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Revue semestrielle printemps - été 2017 n°74 JALMALV Eure et Loir J J Jusqu’ A A A L L La M M Mort A A Accompagner L L La V V Vie

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2 Archipel N° 74

SOMMAIRE N° 74

LE RENDEZ-VOUS DES BENEVOLES

LE DOSSIER 222 Qu’est-ce qu’un bénévole accompagnant ?

333 Valeurs, convictions et objectifs de Jalmalv

333 Qui contacter ?

444 Bulletin d’adhésion

555 Sommaire

6 6 6 Courrier des lecteurs

777 Éditorial G. Barnagaud

LE DOSSIER

999 Personne âgée, témoin de vie A. Van Damme

111111 5 questions à … Dr. J. Philippe

121212 « Vieillir, c’est grandir » Extrait d’un article

131313 Coup de vieux ! N. Saber

141414 Autour de la personne âgée… Dr D. Desmichelle

191919 Quand je serai vieille… Babeth, aide-soignante

202020 La personne âgée dépendante Dr Haberbush

232323 Paroles de « vieux » Extraits d’interviews

272727 Le deuil chez la personne âgée M-L. Defag-Moreau

282828 Les nouveautés de la médiathèque Jalmalv

JALMALV AU QUOTIDIEN

292929 Jalmalv dans la cité

303030 Au salon de l’édition scolaire

FORMATION : LE RENDEZ-VOUS DES BENEVOLES

313131 Les différentes formes de bénévolat. Le choix de Jalmalv

TEMOIGNAGES ET FLORILEGES

333333 Dernier renouvellement Erri de Luca

343434 La vieille Conte

353535 Archi’perles Les vieux, ces héros

363636 Arch’citation Autour du vieillir

OUVERTURE SUR LE MONDE

373737 Les meilleurs soins palliatifs dans le monde

383838 Fin de vie en France : la loi entre timidement en vigueur

393939 Remerciements

404040 Regard sur… Archipel

TEMOIGNAGES ET FLORILEGES

JALMALV AU QUOTIDIEN

OUVERTURE SUR LE MONDE

29

33

9

37

31

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3 Archipel N° 74

L’ED

IT

OR

IA

L

L’éditorial

« C’est seulement en vieillissant que l’on s’aperçoit que la beauté est rare, que l’on comprend le

miracle que constitue l’épanouissement d’une fleur au milieu des ruines et des canons, la survie des

œuvres littéraires au milieu des journaux et des cotes boursière.» Hermann Hesse 1

E n me référant au travail de la commission chargée de la loi de l’adaptation de la société au

vieillissement (déc. 2015), j’ai découvert l’annexe de l’article 2, exposant de façon extensive sa

réflexion transversale sur l’allongement de la vie.

Par ce n° d’Archipel sur les droits des personnes âgées dépendantes, nous essayons d’apporter un

éclairage à nos lecteurs sur ce qui se joue dans ce temps de vie très complexe. Cependant, je souhaite

replacer la réalité du temps de la grande vulnérabilité dans son contexte démographique. Non pour

diminuer l’attention qu’il est de notre devoir d’y porter, mais pour éviter de contribuer à renforcer des

représentations qu’il est nécessaire d’ajuster afin de ne pas tomber dans des peurs stériles et des visions

incomplètes de la réalité. Réfléchir au vieillissement de la société nécessite de changer le regard sur le

Vieillir.

Les chiffres contribuent à ajuster notre perception : la majorité des personnes de plus de soixante ans

vieillissent dans de bonnes conditions d’autonomie, 8% d’entre elles sont dépendantes ; 20% des

personnes de plus de 85 ans le deviennent. L’âge moyen de perte d’autonomie est aujourd’hui de 83

ans.

Les facteurs de dépendances, entre 60 et 80 ans, sont majoritairement liés aux conditions de vie

socioprofessionnelles et aux « coups durs » de la vie.

Ce rapport, en annexe de la loi, s’organise selon trois grands axes : anticiper, prévenir et adapter,

accompagner.

- Anticiper définit les grands domaines d’actions possibles

notamment au regard de l’éducation, des conditions de la vie

professionnelle, de la lutte contre la précarité, de la préparation au

changement de vie à l’approche de la soixantaine : en somme, c’est

intégrer le fait du vieillissement tout au long de la vie.

- Prévenir et adapter : la conception des transports et des

logements intègre, en amont, le vieillissement. Par ailleurs, l’accent

est mis sur le rôle important que tiennent les personnes au-delà de 60 ans dans la cohésion familiale

(place auprès des petits enfants, des enfants et des parents dépendants) et citoyenne par la vie sociale

(cinq millions d’entre elles participent activement à la vie associative). Cette place contribue à mettre

en valeur les solidarités intergénérationnelles.

- Accompagner les personnes âgées dépendantes : Par la « Silver économie »2 dont le potentiel

est indéniable, pour laquelle un vrai effort imaginatif et créatif est nécessaire. Il est possible à condition

de changer le regard sur le vieillissement et sur « une économie qui serait plus ou moins valorisante ».

Et accompagner, c’est aussi l’accompagnement humain pour reconnaître et permettre la réalisation des

choix et des désirs de chaque personne. La trilogie Aidant/Professionnel/Bénévole déjà existante, de

façon souvent aléatoire et non concertée, doit être soutenue et accompagnée.

La réflexion transversale interministérielle3 de ce rapport est un signal très encourageant indiquant

une démarche volontariste vers un inévitable changement profond, provoqué par une transition

démographique à long terme. Elle engage la société toute entière.

« La majorité des

personnes de plus de

soixante ans vieillissent dans

de bonnes conditions

d’autonomie. »

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4 Archipel N° 74

L’EDITORIAL…

Date

Forme

Thème

Intervenant

lieu

Mardi

20 juin 2017

CSA

Les besoins

spirituels

en fin de vie

Dr Claude

Rougeron

Local Jalmalv

Samedi

24 juin 2017

Journée

des bénévoles

Jeux de rôle

et récits de vie

Dr Dominique

Desmichelle

Saint Piat

2 et 3 septembre

Non défini

Salons

des associations

Informer et

communiquer le

message Jalmalv

Les bénévoles

Chartres

Châteaudun

9 septembre

Dreux

Journée Mondiale des Soins Palliatifs : 9 et 10 octobre de 13h à 17h

Présence de bénévoles dans les différents hôpitaux du département (stands).

Jeudi

9 novembre

2017

Conférence « Où en sommes-nous

des soins palliatifs aujourd’hui ? »

Pr Régis Aubry

Cf. invitation

ultérieure

Personnes à mobilité réduite : nous appeler avant au 06 26 80 28 81 pour un accès facilité.

Nous sommes désormais dans l’ère où la vie se déroule en quatre âges interdépendants donc

complémentaires : le temps de la découverte et de l’apprentissage/ le temps de l’activité productive/ le temps

de l’activité intergénérationnelle garante de plus d’humanité/le temps de la reconnaissance.

Puisse le cri du cœur de Hermann Hesse devenir une réalité pour le plus grand nombre : « aujourd’hui,

feuilletant avec précaution le grand album de la vie, nous sommes étonnés de constater à quel point il est

merveilleux et bon de se retirer de cette course poursuite, de cette course folle et d’accéder à la « Vita

contemplativa ».

Geneviève BARNAGAUD

1 Éloge de la vieillesse, biblio roman, le livre de poche 2 « Il s’agit de tous les produits et services qui devraient permettre d’améliorer l’espérance de vie sans

incapacité ou d’aider au quotidien les personnes âgées dépendantes et leurs aidants naturels » définition cf.

internet. 3 ministères et secrétariat d’état : l'écologie, du développement durable et de l'énergie ; de la justice ; des

finances et des comptes publics ; des affaires sociales, de la santé et des droits des femmes ; du travail, de

l'emploi, de la formation professionnelle et du dialogue social ;de l'intérieur ;du logement, de l'égalité des

territoires et de la ruralité ; de la ville, de la jeunesse et des sports ; des outre-mer ; des transports, de la mer et

de la pêche ; de la famille, de l'enfance, des personnes âgées et de l'autonomie ; des personnes handicapées et

de la lutte contre l'exclusion.

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5 Archipel N° 74

Mme C. avait le sentiment de ne plus intéresser

personne. C’était sans compter sur la qualité d’une rencontre

et la bienveillance d’un regard…

J ’ai rencontré Mme C. durant

un an environ. Agée de 96 ans,

elle était seule, sans famille, sans

amis dont les rangs s’étaient

éclaircis au fil du temps. Elle

souffrait de problèmes

respiratoires et son diabète

l’empêchait de satisfaire sa

gourmandise à sa guise. Elle avait

des difficultés pour se déplacer et

elle était vraiment gênée par son

inconfort physique d’autant

qu’elle avait toujours été très

active.

Sa solitude était grande et lui

pesait beaucoup ; elle

m’accueillait toujours

aimablement mais il me semblait

percevoir une certaine gêne que je

ne m’expliquais pas, au moins au

début.

Nos conversations restèrent

longtemps, de mon point de vue,

dans un espace neutre et

superficiel ; elle s’excusait de

n’avoir rien à dire mais me

demandait toujours quand j’allais

revenir la voir.

Je compris peu à peu qu’elle

avait, en fait, beaucoup à dire

mais qu’elle ne comprenait pas en

quoi elle pouvait intéresser autrui.

Ce n’était pas la timidité qui la

rendait « taiseuse » mais

l’humilité et la pudeur ; la pudeur

qui l'empêchait de se livrer

entièrement lors de notre

rencontre ; la pudeur, gage

d’altérité, témoin de sa fragilité

et de la honte qu’elle ressentait

quand elle se retournait sur sa

« pauvre vie » dit-elle un jour et

qu’elle redoutait de livrer de

peur du regard négatif que

j’aurais pu porter.

Une fois qu’elle a pu

exprimer cela, elle commença à

me raconter sa « pauvre vie ».

Elle avait eu une enfance

heureuse malgré la misère de

ses parents. Elle avait toujours

rêvé de faire de la couture mais

elle dut travailler très tôt pour

soulager ses parents.

Deux fois par an, à la St Jean

et à la Toussaint, elle allait sur la

grand place de la ville voisine de

son village pour trouver du

travail : les gros fermiers

proposaient de l’embauche ; les

filles de ferme, domestiques,

ouvriers agricoles allaient vers le

plus offrant. C’est ainsi qu’elle

fit plusieurs fermes, parfois

logée dans une sorte de grenier,

parfois rentrant chez ses parents,

en vélo, à la nuit tombée.

Fille de ferme, elle faisait

toutes sortes de travaux, là où on

avait besoin. Les journées

étaient longues et fatigantes.

Elle racontait les calveniers,

hommes à tout faire comme elle,

les palefreniers qui s’occupaient

des chevaux de labour, les

lingères, la cuisinière.

Elle se maria avec un

calvenier et dès lors, ils se firent

embaucher toujours à deux et

tâchèrent de trouver des emplois

plus stables avec un logement.

Elle connut alors le drame de

sa vie : elle perdit 3 enfants en

bas âge ; le chagrin était toujours

présent quand elle me parla de

ces pertes irréparables, ses yeux

étaient mouillés de larmes.

Retrouvez l’intégralité de

ce témoignage dans le

numéro complet d’Archipel.

LE D

OSSIER

« Elle avait en fait,

beaucoup à dire

mais ne comprenait pas

en quoi elle pouvait

intéresser autrui. Ce

n’était pas la timidité

qui la rendait taiseuse ,

mais l’humilité et la

pudeur ; »

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6 Archipel N° 74

LE DOSSIER

Archipel : Peut-on dire votre âge, et si oui, quel

regard portez-vous sur ces années ?

Dr Julien Philippe : J’ai 92 ans. Ces longues

années ne me pèsent que depuis que ma mobilité, et

donc, ma liberté, est atteinte. Bien sûr, les qualités

physiques diminuent peu à peu, mais j’ai davantage

investi dans les plaisirs de l’esprit que dans ceux du

corps. Et j’apprécie peut-être mieux la douceur d’un

rayon de soleil, maintenant dans mon fauteuil, que

lorsque je faisais des cabrioles. Ouvert à la biologie je

sens profondément que vieillir est une loi de la nature

et je suis son rythme. En outre, je m’imagine, à tort ou

à raison, que ces 20 années de vieillesse, depuis ma

retraite, ont été bénéfiques pour ma femme et ma

famille, et utiles à mon ex-profession pour laquelle j’ai

bénévolement travaillé et publié.

Si le corps peut souffrir de ce que l’on nomme le

poids des ans, votre esprit est toujours créatif. Ressentez

-vous un décalage entre le corps et l’esprit ?

- C’est complexe. D’une part j’ai vu et senti

mon corps vieillir plus vite que mon esprit qui me

semble fonctionner encore normalement. Mais est-ce

vrai ? Objectivement, je dois admettre que je ne suis

pas capable de suivre l’évolution numérique de la

société. J’ai un ordinateur, mais je ne

suis pas « connecté », comme mes

petits-fils. Ce monde informatique me

paraît hostile. Je ne le comprends pas.

Je le fuis et évite les automates.

J’ignore ce que désigne le mot

« facebook ».Tout un pan de notre

civilisation m’échappe. Je suis devenu

un étranger chez moi. Je ne suis pas du

temps dans lequel je vis. Un temps que j’admire…

avec une pointe de mépris pour ses lacunes.

Mon idéal sociétal, c’est un monde pétri de

culture classique et ce monde est en voie de

disparition. L’ignorance de mes petits-enfants me

désole.

Dans la société africaine, vieillesse et sagesse sont

associées. L’ancien transmet les traditions, la mémoire

collective etc… La transmission est déjà ce qui vous

anime, mais plus généralement, quelles sont les valeurs

(ou les pensées) qui vous ont porté toutes ces années et

que vous aimeriez transmettre ?

- J’ai eu la chance d’être professeur durant 20

ans, et, bien sûr, transmettre, expliquer, faire

comprendre et aussi chercher, me paraît le plus beau

métier du monde. J’y ai gagné d’avoir dû étudier

davantage et aussi une solide méfiance vis-à-vis des

théories de toutes sortes, mêmes publiées, mêmes (et

surtout) télévisées.

Je crois que, pour une large part, le bonheur de

l’individu vient des succès qu’il remporte dans la vie.

Peu importe qu’il s’agisse de réussir une tarte, un

livre, un enfant ou de réaliser une ambition

professionnelle. Mais, c’est souvent à l’âge mûr

qu’on cueille le fruit d’une réussite.

La parole des « vieux sages »

est aujourd’hui salutaire, comme

le regard optimiste qu’ils portent

sur le monde, je pense notamment

à Edgard Morin mais aussi à

Michel Serres. Partagez-vous cette

vision des choses ?

- Trop souvent les « vieux

Ancien professeur à la faculté de chirurgie dentaire

de l'université Paris VII, Julien Philippe est, à 92 ans,

toujours aussi passionné par les plaisirs cognitifs¹.

« J’ai vu et senti mon

corps vieillir plus

vite que mon esprit qui

me semble fonctionner

encore normalement. »

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7 Archipel N° 74

LE DOSSIER

sages » ne sont aimés et glorifiés que pour leur

optimisme lénifiant, bien plaisant à entendre. Pour

moi, je ne porte pas un regard optimiste sur le monde

ni sur son évolution. Loin de là.

On ne trouvera pas la sérénité par la science, qui

est faite pour remettre en doute les idées reçues,

même s’il est passionnant de suivre ses sinuosités et

ses progrès. On ne trouvera pas le calme et la

tranquillité dans les machines électroniques ni dans la

musique moderne. Mieux vaut chercher du côté des

religions. Il faut savoir accepter la mort. Après tout, je

n’étais pas malheureux avant de naître, seulement

absent…

Et la souffrance liée à cette mobilité réduite, dont

vous parliez ?

- Je n’ai jamais « vraiment » souffert, mais, je

peine à marcher, au point de ne plus pouvoir sortir de

chez moi. Cette réclusion, est, psychologiquement

difficile à supporter. Je pense acheter une voiturette

médicale électrique adaptée à une ville piétonnière,

comme Chartres.

Les progrès techniques que je ne peux plus suivre

m’ont fait abandonner l’activité professionnelle qui

me passionnait ; la retraite m’a chassé du tohu-bohu

parisien (que je ne regrette pas) ; mes mauvais yeux

m’ont interdit la conduite d’une voiture ; le temps qui

passe m’a privé de bien des amis, disparus ; et

maintenant mes jambes m’empêchent d’aller acheter

mon journal. C’est beaucoup de restrictions. Une

impression de rétrécissement. Ce qui reste, ma

femme, ma famille, mes livres n’en ont que plus de

prix.

**********

¹ Julien Philippe a écrit, entre autres, une Histoire de

l’orthodontie, cette « partie de la médecine qui étudie la forme,

la position et le fonctionnement des éléments constitutifs de la

face et qui les modifie pour assurer leur santé, améliorer leur

fonction et embellir l’apparence de la face. » (Dictionnaire de la

SFODF)

« Je peine à marcher, au point

de ne plus pouvoir sortir de

chez moi. Cette réclusion est

difficile à supporter. »

J e ne l’avais pas vu venir ! J’avais fêté mes 60 ans

avec le sentiment d’en avoir toujours vingt dans

la tête, et c’est tout aussi sereinement que je fêtais,

quelques mois plus tard, mon départ à la retraite.

Rien n’aurait pu gâcher mon plaisir, pas même ce

grand saut dans le monde des seniors. N’étais-je pas

prête à me lancer dans cette aventure ? A savourer ce

sentiment de liberté ? L’idée d’avoir enfin, de très

grandes vacances ? L’esprit léger, j’avais anticipé la

chose, relevant à peine cette remarque d’un élève,

qui m’annonça tout de go, qu’il savait bien, lui,

pourquoi je partais.

- Ah, oui ? Et que sais-tu exactement ?

- Je sais que tu es vieille, parce que la retraite, c’est

pour les vieux.

J’avais ri de sa remarque comme on rit d’une bonne

blague. Et d’expliquer à l’enfant qu’on n’est pas

vieux, à 60 ans. On est juste une personne d’un

certain âge. Un jour, lui dis-je, un jour, oui, je serai

vieille… (Ce vieillir là, me semblait encore tellement

loin !)

Las ! Il arrivait plus tôt que prévu, par une belle

journée de printemps. Un temps idéal pour jardiner.

Juste un effort et me voilà aussitôt coincée, bloquée,

incapable de me redresser, contrainte à me traîner,

pliée en deux, jusqu’à la chambre. Un peu de repos

et la douleur passerait… Elle ne passa pas et je me

retrouvai bel et bien dans le corps d’une personne

qui prenait, ce jour-là, un vrai coup de vieux ! Mon

indépendance aussi en prenait un sacré coup, et ça, je

ne l’avais pas anticipé…

Dans cet état de fragilité physique, (même

momentanée!), je n’avais pas le choix : il me fallait

penser mon rapport à l’autonomie, prévenir les

risques… En attendant, je savais pouvoir compter

sur quelques amies. Cette idée-là me sécurisait,

chassant l’angoisse liée au sentiment de dépendance.

Je pouvais retrouver ma sérénité… Vieille, moi ? Un

jour, oui, si la vie le veut bien…

Qui n’a pas pris, certain jour,

un petit coup de vieux ?

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8 Archipel N° 74

Dans ce texte consacré à la personne âgée, l’auteur nous propose trois

vignettes : l’une sur le temps, la deuxième sur la plainte, la troisième sur le sens.

Il évoque quelques propositions concrètes, laissant par choix la très complexe

question du rapport à la mort que la revue Archipel a déjà longuement évoquée

dans ses précédents numéros.

LE DOSSIER

« La liste est longue

p o u r c e q u i

concerne la violence faite

aux personnes âgées :

dévalorisation, prise de

décisions à leur place,

non-respect de leurs

choix ou de leur intimité,

infanti l isation, non-

respect de leurs droits et

besoins, abus d’autorité,

néga t ion de l eu r

dignité… »

Introduction.

L ’OMS a souvent dénoncé les

conséquences du racisme anti

personnes âgées. L’Organisation a

ainsi pu souligner que 60% des

personnes âgées n’étaient pas

respectées, surtout dans les pays les

plus riches. Cet « âgisme » est une

discrimination ; du coup, les

personnes âgées se pensent comme

un fardeau et cela les expose à plus

de risque de dépression et

d’isolement social. Statistiquement,

plusieurs études ont montré que les

gens isolés qui supportent mal cet

isolement vivent en moyenne 7.5

ans de moins que celles ayant les

moyens de déployer une attitude

positive face à la vie.

La liste est longue pour ce qui

concerne la violence faite aux

personnes âgées : dévalorisation,

prise de décisions à leur place, non-

respect de leurs choix ou de leur

intimité, infantilisation, non-respect

de leurs droits et besoins, abus

d’autorité, négation de leur dignité,

non prise en compte de la douleur

exprimée, manque d’écoute et

d’attention, obstacle au contrôle

qu’elles sont en droit d’exercer sur

leur vie, absence de lieu pour

recevoir en privé, suppression ou

déplacement de leurs objets

personnels sans leur consentement,

espaces de vie trop mal adaptés,

conditions de vie pouvant générer

stress, crainte, angoisse face aux

soignants… Toute cette violence

peut engendrer chez la personne

âgée évitement, silence, troubles

du comportement, renferment

psychique, démence, dépression

voire suicide parfois…

De plus, dans notre société

marquée par l’efficacité et la

productivité, ne plus travailler peut

être perçu comme une perte ; la

personne âgée en est parfois réduit

à penser voire à dire : « sacrifiez-

moi sur l’autel des (pseudo-)

valeurs contemporaines, je n’en

suis plus que le déchet ».

Pourtant, en certains lieux, le

plaisir de vivre peut être maintenu

et stimulé jusqu’à la fin : échanges

avec d’autres personnes, avec la

famille, entre les générations,

partage de l’histoire de vie,

transmission de la mémoire, valeur

humaine donnée au lien, ouverture

à la connaissance et au savoir,

exploration de nouveaux champs

d’expérience…

La suite de ce texte est à

retrouver dans le numéro

complet d’Archipel.

Courriel : [email protected]

Jalmalv Eure-et-Loir

Hôtel Dieu,

Maison des associations,

34 rue du Dr Maunoury

28000 Chartres

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9 Archipel N° 74

JA

LM

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U Q

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TID

IEN

C i-dessous, les bénévoles ont participé

en grand nombre à l’assemblée

générale du 25 mars. Un temps de

formation a suivi, favorisant la convivialité

entre les « anciens » et les « nouveaux ». La

présence de fidèles adhérents est toujours

très appréciée.

D es bénévoles participent à la journée Bientraitance

pour tous ! organisée à Chartres, par l’Ars, la

Mutualité Française et le CRSA. Dominique Desmichelle,

Anne-Marie Bruneau et Nadia Saber ont représenté

Jalmalv au groupe de travail débat public Bientraitance.

Le Théâtre-Débat s’est déroulé le vendredi 25 novembre

au cinéma Les enfants du Paradis.

********

Des bénévoles Jalmalv et/ou adhérents, étaient aussi

présents à l’Assemblée Générale de la Masfip, de

l’Arespel et de la Ligue contre le cancer.

********

L’article du 10 mars 2017, de l’Écho Républicain

donne à voir ci-dessous, les intervenants de la conférence

-débat organisée à Châteaudun autour des droits de la

personne âgée dépendante.

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Avec le soutien de « Je suis assez optimiste pour l’avenir du grand âge en France :

les centenaires y sont plusieurs milliers aujourd’hui, contre quelques dizaines il y a dix ans. » Etienne-Emile Baulieu

Paroles de « vieux » à retrouver page 23.

« Nous aimons les cathédrales, les vieux meubles, la vieille argenterie mais nous avons entièrement oublié la beauté des

vieillards. » Lin Yutang

Retrouvez, page 33 la rubrique Témoignages et florilèges

« Comment voulez-vous que je crois que « c’était mieux

avant » ? Si j’avais été malade en 1960, j’étais mort ! »

Jean d’Ormesson (p. 25).

« J’ai vu et senti mon corps vieillir plus vite que mon

esprit. »

Lire page 11, le témoignage du Dr. Julien Philippe, 92 ans.

Ph

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Gu

y H

OU

GU

EN

AG

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« La vieillesse ne serait-elle pas l’expérience pure,

ultime et indispensable de la fragilité, de la vulnérabilité ? »

Dr D. Desmichelle (p. 14).

« Fille de ferme, elle faisait toutes sortes de travaux… Ce n’est pas la timidité qui la rendait taiseuse, mais l’humilité et la pudeur… »

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Retrouvez p. 9, cet émouvant récit de vie recueilli par une bénévole accompagnante.