histoire des juifs éthiopiens, par le col. didier...

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Histoire des Juifs éthiopiens, par le Col. Didier Nyambariza. Introduction C’est en 1990 exactement que j’ai débuté l’Académie Navale Hellénique, après une année d’apprentissage de la langue grecque du point de vue linguistique que scientifique. Parmi les nombreuses sorties maritimes, aussi que régionale qu’océanique, la marine grecque, étant légitimée sous un gouvernement chrétien orthodoxe, nous faisait part de l’histoire biblique aux furs et à mesures qu’on naviguait entre les sites historiques de la Bible. C’est ainsi qu’une des questions qui releva mon attention fut les hypothèses de la disparition de l’Arche de l’Alliance vers l’Ethiopie. L'Arche d'alliance est le coffre qui, dans la Bible, contient les tables de la Loi (Dix Commandements) données à Moïse sur le mont Sinaï. C'est un coffre oblong de bois recouvert d'or. Le propitiatoire surmonté de deux chérubins, qui en forme le couvercle, est considéré comme le trône, la résidence terrestre de YAHWE (Exode 25:22). Lorsque le tabernacle fut terminé, l'arche fut mise dans le saint des saints, la partie la plus centrale du Temple de Jérusalem. (1 Rois 8:18). Une des versions (émises par l’empire romain) de la disparation de l’Arche, est que l'Arche aurait été dérobée par Ménélik I er (fils légitime de Salomon et de la reine Makeda de Saba), suite à une visite à Jérusalem. La tradition du Kebra Nagast (ou le Livre de la Gloire des Rois), affirme par ailleurs que l'Arche se trouverait toujours dans le saint des saints d'une église chrétienne située à Aksoum : l'Église Sainte-Marie-de-Sion. En fait après avoir été apportée en Éthiopie, dans une île du lac Tana, elle aurait été apportée à Aksoum au IV e siècle, par un roi, lors de la christianisation du pays. Actuellement, elle serait alors dans la cathédrale sous la protection d'un gardien qui est le seul autorisé à la voir et qui sort rarement de l'enceinte. Cependant, un des documents historiques lus qui me poussa à m’intéresser de plus, fût que l’une des raisons principales des expéditions de l’Eglise romaine, fût de retrouver l’Arche disparue. Le document disait qu’après avoir fouillé l’Ethiopie en vain, les missionnaires conclurent que l’Arche aurait été cachée par d’autres peuples éthiopiens qui auraient peuplé le long du Nil ; pour cela, des expéditions furent menées en passant par l’Uganda, le Rwanda jusqu’au Burundi. Le document disait également que des tombes royales de la Kibira avaient été fouillées et que les contenues (tambours et autres) avaient été emportées vers l’Europe! Par après, j’eus accès à un livre en possession de noirs américains qui parlaient des quatre rivières bibliques de Genèse 2 :10-14 (Pishon, Gihon, Euphrate et Tigris) et qui situait la première rivière dans les pays des Grand Lacs... Images de l’Arche de l’Alliance Le Roi Salomon et la Reine de Saba Église Notre-Dame de Sion en Éthiopie

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Histoire des Juifs éthiopiens, par le Col. Didier Nyambariza.

Introduction

C’est en 1990 exactement que j’ai débuté l’Académie Navale Hellénique, après une année

d’apprentissage de la langue grecque du point de vue linguistique que scientifique. Parmi les

nombreuses sorties maritimes, aussi que régionale qu’océanique, la marine grecque, étant

légitimée sous un gouvernement chrétien orthodoxe, nous faisait part de l’histoire biblique aux

furs et à mesures qu’on naviguait entre les sites historiques de la Bible. C’est ainsi qu’une des

questions qui releva mon attention fut les hypothèses de la disparition de l’Arche de l’Alliance

vers l’Ethiopie.

L'Arche d'alliance est le coffre qui, dans la Bible,

contient les tables de la Loi (Dix Commandements)

données à Moïse sur le mont Sinaï. C'est un coffre

oblong de bois recouvert d'or. Le propitiatoire

surmonté de deux chérubins, qui en forme le

couvercle, est considéré comme le trône, la résidence

terrestre de YAHWE (Exode 25:22). Lorsque le

tabernacle fut terminé, l'arche fut mise dans le saint

des saints, la partie la plus centrale du Temple de Jérusalem. (1 Rois 8:1–8).

Une des versions (émises par l’empire romain) de la disparation de l’Arche, est que l'Arche aurait été dérobée par Ménélik Ier (fils légitime de Salomon et de la reine Makeda de Saba), suite à une visite à Jérusalem. La tradition du Kebra Nagast (ou le Livre de la Gloire des Rois), affirme par ailleurs que l'Arche se trouverait toujours dans le saint des saints d'une église chrétienne située à Aksoum : l'Église Sainte-Marie-de-Sion. En fait après avoir été apportée en Éthiopie, dans une île du lac Tana, elle aurait été apportée à Aksoum au IVe siècle, par un roi, lors de la christianisation du pays. Actuellement, elle serait alors dans la cathédrale sous la protection d'un gardien qui est le seul autorisé à la voir et qui sort rarement de l'enceinte.

Cependant, un des documents historiques lus qui me poussa à m’intéresser de plus, fût que l’une des raisons principales des expéditions de l’Eglise romaine, fût de retrouver l’Arche disparue. Le document disait qu’après avoir fouillé l’Ethiopie en vain, les missionnaires conclurent que l’Arche aurait été cachée par d’autres peuples éthiopiens qui auraient peuplé le long du Nil ; pour cela, des expéditions furent menées en passant par l’Uganda, le Rwanda jusqu’au Burundi. Le document disait également que des tombes royales de la Kibira avaient été fouillées et que les contenues (tambours et autres) avaient été emportées vers l’Europe! Par après, j’eus accès à un livre en

possession de noirs américains qui parlaient des quatre rivières bibliques de Genèse 2 :10-14 (Pishon, Gihon, Euphrate et Tigris) et qui situait la première rivière dans les pays des Grand Lacs...

Images de l’Arche de l’Alliance

Le Roi Salomon et la Reine de Saba

Église Notre-Dame de Sion en

Éthiopie

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La Grèce donc, étant non seulement une empire très ancienne mais aussi basée sur la

navigation maritime, l’académie privilégia l’enseignement de l’histoire des grands empires qui

ont gouverné le monde, et pour des raisons stratégiques, se basant sur les empires de

Macédoine, Ottomane et Byzantin. C’est ainsi que j’eus accès aussi à l’histoire d’Israël, en tant

que petite partie de l’image globale. Cependant, un intéressement fût aussi observé quand à

l’histoire combinée de l’Egypte et de l’Empire de Koush, la XXVe dynastie pharaonique ayant

été gouvernée par les Cushites qui s’étant emparés de l’Egypte, gouvernèrent sur un territoire

s’étendant du Soudan à Israël, avant d’être conquis par les Assyriens. L’empire de Koush

resta actif, et les cavaliers de Koush furent même aux cotés des romains lors de la prise de

Jérusalem après JC. L’empire de Koush sera déposé au Ie siècle ap. JC par l’empire

d’Aksoum qui fût le premier grand empire à se convertir au Christianisme au IVe siècle.

Si les sources écrites de la période pré-axoumite sont quasi-inexistantes, les Grecs anciens font de nombreuses références aux Éthiopiens vivant au sud de l’Égypte antique. Dans sa traduction littérale, le terme issu du grec ancien Aithiopía signifie « le pays des visages brûlés », de aíthô « brûler » et ốps « visage », et désigne donc un ensemble plus vaste ; il est par exemple également utilisé pour désigner la région de la haute vallée du Nil du sud de l'Égypte, également appelé Koush, qui au IVe siècle av. J.-C. est envahie par les Axoumites.

L'Éthiopie

La Corne de l'Afrique, et en particulier le territoire de l'actuelle Éthiopie, se trouve donc au cœur de l'histoire de l'humanité. D’après la science, on y trouve les restes de certains des plus anciens hominidés connus (entre autres, « Lucy », âgée de 3,18 millions d'années, et Ardipithecus kadabba, un hominidé de 5,2 à 5,8 millions d'années) mais également les plus anciennes traces de l'homo sapiens moderne. L'Éthiopie est l'État indépendant le plus vieux d'Afrique. La Préhistoire s'achève vers le milieu

du IVe millénaire av. J-C période durant laquelle l'Égypte antique mentionne les premiers

contacts entre le pays de Pount. L'Antiquité éthiopienne s'étend ainsi sur plusieurs millénaires

puisqu'elle prend fin en 1270 avec la chute de la dynastie Zagwe et la restauration des

Salomon. Cependant, l’’histoire de cet État débute vers le VIIIe siècle avant J. C. Le Royaume

de la Reine de Saba - « Negeste Saba » (plus communément connue sous le nom de Makeda

en Éthiopie ou encore Belquis dans le Coran ou Belqama au Yémen) s’étendait de l’Éthiopie au

Yémen. Selon le « Kebre Negest » ou la Gloire des Rois - texte datant du XIVe siècle et

retraçant l’histoire des rois et reines éthiopiens - Saba était une très belle femme dotée d’une

intelligence supérieure. Selon la Gloire des Rois, ayant entendu parler de la sagesse du Roi

Salomon, qui était son contemporain, la Reine fit un long voyage vers le VIIIe siècle av. JC pour

se rendre à Jérusalem pour le rencontrer. Selon la légende éthiopienne, Salomon fut

impressionné par la beauté et l’intelligence de la Reine et fit préparer un banquet grandiose

espérant la conquérir…La Reine passa alors la nuit avec Salomon avant de retourner vers son

Royaume. La légende veut qu’au retour du voyage à Jérusalem, la Reine ainsi que sa servante

étaient enceintes. Toutes deux eurent des fils – la Reine donna naissance au futur Ménélik I,

le premier empereur éthiopien, alors que sa servante donna naissance au futur Roi, fondeur de

la dynastie des Zagwe.

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A sa majorité, la Reine envoya Ménélik à Jérusalem afin qu'il rende visite à son père. Une fois

arrivé, il n’eut pas de peine à reconnaitre son père, Salomon, vu que sa mère n’arrêtait pas de

lui dire qu’il ressemblait à son père

Ménélik Ier et l’Arche de l’Alliance

L’interprétation prédominante en Éthiopie est que Salomon étant vieux et dans la débauche, il

remit l’Arche de l’Alliance à son fils, pour que celui-ci la protège ; ce qui explique la présence de

l’Arche à Axoum au nord de l’Éthiopie.

L’interprétation la plus acceptée de nos jours souligne le fait que ni Ménélik, ni Salomon n’ont prit part au déplacement de l’Arche, plutôt, lorsque Ménélik se préparait pour son retour en Éthiopie, vu notamment la réception froide qu’il reçu à Jérusalem, Salomon décida de laisser son fils repartir à la seule condition que chaque famille noble envoie son premier né au Royaume de Saba avec son fils. L’un des premiers nés était le gardien de l’Arche et ayant du mal à laisser l’Arche à Jérusalem décida de le ramener avec lui. Le vol fut vite reconnu mais à ce moment, Ménélik avait déjà commencé son voyage de retour. Salomon envoya ses chevaliers à la poursuite de celui de Ménélik, mais ordonna à ses commandants de ne pas poursuivre au-delà de la terre ferme. Salomon dans sa sagesse avait reconnu que l’Arche ne se déplace que par sa volonté et que si Ménélik traversait la mer s’est que Dieu l’aurait voulu. Ainsi, l’Arche fut ramenée en Éthiopie, et plus précisément à Axoum, ainsi que les premiers nés juifs qui donneront naissance aux Juifs éthiopiens dont on peut observer les villages maintenant abandonnés prés de Gondar après le retour de la majorité en Israël. L'existence d'un royaume qualifié d'« éthiopien » au sud de l'Égypte est très tôt évoquée dans

l'Antiquité par les sources grecques et égyptiennes, sans que sa localisation précise soit

clairement identifiée. Le royaume d'Aksoum, connu comme l'une des quatre puissances de

l'époque, qui apparaît vers le Ier siècle, unifie les royaumes antérieurs.

Au XIe siècle, l'installation de la dynastie Zagwe créée une entité politique sur le nord du territoire avec Lalibela comme capitale. Elle est renversée par la dynastie salomonienne qui lui succède à partir du XIIIe siècle. Le XIXe siècle est marqué par une lutte permanente pour la sauvegarde de l'indépendance du pays face aux ambitions des puissances coloniales ; la victoire d'Adoua contre l’Italie sous Ménélik II met fin en 1896 à ces prétentions. L'Éthiopie s'étend alors au sud et à l'est pour prendre sa forme moderne. La préservation, au moins relative, de son indépendance caractérise l'Éthiopie durant la période coloniale de l'Afrique.

Le XXe siècle est marqué par le règne d’Hailé Sélassié (de 1930 à 1974), interrompu par l'occupation italienne entre 1936 et 1941. Son règne et la monarchie prennent fin lors de la révolution de 1974. Elle est rapidement récupérée par la junte militaire du Derg, rapidement dirigé Mengistu Hailé Mariam. C'est la lutte indépendantiste érythréenne, commencée en 1962, qui amène à la chute du régime en 1991.

Meles Zenawi, alors dirigeant du FDRPE (Front démocratique révolutionnaire du peuple éthiopien), est depuis le principal dirigeant du pays. Les oppositions violentes ou démocratiques n'ont pu le renverser jusqu’à sa disparation hâtive dans un lit d’hôpital (2012).

Hailé Sélassié, 1930-1974

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Une tradition historiographique ancienne tend à mettre en évidence une continuité entre toutes ces constructions politiques, au-delà des périodes peu ou pas connues qui les séparent et des variations entre les territoires concernés :

…-3000 av. J.C. : Préhistoire… 3000 av. J.C. : Première mention du pays de Pount dans les textes égyptiens.

1000-500 av. J.C. : Établissement d’immigrants venus de la péninsule Arabique sur les côtes éthiopiennes. Développement d’une civilisation d’influence sabéenne à Yeha dans le nord de l’Éthiopie.

100-300 : Fondation de l’Empire axoumite. 330 : Conversion au christianisme du roi Ezana. Fuite des

pratiquants du Judaïsme dans les montagnes (Beta Israël). 517 : Invasion et occupation par les Abyssins de l’Arabie

méridionale, le Yémen actuel. VIème siècle : Apogée du royaume d’Axoum 570 : Les Perses envahissent l’Arabie. Fin de la domination

axoumite sur la péninsule. VIIIème siècle : Les mahométans persécutés se réfugient à Axoum. VIII-IXème siècles : Islamisation des côtes de la mer rouge. Déclin du royaume d’Axoum. IX-Xème siècles : Règne Judith, reine des Beta Israël, Juifs éthiopiens.

1137 : Établissement de la dynastie Zagwe. 1185-1225 : Règne du roi Lalibela, Gebre Mesqel. 1270 : Restauration de la dynastie Salomoniens par

Yekouno Amlak. XIV-XVème siècles : Période de prospérité et de

stabilité relative sous les règnes d’Amda Tsion et de Zara Yacob. Centralisation du pouvoir, extension du christianisme et premières luttes contre les émirs musulmans.

1527-1543 : Les armées d’Ahmed Gragn dit le gaucher, ravagent le pays. Le roi Lebne Dengel fait appel aux Portugais.

1543 : Mort de Gragn. Les troupes musulmanes se replient vers Harar.

1635 : Le roi Fasilidas établit sa capitale à Gondar et rétablit l’autorité de l’église Orthodoxe.

1706 : Assassinat du roi Iyassou. Gondar sombre dans les luttes fratricides et le pouvoir central décline.

1769 : Période des princes « zemene mesafent », au cours de laquelle l’autorité des rois de Gondar disparait au profit de celle des gouverneurs de provinces.

1855 : Un homme de lignée modeste se proclame empereur sous le nom de Téwodros. 1872 : Yohannes IV du Tigray prend le pouvoir 1889 : Mort de Yohannes IV, Ménélik II se proclame empereur et signature du traité de

Wuchale avec les italiens. 1907 : Ménélik II désigne son petit-fils Ledj Iyassou comme successeur ; cependant

Ménélik II meurt en décembre 1913 avant l’intronisation ; 1915-1916, le jeune prince inquiète les Anglais et Français quand il s’allie avec la Turquie,

favorisant l’Islam; il est écarté au pouvoir le 27 septembre 1916. Alors qu’une guerre civile éclate pour le soutien du jeune prince, les français opère un coup d’Etat dans lequel Zaouditou, fille de Ménélik II, est proclamée Nigiste Negest, et Ras Tafari Makonnen (Hailé

Les armées d’Ahmed Gragn

Château de Fasilidas dans l'enceinte du Gondar, construit par les Juifs éthiopiens.

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Sélassié) comme héritier du trône. En cette période d'occupation coloniale du reste du continent, Zaouditou est ainsi la première femme chef d'État d'un pays indépendant.

Le royaume d’Axoum (I-IXe siècle)

Le royaume d'Axoum est le premier grand État connu d'Afrique. Axoum, était une ville

cosmopolite où, Juifs, Grecs et populations d'Arabie du Sud se côtoyaient. Situé au bord de la

Mer Rouge, le royaume se développa et prospéra grâce à l'exportation de produits primaires et

grâce au contrôle des principales routes maritimes passant à travers la Mer Rouge. L'élément

caractéristique d'Axoum est la pratique de l'écriture avec le développement de l'alphabet

éthiopien.

Vers 330 après J. C., Ezana, Négus d'Axoum, se

convertit au christianisme qui devint la religion

officielle du Royaume, adoptée par la population

locale jusqu'alors majoritairement juive et païenne.

Une catégorie de la population va résister et fuir dans

les montagnes sous persécution. C’est le début des

Beta Israël qui seront appelés plus tard Falasha.

Au IVe siècle, Aksoum à son apogée contrôlait le

nord de l'Éthiopie, l'Érythrée, le nord du Soudan, le

sud de l'Égypte, Djibouti, le Yémen ainsi que le sud

de l'Arabie saoudite, soit un total de 1,25 million de

km². La capitale de cet empire était Aksoum, dans le

nord de l'actuelle Éthiopie. Vers la fin du VIe siècle, les gouverneurs axoumites et les garnisons

militaires installées en Arabie méridionale furent expulsés par les forces locales avec le soutien

des Perses.

Suite à l’effondrement du Royaume vers 900 ap. J.C. et en raison de la progression rapide de l'Islam, l'Éthiopie se replia vers l'intérieur des terres et divers prétendants au trône commencèrent à s'affronter pour le contrôle du centre du pays. Le Royaume de Beta Israël (IX-XIe siècle)

Beta Israël ou « ceux de la maison d’Israël », ainsi se désignent les Juifs d’Ethiopie, se répartissant aujourd’hui en grande partie entre l’Ethiopie (surtout la région au nord de Gondar) et Israël. L'ouverture de leur droit à l'émigration vers la terre sainte dans les années 1970-90 a eu pour effet d'accroître leur nombre en Israël croître.

Origine : Trois théories sont retenues.

Il pourrait s'agir des descendants des compagnons du roi d’Axoum, Ménélik I (fils du roi Salomon et de la reine de Saba) lorsqu’il revint d’Israël et qui régna à l’époque sur Axoum et rapporta avec lui l’Arche de l’Alliance. Les dynasties royales se sont par la suite approprié cette légende, se faisant appeler entre autres «conquérant du lion de Juda».

Région des stèles d'Aksoum avec la stèle

d'Ezana au centre. Patrimoine mondial de

l'UNESCO

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La seconde théorie se détache légèrement de l’histoire de ce que devint par la suite, l’empire d’Ethiopie. Ils seraient des descendants de juifs venus d’Egypte, fuyant la persécution par l’Empire Romain suite à la défaite de Cléopâtre qu’ils soutenaient. Ils se seraient ensuite installés vers Kwara, petite ville près de la frontière Soudanaise. Cette théorie présuppose qu’il s’agit des clans qui ne seraient pas rentre avec Moïse, pour la plupart étant probablement les clans provenant des servantes des principales femmes Léa (servante Zilpa) et Rachel (servante Bilha) de Jacob surnommé Israël. Le livre de Genèse aux chapitres 29 et 30 contient la naissance des douze tribus :

30.1 Lorsque Rachel vit qu'elle ne donnait point d'enfants à Jacob, elle porta envie à sa soeur, et elle dit à

Jacob: Donne-moi des enfants, ou je meurs!

30.2 La colère de Jacob s'enflamma contre Rachel, et il dit: Suis-je à la place de Dieu, qui t'empêche

d'être féconde?

30.3 Elle dit: Voici ma servante Bilha; va vers elle; qu'elle enfante sur mes genoux, et que par elle j'aie

aussi des fils.

30.4 Et elle lui donna pour femme Bilha, sa servante; et Jacob alla vers elle.

30.5 Bilha devint enceinte, et enfanta un fils à Jacob.

30.6 Rachel dit: Dieu m'a rendu justice, il a entendu ma voix, et il m'a donné un fils. C'est pourquoi elle

l'appela du nom de Dan.

30.7 Bilha, servante de Rachel, devint encore enceinte, et enfanta un second fils à Jacob.

30.8 Rachel dit: J'ai lutté divinement contre ma soeur, et j'ai vaincu. Et elle l'appela du nom de

Nephtali…

30.9 Léa voyant qu'elle avait cessé d'enfanter, prit Zilpa, sa servante, et la donna pour femme à Jacob.

30.10 Zilpa, servante de Léa, enfanta un fils à Jacob.

30.11 Léa dit: Quel bonheur! Et elle l'appela du nom de Gad.

30.12 Zilpa, servante de Léa, enfanta un second fils à Jacob.

30.13 Léa dit: Que je suis heureuse! car les filles me diront heureuse. Et elle l'appela du nom d'Asher.

D’après la troisième théorie, cette fois s’inscrivant plus dans la tradition Juive, ils feraient partie d’une des douze tribus perdues d’Israël : celle de Dan. Fuyant l’instabilité suite à la guerre civile du Royaume divisé au X°siècle av. JC. Ils se seraient par la suite installés en Egypte et seraient progressivement descendus le long du Nil ce qui expliquerait leur concentration importante autour de la ville de Gondar.

Les récits de Eldad ha-Dani

Eldad ha-Dani est un marchand voyageur du neuvième siècle. Il prétend avoir été citoyen d'un "état juif indépendant" situé à l'est de l'Afrique, habité par des gens se déclarant descendants des tribus de Dan (d'où son nom: "ha-Dani" signifiant "le Danite"), d'Asher, de Gad, et de Nephtali. Partant de ce état hypothétique, Eldad visite la Babylonie, Kairouan, et l'Espagne, occasionnant partout où il passe une grande impression chez les Juifs par ses récits des Dix tribus perdues, et par les halakhot (lois juives) qu'il affirme avoir ramenées de son pays natal. Ces halakhot, écrites en hébreu, traitent de l'abattage et de l'examen subséquent de l'animal…

Tradition juive des Beta Israël

Les Beta Israël ne pratiquaient pas les fêtes juives dont il n’est pas fait mention dans leur version de la Bible, comme Hanoukka, Pourim et d’autres. Ils pratiquaient par contre les fêtes de Pâque, de la Moisson, le jeûne d’Esther, le Nouvel An, le Grand Pardon, les Tabernacles.

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Les pratiques de pureté étaient sensiblement plus strictes que dans le judaïsme orthodoxe. Selon le livre des Lévites chap. 15, Il existait ainsi des « huttes du sang », où la femme devait s’isoler pendant ses règles, période d’impureté. Il existait aussi des « huttes de naissance » où la femme devait s’isoler 40 jours après la naissance d’un garçon, et 80 jours après celle d’une fille. Les hommes chargés d’un enterrement devaient rester isolés 7 jours et se purifier avant de revenir dans le village. Enfin, après tout contact avec des personnes extérieures à la communauté, un Beta Israël devait se soumettre à des cérémonies de purification pour être réintégré dans le groupe….Enfin, les communautés Beta Israël n’utilisaient pas l’étoile de David, celle-ci étant un symbole de la royauté chrétienne des Salomon.

Histoire ancienne

Il y a eu deux tendances au cours des siècles, allant parfois de manière simultanée. Il y a eu un brassage avec les populations locales dont les Beta Israël adoptèrent certains modes de vie. Nous constatons cependant qu’ils ont également subi une marginalisation à la fois culturelle et politique. En effet, leurs pratiques religieuses (dont le sacrifice) s’opposant radicalement aux populations chrétiennes sur place, ainsi que par les métiers qu’ils occupaient (potier…) souvent associés à la sorcellerie, ils ont longtemps étés stigmatisés d’où l’appellation péjorative– «Falasha», « les exilés». Durant l’Histoire, ils furent persécutés pour leur refus à la conversion au Christianisme et étaient obligé de vivre replier dans les montagnes de Samiens et dans le region de Dembea au nord du lac Tana.

D’après la tradition des Beta Israël, le Royaume juif du Beat Israël fut crée à l’époque du roi d’Axoum Ezana vers le IIIe siècle ap. JC (325). Cet Empereur d’Axoum, éduqué par les missionnaires, déclare le Christianisme comme religion de tout l’empire éthiopien. Les habitants qui pratiquent le Judaïsme refusent la conversion et commencent une révolte populaire. Ce serait l’Empereur qui aurait nommé ces habitants les Beta Israël. C’est ainsi que les Beta Israël, s’installent dans les montagnes de Samiens et dans le region de Dembea au nord du lac Tana où ils y fondent leur royaume.

Ils installent alors leur ville à Gondar, couronnent leur premier roi Phinehas, descendant d’un Grand Prêtre Juif Zadok, et commencent l’expansion de leurs territoires vers le Sud et l’Est.

Dans la moitié du IXe siècle, l’Empire d’Axoum commence une guerre d’expansion mais est opposé à l’armée des Beta Israélien qui sont vaincu par le roi Gédéon IV. C’est la fille de Gédéon, la princesse Gudit (Judith) qui, après avoir hérité du trône de son père, signe un pacte avec les tribus pagans d’Agaw, envahit la capitale d’Axoum et la détruit complètement. Elle s’empare en outre des trésors du monastère de Debre Damo, utilisé aussi comme prison royal et élimine ainsi tous les hommes de la famille royale d’Ethiopie. Le royaume de Beta Israël connait son essor culminant entre 858-1270 où le Judaïsme se développe. C’est à cette même époque que le monde entend parler des récits

du marchand Eldad Ha-Dani, récits répétés par le voyageur Marco Polo. Le dernier descendant

Territoires Beta Israel

Monastère de Debre Damo

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de Judith sera renverse par un seigneur Agaw, constituant la Dynastie Zagwe. Cependant, en 1270, l’Empire des Salomon est restauré par le seul prince royal qui avait échappé à la tuerie de Judith.

La Dynastie Zagwe (XIe siècle)

Au milieu du Xe siècle, la reine Agew (Gudit ou Judith) souveraine d'une population judaïsée du Damot (Beta Israël), brûle les églises, dévaste les terres, détruit Aksoum de fond en comble. Vers 960, la princesse Judith échafaude un plan d'assassinat des membres de la famille royale afin de s'approprier le pouvoir. Selon certaines légendes, pendant le meurtre, un

nouveau-né héritier de la dynastie axoumite est protégé par certains croyants et emmené au Shoa où son ascendance est reconnu, alors que Gudit règne pendant 40 ans sur le reste du royaume, et transmet la couronne à ses descendants. Le royaume d'Aksoum est donc détruit à la fin du Xe siècle. Le souverain éthiopien qui succède à la reine Gudit serait un usurpateur, qui n'appartient pas à la dynastie légitime. La seule certitude est qu'il ne réside plus à Aksoum.

Au siècle suivant, le dernier descendant de Gudit fut renversé par un seigneur Agaw du nom de Mara Takla Haymanot. Vers 1140,

les Zagwe arrivèrent donc au pouvoir. Cette famille domina initialement la partie septentrionale de la province d'origine mais à partir du début du XIIIe siècle, elle étendit son contrôle sur le Tigray, le Bégemeder et le Wello actuels. La structure féodale de l'Empire des Zagwe offrit aux seigneurs régionaux une relative autonomie assurant la suprématie des Zagwe au-delà du soutien de l’Eglise Orthodoxe Éthiopienne. L'apogée de cette dynastie fut atteint lors du règne du roi Lalibela, Gebre Mesqel, pendant lequel les onze églises de Lalibela furent taillées dans la pierre. Les treize Eglises sont toujours fonctionnelles et peuvent être visitées à Lalibela.

La Dynastie Salomon (XI-XXe siècle)

En 1270, le dernier souverain Zagwe, Yetbarek, fut renversé par Yekouno Amlak. L'arrivée au pouvoir de ce dernier marque la restauration de la Dynastie Salomon qui régna de manière continue jusqu'en 1974. Pendant presque trois siècles, le pays connu une période de développement culturel, administratif, d'extension territoriale et de guerres contre les sultanats musulmans voisins installés au nord et au sud de l'Éthiopie chrétienne. Cette phase de l'Histoire éthiopienne est parfois surnommée «l'Âge d'Or» de la Dynastie Salomonienne. Outre ses succès militaires, l'Éthiopie connaît aussi une phase de développement du christianisme orthodoxe et de la littérature

nationale sans précédent. Dans ce domaine Zara Yacob semble être le souverain emblématique. Durant son règne de 1436 à 1468, il convertit les païens du Damot et du Godjam et participa aux débats théologiques. Il fut également un grand auteur ; son œuvre la plus connue étant le Metsehafe Berhan (Livre de la Lumière).

Des guerres incessantes vont donc continuer entre la Dynastie des Salomon et le royaume de Beta Israël, et ce n’est qu’au XVe siècle que l’Empereur Yeshaq envahit et annexe le royaume juif. Il commence donc la conversion au christianisme par force et ceux refusent sont démunis

L'Église Béte Medhane Alem, une

des églises de Lalibela

Zara Yacob, surnommé

« l’Exterminateur des juifs »

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de leurs terres, devenant des « sans-terres », «errant » du mot éthiopien « falasa » d’où est venu le nom Falasha. Les Falasha vont essayer de récupérer leurs terres par des invasions échouées, et l’Empereur Yacob Zara (1434-1468), surnommé « l’Exterminateur des juifs », massacre les juifs pendants une période de 7 ans. Cependant, les Beta Israël (Falasha) réussissent à se consolider et à résister dans leur royaume des montagnes.

Entre 1529-1529, l’Empire Ottoman assiste le Sultan Adal à envahir l’Empire éthiopien, et les Beta Israël s’allient avec le Sultan qui fût vaincu grâce aux Portugais. L’Empire éthiopien appuyé donc par le Portugal, envahit le royaume juif et tue le roi Joram de Beta Israël et massacre beaucoup de Falasha. Les rescapées Beta Israël vont se replier vers les montagnes de Semian jusqu’au XVIe siècle.

Durant le règne de Susenyos I, l’Empire éthiopien défait tout le royaume juif qu’il annexe à son empire en 1627. L’Empereur Susenyos confisque les terres juives, vend beaucoup de juifs éthiopiens en esclavage et baptise d’autres par force. En plus, il brule tous les livres écrits en juif, interdit toute forme de judaïsme dans son empire; ce qui causa la perte d’une partie de la tradition et la culture juive.

Néanmoins, la communauté des Beta Israël va survivre grâce à leurs métiers. En effet, la capitale éthiopienne de Gondar était située entre leurs territoires, et vu leur technique d’artisanat et de charpentiers, ils servirent l’Empereur des le XVI e siècle. La religion juive disparait presque jusqu’au XIXe siècle où un moine de Qwara (Abba Widdaye) restaure l’enseignement du judaïsme.

Immigration des Falasha vers Israël

Le politique du XXe siècle n’a pas été favorable à leur intégration. Durant les campagnes de repeuplement de certaines régions, et donc de déplacements forcés lors des années 1980 par le régime communiste en place, les juifs vivant en communauté se voyaient obligés de partager leurs terres et des lopins de terre leurs étaient attribués dans des communautés non-juives. Il y eut donc des tensions pour un partage de ressources équitable et un certain antisémitisme par la suite. La dégradation progressive de la condition des Ethiopiens sous le joug brutal du régime communiste (1974-1991) et donc de celle des juifs, commença à susciter un intérêt de la part d’Israël pour les faire émigrer vers Tel Aviv même si les résultats des tests ADN appliqués à tous les juifs qui rentrent, n’avaient pas été convaincants.

Missions Moise et Joshua

Les liens entre l’Ethiopie et Israël étaient devenus de plus en plus soutenus lors du règne de l’empereur Hailé Sélassié I malgré l’abstention de ce dernier lors du vote à l’ONU pour le plan de partage de la Palestine. Il y eut plus tard un rompt des relations diplomatiques face à la menace d’un embargo pétrolier de la part des pays Arabes lors de la guerre du Yom Kippour (1973). Liens qui se sont refroidis encore plus lors de la mise en place du régime communiste et par la même occasion de la dictature de Colonel Mengistu Hailé Mariam jusqu’en 1991. Malgré les tensions, le gouvernement Israélien

Opération Moïse et Joshua, 1984-1985

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commença à porter un intérêt tout particulier à la cause des juifs Ethiopiens. La situation se fit encore plus alarmante d 1983-1985 suite à la grande famine qui toucha le nord du pays et fit environ 400 000 morts. Les communautés juives étaient parmi les victimes.

L’Etat Israélien réussit donc, en vendant des armes en contrepartie, à obtenir la permission du régime en place afin de pouvoir transporter en transporter un certain nombre vers Tel Aviv et éventuellement en faire des citoyens d’Israël comme il est le droit de chaque juif. Ainsi furent conduites deux missions « mission Moïse » en 1984 et « mission Joshua » l’année suivante avec l’aide de la CIA et réussirent à transporter 15 500 juifs hors d’Ethiopie. La première mission fut possible avec un avion utilisé pour la livraison d’armes qui retournait vers Israël. La deuxième mission en particulier se fit également par voie aérienne suite à un rassemblement sur la frontière Soudanaise quand Mengistu se fit plus réticent.

Suite à l’instabilité du régime communiste et l’instauration d’un nouveau gouvernement en 1991 avec la montée au pouvoir des rebelles du FDRPE (Front Démocratique et Révolutionnaire du Peuple Ethiopien) que combattait Mengistu pendant 17 ans, Israël complétât sa mission avec la mission « Solomon ». 14,324 juifs furent « sauvés » en un jour. Aujourd'hui il est estimé qu'un peu de moins de 80.000 Beta Israël ont été transportés en Israël.

La difficile immigration des Falash Mura

Dès 1991, les autorités israéliennes ont annoncé que la question de l’émigration Beta Israël était en passe d’être réglée, grâce au départ de presque tous les Juifs. Mais dès cette date, des milliers de personnes ont quitté le Nord du pays pour venir se réfugier à Addis-Abeba, se déclarant Juives et demandant à émigrer vers Israël. Un nouveau vocable apparaît pour désigner ce groupe : les Falash Mura.

Ces personnes, qui n’appartiennent pas aux communautés Beta Israël constituées, ne sont pas reconnues comme Juives par Israël, et ne sont initialement pas autorisées à émigrer. Elles sont en principe d’origine Beta Israël (avec des doutes pour certaines), mais ont quitté les communautés organisées, parfois depuis deux ou trois générations.

Les autorités israéliennes considèrent que ces personnes sont désormais chrétiennes et ne peuvent bénéficier de la loi du retour en tant que Juives. Elles affirment aussi que beaucoup ne sont même pas d’ascendance Beta Israël, mais sont des chrétiens de souche cherchant à émigrer en Occident. Elles considèrent donc les Falash Mura comme des émigrants économiques. Depuis longtemps existaient d’ailleurs des groupes de convertis. Il ne s’agissait pas vraiment de conversions forcées, mais plutôt de conversions visant à échapper à une situation sociale douloureuse. Bon nombre de ces groupes continuaient à pratiquer leur religion en privé. L’anthropologue Simon Messing a ainsi mené une enquête en 1962 au sein des Maryam Wodadj (les amis de Marie), un groupe ostensiblement chrétien (leurs femmes se tatouent des croix sur le visage), mais pratiquant toujours la religion Beta Israël en privé, strictement endogame (ne se mariant pas avec les chrétiens) et vivant dans le Dembea (entre la ville de Gondar et le lac Tana).

Les Falash Mura ne sont cependant pas un groupe homogène, et c’est seulement leur volonté d’émigrer qui les regroupe sous ce vocable. On trouve semble-t-il de nombreux cas, depuis des Beta Israël assimilés mais jamais convertis, jusqu’à des chrétiens de souche mentant sur leur origine, en passant par des personnes issues de familles converties plus ou moins par obligation, ou plus ou moins par conviction, sans compter des familles issues de mariages

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mixtes. Par ailleurs, la loi religieuse juive (mais pas la loi israélienne) considère que même converti, un Juif reste Juif. Pour les rabbins, un retour au judaïsme du converti ou de ses enfants (si au moins la mère était Juive) reste donc possible. Sous réserve de prouver son ascendance Beta Israël, ce qui n’est pas toujours simple, même quand c’est vrai.

Compte tenu de ces points de vue divergents, et de la difficulté à trancher, un débat assez vif s’est élevé en Israël, et au sein même de la communauté Beta Israël israélienne, entre partisans et opposants à l’émigration des Falash Mura. La position gouvernementale est restée globalement assez restrictive, mais a été soumise à de nombreuses critiques, y compris de certains religieux qui veulent favoriser le retour (quand il y a bien eu conversion, ce qui n’est sans doute pas toujours le cas) au judaïsme de ces groupes dit « Falash Mura ». Les laïques israéliens, réticents à une définition purement religieuse de l’identité juive, ont souvent été plus réticents que les religieux à la reconnaissance des Falash Mura.

Au cours des années 1990, le gouvernement a finalement autorisé la plupart de ceux qui s’étaient réfugiés à Addis-Abeba à émigrer en Israël. Certains ont pu le faire grâce à la loi du retour, qui permet à un parent non Juif d’un Juif israélien d’émigrer, d’autres ont été accueillis à titre humanitaire. Début 2003, il y avait un peu moins de 20 000 Falash Mura réfugiés à Addis-Abeba, parfois depuis des années. En février 2003, le gouvernement israélien a décidé d’accepter que les autorités religieuses israéliennes organisent les conversions officielles au judaïsme des personnes réellement d’origine Beta Israël, et que ces personnes puissent ensuite émigrer en tant que juives vers Israël. La nouvelle position, plus ouverte, des autorités israéliennes gouvernementales et religieuses doit en théorie permettre l’émigration vers Israël de la majorité des Falash Mura le désirant (ceux dont l’origine Beta Israël est reconnue). En décembre 2010, le gouvernement a donné son feu vert à l'immigration de 8 000 nouveaux Falash Mura, en quatre ans, au rythme de 200 par mois, en prévenant que cette immigration de groupe serait la dernière. Devant ces variation régulière des politiques gouvernementales, le Jérusalem Post peut ainsi parler en 2010 d'«un processus qui a été arrêté et relancé par l'État au cours des cinq dernières années, selon la personne qui dirigeait le ministère de l'Intérieur».

Une des explications de la réticence israélienne face à cette immigration est la difficulté à définir la réalité des revendications des Falash Mura à une ascendance Beta Israël. Les articles de la presse israélienne rapportent que des Éthiopiens désireux d’émigrer paient des Beta Israël ou des Falash Mura éligibles à l’émigration pour les déclarer comme membre de leur famille. Israël ne veut pas d’une vague d’émigration économique africaine.

Quelques images d’intégration

Les Falashas dans les forces de l’ordre en Israël

Miss Israël 2013

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Conclusion

Voici donc, le très long trajet des juifs éthiopiens, une histoire de l’empire de Koush datant des

siècles av. JC, des royaumes d’Axoum égalant les empires anciens Ottoman ou de la Chine, la

dynastie Zagwe entremêlée avec la dynastie des Salomon, une histoire de pratiquants du

judaïsme depuis le Xe siècle av. JC, histoire aussi parcheminée des guerres et persécutions

plus religieuses qu’ethniques, histoire aussi située dans un contexte global de la Guerre froide à

la fin de l’apogée de l’antisémitisme, enfin une acceptation plus géostratégique que scientifique

et une intégration très difficile des juifs éthiopiens …bref de quoi souhaiter bonne chance aux

juifs tutsis de l’Afrique des Grands Lacs !...Mais ceci est une autre histoire intitulée Institut

Havila…

Extraits de Romain 11 : écrit par l’Apôtre Paul, juif de la tribu des Benjamin…

11.1 Je dis donc: Dieu a-t-il rejeté son peuple (les juifs)? Loin de là! Car moi aussi je suis Israélite (juif), de

la postérité d'Abraham, de la tribu de Benjamin… 11.11 Je dis donc: Est-ce pour tomber qu'ils ont bronché? Loin de là! Mais, par leur chute, le salut est devenu

accessible aux païens, afin qu'ils fussent excités à la jalousie…

11.13 Je vous le dis à vous, païens: en tant que je suis apôtre des païens, je glorifie mon ministère,

11.14 afin, s'il est possible, d'exciter la jalousie de ceux de ma race (juive), et d'en sauver quelques-uns.

11.15 Car si leur rejet a été la réconciliation du monde, que sera leur réintégration, sinon une vie d'entre les

morts?

11.16 Or, si les prémices sont saintes, la masse l'est aussi; et si la racine (juive) est sainte, les branches le sont

aussi.

11.17 Mais si quelques-unes des branches (juives) ont été retranchées, et si toi, qui était un olivier sauvage

(païens), tu as été greffé à leur place, et rendu participant de la racine et de la graisse de l'olivier,

11.18 Ne te glorifie pas aux dépens de ces branches (juives). Si tu te glorifies, sache que ce n'est pas toi qui

portes la racine (juive), mais que c'est la racine (juive) qui te porte.

11.19 Tu diras donc: Les branches (juives) ont été retranchées, afin que moi (païen) je fusse greffé…

11.24 Si toi, tu as été coupé de l'olivier naturellement sauvage, et enté contrairement à ta nature sur l'olivier

franc (juif), à plus forte raison eux seront-ils entés selon leur nature sur leur propre olivier (juif)

11.25 Car je ne veux pas, frères, que vous ignoriez ce mystère, afin que vous ne vous regardiez point comme

sages, c'est qu'une partie d'Israël est tombée dans l'endurcissement, jusqu'à ce que la totalité des païens

soit entrée.

11.26 Et ainsi tout Israël sera sauvé, selon qu'il est écrit: Le libérateur viendra de Sion, Et il détournera de

Jacob les impiétés;

11.27 Et ce sera mon alliance avec eux, Lorsque j'ôterai leurs péchés.

11.28 En ce qui concerne l'Évangile, ils sont ennemis à cause de vous; mais en ce qui concerne l'élection, ils

sont aimés à cause de leurs pères…

11.33 O profondeur de la richesse, de la sagesse et de la science de Dieu! Que ses jugements sont insondables,

et ses voies incompréhensibles!...

11.36 C'est de lui, par lui, et pour lui que sont toutes choses. A lui la gloire dans tous les siècles! Amen!

Bref, un vrai Chrétien doit : 1. Respecter l’Israël, 2. Aimer Israël, 3. Visiter Israël, 4. Prier pour

Israël, et 5. Soutenir Israël, tandis qu’un vrai Africain doit 1. Respecter l’Ethiopie, et 2. Etudier

l’Histoire de l’Ethiopie…

Prof. D. Nyambariza.