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III.MOIRE CHRONOLOGIQUE DU Vil U\ (il A II; AU FORT DE MAUVEZlN l \ liA S i OtiNI: NI: M liU K Ï PAS

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III.MOIRE CHRONOLOGIQUEDU

Vil U\ (il A II; AU FORT DE MAUVEZlN

l \ liA S i OtiNI: NI: M liU K Ï PAS

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H IST O IR E C H R O N O LO G IQ U E

Vieux Château-Fort de Mauvezin

SES DESTINÉES

Ces vieux murs restaurés Cette devise intacte Sont à vous pour toujours.

A. B iba l Ç3 i août; 1907}

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H ISTO IRE CHRONO LO G IQ UEDU

V IE U X CH A TEAU FO RT DE M A U V E Z INET

SE S D E ST IN É E S

MAUVEZIN - MALUS VICINUS

Mauvezin joua, au moyen-âge, un rôle dans toutes les guerres dont la Bigorre fut le théâtre. Son château, encore debout aujourd’hui, et l’un des plus intéressants du Midi de la France, porta longtemps le titre de château comtal comme ceux de Lourdes et d’Orthez (Larousse, encyclopédie, page 1368).

Mauvezin était le chef-lieu de la viguerie du comté de Bigorre. Tous les habitants de la viguerie étaient tenus de faire le guet dans le château et pouvaient s’y retirer en cas de nécessité (Réfor­mation, G. i).

La date de sa construction est inconnue. Il est le type des châteaux de défense construits antérieure­ment au Xe siècle.

Il eut successivement pour seigneurs ou occu­pants :

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LES COMTES DE BIGORRE

— y5o à 1078. Raymond, Louis, Arnau, Garcias- Arnau, Bernard-Roger, Bertrand II.

— 1078 à 1 i63. Centulle Ie1', comte de Béarn par son mariage avec Beatrix, fille de Bertrand II, Ber­nard, Centulle II, Lierre, vicomte de Marsan, marié à Beatrix, fille de Bernard, Centulle III leur héritier.

— En 1 133. Réunion à Mauvezin de tous les grands de Bigorre, pour le bornage du Comté avec le vicomté de Labarthe, Péregrin de Lavédan étant viguier (Arch. d’Armagnac, anciens hommages au Comté de Bigorre, n° 25).

— En 1 143. Les Cisterciens, grâce aux libéralités de Pierre, fondent l’abbaye d’Escaledieu, sur les bords de l’Arros, au bas du château de Mauvezin. Cette abbaye fonda la bastide de Masseube en 1274 et 3 autres : celles de Réjaumont ( 1 285), de Balesta (i3o5), de Carsan (1328), {Revue de Gascogne, p. 214). Elle eut 1 1 établissements en Espagne et, en par­ticulier, deux dans l’Armagnac : Bouillas et Flaran. (iChronique de Dont Brugèles, p. 292 et 328;.

— Pétronille, petite-fille de Centulle III, comtesse de Bigorre, qui enrichit l’abbaye, offre cette parti­cularité qu’elle vécut assez pour posséder 5 maris :

En 1196, Gaston de Moncade.En 1215, Nuno, neveu du roi d’Aragon.En 1216, Guy de Montfort.En 1220, Aymar de Rançon.En 1228, Bozon de Mattas, sire de Cognac.

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Pétronille, devenue vieille, pleure les 5 maris

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— 1251. Mort de Pétronille.Par testament, elle ordonne qu’on dépose son

corps à l’abbaye de l’Escaledieu, à laquelle elle fait don de tous ses vases d’or et d’argent, de ses habits, de ses draps de lin ou de laine, de ses joyaux et meubles précieux, de ses reliquaires d’or, d'argent ou de soie, ses anneaux et pierres précieuses (Annales de la Bigorre. Deville, i 8 iS).

On ne sait ce que sont devenus les 5 anneaux de Pétronille. Son livre de prières « lou missaù » est à la mairie de Tarbes.

— 1251. Esquivât, comte de Bigorre, par son mariage avec Alix, fille de Pétronille.

— 1252. Mariage de Marguerite de Moncade, petite-fille de Pétronille avec Roger Bernard IIT, comte de Foix, vicomte de Castelbon, qui lut le bisaïeul de Gaston-Fébus.

— 1258. Esquivât fait don à Simon de Montfort, comte de Leicester, des places de Lourdes et de Mauvezin.

— 1265. Simon de Montfort fait cession du comté de Bigorre à Thiébaut II, roi de Navarre.

— 127L Bernard de Mauvezin cède sa terre à Esquivât, en échange deCapvern et d’une rente qu’un autre seigneur de Mauvezin donna à l'abbaye de l’Escaledieu, en partant pour la croisade « quan agos son prepensament anar oltra mar » quand il feyt son voyaige oltre-mer. (Arch. des Hautes-Pyr. Série II. 70).

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Seigneur de Mauvezin partant pour la CroisadeQuan iitfos'son prepensam ent aiuir olira m ar

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N

— 1283. Esquivât meurt à Olette (Navarre) et est enterré à l’Escaledieu.

- 1284. Mariage de Philippe-le-Bel avec Jeanne de Navarre, nièce de Thiébaut II.

- Lutte entre tous les prétendants, héritiers de Pétronille, et autres, de Poix et de Navarre.

1292. Arrêt du Parlement de Paris: Philippe- le-Bel prend sous séquestre le comté de Bigorre.

— i3oo. Recensement et division du Comté en 7 vigueries : Tarbes, Bagnères, Mauvezin, Godor, Lavédan, Barèges, Vie.

— 1341. Le roi de France donne le Comté à Roger-Bernard II de Foix, vicomte de Castelbon, seigneur de Moncade, cousin-germain de Gaston Fébus.

LES ROIS D’ANGLETERRE

i36o. Le traité de Bretigny cède le comté de Bigorre avec le château de Mauvezin, au roi d’An­gleterre.

— 1373. Le château de Mauvezin occupé par le parti Anglais, est assiégé par le duc d’Anjou, frère du roi de France (voir le récit complet dans les chroniques de Froissarci (i333- i4oo). Livre III chap. VI à IX.

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«... Cil chastel de Mauvezin sied sur une mon- « tagne et dessous queurt la rivière de Lisse et avait « le Duc (d’Anjou) en sa compagnie bien huit-mille « combattants, sans les Gennevois et les communes « des bonnes villes des sénéchaussées de ce pays.

« Du chastel était capitaine, pour lors, un écuyer « gascon qui s’appelait Raymonnet de l’Espée, appert « homme d’armes. Tous les jours y avait aux barriè- « res, escarmouches et faits d’armes et appertises « grandes et beaux lancis de lances et poussis, et « étaient le duc et ses gens logés en ces beaux prés, « entre Tournay et le Chastel. Environ six semaines « se tint le siège, devant le chastel de Mauvezin et « presque tous les jours aux barrières, y avait faits « d’armes et escarmouches de ceux de dedans à ceux « de dehors. Et vous dis que ceux de Mauvoisin se « fussent assez tenus ; car le chastel n’est pas prena- « ble, si ce n’est par long siège ; mais il advint que « on leur tollit, d’une part, l’eau d’un puits qui sied « au dehors du castel et les citernes qu’ils avaient « là-dedans séchèrent ; car oncques goutte d’eau du « ciel, durant six semaines, n’y cheig, tant fit « chaud et sec. Et ceux de l’Ost avaient bien leur « aise de la belle rivière d’Arros qui leur courait « claire et roide, dont ils étaient servis et leurs « chevaux.

« Quand les compagnons de la garnison de Mau- « voisin se trouvèrent en ce parti, si se commencè- « rent à esbahir ; car il ne pouvaient longtemps

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Le duc d'Aniou au siège de Mauvezin (Juin 1373)« . . E taien t Je 'D uc e t ses g e n s logés en ees beau x p ré s en tre « Tourna y e t le C h a s te /. . . » ( Froissa rd ).

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« durer. Des vins avaient-ils assez, mais la douce « eau leur manquait. Si eurent conseil ensemble « entr’eux qu’ils traiteraient devers le duc ainsi que « ils firent, et empêtra Raimonnet de l’Espée, leur « capitaine, un sauf conduit pour venir en l’ost parler « au duc. Il l’ot assez légèrement et vint parler au « duc et dit : Monseigneur, si vous nous voulez faire « bonne compagnie à mes compagnons et à moi, « je vous rendrai le chastel de Mauvoisin — « Quel compagnie, répondit le duc, voulez-vous que « je vous fasse ? partez vous en et allez votre chemin « chacun en son pays, sans vous bouter en fort qui a nous soit contraire ; car si vous vous y boutez et « je vous tienne, je vous délivrerai à Jausselin (cil « était le tranche tête) qui vous fera vos barbes sans « rasouer — Monseigneur, dit Raimonnet, si il est « ainsi que nous partions et remuons en nos lieux. « il nous en faut porter ce qui est nôtre, car nous « l’avons gagné par armes en peines et en grand « aventure — Le duc pensa un petit et puis répondit « et dit — Je veuil bien que vous emportez que « porter en pouvez devant vous, en malles et en « sommiers et non autrement; et si vous.tenez nuis « prisonniers, ils nous seront rendus.

« — Je le veuil bien, dir Raimonnet.« Ainsi se porta leur traité que recorder vous

« m’oyez et se départirent tous ceux qui dedans « étaient et rendirent le chastel au duc d’Anjou et « emportèrent ce que devant eux porter en purent et

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« s’en alla chacun en son lieu ou autre part querre « son mieux — M ais Raimonnet de l’Espée se tourna « François et servit le duc d’Anjou depuis moult « longtemps et passa outre en Italie avecque lui et « mourut en une escarmouche devant Naples,quand « le duc d’Anjou et le comte de Savoie y firent leur « voyage.

« Ainsi que je vous conte eut en ce temps le duc « d’Anjou le chastel de Mauvoizin dont il eut grand « joie et il le fit garder par un chevalier, qui s’appe- « lait messire Chiquart de la Perrière et quand il ot « la saisine de Mauvoizin et délivré le pays et toutes « landes-Bourg des Anglais et des pillards, il s’en « vint mettre le siège devant la ville et le castel de « Lourdes ».

(Pour la reddition du fort et la remise des clés, voir la scène faite avec des personnages en cire, à l’étage inférieur de la salle historique).

— i3y3. Le duc d’Anjou, maître du château de Mauvezin, le donne à Jean I comte d’Armagnac et cède en compensation, à Roger-Bernard de Foix, vicomte de Castelbon, la châtellenie de Sauveterre.

Il s’en suit une guerre entre le Comte d’Arma­gnac et Gaston Fébus, comte de Foix et de Béarn, qui se croit lésé.

1.377. Le 27 Janvier, entrevue à Tarbes des comtes de Foix et d’Armagnac.

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1877. 3 février, le duc d’Anjou prononça la sen­tence de paix, en lui donnant pour sanction le mariage de Beatrix d’Armagnac avec le jeune Gaston de Foix, fils de Fébus.

La paix est jurée sur le corps de J. C. dans l’église cathédrale de Tarbes, en présence des évêques de Lodève, St-Brieuc, Lescar et Tarbes.

Cependant la conclusion des accords est retardée jusqu'en 1879.

[379. 20 mars, le traité définitif de paix est signé au château d’Orthez. Enfin, il fut convenu (Gauche- raud, histoire des comtes de Foix, p. 129) que le comte de Foix se rendrait, la veille des Rameaux prochains, à Aire-sur-l’Adour et le comte Jean II d’Armagnac à Barcelone, de l’autre côté de l’Adour, pour faire l’échange des prisonniers et ratifier tout ce qui avait été décidé à Orthez.

Les deux comtes se trouvèrent au rendez-vous, le jour fixé, chacun avec leurs fils et une suite bril­lante de chevaliers et gens d’armes. Ils se virent dans une maison en charpente construite à ce dessein entre Aire et Barcelone. Là était un autel sur lequel l’évêque de Lectoure célébra la messe que Jean et Gaston entendirent Ils communièrent avec la même hostie et scellèrent la réconciliation en se donnant le baiser de paix.

Dans le contrat de mariage passé le lendemain, lundi des Rameaux, (4 avril 1879) Béatrix renonça à

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tous scs droits paternels et maternels, moyennant les 20.000 francs d’or qui lui étaient accordés en dot et les fiançailles furent célébrées, ce même jour, par l’Evêque de Lescar. Le pape avait accordé la dispense de parenté.

Les deux documents, traité de paix, et contrat de mariage, sont mentionnés comme appartenant aux ar­chives des comtes de Rodez, papiers non inventoriés, liasses x, 3o et § do (.Doat vol. 200 fol. 127).

L’acte notarié est écrit en gascon. Les deux comtes sont qualifiés, l’un : « Monsenhor Johan per la gracia de Diu » et l’autre « Moussu Gaston, per la » gracia medissa... » Pey de Mayrcs « notari reyan » attesta qu’ils ont juré « que juren à qui médis sus lo beroy cors de J. C... » de tenir et observer la « dita pax ».

Le traité de paix est reproduit in-extenso dans les Preuves de l’histoire du Languedoc ( 7’. x. colonne 161 c) ed Privât — T. iv. col. 35q de l’édition origi­nale) et comprend b clauses :

i° Mariage du jeune Gaston et de Beatrix.2° La cession de la tour de Gouffoulens.3° L’usufruit du lieu et de la Châtellenie de

St-Julien.4° La cession de Mauvezin et de Godor — Texte :

« item, la begarie de Maubesin e de Godor dentoren « ab lo dit senhor de Foix à perpetualitat per si e« per sos ».

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i° Renonciation du comte de Foix et de son fils à leurs prétentions sur le Comté de Comminges.

6° Echange réciproque des prisonniers.

Le traité contient le serment sur le corps de J. C. juré dans la chapelle d’Orthez. «... é en cas que en « res hi faillissen volen aver renegat Diu, loquoau « los fossa contre é à dampnacion de leurs corps é de « leurs amnes, prenon lo diable per senhor é eslegen « lors sébeltures en enfern ».

LES COMTES DE FOIX ET DE BÉARN

— 1379. Gaston Fébus, mis en possession du château de M&uvezin par le mariage de son fils avec Béatrix « la gaie Armagnacoise », rend hommage à ses charmes et fait encastrer, dans la courtine, au- dessus de la porte d’entrée, la dalle héraldique, aux armes de Foix et de Béarn, avec cette devise « J’ay belle Dame ».

Un tableau de 3 mètres sur 2, fait par M. Lacoste, artiste peintre gascon, à Bordeaux, et placé à l’étage supérieur de la salle historique, commémore la venue au château de Mauvezin de Gaston Fébus et des deux fiancés.

— i38i-i382. Le jeune Gaston de Foix mourut en 1381 (histoire chronologique de la maison de France. P. Anselme) ou en i38e (histoire des comtes de Foix, Larousse, encyclop.)

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Gaston-Fébus regretta son fils « moult fort... v Lors fit venir son barbier et se fit raire tout jus et « se vêtit de noir et tous ceux de son hôtel, et fut le « corps de l’enfant porté en pleurs et en cris aux « frères mineurs d’Orthez et là ensepulturé. »

(Froissard).— i3ç)i mai. Après une chasse à l’ours, vers Sau-

veterre-du-Béarn, Gaston Fébus meurt subitement, au moment de prendre son repas à l’hôpital d’Orion, a 2 lieues d’Orthez. «... Le comte demande de l’eau « pour se laver... sitôt que l’eau froide descendit sur « ses doigts, le visage lui pâlit, et le cœur lui tres- « saillit et les pieds lui tressaillirent aussi et chut « sur le siège tourné, en disant : Je suis mort, sire « Dieumerci... oncques, depuis ne parla. »(Froissard)

Il fut enseveli à l’église des Jacobins d’Orthez [annales de Foix).

Gaston Fébus fut un chevalier de la plus grande valeur, habile et courageux.

— Vainqueur des « Jacquiers » en 1358, dans les rues de Meaux, pour délivrer la famille royale assiégée, quand il revint de la croisade, entreprise avec les chevaliers de l’ordre teutonique, contre les barbares de Prusse.

— Vainqueur du comte d’Armagnac, en 1372, à la bataille de Launac.

— Vainqueur du duc de Berry, en 1381, à la bataille de Revel.

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Il avait pris pour devise de guerre ces mots : «. Toquoy se gaouses « Olhagaray dit « Toquey s’y gauses ». [ Ed . "’/4 de 1609 p . 278).

Le Comte Jean II d’Armagnac l’ayant défié, un jour, en combat singulier, Fébus accourut à la limite de ses possessions et y fit dresser un poteau avec un placard portant ces mots : « Je t’attends ».

Il fut grand seigneur et généreux, accueillant aux troubadours : Lors de la fête qu’il donna au roi Charles VI, à son passage à Toulouse, en Octobre i 38q, il fit des présents magnifiques aux chevaliers et écuyers du roi. Il donna plus de six cents coursiers, palefrois ou mulets, « tous ambiants sellés et apprêtés <.( de tout point ». (Froissard, liv. 4).

A la visite qu’il reçut, quelques jours après, de Charles VI, au château de Mazères, sur les bords de la Baïse, il renouvela ses cadeaux : troupeaux de moutons et bœufs gras, chevaux des haras de Mazères, tous portant des colliers avec sonnettes d'argent.

Plus tard, à l’arrivée de Charles VI à Paris, les dames ne voulaient plus voir et entendre que ceux qui leur contaient la merveilleuse entrevue du roi de France et de Gaston Fébus (Histoire des Comtes de Foix. — Gaucheraud — 1834).

Charles VI louait Gaston Fébus devant toute sa cour « comme étant le plus grand capitaine et renommé de son temps (Olhagaray, page 296).

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Il fut aussi grand chasseur et bon écrivain pour son époque. Son goût pour la chasse était tel qu’il nourrissait, dit Saint-Yon, 1.600 chiens. Il nous a laissé un ouvrage remarquable « des déduicts de la « chasse et des bestes sauvaiges et des oyseaux de « proye » qui est un vrai monument de la vénérie au xive siècle. 11 fut imprimé sous François I°r. Le prologue écrit par Fébus serait encore aujourd’hui un régal pour les Félibres ; beaucoup voudront le lire.

Une copie de cet ouvrage, qu’on suppose avoir appartenu à Jean de Grailly, un de ses successeurs (1412-1436) est à la bibliothèque nationale. On peut y lire, au verso de la dernière page, sous forme de deux vers : « Ce livre est à celui qui sans blasme, en son « droit mot porte : J’ay belle Dame »

Le sceau du comte de Foix était composé des armoiries qui figurent sur la belle dalle héraldique du château de Mauvczin et il signait Fébus (lettres de Mazères, 10 janvier i 38q , arch. natio. carton 332 n° 28.)

C’est sous l’évocation de Gaston Fébus qu’a été fondée, à Orthez, en 1897, « l’Escole Gastou Fébus » des Félibres du Sud-Ouest, amoureux de leur patrie Béarnaise et Gasconne.

Gaston Fébus eut pour successeurs :— En 1391. Mathieu de Castelbon, son neveu,

fils de Roger-Bernard II, vicomte de Castelbon, seigneur de Moncade.

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Fébus grand chasseur = devant ['Eternel

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En 1398. Archambault de Grailly, par son mariage avec Elisabeth de Foix, sœur de Mathieu de Castelbon.

— En 1412. Jean de Grailly, fils d’Archambault, Comte de Foix, de Bigorre et de Béarn.

Jean de Grailly « beau et magnifique seigneur » fut un des compagnons de Jeanne d'Arc et portait fièrement la devise du château de Mauvezin. « J ’ay belle Dame ». On en trouve des traces diverses dans les poésies ou les chroniques.

Alain Chartier,illustre poète Normand( 1383-1449) après avoir célébré les qualités chevaleresques de Jean de Grailly, termine son poème (les deux for­tunes d’amour) par ces vers :

Aussi son port en fait assez témoignage et rapport

comme celui q u ’amour mène à bon port J ’ay belle Dame.

Le chroniqueur, Michel du Bernis (manuscrit conservé aux archives départementales des Basses- Pyrénées), nous dit que Jean, comte de Foix et de Bigorre. vicomte de Béarn et de Nébouzan, décédé à Mazères, en 143b, avait pour devise : AY BELA DAMA ».

- En 1'i36. Gaston IV de Foix, fils de Jean de Grailly, mort en 1472 à Roncevaux, marié à Eléonore, reine de Navarre.

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— En 1472. Gaston de Foix, prince de Viane, vicomte de Castelbon, fils de Gaston IV, marié à Madeleine de France.

— En 1481. François Fébus, leur fils, roi de Navarre, comte de Foix et de Béarn, couronné à Pampelune ( 1481) mort à Pau (1483.)

— En 1483. Madeleine de France, tutrice de Catherine, sœur du précédent, François Fébus.

— i 5 i 2 . Arrêt du Parlement de Paris décidant que, après la mort de Catherine et de son mari, leur fils Henri d’Albret resterait seul le maître des fiefs de la maison de Foix et de Navarre.

La Maison d’Albret et les Rois de France

— 1627. Mariage d’Henri d’Albret avec Margue­rite de \ alois, sœur du roi François Ier, surnommée « la Marguerite des Marguerites » morte en 1049, au château d’Odos, près Tarbes, et qui fut, par Jeanne d’Albret, grand-mère d’Henri IV « lou nouste Henric », le bon Béarnais, le bon Gascon.

Henri IV, avant d’être roi de France, tint sa cour, tantôt au château de Nérac, tantôt au château de Pau. Il aima surtout les Gascons ; et c’est avec raison que Jasmin, le poète agenais, met dans sa bouche cet appel à ses fidèles de Béarn et Gascogne :

Brabes gascons,A moun amou, bous aous qué diouetz crese ; Benguets. benguets, q u ’ey plazÇ etsé bésé

Approchats bous.

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Ces vers ont été gravés sur le piédestal de la statue qui lui a été élevée à Nérac.

Pendant la seconde moitié du xvi“ siècle, le château de Mauvezin fut occupé par des Huguenots.

— En 1567, ils livrèrent au pillage l'abbaye de l’Escaledieu.

— En 15y5, ils allèrent au-delà de Masseube, attaquer la riche abbaye de Simorre.

— En 1584. Le capitaine huguenot de Sus diri­geait ses expéditions contre les villes voisines, notamment contre St-Bertrand de Comminges, dont le trésor fut pillé et la crosse d’ivoire emportée à Mauvezin (Larousse, encycl.).

— En i5g5. L’avènement d’Henri IV rattacha à la couronne de France tous les fiefs de Foix et de Navarre et par suite la châtellenie de Mauvezin.

i6o7. Un édit du parlement de Paris sanctionna cette réunion.

1626. Visite de Jean de Puységur, vice-sénéchal d’Armagnac et de Haute-Guyenne.

Extrait de son « verbal » :Le chasteau de Mauvoizin citué sur un lieu eslevô,

commandant toute la lande de Montréjeau jusqu’à Trie, est un carré d’environ 40 toizes avec un grand donjon d’environ 3 5 toizes de haulteur; les murailles sont très épaisses, ayant avec la courtine et le parapet environ une toize et demye de largeur; le sieur de Miossens en est chastelain. Si cette place était surprinse elle pourrait incommoder le pais » (Revue de Gascogne, T. xi, p. 464).

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1667. Visite de M. de Froidour, conseiller du roi, commissaire député par le Ministre Colbert pour la Réformation des eaux et forêts.

Extrait de sa lettre du 23 septembre 1667-:Le village de Mauvoizin est grand et bien baty et

il y reste un ancien et petit chasteau à derny ruiné et inhabité, mais qui est bon et fort et qui, dans le besoin, pourrait encore servir...» (Revue d 'A quita ine,'? . xi, p. 213).

Depuis 1667, le château resta inhabité.En 1792. La Révolution française le nationalisa

et l’abandonna à la commune de Mauvezin.Les paysans commencèrent à le démolir.1797. Arrêté municipal :

Ce jourd’hui, vingt huit floréal, ÿma année républicaine, l’agent municipal a fait défendre par le valet de la commune de ne point tirer ny pierres ni mortereaux de l’ancien fort, situé dans notre territoire, sous peine de charger tous ceux qui feront auquun dommage de tous les évènements qui pourrait s’en suivre et améner. Signé Pailhé. (Arch. com . )

1868. Etude sur le château fort de Mauvezin, par Alcide Curie-Seimbres, couronnée par la Société Académique des Hautes-Pyrénées. (Extrait de la Revue d’Aquitaine, tome xn).

Malgré ces menaces des autorités locales, les habitants du village se mirent à y puiser, sans gêne, d ’abord les tuiles, les bois, les barreaux de fer, puis la pierre elle-même. L’angle N ord-Est du donjon et plusieurs contreforts furent

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fouillés, minés sans ménagements. Tout aurait été t rans­formé en carrière si, vers 1808, le préfet du département n ’était intervenu pour arrêter cette exploitation. Depuis lors, rien ne troubla plus le silence de la vieille forteresse; elle devint le domaine non disputé du lierre, des ronces et des oiseaux de proie.

L’inscription gravée dans la dalle héraldique enchâssée dans la courtine, au-dessus de la porte d’entrée avait disparu sous le lierre. Elle était même inconnue des archéologues qui ne pouvaient en approcher.

Cénac-Moncaut, qui lut un des historiens du château de Mauvezin, croyait qu’il y avait ces mots : « Phcebus me fecit » (voyage en Bigorre, 1856).

En actobre 1861, nous trouvant sous ces ruines avec M. Louis Deville, nous parvînmes, à l'aide d ’excellentes lunettes, à rétablir le véritable texte : « J ’ay belle Dame ». (Etude Curie-Seimbres, déjà citée).

Cet événement fut signalé par eux comme une découverte dans l’inconnu.

1875. 27 mars. Acte de vente par la commune de Mauvezin, autorisée, à M. Achille Jubinal, député des Hautes-Pyrénées, des ruines du château de Mauvezin. M. Achille Jubinal avait l'intention de restaurer ces ruines historiques, afin d’y établir un musée archéologique (Société académique des Hautes- Pyrénées. Séance du 4 décembre 1866).

C ’était une heureuse idée qu’a fait avorter la mort si regrettable de M. Achille Jubinal. Mauvezin ne pouvait

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recevoir une destination plus convenable. C’était pour ce château l’unique moyen de se survivre, sans anachronisme, au sein de notre Société. Un musée féodal dans ce gigan­tesque sanctuaire de la féodalité, à l’ombre de ces (ières murailles, témoins de tant de collisions violentes qui ont vu passer les générations des hommes de fer... ! Déjà, pour notre faible part, nous associant à cette pensée généreuse, nous avions recueilli pour Maüvezin quelques débris dignes d’y figurer... Les étrangers qu’attirent chaque année les stations thermales des deux Bagnèies et de Capvern se seraient unis aux habitants du pays pour applaudir avec reconnaissance à cette nouvelle création de M. Jubinal (Monographie du château-fort de Maüvezin, par Alcide Curie-Seimbres, p. 83, 84 Tarbes, Croharé, 1879.)

1906. 4 août. Acte de vente, par les héritiers de Achille Jubinal à Michel Albin Bibal, des ruines du château de Maüvezin, telles qu’elles avaient été ven­dues par la commune.

1906-1907. Restauration. Escaliers d’accès, pro­menoirs des murs d’enceinte, réparation des murailles, des contreforts et du donjon, séparation des étages, rétablissement des créneaux et de la terrasse.

On trouve dans les décombres de la cour, de la citerne, de l’in-pace : un boulet en pierre, témoin du siège de 1073 ; une inscription du xvie siècle tracée par un huguenot dans la citerne « Dieu seul sera adoré et l’antéchrist de Rome abismé » et, à côté, une autre inscription restée indéchiffrable (M. Jullian pense qu’elle est d’un catholique, commençant par

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2,S

du latin et finissant par du français), des fers, des clefs, lampes, ossements, etc. ; un éperon de cheva­lier dont la pointe a i5 centimètres de longueur.

L’ESCOLE GASTOU FÉBUS

1907. 28 mars. Cession de la nue-propriété du château de Mauvezin à l’Escole Gastou Fébus, sui­vant acte passé entre M. Adrien Planté, président de l'Escole, et M. Michel-Albin Bibal.

3 i août 1907. Prise de possession du château par l’Escole Gastou Fébus. Fête d’inauguration donnée par les Félibres du Sud-Ouest, avec le con­cours des «Troubadours Tarbais», de « l’Estudiantina Tarbaise » et de la « Chorale de Bordes-Tournay ».

Appel fait par M. Bibal h tous les Félibres du Sud-Ouest :

Benguets, brabes counfrays de Biarn é de GascougneFébus, en soun castet tout bielh, rebiscoulat,Bous apère la haùt ; ya, benquets chens bergougne :De Félibres que bo Maubesin estelat !

Toutem Gascous, Fébus aban.

Etaient présents : les Félibres majoraux : Adrien Planté, Miqueu Camelat, J.-V. Lalanne, Chassary (de Montpellier) ; des vice-présidents de l’Escole : Darclanne, Dr Dejeanne ; des maîtres en gay sça- voir : Simin Palay, Dr Lacoarret, Baudorre ; des Félibres de marque en Gqston Fébus: l’abbé Daugé, Sarrieu, Charles du Poey, Sylvain Lacoste, Dr Pedebidou, Lacaze, Canton, Laborde-Barbanègre,

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Mouyen, Carrère, Carrive, Lamothe, Marius Fontan, Aimé Fontan, Ch. Palanque, Mérillon, Bouquet, Jean Cayla, Jean Pailhé, Bibal, etc. ; des Félibres indépendants : Paul Dubié, Lansalot (du Semeur), H. Labroquère, Dr Cabadé, Priesel, Cazaux, Daure, (de VIndépendant), Lalonguière, Aylies (du Républi­cain Orléanais), Mousset, Gouneau, de St-Jayme, Piganiol, etc. ; la Reine de Gascogne (Germaine Guillot) et sa Cour ; beaucoup de Dames et d’amis du Félibrige.

Récompenses accordées le jour de la Fête, par l'Escole Gastou Fébus :

Médaille de vermeil, à M. Bibal, donateur.Médaille d’argent, à M. l’abbé Jean Pailhé, curé

•de Mauvezin, qui avait donné tous ses soins à l’achat et à la restauration du château.

(Un tableau de 3 mètres sur 2, peint par M. Lacoste, artis te-peintre gascon à Bordeaux, et placé à l'étage supé­rieur de la salle historique, commémore cette première fête Félibréenne. Ce tableau est accompagné, à droite et à gauche, de deux portraits peints à l'huile par le même artiste, et mis en place en 1909, de M. Adrien Planté, pre­mier président de l’Escole de Gastou Fébus, et de M. l'abbé Jean Pailhé, protonotaiie apostolique et premier conserva­teur du musée gascon de Mauvezin).

■28 août 1911. Deuxième fête Félibréenne, au ■château de Mauvezin, donnée par l’Escole Gastou Fébus.

— Réception des Félibres de l’Escole deras Ptrénebs, ayant à leur tête le président, VI. le baron

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Première Fête Félibréenne à M

auvezin, le 31 août 1907

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3 1

de Hardies, le vice-président M. Dufor, le secrétaire général M. Sarrieu et la Reine des Pyrénées, Mlle Sarrieu qui portait avec élégance le costume national de l’Ariègc.

Sur ce, trois discours, où la langue d’Oc s’associa, avec succès, à la langue d’oil ;

— De M. Adrien Planté, souhaitant gracieusement la bienvenue avec l’éloquence qui le caractérise, à tous les confrères de l’Escole deras Pireneos.

— l)e M. de Bardies, remerciant avec esprit et à-propos, et offrant des Heurs du pays de Foix à la Reine de Gascogne.

De M. Bibal, invitant les Félibres du Sud-Ouest à confier au château de Mauvezin, sous l’égide de l’Escole Gastou Fébus, les souvenirs à conserver de la Grande Gascogne.

Puis, un discours de M. Lisolp, représentant de la Fédération régionaliste Française, et la distribution des récompenses aux lauréats des jeux floraux.

Figuraient à la Cour d’Amour : la Reine de Gas­cogne (Germaine Guillot), la Reine des Pyrénées Mlle Sarrieu et les 6 muses ; Mlles Alberte Lalanne, Lorties, Pichon, Batcave, Valentine et Henriette Gassaët, portant sur l’épaule le chou de rubans fébu- siens et la cigale d’argent.

— La foule qui remplit la cour du château se précipite vers le promenoir sur les murailles et à la visite intérieure du donjon. La fête se termine par un banquet au grand hôtel de Capvern et par une soirée artistique au Casino.

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— Ce que pense des restaurations du château de Mauvezin M. le comte de Roquette Buisson, prési­dent de la Société Académique des Hautes-Pyrénées, et ce qu’il en dit publiquement aux Félibres, réunis à Capvern :

Je regarde comme un devoir de vous faire un a v e u . J ’avais beaucoup entendu critiquer les réparations faites au château de Mauvezin et redoutais d ’y venir, m ’attendant à une triste désillusion, presque à une profanation des vieilles ruines du manoir, si mêlé à notre histoire Bigourdane. Je me rappelais les nombreuses fois où, après les longues pro menades à cheval à travers les bruyères fleuries du plateau de Lannemezan, j’arrivais à Mauvezin pour y jouir du coup d ’œil sur les baronnies et les montagnes qui les dominent ; et, convaincu que j’allais voir une fort malencontreuse res­tauration, d'avance je m ’associais à toutes les critiques.

Ma surprise a été complète. En regardant de loin la lière silhouette du donjon, j'ai éprouvé les impressions de jadis. De près, je n ’ai plus retrouvé la grande brèche de l’enceinte ; j'ai vainement cherché dans la cour les b rous­sailles et les pierres éboulées qui l’encombraient, obligeant pour arriver à la porte à demi démolie à de vrais tours d ’acrobatie ; mais j’ai vu conservés avec un soin pieux, plus vigoureux, plus beaux qu’autrefois, les vieux lierres qui drapent les murs. J ’ai retrouvé, dans cette enceinte nettoyée, toute la poésie de la vieille ruine, tout son cachet, tout son caractère. Pour la première fois de ma vie, j’ai admiré l’ensemble du merveilleux panorama dont on jouit de dessus les remparts ; je ne l’avais jamais vu que par morceau, en suivant au milieu des ronces et des pierres, le pied des m u­railles ; mais j’en ignorais la grandeur et la beauté.

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Je m ’excuse de contrister l’âme des archéologues pour lesquels toute restauration est un crime. Il m ’est impossible de partager leur manière de voir. C ’est en me plaçant au point de vue artistique et historique que j'aime nos vieux monuments et c’est pour cela que j'approuve pleinement ce qui a été fait au château de Mauvezin. A un truquage plus ou moins savant, à un pastiche plus ou moins inférieur, je préfère les maçonneries qui, tout en soutenant la vieille tour, nous en montrent tout l’appareil et conservent au vieux château sa physionomie. Nous revivons mieux les luttes de l’histoire de notre pays, en ayant sous les yeux la forteresse debout qu'en cherchant à travers les broussailles ses pierres éparses et effritées. Je félicite M. Bibal de sa généreuse, intelligente, j’ajouterais artistique initiative. . . .

Le grand mérite du vieux château-fort de Mau­vezin est d’avoir survécu aux siècles passés, en nous transmettant intacte, la devise chevaleresque de notre Gaston Fébus ; sa plus belle destinée sera de con­server, pour les siècles futurs, le souvenir de tout ce que la Gascogne, dans sa plus vaste étendue, aura fait de grand, de beau, d’utile, dans les diverses voies qui conduisent à la célébrité : les armes, les sciences, les lettres et les arts.

Ce résultat sera presque atteint lorsque les vieilles murailles, désormais à l’abri des ravages du temps et des hommes, porteront inscrits sur des tableaux de peinture, les noms des Gascons célèbres qui ont illustré notre patrie de la Garonne aux Pyrénées, du pays de Foix au golfe de Gascogne.

B i b a l .

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IA G A S C O G N EN E M E U R T P A S

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La Gascogne ne meurt pas

La Gascogne, comprise dans ses grandes limites de la Garonne aux Pyrénées, a eu, de tous temps, ses guerriers, ses troubadours ou ses poètes, ses cou­tumes, ses traditions et son franc parler.

Sans remonter au-delà du xvic siècle, on a vu surgir, des bords de la Garonne aux rives de l’Adour, toute une pléïade d’artistes, épris de beau langage, qui révèlent l’art poétique gascon, tout en chantant, à travers les siècles, les mérites du terroir et Jes qualités immuables de la race :

Pey de Garros (i Ô20-1082).Salluste du Barras (1544-1590).Jean de Garros ( 1 55o-i620).Ader Guillaume ( 1 578-1645).Dastros Jean Gèraud (1.594-1648)Goudelin Pierre (1579-1649).Baron Louis ( i6 i2- i663).Bédout Géraud (161 7-169a).Dugay Dominique (1643-1735).Despourrin Cyprien (1608-1755).Il y a, sur Despourrin, une jolie anecdote qui

montre combien nos poètes avaient parfois l’épée près de la plume, comme nos montagnards ont tou­jours eu la tète près du béret. Elle est racontée par Rivarez qui fit un premier recueil des chansons populaires du Béarn.

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De passage aux Eaux-Bonnes, le jeune Despourrin reçoit un affront qu’il croit ne pouvoir venger que par les armes. N’ayant pas son épée, il envoie son domestique la chercher à sa maison d’Accous où habitait son père, le chevalier Despourrin, lui recom­mandant d’être prudent, de cacher la vérité. Le do­mestique s’acquitte au mieux de sa mission. Mais le vieux gentilhomme a des soupçons, suit de loin le domestique, arrive aux Eaux-Bonnes, apprend que son fils est enfermé dans sa chambre avec un étran­ger, écoute à la porte, entend le cliquetis des armes et... satisfait, attend le résultat. Tout à coup le bruit cesse, la porte s’ouvre et notre poète se trouve en présence de son père qui l’embrasse et lui dit: « Le « retour précipité de ton domestique a fait que je suis « parti après lui, présumant que tu avais quelque « affaire d’honneur, et de crainte que tu ne succom- « basses, j’ai apporté mon épée qui n’a jamais été « vaincue ». — « Je suis votre fils, répond le jeune « Despourrin, mon adversaire est grièvement blessé, « allons le secourir ».

N’est-ce pas délicieux? Edmond Rostand a bien voulu laisser au Gascon « le panache ». Mais il a mieux que ça : le coeur généreux, la tête chaude et, à l’occasion, le poignet solide.

Despourrin, qui maniait si élégamment le fer, tournait aussi bien la chanson béarnaise.

Voici deux des couplets de sa chanson « Dous treyts d’ûe brunette » qui servit souvent, dit-on, à réconcilier Louis XV avec la Pompadour.

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b 9

Ni las roses musquettes Ni la flou deü bruchou N 'an pas dé tas poupettes L ’esclat ni la blancou.

Hurouse la manette Qu'ü die aura l ’ounou Dé tira l'espinglette Qui las tien en présou.

L’Escole Gastou Fébus a la bonne fortune de posséder, au Musée de Mauvezin, une lettre auto­graphe de Despourrin (Don de notre ami Miqueu de Camélat). La voilà, celle-là, sauvée de la ruine finale. Combien il est à souhaiter que la belle phalange des Félibres veuille bien .lui confier maintenant d’autres sauvetages 1

Avec Henri IV, « lou noste Henric » le Gascon déborde à la cour de France. Mais il reste si fier que le bon roi est obligé de dire un jour à ses Béarnais : «Je ne donne pas le Béarn à la France, mais la France au Béarn ». Et, pendant les dernières années de la monarchie, le Gascon jette encore partout les éclairs de son épée et les éclats de son parler sonore.

Mais la Révolution Française, cette grande nive- leuse, partie de Paris, semble vouloir tout refondre dans un même creuset, les usages, les traditions, les langues. Le souffle venu du centre s’étend aux extré­mités, à la mer, aux montagnes. Il n’y a plus de provinces, rien que des départements, un échiquier où tout est envahi par le Parisianisme, l’accent pari­sien, la mode parisienne.

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Allions-nous tout oublier et tout perdre, nos traditions, nos espérances, la belle langue du terroir?

Survient Jasmin, le poète de la Garonne, et on l’entend bientôt s'écrier :

O ma lengo tout me zou dit,Plantarey uno estélo à toun froun encrumit...

Nous n’avons pas à rappeler l’œuvre qu’il accom­plit pour la renaissance de la langue Gasconne ni ses ouvrages si appréciés qui ont été traduits dans toutes les langues.

Il nous suffira de revoir ce qu’en a dit le grand Mistral. L’éloge d’un tel homme à l’un des nôtres sera toujours un délicat régal pour tous les Félibres, pour ceux qui l’ont déjà goûté et pour ceux qui ne le connaissent pas encore.

Il nous sera donc pardonné de le citer tout entier.

EN L’OUNOU DE JANSEMIN

Eloge prounouncia davans Lis Agenèslou jour qu’inaguréron l’estatuo d’aqu’éu pouéto (12 mai 1870)

Pér la nacioun e pér li fraire Que reston à l’oustau e que menon l’araire,E parlon voulountous la lengo dôu terraire,

Es un triounffe aqueste jour.Vaqui perque, iéu de Prouvénço

Vène di Prouvençau paga la redevènçoAu grand troubaire dou Miejour,

E tout d ’abord, à la Gascougno Que fasènt soun devé sèns crento ni vergougno,

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Mantôn sa vièo lengo e pdr elo temougno Salut emè libras dubert 1 Mau-grat lou flot que vèn la batte,

Dou brès de Jansemin au pais d ’Enri Quatre Vosto noublesso noun se perd.

Oh ! gramaci, raço valènto !Blesi, despersouna pér la toueso insoulènto De Paris , é nega dins la foulo doulènto.

Vous cridavian : Ajudas-nous !E. de Bourdéus fin-qu’à Marsiho,

Agen nous a larga tan flum de pouôsio Que n'en sian touti luminous.

Cantant l’am our m idsqu ’uno femo,E boulegant dou cor li plus dous terro- trente, Avèn vist Jansemin nous tira li lagremo...

Mai l’amavian, sabds perquô ?Coume Pindare de sa Tèbo,

Eu nous parlavo, (ièr, d'Agen, de Bilo-Nèbo, D’Auch, é dou maine d ’Estanquet.

Ardèrit, lusènt é populàri.Demandant soulamen la glôri pér salàri,Disiè « Mous soubenis, lous Frais bessous, Alàri

L'Abuglo de Castel-Culid »,E, pietadouzo vo risènto,

Sa voues, dins Fnniçnunelo o Maltro itnoucènlo , Fasid di cor ço que voulié.

Pidi, se quauque marchand d ’endormo lé venid pôr coumplaire à la modo uniformo :< Pouéto, à l’ouro d ’uei ta noto es descounfotmo

« Pouôto, gascounes pas mai !« Es lou Prougrds que lou coumando...

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4 2

— « La pilchouno patrio es bien abans la grando , Respouniô, Francimand ? Jamai'. »

En pelerin de Coumpoustello,Anavo degrunant soun capelet d'estello,Pèr H paure e per Diéu dounant à canestello ;

E lou pais reviscoula Beviè i’ounour à soun calice ;

E P ans , é lou réi, 6 tôuti, per delice,Voulien ausi noste parla.

Dis àuti cimo que soun vostro Dôu front di Pirenèu, tout ço que l'ieu nous mostro. Catalan o Gascoun, entend la lengo nostro :

Eh ben ! d ’amount a plen camin, leu, vese un pople brun se m ô u re . . .

E di viéu, e di mort, li courono van plôure Sus lou brounze de Jansem in.

Car nosti mort, e nosti paire E nosti dre sacra de pople é de troubaire Que trepejavo, aièr, lou pèd de l’usurpaire,

E que bramavon ôutraja Revivon aro dins la glôri !

Aro, entre li dos mar, la lengo d’O fai flôri...O Jansemin, nous a venja !

M i s t k a l .

Après un pareil témoignage, doit-on résister au plaisir de lire quelques vers de Jasmin: sa naissance, dite par lui ; une petite ode à la ville de Pau.

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— Extrait de « Mous Soubenis »

Biél et cruchit, l 'aoutre siècle n'abiô Qu 'un parel d ’ans à passa sql. la terro,Quan al recouèn d ’uno biéillo carrèro,Dins un oustal oun may d'un rat bibiô,

Lou ditchaou-gras, darrè la porto, A l'houro oun fan saouta lou pescajou,

D’un pay boutsut, d’une may torto Nasquet un drolle : aquel d ro l le . . . acôs jou.

A la bilo de Paouen la quittan, après mas Sérados per soun Poète (1840)

Bilo de Paou. bilo jouyno e floucado,Bilo oun la poésio és sentido, és aymado,O un semblo que lou ten n’a que d’houros de mel ; Oun de fennos, de flous la terro capelado Dan sous liouses d’am ou play tan ; tan à nostre èl

Que fay embejetos al ciél.Adiou ! parti douma, zou cal ; mais podes creyre

Que déjà me costes de plous ;Et quan te quittarey, per may lounten te beyre.

M’en anirey à reculous !

Jasmin ne s’est-il pas inspiré ' de la Nymphe Gasconne de Salluste du Barras du xvi° siècle) quand il voulut, à Lectoure, le 25 mai 1834, parler lui aussi le premier, avant les Parisiens venus pour y célébrer le Maréchal Lannes ?

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« Ero Puple et Gascou : Silcnço !« Francimans, tayza-bous dans bostros lyros d'or !« Séy Puple, amay Gascou ; moun dret és lou pu fort.« A jou doun, lou prumè, de dire sa nachenso...

« Et sa bito... et sa mort ! »

Le Maréchal Lannes fut un des preux de la Gascogne qui, malgré les grades acquis, tout jeune, sut mourir pour la France, au champ d’honneur, face à l’ennemi.

A la suite de Jasmin et autour de lui, quelle foule d’écrivains et de poètes gascons dont les noms brillent, où l’œil les saisit au passage, mais dont la plume la plus rapide ne saurait reproduire le tableau:

— Noulens Joseph (d’Armagnac) fondateur de la

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\b

Revue d'Aquitaine, qui, embouchant le chalumeau champêtre, a fait parler, avec tant d’esprit, bêtes et gens dans la « Flahuto Gascouno ».

— Cassaignâu Jean (de la Lomagne) qu’on a comparé à Jasmin et qui s’en est défendu, non sans quelques pointes de malice.

— Adrien Planté (du Béarn) aussi éminent qu’aimable (ce qui n’est pas peu dire) président de la Société des Sciences, Lettres et Arts de Pau, Président de l’Escole Gastou-Febus, dont les improvisations Béarnaises coulent et sonnent comme les eaux bruyantes de nos Gaves.

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4.6

— Miqueu libre majorai montagne, de la douce le pionnier du d i c - Gascon , la Pasto- Roubi ».

Camélat, le Fé- de la haute

le chantre « Réline », infatigable

tionnaire auteur de raie « le

— S)min Palay cogne) dont les c o m m e les son nom, à se des cou- presque si m ent, à (en Alle- àTouIou- lousain), d’oeuvres blés :« lou Fran­ce Bersets de coundès à ri se »

(de Béarn et Gras- vers résonnent

llabes de qui on tres-

r o n n e s , multané-

Col ogn e magne) et se(en tou- a u t e u r

remarqua- « Poue'sies

c h i m a n » Youenésse e

Gansons en taus

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maynadots », « Tolosa », « la Rebiscoulade », « la Pcleye dous arrasims », « Case » etc., etc.

— J.-V. Lalanne, Félibre majorai, secrétaire

général de l’Escole Gastou-Febus, auteur des « Coundès Biarnès » « ue Beti}rénse » « lou Prousey d’u Biarnès ».

-— Xavier de Cardailhac, dont la plume alerte célèbre presque à la fois Jasmin et Camélat, auteur de plusieurs ouvrages : « les Propos Gascons - 3 vol. ».

- Le Docteur Dejeanne, aujourd’hui si regretté, ancien Vice-Président de l’F.scole Gastou-Fébus, en Bigorre, auteur des Fables de La Fontaine en rimes bigourdanes.

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— Le Professeur Lannelongue, sénateur, membre de l’Institut, Vice-Président de l'Escole, en Armagnac, qui ne dédaignait pas de faire entendre la langue Gasconne, dans l’Inde, la Chine et le Japon, mal­heureusement décédé.

— Léonce Couture, qui fut « la Cigalo de la Douzo ». Ké 1 ibre majorai et mainteneur des Jeux Floraux.

— J. F. Bladé, qui fut « la Cigalo dou Gers », et l’historien de la Gascogne.

— Isidore Salles, qui ligure en bonne place dans « l’Empire du Soleil » d’Armand Praviel, auteur de « Debis Gascouns » « Nabeths debis ».

— Alcée Durrieux, qui fit le dictionnaire étymo­logique de la langue Gasconne (2 vol. 1899) et « las Belhados de Leitouro ».

— Prosper Duplan, qui fait dériver la plupart des langues vivantes de l’idiome celte de Bigorre.

- J. Michelet, notre éminent collègue, trésorier de la Société gasconne « La Garbure » qui vient d’élever à la mémoire des poètes Gascons du Gers un magnifique ouvrage auquel nous avons puisé nos meilleurs renseignements, en ce qui les concerne.

— Le savant Espagnolle qui par I’ « Origine des Aquitains » démontre l’origine grecque de notre langue.

— Mazure qui fit l’histoire du Béarn.— Lespy qui fit la grammaire béarnaise.— Nos aimables collègues du beau sexe :Mme Filadelfo de Yerde, qui nous a donné les

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« Cantos d’Azur », « Cantos d’Eisil » et « Cantos de Dol ».

Mme de Libertat, qui vient de recevoir les Palmes Académiques et de publier son livre « Moisson d’étoiles ».

Mme Guillot, la reine de Gascogne, aussi gracieuse que belle, qui préside avec tant de distinction nos Cours d’Amour et chante avec tant de charme « la Coupo Santo » et « Lou PrintemS ».

— Sarrieu, l'érudit professeur du Lycée d’Auch, l’âme de l’Escole deras Pireneos, l’auteur de « Imnes d’amou ».

— D’Almeida, le Félibre de Mézin, l’hôte estimé de Loupillon, qui versifie aussi bien qu’il déclame :

S ’em demandon d ’oun souy, dizi : souy dé Mézin, Lou païs dous boussous, lou pais dou boun bin,Dé Mézin qu’aymon bien, malgré caouqué défaou,Dé Mézin aou gran co, dé Mézin aou cat caou.

T ’aymi. Mézin, e t a lengo mayraloQue de mous prumés pas dan joué ey bégayat.Es estado per jou la lengo san ribaloQui hé pensa toutjour à tout ço qu’an aymat.

Q u ’as aouut de tout cens fresquos è beros drolos ;An fourmat de toun Floc las superbos corolos De tu las aoutos bilos podon esta jalousos ;N ’y pot aou je d ’aoustan mé pas mèy d’amourousos.

Souy dé Mézin, oun ès bazut Falliéros !Coumbien dé bilos coumo tu séren fiôros De happera soun hill 1 Jé, qu’èros ignourat ;Aney toun noum què passo à la postéritat !

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r>o

— Louiset de I.acountre, qui fit la pastorale « Despourri à Sén-Sabi ».

— Charles du l’ouey, le vénérable président honoraire de la Société Académique de Tarbes, qui, à 86 ans, envoie au Musée de Mauvezin, son portrait, avec cette dédicace :

Q u ’em demandât lou mi pourtret En taon Museo dou bieilh castet ;Mesclât este dab l’antiquaillo,Lou bous bailli, vaille qué vaille.

— Les 4 inséparables d’Auch qui avec « Aéhus e flous » nous ont donné une gerbe de chansons enguirlandée de fleurs.

— L’abbé Daugé, secrétaire de l’Escole Gastou- Febus, dans le pays des « Lannes », aussi bon chanteur que fin diseur, auteur de plusieurs ouvrages « Flous de lane » « Sounet de Malau » « Grammaire Gas­conne » « Sente Quitayre » « une Camade en Italie » <t lou Castet de Maubesin ».

— Labaigt Langlade, Vice-Président de l’Escole, en Béarn, auteur de « Pouésies Béarnaises » « Flocs embrumats » « Briülétes estarides dou mé casaü ».

Et bien d’autres, dont la liste serait longue ; à remarquer pour leurs écrits en langue mayrane :

— Ugène de Larroque avec « Arrépouès ».— De Dambielle avec « Parpalhôus y Flourines ».— Auguste Peyré avec « Petites pouésies y

cansouètes ».— Félix Arnaudin avec « les Contes populaires ».— L’Artè dou Pourtau avec « Melhé arride qué

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GJHST OU

A B B É - D A rJ G ES E C R É T A I R E D E L A S E C T I Ù i . l DES L A N D E S

C O N T E Ï »

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ploura » « Lous dus parlas d a Nouste » « La Cante dou Couarrou ».

Le Docteur Lacoarret avec ses beaux livres « Au Peys Ber » « Pous paysas » « Pou Bilatye ».

— Henric de Pellisson avec « Noste Dame de Sarranse » et « Libé de Baretou ».

- Cyrille Labeyrieavec « Grouns d’Arrous ».— Léo Lapeyre avec « A Noste »:

Andréu Baudorre avec ses « Cames paysan­nes » et « Mugot ».

— Sylvain Lacoste avec ses « Versions gasconnes ».Lou Cascarot qui nous fait rire avec ses

chansons et nous fait pleurer avec « La gran May ».— .Iules ('.arrive de Nay, le beau diseur, qui aurait

à l’occasion le sourire de d’Artagnan et le coup de poing de Po"*u''°

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— L'abbé Jean Pailhé, curé de Mauvezin, dont la modestie exagérée cache à tous les yeux son breveto Jde pronotaire apostolique, qui fut l’ânie de la restauration du vieux château-fort et sera le premier conservateur de son Musée.

— Marius Fontan, d’Aignan, le paysan poète, : i souvent couronné, le collectionneur infatigable de ; vieux mots de notre langue.

— Les Félibres, dont les oeuvres reçoivent les lauriers de Fébus... et tant d’autres qui, à la suite de la Pleïade ancienne, vont former comme une voie lactée d’étoiles au ciel de la Gascogne.

— Pourquoi ne pas citer ici la plus belle...? notre grand Fallières, qui vient de sortir de l’Elysée où il

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occupa avec honneur, pendant sept ans, la première magistrature de la République Française, et qui. avant d'y rentrer, embouchait, à l’occasion, le chalu meau gascon !

Mis en évidence dans un poème du Docteur Laborde, il lui fait des compliments qu’il termine par ces 4 vers que ne dédaignerait pas Jasmin :

Merci per jou, paourot, tout m ingrat de bergougno, D'esta den toun libret. à la place doû miei.Dans tout aquets messius. l 'ourgull de la Gascougno. Merci dé quet haounou, jamès l’oubliderei !

Enfin ne serait-il pas intéressant de retrouver ici quelques vers de nos poètes Gascons, ne fût-ce que pour suivre, d’un rapide coup d’œil, les diversités de notre langue mavrane, suivant le terroir et à travers les âges ?

En iôyS, Henri de Navarre et Marguerite de Valois, sa femme, ' arrivent à Nérac. Salluste du Bartas fait ainsi parler la Nymphe Gasconne qui veut, avant la Nymphe Latine et la Nymphe « Fran­çoise », saluer la reine et sa beauté :

« Leichem esta la force. Oun mes on s’arrasoue « Mes on bé qu ’ jou é dret de parla daüant bous,< lou souv N ym phe Gascoue ; e r es, are, Gascoue.« Soun marit es Gascoun, é sous sutgets Gascous.

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« Baïse, enfle toun cous ; coummence t’ hé mès grane « Que lou Rhin, que lou Pô, que l’Ebre, que la Tane, « Glouriouse, hé brouny toun gay per tout lou Moun. « Baïse, enfle toun cous ; coummence t’ hé més grane « Puch que jamès lou Rhin, lou Pô, l’Ebre, la Tane « Nou bin sur lou graué tan beutat que lou toun.

« Creich, ô petit Nérac ! Nérac, creich tas barralhes.« Leue tas tous au céu ; cinte, de tas muralhes,« Tout so que de plus bet cintet iamès lou Moun !« Clare halbe deu jour, bet escoune de grassie « l luch léu, huch. bè mucha sur Faute Moun ta fassie ! « Assiu raye un Lugran plus lusen que lou toun.

Au commencement du xviie siècle, Dastros, surnommé l’Hésiode Gascon, se plaint de l’envahis­sement de la langue d’Oil et engage ses compatriotes à maintenir leur langue maternelle :

« Crey me, Gascoun, n ’ajos bergougno « De noste lenguo de Gascougno « Ni de l’augi, ni d’en parla « Coumo à Laytouro é à Sent Cia.

« É la nosto sens ourresio,« Neto coumo béro bassio,« N ’a nat mescladis, ni nat lard.« Nat mot estrani, ni bastard,

Puis, il chante l’Amour qui revient au prietemps :

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« La pageso dab soun pagés,« L abourgeso dab soun bourgés.

« Lou gran Baroun dab la gran Damo,< Lou hoüec d'araou tout ag alamo.

'< Las biestos brudos à soun tour,« Lou Couloumet dessus la tour

« Lous auzerets p e r la hoOeillado « Lou bestiaret dessus la prado,

« Lou Parratoun peous traucs deou mur « E lous peychis an lou bounur

« De hé l’amou sens nado b.ounto :< Deguens la gourguo més prégunto,

« Coumo lous hé ram sau dômèst « De la més escuro abourést ;

« C a r ia terro, l'avguo, ni Favre « N'an arré q u e d ’a m o u se payre. .

Plus tard, vers le milieu du xvnc siècle. Baron Louis (du Comté d’Astarac) né à Pouyloubrin, près de Masseube, chante son pays natal, dans une ode dont nous n’extrayons que quelques vers :

« Cantem, gascounes pastourettes,« Las bigarrades mountagnettes < Deu tucoulet de Pouyloubrin ;•< E per sa glorie q u ’es ta bére ;< H asan tinda per la ribére « Lousfredous de nostre clarin.

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D7« Aquet bét locde ma nechense « Mérité per recounechense « Un councert ta plan aiustat.« Q u’au dous aire denoste muse « L'embeie se trobe camuse,« E lou prêts de noste coustat. .

Puis, il célèbre brillamment la Gascogne.

« Muses aquô mous es bergougne « E mous deurém accusa « Quan n ’auem de loungiems en sa, « Cantat l’aunou de la Gascougne « Despleguém sa glorie sur taule :« E que per dret mous sie permés « De la banta tout à jamés,« Entroque perdam la paraule.

< Flourich, bénaside Gascougne « Teng-te toustem en boun estât. « Ma m an, per traça ta beutat,« Sera tout jamés en besougne.

« Tas terres seran renoumades,« De tu pariaran en tout loc ;« E tu t’en pourtaras lou Hoc « Dessus las is,les fortunados.

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Le 16 Septembre 1649, du même Baron Louis, une ode-épitaphe à Goudoulin (à qui Toulouse vient d'élever une statue) :

« Acv deguens es susterrat « Per tout jamés bouquebarrat « Goudoulin. l’au n o u d e Toulouse 1 « Countre aquet esperit gaillard « La mort a jougat au bieillard « E la fourrât en la balouse.

« De gran sentimen de doulou « Phœbus a cambiat de coulou ;« E despuch que lou clôt embarre « Un trésor rare coum aquet,« Ei, boute au croc soun réseguet « E desacorde sa guitare.

Au xvm® siècle, Xavier Navarrot, surnommé le Béranger du Béarn, qui a tant contribué à faire ériger une statue à Despourrin, en i84o, chante comme lui, mais un siècle plus tard, l’amour et la gaieté.

« Bouques resquettes « Tan berovs œlhous « Tendres merbelhous

« Bienetz palhetes« Flour de la sasoun ; « Bienetz per bandes « Fourm a guirlandes « Y plates bandes

« Cors ta joensv ta tilhous.« Entratz bloundettes « Entratz brunettes « Sus lou berd gazoun

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Au dix-neuvième siècle et plus près de nous : Cassaigneau Jean delà Lomagnei couronne de fleurs « Las papillotos » de Jasmin et finirait par le défriser :

« Aci q u ’és, disets-bous, le ribal de Jasmin !« Nani, Moussu, d ’aquet séou pas à miéy camin :« F'abourit d ’Apolloun, dan sou poulit lingatge,« Sous bersis plà limats, soun aire piétadous,« Le poéto Agenes recep sur soun passatge « Laourés, couronnes d'or e juntadosde flous ;« lou. praoube gus, rimur de pacoutillo,« Brico laouzat pou Diou de l’IIélicoun,« C oum ’ un limac, toutjour din ma couquillo,« Séou proche d ’et un plà petit ciroun !« Es per aco que me preng pas l'embejo « D'ana prêcha, poumadat e cap nut,« Dins aquets bets salous oun le Jasmin trepejo « E tuste din sas mas quan tout le mounde és mut !.. « Mes tabé, de l’Estat tiri pas nado p a g o . . .« Crouxis, pensious, ribants. soun de machant gagna ! « Préféri, sou biouloun en tou he zigo zago,« Parla d ’un charlatan en tout l’escaraougna...

— Noulens, Joseph (de l’Armagnac) fondateur de la Revue d’Aquitaine en 1866, annonce ainsi les fables et les chansons de sa « Flahuto Gascouno » (in-12, 1894, Paris, lib. Bouillon, 67, rue Richelieu).

« Pusquem aquets eschantilhous « De quauques boucis savourous « De nosto bersificaturo

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« Alisca bosto Iegiduro « Din qu 'à la fin de m ascansous !•• Adaro. ostan frouncit per l’adge « Que la ribèro per lou bent,<! Lou Francès noun semblo plazent r « Mé s'emplegui lou bieih lengadge « T an t musicayre e gayhasent,<< En crezi recayjut maynadge :« Praco souy aù cap dou cam i.

« Aùan d'ana din la hanguèro « Heze moun soura damb lou bermi,« E pareche aü gran judici,« Ey boulut arredise encouèro « Quaüques avres que ma memèro,« En jumpla dou pé ma cugnèro « Cantejaùo per m'endroumi,« Et d'autes apprenguts sentz ero '« Aquets taben pouvran serbi.« Se nou sabon vous deberti,« A bous hé bacba la perpéro « S'embejots de b?us assoupi.

— Camélat Miqueu, le poète Pyrénéen, des hauts Gaves, vient de chanter l’idylle de « Béline » (1898) qui est au Pyrénées ce que Mireio est à la Provence. Mais Béline. devenue mère, va mourir de couches. Tout le monde est dans la désolation et aux regrets, la famille, le mari, les amies (et aussi le lecteur). Voici les dernier vers :

« Yacoulet nou pouden matiga-s la doulou.

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« Tan lou sarrabe la canaule,« Qu'ére cadut sensé paraule.

« Que l'abèn empourtat. Dou dehore l 'amplou « Emmouriousit que lou saubabe...« Toute ue bite s'acababe !

« Quoan tourné ta la crampe, u cos mour ère en blanc , « Lous oelhs bitrats é la mas yuntes ;« 'bouts qu'en anaben sus las puntes.

« A l’estrem u cos biu, balalin-balalan,— De la mayote la semblense —« Que vemicabe ue plagnénse 1

— Le Docteur Déjeanne de la Bigorre) dans « Carnets à Bagneros » 1899).

« Salut à nouste bieilh Bagnéros,« Gaouyouso e plasento dou tâ t ,« D'amou, de douços primaouéros,« Qu'es daouno e rèvno de beoutat.

« De't casaou de nousto Bigorre « Que-n és et orguil e ra flou :

■ « 'Qui t'a bist que-t bo beye encoro « De tu que-s broumbo dab amou.

« Quinos beroyos maysouetos !« U céou lusén coum ouelh d'aouzet 1 « Us arrious a ras avgos nétos « Q u’Adour mando coum û troupôt.

« De tous téns en tas houns bourentos « Que y bien cerca forço e santat « Detsè s de doulous escousentos « Grans ou couvés, henno ou m av n a t . .

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— Le 3 t août 1907, aux fêtes félibréennes de Mauvezin, Simin Palay (du Béarn , pour répondre à une jeune félibresse qui venait d’évoquer le souvenir de quelque troubadour, de 20 ans, « aux cheveux dorés », accomplit un tour de force, en improvisant, à la minute le sonnet suivant :

A la Pouetésse Alberte

« Lou blound troubadour qui cercad, « Damisèle, à trabés lous moundes,« Que s'en ey anad ent’aus coundes « Oun lous temps courriès l’an hicat.

« Mes aban, toutu, q u ’a mercad « Lou sou passatye per la bite.

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« E quauqu’arré d'êt que perpitë « Aci : la probe, q u ’at c e rcad . . .

« O bé ! tio. L ’am ne dou cantayre « Q u’aleyte e bribe per l’ayre « Briague de berbe encantad ;

« Coum d’autes cops la bère hade,« Que crey pla que l’abet gahade « Au las de la boste beutat.

— L’abbé Daugé, du pays des « Latines » fait intervenir dans « Lou Sauneyt de Coudoum » (1908}, trois personnages : « Lou Blasi de Mountluc, Bossuet et Duplcix » et il en profite pour adresser un aimable salut à l’Escole Gastou-Febus, à la reine de Gascogne et au vieux château-fort de Mauvezin :

« Lous Félibres de oey que soun d’aute payére « Ne ban pas à Paris : q u ’an u reyne enta d ’ets,« U reyne de Coundoum, toutun modeste e fiêre ;< Coan g n ’a, la balen pas, qu 'an de mey bèts plumets !

« Q u’an même, en Bigorre, un nit de pouésie,4 Bielh castet, segoutit per nau cope cen ibers,« Cintat de sou, de tues, de mountagne bésie,« E perboucat de nau per un niaynat dou Gers.

— « Aco qu’ey Maubezin, d ’oum am heyt patacade !< Se dit labets Mountluc, qui marche à grans arpats : « Saludan Maubezin à la peyre macade,« D’aut cops obre de guerre, adare obre de pats ! »

— J. V. Lalanne, du Béarn, Félibre majorai, nous raconte, plaisamment, dans « lou Prosey dou

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Biarnès » (1911) combien il est difficile, même pour le meilleur des saints, de ne pas avoir des distractions dans ses prières : — La Pregari —

« Nouste Segnou aus Apostous qu’amuchabe la sue mustre.

« — Quoand hasits la prégari, ous disé éth, que « serais ayulhats, cap bach, màs yuntes e nou « penserats arré mey qu'a Diu, lou Pay dou céu. « Oélhs e aurelhes pertout qu’a, pou peysdous lugàs « e sus la terre, dou sim de lamountagne au tréhouns « de la mà pregoune, lou noste Pay, lou Diu dou « Cèu. Si pecats, dab eth que p’at bèyrats.

« — Bertadère que dèu de segu esta la boste « paraule, Segnou : mès per so de you, la boste « mustre qu’ey dehèt bagante. Yamey en tau pun « n’em dera defant lou boste Pay, lou Diu dou Cèu.

« — Pierre, Pierre, au casau enflayrat nou y a « yaméy abut, chéns quauque broc, arrose bermelhe. -« Drinou ménch credéns que boù aux criats lou « dou Cèu.

« — Ayats méy d’afidance, Segnou, en lou boste « Serbidou.

« — E doun, countre l’asou carreye dou de rèyte e « de praubé que’t trouquerey bèth pourî de très ans, « s’es pouderous dou patèr sance' chens pensa ni « habes ni cèses.

« — Maye pêne !... Pater noster qui es in ccelis... « Hèy, Segnou. e m’y hiquerats tabé la sère ?...

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solitude, dans un passage d’ « Ahéus e flous ».

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Depuis bientôt 17 ans, c’est toute une armée d’écrivains et de poètes qui promènent, à la suite d’Adrien Planté, leur enthousiasme et les accents de la langue mayrane, en de magnifiques randonnées Félibréennes, à Biarritz, à Dax, à Bagnères-de-Bi- gorre, à Pau, à St-Sever, à Argelès, à Eauze, à Oloron, à Mont-de-Marsan, à Mauvezin et Cauterets, à Condom, à Salies-de Béarn, à Oapbreton et à Mauvezin Capvern, où les fêtes ont été plus belles que jamais.

Adrien Planté est mort : ce qui nous a mis dans le deuil le plus pénible ; et c’est M. Louis Batcave, son ami et compatriote, qui va présider, désormais, aux destinées de l’Escole Gastou-Febus.

Je ne résiste pas au plaisir de rappeler ici ce que disait de lui I’ « Union Pyrénéenne », sous la plume de son distingué Directeur A. Navarre, dans son édition du mois d’octobre 1912 : « Nos lecteurs « connaissent de réputation la vaillante Société « Félibréenne dont nous racontons dans ces colonnes « l’effort désintéressé en vue de conserver dans notre « pays ce qui reste de vieilles et bonnes,traditions, « de coutumes locales et aussi la langue des aïeux.

« L’homme éminent qui fut, de longues années « durant, l’âme de ce mouvement littéraire et « décentralisateur est mort, il y a quelques mois, « en laissant, avec le souvenir de ses bienfaits, un « nom qui restera dans les annales béarnaises.

« Dans sa dernière assemblée annuelle, l’Escole « Gastou-Febus a été appelée à désigner le succès-

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M . L o u i s B A T C A V E

« seur du regretté Adrien Planté. Elle a porté son « choix sur M. Louis Batcave, bien connu de notre « association dont il a accepté depuis longtemps « d’être membre d’honneur. — Nous sommes heu- « reux de ce choix.

« M. Batcave est un des hommes les plus avertis de « notre pays ; peu d’érudits connaissent comme lui « l'histoire du Béarn et de la Gascogne. — Son âge, « sa situation de fortune, la modération de ses idées. « sa fermeté unie à la sagesse de ses conseils en « font un digne successeur de M. Planté, un enfant « d'Orthez comme lui. — Nous faisons des vœux « que, sous la présidence de M. Batcave, l’Escole « Gastou-Febus marche vers de nouveaux succès et « atteigne une grande prospérité ».

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M . B E R N I S

Le même jour, '26 août 1912, l’Assemblée générale réunie à Pau, a désigné comme vice-président général M. Bernis, Ingénieur en chef des Ponts et Chaussées et des chemins de fer à Tarbes (H.-P.).

La prospérité de l’Escole Gastou-Febus, sous la direction d’un savant et d’un polythecnicien, paraît désormais acquise. D’autres ne pouvaient mieux que MM. Louis Batcave et Bernis travailler à l’union des cœurs, parmi les Félibres du Sud-Ouest, pour arriver, ainsi peu à peu, à l’unification des tendances et de la langue.

Mais qui donc vient de dire, quelque part, que la Gascogne se meurt ?

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Cadré pourtan pas bengue lou dise aù Falliero ni tapoc au Camelat ni au Simin Palay.

« Lou noste Falliero » sourirait dans sa barbe Olympienne; Camélat se fâcherait et Simin Palay serait tenté de jouer de la savate, quelque part.

M. Fernand Laudet, à qui on a fait le reproche de l'avoir dit, ne l'a pas dit. Fernand Laudet est un des nôtres ; homme des plus érudits et des plus distingués ; Directeur de la Revue Hebdomadaire, à Paris. maisGascon avant tout.

•J’avais lu son livre « Souvenirs d'hier » bien senti, bien écrit ; et je ne puis résister au devoir d'en parler. Puisque c'est le volume incriminé, la réponse à l'accusation doir avoir les coudées franches.

Voici ce que M. Fernand Laudet dit de la Gasco­gne et du Gascon :

« La Gascogne a toujours fait parler d’elle : si « lointaine est son histoire qu'elle soulève de difficiles « et obscurs problèmes. Salvien la compareau paradis ; « c’était du moins un paradis où l’on se battait et qui« connut toutes les horreurs des invasions...............

« Cet amour de la bataille, à supposer qu’il soit « un défaut, est compensé chez le Gascon par des « qualités qu’il est bon de rappeler, parce qu’elles <t s'incarnent dans la race comme les travers et « survivent aux évènements.

« La gaieté ou. pour mieux dire, l’humeur égale « est la première vertu gasconne. A la retraite de « Russie, un sous-officier délayait, en chantant, son « chocolat dans la neige et invitait ses camarades à

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« déjeuner ; c’était un enfant de la Garonne............

« Il est intelligent, car il saisit tout ; il est aussi « foncièrement honnête, ce qui ne gâte rien............

« Aujourd’hui, bien que la vie moderne semble « rendre au Gascon sa carrière moins aisée, il vit « sur sa réputation et sait l’entretenir. Comme par et le passé, il continuera de s’aventurer dans le monde « et n’ayant pour avant-garde que son nez et d'autre « suite que ses guêtres » ; mais il chante en parlant, « il est l’aimable « fictor » qui rit et fait rire, et, s’il « arrive aux honneurs, il reste bon enfant ; il demeure « l’ami de son camarade d’école................................

« La vieille province aussi résiste de son mieux « à la contagion de l’uniformité. Dans les champs « dépouillés de leur ancien manteau, sur les coteaux « aux verdures changeantes, dans les vallées lointaines « ouvertes à la vie, elle apparaît encore partout où a l’on retrouve l’emplacement d’un camp romain, le « cloître d’une abbaye, les ruines d'un castel, la « tour d’une collégiale, les ailes d’un moulin, les « arcades d’une bastide, et, alors même que les ruines « périraient, comme à Pergame, la nature dérou­te lerait toujours le même décor original et captivant; « les Pyrénées aux flancs d’azur montreraient leurs « fronts neigeux et couronneraient à l’horizon la <t sér e des coteaux dorés, tandis que, dans la plaine, « baignée de lumière blonde, une voix chanterait

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Aqueros mountagnos que ta hautos soun M ’empèchen de béde mas amous oun soun

Fernand Laudet entend donc, comme nous, chanter les refrains de Gaston Fébus.

Tant que les échos rediront, par monts et par vaux, les chansons de nos aïeux, de Despourrin, de Jasmin, de Rolland, celles que nos Félibres font et vont faire ; tant que le feu sacré des jeunes chauffera le terroir ; tant que nous aurons au cœur l’amour de notre soleil et de nos champs ; tant que notre bouche, la plume et le pinceau conserveront la langue, les traditions et les monuments de la vieille Gascogne, nul n’aura le droit de dire qu’elle va mourir.

Oui, aujourd’hui et toujours, notre petite patrie, la Gascogne avec sa renommée, est et sera chantée en gascon des bords de la Garonne aux rives de l’Adour, du vieux château fort de Mauvezin aux plus hauts sommets des Pyrénées.

Le béret règne en maître, le long de nos monta­gnes, de la Méditerranée à l’Océan.

Et, si l’on entend l’un des nôtres s’écrier :

« Toquo-y , si ganses ><

Mille Escholiers de la montagne et de la plaine sont prêts à ajouter spontanément :

« Diu biban 1 Toustem Gascous ! Fébus aban ! >

Au qui a dit, aus qui diran que la Gascougue ey

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moiirte, touts, assi, que se hiqueran sus las puntes, en ta chioula : « Nani, Moussus é Franchimans,

La Gascougne n’ey pas mourte ».

La Gascogne a vécu, vit et vivra. Rien n’arra­chera de nos cœurs la conscience que nous avons, de notre glorieux passé, de la valeur de nos pères, de la beauté et des ressources de notre climat, de l’esprit et du caractère que nous ont légués nos aïeux, de la richesse et de la sonorité de notre langue qui leur servait à jeter, en tous lieux, la fierté de leurs sen­timents.

Je les ai vues, les fêtes des Félibres du Sud-Ouest; j’ai partagé leur enthousiasme et nul ne m’en voudra d'en garder ici le souvenir. Il sera le meilleur de mes dernières années.

J’assistais, le 5 septembre 1910. à la Félibréc de Capbreton, ce village coquet, baigné par l’Océan, où les villas entourées de verdure paraissent comme un damier d’oasis sur la grande dune de sable qu’ombrage et protège la ligne des pins maritimes.

Ils étaient là, dans la grande salle de la mairie, les Escholiers de Gaston Fébus, la Reine et les demoiselles de la Cour d’amour, les concurrents des Jeux Floraux, des amis, un public d’élite.

Une circonstance imprévue et malheureuse m’avait amené à occuper la présidence ; et je leur disais :

11 a donc fallu improviser une Cour d ’Amour, qu'il me

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reste à présenter. Et tout d ’abord, voici Mlle Alberto Lalanne, une escholiére de Gastou Febus, lauréate des concours de dessin. Je n ’ai pas à en faire l'éloge. Déjà, en i907,elle a mérité, à Mauvezin, un brillant sonnet improvisé de Simin Palay. Depuis, ceux qui ont assisté à nos lêtes de Condom et de Salies ont pu apprécier les charmes et la valeur de ses poésies, ce qui lui vaut, aujourd’hui, l’honneur de ceindre, par intérim, la couronne de Gascogne

Et puis, voici les Muses, florissantes de jeunesse, aux fleurs et rubans de Febus : Mlle Romefort, Mlle Bourciez, Mlle Lâché, Mlle Vignes, Mlle Pôré, Mlle Getten. Les trois premières sont des élèves de l’école des beaux arts de Bordeaux, dont deux lauréates du concours de dessin ; les trois autres sont du département des Landes, dont deux appartenant à l’Université. Mais toutes ont des charmes d’amabilité et de gentillesse que ma voix ne saurait définir.

Que la reine et les Muses, en cette heure solennelle, reçoivent de nous tous de respectueux hommages et qu ’elles me permettent, en m ’inclinant profondément, de saluer, en elles, ce que personnifie la meilleure moitié du genre humain : la grâce et la beauté !

Je manquera s à un autre devoir si je ne me hâtais de remercier les amis, connus ou inconnus, qui assistent à cette réunion Felibréenne, et si je n ’adressais, au nom de tous, nos hommages et nos remerciements aux Dames, si nombreuses, qui ont bien voulu venir égayer cette fête de leurs toilettes et de leur sourire.

Me sera-t-il permis, ici, à cette extrémité du territoire gascon, de dire, en quelques mots, au moins pour ceux qui ne les connaissent pas encore, ce que sont les escholiers de Gastou Febus et ce q u ’ils veulent rester?

Nous sommes, tout d ’abord, des Félibres.

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Le félibre, le philabros des Grecs, l’ami du beau, grâce aux raffinements d 'une civilisation de plus en plus avancée, est aujourd’hui partout. On le reconnaît à la sensibilité qu' il manifeste pour' toutes les beautés, les harmonies de la nature, pour tous les sentiments, élevés ou généreux.

Le Félibre chante le soleil qui réchauffe et féconde ; il aime la feuille qui pousse, la fleur qui étale ses couleurs, l’oiseau qui gazouille dans le feuillage, le ruisseau qui murmure, l’idylle de ses champs, les charmes de son pays.

11 rêve, admire, idéalisé ce qu’il voit et jette, avec éclat, l’expiession de ses intimes sentiments.

Si nous vouions remonter seulement jusqu’à Gastou Febus, sous l’invocation de qui vit notre Escole. nous devons reconnaître que celui-là était déjà un Félibre, qui a fait graver, dans le marbre, au milieu de ses armes de Foix et de Béarn, sur la courtine du château-fort de Mauvezin, cette chevaleresque devise : <( J 'ai belle Dame » aujourd’hui immortelle, parce qu’elle est devenue la propriété de l’Escole Gastou Febus

On ne sait pas exactement quelle lut, en réalité, cette Dame unique de la pensée de Febus. Mais si les Escholiers de nos jours, ses successeurs, étaient appelés à créer une devise de ce genre, ils seraient probablement tentés de la mettre au pluriel ; car, d ’après ce que l’on sait, d ’après ce que l’on voit, c'est par centaines et par milliers que l’on compte, aujourd’hui, en Gascogne, les belles Dames,

C est ainsi que nous sommes naturellement des Félibres; et c'est Jasmin, le poète agenais, et Mistral, le poète provençal, qui nous ont indiqué la voie nouvelle : Jasmin de qui Mistral a dit :

De Bourdeus fin qu’à MarsihoAgen nous a larga tan floum de pouesioQue n’en siam touti lu m in o u s . . .

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Mistral, dont les œuvres et le caractère ont lait revivre la vieille langue des troubadours et qui est considéré par ses contemporains, par nous tous, comme le chef incontesté du Félibrige méridional, des Alpes aux Pyrénées.

Au centenaire de Jasm in, les Félibres du Sud-Ouest, conduits par Mistral sur les bords de la Garonne, ont fait graver, sur le piédestal de la statue de Jasmin, ces mots signiticatifs qui paraissent être le but résumé de toute sa vie :

O ma lengo, tout mé zou dit Plantarey une estelo A toun froun encrumit.

Escholiers de Gastou Febus, vous êtes les disciples de Jasmin et de Mistral ; et c’est à vous qu'il appartient de trouver les étoiles, que vous fixerez sur les tablettes où vous gravez, en langue mayrane, l’explosion de vos sentiments poétiques.

Nous sommes donc des Félibres : mais nous sommes aussi, et surtout, des Gascons. Et, hâtons-nous de le dire,' tout doucement entre nous . « N ’est pas de la Gascogne qui veut. »

Le Gascon a des défauts ; on nous le dit et nous devons le croire. Mais il a aussi des qualités débordantes et nous ne pouvons pas le dire, parce qu'on nu s reprocherait de vouloir mettre, dans notre maison, des guirlandes qui la flattent.

11 est mieux, ce me semble, de rappeler simplement des anecdotes connues, indiscutables, déjà dites, et qu’on aime à redire.

Voulez-vous, pour les Gascons, un certificat d ’esprit d 'initiative et de persévérance? C ’est Henri IV qui le donne.

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Son jardinier de Fontainebleau, probablement pares­seux, se plaignait que le terrain était ingrat, qu'il avait beau le travailler que rien n ’v venait — « Sémes-y des Gascons, dit le roi, ils prennent partout. »

Voulez-vous encore, pour eux, un certificat de courage et de valeur personnelle ? C'est Napoléon i er qui le délivre. Dans un de ces moments d'expansion, où il savait si bien juger les hommes et les choses, il s'écriait : « Qu'on me donne une armée de Gascons et je traverserai cent lieues de flamme ».

Le Gascon est profondément attaché à ses traditions, à sa langue, au terroir de ses ancêtres et, si l'on veut com­prendre le motif de ses préférences, il n'v a qu'à voir, d 'u n ' coup d'œil, ce que contient, pour lui, la Gascogne : E t d 'abord, le grand fleuve, les plaines de la Garonne où poussent, en plein champ, les chanvres, le tabac et les pommes d 'amour ; les vastes forêts de pins, dont les feuilles, filiformes et toujours vertes, gazouillent aux brises de l’Océan : les monts Pyrénéens dont les dentelures, blanches ou grises, découpent dans le ciel notre horizon méridional ; les cent rivières qui en descendent, rayant le sol en vallons et coteaux, où la terre est fertile, verte l'hiver, jaune l'été, où toujours chante le fier Gascon, plus riche d ’esprit que d 'argent ; les sites merveilleux où l’on villé­giature : Luchon, la reine des Pyrénées ; Biarritz, la reine des plages et la plage des rois; Salies-de-Béarn. où nous étions l'année dernière, Capvern de Bigorre où nous serons l’an prochain, Cauterets, Luz, St-Sauveur, Barèges, Bagnères-de-Bigorre, la vallée d ’Arreau et tant d 'autres lieux bienfaisants, dont la nomenclature serait trop longue, où les Parisiens et encore, plus .loin les Franchimans du Nord viennent chercher la santé, le bonheur ou le plaisir.

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Et celte belle cité de Pau, à l’air si pur, au fiel bleu, où les nobles étrangers viennent faire la connaissance du noble Béarn ! Et Tarbes, la ville placide, assise aux pieds des monts, où l’eau pyrénéenne coule dans les rues, en filets argentés, et Audi, l’antique cité des Auscii, dont la cathédrale, avec ses riches vitraux, reste encore la métropole de la Novempopulanie !

Eh ! que dire de Lourdes, la ville miraculeuse, qui guérit tous les maux ?. . Non, dans le monde entier, il n ’y a pas un coin de terre où il y ait autant de prodiges que chez nous

Ne devons-nous pas être pleins d’admiration et de reconnaissance pour toute cette région fôcondeet pittoresque, où coule l’Adour, où roulent les gaves mugissants, depuis les baronnies du château de. Mauvezin jusqu’au rives de la Bidassoa, depuis le pic du Midi de Bagnères jusqu’à cette plage hospitalière de Lapbreton qui nous reçoit aujourd’hui si généreusement, jusqu'à ce grand Océan que limite le Golfe de Gascogne, dont l’écume blanchit sans cesse nos sables de la Côte d’argent et qui déroule toujours, à nos yeux charmés, sa robe aux replis verts.

Et, voilà pourquoi nous voulons rester Gascons, parce que nous avons nos traditions, notre caractère, notre langue, notre terroir : parce que nous aimons et chéris­sons notre petite patrie.

Est-ce à dire pour cela que nous n’aimons pas la France? Le reproche serait bien immérité. Ah ! si jamais la France avait à supporter un péril ou une peine, la Gascogne entière serait à son rang, la première à ses côtés, avec tous ses bras et tout son cœur.

Q u’on nous laisse donc chanter les idylles de nos m on­tagnes, comme Miqueu de Camélat, les charmes de la case

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ancestrale, comme Simin Palay, ou. simplement les notes heureuses du <i Crabé » comme notre distingué secrétaire de la section des Lanes.

Q u’on nous laisse, enfin, aim er toutes choses, le beau et le vrai, comme on sait a im er en Gascogne !

Que la Gascogne soit fière de ses enfants, et que la France soit fière de la Gascogne !

Il est permis à chacun d ’avoir une ambition. La mienne, la voici ; et c’est par là que je termine : car il faut savoir, en toutes choses, se limiter par une ambition quelconque.

Je voudrais, et je crois être, ici, l’interprète de tous les membres de l’Escole Gastou Febus, je voudrais que la France fut à la tête de tous les progrès, et la Gascogne à la tête de toutes les provinces, avec notre vieux cri :

Toustem Gascous, Fébus aban . »

Et, quelques heures après, sur la terrasse exté­rieure de l’hôtel de la plage, où avait lieu le banquet, mon devoir et peut-être le besoin non encore satisfait d’épancher mes sentiments auprès de mes joyeux collègues, me faisaient reprendre la parole ; après les compliments d’usage aux présents, des regrets aux absents, des souhaits à tous les nôtres, j’ajoutai encore :

« Je ne puis oublier Capbreton.On nous a dit et nous savons que l’air pur avec son

oxygène et les émanations salines avec l'iode sont des éléments essentiels pour la santé. Eh bien ! quand on a vu cette belle plage de Capbreton dont les extrémités se perdent dans l'infini, au nord et au sud : quand on voit comme nous, en ce moment, le grand océan qui moutonne à nos

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pieds cl lance vers nous, à chaque ondulation, la brise marine on ne peut s’empêcher de reconnaître et de s'écrier que nulle part, ailleurs, l’air n’est plus pur, ni la mer plus belle.

Ce sont là des éléments certains de santé pour les baigneurs et de prospérité pour Capbreton.

Cette prospérité, nous souhaitons vivement quelle vienne plus agrandie et qu’elle se maintienne toujours.

Je lève donc mon verre à la prospérité de Capbreton, présente et future.

Ne devons-nous pas quelque chose à la Gascogne et si grande et si belle ?

11 paraît même qu elle n ’a plus de limites ici, puisqu’elle pénètre dans 1 Océan et se confond avec lui. Ce sont les géographes qui l’ont ainsi voulu.

Cette belle mer, de Bordeaux à Capbreton et de Cap­breton à Bayonne et au-delà, c’est toujours le Golle de Gascogne ; de telle sorte que, si nous avions la vertu de S t-P ierre , dém archer sur les eaux, nous pourrions, à ce moment, aller nous promener sur l’Océan — en guise de promenade digestive — et nous serions encore en Gasco­gne.

Je lève donc mon verre à la Gascogne dans toute son étendue, et pour tous ceux qui veulent la Gascogne et plus belle et plus grande ! »

Ces souvenirs sont d’hier, je les revois ; je revis ces heures fugitives. Le temps qui passe avec tant de rapidité nous emporte vers les régions inconnues, où tout semble tomber à rien ; mais la Gascogne vivra, parce qu’elle possède un esprit et une âme qui ne peuvent périr.

B iuai..

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