreuses espèces ligneuses répond davantage à la température (Rathcke et

Lacey 1985). À l’instar du Vigna subterranea (L.) Verdc., la période de floraison de

plusieurs espèces est dépendante à la fois de la température et de la longueur des

jours (Craufurd et Linnemann, 1994). Il serait intéressant de poursuivre les

observations pour confirmer les résultats de cette étude sur un plus grand nombre

d’années.

La comparaison de la période de floraison des plants indigènes d’un site

expérimental à l’autre démontre que celle-ci est plus hâtive d’environ une semaine

au site de Beauharnois comparativement à celle du site de Lacolle, et ce, pour

2004 et 2005. Bien que ce constat ait permis de mieux coordonner les expériences

du chapitre 2, les deux sites ne sont pas sujets à comparaison puisque qu’ils

diffèrent sur plusieurs aspects biotiques et abiotiques.

En effet, la différence phénologique entre ces deux plantations pourrait être

expliquée par les conditions environnementales et physiques des champs. Le type

de sol diffère et l’entretien des champs également; la plantation de Lacolle est

régie de façon biologique alors que celle de Beauharnois est de type

conventionnel. Il est également important de rappeler que les plants du site de

Lacolle ont une saison de croissance en moins comparativement aux plants du site

de Beauharnois. Comme la maturité des plants peut influencer la période de

floraison du sureau du Canada, en plus des nombreux autres facteurs

environnementaux, il serait intéressant de cumuler les observations concernant les

dates de floraison pendant encore quelques années.

À titre indicatif, une courbe des degrés-jours cumulés en fonction de la date est

présentée à l’annexe 3.

Page 46: IMPACT D’UNE POLLINISATION ASSISTÉE SUR LA PRODUCTION

36

Détermination de la période de floraison de 5 cultivars et de plants indigènes à la plantation de l’Acadie

La période de floraison de chaque cultivar sur la parcelle expérimentale de l’Acadie

est illustrée aux figures 12 et 13 pour les années 2004 et 2005 respectivement.

Les données de ces graphiques illustrent la synchronisation de la période de

pleine floraison entre tous les cultivars. Toutefois, en 2004, bien que les

inflorescences de l’ensemble des cultivars et du type indigène aient été pleinement

épanouies le 30 juin, la floraison des cultivars Nova et Kent ainsi que celle des

plants indigènes avait débuté légèrement plus tôt que celles des cultivars York et

Victoria. En effet, le 25 juin, les cultivars Nova, Kent et les plants indigènes avaient

déjà atteint environ 60 % de leur pleine floraison comparativement à 25 % pour les

cultivars York et Victoria. Ces derniers ont atteint 60 % de leur pleine floraison 5

jours plus tard.

0

10

20

30

40

50

60

70

80

90

100

14 ju

in

16 ju

in

18 ju

in

20 ju

in

22 ju

in

24 ju

in

26 ju

in

28 ju

in

30 ju

in

2 ju

illet

4 ju

illet

6 ju

illet

8 ju

illet

10 ju

illet

12 ju

illet

14 ju

illet

16 ju

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18 ju

illet

20 ju

illet

22 ju

illet

Date

Rat

io n

orm

alis

é d'

inflo

resc

ence

sou

vert

es (%

)

indigèneKentYorkvictoriaScotiaNova

Figure 12 : Courbe de floraison normalisée des cultivars Kent, Nova, Scotia,

Victoria et York ainsi que de plants indigènes en 2004.

Page 47: IMPACT D’UNE POLLINISATION ASSISTÉE SUR LA PRODUCTION

37

En 2005, se basant sur les observations la première année (annexe 3), les

premières données au champ ont été prises le 27 juin. Toutefois, la floraison était

beaucoup plus avancée que prévue, ce qui explique que les premières données de

la courbe de la figure 13 correspondent à un stade avancé de la floraison. Il est

tout de même possible de constater qu’en 2005 l’ensemble des cultivars ont atteint

la pleine floraison le 29 juin. Lors des observations du 27 juin, il a été constaté que

les cultivars Nova et Scotia avaient un nombre d’inflorescences épanouies de 20 à

35 % plus élevé comparativement aux autres cultivars.

Figure 13 : Courbe de floraison normalisée des cultivars Kent, Nova, Scotia,

Victoria et York ainsi que de plants indigènes en 2005.

Ces données, bien qu’empiriques, indiquent une répartition de la dispersion du

pollen dans le temps entre les cultivars autour d’une date culminante commune.

En 2004, les cultivars Nova et Kent dispersaient leur pollen 5 jours plus tôt que les

0

10

20

30

40

50

60

70

80

90

100

25 ju

in

27 ju

in

29 ju

in

1 ju

illet

3 ju

illet

5 ju

illet

7 ju

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9 ju

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11 ju

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13 ju

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Date

Rat

io n

orm

alis

é d'

inflo

resc

ence

s o

uver

tes

(%)

IndigèneKentYorkVictoriaScotiaNova

Page 48: IMPACT D’UNE POLLINISATION ASSISTÉE SUR LA PRODUCTION

38

autres cultivars et leur floraison diminuait légèrement avant celle des cultivars

Victoria et York. En 2005, ce sont les cultivars Nova et Scotia qui semblent avoir

été les plus hâtifs.

En production fruitière, l’utilisation de plants pollinisateurs est souvent préconisée

lors de la conception d’une plantation afin d’allonger la période de pollinisation et

d’optimiser le taux de fécondation (Lord et Russell, 2002). En effet, des périodes

de floraison complémentaires entre certains cultivars favorisent la pollinisation

croisée (Kozma et al., 2003).

À l’Acadie, les cultivars Kent et Nova ont présenté des courbes de floraison très

rapprochées de sorte qu’ils pourraient se polliniser l’un et l’autre tout au long de

leur floraison. Il en va de même pour les cultivars Victoria et York. Par ailleurs,

Kent et Nova, étant légèrement plus hâtifs, pouvaient agir comme pollinisateur en

début de floraison tandis que Scotia, Victoria et York couvraient les inflorescences

se développant plus tardivement. Quant aux plants indigènes, ils présentaient une

floraison plus constante, couvrant davantage l’étendue de la période de floraison.

Dans un guide de production du Wisconsin, Roper et al. (1998) suggèrent

d’ailleurs d’utiliser le cultivar Nova comme pollinisateur pour le cultivar York. Cette

dynamique de compatibilité entre les cultivars sera explorée au chapitre 3.

Tout comme les observations recueillies sur les plantations de Lacolle et de

Beauharnois, la période de floraison des plants du site de l’Acadie est davantage

fonction de la date que du cumul des degrés-jours.

En annexe 4, le développement phénologique global de la plante est illustré et

situe la floraison dans l’ensemble de la croissance de la plante. On y voit

également les moments d’intervention en cours de culture.

Page 49: IMPACT D’UNE POLLINISATION ASSISTÉE SUR LA PRODUCTION

39

1.4.2 Observation de la morphologie des pièces florales de plants indigènes et de cinq cultivars

Les observations et les photographies effectuées au cours de l’été 2004 ont permis

de visualiser le développement floral, du bouton jusqu’à la déhiscence des

anthères. La figure 14 illustre l’ouverture du bouton, l’élongation des étamines puis

la libération des grains de pollen. Selon les observations faites au champ cette

année-là, ces étapes se sont déroulées sur une période de temps variable

dépendamment des conditions d’humidité et de chaleur. Il a aussi été remarqué

que l’anthèse complète pouvait se dérouler sur quelques heures ou quelques

jours. Pour réussir les pollinisations assistées, il faut donc être très attentif à la

vitesse d’éclosion des fleurs et de dispersion naturelle du pollen.

Figure 14 : Déroulement des différentes étapes menant à l’anthèse chez

Sambucus nigra ssp. canadensis. (1,2,3) Ouverture des boutons floraux. (4,5) Élongation des étamines. (5,6) Déhiscence des anthères.

D’autres observations recueillies dans la plantation de l’Acadie en 2005 ont permis

d’identifier des différences entre les parties florales des cultivars et celles des

plants indigènes. Chez les fleurs des plants indigènes, les étamines sont plus

courtes et érigées au-dessus du pistil (figure 15a), tandis que chez les fleurs des

1 2 3

4 5 6

Page 50: IMPACT D’UNE POLLINISATION ASSISTÉE SUR LA PRODUCTION

40

différents cultivars les étamines ont tendance à être plus allongées et plus

divergentes (figure 15b). À partir des photos de la figure 15, détaillants les pièces

florales, il a été constaté que les étamines des plants indigènes étudiés étaient

positionnées dans le même angle que le pistil : les anthères au-dessus du

stigmate. Pour les cultivars, cet angle entre les parties mâles et femelles était

d’environ 90°; les anthères se retrouvaient donc à l’extérieur de la corolle. Bien que

ces données demandent à être validées, elles dévoilent une particularité

fondamentale de la pollinisation du type indigène et des cultivars.

Figure 15 : Disposition des pièces florales chez Sambucus nigra ssp. canadensis.

(A) Position érigée des étamines chez des plants indigènes. (B) Position divergente des étamines chez les cultivars Kent, Scotia, Victoria et York.

De par l’organisation des organes mâles et femelles, les cultivars qui ont été

sélectionnés favorisent la pollinisation croisée tandis que la structure florale des

5 plants indigènes observés favorise naturellement l’autopollinisation. Cette

caractéristique pourrait-elle assurer un meilleur succès de fécondation, donc de

mise à fruit, chez les cultivars? En effet, la morphologie des pièces florale peut être

un aspect qui limite la pollinisation et la fécondation (Wilcock et Neiland, 2002). Par

exemple, chez Clarkia tembloriensis Vasek, il a été remarqué que les sépales, les

Page 51: IMPACT D’UNE POLLINISATION ASSISTÉE SUR LA PRODUCTION

41

pétales, les étamines et les styles des fleurs autopollinisatrices étaient de

dimension plus petite que chez les fleurs se pollinisant de façon croisée (Sherry et

Lord, 2000). Cependant, le succès de la mise à fruit repose également sur l’impact

majeur de paramètres comme la quantité et la qualité du pollen.

1.4.3 Détermination de la technique de germination in vitro

1.4.3.1 Conditions de germination des grains de pollen Les différentes conditions de germination des grains de pollen testés ont mené à

choisir et à utiliser une technique unique pour les tests de viabilité effectués lors

des pollinisations ultérieurement décrites (chapitres 2 et 3).

Les données présentées à la figure 16 indiquent que les taux de germination

mesurés à partir des grains de pollen incubés dans les microtubes sont

significativement supérieurs à ceux mesurés dans les plats de Pétri (41 et 32 % de

germination respectivement avec p = 0,004).

0

5

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Taux

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germ

inat

ion

des

grai

ns d

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llen

(%)

Pétri Ependorf

Type de contenant

Figure 16 : Taux de germination des grains de pollen de Sambucus nigra ssp. canadensis en fonction du type de contentant utilisé pour la mise en culture. Les lettres correspondent à des valeurs significativement différentes selon le test « t » de Student pour un seuil de signification de 0,05.

a

b

Page 52: IMPACT D’UNE POLLINISATION ASSISTÉE SUR LA PRODUCTION

42

La différence entre les deux traitements est probablement liée à la variation de

volume de milieu, donc de la densité des grains de pollen, d’un contenant à l’autre.

En effet, chez plusieurs espèces, ce paramètre de germination in vitro est

important pour l’optimisation de la technique (Shivanna et Rangaswamy, 1992). À

densité trop faible, certains facteurs ne sont pas exprimés, ce qui empêche

l’élongation des tubes pollinique. D’ailleurs ce phénomène est représentatif de la

germination in vivo. Chez la canneberge, par exemple, une quantité de 60 grains

de pollen appliqués par stigmate est nécessaire pour que les tubes polliniques se

développent et fécondent l’ovaire. Sous ce nombre, la fécondation diminue

exponentiellement (Cane et Schiffhauer, 2003).

Ainsi, lors de la mise en culture des grains de pollen du sureau du Canada, il est

préférable d’utiliser les microtubes. Cette méthode a également l’avantage d’être

plus simple à utiliser.

Les données présentées à la figure 17 indiquent que l’agitation pendant la période

de germination n’est pas un facteur important dans la technique de travail (39 et

35 % de germination avec et sans agitation, respectivement). Par contre, on

remarque qu’en absence d’agitation, les résultats sont plus variables.

Il serait donc préférable d’agiter les grains de pollen à l’intérieur d’un petit volume

afin d’assurer une répartition égale des nutriments dans le milieu de culture. C’est

d’ailleurs pourquoi Shivanna et Rangaswamy (1992), dans leur manuel technique

sur la germination du pollen, suggèrent une agitation douce du milieu de culture.

C’est une méthodologie recommandée dans la plupart des essais de germination

des grains de pollen de toutes espèces et qui s’avère également favorable pour le

sureau.

Page 53: IMPACT D’UNE POLLINISATION ASSISTÉE SUR LA PRODUCTION

43

0

5

10

15

20

25

30

35

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45

Taux

de

germ

inat

ion

des

grai

ns d

e po

llen

(%)

Sans Avec

Agitation

Figure 17 : Taux de germination des grains de pollen de Sambucus nigra ssp.

canadensis incubés dans un milieu avec ou sans agitation. Les lettres correspondent à des valeurs significativement différentes selon le test « t » de Student pour un seuil de signification de 0,05.

Les données présentées à la figure 18 indiquent que le taux de germination n’est

pas influencé par la présence ou l’absence de lumière (38 et 42 % de germination

respectivement). Les tubes polliniques en croissance de S. nigra ssp. canadensis

ne sont donc pas photosensibles. Bien que certains auteurs aient choisi de faire

germer le pollen à l’obscurité (Gudin et al., 1991; Rajasekharan et Ganeshan,

1994), aucun n’a démontré l’importance de ce facteur dans la littérature.

a a

Page 54: IMPACT D’UNE POLLINISATION ASSISTÉE SUR LA PRODUCTION

44

0

5

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15

20

25

30

35

40

45

50

Taux

de

germ

inat

ion

des

grai

ns d

e po

llen

(%)

Avec Sans

Lumière

Figure 18 : Taux de germination des grains de pollen de Sambucus nigra ssp.

canadensis incubés en présence ou en absence de lumière. Les lettres correspondent à des valeurs significativement différentes selon le test « t » de Student pour un seuil de signification de 0,05.

Le quatrième volet de cette série d’essais, portant sur la mise au point du milieu de

culture le plus adéquat pour l’espèce étudiée, démontre des différences

significatives entre les traitements (p < 0,0001). En effet, les résultats présentés à

la figure 19 indiquent que les deux milieux contenant une concentration de

saccharose de 15 % (M1 et M3) ont tous deux favorisé la germination des grains

de pollen avec des taux de 33 et 30 % respectivement, comparativement à des

taux de 23 % pour le milieu Roberts et al. (1983) et de 10 % pour le milieu

Muccifora et al. (2003) qui contient 30 % de saccharose.

a a

Page 55: IMPACT D’UNE POLLINISATION ASSISTÉE SUR LA PRODUCTION

45

Figure 19 : Taux de germination des grains de pollen de Sambucus nigra ssp. canadensis incubés dans différents milieux de culture.

Les lettres correspondent à des valeurs significativement différentes selon le test « t » de Student pour un seuil de signification de 0,05.

Il est intéressant de noter que la concentration en saccharose joue un rôle

important dans le milieu Muccifora et al. (2003). En effet, le taux de germination a

diminué de 33 à 10 % avec une augmentation de la concentration en saccharose

de 15 à 30 % respectivement. En général, les grains de pollen trinucléés, comme

ceux du sureau, requièrent une concentration en saccharose supérieure à 20 %.

Les résultats obtenus semblent donc indiquer que le pollen de cette espèce

possède des caractéristiques métaboliques semblables à celles des grains de

10

15

20

25

30

35

M1 M2 M3 M4

Milieux de culture

0

5 M

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15%

Muc

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de

polle

n (%

)

Page 56: IMPACT D’UNE POLLINISATION ASSISTÉE SUR LA PRODUCTION

46

pollen binucléés. Les sources d’hydrates de carbone dans le milieu ont deux

fonctions : maintenir le potentiel osmotique et servir de substrat au métabolisme

des grains de pollen (Shivanna, 2003). La deuxième fonction étant mineure dans le

cadre d’une incubation de courte durée telle qu’effectuée dans ces essais, il est

raisonnable de penser que le taux trop élevé en sucre dans le milieu ait affecté la

perméabilité de la membrane des tubes polliniques, tel que mentionné par Taylor

(1997). À 30 % de saccharose, les forces osmotiques étaient probablement trop

élevées pour les grains de pollen et ont pu inhiber l’élongation des tubes

polliniques.

1.4.3.2 Évaluation de la technique de conservation du pollen Les différentes techniques de séchage ont été comparées à titre indicatif

seulement dans le but de sélectionner la méthode la plus efficace et la plus facile à

effectuer au champ. Les résultats présentés à la figure 20 démontrent que le taux

de germination moyen se situe autour de 31 %, quelle que soit la technique de

récolte du pollen ou sa méthode de conservation. L’analyse visuelle du graphique

permet de constater des écarts-types assez importants, variant de 10 à 15 % à

l’intérieur d’un même traitement. Des essais contenant davantage de répétitions

pourraient éventuellement être considérés afin d’identifier la meilleure technique.

Page 57: IMPACT D’UNE POLLINISATION ASSISTÉE SUR LA PRODUCTION

47

Figure 20 : Taux de germination des grains de pollen de Sambucus nigra ssp. canadensis après avoir été soumis à diverses méthodes de conservation.

Ces résultats suscitent toutefois quelques interrogations. Le taux de germination

étant bas, on peut se questionner sur la représentativité du test effectué.

Représente-t-il bien le niveau de viabilité des grains de pollen du sureau du

Canada? Les conditions de mise en culture pourraient-elles être optimisées?

Dans des conditions de germination semblables, Muccifora et al. (2003) obtenaient

un taux de germination d’environ 90 % chez le sureau noir en Europe. Bien que la

littérature possède des exemples de faibles taux de germination, tel le fraisier

avec 21 % (Chiasson et al., 1995), elle révèle des taux de germination de grains

de pollen frais de l’ordre de 80 % pour de nombreuses espèces (Shivanna, 2003).

Cependant, aucune référence n’indique le taux de mortalité ou de stérilité de

S. nigra ssp. canadensis.

Le taux de germination des grains de pollen de l’espèce étudiée est généralement

bas. Il se pourrait que ce soit une caractéristique intrinsèque à l’espèce ou que le

milieu de culture utilisé soit sous optimal ou les deux facteurs à la fois. Il est connu

qu’une fois détachés des anthères, les grains de pollen perdent rapidement leur

0 5

10 15 20 25 30 35 40 45

Frais T°pièce, 1 jour Séché suranthères, 2 jours

4°C, 3 jours 4°C, 5 jours

Traitement du pollen

Taux

de

germ

inat

ion

des

grai

ns d

e po

llen

(%)

Page 58: IMPACT D’UNE POLLINISATION ASSISTÉE SUR LA PRODUCTION

48

capacité à émettre un tube pollinique (Wilcock et Neiland, 2002), particulièrement

les grains de pollens trinucléés (Shivanna et al., 1991). Ces grains de pollen

présentent un développement inégal des mitochondries (Charzynska et

Lewandowska, 1990) qui pourrait résulter en une perte de viabilité.

Dépendamment de l’espèce étudiée, le développement d’un milieu de culture

optimal peut être laborieux. Certains grains de pollen, comme ceux de l’espèce

Annona cherimola Miller, nécessitent la présence d’étamines dans le milieu (Rosell

et al., 1998) alors que d’autres ont besoin d’une période d’hydratation précise

(Heslop-Harrison et Heslop-Harrison, 1993).

Les présents essais ne permettent donc pas de conclure que les grains de pollen

de la sous-espèce canadensis sont moins viables que ceux de la sous-espèce

nigra. Par contre, la méthode choisie donne des résultats stables et permet

d’assurer l’utilisation de grains de pollen ayant un pouvoir germinatif comparable

entre les expériences de pollinisation assistée.

1.4.3.3 Résumé des essais de germination in vitro des grains de pollen Les essais de germination effectués avec le pollen de S. nigra ssp. canadensis ont

démontré qu’il est préférable d’une part d’utiliser des microtubes pour mettre en

culture le pollen puisque les résultats obtenus étaient supérieurs à ceux obtenus

en plats de Pétri. Par ailleurs, afin de faciliter les opérations de travail, les tests de

germination on été effectués sous les conditions de lumière du laboratoire avec le

milieu M1 (Muccifora et al., 15 % de saccharose). De plus, afin de diminuer

l’hétérogénéité des mesures, l’agitation du milieu de culture a été maintenue.

Finalement, puisque les taux de germination demeurent semblables,

indépendamment de la méthode de récolte étudiée, l’utilisation de grains de pollen

frais a été favorisée lorsque possible. Cette approche a le mérite de représenter

plus fidèlement les conditions naturelles de dispersion du pollen. Ces conditions de

récolte et de germination des grains de pollen ont été utilisées tout au long des

essais de pollinisation assistée des chapitres 2 et 3.

Page 59: IMPACT D’UNE POLLINISATION ASSISTÉE SUR LA PRODUCTION

49

2 CHAPITRE 2 EFFET D’UN APPORT SUPPLÉMENTAIRE DE

POLLEN SUR LA MISE À FRUIT

2.1 INTRODUCTION D’une année à l’autre, le sureau du Canada produit une quantité de fruits variable.

Dans l’état de New York, la production peut fluctuer de 4 à 12 tonnes/ha (McKay,

2001). Certains auteurs mentionnent que la disponibilité du pollen, en terme de

quantité, peut expliquer les variations de rendements fruitiers de certaines espèces

(Ayre et Whelan, 1989; Burd, 1994). Chez le bleuet par exemple, la mise à fruit est

dépendante du nombre de grains de pollen adhérant au stigmate (Dogterom et al.,

2000; Kozma et al., 2003).

La grosseur des inflorescences pourrait également expliquer une partie de la

variabilité de la production chez le sureau puisque ces dernières peuvent

regrouper une quantité variable de fleurs. La question se pose quant à l’influence

du nombre de fleurs formant une panicule sur la mise à fruit. En effet, chez

plusieurs espèces, le nombre de fleurs présentes au départ et le nombre de fleurs

pollinisées a un impact sur l’avortement des fruits (Stephenson, 1981). Qu’en est-il

de cette relation pour les larges inflorescences du sureau?

La pollinisation assistée est une méthode fréquemment employée pour étudier

l’effet de différents aspects de la pollinisation sur la mise à fruit et le volume des

fruits, deux variables déterminantes d’un rendement fruitier (Burd, 1994).

Page 60: IMPACT D’UNE POLLINISATION ASSISTÉE SUR LA PRODUCTION

50

2.2 HYPOTHÈSES ET OBJECTIFS La pollinisation insuffisante des fleurs est un phénomène fréquent en nature. Dans

cette situation, une disponibilité plus grande de pollen dans une plantation

augmente le rendement en fruit. Lors de l’étude de l’effet d’un apport

supplémentaire de pollen sur la mise à fruit, plusieurs aspects de la biologie florale,

comme la grosseur des inflorescences et la viabilité du pollen, ont été abordés.

Plusieurs sous-objectifs ont donc été identifiés:

• Évaluer l’effet d’un apport de pollen exogène sur la mise à fruit et le volume

de ceux-ci;

• Vérifier deux techniques d’ajout de pollen : l’agitation manuelle des plants et

l’application manuelle de pollen;

• Comprendre les relations entre le nombre de boutons floraux à l’intérieur

d’une inflorescence, la mise à fruit et le volume des fruits;

• Évaluer la viabilité du pollen des plants indigènes tout au long de la période

de floraison;

• Comprendre les effets de la pollinisation assistée sur la répartition des

ressources par l’étude de la mise à fruit d’inflorescences adjacentes non

pollinisées.

Page 61: IMPACT D’UNE POLLINISATION ASSISTÉE SUR LA PRODUCTION

51

2.3 MATÉRIEL ET MÉTHODES

2.3.1 Matériel végétal Les expériences de pollinisation assistée se sont déroulées en conditions de plein

champ sur des plants indigènes. Sur le site de Lacolle, les essais ont été

effectuées au cours des étés 2004 et 2005, alors que sur le site de Beauharnois

les expériences ont été conduites à l’été 2005 seulement.

La plantation sur le site de Lacolle a été faite en mai 2003. La parcelle

expérimentale était composée de 6 rangs de 30 plants. La distance entre les plants

était de 2 m sur le rang et de 4 m entre les rangs. La parcelle de Beauharnois a été

implantée à l’automne 2002 et comprenait 3 rangs de 60 plants, espacés de 2 m à

l’intérieur d’un rang. Par contre, entre les rangs, la distance a varié : 2 m entre les

1er et 2e rangs, 4 m entre les 2e et 3e rangs. Les plans de champs sont présentés

aux annexes 5 et 6.

Les parcelles ont été désherbées sur le rang et les entre-rangs, recouverts de

trèfle à Lacolle et de graminées à Beauharnois, ont été tondus chaque semaine.

Aucune intervention d’irrigation n’a été faite. L’historique des plantations ainsi que

le détail des sols a été décrit à la section 1.3.1. À la mi-août, avant que les fruits

n’atteignent leur maturité, des filets (cf-polypropylene netting standard mesh 3/4" x

5/8") ont été étendus au-dessus des parcelles expérimentales pour prévenir les

ravages causés par les oiseaux. En 2004, sur le site de Lacolle, les filets ont été

disposés en forme de tente sur toute la longueur d’un rang (annexe 7), tandis

qu’en 2005 aucun filet n’a été nécessaire. Sur le site de Beauharnois, les filets ont

été cousus et étalés sur toute la surface de la parcelle à une hauteur de 2,50 m.

Page 62: IMPACT D’UNE POLLINISATION ASSISTÉE SUR LA PRODUCTION

52

2.3.2 Traitements de pollinisation

En juillet 2004, à Lacolle, trois traitements de pollinisation ont été comparés : T1, le

témoin qui n’impliquait aucune intervention, T2, toutes les inflorescences d’un plant

étaient agitées manuellement pour favoriser la dispersion du pollen entre les fleurs

d’une inflorescence et entre les inflorescences d’un plant, et T3, du pollen exogène

était ajouté manuellement pour augmenter considérablement la quantité de pollen.

Des inflorescences ont été prélevées sur plusieurs plants indigènes au même

stade phénologique que les plants traités. Elles ont été placées dans des

contenants ouverts de plastique clair de 250 ml et séchées pendant 36 heures aux

conditions ambiantes du laboratoire. L’ensemble des grains de pollen récoltés a

été divisé en lots pour une application par bloc. L’apport exogène de pollen a été

effectué à l’aide de pinceaux à poils souples, en balayant toute l’inflorescence. Un

pinceau distinct a été utilisé pour chacun des blocs.

Des grains de pollen de chaque bloc ont été mis en culture pour évaluer leur

viabilité selon la méthode de germination in vitro optimisée et présentée au

chapitre 1. Les traitements T2 et T3 ont été répétés 3 fois sur chaque

inflorescence, l’anthèse des fleurs y étant étalée.

En juillet 2005, à Lacolle ainsi qu’à Beauharnois, les trois traitements ont été

effectués à nouveau et deux traitements supplémentaires ont été ajoutés : T4,

passage d’un pinceau sur les inflorescences sans ajout de pollen, et T5,

pollinisation naturelle d’un certain nombre d’inflorescences sur les plants qui

recevaient le traitement T3. Dans ce cas, les traitements T5 et T3 étaient effectués

sur des ramifications distinctes portées par la même tige. Ce cinquième traitement

avait pour objectif de vérifier si la pollinisation assistée d’une inflorescence pouvait

influencer l’allocation des ressources entre les inflorescences et, par la suite, la

mise à fruit.

Page 63: IMPACT D’UNE POLLINISATION ASSISTÉE SUR LA PRODUCTION

53

La technique de récolte du pollen a légèrement changé en 2005 : du pollen frais de

plants situés sur le site expérimental était utilisé, une partie dans les minutes

suivantes et l’autre, gardée au frais pour la mise en culture au laboratoire.

2.3.3 Dispositif expérimental En 2004, le dispositif expérimental de la plantation de Lacolle était constitué de 12

blocs complets aléatoires comprenant 3 traitements, 5 plants et 3 échantillons pour

les données de mise à fruit. Les 3 échantillons correspondaient à 3 inflorescences

sélectionnées au hasard sur le même plant. Pour recueillir les données de volume

des fruits, 50 fruits par panicule, représentant 50 sous-échantillons, étaient utilisés.

En 2005, aux sites de Lacolle et de Beauharnois, deux expériences se déroulaient

simultanément à partir du même matériel végétal. Le dispositif principal était formé

de 6 blocs complets aléatoires comprenant 4 traitements (T1, T2, T3 et T4),

5 plants et 3 échantillons. Le même dispositif expérimental était utilisé pour la

seconde expérience à la différence que les trois échantillons du traitement T5 se

situaient sur les mêmes plants que le traitement T3.

Les plans de champ présentés aux annexes 5 et 6 schématisent les dispositifs

expérimentaux.

2.3.4 Prise de données Le dénombrement des fleurs est possible par photographies numériques

d’inflorescences au stade de boutons floraux, leur distribution étant quasi plane.

L’annexe 8 illustre les interventions effectuées sur les inflorescences.

À la fin du mois d’août, les panicules de fruits ont été récoltées manuellement et

congelées immédiatement. Par la suite, les fruits détachés de chaque panicule ont

Page 64: IMPACT D’UNE POLLINISATION ASSISTÉE SUR LA PRODUCTION

54

été pesés (balance Mettler Toledo PB303). Leur nombre a été estimé à partir d’un

échantillon de 50 fruits selon le calcul suivant :

[1] Nombre de fruits = (masse totale des fruits x 50)/ masse de 50 fruits

Le pourcentage de mise à fruit a été calculé à l’aide de la formule suivante :

[2] Pourcentage de mise à fruit = (nombre de fruits/nombre de boutons floraux) x 100

Leur volume a été déterminé au moyen d’une table numérisante (Epson

Expression 1640XL) et du logiciel spécialisé WinseedleTM, version 2001a (Régent

instruments Inc., Québec), et ce, sur les fruits de la plantation de Lacolle, en 2004

seulement.

La fiabilité de la technique par échantillonnage de 50 fruits a été vérifiée en

calculant la variation entre cette technique et un comptage exhaustif de chaque

panicule. Pour chacune d’elles, tous les échantillons possibles de 50 fruits étaient

pesés. De ces échantillons, le nombre de fruits total était inféré. Puis une moyenne

de tous les échantillons d’une panicule a été calculée.

Ces essais préliminaires, à partir de 13 panicules ont montré une erreur moyenne

de 2,4 +/- 0,96 % par rapport à un comptage exhaustif des fruits pour chaque

panicule.

Les données recueillies en 2004 sur la plantation de Lacolle ont été utilisées pour

étudier les relations entre le nombre de fleurs, la masse des fruits, le volume de

ceux-ci et la mise à fruit d’une inflorescence.

Page 65: IMPACT D’UNE POLLINISATION ASSISTÉE SUR LA PRODUCTION

55

2.3.5 Analyses statistiques Les analyses statistiques ont été effectuées sur les moyennes de chaque

traitement pour vérifier l’effet différentiel de ces derniers sur le taux de mise à fruit

et sur le volume des fruits. Une première analyse a été menée pour comparer les

traitements T1, T2, T3 et T4, puis une seconde analyse, pour comparer T3 et T5

entre eux. Pour ce faire, deux ANOVA ont été réalisées, suivies d’un test de Tukey

HSD avec un seuil de signification de 0,05. Les analyses ont été réalisées à l’aide

du logiciel JMP de SAS institute, version 5.0.1. L’homogénéité des résidus a été

vérifiée avec le test de Brown-Forsythe et le postulat de normalité a été vérifié

avec le test de Shapiro-Wilk pour la variable mise à fruit et avec le test de KSL

pour le volume, tous au seuil de signification de 0,05.

En 2004, pour vérifier les relations entre le nombre de fleurs et le nombre de fruits

formés à l’intérieur d’une inflorescence, des analyses de corrélation ont été

effectuées, avec le même logiciel, entre le nombre de boutons floraux par

inflorescence, le nombre de fruits par inflorescence, le volume des fruits ainsi

qu’entre la masse des fruits et le pourcentage de mise à fruit. Certaines variables

ont subi des transformations pour obtenir une distribution normale des résidus. Le

test de Shapiro-Wilk a été utilisé à cet effet (α=0,05). La correction de Bonferoni a

été faite pour 5 variables et le seuil de signification a été ajusté à 0,005.

2.4 RÉSULTATS

2.4.1 Étude de la viabilité du pollen au cours de la floraison en champ

L’information relative à la viabilité du pollen, tout au long de la période de floraison,

a été compilée en parallèle avec les tests de germination des lots de grains de

pollen utilisés lors des pollinisations assistées au champ. La viabilité des grains de

pollen était semblable lors des nombreuses applications au pinceau, avec un taux

Page 66: IMPACT D’UNE POLLINISATION ASSISTÉE SUR LA PRODUCTION

56

de germination moyen de 50 % sur le site de Lacolle et de 56 % sur celui de

Beauharnois. Le détail de ces taux de germination est présenté à l’annexe 9.

Les taux de germination moyen des grains de pollen prélevés à intervalles

réguliers au cours de la période de floraison en 2005, sur les deux sites

expérimentaux, sont représentés à la figure 21. Le nombre de répétitions étant

faible, il est impossible de faire une comparaison formelle. Cependant, on

remarque que la viabilité des grains de pollen recueillis à différents moments au

cours de la floraison ne montre pas de tendance. À Lacolle, le taux de germination

fluctue de 45 à 60 à 45 %, tandis qu’à Beauharnois le taux de germination

augmente de 45 à 65 % en 6 jours.

0

10

20

30

40

50

60

70

29 ju

in

30 ju

in

1 ju

illet

2 ju

illet

3 ju

illet

4 ju

illet

28 ju

in

29 ju

in

30 ju

in

1 ju

illet

2 ju

illet

3 ju

illet

Figure 21 : Taux de germination des grains de pollen de plants de Sambucus nigra

ssp. canadensis sur deux sites expérimentaux au cours de la période de floraison 2005.

Date de prélèvement du pollen

Lacolle Beauharnois

Taux

de

germ

inat

ion

des

grai

ns d

e po

llen

(%)

Page 67: IMPACT D’UNE POLLINISATION ASSISTÉE SUR LA PRODUCTION

57

2.4.2 Effet des traitements de pollinisation assistée sur la mise à fruit

Les résultats obtenus suite aux essais de pollinisation effectués sur le site de

Lacolle, en juillet 2004, sont présentés au tableau 3. L’analyse de variance a

permis de différencier l’effet des 3 traitements de pollinisation sur la mise à fruit

avec une probabilité de p = 0,0016. Le test de Tukey HSD indique que le témoin

sans intervention (T1) et le traitement avec agitation manuelle (T2) montrent un

taux de mise à fruit similaire, soit 58 et 57 %. Les résultats obtenus avec un apport

exogène de pollen (T3) sont significativement supérieurs aux deux autres

traitements. En effet, le taux de mise à fruit se situe à 74 %. L’apport de pollen

supplémentaire au pinceau a donc entraîné une augmentation de la mise à fruit de

16 % par rapport au témoin. L’intervention par agitation des inflorescences n’a eu

aucun effet positif sur la mise à fruit.

Les conditions de normalité et d’homogénéité des variances ont été remplies avec

des probabilités de 0,955 et de 0,426 respectivement.

Tableau 3 : Taux de mise à fruit (%) du Sambucus nigra ssp. canadensis suite à

quatre traitements de pollinisation, sur deux parcelles de la Montérégie.

Site Témoin naturel (T1)

Agitation manuelle des

plants (T2)

Apport de pollen exogène

(T3)

Témoin : balayage au pinceau sans

pollen (T4) 2004

Lacolle 58b 57b 74a -

2005

Lacolle 74c 80b 90a 82b

Beauharnois 84a 84a 88a 86a Les lettres correspondent à des valeurs significativement différentes selon un test de Tukey à un seuil de signification de 0,05.

Page 68: IMPACT D’UNE POLLINISATION ASSISTÉE SUR LA PRODUCTION

58

En 2005, les résultats entre les deux sites expérimentaux diffèrent quant aux

analyses de variance effectuées sur les taux de mise à fruit. À Lacolle, l’application

de pollen exogène (T3) a permis une mise à fruit significativement supérieure aux

autres traitements avec un taux de 90 % (p = 0,003). Pour le traitement témoin

(T1), la mise à fruit a été significativement inférieure aux autres traitements tandis

que les traitements avec agitation (T2) et balayage au pinceau (T4) ont donné des

valeurs intermédiaires. Ces résultats indiquent que sur cette parcelle les relations

de mise à fruit entre les traitements varient légèrement entre 2004 à 2005

(tableau 3). Les résidus des analyses de variance étaient distribués normalement

(p = 0,064) et de façon homogène (p = 0,231). On remarque également, sur la

parcelle de Lacolle, que de façon générale la mise à fruit a augmenté d’environ

20 % pour tous les traitements en 2005.

Sur les mêmes plants que les inflorescences pollinisées à la main (T3), les

inflorescences laissées aux conditions de pollinisation naturelle (T5) ont aussi

obtenu une mise à fruit inférieure, soit de 79 % comparativement à 90 %

(p = 0,002) (tableau 4).

Tableau 4 : Taux de mise à fruit du Sambucus nigra ssp. canadensis suite aux traitements T3 et T5, sur deux parcelles de la Montérégie.

Site Apport de

pollen exogène (T3)

Témoin naturel intra-plant

(T5)

Lacolle 90a 79 b

Beauharnois 88a 91 a

Les lettres correspondent à des valeurs significativement différentes selon un test de Tukey à un seuil de signification de 0,05.

En 2005, les résultats de mises à fruit à Beauharnois ne montrent aucune

différence entre les traitements T1, T2, T3 et T4 (p = 0,458), ainsi qu’entre les

traitements T3 et T5 (p = 0,595). Les postulats de la normalité et de l’homogénéité

Page 69: IMPACT D’UNE POLLINISATION ASSISTÉE SUR LA PRODUCTION

59

de la variance étaient respectés avec les probabilités respectives de 0,095 et

0,368. Les valeurs de mise à fruit se situaient entre 84 et 91 %, soit près des

niveaux observés sur la parcelle de Lacolle lors de cette même saison.

2.4.3 Effet de la pollinisation assistée sur le volume des fruits

Les résultats présentés dans le tableau 5 montrent qu’il n’y a aucun effet du

traitement de pollinisation sur le volume moyen des fruits mûrs à l’intérieur d’une

même panicule (p = 0,310). Le volume moyen des baies variait de 76 à 82 mm3.

Il y avait par contre une variation significative du volume des fruits à l’intérieur

d’une panicule (p < 0,001). L’analyse des coefficients de variation indique qu’il y a

une variation moyenne de 17 % quant au volume des fruits d’une même panicule,

et ce, tous traitements confondus.

Tableau 5 : Volume des fruits du Sambucus nigra ssp. canadensis suite aux traitements de pollinisation sur la parcelle de Lacolle en 2004.

Traitement de pollinisation

Volume des fruits (mm3)

Témoin naturel (T1) 82 a

Agitation manuelle

des plants (T2) 76 a

Apport de pollen

exogène (T3) 81 a

Les lettres correspondent à des valeurs significativement différentes selon un test de Tukey à un seuil de signification de 0,05.

Page 70: IMPACT D’UNE POLLINISATION ASSISTÉE SUR LA PRODUCTION

60

2.4.4 Effet du nombre de fleurs d’une inflorescence sur la mise à fruit

Les relations entre des variables clés du potentiel fructifère, quantité de boutons

floraux, quantité de fruits formés, masse et volume de ceux-ci, s’ajoutent aux

données de l’étude de la mise à fruit.

La méthodologie appliquée lors des pollinisations assistées ne tenant pas compte

de la grosseur de l’inflorescence, la relation la plus pertinente de la présente étude

est certainement celle entre le nombre de boutons floraux formant une

inflorescence et la quantité de fruits atteignant leur maturité. Comme l’illustre la

corrélation en figure 22, il n’existe qu’une très faible relation entre ces deux

variables (r = 0,20) (tableau 6).

Une relation hautement significative a été obtenue entre la masse et le volume des

fruits (figure 23) et présente un coefficient de corrélation de r = 0,96. On observe

donc que la masse d’un fruit est directement proportionnelle à son volume.

La mise à fruit a peu d’impact sur le volume de ces derniers, comme le démontre

la corrélation en figure 24, avec un r = 0,20. Cette courbe corrobore et illustre les

résultats obtenus en 2.4.3.

Page 71: IMPACT D’UNE POLLINISATION ASSISTÉE SUR LA PRODUCTION

61

102030405060708090

100110120130

Mis

e à

fruit

(%)

200 400 600 800 1000 1200Nombre de boutons floraux

Figure 22 : Relation entre le pourcentage de mise à fruit et le nombre de boutons

floraux constituant une inflorescence.

2

3

4

5

6

Mas

se d

e 50

frui

ts (g

)

40 50 60 70 80 90 100 110 120 130 140Volume moyen de 50 fruits

Figure 23 : Relation entre la masse des fruits et le volume des fruits (mm3).

(mm3)

Page 72: IMPACT D’UNE POLLINISATION ASSISTÉE SUR LA PRODUCTION

62

102030405060708090

100110120130

Mis

e à

fruit

(%)

40 50 60 70 80 90 100 110 120 130 140Volume moyen de 50 fruits

Figure 24 : Relation entre le pourcentage de mise à fruit et le volume des fruits (mm3).

La technique de comptage par photographie possède une erreur expérimentale qui

sous-estime le nombre de boutons floraux. Cette erreur s’exprime par les valeurs

surélevées des pourcentages retrouvés dans les figures 22 et 24. Malgré cette

limitation, il a été possible de distinguer l’effet des différents traitements de

pollinisation sur la mise à fruit.

Tableau 6 : Coefficients de corrélation des relations linéaires entre différentes variables relatives à la mise à fruit.

Variables Coefficient de

corrélation Probabilité

Mise à fruit (%) Ln (nombre de boutons floraux) 0,20 0,0012

Masse 50 fruits (g) Ln (volume moyen des fruits) 0,96 <0,0001

Mise à fruit (%) Ln (volume moyen des fruits) 0,20 0,0022

Le seuil de signification de 0,005.

(mm3)

Page 73: IMPACT D’UNE POLLINISATION ASSISTÉE SUR LA PRODUCTION

63

2.5 DISCUSSION Les résultats obtenus sur le site expérimental de Lacolle confirment l’hypothèse de

départ : un rendement supérieur de la mise à fruit a été observé une suite à un

apport exogène de pollen. Quelques principes de base ont également pu être

identifiés grâce aux résultats des analyses de corrélation. Premièrement, puisque

le nombre de fleurs formant une inflorescence n’influence pas la mise à fruit finale,

l’utilisation d’inflorescences de grosseur variable lors des expérimentations de

pollinisation assistée ne devrait pas entraîner de biais. Un constat semblable a été

relevé chez l’Asclepias speciosa Torr. (Finer et Morgan, 2003). Pour expliquer la

stabilité de la mise à fruit chez cette espèce, ces auteurs ont mentionné une

stratégie évolutive intéressante : « l’hypothèse du dilemme de la plante ». Cette

hypothèse stipule que les individus à larges inflorescences attirent davantage

d’insectes pollinisateurs mais n’ont pas une mise à fruit supérieure puisqu’ils

favorisent à la fois un plus haut taux de geitonogamie. Ainsi, petites et larges

inflorescences atteignent un équilibre différent entre l’autogamie et la xénogamie

tout en conservant une fructification équivalente.

Une autre relation a mis en évidence que le volume des fruits ne variait pas selon

le traitement de pollinisation et le taux de mise à fruit final. On conclut donc qu’une

quantité supérieure de fruits engendrerait directement un meilleur rendement. Le

succès de la pollinisation serait davantage lié à la disponibilité en pollen qu’aux

ressources, la plante ayant démontré sa capacité physiologique à produire

davantage en produisant une mise à fruit supérieure de 16 % suite à un apport

supplémentaire en pollen.

À Lacolle, la fructification inférieure des inflorescences préservées d’une

application de pollen (T5) comparativement à la fructification d’inflorescences

ayant reçu du pollen exogène (T3), sur le même plant, suggère également que la

limitation de la mise à fruit est due à la quantité de pollen plutôt qu’aux ressources

disponibles pour la fructification.

Page 74: IMPACT D’UNE POLLINISATION ASSISTÉE SUR LA PRODUCTION

64

Au cours des essais effectués en 2005, les pourcentages de mise à fruit ont

augmenté légèrement mais significativement suite à l’agitation des inflorescences

(T2) et du balayage au pinceau (T4), soit 6 % comparativement à la pollinisation

naturelle. Encore une fois, l’augmentation de la quantité de pollen pourrait

expliquer cette production de fruits supplémentaire.

Par contre, plusieurs raisons peuvent expliquer l’impact positif du passage d’un

pinceau. Le mouvement du pinceau lui-même sur le stigmate pourrait favoriser

l’adhérence des grains de pollen et leur hydratation rapide par la suite, favorisant

ainsi le développement des tubes polliniques (Sanchez et al., 2004). Cette idée est

légitimée du fait que le stigmate du sureau est du type « sec » (Bolli, 1994), donc

naturellement moins adhérant que les stigmates de type « humide ». Le traitement

correspondant au balayage de l’inflorescence par un pinceau sans ajout de pollen

démontre un effet positif du mouvement du pinceau en augmentant la mise à fruit

de 6 % par rapport au témoin. Ce phénomène rappelle l’action des insectes

pollinisateurs qui dispersent autant du pollen autogame et geitonogame que du

pollen xénogame (Thompson, 2001).

Comme le passage d’un pinceau, l’agitation manuelle des inflorescences (T2)

favorise une dispersion importante d’auto-pollens matures de la même

inflorescence (geitonogamie) sans toutefois apporter autant de pollen aux fleurs

que le traitement correspondant à la pollinisation exogène. Les espèces à larges

inflorescences, comme les panicules du sureau, possèdent un meilleur potentiel de

dispersion du pollen par leur étendue et favorisent donc, comme mentionné

précédemment, la geitonogamie (Finer et Morgan, 2003).

La diversité génétique présente dans les plantations pourrait également expliquer

une partie des résultats obtenus. L’apport de pollen d’individus différents

(xénogamie) améliore généralement le succès de la reproduction (Kozma et al.,

2003). Bien que le pollen utilisé lors des pollinisations assistées provienne de

plants indigènes, tout comme ceux ayant été pollinisés, les plantations étaient

hétérogènes. En fait, les boutures ont été prélevées sur plusieurs pieds-mères. Il

Page 75: IMPACT D’UNE POLLINISATION ASSISTÉE SUR LA PRODUCTION

65

existe donc une certaine variation génétique au sein d’une plantation

expérimentale.

Une hypothèse émise par Stephenson (1981) propose une explication à la

différence de mise à fruit obtenue entre les traitements. Celui-ci rapporte que chez

les fleurs pollinisées librement, comme pour le traitement T1, l’avortement peut

être dû à un apport de grains de pollen incompatibles. Ces derniers peuvent

provenir d’espèces différentes présentes à proximité et avoir été transportés par le

vent ou par les insectes. Chez plusieurs espèces, lorsqu’un pollen adhère à la

surface du stigmate ou émet un tube pollinique, quelque soit sa vigueur et sa

source, il inhibe l’action des grains de pollen déposés subséquemment (Wilcock et

Neiland, 2002). Or, le témoin naturel est plus susceptible à une telle pollinisation

hétérospécifique que les traitements avec intervention qui en reçoivent en

proportion négligeable.

À Lacolle, en 2004, l’absence de différences entre le traitement témoin et celui de

l’agitation manuelle pourrait s’expliquer par une grande importance du facteur vent.

La parcelle est en effet très exposée et le vent peut avoir annulé l’effet du

traitement lui-même (Kelly et al., 2001). De plus, puisque les plants étaient plus

petits donc moins denses en inflorescences, la dispersion du pollen par agitation

mécanique s’est peut-être révélée inefficace.

Il est également ressorti des résultats des précédentes expériences une

augmentation du taux de mise à fruit d’environ 20 % au cours de la saison de 2005

par rapport à la saison 2004. Bien que les conditions culturales soient demeurées

les mêmes, plusieurs facteurs peuvent expliquer une telle hausse : l’âge des

plants, les conditions météorologiques favorables et la présence accrue de

pollinisateurs. Stephenson (1981) affirme que, dans plusieurs plantations d’arbres

fruitiers, il existe une forte relation négative entre la surface foliaire et l’avortement

des fruits. La réduction de la surface foliaire entraîne donc une diminution de la

mise à fruit, puisqu’en réduisant la capacité photosynthétique les ressources

disponibles à la fructification diminuent tout autant. De plus, il est bien connu que

les conditions climatiques jouent un rôle important pour toute production fruitière

Page 76: IMPACT D’UNE POLLINISATION ASSISTÉE SUR LA PRODUCTION

66

(Kozma et al., 2003). Bien qu’elles soient difficilement mesurables, on a remarqué,

au cours de la saison 2005, une accumulation plus rapide des degrés-jours

comparativement à l’année précédente. Au sommet de la floraison, le nombre de

degrés-jours cumulés était de 795 en 2005 comparé à 358 en 2004 (annexe 3).

Sans pouvoir identifier clairement les causes d’une telle augmentation, il est

maintenant connu que le S. nigra ssp. canadensis peut présenter une mise à fruit

allant jusqu’à 92 %. Difficile de produire davantage! En effet, peu d’arbustes et

d’arbres fruitiers produisent autant. Les mises à fruits moyennes chez les petits

fruits comme la framboise et la fraise se situent entre 80 et 95 % (Kozma et al.,

2003). Pour le bleuet et la canneberge, la mise à fruit est légèrement plus basse,

soit 60 à 80 % (Cane et Schiffauer, 2003; Dogterom et al., 2000). Pour le raisin, la

mise à fruit optimale se situe autour de 35 % (Sampson et al., 2001). Chez les

arbres fruitiers, ce ratio est nettement inférieur, avec un taux de 3 à 20 % pour la

pomme et la poire (Kozma et al., 2003).

Au site de Beauharnois, en 2005, aucune différence entre les traitements n’a été

remarquée. La mise à fruit se situait entre 84 à 91 %. Des facteurs d’ordre

physiologique pourraient expliquer cette stabilité. En effet, les plants de cette

plantation étaient plus vieux et plus développés que ceux du site de Lacolle.

D’ailleurs, Ayre et Whelan (1989) rapportent que, chez de nombreuses plantes

hermaphrodites, la production de fleurs en excès et l’avortement d’un certain

nombre de fleurs seraient un phénomène préprogrammé, un phénomène évolutif

assurant un nombre stable et suffisant de fleurs, répondant aux imprévus de la

nature. Vus sous cet angle, il serait possible que les plants matures du site de

Beauharnois, comparativement à ceux de Lacolle, aient atteint cet équilibre. La

densité et la proximité des inflorescences dans cette plantation permettaient à une

quantité plus importante de grains de pollen de se disperser par le vent ou les

insectes. Ces facteurs environnementaux biotiques et abiotiques pourraient

annuler l’effet de l’apport supplémentaire de pollen au pinceau (Wilcock et Neiland,

2002).

Page 77: IMPACT D’UNE POLLINISATION ASSISTÉE SUR LA PRODUCTION

67

Des facteurs pédologiques pourraient également expliquer l’absence de différence

entre les mises à fruit sur la plantation de Beauharnois. Stephenson (1981) avance

que, sur les sols riches en azote, les ovules ont une longévité plus grande et

peuvent être fécondés suite à l’autopollinisation. Ainsi, lorsque l’azote est rare, les

ovules dégénèrent avant que les autopollens ne les fécondent. Or, les plants du

site de Beauharnois ont été fertilisés tandis que les plants du site de Lacolle n’ont

pas reçu cet intrant, puisque cultivés avec du trèfle en culture biologique.

L’implantation du trèfle est récente et son apport réel en azote est inconnu

(CRAAQ, 2003). Les études de sols n’ayant pas été détaillées lors des

expériences de pollinisation, ces explications demeurent incomplètes et ne

permettent pas de comparaison entre les deux sites.

Les résultats obtenus sur ces deux parcelles expérimentales permettent donc de

clarifier quelques points, mais il demeure un questionnement sur la raison qui

justifie une augmentation de la mise à fruit. Est-ce la quantité ou la source de

pollen apporté qui stimule la production de fruits ou est-ce la combinaison de ces

deux facteurs?

Page 78: IMPACT D’UNE POLLINISATION ASSISTÉE SUR LA PRODUCTION

68

3 CHAPITRE 3 EFFET DE LA POLLINISATION CROISÉE SUR

LA MISE À FRUIT 3.1 INTRODUCTION Les diverses observations et expériences présentées jusqu'à maintenant sur le

S. nigra ssp. canadensis ont permis d’aborder les limites de la pollinisation par

rapport au développement floral et à la disponibilité du pollen.

En Europe, des essais de pollinisation assistée avec la sous-espèce nigra ont

démontré la présence d’auto-incompatibilité partielle (Bieniasz et Lech, 2002; Bolli,

1994). Lors de ces essais, les mises à fruit découlant de l’autopollinisation étaient

pratiquement nulles. Cependant, les plantations constituées uniquement de plants

indigènes de sureau du Canada étudiées jusqu’à maintenant produisaient une

mise à fruit naturelle et importante qui se situait entre 60 et 90 % selon les années

(voir chapitre 2). Qu’en est-il alors de cette relation d’incompatibilité? Est-elle

existante et qu’elle en est l’importance chez la sous-espèce canadensis? Pour

identifier les niveaux d’incompatibilité entre les cultivars d’une espèce désignée, la

technique d’application manuelle de pollen sur les stigmates récepteurs est

couramment utilisée (Reed, 2004 a,b) et le nombre de fruits atteignant leur

maturité indique la capacité de fécondation d’un pollen exogène.

Dans ce chapitre, les expériences de pollinisation croisée ont été menées en serre

pour séparer spatialement les plants pollinisateurs des plants pollinisés. Les

cultivars Kent, Scotia et York ont été retenus puisque leurs périodes de floraison

diffèrent les unes des autres et couvrent l’étendue de la floraison de cette sous-

espèce.

Page 79: IMPACT D’UNE POLLINISATION ASSISTÉE SUR LA PRODUCTION

69

3.2 HYPOTHÈSE ET OBJECTIFS Se basant sur les pratiques culturales développées pour le sureau noir, nous

avons formulé l’hypothèse suivant à l’effet que le sureau du Canada est

partiellement auto-incompatible et que la pollinisation croisée favorise la mise à

fruit comparativement à l’autopollinisation. Pour vérifier cette hypothèse, les sous

objectifs fixés étaient :

• Comparer la viabilité du pollen provenant de cinq cultivars et de plants

indigènes cultivés en champ et en serre;

• Vérifier le phénomène d’incompatibilité chez des plants indigènes par un

essai comparant la mise à fruit suite à l’autogamie, à la geitonogamie et à la

xénogamie;

• Vérifier la compatibilité du pollen des cultivars Kent, Scotia et York avec les

plants indigènes par la pollinisation assistée;

• Identifier, grâce à des traitements d’autogamie, de geitonogamie et à trois

traitements de xénogamie, les relations les plus productives entre

« couples » pollinisateur-récepteur.

3.3 MATÉRIEL ET MÉTHODES

3.3.1 Matériel végétal La première expérience visait à comparer les potentiels de germination des grains

de pollen provenant des cultivars Kent, Nova, Scotia, Victoria et York et de plants

indigènes cultivés au champ dans la plantation de l’Acadie (tableau 2).

Page 80: IMPACT D’UNE POLLINISATION ASSISTÉE SUR LA PRODUCTION

70

La deuxième expérience, menée dans les serres du CRDH, a permis de comparer

la mise à fruit de plants indigènes pollinisés avec différentes sources de pollen.

Des plants indigènes âgés de trois ans, provenant de la pépinière Arbotech (La

Pocatière), ont été empotés dans des pots de 20 l et utilisés comme plants

femelles. Les plants des cultivars Kent et York et des plants indigènes utilisés

comme pollinisateurs, âgés de 2 ans, provenaient de boutures faites à la ferme de

l’Acadie et étaient empotés en pots de 6 l.

Le troisième essai a été mené dans la serre de l’Acadie et visait à comparer la

mise à fruit de cultivars pollinisés par diverses sources de pollen. Les plants

femelles des cultivars Kent, Scotia et York provenaient d’un lot de plants bouturés

à la ferme de Frelishburg, âgés de 2 ans et empotés en pots de 10 l. Les plants

pollinisateurs des cultivars Kent, Scotia, York et les plants indigènes provenaient

des mêmes lots que ceux de l’expérience précédente.

3.3.2 Entretien et conditions de croissance du matériel végétal en serre

Le 1er novembre 2004, les plants ont été effeuillés avant de les placer dans une

chambre froide (-2 à 2 °C), le 15 novembre 2004, pour une période de deux mois.

Cet effeuillage avait pour but de diminuer les risques de pourriture. Le 4 janvier

2005, les plants nécessaires à la deuxième expérience ont été transférés dans une

serre du CRDH, à une température de 15 °C pour deux semaines. Un traitement à

l’huile de dormance a été effectué sur tous les plants pour détruire les ravageurs

passant l’hiver sur l’écorce des arbustes comme les cochenilles et les tétranyques.

Le savon insecticide Safer a également été appliqué au niveau du sol à raison de

20 ml/l.

Pendant les 4 semaines suivantes, une fertilisation au 20-20-20 à raison de

350 ppm d’azote a été appliquée une fois par semaine. Par la suite, une

fertilisation au 15-15-18 et au 15-30-15 en mélange moitié/moitié a été appliquée

hebdomadairement jusqu’à la récolte des fruits à raison de 350 ppm d’azote. Les

Page 81: IMPACT D’UNE POLLINISATION ASSISTÉE SUR LA PRODUCTION

71

conditions de photopériode et de température ont été détaillées dans la section

1.3.1.

Les plants femelles indigènes ont été placés dans une serre et les plants

pollinisateurs indigènes, Kent et York, dans une autre.

Le 14 mars 2005, un autre lot de plants a été sorti de la chambre froide, traités à

l’huile de dormance et placés dans une serre de plastique située à la ferme

expérimentale d’AAC de l’Acadie. Les conditions d’ensoleillement étaient

naturelles et la température était tributaire des conditions météorologiques de la

saison. Les détails de la serre ont également été mentionnés à la section 1.3.1. La

dimension de cette serre a permis de séparer physiquement les plants femelles et

les plants pollinisateurs, chacun à une extrémité de la serre. Les plants ont été

fertilisés selon la même programmation que ceux de l’expérience qui s’est

déroulée dans les serres du CRDH de janvier à mars.

3.3.3 Traitements phytosanitaires Tout au cours des deux expériences menées en serre, des traitements de lutte

biologique ont été requis pour prévenir les ravages du perceur du sureau

(Achatodes zeae Harris). Dans les serres du CRDH, le 14 février 2005, une

application de Bioprotec, contenant la bactérie Bacillus thuringiensis, a été faite à

raison de 2 ml/l contre ce ravageur. Les ravages étant trop sévères, un traitement

chimique au Dursban 2E (4 ml/l) a été nécessaire, le 17 février, afin de contrôler

cet insecte. Pour limiter l’invasion des tétranyques à 2 points (Tetranychus urticae

Koch), des prédateurs ont été introduits à partir du 1er mars via les produits Thripex

et Spidex à une fréquence hebdomadaire. Cette fois-ci encore, il a fallu effectuer

un traitement chimique contre ce ravageur. Du Kelthane 50W a été appliqué à une

concentration de 4,2 g/l les 30 mars et 12 avril.

Dans la serre de l’Acadie, un traitement de lutte biologique au Provitec (2 ml/l) a

été appliqué aux 2 semaines à partir du 15 avril pour prévenir les ravages du

Page 82: IMPACT D’UNE POLLINISATION ASSISTÉE SUR LA PRODUCTION

72

perceur. Le 2 juin, un traitement au Kelthane 50W (4,2 g/l) a été fait contre les

tétranyques à deux points. Face à la résistance de ces ravageurs, un autre produit

a été utilisé le 17 juin, le Vendex à raison de 1 g/l.

3.3.4 Méthodologie

3.3.4.1 Comparaison du potentiel germinatif des grains de pollen recueillis dans la plantation de l’Acadie

Pour évaluer la viabilité des grains de pollen provenant des cinq cultivars et des

plants indigènes, la méthodologie décrite au chapitre 1 a été utilisée. La récolte a

été faite de manière aléatoire avec 4 répétitions de 3 échantillons pour les cultivars

Kent, Nova et les plants indigènes et avec 2 répétitions de 3 échantillons pour les

cultivars Scotia, Victoria et York. Le pollen a été recueilli les 25 et 27 juin et le 1er

juillet 2004. La viabilité du pollen des cultivars et des plants indigènes a été

comparée à l’aide d’une ANOVA suivie d’un test de Tukey pour un seuil de

signification de 0,05.

3.3.4.2 Traitements de pollinisation et dispositif expérimental

Pour l’expérience menée dans les serres du CRDH, 5 traitements de pollinisation

ont été appliqués sur les plants indigènes : (T1) aucun traitement, (T2) utilisation

d’un pinceau sans apport de pollen, (T3) apport de pollen de plants indigènes, (T4)

apport de pollen du cultivar Kent et (T5) apport de pollen du cultivar York. Toutes

les inflorescences d’un plant ont reçu un traitement.

Le dispositif expérimental était composé de 3 blocs complets aléatoires, 5

traitements et 2 répétitions (3x5x2). Chaque plant pollinisé constituait un bloc. À

l’intérieur de ce bloc, les inflorescences sélectionnées au hasard recevaient un

traitement donné de pollinisation au fur et à mesure de leur ouverture (plan en

annexe 10).

Page 83: IMPACT D’UNE POLLINISATION ASSISTÉE SUR LA PRODUCTION

73

La deuxième expérience, qui s’est déroulée dans la serre de l’Acadie, visait à

évaluer les traitements de pollinisation sur 3 cultivars de sureau. Les plants étaient

disposés en blocs complets aléatoires comprenant 8 blocs, 6 traitements et

2 répétitions (8x6x2), mais les traitements étaient légèrement différents. Les

cultivars Kent, York et Scotia ont reçu les traitements de pollinisation suivants :

(T1) aucun traitement, (T2) utilisation d’un pinceau sans apport de pollen, (T3)

apport de pollen de plants indigènes, (T4) apport de pollen du cultivar Kent, (T5)

apport de pollen du cultivar York et (T6) apport de pollen du cultivar Scotia. Le

traitement associé à l’autopollinisation était propre à chaque cultivar (annexe 11).

Lors de ces pollinisations, du pollen frais était appliqué au pinceau. Celui-ci était

récolté en secouant les inflorescences dans un contenant de plastique. Un même

lot de pollen était utilisé pour tous les blocs. La viabilité des lots de pollen utilisés a

été vérifiée selon la méthode développée au chapitre 1.

3.3.5 Récolte des données et analyses statistiques Les dénombrements des boutons floraux et des fruits ont été faits selon la

méthode décrite au chapitre 2. À partir du calcul des mises à fruit, les analyses

statistiques ont été effectuées sur les moyennes de chaque traitement pour vérifier

l’effet différentiel de ces derniers sur le pourcentage de mise à fruit. Pour ce faire,

le test non paramétrique de Kruskal-Wallis conjointement à un test de Chi carré a

été appliqué. Puis une ANOVA a été réalisée, suivie d’un test de Tukey à un seuil

de signification de 0,05.

L’analyse de la deuxième expérience a été réalisée de façon séparée pour chaque

cultivar receveur. Les analyses ont été faites à l’aide du logiciel JMP de SAS

Institute, version 5.0.1.

Page 84: IMPACT D’UNE POLLINISATION ASSISTÉE SUR LA PRODUCTION

74

3.4 RÉSULTATS

3.4.1 Comparaison du pouvoir germinatif des grains de pollen entre cultivars et plants indigènes

Les essais de germination des grains de pollen prélevés sur les cultivars et les

plants indigènes de la plantation de l’Acadie ont montré des différences

significatives de viabilité (figure 25). En effet, les taux de germination mesurés sur

les cultivars Kent et Nova étaient statistiquement supérieurs aux taux de

germination obtenus avec les cultivars Scotia, Victoria et York (50 et 54 % versus

29, 25 et 37 % respectivement). Le taux de germination des grains de pollen du

cultivar York, contrairement à celui des cultivars Scotia et Victoria, ne diffère pas

de celui mesuré sur les plants indigènes (37 et 48 %).

Figure 25 : Germination des grains de pollen de différents cultivars de Sambucus

nigra ssp. canadensis et de plants indigènes cultivés au champ à l’été 2004. Les lettres correspondent à des moyennes significativement différentes, selon le test de Tukey à un seuil de signification de 0,05.

0 5

10 15 20 25 30 35 40 45 50 55 60

Indi

gène

Ken

t

Nov

a

Sco

tia

Vic

toria

Yor

k

Cultivar

ab a

a

c c

bc

Taux

de

germ

inat

ion

des

grai

ns d

e po

llen

(%)

Page 85: IMPACT D’UNE POLLINISATION ASSISTÉE SUR LA PRODUCTION

75

3.4.2 Viabilité du pollen au cours des expériences menées en serre

La viabilité du pollen a été vérifiée tout au long des pollinisations effectuées au

cours des expériences menées en serre afin de s’assurer de la constance des lots

utilisés. Les résultats de l’expérience de pollinisation croisée sur des plants

indigènes conduite au CRDH sont présentés à la figure 26. Les moyennes sont de

33, 46 et 44 % pour les plants indigènes, le cultivar York et le cultivar Kent

respectivement. La grande variabilité entre les données est due au faible nombre

de répétitions effectuées.

0

10

20

30

40

50

60

Indigène York Kent

Cultivar

Taux

de

germ

inat

ion

des

grai

ns d

e po

llen

(%)

Figure 26 : Viabilité du pollen des cultivars Kent, York et de plants indigènes utilisés lors de l'expérience de pollinisation assistée dans les serres du CRDH au cours de l’hiver 2005.

Page 86: IMPACT D’UNE POLLINISATION ASSISTÉE SUR LA PRODUCTION

76

La figure 27 illustre la viabilité moyenne des lots de pollen des plants indigènes à

l’intérieur de la période de floraison des plants indigènes femelles. Il est intéressant

de remarquer que les taux de germination fluctuent entre 25 et 35 %. Aussi, la

durée de la floraison s’est étendue sur une période de temps plus longue qu’en

condition naturelle, soit sur près de deux mois. Bien qu’au 3 mars,

l’épanouissement des fleurs a permis d’obtenir 30 % de d’inflorescences ouvertes

par rapport au total, le taux d’inflorescences ouvertes est demeuré généralement

bas, entre 10 et 15 % pour les semaines suivantes.

0

5

10

15

20

25

30

35

40

45

28 février 3 mars 10 mars 14 mars 16 mars 21 mars

Date de prélèvement du pollen

% d

'inflo

resc

ence

s ou

vert

es

Viabilité dupollenCourbe defloraison

Figure 27 : Viabilité du pollen au cours de la floraison des plants indigènes lors de

l'expérience de pollinisation assistée sur les plants indigènes dans les serres du CRDH, à l’hiver 2005.

Les résultats associés aux pollinisations assistées de la deuxième expérience sont

présentés à la figure 28 et correspondent à 27, 36, 34 et 28 % de germination pour

les grains de pollen des plants indigènes et des cultivars York, Kent et Scotia

Taux

de

germ

inat

ion

des

grai

ns d

e po

llen

(%)

Page 87: IMPACT D’UNE POLLINISATION ASSISTÉE SUR LA PRODUCTION

77

respectivement. Ces valeurs sont légèrement plus basses que celles obtenues au

cours de l’expérience précédente, mais elles demeurent similaires entre les

sources de pollen.

0

5

10

15

20

25

30

35

40

45

50

Indigène Kent Scotia York

Figure 28 : Viabilité du pollen des plants indigènes et de cultivars utilisés comme pollinisateurs lors de l'expérience de pollinisation assistée sur les cultivars dans la serre de l’Acadie, au printemps 2005.

3.4.3 Mise à fruit Au cours des expériences effectuées dans les serres, il a été constaté que les

plants de sureau étaient susceptibles aux tétranyques à deux points et aux

perceurs du sureau (description en annexe 12). Pour contrôler ce dernier, l’emploi

d’un insecticide biologique à base de Bacillus thuringiensis a été très efficace

lorsque utilisé en prévention, soit dès le tout début de la croissance végétative. Il

est également intéressant de noter que les plants ont bien supporté les chaleurs

élevées dès leur sortie des chambres froides. Il faut préciser que, dans les

premiers jours, les températures enregistrées dans les serres ont dépassé le 15 °C

Taux

de

germ

inat

ion

des

grai

ns d

e po

llen

(%)

Cultivar

Page 88: IMPACT D’UNE POLLINISATION ASSISTÉE SUR LA PRODUCTION

78

programmé; des hausses de température allant jusqu’à 25 °C ont été observées

les jours ensoleillés.

Pour les essais de pollinisation croisée sur des plants indigènes (première

expérience), seuls les apports supplémentaires en pollen provenant des cultivars

Kent et York ont permis une mise à fruit de l’ordre de 60 et 56 % respectivement

(tableau 7).

Tableau 7 : Taux de mise à fruit de plants indigènes de Sambucus nigra ssp.

canadensis suite à des pollinisations croisées au cours d’une expérience conduite en serre à l’hiver 2005.

Traitements Mise à fruit (%)

T1 Témoin : sans traitement 3b

Autopollinisation

T2 Témoin : pinceau sans apport de pollen 2b

T3 Pollen exogène de plants indigènes 1b

Pollinisation croisée

T4 Pollen exogène du cultivar Kent 60a

T5 Pollen exogène du cultivar York 56a

Les lettres correspondent à des valeurs significativement différentes selon le test de Tukey à un seuil de signification de 0,05

Pour les traitements T1, T2 et T3, les inflorescences ont fané très rapidement et la

mise à fruit a été presque nulle. De manière très partagée, les traitements

d’autopollinisation ont mené à l’avortement des fruits tandis que les pollinisations

croisées ont permis la fécondation et la maturation d’un pourcentage de fruits

(p < 0,0001) comparable aux résultats obtenus au chapitre 2, en condition de plein

champ. Bien que les données ne respectaient pas les postulats d’homogénéité et

Page 89: IMPACT D’UNE POLLINISATION ASSISTÉE SUR LA PRODUCTION

79

de normalité de la variance essentiels à la validation d’une ANOVA, le test non

paramétrique de Kruskal-Wallis a indiqué un différence significative entre les

traitements avec une probabilité supérieure à 0,0001. Ainsi, la procédure

paramétrique habituelle a été validée.

Les résultats ont été légèrement différents pour l’essai conduit dans la serre de

l’Acadie (deuxième expérience), effectué avec des cultivars comme plants femelles

(tableau 8). Tout comme les résultats obtenus dans l’expérience précédente, la

mise à fruit était pratiquement nulle lorsqu’aucune intervention n’était faite, et ce,

pour les cultivars Kent, Scotia et York. Par contre, le traitement témoin avec

pinceau sans apport de pollen, qui représente de la geitonogamie, a permis une

mise à fruit de 20, 25 et 23 % pour les cultivars Kent, York et Scotia

respectivement. Ce traitement a montré, pour les trois cultivars étudiés, des taux

de mise à fruit statistiquement inférieurs à ceux mesurés et obtenus pour les

quatre traitements de pollinisation assistée par un apport supplémentaire en

pollen. En effet, ces derniers sont significativement supérieurs (p < 0,0001) aux

traitements sans apport exogène de pollen.

Le cultivar Kent est, parmi les trois cultivars étudiés, celui qui a répondu davantage

à la source de pollen utilisée. Son taux de mise à fruit se situait à 31 % lorsque les

plants étaient pollinisés avec du pollen provenant du cultivar Kent

(autopollinisation) alors que ce taux se situait à 49 % de mise à fruit lorsqu’ils

étaient pollinisés avec du pollen de plants indigènes. Ces résultats sont différents

de ceux de l’expérience précédente par le succès des autopollinisations : 31, 43 et

41 % de mise à fruit ont été obtenus suite à l’autopollinisation assistée des

cultivars Kent, Scotia et York respectivement. Chez le cultivar Scotia, la mise à fruit

était supérieure lorsque le pollen provenait du cultivar York (52 %)

comparativement à un apport de pollen de Kent (30 %). Quant au cultivar York, sa

mise à fruit n’a pas variée significativement suite au apport de pollen de source

différente et se situait entre 41 à 47 %.

Page 90: IMPACT D’UNE POLLINISATION ASSISTÉE SUR LA PRODUCTION

80

Tableau 8 : Taux de mise à fruit des cultivars Kent, York et Scotia suite à des pollinisations croisées menées en serre au printemps 2005.

Mise à fruit (%)

Traitements Kent Scotia York

T1 Témoin : Aucun traitement 6e 8d 6c

T2 Témoin : pinceau sans pollen 20d 23c 25b

T3 Pollen exogène de plants indigènes 49a 47ab 47a

T4 Pollen exogène du cultivar Kent *31c 39b 46a

T5 Pollen exogène du cultivar York 47ab 52a *41a

T6 Pollen exogène du cultivar Scotia 37bc *43ab 43a

Les lettres correspondent à des valeurs significativement différentes selon le test de Tukey à un seuil de signification de 0,05. *correspond au traitement d’autopollinisation par un apport de pollen exogène.

3.5 DISCUSSION Les essais de viabilité des grains de pollen n’ont pas permis d’identifier un cultivar

particulièrement performant car la viabilité des grains de pollen récoltés sur les

différents cultivars différait entre les essais en serre et ceux en champ. Les taux de

germination des grains de pollen des cultivars Scotia, Victoria et York étaient

inférieurs à ceux des plants indigènes et des cultivars Kent et Nova au champ,

tandis qu’en serre, la viabilité des grains de pollen utilisés lors des pollinisations

assistées était semblable pour toutes les sources. Cependant, cette homogénéité

retrouvée dans les essais en serre a permis d’effectuer des comparaisons lors des

essais de pollinisation croisée avec trois sources différentes de pollen. Le nombre

de répétitions étant faible lors de ces essais sur la viabilité des pollens, des

expériences supplémentaires mériteraient d’être effectuées pour tirer des

conclusions plus exactes.

Page 91: IMPACT D’UNE POLLINISATION ASSISTÉE SUR LA PRODUCTION

81

En démontrant un phénomène d’auto-incompatibilité, les essais de pollinisation

assistée sur des plants indigènes ont permis de vérifier l’hypothèse de départ. En

effet, l’apport de pollen indigène n’a pas permis une mise à fruit intéressante (1 %)

sur des plants indigènes alors que le pollen provenant des cultivars Kent et York a

permis une mise à fruit de près de 60 %. Ces résultats soulignent l’importance de

la xénogamie sur le succès de la fécondation de la sous-espèce canadensis et

corroborent les résultats de Bieniasz et Lech (2002) obtenus pour la sous-espèce

européenne nigra.

Il est tout de même surprenant d’observer, suite à l’autopollinisation, une mise à

fruit quasiment nulle dans des conditions de serre alors que les taux de mise à fruit

obtenus en conditions naturelles étaient élevés. Rappelons que les résultats de

mise à fruit des essais présentés au chapitre 2, consistant en un apport

supplémentaire de pollen indigène sur des plants femelles indigènes, variaient

entre 74 et 90 % selon l’année et le site. L’absence de mise à fruit suite à un

apport de pollen indigène en serre pourrait s’expliquer par la faible variabilité

génétique entre les plants pollinisateurs et les plants pollinisés puisque ceux-ci

étaient des clones, ce qui n’était pas le cas des plantations de jeunes plants

indigènes propagés par boutures et utilisés dans les essais au champ (chapitre 2).

L’utilisation de plants génétiquement semblables dans le dispositif en serre a

toutefois permis de vérifier l’effet positif de la pollinisation croisée,

comparativement à l’autopollinisation, sur la mise à fruit du sureau du Canada.

Une telle relation d’auto-incompatibilité a aussi été remarquée chez des espèces à

larges inflorescences comme le Cornus et l’Hydrangea suite à des essais de

pollinisation assistée (Reed, 2004 a,b).

Les résultats de l’expérience portant sur la pollinisation croisée entre cultivars

étaient différents de ceux obtenus lors de l’utilisation de plants femelles indigènes.

Tout d’abord, le traitement consistant en un balayage des inflorescences avec un

pinceau sans apport de pollen a démontré l’effet positif de la quantité de pollen qui

est mise en contact avec le stigmate comparativement au témoin sur lequel aucun

pollen n’était dispersé. Par contre, le taux de mise à fruit atteint suite à ce

Page 92: IMPACT D’UNE POLLINISATION ASSISTÉE SUR LA PRODUCTION

82

traitement d’autopollinisation était de 20 à 25 % seulement comparativement aux

autopollinisations assistées qui atteignaient une mise à fruit supérieure variant de

31 à 43 %. Bien que l’effet du mouvement du pinceau sur les inflorescences ait été

significatif, la quantité de pollen ainsi dispersé était probablement plus faible que

celle des traitements de pollinisation assistée, le pinceau ne dispersant que du

pollen des fleurs de l’inflorescence (geitonogamie).

Lors de cette expérimentation, la source de pollen utilisée pour les pollinisations

assistées a eu une influence variée sur la mise à fruit dépendamment des cultivars

utilisés. Seul le cultivar Kent a démontré une auto-incompatibilité partielle. En effet,

une mise à fruit supérieure de 18 % a été notée avec un apport de pollen de

source indigène comparativement à une autopollinisation. Au sein d’une

plantation, il serait donc opportun de planter le cultivar Kent à proximité de plants

indigènes afin de permettre une pollinisation optimale. Le cultivar Scotia a

également démontré une meilleure compatibilité avec le pollen du cultivar York

plutôt que le pollen du cultivar Kent en produisant une mise à fruit supérieure de

13 %.

Plusieurs cas similaires ont été rapportés dans la littérature. Pour l’espèce

Macadamia ternifolia F. Muell., partiellement auto-fertile, les fleurs ayant été

autopollinisées se développaient seulement lorsque la mise à fruit est faible

(Stephenson, 1981). Chez Blandfordia grandiflora R.Br., également partiellement

auto-fertile, les traitements simultanés d’autopollinisation et de pollinisation croisée

entraînaient une limitation de la fécondation (Wilcock et Neiland, 2002). Dans ce

cas, la fécondation des ovules par l’autopollen réduisait la disponibilité de plusieurs

ovules au pollen exogène, diminuant la fécondité de 50 %. Les particularités de

ces espèces démontrent que les relations de fertilité sont régulées de manière

complexe et que la méthodologie appliquée lors des essais présentés dans cette

étude ne permet pas d’identifier les sources d’incompatibilité potentielles.

Lors des deux expériences effectuées en milieu clos, le traitement témoin, pour

lequel la distribution en pollen était nulle, n’a pas permis le développement des

fruits. Ce résultat souligne l’importance des conditions environnementales comme

Page 93: IMPACT D’UNE POLLINISATION ASSISTÉE SUR LA PRODUCTION

83

le vent et l’action de l’entomofaune dans la distribution du pollen (Wilcock et

Neiland, 2002).

Bien que les résultats des deux expériences de pollinisation assistée divergent,

une constante demeure : le sureau du Canada exprime une auto-incompatibilité

partielle lorsqu’il est cultivé en milieu clos et une quantité supplémentaire de pollen

est nécessaire pour atteindre une mise à fruit optimale.

Page 94: IMPACT D’UNE POLLINISATION ASSISTÉE SUR LA PRODUCTION

84

DISCUSSION GÉNÉRALE Les essais et résultats présentés aux chapitres précédents ont permis de vérifier

ou de répondre en partie aux hypothèses de départ qui stipulaient que l’apport de

pollen supplémentaire augmente et stabilise la mise à fruit chez S. nigra ssp.

canadensis, et que la source de pollen affecte la mise à fruit chez les plants

indigènes et les cultivars.

Les observations sur la floraison ont permis de documenter davantage les aspects

physiologiques et morphologiques de la fleur ainsi que l’étendue de la floraison.

Chacun des cultivars couvrent une période de la floraison légèrement différente,

un aspect qui pourrait être utilisé dans le choix de cultivars lors d’une plantation

afin d’optimiser la période de dispersion du pollen. Parallèlement au

développement des connaissances de la biologie florale, les essais de

pollinisations croisées ont démontré l’effet positif de la xénogamie sur la mise à

fruit de certains cultivars. En plus de l’auto-incompatibilité presque complète

rencontrée chez les plants indigènes, les expériences en serre ont démontré la

présence d’auto-incompatibilité partielle chez le cultivar Kent. Ces essais ont aussi

illustré, chez le cultivar Scotia, que le pollen du cultivar York était plus compatible

que celui des autres cultivars. Bien qu’encore partiels, ces résultats sur la

dynamique de compatibilité indiquent que certains choix de plants pollinisateurs et

récepteurs sont plus judicieux que d’autres.

L’observation de la position érigée des étamines, qui favorise l’autopollinisation par

la dispersion de l’autopollen sur le stigmate de la même fleur, est une observation

originale qui n’a pas été relevée au sujet de la sous-espèce nigra. Les données

recueillies ne permettent par contre pas de relier cette observation au taux de mise

à fruit. Cependant, chez l’espèce Clarkia tembloriensis Vasek, les plants

possédant une morphologie florale similaire, c’est-à-dire favorisant

l’autopollinisation, obtiennent une mise à fruit semblable aux plants démontrant

des caractères floraux adaptés à la pollinisation croisée (Sherry et Lord, 2000).

Page 95: IMPACT D’UNE POLLINISATION ASSISTÉE SUR LA PRODUCTION

85

Les résultats des expériences effectuées en serre ont démontré que

l’autopollinisation de plants indigènes résultait en une mise à fruit quasiment nulle.

Cet étonnant résultat met en évidence l’importance de la diversité génétique dans

une plantation et l’influence des conditions environnementales comme le vent et le

mouvement des insectes sur le succès de la fructification. Chez les angiospermes,

plus de 90 % des espèces dépendent des animaux, principalement des insectes,

pour assurer leur reproduction (Wilcock et Neiland, 2002). Bien que le sureau du

Canada ne soit pas reconnu comme une plante nectarifère (Bolli, 1994), plus de

150 espèces d’insectes visitent ses larges inflorescences en période de floraison

(Frost, 1979). Chez les inflorescences où les nombreuses fleurs atteignent

l’anthèse de manière asynchronisée, comme le sureau, le mouvement des

insectes assure la dispersion du pollen (Barrett, 2003).

Outre l’absence de vent et d’insectes, les variations de température pourraient

expliquer partiellement la mise à fruit pratiquement nulle observée lors des essais

en serre avec des plants indigènes. Dans les serres de type cathédrale utilisées

dans cette étude, de larges écarts de température ont été remarqués, fluctuant

parfois entre 35 °C le jour jusqu’à 15 °C la nuit. À basse température, il se pourrait

que la fécondation ait été inhibée suite à l’autopollinisation, alors que la

pollinisation croisée sous ces mêmes conditions de température aurait permis la

mise à fruit. Ce phénomène s’expliquerait par le développement généralement plus

rapide des tubes polliniques en situation de xénogamie qu’en situation d’autogamie

(Pacini et al., 1997; Reed, 2004b). Aux basses températures enregistrées la nuit,

la croissance des tubes polliniques serait inhibée ou ralentie de telle sorte que la

fécondation de l’ovaire par le tube pollinique aurait avorté (Hedhly et al., 2004).

En conditions naturelles, la température peut également jouer un rôle important sur

la stabilité de la mise à fruit. Si ce facteur interfère de façon significative,

l’augmentation de 20 % mesurée sur la mise à fruit au cours de l’année 2005

pourrait s’expliquer par un cumul de près de 400 degrés-jours de plus qu’en 2004

au sommet de la période de floraison. D’ailleurs, Ayre et Whelan (1989)

Page 96: IMPACT D’UNE POLLINISATION ASSISTÉE SUR LA PRODUCTION

86

mentionnent dans leur étude que les conditions environnementales auraient un

rôle très important dans le cycle pollinisation-fécondation-fructification.

Les expériences de pollinisations assistées effectuées dans le site de Lacolle ont

démontré une limitation de la mise à fruit par la disponibilité en pollen puisque la

mise à fruit a augmenté de 16 % suite à un apport de pollen supplémentaire

comparativement à la pollinisation naturelle. Par contre, cette relation n’ayant pas

été observée sur le site expérimental de Beauharnois, là où les plants étaient plus

âgés, plus développés et plus denses, il est impossible d’affirmer que la

disponibilité en pollen est un facteur limitatif de la mise à fruit à l’intérieur des

plantations de sureau du Canada. Une plantation plus développée produit

naturellement plus de pollen.

L’interprétation des résultats doit également tenir compte du fait que

l’échantillonnage peut ne pas être représentatif d’un comportement naturel de la

plante. Stephenson (1981) rapporte que lorsque seuls des échantillons

d’inflorescences sont pollinisés sur un individu, les inflorescences pollinisées à la

main ont un potentiel plus élevé de se développer et de produire des fruits. Ce

phénomène n’impliquerait pas nécessairement une limitation par la pollinisation

car, entre autres, la fructification qui découle de la pollinisation assistée peut

entraîner l’utilisation des ressources qui auraient pu servir à la production de fruits

à partir de fleurs sous pollinisation naturelle plus tard dans la période de floraison.

Burd (1994), adaptant le principe évolutif de « Bateman » au monde végétal,

souligne également que, dans un état d’équilibre, la pollinisation devrait avoir un

faible effet sur la fécondité femelle chez des populations naturelles. Dans ce cas,

les déficits en pollen observés au site de Lacolle démontreraient un état de

déséquilibre. Ce déséquilibre pourrait correspondre aux observations notées plus

haut : la disponibilité des ressources nécessaires à la fructification ou la proximité

des plants et le pouvoir de dispersion qui s’y rattache.

Ainsi, dans le cas d’une plantation dense où la période de floraison s’étend sur

près d’un mois et se superpose entre cultivars, une quantité suffisante de pollen

Page 97: IMPACT D’UNE POLLINISATION ASSISTÉE SUR LA PRODUCTION

87

devrait être disponible. Puisque quelques phénomènes d’auto-incompatibité ont

été démontrés par les essais de pollinisation croisée, la plantation mixte, comme

l’indiquait Kozma et al. (2003) pour la sous-espèce nigra, pourrait favoriser une

mise à fruit optimale. Le climat demeure un facteur ayant une grande influence sur

le processus de floraison et de fécondation des fleurs; ce dernier n’a pas été traité

par les chapitres 1, 2 et 3. Ce facteur pourrait grandement influencer la stabilité de

la mise à fruit année après année, par son impact sur la phénologie de la plante et

sur l’élongation des tubes polliniques ou par son impact sur les pollinisateurs

naturels du sureau du Canada (Hedhly et al., 2004).

Page 98: IMPACT D’UNE POLLINISATION ASSISTÉE SUR LA PRODUCTION

88

CONCLUSION Les essais de pollinisation assistée sur le S. nigra ssp. canadensis ont clairement

démontré les effets de la quantité et de la source du pollen sur la production de

ces petits fruits.

Dans la foulée de ces expérimentations, des données morphologiques et

physiologiques originales ont été recueillies sur cette espèce encore peu étudiée.

La période de floraison du sureau du Canada dans la région de la Montérégie est

maintenant définie comme dépendante de la photopériode. Cette période peut

varier de quelques jours entre les cultivars et les plants indigènes. Les

observations empiriques au niveau de la fleur même ont permis de détecter un trait

morphologique différent entre les cultivars et les plants indigènes étudiés d’une

grande importance du point de vue de la pollinisation. En effet, les étamines

divergentes des cultivars et celles très érigées des fleurs des plants indigènes ont

un impact direct sur le type de pollinisation favorisée par les plants, c’est-à-dire la

pollinisation croisée chez les cultivars et l’autopollinisation chez les plants

indigènes.

Les expériences de pollinisation croisée effectuées en serre ont également

démontré la présence d’un phénomène d’auto-incompabilité partielle,

particulièrement chez le cultivar Kent. Bien que partiel, ce premier résultat sur la

compatibilité du sureau du Canada et les observations faites au niveau de la

floraison permettent de confirmer l’importance de la plantation mixte dans un

verger, car l’implantation de plusieurs cultivars favorise la pollinisation croisée, qui

s’est avérée, dans certaines situations, préférable à l’autopollinisation en

augmentant la mise à fruit de 16 %. Des études supplémentaires permettraient

sans aucun doute d’identifier des couples de cultivars tels Kent et York qui, en plus

d’optimiser la mise à fruit, se complètent dans leur floraison et permettent la

pollinisation d’un maximum d’inflorescences.

Page 99: IMPACT D’UNE POLLINISATION ASSISTÉE SUR LA PRODUCTION

89

Afin d’en connaître davantage sur la biologie de la sous-espèce canadensis, il

serait intéressant d’effectuer la comparaison du taux de mise à fruit naturelle entre

les cultivars et les plants indigènes dans le cadre d’une plantation mixte et d’une

plantation exclusive. Il serait ainsi possible de comparer le succès de fructification

de plants indigènes suite à l’autopollinisation et celui de chacun des cultivars et

peut-être d’établir une relation entre la morphologie florale et le succès de la mise

à fruit.

Les expériences de pollinisation assistée au champ n’ont pas démontré hors de

tout doute une limitation de la pollinisation due à l’insuffisance de pollen. Bien

qu’un apport de pollen ait augmenté la mise à fruit de 16 % chez les plants du site

de Lacolle, aucun effet relatif à la quantité de pollen n’a été remarqué sur le site de

Beauharnois. Cette dernière plantation, plus vieille et plus dense, pourrait s’avérer

plus représentative. Un suivi des essais sur le site de Lacolle serait nécessaire afin

d’évaluer s’il y a une limitation de la pollinisation sur cette plantation et si la

production fruitière se stabilisera avec la croissance des plants. Par contre, la

capacité de mise à fruit de cette espèce a été démontrée au cours de ces deux

saisons. Le sureau du Canada, dans le cadre d’une plantation d’une certaine

densité de plants indigènes, produit naturellement une mise à fruit de 60 à 85 %,

ce qui est élevé par rapport à plusieurs autres espèces de petits fruits.

Ce taux de mise à fruit élevé témoigne un équilibre, ou une bonne dispersion du

pollen, à l’intérieur d’une plantation de plants indigènes. Les essais en milieu clos

ont d’ailleurs démontré la supériorité du milieu extérieur sur le succès de la

pollinisation. Parmi les facteurs impliqués dans le processus de la reproduction

végétale, la présence d’insectes pollinisateurs est d’une importance capitale pour

de nombreuses espèces fruitières. Or, chez le sureau du Canada, plus de 150

espèces d’insectes ont été dénombrées. Bien que leur action pollinisatrice

respective ne soit pas démontrée, leur rôle dans le succès de la fructification est

indubitable.

Dans ce contexte très récent de domestication du sureau du Canada, il est

important de tenir compte de l’interaction entre l’environnement et le

Page 100: IMPACT D’UNE POLLINISATION ASSISTÉE SUR LA PRODUCTION

90

développement des plants. Les mises à fruit naturellement élevées suggèrent que

la gestion des plantations expérimentales permettait une bonne pollinisation. Dans

le but d’assurer la stabilité de la mise à fruit par le maintien d’insectes

pollinisateurs dans les vergers, l’identification d’espèces végétales « compagnes »

créant des ressources pour ces alliés, particulièrement hors de la floraison du

sureau, serait un aspect d’une régie de culture intégrée à étudier.

Page 101: IMPACT D’UNE POLLINISATION ASSISTÉE SUR LA PRODUCTION

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Page 107: IMPACT D’UNE POLLINISATION ASSISTÉE SUR LA PRODUCTION

ANNEXE 1 Clé taxonomique du genre Sambucus

Tiré de Small et al. (2004)

Page 108: IMPACT D’UNE POLLINISATION ASSISTÉE SUR LA PRODUCTION

98

ANNEXE 2 Observation sous microscope optique de grains de

pollen de Sambucus nigra ssp. canadensis

Photo 1 : Grains de pollen déshydraté.

Photo 2 : Grains de pollen hydraté.

Photo 3 : Initiation de la croissance d’un tube pollinique.

Page 109: IMPACT D’UNE POLLINISATION ASSISTÉE SUR LA PRODUCTION

99

ANNEXE 3 Courbe du cumul des degrés-jours à la station

expérimentale de l’Acadie

0100200300400500600700800900

10001100120013001400150016001700180019002000210022002300

1 avril

15 avril

29 avril

13 mai

27 mai

10 juin

24 juin

8 juillet

22 juillet

5 août

19 août

2 septembre

16 septembre

30 septembre

Date

Deg

rés-

jour

s

20042005

Page 110: IMPACT D’UNE POLLINISATION ASSISTÉE SUR LA PRODUCTION

100

ANNEXE 4 Phénologie du sureau du Canada

Mai Juin Juillet Août Septembre

Floraison

Maturation

Développement floral

Récolte

Pollinisation

Développement des fruits

Page 111: IMPACT D’UNE POLLINISATION ASSISTÉE SUR LA PRODUCTION

101

ANNEXE 5 Plan de champ du site de Lacolle

Schéma 1 : Vue d’ensemble de la plantation.

fo s s e

NRoute 221

étang

Plants indigènes

Essai cultivar

38 m

3 8 m

1 1 8 m

N

Volet pollinisation 12 rangs de 30 plants indigènes

Distance: 4 m entre les rangs 2 m entre les plants

Page 112: IMPACT D’UNE POLLINISATION ASSISTÉE SUR LA PRODUCTION

102

T1: témoin sans intervention T2: agitation manuelle T3: ajout de pollen exogène au pinceau T4: passage d’un pinceau sans ajout de pollen

Schéma 2 : Dispositif expérimental du volet pollinisation du site de Lacolle. (A) Parcelle expérimentale. (B) Unité expérimentale.

Bloc 1 Bloc 2 Bloc 3 Bloc 4 Bloc 5 Bloc 6

A

B

Page 113: IMPACT D’UNE POLLINISATION ASSISTÉE SUR LA PRODUCTION

103

ANNEXE 6 Dispositif expérimental au site de Beauharnois

T1: témoin sans intervention T2: agitation manuelle T3: ajout de pollen exogène au pinceau T4: passage d’un pinceau sans ajout de pollen

Schéma 2 : Dispositif expérimental du volet pollinisation du site de Beauharnois. (A) Parcelle expérimentale. (B) Unité expérimentale.

A

B

Page 114: IMPACT D’UNE POLLINISATION ASSISTÉE SUR LA PRODUCTION

104

ANNEXE 7 Filets recouvrant les rangs sur le site de Lacolle,

septembre 2004

Photo 1 : Vue de face d’un filet installé en forme de tente comme protection contre les oiseaux.

Photo 2 : Vue latérale d’un filet installé en forme de tente comme protection contre les oiseaux.

Page 115: IMPACT D’UNE POLLINISATION ASSISTÉE SUR LA PRODUCTION

105

ANNEXE 8 Illustrations des étapes d’intervention au champ

Photo 1: Photographie des boutons floraux pour le comptage manuel.

Photo 2 : Application de pollen au pinceau.

Photo 3 : Récolte des fruits mûrs.

Page 116: IMPACT D’UNE POLLINISATION ASSISTÉE SUR LA PRODUCTION

106

ANNEXE 9 Taux de germination des lots de grains de pollen

utilisés lors des pollinisations sur le site de Lacolle, en 2004

0

10

20

30

40

50

60

70

27 ju

in

28 ju

in

29 ju

in

30 ju

in

1 ju

illet

2 ju

illet

3 ju

illet

4 ju

illet

5 ju

illet

6 ju

illet

7 ju

illet

8 ju

illet

9 ju

illet

Tau

x de

ger

min

atio

n de

s gra

ins d

e po

llen

(%)

Date de prélèvement

Page 117: IMPACT D’UNE POLLINISATION ASSISTÉE SUR LA PRODUCTION

107

ANNEXE 10 Dispositif expérimental de l’expérience de

pollinisation croisée dans les serres du CRDH

Schéma : Dispositif expérimental (3x5x2) de l’expérience de pollinisation croisée dans les serres du CRDH.

Photo : Identification des inflorescences pollinisées sur un plant indigène.

Page 118: IMPACT D’UNE POLLINISATION ASSISTÉE SUR LA PRODUCTION

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ANNEXE 11 Dispositif expérimental de l’expérience de

pollinisation croisée dans la serre de l’Acadie

Schéma : Dispositif expérimental (3x6x2) de l’expérience de pollinisation croisée dans la serre de l’Acadie.

Photo : Disposition des plants pollinisateurs et femelles dans la serre de l’Acadie.

Page 119: IMPACT D’UNE POLLINISATION ASSISTÉE SUR LA PRODUCTION

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ANNEXE 12 Perceur du sureau (Achatodes zea)

Description

Le perceur du sureau appartient à l’ordre des Lépidoptères. L’adulte pond sur les nouvelles tiges du sureau. La larve pénètre ensuite dans la tige pour se nourrir et grandir. Les tiges affectées flétrissent en débutant par l’extrémité.

Photo 1 : Larve du perceur du sureau.

Photo 2 : Pénétration de la larve dans la tige.

Photo 3 : Ravage et flétrissement.