histoire de jeanne de constantinople, comtesse de flandre et de...

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s Les pages qu'on va lire ne forment , à proprement parler, qu'un épisode de l'histoire de Flandre et.de Hainaut. II y avait à choisir entre tous les personna- ges fameux qui ont régné sur ces belles contrées; et certes , la matière abonde. Depuis ces forestiers semi-. fabuleux , jusqu'au téméraire bourguignon qui se fit tuer sous les murs de Nancy, les sujets héroï- ques ne manquent pas. Pour essayer nos forces et signaler notre début dans une carrière qu'il nous serait doux de parcou- rir entièrement, ' nous avons adopté une période également éloignée des temps modernes et des âges Document 11111111111111111111 il 111 il il 0000005566709

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s

Les pages qu'on va lire ne forment , à proprementparler, qu'un épisode de l'histoire de Flandre et.deHainaut. II y avait à choisir entre tous les personna-ges fameux qui ont régné sur ces belles contrées; etcertes , la matière abonde. Depuis ces forestierssemi-.fabuleux , jusqu'au téméraire bourguignon quise fit tuer sous les murs de Nancy, les sujets héroï-ques ne manquent pas.

Pour essayer nos forces et signaler notre débutdans une carrière qu'il nous serait doux de parcou-rir entièrement, 'nous avons adopté une périodeégalement éloignée des temps modernes et des âges

Document

11111111111111111111 il 111 il il0000005566709

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I

obscurs où l'histoire ne marche, pour ainsi dire,

qu'avec un bandeau sur les yeux.

A cette époque intermédiaire qui vit mourir Phi-lippe-Auguste et naître saint Louis, la maison deFlandre jetait un grand éclat. Victorieuse dansl'orient , elle s'était assise sur le trône impérial deByzance. Le glorieux Bauduin avait laissé le gouver-nement de ses états héréditaires à un enfant, à unejeune fille. Que deviendra le pays dans des mains sifaibles? D'un côté, un tuteur inhabile et peut-êtremal intentionné ; de l'autre, un suzerain qui ne se-tait pas fiché de neutraliser cette puissance flamandedéjà si menaçante et que te grand choc de Bouvines

put bien amortir, mais qu'il ne détruisit pas.

Nous avons trouvé du charme, il faut l'avoûer,.dans les événements tout dramatiques qui signalentle règne de cette femme sans cesse éprouvée, tou-jours courageuse. Et si enfin nous nous sommes prispour elle d'une sorte d'affection respectueuse, c'estaprès l'avoir froidement examinée dans toutes lesphases de sa vie.

Nous aussi, nous avions prêté l'oreille à ces ru-

meurs accusatrices inventées par une fourberie con-

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'temporàine, accueillies vaguèment par la crédulitépopulaire , et reproduites de siècle en siècle parl'ignorance, l'amour du merveilleux, et sans dont?,par je ne sais quelle prévention - malveillantequi s'attaque volontiers aux noms illustres. Mais,grâces à Dieu, ces préventions sont tombées bien-tôt devant l'étude cgnsciencicuse des faits et despersonnes.

La fille de Bauduin nous est donc apparue, nonpas telle q&ont voulu la peindre deux ou troischroniqueurs obscurs ou menteurs, et, entr'autres,ce Mathieu Pâris, que la critique a qualifié le moins

croyable des historiens; elle s'est montrée à soustelle que, du reste, elle a été célébrée par les histo-riens les plus renommés et les plus équitables.

Nonobstant une fortune trop rigoureuse, con-tre laquelle elle sut toujours lutter avec une mâleénergie, les quarante années de son règne furentmarquées par des actes nombreux qui décèleiù unesprit droit et ferme, un coeur généreux et noble.En un mot , beancup de bien et peu de fautes danssa vie publique, pas une tâche dans son existenceprivée.

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Jusqu'à, présent, la vie dé Jeanne de Flandren'avait pas été éèrite. Les âhroniqueurs, les histo-

riens n'ont parlé d'elle. qu'en passant. On a tenté icid'en faire l'objet di ane monographie spéciale, et, à

•cet effet . les recherches n'ort pàs été ' épargnées.

Les documents connus ne suffisaient guères; ils s'enest présenté d'autres Èui , sau modifier essentielle-mentIes récits de nos devanciers , ont néanmoinsapporté un jour nouveau sur quelques points obs-curs et, peiikêtre., ont servi à mieux coordonner lesfaits.

L'auteur 'enfln n'a point cherché à étonner par lahardiesse de ses assertions. Il a pris les événements

tels qu'ils se• sont offerts à lui et ne s'est point étudiéà les dénaturer par 'des explications plus ou moinshasardeucs, genre de mérite peu compatible avecl'amour du vrai. Il , faut se tenir en garde contrecette manie du paradoke qui, de nds jours ,vou-

drait envahirjusqu'u domiine de l'histoire. Ce quiimporte, ce n'est. ps de dire du nouveau, c'est dedire la vérité. Nous èroyons l'avoir dite toujours.Plaiseà Dieu que toujours aussi I'eipr'ession 'ait bien

servi notre pensée!

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HISTOIREDE

JEANNED E CONS T A N TIN O P L E,

COMTESSE DE FLANDRE ET DE HAINAUT.

I.

Couraient Jeanne ddvinl orpheline et comtesse de Flan.dre en son

bas-ége. Comment clic épousa le fils du roi de l'onu gal et ce

qui sjen suivit.

L'histoire de la comtesse Jeanne commence avec le treizièmesiècle. Le mercredi des cendres de l'année 1201, la Flandreavait vu s'accomplir dans ]'église do St.-Donat, de Bruges, un

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HISTOIRE DE JEANNE,

grand événement: elle avait vu Bauduin IX, son souverain, et

les plus illustres d'entre les chevaliers du pays, prendre la

croix pour la délivrance des lieux saints. Puis, l'année sui-

vante, tout ce inonde était parti; et la Flandre n'avait con-

servé de la famille de ses comtes que deux jeunes enfants,

frêle et précieux dépôt sur lequel reposaient désormais toutes

ses destinées. C'était deux filles. Jeanne, lainée, avait alors

près de imnze ans;,' Marguerite s'a sur quittait à peine la

On ne sait pas au juste en quelle année Jeanne vint au monde.Les historiens do Ilaina u t disent que ce lu t en 1188; M eyer , en i 90.

Dans tous les cas, le n navait jusqu'à présent aucune no lion sur les ciiconstances des au aissatice. M on père o trouvé à cet égard tilt documentcurieuç que je crois inédit CL qui mérite détre inséré ici. Il est extraitle la Vie du Bic,s/wnrei,x Je,1,1 , premier abbé de Ga ni in ' pré. Lan leur.

Ttiomas de Cantimpré , écrivait en 1 235 , e'cst-idire du vivant mémode la comtesse ,Jeanne. Son récit a donc tout linlérét d'un mémoirecontemporain. En voici la traduction: • La comtesse (Marie deCliam-• pagne, femme de Baudouin IX), long-temps stérile, devint enfin

grosse pendant soif à Valenciennes. Arrivée ii terme, elle fut• atteinte de douleurs incroyables. Déj à lieu[ jours s'étaient écoulés• dans ce traçait plein d'angoisses, lorsqu'elle fit appeler t, elle le

serviteur (le Dieu (l'abbé Jean). Sitôt qu'il fut entré , . Mois père.• s'écria la comtesse, ayez pitié de aies souffrances ci mettez-vous en• prières pour moi. • Touché de ses larmes • J eau se retira CLI sa n-o glota nt dans l'oratoire, et levant les mains ail cielSeigneur,• di t .il, vous qui, pour châtier ta transgressio n de nos premiers Pères,

avez condamné la femme à enfanter avec douleur ,ct lhomme , sou• complice, à gagner le pain dé chaque jour à In sueur de son front,à exaucez nos prières et faites que cette femme, qui se confie en voire

miséricorde et vous invoque par nia voix, soit enfin dtlivrée de,• longues douleurs qu'elle enflure , et qu'elle mette an monde un

enfant, pour le salut et le bonheur de la patrie! • A peine rhomme• de Dieu avait achevé so it que les chambrières de la rom-• tosse accoururent cii grande liesse et jubilation à la porte defor,-

taire, annonçant an saint homme que tour dame et mattresso venaitde mettre k monde un enfant du sexe féminin • et à l'instant, lesgrandes dames de la cour apporteail h Jean l'enfant nouveau'né

• comme le fruit de ses prières. L'a,,ti dn Seigneur rendit grce5• à Dieu et couvrit la petite fille de sés bénédictions. Ensuite , on la

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COMTESSE DE FLANDRE.

mamelle. Il s'écoula bien longtemps sans qu'on eût en Flandre,

nouvelle certaine des croisés; seulement, en 1206, il y courut

d'étranges bruits. Le comte Bauduin ,après de merveilleux

faits d'armes, était monté sur le trône impérial d'Orient

puis, il avait disparu dans une lointaine expédition contre les

Bulgares. A cette nouvelle qui répandit dans le pays une

grande tristesse, en succéda rapidement une autre. On disait

que le comte n'était pas mort comme on l'avait pensé; qu'il

s'était échappé des mains des Sarrasins, et bien plus, qu'il

arriverait soudainementen Flandre. La perplexité fut grande;

car on l'aimait beaucoup; l'agitation fut extréme jusqu'à ce

qu'enfin l'on publia dans les deux comtés des lettres arrivées

d'Orient. Ces lettres, écrites par fleuri, frère du comte

Bauditin et son successeur à l'empire de Constantinople

• poila sur les saints fonts de baptême, et, suivant I 'o 'die du comte• et (le la comtesse, on ta noruuto Javae . bien que personne jusrjie'• IL n'eût été appelé de ce 'Ion' dans la Famille des comtes de Flan-• dre. Or, c'est cette même Jeanne, qui plus tard prit pour époux te• fils du roi de Portugal , et qui ,-aujourd'hui, gouverne si bien les• comtés de Flandre et de Hainaut. c'est cIte que nous avons vue 'la'• guères inspirée, il •fautle croire, par les mérites du saint homme• renoncer nui vanités du monde, avec sa famille et sou époux ,el• fonder auprès do la ville de Lute , un riche monastère eu l'honneur• de ].a vierge Marie, oie. . — Vira B. John riais , privai abba-lis Canlipratensis , Auctore Thosnii Cantipralensi . lib. LII, cap. i.Manuscrit , de ].a de M. Le Glay.

Scanne et Marguerite sa soeur furent baptisées en l'église Saint-Jeande Valenciennes, comme le prouve une charte rapportée par d'Outre.mao, 'Nos Margarita, 1"taudt'im et Llaynoni;e cowitissa, notum facinausuniversis , quod nos ecclesisua Sancti bannis Baptistie de Valencenisin quA domina et sorornosira Joanna, quondam Flaudi'ke et Ilaynoiahe-couaitiosa , et nos Ni. comitissa prmdieta fuimias regenerahe sacri bap-tisma tis o nda , etc. I)a tain aime domini nul tesi [no duceniesi motuagesiniri or.tavo , mense ,,ovenat,ri.

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Id HISTOIRE DE JEANNE,

contenaient le récit détaillé de la mort du malheureuxprince. Bans une bataille contre les Valaques, les Bulgares,les Grecs rebelles et les Turcs, l'empereur s'était précipitéparmi ces barbares, la hache à la main, et y avait trouvéun glorieux trépas. Cepdndant, il y eut encore des gens quirestèrent convaincus' que leur bon souverain detait bientôtapparaitre au milieu d'eux. Il en est ainsi toutes les foisqu'un personnage héroïque vient à mourir loin des siens;le vulgaire qui n'a point vu et touché son cercueil, hochela tête en signe de défiance. Pour lui tout grand homme estimmortel. On verra plus tard ce qui advint de cette fatale

croyance.

Voici donc Jeanne et sa soeur orphelines; car leur mère,Marie de Champagne, était morte dès 1203, sur la plagede Saint-Jean-d'Acre allant rejoindre son mari. ' EllesviVaient au château de Gand , sous la garde et tutèle de leuroncle Philippe, comte de Namur. Mais bien inal prit aucomte Bauduin d'avoir laissé ses filles en de telles mains. Apeine la mort du père fut-elle connue que le tuteur vendit lesenfantsauroideFrance,etvOici comme.Philippe-Auguste avaitgrand'peur que le roi d'Angleterre n'épousât Jeanne, devenuecomtesse de Flandre et de Hainaut; et en effet les Flamandsparaissaient assez disposés à la lui offrir. Il séduisit le comte

Les uns disent qu'elle succomba à la joie d'apprendre l'électionde son époux à l'empire, d'au Ires qu'elle mourut lent simplement dela peste.

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COMTESSE DE FLANDRE. 5

de Namur en lui donnant pour femme sa fille Marie, veuved'Arthur de Bretagne, et se fit livrer en échange les deuxjeunes princesses. C'était à tous égards pour le roi un marchéd'or. Les Flamands et les Jlenùuyers en conçurent un si vifressentiment, poursuivirent Philippe de Namur de si amersreproches, que le faible tuteur n'eut rien de mieux à faireque de se laisser mourir dé chagrin en 1213. 1 Leshistoriensdu temps racontent que, pour expier la faute qu'il avait com-mise de sacrifier Jeanne à la politique du roi de France, ilvoulut se confesser solennellement à quatre prélats, les abbésde Cambron,de Villers, de Marchiennes et de St.-Jean. Puis,l'heure de sa mort approchant, il se Lit attacher une corde aucou et tramer en cet état à travers les rues et carrefours deValenciennes, criant à qui voulait l'entendre: J'ai vécu en

chien, il faut que je meure en chien. Jeanne et sa soeur n'enétaient pas moins au Louvre sous la main rapace de Philippe-Auguste.

Elles y testèrent jusqu'à ce que les habitons de la Flandreet du Hainaut les réclamèrent avec tant d'énergie qu'il fallutbien les leur renvoyer. Ils se seraient donnés au roi d'Angle-

D'Oudcglieist se trompe en disant que Philippe de Nattiur lié-passa en in lI. li esiste aux archives générales , à I 11k un acte origi -uni de ce même Philippe * pori an i la da lu de 1212. li inoui-u I Cfl 12 5,s'il faut eu Croire l'épitaphe rapportée dans t !listoi,'r de Nam rir, i 7SS,1,210.

2 Albéjic , 1213. - Coesariti S j lleisterback , diul. t. ta. - Jeau.Brustemius. Anselme de Liège. - D'Ou Irema u, IIi,t. de t'a(cii-rir,iiies, 5 4 0. .- flelewarde, fun gén. rIe lia/nrnst , 111 384.

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6 i:lISi'OlRE DE JEANNE,

terre, qui justement alors s'appelait Jean-sans-Terre, plutôtque de ne pas ravoir leurjeune suzeraine. Ils en firent dumoins sérieusement la menace. Philippe-Atiguste céda devantun tel argument. Il renvoya Jeanne et Marguerite à Bruges;mais pour ne pas tout perdre, il avait eu soin au préalable depréparer une alliance dont il pût tirer parti ,le cas échéant.C'est alors que, par l'entremise de la reine Mathilde, veuve ducomte de Flandre Philippe d'Alsace, fut conclu le mariagede Jeanne avec Fernand, son neveu, fils de Sanche I.', roien Portugal. Ceci se passait en 1211. Jeanne avait alors23 ans. S'il faut en croire les monuments contemporains quevous avons sous les yeux, Jeanne était à cette époque unebelle jeune fille à la taille élancée, aux cheveux longs et flot-tants sur ses épaules. Pour tout ornement, un cercle de perlesentouresatéte. Une simple tunique l'enveloppe chastement etelle agace du doigt le faucon qui perche sur le pouce de samain gauche, àla mode du temps.-

Les nôces furent célébrées à Paris avec une magnificenceextraordinaire, aux frais des bonnes villes de Flandre et deHainaut toutefois. On se livra à celle occasion, dit le corde-lier Jacques de Guysc, à une allégresse inexprimable, sanssonger à cette parole du sage que l'excès de ta joie est voisinde la douleur. En effet, la série des infortunes de Jeanneva seulement se dérouler à partir de cette union fatale.

..4nnalcs du ilainaus , édition de M, le Ijiarqu k dè Forlia , X LY, j

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COMTESSE DE FLANDRE. 7

Le roi de France n'avait pas marié la jeune comtesse pourle seul plaisir de la marier. Il s'était fait promettre à l'avancepar Fernand , les villes d'Aire et de St.-Oiner, que jadis lecomte Bauduin avait conquises. Fernand, trop heureux d'é-pouser l'héritière de Flandre, avait tout promis, sans s'in-quiéter s'il n'allait pas de la sorte se rendre odieux à ses nou-veaux sujets. C'est ce qui advint pourtant et le Portugaisn'obtint pas même en compensation la bienveillance de Phi-ippc-Auuste,prince trop politique pour avoir le coeur placéailleurs que dans la tête.

Lesjeunes époux ,après les fêtes, s'en allaient joyeusementprendre possession de leurs vastes et beaux domaines. Arrivésà Péronne, ils ne sont pas peu surpris d'y trouver Louis, filsdu roi, en grande escorte dé gens d'armes. Leprince fran-çais avait quitté la noce pour venir en guet-apens saisir lesmariés au passage. Philippe-Auguste craignait, sans doute,que les villes d'Aire et de Sc.-Orner, promises par Fernandne lui échappassent il avait cru prudent, tout en faisantdanser les mariés à Paris, d'ordonner à son fils d'aller leurpréparer pour chambre nuptiale ce donjdn de Péronne, oùen ce temps là, sans doute, n'était pas éteint le souvenirsanglant du roi Charles-le-Simple, qui y périt de si tristemort, comme chacun sait. Le chMeau de Péronne, témoindepuis lors de tant dévériemens bizarres, devait voir encores'accomplir dans ses murs un des épisodes les plus saillants dela vie de Jeanne de Flandre. - En attendant elle y fesait lepremier apprentissage du malheur.

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8 HISTOIRE DE JEANNE,

LorsqueLouis de Fronce se fut emparé des villes en ques-tion, lorsqu'il eut massacré à souhait tout ce qu'il y avait ren-contré de Flamands fidèles, Jeanne et son mari furent mis

en liberté,: Telle était la diplômatie du temps.

Fernand ne pardonna jamais l'odieuse violence dont sajeune épuse et lui furent l'objet dans celte circonstance.Désormais ennemi mortel du roide Fronce , il arrivait néan-moins dans ses nouveaux états plus impopulaire qu'on ne sau-rait dire. Voici, d'après un vieil auteur, ce que la pauvreJeanne aurait été obligée d'entendre de la bouche d'un desplus hauts basons du pays : « Darne, lui dit le sire de Tournai• moult aigrement, vous nous avez laidement servis: car• vostre mari est serf du roy de France et s'en vanta le roy• en nostre présence à Paris et que si fut son père et le roy de• Portugal qui est à présent. Or est ainsi que nul serf ne petit• tenir plain pied de terre que son seigneur n'aist si luy plaist;o ou il le peuh faire pendre ou faire noyer se il mesprent rien» envers luy. Dame, prenésvoslre serf, qu'il Îoit mauldit de• Dieu et vous en allés en Portugal où sont les serves gens;• car jamais serf n'aura sur les Flamands aulcune mestrise;• et veuillés biensçavoir que si Fernand est encore XVjours• par deçzi, nous luy ferons couper la teste. » t

On ne se contentait pas de faire un crime à Jeanne d'avoirépousé Fernand, sans s'inquiéter si elle n'avait pas eu la

I Le titre de ljaudo yi, conte de. Flandres publié p» r MM. Serrure clvoisin , introd. XV.

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COMTESSE DE FLANDRE. t)

main forcée on lui mettait encore en perspective Une têtecoupée.

Aune journée de marche de Péronne, Jeanne, qui venaitd'éprouver tant d'émotions diverses , tombe malade. Unefièvre violente s'empare d'elle. La reine Mathilde était pourlors à Douai. Fernand la laisse à ses soins; il se présente à.Lille, à Courtrai , à Ypres et à Bruges. On l'y reçoit tant bienque mal. A Gand, c'est autre chose on lui ferme la porte.- Allez chercher votre femme qui est notre légitime souve-raine, lui dit-on sans elle on n'entre pas. - Ces Gantoisont toujours été les plus 'fiers bourgeois du monde. Le comteFernand, fort de la présence des grands vassaux qui l'én-louraient, fait mine de vouloir regimber. Les Gantoisayant à leur tête Rasse de Gavre et Arnoul d'Audcnaerde,sortent des murs, le poursuivent; et il eût été infaillible-ment écrasé si par hasard il ne s'était trouvé, entre les bour-geois et lui, un pont qu'il fit couper en toute hâte, ce quile sauva. Les Gantois , puur se consoler d'avoir manquéleur coup , s'en allèrent piller Courtrai ayant de rentrerchez eux.

Fernand mettait le pied en Flandre pour la première foissous de malheureux auspices. il en était au désespoir.Pour fire acte de souveraineté, il aurait bien volontiers re-pris Aire et Saint-Omer sur le fils du roi de France ; et il al-lait dans les boutades de sa mauvaise humeur se fourvoyer denouveau, peut-être, en quelque fausse démarche. Déjà il

\

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10 HISTOIRE DE JEANNE,-

avait fait approvisionner Lille et Douai, et il se disposaitmarcher contre Louis, qui l'attendait à Arras. Jeanne l'a-paisa.

On se rendit de part et d'autre entre Lens et Pont-à-Wen-dia, sûr les contins des pays d'Artois et de Flandre; et là, le24. février 1211, on fit la pais, c'est-à-dire qu'on laissales choses dans ce que nous appelons aujourd'hui le statu

quo ou à peu prés. Un an s'était à peine écoulé que laFlandre était envahie et -saccagée par Philippe-Auguste. Ilest vrai que Fernand avait, dans une assemblée tenue àSoissons, refusé solennellement assistance A son suzerain,qui préparait alors une expédition contre l'Angleterre. Leroi savait ou ne savait pas que Fernand avait fait allianceavec Jean-sans-Terre. 2 Une fois rentré en grâce près des

Fernand et Jeanne remirent définitivement et il toujours , àLouis, fils allié du roi cL à ses boire comme étant oui droits de samère Isabelle de humant , les villes d'Aire et de StOmer. Ils lui don-nèrent pour cautions (le leurs promesses. Jean do Neelle, eliatelainde Bruges. Sohier. châtelain de Gaud, Baudouin de Gomines,Miche! de Ilarnus, lioger, Châtelain de l,ille, SihUle de Wavtiu clIlellin, sots fils. De son côté, le fils du roi promit de ne jamais rienréclamer dans le comté de Flandre , excepté ce dont il est en posses-sien, et il donne pour Otages de cette promesse: lavooé de BéthuneSibulte du \Vavdu . Dullin son fils, le seigneur d'Oisy . Jean de Lests,le châtelain de Saint-Orner et Michel de Marnes- cet acte existe en On:

ginal aux archives des comtes d'Artois. ii Arras; ou le conserve aussiaux archives générales de tille, (i.' cerf. dAnois, pièce 593.) il nété en outre imprimé dans les Preuves de ic Maison de Bdt/sune • parDuchesne , p. 58, et plu s récemment, dans les PUces .Justificatives del'excellente histoire de Flandre de il. \Varnkœnig. 1, 346.

2 Nonobstant l'hommage qu'il avait prêté au roi le 22 janvier 1211,et dont la teneur commence ainsi Ego Fernandses, cornes Ftandriex etI(aisoja norois. facio ,onversis , qaod ego sein homo ligies donsi,ss ,,iet

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COMTESSE DE FLANDRE. 1!

Gantois, au moyen d'un accroissement de libertés commu-niales qu'il fut bien obligé de leur octroyer, le prince avaitrepris ses idées de vengeance. Basse de Gavre et Arnould'Aùdenaerde,ces deux chevaliers qui, l'année précédentel'avaient pourchassé de si belle façon à la tête des Gantois ,ilen avait fait ses meilleurs amis., par la raison qu'ils détes-taient les Français. Le souvenir de la prison de Péronne ôtaittoujours présent à sa pensée. L'on raconte qu'à ce motif dehaine contre Philippe-Auguste s'en était joint un autre. Voicice qu'on lit dans la chronique de Bicher: « . Il y avait en Flan-• die un certain comte nommé Fernand, qui avait épousé la• cousine du roide France. Unjour que celle-ci, jouant aux• échecs, avait fait son mari échec et mat à plusieurs reprises,• le comte Fernand la frappa et la traita malhonnêtement. La

îlien ris Fianeioe rugis Pizilippi contra om,ses hommes et femmes qui p05-surit vivere et mari; ctjuravi rident, qesod ego ci fanant Iionum servéru,ai etfidek, NÊQUE DE 10 DEFICIAM QU,5IOtn I psit VOI,UERIT 511111 FACEttE BSCTUM,unl.a suetc. La formule areepse de ce dc/iciasn quee,,idue , etc. , étaitprudente. 11 est bon de remarquer ici que cc n'est pas Jeanne , SOU'veraine Je Flandre et de llain au t, dit de soit , qui fait bom'mage, mais bina soi, mari, lequel, d'après la loi féodale, n'était quebail et asainbour des deux comtés. Jeanne prêta-t-elle serment paracte séparé? iNous n 'en trouvons trace nulle part. Quant an documentci-dessus, il n été publié à notre con naissauce • dans les Mémoiressur tee A'avan'e et ta Mordre, par A. Ca]land • preuves, 145 2. 6 dansIjaliize, Misceit. VIII, '49; 5." dans l'Histoire de Flandre de M. Warn-kœnig , 1, 345. Nous ferons observer que lalaseuce du nom de Jeannedans cette prestation d'hommage est d'an t ut plus étonnante , quece nom figure dans celle quo fit Thomas de Savuic, son second époux,en décembre 1257. Est-ce que , par hasard, la 611e de l'empereurBauduin ne coniplait pour, i !en -aux yeux de PWHppe.Augoste? - Letraité d'alliance de Fernand avec le roi d'Angleterre se trouve dansiZymer, Acta pub(ien , 2. 1, p. t, pag. 5o , sousla date du 4 ruai i2i 2,avec plusieurs lettres qui se rat tocisen I audit traité.

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t'7 HISTOIRE DE JEANNE.

il comtesse irritée s'en plaignit au roide France, qui adressao de duresréprimandes â Fernand, et lui dit qu'il ne lui avait» pas donné le comté de Flandre et sa cousine pour la maltrai-» ter ainsi. Le comte prit fort mal les menaces du roi, fito alliance ayecle comte deBoulogne et plusieurs autres, puiso alla se ranger dans le parti de l'empereur Othon. »

Cette anecdote, toute singulière qu'elle est, nous sembleempreinte d'un certain cachet de vérité morale;. et elleest parfaitement dans l'esprit de l'époque. Ainsi donc, s'ilfaut en &oire le moine Bicher, qui écrivait peu de tempsaprès la mort de Jeanne, cette princesse n'aurait pas trouvédans la vie intime une bien douce compensation aux déboiresde sa position sociale. Quant û la ligue deFernand avecl'eni-pereur, qu'elle ait été déterminée ou non par une querelle dejeu entre le mari et la femme, on sait quel en fut le résultat.

Abordons enfin le récit de cette bataille de Bouvines, dontnotre pays fut le sanglant théâtre. Cet événement, l'un desplus significatifs du moyen-Age, va faire entièrement dispa-raître Fernand de la scène politique, pour y laisser Jeanneseule aux prises avec la fortune.

Ev c. fno,,iro so j ,o,,icisi R ir/c,ii ipitd Labbeum . klan gos etIricI4X,Ii, C35.

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H.

Comment Fernand, époux de ta comtesse Jeanne, se ligua avecl'empereur Othon cl te comte de .toutognc, ci comment unegrande bataille fut livrée auprès du Pont-d-Bouvines.

Deux fois envahie par Philippe-Auguste, de 1213 à 1214, la

Flandre fut deux fois reprise par Fernand. Quatre conquêtes,

ou pour mieux dire quatre séries d'horreurs à souffrir en une

seule année Tandis que le roi des Français saccageait, pillait

Lille, Cassel et Douai et qu'il investissait Gand, en. atten-

dant mieux, les comtes de Fiandre, de Boulogne et de

Salisbury , eux, ne perdaient pas leur temps. fis détrui-

saient dans les eaux de flamme .grande partie de cette flotte

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i-s hISTOIRE DE JEANNE,

immense que Philippe avait préparée avec tant de sollicitudepour une descente en Angleterre. Le roi l'apprend . , quitte

le siége de Gand, court à flamme, arrive au moment où lesalliés s'acheminaient vers ]avilie pour s'emparer du port danslequel le reste de la flotte était abrité, tombe sur eux, leurtue 3,000 hommes et les force à se rembarquer. Mais adieu laconquête de l'Angleterre! ht ne lui restait qu'un bien petitnombre de navires (tes alliés en avaient coulé plus de troiscents); il les brûla. De Guerre lasse, Philippe-Auguste rentraen France, laissantù son fils Louis le soin de garder les villesprises. Fernand s'était retiré en Zélande. Lorsqu'il apprendle départ du monarque français, il rentre en Flandre ,se ruesur l'Artois qu'il ravage cruellement par représailles et pillele comté de Guines. Entre temps, le fils du roi est rappelé enFrance. Le destin semble favoriser Fernand. Sans plus tar-der, il s'empare de Tournai et reprend Lille qui lui ouvreses portes comme à un libérateur, après avoir chassé lesFrançais. Cette nouvelle vint surprendre Philippe-Augusteau milieu de l'irritation où l'avaient jeté la destruction de saflotte, les dévastations de l'Artois et du comté de Guines. Ilraecourt en Flandre à la tête d'une armée nouvelle, et signaleson arrivée par le siège de Lille. Cet acte fut un des épisodesles plus atroces des guerres impitoyables de ces temps-là.

Philippe, dans l'impétuosité de sa fureur, avait emporté Inville; avant Même que les bourgeois surpris se fussent mis surleurs gardes. Il n'y avait encore personne aux murailles, quedéjà le roide France se répandait à travers la ville en tête de

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COMTESSE DE FLANDRE.

ses hommes d'armes, lofer dune main ,le feu de l'autre. Levol et le.pillage sont des moyens trop lents pour assouvir savengeance : il lui but l'incendie, et bientôt le feu se déroulede toutes parts. Le comte Fernand étaitdans Lille. Enveloppéde tourbillons de flamme, il n'a que le temps de s'échapperau milieu de l'épouvante et de la fumée. Les malheureux ha-bitants ont deux morts à' choisir nu d'élre brûlés vifs entreles murs de leurs logis, ou de périr au seuil parle couteaudes Français. Beaucoup se laissèrent brûler. Ce que l'actiondu feu épargnait, les soldats lejetaient bas au moyeu de crocsde fer-dont ils s'étaientinunis ; car Philippe avaitjuré l'anéan-tissement de la cité rebelle, Il ne lui pardonnait pas de sétrerendue à son suzerain légitime. Guillaume le Breton, chape-lain et médecin du roi , et qui plus est assez bon poète latinpour lépoque,chante fort naïvement dans sa P/tilippidc leshorreurs de ce siège à la louange de son maître. e En môme• temps que lés maisons, s'écrie-t-il dans son admiration• pour le conquérant, périsserh tous ceux à qui les infirmités• de l'âge ou la faiblesse du corps refusent les moyens• d'échapper au danger. Ceux qui peuvent se sauver, fuyant• à pied ou à l'aide d'un cheval vigoureux ,évitent à la fois• la double fureur des flammes et de l'ennemi, et s'élancent• à la suite de Fernand, le coeur rempli d'épouvante, à tra-• vers les broussailles et en rase campagne ,hors de tous les• sentiers, se croyant toujours près des portes fatales, n'osant• porter la tête en arrière, soit pour ne pas tomber, soit pont-1) ne pas perdre un seul mouvement de leurs pieds.... La

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-16 HISTOIRE DE JEANNE

• main de la fortune cependant vient au secours (]es vaincus

• plus que n'eût pu le faire la fuite ou la marche rapide cii

» laquelle ils mettaient l'espoir de leur salut: En effet, la

terre humide ,toute couverte de joncs de marais et cachant

u ses entrailles puantes sous une plaine fangeuse, s'évaporait

u par l'effet d'une chaleur intérieure, et, changeant latmos-

» phère en nuit épaisse, exhalait des brouillards formés

d'un mélange de chaleur et de liquide, de telle sorte que

u l'oeil du conducteur pouvait àpeine atteindre à l'objet qu'il

Il conduisait et que nul ne pouvait distinguer ce quil y avait

• devant, derrière lui ou à côté de lui. Les nôtres donc, ne

• poursuivirent les fuyards que tant qQ'ils purent s'avancer,

• à lai lueur de l'incendie de la ville; car le soleil ne pouvait

u luire à travers les brouillards. Ils tuèrent cependant un

» grand nombre d'hommes- et firent encore plus de prison-

» niers, que le roi vendit à tout acheteur pour être A jamais» esclaves, les marquant ainsi pour toujours du fer brûlant

de la servitude. Ainsi périt 'toute entière la ville de Lille,

u réservée pour une déplorable destruction.

La P/sillppide, chant IX, p. 279, version d0M. Guizot, ou plu-tôt d'un de s es disciples qui aurait pu ruicur iraduire. - Voyez sur ccsiège de Lute l'excelle .stouvragedeMM. Brun: Les s8ptsiéges de Lifte,P . 21 etsuiv.- -

Deux poêles français du XIII.' siècle ont aussi raconté la prise etlineendie do cette ville par le roi tIC ,Frauce. C'est d'abord PhilippeMouskes en sa Chronique rimée. (Y l'éd. du baron de tteiffenberg 11

344) . Puis Guillaume Gulart qui , pins explicite que Lel3reton , ditpositivement quo Pliilippe-Auguste lit marquer d'un fer chaud tousles Lillois qui tonibareni sous sa main. - 1

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COMTESSE DE FLANDRE. 17

Guillaume le Bretonne savait pas que, peu de jours après,

les Lillois échappés î la mort revenaient, la nuit, errânt

sur lés débris fumants de la tille anéantie, chercher au milieu

de cette terèebrûlantela placeoù furent leurs foyers. Il ignorait

surtout que l'amour du sol natal ferait bintût surgir de ce

lieu de désolation une cité nouvelle, et que cette cité devien-

drait un jour l'une des plus riches et des plus puissiintes du

royaume dévolu aux descendants de l'exterminateur. S'il

avait pu le prévoir, quel beau texte pour un poète! Cela

eût bien valu l'éloge de l'incendie et l'apothéose du mas-

sacre.

Cependant, la grande coalition contre la France se formait.

Pour décider l'empereur Othon û y entrer, le comte de Flan-

dre employa de singuliers moyens de persuasion. U lui dit

d'abord que le succès était sûr, attendu que 1e roi Philippe

ne pourrait disposer que de soldats vieux et invalides, tous

les jeunes se trouvant avec le prince Louis, dans le midi de la

Là Têissiez ces sales fondre.Et ces biaus hosties craventerEnfans et tentes dementerMenesteriex braire et crier;L'un ocire , l'anise lier,Et ].a sus François pourpreudre'Fous ceux con puet ilcuques prendre.Furent après serf leurnage;Etlenr fut li rois tel hontageQue pour les plus [est enseingnier,Les fist tons d'un fer chaus sciguier• U , dedans leur vile méi,isteCorne l'en fait en paiénisrne.

T, I, p. 2f.2

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4$ HISTOIRE DE JEANNE,

France,.. Puis il lui fit confidence que sa tante la reine Ma-thilde était sorcière :'elle avait consulté son démon familiersur les éventualités d'une guerre, et le démon lui avait ré-pondu en propres termes Le roi tombera et ne sera pas ense-veli; Fernand viendra triomphant 4 Paris. L'empereur futconvaincu, Renaut de Pammartin, comte de Boulogne, quiavait, lui aussi, un grief à venger sur Philippe, s'était lait avecson cousin Fernand le négoèiateur de la ligue. L'Angleterre, laFlandre, !e Brabant, la hollande, le Limbourg, le Namuroiset l'empereur Othon IV se trouvaient désormais liés dans unemême communauté d'intérêts. L'envahissement et le partagede la monarchie française avaient été résolus. (e fut à Valen-

liex cadet in belle CL 1100 sepelieLtir, , et Ferrandos colla pollipiveniet Parisius. -Ex tibia III hist. regain Fflg ncoruni ail Origine gent icd atenant MCC. XIV ex ris. codico bibhiotIt. S. Vieto,'is Par. 2V.' 4i,fol. 283 ris., apad hoo0 unr, XVII, 427.

Voici comment Guillaume Le Breton raconte ceuc parIiculariIJuterea comulissa senex quri Porligalensisfilin regis, ou irne solum regina vocata estVerraiîdiqoe erat ipsa gern ana tan rentisti.speridum riin copions ventera doccri,Sorlilegos nohis ignota consulit arte.Nec lamen ipsa, reor, or

al inscia j,msLigioruli,

Quin solet liispanos prrisaga 'J'holeta docerc.Sorcibus e' go dalis , taU proihiemate falliDigi.a fuit, vero axjuivoe;i soli voce latenti

lIexab ee li O mulla jUVCflQu) vi drains, equorumTuindctiir partibus, nec oum conhingel. ItuinariAliisonoqua cornes, plausu post 1-rrwlia cùrrcs%'eclns , Pansus o civibns excipietur.

Hinc ulagis n udacter Ferra odus in arma Torcha LNon

in teltecto gaudens tonigasa e sortis

Auibigua , vans cupidam s ite fallere mentemNe solos duplici fou s Lur Apolline Cresus.

Phihj pidc, &l. d'Octave L)elepierro, 55.

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COMTESSE DE FLANDRE. fi)

ciennes, en la Salle-le-Comte, que se fit In part anticipée d'unbutin qu'on regardait comme sûr. On ne doute de rien lors-que cent cinquante mille hommes campent autour du lieu oùl'on délibère. Othon s'adjugea d'abord la Champagne, laBourgogne et une partie de la Franche-Comté; le roi Jeand'Angleterre s'était contenté des provinces attenantes àcelles qu'il avait déjà sur la Loire; le comte de Boulogneprit pour lui le comté de Gaines et le Vermandois. Quant iiFernand, il voulaitia plus grosse part; c'était l'Artois qu'il luifallait, la Picardie, l'Ile do France, ni plus ni moins, sans ou-blier cette bonne ville de Paris où, dans son jeune àge, ilavait mené si joyeuse vie. Pour les coalisés d'un ranginférieur fractionnèrent ce qu'on voulut bien leurlaisser.

Comme ces choses se passaient à Valenciennes, Philippe-Auguste s'acheminait au-devant de ses ennemis, à la tête de40,000 hommes. Ce n'était point là toute l'armée; niais lereste , il avait fallu le laisser au fils aîné du roi , pouraller s'opposer à l'invasion de Jean Sans-Terre, lequel, afinde seconder le mouvement des alliés au nord, s'était portésur la Loire avec de nombicuses forces. La France n'avait ja-mais été plus près de sa perte. Enveloppée du réseau formi-dable qui semblait devoir l'anéantir, seule contre tous, elle neperdit cependant pas le sentiment de sa force morale; instinct

Cétoit , dit M arclia atius , rendre la peau de l'ours , avant delavoir étendu par t erre.

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20 HISTOIRE DE JEANNE,

providentiel, qui tant (le fois, à l'heure du péril, sauva la me-

narchie. Philippe 1 arrivé sur les contins du pays occupé par

les ennemis, poussa vers ses peuples un grand cri (l'alarme. A

cette voix, les beffrois de toutes les communes de la Picardie,

de l'Artois, de Vile de France, du Vermandois, du Beauoi-

sis, du Soissonnais s'ébranlent ensemble, et trente-cinq initie

de ces durs et fiers bourgeois, qui dès cette époque secouaient.

déjà si rudement le joug féodal, accoururent spontanémentranger leurs bannières sous l'oriflamme de Saïnt'Denis. Le

sentiment de la patrie en danger a toujours fait en France sor-

tir des soldats de terre.

Tandis que grondait l'orage, où était Jeanne, que devenait-

elle? Isolée dans quelqu'un de ses châteaux de Gand, deBru-

ges, ou du Quesnoy, elle restait étrangère à la formation de la

ligue et à l'exécution de ses desseins. Loin de partager les

orgueilleuses chimères de la coalition, il paraît qu'elle fit, au

contraire, tous ses efforts pour chasser de l'esprit de Fernand

les illusions qu'y nourrissait l'espoir de la vengeance; Les mal-

heurs qui, depuis lemariage de Jeanne, pesaient surlaFiandre

et le 1: lainant ,tout en faisant saigner le coeur de la comtesse,

avaient dit mûrir son esprit. Et puis à ces chagrins de souve-

raine se joignaient, en ce moment-là méme, des chagrins de

femme et de soeur- La jeune Marguerite, mariée depuis peu,

subissait alors les rigueurs d'une étrange destinée. Mais pour

ne pas retarder le dénoûment d'une série d'actes politiquesque, jusqu'ici, nous avons fait marcher sans interruption,

nous raconterons plus tard cette romanesque aventure....

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COMTESSE )E FLANDItE, 21

A mi-chemin de Lille à Tournai , mais un - peu sur la

droite en allant vers Tournai, à ]'entrée d'une plaine, , se

trouve un petit village nommé Bouvines. La rivière de la

Marque coule tout près de là. l]été, cette fertile campagne

est, comme toutes celles de la Flandre, diaprée d'une.vigou-

reuse végctation. Peu d'arbres toutefois, si ce n'est aux

alentours des maisons de chaume (lu village et de l'église

dont le clocher se dessine au loin entre le feuillage. Sur

la Marque et à trois ou quatre traits d'arc des habitations,

entre Cysoing et Sainghin , un pont rustique. La physio-

nomie de ces lieux n'a dû guéres changer depuis le 27

juillet 1214.

Ce jour-là , dimanche , le soleil s'était levé radieux à

l'horizon. Les paysans et les ser de l'Abbaye de Cysoing,

en cheminant le matin par les champs, pour aller à la

messe, dûrent être étrangenient émus de voir le pays envahid'innombrables gens d'armes. Et, en effet, dès l'aurore

une grande année se pressait aux environs du pont de

Bouvines. Un homme û cheval, séparé du gros de la troupe,

la regarda passer la rivière , ce qui dura long-temps ; et

lorsque la majeure partie fut de l'autre cété du pont, il s'en

alla vers l'église prochaine dédiée à Saint-Pierre. Devant

le portail s'élevait un frêne touffu. L'homme descendit decheval, se fit enlever sa lourde armure de fer, harassé qu'il

était de chaleur et de fatigue; il avait marché depuis là pointe

du jour. Haletant et poudreux, il s'étendit sur la terre à

l'ombre du 'frêne. C'était le roi de France , Philippe-Au-

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D

HISTOIRE DE JEANNE,

guste ' , et tous ces gens d'armes les 75,000 hommes qu'il

amenait au-devant de l'empereur Othon, jugeant avec rai-

son qu'il vaut mieux porter la guerre chez les autres que (lel'attendre chez soi--

Philippe avait eu à peine le temps de prendre le frais

que les éclaireurs de son armée accoururent jetant de

grands cris et annonçant l'approche de l'armée impériale.

On l'apercevait du côté de Cysoing déjà même les troupes

légères d'Othon avaient eu un engagement avec les arbalé-

triers, la cavalerie légère et les satellites formant l'arrière-

garde du roi sous le commandement du vicomte de Melun.

 cette nouvelle, Philippe remonte à cheval en toute hâte.

(ait rétrograder son armée, repasse avec elle sur la rive

droite de la Marque. Comme à la bataille d'Hastings, où (Jeux

évêques dirigèrent les opérations de l'armée de Guillaume-

le-Conquérant, l'élu de Sentis, alors nommé [e chevalier Garin,

grand homme de guerre et prélat non moins grand , fut

chargé de mettre en ligne les troupes du roi. Elles prfrent

aussitôt position devant Bouvines, face à Tournai. Eudes, duc

de Bourgogne, eut le commandement de la droite, et deux

Voueront autem ad poutem Bovitium qui est inter cesouam et'Sanguineuw. Queni cucu miijur pars exel'eitus juin lianili.set, et reïcirea ponteun exat'Iliatus , arniis siquitieni olir1uantiulum etititiere fiuti.gaies sol, uml,ra cuujusdaw (jauni jouta quawdain ecelesian. Beau-['euH quieti vacaret, ceco nuu,Iii .....etc. Vt,,c ga'r oc BEAU VA] S. xxxi, 54,

Il titait.lh , dit un tucicn cnvziiiI , liOn mie pour combattremais pouu admonestea' les haro tas et les autres chevaliers, à ''lion-ajour ioDle0, du toi t clii ro"ausne,ei i ta défense (le leur pro1lreSeigneur.

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COMTESSE l)E FLANDRE.

princes de sang royal , les comtes de Preux et d'Auxerre,celui de la gauche. Pendant ce temps, Philippe entra dans lapetite église du village pour y faire une courte prière; aprèsquoi, ayant revêtu son armure, il sauta à cheval avec autantde gaité, dit Vincent de Beauvais, que s'il allait à la noce.

Déjà es deux armées se trouvaient à une distance très rap-prochée. Le roi se plaça à la tête de la sienne, entouré desplus vaillants hommes de guerre de France , parmi lesquels on.distinguait Guillaume des Barres, Barthélemi de Roye le jeunecomte Gauthier de Saint-Pol, Pierre de Manvoisin, GérardScropha vulgairement la Truie, Etienne de Longchamps,Guillaume de Mortemart, Jean de Rouvroi, Henri comte deBar, et un pauvre; mais brave gentilhomme du Vermandois,ayant nom Gales de Montigni; il portait, auprès du roi, labannière aux fleurs de lys.

Quelques historiens prétendent qu'alors le roi de France,se plaçant au milieu de ses officiers, fit déposer son casquesur un autel, et que là, il offrit, en termes magnifiques, lacouronne de Franco au plus digne. Personne ne se présentacomme bien l'on pense, et Philippe remit la couronne sur satète.Nous doutons fort de cette cérémonieà laPlutarque. Le roifit, si l'on veut, quelque chose de moins majestueux, mais detout autant chevaleresque. Prenant en main un immense hanap

Quo atidiEn , fox eccksi,rn lugreditur. cl , lireviter oransileriitn ogrèssu ' induitur armis alacri y ultu , cquuui insilit ac ,i adiirprias roenicr....... VlNcIust 0E EnAuvÂls. xxxi , 54.

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24 HISTOIRE DE JEANNE

rempli devin, dans lequel ou avait trempé des soupes, il en

mangea une, et passant le hanap aux barons qui l'entouraient:

Que ceux, dit-il, qui auront bu et mangé à cette coupe,

jurent tous de vaincre onde mourir! n Les barons mangè-

rent les soupes au vin, jurèrent et firent mieux 'encore, ne

fiillirentpas â cette héroïque communion.

II était environ midi; En cc moment, l'armée impériale

débouchait sur le. plateau de Cysoing. Depuis les invasions

germaniques, jamais armée si formidable n'avait paru en

Flandre. Elle semblait disposée au combat; car elle s'avançait

enseignes déployées , les chevaux couverts et les sergents

d'armes courant en avant pour éclairer la marche. Au centre

des lignes, on apercevait un groupe compact de chévaliers

reluisant d'or et d'argeiit. C'était l'empereur Othon et son

escorte, entourant un caroccio traîné par quatre chevaux, où

se dressaient les armes impériales. L'aigle d'or tenait dans sa

serre un énorme dragon jetant feu et flamme de sa gueule

béante, et qu'on a prétendu être la personnification ernblé-

matique de la France, prise entre les serres de la coalition.'

Et quant In messe fut dite si lia aporter pain eu vin et tisÉ taillerclos soupes ct , eii mangea une. Et pois dia h tous céans Ici cialour luiestoient s Je proi à tous mes boise; amis qu'il maiigascent avec moi

en rcmenht'ance (les XII aE)oslles Li nn'ec osti'e seigneur burent -etmangièren t. EL s'il en y n nul Id relise ii] auviisté ne treclibde si ne

s'r- roche raie, — Citron, tic R heints, w an '5cr ta du roi, cli. XX

(. CeLle chronique raconte égaletiient ta scène de )a couronne.II csL n rcmarq lier que G qilla nitre Le li i'eto ii lie p ai ti e Ii (le I' u ire nisic l'autre.

Les eh ro uiqu (le Soi u L Moi, disent tout t boii n C (n Cil t Le visageion rad par i jcve,'s Fnnr,'ois , et /n gnon k i,nde (fée u te) rein mcs'il ions istCent bit) tout 'nc'ngi»?'. -- A'ns1 Bon'euur'r XVII . 40. -

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COMTESSE I)E FLANDRE. 25

Cette orgueilleuse enseigne avait pour garde spéciale, 'cin-quante barons allemands, commandés par Pierre d'.lIostmar,La personne sabrée de l'empereur fut confiée aux ducs de Bra-bant, de Luxembourg, de Tecklenbourg, aux' comtes deHollande, de Iermont, Bernard d'Hostmar, Gérard de Ràn-derode, Pierre de Namur, Gérard de Trémogno, Hugues deBoves, et quântité d'autres chevaliers de même valeur.

Les deux âmes de cette grande armée étaient aux deuxextrémités. A la gauche, Fernand avec les milices de Flandre,de Hainaut et de Hollande; à la droite, Renaud et six milleAnglais avec leurs chefs Salisburi et Bigot de Clifîord, l'infan-terie brabançonne, les cschiclles ou pelotons de cavaleriesaxonne et brunswikoise, des corps de mercenaires et d'aven-turiers ramassés par Hugues de Boves.

- « Eli,quoi! s'écria l'empereur, stupéfait en apercevantl'armée française en bataille dans la plaine, je croyaisles Fran-çais en fuite, et les voilà en ligne, le roi Philippe à leur tête I»Cette parole, prononcée d'un ton craintif, circula tout à tra-vers l'armée, et la décontenança un peu.

Le roi Philippe disait en inSe temps à ses troupes: «Voici• venir 00mo l'excommunié ' et ses adhérents; l'argent qui• sert à les entretenir est de l'argent volé aux pauvres et aux

Le pape Innocent III l ' avait excommunié au mois de 'iuvewl,ro1210 , à cause de ses agressions coutre la royauté de Sicile qui rele-vait du saint siège. Cette eRowm unica hou de l'empereu r, publiée parl 'arclsevûque de Mayence , causa de grands troubles eu Allemagne.

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20 hISTOIRE DE .JEANNE,

; élises. Nous ne combattons, nous, que pour notre liberté• et notre honneur. Tout pécheurs.que nous sommes, ayons• espoir en Dieu etnous vaincrons ses ennemis et les nôtres.Alors il parourut les rangs. Quelques gens d'armes, deceuxqui jadis l'avaient suivi àlacroisade, s'attristaient d'ètreobti-gés de se battre un dimanche. -- Les Machabées, leur dit-il,• cette famille chère au Seigneur, necraignirentpasd'aborder• l'ennemi un jour de sabbat, et le Seigneur bénit leurs ar-• mes.»—«Vous, l'élu deDieu, bénissez les nôtresl n crièrentles Gens d'armes; et l'armée entière se précipita à genoux.Cette bénédiction du roi acheva de rassurer les Français; ilsse relevèrent pleins de courage etde résolution.

A une heure et demie, la chaleur du jour était dans toutesa force. Le soleil dardait ses rayons brûlants sur les alliésmarchant en ligne tirée du sud-est au nord-ouest, front ABouvines..Les Français l'avaient donc à dos once moment-là.Philippe profita de l'avantage de cette position, et donna surle champ le signal del'attaque. Les buccines retentirent; etalorsGuillaume le Breton et un autre clerc, qui se trouvaient près duroi, entonnèrent les psaumes Eenedictus qui docet....ExurqatDeus... 1 et Domine, loetabitur..... Des larmes et des sanglotsvinrent souvent les interrompre, tant ils étaient émus. Ilschantèrent ainsi durant tout le combat.

Le premier choc fut terrible. B donna sur les Flamands.Indignés dose voir attaqués par des satellites et non par deschevaliers, ils reçurent d'abord les coups sans s'émouvoir et

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COMTESSE ))E FLANDRE.

sans s'ébranler. Mais :bientôt, :laissant un espace 'vide entreleurs rangs, le jeune Gauthier de Saint-Vol s'y précipite têtebaissée, avec ses gens d'armes , frappant, tuant, à droite, àgauche. 11 traverse de la sorte toute l'armée flamande, puis,laprenantà dos,il la traverse de nouveau, traçant sursonpas-sage un sillon au milieu des cadavres. La mêlée de ce côtédura trois heures, et pendant trois heures clic fut effroya-ble. Il s'y passa des scènes homériques. Les chefs Flamands,pour ranimer leurs soldats, les haranguaient tout en frappantd'estoc et de taille. Tour-à-tour ils parlaient des ayeux et deleurs exploits; ils parlaient des femmes • des enfants laissésau foyer domestique; puis, rappelant l'incendie de Lille etles horreurs de l'invasion française, ils appelaient la ven-geance par des clameurs de mort.-

Une sorte de géant, Eustache de Marquillies, chevalier dela châtellenie de Lille, se démenait avec fureur, seul, aurnilieu.des cavaliers champenois, faisant grand carnage et -s'excitant lui -même, en criant: Tue! tue Un Champenois luisaisit le cou par le bras, le lui serre comme dans un étau etdétache son hausse-col. Michel de Harnes alors, voyant le coul'Eustache à découvert, lui plonge son épée dans la gorge. Le

vicomte do Melon etÂrnoud de Guines, à l'exemple deSt.-Pol, labouraient la ligne flamande par des trouées, passaientet repassaient à travers cette min-aille de chair et de fer. flansune de ces charges, Michel de }Iarnesest cloué d'un coup delance aux parois de sa selle. Eudes, duc de Bourgogne, étaitd ' une énorme corpulence: son cheval est tué sous lui. Non

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28 itlST011kE DE JEANNE,

sans peine, on le remet en selle sur un destrier frais. Aussi-tôt, il tombe sur les Flamands avec une nouvelle fureur etpour venger sa chute et la perte de son cheval, il écrase tousceux qu'il rencontre. Le jeune Gauthier de Saint-Pol, qui,le premier, avait entamé les Flamands, Lit des prodiges devaleur. Encore harassé de chaleur et de fatigue, après la-charge qu'il venait d'opérer, il se précipita seul à la rescoussed'un hommed'armes pris au milieu d'un gros d'ennemis. Douze -coups de lance tombaient à-la-fois sur Gauthier, sans que leclie'al et le cavalier en fussent ébranlés. Il enleva l'hommed'armes.

Les Flamands, de leur côté, se battaient héroïquement;mais le corps de chevaliers qui protégeait leur comte, com-mençait à s'affaiblir; et c'est sur ces chevaliers que portaienttoutes les attaques. EnEin, on les enveloppe avec un nouvelacharnenieitt. Fernand se bat comme un lion. Deux chevauxsont morts sous lui. Couvert lui-même de blessures, ilperdtout son sang. Les chevaliers flamands qui vivent encore,essaient de le tirer delà, mais c'est en vain. Le comte alors sedéfend en désespéré; la terre est jonchée de corps tombés

• Tune prituumflandri coepere timorc moyen-Pondus enim belli totem se indinat in illos.Non La men aut on inpo diseedei'e . terga 'cI Ii ostiOsten Lare vo1 tint; tinta indigna Uo mentiO lisi de t il lot-u in , scrv: ' ndi l rdor ho no lisUt inalint pugnando mon , vel vincla sutureCaxi e req ne ct cuedi qua in se fii gisso no ta

i'/sihppidi X!, V. (27.

n

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COMTESSE DE FLANDRE.

souk ses coups. Le sang coule à flot de ses blessures et ilfléchit sur les genoux. Toutefois, sa bonne épée -n'est pastombée de sa main; il essaie encore de la brandir... Enfinson oeil se trouble, n'en pouvant plus et se sentant évanouir,il la -rend Ù un seigneur appelé Hugues de Mareuil.

La victoire était gagnée sur ce point, mais au centre et à lagauche, le combat durait encore. Al'instant môme où Fernandse rendaitprisonnier, le roi de France échappait à un grandpéril. Les jiquiers de l'infanterie allemande, en repoussantles gens des communes de Beauvais, de Compiègne, d'Amiens,de Corbie et d'Arras, qui s'étaient rués tète baissée vers lagrande aigle impériale, pénètren t .p armi les barons de la gardedu roi Philippe. Quatre de ces allemands s'étaient acharnésaprès le roi, l'avaient blessé àla gorge et tiré à bas de soit

ad moyen de leurs hallebardes à crocs. Il allait périr,malgré les efforts de Gales de Montigni, qui d'un bras écar-tait les coups et de l'autre haussait l'étendard royal en signe dedétresse. Arrive Pierre Tristan. Descendre de cheval ,l'offrirau roi, se jeter l'épée à la main sur les quatre piquiers al-lemands, fut pour lui l'affaire d'un moment. Philippe remontéà cheval avait rallié ses chevaliers et rétabli le combat; lebrave Tristan aurait volontiers payé de sa vie le salut du mo-narque, et, ainsi, celui de la monarchie. 'Nous n'avons pasvu sa statue à \rersailles

Au moment oit se passait cet heureux événement, Eudes,duc de Bourgogne, vainqueur des Flamands sur la droite, se

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30 HISTOIRE 11E JEANNE,

portait au flanc rie l'armée allemande, attaquée en même

temps par la cavalerie de la garde du roi. Cent vingt cheva-

liers français tombent morts; mais la phalange impériale est

ouverte, on arrive à son coeur. Pierre de Mauvoisin écarte

piques et hallebardes, et saisit les rênes du cheval de l'empe-

reur. En vain il cherche à l'emmener; la presse est trop

grande. Guillaume des Barres ,se penchant du haut de soncheval, saisit la sacrée majesté à bras le corps; taudis que Gé-

rardScropha lui porte de grands coups de couteau, qui ne

peuvent percer Ic haubert. Le cheval d'Othon dressant la tête,

reçoit un dé ces coups qui lui crève l'oeil et pénètre jusqu'à la

cervelle. L'animal blesséà mort se cabre en arrière etva tomber

expirant, en dehors de la mêlée. Guillaume des Barres était

resté accroché à l'empereur. fis culbutèrent ensemble. Mais

Bernard d'ILostmar et d'autres chevaliers accoururent au

secours d'Othon, le relevèrent et le remirent sur tin cheval

frais. Blessé, étourdi de sa chute, l'empereur prit le galop à

travers champs, suivi du duc de Brabant, (lu comte de Boves

et de plusieurs autres. - «Oh oh I dit Philippe en riant:

« voici l'empereur qui s'en va; nous ne verrons plus aujour-

»d'hui que son dos.' Le chariot qui portait les armes impé-

riales est mis en pièces; l'aigle etle dragon, les ailes arrachées

et meurtries, sont .apportés ait roi deFranco.

Ce n'était pas tout encore. Le comte Renaud de Boulogne

tenait bon. Cependant, déjà son corps d'Anglais avait été

taillé en pièces par l'évêque de Beauvais. Tandis que l'élu de

Sentis, l'intrépide Garin , se portait partout où besoin était, le

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COMTESSE DE. FLANDRE. .h

prélatde Beauvais s'était acharné contre les Ab Mais. D'un coupde masse d'armes il avait abattu et pris Salisburi, leur chef. Ondit que Renaud, malgré cet échec, quitta son corps d'armée, etque,transportéde fureur, il pénétra, la lance enarrét,jusqu'auroi Philippe. Il allait le Frapper, mais à la vue de son ancienSmaître, il se détourna saisi de respect ou d'irrésolution, et

urnitsa course envers le comte d'Auxerre. Rentré au milieudes siens, il s'était fait avec une merveilleuse adresse un rem-part de gens de pied, disposés circulairement autour de lui,sur deux rangs fort serrés. Quand tout le choc de l'arméefrançaise victorieuse sur les autres points, porta contre cebataillon, il fut écrasé. Renaud, resté presque seul avec sixécuyers, résolut de mourir, mais n'en vint pas à bout. lJrsergent d'armes français, Pierre de ].a s'approchantde lui, enfonce sa dague jusqu'au manche dans le flanc deson destrier. Un des écuyers cherche à entrainer le cheval parla bride, mais il est renversé. Le cheval succombe, et Renaudreste la cuisse engagée sous son corps. Les deux Fontaine etJean de Rouvroi le tiraillent et se le disputent. Arrive-Jean deNelle qui veut aussi sa part d'une si belle proie. Pendantcette querelle, un varlet nommé Comme s'amusait à fourrersa pique à travers le grillage de la visière du comte et l'auraittué bien volontiers. L'élu de Senlis, qu'on rencontrait partoutoù il y avait à faire, survint. Renaud le connaissait; il senomma, cria merci et lui tendit son épée.

La grande armée impériale n'existait plus. Du plateau deCysoing où Philippe-Auguste s'ôtait placé, on ne voyait de

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à IIISTOIRE DE JEANNE

tous côtés qûc des débris épars et fuyants: La plaine offraitl'aspect d'uit immense carnage. Ait de ce théAtre deconfusion et de. mort, un petit corps de 700 Brabançons che-minait en ordre, larme ait et sans s'émouvoir. Cesbraves gens espéraient revoir leur pays; et cette idée lesavait maintenus pleins de calme et de résolution. Philippe,dans l'enivrement de son triomphe, se donna le plaisir de lesfaire exterminer sous ses yeux par Thomas de Saint-Valeri.

Ainsi se termina la bataille de Bouvines. Il était alors septheures dit soir. Les chapelains du roi chantaient encore, maisils chantaient des actions de grâce. Lis ne cessèrent pas jusqu'àce que fiât couché ce soleil qui venait'd'éclairer une des plusgrandes scènes de l'histoire.

e

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Ili.

Des fôtes et triomphes qui furent célébrés en France, descalamités qui advinrent en Flandre, du deuil de la com-tesse Jeanne et du courage quelle mit à gouverner ses comtéset pays.

Rien ne manquait au triomphe (le Philippe-Auguste. Commetes héros de l'antiquité, il revenait tr&nant à sa suite sesennemis vaincus et encbatnés. La joie que causa en Francel'heureuse issue de la bataille de Bouvines tint du délire.Les Parisiens, clercs et laïcs, altèrent au-devant du roi,chantant des hymnes et des cantiques. On dansait dans lesrues; on y faisait retentir tous les instruments connus de

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34 HISTOIRE DE JEANNE,

l'époque, ce qui devait être fortdiscordhnt. Pas une église,pas une maisonqul ne fût tapissée de courtines, de draps de

soie, jonchée de fleurs, de branch'ages. On était alors en

plein temps de moisson : les paysans, à six lieues à la ronde,quittèrent leurs travaux. Impatients de voir ce fameux Fer-nand dont le nom, depuis deux ans, était presque devenuen France un épouvantail, ils circulaient à travers la villeleurs faucilles, leurs houes et leurs rateaux suspendus aucou. ' Le comte de Flandre fit sort lié sur une char-

rette tirée par quatre chevaux; etie peuple de Paris, ce peupleque souvent rien n'apitoie et qui s'égaie de tout, criait ironi-

quement en le voyant passer

Quatre Çerrands (chevaux bais) bien ferrésT?ainent Ferrand bien enferré.

Ou prononçait alors Ferrand pour Fernand. Les jeux do

mots étaient fort en vogue: il n'en est pas qu'on ne • fit sur

l'équivoque que présentait le nom du comte de Flandre. 2

It situons cl tnessores , internaissis operibus , falcibus , restris ettrilinlis in colle suspeissis, catervatim ad Nias ruentes , Certiere cupientesFerrandum in vineulis, quem noper formidabant in arohis - Vis-.CENT 0E BLAUvAss, XXXI, 62.

z Chaque lois qu'uts idiOme se forme on est ingénieux à lui tairesubir des caprices d'imagination, des tours de force do syntaxe. C'estIl n enfant qu'on dégage de ses langes et qu'ou voudrait voir courirtotitseul.

- . Li vilain, )es vieilles et li enfant n'avaient pas boute de luimoquier et esebarnir. Si avoient trovée occasion de loi gaber parl'équivocafioli de sou iota pour ce que li nous est équivoques à homeet à cheval. Si avint tek aventure que sa cheval de la couleur qui telsaut' met à cheval le portoient en une litiùre et pour ce criaient en

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COMTESSE DE FLANDRE. 35

Après les coups d'épée, ce que les Françaissavent le mieuxappliquer, ce sont les coups de langue et les coups (leplume. - Bref, durant toute la semaine, on ne se couchapas dans Paris. Il y avait tant de lumière, la nuit, par lesrues, qu'il faisait clair comme en plein jour.

En Flandre et en flamant, consternation profonde, so-lennelle. On eût dit qu'on venait d'être frappé d'un malheurirréparable. Au premier moment, ce ne fut qu'un cri d'im-précation contre Othon l'excommunié, à qui l'on attribuaitle funeste résultat de cette guerre. Puis l'on songea que lesmalédictions ne remédiaient à rien et l'on s'occupa du règle-ment des affaires intérieures. Elles offraient un lugubretableau.

La guerre avait si cruellement ravagé la Flandre dansles derniers temps qu'il y restait à peine quelque chosedebout. De tous côtés, à la place d'un village, d'une église,d'une abbaye, on ne voyait plus que des murs dénudéspar le pillage, noircis par les flammes; d'affligeantes ruines

reproielto que 't ferrant emportaient le tiers ferrant et quo Ferrauziert enferrez qui d,rvaut iefl si elicressiez qui parorgueili s'était contresou seigneur reveler. - Chroniques de Saint-Brais, manuscrit de laBibliothèque do cambrai, N. 622, page 330, 1." et 2.' col.

Fcr,'ane partent dui auferantQui Ions dent sont de poit ferrant.Aiiii s'i!n va lié en ferLi queue Ferranson son enfer.Li an ferrant de fer ferréEm1,orlent Fe,rant enferré.

-CUI,.',. GUIMIT, 1, 30q,

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36 HISTOIRE 11E JEtNNE,

enfin, comme à Lille après l'incendie. C'était-là des fléauxhumains. Pour surcroît dé malheur, Dieu vint y joindreses fléaux à fui. Une maladie contagieuse dévora plusieurscantons, et la mer, franchissant ses limites, inonda unepartie de la Flandre occidentale et tout le territoire de

Bruges.

Lacomtesse Jeanne gémissait profondément de cette situa-tion désastreuse, mais elle ne connaissait pas encore la

Jacques de Guise donne sur ces calamités dinléressants détails.Peu de temps après la déroute des Flamands et le rachat des pci-

soniliers que le roi avait faits • cette terre qui avait échappé au roi deFrance, Lot submergée avec ses habitants par une inondation do lamer, et cette inondation causa un hies, plus grand dommage au paysque les ravages de l'armée française. Parmi les circonstances ruinai'-quables de cet évéiscuient, la tradition s conservé le fait suivant: Unenfant , dormant dans son berceau, fut , par la protection de Dieu.porté sur les eaux 3iiELU'à Mandegliem en Zélande , où des habitons letrouvèrent encore endormi, te recueillirent et l'élevèrent. A 1,ris avoirétéaffligés de tant de maux , les Flamands eurent à supporter undésasire plus alTreux encore: Gand , Ypres et Bruges (tirent ravagéspar l'incendie qui étirera la moitié des niaisons et lit périr une feule4'habilans de 1 u et de l'aulre sexe : de telle sorte qu'ils pouvaientsire , avec raison, au seigneur: Nous avons passé par Veau ci par lefeu. Plaise à Dieu que le reste lenrsoit épargné t Au nombre des chosesmém or ables qui se passèrent iurs de l'incendie de Gand, un citelévénement (lu C nous allons rapporter. Sept homme s et - une femmesur le point de périr par les flammes, et ne trouvant aucun moyen d'yéchapper, se laissèrent tomber dans un puits et se tinrent cachésdansune cavilé qu'ils y trouvèrent. après l ' incendie, quelqu'un qui ignorait ce fai t • voulant 1Çuiser de l'eau ii ce j, u U s • y plongea ni seau : 'ii ude ces nanlhe u reu x s'y attacha pour attirer l'a t te n lie,, su r liii; on u (rivaet on le relira du puits, lui et ses compagnons. A peine étaient-ils sor-tis et rendus à la vie, parla permission diviife, que le puits , surchargépar la foule, et dont les pierres n'étaient pas liées e,,tretles parleciment , s'écroula touti-eoup. Les Flamands furent ainsi frappés demaux tellement P rodigieux et innombrables, qu'on peut leur appliquer cette parole du piophète : Le jéicoh mange les restes rie la saute-relle, etc. n Assure (es de Ilainritit, X tV 177.

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COMTESSE DE FLANDRE. 37

catastrophe de Bouvines. Ses sujets avaient cula touchantesollicitude de lui cacher le dénouement fatal de tant d'infor-tunes, de peur que la pauvre jeune femme n'en-mourût dedouleur. Chose étrange I le dernier pâtre dans les champs,le dernier gueux par les chemins, savait à point nommé lagrande affaire du Pont--Bouvines, tandis que la comtesse deFlandre et de Hainaut ne s'en doutait nullement. À la fin,toutefois, il fallut bien que la souveraine du pays n'ignorâtplus ce qui s'y passait; que la femme de Fernand apprit cequ'était devenu son mari. Les bonnes gens de Flandre et deHainaut avisèrent ensemble comment on devrait s'y prendrepour faire les choses au mieux.

On décida que les Flamnds prieraient les seigneurs Adamet Gossuin, évêques de Térouanne et de Tournai, et les Hen-nuyers, le seigneur Jean de Béthune, évêque de Cambrai,d'aller trouver la comtesse et de lui révéler la vérité avec tousles ménagements possibles. Les prélats étaient trois hommesd'une haute sagesse; ils s'acquittèrent fort bien de leur mission.Au premier moment, il est vrai, Jeanne se livra aux sanglotset au désespoir, aussi bien que sa tante Mathilde et la jeuneMarguerite; mais bientôt, réconfortée par les consolantesparoles des trois évêques, Jeanne envisagea sa position d'unoeil plus calme. Un grand devoir, une pénible tâche venaientde lui être dévolus par la Providence. A elle désormais àfermer les plaies de la •Flandre, à calmer les angoissesde ses peuples , à lutter contre la fortune, à préparerl'avenir,

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38 ,HISTOIRE DE JEANNE,

Et d'abord il y avait à prendre sans retardune courageuserésolution. Jeanne n'hésita pas. Â peine-la sainte députationétait-elle partie, que la comtesse en habits de deuil cheminaitvers Paris; décidée à se jeter aux pieds de PhilippeAuguste,à lui demander grâce pour l'infortuné mari que naguéres illui avait imposé lui-même.

Le moyen-âge est l'époque des grandes haines, des inter-minables querelles. Lisez les romans de chevalerie du trei-zième siècle: la vengeance, et une vengeance qui se lèguede génération à génération comme tin patrimoine, formepresque toujours le thème de ces Chansons de Geste qui re-flètent si bien la physionomie de leur temps. Il restait dans.les moeurs un vieux levain de paganisme qu'une civilisationplus éclairée, ou plutôt que le dogme chrétien mieux com-pris et mieux développé, ne devait pas tarder à dissoudretout- à-fait. Mais Philippe-Auguste n'aurait .pas eu d&puissants motifs d'aversion contre les instigateurs de la ligueanéantie surie champ de bataille de Bouvines, que la raisonpolitique lui eût fait une loi' ou de les mettre en jugementcomme rebelles au suzerain, ou de les conserver commeMages. Il prit ce dernier pffrti qui lui offrait, en effet, demeilleures garanties. Tant que le comte deBoulogne, et sur-toutFernand, seraient en son pouvoir, au coeur rie la France,pas de nouvelle coalition possible. Philippe le savait bien.Aussi tout l'or du monde ne lui eût-il -pas fait lâcher prise. Onn'expose pas deux fois un royaume aux chances d'une bataillecomme celle de Bouvines.

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COMTESSE DE FLANDRE. 39

Un moment, toutefois, Philippe parut ébranlé des pleurs deJeanne, quand au Louvre; le vendredi 17 octobre 1214, ellevint, à genoux et vêtue de noir,-le supplier de lui rendre sonépoux. Un traité fut même couché par écrit, mais le prudentet fin monarque savait qu'il était inexécutable, ou mieux, queson exécution équivalait pour la Flandre à un arrêt de mort.Que risquait-il, de le proposer? Philippe demandait toutd'abord en étage à la place du comte, Godefroi, second filsdu duc de Louvain; les principales forteresses de Flandre etde 11aiiaut devaient être démolies; puis le roi verrait à rendreFernand et les autres prisonniers, moyennant une rançonproportionnée à la quantité de leurs méfaits.

Jeanne souscrivit à de telles conditions. Â quoi n'eût-ellepas souscrit en ce moment-là? Heureusement, les états ne,ratifièrent pas ils firent bien, car c'était consacrer l'anéan-tissement de toute nationalité. Jeanne en fut donc pour sesgémissements et sa démarche. Quant à Philippe, il chassabientôt comme mauvaise et périlleuse toute pensée de traitéetne se départitplus un seul instant dune obstination qudriendésormais n'aurait su vaincre. Moins que jamais, d'ailleurs,la comtesse et trouvé chez ses sujets de la synipatliic pour'

• Ce traité porte la date du 24 octobre !214. Il a été publié parBalme, Misceli. VII, 2o5, Dachestie , Jiist. de Gaines, Preuves, 475,Warnkœnig, Ilist. de la Flandre, 1,347.

2 Jeanne fit cependant et a(lois reprises différentes do nouvellestentatives pour tirer 'on mari de prison Philippe , chaque Lois, luijura sur son sceptre et sa eOnteflsiO que jamais Fernand ne sorlirail.de la tour du Louvre. Nous reparlerons pins lard de ces tentatives

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40 - HISTOIRE DEJEANNE.

Fernand, qu'ils avaient toujours considéré comme un intrus.È'esprit turbulent de ce prince étranger allait mal à leurshabitudes. Et qui donc, en effet, avait réduit le pays aupitoyable état où il se trouvait en 1214, sinon les malencon-treuses boutades du Portugais? II vint un temps, peut-être,où ils ne furent pas très-fâchés de le voir au Louvre, quàndils s'aperçurent, sous la sage domination d'une femme; qu'onferait mieux sans lui qu'avec lui.

Jeanne revint en ses pays. Tantôt en Flandre, tantôt enHainaut, pour que son heureuse influence se fit également

- -sentir dans les deux comtés, « la fille de l'empereur d'Orientvivait simplement et dans le deuil. Pratiquant la dévotion etl'humilité, occupée à fonder et à réparer des hôpitaux et deséglises, elle passait honorable-ment et sans reproche les annéesde sa jeunesse au milieu des tribulations et des angoisses. o

Oui, des angoisses, et quelles angoisses I Jeanne n'avait passeulement à déplorer les malheurs de la patrie et les siens pro-pres, mais encore ceux de la personne qui devait lui être laplus chère au monde - de sa soeur. Triste similitude d'éxis-tence 1 Il était écrit dans la destinée des filles de liauduinlXqu'elles seraient veuves toutes deux du vivant de leurs maris.

(je sont les Nrolcs mêmes de iticclue n do Guise, Y. XLV, iGS.

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Iv,

Aventures de Ilouchard d'Avesnes.

Vers la fin du XII.- siècle, vivait à la cour du comte deFlandre, Philippe d'Alsace, un jeune enfant ayant nom Bon-chard. II appartenait à ctte illustre maison d'Avesnes, dontla renommée brilla d'un si vif éclat dès les premières croi-sades. Son père, Jacques d'Avesnes, faisait en ce temps-làmême des merveilles en Palestine. C'était lui qui, à la ba-taille d'Antipatride, le 7 septembre 11 91 , mutilé, haché parles Sarrasins, brandissait encore son épée du seul bras quilui restait et criait expirant, â Richard Coeur-de-Lion: Braveroi, viens venger ma motif

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HISTOIRE DE JEANNE,

Bouhard était le troisième fils de ce héros. ' Suivant ht

coutume de l'époque, il devait tasser le temps de sa jeunesseauprès du souverain , afin de se former parmi les barons etles dames aux nobles usages de la chevalerie. Sa charmantefigure , ses heureuses dispositions d'esprit lui concilièrentl'affection du comte et de sa femme Mathilde. Ils n'avaientpas d'enfaiits; ils s'en consolèrent bientôt, en aimantBouehardcomme-on aime un fils. Son avenir lespréoccupa vivement.La famille du Seigneur d'Avesnes comptait assez'd'homrnes deguerre. L'on songea que Bouchard, avec ses bonnes -et pré-coces qualités, pourrait aspirer aux premières dignités ecclé-siastiques. La pourpre romaine, la thiare peut-être, apparu-rent quelquefois dans les rêves paternels des augustes bien-faiteurs, quand ils apprenaient les succès du noble jeunehomme aux écoles de Bruges. C'était-là qu'on l'avait misd'abord, mais J)ouehard n'jresta pas long-temps. -Ses progrès..dans l'étude devenaient si rapides, que son maître conseillaà la reine Mathilde de l'envoyer à Paris.

Paris était dés-lors l'ardent foyer où devaient aller s'échauf-fer -toutes lesintelligences. Nulle part , les sciences del'époque, la philosophie setiolastique et la jurisprudence,n'avaient de plus profonds interprètes , des adeptes -plus

s Molanus , dans sou martyrologe Belgique , met Jaeques•• d'Avesues entre let l,ieniteureux qui sont morts pleins de gloire et•de mérites (levant Dieu, ayant expié ses fautes par •une mort si• glorieuse. Jlist. gén. du liai naut , par le 1%. P. M. Delewarde11E, 258.

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COMTESSE DE TLANDRE.

zélés, qu'à l'Université de cette ville. Les téqèbres de la bar-barie se dissipaient; la civilisation faisait effort pour naître.Un irrésistible besoin de savoir s'était emparé des espritsd'élite ,et l'on cherchait avec passion fi vérité, jusque dansles subtilités de la dialectique, jusque dans les abstractionsdu droit, jusque dans'les spéculations de l'astrôlogie! ll'n'yavait pas long-temps que les Saint-Bernard, les Abeiliirdétaient morts; mais leur génie ne l'était pas; il se revivifiaitchez leurs disciples. Parmi eux et au premier rang, nousdevonè le dire à la gloire de notre pays, brillait un illustreflamand , Main de Lille, surnommé par l'admiration naïvede son siècle le docteur universel. -

.Boucbard dut s'inspirer de leurs conseils, s'enthousiasmerde leur exemple, car il s'adonna aux travaux d'esprit avec lezèle d'un plébéien ,dévorant avidement les leçons ,des maîtresdans les cours publics, ôte à côte avec de pauvres clercs enguenilles, scrutant, discutant, approfondissant les questionsles plus ardues de philosophie naturelle et morale. Le grandseigneur avait disparu: absorbé par l'étude, Bouchard l'éco-lier, ne songeait plus au luxe, à la richesse dont le comtede Flandre avait voulu entourer le fils de Jacques d'Avesnespendant son séjour à Paris; ' il oubliait qu'il était l'en-fant de toute une lignée de héros..,, que ces héros n'avaientjamais manié qu'un fer de lance! Oh, combien, plus tard,il dt gémir de n'avoir pas fait comme eux I-

A la cour de Fia udre , il lui n vail doirii ô le train (le quatre chevaux.

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44 HISTOIRE DE .JEANNE,

Bientôt Paris mème ne suffit plusà l'insatiable cupidité d'ap-prendre qui tourmente Bouchard. L'édole d'Orléans Ilorissaitpar ses professeurs en jurisprudence ecclésiStique et civile. IIy court. Bachelier , puis ensuite docteur et professeur lui-même en droit civil et canon, on le pourvoit d'une prébendeet d'un arc hidiaconéen l'église Notre-Dame de Laon. De sem-blables dignités, à cette époque, L'exigeaient pas toujoursqu'on fût dans les ordres, pour les obtenir. Peu après, le comtePhilippe lui fait avoir une autre prébende et la trésoreriede la riche église de Tournai. Puis un certain temps s'écoule,pendant lequel on perd de vue Bouchard. Sa viereste môme unmystère pour ses amis.On le croit dans la retraite avec ses] ivres.

Un jour, toutefois, il arrive en Flandre. Sa renommée l'yavait précédé et il apparaît à la cour du comte, entouré duprestige que donne toujours et que donnait surtout alors,pour un noble personnage, le renom d'un grand savoir.Les barons de Flandre et de Hainaut, ces braves et ru-des guerroyeurs qui pour la plupart ne savaient pas lires'étaient sans doute imaginés voir venir Bouchard , le profes-seur d'Orléans, en robe noire et en bonnet carré. Les baronsdàrcnt être étrangement surpris quand, au contraire, se pré-senta devant leurs yeux un jeune et beau chevalier, à l'airgrave, il est vrai, mais à laparole imprégnée de charmes, auxfaçons pleines d'élégance et de dignité. Hommes et femmes,à la cour du comte, tout le monde en hit dans le ravissement.On subissait malgré soi l'ascendânt de sa supériorité moraleascendant auquel de rares perfections physiques ne faisaient

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COMTESSE DE FLANI)RE. 45

qu'ajouter.... Mais un grand changement avait dû s'opérer,car ce n'était pas là un docteur, encore moins un archidiacre;c'était l'idéal de la chevalerie personnifié. 0e prêtrise, il n'enfut plus question.

Vinrent les 'guerres de Flandre sous le comte Bauduin;ouchard,laissant ses livres, avdit repris l'épée de ses an-

cêtres. Il y fit des prodiges: sa réputation , de valeur gran-dissait à] 'égal de celle que, malgré son jeune âge, il s'étaitacquise comme homme de sagesse et d'expérience. RichardCoeur-de-Lion tressaillit d'orgueil quand il apprit que mc-pies d'Avesnes, cet ami mort si Glorieusement sous ses yeuxaux champs d'Antipatride, avait un fils digne de lui. II nevoulut pas que d'autres mains que ses mains royales armas-sentJlouchard chevalier; il le combla de faveurs et lui donnaen Angleterre de grands biens et revenus.

Au commencement du siècle, le comte partit pour lacroisade. Bauduin IX emmenait avec lui tout ce que la Flan-dru elle liai riant possédaient d'hommes de guerre etd'hommesde conseil. Il voulut qu'au moins une tête solide restât dansle pays pour le gouverner, qu'une main sûre gardât le trésorqu'il y laissait. II ne se fiait pas trop d'ailleurs en son frère

• .11 se concilia la bienveillance du roi et (les seigneurs d'Angleterre,ainsi que celle de la noblesse de Flandre, de Hainaut, de Brabant etdes bonnes villes tic ces pays, au point que personne ,de son temps.n'avait une plus grande habileté à la guerre, de sagesse dans les con-seils, de justice, d'éloquence et de savoir. Il se distinguait égalementpar ses mœurs et ses vertus héroiques , par sa stature et son adressedans les exercices du corps, par la force de ses membres, sa vigueur,sa grace , et par une foule d'antres qualités. . J. ut G. XLV, 14.

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46 .HISTOIRE DE JEANNE,

Philippe de Namur, qui de fait et de droit devait être cequ'on appelait alors bail et mainbour des deux comtés pen-dant l'absence du souverain et la minorité de ses fillès.Eoucliard lui fut adjoint en qualité de conseil et Bouchardn'alla pas en Palestine I

On sait comment Philippe de Namur, trompant tout lemonde, livra ses nièces au roi de France : on sait aussi que,sur les instances des habitans de la Flandre et du Hainaut,.Philippe-Auguste renvoya Jeanne, et Marguerite â Bruges.Eouchard mit le comble Ù sa popularité, en dirigeant et enmenant à bien cette négociation. Mais déjà le mariage deJeanne avec Fernand était décidé. Il se fit, et on dut s'oc-cuper de la jeune Marguerite, alors âgés de onze à douzeans.....

Laissons ici un chroniqueur de l'époque prendre la parole.Son langage naïf et plein de bonne foi produirh peut-êtresur le lecteur l'impression qu'il nous a fait éprouver à nous-même.

- e Enfin, après un certain temps, on finit par convenirentre le roi de France, les parents et amis des deux prin-cesses et les bonnes villes, que Jeanne,l'ainée,seraif donnéeen mariage à Fernand, fils du roide Portugal; pourMargue-rite, on résolut dela confier jusqu'à l'âge nubile au seigneur

JACQUES Hz Gu,ss., XIV, aS, Nous avons ttsché Je le traduire aussifidèlement que possible.

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COMTESSE DE FLANDRE. 47

Ilouchard d'Avesnes, renommé alors comme le plus prudentchevalier du pays. On lui donnait pour l'accompagner cinqnoblês dames des plus honorées de Flandre, avec une suiteconforme à son rang et on lui assignait, imr les recettes deFlandre et de lEainaut, une pension de trois mille livresmonnaie courante. .Bouchard se récusa d'abord avec degrandes marques d'humilité et de respect et il fut saisi d'épou-vante Û l'aspect de la charge qu'on voulait lui imposer.Néanmoins, après mûre délibération, il céda et fit appareillerson hôtel en toute splendeur et magnificence... Puis il y reçutMademoiselle Marguerite pour l'élever dans les bonnesmoeurs, la nourrir honoriiblcment comme il était séant pourla fille d'un si grand empereur etd'un si noble comte qu'avaitété le seigneur Bauduin. Dès lors Marguerite entourée deses dames vécut long-temps pieuse, soumise, humble,chaste et tempérante.

Elle passait doucement les jours que le Seigneur luiaccordait, comme une vierge bénigne , dons la pratique.des vertus d'honnêteté , de sobriété , de prudence et , deforce. Maints comtes et barons la demandaient en mariage,qui au seigneur Bouchard, qui à ta reine Mathilde. Le roide France postula sa main pour un chevalier de son sangroyal et , du pats de. Bourgogne ,. mais les Flamands n'y.voulurent entendre. Le comte de Salisbury sollicita pourson fils aîné. Les Flamands s'étant enquis de la personnede ce fils, apprirent qu'il était boiteux et ainsi le rebou-tèrent. On raconte qu'un 'jour Mathilde vint à dire

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48 HISTOIRE DE JEANNE,

«Ilouchard ne cesse de nous faire ii nous et au conseil de

• Flandre des propositions. diverses pour le mariage de

• notre fille, et pour lui-même il ne dit mot. » Une des

demoiselles de la reine ayant ouï cela , attendit l'arrivée

de Bouchard et lui dit « J'ai entendu Madame dire telle

n et telle chose. n I3ouchard songea beaucoup en lui-même,

et ensuite fit connaître la chose à ses fidèles amis et spé-

cialement à Watier, son frère, leur demandant conseil sur

la manière dont il devait se conduire. Ceux-ci ,qui ignoraient

absolument l'inaptitude de Jiouchard, répondirent qu'en si

grave matière ils n'osaient rien conseiller sans connaître au

préalable la volonté de la reine; que du reste, si Mathilde

consentait, il serait facile d'avoir l'adhésion des bonnes villes

et des seigneurs..

Ijoucliard saisi de terreur se présenta à la reine , lui

découvrit ce qui se passait dans son ciœur et requit d'elle

avis et assistance. La reine fixa jour pour répondre. Entre

temps, elle manda son conseil et les gens des villes, puis

leur exposa comment Marguerite avait été demandée en

mariage de la part du roi de France, des Anglais et de

plusieurs chevaliers de diverses nations Mais que sonéloignement du pays pouvant tourner à mal par la suite,

il valait mieux la marier à quelque seigneur d'un moin-

dre rang, qui pût servir un jour la patrie de sa prudence etde son bras. La reine conclut en disant ((Or, nous avons

n ici tel seigneur qui est de sang royal et qui nous a fait la» demande de Marguerite. n Les conseillers a -près avoir en-

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COMTESSE DE FLANDRE. 49

tendu ces paroles de Mathilde, reçurent jour pour délibérer.Ils assemblèrent alors les nobles de Flandre et de Hainautainsi que les conseils des bonnes villes, et après longues dis-cussions; ignorant toujours les empêchements de liouchard,ils décidèrent qu'il valait mieux marier la jeune princesseavec un seigneur du pays de Flandre ou de Hainaut, qu'avecun étranger et surtout un Français qui, par la suite, pour-rait causer malheur à la patrie. o

Voilà comment la fille de l'empereur Baudouin épousa lechevalier Bouchard d'Avesnes. Les noces se célébrèrent vers1243, en grand appareil, à la cour de Fernand et de Jeanne.Chacun se réjouissait d'une union qui présentait tous les élé-ments de bonheur. Conclue sous les plus favorables auspices,d'après le voeu populaire, à la grande satisfaction de deuxillustres maisons, elle promettait un long avenir de félicités.,un avenir que rien ne devait assombrir. La comtesse Jeanneétait heureuse de voir désormais fixés le sort de sa jeune soeuret celui de Bouehard, qu'elle aimait presque à l'égal d'unfrère. Cet événement de famille, toujours si plein de douceset tendres émotions, vint adoucir un moment pour elfel'amertume des chagrins que lui causait le malheureux état deson pays ravagé par les troupes de Philippe-Auguste, et cal-merles inquiétudes qu'avait fait naître en son coeur l'appro-che de cet orage politique dont la bataille de Bouvines allaitêtre le foudroyant résultat.

Je ne sais trop si l'on était physionomiste au treizième siè-cle mais si un observateur quelque peu judicieux s'est

4

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nomad

50 HISTOIRE DE JEANNE,

rencontré parmi cette cour brillante qui assista au mariagede J3ouchard avec Marguerite, il dut être frappé des sensa-tions étranges qui, parfois, sans doute, se trahissaient sur levisage de l'époux. Et, en effet, une grande et noire penséel'absorbait; il est impossible qu'elle ne se révélâtpoint à traversle masque riant qu'on est bien obligé de se faire en pareilleoccurrence. Cette pensée, les joies nuptiales ne pouvaientl'effacer; elle était indélébile, comme la cause qui lavaitproduite...

Cependant, Bouchard, après les fêtes, emmena sa jeunefemme en Hainaut, dans ses domaines. Ils' furent reçus aveceffusion par Watier, le frère ainé des enfants de Jacquesd'Âvesnes. Watier, joyeux et fier de l'alliance de son frère avecla fille de l'empereur deConstabtineple, lui avait donné la terred'Etrœungt et toutes ses dépendances, plus une rente annuellede six cents livres de blancs de Valenciennes. u

C'est à ce château d'Etrœungt, somptueuse et paisibleretraite, à deux lieues d'Âvesncs, que les nouveaux épouxallèrent confiner leurs mutuelles félicités. Ils y séjournaient

tour-à-tour et à Valenciennes

Marguerite n'avait guères que douze ans , lors de sonmariage. L'évêque de Tournai, Philippe Mouskes, qui vivaiten ce temps-là, nous dit que cette jeune princesse . était belle

Cet acte de donation est daté de Mous, te lendemain de Sainte-Marie-Madeleine, 212. -

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COMTESSE i)E FLANDRE. 51

comme la fleur dont clic portait le nom. Ainsi s'explique

l'amour si fatalement obstiné qu'elle sut par la suite inspirer

à Bouchard. Ce fut en outre une riche et précoce nature que

celle de Marguerite, car la première année de son mariage,

elle mit au monde un fils qui eut nom Jean i'Avesnes, et laseconde, un autre fils, appelé Bauduin.

A l'illustration comme guerrier et comme savant, aux hon-

neurs, aux richesses, venaient encore se joindre pour Bon-

chard les affections domestiques... De puissants liens l'atta-

chaient désormais au monde qui voyait en lui le chevalier

le plus accompli, le plus heureux qu'on pût imaginer.....

Chacun enviait un bonheur sans égal!...

l'ont-à-coup, une sourde rumeur, venant on ne sait d'où,

émanant on ne sait de qui, circule en Flandre et en Rainant..

Elle pénètre, s'insinue partout. On eût dit un airpetilentie!.Bouchard le . premier en sentit l'influence. Sortant alors dulong rêve dans lequel il cherchait à rester endormi, il se res-

souvint, si jamais toutefois il avait pu l'oublier, qu'un jour,au m aître-autel de l'Églis. d'Orléans ,une main d'évêque luiavait silencieusement rasé' ].a qu'ensuite, ce même évê-que l'avait revêtu du caractère indélébile et sacré que confère

le sous-diaconat. Le sacrilège fut bientôt proclanié. La no-

La contesso iert en sa eonNJehane et s'ot à MargerieQui hi etc estoit coin ?oargei'cc.

CORON, n,M(z , diI. Beifl'enberg , y . 211S '5.

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52 111510111E DE JEANNE,

blesse murmura, le clergé murmura, le peuple murmura plus

fort qu'eux. L'illusion était détruite , le charme rompu. Le

chevalier, naguères encore si gloriux et si populaire, avait

disparu; et ce ne fut plus qu'un apostat qu'on signalait dit

doigt, en le montrant

1)u coup, Jeanne fut altérée. Sa soeur avait été odieuse- -

ment tronipée, elle aussi, le pays aussi, A un grand scan-

dale,il fallait une grande réparation. Mais quelle réparation

eût suffi pour laver le crime? La comtesse exigea d'abord que -

flouchard abandonnât Marguerite. t ii n'en fit rien. Cepen-

dant, au milieu d'un peuple profondément religieux, dans

le temps des fortes croyances, la fille de l'empereur Baudouin,

du chef de la croisade, pouvait-elle rester la femme d'un prê-

tre renégat; etpartager une éternelle réprobation?

Le trouble et ré Ln LI itement de la comtesse fortuit moi pri niables.ditjacques de Guise. Elle manda l'évêque de Tournai et les principauxecclésiastiques de ses état,. Après avoir donné diversement leur avissol cette affaire , ils décidèrent Lin 'il serait i propos de la soumet tic ailprochain concile qui s'assemblerait à Rome et la comtesse suivit cetavis. Pendant ce temps-] à elle écrivit plusieurs fois à Bouchai-d, etenvoya près de lui des chevaliers et l'évêque de Tournai, pour l'en-gager à lui rendre Marguerite, qui trouverait auprès d'elle le meilleuraccueil. Les uns étaient d'avis que Marguerite se fit religieuse oubéguine; d'autres voulaient qu'elleentrftt en labliaye.de Sainte-Vaudru ou 'à do M;, ubeuge , ou aux hospitalières: quelques-uns

- disaien I qu'elle devait paaser le reste de ses leurs dans la simplicité etl'humilité ; enfin, chacun donnait son avis sur cette affaire, ltlaisBon.ehard refusa absolument de rendre Marguerite. La comtesse voyant,

Obstination, écrivit au pape innocent et au concile général , pourqu'ils daignasseut preudre une détermination sur je cas où se trouvaitsa soeur, et décider si son mariage avec Ltoucliard était valable et siles deux fils qu'elle avait eus de lui devaient être réputés légitimes. -XIV, 171.

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COMTESSE DE FLANDRE.

D'ailleurs, la chrétienté toute entière n'avait pas tardé às'émouvoir decet.événement. Un concile général se tenait alorsà Latran. L'apostasie du sous-diacre Bouclutrd y fut dénoncéepar la comtesse de Flandre. Le pape innocent III, ce pontifeaustère, cet homme inflexible, qui avait dompté Jean Sans-Terre et forcé Philippe-Auguste à renvoyer Agnès de Méra-nie, tressaillit d'une sainte colère. La huile qu'il fulminale prouve assez. -(c Innocent, évêque, serviteur des servi-» teurs de Dieu , aux vénérables frères l'archevêque de» Rheims et à ses suffragants i , salut et bénédiction apos-o tolique. Un horrible, un exécrable crime a retenti à noso oreilles. Bouchard d'Avesnes, naguères chantre de Laon,o revêtu de l'ordre du sous-diaconat, n'a pas craint d'enie-o ver frauduleusement de certain château, où elle était con-n fiée à sa foi, sa cousine, noble femme, Marguerite, soeurn de notre chère fille en 1.-C., noble femme, Jeanne, com-o tosse de Flandre: il n'a pas redouté de la détenir, sous le

prétexte impudent et menteur d'avoir contracté mariageo avec elle. Comme du témoignage de plusieurs prélats et» d'autres hommes probes qui ont assisté au sacré concile

général, il nous e été pleinement prouvé que ledit Bon-» cliard est sous-diacre et qu'il fut jadis chantre de l'église de

Laon; ému de pitié dans nos entrailles pour cette jeune» fille, et voulant remplir les devoirs de noire office pastoral

t Les évûq n esrias, Beauvais, Seiili , Cambrai , GIi Ions , Lii o t

,N oyon , Térou ait ne et Tournai.

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51 HISTOIRE DE JEANNE,

• envers l'auteur d'un forfait si odieux, nous vous ordon-

• nons et mandons par ces lettres apostoliques , que les

• dimanches et fêtes, par tous les lieux de vos diocèses, au

• son des cloches et les cierges allumés, vous fassiez annon-

cer publiquement que Bouchard l'apostat, contre lequel

• nous portons la sentence d'excommunication que réclame

• son iniquité, est mis ,lui et ses adhérents, hors de commu-

• ilion, et que tout le monde doit avec soin l'éviter. Dans les

• lieux où Bouehard sera présent avec la jeune fille qu'il dé-

• tient, dans les endroits même en dehors de votre juridic-

» lion où, par hasard, il aurait l'audace d'emmener ou des. cacher ladite jeune fille, le service divin devra cesser à

ta votre commandement, et cela, tant que ledit Bouchard

» n'ait rendu Marguerite libre, à la comtesse sus-nom-

» tuée, et que, satisfaisant comme il convient aux injures

» commises , il ne soit humblement retourné à une vie

» honnête et k l'observance de l'ordre clérical. Ainsi donc,

o . tous et chacun de vous ayez soin d'exécuter ceci efficace-

» ment, de manière à faire voir que vous aimez la justice et

n détestez l'iniquité, et aussi pour n'être pas repris.d'inobé-

s dience et de néggence. Donné à Latran , le XIV des

kaléndes de février, l'an.XVIU. de notre pontificat. i

(19janvier f215,)

Joue con t Il E fut élu pape le,.- OYICr I 98 1 par conséquent,1:, 18,' nouée de son pontilie:IL avait commencé au 8 janvier ta tb.

vivo sollici Iii tic de ce p ré], t à l'égard ries 1111es du comte Bau-liani n s'espliue. C'élaiL petit. iile pape etc Taire de COH5CÎCflCC. E ta

alors qu'il s'agissait d'oi-ganiser celle grande croisade dont le,

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COMTESSE PE FLANDRE. 53

• S'il fallait en croire quelques chroniqueurs, Boucliard n'au-rait pas attendu que le pape l'excommuniât, pour crier merci.Il serait allé spontanément à Itome , dés que le sacrilège futébruité, et là, courbant son front devant le pontife, il auraitaccepté une dure pénitence: celle de passer un an clans laPalestine et de ne plus revoir sa femme et ses enfants. Iou-eard,toujours suivant ces mêmes historiens, accomplit fortbien la première condition mise au pardon de sa faute. Pen-dant une année toute entière, les saints, lieux où vivaitencore le glorieux souvenir de ses ancêtres, le virent, non pasle bourdon de pèlerin sur l'épaule, mais bien la hache d'ar-mes en main, guei'royant de la belle façon, pourfendant àplaisir Turcs et Sarrasins. Puis, Bouchard, de retour en sonpays, au château d'Etroeungt, aurait. revu Marguerite et sesdeux fils; il aurait senti lurs étreintes, et, son courage l'a-bandonnant, il se serait écrié au plus fort de la passion et dudésespoir, qu'il aimerait mieux être écorché vif, qucd'aban-donner désôrmais la femme de son coeur et les chers petitsenfans qu'il tenait delle. - Tout cela ne laisse pas que d'êtrefort dramatique et très-touchant; aussi regrettons-pous quetout cela ne soit pas historiquement vrai. Bouchard ne quittaas le liainaut. Pour s'en convaincre, il suffit de jeter les

yeux sur le texte de la bulle.

comte de Flandre devait être le chef, lunocent , pour ôter toute.crainte • touL scrupule à Baudouin, loi &rivit une lettre dans laquelleil le preilai t SOUS Sa protection lui et sa famille, jura et davoir. pendantIexpMilion ,% u soirs particulier des cabrisas du comte et de leur patri-moine. En rit il les adoptait. Voir cette lettre: Episi. Iii uor.. IIIT. X!. Corse. gosier.

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56 HISTOIRE DE JEANNE,

Quoi qu'il en soit, Bouchard tint tête à l'orage. Enfermé entreles hautes tours du château d'Etrœungi, il ne parut pas ébranlé(le ce premier coup de foudre. Le second ne se fit pas long-temps attendre. 1-Ionoriusill, successeurd'Innocenvqui venaitde mourir,fulmina le 17juillet 1217, une nouvelle bulle, plusénergique, plus significative encoreque la première. Jl ydisait:

- u Plût à Dieu que Bouchard d'Avesnes, cet apostat per-fide et impudique, se voyant frappé, en conçût de la dou-

• leur, et que brisé de contrition il acceptât humblement la• correction ecclésiastique; ainsi le châti ment luirendrait l'in-• telligence, l'ignominie qui souillait sa face viendraità cesser;• le saint ministère ne serait plus en lui sujet à l'opprobre etn l'on ne verrait plus le visage d'un clerc couvert de confu-• sion Bouchard enfin n'aurait plus à craindre le reproche• ét la parole de tous ceux qui l'abordent. Tandis qu'au• contraire le caractère clérical est blasphémé en lui parmi• les nations et que vous-mêmes, mes frères, encourez lac-j) cusation de négligence.... Mais, bien que suivant ce quen nous a fait dire la comtesse sus-mentionnée (Jeanne), vous• ayez fait promulguer l'excommunication du sus-nommé• Bouchard, comme vous n'avez pas pleinement exécuté no-

• Ire mandat apostolique en d'autres points non moins né-• cessaires, ledit ilouchard n'a eu garde de se tourner vers• celui qui l'a frappé et na point invoqué le Dieu des armées.n Bien loin de là, cettetéte de fer , ce front d'airain ne s'estn ému ni de la crainte de Dieu, ni de la crainte des hommesn et n'a donné aucun signe de repentir. Ladite comtesse,

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COMTESSE DE FLANDRE. ùl

• toujours accablée de douleur et pénétrée de confusion,

• n'a donc pu jusqu'à présent recouvrer la soeur qui lui• est ravie. Ainsi, voulant atteindre par un chàtiment plus

• Brave celui qui ne s'est point laissé pénétrer par la com-• ponction 1 nous mandons expressément à votre Paternité

• que, suivant l'ordre de notre prédécesseur, vous ayez à

• procéder contre l'apostat susdit, nonobstant tout obstacle

• d'appel, de Façon à faire voir que vous avez de tels forfaits

• en abomination, et que la comtesse sus-nominée n'ayant

• plus à renouveler ses plaintes, nous puisions rendre bon

• témoignage de votre droiture et de votre zèle. Donné à

• Agnani le 16 des kalendes d'aoM, l'an premier de notrepontificai. n (17juillet 1217).

Cette excommunication n'eut pas plus d'effet que la pre-mière. Marguerite, de son côté, ignorait-elle la position de

Bouchard? flouchard la tenait-il dans une retraite tellement

impénétrable qu'elle ne devait rien savoir de cc que chacunsavait? Non, • elle connaissait tout, et malgré tout, elle restait

unie par les liens d'une affection puissante à celui qu'elle nePouvait plus nommer son. mari, mais qu'elle aimait toujours.

Cette pensée soutenaitijouchard dans l'adversité; ellele for-tifiait surtout dans la lutte terrible qu'il avait engagée contreles hommes et Dieu. Marguerite, en un mot, s'était faite sa

complice. Quand le juste courroux de la comtesse Jeanne et

les fureurs d'un peuple indigné le forcèrent enfin à s'expatrier,

onlevitencoj-e ferjucet courageux surla terre étrangère, trai-

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58 HISTOIRE DE JEANNE,

ner avec son existence (le proscrit, le lien fatal qui l'enchanaitau monde sa femme et ses enfants.

Tantôt il vivait dans une pros1nce, tantôt dans une autre;au fond de quelque retraite que lui ouvrait furtivement la maingénéreuse d'un ami. L'excommunié avait encore des amis 1 Ise trouva même des prêtres assez audacieux pour dire la messeà l'intention de Bbuchard et de sa famille. Il parcourut de lasorte, pendant trois ans, les diocèses de Laon, de Cambraiet de Liège.

La papauté, devant qui les empereurs et les rois humi-liaient leurs fronts, ne pouvait vaincre l'obstination d'un

sous - diacre. Cependant une troisième excommunicationplus violente que ne l'avaient été les deux autres, est fulmi-née par Honorius. Cette fois, ce n'est plus Ilouchard seul quiest frappé; c'est son frère Gui d'Avesnes, ce sont ses amisWaleran et Thierri de Hufalize et les autres qui ont donnéasile à l'apostat, ce sont les prêtres qui ont prié pour lui, c'estMarguerite enfin qu'atteindra l'exeommuniation, si Boucliardn'est pas laissé dans l'isolement comme tin lépreux.

« Honorius ,etc... Pourquoi la bonté divine n'a-t-elle pas• permis que le méchant apostai Bouchard d'Avesnes se ré-• veillât et ouvrît enfin les yeux pour reconnaître son iniquité• et apercevoir les immondices dont il est souillé depuis lii» plante des pieds jusqu'au sommet de la tête, et que,» de l'abîme boueux ù il est enfoncé, il poussât un crin vers le seigneur pour obtenir d'être retiré clé cet étang

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COMTESSE DE FLANDRE. 59

• de misères et de la fange d'impureté où il est retenu".....• Mais non, nous, le disons avec douleur, le coeur de cet• homme est endurci. Il 5o corrompt et se putréfie de plus• en plus dans son fumier connue une bête de somme, il• élève la tête, et comme l'aspic qui n'entend pas, il se hou-• cite les oreilles pour ne point écouter nos corrections et• écarter de lui les remontrances qui devraient le retirer de• l'iniquité. Aussi le misérable bit-il craindre avec raison• d'encourir tout à la fois l'exécration de Dieu et des hommes,• c'est. à-dire les chûtiments temporels d'une part et les peines• éternelles de l'autre. Nous rougirions de rappeler encore• ici les forfaits que l'apostat susdit a commis impudemment• envers noble femme, notre très-chère fille en Jésus-Christ• Jeanne, comtesse de Flandre, etc.,., Mais comme nobles• hommes waleran , Thierri de i'Iufalize et d'autres encore• des diocèses de. Laon, de Cambrai et de Liège favorisent• le même apostat excommunié et gardent les receptacles• où est détenue ladite Marguerite, et qu'en outre, noble• homme, Gui d'Avesnes, frère Germain du même apostat,• et quelques autres avec lui, le maintiennent de toutes• leurs forces , et qu'enfin il s'est trouvé des prêtres assez• audacieux pour célébrer témérairement les divins offices• au mépris de l'interdit dans les lieux où la susdite Margue-• rite est détenue captive, etc.... Nous mandons apostolique -• ment à votre discrétion de publier, etc. (la formule dcx-• communication comme ci-dessus)... et s'il est trouvé que• ladite Marguerite,s'étant rendue complice d'une si grande

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60 HISTOIRE DE JEANNE,

» iniquité, ne. s'est. point séparée de- son séducteur, quelle

» soit aussi nommément excommuniée , • nonobstant tout ap-

II ,jusqu'à récipiscence ,•ete.—flonné à Rome le VIII des'

II kalendes de mai , l'an •troisième de notre pontificat

» (21. avril 1219). » I

L'ange rebelle resta debout et impassible. Sourd aux

prières, aux larmes, aux menaces de la comtesse Jeanne

qui ne cessa point tic lui redemander sa soeur A grands cris,

sourd aux anathêmes du pape, à la malédiction des peuples,

bravant tout à la fois et le ciel et la terre, Bouchard Garda

long-temps encore près de lui la fille de l'empereur Bau

(loin. 2 Marguerite lui donna mne un nouvel enfant durant

celle union maudite. C'était une fille. Bouchard la fit nom-

mer FELICIflS cruelle et amère allusion aux circonstances.

au milieu desquelles elle naquit!

Cette bulle et celles dont nous avons donné ci-dessus la traduc-tion , sent conservées aux archives générales b Mile (Chambre descomptes).

2 On garde at,: Archives générales a Lille, n" acte de 1222, oisMarguerite Jeune encore à tlouchard li, jure d'époux: suantes suais,.(s. Lr GACTULAIIIC 0E I]ATNJtU'l' , JJiéCC 14).

fluuèlsard eut trois enfants de Marguerite de Constantinople:Jean d'Avesnc,, qui mourut la veille de Noël 5257 u.' Bauduin

d Avcsnes, seigneur de Beaumont , mort on 3259; 3.' Félicitas d'Aves-ses, laquelle trépassa )'an s 262. Les deux premiers furent enterrés aumillet, du coeur de l'église du cous'eut des Frères Préclieurs Ait de.Saint-Paul , ii Valenciennes. Leur soeur Felici tas, reçus t sa sépultureau mou suer de le Tare. D'Outremau ra p porte tout as long les épila-plies dola maison d'A vesiies , lcsqu e!, de sois I ciiips existaient encore..Voir son IIistoi,'c de Va tcssrir,sne, 436.

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I -'-

COMTESSE DE FLANDRE. 01

Le dénouement de cette déplorable histoire approchàit. Il

est fort simple. Abaiidonnô de tous, Bouchard ne tarda pas

à l'être de Marguerite elle-mémo et resta seul au monde. La

soeur de Jeanne épousa en 1225 Guillaume de Dampierre. u

L'on raconte que, peu de jours avant cette union, l'excom-

munié écrivit à celle qu'il avait hélas! trop aimée. Est-il

possible, comme le dit un historien, 2 que Marguerite ait eu le

courage de lui répondre: ((Sire, laissez-moi en paix et boso-

n gnez de dire vos heures? n

Bouchard vécut long-temps encore. Il est probable que par

la suite il rentra en grâce devant Dieu et devant les hommes.

Dans tous les cas, la comtesse Jeanne lui pardonna et l'on

ne songea plus trop Û lui. Nonobstant les fables qu'on fit

courir sur le trépas de Bouchard, il parait aujourd'hui cer-tain qu'il mourut naturellement dans son lit, au château

d'Etrœungt vers 1240 et fut enterré à Cerfontaine, près de

l'ancienne abbaye de Montreuil-les-Dames, sur les confins de

la Thiérache et du Hainaut.

Si prist Guillaume de Daaspïère.Mais de en hi partot blasméeQuar Boucars l'avo'st moli arnée.--

- Ph. Mousées, 229d.Guillaume de Dampierre était le deuxième fils de Cri II de Dam-

pierre, et de Mathilde , héritière de Bourbon.

2 Bu zelin, si j'ai bonne mémoire.

3Davantage Cille Ansel Yalentieiinois et Scoluier Beaumontoistous deux grands généalogistes, cl par conséquent obligés à fureterles archives, tant des monastères, que des seigneurs et genlils-lsomnies

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HISTOIRE DE JEANNE.

Ainsi disparut insensiblement de la scène politique cettesombre figure d'apostat.Bouchard avait été populaire danssontemps, mais le sentiment qui le fit réprouver l'était bien da-vantage encore. Un homme n'est rien devant un principe.

tics Pays-Bas, asseurent qu'il mourut de sa mort naturelle: et disentd'avoir yen le testament, CL diverses ordonnances faites par BouchardP ei] devant sa mort, nu village &Esiroen-Cauchie qui cstoit à luy.Il gist i clesfoniaine , une lieue de, In Veroniquc, ou de Moostiœul-les-Dames. D'OuvnEM&rç ilisi. de Valenciennes, 140,

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Du gouvernement de .Teanne et de quelques particularités.

A part l'événement que nous venons do raconter, les dixpremières années'qui s'écoulèrent depuis la bataille de flou-vines et la captivité du comte Fernand n'offrent rien de biensaillant. Cette période de l'histoire de Jeanne ne fut plusguèressignalée que par des incidents politiques. Il esttoutefoisnécessaire d'effleurer ces particularités, afin de ne pas laissers'interrompre la chaîne des temps, la succession des idées,afin aussi que rien ne reste en arrière de ce qui peut servir âfixer l'opinion sur une des femmes assurément les plus remar-quables du moyen-ge.

Un mot d'abord sur le gouvernement intérieur du pays.

L

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64 HISTOIRE DE JEANNE,

S'il est permis de nous servir d'une distinction d'hier pourformuler une pensée qui se reporte au-delà de six siècles,nous dirons que Jeanne régnait mais ne gouvernait pas; dumoins elle ne gouvernait pas seule.

En Flandre et en Hainaut, plus que partout ailleurs à cetteépoque, l'heureuse fusion du principe municipal avec le système féodal avait produit une administration libérale et forte.C'étaitcomme une grandefamiue. La comtesse avait son bailli,sorte de ministre responsable, représentant ordinaire du sou-verain dans toute espèce de juridiction, puis un conseild'hommes sages qu'elle consultait quand il s'agissait d'un actepolitique quelconque. La cour suprême féodale, formée deshauts baronîs des deux comtés, statuait sur les affaires d'admi-nistration générale, en prenant toutefois l'adhésion des éche-vins des principales villes dont l'assemblée portait le nom..d'échevins de Flandre et de Hainaut. Ces états aidaient lacomtesse et la dirigeaient souvent en ses résolutions. MaisJeanne, on en trouve quelquefois la preuve, conservait sureux une très haute influence qu'elle puisait dans la sagaciténaturelle de son esprit, dans sa- fermeté, dans l'exemplaireaustérité de sa vie publique et privée.

On en trouve la preuve dans une charte de IQ t6: Per consiliumdilectorum meorum Walteri (le Avesuis • \Vatteri de SomergbemSigeri de l\Ioscrou , Pliilippi d'Eenan. o En 1234 , Pendant son von-vag , on ta voit encore consulter Arnoiit dAiideiiaerde et Waller deFormesolle , au .s sujet des droits et prérogativesaecorder auskr et pan ii cher héréditaire de Flandre, Jean de Bellengliien. Voirces actes aux Pièces Justificatives ci

•1

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COMTESSE DE FLANDRE. or,

C'était sur ces bases soudés que reposait la nationalité fla-mande; aussi resta-t-elle debout après ledésastre deBouvines.Cependant, ne semblait-il pas alors que Philippc-Aug,ustcn'avaitjlus, pour se rendre maître de la Flandre, qu'à étendrelà main sur ce pays qui lui avait coûté tant de sang et d'argent.Sans doute il eu rêva souvent la conquête. Oui, niais aussi,d'un autre côté, Philippe apprit, s'il ne le savait pas, qu'on nes'empare point d'une nation comme on prend un homme aumilieu d'une bataille. L'homme s'enlève '; on le met cri prisonquand il est vaincu. La nation reste vivace sur le sol qui laporte; elle s'y attache avec force et dit au co!quérànt : En-lève-nous si tu l'oses et si tu peux! » Le conquérant recule- à moins qu'il ne s'appelle Louis XIV.

Une fois le pays en paix , Jeanne , comme nous l'avons vu,ne le fut pas encore. De nombreux soucis l'accablaient , enpremière ligne desquels il faut compter la scandaleuse obsti-nation deflouchard, et en dernière, sans doute, le trépas dela reine Mathilde qui ,se promenant en chariot, pour sonagrément, le long d'un marais aux environs de Furniis, péritétouffée sous cette voiture qu'un maladroit valet fit verserdans la boue. a Cette femme joua toujours de malheur. Onse rap$lîe que c'est elle qui fit un comte de Flandre du por-tugai Fernand, et maria la seconde des filles do l'empereurau chanoine Bouehard. il est probable qu'elle avait aussi

On sait que Louis Mv lit la conquête de la Flandre en t(i67.2 Cet v*nement arriva 1c G mars 1219.

5

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66 HISTOIRE DE JEANNE,

trempé dans la ligue fatale qui amena Bouvines. Après lamort de cette princesse, toute la Flandre Gallicane, qui étaitson douaire, retourna à la comtesse Jeanne.

Au milieu des graves préoccupations du pouvoir, la com-tesse de Flandre n'oublia jamais un seul instant qu'elle avait,

- comme-épouse, un grand devoir à remplir; et elle le remplittant que dura la captivité de Fernand. Chaque année, sans selaisser décourager par les refus si nettement exprimés du !°de France, elle faisait di, nouvelles tentatives pour tirer soumari de la tour du Louvre. Elle employa d'abord l'ntrcmisÔdit ifonorins, puis celle du cardinal-légat, puis enfincelle des évêques de Cambrai, de Tournai et de Térouane; cefut toujours en vain. Chaque fois, les négociateurs trouvèrentPhilippe inébranlable. ' En 1220, Jeanne n'avait pas perdu

- toute espérance elle travaillait encore à la délivrance deFernand, comme le prouvent des actes reposant aux archives

- Générales de Flandre, à Lille. L'année suivante, les chanoinesde Saint-Pierre de Lille, ouvrant leur coffre-fort ,lui offraientpontanément et en don, trois cents livres monnaie de Flan-

dre,poui' lui venir en aide, et elle empruntait. aux Juifs, à

des (auxénormes, mie somme de plus de 29,000 livres, des-tinée égalementà la rançon de son mari. L'acte de cet empruntest trop significatif pour ne pas trouver place ici.:

• Voyez , sur les ten ta tivS réitérées que fit Jeanne pour tirer soislu ri de prison , Jacques dc O Li ise , M eyer , O udegliurst , Ferri deLouves , wartikoetsig

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COMTESSE DE FLANDItE. 67

« Moi, Jeanne, comtesse de Flandre et de Hainaut, à tousceux qui verront les présentes lettres, je fais savoir que j'aireçu pour la mise en liberté de mon très-cher époux Fernand,comte do Flandre et de ilainaut, qui était retenu en prisonpar mon seigneur le roi de France, en mort et en celuide maudit époux, do marchands Siennois, Romains et autres,savoir, de Cortebragne et de ses associés, onze mille et qua-rantè livres,qui leur vaudront treize mille et quarante livres;d'Hubert de ChÛteau-Neuf, trois-mille et quarante-huit livres,qui lui produiront quatre mille livres; de Jean le Juif, troismille livres, qui lui vaudront trois mille cinq cent trente-sixlivres et cinq sous; de Grégoire Alexis et de ses associés,cinq mille et cent six livres, dont il aura six mille livres; deBarthélemi, sept mille livres, dont il aura huit mille cin-quante livres. Pour ces divers engagements, les créanciersont aussi des lettres de ma très-chère dame et amie l'illustreBlanche, comtesse do Troyes, et de son fils Thibaut, comtede Champagne. Ladite comtesse et ledit comte de Champagne,aux instances de mon époux et aux miennes, de notre volontéet consentement, ont fait leur promesse auxdits créanciers etleur en ont donné des lettres-patentes. Quoi ,par hasardlesdites sommes n'étaient pas entièrement payées aux termesfixés, alors ladite comtesse et le comte de Champagne, û laréquisition de ces mêmes créanciers, interdiraient leurs mar-chés à tous les marchands et bourgeois de notre territoire, et,tant dans ces marchés qu'au-dehors, prendraient et saisi-raient les effets et les corps des bourgeois et marchands de

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Mm

68 hISTOiRE DE JEANNE,

notre territoire, partout où ils les trouveraient, soit dans leur

territoire, soit ailleurs, et les retiendraient jusqu'à ce que

lesdits créanciers fussent pleinement satisfaits de tout ce qui

leur sera dû; les frais en sus. Moi donc, et mon dit mari

avons obligé et engagé tant nos 'personnes que tous nos biens

présents et 4 venir, à ladite comtesse et audit comte. Si, à

l'occasion du présent emprunt , ils venaient à éprouver

quel4de dommage, ou s'ils étaient forcés de faire quelque

dépense p6ur la mise en liberté de notre dit époux; nous leur

cii feriéns pleine restitution, et, sur leur parole, nous, lesdédommagerions de tout ce qu'ils auraient perdu ou dé-

pensé. ..-.

» En toi de quoi j'ai fait dresser les présentes lettres et les

ai munies de mou sceau, l'an de l'incarnation de Notre-Sei-

gneurt221. »

Ainsi', Jeanne concluait un marché ruineux , se livrait

corps et biens, tout cela sans résultats. Mais elle ne se décou-

rageait pas.

Cette activité que Jeanne apportait à l'exécution d'un

projet, à la réalisation d'une pensée, celte sorte de ténacité

avec laquelle elle marchait droit au but, sans s'effrayer des

obstacles, cette courageuse persévérance enfin, qui ne lui

faillit jamais dans les grandes circonstances , est l'un des

traits les plus significatifs du caractère de la comtesse de

Flandre.

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I

COMTESSE DE FLANDRE. no

Soit qu'il s'agisse d'administration intérieure, soit qu'ils:agisse d'affaires diplomatiques, on ne la trouve jamais audessous de sa position. En voici la preuve. On sait que lescomtes de Flandre n'étaient pas seulement grands vassaux etpairs du royaume de France; niais qu'ils relevaient aussi,

Pour certaines-portions de pays , de l'empereur d'Allemagne.Il parait qu'au milieu des préoccupations pénibles dont elleavait toujours été entourée, Jeanne négligea de prêter foi ethommage à l'empereur, ainsi que le faisaient tous les comtes deFlandre. Fréderic Il s'en fâcha, et en 1218, dans une diètesolennelle à Francfort, confisqua la Flandre impériale, ni plusni moins. C'était une très grave affaireen ce qu'elle devait, unjour ou l'autre, rallumer la guerre en Flandre. Effectivement,l'empereur avait concédé les parties qui tenaient de l'empireà Guillaume, comte de hollande. A chaque instant, ce dernierpouvait chercher à prendre possession des nouveaux domainesqu'on venait de lui octroyer. Il n'y eût certes pas manqué, sisa puissance eût égalé sa bonne volônté; niais c'est une fortune

'cluil neut jamais qu'en imagination, grâce à l'adresse queleanne déploya dans cette circonstance délicate. Elle négociaavec tant d'habileté, qu'en définitive la chose tourna inéine àson profit. Deux ans ne s'étaient pas écoulés que l'empereurannulait la confiscation , en reconnaissant que les cheminsétaient trop périlleux pour que la jeune femme ait pu serendre en Allemagne pendant la capti vi té de son mari,qu'ainsi elle était excusable de n'avoir point fait soit

etc. [année suivante, en 1221 , son fils fleuri VII

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I

70 HISTOIRE DE JEANNE,

faisait plus encore. En déclarant (le nouveau rapportée lasentence de 1218, en confirmant la comtesse dans la posses-sion des fiefs impériaux, il forçait le comte de Hollande àsubir et à reconnaUre derechef sa dépendance de la Flandre.De sorte que, de suzerain qu'on l'avait fait, Guillaume re-tomba vassal de la comtesse, et plus vassal que jamais.

Une pensée prédomine dans toute la conduite politique (leJeannerclativeau gouvernement de ses domaines: celle d'ac-crottre le pouvoir municipal et par là de contrebalancer l'in-fluence des hauts barons qui commençait à se montrer me-naçante. Il y avait surtout une classe de seigneurs fort àcraindre; c'étaient les châtelains, dont la puissance devenaittrès dangereuse et pour le peuple et pour le souverain. Sans -parler des violences et des rapines qu'on leur avait reprochéesde tout temps, ils avaient trouvé moyen de s'affranchirtellement de la domination ducomte lui-même, qu'à la bataillede Bouvines, on en vit combattre, sans plus de gêne, parmiles chevaliers de l'armée française. Les châtellenies formaientautant de petits états dans l'état. Gémit là un grand mal et ily avait urgence d'y remédier. Jeanne le comprit et mit tout enoeuvre pour atteindre ce but. Si ellene parvint pas tout-à-faità ané-an tir l'influence des châtelains, on doit dire, àsalouange,

Consullezà ce sujet k Sj icitegiuna DACJIEBV , li, 2 iS. - Mii1Œus,111 • 15 et IV . bio. - BEAUCOIJRT, Iaer&oe!:cn van' t Vrye, 111, 76.--Mnynn, annaL id afl. i i48. —DOM BouQuEt, IX, 528 et X,

[fin, de t, Ft,ndre • Il, 136. - RÀu'sAn, éd. de 1859,1V, 403. -

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COMTESSE ))E FLÂNDJIE. 71

quelle l'amoindrit beaucoup. En 1218, elle donnait à la ville

deSeclin la même charte d'affranchissement dontjouissait déjà

la ville de Lille, charte très sage et très libérale qui devait sin-

gulièrement atténuer l'importance du châtelain de cette der-

nière ville; et, en même temps, elle négociait avec le connéta-

ble deFlandre,Michel de Harnes, l'échange de lachâtelleniede

Cassel. Un peu plus tard, en 122%, elldse fit vendre par Jean

de Nesle, pour 23,5 ' 5 livres parisis, la chtellenie de Bruges,

l'une des plus considérables de Flandre. La comtesse eut

même à ce sujet, avec Jean de Nesle, un procès fameux qui

fut vidé à Paris devant la cour des pairs du royaume, Jeanne

ne pouvant être jugée quepar cette cour, en vertu des lois de

la hiérarchie fsodale.'

La comtesse de Flandre apportait dans sa lutte contre les

châtelains beaucoup d'adresse et, ait beaucoup de

courage etde résolution. On prétend que, lors de ses démêlés

avec Jean de Nesle , l'obstination était devenue si grande

de part et d'autre que la comtesse, dans, un moment d'exal-

tation chevaleresque, ne craignit pas d'eiivoyer un défi à

outrance à son vassal. Lrsque son procès fut gagné contre

le châtelain , elle institua à Bruges la fête du Forestier, desti-

née à perpétuer le souvenir d'un événement qui consacrait

• Les comtes de Flandre ne pouvaient être tradoils devant lacour clos pairs de Franec que pour défaut do droit ou dêni de justice(jans sas deneg(tla justiosa) , et les jugements rendus par eux et leursbarons ne pouvaieni être défârés à la connaissance de cette cour quecomme faux jugements rendus par malice, Corruption, vengeance oupartialité.. - \YAnrozwNro , Jïist. de la .F(andrc, U,

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72 HISTOIRE DE JEANNE,

l'affranchissement de cettebelle cité. Laprospérité de Brue.s,comme celle des principales villes flamandes du reste , neprit le développement prodigieux qu'on sait qu'à partir de ladisparition des châtelains, ou du jour que ces petits despotesfurent mis dans l'impuissance d'exercer la tyrannie et desoppressions de toute nature.

Ainsi, en même temps qu'elle travaillait à l'affaiblissementde l'aristocratie ,la comtesse de Flandre augmentait le bien-être du peuple. Les droits politiques d'un grand nombre decommune dans les deux comtés avaient été consacrés et.reconnus par ses prédécesseurs ou par elle. Elle ne s'en tintpas là elle voulut aussi favoriser de tout son pouvoirle commerce et l'industrie. -

En mai 1223 , Jeanne confirme le privilége que Phi-lippe , comte de Flandre et de Vermandois , son grandoncle , avait accordé à l'abbaye de Saint-Bertin d'établirun marché à Poperingue et dy faire construire un canal.Dans tannée 122 , on la voit affranchir de toutes char-ges , tailles et exactions , les cinquante ouvriers quiviendront s'établir à Courtrai pour y travailler la lainede sorte qti'on peut dire que c'est à Jeanne (lue les -fabriques de celle ville doivent, sinon leur . naissance,

J3a tiduin 111, dii IL jeune, I abi iL des marchés 14 Bruges ,I -ni. lima ou t. Cassel, et alti, à ! Ypres, h Gand,, à Bruges et et'(1110 lies vlIIe4 des lissera nds rie loue et dé o fies rie lai ne , vers Vannée958.— \!fl,gq,jç Il , iS-.

A

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COMTESSE DE FLANDRE. 73

du moins les premiers éléments de leu ,r incroyable pros-

périté.

Sous aucun point de vue et même dans les choses intellec-

tuelles , Jeanne ne se laissa devancer par nul des princes ses

contemporains. 2 La langue française, cet idiome devenu,

Voyez sur ]e développement du commerce et de l'industrie enlance au )(ffl ' siècle, cc que disent RAF,psAcr. Analyse de l'origine clles progrès des droits des Belges et Gaulois éd. de 1859 Y. Sg.WRNKNIG , tisse. de tri Flandre, (t , 179.

2 ' A l'ouverture du XIII. • siècle ]es daines gouvernantes de litFlandre reparaissent comme protectrices déclarées des Trouvères.Marie de Champagne, femme de Bauduin IX, dit de Constautitaople,vomie de Flandre , morte de la peste, à Acre, en 1204, choisit elle.même le sujet do second roman du nom de Lancelot, qu'on appelleLancelot de la Charette elle l'a rai t ti 'é d'uts incident de Lancelot duLac, Ce poème, commencé par Cliresiien de Ti'oycs et terminé parGodefroy deLigny, , est dédié à la comtesse de Flaudrequi cil avaitfait l'évocation.

Sot, mari, Fillustre la uduin tIc Consta nti impie . avant même qu'ilfut comte de Flandre et de Fiaina u , s'exerçait dans les joutes li (té rai-tes, et composa , chose fout bizar re pour un lionsme du Nord, desvers en langue provençale.

Leur fille alitée, la comtesse Jeanne. unit l'amour dcsvers à celuide l'humanité; elle encouragea ii la fuis les 'trouvères et fonda h Lilleun (ici, d'asile qu'on appelle encore l'Flôpital-cointesse. CeLle princesseStante des comtes Guillaume et Gui, auxquels elle inspira aussi le goûtde la poésie, reçut entre les années 1208-1250. une dédicace dutrouvère Manessier qui. peut-être, est né dans lins provinces , cc quiacheva le roman de Perceval, commencé par Chresiien de 'l'royes.11 dit en finissant

Si coin le LéôioigiieLui a fin Irait ceste bcsoiguseLI flou JimAron, la contesseQ ni esideFlandres dame et maitressc.Et par ce que tout je aprisDe ses hunes snoui's à délivre,

-Ai en son nom flué mon livre. -Enfui , l'amour de la poésie était tellemen t i ncrus tée, FIa ndre. à

cette époque du commencement dit siècle, qu'un ehétela'm (le

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74 HISTOIRE DE JEANNE,

pour ainsi dire, aujourd'hui, l'idiome européen, ne faisait

que de naître. On la parlait bien parmi le peuple, parmi les

grands: elle servait bien aux poètes pour leurs fabliaux et

1)O Ur leurs chansons de gestes: quelques chroniqueurs s'é-

taient même aventurés jusqu'à écrire l'histoire dans cette

lanèue qui ne s'appelait encore que la tangue romane. Mais

long-temps incertaine dans son vocabulaire comme dans sa

syntaxe, elle inspirait peu de confiance àla cent méticuleuse et

formaliste deslioinrne d'affaires, etpersonneencoren'avait osé

s'en servir pour la rédaction des actes authentiques. La chan-

cellerie française n'écrivait qu'en latin, et durant les quinze

premières années du règne de Louis JX, cc roi si français,

ni ses ministres ni lui ne s'avisèrent d'employer l'idiome de

Ville-iFlardouin et de Joinville. manne fut plus hardie. On a

Lille , Rogier III. • du nom, cliételain , mort vers 1229, se donnaaussi le plaisir, comme les comtes et comtesses de Flandre, (et peut-êtrele lit-il par esprit de Cou rt ;sa iserie) , rie commander une chronique Cilvers à un Trouvère dont IL nom n'est pas parvenu jnsquà nous, maisqui se donne comme vassal du elsêtelain de Lille. Voici comment aldéclare son instigateur

Qu'en pensesoy Conterà plais,Per qu'il plaise 1c KasictainDe ('Isic, Ilogier, , mon selguorGui Dieu doint santé et lionor.

• Les neveux 0e la comtesse Jeanne, dont nous avons parlé pinshaut, Gui et Guillaume de Dampierre, suivirent les mêmes errementsque leurtante. Le comte Gui avait plusieurs poètes ii sa cour, qui l'ac.compagnaient partout ou n " u ci-devant quelle Sait sa générosité,envers tes jongleurs et ménestrels. Le comte Guillaume rie Dampierreétait la vraie fleur de chevalerie. Il est aujourd'hui constant que lesjolies fables de Marie de France ont été traduites de l'anglais pourlui. • AnTaun D,xAur. Trouvères jongkurs et naeucsf rets du Nord dcta Fren,rc et du Midi de ta Be(gique.67.

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COMTESSE DE FLANDRE. 75

démontré dernièrement que le plus ancien acte original, connu

pour avoir été rédigé en français: est une charte passée

entre la comtesse de Flandre et Mahaut , dame de Tenre-

monde, à Courtrai, en 1221 , le lendemain de la Madeleine.

Chose bizarre! Courtrai, ville flamande s'il en fut jamais,

voyait déjà traiter les affaires publiques en français, lorsqu'à

Paris on en était encore au pi'otocoie latin. Ainsi c'est en

Flandre et par la volonté de Jeanne, conforme en cela sans

doute au voeu populaire, que le français est devenu une

langue officielle.

Voyez les Recherches sur (es premiers actes publies , rédigés cnfrançais, par lU. Le Clay, nieR père. lu-8.' Lille, 1837.

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VI,

Comment un ermite se fit passer pour le eoniie Bandun-et comment son, imposture fut dévoilée.

La paix et la tranquillité régnaient dans le pays. La coin-tosse Jeanne semblait n'avoir plus à redouter pour long-tempsles vicissitudes qu'elle avait subies depuis son enfance, quandarriva vers 1224 un événement merveilleux qui produisit par-tout une grande sensation et faillit causer une révolutioncomplète en Flandre et en Hainaut. Ce fut la plus rude maisheureusement la dernière épreuvé réservée parla Providence

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78 hISTOIRE DE JEANNE,

à la fille de Bauduin IX. Nous avons fait plus haut allusion àcette aventure. 8h cause et ses effets sont trop singuliers pourn'Gtre pas ici racontés en détail, inutile d'ajouter que nousresterons dans les bornes tIc la plus stricte véracité historique. C'est aux écrivains contemporains et dignes de foi seulsque nous empruntons toutes les circonstances qu'on va lire.

En l'année 1215 ou environ, parurcntpour lapreniièrefois,en ilainaut, dans la ville de Valenciennes, des frères mineursde l'ordre de Saint-François. On n'y rit pas d'abord grandeattention; mais bientôt la vie mystique et pleine d'austéritéde ces religieux attira sureux l'admiration naïve des peuples.On eût dit que ces hommes étaient d'un autre siècle, tant on

-les voyait s'efforcer i tenir constamment tendus vers les -choses du Ciel leur esprit et leurs yeux. A peine prenaiênt-

Jacques de Guise , surtout , qui rapporte cet épisode avec nueprécision et une véracité telles, qu'on croirait qu'un témoin oculaire lelui n ra cois t é. -Aux perso n nos f1iii me trouve ra te et trop hardi d'avoirinséré des coUD qiies da "s CO récit, je répondrai avec un illustre lus.lor',en: • [as une (les Opinions I:Xpt)luéCs sur les hommes ou sur les• faits, n'est tirée d'ailleurs que des sources où j'ai puisé. A pins forte• miaou , j'ai dû miii terdire de supposer les discours directs. Tout es• les fois Elle je les ai Li'o,ivés dans les écrivains contemporains et• qu'ils ont pu venir naturellement flans IC récit, j'ai saisi avec cm-

pressewent cc moyeu dramatique de faire connaltro le earaetùre• des Personnages et l'espi'it du temps. Ilieh , mssuu'énaejat n'a Plus(le• cii armez toutefois, le langage simple que j'ai adopté, I absence

complète de tout artifice de rhéteur, tint recominandéta par Quin't ilicia -, et , ce me semble , par le bon goût , ne inc permettaientrie', de plus que de copier cli ceci les clam-ami iquen rs do tem p s P assé -Je sais bien qu'iLs rapportentt , sans dame, des discours et des con-versaliolas qui ii « oiit pas été réellement tenus; niais, racontés par

n eux , ils lieu portent pas môtos l'empreinte de l 'époque dont je vou-lais donner Vidée. ' ils ilsm,Aare , lfist. des tIlles de Bourgmigmma

introduction.

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COMTESSE DE FLAN1MIE. 70

ils la nourriture nécessaire à leur existence. Presque jamaisils ne mangeaient d'aliments cuits, et quand ils en fesaientusage., ils y mêlaient de la cendre pour les rendre amers, oules délayaient dans l'eau afin de leur ôter toute saveur. Laterre nue servait de lit à leurs corps fatigués. Une pierre oudu bois leur tenait lieu «oreiller. Leurs membres amaigrisétaient couverts à peine d'une étoffe rude et grossière. Sanscesse en prière, ils ne travaillaient que tout juste ce qu'il fat-fait pour subvenir à leurs besoins, et c'était aux plus humblescomme aux plus utiles travaux qu'alors ils s'adonnaient. Lesuns fesaient des nattes, des paniers, des corbeilles; les au-tres de la toile; quelques-uns écrivaient ou reliaient ces liVresque nous admirons aujourd'hui comme les chefs-d'oeuvred'une patieice surhumaine. Quels étaient donc ces saints per-sonnages? D'où venaient-ils? Les populations émues de leurprésence, édifiées de leur exemple, auraient bien vouilti pé-nétrer le mystère dont s'entourait leur humble et silencieuseexistence. On se livrait à toute espèce de conjecturesà ce sujet,quand un incident vint trahir le secret des frères mineurs.

L'ait comme l'on posait les fondements du beffroiau coin du marché, en la ville de Valenciennes, le sire deMateren, gouverneur de ladite ville pour la 'comtesse Jeanne,s'en vint assister à cette opération. Il était là regardant faireles' maçons et architectes, quand il aperçut devant lui unfrère mineurdemandanthuinblement l'aumône parmi la foule.

Cet homme, dit-il aux gens de sa suite, me parait d'uneélégante et belle stature son geste est noble et grave, niais

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80 hISTOIRE DE JEANNE,

• quel vêtement déguenillé Comme tout cela est bizarre,• misérable! Qu'on l'appelle et festins lui l'aumône. n

Le frère s'approcha du gouverneur, et l'ayant considéré avecattention, il se couvrit le visage de ses mains et s'éloigna aus-sitôt en disant - . Je n'accepterai point d'argent. n

On courut après lui , niais il repoussa dédaigneusement labourse qu'on lin rendait, et se hAta de regagner son couvent.

Cette conduite parut étrange au gouverneur; mille penséesdiverses traversèrent son esprit. Il s'enquit du nom de cethomme qui fuyait sa présence si brusquement. On n'en putrien lui dire, sinon qu'on le croyait Flamand, que les autresreligieux l'appelaient frère Jean le Nattier, à cause de sonadresse à tresser les nattes. Du reste, ajouta-t-on, il portesur le visage deux profondes cicatrices dont l'une descend(lu front à l'oeil droit en passant sur le sourcil et l'autre par-tage le front transversalement.

 ces mots, le gouverneur baissa la tête et demeura pensif.Rentré au logis, il envoie dire au religieux de venir incon-tinent le trouver. Mais on répond au messager que le fièrea quitté le couvent pour. se diriger vers Arras. La nuit sepasse ,et le lendemain ,,dès l'aube, le sire de Materen suivide quelques valets, chevauchait à la poursuite du religieex.Entre flouai et Arras, il rejoint le frère qui cheminait enc.ompagnied'un autre religieux de son ordre, Lotis les deuxpieds nus et couverts de Pauvres vêtements.-

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COMTESSE DE FLANDRE. 81

- « Bonjour, frères, leur dit-il en les abordant.»

- » Que la paix du seigneur soit toujours avec vous, ré-pondirent ceux-ci, et l'on marcha en s'entretenant de chosesindifférentes. Quand le Gouverneur fut assuré qu'il ne s'étaitpas trompé dans ses conjectures, il sauta à bas de son cheval,et s'approchant du religieux:

- « Seigneur iosse, lui dit-il, vous êtes mon oncle, le• frère de mon père. Dame Élizabeth, votresoeur, vit encore,• et vos deux fils ont été faits chevaliers. Pourquoi donc les• seigneurs vos compagnons d'armes nous ont-ils annoncé» votre mort en nous renvoyant votre armure, la vieille ar-» mure de votre aïeul, puisque vous voilà vivant? »

Le religieux confondu par ces paroles ne savait plus quedire. Son coeur se remplit d'amertume. Un instant il s'efforçad'échapper à cette position par des subterfuges mais sevoyant reconnu tout-à-fait, il prit la main du chevalier dansla sienne et lui dit:

- e Jurez-moi de ne jamais révéler ce que vous allezapprendre. »

Le chevalierjura.

- ((Eh bien, oui, je suis votre oncle Josso de Materen,• le même qui, jadis, comme vous le savez, partit avec• Bauduin, comte de Flandre et de Hainaut, pour la croi-• sade! »

.6

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82 HISTOIRE DE JEANNE,

Alors il se mit à raconter les principaux événements decette grande expédition. Partout et toujours il avait suivi sonuzerain depuis la Flandrejiisqu'à Venise, depuis Venise jus-

qu'au siégede Constantinople. Dans les combats, il était prèsdu comte; après les combats, il assistait aveclui au partage desdépouilles. Lors de l'électiondc llauduinù l'empire, il était làprésent, à sa confirmation encore, ,â son couronnement encore.Enfin, il avait pris part aussi à cette sanglante bataille queflauduin avait livrée aux Blactes - et -aux Comans, devantAndrinople, et dans laquelle le valeureux prince avait trouvéla mort.

Le gouverneur de Valenciennes écoutait avidement ces pré-cieux détails, et son étonnement redoubla quand le frère seprit à narrer comment les chevaliers Flamands, après avoirlong-temps combattu en Palestine, s'en allèrent avec Pèdre,roide Portugal ,frère de la reine Mathilde ,jadis comtesse deFlandre, envahir le royaume de Maroc; comment beaucoupd'entre les Croisés reçurent un glorieux martyre sur la plageafricaine; comment enfin grand nombre de barons firent voeud'entrer en religion et'y entrèrent en effet.

- cc L'infant Pèdre, fils aîné du roi de Portugal, dit lefi-ère en terminant, qui commandait l'armée des Chrétiens,jura que si Dieu lui conservait la vie sauvé et lui permettait derevoir sa patrie , il entrerait dans l'ordre des religieux de St.François. Réunis sous l'étendard du prince, nous fîmes voeude le suivre et d'adopter comme lui l'habit et la réglé de ces

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COMTESSE DE FLANDRE. sa

humbles frères. Puis ensuite nous partîmes emportant avecnous les reliques des martyrs de la foi. Grâce à elles, la tra-versée fut heureuse. Nous abordâmes en Portugal, et à notrearrivée, l'infant Pèdre raconta à la foule du peuple qui flousentourait l'histoire célèbre du martyre de ces bienheureux;après quoi nous songeâmes à la promesse que nous avionsfaite à Dieu. Rassemblés au nombre de vingt-huit chevaliersdansun petit couvent fort pauvre de frères mineurs, àLisbon-ne,nous quittâmes le monde en présence des rois d'Espagne,de Portugal, deNavarre et d'une foule de soigneurs. Chacunfondait en larmes, lorsqu'on nous entendit renoncer pourtoujours à nos armes, Û nos femmes, à nos enfants, aux hon-neurs, aux félicités du siècle. On renvoya nos bonnes armu-res à nos femmes et à nos amis charnels, car désormais nousétions torts au monde. Alors nous primes cet humble et misé-rable habit, afin d'obtenir la rémission de nos péchés. S'ilplait à Dieu , nous le conserverons jusqu'à !a mort.

Ace récit,le gouverneur, ému de pitié, dit au frère:

- « Quels sont donc les infortunés qui ont avec vousembrassé un genre de vie si bizarre, si incroyable, après leslongs tourments que vous avez soufferts chez les Sarrasins? »

- « Oli! ne les appelez pas malheureux , répondit lefrère, mais plutôt bienheureux 4 jamais, puisqu'ils ont mé-prisé la vie du monde et qu'ils obtiendront les célestes récom-penses; eux, qui ont lavé et ldveront leurs étoles dans le sangde l'agneau.

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84 HISTOIRE DE JEANNE,

- o Au moins, continua le sire de Materen, si quelquenoble chevalier de notre pays avait partagé avec vous cettetriste condition, je sotiffrirais plus patiemment l'injure quevous faites à notre sang, en prenant cet habit. »

- a Voici les noms des chevaliers de ce pays qui se sont liésavec nous pour Jésus-Christ sous le joug de la religion, etjevous dis ces noms sous la foidu sermentque vous m'avez prêté.Ceux de Flandre sont Roger de Gavre , frère de Rasse,ifenri de Neelle, Liévin d'Axelle, Wnoc d'}Iondschoote,Thierri de Pixrnude, Pierre dOdenhove et Jean, curé deZoemergheu; ceux des provinces voisines, Gautier de Rosoy,frère de Robert , Jean de Trith, frère de Regnier, Macairede Sainte-Menehould, flarthélerni, frère de Quesne de Bé-thune, Jean d'Aire et Ferri son frère, Josselin de BalehanGautier de Viesly, Baiiduin de Neuville, Guillaume de laPorcherie, Siger (le Silly, Jean de Hoves et beaucoup d'au-tres. Et moi le plus indigne de tous, je nie suis joint à ceschevaliers. Peu de jours après notre conversion, l'infantPèdrefit distribuer nos biens et tout ce que nous avions abandonné,ô. nos femmes et aux pauvres. Ensuite, à notre prière, il fitappareiller un navirequi nous transporta, mes frères et moiau port de l'Écluse en Flandre. Ainsi nous voilà disséminéset inconnus sur la terre. D'abord, moi cinquième avec lecuré de Zoemerghen, nous vînmes aux environs de Valencien-nes, où nous trouvâmes des religieux de notre ordre qui noustendirent leurs bras charitables. Parmi nos frères, plusieursont quitté la vie et Gisent ensevelis en l'église Saint-Géri; mais

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COMTESSE DE FLANDRE. 85

les plus nobles ont survécu , et s'il plaIt à Dieu , j'attendraipieusement dans leur compagnie cette mort que pendanttrente ans j'ai cherchée sur les mers, que j'ai cherchée parmiles Turcs, les Grecs et les Sarrasins. Hélas] la grandeur de niesPéchés ne m'avait pas rendu digne d'un si glorieux trépas! o

Le gouverneur écoutait en pleurant. Quand il fallut seséparer de son oncle , il le serra sur son coeur avec effusion,.et regagna pensif et silencieux la ville de Valenciennes.-

Cependant, peu de temps après, le bruit se répandit detous côtés que les chevalièrs qui avaient accompagné le comteBanduin à la croisadè, étaint revenus dans leur patrie poury vivre pauvres etinconnus, les uns sous l'habit de frères prê-cheurs, lès autres sous celui dermites mendiants. Cela fitune grande sensation. De conjectures en conjectures, le peu-ple, toujours ami du merveilleux ,tomba dans les imagina-tiôns,.Ainsi que nous l'avons dit, il n'avait jamais eu de con-fiance bien robuste dans la mort de l'empereur. Souvent,et dès les premières années de la croisade, il avait espéré voirce prince qu'il aimait tant apparaitre un beau jour parmilui.Quand on sut que ses compagnons d'armes se trouvaient enHainaut, on pensa qu'il pourrait bien être avec eux. Bientôtmême ce ne fut presque plus un doute, grâce aux perfidesinsinuations de quelques-uns de ces grands vassaux dont lacomtesse Jeanne comprimait les velléités tyranniques, et qui;pour se venger , cherchaient toutes les occasions de susciterdes embarras à leur courageuse souveraine.

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86 JIISTOILIE DE JEANNE,

• A quatte lieues de Valenciennes, et non loin de lapetite ville de iVlortagne, existe un bois qu'on appelle lebois de Glançon. Là vivait un ermite, ou pour mieux direun mendiSt que sustentait la charité publique. Un jourque cet homme parcourait les rues de Mortagne tendanth main aux passants , un baron l'aborde. Après l'avoirun instant considéré, il recule de surprise..Comme le men-diant lui en demande la raison, le baron se prosterne etlui dit: « Seigneur , je vous reconnais vous êtes bienvéritablement l'empereur )3auduin. n L'ermite est stupéfluit.Plus il cherche è se défendre d'être l'empereur-, et plus

sle chevalier paraît convaincu du contraire. Tout en fesantmille protestations, il emmène l'ermite ébahi en soit -et l'y installe en toute révérence. L'ermite alors trouve lejeu bon et se laisse faire. Bientôt de hauts personnagesarrivent à la dérobée qui le circonviennent , lui persua-dent que, s'il n'est pas l'empereur, il a du moins une telleressemblance avec Ilauduin , qu'on le peut facilementprendre pour ce prince , lui apprennent plusieurs secretsde famille, enfin le dressent au rôle qu'il doit jouer. ' Lemendiant se montre d'autant plus intelligent, qu'en sontemps il avait été jongleur , ainsi qu'on le verra par lasuite.

A Von cuide Lu bagnisLavés, tondus et roegniés.El ai'cs,nd l'oie rtQrItnic conte. -

PIt.fllou,kcs, 246/17).

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COMTESSE DE FLANDRE. 87

Entre temps, on exploite la crédulité du peuple. Ou luipersuade à Valse que l'empereur existe réellement, et qu'ilconsent enfin à sortir de l'obscurité où il avait voulu finir sesjours pour se rendre à l'amour de ses sujets fidèles. Mortagned'abord le reconnaît pour son souverain. Les populations sesoulèvent de joie. ' On allait à sa rencontre de tous côtés, etc'est avec un immense cortège qu'il se présente dans lesvillesde Tournai, de Valenciennes aide Lille, où il est reçu par accla-mation.A'Gand etàBruges l'en (rée du faux Baud uin fut magni-fique. Au mil ieudc l'en thousiasmegénéral, il traversa ces villes .porté sur une litière, revétu da manteau de pourpre et detous les ornements impériaux. Un archi-chapelain portait lacroix devant lui. Chacun pleurait d'attendrissement et debonheur on voyant ce bon prince sur lequel on avait fait cou-rir tant de sinistres bruits. La grande barbe blanche qui luiétait poussée depuis vingt-cinq ans , émerveillait tout lemonde. Personne ne se doutait du piège, et quantité deseigneurs des deux comtés donnèrent dedans et suivirent'

Le bon évêque de Tournai, Philippe Mouskes, dit à ce propos,( rue si Dieu était venu sur terre • il n'eut pas été mieux reçu que liai-posteur.

Or vient en Flandres li pa umiersQui n'en fil mie contusujiers.Se Didut fust en tiôu'e venus,Ne fust-i I pas micas menusD'abôs, de moines aide aloisQuarli pais iert moult emfers,lices pu'ésens ii apoi'toientLi fol buisnai't qui lot perdaient.

V. 14851

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1

SS HISTOIRE DE JEANNE,

l'imposteur. Tant et si bien que, tout-à-coup, et comme par

enchantement, la comtesse Jeanne se trouva presque aban-

donnée, sans autre appui qu'un petit nombre d'amis fidèles,

qui, sachant parfaitement à quoi s'en tenir surie sort de

Rauduin,déploraient avec elle l'astucieuse perfidie de quel-

ques-uns, et le fatal aveuglement de tous.

Le pouvoir de la comtesse fut un moment ébranlé par cette

'bizarre aventure sa vie môme courut des dangers. Dans

leur exaltation contre Jeanne, qu'ils considéraient comme

une fille rebelle, attendu qu'elle ne voulait pas croire te

qu'ils croyaient, les partisans du fauk ilauduin dirigèrent

leurs coups contre elle. Après avoir cherché vainement A

vaincre la superstitieuse obstination de tout un peuple et

à s'opposer aux envahissemens de l'imposteur, Jeanne s'était

réfugiée en son château du Quesnoy. Une nuit, ils tentèrent

de l'enlever; elle eut à peine le temps de fuir dans la cam-

pagne par une issue cachée , de monter à cheval et de ga-

gnerla ville de Mons, à travers des chemins affreux et pleins

de périls.

Les noms des seigneurs restés fidèles h la comtesse Jeanne nousont été transmis par Mouskes, dans sa Chronique rimée, qui renfermedu reste tant et de si curieux ,détails sur toute celte histoire. Ce futd'abord et en première ligne, Arnoul d'Audenarde , le Tuteur deFlandre. Pois • Michel de Harnes, Linon1 eldlclaiz, de Tournai • Bassede Gavre teilla de celui qui avait été tué à Bouvines , les deux frères deGrimberghe , Gantier et Guillaume, Gifles de Barbanvon , VVatier deGhistelles, Gilbert de Soteugliien. Philippe de Somergisem , Sohierchâtelain de Gand, Walier de Fontaines, Fastré et Watier de Ligue,Godefroi deFentaisies, évêque de Cambrai, Watier d'Avesnes, comtedeBlois, Philippe IL de Gourlenai , comte de Narnur, et plusieurs autres.

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COMTESSE DE FLANDRE. €9

En aucune circonstance Jeanne n'eut à déployer plusd'iiiergie et d'habileté que dans la triste position où la fortunevenait encore une fois de la placer. Perdre l'héritage de sespères, le laisser aux mains d'un misérable aventurier, etsurtout passer pour une fille dénaturée , parricide, c'étaitvraiment là comme une vengeance de Dieu. Jeanne n'avaitpas mérité le courroux du ciel.... Elle considéra le nouveaumalheur qui lui arrivait comme une épreuve providentielle,etcette épreuve elle la soutint dignement.

Pour nous servir de l'heureuse expression de l'historiendOutreman, la comtesse e jugea bien que ce fuseau ne sen devait pas démesler par force, mais par finesse. o Elleessaya d'abord de faire venir l'ermite au Quesnoy. Il y avait au-près d'elle en ce moment-là une ambassade du roide France,Louis VIII, composée de trois hauts personnages, Mathieude Montmorency, Michel de Harnes et Thomas de-Lemper-nesse. Elle espérait confondre devant eux l'imposteur ,maiscelui-ci se garda bien de se rendre à l'invitation de Jeanne.Il aimait mieux poursuivre sa marché triomphale.

La chose devenait de plus en plus sérieuse et menaçante.Le roi d'Angleterre, partageant ou plutôt feignant de paria-l'erreur commune, écrivit au faux Fauduin une lettre de féli-citation ;en lui offrant de renouveler d'anciennes alliances.Jeanne éperdue, après avoir vainement tenté tous les moyens

Rvminrs Fdc,'a , 1, 277. L'aut lie nlicité de cette lettre n'est pas dureste incontestable.

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no HISTOIRE DE JEANNE,

d'ouvrir les yeux à son peuple, attendait avec anxiété que laProvidence se chargeât de dévoiler elle-même l'iniquité.Jeanne n'attendit pas long-temp. Le sire de Materen, restéfidèle â sa suzeraine, s'était ressouvenu de la rencontremiraculeuse que naguères il avait faite de son oncle. JI pensaque son appui et celui des frères mineurs, s'ils voulaient leprêter, serait d'un Grand secours à la comtesse Jeanne. II semit en quête de rechercher cet oncle, et ce ne fut pas sanspeine qu'il parvint à le découvrir dans le refuge de Saint-Earthelémy, près Valenciennes, où il était revenu après l'in-'cident que nous avons dit plus haut.

- e Seigneur oncle, dit le gouverneur au religieux, jus-qu'à présent j'ai fidèlement tenu le serment que je vous aiprêté: mais aujourd'hui, vous pouvez voir comment ce man-dit ermite s'efforce, contre le bon droit et les lois du pays, àusurper les comtés de Flandre et de Hainaut. IMjâ il a étéreçudans toute' la Flandre; bien plus, il est honoré jar chacundans Valenciènnes, comme seigneur et comte dè Hainaut,tandis que la véritable héritière et maîtresse du pays , se voitdéshériter au mépris de la justice 'et de Dieu. il m'est impossi-ble de tolérer de telles choses. Il y a ici urgence, et dans unepareille nécessité, je ne puis ni dois tenir ce que je vous aipromis. Et comme en cette oeuvre étrange du démon ,il n'y apersonne au monde qui sache mieux la vérité (lue VOUS et vosfrères, je reviens vers vous, poussé par nia conscience carvous êtes parti de Flandre avec le seigneur Bauduin , vousavez traversé la mer avec lui, vous ne l'avez pas quitté depuis

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COMTESSE DE FLArÇDRE.

son intronisation à l'empire de Constantinople, jusqu'à la finde ses jours; vous l'avez accompagné dans toutes ses guerres,vous avez partagé tous ses périls. Qui donc, sous le Ciel,pourrait plus sûrement que vous faire cesser les doutes etproclamer la vérité? Répondez; que je retourne près de nia-dame la comtesse et de son conseil, pour leur révéler tout ceque vous m'aurez dit; car, dans les circonstances où noussommes, de telles choses ne doivent plus être un mystère. »

Le frère, confus et plongé dans la plus grande perplexitésur ce qu'il devait dire au gouverneur, ne fit aucune réponse,nais se jetant à genoux, il s'écria les mains tendues vers leciel « Seigneur, soyez-moi propice!»

Mors le sire de Materen prit congé de sou oncle et se retiraen toute hâte auprès de la comtesse Jeanne. Là, devant leconseil assemblé, il rendit compte en secret de ce qu'ilavait fait. Jeanne et ses conseillers furent profondément émusde ce récit. Ils éprouvaient tout â la fois un mélange de joieet de tristesse. 11eu dejours après, la comtesse vint à Valen-ciennes, croyant y trouver les frères; mais ceux-ci, fuyant lesouffle de la faveur mondaine, s'étaient dispersés et réfugiésles uns à Liège, les autres à Arras ou à Péronne.

Sans délai, Jeanne informa le roide France de tout ce quise passait, lui demandant conseil et protection dans cette pé-rilleuse circonstance. Le roi fit aussitôt partir pour la Flandreet le Hainaut des envoyés qui trouvèrent le pays en révolution.La plupart des communes obéissaient Û l'ermite comme à leur

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92 HISTOIRE DE JEANNE,

seigneur naturel. De leur côté, la noblesse et le clergé ne sa•nient plus trop à quel saint se vouer. Dans leur perplexité,ils firent aux interpellations des commissaires du roi deFrance la réponse suivante:

- « Ne nous étant pas consultés, et les deux comtés ni lesbonnes villes n'ayant point encore arrêté une détermination,nous ne saurions répondre sans avoir interrogé, consulté lespersonnes que nous savons pertinemment avoir accompagnéle seigneur dont il s'agit jusqu'à sa mortel qui ont bien connusa manière d'être, so i t et jusqu'aux signes particu-liers qui distinguent sa personne. C'est pourquoi nous roqué-Tons unanimement un délai pour faire notre réponse. s) I

En même temps Jeanne faisait rechercher en toute diligenceles personnes qui pouvaient avoir connu son père et surtoutles frères mineurs dont le gouverneur de Valenciennes avaitparlé. On en trouva dix-neuf d'entr'eux, dont seize laïcs ettrois prêtres, qui furent mandés devant la comtesse Jeanne etles envoyés du roi.

Les marques que l'imposteur Ilauduin monLrait aux personnesnobles et aux gens de piété, c'étaient des cicairices au Côté, auxmains, aux pieds et à la tète qui firent d'abord impression sur quel.ques personnes qui avaient eu quelque familiarité avec l'empereur.Thierri , abbé de Saint-Jean-de-Vatencienoes l'abbéde Saint-Vaast , leduede Louvain (sic), les barons, les gentilshommes et les chevaliers,au nombre de plus de mille, sans compter les ignobles qui étaientsalis nombre, se laissèrent persuader qu'il était t'empercur l3auduiu;il régna près dodeux mois; il faisait porter la croix devant soi, commeempereur; il porta la couronne le Jour de la Pentecôte , il créa donouveaux chevaliers, il mit sou sec1 à de nouvelles lettres Patentes,et partagea des fiefs ii plusieurs familles, t - Albesk. id "un. I 225

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COMTESSE DE FLANDRE. 93

Le fameux Guérin, évêque de Sentis, présidait l'enquête.Ayant demandé aux religieux leurs noms, leur patrie, leurétat, ce qu'ils savaient du comte liaudnin, de sa vie, de samort; leur ayant fait jurer sur l'évangile de dire ta véritél'un de ces frères répondit à l'évêque au nom (le tous

- "Seigneur, nous sommes de pauvres pécheurs, d'inutilesvermisseaux. Toutefois nous sommes chrétiens et nous habitonsce désert. Nous avons tous tes seize traversé ta mer avec tetrès-illustre prince Bauduin, dont l'âme repose en paix; etdepuis lors nous ne l'avons plus quitté un seul instant jusqu'àsa mort. flans toutes tes batailles où il combattait de sa per-sonne nous étions présents, et dans ta dernière qu'il livra auxComans et aux Blactes nous l'avons vu vivant, puis mort. Nousle jurons tous. Nous demandons eu outre à parler en présencedu roi à celui qui se dit être Bauduin. s

Quelques semaines après, sur les instances de Jeanne, teroi lui-même vint à Péronne. On était alors en tannée 1226;il y manda les frères mineurs qu'il interrogea longuement surtout ce qu'il désirait savoir, puis les continu au couvent dePérenne pour attendre ses ordres. Entre temps , Louis VIE!enjoignit au prétendu comte Bauduin devenir lui rendre hom-mage pàur la Flandre. Co dernier ne pouvait se dispenserd'obéir aux ordres de son suzerain. Il se rendit à Péronneavec une suite nombreuse de barons. Ce qui importait surtoutc'était de démasquer solennellement l'imposteur, c'était de(lisiper l'odieux soupçon qui pesait sur la comtesse, c'était

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94 HISTOIRE PE JEANNE,

enfin d'obtenir satisfaction complète de toute cette gigantesqueescroquerie. On s'y prit fort adroitement. L'ermite fut reçu entoute honneur et révérence, ni plus ni moins que s'il avait étélémpereur en personne. Il ne se doutait encore de ce qu'il luiallait advenir, quand tout-à-coup et devant une imposante etnoble assemblée, l'6vêquede Senlis se lève,sur l'ordre du roi,et adjure le prétendu comte de répondre aux trois questionssuivantes. —On lui demanda successivement en quelle ville ilavait fait jadis hommage du comté de Flandre au roi; en quelleville et par qui il avait été fait chevalier; en quelle ville, àquel jour et dans quelle chambre il avait épousé Marie deChampagne. Le vieux jongleur ne s'était pas préparé à d'aussisimples questions : il resta muet et confondu. Alléguant savieillesse et son peu de mémoire il demanda jusqu'au lende-mafn pour répondre, mais le lendemain on s'aperçut qu'ils'était échappé durant la nuit, emportant aveclui tout ce qu'ilavait pu réunir de précieux. Quelque temps après il fut prisau village de Rougemont en Bourgogne. Il y menait joyeusevie et dépensait gros, ce qui le fit suspecter de larcin. Mis àla question par ordre du seigneur du lieu, sire Everard deCastenay, il confessa être le faux Bauduin. On sut alors aussique son nom véritable était Bertrand, natif de Bains, villageà une lieue de Vitri-sur-Marne, fils de Pierre Cordel, vassalde Clarambautde Capes: qu'il avait été ménestrel, jongleur,

On trouve dans le Mercure de, Francs de février j 770, une disser-lalion dont l'auteur essaie de prouver que le [aux Bauduin était de lai1te de Reims.

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COMTESSE DE FLANDRE. 05

enfin ermite, pour de cette condition revêtir la pourpre impé-riale.

Remis entre les mains de la comiesseleanne, cet audacieuxaventurier fut d'abord, pour l'exempte ., promené à traverstoutes les villes où naguères il passait eu triomphateur.

Il confessa partout son crime.; après quoi, ramené et jugé àLute, il fut étranglé devant, les halles. Soit y.restasuspendu pendant quelques jours. Puis on le conduisit auxchamps polar l'accrocher près de l'abbaye de Loos à un gibetOÙ les oiseaux le mangèrent.

Telle est la péripétie vulgaire d'un événement qui certesne le fut pas. Le retentissement qu'il produisit en son tempsdure encore. Il- s'est répereuté.d'àge en âge jusques à nous,mais souvent bien modifié , quelquefois même dénaturétout-à tait par les traditions dont il a dù traverser la longéefilière.

t M. le baron dosa int-c 01101v, à qui l'on doit un roman historiqueplein diii té rét , iniilulé le Faux . Ijnueba11 , n inséré à la Su do son livreune nomenclature des chroniqueurs et historiens qui ont parlé avecquelques détails (le cet imposteur fan,eux. Nous ne la reproduisonspas ici ' mais qu'ors nous permette de la compléter par quelques indi-cations qui ont échappé à t'érudit écrivain,

le Fntsià Locar, , CI,ronieon iJclgieom , 585.- -2.0 D'Ouv,:r,,ra.rv , lïistoia'c de la ville et co,nU de Va lcntie,uie.q , in. f,'

Douai, iGSrj, 133.Rien de curieux et d'original, comme le récit do l)Oulretuan

dont nous faisons , du reste , le plus grand cas , tant sous le rapportde l'érndiiion - que sous celui de la véracité liisloriquc. Voici commentil termine la narration de cet épisode: s Tell e fut la lin de ceste tra-gédie et de cesi imposteur: semblable ii celle de bus ceux qui se sont

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96 HISTOIRE 1)E JEANNE

meslés de ce dangereux mes fer, que Ton trouvera à foison dans Valere'e Grand , Eulgose , et autres. Cependant. le peuple abbreuvé de lapremière opinion ne la voulut deswurdre,et plusieurs tiennent encoretrès sottement, que la comtesse Jeanne fit mourir son père. Voire Mat-thieu Paris à bien osé suivre ceste absurdité et erreur, qu'il ajolive debeaucoup d'autres fables et impertinences très-grossières.

3,' DELEWAHDE , Histoire générale duHaiita,L, III.

4.' ART DE VFILFJEB LES DATES. C/ii'onot. tICS tenues de Flandre , art.JBANrE.

5.' B yrqoutu,, Journal des Savants, novembre 1834.L'illustre académicien démontre victorieusement que lempereur

Bauduin était mort en Orient, vers t 206.-6.' A. Daasux. Trouvéres, Jongleurs et Ménestrels du Nord de ta

Flandre et da Midi de ta Belgique ,H, 124.- -Nous regrettons que les bornes de cette note ne nous permettent

pas de reproduire je curieux article que M. Ditaaux consacre à Ber-trand de Bains ,le jongleur. -

7.' WARNKOENIG. llistoi,'e de fa Flandre ,'L-

8.' Chroniqua de Flandre, manuscrit inédit reposant à la biblio'thèque communale de Cambrai, sous le N.' 701, in'f.' papier, écritore du xvi:' siècle. L'lustoirc du faux l3audoin y est racontée souscc titre t Du Péterin é ta Bette Barbe.

Enfin, pour, ne rien omettre, mentionnonsici nia travail tout récentsur Jeanue , inséré dans les Annales de la Société d'Emutation deJiruges.II faut convenir qu'on ne pouvait paraphraser plus longuement etpins passionnément le calomnieux mélodrame de MM. Fontan et VHerbin, dans lequel la comtesse de Flandre est représentée comme unmonstre à face humaine. C'est eu vérité trop do frais d'éruditionpour aboutir ii une conclusion mal fondée, à un paradoxe anti-national.

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Vil.

Du traité de Meiun , de la délivrance du comte Fernandet de sa mort.

Le vainqueur de Bouvines mourut le 14 juillet 1223, em-portant au tombeau la satisfaction de ne s'être pas un seulinstant écarté de laligne politique qu'il s'était tracée à l'égarddu comte de Flandre: rigueur inexorable, inflexible duretéen vertu de laquelle cc dernier voyait tristemenCs'étioler sajeunesse entre les murs du Louvre. Scanne cependant n 'ou-bliait pas son époux, et quand on voit tout ce qu'elle fit pourle tirer de cette pénible captivité, l'on est bien obligé de re-connaître que le sentiment du devoir seul ne dirigeait pas labonne et courageuse comtesse. U y avait au fond de tout cela

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98 HISTOIRE DE JEANNE,

beaucoup plus d'affection qu'on ne pense et une affection quifaillit même deux fois la faire passer par-dessus les intérêtsde ses sujets ;1a première, lors du traité de 1214 dont nousavons parlé ci-dessus; la seconde, dans la circonstance quenous dirons tout-à-l'heure.

Lprsque Philippe-Auguste eut fermé les yeux, Jeanne , crut

l'occasion belle pour renouveler ses tentatives auprès du suc-tesseur de ce prince. Mais Louis VIII avait hérité de l'opiniâ-treté de son père.Il conservait d'ailleurs une vieille rancune con-tre Fernand pour.les soucis que jadis, lors des guerres de Flan-dre, le pétulant portugais lui avait donnés. Il ne voulut d'abordrien entendre. .Jeanne mit en oeuvre tous les ressorts imagi-nables pour l'ébranler. Elle fit écrire au roi par le pape, parun grand nombre de cardinaux et d'autres influents persoh-sonnages. Chacun employait les termes les plus pressants.Honorius alla jusqu'à menacer de lancer l'interdit sur laFlandre et le Hainaut, d'excommunier le comte et la com-tesse si Fernand , mis en liberté , tentait de se rebeller

encore. -

La bulle du pontife à cet égard est un monument curieux

de la dipidmatie du temps. On y verra aussi une preuve del'influence civilisatrice qu'exerçait alors la papauté sur lesaffaires temporelles. Du reste, l'inspiration toute entière decet acte est dûc à Jeanne, il est facile de s'en apercevoir auxtermes mêmes dans lesquels il est conçu, et aux conditions

qu'il renferme. ' -

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COMTESSE DE FLANDRE. • 90

« Ilonorius, évéque, serviteur de Dieu, à nos vénérablesfrères l'archcvéque de Remis et lévéque de Seuils, salut etbénédiction apostolique.

n L'église en général prie presque sans cesse pour lesprisonniers ales affligés; et nous qui présidonsà l'église, quoi-quesans le mériter, nous ne pouvons ne pas compatir auxmalheurs de la captivité pour ceux qui les souffrent, et nousdevons par là d'autant plus volontiers nous interposer enfaveur de leur délivrance ,dola manière que nous jugeons laplus salutaire, veillant ainsi aux détenteurs et aux détenus,â ceux qui peuvent délivrer et aux prisonniers. C'est pourcette raison qu'ayant jeté nos regards sur notre très-cher filsen Jésus-Christ, l'illustre Louis, roi des Français, nous luiadressons présentement nos prières , parce que nous chéris-sons sa personne d'un amour spécial et d'un attachementparticuliér, désirant sa prospérité selon Dieu et selon leshomnes; nous voulons l'avertir soigneusement de ce quiservira' au salut de son unie et à la gloire de la dignitéroyale, etc. (Ici le pape fait allusion à la volonté qu'aurait euePhilippe-Auguste, pèrede Louis, de délivrer le, comte Fernand).Mais, ajoute-t-il, par, la méchanceté du diable, qui s'opposeaux bonnes actions, ledit Philippe, ayant été enlevé de cettevie, la convention ne put s'accomplir et la délivrance ducomte a été retardée jusqu'à ce jour. Or, il semble que ceserait une trop grande inhumanité de lui etaire souffrir pluslong-temps l'horreur de la prison. C'est pourquoi nous prions,admonestons et exhortons ledit roi que, réfléchissant avec

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100 HISTOIRE DE JEANINE,

prudence (lue Dieu promet sa miséricorde aux miséricor-dieux, reconnaissant que la plus grande et la plus noble ven-geance est de ne pas vouloir punir quand on le peut, lamagnanimité consistant à pardonner avec grandeur, il laissefléchir son cœurpar la clémence et permette que le comte soitracheté. Ainsi, noustlonnons en mandement par les présenteslettres, lesquelles nous voulons être étendues égalementà nossuccesseurs, que si, par hasard, le comte et la comtesse doFlandre viennent à agir contre les conventions qu'il vous appa-rattra avoir été scellés des sceaux dudit roi, ducomte et de lacomtesse, vous et vos successeurs fassiez et promulguiez sen-tence d'excommunication contre les personnes desdits comteet comtesse êtde leurs adhérents, sans égard à quelque appelque ce soit. Vous jeterez aussi sentence d'interdit sur leursterres et ne permettrez pas qu'elle soit enfreinte jusqu'à cequ'il soit amendé par un jugement en la cour du roi. Si vousne pouviez tous les deux exécuter ces choses, nous ioulonsque l'autre proctde à l'exécution.

» Donné à Latran, le X.' des kalendes de mars, l'an hui-tième de notre pontificat: (20 février 124). »-

On'fit tant et si bien que Lou is VIII, obsédé de tous côtés,consentit enfin à traiter de la délivrance de son prisonnier.Voici les principales clauses de ce traité passé â Melun le10 avril 1225.

Le roi s'oblige à faire sortit' Fernand do prison, le joui' deNoël-1226 1 à condition qu'il lui paiera 25,000 livres parisis

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COMTESSE DE FLANDRE,. loi

avant sa sortie. En outre il devra, ainsi que la comtesse safemme , remettre entre les mains du roi les villes de LilleDouai , l'Écluse et leurs appartenances ,pour garantie d'unsecond.paicment de même somme. Le roi rendra ces villesquand le comte et la comtesse lui.auront soldé en totalité les50,000 livres, niais il Gardera la forteresse de flouai pendantdi,c ans et une Garnison française y sera entretenue, aux fraisde la Flandre, à raison de 20 sols parisis par jour. —En vertude la lettre du pape ,le comte et la comtesse, s'ils n'exécutentpas les clauses du traité, seront excommuniés par ]'arche-vêque de Reims et l'évêque de Senlis, quarante jours aprèssommation, et les terres de Flandre et de Hainaut seront miseseu interdit.—. Le comte et la comtesse feront jurer sûreté etféauté au roi par les barons les communes et les villes desdeux comtés. —ils ne pourront faire la guerre au roi ou à sesenfants. - Si quelque chevalier refuse de jurer sûreté au roi,ils le chasseront de sa terre; si c'est une ville, ils s'empare-ront de ses biens. —Enfin le comte et la comtesse n'aurontpas le droit d'élever de nouvelles forteresses en Flandre endeçà de l'Escaut, sans l'agrément du roi.

Jeanne et Fernand jurèrent tout cela!

Pour -la question d'argent, Jeanne eût peut-être été en me-sure. Comme nous l'avons vu, elle s'était toujours ingéniée àrassembler de fortes sommes. Depuis 1221 , les opulentsmonastères, les bonnes villes deFlandre lui en avaient encoredonné beaucoup, Gand surtout. D'un autre côté, elle en

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102 1HISTOIRE DE JEANNE,

avait pris à gros intérêts, sans doute , chez les Crespind'Arras, les plus riches argentiers de l'époque. Mais la diffi-culté ne gisait pas là. Lorsqu'on lut aux barons et aux villesles conditions du traité de Melun, ces clauses pour la plupartsi impérieuses, si outrageantes à la nationalité flamande, ilsn'en voulurent pas entendre davantage et, comme en 12U,ils mirent leur veto formel à toute espèce de conventions decette nature, et ce fut bien heureux.

Du reste, comme nous l'avons dit, pour ](,,Portugais person-nellement, ils n'auraient pas donné . une maille. S'ils se mon-traient disposés à faire quelque chose, ce n'était que dans lehutde complaircà leur souveraine naturelle; mais l'intérétdupays doit passer avant toute considération personnelle, et nousavons le regret de le dire, Jeannè ne nous parait pas, 'dansces deux circonstances, l'avoir asset profondément compris.

Ainsi donc, encore une fois, la comtesse de Flandre allaitvoir l'occasion lui échapper. Fort heureusement pour Fer-nand et pour elle, le roi vint à mourir sur ces entiefaites. Lareine Blanche, mère et tutrice de Louis IX consentit, au moisdejanvier 1226, à modifier le. traité de Melun. C'était digne-ment ouvrir l'un des règnes les plus glorieux dela monarchiefrançaise. On se contentait de 25,000 livres,- avec quelquesgaranties. Mais il n'était plus question de garnison françaiseentretenue au coeur même du pays et aux frais des Flamands.Les barons et les villes souscrivirent alors à ce traité, qui néput toutefois recevoir son exéculion,qu'après que le jeune roi

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COMTESSE DE FLANDRE. 103

eut été sacré. I Jeanne fut si heureuse de voir enfin arriverl'heure de la délivrance du comte, qu'elle ne craignit pas defaire jurer aux Gantoisde se lever contre elle en faveur du roide France, si elle ou son mâri venaientâ violer la convention.

Fernand sortit donc de prison le 6janvier 1226, après unecaptivité de douze ans, cinq mois et quelques jours. Le mal-heureux prince avait bien expié les étourderies de sa jeunesse.Eprouvée par cette grande infortune, l'âme de Fernandsembla s'être retrempée. Son esprit avait acquis de la gravitédans cette solitude où, pour toute compagnie, le comte deFlandre n'obtenait de son vainqueur sans pitié qu'un de cefranciscains austères dont nous avons parlé plus haut. Pen-dant !e peu d'années qu'il eut encore à vivre, Fernand seconduisit dans Je gouvernement de ses états avec sagesse etprudence, et ne compromit plus, il fâut le dire, ni le bonheurde ses sujets, ni celui de sa femme. Jamais il ne se départitdu serment de fidélité qu'il avait juré au roi, et se montratoujours plein de reconnaissance pour lui et sa mère, la reineBlanche, laquelle avait si puissamment contribué à hâter lemoment de sa délivrance.

t La contesse Jehane iert làDe Flandres, U laséuraEt apriès Ernous dAudcnarctoEt mesire Passe. de GavreQui portèrent et marset livretDont Ferrant diut cstrc délivres;Plais li co;,saus les fin atendreTaul que l'c,tfes pctifl sacre prendre.

Pu. MOUSKES, V. 27495.

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104 HISTOIRE DE JEANNE,

On sait que, dans les cérémonies du sacre clos rois deFrance,le comte dê Flandre remplissait les fonctions de connétableet portait l'épée de Charlemagne devant le monarque. Lorsdu couronnement de Saint-Louis, Fernand était encore enprison. La comtesse sa femme, jalouse de maintenir une siglorieuse prérogative ,disputa l'honneur de porter l'épée àla comtesse de Champagne qui, elle aussi, avait la prétentionde faire office de connétable pendant l'absence de son'mari,en vertu deje ne sais quel antécédent. L'affaire fut déféréeà la cour des pairs. Du consentement de Jeanne, les pairsdécidèrent que ce serait Philippe de Clermont, comte de Bou-logne, qui tiendrait l'épée, mais que cette exception ne por-terait pour l'avenir aucun préjudice au droit des comtes deFlandre.

Ce.méme Philippe de Clermont, l'année qui suivit celle dusacre, c'est-à-dire en 1221, se ligua avec Pierre de Preux,comte do Bretagne et plusieurs grands vassaux, contre lareine Blanche, régente de Franco, pendant la minorité. deLouis IX. C'était la première occasion qui s'offrait à Fernandde prouver son dévornent à li mère et ait fils Il la saisit avecempressement. A peine Philippe de Clermont eut-il rejointles confédérés, que Fernand fit irruption sur le Boulonnais,et força le comte àaccourir défendre ses propres états. Plustard, Fernand prit encore part à l'expédition dirigée contrePierre de Preux, le plus redoutable de ces grands vassauxrévoltés, qui, sous la minoritédu roi de France, donnèrenttant de sujets de crainte à Blanche de Castille. C'est dans

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COMTESSE DE FLANDRE.-. 105

cette circonstance que s'éleva entre le comte de Flandre etic comte de Champagne une disputesur la question de savoirqui des deux avait droit de commander l'arrière-garde oul'avant-garde des troupes du roi. Ils eurent Euh et l'àutre gainde cause, c'est-à-dire qu'il fut décidé d'un commun accord

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que chacun serait à tour de rôle tantôt à la tête, tantôt à laqueue de l'armée.

Fernand fit encore la guerre au comte de Namur, Henri deVianden, en 1227. Cette guerre eutpour cause les prétentiônsque Fernand se crut en droit d'élever sur le-Namurois, duchef de sa femme, il s'empara de Colzinne et de Floreffequi soutint quarante jours dé siège. Mais l'affaire s'arrangeapar la suite. Henri conserva le comté de Namur', et Fernandeut pour lui Golzinne et Vieuxville.

Tout le fardeau des grands et sérieux événements avaitpesé sur Jeanne durant la captivité de son mari , et l'on saitcomment elle en supporta le poids. Lorsque Fernand sortitde prison ,la Flandre jouissait de tous les bienfaits du calmeet de la paix. A part lesguerres de peu d'importance qu'il dutsoutenir, et dont il se tira avec honneur et profit, 'e comtede Flandre n'eut plus qu'a consolider avec sa femme Fœuvreque celle-ci avait si dignement commencée. Ils y travaillèrenttous deux avec un noble zèle. Sans parler ici des fondations

V. aux Pièces justificatives , ail. 1250.2 V. M,sriia , anti. 1227 et 1234. —Nous doniiuus le (tallé aux

i'iôcc, jrsstifirolivcs, afin, 1229-1-232.

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I

oo HISTOIRE DE JEANNE,

charitables ou pieuses faites avec autant de libéralité que desagesse, des actes diplomatiques consommés avec beaucoupde prudence, nous devons mentionner le déveloipement que,dans l'intérêt des classés populaires, ils s'efforcèrent de don-ner aux institutions politiques, en Flandre surtout, car enHainaut le comte Bauduin y avait pourvu avant de partir pourela croisade.

L'extension, l'organisation du pouvoir municipal, ce contre-poids si nécessaire des envahissemens féodaux parait encoreici avoir été le. but de leurs efforts, efforts qu'on voit, du reste,se renouveler pendant le règne de Jeanne à chaque intervallede tranquillité publique, flans la seule année 1228, le comteetla comtesse reconstituèrent le corps échevinal dans quatredes principales villes de Flandre; Gand, Ypres, Bruges etflouai. Le système électif le plus libéral et le plus judicieuxforme la base de ce nouvel échevinage qui consacre et fixepour la première fois,d'une manière bien stable, les droits dela bourgeoisie.

\Toici, pour exemple, les dispositions fondamentales ducorps politique connu dans l ' histoire sous le nom fameux destren(c-neufde Gand, -.

L'élection des échevins de la ville de Gand se flra chaqueannée,lejourdel'Assomptiondela \'ii'ge,dela façon suivante:

Les échevins actuels (de l'année 1228) éliront, après ser-mentprété, cinq échevins ou bourgeois de Gand , qu'ils eroi-

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COM,TESSE DE FLANDRE. 107

ront les meilleurs. Si dans l'é j ection , il survenait quelque dif-ficulté, celui qui aura le plus de voix sera nommé.

J] né pourra y avoir parmi ces cinq échevins de parents autroisième degré, selon le comput canonique.,

Ces cinq élus feront serment d'élire à leur tour trente-quatreautres échevins ou bourgeois qu'ils croiront les-plus capables,ce qui formera le nombre de trente-neuf.

En cas de contestation, celui qui obtiendra le plus de voixaura toujours la préférence; mais le père et le fils ou deuxfrères ne pourront se trouver ensemble.

Ces trente-neuf échevins se diviseront en trois trcizaines.Là première formera l'échevinage proprement dit; la seconde,le conseil; la troisième restera sans fonctions.

La treizaine qui aura rempli l'échevinage pendant uneannée sera remplacée parla seconde, celle-ci parla troisième,et ainsi alternativement à perpétuité.

S'il arrive quelque vacance, soit par mort ou par retraite,les échevins alors en place en éliront un autre, se conformantaux mêmes formalités et exceptions.

Les échevins prêteront serment entre les mains du bailli deGand ou de celui qu'il aura légitimement préposé; en casd'absence, entre les mains des échevins sortants.

Le diplôme, conservô aux archives dc la chambre des comptesà Lille, a âIé imprimé plusieurs fois,

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108 hISTOIRE DE JEANNÉ,

Le comte Fernand eut sans doute, en 1230, le pressenti-

ment d'une fin prochaine, car au mois de mars de cette

même année, il fit son testament. Entr'autres dispositions, on

y remarque celle-ci «Mes joyaux et tout ce qui appartient à

• o mon écurie, à ma table, à ma cuisine, à ma chambre se-

» ront mis à la disposition de mes exécuteurs testamentaires

» pour être veiSdus, à l'exception toutefois de ce qui aura été

- o réservé par moi; le prix sera employé aux frais d'exécution

» du testament et le surplus de l'argent être abandonné auxo pauvres. o

Le 27juillet 1233, comme il se trouvait àNoyon, il succomba

aux progrès de la gravelle, maladie cruelle dont il avait con-

tracté le germe durant sa longue captivité. Son coeur et ses

entrailles furent ensevelis dans la cathédrale de cette dernière

ville. Plus tard, son corps fut, par les ordres de sa femme,

rapporté en Flandre et inhumé en grand honneur au couvent

de Marquette, que Jeanne avait fondé près de Lille., et où elle

avait résolu de reposer elle-même à la fin desesjours, â côté de

l'époux dont elle avait été si long-temps séparée sur la terre.

Voici ce que dit Gousetaire dans sou histoire inédite de l'Abbaye.de Marquette, au sujet de la fondation de ce monastère devenu célè-bre par la sépulture de Jeanne et de Fernand.

'tant de si grandes affaires que Madame la comtesse Jeune deFhUldres eu L sur les bras durant lem prisonncmon t du comte Ferdi- ,il son mary, , ne loy fi re n L pas oublier la principale ci la plus.importante , qui estait celle <le son salut. EtIc y travailla soigneuse-nient par la pratique de tonte sorte de vertus qui 1,ourroi, itt fournirune très-belle et très-ample matière duo excellent panégyrique; niaisn ous ne parlerons iey que de la fondation de l'Abbaye de Marquette

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COMTESSE DE FLANDRE. 109

quo)' qu'elle ers ail- fait beaucoup d'autres, Il est certain qu'elle enformate dessein et en prit la résolution pendant que le comte ti'erdi.asand soit , caLait encore dans la tour du Louvre ii Paris, etqu'elle eut à diverses fois coiaft!ré avec Iuy par lettres ou autrement,puisquil n'a été mis en liberté qu'en l'an 122 7 el- que ce monastèrea esté fondé au pins tard en l'an j226,aamuis d'octobre, ainsi quonôtre manuseript le marque expressemeut. ii, dis au pins tard, parcequ'il parait d'avoir esté commencé avant cette année-là. On ne doute1) 15 que les premiers fondemens u'ayeut esté jetiez es' deça le pontetla rivière de la Marque. à gauche du pavé qui mène de Lille à ?sleniu,dans un lieu que l'oit nomme encore aujourd'hui la Vielle Court, oùle couvent demeura deux ans et demy. il ne ponvoit pas y demeurerqu'il n'y eut des édifices t que l'on aie baslit pas en si peu de temps.Car en l'an 5227, le comte l'ordinand revenu de sa longue prison , etMadame la comtesse Jeune sa feioine , considérant que cet endroit-Iiiestait trait d'ut, grand passage , qui ne convient point à ].asolitaire des religieuses qu'ils avoient dessein d'y mettre et qu'il pour-roit y avoir eourteresse «canes, quand il arrive que la Marque esttrop basse t trouvèrent à propos de transporter l'Abbaye au lieu oùelle est aujourd'ltuy. C'esloit une métairie appartenant A l'Abbaye deLas, nommée anciennement la Cons' de JlIarpsettc , etc. Les fonda-leurs firent ineossament travailler la construction du nouveaumonastère, pendant que la communauté demeuroit en la Vielle Court,où elle fut environ deux ans et dciuy. Suivant quoy elle vintlaabiiercc nouveau eloistre l'oudéàl'honneur de la glorieuse vierge Marie,sànbs le nom de lkei'os or iVo,'na-Dsant,

Un peu plus lois, , Gonselaire donne les détails suiva uts sur ],adu comte Fernand et sur sa sépulture à l'Abbaye de Marquette.

Peu de temps après, sçavoir en l'an 1255, le 27 juillet, le comteFerdinand, qui n'ai-oit eu guères de santé depuis sou emprisonne.usent, mourut dans la ville de Noyon. en Pieardie, où sou coeur etses entrailles lurent enterrez, et sois corps rapportti en ce monastère.On lui nsit un épitaphe à 'Noyon tel qui s'ensuit:-

FEISNANaJ PaoAa'as lias p sxr. , FLA yrsssra CamusCois CUM VasCEIsjastJs CO1'a1NF.T JSTZ Locus.

La comtesse Jénne fut tant plus sensiblement touchée dola monde son illustre époux, que moins elle en avoit jouy pendant sonsnaaiage. Elle fit enterrer honorablement sort dans cette église,prcsqu'au mi lieu du choeur des religieuses, souz un tombeau de anar-bre bien élevé , que l'on- voit encore aujourd'huy et sur lequel il y ueu long-temps le mémo épitaphe pi e cy dessus, qui pourtant estoitgs-avé en caracthères modernes, Et d'autant qu'il donuoit à eonnoicrecontre L, vérité , que le coeur et les entrailles de ce prince qui sentrestez et enterrez à Noyon où iL est mort, estoient dansle tombeau qui

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110. HISTOIRE DE JEANNE.

est à Marquette, et que son corps, qui est iey es toit inhumé dansquelqu'aulrt lieu de la Flandre , ce qui n'est pas vray, , nous avonschangé le susdit épitaphe, cula place duquel nous avons fait mettrele suivant pli ne dit rien que de vray.

Fannnsni pnosvos LUSITÂNJA, GALLJA SEEVATViscns, Q000 SUPE5SE5T CORPOELS, ISTE LOCUS.

EntRA Pies SItRVET CAftA Colt CONJUCE MANESEv SIMUL JETERflO LUGE FRUANTUR AMEN.

Histoire de (Abbaye cia Notre-Danse cia Repos â Marquette, par F.Michel Gouselaire, religieux de l'Abbaye de Las, syndic général de l'or-cire de Cisteaux dans le Pays-Bas français, directeur de ladite AblsayedeMarquette, dédiée â Madame de Humiéres , très digne abbesse, et toutesles dames religieuses dudit lieu ,en l'an aGqS. —Manuscrit inédit de laBibliothèque de Lille ,côté B F; 23, in-f.', papier, de 346 Pages,plus, une table très détaillée des personnes dont il est l'ail mentiondans l'ouvrage.

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VIII.

Comment Jeanne employa le temps de son Veuvage.

Jeanne savait que la guerre, mémo la plus juste, est tou-jours pour les peuples un grand malheur. Aussi évita-t-elleavec soin, durant son règne, les occasions qui, pour tout sou-verain moins habile ou moins prudent qu'elle, se fussent plusd'une fois présentées de risquer la fortune de la patrie au mudes batailles. Bouvines avait été pour Jeanne d'un liant ensei-gnement.

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112 HISTOIRE DE JEANNE,

Au reste, les lointaines expéditions de la Palestine, les croi-sadessanglarites contre les Albigeois, ne laissaient pas refroidir l'ardeur guerrière des hommes d'armes de Flandre et deHainaut. Côtte ardeur, au besoin , trouvait aussi son aliment,au sein même du pays , dans tes querelles privées de seigneurà seigneur, ou bien dans les passes d'armes, les combats àoutrance devant les dames.

Il fallait que la comtesse de Flandre, plus civilisée en celaque son époque, on peut le dire, frît contrainte par une im-périeuse nécessité pour faire endosser les armures à ses chevaliers. Mais alors elle ne reculait plus; et la femme qui, ausacre du roi Sc. Louis, aurait volontiers arraché l'épée deFrance des mains qui la portèrent, la femme qui se serait vo-lontiers mesurée la lance en arrêt avec le châtelain rebellede Bruges, n'aurait certes pas failli de courage devant l'en-nemi, comme elle n'en faillit jamais devant l'infortune.

L'année méme de la mort du comte Fernarid, le pape Gré-goire lx. fit prêcher une croisade contre une sorte d'héréti-ques que l'exemple et l'influence des Albigeois avait faitsourdre comme par enchantement aux environs de la ville deStaden en Allemagne. Les Stadinglien, comme on les appe-lait, du nom de la cité où ils prirent naissance, devenaientd'autant plus ii craindre que le peuple commençait à êtrerempli pour eux d'une sainte admiration , d'une pieuse•terreur , en raison du stoïcisme qu'ils manifestaient enprésence de la mort. On racontait qu'ils adôraient le diable

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COMTESSE DE FLANDRE. -113

sous la forme d'un chat, qu'Us ne poussaient aucun criquand on les tuait, et qu'on ne voyait aucune goutte desang snjtir de leur corps. On disait bien d'autres choses en-core.' Dans cc temps de fanatique superstition, le prosélytismeallait grand train. On se hâta d'y mettre ordre.

 la voix du pontife, Florent, comte de Hollande, le ducde Clèves et fleuri , duc de Brabant, prirent les armes contreles hérétiques qui déjà s'étaient livrés à de graves excès; Lacomtesse de Flandre avait été sommée de. se joindre à lacroisade. Elle y envoya l'avoué de Béthune et Guillaume, sonfrère, Arnould d'Audenarde , messire Basse de GavreArnould, sire de Materne , son frère, messire Thierri deBeveren, châtelain de Dixmude, messire Guillebert de Sotte-«hem et plusieurs autres. Tons ces chevaliers se couvrirent degloire. Philippe iIouskes rapporte qu'Arnould d'Audenarde,ne pouvant faire chargercontre lesStadinghen son cheval bardéde fer, les aborda à reculons, et que s'abattant au milieu d'eux

Ensi furent communalmentA l'aneuli obéisant.Ansi li petit coin grant.Par nuit ensanhic conviersoiejitEn I celier . et là siervoientL'ancrai en wise de kat,Par vilain plait et par barat.Lor venaient et dont le baisoientEnmi le cul, et puis aloientTot ensanb)e communalmentHomes et ferres laidement;N'i avait sereur ni couiineCon espargnast à cet hermine.

Pu. Mousites. 28208.

8

1

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F'116 HISTOIRE DE JEANNE,

il en oecit un grand nombre. Déroutés, traqués comme des hèles

fauves, à travers les marais et les bois, ils périrent presque tous.

Des historiens ont dit, d'autres après eux ont rép&é que

Jeanne n'avait jamais eu d'enfants. C'est une erreur. De son

union avec Fernand , mais seulement lorsque ce prince fut

délivré de prison, naquit -une fille qui eut nom Marie, sans

doute en souvenance de sa grand'mère Marie de Champagne

la digne épouse de l'empereur Bauduin. ' Cette enfant, héri-

tière de Flandre et de Hainaut, avait même été promise en

mariage à Robert j,cr comte d'Artois, frère de Saint-Louis.

Mais elle mourut trop jeune, le jour de sainÉtienne, en août

1234, n'ayant guère survécu à son père que d'un an.

Pleurant tout à la fois son mari et une fille sur laquelle se

devaient concentrer de bien belles espérances, la comtesseJeanne n'en bénissait pas moins cette main rigoureuse de la

Providence qui , si souvent, sétait appesantie sur elle.

Une résignation pleine de douceur et de piété préside aux

actes qui signalèrent le temps de son veuvage. Ses premiers

soins, après le trépas flu comte Fernand, furent d'exécuter re-

ligieusement les volontés dernières do ce prince. Mais elle ne

sen tint pas là- Dans la seule année 1233 , elle répandit tant

de bienfaits sur les pauvres, les hôpitaux , les maisons reli-

gieuses, qu'il est aisé de reconnaître là les effets d'une pro-

Quelques-uns, en' rab tres dOu Ireman , dise" I qu'elle s'appelaitJt'atine.

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COMTESSE DE FLANDRE. 415

fonde sollicitude pour la mémoire de Fernand; L'amour deJeanne suivait au-delà même du tombeau cet époux qui pour-tant avait été pour elle, durant sa vie, la source (le si amerschagrins: L'expression de cet amour se retrouve à chaqueinstant dans les actes nombreux (lue renferment nos archives;et quant aux preuves des pieuses libéralités dont nous par-lons, il faut aller les demander, car, sans doute, elles y sontencore vivantes, aux hôpitaux d'Ypres, d'Àudenarde, de St.-Jean à Bruges, de Notre-Dame à Gand, de Saint-Sauveur àLille, de Saint-Antoine à Paris, à la Maladrerie de Lille ditede Canteleu; aux abbayes de Saint-Aubert à Cambrai, deMarquette, à l'église Notre-Dame de Boulogne, à l'église desFrères-Mineurs de Valenciennes, ces vieux compagnons deguerre de l'empereur Bauduin. C'est ainsi que les afflictionsde la comtesse de Flandre se traduisaient en consolationspour ceux qui souffrent sur cette terre. JelflflC allégeait de lasorte le compte sévère que doivent rendre un jour les princesauxquels sont confiées les destinées des peuples.

Écoutons le bon cordelier Jacques de Guyse, que nous ai-ruons tant A laisser parler, raconter lui-même la visite queJeanne fit aux glorieux mendiants du couvent de Valencien-nes. - «Pendant qu'on s'occupait des dispositions dont j'aiparlé, c'est-à-dire, à poser le pont et A faire le mur d'enceintedu donjon , et avant qu'on eût commencé la construction del'église et du couvent, Madame la comtesse Jeanne arriva tout-û-coup à Valenciennes, et entre autres choses, alla humble-nient visiter enpersonne les fréres-rnineursdemeurantliors tIc

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11 iiJS1'OlRE DE JEANINE,

la ville. Admirantia manière dc'vivre, les moeurs, les discourset les exemples de ces religieux, touchée de cette pauvreté heu-reuse, de cette obéissance facile., de cette continence exem-plaire, de ces austérités, touchée de cette vie pleine de sain-teté qui se cachait derrière les rigueurs d'une si grande péni-tence, elle éprouvait un véritable soulagement d'esprit àtrouver au milieu d'eux. Elle écouta très-dévotement la brèveallocution qu'un frère lui adressa sur te mépris du monde, surles vertus et les vices, sur les punitions et les récompenses:puis, l'âme émue , elle dit adieu aux religieux en versant deslarmes , et retourna en son palais.

Satisfaite plus qu'on ne saurait dire des frères-mineursédifiée de leurs vertus, elle voulut, avant de quitter Valen-ciennes, poser les fondemens de douze colonnes destinéesà soutenir leur nouvelle église, en l'honneur de ],aJérusalem et de ses douze apôtres dont ces frères imitaientla sainteté. En effet, le lendemain Je sa visite, elle revint eupersonne au donjon en grand cortège de seigneurs et dedames, suivie d'un immense concours de bourgeois et demenu peuple; et là, solennellement, en présence de tout cemonde, elle assit, posa et fixa de ses propres mains lapremière pierre de l'église en l'honneur de la trè,-sainte etindivisible Trinité, de la sainte croix , de tous les saints etsaintes de Dieu. Elle recommanda le seigneur Bauduin, sonpère, le seigneur Fernand, ses prédécesseurs, ses successeurs,et elle-même, à Dieu et aux prières de l'ordre des frères-mineurs, et répandant d'abondantes larmes, elle promit aux

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COMTESSE DE FLANDRE. 117

frères de faire beaucoup et de grandes choses pour la gloirede Dieu, la prospérité et l'élévation de l'ordre. La cérémonieachevée, elle fit ses adieux â tous et chacun, et se dirigeaaussitôt vers Gand, où la mémo année elle fonda égalementun couvent de frères-mineurs, sur la Lys, dans la paroisseSaint-Nicolas, près de la porte nommée Cacabi.

Ces oeuvres pies n'empêchaient pas Jeanne de se préoc-cuper toujours des intérêts politiques de ses sujets, de tra-vailler â leur bien-être matériel et moral. Bientôt nous laverrons , marchant d'un pas plus ferme vers ce but, qu'elles'efforçait néanmoins d'atteindre sans cesse , mettre â profitles derniers temps de sa vie â réformer d'une manière pluscomplète et plus générale la constitution du pays. Elle eutfait beaucoup plus à cette époque, sans les fléaux qui vinrentfrapper son peuple en 1234.

Le 1 . 11 jour de janvier, il gela si fort, que les blés furentglacés. La disette de grains amena une horrible famine. Leshommesbroutèrcnt del'herbe par les champs, comme'lesbêtes;enfin, pour surcroît de malheur, la peste décima de nouveaula Flandre et le Hainaut, et se répandit même en France.

L'éducation de la jeunesse, dont le gouvernement civil pa-rait s'être peu occupé gh Flandre avant le xv' siècle, fat aussil'objet de ses soins, à en juger par un décret qu'en 1234 elledonna en faveur des écoles de Sainte Pharaïlde à Gand.

Citron. Massœi, 11h. iy.

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1t8 HISTOIRE DE JEANNE.

Dans cette mérite année, des différends s'étant élevés entreles enfants de ilouchard d'Àvesnes, et ceux que, dix vivant dece dernier, Marguerite avait eus de Guillaume de Dampierre,Jeanne met l'accord entre cette famille en déterminant lesdroits de chacun, en attribuant aux uns et aux autres les partsqui leur devaient revenir de leursparents respectifs. Elle avaitcherché pat là à prévenir ces dissensions funestes qui plustard se réveillèrent si malheureusement.

En 1235, la comtesse Jeanne donne à la ville de Lille unenouvelle loi échevinale et permet à ses habitants d'ériger unehalle; ce qui ne contribua pas peuà développer parmi euxl'instinct des transactions industrielles etconimerciales, Germesi fécond de leur prospérité future.

Enfin, l'année suivante, au sein de cette même cité pourlaquelle elle avait déjà tant fait, elle fonde et dote de grandsbiens un hospice appelé encore (le nos jours l'Hôpikd-Cont-

tesse. Le portrait de la fondatrice est là qui rappellerait àchacun, si on pouvait jamais l'oublier, que depuis six centsansies pauvres infirmes de Lille doivent à la comtesse Jeanneun asile, du pain et des consolations pour le reste de leursjours.

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Ix,

De ta cour des comtes de Flandre.

En même temps, la comtesse, dont la vigilance et les soinsne se ralentissaient pas un seul instant, s'occupait du régie-ment des affaires intérieures de sa maison, Axait d'une façonplus régulière les charges et prérogatiVes de quelques grandsofficiers, tels que le chancelier héréditaire de Flandre et lebouteiller de Hainaut. -

Et à ce propos, disons en peu de mots ce qu'était alors lala cour des comtes de Flandre. Nous pensons que cette petitedigression ne sera pas considérée comme hors-d'oeuvre, et

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120 HISTOIRE DE JEANNE,

nous l'avons jugée nécessaire pour compléter la physionomied'une époque .dont la comtesse Jeanne peut être regardéecomme la personnification.

L'hérédité forme toujours, on le sait, la base du systèmeféodal; aussi voyons-nous ici comme partout ailleurs, lesoffices de cour se transmettre héréditairement, depuis] es plusillustres, jusqu'aux plus infimes. Le charpentier en l'hôtel ducomte laisse sa charge à son fils,ni plus ni moins que le con-nétable.

Les souverains de la Flandre ne reconnaissaient guéres au-dessus d'eux en puissance et en splendeur, que le roi deFrance leur sszerain, et il leur est souvent arrivé de se dres-ser à sa taille. Quoiqu'il en soit, leur cour se modelait sur lasienne. Dès le treizième siècle, elle était fort bien pourvued'officiers, grands et petits.

Voici la nomenclature rapide des uns et des autres , avecun aperçu de leurs droits et prérogatives.

Enpreniierlieu vient le chancelier de FlandreCette chargeest héréditaire dans la personne (lu prévôt de Saint-Donat deBruges 1 depus l'année 1089. Il garde le sceau du comte, leporte toujours avec lui , et suit son souverain partout où il luiplait d'aller. Les attributions du chancelier sont fort étendueset lui rapportent beaucoup. Quant à ses droitures ou émolu-ments ordinaires, ils se composent, par jour, de vingt cou-pons de chandelles, un (ortin de cire d'une longueur détermi-

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COMTESSE 0E FLANDRE. 121

née ,deux pots de vin du meilleur, deux autres pots de moin-dre qualité et douze sols de gage. -

Après le chancelier, on voit le sénéchal ou dépensier. Sesfonctions sont à peu près identiques à celles que remplissaientle maréchal du palais eu le ministre de la maison du roi en lacour de France, quand il 'y avait une cour. Le sénéchal adroità vingt coupons de chandelles,un torUn de cire, quatrepots de vin du meilleur, douze sols de gage, vingt-quatreaunes de drap à Noôl, autantà la Pentecôte, deux fourrures degi'o,vii':et une fourrure de manteau. Il tient à ses ordres unsous-sénéchal, lequel reçoit trois sols de gage, l'avoine pourcinq chevaux, etc. Le fief de sénéchal étaithéréditaire dansla maison des sires de Vavrin , celui de sous-sénéchal danscelle des seigneurs de Morselede.

Viejit ensuite le connétable, dont les gages sont à-peu-prèssemblables à ceux du sénéchal, mais un peu moindres. SousJeanne, l'office de connétable appartenait à ce Michel deHarnes qui vendit à la comtesse la chAtellenie de Cassel, etqui ,tout officier qu'il était en la cour deFlandre,sc battait àBouvines dans l'armée du roi. L'hérédité le sauve-gardait: en1227, il était encore connétable de Flandre.

Après le connétable, parait le bouteiller ou échanson, auxmêmes émoluments que le sénéchal. Cet office appartenait àla famille de Gavre. Outre le grand bouteiller, il y avait encoreen l'hôtel du comte, deux bouteillers héréditaires pour leservice ordinaire. ils recevaient huit deniers de gage, l'avoine

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22 JIISTOTIIE DE JEANNE,

pour deux chevaux, et quand ils se trouvaient avec le sei-gneur, ils avaient en outre pour eux, les vieux tonneaux, ycompris la lie qu'ils renfermaient.

Suit le chambellan. C'est une charge héréditdire de la mai-son deGhistelles. Le chambellan ou chambrier doit se trouverà la cour du comte à ?oèl etâla Pentecôte, et chaque fois queson souverain le mande. Pour remplir son office ,il est accom-pagné de deux chevaliers parés de cottes et de manteaux.C'est lui qui présente à laver au comte dans un bassin d'argent.Pendant qu'il est eu cour, il a les mêmes gages que le séné-chal. -

Enfin, au nombre des grands officiers héréditaires, il y aencore deux maréchaux, à savoir: les seigneurs de Bailleul etde la Vichte, et un pannetier ou dépensier de la maison deJ)ellengbicn. C'est de ce dernier que Jeanne détermina lesprérogatives en 1234. On remarque eutr'autres droits à luiconférés, le son de la farine consommée dans l'hôtel et lesvielles nappes hors de service.

Parmi les officiers héréditaires subalternes, on distingueles huissiers, le banheman ou chef des cuisines, le saucier,le charpentier, le lavandier qui lave les nappes et les drapsde la chambre du comte, livre la laine dans les voyages, etqui, pour ce fief, doit au comte, tousles ans à laSaint-Jean,un tourd d'épervier en argent, et un touret d'autour en fer,le litier, le lardier qui fournit à l'hôtel tourbes, anguilles,poules, sel, oeufs et poissons, le brise-celliers qui enfonce les

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COMTESSE DE FLANDRE.

portes des caves quand besoin est, l'écuetlier qui livre lesécuelles au comte. Ces six derniers offices sont héréditairesdans les maisons de Bruges et de Male.

Enfin, on trouve encore un officier chargé d'approvisionnerl'hôtel trois fois par semaine, de crème et de beurre, et quipour ce fait n droit de manger en cour chaque fois qu'il yvient.

Telle était à-peu-près organisée la cour des comtes deFlandre au temps de Jeanne. Il)' existait bien encore plusieurscoutumes qu'il serait trop long d'énumérer, et dont la moinssingulière n'était pas celle qui forçait le sire d'llazebrouck,chaque fois qu'il sortait de sa châtellenie et venait à Brugesou A Male, à donner au souverain un entremet de poissonsd'eau douce, d'une valeur de 40 sols. Mais en voici autantqu'il en faut sur cc sujet. Revenons à la comtesse Jeanne.

'l'oas les détaiLs ci-dessus sont puisés dans 'e Ca,tulau'c oblongreposant ans Archives générales à Luit,.

D

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IN

La comtesse Jeanne épouse Thomas de Savoie. Ce qui se passadurant cette union. Elle Tait son testament. Sa mort.

r

LesFJamands tales flaynuiers étaient chagrinésde voir queleur souveraine n'avait pas d'enfants. On savait bien qu'il yaurait toujours là quelqu'un pour lui succéder en cas de mort;les princes n'ont jamais manquéd' héritiers mais j'ignore sien ce temps-là on n'éprouvait pas beaucoup de sympathiepour Marguerite-la-Noire, comme on l'appelait alors, si onn'avait pas une bien grande confiance en la sagesse de celte

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12e HISTOIRE 0E JEANNE,

femme qui plus tard cependant fit tant de belles et bonneschoses; toujours est-il que les barons et les communes desdeux comtés désiraient vivement que Jeanne se remariât, etque surtoutce nouveau mariage nefèt pas stérile.

Marguerite de Provence, la jeune épouse du roi Saint-Louis, avait quinze oncles et tantes dans la seule maison deSavoie. Ellejeta les yeux sur un prince de cette nombreuse etpatriarchale famille peur en faire l'époux de Jeanne de Cons-tantinople. Il s'appelait Thomas, comme sou père Tlionast t ' comte cli) Savoie. C'était un homme de 37 ans, d'unebelle prestance, ' et, à défaut d'une grande fortune ,remplide solides qualités d'esprit et de coeur. Dès son jeune âge, ils'était livré à l'étude des lettres, car on le destinait à l'église.Cinq de ses frères étaient déjà dans les ordres. Lui-même,paraît-il, avait inutilement prétendu à l'évêché de Lausanneet à l'archevêché de Lyon. Quoiqu'il en soit, ce prince offraittoutes sortes de garanties de sagesse et d'expérience. On leregardait comme un brave chevalier, digne d'unir sa destinéeà celle d'une femme que tant de malheurs et de vertus pla-çaient bien haut dans l'estime de ses contemporains.

Biaus tu dc membres CL de cors,M ais en 1a fin , c'est nies recorsQui bics, en vient dire le voir,Centius oui à petit d'avoir

• Assés estoit séu rs et fersEt si et bec laits estet clersCière aL hardie cern lions.

in. M. V. 29442.

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COMTESSE 0E FLANDRE.

Le mariage se fit en octobre 1236, à la satisfaction dechacun, sous les auspices du roi et de la reine de France quiaimaient singulièrement leur cousine de Flandre. C'est ainsique Jeanne devint, par alliance, la tante de Saint-Louis.

A l'occasion de cet union, Marguerite, soeur de la comtesseet son héritière présomptive, consentit qu'une pension via-gère de six mille livres monnaie d'Artois, à percevoir sur lesdomaines de Flandre et sur le tonlieu de Mous, fût attribuéeau comte pour le cas où Jeanne mourrait sans progéniture etavant son mari. C'était là un revenu convenable il équi-vaudrait aujourd'hui à 500,000 francs environ. Plus tardlorsque Marguerite eut succédé à sa soeur, elle racheta cetterente moyennant 60,000 livres.

Au mois de décembre 1237, Thomas et Jeanne allè-rent à Compiègne pour rendre hommage au roi Louis M.Là ,s'éleva une difficulté. Le roi prétendit que le comte devaitjurer d'observer le traité de Melun, a yant de faire hommagede ht Flandre. Le comte disait, au contraire, et il avait raison,qu'il ne deyait et ne pouvait rien promettre avant d'avoir, adpréalable , satisfait à l'observance d'une formalité essentiellede la constitution féodale; que tant qu'il n'était reconnu pourcomte de Flandre, il ne pouvait, à l'égard du roi, s'engageren cette qualité. Ce différend fut remis à l'arbitrage de troispairs du royaume, Anselme, évêque de Laon, Robert, évêquede Langrcs, et Nicolas, évêque de Noyon , qui statuèrent enfaveur du conitc, il est à remarquer qu'eu prêtant foi et hovi-

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hISTOIRE DE JEANNE,

mage, Thonus et Jeanne donnèrent au roi les sûrelés eNhor-hitantes réclamées par le traité primitif de Melun , du moisd'avril 1225, tout en jurant de ne jamais revenir sur ce quis'est passé antérieurement à la paix de 1226. Mais tout celan'était plus que de forme et ne tirait pas aux mêmes consé-quences qu'en 1225, où il y avait un comte de Flandre'à fairesortir de prison et une sZmme de 50 mille livres à payer auroi. Ce que Louis IX voulait, c'était déterminer les limites deson autorité , comme suzerain , à l'égard des comtes deFlandre, et surtout prévenir les envahissemens du -vassal leplus puisant et le plus à craindre qu'allait bientôt avoir lacouronne de Franco. Saint-Louis, comme ses prédécesseurs,en avait eu le pressentiment.

Thomas de Savoie venait à peine d'être reconnu par lesbarons et les communes de Flandre et de Hainaut, en qualitéde souverain des deux comtés, ou pour mieux dire, de bailet mainhour, lorsque l'occasion se présenta pour lui d'appe-ler aux armes les hommes de guerre de sa nouvelle patrie.Guillaume de Savoie, son frère, était en ce moment-là eù butteaux agressions violentes de Waleran , duc de Limbourg. -Thomas s'avança pour porter secours auprèlat, mais Walerann'attendit pas que le comte de Flandre fit arrivé pour fairesa paix, et la chose en resta là. --

Il n'y eut pas d'iutres expéditions guerrières en Flandre-jusqu'en 1249. La paix y régna, sans être troublée par aucuneespèce d'événeniens fâcheux. Cette période de six ans de

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COMTESSE 1)E FLANfiRE. 129

calmé non interrompu permit à Jeaune et à son mari des'occuper efficacement des réformes politiques que récla-maient la constitution du pays et les progrès de la liberté.

Ce n'est pas ici le lieu d'entrer dans des considérationsi.endues sur les résultats moraux, intellectuels et politiques

de l'affranchissement des communes. E Il nous doit suffirede signaler les actes importans qui furent comme le couron-nement de l'oeuvre entreprise par Jeanne , de constituer letiers-état, de régulariser son action, de le faire enfin partiel-per d'une manière sérieuse au gouvernement du pays.

Nous ayons déjà dit que le Hainaut devait à Baudouin IX,père de la comtesse, des lois gén'érales dont il fit jurer l'obser-vance par les nobles du pays, lois qui peuvent être regardéescomme la base du droit public, civil et criminel de ce pays.•Jeanne n'eut donc pas refaire pour le Hainaut ce qui étaitdéjà fait. Aussi ne s'occupa-t-elle que des villes flamandesqui, du reste, sous tous les rapports, étaient aussi les plusimportantes. Comme on l'a vu plus haut, Gand , Bruges,Ypres, Lille, flouai, Seclin, etc., avaient déjà leurs chartes etleurs réglemens municipaux. 0e 1239 à 1241, elle confirma deconcert avec le comte Thomas, sort époux, les priviléges pré-cédemment accordés à la ville du Dain , lui en concéda de

Voyez à ce sujet l'excellent ouvrage intitulé De l'aflranclsisscmo,udes conu,,esues Sous le Nord de la Frpswc' et des avantages qui en sautrésultés, par M. TAILtAn , conseiller à la cour royale deflonai, in S.Cambrai, 1837-

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130 hISTOIRE DE JEANNE,

nouveaux, ainsi qu'à la ville deCaprick, etreformal'échevinagede Bruges.

Une des institutions les plus remarquables sous le doublepoint de vue de la législation et des moeurs, c'est la keure oucharte que Thomas et Jeanne donnèrent en juillet 1240 à lachâtellenie de Bourbourg, â celle de Fumes , et à la terrede Berghes-Saint-Wïnoc. Entr'autres dispositions curieuseson remarque celles ci : - Le comte retient A lui la con-naissance du meurtre, mordaci ,ainsi que l'incendie commis

en plein jour. dachbra,t,le délit commis en sa présence ,lesforfaits des dianes et des forteresses, la dépouille du mort,rarofh, la violence faite dans les églises, etc. - Celui quibattra une femme paiera au comte trois livres, et vingt sols àla femme. —Si un voleur est pris avec son vol, il sera amenédevant la vierscare, (tribunal de la .keure), on entendra sesallégations, et il pourra être convaincu sur-le-champ parle serment de celui qui l'aura arrêté et par quatre pi'ud'hom-mes. - Les keurhers 2 paieront le dommage des incen-dies qui se commettront dans les villes; si. l'incendiaire estconnu, il sera banni A perpétuité, et ses biens paieront ledommage le reste appartiendra au comte. - Celui qui seraaccuse de nacibrant, (feu pendant la nuit), devra se justifier

La keuro, dit M. Warnkœnig dans son Histoire dc la Flandre.5, 2 98. contient, comme la loi des xi' tables Pto,ne, les règles fors ,

da meolales du droit public et criminel de la -ville, et de son organisa-tion judiciaire.

2 ceux qui participent aux liénéflees de la keure.

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COMTESSE DE FLANDRE. 131

devant cinq leurhcrs; autrement il sera pendu.—Si quelqu'un

est accusé de vol devant la justice, il pourra se disculper la

première fois enprésence des quatre hommes de bien de sonespèce, ou de cinq keurhers dans la vierscare. S'il est accusé

une seconde (bis, il se purgera en présence de cinq kcurhers

seulement; s'il lest une troisième fois, la keure ne pronon-

cera rien, mais le seigneur en fera justice comme il lui plaira.

- Celui qui aura fait tapage dans une église (herestorm),

paiera au comte trois livres. - Celui chez qui on trouvera un

canipù!urn, (espècede bâton nouevx), ou une massue torcoise,

hors de sa chambre ou de son bahut, paiera au comte trois

livres. - Toute personne qui portera des armes défendues

en dedans la keure, paiera la même somme au comte. Il est

cependant permis aux échevins , keurhers, chevaliers, fils

de chevaliers-et voyageurs de porter des épées. - Celui qui

portera son épée à l'église, paiera trois livres; s'il sen sert

pour faire mal, il en paierasix.—Personue ne doit plaider dansl'église ou dans des maisons particulières pour choses dont la

connaissance appartient à la keure celui qui en sera con-vaincu paiera l'amende de trois livres. - Les officiers du

seigneur ne pourront saisir la maison ni les biens de quel-

qu'tin, si ce n'est par le jugement des keurbers. - Ceux

qui, parjugement des keurhers, se rendront en étage sontobli-

«s de rester trois fois quarantejours dans la maison du comte

ou' dans l'endroit qui leur aura hé désigné, sans armes: il ne

leur sera pas permis de passer les bornes qu'on leur aura

prescrites, à moins que le feu ne prenne à la maison. - Ceux

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132 HISTOIRE FE JEANNE,

qui auront joué de ludo tuloru,n, aux osselets, aux dcx, paie-ront une amende de 20 sols il sera cependant permis dejouer aux dames et aux échecs. - Celui qui tiendra tavernehors dela ville paiera trois livres d'amende, ctsa maison serabrùlée. - Celui qui lèvera ou fera lever le drapeau, signunilevaverit, à moins que par nécessité, ou de nuit, lorsqu'il en-tendra du bruit , ou de jour, lorsqu'il sera attaqué dans samaison , ou à cause de l'eau, paiera, sil en est convaincu, 60livres au comte.—Celui qui sera trouvé portant une cuirasse,

ha! bcrquel, ou un bonnet de fer, le perdra et paiera troislivres au comte. - Si quelqu'un est accusé d'avoir enlevéunefemme, la Justice doit faire arréter l'homme et la femme, lesretenir et les ajourner au troisièmejour; s'ils comparaissent.,l'homme doit être d'un côté et la femme de l'autre avec sesparents. On dira à la femme d'aller avec cet homme î si elle yva, il sera libre et devra l'épouser; mais si elle refuse d'alleravec lui et se plaint du rapt, on fera justice de l'homme.

Bisons ici que ces keures, ces chartes d'affranchissementpleines de dispositions si sages, si naïvement libérales,, nefurent pas le résultat de l'insurrection. On ne trouve aucune

trace en Flandre, à cette époque, de commotions popu-laires dont le but aurait été de forcer la main au souverainà l'effet d'obtenir un accroissement (le privilégôs. JI n'enétait pas besoin. Enaffranchissant les communes, les comicsfaisaient tout-la-fois acte de justice et acte de bonne poli-tique. Pour ne parler que dc Jeanne , elle avait certes

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COMTESSE DE FLANDRE. 133

plus à se défier de la noblesse que de la bourgeoisie , témoinla présence de plusieurs barons flamands dans les rangsde l'armée royale à Bouvines, et l'échauffourée révolution-naire dont le faux J3auduin n'avait été, peut-être, que leprétexte et l'instrument. Nous ne voulons pas dire , toutefois ,qu'une crainte prévoyante, trop bien justifiée dans la suitedû temps, n'ait fait caresser un peu ce lion populaire qu'iln'était pas prudent d'agacer ou de mécontenter. Toujoursest-il qu'au xiii.' siècle, les comtes e Flandre ne voyaientpas sans une certaine satisfaction le beffroi des communesélever sa tête plus haut encore que le donjon féodal.

Cependant la mission de Jeanne sur la terre allait êtrebientôt tout-à-fait accomplie. Thomas de Savoie semble avoirpressenti que le rôle secondaire qu'il remplissait ne devaitpas tarder à cesser avec la vie de celle par la grâce de qui ilavait été fait comte de Flanche et de Hainaut. Il ne voulutpas que l'histoire, à son chapitre, restât entièrement muette;que le sobriquet flétrissant de certains rois karolingiens fûtinscrit sous sou nom. Sans doute il aurait suffi que Thomaseût attaché son sceau à côté de celui de l'illustre fille deBauduin, pour être à jamais sauvé de l'oubli ; mais il ne s'encontenta. pas. Le peu d'années que ce prince vécut au milieudes riches campagnes, des cités populeuses du dômaine de safemme, furent par lui employées utilement et non sans gloire.Il répara plùsieurs forteresses et ne dédaigna pas de portersa sollicitude sur l'agriculture et l'amélioration des races debestiaux. On assure qu'il fit venir des chevaux d'Espagne et

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136 HISTOIRE DE JEANNE,

de Pouille, des taureaux et des vaches de Savoie d'uneénorme grosseur, et qu'il en établit des haras dans la forôt

de Mormal, contiguc à sa résidence d'été du Quesnoi. Sa

bravoure comme homme de guerre eut aussi l'occasion de se

déployer en 1247. ilenri, duc de Brabant, qui jadis, lors de

la grande coalition de 1214, avait fut alliance avec le comte

de Flandre, ne tint pas, dans'la suite, tout ce qu'il avait pro-

mis. Thomas entra à main armée dans le brabant, qu'il ra-

vagea, prit Bruxelles, s'empara de la personne du duc et de

celle de son frère Godefroi, et ne les relâcha qu'après en avoir

obtenit bonnes rançons. L'année suivante il alla guerroyer au

comté de Namur. Il venait de prendre une des forteresses les

plus considérables de ce pays, le château de l'oilvache , lors-qu'il lui arriva de Flandre une funeste nouvelle. Il y revint en

toute hâte,.

La santé de Jeanne ébranlée par les secousses, les émo-

tions de toute nature qu'elle avait subies durant le cours desa vie, était fort gravement compromise. Le comte Thomas

trouva sa femme malade à l'abbaye de Marquette qu'elle af-

fectionnait d'une façon toute singulière, et où elle résidait

souvent dans les dernières années de son règne. Elle y avait

même fait bâtir un hôtel qu'on voyait encore au xvJt.e siècle;c'est là qu'elle allait se reposer des affaires et se livrer hum-

blement à la prière et à la méditation au miticu des reli-

gieuses dont elle avait maintes fois ambitionné l'existence

pleine de calme et de bonheur. La douleur du comte fut

grande, mais elle ne pouvait ]'être plus que la résignation de

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COMTESSE DE FLANDRE. 125

tic sa vertueuse épouse. banne envisagea, sans éprouver d'ef-froi, la mort qui s'approchait d'elle. Lorsque jetant un regardvers le passé, elle interrogea les souvenirs de sa vie publiqueet privée, rien ne dut venir troubler sa conscience, car c'estavec une confiante tranquillité d'âme qu'elle attendit le mo-ment suprême où le bien et le mal sont mis dans les plateauxde la même balance.

Vouiantsayoir si l'instant étaitarrivé pour elle de se dégagerde tout lien terrestre et de déposer enfin cette couronne qui,depuistrenteannées, avait tant pesé sur sa tète, elle manda lesfisiciens et les requit dé lui dire sue mal était sans remède. Ilsrépondirent qu'odi.

Jeanne alors demanda congé au comte Thomas, son mari,de prendre l'habit de novice et de se faire transporter au cou-vent. Le prince, fondant en larmes, le lui accorda. Elle vécutencore quelque temps de la sorte, priant et méditant sous larobe de bure, au milieu de la communauté qu'elle édifiaitpar soit Plus humble que la dernière des humblesfilles de ce monastère, la comtesse de Flandre et de Hainautne faisait rien sans la permission de l'abbesse. Elle n'ouvraitmême pas la bouche pour parler, au dire des chroniquesauxquelles nous empruntons ces détails.

Cependant, la maladie faisant des progrès rapides, la com-tesse dicta sort en présence d'une auguste assemblée.Le comte i'homas, son mari, et Marguerite, sa soeur , étaientlà près de son lit, et Ù côté d'eux ,le prieur de l'ordre des

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136 HISTOIRE DE JEANNE,

fières prêchSrs de Valenciennes avec trois religieux du mêmeordre, Pierre d'Esquermes, frère Michel et frère Henri duQuesnoy, G., prévôt te Marchiennes, A., doyen de la Salle,le seigneur Fastré de Ligne, le seigneur Watier de Lens etplusieurs autres barons. Une pensée, une seule pensée dejustice et de charité présida à cet acte suprême que nouscroyons devoir reproduire, au moins en substance

((Au nom du Père et du Fils et de l'Espritsaint, ainsi soit-il.Moi Jeanne, comtesse de Flandre et de Hainaut, pour le salutde mon Aine et de celles de mes prédécesseurs et successeurs,je fais mon testament sous la forme ci-dessous, et je veux qu'il.ait force comme testament, sinon cornmé codicille, sinoncomme expression de la dernière volonté d'une mourante..—J'entends, par dessus tout, que mes dettes de quelque na-ture qu'elles puissent être, soient pleinement acquittées. Sij'ai injustement occupé l'héritage d'autrui ou si j'ai détenu desbiens pris indûment par mes prédécesseurs, je veux qu'ilssoient rendus et restitués partout où.ils se trouveront, et jedonne pouvoir à mes exécuteurs testamentaires, plushas nom-més, de remettre en leur possession ceux qui auraient desdroits à une restitution; je veu* aussi qu'il leur soit entière-ment satisfait de tous dommages et intérêts, - (Suiventles re-commandations et les dispositions les plus scrupuleuses pourque personne n'ait rien à réclamer à sa mémoire et à celle deses ancêtres. D'une part, trois mille quarante livres, monnaiede Flandre, et d'une autre, dix mille livres, même monnaie,sont assignées A ces restitutions éventuelles. Si ].a ne

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- -. -, -COMTESSE 1h FLANI)ltE. 137

suffit pas, son mari, sa soeur nies frètes prêcheurs sontchargés de pourvoir au surplus.) - Pour récompenser lesgens de ma maison, je leurlègue, sur les dix mille livres men-tionnées ci-dessus, mille cinquante livres, à chacun suivantque je l'ordonnerai de bouche ou par écrit. Si je ne disposepas en totalité de cette somme, mes exécuteurs testamentairesdistribueront le reste de, cc qui n'aura pas été expressémentassigné par moi à chacun de mes serviteurs, selon son mériteet son état, suivant l'avis de ma soeur et des frères prêcheurssus-nommés. Sur ces mêmes mille cinquante livres, je lègueA Jeanne de Montereuit, deux cents livres de Flandre , et àdame Marie du Châtel cent livres. Item, à ladite Jeanne, jelègue quarante livres de rente viagère, et dix à ladite Marie,etc. —Je veux en outre et j'ordonne que tous mesjoyaux, niesreliques, mes livres, mes vases d'or et d'argent, tous les ob-jets et ornements de ma chapelle, tout ce qui sert à ma table,à ma chambre à coucher, à ma cuisine, et autres choses affec-tées spécialement à mon service soient remis entre es mainset à la disposition de mes exécuteurs testamentaires, afinqu'ils en usent selon leur conscience pour le bien de monlime, etc. - Libre d'esprit, jouissant du sain usage de maraison, j'ai ordonné ce qui vient d'être dit, et j'ai constitué etje constitue expressément pour les exécuteurs de mon testa-nient mes révérends seigneurs en Jésus-Christ, lés évêques deCambrai etde Tournai, quels qu'ils soient à l'heure de mamort, etvénérablcs et discrètes personnes, leseigneur Watier,abbé de Saint-Jean en Valenciennes, maitre Gérard, écolAire

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138 HISTOIRE DE JEANNE,

de Cambrai, et maitre Éloi de Bruges, prévôt de Saint-Pierrede flouai, etc. - Je veux que ces mêmes exécuteurs testamen-taires procèdent pour les restitutions et l'acquit de mes legssuivant droit et justice et de la manière qui sera la plus profi-table au salut de mon âme. Ainsi, qu'ils satisfassent toutd'a-bord les pauvres, les indigens, et ceux envers lesquels je suisle plus obligée. L'illustre et très-cher seigneur, mou épouxThomas, comte de Flandre et de Hainaut, et ma très-chèresoeur Marguerite, dame de Dampierre, ont promis, de bonnefoi, d'observer, fermement et inviolablement toutes les dispo-sitions susdites. - Enfin, je supplie ma très-chère soeur, mesexécuteurs testamentaires, tous mes fidèles etmes amis, d'agiravec telle diligence et promptitude pour l'exécution de mavolonté , que mon âme ne puisse souffrir dommage d'aucunretard. - (Suivent les noms des témoins que nous avons nom-inés ci-dessus.) —Fait en l'an du seigneur 1244, le second di-manchb de l'Avent, e

Lorsqu'elle eut fait son testament, le mal empira de tellesorte que le lendemain lundi elle rendit l'âme en la salle de

pierre de l'abbaye. Jeanne avait alors 54 ans environ. Onne douta pas en ce temps-là qu'elle no fàt allée droit au ciel;car on la trouve inscrite sur le ménologe de Cîteaux, aunombre des bienheureuses de l'ordre, à lit du 5 dé-

cembre.

I Yr.ir le teste de ce testa meut aux Puces Jissiific.a inca.

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COMTESSE DE FLANDRE. no

Ainsi vécut et mourut Jeanne de Constantinople, comtessede Flandre et de Jiainaut. Quels que soient les reprochesimpies que l'ignorance, qu'une haine aveugle, qu'un étroitesprit de paradoxe aient cru devoir adresser à cette femmeremarquable, son nom n'en restera pas moins cher à tous lesenfants d'un pays>ay dont elle a inauguré l'émancipation et pré-paré l'opulence. Les sageset belles institutions de Jeanneprotestent solennellement, depuis six siècles et plus, contre lescalomnies donton a voulu flétrir sa mémoire.

La fille de Baudouin comptait Charlemagne au, nombre deses ancétres; elle eut Charles-Quint pour arrière-neveu et pourhéritier. Ne mérite-t-elle pas d'être le lien qui doit unir dansla pensée des Flamands ces deux grands empereurs?

Nous sommes heureux de pouvoir encore ici donner des détailsintéressants et loti t4-(ait inédits sur la mort et la sépulture de la cent.tosse Jeanne. Nous puisons les premiers dans un manuscrit du Xltl.'siècle, reposant aux Archivas générales 4 Lille, sous le turc de Parti-cularités sur ('Abbaye de Marquette, iii-4. -, voila , p. IX, et les autres.dans l'ouvrage de Dom Gooselaire , cité plusliant.- En l'an dol incarnation soit cc et XfAtLI,el mois de décem-

bre, le vieille St.-Nieliohai, trespassa me dame li noble contcsse Jehaneet avoit ailont 4 nourrit le noble conte Tttumas de Savoie U Lu frères 4le b&le Bictres coutesse de Pronveriebe et lu mère 4 le royne deFranche jadis espeuso au saint roy Loys. Et avant ko inc dame fiimbue coutesse Jehane trespassast , pour le grand affection et le grainLenteur de dévotion kcle avoit au convent de chaiens et pour teflanelle Thomas sera matit de prendre les dras dcl ordure , et ildolnris et courcejijé de coer de te desaevranche de tel dame, asseurésdes 1iltisi ions kele aie punit respasser, . en grant tristeche et en gratislarmes Il otria. Et 'ne daine Ji abbeesse Bierte et tons li couveras 3dnuit CI jour çstoierit entour li - en gérnissemens et car pleurs. eudolcu r(le le pierte de si b auto . dc si noble , de si gentit dame et de si duo-clic cL Joie] mère Id itou vietemen I avoit (ondée cesse maison et avaittant [ait ri encore entendoït faire gratis biens, li donnèrent lurdene

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140 HISTOIRE 1)E JEANNE

en habit de novisse et t'1e le rechut en grant jnoie et e o rant flanelle sen salut et tantr,st prist ses coingiés à me dame l'abbesse de score

dite de parler et d'ausres choses, et trespassa chaiens en le sale dePiero, le j our desesure nommé.

Elle avoit, dit Coosclaire , fait bastir un buste) dans let.-ceinte de ce monastère • que l'oit void encore aojoord'luny , où elleavoit construire de venir de temps en temps, et d'y rester quelquesjours hors du bruit et de l'embarras do la cour pour vacquer avec p1os(le repos aulx affaires Je son salut; mais quand elle•eust obtenu la per-mission de son ipottx de quitter tout ' t ' fait les vanités di, monde, ellevint en ce monastère non plus polir eslre la maisiresso , ainsy qu'elleavoit tousjours esté, niais poiii'estrela dernière de toutes, à l'exemple dusauveur du monde, qui dit de luy mesure , qu'il y est venu pour servi,'et non pas pour esire servi. Elle demanda donc l'habit de novicequ'elle obtint et reçut des mains de madame Lterle. abbesse de )éansavec plus de joye et de contentement qu'elle n'avoit On souz les ses-temens royaux, qu'elle a voit portés si long-tom ps ' - Notre manuscritassure qu'elle estoit si exacte dans toutes les observances régulièresqu'elle lie faisoil rien sans la permission demadame l'abbesse, jusqu'àleur demander congé de parler. Sa santé avnit esté fort altérée partant de traverses qu'elle avoir souffert presque Incite temps de sa vie;ainsy que irons avons von ey-devant. C'est poilrquey Dieu isp-scIa bien lest de cette vallée de misères pour loy donner unecouronne de gloire en récompense de celle qu'elle avait quittée pourse donner enlièremelit à son service. Ce bonheur luy arriva le cin-quième jour de décembre de l'année mille deux cent? quarante-qua'Ire, eslant apparamment encore novice, mais (l'une vertu toute

Cou-

sommée , âgée (le einqnanle.quatre ans. - Si la voix du peuple est lavoix de Dien il ne faut pas douter qu'elle ne soit sainte, ny s'eslon-ocr que le ménologe de Cisteaux l'ait mise dans le cathalogue desbienlscurcuxde l'ordre, air jour (le son trépas. C'est DomChrisostotue Ilenriqtiv'z , espagnol do nation, docteur en shéologie ethistoriographe de notre ordre qui est l'auteur de ce ménologe , danslequel il fait tin abrégé des principales actions de cette illustre prin-cesse, —Son corps fut icy enterré avec les cérémonies et soleuanitésdeues àson mérite, et mis dans un tombeau de marbre ,au milieu ducbœerdes Dames ,au-devant de celoy du comte Ferdinand .son pre-mier Inary , que l'en voit encor auijoui'd'l.uy. Il y avoit islientourdiverses effigies relevées en bosse, qui furent toutes défigurées par leshérétiques lorsqu'ils pillèrent celte abbaye en ['.air , ainsi 'quenous dirons ci-après. Le susdit Dom Cli risostoioe tleuriquea , en sonuiéùologe , rapporte l'épitaphe suivant, qu'il dit avoir esté autrefoisgravé sur le tombeau (le noire comtesse et dont il ne paroit plusauj ou rd'l,n a ecu t. vestige.

EST SITA FLANIIISEiSIS 1 1 ItIrcEt'5 lit flMQioNtUNstsIN Tu,lul,u TAIUTS VIVIT Si't',r.IAI,i

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COMTESSE DE FLANDRE. 141

SICUT SUSANNA CŒLEOS Frit ISTA JOANNAiÇOBIitA5 TALIS , PiiOLiis FUIT iMI'EUIALISJEISTA POTENS , F05715, CLEME1S, AC I1011tltDS llOnTis.ÂNOEL11G15 MUTA FIT TUBIUS HACC COMJTI5SA.

• En voiey un autre que nous y avons ver , quoyqoe tes earactlaèresdont il estoit gravé, no parussent pas fort anciens.

ii. II. C. IUNCTA lits ET X QUATER 1115 SilitII1ÎÇA OIilIT QUINTA TiEGIiMBRhS.AFSNO MILLENO MEGIIAVIT CUM QUAP1IACENOQUARTO ET 1325 tENnIS! QU1NTA LUGEiiECi1liIiliTS. ORATE 1 1 110 LA.

r Ce double épitaphe nous u paru, aussi bien qu'à d'autres, si désa'gréablo pour son obscurité et pour l peu de sens et d'esprit de sot'autheur, que nous l'avons jugé indigne d'eslre plus long-temps sur letombeau d'une si grande et vertueuse princesse. C'est pourquoi nousl'avons fuit effacer en l'an i 6g5 et fuit graver en sa place le suivant,que nous croyons que le lecteur trouvera un peu pins raisonnable,quo)' qu'il soit bien an-dessouz des mérites de la personne dont ilparle

IIAC , QI1AM FONOAVIT ' R[QUiE JIjANNA QUiI:SCA•i'FLApconoIcUaL PRINCEPS , IIANIVONiAIQUE COMES.PIUETUUT 3115 VELUM TETUIÂS, Et JUNCTA SACIIATISVIflCtNiIiUS stIPERIS Est QUOQUE J1UÇETA cubais.

OiliT T DECEMI3RI5 ANNO SI,CC.XUTV.

01 ut mii ,,ioss/a(teatiiieu tic ,Toat,,,a, ,tt,uista rvtmef;,it voir (lue c'est utir. fuite. iI(IV0/e dc C.oucehiee).

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PIÈCES

JUSTIrICATIVES

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u

L'histoire que nous venons de tracer serait incomplète si,

pour la justifier, nous ne donnions en . appendice les actes prin-

cipaux émanés de la comtesse Jeanne, ou bien qui se rattachent

d'une manière plus ou moins directe 4 son existence politique

et privée.

Les titres déjà connus suffisamment et ceux qui -n'offrent

qu'un intérêt secondaire sont simplement analysés; quant aux

autres qui jusqu'à ce jour, n'étaient pas encore sortis de nos

archives ou n'avaient reçu qu'une publicité trop restreinte,

nous avons cru devoir les produire textuellement.

Ces documents divers, extraits pour la plupart de la Cham-

lire des Comptes du roi 4 Lute ' , ne serviront pas seulement

de pièces justificatives 4 l'histoire de Jeanne de Flandre; tes

érudits y trouveront peut-être aussi de précieux renseinemen.ts

suusd'atstres points de vue.

I T6u tes les ièc vs pros e',ait sles A reliive s générales du dé par lente p it du Nouit so's Lsuivies de ces lettres indicahives A. N.

II)

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PIÈCESJ U STI FIC ATIVE S.'

1209.— 5Août, àCourirai.

Lettres par lesquelles Philippe, Marquis de Namur, tuteur deFlandre et de Hainaut, accorde aux bourgeois et è la commu-nauté dYpres,la faculté de se choisir entre eux cinq personneschargées de conserver les droits des églises de la ville. Ces per-sonnes ne pourront quitter leurs fonctions qu'après avoir choisicinq échevins qui en éliront huit autres, lesquels feront tousserment en présence du tuteur de Flandre ou en celle de sonbailli de remplir leurs devoirs. Lés échevins seront élus tous lesans ,et en sortant de l'échevinage, ils choisiront cinq hommesprobes qui ,après, nommeront cinq autres échevins, comme ilest dit ci-dessus. - A. Ni. - Copie en papier.

1211.— 92 Janvier.

Acte de l'hommage fait au Roide France par Fernand , comtede Flandre. - A. Ni. - Imp. dans les Mémoires sur la Navarreetia Flandre par A. Galland, preuves, 145. - Baluze, )Ifiseelt.VII, 149. - Warnkœnig, Ttist. de la Flandre, 1,34-5.

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148 PIÈCES JUSTIFICATIVES.

1211. - Février.

Jeanne, Comtesse de Flandre et de itainaut, et Fernand sonmari remettent les villes-d'Aire et de Saint-Orner à Louis, filsaiLlé du Roide France Philippe-Auguste (Traité de Pont-à-Voit-din.) - A. N. - f.r Cari, d'Artois, pièce f93.— Imp. dans les

Preuves 4e ta Maison de Bétkune par Ducliesnc, P. 88. - Bis!.

de la Flandre par Warnliœni g , pièces justificatives. 1,34f..,

1212. —4Mai.

Lettres de Jean, roi d'Angleterre,Fernand, comte de

Flandre, au sujet de l'alliance projetée entre eux.

- Roi Ferando comiti Flandrhe,cte. - Sciatis quart f'idelisnoster 11eginadus comesBoloni, locutus est nobiseum de vohis,et quod libeuter vos ad rident et servitium nostrum attrahere-mls, tantum erga vos facentes de feodo vestro vobis reddendo,et de aflis , quod non subit per nos, quin amicitia inter nos etvos perpetua perseveret. Et ideo vos rogarnus, quatenus aflquosde vcsti'o coneilio discretos ad nos in Angliam , sine dilationemittatis, ad foedus inter nos eomponendum, per consilium prœ-dieU comitis, quem, pi-opter troc, nohiscuni retinemus, sieutlideles nostri, Adam Keret et Williclnil]s Creset, quos ad vosmittimus, vohis dicent. Nos veto procul de niariùa interim nonrecedernus , et vos sirniliter prope marinam vos teneatis ; ut,pnetacto inter nos et nuneios vestros negoeio nostro et vestro,eltius ad ea , pue pr1ocuta fuerint, consummanda convenirepossimus. Teste me ipso, apud London , quarto die mail. -Impr. lInIER, Poedera, nova cri., .l.ondiui , 1810. 1. 105.

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PIÈCES JUSTIFICATIVES. 149

1212. —4Mai.

Le roi d'Angleterre prête trois mille mtzrcs d'argent 4 la reine

AIal hilde , comtesse douairière de Flandre , 4 la condition que

te comte Fernand et les villes de Gand , .lintges et Ypres répon-

dront de cette somme.-

- ttcx dilecec Margaretre (Usez Matiifidi) , eomitiss Flan-drioe, etc. -Super hoc quod nobis man dastis per (idelem vestruinWillietniurn de Creseck , tic tribus miltibus marcaruna vobiscommodandis, ah iristanti medio auguste in unum annum; sciatisquod illas vobis libenter accommodabimus; iLi quod habeamuslitteras vestras patentes et litteras nepotis vestri Ferandi comitisFlandtire, ettitteras triant viilarum F1andric, seiIicet,ant', Borg,et Ipre', testificantes pied de lanto nobis tcneamini , et quod adterminum pnedictum nobis litas persolvatis; et cum litterasproediclas nobis miseritis, prmdictam pecuniam vais mittemus.Teste meipso , apud Lameb' , quarto die mail. - Imp. BnrEIt,ut supra. -

1212. —iuin,âLille.

Fernand, comte de Flandre et de ]lainant, prend sous saprotection l'abbaye de Saint-Nieolas-des-Prês hors Tournaiainsi que l'ont tait Thierry , Philippe et Bauduin , comtes deFlandre, ses prédécesseurs. - A. N. L. jer Cârt, 41e Fia-mire,Plee 33.

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150 PIÈCES JUSTIFICATIVES.

1212. —20 Juillet.

Le roi dAngleterre écrit au comte Fernand, au sujet del'entrevue qu'ils devaient avoir ensemble.

—liez (An glite)amira siso carissimoF. comiti Flandrie, saluteinet dilectionem. - Grates vobis referimus ex hoc, qucd virentprobum et diseretum Walterum de Hauhergecurt ad nos misistis,et ex Mis quie per eum rubis sigriiricastis, ad que perficiendaad honorera et commodum utriusque nostrum parmi sumusvenire usque 1)overiam à die sancueMarite Magdalento in XV diesin oceursum vestrum; et ideo ad vos mittimus dilectum et 114e-lem nostruin Jacobum de Caleto, rogantes quatinus per ipsum,vcl.aliquem de familiaribus vestris, nobis significelis si ad ter-minum ilium ad nos illue venire possitis. Misimus enim iltuccomitem Sarr' fratrem nostrum, qui vobis literas nostras p3-tentes de salvo conduetu vestro, et littteras ejusdem coin! lis, etlitteras domini Winton' episcopi , et Galfr' filii Petri justiciariinostri, et cornais Arundelr et comitis de Ferar' habere fnciet.Vos autein super hoc nos quant ternpestivè poteritis certificetis.Teste meipso, apud Wodestock, vieesimo die julii.—Lmp firsien.1,107.

121 12. —À Matou.

Lettres par lesquelles Philippe , marquis de Namur, remet àsa nièce Jeanne, comtesse de Flandre et de Hainaut, et à Fer-nand son mari, la convention qu'il avait faite avec Ilauduin,son frère, eoncernantl'échange àopérer de la valeur des terres tIcla Roche et de 1)urhuy, à condition qu'ils aideront Yolende, sasoeur, comtesse d'Auxerre, avant que les lettres de conventionsoient rendues; ils seront aussi obligés de conserver le douairede Marie, marquise de Namur, sa femme, et de protéger son

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PIÈCES JUSTIFICATIVES. 15f

cher et féal Bauduin de Labiis (de Lobes), contre toutes les que-relles qu'àn lui intente. Jeanne et Fernand doivent pourtout celaagir d'après le conseil de Nicolas de Condé et de Watier de Fon-taines. - Â. N. - Or. parch. scellë.

1213.-25 Mai.

Lettre du roi d'Angleterre d Fernand. Il s'excuse de ne pas

lui avoir plutôt envoyé secours, et le prie d'accorder créance

aux ambassadeurs qu'il lui députe.

- Ilex dileeto amico suoF. comiti Flanrhe et Hannoniœ salu-tein. Suscépimus titteras vestras, quas nobis per Baldewinum deNewport militem anisistis , et lilas vobis remittimus ut videatismandatum nostrum; et si prius ad nos misissetis, majorem suc-cursum volais fecissemus.—Mittimus autem ad vos fideles castresdilectum fratrem nostrum, W. comitem Sarr', R. comiLemBonon, Rugonemdei3oves, Heur ieumClium comitis ctl3rien deInsula , mandantes quod fidem habeatis ois , super bus qum vainsdiceut, ex parte nostra, de ncgotio nostro et vestro, qui ratumhabebimus quklquid vobiseum fecerint ad commodum utriusquenostruin, etc. - Apud Templ' de Ewell' XXV die maii, sonoXV. - lmpr. RYMEB, I, 113.

1213. tt26 Juin.

Pareille lettre de créance pour de nouveaux envoyés.

- Rex dilceto arnico suc F. ccmiti Flandrhc et liannoniœ, etc.—Mittimus ad vos dilectos et fideles castras W. comatem Sarr'

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152 PIÈCES JUSTIFICATIVES.

fratrem nostrurn, et W. de Gray cancellarium nostrum pro ne-gotio nôstro et vestro. Et sciatis pied, quicquid fldelis nostetR. cornes Bononim,et predieti, cornes frater noster, et W. eau-cellarius rester, et Johannes filins ilugonis, et Fa!kesius deUreante vobiseum inde fecerintad honorerai et c.ornmodum nos-trum, id ratum habehirnus et tenehimus. Et in hujus rei tes-limonium bas litteras nostras patentes vobis mittirnus. Testeme ipso, apnd B. eram' XXVI die junii, anno regni nostri XV.- Jrnp. RvIEu, 1, 113.

1213. - I .erSeptembre.

Le roi d'Angleterre annonce à Fernand qu'il se dispose lui

envoyer des secours en hommes, argent, etc.

- lies Ferando corniti Flandrke ,etc. - Sciatis quod nuniciivestri, •sci]icet Erra' de Landa, et prpositus de Sancto-Audo-maro venerunt ad nos in rernotis partibus regni nostri , seiIieetapnd flunliolrn' et, audito nuncio eoruni, statim rnisirnus adprovidenduni negotium vestrum, et nosipsi ad iliud expediendumfestinarnus versus London; ita quod fraternoster, cornes Sarurn,versus vos iter arripiet, una citai niineiis vestris , dorniniea,seflieet, in festo sancti Michaelis, cum denariis, gente, et allis.Et vos rogamus quatinus interim ita virititer vos habeatis, quodprobitas et sollicitude vestra n Dec et hominibus rnerito deheantcommendari pro cette habentcs quod talera vobis suceursumfaeienius, qùod pro defeetu nostri niehil arnittemus. Et sciatisquod de prdietis nuneiis vestris multum vos laudarnus, quia

ccenter et diserete nostrurn etvestrurn negotium nobis propo-suerunt. l'este me ipso, apud Stretton' , vicesirno prime dieseptembris.—(Eodemvzodo sen biftcrjohannœcomitissœ Ftandriceet Il. comitiliolon). - Impr. Rnitsn, 1,114.

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PIÈCES JUSTIFICATIVES. isa

1214. - J. Avril, à Gand.

Jeanne, comtesse de Flandre et de Hainaut, fait savoir auxéchevins et bourgeois d'Audenarde, quelle a pris sous sa protec-tion la maison et les biens de l'hôpital de N.-D. ,en cette ville ,etqu'elle ne veut pas qu'on lève sur ladite maison, tailles ni exac-tions. - A. N. - 2.' Car!. de Flandre , pièèe 42.

1214. —3Avril, à Gand.

Fernand, comte de Flandre et de flamant, et Jeanne, safemme, se soumettent âce que Gérard de Gavre, Willaume sonbeau-père, G. châtelain de Baumont, Arnoul d'Audenarde ,Bau-duin de Comines le père et Gilbert de Ilorghelles ordonnerontrelativement aux droits que Boucliard d'Avesnes devait avoir enFlandre et en Hainaut, du chef de sa femme. - A. N. - Copienid-i.rnécâ la date du 11 octobre 1249 par l'abbé de Liessies etRemi, chanoine de Châlons. - 1.t Cart. de Ham., pièce 13. -Or. parch. scellé en la trésorerie des chartes du Hainaut û Mons.—'Sajut Gtnois, I, CCLIII. - lmpr. i'kesaurs an.ecdot. I col. 842.

1215. - 19 Janvier, à Latran.

Bulle d'Innocent III relative à Bouehn'd d'Avesnes. - A. N.- Nous en avons donné la traduction ci-dessus. V. p. 53.

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154 PIÈCES JUSTIFICATIVES.

1216. —13 Janvier, à Audenarde.

Jeanne exempte de toutes tailles les personnes qui viendront

demeurer à Courtrai.

- Ego Johanna Flandrie et liainonie comitissa, universis adquoslittere iste pervencrint notum fieri vola quod mares liii quide alienis terris videlicet de alUs terris qum de terra mea velde dotalicio domine Mathildis regine, Flandric cornitissevenient manere in villa mea de Curtraco liberi erunt, quamdiuvixerint, de omni tallia que fiet apud Curtracum,ct hoc eis perpresentes littcras meas patentes concedo. Sed vola quod heredescaraco, si eos habeant, tallias solvant sicut alU biirgenses mei.Actuin apud Aldenarde per consilium dilectorum meorum \Yal-teri de Avesuis, Walteri de Somerghem, Sigeri de Moscron,Philippi d'Eenan, seria V. post epiphaniam domini, anno mille-simoducentesimo sexto dceimo. —A. N. - Orig.parch. scellé.

1217. - 17 Juillet.

Bulle UHonorius relative à Iloucliard. -Voir ci-dessus la

traduction de cet acte, p. 56.

1218. —12 Octobre, à Lille.

Jeanne, comtesse de Flandre et de Hainaut, donne aux bour-geois de sa ville de Seclin les mêmes lois, privilèges et coutumes -dont jouit la ville de Lille. - A. N. - ter Cart. de Flandre,pièce 46f.. - Impr. Recueil des ordonnances dis Louvre, 1V,320. Sous la date de 1280,

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PIÈCES JUSTIFICATIVES. 155

1218. —28Octobre, à Lille.

Michel de humes, conniitable de Flandre, cède â Jeanne la

châtellenie de Casse!.

---LEo Michaci de Ilarois, Flandrie constabularius , notant facioomnibus presentibus pariter 3e luturis quod Castçllaturam Caste-tensem, sieut cain tenuerant antecessores moi et sieut cam tene-bam integre taro infraCasletumquam extra, reportavictresignaviin manus karissimc domine mcc Johaune Flandrie et ijainoniecomitesse ab ipsa ci beredibus suis perpctuo possidendam. Ipsavero domina mea mliii dedit in excambium istius castellaturequidq'iid habebat in Broxella, in Polinchove, in Rubruec et inLiederseua, excepta feodo Gilleberti de Haveskerca. fleditetiam mihi annuos redditus quadragintorum CL trium hodorummollis avene ad brevia Jienrici de J{asebruecctsex denariorum,et ad brevia Rogeri de \Vaonis-Capella dedit ipsa mihi quadra-genta bodos trititi ètquadringentos et quinquaginta bodos mollisavene. fleijit etiam miiji nemus de Geraldi-Monte. Et sciendumest quod si Christiana uxor mea vol aliquis ex heredihus metssuper eastellatura predita rationc dotalieii vol aliqua alia occa-sione profite domine mec ire veUent ad extorsam in otique,concedo et approho quoci ipsa domina mea ad omne excambiumquod mihi dedit, stout prenotatum est, recurrat et ilind liberesaisiat et tenon donec pretaxata uxor mea et omnes beredes moinJemoratam castellaturam Casletensem ci integre resignaverintquitani clamaverint et omnino guerpierent, et cura satisdictoexeambio meo ujedietatem Lutins castellature Casletensis tencatdouce u prefata uxore mea et ab heredihus mois omnibus pres-cripta castellatura ci plene fuerit resignata et legitime confir-mata. Âcto,n est hoc et recognitum Insole, die Mereurii proximaunie festiim apostotorum Si inonis et Jude, coram ridelibus moisIlellino de Wavrin senescallo Flandrie, Petro de Bruec, Peirode Gamans, Goberto de Fondues, Urso de Fertin, Llugone deLesanes, Balduino de Fondues, Olivero de Fondues, Rogero deAnetieres, Gerardo de Avefln et Roberto de Anctieres. Annodornini M. CC.o octavo decimo. - A. N. - Ong. pardi. scdllè.

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156 PIÈCES JUSTIFICATIVES.

1219. - La 5.- férie après Sai?tftJar(iu, 4 Male.

Lettres par lesquelles Fernand, comte de Flandre et de liai-naut, et la comtessejeanne,sa femme, déclarent qu'ils ne peu-vent changer les échevins de l'office de Bruges , nisi essent falsi-fleati. Lorsqu'un nouveau seigneur viendra en la terre, il pourrachanger lesdits échevins. - A. N. - Cerf. de Flandre, pièce 136.

1220.

Lettres par lesquelles l'empereur Frédérie II casse ta sentencerendue à une diète tenue à Francfort et par laquelle Jeannecomtesse de Flandre et de Hainaut avait été privée des terresrelevant de l'empire, faute d'avoir prêté foi et hommage à 1cm-pereur. (Sous le vidimus de G. (Godefroi), évéque de Cam-brai, qui déclare que cette sentence était scellée d'une bulle d'or.- A. N. - Or. parek. scellé du sceau de l'évdque de Cambrai. -Cari, des empereurs, piéce 1. - Impr. dans les pièces j usti r. del'Jlist. de la Flandre, par Warnhœnig, 1, 348.

1220. - Sans date.

Jeanne fait un règlement concernant les lépreux de la ville doMous. - A. N. - 1:1 Cart. de Hainaut, pièce 177.

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PIÈCES JUSTIFICATIVES. 157

1220. - 6 Novembre. —20 Décembre.

Lettres de non-prejudice octroyées par Jeanne aie des

doyens et chapitre de Saint-Donat de Bruges, à cause de Var-

gent que ceux-ci lui ont donné pour le rachat du comte Fer-

nand.

Ego Johanna rlandrie CL ijainonic conhiliSsa, omnibus notutofacio quod decanus et capitulum sancti Donatiin Brugis michidederunt, ad rèdcrnptionem karissimi domini moi Fernandicomitis Flandrie et Ilainonie ,dc quolibet igne huspitum Suorumqui sub ipsis marient, septem s&idos flandrensis mnoncte, et hocfecerunt non ex jure sed ex gratin tantum. Nice vola quod oeca-sionehujus donationis possit in posterum trahi in querelam. Etpropter hue, presentem ciscontuli paginam sigilti mci appensionemunitam. batum Curtraci, seria Ii I1. post natale dominice in-carnationis, M.° CC.° vigesinlo.

—Ego Johanna Flandrie etilainonie comitissa, omnibusnotumfacio quod knarios quosntiIti concesserunt decanuset capiculumsaneli DonaLi in Brugis ad redemptionem dornini et mariti moiFernandi et Jiainonie eomitis non mihi Concesserunt pro aliquojure vol pro a!i,ua consuetudine, scd gratia tantum , et ne possictrahi in consuetudinem in poslerum tpiod feceruot de gratiaipsis presentes contuli ]itteras sigillo race sigillatas. flatumInsulis, die Veneris post festum omnium sanctorurn anno dotai niM" CC.° vicesimo. - A. N.— Cap. stntpic en purch; à !a suited'un titre de Bol.

122 1. - Le joua' de ./'dques à Courtrai.

Jeanne, comtesse de Flandre et de Jiainaut, nomme son citercousin et féal J. (Jean) sci guetir de Neclie, chteIain de Bruges,

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158 PIÈCES JUSTIFICATIVES.

pour terminer les contestations qu'il y avait entre elle et Arnould'Audenarde,au sujet du receveur dii vinage dysecI quArnoulsoutenait devoir être établi à Ath où ses hommes de Pamele lepayaient. - Â. N. - Cari, rouge, pièce 85.

1221.— Avril.

Sentence de Jean de Neelte en conséquence de ta charte ci-dessus, il décide que ta comtesse peut avoir un vinage à Yseelsans faire tort au séignetir dAudenarde et que les habitansd'Âudenarde et de Pamele doivent en être exempts. - Â. N. -Cari, rouge, pièce 86.

1221.-6 Mai, àMayence.

Henri, roi des Romains, casse et annule la sentence rendue

à Francfort en faveur de Guillaume, comte de Hollande, con-

ire la comtesse Jeanne. (Sous k vidimus de Gui, évêque de

Cambrai).

- Guide, dei gratiaCarneracensis episcopus omnihuspresenteslitteras inspecturis, salutem in domino. Noveritunivcrsitas vestraquod nos litteras felicis recordatiotiis Jieurici dei aralia Borna-noruin regis etsernper Augusti inspcximusin bec verba. - Jien-riens, dei gratia Romanorum rex et semper A.ugustus,omnibus adquos littere iste pervencrint salutem, omne bonum. Noveritisquod sententiam illam que data fuit apud Frankcnevorde proWillelmo comiti Holtaridie contra nobilem Johannam Flandrieet Ilainonie coniitissam, vidclicet quod cornes Willclmus recepit

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PIÈCES JUSTIFICATIVES. 159

in fcoduni terram illam quam dicta corniLissa jure hereditariotenchat ah imperio in feodum, per consilium prineipum nostro-ram, ex Loto revocamus et ad nichilum redigimus, et ex bus ra-tionibus quod tcmpore illo quando illa sentent!a data fuit, dictacomitissa non poterat secure veniread domiDum patrem nostrumut abeo feodum suum reeiperct et ci homagium faceret, et quodtempore illo maritus ejus Fernandus cornes Flandric et ilaino-nie erat in captione domini yogis Fraucie,et quod dictas cornesWillelmus non tenait que coneessit quando sententia data fuitpro coi unde dictam comitissam repoudrons in saisinam et pos-sessionem omnium bonorum et totius feodi quod anteecssoresejus tenuerunt de antecessoribus nostris,et volumus quod paci-fica gaudeat possessione omnium boriorum illurum et feodi illius.Precepirnus etiam prefato corniLi Wulietmo, sub periculo omniumbonorum que taret de irnperio, quod oullo modo contra hoc factumnostrurn venire presumat. Daturn Maguntie, feria quinta postinventionem sanete crucis, anho dominice incarnationis mille-simo ducentesimo vicesimo primo, mense maie. - A. Ni. - Or.parch. scellé. Se trouve aussi dans le Cari, des empereurs, pièce 2.

1221.— Mai.

Vidimus sous les sceaux de Gui, Watier et Fureq, évêques

de Cambrai, Tournai et Arras, de (rois lettres données en 1221

qui déclarent que la sentence rendue au profit du comte de

Hollande contre Jeanne, comtesse de Flandre et de Hainaut,

a été cassée et mise 4 néant par l'empereur Henri.

(Les lettres de 1221 , le vidimus de 12t6.)

—Guida dei gratis Cameracensis,W. eadern gratiaTornaceniset F. cadein gratia Attrebatensis episcopi, universis presenteslitteras inspecturis in domino saluteni. Noveritis quod nos litte-

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160 PIÈCES JUSTIFICATIVES.

ras venerahulis patris Englielberti feilcis recordationis quondaniarcliiepiscopi Coloniensis sigillo ipsins sigillatas non cancellataseut viciatJis . vidimus in bac forma. - Englielbertus dei gratissancte Coloniensis ecclesie archiepiscopus, omnibus quibus litte-ras istas videre contigerit satutem in domino. Noveritis quodpresentes fuimus uhi dominas rester ilenricus iltustris Roma-rorum rex et semper Augustus revocavit in irritum et ad niehi-lum redegit sententiam 11km que data fuit apnd Frankenvordcpro comiti Jtollandic Wiltelmo contra egregiam Ftandric etflainonie comitissam Johannani , videlicet de en quod ipsocornes WiIelmus recepit in feodum de domino nostro harissimoFredcrieo dei gratia tune Romanorum rege et semper AugusLo,nuncautem imperatorc, terram quam ipso tenait in feodum deprefata eornitissa et rationes exposait. Dominos rcx Jienricussicut in litteris suis qnas dedit super Iioe prenoniinate eomitissepleflius contiricttlr, et hoc protestamur quia per consilium nos-tram factum fuit, et in hujus rei tcstimoniurn presentcs liLterasficri fecirnus sigillo nostro sigillatas. Datum Maghuntie,feniaquinta post inventioncm sancte erucis, aune dominiec incarna-tionis rnillesimo ducentesimo viccsimo primo, mense main.Item, litteras venerabilis patnis Th. bouc mcmonie, quondarnarehiepiscopi Treverensis , inspeximus in bac forma. —Th. deigratis Treverensis archiepiseopus , omnibus quibus presentesluteras videre contigerit salutem lu domino. Noveritis quodpresentes frimas ubi doniinus noster Hennieus illustris Borna-forum rex et semper Augustus revocavit in irritera CL ad nichi-lum redegit sententiam illani que data fuit apud Frankenvordepro comite Hollandie WiIIeIrno contra egregiam Flandrie etilainonie comitissam .lobannarn , videlicet de en quod ipsecornes Willelmus recepit in feodum de domino nostre ICarissirnoFrederico dei gratia turc ltomanornm rcge et semper Augustenunc auteni imperatore, terram quam ipso tenait in feodum deprefata comitissa, etrationes exposuitdorninus rexHenricus, sieutin littenis suis quas dedit super bec prenominate cornitisse pie-n9ns continctur ,et hoc nrotestamur quia per consilium nostrumfactum fuit. Et in hujus rei testinlonium presentes Iitteras lienfecimus sigillo nostro sigillatas. Datuin Magontie , feria quinta

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PIÈCES JUSTIFICATIVES. 161

post invenUonem sancto cruels, anno dominice incarnationism illesimo ducentesirnovicesinjo primo, mense maio.—Item hue-ras viri nobitis \Varncri, quondam dicti de Bollande , vidimusin forma subscripta. - Warnefus de Bollande, omnibus quibuslitteras istas videre contigerit salutem in Domino. Noveritis quodpresentes fuimus.... (ut supra). - Nos igitur iii testimoniumomnium predictrn prcscntes luteras sigillorum nostrorumfecimus appensione muniri. Datum anno Domini millesimoducentesimo quadragesimo sexto, mense decembri. - A. N. -Or. pareil. scellé.

1222.-26 Janvier, au Quesnoy

Jeanne donne à l'église de l'abbaye de Vaucciles en Cambrésis,dix livres blancs à recevoir tous les ans sur le torilicu de Lilledans le temps de la foire, pour fournir au pain et au vin néces-saires ail sacrifice de l'autel. - A. N. - 3.' Cari. de Flandrepièce 237.

1222.

Acte dans lequel Marguerite, soeur de Jeanne, donne a flou-chard d'Avesnes le litre d'époux.

- Ego Margarata soror comitisse Flandrie et Haynonie, notunaveto fieri quod damions ho, de Avesnis, ' ntaritus meus, pervoluntatem et assensum mcum dcdit in feodum et in hommagiumdomino 1h. de Rufalise, consanguinco sua, sexaginta libras allie-mm annuathn accipiendas ad winnagia sua apud Avesuas. Quodut ratum habeatur, prescrites !ittcras sigillo mcà feci sigillari.Datiim anno Domini M.° CC.° vicesimo secundo - A. N. -

'r cari. de liai'?., pièce 14.

Ii

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162 PIÈCES JUSTIFICATIVES.

1223. - Mai.

• Jenne confirme le privilège que Philippe, comte de Flandreet de Vermandois, son grand oncle, avait en 1187 accordé àl'abbaye de Saint-Bertin , d'établir un marché à Poperingue etd'y faire construire un canal. - A. N. - JMrvs une eonfirmatioitde Louis, comte de Flandre, du 3 novembre 1366 r Gand, sous

le ,idimtes de Jean, abbé de Sainhliertin, du 14 novembre,

même année.

1223.

P. (Pierre) prévôt, B. (Roger) doycn,tout le chapitre Notre-Dame et les autres chapitres des églises du comté de Cambrai,déclarent que par accord fait depuis long-temps entre le comtede Flandre et ces églises, elles sont tenues de lui payer un droitde gavenne ,selon l'ancien usage, et que le comte de Flandredoitles défendre envers et contre tons.

Lorsque te comte de Flande, ou son héritier viendra dans lecomté de Flandre, il doit aller à Cambrai faire serment sur lesreliques, dans l'église, qu'en recevantle gavenne, il cstobligédedéfendre les églises, leurs biens et leurs pèrsonnes, et de leurdonner une nouvelle charte confirmative de celte obligation.

Le bailli qui sera nommé pour recevoir le garenne, doit faireserment dans le chapitre au nom du comte et montrer ses let-tres.

Le comte doit toujours avoir à Cambrai deux sergeotsàcheval,prêts à aller où les besoins des églises l'exigeront, et s'ils ne fontpas réparer les injures et les torts qu'on leur aura faits, les égli-ses pourront avoir recours au comte.

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PIÈCES JUSTIFICATIVES. 163

Si le comte, après avoir été averti dés dommages cotisés àquelques églises, ne les répare pas, ces églises pourront elles-mêmes se fairejustice, demander que ion descende les reliquesdes saints et empôeher qu'on ne paie au comte son droit degavenne , jusqu'à ce qu'il ait pris leur défense.

Lorsque le gai-enfle aura été décidé par l'avis commun deséglises, on ne pourra se dispenser de le payer.

Lorsque les églises auront eu satisfaction des injures qu'onleur aura faites, ou continuera do payer le gavenne au comte.

Si le comte de Flandre ou ses héritiers demandent que l'onremette les reliques h leur place, elles ne pourront l'être queparle eointelui-mjme,le demandant avec humilité, à moins quepeur raison particulière, les églises ne lui permettent d'y sup-pléer par quelqu'un de ses barons.

Le comte ne doit jamais donner de cautions pour la restitutiondes dommages faits aux églises, ni assigner ces dommages surle gaveune, mais il pourra en exiger lui-même la restitution,quand il le trouvera bon.

Quant à l'évaluation des dommages, le comte doit s'en rappor-ter au simple témoignage des églises et d'un chanoine qui lestaxera.-

Si les torts ont été commis par quelque personne puissante oupar un chevalier, et que le comte ne puisse les réparer, leséglises se ligueront pour punir le malfaiteur et exercer leurjustice contre loi. —A. N. - Cap. authentique en papier, signéeLe Monnier, et collationnée eu 1599.

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64 P1fLCES JUSTIFICATIVES.

1224. - 29 Juillet, à Courtrai.

Jeanne donne à l'église de Notre-Dame à Boulogne, huitlivres monnaie de Flandre, à recevoir tous les ans, le jour deSaint-Martin, pour le vin et les lumières nécessaires au sacrificede la messe. - A. N. - Or. parch. scellé.

I 224

Thomas, abbé, et tout le couvent de Boulogne-sur-Mer, décla-rent que la comtesse Jeanne ayant été dans leur église et ayantvu les reliques qui y sont conservées, leur avait donné ce quileur était nécessaire, afin d'acheter le pain ,ie vin et la cire,pour In célébration des divins offices. _A.N._2.t cart. de Fi.,pièce 18!. - 8. éd., p. 3.0. - Imp. MinuS, III, 679.

1224. - Octobre ,àMelun.

Le roi de France Louis VIII confirme l'accord rai t entre

Jeanne, comtesse de Flandre, et Jean de Neel.le, au sujet (/CS

difficultés survenues pour la chàtellenie de Bruges.

Ludovicus dei gratiaFrancorum rex, omnibus presenteslitterasinspecturis , salutem; Venions ad nos dilectus et fidelis nosterJohannes de iNigella, requisivitànohis coram karissiio fratre etlideli nostroPhilippo, comiteBoloniensi, et liarissimo conSatgUi-nco et fideli nostro G. cpiseopo Cathalaunensi, et dilectis ocfidelibus nostris M. episcopo Ilalvacensi, et G. episcopo Salva-iiectcnsi (sic), Francorum cancellario ,et B. de Baia Franeorumcamerario, 1%Iatheo de Monte-Morentio Franeorum constabu-lario , comte Roherto Procarum et Johanne fratre ejus, Inguer-

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PIÈCES JUSTIFICATIVES. 165

ranno de Cociaco, Stephano de Sacro-Cesari , vis-carnbcllano,Ada de BeBo-Monte et Johanne fratre ejus, Symon de Pissiaco etmoitis aflis, ut tesLaremur conventionesfactas inter dilectani con-sangliincam et fidelem nostram J. comitissam Flandrie ex unaparte, et ipsum Johannem ex altera, sicut continetur in litterisipsius Joltannis quarum- tenor tatis est. - Ego Johannes, dominusdeNigella, castellanus Brugensis, notum fado universispresenteslitterasinspecturis quod nobilis domina Johanna, comitissa Flan-drieetiannonie, debet miciji vigenti tria milialihrarumetquin-gentas et quadraginta quinque lUiras cura solidis et octo doua-dis parisiensibus, reddcndas michi ad terminus inferiusannotatos:videlicet ad pagamentum presentium nundinarum sancti Àygulpbiapud Provinum , duo mitia librarum ad tertiam diem post instansfestum omnium sanctorum; quatuor rallia et ducentas et duodecimlibras ail nundinas Latiniaceuses proximo venturas, dotera et sep-tom milia librarum et trecentas et triginta tres lUiras sex solidis etocto denariis et sciendum quod, quaiicumque bora ista paga-menta fuerint (acta michi, sieutinpresntibus litteriscontinetur,casteltania J)rugensis et ornnia (coda, sicut ea a dicta comitissatenebarn, erunt sua per istam venditionem ; et ipsa debet reci-perc homagiade nids honiinibus qui sent de illa pertineutia intaU puncLo in quai erant hommes moi et in bona parc. Et si ennui-tissa aliquid ccperat de mets reLus vel mihi fecerat aliquod damp-num , ipsa remanet erga me quita et amodo non possum iiide ah-quid ç.ctcre ah ea. Sciendum etiam , quod die sabbati ante festumbeati Martini vel ante,debet ipso venircad dominum meum Lodo-vicuin, illustrera Francorum regem, etrequirere ci quodipse dictaduelli quod dicte comitisse etmichi ail illam diem sabbati est assi-gnata, ponat in respectum osque ail oetavam instantis puriflcatio-nis botte Marie in tali puncto quali erat ad itiam dicta sabbati; etipso debet tamen facere qued dominus rcx istud faciaL Pretereascicndum quod si eontiogcret dictam comitissam dccedere quam-diu lex ista duraNt, heres ejus remaneret in tali puncto in qualiipsa est, modo ail faciendum ad diem que assignata est vel fueritassignata, quicquid facere debet, sive sit de ducllo, sire de y en-ditione; et si contingeret me decedere, litres -meus remaneretin mli puncto in quo sum,et si contingeret quod Alhericus de

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vl-

166 PIÈCES JUSTIFICATIVES.

Rom qui meus testis estin ista qucrela deticeret aut quod ipsumaEquo modo non possem babere, ego possem ponere aliquemmilitera in loco cjus,quemeumque velim et quem pàssim haherè.Insuper etiam sciendum est, quod si comitissa deficcret in hoc,quodistapagarnentanon esscntfaeta inihi et donventiones sieutinresonti script&contiuentur, qualieumquc bora mliii deflecret,

quiequid reecissem de pecunia prenotata, esset incum; ctomnesiste conventiones predicte essent nulle preterquam, de ducllobdquod ego et comitissa ravehiremus in taU puneto quali debeba-mus facere in istam conventioinem ; et si ista pecunia fucritmichi saUna M conventionesiniplete, sicutsuperius est cxpressum,bons pax érit inter comitissam et me ci Albericum prenotatumet orantes illos qui propter istud affarium odio haberentur; et vadiaduelli nullE! crunt. In hujus igitur rei testimoniom, prescrites lit-teras tien volui sigilli moi munimine roboratas. Actum anno gra-tieM° CC° vicesimo quArto, menis octobris.—Nos autem que pre-missa sont veloutes invioIabilitex observari, presentibus litterisen testaffiur ad requisitionem dicti Joliannis de Nigella et ad ins-tantiam karissimi eonsanguinei et fidelis nostri Th. cornitis'frecensisqui »ro dicta cornitissaadipsuua ficri requircbat.ÀetumMeledutii annoflomini M° CCO vicesimo quarto, mense octobris.- A. N. - 3 • , tort. de Flandre, pièce 2.

I224. - 22 Novembre, à Courtrai.

Jeanne affranchit de toutes tailles et exactions cinquantehommes qui viendront s'établir â Courtrai, pour y trai;aiUerla laine,

Ego Jobanna , Flândnie et ilaitonie comitissa, ratura Lienveto taon presèntibus quota futuris, quod ego ci successones mcia quinquaginta vins qui ad operandum lanam, ah hacdie in auto,venient manere apud Curtracum , neque talliam neque exactio-

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PIÈCES JUSTIFICATIVES. 167

nom aliquam extorquetpoterimusnec debebimus quarndiu vixe-rent, ha tamen qtiod heredes eorum,post decessum patrum suo-rum,mihi scrvientsicut alii moi burgenses. Datum apud Curtra,cum , anno Domini M.° CC.° XX.° quarto, in die sancte Cecilie- A. N. - Or. parek. scellé .

1224. - 16 Décembre, à Ypres.

Michel deBoulers, connétable de Flandre, déclare avoir venduà Jeanne, comtesse de Flandre, 250 hœuds d'avoine, qu'il rece-vait annuellement sur l'espier d'Hazebrouck , (chaque hœudvalant 28 deniers, ce qui fait 29 livres I sols 4 deniers). - Plus,tout ce qui lui appartenait à Bollezeele et qui pouvait lai rappor-ter 44 livres par an; en tout, 73 livres 3 sols 4 deniers de revenuannuel, qu'il avait eus en échange de la châtellenie et du tonlieude Cassel. La prisée de la valeur de cette châtellenie doit êtrefaite par quatre personnes, savoir: Bauduin de JlaveskerkeRaoul de Hazebrouck, Bauduin de Pcenes et Gautier de Bavin-chove. - Ces lettres ont été passées en présence de la comtesseet de la loi de ses hommes; plus, en présence 4'Arnoul d'Aude-narde,dc Philippe de Berg..., de Bauduin de Lobes, Watier dela Lake, \Vatier de Eoiseurc , Alard de ',Vastincs , Gilbert deLobes, Gui de Burke, Jean Lupi et Eustache de Loeres. —A. N.- Or. parch. scellé.— 2.'cart. de Flandre, pièce 578, et 8.' cari.ici. p. 258.

1224. - 1. 01 Janvier, à Courtrai, (en français).

Lettres d'Arnoul deLandas, sire d'Esne, qui contiennent l'ac-cord fait entre la comtesse Jeanne et lui , par lequel il prometpour lui et ses enfants, de rendre à la comtesse ce qu'il avait pri-

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168 PIÈCES JUStIFICATIVES,

sur elle et sur les siens, depuis la paix qu'ils avaient faite ensem-ble â IIaimon-Quesnoy,le mardi avant l'Ascension 1223, renonceà toutes les prétentions qu'il avait sur la terre de Fatrelos, sanspouvoir y prétendre autre chose que ce qu'Arhould'Audenarcle,Jtaoul de Mortaigne et Jean de Cyson (Cysoing) lui en donne-raient. - Arnoul de Landas doit garder les lettres que ces troispairs de Flandre donneront, et elles seront exécutées. - A. N.- Or. parck scelle.

1224. - 19 Janvier.

Jean seigneur de Neelle, châtelain de Bruges, reconnaitavoir reçu de la comtesse de Flandre, 1733 livres Gsols 8 deniersparisis qu'elle lui devait aulx foires de Lagny. -A. N. - Or.parch. scelle.

(\t l'acte du mois d'octobre ci-dessus).

1224. - Février, à Melun.

Jean, seigneur de Neclic, déclare avoir vendu â Jeannè Ç

comtesse de Flandre , la châtellenie de Bruges et ee.qu'ii tenait

d'elle en fief et hommage.

—Ego Joannes, dominus de Nigella, notumlacio univers'is pre-sentibus pariter et futuris, quod ego vendidi etquitavihereditarieJohanne, comitisse Flandrie etHayruonie, castellaniam Brugensemet quiequid tenebam de ea in feodum et hornagium; et me teneopro pagato de totasumma pecunie quam habere debebam pro hae

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PIÈCES JUSTIFICATIVES. 169

vend itione. In cujus rei memoriam, presentem caetera sigilli me munimine corjlirmavi Actum Meleduni, anno Domini miI1eimoCC.° vicesimo quarto, mense februario. - A. N. - Or. pareil.scellé.

1224. - 15 Mars.

Jeanne déclare qu'en vertu du mandement dArnoul d'Aude-narde Philippe de Wastines, Watier de Somerghem etWatier delWcnin, ainsi que ses baillis de Courtrai et d'Audenarde ont faitla division de ce qui appartient à la comtesse, d'avec la terrequ'Arnoul d'Audenarde tient d'elle. - Le ruisseau qui va entreAulertghem et Auterive, jusqu'à la paroisse de )Ifoudes et deVendeghern , sépare les deux terres le domaine du seigneurd'Audenarde s'étend jusqu'à l'Escaut. - A. N. - Cart. rouge,pièce 80.

1225. - 11 Avril.

Le roi d'Angleterre écrit au faux Ban duin, pour le félici-

ter et faire alliance avec lui.

- Rex harissirno amico suo B. illustri comiti Flandrie et Hano-nie, salutem etsinceramin Domino dilectionem. Audiyimusquod,omnipotenti Domino vobiscum misericorditer agente, à captivi-tate liberati in terram vestram venistis; obi confluentes ail voshommes vestri vos in dominum receperunt, ut decebat. Lmtatiaurons gaudio magne, optantes et volentes ut codera foederisobligatio, qua confoederati fuisse noscunturantecessores vcstrinobiscum, toutou et indissolubili nos et vos habeat amoris vin-

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170 PIÈCES JUSTIFICATIVES.

culo foederatos, quod et vos ex parte vestra velitis. Sane satis estindustrie vestrœ notorium quod rex Francie utrumque nostruinexijoereditavit, et optamus rogantes quatenus, pro loco et tenu-pore, nobiscum auxilio et eonsilio velitis assistere contra ipsumqui prati sumus manum auxiliarem vohis pro viribus extendere.Mittere autem velitis cd nos aliquem de vestris, de quo confidea-tis, qui de statu vestro , et de voluntate vestra cires prœmissanos poterit ccrtiflcarc. -Teste Rege, apud Westmonasteriumundecimo die apritis. - lmpr: RtMEB, I., 177.

1225. - Avril, à Melun.

Traité de Melun. - A. N. - Impr. par A. Galland, ouvragecité, preuves, 145,148. - Warnkœnig, I, 350

1225. - Juillet.

Evrard Kadoul, seigneur de Mortagne, promet d'acquitter etdédommager Daniel, avoué d'Arras, de la somme de deux millecinquante livres parisis à laquelle il s'était engagé à Arras pournoble dame Jeanne, comtesse de Flandre. - A. W— Or. parc.scellé.

1225. -. Août.

Michel dejiarnes promet d'indemniser Daniel, avoué d'Arras,du cautionnement auquel il s'était soumis pour la comtesseJeanne envers certains bourgeois d'Arras. - A. N. - Or. panA.scellé.. /

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PIÈCES JUSTIFICATIVES. iii

1225. - Août.

Michel de Harnes reconnatt avoir promis à Daniel, avouéd'Arras, de lui faire avoir des lettres d'Arnoul d'Audenarde etdo Radoul de Mortagne pour sûreté de la somme de 2050 livresà laquelle il s'était obligé. - A. N. - Or. parch. scellé.

1225.— Août.

Jeanne promet acquitter et dédommager Daniel , avouéd'Arras, de la caution qu'il lui avait donnée pour la somme dedeux mille cinquante livres qu'elle avait empruntée à RobertCrespin, ]3auduin Crespin , Strabon (louche) et Laurent Wagon,bourgeois d'Àrras;—A. N. - Or. parch.scellÔ.

Nota. Les quatre actes ci-dessus sontrelatifs aux emprunts queJeanne avait faits pour payer la rançon de son mari.

I'225

Jeanne fait un accord avec les templiers d'Ypres au sujet desfoires qui se tenaient dans cette ville et dans la banlieue pèndautla emaine des Rogations. - A. N. - 4. Cari. de Flandre,pièce 132.

Nota. Si3ivent trois autres pièces sur le même sujet et sur lajuridiction des templiers à Ypres et celle des échevins de lamême ville.

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172 PIÈCES JUSTIFICATIVES.

-- 1225.— 25 Août, àLille.

Jeanne pardonne aux Lillois d 'avoir tenu le parti du faux

liauduin. -

- J. Flandrie et Hainonie comitissa, dilectis suis, boiltivo ,scahinis et omnibus ittis de Insula, salutem. Novent universitasvestra quo4 ego, divini amoris intuitu , nos et omnes illos qttosodio habebam , occasione flertranni de Bais qui se patrem mentalfecit apeltari ,de omni raneore et fotefacto quod michi fecistisquictos clama libere et absolutc, excepte eo de quo fecistiserga alium vel allés quam erga me, excepta tantum modo cor-pore Bertranni predicti. Unum rogo vos quatinus ad Dominumpro me intercedere vejitis et flique intercedere faciatis. DaturaInsulis, feria quinto ante testent sancti Micbaelis, anno DominiM.° CC.° vicesimo quinto.

- Archives de ta ville de tille. Carton A. 1° Or. parch. sec!rompu. - Et Reg. aux titres K L. 3f., f.° I n.° - Sur le dos decet acte est écrit Pardon de la comtesse Menue de ceutx qui

avaient cvii contre cite â cause de Bertremicu de Rais qui Cestoitfait appeller son pire. ,)

1226 ou environ, sans date.

Fernand et Jeanne promettent de ne jamais rien réclamer

contre le traité de Mcitas , si ce Wcst la forteresse de Douai; de

nejam•is inquiéter le roi Louis IX, ses frères et sa mère, de ne

jamais manquer au service qu'ils lui doivent et de ne faire

aucune forteresse en-deça de l'Escaut.

Ego Fernandus, Flandric etilainonic cornes, et ego Johanna,Flandrie et ilainonic comitissa, uxor ejus, notum facimus uni-

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PIÈCES JUSTIFICATIVES. 173

versis presentes hueras inspecturis qnod nos convèntionessiibscriptas inivimus et fecimus cum karissimo domino nostroLudovieo, rege Francotum illustri, et heredibus et fratribus ejuset illustri regina Marcha matre ipsius, videlicet quod nos Lcne-mur tradere domino regi luteras dornini Pape continentes quoÉlsi ego cornes, vol comitissa , vel successores nostri in comi-tatu Flaudriœ resitiremus, quod absit, de conventionibus tir-matis inter dominum regem ex una parte et nos ex altera, Lau-dunensis CL Silvanectensis episcopi CL eorurn successores, infraquadraginta dies postquam ex parte domini regis Francie fue-nuL super hoc requisiti per luteras aut nuncium domiru regis,promulgarent ,aùctoritate domini Pape, sententiam excornmu-nicationis in nos et succcssores nostros in comitatu Flandrie etornnes coadjutores et Lactoses nostros , et sententiarn interdiraiin terras nostras , coadjutornm et fautorum nostroruni, et illassententias Lenerent et facereut tencri sine retaxatione , quoad-tisque id esset emendatum in cunia domini regis ad jiidiciumparium Francie. 1)ominus rex tenebiL fortericiam fluaei , in quagarnisio sua nunc est, in manu sua, ai) instanti die cireurneisionisDomini usqueaddecem annos eornpletos, ad custuni nostrum perviginti solidos parisienses de liberatione singulis diebus, cumsecnritate et fidelitate ville Duacensis, ita quod in fine illorumdeeemannoruni,rex retldetnohis fortericiamfluaei,salvoeoquodhommes ville Puncensis reno'abuni domino regi eandem secu-ritatem et fidelitatem quam alic ville Flandnie ci fecerunt. Nosfecimus haberi domino regi securitates et lidelitates inilitumcommuniarum et villarum Flaridrie de quibus cas liabere voluit,quod videlicet si nos resiliremus n conventionibus in hac cariacontentis ,milites ethomines communiarum etvillarum Flandnie,domino regi , et heredibus ,et fratribus ejus ,et domine reginematri ejus adhererent etûdcliter se tenerent contra nos, nec nobisauxilium prestarent vol consilium, quoad usque id esset emen-datumin curiadomini regisperjudicium pariumFrancic. Et si quimilites, vel hommes, vel si que villesunt qui non fecerant easdemsecuritates et fidelitates , nos de)psis cas haberi faciemus, quumsuper hoc fuerimus requisiti. Si qui autem de militibus, com-muniis vel villis Flandrie noUent facere domino regi fidelitatem

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174 PIÈCES JUSTIFICATIVES.

et securitatem quas alii tant quani ville Flandrie jamfecerint, nos cos expelteremus de terra nostra et saisiremusquicquid ipsi liaberént sine revocare cos et sine ois tradere ressuas nisi per dominum regern , vol heredes, vel fratres sues, voletiam dominant reginam matrem ejus,vel hommes corum traderoin causant occasione alicujus roi facto auto pacem isLam quiaremaneant sempèr in pace tencntes de omnibus luis de quihusdominus rexLudovicus, bone menterie, pater ejusct hommes suierantteuentes die qua cumeodem paire ejus conventioncmfeei-mus de liberatione domini nostri comitis facienda. Quod factumfuit apud Melodium ,anno incarnationis dominiee M.° CC. o XX.oquinto, mense aprili ,et niehil jurisde ectero in. tifls vendica-himus vol reclamahirnus preterquam de fortericia fluaci , sictitsuperius expressum. Nos et suecessores nostri non inquietabi-mus nec guerriahimus dominum regem , nec heredes necfratres sacs, nec dominam rcginarn matrem ejus, nec heredeseorum, nec ci deficiemus de servicio et jure facicndo, quamdiudominus rex veUt nohis facerc jus in caria sua per judiciumparium nostrorum. Nos non possumus facere fortericias novasnec veteres inforciare in Flandrin citra Ilumcn qui dieiturEscaus, nisi per dominum regem vol successores oins. Rassi-quidcm conventiones ego cornes cl ego comitissa predicti taètissacro-sanctis, juravirnus et promisimus nos bons fide fldeliter etfirmiter servaturos et volemus quod ad itias similiter firrniter etfideliter ohservàndas teneantur per omnia hercdes eLsuccessoresnostri in comitatu Flandrie._À.N._1.r Cari. Ii., pièce 553.

1226. - 21 Mai.

promesse de plusieurs seigneurs zélandais d'entretenir le

traité de paix fait entre Jeanne et Florent, comte de Hollande.-Or. parch. .scellé. - A. N. - Inip. Hist. critique de laZélande, par Xluit; 11, 460.-

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PIÈCES JUSTIFICATIVES,. 175

1226. - 12 Octobre., à Gànd.

Jeanne échange avec Raoul, seigneur de Rodes, les biens quiloi appartenaient è Meine, Genterode, Lamoronico • Botelar,Mante, 4teleine, Scilterod et Gentebrughe, contre les terres deNieppe-Eglise (Neuve-Eglise) et de iWaib. et tout ce que ce soi-gneur y possédait, excepté la nef de Merlebecke, - A. N. -2. 1 Cart. de Flandre, pièce 316.

1226. - 22 Octobre, h Lute.

Michel de Darnes, \'atier de Formezelles et Mellin de Me-terne, arbitres nominés pour terminer le différend qu'il y avaitentre la comtesse Jeanne et le connétable de Flandre (Miche! deBoulers), décident que la comtesse doit jouir des wastines, després et des eaux courantes dans la terre d'Alost, ainsi què de123 livrées de terre à Alost qui appartiennent au connéta-ble, etc. - A. N:— Or. parek. scellé. - 2.' Cari. FI., p. 574.- 8.' Id., p. 257.

1227

Vidimus sous le scel des évêques de Cambrai, Tournai etArras, de l'hommage rendu 4 Fernand, comte de Flandre,par Florent, comte de Hollande, 4 cause de la Zélande. -

Promesse de quelques seigneurs d'entretenir cet accord.

(L'acte de 1227, le vidimus de 1246).

Guide Bel gratin Cameracensis, W. eadem gratin Tornacensiset F. codera gratin Âttrebatensis episcopi , universis prcsentes

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176 PIÈCES JUSTIFICATIVES.

litteras inspecturis in Domino salutem. Noveritis quod nos lit-teras illustris viri Ftorentii , quondam comitis Hoilandie , sigilloipsius sigiltatas, non cancellatas autviciatas vidimus in liac forma.—Ego Florentius, comesflollandie, notum faeio omnibus proscrisscriptuin inspecturis quod, inter karissimum .dominum meumFernandum corn item Flandnie et me, talis interccssit conventioquod ego rccognovi ci ornnia jura sua que antechssorcs suibabueruot in terra Zelandie communia coin antecessonibus mois,hue solo excepta quod, pro majore paris firmitate, mihi concessitut obsides pacis quos ipse liabebit de Zelandia miehi recredetsuper litteras meas patentes ,si quos voluenim , vol ipsi obsidesfidejussores insitos constituent, vol portes ipsum remanchunt. Etsi de dictis obsidibus vol alUs ageudis nostnis ci non satisfacerem,ileberet inc suhmonere per hommes suas et pares mous Brugiscoram se, et per legem et judicium deberem ci ernendare. Busmediantibus, Ceci ci liomagium et dictam terrant Zetandie, Sicutantecessores moi ean ah antecessoribus suislenuerunt , ab ipsorecepi, et omnia arnieragia et votera que ci, vol castellano, sivealicui aHi ex parte sua de dicte terre proventibus debebanturusque ad hune diem sospita rernanebunt per Lias conventioneset alias in cartis nostris super hoc confectis contentas, fias si-quidem conventiones et pacem bonn flde juravi firiniter obser-vare et testes qui mnterfuerunt Ceci subseribi. S. Gerardi comitisde Ghelra. S. Balduini comitis de Bentheni, A. de Aud. S. Cas-tellani de Gandavo , R. de Gavera, W. de Formeselle, B. dei{arsmara, il. de Monte, W. de Thelingliem, M. de Kuet, J. deMirlara. Actum apud Godehide,annoDomini M.o CC.- vicesimoseptimo, feria sexta post paseha.— Item litteras virorum nobiliuniGerardi, comitis de Ghelra Balduini , coniitis de Bcnthem etWilelmi de Thclinghein inspeximus in bac forma. - Gerarduscornes de Chelra, Balduinus cornes de Bentheru et WiIeImu deThelinghem, omnibus present.Ys litteras inspecturis , salutem.Novenint universi quod nos bona flde promisimus dominocumiti Flandrie Fernando et firmiter creantavimus quod siFlorentius , cornes iloltandie ,.veniret contra conventiones mitasinter ipsos super danipnis et rapinis factis et utraque parte,secundum quod littere eorum ptenius testantiir, , dicte Ftorehtio

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PIÈCES JUSTIFICATIvES. 177

comiti liollandie nufluin consilium vel auxililum prestarenhitsadversus dietum comitem F land rie, immo dicto comiti F [and rieconsilium et auxUium prestaremus douce dicte eonvêntienesplenius servarentur. In cujus rei tesLimonilim prescrites litterassigillis nostris sigillavimus. Actant apud Codebide anno l)ominiM.° CC.° vicesimo septimo, feria sexta post pascha. - Nos igiturin testimonium predictorum prescrites titteras fecimus nostro-mm sigillorum appcnsione muniri. Datant anno flomini M.° CC.°quadragesimo sexto, mense .Iccembri. - A. N. - Or. parek.scellé.

1227. - A Lillo, après la Trinité.

Fernand et Jeanne font donation à Amont dAudenarde de cequi leur appartenait à Lengcsen (E.ancqucsaing), en récompensede ses services. - A. N. - CarI, rouge, pièce 55.

1227. - 12 Août.

Convention entre Michel de BottIers ou de Darnes, connétablede Flandre, le comte Fernand et la comtesse Jeanne , au sujetde la ville d'Erembaudeghcm•, des droits et privilèges du conné-table, etc. - A. N. - Or. pardi, scellé.

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178 PIÈCES JUSTIFICATIVES.

1227. — 10 Septembre, à Windsor.

Henri III , roi d'Angleterre, mande à son cher ami Fernand,comte de Flandre, qu'il lui accorde le même fief à tenir de luique Ic roi Jeanson père lui avait donné. - A. N. - Or, parch.scellé.

1227. - Novembre.

Le couvent de Ravensberg promet de faire célébrer l'officedivin tous les jours dans son église , pour le comte et la com-tesse, en reconnaissance dc leurs bienfaits. - A. N, - Or.parch. scellé.

1228. - Avril, Gand.

Fernand et Jeanne règlent la forme de l'élection des éche-vins de la villé de Gand, chaque année, le jour de l'Assomption.-A. N. .- jer Cart. FI., pièces 108 et 171.

1228. - Avril, à Courtrai.

Fernand et Jeanneconsentent pour eux et leurs successeursen faveur des échevins et bourgeois de Bruges, de ne pouvoirnommer de bailli ou d'écoutetes dans cette ville qu'il n'y soit néou sa femme. - A. N. - 4.' Cari. FI., pièce 71.

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PIÈCES JUSTIFICATIVES.

228. - Mai.

Fernand et Jeanne affranchissent les bourgeois de Jtodcm-bourg (à présent Ardenibourg) du droit de tonlieu qu'ils paraientau Dam. - Â. N. - 3t Cart. FI., pièce 262.

1228. - 16 Juin, â Male.

Font une donation à l'abbaye de flouxval près Ardemboui'g.- A. N. —2--et 3.' CarI. Fi., p. 66,148. — lnip. Min&us, 111, 88.

1228. . 29 Juin, â Gand.

Font une donation à l'église N.-D. de Boulogne. - A. N. -Cop. pareb. - Imp. Mn'us, IIJ, 678.

1228. - 7 Septembre, à Ypres.

Fernandel Jeanne font une donation à Waller sire de Forme-selles. - A. N. -

Cati. FI., p. 290.

1228. - Septembre, à Haimon-Quesnoy (Le Quesnoy).

- Fernand et Jeanne règlent la façon dont se renouvelleront leséchevins de la ville de Douai tous les treize mois. - A. N. -Or. parek. scellé et cep.

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180 PIÈCES JUSTIFICATIVES.

1228. —24Novembre, à Valenciennes.

Fernand et Jeanne donnent une rente de 64 sols à l'église des- Chartreux du Val.St.Pierre (diocèse de Laon). - A. N. -

1er Cari. Hain., p. 90.-

1228.-2 Février, à Pérouse.

Bulle du pape Grégoire IX qui ordonne, à la prière du comteFernand, de lever l'interdit mis sur la ville de Hile par l'arche-vêque de Rheims. - A. N. - Or. parch.

1229. - Mai, à Valenciennes.

Fernand et Jeanne donnent une rente viagère de 80 liv. et20 livrées de terre dans la forêt de Norechin, à Arnoul d'Aude-

narde. - À. N. - Cari, ronge, p. 56.

1929. - Juin.

Hugues, châtelain de Gand, promet (le ne jamais faire laguerre au comte ou à la comtesse de Flandre-,tant que lui etses frères seront traités scion les lois et jugements de la cour de,Flandre, etc—A. N.— I.- Cari. FI., p. 342.—Imp.DVdIIE5NE,Histoire de la maison de Gand, 497.

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PIÈCES JUSTIFICATIVES. 181

1229. - Juin, à Gand.

Lettres de plusieurs barons Flamands qui promettent et jurentque si Bogues, châtelain de Gond, et ses frères, n'observentpas fidèlement le traité qu'ils ont fait avec le comte et la com-tesse, ils aideront lesdits comte et comtesse, eontr'eux, de toutleur pouvoir. - A. N. - Or. parch. scellé. - 2.' Cart. i9., p.314.-8.' id., p. lit.—lmp. histoire de la maison de Gand, p. 494.

1229. - 3 Juin, à I)ettinghen.

Henri, roi des Romains , déclare donner le comté de Ncunuren fief impérial 4 Fernand.

IL. Dei gracia Romanorum rex et semper Augustus, fidelibussuis burgravio, castri et universis civitatis Namurcensis, bur-gravio de Bovine, hurgravio de Sanson et universis consortibuset infeudatis de comitatu Namurcensi, gratiam suam et onanebonum. Recognoscentes dilecto consanguineo nostro F. comiliFlandrin comitatum iNamurcensem cum omnibus attinentiissuis in feddo contulisse, prudentie vestre. regia auctoritate, pro-cipiendiim duxinius et mandandum ut quunl cornes Namur-cerisis dieni clausit extremum, castra, munitiones et civitatescum attincntiis, dicte comiti Flandrie assignetis libere tenendaet perpetue possidenda. Si quis veto quicquid juris in seine-dicte corfiitatu habere se eonfidet coram nabis et prineipibusproponat et cornes Flandrie plenam el justiciam exhibebit. J)atumapud Detinghern, tertio nonarum junii, indictione seconde. -A. N. - C'op. parois.

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i8* PIÈCES JUSTIFICATIVES.

1229. - Juillet.

Jeanne confirme la donation faite par Philippe; comte deVermandois, au chapitre de Saint-Pierre, à Aire, d'un maraisque ce chapitre avait fait dessécher à ses dépens dans le terri-toire de Bourbourg.—A. N2 . Cart. Ft.; p. %66.-4. id., p. 99.

1229. - Janvier.

Watier, châtelain de flouai, déclare que les comte et comtessede Flandre ayant déchargé Agnès, châtelaine de flouai, sa mère,de la garde des prisons de la ville de Douai qui lui appartenaità raison de sa dot, Watier se charge d'en avoir le soin; et s'ilne s'en acquitte pas bien, il consent que les comte et comtesses'emparent de tous les fiefs qu'il tient d'eux jusqu'à ce qu'ilssoient contents. - A. N. - Or, pareb. scellé. -

122.là Janvier, à Lille.

-Jàhne gàtàntit à Îldbei't, avoué de Béthune, le paiementd'ùhéÉbmmédeihille livrés pariis, polit' laqUelle il s'ôtait renducaution en sà Mcdi', ênVe's Watiér; Pilate, Jean de Foro, GuiAbdefÈ-oy et Jèàn Pèti+-MoaliUctç bourgeois de Douai. A. N. -Or. jtrdt. scellé.

J 229.

Fernand et Jeanne donnentàloidin, ditdè Wieslierkin (Vieux-Berquin),leur clerc ou à ses hoirs, huit mesures de terre ALongewées. - A. N. —4.' Cart,Fi,, pièces 45 et 177.

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PIÉCESJUSTIFICAT!YESY 183

1229.

Fernand etJeanne fontune donation à l'abbaye d'Aine, ordrede Citaux;

1230. - Mai.

Fernand et Jeanne font donation à Jean de Fera, bourgeois deDouai, en récompense des services qu'il leur o rendus, de 60muids de brai à prendre tous les ans sur le moulin de brai, àDouai. - A. N. -Cart. Fi., p. 22.

1230. - 8Juin.

Accord entre Thibaut , comte de Champagne et de Brie , et

Fernand, comte de Flandre, au sujet du commandement de

('avant-garde et de l'arrière-garde de l'armée française.

Ego T., Campanie et Brie cornes palatinus, noturn facio uni-versis presentes littcraÉ inspecturis quod coin esset Controversiainter me ex una parte, et karissimuni consariguineum meum F.comitem .Flandrie ex altera, de antegarda et retrogarda in exerci-tum domini regis faciendis, ita, ad preces karissimi domininostri Ludovici regis Francie illustris, ad eoncordiarn sumusrevocati quantum ad antegardam et retrogardam faciendas adpresens in exercitum domini regis predicti in Britannia; seilicetquod dictus cornes Flandrie semel faciet antegardam in exereitudomini regis eundo in Britanniam et bis retrogardam, quia egofuceramsimiliter in dicto exercitu domini regis: deinde in codemexereitu, in cando in Britaoniam, siniul faciemus antegardam et

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18; PIÈCES JUSTIFICATIVES.

retrogardani. Nec antem omnia fient salvo jure meo et salvo jureF. comitis Flandrie, tain saisina quam in hereditate, ita scilieetquod iflud qiiod jam fecerani non prejudicahit corniti Flandrienec illud quod facturas crit cornes Flaudrie prejudicahit michi.Actum anrio gratie M.° CC.° tricesimo, die sabhati ante (estantsancti .Ilarnabe apostoli. -A N. - Or. pardi, scellé.

1230. - Mars.

i'cslam'nt du Comte .Fernand.

lu nomine patris et fuji et spirituis sancti. Ego F'urnandiisFlandrin et Bainonie cornes: diligenter attendens (LilOd nichilest morte certius et quod nicitil incertius bora naortis , venLoqueviLa hominis comparetur, in plena vita mea sanas et incolumiset per omnia compas mentis nec, in presentia prohorum viro-ram et de consilio eorumdem , ordinavi testanientum metum etscripto firmavi prout inferius expri unotur, Volo siquidem inpri -mis ut debitu mea, si qua post niortem meatn remanebo debensde quibus constabit lugitime ,de paratiorihus bonis tueis, tain, deterra Flandrie , quitta de terra liainonie plenarie persotvantut'.Insuper assigna deeem tnilia librarum distrihuenda in restitu-tiones et in elenuosinas puante faciendas prout ego ordi naho; et siforsitan aliquo casa contingat quod ego ad plenum non ordina-vero modus restitutionum et clemosinarum quibus dispono fueride peeunia memorata, lui 4uihus exeeutionem presentis testa-menti committam super bus ordinent et disponant prout salutianimé mec viderint melius expedire. Predicta vero dccciii milialibrarum ad nernora de Mormalio et ad omnia aFin nernora Hai-nénie sôlvantur infra duos anima tel tres, nec successor meusin eisdem lacis accipiat auquid nisi de assensu testamentariorumineoriuin donec prèdictasiunirna pecuiuic fnerit plenarie peroluta.y0; 0 mitent ut tIc eisdem decem milibus librarum , octo radiaI ibrari in in res Li tut lion es e t di 'o mil la distribua ut;, r in elemosi n as,

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PIÈCES JUSTIFICATIVES.185

lia tainen quod si ôcto milia libraroun non sufficiant ad restitu-tiofies pro me faciendas, de residuis duohus niiiibus librarumunion sumatur, ut sufficienter restitntio pro nie fiat; et si, dominovolente, contingat quod necesse non fuerit octo initia iibrarumtotatiter in restitutiones distribui, quod de eisdcm octo mitihusiihrarntn, peracta restitutione, crit residuiuim, addetur predictisduobus milibus libris ad etemosinas augmentandas. Preterea egoet karissima uxor mea, Johanna, Fiandrie et Hainonic comitissa,preter redditus et possessiones quos dudum contulimus mo-nasterio defteetinatorio bcate Marie quod nos et ipsa extra Insu-km fnndavimus, de nove, redditus quadringentarum librarumeidein monasterio, nomine testamenti, de communi consensu etcommuni donc assignamus post mortem aiterius nostrum inçierpetuiini pacifice possidendos. Quorum reddituum ducentasIihras assignamus apud Dam juxta Brugis,et residuas ducentasbinas apud Ijainonis-Quercetuin, de paratoribus redditihus, senproventibus nostris annuatim sotvendas, ita tamen quod predic-lot redditus quadragintarum librarum, ad conimodum nostrumproi:t nobis piacuerit, in alio bec assignait poterimus monasteriomemorato; et si n rubis, in vita nostra, idem quadragintarumiibrnrum rcdditus non fuerint inioco alio assignati, nichiioniinussuccessor noster, si veUt, eosticm redditus retiabere poterit, sipredicto monasterio dederit exeambium comptions, sceundumestimationem venerabitiiim abbatuna de Camherone et de Lande,ita vero pied hoc fiai de asscnsu et votuntate abbatisse supra-dicti monasterii de rèelinatorio fiente Marie. Preter predictos '.'eroredditus qiiadringerutarum tibrarum, ego, de speciali dono nieo,centum iibrarum redditus ad scakarium Furnensem sumendosassigne, pro sainte anime mec, diversis rchgiosis domibus confe-rendosprout ego, volente domino, ordinabo; et si forsitan ad pie-1111m non ordinavero quibus locis idem centum tibrarum redditusconferantur, testamentarii moi super hiis ordinent, prout satutianime mec viderint expedire. Preterea jucha mea et ea quepertinent ad stabuicim, nicrisam , coquinam et cameram meampononturin marins testamentariorum meorum, nisi inde aliquidexpresse fuerit perme ordiaatum, atqne vendantur ut moi execu-tores lestanienti expensas accipiant et residuu 'n in usus palipe-

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180 PIÈCES JUSTIFICATIVES.

rom convertatur. Et UL scriptum presens robur obtineat firmi-tatis, ipsum sigillo roto et sigillo karissime uxoris mec Johanne,comitisse Flandrie et flainonie, duxi roborandum, anno DominiM.° CC:° XXX.°, mense martio. - A. N. - Or. parch. - Lessceaux manquent.

1231. - Avril.

Hubert, abbé de St.-Amand en Pevèle, déclare que Fernandet Jeanne ont accordé û son instante prière que les échevins deNeuville (sur l'Escaut) et du lieu St.-Amand soient aussi éche-vins de l'église, qu'ils soient conservateurs de ses droits et deceux des comtes et comtesses de Flandre; et s'ils ont des doutessur quelque pôint, qu'ils aillent à l'enquête û Valenciennes. -A. N. - Or. Parch. scellé.

1231. - Août.

Fernand et Jeanne donnent à l'abbaye de Maroilles le droit depêche dans la Sambre entre le bois de Murmel et le territoirede cette abbaye, etc. - A. N. - Copie en parch.

1231.7 Septembre, à Ypres.

Bauduin, comte de Guines, cède aux comte et comtesse deFlandre tous les droits et prétentions qui pouvaient lui apparte-nir dans le comté d'Alost, se réservant seulement cc dont il étaiten possession. - A. N. - Or. parch. scellé.

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PIÈCES JUSTIFICATIVES. 187

Nota. Les droits que J5auduin, comte de Guines, III. e du nom,Pouvait avoir sur le comté d'Alst, lui provenaient de Béatrix,châtelaine de Iiourbourg, sa mère, fille de Gnuti& et de Maliant.de Béthune.

121. - Janvier, à Male.

Fernand et Jeanne déclarent qu'ils sont avoués héréditairesde l'abbaye de Ninove et confirment les possessions et pri-viléges de ladite abbaye..— A. N. - Reg. des chartes.

1231. - Janvier, à St.-Quentin.

Lettres par lesquelles Robert, comte de Preux et Aanor deSt.-Valeri, sa femme, remettent è Fernand et à Jeanne tous lesfiefs qu'ils tenaient d'eux en France, et ce moyennant une renteannuellè de 80 livres monnaie de Flandre. - A. N. - Or.Pai'eh•. scellé et 2 cari, de Ftandre, pièce 388.

1231. - Mars.

Jeanne règle les charges et attributions du bouteiller (leHainaut.

Johanna, Flandrie et ilanonie comitissa, omùibus prescriteslitteras inspecturis salutein in domino. Noverint universi quod

Éli

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M

PIÈCES JUSTIFICATIVES.

coin Ilellinus, miles, dominus de Aineto, ex parte uxoris sue,in curie nostra , jura quadam ad huticulariam lianonie pertincu-tia diccret se liabere quibus ex parte usus tuent in tcmporemeo, quihusdam autem alus usus non fucrat ; ego super busvolens inquirere veritatem a quibusdam nobilibus vins et anti-quioribus terre mec, videlicet Waltero de Kieveraing, Alardode Estrepy et Balduino de Lobiis, senescalo Valenchenensirnilitibus,per fidelitatem quant mihi fecerant et debcbant adju-reLis, ex cornai fideli et concordi testimonio intellexi quod -Valterus de Aineto , pater axons predicti Bellini , buticulari'isfuit in Iota lianonia. ultra aquam de Morchiopont et dIra,et rtione butieularie habebat , de quo comitem serviebat in.Pentecostis et Natali ,et in eisdeni festis dabanLur cidem taiesvestes à corolle et talis capa foirata in hyeme, quales cornes suismilitibus conferehat; et talia vadia deliberabantur eidern in euriaqualia militihus ipsius comiLis dabantur. Eodeni autem jure ususfuerat avunculus ejus, sulicet Egidius de Aineto qui ativocatustuent uxoris Bellini predicti. In quorum perpetuam memoriamcl etiam firniitatein , presenles litteras feci scribi et sigilli metsmunimine roborari. Âcturn Valencheni, anno flomini millesimoduecntesimo tricesimo primo, mense rnartio. - A. N. - 2.1Cart.de Jiaitrnui, pièce 117.

II existe deux autres actes concernant les droits du bouteillerde Hainaut, des mois- de mars et novembre 1237, méne cari.,pièces 115e1 118.

1232. - 18 Juillet, à Male. t

Jeanne, comtesse 4e Flandre, ordonne l'observation des an-ciens usages et coutumes concernant les briefs de Bruges ditsBiens dc LaSer!. - A. N. - Cep. et parck - Inip. WAnri-KOENIC. Iiisr. de PI. 11-4.37.

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PIÈCES JUSTIFICATIVES. 189.

1232. - Aoùt.

Fernand et Jeanne exemptent les habitants de Léeder:eltc etceux qui tiennent des terres d'eux à BoWnzefle ou qui vien-dront y demeurer, de toute taille, exaction, redevances et for-faits, excepté de l'incendie, du viol des femmes et du vol, et

- promettent de les traiter suivant les lois ,coutumes et privilégesétablis par Philippe comte de Flandre. - Tous les baillis etéchevins de ces villages seront tenus de prêter serment de fidé-lité au comte avant de prendre possession de leurs offices. -A. N. - ('art. de FI. pieces 558 et 618.

Nota. Les villages ci-dessus fesaient partie de la châtellenie deCasse!.

1232. - jer, Novembre, à Cambrai.

Accord cuire fleuri , marquis de Namur, et Marguerite safemme d'une part, et .Fernand et Jeanne d'autre part, par le-

quel. Henri cède â Fernand Vieuville et Golezines et déclarequ'il tiendra son marquisat de Namur en fief du liainaut.

Henricus, marchioNarnurcensis et comes Vienne,et Margaretauxor ejus, marchissa Namurcensis et comitissa Vienne, omnibusprescrites litteras inspecturis , salutem in domino. Novent uni-versitas vestra quod cum contentio esset inter illustrem virumFernanduni , comitem Flandrie et Harmonie, etillustrem domi-taon Joliannam comitissaru Flandrie et Harmonie, ejus uxorem,ex parte una, et nos, exaltera, super comitatu Namurcensi quempetebant predicti a nohis, tandem mediantihus magnis vins, cern-posuimus in hune modurn: quod nos quitavimus eis in perpe-tuumVieville etGolosines et totum doanium quod, boue meme-rie, comitissa quondam Nainurcencis et ducissa dc .Lovaing, filiameuLe recordationis, Philippi, F'rancorurn regis, et soror nohilis

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i90 PIÈCES JUSTIFICATIVES.

viri Philippi , comitis Butome , tenuit infra cornitatum Namur-corsera abipsis et cor uni heredibus pacifice perpeLuo possideudà.Ipsi autem nichil poterunt reclarnare de ectero in residuo comi-tatu Narnurcensi, vice in terra guam tenuit in Flandria et Ha-nonia, hone memorie, Philippus, fraternostri comitisse Vienne,nisi per successionem vol excantiam dehitani et legitimam deve-niret; ad cos et nos ad homagium ligium pro dicta terra tenernureisdem, et ipsi nos et heredes nostros qui de corporibur n6stnisexierunt vel exihunt vel descendent, recipient in honiines depredictis-, salvo ornni jure, houa Me; et sciendum quod si hum-nos ipsorum de corpore vel advoeatia in terra nostra transsie-rint,cornes et comitissa Flandrin CL JJanonie pre4ic ti cos sequivcl repetere non poterunt. Remanentie autem eorurn transseun-tium penes ipsos dominos à quibus receserunt vel recessenintremancbunt. De allodiisautem sic ont: quod qui allodium hahue-ret sub nobis non poterit illud recipere a comite et comitissaFlandnie memoratis : de fortaliciis autem novis faciendis interGolesines et Namurcum, cornes Flandrie dehet se ducere perconsilium comitisseFlandrie. In cujus rei testimouiurn presenteslitteras sigillorum nostrorum munimine fecimus roborari. Actumapud Cameracum, in dieornniurn sanctorum, sono flominiMOCC°XXX° secundo, mense novembri. - A. Ni. - Or. parch. scellé.

1232. - 1. Novembre , à Cambrai.

Philippe, comte de Boulogne, déclare que par sa médiationet celle de plusieurs grands personnages l'accord ci-dessus a étéconclu entre les comtes de Namur et de Flandre. A. N. -Or. part!.. scellé.

rsférnedate. Pareilles lettres de Henri-, archevêque de Reims.- A. N. - Or. parc!.. scellé.

ftfôrne date. Pareilles lettres de Milon, évêque de Mauvais.- A. N. - Or. pare!.. scellé.

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PIÈCES JUSTIFICATIVES. lot

1232.

Jeanne et Fernand approuvent la fondation et la dotation dede l'abbaye de Orant-Pré. - Imp. MILEUS. 1.308.

1832. - 9 Décembre, à Cassel.

Lettres par lesquelles Jeanne , comtesse de Flandre et deHainaut et P. de Colmicu, prevôt de l'église de S.t-Omer, dé-clarent qu'ayant été choisis comme arbitres pour terminer ladifficulté qu'il y avait entre Fernand, comte de Flandre, et lacomtesse Jeanne sa femme d'une part; Willaumc prevot et lesdoyens et chapitres de S.t-Donat à Bruges d'autre part, ils -pro-noncent ce qui suit: etc. Or. parch. scelle. - A. N. — Imp.Minns, Opera tiplotngf. H. 1218.

1233. - Juillet.

Fernand et Jeanne confirment la vente faite par Élie,clerc,et Jean de Lille , leur sergent, de 200 bonniers de Was(iitnessitués à Alstoet près Caprick. Ils accordent à ceux qui demeure-reront dans ces WasUnnes le privilége de ne pouvoir être tra-duits en justice par leurs baillis ni à Bruges ni à Gand, maisseulement audit lieu d'Alstoe g ou à Bavenstoet.

Les mêmes accordent à Perpétuité 250 bonniers de lVastinsà Acistoet à Riquard Buettig de Flessinyhes et Willawne Land-metre. - À. N. - Regis. Ch. (Sous une confirmation de Louisde Male du 16 mari 1366, à Gand).

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192 PIÈCES JUSTLFICA1'IVES.

1233.

Jeanne fonde Bruges l'abbaye des dominicains. - Inip. Mi-RIUS. 1. 310. -

1233. -Juillet.

Lettres par lesquelles P. prévot, R. doyen, et tout le cha-pitre de l'église de Cambrai déclarent que pour ratifier le traitéfait entre eux d'une part, et les comte et comtesse de Flandre

et

de Jiaittaut d'autre part, ils sont convenus avec l'archidiacre deChâlons, le prévôt de Bruges et le prevôt de St.-*Jmcr, au' nomdu comte, qu'ils reprendront l'avoueric des villes d'Onnaing etQuaroube pendant deux ans ,que les choses resteront dans l'étatoù elles étaient avant la paix faite entre les comte et comtessede Flandre, les comte et comtesse de Namur, sauf que si lecomte de Flandre croit avoir droit d'y prétendre davantage, ilpourra le demander sans violence. - Les commissaires ducomte ont protesté et déclaré que l'absolution qu'ils deman-daient au chapitre à cause tic l'excommunication que le dit cha

-pitre avait lancé contre Fernand, ne pourrait porter à ce princeaucun préjudice, que les choses resteraient au point où ellesétaient avant l'excommunication du cohue et que le comte et lacomtesse de Namur ne pourraient jamais prétendre à-cetteavouerie. - A. N. - Or. jiareh. .sceW. - r Cari. Fi. pièce 002.

1233. - 3 Aoit, â Lille.

Accord entre Jeanne 0 Franco de Mnldeghern ,prévôt deBruges, cliancellier de Flandre , par lequel la comtesse déclare

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PIÈCES JUSTIFICATIVES. 193

que k prévot aura toujours son sceau et qu'il le- portera enFlandre, Hainaut et ailleurs où la comtesse ira. etc. —À. N.-Or. parc!'. scellé. - Imp. \VARNKOEriIG.. Hist. de la F!. II. 43fl.

1233. - Août et septembre.

Jeanne fait diverses donations aux hôpitaux de St.-Jean hBruges, Notre-Dame à Gand, d'Ypres, d'Audenarde, maladie-rie de Lille dite de Canteleu, St—Sauveur à Lille, et ce enexécution du testament de son mari Fernand. - A. N. - 2.°et3•e cart. de Flandre. - Les trois premiers actes imp, Mintvs.III. pp. 13. IV 275-276. -

1233. - Novembre.

Jeanne exempte l'abbaye de Marquette de tous droits de ton-lieu, péage, vinage,. etc. - À. N. - 1. 1,1 cart. Fi. - Imp. lfl-R.EUS. III, 304-.

1233. - Novembre , à Lille.

Mandement de la comtesse Jeanne â tous les receveurs destonlieux, vinages, passages, etc. ,tant dans les foires que dansles comtés de Flandre et de Hainaut, de ne rien demander aux

13

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194 PIÈCES JUSTIFICATIVES.

personnes qui lui montreraient les lettres qu'elle n accordées àl'abbaye de Marquette fondée par elle et feu son mari Fernand.

A. N. - Reg. des eh. 9 f.° 41.

Même date. - Différentes exemptions h la même abbaye.

1233. - 27 Décembre.

Jeanne mande à ses receveurs du tonlieu , à Lille, de payertouts les ans à l'église St.-Antoine à Paris vingt livres qu'elle luiavait données et assignées sur le tonlieu de Lille pendant lafoire. - A. N. - Or. parek. scellé. - 3. o cart. pièce 234.

1232. - Novembre.

Jeanne fait une donation annuelle de huit livres, monnaie deFlandre, à l'église Notre-Dame de Boulogne. - A. N. - Sousun vidimus du 15 Juillet 1363 desmaires et échevins de la ville deBoulogne.

1234. - Mai.

Jeanne donne à l'abbaye de Flines, nommé l'Honneur-Notre-Dame, dix livres monnaie de Flandre à recevoir annuellementsur le tonlieu de tille, à la foire. - A. N. - 2.° cart. FI. pièce99. 3. id. P. 230.

j1Jffize dal. - Confirmation d'une donation annuelle de centlivres, faite par Marguerite., sa soeur, à la même abbaye.

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PIÈCES JDSTIFICATIVES. 195

1234. - Août.

Jeanne, pour accomplir tes promesses de Fernand son mari,donne â l'abbaye de Douxvat (Soetendat), dont ils étaient tous lesdeux fondateurs, trente bonniers do terre en la paroisse deMourkerke. —A. N.- 1.-cart. FI. Pièce 67.— 3.eid. p ' 149.-Imp. Mrnxus, 111, 88.

I234. - Janvier, à Asni&res.

Acte de l'accord Juré entre Boucitard d'Arcsnes et ses enfants

d'une part, et Jeanne comtesse de Flandre, Afaryterite sa soeur

et 1c4 enfants que cette dernière avait eus de Guillaume deDampierre , d'autre part.

Ego Boehardus de Avesrns et nos Joliannes et Baldiwinus deAvesnis, fUi ejus, notum facimus universis presentes litteras jas-pecturis, quod coin inter nos, ex una parte, et nobitem mulieremJohannem, Flaudrie et Harmonie comitissam, Margaretam, do•minam de Uarnpetra, sororem ejus; matrem nostram,(Joharjoiset.Baldiwini) et fui05 et fluas quas suscepit de vira nobili guondamWitelnio, domino de J)ampetra, ex altern, discordia essct orta, ettandem, mediantibus bonis vins, facta fuit bona pax et concordiain hune modum. De terra quam prefata Margareta, domina deDampetra, tenet de propria hereditate sua, aceipiet ipsaquingcntas libratas ad faciendani votuntatem suan, et residuum debet es-timari per bonos virosetdividi in septem partes equales: de qui-bus, due partes erunt nostrb, (Johannis et Baldiwini), post deces-sum ipsius Marqarete , matris nostre, et residue quinque parteserunt fihiorum et fihiarum quos suscepit de domino Wilelmo deDampetra, post deeessum ipsius simititer; et itlas Élues partesgiins nos (Johannes etEaldiwinus) (lehemes habere, debet domina

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196 PIÈCES JUSTIFICATIVES.

c.omitissa Flandric assignare, ad votuntatcm suam, ubi magis vi-dent expedire, iÀfrahereditatem predicte Margarete, domine dePampetra; et si forte contingeret quod, post diem hujus pacis(acte, unus vol plates de fiIii5 aut flhiabuspredicti dominiWilelniide 1)ampetra obirent,pars illius vol partes illorum qui ita dore-dorent ad superstites fratres germanos et sorores germanas redi-rent. Simililer si ohire contingeret alterum nostrum, (Johannis etBaldiwini), pars ejus ad alium (ratrem germanum rediret. Et, nonobstante ista pace et divisionc , retinet dicta Margareta de flam-petra, niaternostra (J. et B.) potestatem,in hereditate predictadonandi èlemosinas suas sieut ante haijehat, ità (amen quod siaiquas faceret elemosinas , irent communiter et eqitaliter superseptcm partes ante nominatas. Pacem istam et concordiam inomnibus lirmiter et fideliter observare, nos, prias sutTicienterprobata in curia domine comitisse Flandrie et Jianonnie etatenostra , (Johannis et Baldiwini) ,et per judicium hominum dictecomitisse legitime judicata, laudamus et juramus coram dominisnostris, videlicet coram domina comitissaFlandric que est primaet proxima domina hereditatis predicte et feodi, et ceram domi-no rege Francie qui superior estdominus fcodi Flandrie; et idemdebemus jurare et laudare corsai domino episeopo Leodiensiqui superior est dominus fcodi ilanonie ,tali scilicet modo quodniehil de cetero potcrimus reclamare in hereditate jarn dictapreter Id quod assignatum fuerit nobis per pacem et divisioncmpredictam, nec querelam mo ycre poterimus contra dominam coinitissam Flandrie, vol sous, aut contra Margarctam,sororem ejus,maLrern nostram, (J. et Ii.), vol contra dietos Ghios et filias doniiniWilelmi deflampetra vol suas , sed pacem dicte comiiisseetsuiset prenominate Margarete et supradictis fuis et flhiabus dicti•l.'iIcImi et suis debcmus in posteront Etego Bochardus.deAvesnis perme feci securitatem eandem, et de luis omnibusfirmiter observandis, dominus rex et domina comitissa Flandriededcrnnt ad petitionem nostrain litteras suas; ita quod si nos ire-mus contra pacem predictam, de cetero non haheremus audien-tiam in ellriiseorum de qucrela de qua pax facta est, sicut est su-pradictum ' et sub cadem [ormadebenius quererelitteras dominiepiscopi Leodiensis..Et si alter nostrum, (Johannis et Baldiwini)

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PIÈCES JUSTIFICATIVES. tWz

vol etiam ambo, veniremus contra eandèm, domina coiflitissaFlandric saisiret partem vol partes nostras assignatas nabis , volliii qui contraveniret ad opus riliorem et filiarumdomini Witel-In' de Iahfpetra. l'acem isLam laudavimus et juravimus, quantumpertinet ad christianitateS nostram, coram domino archiepiscopoitemensi et sutîragancis ejus etdomino èpiscopo•Leodiensi, et oischristianitates nostras taliter obligavimus, quod si iremus contrapuceau predictam, et dehoeconstaret per bonam vcritatem, arche.piscopo Il emensi aut domino episcopoCameracensi , aut episco-p0 AtLrebatensi, atit episcopo Morinensi aut episcôpo 'l'ornncen-si, dominus archiepiscopus vol cpisopus oui sic constaret , cx-communicaretitium vol illos qui contra pacem venirent, sine ap-pellatione, et archiepiscopus Remensis, vol quilihet cpiscopo-mm qui supra notati sont, daret litteras suas quod ipsum vol ip-sos denunciaret excommunicaLos per suas dioceses ad testimo-nium et denunciationem illius episcopi cul, sicut dictum est,.constaret. l'reterea , idem archiepiscopus vol cpiscopi debentscribere domino pape et testari quod nos pacem istam 5cr-vare in corurn presentia juravimus. Insuper ego Bochardus ju-ravi pied, hona fide , dabo operam ad hoc, quod dorninus papaconfirmet pacem is(am,et eidém snpplicabo per litteras incas 10-

tom pacem continentes ut eam confirmet et per exequutores, ap-pellatione rernota, condom pacem faciat per densuram ecclesias-ticaminviolabiliter observari. Istam pacem tencre siniiliter je-raverunt 'Lii. de Iluffatise et fleurions fitius cjus, 1h. de Wate-cort et duo Mii ejus, Nicholaus de Ruminiaco et duo fratrcsejus et duo (liii ejus majores natu , À. domina de Roseto et lb-gerus fitius ejus, comiLissa de Cinniaeo , soror moi Bochardi ,etfille ejus , Jacobus de Grandi-Prato, Castellanus de Sancto-Audomaro et W. Crater ejus, Hugo de Àutonio, Arnulphus deMauritania, Sigcrus de Angien et duo Mii ejus ante-nati , J'hilip-pus de Creki etfratcr ejus major nota post euni et Amnulphus deLongo-Villari. Cronos isti, sicut sont nominati, jurnvcrunt, sicutdictum est, pacem istam torero et etiam juraveruot quod si nosvel alter nostruin vcniremus contra pacem prefatam , ois vol ciqui contraveoiret, ut dictum est, non essent in auxilium nec inconsilium , et christianitatcs suas obligaverunt predictis archie-

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r-

10$ PIÈCES .flJSTIIICATIVES.

piscopo et episcopis tali modo; et etiam litteras suas dederunt pa-tentes, quod si forte contingeret quod nos vol alter nostrum ire-mus contra pacem predietam et aliquis predictorum qui pacemjuraverunt, ut dictum est, esset nos adjuvans vol confortaiis,etde 1mo constaret per bonam voritatem archiepisco Itemensi voluni de subnotatis episcopis, videlicct episcopo Cameraceusi , sutcpieopo Attrebatensi, aut episcopo Morinensi, sut episeopo Tor-nacensi , ille oui sicut dictum est, constaret , exeommunicaretcure. Et est sciendom quod nos et ovaires ostagii predicti renun-tiavimus omni appelationi, supplicatiunni et ornai amniinieutojuris, et omnes ahi ad testirnonium et denuntiationem illiusdenutiarent illos vol ilium excornrnunicatum per suas diocesesosque ad satisfactionem condignam. SimiliterdominusWalterus,cornes Blesonsis, promi sit in fide quant domine comitisso Flan-drie debet tanquam domine sue, pacem islam tenere hoc modo,quod si nos vol alter nostrum iret contra pacem eandcrn, ipso,nec in auxilium,nec in consilium essot ois vol ci qui contra pa-cern venirot, irnrno saisiret fooclum quod ego flochardus teneode ipso ) nec promitteret nos gaudere codera fondu vol valoremhabere ejusdem quousque hoc emendassemus per dominamcomitissam .Flandrie vol ejus heredem. Et si forte comitem RIe-sensem obire contingeret, heres ejus ad ea facienda que dictasurit teneretur. t'etiit etiam dictas cornes ab archiopiseopo Ko-mensi et episcopo Silvanectensi, qui erantpresentes, ut omnia quepromiscrat utdictum est, suis tostilicarentur litIons et sigillis.Sciendum est similitor, quod domina comitissa Flandric, sororclos, mater nostra, (J. et B.) et arnicA filiorum et filiarum dominiViIeIrni de Pampetra , videlicet dorninus Arehembaldus, Guido

frater ejiis, WiIle]mus de Merlota et J)rogo [rater ejus, J. cornesCarnotensis et domines G. du Aspero -Monte juraverunt pareraisLam tenere et firmiter observare; ita quod si dicti pueni vol ah-quis corum iret contra picora candeur , ipsi ornnes nec in auxi-hum nec in consiliuna eis Casent. Dicti quoque Mii domini \Vil-leJmi laudabunt et jurabunt coi-am domino rege et coram comi-tissa Flandric et corser domino episcopo Leodiensi, catin etatemlegitimam hahuenint, pacem istain (encre et firmiter observareija qpod. 111e vol illi qui contravenirent non dehenont audiri in

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PIÈCES JUSTIFICATIVES. 199

tjria dornini regis, vol comitissc Fiandrie, vel episeopi Leo-diensis super querela de qua pax tacts est, sicut est prenotatum.Et de hoc debent, perse vel per arnicas sucs, querere litteras do-mini regis CL atiorum dotniuorunl qui nominati saut supra. Utentera memoriter teneatur et firmiter observetur contineutiadicte pacis, domina comitissa Flandrie et Harmonie et M. sororque, mater nostra (L et B.) et nos, sicut [acte est coram eademcomitisa Flandrie , fideliter et plene conseriptam propriis confie-mavimus sigillis. Actum apud Asnerias, feria VI post octavamepyphanie, auno Dornini millesimo ducentesimo tricesirnoquartO,mense januario. - A. Ni. - Or, parch. scellé des sceaux deJeaune, de Marguerite sa soeur, deBoucltard d'Àves,ies, de Jeanet Danduin d'Avesnes ses fils. Bouehard est représenté armé detoutes ses pièces, sur nu palefroi au galop.

1234. - Janvier, à Asnières.

Confirmation de l'accord ci- dessus par le roi de FrancoLouis IX ,comme suzerain de laFtandre. - A. N. - Or. parek.scellé. -

1234. -, Février, à Binch.

Confirmation de L'accord ci-dessus par léveque de Liègecomme suzerain du Hainaut. - A. N. - Or.parck. scellé.

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r

200 P1iCES JUSTIFICATIVES.

1234.

Lettres par lesquelles Jeanne détermine tes droits et préro-gatives du dépensier héréditaire de Flandre. - A N. -cart. Et. pièce 19. —Car(. oblong. fol: 14. —Irnp. \VAIIixKOENIG,

Hist. 4e la Flandre, 11,440.

1235. - Janvier, à Lute.

Lettres parlesquelles la comtesse Jeanne déclare que, voulantpréserver l'église des dunes tant du danger de la mer que dudom-mage des laïcs, elle donne à toujours à cette abbaye trois centsoixante verges de terre depuis l'extrémité de la basilique de cetteabbaye du côté de l'orient, et depuis l'autre extrémité du côtéde l'occident, deux cent quarante-deux verges mesurées à lagrandé verge de Flandre , avec la basilique qui est de trenteverges; et veut que du côté du midi jusqu'à la fin des dunes etdu côté du nord jusqu'à la mer ,le terrain donné soit de mêmelargeur que la susdite longueur de six cent trente-d&ux verges.La comtesse s'y réserve la justice , etc., etc. - A. Ni.— I." cart.de Flandre, pièce 127.

1235. - Février, à Courtrai.

Bauduin 4e Pratis (des Prez), chevalier, déclare qu'y ayant eudifficulté entre la comtesse Jeanne et lui, sur ce quelle préten-dait pouvoir établir un sergent à Zomerghetn, pour y conserverses droits dans les plaids qui s'y tenaient, ce que Bauduin refu-sait, il reconnait que la comtesse Jeanne peut y établir lin ser-gent , mais qu'il a le droit d'y tenir les plaids. - A. Ni , . - Or. cnparch•. scellé.

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PIÈCES JUSTIFICATIVES. 201

1235. - Mai.

Jeanne donne des lois aux échevins jurés et communautés dela ville de Lute. - A N. - Gop. partit.

1235. - Septembre.

Jeanne, choisie pour arbitre à l'effet de terminer les contesta-tions qu'il y avait entre les doyen, chanoines et chapitre deSaint-Géri à Cambrai d'une part, et Gérard, seigneur de Busi-gny d'autre part, prononce le jugement suivant, etc. - A. N.- Or. varch. scelkt.

1235. - Septembre.

Lettres de Jeanne par lesquelles elle mande aux échevinsjurés et communauté de Gravelines, qu'à leur prière elle con-sent que l'hopital de cette ville ait des barques sur la rivièrepour passer gratis ceux qui le demanderont. il y aura sur labarque un tronc où les passagers pourront déposer leur offrandeen faveur de l'hopital, etc. - A. N. —4. tort. FI. pièce 25f.

1236. - Janvier,

Lettres par lesquelles Sibille , dame de Beaujeiz , renonce âtout le droit qu'elle pouvait avoir contre Jeanne, comtesse (le

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202-.PIÈCES JUSTIFICATIVES.

Flandre, qui avait promis de lui faire payer annuellement surle tonlieu de Lute deux cents livres, monnaie de Flandre, pen-dant sa vie, et cent livres une fois seulement après sa mort.Elle renonce aussi à tout ce qui pouvait lui revenir par succes-sion ou autrement. - A. N. - Ong. enparck. scellé.

1256. - Mars.

Lettres de la comtesse Jeanne au sujet de l'hôpital Notre-Darne ,dit hôpital-comtesse à Lille. - A. N. - Copie awtl.sit-tique en parch.

1236. - Mars.

Lettres par lesquelles la comtesse Jeanne consent que le cha-pitre de sa chapelle de Notre-Dame de la Salle,à Valenciennes,aille se placer, en cette ville, dans un endroit plus commode , àcondition que deux chapelains, s'il est nécessaire, ou un seul,célébreront tous les jours dans cette chapelle la messe et lesheures canoniales, comme cela s'observe dans les chapelles de lacomtesse en Hainaut, —A. N. - Gop. simple enparch.-

1237. - 31 Mars.

Bulle du pape Grégoire LX adressée aux évêques de Tournai,et de Cambrai et à M.° Gérard, chanoine de Tournai, par la-quelle il leur mande qu'il confirme ce qu'avait fait I. (InnocentIII), son prédécesseur, au sujet de ce qui s'était passé entre

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PIÈCES JUSTIFICATIVES. 203

Ilouchard d'Àvesnes et Marguerite, soeur de la comtesse deFlandre, et regarde comme illégitimes les enfants qu'ils ont eus.- A. N.Ong, en parch. scellé.

138. - Septembre.

• Lettres par lesquelles la comtesse Jeanne déclare avoir fondéun hopital pour les pauvres malades à Lille , près de sa maison,en l'honneur de Notre-Dame, et lui avoir donné le terrain où ilest situé tout ce qui est au de-là des murs de sa maison et de lachapelle de Notre-Dame jusqu'à la rivière, du côté du midi etvers l'orient; la chambre qu'elle y a bâtie; tout le terrait' jus-qu'au manoir de Hugues de la Porte; li maison dudit Hugueset celle de !ean Argent, etc., etc.— A. N. - Or. et parch. scellé.

1237 - Novembre.

Titomas, (de Savole), comte de Flandre et Hainaut, confirmeles lettres de la comtesse Jeanne sa femme, en date de novembre133, concernant les droits du grand bouteillier de Hainaut. -A. N. - 2.0 cart. de M. Pièce 116.

1237 - Décembre, à Compiègne.

Lettres par lesquelles Thomas, comte de Flandre et de Hainaut,et Jeanne sa femme, font hommage au roi du comté de Flandre

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204 PIÈCES JUSTIFICATIVES.e

et promettent de lui remettre les lettres du pape qui portent que,s'ils ne veulent pas tenir les conventions faites avec le roi , lesévêques de Laon et de Sentis pourront lancer, par autorité durpape, une sentence d'excommunication contre eux, leurs succes-seurs en Flandre et leurs fauteurs, et mettre en interdit toutesles terres qui leur appartiennent, etc., etc. - A. N. - Ong, enpanek. scellé.—lmp. dans le Traité (lit dit sur les villeset chdlellenies de tille, Postai et Orchies, par A UGUSTE GALLANŒ,preuves. P. 148.

1238. - 18 Janvier.

Lettres partesqhclles Thomas, comte de Flandre, et Jeanne safemme, déclarent que pour terminer toutes tes diflicultéi qu'ily avait entre eux et les doyen et chapitre' de saint Pierre deLille, au sujet des droits que cette église prétendait sur quel-ques terres dans la paroisse tIc Saint-Maurice à Lille, ilsnomment Daniel (le Bonneke polir les finir avec F. de Gand,chanoine de Saint-Pierre, arbitre choisi par cette église, et pro-mettent de s'en te ni r air jugement qu'ils prononceront, souspeine de cinq cents marcs. Si ces deux arbitres ne sont-pointd'accord, les deux parties ont nommé hL e Nicolas de Bruges-,chanoine de Tournai pour troisième arbitre. - A. N. - Ong.ru pardi. scellé. —1.' cari. de Fi. Pièce 5. - 2. cari. Id.Pièce 6. - lirip. dans Minus, page 589.

1238 - Février.

Frère Willauinc', abbé, et tout le couvent de Clairvaux fontsavoir àThomas, comte de Flandre et deilainaul, et à Jeanne sa

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PIÈCES JUSTIFICATIVES. 205

lemme, que selon ce qui leur a été dit de leur partpar A., abbéd'lgny , ils ont statué que les frères ne sortiraient pas de chezeux pour faire la moisson, sans avoir célébré la messe solennelle,et pour en témoigner toujours la reconnaissance aux comte etcomtesse, ils veulent que l'on fasse au commencement de chaquemoisson lecture de cette charte. — A. N. — Oflg. en pareil.scellé. — 2.° cart. de FI. Pièce 139.-8- e cari. de ici. Pièce 243. —!mp. dans le Thésaurus ar.ecdotoru,n du P. MÂRTÈriE, t. 1., col.1010.

1238. - Août.

Godefroi de Perois,le Manions, châtelain de Bruxelles, Ar-natal de \Vezemale etilenri de Otoncourt, chevaliers, se consti-tuent cautions pour l'exécution de la sentence que Robert comted'Artois rendra sur la difficulté qu'il y avait entre le due deLothier et de Brabant et Walerand de Lamb... (Limbourg)d'une part, et Thomaset Jeanne sa femme, comte et comtesse deFlandre, d'autrb part, au sujet du château de Poilvache (pays deNamur) et s'engagent à la faire observer; - A. N. — jer cari.d'Àriois, pièce 120.

1238. -. Août.

Thomas, comte de Flandre et de Hainaut ,et Jeanne sa femmepromettentde se soumettre àla sentence que doit rendre Robert,comte d'Artois, pour terminer, la difficulté qu'il y avait entreHenri, duc de Lothier et Galet (sic) de Limbourg d'une part 'eteux d'autre part, au sujet du cliateait de Poilvaehc. Ils donnentpour cautions l'avoué de Béthune, Arnauld d'Audenarde, Bau-

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206 PIÈCES JÙSTri?ICÀTIYES,

duin d'Aire, MaUls dé Meternes, Gautier de... sénéchal deFlandre, Guillaume de Béthune, et Fastrés de Ligne, cheva-liers. - A. N.cart. d'Artois, Pièce 121.

1238.25 Octobre.

Lettres par lesquelles Thomas, comte de Flandre et de Hainaut,mande et ordonne à ses baillis et échevins du Dam de rendrepromptementia justice aux marchands étrangers, parce qu'on luiavait porté plainte qu'ilsnégligeaicnt de te faire. - A. N. -cari. de FI. Pièce 166.

« Cette pièce est datée de 1228, dans le cartulaire, mais c'est» une erreur; Thomas -de Savoie n'était pas alors le mari de ta• comtesse Jeanne; Ferrand sou premier époux vivait encore• cette année et elle ne s'est remariée, comme on sait, qu'en) 1237. u

1238. - 9'Mars.

Lettres de Thomas et de Jeanne, contenant les arrangements

de famille conclus par leur entremise , entre D'aUer , sired'Avesnes et Ijouchard son frère.

Je Thomas, cuens de Flandres et dc Itainan ,et je Mienne,contesse de Flandres et de llainau, faisons savoir à tous çaus quisont et qui venront, que Watiers, sires de Avesnes, et Bouchars,ses frères, ont fait teus convenances par devant nos: c'est à

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PIÈCES JUSTIFICATIVES. 207

savoir que Watiers, sires de Avesnes, adené et otroié à hou chart,sen frère, et ses hoirs Jehan et Baud trio, lie ritaulementEstruemet toutes lesapendances, et se a assené au dit Bouchart et à seshoirs, Jehan et Bauduin, trois centslivres de Hans, chascun an, àprendre héritaulement.à sen winage de Avesnes, as forages, astannins, as estalages, as deniers de le hale et as apendances donwinage, des premiers deniers

'qui verront as winages et as apar-

tenanQes et as choses devant dites. Et se commencera li prisedon winage et des choses doseur dites chascun an,le jour de(este saint Jehan decolasse; et cil Bouehars porra metre senserjant par recoivre le winage jusques à tant qu'il ait rocousles trois cens livres devant dis, contamment, par le serjant leditWatier , seigneur de Avcsnes. Et cil dol serjant doivent faireftanté de conter lolaument; et s'il avenoit que li dis Watiersacensesit son winage, cil à oui il le acensiroit fineroit au grédota dit Bouchard des devant dis trois cens livres, ou Ji dis Bot,-chars i raclerait sen serjant, tant que Ji denier devant dit fussentrocou par loial conte par leur deux serjans. Et se lia dené lemoitié don winage de Ilouloingne et en tel manière cour cidevant est dit. Pou winage de Avesnes en prendera li dis Bon.chars cent livres au winage de Landrechies. Et se Ii a dené li disi7atiers les hommages qui meuvent de le terre de Estruem.

Et se li Vinages de ces dons lins devant dis ne volaientcol assenement qui est dis , li dis Watiers et si hoir sont tenu auparfaire s'il ne déehaolent par commune werre. Et se li n doué lidis Vatiers toute la terre que mesireWis, leur frère, tint delà leBaie deAvesnes, tout ensi coin il le tint. Et toutes ces choses queci doseur sont fournées a li devant dis Watiers doué audit flou-chart et à ses hoirs, Jehan etflauduin, en partie de terre, et li disBouchars etsi hoir,Jeliang et Bauduins, les ont reeeues en partiede terre. Et par ces choses que ci devant sont dites, n quité Ji disBouehars et si hoir, Jehans et Bauduins, audit Watier, seigneurdeAvesnes , et à ses hoirs ,toute la terre qui leur vient de parleur père et de par leur mère: e'esCà savoir à linon, conte deSaint-Pol et de Bloys, et à Marie, contesse de Bloys et de Saint-Fol, et â sess hoirs. Et ces choses ont otroiés li cocus de Saint-Pol devant dis et Marie sa femme par devant nos. Et toutes ces

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208 PIÈCES JUSTIFICATIVES.

choses devant dites tient li dis Bouchais don devant dit Watier,seigneur de Avesnes , en fié et en hommage lige. Et toutes ceschoses devant dites sont faites en no cort par loi et par le juge-gement des pers le devant dit Vatier et de nos hommes quijtigicr peurent et durent. Et li quitance que li devant dis flou-charsit si hoir, Jehans etflauduins, ont fait au devant ditWatieret à ses hoirs est à entendre • de le terre que meurent au devantdit Watier et au devant dit Bouchart de par leur père et de parleur mère. Etpor que ce soit ferme chose et estaule, à le requestedes parties, nos avons ces letrés seelées de nos séaus. Ce fu faitl'an de le incarnation rostre Seigneur mil et deus cens et trenteoutil, on mois de marc, le mecredi apres le mi-quaresme. - A.N. - Original scelU des sceaux de Thomas ete Jeanne, en cirejaune. -

1238 - Mars.

hues de Châtillon, comte de Saint-Fol et Marie (d'Avcsnes)sa femme, confirment et approuvent 'es lettres accordées parWautier d'Avesnes leur père, à Bouchard son frère, pour lasuccession de leur père et mère.—A. N.— i. cart. de Hainawi,pièce iO. - Imp. Thesaurus an-ecdoct: de, Dom - MÂRTbiE. T. t.

col. 1008.

1238. - 9 Mars.

Mémoire donné par les prévôt, doyen et chapitre de Saint-Pierre de Lille contre les comte et comtesse de Flandre, danslequel ils exposent qué la terre qui leur appartient sur la pa-

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PIÈCES JUSTIFICATIVES.209

roisse de Saint-Maurice, à Lille, leur a été donnée par Ilauduin,comte de Flandre, leur fondateur, exempte de toute charge etqu'il est Injuste pic Ion veuille y percevoir des droits surievin dans le temps de la foire de Lille, etc., etc; —A. N - Ong.--ci? partit-. scellé. - -ter cari. de FI. Pièce 5. - 2. cari. de FI.Pièce 6. Imp. MIBAtUS III, P. 589.

1239. - 17 Juin.

Thomas ,conne de Flandre et de liainaut, mande à son baillide Gand d'empêcher qu'on ne fasse payer te droit de tonheu àGand auxhabitants dde ville du Dam jusqu'à cc qu'on ait prouvéqu'ils y sont obligés. - A. N. - 3. cari. de FI. pièce 165.

1239. - S Mai.

La comtesse Marguerite (ce doit être la comtesse Scanne) con-firme les lois données à la ville de Landes par Amaury, sire deLandes. - A. N. - Copie simple en papier.

1239. - Set3tembre.

Lettres par lesquelles les comtes Thomas et Jeanne déclarentque, voulantpourvoir à l'administration de I'hêpital qu'ils avaientfondé à Lille ,près de leur maison, ils nomment des proviseursà cette maison—A. N.— Copie simple en parch.— Imp. Min.-us.M. p. 104,

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210 PiicEs .JUSTIF'JCATIVES.

1239. - Sans date.

Mention des lettes données par le comteïhènias et Jeanne, safemme, portant confimation dès priviléges accordés à la villedu Dam par Philippe, comte de Flandre et (le Vermandois. -À. N. - 3. 1, cari, de Fi. Pièce 16.1,

1240. - Juillet.

Lois et coutumes appelées cora (heure) données lerrœ (à lachâtellenie) de Bourhourg par Thomas ,comte de Flandre et lacomtesse Jeanne ,sa femme. - A. N.— Origiir. en parch. scelle.

1240. - Juillet.

Lois et coutumes données à la châtellenie, dc Fumes par lecomte Thomas et la comtesse Jeanne. (Les mêmes que celtesdonnées à la châtellenie de Bourboiirg). - A. N. - Ong, en

pareh. scellé.

1240. - Juillet.

Lois et coutumes données à la terre de Berghes-St.-Winocpar les mêmes souverains. - A. N. - Or. parch. scellé.

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PIÈCES JUSTIFICATiVES.

1-240. - Août.

Lttres par lesquelles P., prévôt, P., doyen et tout lb chapitrede Cambrai déèlai'ent que, pour terminer toutes les difficultésqu'il y avait entre eux d'une part, et les comteet comtesse deFlandre et de Hainaut, Thomas et Jeanne, d'autre"part, ail sujetde la justice haute ethasse d'Onnaing et Quarouble, de l'avouerieet des pâturages qui y appartiennent , ils sont convenus des ar-ticles suivants , etc., etc. - A. N. - Ong. en pctrch. scellé. -1.r cari, du Rainant, pièce 67.

1240. - Janvier, à Bruges.

Lettres par lesquelles Tliomas, comte de Flandre et de Hai-naut, et la comtesse Jeanne sa femme, règlent, à la demandedes échevins et communauté de Bruges, la façon dont serontnommés les échevins de cette ville, etc., etc. - A. N. - 41 cart.de F?. Pièce 72.

1240.

Lettres par lesquelles Thomas et Jeanne cèdent à perpétuitéau profit de l'hôpital de Sainte-Elisabeth au Quesnoy, le droitqu'ils avaient de conférer leshourses dans les écoles de cette ville,après la monde Henri Custodi (gardien) delUons, à qui ils t'avaientdonné, à condition que les proviseurs de cet hôpital seront obli-gés de conférer gratuitement comme ces princes faisaient et deprendre le conseil du prieur des prêcheurs de Valenciennes. -A. N. - Ong. en pardt. scellé.

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212 PIÈCES JUSTIFICATIVES.

1241, Ou environ.

• Kcurc et privilèges accordés par Jeanne aux habitants deCaprick. - A. N• - Reg des chartes , 13eô f.* 19.

124I. - 6 Avril ,Male.

Jeanne mande à l'avoué de Béthune de remettre au porteurdes présentes lettres, en présence d'un échevin de villes deGand, Bruges , •Ypres et Lille, le traité fait entre le royaumed'Angleterre et le comté de Flandre. - A. N. - Or. pare!..scellé.

1241. - Mai, à flouai.

Thomas et Jeanne reconnaissent que les échevins , bour-geois et hommes de la ville de Douai, doivent jouir de tousles marais qui sont autour de cette ville, comme ils en ont tou-jours joui depuis le comte de Flandre, Philippe. - A. N. - Or.parch. scellé.

1241. - Mai.

Thomas et Jeanne règlent la forme de l'élection et les préro-gatives des échevins de la ville du Dam. - A. N. - &° cari.de Flandre, pièces 167 et 108.

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PIÈCES JUSTIFICATIVEs,1213

1241. -Juillet à Courtrai.

Thomas et Jeanne terminent les difficultés qui existaiententre les échevins et bourgeois de Bruges ,d'une part, et ceuxdu Dam, d'autre part, au sujet des ôtages de ta paix. - A. N.- 4.° cari, de Fi. pièce 73.

1241. -' Dans l'octave de S.Ie-Maric, vierge.

Renaud, maUre de la milice du Temple au baillage de Landi-rnesio décharge Bouchant d'Avcsnes de toutes les difficultés qu'ilsavaient ensemble au sujet du vivier de Saint-Aubain et autresterres. - A. N. - 1.cr cart. de Hainaut. Pièce 17.

Nota. Ndus avons énoncé plus haut que Bouehard vivait encore.vers i240 voilà un acte qui le prouve de reste.

1241. - Aoét,àGand.

Thomas et Jeanne acceptent le don que leur avaient fait leabbé et couvent de Tronehiennes de la moitié d'un lieu appeléIIutsferlo avec une moere' et des pâturages j lesquels biensavaient été jadis donnés à cette abbaye par Thierri, comte deFlandre et Swanichilde (Sybille) d'Anjou, sa femme. - A. N. -Copie simple en parch.

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214 PIÈCES JUSTIFICATIVES.

1241. - Septembre.

Thomas et manne remettent à toujours aux échevins et bour-geois de la ville du Dam un eensappelé Statpenenghc (droit d'é-talage) leur donnent la permission de bâtir une halle leur ac-cordent de pouvoir bannir à terme les querelleurs et les calom-niateurs , défendent aux baillis et receveurs du tonlieu de tenirtaverne au vin et d'en vendre 4 broc ,et condamnent à 60 livresceux qui y contreviendront et ceux qui enfreindront les trêves.—A. N - Su cari. de Flandre, pièce 169.-

1241. - Septembre.

Thomas et Jeanne remettent aux échevins et à la communautéde la ville de Nieuport tous les droits qui leur avaient été adju-gés par les arbitres au sujet des difficultés qu'il y avait entre lecomté d'une part ,et le chapitre de S.te-Walburge de Fumes,l'attire part. - A. N. - Cep. simple en parck.

124$. - Février.

Thomas et Jeanne assignent à 'l'abbaye et aux religieuses deN.-D.,erdre deCiteaux, qu'ils ont fondées depuis peu dans un lieuappelé Jiiec PrèsDixmade (abbaye de Sl,emelsdaele, 85 livres derente annuelle à percevoir sur les briefs de Dixmude. - A. N.- 2 e cari, de FI., pièces 60 et 91 - 3e id. p. 404.

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PIÈCES JUSTIFICATIVES, 215

1241. - Février, à Gand.

Thomas et Jeanne donnent à l'h6pital d'Alost le droit de no-mination d'un chapelain dans cette ville, droit qui leur appar-tenait. - A. N. - 2. cart. de Flandre pièce 473. - Sous unvidimus de.!. abbé deNinove de 1287.— Imp. MLREus, 111,681.

1241. - Mars.

Thomas et Jeanne déclar'ent que ,s'ils lèvent des tailles et im-positions dans la terre de Bourbourg, comme ils le font danscelles de Fumes et de Berghes , ils remettront à la châtelleniede Bourbourg ce que pourrait rapporter la terre de Langle. -A. N. - Or. parch. scellé.

1242. - Novembre.

Thomas et Jeanne donnent une rente annuelle de six livres deblancs à l'abbaye de St.-Diziet'. - A N. - Or. parch. scellé.

1242. - Décembre.

Thomas et Jeanne donnent à l'abbaye de Marquette lez-Lille,cinquante bonniers de moeres près de la maison dite Soûlequi appartient à ladite abbaye entre Baudeloo et Artevelde , àcondition que l'abbesse sera obligée de livrer tous les ans huittonneaux devin, tant à l'infirmerie qu'au couvent pour faire despitances. Le comte se réserve la justice sur cette terre, - A.N. - Rej, des chartes. I, f.o 61.

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216 PIÈCES JLJS'l'IFICATJVES.

1242. -- I Décembre.

Thomas et Jeanne donnent toujours à l'hôpital que la comtessea fondé à Lille tous les moulins qui leur appartiennent à Lute età Wazemnies, à condition que cet hôpital paiera annuellementvingt livres pour la fondation etl'entretién d'une chapelte. à lavolonté de Marguerite, dame de Dampierre, soeur de la com-tesse. - A. N. - Copie simple en parek.

1242. - Mars.

Frédéric II, emperetir des Romains, roi de Jérusalem et deSicile ,déclare avoir légitimé Jean etBauduin d'Ayesnes, fils deIlouchard d'Avesnes et de Marguerite, soeur de la comtesse deFlandre, par un privilège scellé d'une huile d'or etles avoir ren-dus habiles à succéder aux biens de leur père et mère. - Â. N.- i.- cari, de Hainaut, pièce 53..— Imp. Thesau.r. Anecdoct.de Martene, I, col, joui.

123. -. Août.

Thomas et Jeanne décident, après avoir pris l'avis des baronsde Flandre, savoir Robert, avoué d'Arras, sire de BéthuneArnoul, sire de Cisoing, Arnoul de Mortagne, châtelain deTournai, et Philippe, sire de Boulets, qu'Arnoul de Landas,sired'Esne ,pouvait donner aux frères du Temple toute la terrequi lui apartenait dans le bois de Nieppc,quoique ses enfants s'yopposassent, etc. Le comte se réserve certains droits de jtiridic-Lion. - A. N. - Or. pareil. scellé.

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PIÈCES JUSTIFICATIVES. 217

1214. - 4Décembre.

Testament de la comtesse Jeanne.

In nomine Patris et Filii et Spiritus Saneti. - Amen.

Ego Johanna, Flandrie et Hannonie comitissa, ab remediurnanime mec et antecessorum et successorum meorum, condo testa-mentum meum sub forma subseripta et vole quod val&atut testa-nientum,quod sinon potest, valent ùtcodicillus vol sicut extremadispositio decedentis. lnprimis vole quod dehita mea, de quibusconstiterint,plenarie persolvantur. Si alieujushereditatem injusteoccuparvi,vel n mois antecessoribus injuste oecupatum detinui,iltud rcddo etrestituoubicumquesitum iit, etdo potes tatem execu-toribus meissubseriptis assignandi etinducendi in possessionemillos quibus competit de jure restitutic facienda, et vole quodad plenum ois sntisfiat de dampnis et intcresse, aient de jurefuerit faciendum. AU restitutiones autem mens faciendas, assignetria initia librarum et quingentas libras Flandrensis monete per-cipiendas annuatim in paratiorihus redditibus vol proventibustotius Flandrie et Hannonie, ubicumque subseripti testamentariimoi maluerint vol clegerint, sive in ncmoribus, sive acensis,siveproventibus quibuscumque. Et vole et firiniter statue qundsueeessor meus talc ossignamentum subseriptis testamentariismois faeiat etexhiheat, sicutsuperius est expressunl , ad dictum -corum statutum, eum ah ipsis fuerit reqiiisitus. Et vole modisomnibus et erdino quod, ad predietos redditus vel proventus asubseriptis mois doctes, non apparat maous successor meus.perse, vol per sucs, nec apponi perniittat, sed omnes feodatos, volalios ministres per quos forte illi redditus vol proventus procrean-tur vol solvuntur jûrare faeiat quod nulli omnino solvent predic-tos redditus vol proventus nisi testamentariis ipsis vol mandatocumin, et ipsis testamentariis prefatos rhdditus vol proventusconservare teneatur, et ab ornai invasore, vol melestatore, tainipsos testamentarios quam redditus etproventus predictos suissumptibus defensare. Predietos autem proventus trium miliumet qiiingentarum librarum annuatim saucent subseripti testanlen-

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218 PIÈCES JUSTIFICATIVES.

tarii cati, donec restitutiones mec omnium compicte fucrint,eLdouce etiam elemosine sen legata alia mea, videlicet deceinmil ia lihiarum Flan drie, fueririt totaliter etiutegraliterpersoluLa.Legosiquiclem et in elemosinani cordera, in remedium anime mecCL antecessorum et suecessoruni meorum,necnonct intuituresti-tutionis faciende generaliter pro Mis quihus restitutio eerta fierinon valehit,deccm mulia tibrarum Flandrie eroganda per exeeu-tores testamenU mei,ubi et sicut a me expresse fuerit ordinatum,et in titteris meis videijitur contincri. Quod si forte super hocnicbit me scribere contingeret, valu quod executores mei sub-seripti credant super hoc karissirne sorori mec, Margarete, do-mine de Dampetra, priori Insulensi et priori Yalenecnensi or-dinis predicatorum, fratri Petro de Sciuelrnis, fratri Micbaeli etfratri Ilenriec de Querceto, vel duobus istorum , ut faciant etdistribuant sicut predicta karissima soror mes et dicti fratres,vel duo predictorum, me dixerint ordinasse. Oc hiis autem dequibus expresse seripto vel verbo non ordinavero, exceutoresmci subseripti faciant pro utilitate anime mec, secuodum quodeis melius videbitur, distribuentes ea in terra nostra de consitioprediete sororismee et fratrum predictorum. Ad familiam voteranicam remuncrandam , lego de supradictis decem mitibus librismille quingentas libras, cuilibet, sicut verbo vel seriptoordinaboconferendas; vel si non de eis totaliter ordinavero, testamentariimoi residuum predicte peeunic, de qua expresse non ordinavero,distribuant de eonsitio dicte sororis mec ctfratrurn predietorumsingulis de famitia mea, secundum meritum et statum sunna. Etde predicta pecunia, mille quingentis libris lego Johanne deMonstcroelducentas libras Flandrie, et domine MariedcCastetlocentum libras. Item, prediete Johanne lego quadraginta librasaniiui redditus hereditarie et dicte Marie deeem, de eoùsensu etvoltmtMe sepediete sororis mec. Volo insuper et ordino quodquinque milia libras Flandrie,de parata pecunia quam miebibenigne eoncessit ad solvendtirn testamentum meum, si de bacint'trmitate decessero , karissimus dominus et maritus meus,Thomas , Flandrie at Harmonie cornes, aient in suis litteriseontinetur, in manu sint et dispositione testamentariorum meo-rum subseriptorum cd faciendas restitutiones rotas ceicriter per

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PIÈCES JUSTIrICATIVES. 219

nianum ipsorum, ne ex mora et tardatione anima mea dispen-dium patiatur. Volo autem et ordino quod, ad judicium testamen-tariorum meorum subscriptoruni pertinent et non ad jucliciumsuccessoris moi oui et quibus et qualiter restitutiones maxime demobilibus fuerint faciende. Vole insuper et statuo quod omnesjiielli mei, reliquie et Iibri, vasa arroi et urgentes et omniasuperlectilia mea et indurueuta de capella, mensa, camera seuetiam coquins mea, et si qua saut alla, et omnia mobilia mliiispecialiter deputata, quoeumque indic obitus moi poterunt inve-neri, in manu sint et dispositione testamentariorum meorumsubscriptorum ut ipsi disponantsupr eisdem pro utilitate animemec , secundum consaientias suas, de consitio sororis mec etfratrum ordinis predicatorum superius nominatorurh, nisi superluis expresse a me verbo vol seripto fucrit ordinatum.Ego autem compas existens mentis mec et in bono rationis usa,predicta omniaordinavi, etexpresse eonstitui et Constitua execu-tores testamentj mai reverenclos in Christo ac dominos mous Ca-meracensem et Tornacensem episcopos, quicumquepro temporefuerint, virosque venerabiles et discrctos, dominum Walterum,abbatem Saneti-Johannis in Valencena, magistrum Gerardumscolasticum Cameraeensem, Magistrum A., decanum de Aula etMagistrum Egidium deBrugis,prepositumSancti-Petri Duacen-sis. Quod si forte aliquem vol aliquos predictoruin testamenta-rionem decedere contingat, vola et statua quod ifli qui residuifuerint, ad voluntatem suam, alium vol alias etigant, secundum000scientias suas, qui Ioco iltarum testamentarii moi sint et vicessnppteant defunetorum. Et si omnes simul executioni testamentinaquirent vol noluerint, interesse vola nichilominus quod tresvol duo ipsorumpossint procedere in executione testamenti moi,seeundum quod ois videbitur expedire. Vola etiam quod si quaambiguitas oriatur super verhis in testamento mao positis, adjudicium et interpretationem testamentariorum ,neorum sepe-dictorum spectet oninino ita quod interpretatio corum firmiterteneatur. Voie etiam quod ipsi testamentarii rnei illo ordine pro-cèdant in rcstitutionibus faciendis et in legatis alus persolven-dis, quo de jure fuerit proeedendum, pensantes quod anime mceutilius fuerit. Pauperibus autem et egenis citius satisfaeiant et

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220 PIÈCES JUSTIFICATIVES.

quibns amplius sum astricla. Omnibus autcmpredictissuum prè-hueront assensum Hiustris et karissimus damions et maritusmeus, Thomas, cornes Flandrie et Hannonie, et karissima sorormea, Margareta, domina de Dampetra; etpromiscrunt houa fidese predietaomnia, quilibet pro parte sua, firmiter et inviolabiliterservaturos, et ad hue confirmandum,apposucrunt sigilla sua pre-senti scripto. Vola igituret statuo moctis omnibus quibus passantquatinus predicta mania firmiter et inviolabititer observentur.Tandem suppliéans ex affectu tant karissirne sorori mec quantpredictis testamentariis meis et omnibus fidelibus et amieis meisquant ita diligenter et celeriter omnia procurenturquarn animamea nullurn ex retardatione dispendium patiatur in future. liceautem omnia ordinavi presentibus domino et marito meo, Thomacomite, etMaPgarcta, sorore mea, priore Valencenensi ordinispredicatorum , G. preposito de Marchianis, fratre Petro deSquehnis, fratre Michaele, fratrc Henrico de Querceto, ordinispredicatorum, A. decano de Ailla, domino Fastredo de Linea,domino Gerardo de Hanonia, dôrnino Waltero de Lens et pion-bus allis. In cujus rei noticiam presens scriptum feci sigilli meimunimine reboravi, sigillorumque predicti comitis et dictesoronis mec, prions Valeneenensis, deeani de Aula, dominiFastredi,domini C,erardi de llanonnia,domini Walteri de Lens.Actum anno flomini, millesimo ducentesimo quadragesimoquarto, dominica seconda in adventu Pomini. - A. N. — Or.parck scellé. — Sous le vidimus des prévôt, doyen et chapitre deSaint-Pierre, â tille.

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TABLE.

Page.

Introduction.

II

Comment Jeanne devint orpheline et comtesse de Plandre enson bas-âge. Comment elle épousa le fils du roi de Portugalet ce qui s'en suivit ........................... .. ......j

Il.

Comment Fernand, époux de la comtesse Jeanne , se liguaavec l'empereur Othon et le comte de Boulogne, et commentune grande bataille fut livrée auprès du Pont-à-Jiouvines. 13

1f'.

Des fêtes et triomphes qui furent célébrés en France, descalamités qui advinrent enFlandre, du deuil de la comtesseJeanne et du courage qu'elle mit â gouverner ses comtés etpays.................................................33

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222 •t'ÂELE.

n

1v

Aventures 4e Bou chard d'Àvesn.es. 41

V.

Du gouvernement de Jeanne et de quelques particularités. 63

vÏ.

Comment un ermite se fit passer pour le comte Ilauduin etcomment son imposture fut dévoilée * ................... 77

VII.

Du traité de Me&zn de la délivrance du comte Fernand et desamort. . ..........................................97

VIII.

Comment Jeanne employa le temps de son veuvage .........(11

Ix.

De la cour des comtes de Flandre ......................... 149

La comtesse Jeanne épouse l'honuis de Savoie. Ce quise passa.durant cette union. Elle fait son. testament. .5a mort. . .... 125

Puces justificatives ..................................... 143

FIN.